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W. Koch Comment l'empereur Julien tâcha de fonder une église païenne In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 7 fasc. 4, 1928. pp. 1363-1385. Citer ce document / Cite this document : Koch W. Comment l'empereur Julien tâcha de fonder une église païenne. In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 7 fasc. 4, 1928. pp. 1363-1385. doi : 10.3406/rbph.1928.6559 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rbph_0035-0818_1928_num_7_4_6559

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Page 1: Incercarea Lui Iulian de a Constr o Biserica Pagana

W. Koch

Comment l'empereur Julien tâcha de fonder une église païenneIn: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 7 fasc. 4, 1928. pp. 1363-1385.

Citer ce document / Cite this document :

Koch W. Comment l'empereur Julien tâcha de fonder une église païenne. In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 7fasc. 4, 1928. pp. 1363-1385.

doi : 10.3406/rbph.1928.6559

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rbph_0035-0818_1928_num_7_4_6559

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Ά

COMMENT L'EMPEREUR JULIEN

TACHA DE FONDER UNE ÉGLISE PAÏENNE.

III. LES FRAGMENTS D'UNE LETTRE ENCYCLIQUE DE L'EMPEREUR JULIEN

CHEZ GRÉGOIRE DE ΝΑΖΙΑΝΖΕ ET SOZOMÈNE.

Indépendamment des lettres pastorales de Julien, passées en revue dans l'article précédent, on trouve encore des restes d'une lettre pastorale, maintenant perdue, dans les écrits de Grégoire de Nazianze et de Sozomène (1). Ces fragments ne sont pas empruntés aux lettres que j'ai discutées précédemment, et comme ils montrent une phase plus avancée dans l'organisation du culte, ils ne peuvent provenir, comme l'a démontré M. Asmus (2), que de l'Encyclique annoncée si clairement dans diverses parties de la Lettre à Théodore (3), cette dernière n'étant elle-même qu'une ébauche sommaire (4) de la circulaire qui devait la suivre. Cet écrit n'a peut-être été édité qu'après la mort de Julien, car quand il écrivit à Libanius, le 10 ou 11 mars 363, le σύνταγμα n'avait pas encore paru (5). Les renseignements donnés par Grégoire et Sozomène sont très succincts ; il se peut

(x) Voyez les fragments recueillis et édités par Bidez et Cumont sous N° 84f> de leur collection de Lettres,Lois, Poèmes et Fragments de Julien, Paris, 1922, p. 116 s.

(2) Eine Encyklika Julians und ihre Vorläufer, Zeitschrift für Kirchengeschichte, XVI, 1896, p. 45-71, 220-252. Voyez J. Bidez, Lettres, p. 152, η. 1.

(3) Epist. 89α (= ep. 63H.) ρ . 453a, Ep. 89b (= Fragm. Ep.) p. 298a, 304a.

(*) V. Epist. 89b ρ.304ε, Bidez, Lettres, p. 172, 9; vwi όε ώζ τύπω προς σε(1. προς σε) γράφω περί αυτών.

(8) V. ep. 98 (=ep. 27H.), p. 400 D, Bidez, Lettres p. 182,2 s.

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donc, comme dit M. Bidez^), qu'ils n'aient eu sous les yeux qu'un résumé du document. En tout cas, cette brièveté rend malheureusement ces renseignements très obscurs, et ils ont donné lieu à des conclusions souvent très hâtives et surtout très peu satisfaisantes. Pour comprendre au juste ce que Julien a voulu ordonner, il faut considérer le texte, mot pour mot, ce que je ferai dans cet article.

Je commencerai par le résumé de Grégoire de Nazianze, parce que ce contemporain de Julien peut être considéré comme le meilleur témoin, et parce qu'il cite les écrits de Julien, comme nous le verrons dans le cours de ces recherches , toujours presque textuellement, tandis que Sozomène ne donne qu'un aperçu plus ou moins exact de ce que l'Empereur avait écrit. Grégoire est partiel ; il poursuit son adversaire d'une haine acharnée, mais il ne ment pas, il n'invente rien, on peut se fier à lui, et quand on tient compte de son esprit de parti, on peut reconstituer, tant soit peu, les mots et les intentions de Julien ; quant à Sozomène, il peut servir à compléter les renseignements donnés par Grégoire. Grégoire ne fausse pas le texte, mais il le cite sans ordre aucun, sans faire attention au contexte, sans autre but que de faire voir au lecteur que Julien imite en tout les institutions du Chrsitianisme(2) ; il suit de là que, si l'on veut voir ce qu'il regarde comme des « singeries », il faut commencer par donner ici un aperçu de ce qu'était de son temps l'organisation du culte, et la disposition des églises orientales. Grégoire omet naturellement d'en parler, ces détails étant connus de ses lecteurs ; c'est ce qui rend la lecture de ces textes si difficile : le ritus Grec n'est pas le même que celui de l'Église Catholique de nos jours, et les églises orientales diffèrent des églises de l'Occident. Pour donner cet aperçu, je me servirai surtout des divers articles de l'œuvre fondamentale de du Cange (3), dans

0) Lettres, p. 98 et n. 4. (2) Voyez orat. IV C. in : δσατής ημετέρας σαφώς έστιν ευ

ταξίας, et c. 112 : πιθήκων μιμήματα. (3) Glossarium ad Scriptures mediae et infimae Graecitatis,

Lyon, 1688. Voyez aussi Goar, Rituale Graecorum (Ενχολόγιον), Paris, 1647.

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laquelle les auteurs Grecs ecclésiastiques sent cités régulière- lent,en tenant aussi compte des découvertes récentes de l'archéologie chrétienne, continues dans le Dictionnaire d'archéologie chrétienne, et de liturgie, publié par Dom Cabrol.

Les églises qui sont affectées au culte de tous les catéchumènes, les églises paroissiales pour ainsi dire, sont nommées καθολικοί έκκληαίαι Q), et se distinguent nettement des églises annexées aux monastères, qui sont divisées en trois parties. Les premières, qui seules nous intéressent ici, n'ont que deux parties bien distinctes, le βήμα ou αδντον, le presbytère des églises d'occident, destiné à l'Évêque et aux prêtres (πρεσβύτεροι), mais inaccessible au peuple (λαός), et séparé de l'autre partie par un treillage (2), et le ναός (3), où se trouvait le peuple, hommes et femmes pêle-mêle, et le bas clergé, car la troisième partie, le narthex (4), le porche, est en dehors de l'église. Le βήμα, qu'il faut bien distinguer du βήμα των αναγνωστών (5), est la partie orientale rehaussée (e), où se trouve l'autel (7), et devant l'autel la Table

(!) V. Du Cange, I p. 537 s. in ν. καθολικαι εκκλησίαι, Dom Cabrol in ν. Basilique, II, 1, p. 541-544.

(2) δίκτυα, cancelli. Voyez Dom Cabrol in v. Cancel, II 1 p. 1827 : « Les cancels n'avaient pas seulement pour destination d'empêcher la foule de venir jusqu'à frôler l'autel, ils devaient en tenir à l'écart tous ceux sans exception, qui n'appartenant pas au clergé n'avaient pas qualité pour pénétrer dans l'enceinte réservée du sanctuaire», p. 1828 : « C'est pour cette raison que cette partie de l'Église » (le presbytère) «était appelée άβατα, et άδυτα par Théodoret et les autres écrivains grecs, etc. »

(3) V. Du Cange, in ν. Ναός I p. 985. (*) V. Du Cange, in ν. Νάρθηξ I p. 986. (») V. Dom Cabrol, in v. Ambon I p. 1330 s. et 1337, Sozo-

mène, Histor. Eccl. VIII 5. C'est pourquoi Grégoire de Na- zianze, orat. IV 97 parle du μέγα βήμα, quand il dit que Julien fut honoré dans sa jeunesse de la dignité du presbytérat (o... της τον μεγάλου βήματος ήξιωμένος τιμής,νογβζ Chap. I (L'A- postasie) VI p. 127, η. 3.

(β) V. Du Cange I p. 196, in ν. βήμα, Dom Cabrol in ν. Basilique II 1 p. 544 : « Le Testamentum (Ign. Ephraim Rah- mani, Testamentum domini nostri Jesu Christi, 1899, p. 156) ... recommande de placer la chaire de l'évêque à l'est et de l'en-

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Sainte Q). Tout αμΐοαΓ de la Table sont placés les sièges, καθέ- δρηι, des prêtres (πρεσβύτεροι), et le siège, θρόνος, de l'évêque (2). C'est pourquoi toute cette partie de l'Église, excepté l'autel, s'appelle το σύνθρονον (3). Les sièges des prêtres sont placés plus haut que ceux du peuple, pour leur permettre de le surveiller. C'est pour cela que Balsamon et Zonaras parlent des ανωτέρω καθέδραι ou des εφ' νψονς καθέοραι (4) ; par conséquent ce sont les stalles des Églises d'Occident. Les sièges du peuple s'appellent καθέοραι δημοτικαί ou βάθρα (subsellia) ; mais durant le service divin le peuple devait rester debout (5). Derrière le presbytère, dans le ναός, se dressait l'ambon (6), et c'est de là que les lecteurs άναγνώσται (7) faisaient la lecture des saints écrits îiu peuple, et où les chantres (8) se tenaient et chantaient les psaumes, en se servant d'un livre de cantiques (διφθέρα). Ce livre s'appelle ψαλτήρ ou ψαλτήριον, psautier (9). Quant au ehant,on prétend généralement sur la foi de Théodoret (10) que,

tourer des sièges des prêtres. Ces sièges seront au niveau de l'autel et élevés de trois degrés sur le reste de l'Église. »

(') το θυαιαστήριον. 0) τράπεζα, Mensa. V. Du Gange in ν. II p. 1597. (3) V. Du Cange in ν. καθέδρα I p. 534. Voir aussi p. 1365. η. 6. (3) V. Du Cange in ν. I p. 498. (*) V. Du Cange /. c. (6) V. Sozomène VIII 5, 2, Dom Cabrol in v. Ambon I,

p. 1335 : « ... Alors le pontife s'assied avec le presbyterium, mais diacres, sous-diacres, clercs et fidèles demeurent debout, etc. »

(e) Voyez Dom Cabrol in ν. Ι p. 1330 ss. (7) Voyez Du Cange in ν. Ι p. 66. (8) V. Dom Cabrol in v. Ambon I p. 1337 : « L'ambon

servait généralement chez les Grecs à plusieurs usages : on y lisait leçons... on y donnait l'antienne d'après les canons de Lao- dicée..., mais on l'appelait néanmoins le bêma des lecteurs », p. 1331 : Le concile de Laodicée (371) réserve aux seuls chantres le droit de monter à l'ambon... Il faut toutefois remarquer que les prêtres et les évêques jouissaient delà liberté de s'adresser au peuple du haut de l'ambon, etc ». P. 1332 : « C'est de l'ambon que saint Chrysostome s'adressait ordinairement aux fidèles ».

(e) V. Du Cange, in v. II p. 1777. "

(l0) Kirchengeschichte, éd. Parmentier, II 24,9 p. 154, 15 s. : οΰτοι πρώτοι δι%γ\ διελόντες τους των ψαλλόντων χόρονς εκ διαδοχής α,δειν την Δανιτικήν έοιοα^ατ1 μελωδίαν.

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entre 348 et 358, Flavien et Diodore inaugurèrent la distribution des chœurs de psallistes en deux groupes, mais M. H. Le Clercq (x), a mis en lumière que l'usage de l'antienne n'était pas tout à fait une nouveauté, et que les mots χόρονς ψαλλόντων ne visent pas seulement les clercs, mais le peuple entier (2). On commençait par chanter des psaumes, puis venaient des prières, etc. (3).

Il s'agit à présent d'interpréter le texte de Grégoire de Na- zianze. En citant la Bible (*), Grégoire dit (5), que Julien voulait imiter Rapsaque, général du roi des Assyriens Senacharim (=Sanherib), qui, en employant un langage doucereux et en leur parlant dans leur propre langue, voulut persuader aux Hébreux de lui livrer la ville de Jérusalem ; en d'autres termes, selon Grégoire, Julien, en imitant les institutions de l'Église, se proposait de gagner les chrétiens à la religion nouvelle, et voulait faciliter leur conversion au nouveau culte. «Dans ce but», dit-il (e), « Julien se proposa de fonder dans chaque ville des écoles pour l'enseignement (religieux) », P. AHard (7) croit que ce sont des «écoles de chanteurs », et pour cela il renvoie à la lettre 56 (maintenant ep. 109) de Julien à Ecdicius, dont j'ai parlé auparavant (8), mais nulle part on ne rencontre cette signification du mot διδασκαλεϊον, et, selon Du Cange, le mot διδάσκειν se rapporte toujours à l'enseignement religieux, soit au sermon (8),

(!) V. Dom Cabrol in v. Antienne, I p. 2282-2319. V. aussi : Chant, III, 1 p. 272 s.

(2) V. Dom Cabrol I p. 2283, 2287 s. (3) Chez S. Basile c'était le contraire, v. Dom Cabrol,p.2287 :

« Le peuple se lève la nuit et va à la maison de prière ; et quand il a prié, il passe à la psalmodie, etc. ».

(«) Septuaginta, Βασ. δ', 18, 26 sq. = 2 Rois, 18, 26 ss. (e) Orat. IV c. 110. (e) Orat. IV c. 111 : Τοϋτο δη και ούτος διανοηθείς διδασκαλ

εία μεν ίδρνσασθαι κατά πασαν πάλιν ί,τοιμος ήν. (7) Julien l'Apostat, II p. 185 s. (8) Chap. II p. 529, η. 1. (9) I, p. 304 s, in ν. Διδάσκειν : « Proprie est concionem ha-

bere ad populum in Ecclesia, quod Praedicare vulgo dicimus ». Le sermon, ομιλία, s'appelle aussi διδασκαλία, plus tard δι-

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soit plus tard à l'enseignement du catéchisme O.Barbagalio (2) croit qu'il était dans l'intention de Julien de faire sortir de ces écoles les meilleurs des prêtres et les meilleurs des maîtres (éducateurs) des nouvelles générations, et qu'il voulait opposer à la propagande religieuse du Christianisme une propagande re

ligieuse et morale en faveur du paganisme (3). Cela ne me paraît pas invraisemblable, quoique naturellement rien de cela n'ait été mis à exécution^). Grégoire continue ainsi : « (Julien se proposait d'ériger)» (dans les temples) «destribunes(5) avec des siè-

δαχή, ν. Du Cange I p. 306 in ν. Διδάσκαλος : « Jam vero eius- modi Homiliae et Conciones Ecclesiasticae Διδασκαλίαι ap- pellantur a Socrate, lib. VI Hist. Eccl. cap. 17. 'Ιωάννης δε ταΐς . διδασκαλίαις εαχόλαζε, quae sic vertit Eruditus Valesius : Joannes interim Concionibus Ecclesiasticis operam dabat ».

(*) Du Cange, in ν. διδάσκειν p. 305 : « Verum inductum postea, ut essent Concionatores, qui vice Praesulum conciones haberent ad populum et Sanctas literas interpretarentur », et Ruffinus lib. 6 Hist. Eccl. cap. 3 : catechizandi ei, id est, do- cendi magisterium in Ecclesia tribuit ».

(2) Lo Stato e i Istruzione pubblica nell' impero Romano, Catania, 1911 (Brockhaus, Leipzig, Paris), Bïblioteca di filologia classica diretta da Carlo Pascal, p. 273.

(8) L. l. p. 273 s. : « Tutta via sembra ehe egli, per mezzo di un' istruzione, per natura sua più intima o meno esteriore di quella délie scuole del tempo, abbia pensato di tentare un rav- vicinamento spirituale dei contemporanei ail' anima délia reli- gione, délia filosofia et délia morale ellenica. Dalla scuola, cosî rinnovata,sarebbero dovuti escire i migliori sacerdoti et i maestri migliori délie nuove generazioni. Alla propaganda spirituale del Cristianesimo Giuliano intendeva contrapporre una propaganda spirituale dell' Ellenismo. »

(«) « S* Augustin (Ep. 91 [202[, Migne, P. L. 33, col. 315) semble attester que le vœu de Julien de voir faire des sortes d'homélies dans les temples païens a été réalisé, en certains endroits du moins. Voyez Fr. Cumont, Religions orientales, 2e éd. p. 414, n. 23 » (p. 329, n. 23 de l'éd. de M. Gehrich, 1910). Communication de M. Bidez.

(6) βήματα τε και προεδρίας και νφεδρίας. Les βήματα sont les ambons (αμβονες) ou tribunes (βήματα) de l'Église. M. Bidez traduit le passage parallèle de Sozomène : βήμασί τε και προε- δρίαις, L'Evolution, Bulletins, 1914, p. 440 avec :« des ambons et des chaires », et Lettres p. 98 : « des tribunes et des sièges

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ges d'honneur et des sièges ordinaires. » (*). Pour savoir à quoi servaient ces tribunes et ces sièges, il faut citer un autre passage des écrits de Julien, que Grégoire de Nazianze nous a conservé, c'est-à-dire : orat. IV, c. 114 (2) : « Que le théâtre (car je ne sais de quel autre nom ils vont faire appeler leur temple) soit prêt, que les hérauts crient, que le peuple se rassemble, » qu'aient la préséance ceux qui sont préférés aux autres, soit pour leur vieillesse et leur âge avancé et leur position parmi les autorités municipales, soit ceux qui sont notables par leur naissance, leur gloire, leur sagesse », une sagesse, ajoute Grégoire, « qui s'entremêle avec les choses d'en bas et qui préfère ce qui est agréable à la vraie piété ».

Comme on voit, il n'est pas question ici d'un βήμα (presbytère), inaccessible au peuple, et séparé de l'autre partie du temple par un treillage, et muni de stalles pour les prêtres et d'un siège (θρόνος) pour le grand-prêtre — un presbytère ne servirait à rien dans un temple, où il n'y a pas de clergé proprement dit ; on ne trouve qu'un prêtre pour chaque temple, qui souvent aussi en desservait plusieurs (3) — mais, comme au temps de Cicéron,

d'honneur ». Les βήματα ne sont au fond que des estrades ou tribunes pour les orateurs, voyez Platon, Ion 535e, où Ion dit : « (quand je récite les poèmes d'Homère) je vois du haut de ma tribune (de mon estrade) à chaque fois les auditeurs en pleurs, etc. » (καθορώ γαρ εκάστοτε αυτούς άνωθεν ά π ό τον βήματος κλαίοντας).

(*) Suidas ρ. 1074 ed.BEKKER : ύφεδρία, ή κατωτέρω καθέδρα. (2) Voyez BiDEZ et Cumont, Epistulae, p. 117 : "Εστω το

θέατρον εύτρεπές (ή ουκ οϊδ' δ τι και καλεϊν τον οίκον αυτών κε- λεΰσουσιν) · οί κήρυκες βοάτωσαν, ό λαός συνίτω, την π ρ ο- ε δ ρ ί α ν εχέτωσαν ε ϊ τ ε οι π ο λ ι q. και χ ρ ό ν ω και τω της πολιτείας εξειλεγμένω προέχοντες, ε ϊ τ ε ο Ι γένει και δ ό ξ y περίβλεπτοι και σοφία τγ\ κάτω πλεκομένη και πλείον εχονστ) το τερ~ πνον της αληθούς ευσέβειας. Les mots espacés sont, selon MM. B.et C. des mots de Julien lui-même,et je me range à leur avis.

(3) V. Stengel, Die griechischen Kultusaltertümer2 § 18 p. 34 ; Julien lui-même appela Gallixéna, qui pendant près de quarante ans avait été prêtresse de Demeter, à exercer également le sacerdoce de Cybèle à Pessinonte, voyez Julien, ep. 81 (= ep.

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beaucoup de temples servaient aux séances du sénat, et pour cela étaient munis de subsellia, βάθρα, Julien aussi voulait faire munir les temples de tribunes pour la prédication (pas pour le chant (x) et de sièges hauts et bas pour tous ceux qui venaient écouter un sermon. Les sièges d'honneur n'étaient pas destinés aux prêtres, mais aux vieilles gens, aux gens de bien, etc., comme c'était de coutume dans l'antiquité grecque et latine ; qu'on se figure devant ces sièges la tribune (το βήμα) avec la chaire de l'orateur ou prêcheur ; les gens qui devaient faire le sermon n'étaient pas des prêtres non plus, mais des philosophes, voyez Grégoire de Nazianze qui dit (2) : « Tu leur donneras sans doute des interprètes d'oracles inspirés par un dieu », comme vous le diriez vous-mêmes (3), et tu leur expliqueras des livres de théologie et de morale », et alors il cite et persifle Hésiode, Orphée, Homère et autres. Ainsi nous trouvons ici la même chose que dans le chapitre 1 1 1 de Grégoire, auquel je dois revenir maintenant. Grégoire écrit : « (Julien se proposait... d'organiser) des lectures et des explications des dogmes helléniques, c'est à dire de celles qui dirigent les mœurs et celles qui expliquent le sens caché (des mythes) (4) ».

21H.), p. 388d-389a, Bidez, Lettres, p. 91, 11 s. : « Pour notre part, nous t'honorerons d'un double sacerdoce » et c. q. s. Voir Bidez, Lettres p. 82 et 91.

C) Voyez ci-après, p. 1375. (2) Orat. IV c. 115 Migne, S. G. 35, col. 653a : παρέξεις

αύτοϊς ύποφήτας δηλαδή θεοφόρων λογίων, ώς αν αυτοί φαίητε, και βίβλους ανελίξεις θεολογικάς τε και ήθικάς (Β. et C. p. 117).

(3) Comme je l'ai noté auparavant (Chap. II, Excursus IV p. 542), Grégoire ne cite pas Julien lui-même, mais les autres philosophes.

(*) 'Ελληνικών τε δογμάτων αναγνώσεις και αναπτύξεις,δσαι τε ή θος ρυθμίζουσι και δσαι της άπόκρυψεως. De tous ces mots άνά- γνωσις est le seul qui soit en usage chez les chrétiens. V. Du Cange I p. 66. Pour ρυθμίζειν voyez Platon, Phaedr. 253η : μιμούμενοι αυτοί τε και τα παιδικά πείθοντες και ρυθμίζοντες εις το εκείνου επιτήδευμα και Ιδέαν αγουσιν. Le mot έπίκρυψις fait penser au passage de Julien, orat. V p. 169a : εϊθ' έξης γίνεται τα λοιπά, τα μεν δια τους μυστικούς και κρύφιους θεσμούς, τα δε κα,Ι ρηθήναι πασι δυναμένους. « Puis ont lieu les autres céré-

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l'empereur julien

On serait naturellement enclin à supposer que Julien emprunta à l'Église cette institution des discours, parce que dans sa jeunesse, il avait fait lui-mêm"e la lecture des Saints Écrits au peuple. Sans aucun doute, il y a ici une adaptation, mais Julien s'est tellement orienté par ses études vers les usages des anciens que pour les sermons au moins, on ne peut rien affirmer avec certitude.Le sermon n'a pas son origine dans le Christianisme : il était en fréquent usage chez les anciens ; les stoïciens prêchaient dans un portique ou dans les temples (*), les cyniques sur les places publiques des villages et bourgades(2). «On rencontre déjà», dit Martha (3), « chez les philosophes, certaines formes oratoires consacrées depuis par la prédication chrétienne. Ainsi Dion prêche sur un texte qu'il emprunte au livre par excellence, à Homère. Avant d'entrer dans son sujet, à la fin de l'exorde, il invoque la Persuasion, les Muses et Apollon, comme les orateurs chrétiens implorent le secours d'en haut. Il ne faut pas trop s'étonner de ces ressemblances. Le christianisme se conformait aux usages, en animant, il est vrai, d'un esprit nouveau, plus sincère et plus religieux, ces vieilles formes oratoires et poétiques ». Dion que Martha (4) appelle le prédicateur ordinaire de Trajan, prétend faire de V éloquence sacrée. Il dit (5) : « Parce que les gens savent ce qui leur faut, mais ne le font pas, il faut toujours et de nouveau prêcher la vertu et dire ce qu'il savent déjà, et tâcher de les convertir et de les diriger de force vers la vertu ; car, comme dans les mystères l'hiérophante n'annonce pas une seule fois à ceux qui vont être initiés chacune des choses ce qu'il

monies, les unes au moyen de rites mystiques et cachés, les autres au moyen de ceux qui peuvent être divulgués ». Voyez P. Allard II p. 186 : « Julien conçut le plan d'une série de lectures et de discours exposant les explications morales et le sens caché des dogmes helléniques ».

(*) Dion p. e. prêchait de temps en temps dans les temples, voyez P. Allard II p. 186 n. 5.

(2) Voyez Orig. c. Cels. III 50 (I p. 246, 21-24 Koe.). (3) Les Moralistes sous l'Empire Romain, Paris, 1865, p. 302,

n. 1. (4) L. l. p. 304. (6) Orat. XVII p. 463 s. éd. Reiske. R. B. Ph. H. — 86.

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faut faire, pareillement il importe que les discours sur ce qui est utile, comme quelque prédication sacrée, soient souvent, mieux vaut, soient toujours répétés. »

Néanmoins, il y aune différence essentielle entre les prédications des philosophes et les sermons des évêques : ces prédications n'ont pas ou peu de rapport avec la religion ; les philosophes, comme on le voit chez Dion, ne prêchent que la vertu ; on le voit déjà chez Horace, qui moralise lui-même tant soit peu, en raillant, tandis que le christianisme n'est et ne veut être qu'une religion. C'est en cela, que Julien s'est adapté au christianisme, car il veut qu'on prêche et la religion et la morale, et qu'on interprête allégoriquement les mythes plus ou moins immoraux des anciens. C'est à cela que servent aussi les lectures de textes sacrés que les anciens ne connaissaient pas du tout. Grégoire nous dira, comment il faut qu'elles se fassent. Après avoir raillé les mythes absurdes et licencieux des anciens (x), il dit (2) : « que ces contes soient inculqués l'un après l'autre aux admirables auditeurs de cette théologie, et qu'ensuite on fabrique à leurs propos des explications allégoriques et des pre- tiges ». Julien quelque fois prêchait aussi, mais, comme il l'avoue lui-même, sans grand succès (3).

Avant de revenir au texte de Grégoire, je citerai, par acquit de conscience, le texte de Sozomène (4), quoi qu'il ne s'y trouve rien qui diffère des renseignements de Grégoire ; seul le motif que Sozomène allègue pour la conduite de Julien, est autre. Il

(!) Orat. IV c. 115 ; voyez aussi c. 116. (2) Orat. IV, c. 115 à la fin, Migne, S. G., 35 col. 653bc :

ταϋτα επεισκυκλείσθω τοις θαυμαστοίς της θεολογίας άκροαταίς, εϊτ' έτιινοείσθω τούτοις άλληγορήματα και τερατεύματα.

(3) Voyez ep. 98 (= ep. 27H.) p. 399d, et Misopogon p. 344c il se dit: «Pourquoi harangues-tu le peuple?» (Τί... δημη- γορεΐζ εν τω πληθει ;)

(4) V, 16, 2 : Ύπολαβών όε τον Χριστιανισμόν την σύστασιν εχειν εκ τον βίου και της πολιτείας των αυτόν μετιόντων, διενοεΐτο (se. 6 'Ιουλιανός) πανταχή τους c Ελληνικούς ναούς τΐ\ παρασκευή και τΐ\ τάξει της Χριστιανών θρησκείας διακοσμεΐν} βήμασι τε και προεδρίαις} και 'Ελληνικών δογμάτων και παραινέσεων διδασκά- λοις τε και άναγνώσταις... το Ελληνικον δόγμα σεμνϋναι.

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dit : « comprenant (*) que le Christianisme tirait sa force de la manière de vivre de ceux qui le professaient (2), Julien résolut de munir partout les temples helléniques de l'appareil et de l'organisation du culte chrétien, de tribunes et de sièges d'honneur, et rendre du prestige aux croyances des païens au moyen de maîtres et de lecteurs destinés à l'enseignement des dogmes et de la morale helléniques. »

Grégoire poursuit ainsi : « Julien se proposait... (de donner) une simple esquisse (3) de prières avec réponses. » (4). M. Bidez avait écrit (5) : «Grégoire de Nazianze prétend même qu'il voulut rehausser les cérémonies païennes par l'exécution chorale de prières antiphoniques (orat. IV, 111) », et alors il renvoie (6) le lecteur au passage de Théodoret (II, 24, 8 ss.) sur l'emploi de l'antienne, qui selon l'auteur, a été introduite dans l'Église par Flavien et Diodore et à Cabrol, I, 2283 (7). Examinons cela un peu de plus près. Chez Théodoret il est question de deux demi-chœurs de chantres qui chantent alternativement des psaumes, etc., non pas des prières. Les prêtres aussi chantent souvent dans le presbytère, mais nulle part il n'est question dans l'Église orientale de prières qui sont chantées (8). Julien veut imiter,

(^ Ύπυλαβών... των αυτόν μετιόντων. Sozomène cite ici la lettre 84a ( =49H.) conservée par lui, V,16, 5 sq. (observation de M.Bidez).

(2) On voit que les ariens, les seuls chrétiens que Julien ait connus dans sa jeunesse, ne sont pas si dépravés qu'on veut nous le faire croire, voyez Chap*. I p. 128 s. Sozomène qui était un orthodoxe, n'en dit rien.

(3) τύπον ; pour l'usage du mot τύπος chez Julien, voyez epist. 89b (= Fragm. Ep.) p. 301d : τύπου χάριν = exempli gratia, et p. 304b : vwi δε ώς τύπφ προς aè γράφω περί αυτών. = « Pour le moment je me borne à t'en donner une simple esquisse ».

(*) ευχών τε τύπον εν μέρει. J'ai cité ici la traduction de H. -A. Naville, Julien l'Apostat p. 164 : « introduire des prières avec réponses ».

(B) Lettres, p. 120. Dans une lettre du 24 janvier 1926 il me propose la traduction : « prières liturgiques », qui me semble beaucoup meilleure.

(«) Lettre p. 121 n. 1. (7) Voyez ci-dessus p. 1366s. (8) Quand nous lisons dans l'Euchologium Goari p. 65 : Ευχή àv-

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comme dit Grégoire, les institutions de l'Église, mais il ne peut pas imiter ce qui n'existe pas ; ainsi il ne peut pas avoir voulu imiter des prières chantées alternativement, parce qu'il n'y avait pas de prières chantées. Ainsi les mots : ενχαΐ εν μέρει ne peuvent que signifier des prières qui sont récitées ou dites avec des réponses, des prières liturgiques. Le prêtre récite ou dit la prière, le peuple répond avec quelques mots, et alors le prêtre reprend sa prière, et ce qui suit (*), comme cela est encore de coutume dans l'Église Catholique Occidentale. C'est ce que Julien a voulu imiter, et ce qu'on peut aussi conclure des mots de Sozomène (2) : « par des prières imposées à heures et à jours fixes (3) ». On se souvient que Julien avait prescrit au prêtre de dire des prières deux ou trois fois par jour (4). Comme les mots : ειχών τε τύπον εν μέρει sont de Julien lui-même,

τιψώνον πρώτου μυστικώς, on pourrait croire que la prière fût chantée, mais ce n'est pas ainsi, car il suit :τον Ιερέως λέγοντος την εύχήν μνστικώς (secreto) εν τω βήματι (dans le presbytère), èv τω αύτώ χαίρω ό Διάκονος λέγει ε£ω τον βήματος (c'est-à-dire in ambone) τα είρηνικά. Enfin, tout à la fin de Y αντίφωνον, nous trouvons : Μετά τα είρηνικά( = Pacificis recitatis) ό χάρος ψάλλει το πρώτον άντίφωνον κ. τ. λ. Pareillement à la fin du second antipho- ne p. 66 : Μετά τα είρηνικά τα δεύτερα ψάλλει ό χάρος τό δεύτερον άντίφωνον κ. τ. λ. Parfois aussi les prêtres chantent, mais ce ne sont pas des prières, mais des hymnes (v. Euchologium p. 217 : και 'ιερείς μεν αρχόμενοι των Θείων ν μ ν ων , τον ιερόν βήματος ενδοθεν (c'est-à-dire dans le presbytère) τάς περί Θεον πρώτας είκονίζουσι τάξεις). Qu'il ne soit pas question de prières chantées, cela résulte aussi de la version oratio.Y. Du Gange, in ν. "Αμβων I p. 58 : Όπισθάμβωνος ενχή. Oratio quae retro Ambonem in media Ecclesia recitatur, etc. V.Dom Gabrol in v. Ambon I p. 1347 : « Les liturgies de Saint Basile et de saint Jean Ghrysostome contiennent une oraison finale intitulée : Ενχή όπισθάμβωνος, oraison de derrière l'ambon ».

(x) Voyez Γ Euchologium Goari, passim. (2) V, 16, 2 : ωρών τε ρητών και ημερών τεταγμέναις εύχαΐς. (3) Voyez BiDEz, Lettres, p. 98 ; voyez aussi sa traduction,

Bulletins, 1914, p. 440 : « des prières revenant régulièrement à des jours et à des heures déterminées. »

(4) Epist. 896 (= Fragm. Ep.) p. 203a. Voyez Chap. II p. 529.

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je pense qu'il aura composé une ébauche de prières à réciter pour les diverses parties du jour, du mois, de l'an, en quelque sorte un livre d'heures païen.

Ainsi, à ce que nous savons, nulle part dans l'Encyclique, Julien n'a fait mention du chant, et nous ne savons pas, s'il a aussi voulu introduire l'antienne. Je pense que non, d'abord parce que, quand il était encore chrétien, l'antienne n'était que depuis très peu de temps en usage dans l'Église (x), et que Julien n'aimait pas les nouveautés, comme il le dit souvent, de plus les hymnes païens pour la plupart étaient chantés hors des temples, dans l'enceinte, et durant les fréquentes processions. Ainsi, le βήμα de Julien n'a pas servi comme ambon, comme le βήμα des églises.

La supposition de M. Ensslin (2), que les hymnes que les prêtres devaient apprendre par cœur, auraient été les hymnes d'Homère et d'Hésiode, et que ces hymnes auraient été récités, et non chantés, pour servir de texte à la prédication, me semble absurde. On n'a pas besoin d'apprendre par cœur les textes sur lesquels on veut prêcher la religion ou la morale. En outre, Julien parle expressément des hymnes, qu'on chante dans les temples (3).

Revenons maintenant au texte de Grégoire : « (Julien se proposait... de donner une simple esquisse de prières avec réponses, et du châtiment à infliger aux pécheurs selon la gravité de leurs

(x) A Constantinople elle n'a été introduite dans l'Église catholique qu'au temps de Jean Chrysostome, pour lutter contre l'influence des ariens qui en faisaient usage dans leurs réunions hors de l'église, voyez Dom Cabrol I p. 2290.

(2) Klio XVIII p. 195 s. : « Der Gottesdienst sollte neue Anregung und Belehrung auch dadurch erfahren, dass Stellen aus religiösen Texten vorgelesen und erläutert wurden... Zur Grundlage dienten Hesiod und Homer, bei dem wir hauptsächlich an die Hymnen denken müssen, die ja die Priester auswendig lernen sollten, dazu die Schriften der Orphiker und anderes mehr. »

(3) Epist. 89b p. 310d, Bidez, Lettres, p. 169, 26 s. : ού μην Αλλ' εκείνους πειρατέον επίστασθαι τους εν τοις ίεροΐς άδομένους.

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péchés » (x). Comme nous l'avons vu auparavant (2), la peine spirituelle n'était pas tout à fait inconnue dans l'antiquité. Ici aussi, quoique Julien ait sans doute suivi de loin les usages de l'Ëglise,il s'est conformé en tout aux mots et aux expressions des auteurs classiques (3). Le texte analogue de Sozomène, dont j'ai traité déjà dans le précédent article (4), est beaucoup plus explicite, mais nous causera aussi beaucoup plus de difficultés. Sozomène écrit (5) : « II songea aussi... à prescrire selon la tradi-

(*) ευχών τε τύπον εν μέρει και της των άμαρτανόντων κατά μέτρον επιτιμήσεως.

(2) Chap. II ρ. 74-82. (3) επιτίμησις veut dire simplement : blâme, reproche, voyez

Thucydide VII 48, 3, et le verbe έπιτιμαν signifie : infliger un blâme, faire un reproche, voyez Plat. Phaedr. 237c : εγώ οΰν και συ μη πάθωμεν δ άλλοις επιτιμώμεν = ce que nous reprochons aux autres, Gorgias 487e : περί τούτων ων συ δη μοι επετίμησας = dont tu m'avais fait un reproche. Le mot επιτίμησις ne se trouve pas chez les auteurs ecclésiastiques ; le mot pour pénitence est : επιτίμιον (qui dans l'antiquité, voyez Hérodote IV,80, signifie : peine infligée par la loi ou par un tribunal). V. Du Cange, in v. I p. 429 :« Maxime apud Graecos su- mitur pro Poena Ecclesiastica, quae reis, aut confitentibus pec- cata imponitur, quam vulgo Poenilentiam appellamus, non verû excommunicatio... Johannes Antiochenus de Charistariis p. 162. oi γαρ άγιοι πατέρες ημών μετανοίας τρόπους εκθεμένοι, και επιτιμίων Ιδέας (des espèces) ανάλογους τοϊς τών ανθρώπων άμαρτήμασιν, εσπευδον δι' αυτών καθαίρειν το σώμα της εκκλησίας, καΐ την υπό τών αμαρτιών συγχωσθεΐσαν χάριν τοϋ αγίου βαπτίσματος τοις πλείστοις άνακαλεΐσθαι πάλιν. Apud Theo- doritum Serm. 11 ad Graecos : τών τα μικρά ημαρτηκότων τά ξύμμετρα επιτίμια ( — les pénitences convenables)». Le mot μετάνοια, poenitentia, ne se trouve pas chez Julien^

(4) Chap. II p. 75s. (5)V, 16, 2, 3 : διενοειτο (se. ό 'Ιουλιανός)... εκουσίων τε και

ακουσίων αμαρτημάτων κατά την τών Χριστιανών παράδοσιν εκ μεταμέλειας σύμμετρον τάξαι σωφρονιαμόν. Σύμμετρος, convenable, se trouve aussi chez les auteurs ecclésiastiques, voyez ci-dessus, n. 3, mais σωφρονισμός , correction, est un mot tout à fait ancien, voyez pour σωφρονίζειν : Xenoph. Hell. Ill, 2, 23 : εκ τούτων oëv πάντων οργιζομένοις εδοξε τοις εφόροις καϊ τγ\ εκκλησία σωφρονίσαι αυτούς = de corriger les Éléens, Xen. Mem. 2, 1, 16, Platon, Gorgias 478d, Phaed. 69a. Dans le N.T. Tit.2; 4 : ha

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tion chrétienne une correction convenable pour les péchés à la fois volontaires et involontaires suivis de repentir. » Sozomène, naturellement, a inséré les mots : « selon la tradition chrétienne », qui ne se trouvaient pas dans le texte de Julien, et le mot correction est, comme la combinaison des péchés volontaires et involontaires (x), emprunté aux idées païennes, mais si le texte de Julien a réellement contenu les mots : εκ μεταμέλειας — après repentir, nous avons ici sans aucun doute une imitation d'une des institutions de l'Église. Le mot μεταμέλεια, repentir, éveille une idée tout à fait chrétienne ; dans toute l'antiquité le mot ne se trouve pas dans le sens chrétien, ni le mot μετάνοια non plus (2). Faudrait-il traduire : « après avoir exprimé ses regrets »? Je crois que non, car, bien que les mots μεταμέλεια, μεταμέ- λος, μετάνοια (avec les verbes correspondants) n'aient pas chez les auteurs classiques le sens moral du mot repentir, l'idée de repentir, quoique très imparfaitement développée, n'était pas tout à fait inconnue, surtout dans l'Asie Mineure, comme nous l'avons vu chez Steinleitner(3).Pour donner une idée des senti-

σωφρονίζωσιν τάς νέας φιλάνΟρους είναι = Ν. T. Latine ed. Nestle *, p. 543 : « ut prudentiam doceant adulescentulas, ut viros suos ament,» et 2 Tim. \,1 : ου γαρ εδωκεν ήμίν ό θεός πνεύμα δειλίας, αλλά... σωφρονισμού = Ν. T. Latine p. 536 : « nonenim dédit nobis Deus spiritum timoris; sed... sobrietatis », le sens est tout autre.

ί1) Voyez Chap. II p. 75 et 76 η. 1. (2) Pour le mot μεταμέλεια, voyez Thucyd. 3, 37 : εν τή

νϋν υμετέρα περί Μυτιληναίων μεταμέλεια, où il signifie : changement de sentiments. Plat. Rep. IX 577e et Lois V 727c il signifie : regret, dépit ; aussi μετάμελος, Thucyd. 7, 55. Pour μετάνοια c'est la même chose : ThuC. 3, 36 : και τχ\ ύστεραία μετάνοια τις ευθύς ην αύτοΐς, μετάνοια signifie : changement de sentiments ; Antiphon II ô, 12 (p. 120) : ανίατος γαρ ή μετάνοια των τοιούτων, il signifie plutôt regret que repentir (dans le sens chrétien).

(3) Die Beicht, passim, voyez surtout p. 108 : « Der Mensch, der seine öffentlich angeschlagene Verfluchung gelesen oder doch von ihr Kenntniss genommen hat, weiss damit, dass er der Gottheit geweiht sei. Er geht in sich und leistet Sühne, um den Wirkungen des Fluches zu entgehen ». In sich gehen, se recueillir, se repentir, se trouve déjà : Xen. Anab. I, 5, 17 : êv εαυτώ (έαυτον) έγένετο.

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ments régnant dans ces pays, je citerai ici V. Chapot Q) : « En Méonie, ... et en plusieurs parties de la Phrygie, on a retrouvé de singuliers monuments, les exempla ou exemplaria. Dans ces courtes inscriptions, un individu raconte une faute qu'il a commise .. Le dieu J'a châtié en lui envoyant quelque maladie... Il a confessé sa faute (εξομολογέομαι), apaisé le dieu par un sacrifice et une expiation etc.. Et sans doute on voit bien la divinité se poser en adversaire comme dans un procès (αντίδικος) ; elle est représentée comme personnellement lésée ; et cela est bien grec. Mais voici qui ne l'est pas : ce sont des expiations que ces petites inscriptions nous révèlent ; or les Grecs, dans le domaine religieux, ignoraient Yexpiation, ils ne connaissaient que la purification matérielle, physique ; elle était même requise dans peu de cas ; la divinité ne punissait pas, à proprement dire, elle se vengeait ; il n'était recommandé que de se dérober à sa colère le plus possible. Et cette vengeance du dieu outragé n'entraînait aucune leçon pour le coupable; nulle place au remords. Il en est ici autrement : une fois châtié, le coupable a fait une prière ; les Grecs d'ordinaire ne priaient qu'en vue d'une faveur à obtenir ou en remerciement d'une faveur, et toujours leurs rapports avec le dieu avaient la forme d'un contrat : donnant, donnant. L'auteur de l'inscription, lui, après avoir subi sa peine, élève en l'honneur de la divinité un χαριστήριον, un témoignage de reconnaissance. Ailleurs il est dit aux dieux justiciers : « Et j 'ai inscrit sur une colonne un témoignage de votre puissance ». Le suppliant, ici, s'élève à la notion du péché (le mot αμαρτία a déjà ce sens) ; il a le sentiment de la justice du châtiment infligé, il en remercie la divinité, il y voit une leçon pour la suite et il fait l'aveu public et permanent, et signé de son nom, de sa faute, atteignant ainsi à l'humilité que nous ne sommes pas habitués à rencontrer dans le monde gréco-romain. Tout ceci n'a rien d'hellénique, etc. ».

Quant à l'expiation du péché, Juvenal nous en a donné un

(*) La province romaine proconsulaire d'Asie. (Bibliothèque de l'École des Hautes Études, t. 150). Paris, 1904, p. 509 s.

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exemple très curieux (0> La zélatrice d'Isis fait tout pour expier sa faute. Mais nul ou rien ne la pouvait contraindre à se soumettre au jugement du prêtre ; il n'y avait pas d'autorité publique, pas d'organisation, comme dans l'Église ; c'était une chose tout à fait individuelle, une chose de cœur ; cela dépendait absolument de l'influence du prêtre, et du degré d'assujettissement de l'adepte, ou mieux encore de l'angoisse et de la peur que lui inspirait la force vengeresse de la divinité. Dans les inscriptions de l'Asie Mineure, il y a encore autre chose : le malfaiteur avoue sa faute, après que le dieu l'a châtié, en lui envoyant quelque maladie, mais le dieu ne s'en mêle qu'après que le prêtre a maudit le coupable (2). Revenons maintenant à la lettre 88 de Julien, dont j'ai traité auparavant (3). Julien frappe le destinataire de la lettre d'une peine spirituelle, parce qu'il ne veut pas des malédictions des dieux. Mais pourquoi n'en veut-il

(*) Juven. II Sat. VI 520 s. : ut... totum semel expiet annum. V. Fr. CuMONT, Die orientalischen Religionen, p. 109 : « Die Anbeterinnen der Isis, welche Juvenal (VI, 522 ff.) uns vorführt, wie sie das Eis des Tibers zerbrechen, um sich im Flusse zu baden, und auf ihren blutenden Knien die Runde um den Tempel machen, hofften durch diese Leiden ihre Sünden zu sühnen und ihre Verfehlungen wieder gut zu machen ».

(2) Voyez Steinleitner, l. l. p. 103 : « Der Angabe des Klagegrundes und der Bitte an die Gottheit schliesst sich der Fluch an, den diese an dem Uebeltäter vollziehen soll. Diese Verfluchung der betreffenden Person bildet die Hauptsache ; denn durch den Fluch soll ja der Missetäter zur Sühne gezwungen werden », et p. 104 : « Bei einem Ueberblick über diese einzelnen Punkte der Klageschrift, durch welche der Gottheit das Urteil in einer Rechtssache übertragen wird, zeigt sich als die Hauptsache und das eigentlich Wesentliche die Verfluchung des Uebeltäters, wie denn die oben angeführte maionische Fluchinschrift auch nur eine solche enthält. Während jedoch in anderen Fluchinschriften sich nirgends eine Andeutung findet, dass der Fluch auch wieder zurückgenommen werden könnte oder sollte, soll hier der Fluch im Dienste der sakralen Rechtspflege nur solange wirksam sein, als die verwünschte Person das gestohlene Gut nicht zurückerstattet oder sonst ihr Vergehen nicht wieder gut macht ».

(3) Ghap. II p. 73-82.

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pas? J'ai tâché d'en donner une raison dans l'article précédent (x) ; je la répéterai ici en quelques mots. La mention qu'il fait des malédictions des dieux, me semble montrer — quoiqu'il n'en dise rien — qu'il a connu, non pas naturellement les ins-

. scriptions dont traitent MM. Chapot et Steinleitner, mais l'emploi de la malédiction même pour amener le malfaiteur à confesser et expier sa faute. Mais pourquoi alors ne veut-il pas suivre l'exemple de ses coreligionnaires ? Prétendre amener le coupable à confesser sa faute, sans le maudire auparavant, est une conception chrétienne. Ainsi nous voyons que Julien, tout en citant des exemples pris dans l'antiquité, a conservé, pour ainsi dire sans s'en rendre compte, cette idée toute chrétienne qui lui fait rejeter les malédictions. Chez les anciens, la punition, suite d'une malédiction, devance le repentir, ou le sentiment de malaise ; chez les chrétiens c'est tout le contraire : le chrétien a conscience de sa faute, sait qu'il est enclin au péché, par conséquent avoue son péché, et est frappé ensuite d'une peine spirituelle. L'homme antique n'y comprendrait rien ; c'est une des différences essentielles entre la philosophie des anciens et le sentiment religieux des chrétiens. Les idées de pénitence, de remords, de contrition,, de conscience de culpabilité, avec leur contre-partie, la grâce, sont totalement inconnues aux anciens (2), et ne se trouvent que très imparfaitement développées dans les religions de l'Asie Mineure. M. Chapot (3) pense qu'on y peut constater une in fluence du christianisme naissant ; cette question compliquée peut-être négligée ici, mais les mots εκ μεταμέλειας de Sozo- mène (*) me semblent suffire pour déceler ici chez Julien une influence chrétienne. Ici aussi, comme en maint endroit des lettres pastorales, nous trouvons mêlées inextricablement les

Ο P. 81s. (2) Voyez Reitzenstein, Poimandres, p. 180 n.l : « Der furcht

bare Ernst der Predigt von der Schuld und Versöhnung fehlt, soweit ich sehe, dem Hellenismus ».

(3) L. l p. 510. (4) Les mots εκ μεταμέλειας, propres à Sozomène, prouvent

qu'il ne dérive pas de Grégoire. Sozomène, pour composer son histoire, se sert d'auteurs indépendants et de Grégoire et de Li- banius ; voyez aussi Chap. II, Excursus VII p. 549«

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idées païennes et les conceptions chrétiennes, parce que l'auteur des lettres était resté en quelque sorte chrétien.Mais il y a encoreautre chose: voyant l'influence dominatrice de l'Église,qui s'appuyait entre autres sur l'institution de la confession (ομολογία, εξομολόγησις) et de la pénitence (μετάνοια), il utilisa l'esprit dominateur qui est en quelque sorte inhérent au sacerdoce de tous les cultes, et qui pouvait d'autant mieux se manifester alors, que les peuples de plus en plus s'asservissaient à l'esclavage général ; c'était l'esprit de collectivité, pour ainsi dire, du moyen âge, qui faisait suite à l'individualisme des premiers siècles de notre ère. Ainsi Julien aussi en a fait un système, et c'est cela que veulent indiquer les mots de Grégoire : « une simple esquisse., du châtiment à infliger aux pécheurs selon la gravité de leurs péchés », et de Sozomène : « II songea aussi... à prescrire... une correction convenable pour les péchés à la fois volontaires et involontaires suivis de repentir. »

Les mots qui suivent chez Grégoire, sont de Julien lui-même, et en usage dans les cercles des initiés aux mystères : « (Julien se proposait)... (de donner) une simple esquisse du châtiment etc.. et des cérémonies préliminaires et de l'initiation elle- même aux mystères » (x). Le mot προτέλεια, qui ne se trouve nulle part chez les chrétiens, prouve que ce passage a en vue les initiations aux divers mystères. Il en aura donné les règles ; en cela aussi Julien aura suivi l'exemple de l'Église qui avait tout réglementé, mais les mots qui suivent chez Grégoire :

(*) τύπον... προτελείων τε και τελειώσεως. Le mot τελείωαις est, comme je l'ai démontré auparavant (Chap. I p. 127 η. 2) en usage à la fois chez les chrétiens et les païens, voir Grégoire de Naz. orat. IV C. 52 : τί/ καθ' ημάς τελειώσει την τελείωσιν τον μνσονς αντιτιθείς. Chez les païens τελ. signifie: initiation aux mystères : pour les chrétiens voyez Du Gange, II p. 1539 in v. : «.Τελείωσις, vox usurpata a Patribus Graecis pro baptismo... vel pro Sacramento Confirmationis. » Pour προτέλεια, cérémonies préliminaires, voyez Julien, orat. V p. 173c : ατε δη παρόντος τον σωτήρος και άναγω- γον θεοΰ} (οι 'Αθηναίοι) τα προτέλεια κατεβάλλοντο της τελετής = « Car, quand le dieu sauveur qui nous amène vers le ciel, était là, (les Athéniens) instituaient les cérémonies préliminaires de l'initiation ». Sozomène omet ce passage.

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«tout ce qui appartient évidemment à nos belles institutions » Q), sont exagérés, et ont dupé souvent les savants. Par contre, le reste du chapitre 111 de Grégoire,à l'exception des mots άγνεν- τήρια (lieux de purification), παρθενώνας (asiles pour les vierges), φροντιστήρια (maisons de recueillement pour les hommes), dont j'ai parlé déjà (2), a son origine dans les œuvres charitables de l'Église. Ici on peut vraiment parler des « singeries » de Julien, ce que personne n'a jamais contesté. C'est pourquoi je me bornerai pour cette partie à citer et à expliquer les textes de Grégoire et de Sozomène. Grégoire écrit (3) : « (Julien se proposait)... encore de fonder des hôtelleries et des hospices, [des lieux de purification, des asiles pour les vierges, des maisons de recueillement], et il voulait (imiter) toutes nos œuvres de bienfaisance pour les indigents, notamment l'emploi des signes de reconnaissance joints aux lettres dont nous munissons ceux qui en ont besoin pour aller d'un pays dans un autre », et Grégoire ajoute : « C'est cela qu'il admirait le plus dans nos institutions ». Les phrases analogues de Sozomène portent sur le même point. Il écrit (4) : « (Julien résolut... de rendre du pres-

(x) Kai δσα της ημετέρας σαφώς εστίν ευταξίας. (2)Chap. Il p. 534-537. (3)έ'τι δε καταγώγια πήξασθαι και ξενώνας, χάγνευτήριά τε και

παρθενώνας και φροντιστήρια], καϊ την εις τους δεομένονς φιλαν- θρωπίαν , τήν τ? αλλην όπόση καΐ την εν τοις επιστολιμαίοις σνν- θήμασιν, οϊς ημείς εξ έθνους εις έθνος τους χρήζοντας παραπέμπο- μεν, â δη και μάλιστα τών ημετέρων είχε θαυμάσας. J'ai suivi la traduction de M. Bidez, Lettres, p. ί 45, η. 4.

(4) διενοείτο (se. ο 'Ιουλιανός)... καταγωγίοις ξένων καϊ πτωχών, και τβ άλλη περί τους δεομένους φιλανθρωπί(ΐ το ' Ελληνικον δόγμα σεμνϋναι... ούχ ήκιστα δε ζηλώσαι λέγεται τά συνθήματα τών επισκοπικών γραμμάτων, οϊς εθος άμοιβαδόν τους ξένους οποί δήποτε διιόντας και παρ οϊς αν άφίκωνται ηάντως κατάγεσθαι και θεραπείας άξιοϋσθαι, οΐά γε γνωρίμους και φιλαιτάτους δια την τοϋ συμβόλου μαρτυρίαν. Καταγώγιον dans Fantiquité était une sorte de caravansérail, avec une grande cour, sur laquelle s'ou vrent les chambres, voyez Thuc.III, 68,3, Grote, History of Greece, New- York, 1854, VI p. 264, Busolt, Griechische Geschichte, III 2 p. 1037, Becker, Charikles. bearbeitet von Gölk,II p. 5 ss. Le καταγώγιον, dépeint par Thucydide, avait été bâti par les Lacé démoni ens afin de servir en temps de guerre aux soldats de passage. La cour,

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tige aux croyances des païens au moyen... d'hôtelleries (καταγώγια) pour les étrangers et les mendiants, et de toute sorte d' œuvres de philanthropie en faveur des indigents... Ce qui, dit-on, provoqua surtout son émulation, ce fut la coutume qu'avaient les évêques d'échanger entre eux des tessères accompagnant les lettres de recommandation dont ils munissaient ceux qui partaient en voyage, afin que, partout où ils arrivaient, les étrangers obtinssent un logement et les soins nécessaires, le témoignage de la tessère les faisant considérer comme des connaissances et des amis. » C'est curieux que ni lui, ni Grégoire non plus ne rendent ici, comme d'ordinaire, le texte précis de Julien ; Grégoire ajoute de lui-même les mots : οΐς ημείς... τους χρήζοντας παραπέμπομεν, Sozomène les mots : των επισκοπικών γραμμάτων. Au contraire, les mots : την εις τους δεομένους φιλανθρωπίαν (Sozomène : τη άλλη περί τους δεομένους φιλανθρωπία) sont de Julien lui-même (*).

Julien a emprunté l'institution et la dotation de ses hôtelleries aux décrets de ses prédécesseurs Constantin le Grand et Constance (2). La seule différence est que maintenant la distri-

du καταγώγιον parait avoir eu une fontaine au centre, voyez Plat. Phaedr. 259a ; ξενών était une hôtellerie, voyez Plat. Tim. 20c. Chez les auteurs chrétiens les mots ξένων et ξενοδόχιον (ξενο- f5o/e?oT'?v.JuLiENJep.84 (=49H.) p. 430 η) sont identiques ; il en est de même pour le mot καταγώγιον, ν. Du Gange, in ν. ξενοδόχιον I p. 1014 : «Aedes in qua excipiuntur Peregrini. S.Basilio in Epist. 371 : καταγώγιον τοις ξένοις τοις κατά πάροδον επιφοιτώσι (une auberge pour les étrangers qui nous visitent en passant) ». Pour ξένων ν. aussi Philostorgius, éd. Bidez, p. 215, 20 : d δε 'Ιουδαίος αννεισελθών αύτοίς εν τω ξενώνι,ρο\ιτ ξενοδοχεΐον, Philostorgius, ρ. 207, 18 et surtout p. 215, 4 : επιμελον μένος δε και των ξενοδοχείων νπερ της των ξένων, θεραπείας, et p. 225, 23. (!) Pour φιλανθρωπία voyez Chap. II p. 52, η. 6, p. 517-527. Au

lieu des δεόμενοι} les auteurs ecclésiastiques auraient parlé des religieuses, des veuves et orphelins, et des mendiants (πτωχοί), voyez Philostorgius, éd. Bidez, p. 225, 21-24.

(2) V. Philostorgius, éd. Bidez, p.225, 21-26 : και πολλας δωρεάς εχαρίσατο (se. ό Κωνστάντιος) φιλοτίμως τότε παντι κλήρψ και τω κανόνι τών παρθένων (les religieuses, ν. Du Gange, I p. 579 s. in ν. κανών : Socr. Hist. Eccl. I, 17) και τών χηρών και τοις ξενο- δοχείοις. και εις διατροφήν τών προειρημένων και τών πτωχών

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1384 w. koch

bution des aumônes était confiée aux prêtres païens et non plus au clergé de l'Église, et que les aumônes ne servaient plus pour les religieuses, les veuves et orphelins, et les mendiants (πτωχοί), mais simplement pour tous ceux qui en avaient besoin (oi Οεόμενοι), sans que rien fût spécifié à cet égard rc'est la bienfaisance humanitaire comme nous l'entendons, au lieu de la charité chrétienne. Sozomène est plus explicite que Grégoire ; il dit que les hôtelleries, καταγώγια, servaient aux étrangers et aux mendiants, mais il omet les ξενώνες, qui naturellement étaient destinés aux étrangers Q), tandis que les hospices, καταγώγια, étaient destinés aux indigents ; c'est pourquoi M. Bidez a rendu le mot par : asiles (2). L'institution de l'emploi des tes- sères (3), jointes aux lettres de recommandation, que Julien se proposait d'introduire dans le monde païen, n'était naturellement pas possible, sans qu'il fondât partout des ξενώνες ou ξενοδοχεία, comme il l'avait ordonné déjà dans sa lettre à Ar- sace (4). Je veux finir ces études déjà trop longues en citant et commentant ce que Julien avait écrit en cet endroit (5) : « Établis dans chaque cité de nombreux hospices, afin que les étrangers aient à se louer de notre humanité... Je déclare

και ορφανών και φυλακών σιτομέτριον προσέθηκεν πλείονος μέτρου ούπερ ό πατήρ αύτοϋ Κωνσταντίνος εχαρίσατο. Ο Voyez Philostorgius, ed. Bidez, p. 215,4 (ci-dessus, p. 1382

η. 1 à la fin). (2) Lettres, p. 98 : « des asiles pour les étrangers et les men-,

dia,nts » (καταγωγίοις ξένων και πτωχών). (3) Pour ces tessères voyez Bidez, Lettres, p. 98 n. 1. (4) V. Chap. II p. 517. (6) Epist.84 ( = ep. 49H.) p. 430bc : Ξενοδοχεία καθ' έκάστην

πόλιν κατάστησον πυκνά, ϊν' απολαναωβιν οι ξένοι της παρ'

ημών φιλανθρωπίας... ων το πέμπτον μεν εις τους πένητας τους τοις ίερεΰσιν εξυπηρετούμενους άναλίσκεσθαί φημι χρήναι, τα ôè αλλά τοις ξ έ ν ο ι ς και τοις μεταιτοΰσιν επινέμεσθαι παρ' ημών. Μεταιτεϊν est le mot pour : mendier, ν. Lug. Cyn. 2, où Lychnis dit au Cynique : tu ne diffères guère des pauvres qui mendient leur nourriture quotidienne (διαφέρεις γαρ ούδεν συ των πτωχών, oi την έφήμερον τροφήν μεταιτοΰσιν) ; Libanius au contraire se sert du mot πρασαιτείν, ν. Orat. XXXIII, 30, or.XLV, 9 (V.Chap. II p. 523, n. 6) et 10 (V. Chap. II p. 524 n. 6.).

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L*EMPEREUR JULIEN 1385

qu'il faut en dispenser » (c'est à dire des subventions que Julien lui donne) « le cinquième aux pauvres qui sont employés au service des prêtres, puis distribuer le reste aux étrangers et aux mendiants qui s'adressent à nous ».

Ainsi donc, quoique la doctrine de Julien soit tout autre que celle des chrétiens, l'exécution reste toujours la même ; la seule bienfaisance possible dans le monde antique qui n'en avait connu aucune jusqu'alors, était la charité chrétienne. C'est le grand mérite des chrétiens de l'avoir organisée, et Julien, qui le savait, a dans sa misérable tentation de fonder une Église païenne, emprunté le mieux de ce qu'il fit à l'Église qu'il détestait de tout son cœur.

W. Koch.