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Histoire des arts : La mort aux trousses de Alfred Hitchcock Analyse du générique de Saul Bass pour La mort aux trousses : Il débute par le logo de la MGM teinté de vert par Hitchcock ( il prend les devant), la société de production ayant fait confiance au réalisateur sans avoir pris connaissance du scénario. Puis un fondu, le logo disparaît pour laisser place à un fond vert. Un quadrillage noir apparaît à l'écran ( déjà l'effet de trajectoire est ressenti). Les noms des acteurs arrivent grâce à un rectangle blanc qui donne un effet de contre-balancier ( les identités sont déjà dirigées, plus maîtres d'elles-mêmes). Seul le nom de Hitchcock n'est pas accompagné du rectangle blanc ( c'est lui qui réalise le film, il sait les directions que les choses vont prendre). La musique de Bernard Hermann, dès la première image, sonne comme un martèlement, elle redouble l'effet de vitesse lorsque les noms des acteurs apparaissent. Ainsi la partition annonce le film qui partira dans tous les sens, les personnages apparaîtront, disparaîtront.. Puis le titre apparaît : North by northwest. Les flèches du titre sont disposées dans des directions différentes : une vers le haut et l'autre vers la gauche. Le building de verre des Nations-Unies réfléchit et brise en multiples facettes l'image de l'agitation de la ville (et prépare à la séquence à l'ONU), l'intrigue est située géographiquement ( New York). L'image inverse et brisée que nous renvoie l'édifice reflète l'atmosphère du film, son rythme effréné, un monde de publicité et d'agitation. Cette image très moderne introduit le héros. 7 à 8 plans esquissent d'une façon rapide, mais très juste les principaux traits de publicitaire. En résumé : comme dans plusieurs autres films du cinéaste, le générique de Saul Bass présente, avant même que l'aventure ne commence, le sujet du film de façon simple et efficace : des lignes viennent se croiser sur l'écran vide jusqu'à quadriller et former une structure qui s'anime, un bâtiment reflétant l'effervescence d'une grande avenue new-yorkaise. Le titre original North by northwest qui apparaît souligne l'incohérence d'une direction qui n'existe sur aucune boussole : le sens des flèches fait autant référence aux lignes initiales du générique qu'au futur itinéraire de Roger Thornill contraint de traverser les Etats-Unis pour une raison tout aussi absurde. Pour le générique du film précédent : Sueurs froides, Bass avait imaginé annoncer le vertige du personnage principal en animant une spirale dans l'oeil de Kim Novak; pour Psychose, le film suivant, il reviendra à une pure abstraction géométrique, les noms de l'équipe apparaissant d'abord parfaitement lisibles avant d'être fracturés, comme pour restituer l'esprit dérangé de Norman Bates.

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Post on 24-Apr-2018

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Histoire des arts : La mort aux trousses de Alfred Hitchcock

Analyse du générique de Saul Bass pour La mort aux trousses :Il débute par le logo de la MGM teinté de vert par Hitchcock ( il prend les devant), la société de production ayant fait confiance au réalisateur sans avoir pris connaissance du scénario. Puis un fondu, le logo disparaîtpour laisser place à un fond vert. Un quadrillage noir apparaît à l'écran ( déjà l'effet de trajectoire est ressenti).Les noms des acteurs arrivent grâce à un rectangle blanc qui donne un effet de contre-balancier ( les identités sont déjà dirigées, plus maîtres d'elles-mêmes). Seul le nom de Hitchcock n'est pas accompagné du rectangle blanc ( c'est lui qui réalise le film, il sait les directions que les choses vont prendre). La musique de Bernard Hermann, dès la première image, sonne comme un martèlement, elle redouble l'effetde vitesse lorsque les noms des acteurs apparaissent. Ainsi la partition annonce le film qui partira dans tousles sens, les personnages apparaîtront, disparaîtront..Puis le titre apparaît : North by northwest. Les flèches du titre sont disposées dans des directions différentes : une vers le haut et l'autre vers la gauche.Le building de verre des Nations-Unies réfléchit et brise en multiples facettes l'image de l'agitation de la ville (et prépare à la séquence à l'ONU), l'intrigue est située géographiquement ( New York). L'image inverse et brisée que nous renvoie l'édifice reflète l'atmosphère du film, son rythme effréné, un monde de publicité et d'agitation. Cette image très moderne introduit le héros. 7 à 8 plans esquissent d'une façon rapide, mais très juste les principaux traits de publicitaire.

En résumé : comme dans plusieurs autres films du cinéaste, le générique de Saul Bass présente, avant même que l'aventure ne commence, le sujet du film de façon simple et efficace : des lignes viennent se croiser sur l'écran vide jusqu'à quadriller et former une structure qui s'anime, un bâtiment reflétant l'effervescence d'une grande avenue new-yorkaise. Le titre original North by northwest qui apparaît souligne l'incohérence d'une direction qui n'existe sur aucune boussole : le sens des flèches fait autant référence aux lignes initiales du générique qu'au futur itinéraire de Roger Thornill contraint de traverser les Etats-Unis pour une raison tout aussi absurde.

Pour le générique du film précédent : Sueurs froides, Bass avait imaginé annoncer le vertige du personnage principal en animant une spirale dans l'oeil de Kim Novak; pour Psychose, le film suivant, il reviendra à une pure abstraction géométrique, les noms de l'équipe apparaissant d'abord parfaitement lisibles avant d'être fracturés, comme pour restituer l'esprit dérangé de Norman Bates.