gazette le méliès n075 octobre 2012

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N°075 C’est la rentrée des classes pour Germain Germain (difficile de ne pas penser au Humbert Humbert du Lolita de Nabokov), un prof’ de lettres qui ne se fait plus beaucoup d’illusions sur sa mission de transmission des savoirs aux apprenants, comme on dit maintenant. Un brin cynique, un bon peu défaitiste, il se fait une raison aussi quand on lui apprend qu’en cette nouvelle année scolaire son lycée Gustave-Flaubert – son idole, le maître absolu à ses yeux, auteur du chef d’œuvre ultime de la littérature française, Madame Bovary – a été choisi pour y mener une expérience pilote qui dit que les élèves, pardon les apprenants, porteront tous des uniformes à la façon anglo-saxonne : discours très drôle du proviseur Jean-François Balmer… Comme chaque année et dès le premier cours, Germain donne une petite rédaction à ses élèves pour avoir une idée du niveau de sa classe. Le sujet : « racontez votre dernier week-end ». Alors qu’il corrige les copies et se navre de tant de médiocrité et de vacuité chez des adolescents de seize ans qui n’ont rien d’autre à raconter qu’avoir mangé une pizza et regardé la télé, il tombe sur le texte de Claude Garcia. Le garçon raconte comment, après avoir, depuis un banc dans un parc, observé une maison et ses occupants durant tout l’été, il a élaboré une stratégie pour pouvoir y être invité. Une fois dans la place, sous prétexte d’aider le fils de la famille nul en maths, il raconte l’intérieur, les personnages, le parfum parti- culier de la femme de la classe moyenne… et de terminer par un mystérieux et promet- teur « À suivre… ». Interloqué par l’ima- gination et le style du garçon, Germain va reprendre goût à l’enseignement, prendre Claude sous son aile et l’encourager à pour- suivre son récit… mais l’intrusion de Claude dans cette maison de la classe moyenne en même temps que dans la vie de Germain va déclencher une série d’événements petit ) petit incontrôlables… Après Potiche et sa Deneuve virevoltante, le cinéaste nous entraîne avec juste ce qu’il faut de perversité bienveillante dans un thriller psychologique beau, intense et mélancolique qui distille une tension savamment dosée. C’est limpide, simple, d’une redoutable efficacité, sans insistance psychologisante, c’est cocasse et finalement émouvant, un pur plaisir de cinéma pour les spectateurs pas totalement innocents que nous sommes.

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Tous les films et les horaires

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Page 1: Gazette le Méliès N075 octobre 2012

N°07

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C’est la rentrée des classes pour Germain Germain (difficile de ne pas penser au Humbert Humbert du Lolita de Nabokov), un prof’ de lettres qui ne se fait plus beaucoup d’illusions sur sa mission de transmission des savoirs aux apprenants, comme on dit maintenant. Un brin cynique, un bon peu défaitiste, il se fait une raison aussi quand on lui apprend qu’en cette nouvelle année scolaire son lycée Gustave-Flaubert – son idole, le maître absolu à ses yeux, auteur du chef d’œuvre ultime de la littérature française, Madame Bovary – a été choisi pour y mener une expérience pilote qui dit que les élèves, pardon les apprenants, porteront tous des uniformes à la façon anglo-saxonne : discours très drôle du proviseur Jean-François Balmer…Comme chaque année et dès le premier

cours, Germain donne une petite rédaction à ses élèves pour avoir une idée du niveau de sa classe. Le sujet : « racontez votre dernier week-end ». Alors qu’il corrige les copies et se navre de tant de médiocrité et de vacuité chez des adolescents de seize ans qui n’ont rien d’autre à raconter qu’avoir mangé une pizza et regardé la télé, il tombe sur le texte de Claude Garcia. Le garçon raconte comment, après avoir, depuis un banc dans un parc, observé une maison et ses occupants durant tout l’été, il a élaboré une stratégie pour pouvoir y être invité. Une fois dans la place, sous prétexte d’aider le fils de la famille nul en maths, il raconte l’intérieur, les personnages, le parfum parti-culier de la femme de la classe moyenne… et de terminer par un mystérieux et promet-teur « À suivre… ». Interloqué par l’ima-

gination et le style du garçon, Germain va reprendre goût à l’enseignement, prendre Claude sous son aile et l’encourager à pour-suivre son récit… mais l’intrusion de Claude dans cette maison de la classe moyenne en même temps que dans la vie de Germain va déclencher une série d’événements petit ) petit incontrôlables…Après Potiche et sa Deneuve virevoltante, le cinéaste nous entraîne avec juste ce qu’il faut de perversité bienveillante dans un thriller psychologique beau, intense et mélancolique qui distille une tension savamment dosée. C’est limpide, simple, d’une redoutable efficacité, sans insistance psychologisante, c’est cocasse et finalement émouvant, un pur plaisir de cinéma pour les spectateurs pas totalement innocents que nous sommes.

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12, 13&14oct. 2012

de Saint-Étienne

PLACES JACQUARD & JEAN-JAURÈS

La mémoire d’une ville

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Gérard Mordillat, parrain de la 27e

Fête du LivreCette année, la Fête du Livre accueille un parrain écrivain et cinéaste. Avec son équipe et ses comédiens, assistez

“Le Grand Retournement” qui raconte la crise comme vous ne l’avez jamais vue, tout en alexandrins d’après un texte de l’économiste Frédéric Lordon. Avec François Morel, Jacques Weber, Edouard Baer : un casting d’enfer !!!

Ateliers BDVous êtes fan de BD etrêvez de vous retrouverdans l’atelier de vos auteurs préférés, dans le secret de leur art ? C’est possible ! Inscrivez vous vite aux ateliers BD de l’École d’Architecture pendant la Fête du Livre !

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Le cercle vicieuxdes Roms

Roanne, un fauteuilpour deux

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Jeune Public

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Sommaire

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Le grand-père nous accueille dans sa grotte bleue, pour de nouvelles confidences. Il restait encore de beaux souvenirs de l’enfance de Kirikou à évoquer : les moments où il a aidé les hommes et les femmes de son village et d’ailleurs… Il nous raconte alors comment Kirikou, grâce à sa bravoure et son intelligence, est venu au secours de la femme forte, dont le toit de la case avait été détruit par Karaba. Il nous apprend par quelle astuce le petit héros a retrouvé le vieux grincheux, qui s’était égaré dans la savane, puis comment une griotte menacée par la sorcière a finalement pu transmet-tre son savoir aux habitants du village. On découvre aussi le secret d’un mystérieux monstre bleu, et enfin, grâce à une flûte liée à la famille de notre héros petit et vaillant, le pouvoir magique de la musique.

Film japonais de Mamoru Hosoda (2012 - 1h57min - VF et VOST)

Hana et ses deux enfants, Ame et Yuki, vivent discrètement dans un coin tranquille de la ville. Leur vie est simple et joyeuse, mais ils cachent un secret : leur père est un homme-loup.

Film français de Jean-Christophe Dessaint (2012 - 1h36min)+ D’INFOS PAGE 23

Le fils Courge vit au cœur de la forêt, élevé par son père, un colosse tyrannique qui y règne en maître et lui interdit d’en sortir...

Film britannique de Uwe Heidschötter,

Johannes Weiland (2012 - 43min - VF)+ D’INFOS DANS LA

GAZETTE DE NOVEMBRESon papa l’a averti : en aucun cas, le Petit Gruffalo n’a le droit d’aller se promener seul dans les bois profonds. C’est bien trop dangereux !

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Damien, professeur de civilisation chinoise, vit avec sa femme, Iva, metteur en scène de théâtre, et leur fils Noé. Leur histoire d’amour s’est enlisée dans une routine empreinte de lassitude. Pour éviter à une certaine Zorica d’être expulsée, Damien se trouve un jour piégé par Iva, qui le somme de demander l’aide de son père, conseiller d’État, avec lequel il entretient une relation plus que distante. Cette mission hasardeuse plonge Damien dans une spirale qui va boule-verser sa vie…Superbement écrit et conduit comme nous l’avons souligné d’entrée, d’une invention et d’une drôlerie permanentes, Cherchez Hortenseest porté par un extraordinaire Jean Pierre Bacri, qui trouve ici un de ses meilleurs rôles, bien au-delà de la figure du perpétuel bougon auquel on le réduit parfois : désenchanté, fatigué, puis bousculé, chamboulé, rendu à sa pleine humanité. A son côté, Claude Rich est fabuleux en haut fonctionnaire cynique et manipulateur, odieux par choix et menteur par volupté : les face à face père-fils nous réservent quelques beaux moments drolatiques. Et puis Isabelle Carré, et puis Kristin Scott Thomas, et puis Jackie Berroyer en copain suicidaire et dostoïevskien : tous impeccables !

Avec Block Party et Soyez sympas, rembobinez, le nouveau Gondry forme une sorte de trilogie urbaine (plutôt new yorkaise) où le réalisateur français fait du brassage ethnique la matière même d’un cinéma social, coloré, décalé et touchant.Dernier jour de classe dans une école de NYC. Les élèves récupèrent leur téléphone portable à la consigne avant de monter dans le bus qui les ramène chez eux. Excités par ce sas de décompression entre l’école et le foyer parental, les jeunes y mettent vite « le bronx ». Très vite, des archétypes apparaissent : la bande des durs à l’arrière, la fille mal aimée, la tête de turc, les deux gays, le couple scotché par la bouche, les deux fausses bonnes copines (la belle et la moche), les musicos… Mais Gondry évite la suite de vignettes, et s’il passe de l’un à l’autre, il tient jusqu’au terminus les histoires de chaque personnage en faisant la part belle aux maladroits, aux silencieux et aux discrets : ceux qu’on ignore généralement au cinéma comme dans la vie.

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Les films

Treize comédiens, de Mathieu Amalric à Lambert Wilson en passant par Sabine Azéma, Anne Consigny ou Michel Piccoli, sont réunis dans la maison d’un metteur en scène fraîchement décédé. Celui-ci leur confie une mission testamentaire : assister à la captation d’Eurydice, pièce de Jean Anouilh, jouée par une jeune compagnie et, selon leur avis, donner leur aval à celle-ci. La projection à peine commencée, les « anciens » ne peuvent s’empêcher de rejouer à leur tour la belle et triste histoire d’amour d’Orphée et Eurydice... Voilà pour le résumé de Vous n’avez encore rien vu, qui porte bien son titre car ledit résumé justement n’est qu’une indication d’usage. Il s’agit d’un film d’Alain Resnais. Or Alain Resnais ne fait rien comme personne, s’affranchit de tout consensus, met en scène comme bon lui semble ; et il a bien raison, car le résultat est excellent. À la captation ultra-moderne et pertinente mise en image par Bruno Podalydès et projetée aux comédiens, Resnais oppose sa vision du cinéma et du théâtre où tout est faux sauf les sentiments. « Oppose » est impropre, d’ailleurs. Resnais n’est pas un donneur de leçons. Au contraire. Il propose, il offre, il transmet. Il joue avec les corps, malaxe les images, use du splitscreen (écran partagé en plusieurs images), ferme un plan à l’œilleton, trafique grossièrement des incrustations... Bref, il s’amuse !

Bram ou Seulela peinture Le Noir et le Bleu

Tarif :

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Quelque part aux Philippines, des terroristes islamistes kidnappent un groupe d’Occidentaux et de Philippins, touristes et travailleurs sociaux. Alors qu’elle apporte des provisions au siège d’une ONG en compagnie d’une autre bénévole philippine, Thérèse Bourgoine, citoyenne française qui travaille dans l’humanitaire, est kidnappée à son tour. Pour eux commencent des mois de captivité et de cohabitation avec des ravisseurs souvent très jeunes, tout autant qu’avec une jungle hostile…Captive s’inspire de faits réels : en 2001 survinrent aux Philippines plusieurs enlèvements et prises d’otages, dont celle de l’hôtel Dos Palmas à Palawan, perpétrée par le groupe Abu Sayyaf. La séquence inaugurale nous plonge d’emblée dans la violence de l’attaque : la caméra de Mendoza se faufile dans les chambres et les embarcations avec une énergie sidérante, très proche du reportage. Nous assistons au moindre détail d’une prise d’otages en temps réel, nous en devenons d’ailleurs nous-mêmes captifs, désireux de connaître l’issue du drame.

C’est pour nous LA comédie française de l’année : Camille a rencontré Eric à 16 ans, il fut le premier et le dernier homme de sa vie. Ils sont tombés fous amoureux et, encore adolescents, ont eu une fille. La mère de Camille n’a jamais su qu’elle allait être grand-mère, elle est morte quelques heures avant que Camille le lui annonce… Aujourd’hui, Camille est une quadra pas complètement épanouie : sa vie amoureuse part en eau de boudin, elle a un peu mal dans une carrière d’actrice ratée, elle picole et finit par se faire larguer par l’homme de sa vie… Alors qu’elle file seule à la fête du nouvel

an chez des amies, aux douze coups de minuit, elle s’évanouit et se réveille transportée dans son passé eighties. Elle retrouve ses parents, ses copines de lycée, etc… Elle a son corps de femme mûre, elle n’a rien perdu de l’expérience des années. Autour d’elle, les proches, les profs, les mecs ne s’aperçoivent pas qu’elle n’est plus une ado et la traitent comme si elle avait 16 ans…Noémie Lvovsky réussit ici ce que beaucoup de cinéastes français essaient en vain de réaliser : un film à la fois grand public et osé. Elle nous livre LA comédie de l’année !

Luxembourg, 1984. Sur un coup de tête, Frank, 18 ans, quitte sa famille étouffante pour aller s’installer à Amsterdam. Le jeune homosexuel trouve refuge dans un cabaret, le House of Boys, dirigé par un patron autoritaire que tous surnomment Madame. Frank devient rapidement le danseur vedette du club, éclipsant Jake, un jeune Américain hétérosexuel. Subjugué par le charme de ce dernier, Frank met tout en œuvre pour le séduire et, contre toute attente, finit par y parvenir. Mais leur relation naissante prend une tournure dramatique lorsque Jake, à la suite d’une overdose, découvre qu’il est

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film + visioconférence avec le réalisateurJean-Claude Schlim

porteur du virus du sida, une nouvelle maladie mortelle que certains nomment le cancer gay…Misant sur une approche plus frontale qu’André Téchiné dans Les Témoins,House of Boys est pourtant beaucoup plus festif que son illustre prédécesseur en proposant une ode aux années 80 : époque aussi exaltante que douloureuse.

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Les films

1931. Au cœur de l’Amérique en pleine Prohibition, dans le comté de Franklin en Virginie, Etat célèbre pour sa production d’alcool de contrebande, les trois frères Bondurant sont des trafiquants notoires. Jack, le plus jeune, ambitieux et impulsif, veut transformer la petite affaire familiale en trafic d’envergure. Il rêve de beaux costumes, d’armes, et espère impressionner la sublime Bertha... Howard, le cadet, est le bagarreur de la famille. Loyal, son bon sens se dissout régulièrement dans l’alcool qu’il ne sait pas refuser... Forrest, l’aîné, fait figure de chef et reste déterminé à protéger sa famille des nouvelles règles qu’impose un nouveau monde économique. Lorsque Maggie débarque fuyant Chicago, il la prend aussi sous sa protection. Seuls contre une police corrompue, une justice arbitraire et des gangsters rivaux, les trois frères écrivent leur légende : une lutte pour rester sur leur propre chemin, au cours de la première grande ruée vers l’or du crime.Après son adaptation bouleversante, bien que trop paralysée par le respect absolu de l’œuvre littéraire, de La Route de Cormac McCarthy, John Hillcoat renoue en quelque sorte avec le western pour Des Hommes sans loi. Sur un scénario du fidèle Nick Cave, adapté du roman Pour quelques gouttes d’alcool de Matt Bondurant, il signe une chronique familiale dans la grande tradition du cinéma américain mariant western, film de gangster et grande fresque crépusculaire. Dans son approche des comportements humains, entre romance et violence, en dressant le portrait d’une génération qui s’éteint, comme dans Les Incorruptibles de De Palma, c’est l’histoire des Etats-Unis qui s’écrit à nouveau. Un pur plaisir de cinéma à l’ancienne.

(SUPER) HAMLET ~ Cie La Cordonneried’après Shakespeare - Ciné-concert dès 9 ans Samedi 13 octobre / 20 h 30

RAJERYMusiques du monde - Madagascar dès 8 ans Samedi 24 novembre / 20 h 30

L'AVARE ~ Cie Tàbola Rassad’après Molière - Théâtre d’objets dès 12 ans Samedi 16 février / 20 h 30

POUCET POUR LES GRANDS~ Cie Travelling théâtrede Gilles Granouillet - Théâtre

dès 7 ans Samedi 16 mars / 20 h 30

CUERDO ~ Cie La LoggiaCirque dès 6 ans Samedi 13 avril / 20 h 30

Ô ! ~ Cie En attendantThéâtre dès 4 ans Samedi 6 avril / 15 h 00

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Nathan (Pio Marmaï) est un beau et jeune glandeur parisien, dealer de beuh et, très accessoirement, Juif ashkénaze. La religion ne lui évoque qu’une vague denrée folklorique consommée au sein d’une famille dont il se tient à bonne distance ; et l’alyah,pratique consistant pour les juifs de tous les pays à tout quitter pour se mettre à disposition d’Israël, est aussi concevable pour lui que d’aller demander un conseil de reconversion professionnelle à la brigade des stups. Pourtant, c’est exactement ce que Nathan va décider d’entreprendre, du jour au lendemain, en saisissant l’opportunité d’ouvrir un restaurant avec son cousin en Israël. Lui qui connaît à peine le nom des fêtes juives, qui se moquait de son cousin parti faire son service militaire en Israël et qui ne parle pas un mot d’hébreu, va entamer le parcours du combattant pour rejoindre la Terre promise.Le film raconte le laps de temps qui s’écoule entre la décision de Nathan et son départ. Quelques semaines au cours desquelles il doit faire, au pas de charge, un bilan plutôt morose de sa plus si jeune existence. Côté carrière, il sait que son petit commerce se terminera un jour ou l’autre derrière les barreaux d’une cellule. Côté famille, le désastre est total, avec un père remarié et indifférent, une mère disparue, une lointaine cousine dont il était jadis amoureux et qu’il a du mal à oublier, et surtout un frère aîné (Cédric Kahn, qui campe ici un personnage aussi ambigu que génial !) qui passe son temps à se coller dans les ennuis et à lui soutirer de l’argent pour s’en sortir. Reste le volet sentimental, le plus délicat puisqu’il vient d’entamer une relation amoureuse avec une jeune femme (la belle Adèle Haenel) qui veut croire que l’amour qu’elle porte à ce garçon compliqué est la solution à tous ses problèmes.

Film français de Christian Vincent(2012 -1h35min) avec Catherine Frot, Jean D’ormesson, Hippolyte Girardot...

Hortense Laborie est une cuisinière réputée qui vit dans le Périgord. A sa grande surprise, le Président de la République la nomme responsable de ses repas personnels au Palais de l’Élysée. Malgré les jalousies des chefs de la cuisine centrale, Hortense s’impose avec son caractère bien trempé...

Film français de Kamir Meridja(2012 - 1h25min) avec Dub Inc.

Rude Boy Story est un documentaire sur le parcours musical atypique du groupe de reggae français Dub inc. : une bande de potes qui construit sa route hors des sentiers battus, en prônant l’indé-pendance et l’autoproduction, loin des circuits médiatiques traditionnels.

Film américain de William Friedkin (2012 -1h35min) avec Matthew McConaughey, Emile Hirsch...

Chris, 22 ans, minable dealer de son état, doit trouver 6 000 dollars ou on ne donnera pas cher de sa peau. Une lueur d’espoir germe dans son esprit lorsque se présente à lui une arnaque à l’assurance vie. Celle que sa crapule de mère a contractée pour 50 000 dollars.

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Les films

Que du bonheur ! Voici enfin la nouvelle fantaisie des réalisateurs du déjà réjouissant Little Miss Sunshine : Calvin (Paul-There-Will-Be-Blood-Dano !) est un jeune écrivain qui a fait une entrée fulgurante sur la scène littéraire grâce à son premier roman. Mais depuis ce premier best-seller qui a changé sa vie et celle de tas de gens, c’est l’angoisse de la page blanche : plus moyen de coucher la moindre lettre sur papier ! Ducoup la spirale de la loose commence à s’installer et Calvin devient de plus en plus paumé, asphyxié par cette célébrité qui lui sied si mal, dévasté par une vie amoureuse loin d’être au beau fixe, etc… Dans une ultime tentative pour l’aider à retrouver l’inspiration, son psy lui demande d’écrire sur sa rencontre avec une fille. Calvin s’exécute avec zèle, et se prend au jeu, imaginant les débuts d’une relation avec Ruby Sparks, ravissante demoiselle de 26 ans, indépendante, excentrique et surtout très joyeuse (exactement ce qui manque à Calvin, en somme). A la minute où il pense à cette compagne idéale, l’étincelle créatrice revient, et il se met à écrire sur elle, lorsqu’ un beau matin… Ruby apparaît dans sa salle à manger ! Est-ce une plaisanterie, la folie qui frappe ou de la magie ? Quoi qu’il en soit c’est incroyable. Soudain, Ruby est là, elle dort dans son lit, elle s’affaire dans sa cuisine. Tout en elle captive Calvin, et quelque chose de plus extraordinaire encore se révèle : il lui suffit de s’asseoir devant sa machine à écrire pour modifier la jeune femme selon sa volonté. Alors qu’il tente de maîtriser son pouvoir, Calvin est confronté à un dilemme majeur, à la fois comme écrivain et compagnon : que faut-il faire pour que cette relation née de son imagination fonctionne dans la vraie vie ?

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RAJERYSamedi 24 Novembre - 20 h 30FESTIVAL du FILM

de Saint-Étienne

8ème

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Infos sur www.festivalfaceaface.fr06 29 43 01 20

[email protected]

Au programme, première nuit du court métrage à la cinémathèque de Saint-Etienne le vendredi 23, projections documentaires et longs métrages,débat, grand spectacle cabaret «Madame Raymonde exagère» à la Comédie de Saint-Etienne le samedi 24...

CINÉPHILES ?

MOTIVÉ(E)S ?L’association FACE à FACE recherche des bénévoles pendant le Festival ainsi que son futur service civique à l’année !

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Lino, Jacques et Simon, trois truands déconcertés de ne plus trouver d’argent dans les banques, décident de s’adapter au plus vite. Leurs handicaps respectifs - Lino est myope, Jacques est sourd et Simon est bègue -, ainsi que le très bas quotient intellectuel de leurs lieu-tenants ne facilitent pas leur tâche. Ils estiment, après examen de la situation, que l’enlèvement de personnalités offre les meilleures chances de profit. La bande teste la chose sur Johnny Hallyday, qui en retire essentiellement un regain de publicité fort bienvenu. Peut-être est-ce une question de climat ? Les cinq gaillards s’envolent pour l’Amérique du Sud, où ils se saisissent d’un ambassadeur pour le compte d’un chef révolutionnaire...

Ça commence par une libération. Celle d’Alain, 48 ans, qui sort de prison et s’installe chez Yvette, sa mère, le temps de trouver du boulot. Cohabitation forcée qui fait ressurgir toute la «violence» de leur relation passée. Il découvre alors que sa mère est condamnée par la maladie. Dans ces derniers mois de vie, seront-ils enfin capables de faire un pas l’un vers l’autre ?Révélé au grand public grâce au succès inattendu mais mérité de son deuxième long-métrage Je ne suis pas là pour être aimé

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(2005), le réalisateur Stéphane Brizé a ensuite creusé plus avant son sillon d’un cinéma d’auteur intimiste avec l’excellent Entre adultes (2006), avant de nous bouleverser avec sa Mademoiselle Chambon, l’un des succès français de l’année 2009. Avec Quelques heures de printemps, il retrouve Vincent Lindon qu’il inscrit de nouveau dans un contexte social celui de la fin de vie. Sans jamais plomber son film d’un discours trop poussif, Brizé a également l’intelligence de ne pas céder à l’emphase mélodramatique qui pourrait enfermer un tel sujet mais ouvre quelques portes furtives à une délicate drôlerie. On en ressort la larme à l’œil sans avoir la désagréable sensation de se l’être fait arracher à coups de pathos.

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Matteo Garrone nous avait impressionnés avec Gomorra, plongée saisissante au cœur de la mafia napolitaine. Et il revient avec Reality, un film tout aussi puissant mais sur le registre de la comédie, qui a comme Gomorra remporté le Grand Prix du jury au Festival de Cannes. Le sujet est donc plus léger en apparence : la télé-réalité. Mais légèreté ne veut pas dire inconsistance : Garrone dresse le constat implacable d’une société gouvernée par le culte de l’image matraqué par les télévisions. Le film navigue entre illusion et réalité et s’arrête sur un personnage happé par la machine à décerveler. Entre conte de fées et comédie grinçante, le film s’inscrit en plein dans la grande tradition de la comédie italienne.Ça commence par un long plan séquence, la caméra vole, plane, tourne, virevolte tout en suivant une cérémonie de mariage dé-mesurée. Les mariés arrivent en carrosse, devant les grilles d’un château qui ressemble plus à celui de Barbie qu’au palais de la reine d’Angleterre. Et au moment où la fête bât son plein, un invité surprise fait une apparition aussi brève que fracassante : Enzo, gagnant d’un jeu de télé-réalité, est acclamé tel une star. Plus besoin d’avoir un quelconque talent pour être adulé du public et payé pour apparaître pendant un mariage huppé ! Dans un pays dirigé pendant très longtemps par un patron de télé-poubelle, pas étonnant… Ce n’est pas forcément mieux chez nous, me direz-vous, et vous aurez raison. L’histoire est très ancrée dans la réalité italienne, mais on pourrait la transposer dans n’importe quel pays « développé »… Après cette fantastique scène d’ouverture, la caméra s’arrête sur Luciano, poissonnier, infatigable tchatcheur et toujours de bonne humeur. Il use de son don naturel de comique pour faire marcher son petit commerce, au grand bonheur des habitués ; et de sa famille, qui profite aussi de sa gouaille et de son humour à la maison. Poussé par ses enfants à participer au casting de l’émission phare de télé-réalité en Italie Il Grande Fratello,Luciano finit par accepter, en n’espérant pas grand chose. Et puis, porté par tout son quartier qui croit en ses chances, il se prend au jeu, devient euphorique, avant d’être saisi par l’anxiété en attendant la réponse de la chaîne. Ensuite la paranoïa s’installe, il est persuadé que les gens de l’émission viennent l’observer en cachette pour vérifier s’il est un candidat valable…À plusieurs reprises, cette mise en scène immersive nous place dans la position des spectateurs-voyeurs de ces émissions de télé-réalité, démontrant par l’absurde le vide sidéral de ces programmes qui fleurissent pourtant sur tous les écrans. Mais comme disait l’autre, la télévision n’est que le reflet de notre société… et (mauvais) signe que les temps ont changé, les mythiques studios de cinéma de Cinecitta, où les plus grands cinéastes, pas seulement italiens, ont tourné, sont d’abord devenus le lieu où l’on enregis-tre Il Grande Fratello et toutes les émissions de télés débiles made in Italy… avant d’être aujourd’hui menacés par la spéculation immobilière… (Merci Utopia !)

Les films

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Grand PrixCannes 2012

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S’il signe les papiers de son divorce, Joby perd ses droits sur Ellen, sa petite fille de 6 ans. Musicien de rock, tout juste sorti de l’adolescence, il ne peut s’y résoudre même s’il la connaît à peine… Troisième film de la réalisatrice de Treeless Mountain (2009), ce portrait d’un père velléi-taire (Paul Dano, fragile, indécis, bouleversant) dit bien les rêves et les impossibilités de toute une génération. L’essentiel, ici, est dans les détails, les non-dits, la tris-tesse sourde des paysages enneigés, et la promesse d’une saison nouvelle. Plus douce.Voilà un film délicat et émouvant auquel Paul There Will Be Blood Dano apporte fêlures et rêves brisés. Un film déli-cat qui séduira les trop nombreux papas qui se retrouvent dans ce genre de situation…

Dans un resto de type fast food quelque part aux États-Unis, la gérante (Ann Dowd, formidablement convaincante : le tour de force du casting) reçoit un appel d’un homme qui se présente comme étant un policier. Il affirme que devant lui se trouve une cliente qui dit avoir été dérobée par une caissière, qu’il décrit en détail. Or, prétendant qu’il ne peut pour l’instant se rendre au resto et qu’il doit donc pouvoir compter sur la coopération de la gérante, il pousse celle-ci à fouiller son employée… Et ce n’est que le début d’une série de situations de plus en plus étranges…Si le film semble avoir pour question centrale « Jusqu’où iriez-vous pour obéir aux forces de l’ordre ? », ATTENTION SPOILER :nous nous posons vite une question bien différente : « Comment des gens apparemment sains d’esprit ont-ils pu aller aussi loin, sans jamais soupçonner, ne serait-ce qu’une seule fois, qu’il pourrait s’agir d’un canular ? » Et pourtant…Pour info, non seulement Compliance nous apprend que pas moins de 70 (70!!!) incidents similaires ont été recensés en dix ans dans trente États américains, mais on trouve sur Wikipédia (http://en.wikipedia.org/wiki/Strip_search_prank_call_scam) une description détaillée du véritable crime, qui a eu lieu en 2004 au Kentucky et a finalement mené à l’arrestation de son auteur ; et on jurerait lire le scénario du film ! Au pays de l’Oncle Sam tout est décidemment possible… et chez nous ?

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Voici une remarquable comédie sur la crise financière, pour en rire après en avoir peut-être pleuré...Adapté de D’un retournement à l’autre, la pièce à succès de l’économiste Frédéric Lordon, cette histoire d’aujourd’hui se raconte en alexandrins. C’est tragique comme du Racine, comique comme du Molière…C’est la crise, la bourse dégringole, les banques sont au bord de la faillite, le crédit est mort, l’économie se meurt... Pour sauver leurs mises les banquiers font appel à l’État. L’État haï est soudain le sauveur ! Les citoyens paieront pour que le système perdure, que les riches restent riches, les pauvres - pauvres…Sous la direction de Gérard Mordillat (parrain de la 27ème Fête du Livre), François Morel, Jacques Weber et Edouard Baer y incarnent président, conseillers et autres banquiers pour mettre au jour les dérives d’un système qui marche sur la tête.

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CHRONIQUES 2009-2011

L’air de rien

18 h : avant-première exceptionnelle du film LE GRAND RE-TOURNEMENT en présence du réalisateur Gérard Mordillat et du comédien François Morel (sortie nationale du film le 16 janvier)

à l’issue de la projection au Méliès Café : > François Morel signera L’air de rien ses chroniques sur France Inter publiées chez Denoël. Il est comédien, metteur en scène, chanteur et chroniqueur de radio. Il alterne entre spectacles personnels et théâtre de répertoire. > Gérard Mordillat, parrain de la FDL 2012, signera Ce que savait Jennie publié aux éditions Calmann Lévy. Il est romancier et cinéaste. Il a, entre autres, publié Vive la Sociale !, L’Attraction universelle, Rue des Rigoles. Pour l’occasion, le Méliès Café recevra également une ex-position de photographies et d’estampes du Chef opérateur François Catonné.

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Soyons excessifs et disons le tout net, cette satire impitoyable est la chose la plus jubilatoire, la plus irrévérencieuse qu’on ait vue cette année. Jubilatoire parce que, par le biais de la comédie, les héros de God bless America accomplissent ce dont secrètement on a toujours rêvé : dézinguer, pulvériser, atomiser, écrabouiller, réduire à néant les cons malfaisants, alors qu’on se croit souvent obligé de s’épuiser à tenter d’éveiller les quelques neurones qu’il leur reste..Les deux anges exterminateurs du film n’étaient pourtant pas faits pour purger l’Amérique de ses boulets. Frank (génialement incarné par Joël Murray, petit frère de Bill) est un père divorcé un peu loser, qui fait depuis des années le même métier de bureau barbant et dépense tout son argent pour faire plaisir à son insupportable gamine qui le harcèle pour avoir les jouets numériques dernier cri. Il se trouve que Frank a une éthique et déteste de plus en plus le monde qui l’entoure : ses voisins qui laissent brailler leur bébé et préfèrent commenter les derniers potins people, les discussions absurdes de ses collègues sur des vidéos qui tournent en boucle sur le net montrant un pauvre attardé mental qui se ridiculise devant le jury obscène d’une émission genre Nouvelle Star, etc....Pour l’instant Frank se tait et tente de survivre… Jusqu’à ce qu’il apprenne la même semaine qu’il est : 1/ viré pour harcèlement sexuel simplement parce qu’il a offert des fleurs à la standardiste pour laquelle il en pinçait, et 2/ atteint d’une tumeur au cerveau en phase terminale. C’est le déclic, il achète à un VRP en armes de guerre un AK 47, l’arme préférée des résistants afghans, et ça va dézinguer sévère ! Il va être rejoint dans sa croisade civilisatrice par Roxy, une ado qui ne supporte justement plus d’être une ado américaine et on la comprend quand on voit ses copines. Et c’est parti. Leurs cibles : une merdeuse irascible vedette d’une téléréalité qui hurle de colère parce que ses parents ne lui ont pas acheté un 4x4 ; un présentateur télé néo conservateur qui insulte tous ses invités un tant soit peu progressistes ; des militants anti avortement ; des jeunes abrutis qui mangent du popcorn et parlent fort au cinéma (cette scène de massacre nous réjouit évidemment tout particulièrement). Le film est hilarant et ne fait pas de cadeau, autant dans les scènes de flingage (rassurez-vous, on est plus dans le cartoon que dans le film d’horreur) que dans les dialogues où tout le monde en prend pour son grade.Et s’il n’y avait qu’une seule bonne raison de courir voir God bless America, ce serait le traitement de choc qu’il réserve à la télé poubelle, sa bêtise crasse, sa bassesse sans vergogne, les ravages qu’elle peut faire auprès d’un public trop manipulé et trop paresseux pour aller voir ailleurs. Rien que pour cette entreprise de démolition sans appel, le film de Bobcat Goldthait (inconnu en France mais équivalent américain de notre Didier Porte) est de salubrité publique. (Merci Utopia !)

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Les films

Ada avait construit sa vie, elle en était contente, en tout cas elle croyait l’être. Elle avait l’air heureuse en couple, avait eu un enfant, prévoyait même de se marier, et pof... elle était tombée sur Paul... Un écrivain, en plus, ce Paul, et qui vit seul avec sa fille, a une mère des plus envahissante et a la mauvaise idée de perdre son père alors que cette histoire commence à peine... La vie s’accélère. Il était temps.Les acteurs font souvent de bons réalisateurs car ils savent aller à l’essentiel, au cœur de chaque scène. Louis-Do de Lencquesaing confirme cet axiome presque infaillible. C’est la petite musique discrète du cinéma français qu’on entend dans son film, l’axe Truffaut-Rohmer-Sautet : Truffaut pour la voix off et les dialogues très littéraires, Rohmer pour le marivaudage des cœurs, Sautet pour le passage du témoin et les choses de la vie. Sans faire d’esbroufe inutile, en toute finesse, cette petite musique attachante et fragile s’impose dans nos cœurs et fait vraiment du bien.

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RenseignementsMaison de la Culture Le Corbusier04 77 100 777

Un spectacle sensible sur la mémoire et nos souvenirs qui entremêle théâtre danse et photographie

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Avec Savages, Oliver Stone délaisse la fresque politique balourde et retrouve une cer-taine vigueur avec une série B sexy et toxique. Après une décennie consacrée à aborder les grands problèmes du monde contemporain avec un sérieux de bénédictin, Oliver Stone revient avec Savages à quelque chose de plus léger. Plus léger, façon de parler : le film s’ouvre sur une décapitation dans une cave au Mexique, là où sévit la guerre des cartels, l’une des plus meurtrières au monde. Mais l’acte est filmé avec détachement, de façon presque badine, puis regardé par deux surfeurs californiens confortablement assis derrière leur ordinateur, pétard et paréo à portée de main. L’effroi les saisit bel et bien, mais disparaît aussi vite, le temps d’un clic. Snuff zapping. On reconnaît là le réalisateur de Tueurs nés, pour qui la violence est une pop song anodine que les Américains fredon-nent entre un burger et un reality-show, une tare congénitale dont il convient, à défaut de pouvoir l’endiguer, de saisir la mécanique infernale. Les sauvages promis par le titre se distribuent ainsi des deux côtés de la frontière, bien que les uns soient foncièrement plus sympathiques que les autres – Stone demeure un « patriote ». Au Nord donc, Taylor Kitsch, Aaron Taylor-Johnson et Blake Lively (scrutée avec un œil dégoulinant de désir) mènent la belle vie à Laguna Beach, formant un ménage à trois et vendant, en toute légalité, la meilleure herbe du comté. Au Sud, Salma Hayek et Benicio Del Toro (tous deux excellents, cabotinant juste ce qu’il faut) dirigent l’un des plus gros cartels du pays et s’intéressent de près au business florissant de leurs collègues étasuniens. La guerre est déclarée, elle sera sans pitié… (merci Les Inrocks !)

La Pirogue retrace la tentative d’une trentaine d’Africains (guinéens, dakarois...) de rallier l’Espagne depuis la côte ouest de l’Afrique, entassés dans une pirogue. Un périple extrêmement risqué, qui coûte chaque année la vie à plusieurs centaines d’hommes et de femmes livrés aux intempéries, exactions de leur passeur et conditions de vie déplorables, avant d’atteindre l’Europe, et bien souvent d’être directement renvoyés là d’où ils viennent. C’est donc à un phénomène à la fois largement connu de la plupart des spectateurs, puisque - partie intégrantes de débats et de politiques électoralistes diverses depuis plusieurs décennies - et largement fantasmé, faute d’images, de té-moignages, ou tout simplement de véritable information à la portée du grand public.

Aprés le film le Collectif du 17 Octobreanimera un débat sur ces personnes qui risquent leur vie pour essayer de venir en Europe. Qui sont-ils ? Quel est leur parcours ? Que deviennent-ils ?Soirée avec la participation de laCimade et de la Passerelle.

La chronique de cet exil vers un monde autre plutôt que meilleur aurait pu n’être qu’un énième film destiné à panser des plaies, témoigner sincèrement mais un peu naïvement des souffrances d’autrui. Et si La Pirogue accomplit largement cette mission, il a aussi l’intelligence de ne pas s’y limiter. En effet, le pathos est absent de cette aventure cruelle, et si compassion il y a, elle ne pourra venir que de nous, le film se gardant bien de nous tendre le mouchoir pour pleurer, préférant l’analyse des faits au chantage émotionnel. La Pirogue nous permet ainsi, à nous autres spectateurs occidentaux non pas de comprendre les mécanismes de cette immigration sauvage (nous les connaissons depuis belle lurette) mais de ressentir une part de l’urgence et de la terrible absence de choix vécue par les migrants.

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Les nouveautés de la semaine : Elle s’appelle Ruby ; Kirikou 3 ; Después de Lucia ; Reality ; L’aventure c’est l’aventure

les musiques que vous entendez en

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Resister, c'est exister

Mardi 9 octobre 201220 h

Nouvel Espace Culturel9 rue Claudius Cottier42270 St Priest en Jarez04 77 74 41 [email protected]

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Les nouveautés de la semaine : For Ellen ; Compliance ; Quelques heures de printemps ; Le grand retour-nement ; God bless America ; Le 7ème continent ; Benny’s video ; 71 fragments...

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Les nouveautés de la semaine : La Pirogue ; Au galop ; Le magasin des suicides ; César doit mourir,

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Les nouveautés de la semaine : Savages, Les jour des corneilles, De l’encre, Funny Games,Pauline Détective

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Les horaires

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Les nouveautés de la semaine : J’enrage de son absence, Une famille respectable, Do not disturb, Frankenweenie

les musiques que vous entendez en

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Théâtre de la prison de Rebibbia. La représentation de Jules César de Shakespeare s’achève sous les applaudissements. Les lumières s’éteignent sur les acteurs redevenus des détenus. Ils sont escortés et enfermés dans leur cellule. Mais qui sont ces acteurs d’un jour ? Pour quelle faute ont-ils été condamnés et comment ont-ils vécu cette expérience de création artistique en commun ? Inquiétudes, jeu, espérances... le film suit l’élaboration de la pièce, depuis les essais et la découverte du texte jusqu’à la représentation finale. De retour dans sa cellule, Cassius , prisonnier depuis de nombreuses années, cherche du regard la caméra et nous dit : « Depuis que j’ai connu l’art, cette cellule est devenue une prison ».Fortement marqués par le maître du néo-réalisme Roberto Rossellini, les frères Taviani, fils d’un avocat antifasciste de San Miniato en Toscane, ont toujours pratiqué un cinéma engagé, ancré dans la réalité sociale de leur pays ; ils signent ici leur film le plus humain. Non dénué d’un certain humour car la plupart des «acteurs» ayant à purger des peines allant de 14 ans à la perpétuité ajoute à l’intensité dramatique de la tragédie shakespearienne. La séance de casting, partie intégrante du film, avec les essais des détenus devant la caméra, est particulièrement savoureuse : y défile une humanité sans femmes, condamnée à de lourdes peines pour meurtres, trafic de drogue, contraventions multiples aux lois anti-mafia.

C’est notre grand coup de cœur de l’année ! Un film magique, magnifique que nous offrons en avant-première exclusive aux étudiants stéphanois grâce à la complicité de la Mission Jeunesse-Vie étudiante de la Ville de Saint-Etienne, dans le cadre de la désormais immanquable opération de rentrée Sainté accueille ses étudiants (SASE pour les initiés). « Quand le cinéma est beau comme le vôtre, quand les films sont beaux comme le vôtre, cela rassemble » a déclaré la présidente du jury Sandrine Bonnaire à ce jeune réalisateur new-yorkais à la cérémonie du palmarès du Festival du Cinéma américain de Deauville 2012 où Les bêtes du sud sauvage a été couronné du Grand Prix. C’est en effet un des pouvoirs magiques du cinéma que de pouvoir rassembler ainsi des spectateurs différents dans un tourbillon d’émotions agréablement dévastateur. Comme The Artist présenté en avant-première SASE l’an dernier, Les Bêtes du Sud sauvage est le grand film qui devrait faire l’unanimité du public cette année. C’est un film universel, audacieux et dense, un hymne à la vie et l’espoir, au doux refuge de l’imaginaire aussi quand la réalité devient trop violente, un film d’une beauté flamboyante qui vous emmènera loin et vous accompagnera longtemps après sa découverte. Voix off sublime et magnifiquement écrite, regard tendre et percutant sur l’humanité, musique magique et envoûtante, Les Bêtes du Sud sauvage est à l’image de son affiche, un feu d’artifice d’émotions !

Ours d’OrBerlinale 2012

Entrée réservée aux étudiants et offerte par la Ville de Saint-Etienne dans le cadre de SASE (+ d’infos page 31 de cette gazette ou sur www.saint-etienne.fr/sase)

*sur présentation de votre carte et dans la limite des places disponibles

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Les films

Bienvenue dans l’univers poétique et drôle du Jour des corneilles, un film superbe, sorte de Miyazaki à la française, à montrer à tous les mômes pour peu qu’ils aient au moins 6 ans, et que tous les grands un peu curieux devraient aussi voir, parce qu’il touche nos cœurs de grands enfants et parle avec simplicité des chemins qui s’offrent à nous pour choisir le monde de demain…C’est l’histoire d’un Père et de son Fils, d’un homme des bois et de son enfant sauvage : pas de maison mais une cabane au cœur de la forêt, pas de supermarché mais la chasse au sanglier pour se rassasier, pas de balançoire mais les branches des arbres pour s’amuser. Père et fils vivent ainsi depuis la naissance du petit : une vie de famille un peu particulière où les tapes viriles dans le dos se pratiquent plus que les bisous. C’est que le Père n’est pas du genre rigolard… avec lui, c’est un peu l’esprit de la jungle qui règne en maître : être la proie ou le prédateur, celui qui mange ou celui qui est mangé ! Le Père Courge, c’est un peu un mélange de Barbe Bleue, de Don Quichotte et du Papa Noël.Tout aurait pu continuer dans la cabane au rythme des saisons si le Père n’avait pas eu la mauvaise idée de faire une mauvaise chute, perdant en même temps la conscience et l’usage de ses jambes… Ignorant tout de la société des hommes, le Fils est donc obligé de se rendre au bout du bout du bout de la forêt, à la limite de son monde, là où les arbres laissent place aux poteaux électriques, aux voitures pétaradantes, aux tuiles des maisons. C’est ici et seulement ici que l’on pourra guérir son papa, dans cet endroit interdit où il ne faut jamais aller…

« Vous avez raté votre vie, avec nous, vous réussirez votre mort ! ».Imaginez-vous une ville sinistre où les gens n’ont plus goût à rien. Dans le magasin de la famille Tuvache, on ne vend plus que poisons et cordes pour se pendre. Mais la patronne vient d’accoucher d’un enfant qui est la joie de vivre incarnée…Jadis dessinateur de BD, Patrice Leconte (le réalisateur des Bronzés et de Ridicule) revient à ses premières amours avec ce film d’animation adapté du célèbre livre éponyme de son ami Jean Teulé.Le Magasin des suicides version Leconte devient donc une comédie musicale d’animation au ton grinçant, qui met en scène une famille dépressive vendant du matériel pour se suicider et dont le quotidien va être bouleversé par l’arrivée de ce bambin joyeux et optimiste qui sèmera vite la zizanie pour notre plus grand plaisir de spectateurs. Car comme le livre, le film est un cocktail d’humour noir et de situations absurdes : « Avec la crise qui vous défrise, quoi de plus doux qu’une mort exquise », répète le père Tuvache dans la première chanson. Tout est dit !

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Avec une mère actrice et un père metteur en scène, Michael Haneke baigne très jeune dans un univers artistique. Tout en étudiant la philosophie et la psycho-logie, il commence à monter des pièces de théâtre, notamment à partir de 1967 pour la Südwestfunk Theater Company. En 1970, il se lance comme indépen-dant, et en 1973 débute à la télévision avec After Liverpool. Son premier long métrage, Le Septième Continent, sort au cinéma après avoir été refusé par les chaînes de télévision. Ce film inaugure une trilogie sur la « glaciation émotion-nelle », bâtie sur les constats du dévelop-pement de la violence dans les sociétés modernes. Elle est sélectionnée pour la Quinzaine des réalisateurs. Le deuxième volet, Benny’s Video sort en 1992, suivi en 1994 de 71 Fragments d’une chrono-logie du hasard. Funny Games crée une onde de choc sur la Croisette en 1997. Devenu alors l’un des grands réalisa-teurs du cinéma européen, il fait tourner Juliette Binoche dans Code inconnu en 2000, et la consécration arrive l’année suivante avec La Pianiste, couronné par le Grand Prix du Festival de Cannes. Isabelle Huppert et Benoît Magimel en sont les protagonistes. Après Le Temps du loup présenté hors compétition en 2003, Michael Haneke revient en com-pétition au Festival de Cannes en 2005 avec Caché (Prix de la Mise en scène) et triomphe en 2009 en emportant la Palme d’Or avec son éblouissant Ruban blanc. De nouveau à Cannes en 2012, il y présente Amour avec Jean-Louis Trin-tignant, Emmanuelle Riva et Isabelle Huppert. Le film reçoit la Palme d’Or, la deuxième pour Haneke.

Focus Michael Haneke

Film autrichien de Michael Haneke (1992 - 1h45min - VOST) avec Arno Frisch, Angela Winkler, Ulrich Mühe...

Interdit aux moins de 16 ansBenny est un ado passionné de vidéo et fasciné par la violence. Au début du film on le voit par exemple regarder sur son écran la mise à mort d’un cochon dans une ferme, scène qu’il a lui-même filmée. Au vidéo-club, il rencontre une jeune fille qu’il emmène dans sa chambre...

Film autrichien de Michael Haneke (1995 - 1h35min - VOST) avec Lukas

Miko, Udo Samel, Gabriel Cosmin Urdes...La veille de Noël 1993, un étudiant de 19 ans tue, sans motif apparent, plusieurs persones lui étant totalement étrangères. Qu’est-ce qui rapprochait victimes et assassins ?

Film autrichien de Michael Haneke (1978 - 1h43min - VOST) avec Susanne

Lothar, Ulrich Mühe, Arno Frisch...Interdit aux moins de 16 ans

Une famille composée d’un couple et de leur fils passe ses vacances au bord d’un lac. Deux jeunes hommes leur rendent visite sous un prétexte futile. Ils les séquestrent et leur font vivre un enfer...

Film autrichien de Michael Haneke (1989 - 1h44min - VOST) avec Birgit

Doll, Dieter Berner, Udo Samel...Interdit aux moins de 16 ans

Le film raconte trois ans de la vie de Georg, de sa femme Anna et de leur fille Eva : c’est l’histoire d’une famille, l’histoire d’une réussite professionnelle, l’histoire du prix à payer pour le conformisme, l’histoire d’un aveuglement mental.

9 euros le pass 3 films ou film à l’unité aux tarifs habituels

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Palme d’OrCannes 2012

Dans le cadre de LA PETITE SEANCE, notre nouveau rendez-vous mensuel en partenariat avec le journal LE PETIT BULLETIN Séance présentée par Christophe Chabert (Critique cinéma au Petit Bulletin)

Prologue. La porte d’entrée d’un bel appartement parisien que l’on enfonce. Des pompiers surgissent. On comprend à leur moue que l’odeur est insoutenable. Puis il y a une pièce calfeutrée. Une chambre avec un lit et le corps d’une vieille dame endormie pour l’éternité. Morte depuis quand ? Des heures ? Des jours ? Elle est soigneusement vêtue et maquillée avec des pétales de fleurs qui entourent sa tête apaisée. Le mot « Amour » surgit plein cadre sur fond noir. Tout est dit ou presque.On pressent l’humour pince sans rire et l’ironie souvent brutale du cinéaste autrichien poindre déjà le bout de son nez. Et puis non, le film qui commence se veut doux mais intranquille, calme malgré l’odeur de mort qui nous a déjà étreints. Presque rassurant ! Et pourtant nous ne sortirons jamais de cet appartement. Amour est l’histoire d’un vieux couple. Elle est malade, bientôt impotente. Lui fait ce qu’il peut pour gérer et accepter le lent processus de la vie et donc de la mort. Elle, c’est Anne : Emmanuelle Riva, qui n’avait rien vu à Hiroshima. Lui, c’est Georges : Jean-Louis Trintignant que l’on a tous vu chez Truffaut, Bertolucci, Scola, Rohmer, Audiard... Ils forment ici un couple amoureux, élégant, lettré, fin, poli. Dans le grand appartement on écoute des impromptus de Schubert, on lit beaucoup, on reçoit un élève concertiste ou bien leur fille (Isabelle Huppert forcément!) Le film dont on connaît l’irrémédiable finalité, avance avec une précision absolue, un sens du dialogue magnifique d’expressivité et puis finit par questionner, comme souvent chez Haneke et dans tous les grands films en général, notre regard.Le vieil homme ferme la porte pour ne pas exposer aux proches l’état délabré de sa femme. La caméra, elle, enfreint cet interdit et nous place à une distance évidemment troublante. Et puis il y a ces séquences où le vieil homme se perd dans un cauchemar, raconte des souvenirs d’enfance, tente d’attraper un pigeon... Des moments poétiques, romanesques, beaux comme un poème animé. Il arrive qu’une vie trouve une conclusion qui ressemble à son déroulement : celle de Georges et Anne était tissée d’har-monie et d’accords sublimes. C’est magnifique, et curieusement apaisant, comme si la lucidité bienveillante de Haneke, en se coulant dans le rythme d’une vie qui s’essouffle, donnait à sentir encore plus fortement combien chaque moment qui reste est précieux. C’est très fort, très beau, et il faut dire et redire qu’Emmanuelle Riva et Jean Louis Trintignant sont impressionnants d’intensité, et que leur histoire avec le cinéma a laissé une telle empreinte qu’elle enrichit d’une émotion encore plus puissante cette histoire de vie et d’amour indestructible. Un chef-d’oeuvre tout simplement !

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De l’encre, sombre et acide, au goût de fiel, le duo de La Rumeur, Hamé et Ekoué, en a souvent jeté sur papier. Dans cette première réalisation en tant que cinéastes résonne leur esprit de résistance à la raison du plus fort, à la domination imposée d’en haut. Leur personnage principal – une rappeuse installée dans le XVIIIe arrondissement de Paris, Nejma (Karine Guignard) – se frotte au monde âpre des majors qui contrôlent le business du disque. Poussée par le directeur artistique cynique du label Remake à devenir “ghostwri-ter” pour un slameur en vue dans les médias, la rappeuse découvre la contradiction entre son éthique personnelle (l’écriture de textes purs et intenses) et le principe de réalité du marché (l’écriture de rimes pourries censées plaire au plus grand nombre).Le cas de conscience de Nejma se déploie au cœur d’une industrie musicale contre laquelle se débat avec hargne son ami et produc-teur intransigeant depuis toujours, Romuald (Reda Kateb, magnétique comme à son habitude). Derrière l’affrontement entre le pur et l’impur, la culture indé et le business sans foi ni loi, le rap hardcore et le slam tous publics, la périphérie et le centre, on devine les combats artistiques de La Rumeur en même temps que ses convictions politiques en faveur de la marge et de l’ombre contre le fait majoritaire. Porté par son sincère élan militant, De l’encre n’évite pas totalement la tentation des caricatures, tant des maisons de disques réduites à de pures et sales machines à fric, que des médias où se promeuvent les produits et les idées les plus frelatés. Il faut simplement prendre acte du signe de la satire sous lequel se situe ouvertement le film, dont chaque partie, même infime, est nourrie d’un esprit critique à fleur de peau. Pour autant, sous le poids du regard intransigeant qu’ils portent sur les moeurs culturelles et sociales de leur époque, transpire aussi un geste assez audacieux de mise en scène. Bien que parfois un peu bancale, la réalisation de Hamé et Ekoué tente de transposer à l’écran quelque chose de l’énergie vitale du rap… (merci les Inrocks !)

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Une cité de banlieue ordinaire. La présence des forces de l’ordre dans le quartier débouche, le soir venu, sur un affrontement entre les jeunes et la police. L’aîné d’une famille sans père, fils illégitime et asthmatique, est envoyé par sa mère à la recherche de Mehdi, le cadet de 17 ans, l’enfant aimé…« Les rapports du ministère de l’Intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété », cette simple phrase qu’avait déclaré Hamé en avril 2002 dans le fanzine de La Rumeur qui accompagnait la sortie de l’album L’Ombre sur la mesure, lui a valu 8 ans de procédure judiciaire face au ministère de l’intérieur à l’époque dirigé par Nicolas Sarkozy. Aussi qu’après 8 années qui lui ont coûté en temps, en énergie et en nervosité, ce dernier opus filmique du MC de La Rumeur soit le seul film français en lice cette année dans la compétition court-métrage du prestigieux Festival de Cannes est en soi synonyme de victoire pour une certaine liberté d’expression.

Projection de CE CHEMIN DEVANT MOI suivie de CE CHEMIN DEVANT MOI suivie de CE CHEMIN DEVANT MOI DE L’ENCRE en présence de Hamé & Ekoué et animée par le duo infernal Mehdi Baouzzi et Nicolas DE L’ENCRE en présence de Hamé & Ekoué et animée par le duo infernal Mehdi Baouzzi et Nicolas DE L’ENCRECostanzo (la rumeur court qu’ils seraient les réincarnations stéphanoises de Tupac et Biggie... ou Laurel et Hardy... enfin à vous de voir !)

soirée en partenariat avec

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Après Copacabana voici le nouveau film de Marc Fitoussi Plaquée par son petit ami, Pauline se laisse entraîner par sa sœur dans un palace de la riviera italienne. Au lieu de savourer les joies du farniente, elle se persuade qu’un crime a été commis dans l’hôtel et s’improvise détective, embarquant dans ses investigations un séduisant maître-nageur… Avec son côté kitsch et désuet, lorgnant du côté d’OSS 117, Pauline Déctective a le mérite de ne pas se prendre au sérieux. Un divertisse-ment aussi léger que rigolo, avec un duo d’actrices très convaincant.

Le nouveau Tim Burton est arrivé, pas de Johnny Depp à l’horizon mais une histoire avec un garçon et son chien…Après la mort soudaine de Sparky, son chien qu’il adorait, le jeune Victor se tourne vers le pouvoir de la science pour ramener à la vie celui qui était aussi son meilleur ami. Il lui apporte au passage quelques modifications de son cru… Victor va tenter de cacher sa création « faite main », mais quand Sparky s’échappe, les camarades de Victor, ses professeurs et la ville tout entière vont apprendre que vouloir mettre la vie en laisse peut avoir quelques monstrueuses conséquences…A l’origine, Frankenweenie était un court métrage avec de véritables acteurs (dont Barret Oliver, le Bastien de l’Histoire Sans Fin) racontant l’histoire d’un petit garçon qui ressuscite son chien à la manière d’un Frankenstein après que celui-ci est mort dans un accident de voiture. Le film se voulait un hommage aux films d’horreur des années 30. A l’époque, Burton n’avait pas pu en faire un long et Disney n’en avait pas voulu. Le réalisateur a donc pris sa revanche sur le studio qui distribue aujourd’hui le film, cette fois en stop-motion (comme L’Étrange Noël de Mr Jack) et scénarisé par John August son compère de Charlie et la Chocolaterie.

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Après dix ans d’absence, Jacques ressurgit dans la vie de Mado, désormais mariée et mère de Paul, un garçon de sept ans. La relation de l’ancien couple est entachée du deuil d’un enfant. Alors que Mado a refait sa vie, Jacques en paraît incapable et lorsqu’il rencontre Paul, c’est un choc. La complicité de plus en plus marquée entre Jacques et Paul finit par déranger Mado qui leur interdit de se revoir. Mais Jacques ne compte pas en rester là....Sandrine Bonnaire nous avait déjà bouleversés avec son documentaire consacré à sa sœur autiste Elle s’appelait Sabine, elle parvient à nouveau, magistralement, à nous bouleverser avec ce premier long-métrage de fiction, inspiré d’une histoire vraie. Entre drame familial et thriller, l’ex égérie de Maurice Pialat met des images sur l’indicible douleur de la perte d’un enfant et donne sans doute à William Hurt et Alexandra Lamy leur meilleur rôle.

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Sommes-nous tous des cobayes ?Comment se fait-il que les OGM agricoles soient dans les champs et dans les assiettes alors qu’ils n’ont été testés que pendant trois mois sur des rats ? Comment se fait-il que l’éner-gie nucléaire soit toujours l’énergie du futur alors que les hommes ont vécu Tchernobyl et Fukushima ? Les conclusions seraient-elles accablantes ?Pour son troisième film, Jean-Paul Jaud a donné la parole aux agriculteurs japonais de Fukushima, Sénégalais ou Français, aux scientifiques, aux politiques ou aux militants. Autant de personnes qui s’expriment librement sur ces deux problématiques majeures, les OGM et le nucléaire.

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C’est à la fois un thriller psychologique prenant et une plongée fascinante dans l’absurdité d’un pays miné par ses contradictions, son passé non assumé, une corruption qui gangrène tous les étages de la société. C’est cette réalité que découvre, avec les yeux d’un Candide horrifié, Arash, jeune universitaire qui vit depuis plus de vingt ans en Occident où il a fait ses études et qui est revenu à Chiraz, loin de Téhéran, pour soutenir sa mère tandis que son père se meurt et pour donner des cours à la fac. Arash se heurte à la difficulté d’enseigner dans un pays où l’on ne peut pas utiliser n’importe quel texte, beaucoup étant censurés, où l’on ne peut pas aborder l’histoire iranienne de n’importe quelle façon, les censeurs veillant là encore au grain. Il affronte aussi une histoire familiale compliquée. Sa mère a quitté depuis longtemps son père qui menait une double vie avec une autre femme et un autre enfant, un père à qui son épouse n’a jamais pardonné la mort de son fils cadet, tombé en martyr lors de la guerre Iran/Irak, poussé par son père à s’engager. Le père est donc mourant et, rongé par le remords, il a décidé de léguer à son ex-femme et à Arash sa fortune, en grande partie constituée de l’indemnité de guerre de son fils défunt. Mais la mère refuse obstinément cet argent souillé selon elle par le sang de son cadet. Arash rencontre alors son demi-frère Jafar, devenu un homme d’affaires redoutable, son épouse Zoreh, ancienne compagne de jeux d’enfance d’Arash et devenue depuis une femme très pieuse, obsédée par la pureté, et enfin son neveu Hamed qui semble vouloir l’aider dans toutes ses démarches et réconcilier l’ensemble de la famille. Mais tous ces gens ont ils de si bonnes intentions envers Arash ? Comment expliquer le meurtre mystérieux du notaire de famille ? Pourquoi Zoreh semble -t-elle détester son fils, nettoyant tout derrière lui de manière compulsive ? Pourquoi Hamed est-il si empressé de l’aider dans ses démarches pour obtenir son passeport qui lui permettra de revenir en France ?Le réalisateur sait parfaitement distiller l’ambiance délétère qui s’installe au cœur de la famille. Il décrit bien le cheminement d’Arash qui, arrivé pour repartir le plus vite possible, découvre peu à peu, avec inquiétude mais aussi avec passion, la violence et la complexité de la société iranienne dont il avait peu d’idée en tant qu’Iranien de l’étranger… (merci Utopia !)

Souvenez-vous de l’excellent Humpday, film indé US de Lynn Shelton sorti il y a 3 ans sur nos écrans… Et bien ce Do Not Disturb signé Yvan Attal en est le remake assumé ! Comme l’a bien dit Yvan Attal « On joue et rejoue bien des pièces au théâtre alors pourquoi pas au cinéma ? ». En effet Yvan, surtout lorsqu’on passe un bon moment !C’est l’histoire de Jeff qui débarque un soir sans prévenir chez Ben son vieux pote de fac avec qui il a fait les quatre cents . Pour célébrer ces retrouvailles et distraire son vieux copain de sa vie rangée, Jeff l’entraîne dans une fête. Sur place, une discussion évoque un festival de porno amateur et l’idée prend vite l’allure d’un pari : Jeff et Ben coucheront ensemble sous l’œil d’une caméra. Ce n’est ni gay, ni porno, ce sera de l’Art ! Le lendemain, impossible de se dégonfler. Rien ne les arrêtera, sauf peut-être la femme de Ben, l’hétéro-sexualité ou certaines questions mécaniques…

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Polar malin et joueur, Les Neuf Reines, réalisé il y a tout juste dix ans, se posait à l’époque comme le fer de lance d’un nouveau cinéma argentin en pleine efferves-cence.Qu’est-ce que les « Neuf reines » ? Une planche de timbres extrêmement rare de la république de Weimar qui va se retrouver au cœur d’une belle machination. Le hasard de la vie veut que ces pièces de collection atterrissent entre les mains de deux petits arnaqueurs sans envergure. Juan et Marcos passent en effet leurs journées à détrousser «gentiment» les quidams ; jamais de violence, seulement des tours de passe-passe qui leur permettent de subvenir à leurs besoins. Jusqu’au jour où cette occasion en or se présente à eux. Ils ont 24 heures pour réussir le coup de leur vie en vendant les Neuf reines - du moins une copie des vrais - à un riche collectionneur espagnol. Mais évidemment rien ne va se passer comme prévu…Qu’il est bon de se faire retourner dans tous les sens par un scénario ingénieux ! Sans exagération, Les neuf reines est bien le digne héritier argentin de Usual Suspects de Brian Singer. Fabian Bielinsky, dont c’était le premier film, construit une histoire sans failles qu’il est jouissif de revoir plusieurs fois afin de déceler les moindres détails susceptibles d’anticiper le coup de théâtre final. Très bien joué, bien maîtrisé dans sa réalisation (certaines scènes furent tournées en caméra cachée), Les Neuf Reines fait preuve d’un incroyable culot que le festival du film policier de Cognac avait salué de son Grand Prix en 2002.

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Prochainement

Tarifs(validité 30 juin 2014)

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> Mardi 6 novembre à 20h00 :Avant-première de ELEFANTE BLANCO de Pablo Trapero (Argentine/2012/2h)> Vendredi 9 novembre à 20h00 :Avant-première de ENFANCE CLANDESTINE de de Benjamín Avila (Argentine/2012)> A partr du 7 novembre :VILLEGAS de Gonzalo Tobal (Argentine/2012/1h35)

Soirée d’ouverture de la SEMAINE CULTURELLE ARGENTINE

Projection du film culte argentin LES 9 REINES précédée d’une petite introduction sur le cinéma argentin

En bonus après le film, nous vous proposerons un excellent interview du réalisateur, 20 minutes de plaisir supplémentaire durant lesquelles Fabian Bielinsky nous raconte son in-croyable parcours avant d’en arriver aux Neuf reines : 15 années d’assistanat en tout genre, un scénario refusé par toutes les sociétés de production argentines, puis la première place à un concours de scénario qui lui permet de tourner son film. Homérique !

SEMAINE CULTURELLE ARGENTINE du 5 au 11 novembre en partenariat avec L’Université Jean Monnet

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Después de Lucia est un des plus beaux films de l’année, un grand cru 2012 doté d’un scénario d’une rare intensité, très bien construit et qui implique immédiatement le spectateur pour ne plus le lâcher jusqu’à la toute dernière séquence.Après le décès de sa femme Lucia, Roberto part s’installer à Mexico avec sa fille Alejandra. Elle a une nouvelle école, et lui - un nouveau boulot, toutes choses qui impliquent des difficultés liées au changement. Lors d’une soirée avec des camarades de classe, Alejandra couche avec l’un d’eux qui, ayant filmé la scène avec son portable, va diffuser celle-ci à tout le lycée... Ce remettant à peine du départ de sa femme, Roberto ne perçoit pas le désarroi grandissant d’Alejandra, qui par ailleurs ne souhaite pas embêter son père avec ce qui n’était au départ qu’un « petit problème » de lycéenne…Harcèlement scolaire et perte du dialogue parent-enfant sont au cœur de ce splendide long-métrage où la forme sert à la perfection le fond. C’est à une sorte de croisement entre la violence froide et objective d’un Michael Haneke et le constat social sur la classe moyenne façon Larry Clark que nous convie ce jeune prodige (oui n’ayons pas peur du mot) mexicain. Côté casting, dans le rôle d’Alejandra, la jeune Tessa Ia est une véritable révélation pour son interprétation multi-facettes.

Notre coup de b

Le Méliès cinéma indépendant 10 place Jean Jaurès 42000 [email protected] / www.lemelies.com / www.facebook.com/CinemaLeMeliesSaintEtienne

Elle va ainsi successivement être la belle jeune fille en fleur qui tente d’oublier le tragique événement que fut la disparition de sa mère, puis la rebelle lorsque débute le harcèlement et enfin la résignée emplie de colère réfrénée lorsqu’elle s’aperçoit qu’elle se trouve désormais au centre d’un cercle vicieux inextricable. Après tout, n’est-elle pas elle-même honteuse et furieuse de s’être fait « baiser » par cette histoire de sextape à l’origine de tout ? Pour autant, la belle n’a pas dit son dernier mot et fera preuve d’un tempérament et d’une détermination à toute épreuve jusqu’au bout. A la fois très fortement acclamé et (légèrement) hué lors de sa présentation en festival, Después de Lucia ne vous laissera pas indifférent. Sujet sensible et images fortes en sont la recette, mais lorsque l’on aborde un sujet comme le harcèlement moral et physique en milieu scolaire ainsi que ses conséquences, on ne peut pas y aller avec le dos de la cuillère. Un parti pris osé pour un résultat brillant, du vrai grand cinoche.

Después de Lucia

Prix Un Certain RegardCannes 2012

Nadine BESSET et Nadine BESSET et Nadine BESSET Sylvie BARJON deux psychologues cliniciennes, expertes judi-ciaires et en criminologie, animeront un débat sur le thème de la maltraitance, de la violence et du harcèlement en milieu scolaire.