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Entretien

Lesdeuxsontéconomistesets’esti-ment. Mais l’un, Mario Monti, aplongé dans la politique et estdevenu président du conseil ita-lien, quand l’autre, l’Américain

PaulKrugman,estrestéobservateur.Pour-fendeurdel’austérité,cedernierrestepes-simistesurl’aveniràmoyentermedel’Eu-rope, tandis que M.Monti estime que lesépreuves la poussent à avancer.Quel diagnostic faites-vous de la criseeuropéenne. Qui doit-on blâmer:l’euro? le système politique? dix ans dedettes excessives? lemarché?

PaulKrugmanL’Europeacrééunemon-naie commune sans les conditions préala-bles nécessaires – intégration fiscale etgaranties bancaires. La crise était un acci-dentprévisible.Quelque chosedevait arri-ver. J’ai beaucoup de critiques à formulerauxréponsespolitiquesapportées,mais leprincipal tort, c’est le système en lui-même.

MarioMonti Jesuisd’accordaveclepro-fesseur Krugman. Une union monétairedoitavoirunvéritablemarchéuniquequis’accompagne d’une union fiscale et d’uncertain degré d’union politique. Maisdémarrer cette union monétaire, mêmede façon imparfaite, a été préférable à nerien fairedu tout. Si onavait vouluattein-dre la perfection, on n’aurait rien fait etcela aurait eu des conséquences néfastes

sur l’économieeuropéenneetsonintégra-tion. La crise actuelle aurait donné lieu àdes dévaluations compétitives nocives.Cette crise est sérieuse, mais elle a forcél’Europe à mettre en place une meilleuregouvernanceéconomique.L’euro est donc,malgré tout, une bonnechose?

M.M.Oui, et il faut l’inscriredans l’ado-lescence de cette Europe en construction.Certes, les Etats-Unis ou la Chine ontmieux réussi que l’Europe, en termes decroissance.Maisnousavionsànotreagen-da une tâche bien plus ardue. En quinze,vingtans, l’Europeestparvenueàbâtirsonmarché unique, sa monnaie unique, sonélargissement et sa «presque Constitu-tion» (le traité de Lisbonne) : une unionque les Etats-Unis ontmis bien plus long-tempsà faire aboutir.

P. K.Là, je ne suis pas d’accord. Je parta-ge et défends l’objectif de l’euro, mais j’aipeur que cette crise contribue, au contrai-re, à saper la solidarité entre sesmembres.Onneparlepas de troublesmineurs,maisd’unchômageà30%,40%,voire50%chezles jeunesdecertainspays.C’estunesitua-tion très, très dangereuse, socialement etpolitiquement.L’euro est-il encoremenacé demort?

P. K.L’euro n’est plus en danger immé-diat.Unanplus tôt, j’auraisdit que lamon-naie unique était menacée à court terme.Un cercle vicieux s’était enclenché par lebiais du marché des dettes souveraines.

L’action de la Banque centrale européenne[BCE\]a permis de stabiliser la situation.Mais regardons la situation enGrèce. Com-bien de temps le consensus proeuropéenpeut-ilsurvivreàunetelledégradationdelasituation?

Tant que les dirigeants politiquesn’auront rien d’autre à offrir aux citoyensquedes efforts etdu chômage, les discoursseront vains. Et lorsque j’entends Wol-fgang Schäuble [le ministre des financesallemand] s’inquiéter des dangers d’une

politiquemonétaire trop expansionnistedelaBCE, jemedis«oh,monDieu!», car laBCE est la seule chose qui reste à l’Europepour doper la croissance. C’est cela quipeut détruire l’Europe.

M.M. Ilnes’agitpasde«doper»lacrois-sance, mais plutôt d’enlever des «entra-ves»qui,dans lagouvernancede l’Europe,freinent la croissance. Elles sont fiscales etfinancières. Au sujet des entraves fiscales,jeme rappellema première conversationavec le présidentObamaen février2012. Ilsavait que j’avais un dialogue franc etconstructif avec la chancelièreMerkel surlapolitiqueéconomiqueet il était curieuxde savoir comment on devait l’approchersur ce thème. Il faut toujours se souvenir,futma réponse, qu’enAllemagne l’écono-mie est, encore aujourd’hui, un pan de laphilosophie morale. La croissance estconsidérée comme le résultat d’un com-portement vertueux des citoyens, desentreprises et de l’Etat. Il n’y a aucunmoyendepersuaderMmeMerkel,maisaus-si l’opinionallemande,quelesdéficitsbud-gétairespeuventêtreunebonnechose.Enrevanche, on peut faire brèche, petit àpetit,enleurexpliquantquedebonsinves-tissementspublics,quiaccroissentlacapa-cité productive pour l’avenir, ne sont pasexécrables du tout. Par cette pédagogie àlong terme, que j’avais commencée en1997 au sein de la Commission européen-ne et récemment avec le soutien duprési-dent Hollande à partir de mai2012, nousavons pu infléchir un peu la vision alle-mande et voir reconnu par l’Europe unespace de regard pour certains investisse-ments publics.Quelles ont été les entraves financièresà la croissance en Europe?

Une entrave sérieuse a été l’instabilitéfinancièredelazoneeuro,quiaeutendan-ce à persister, même après que plusieursEtats membres, comme l’Italie, avaient« fait le ménage dans leur propre mai-son». Pour réduire cette instabilité, pourfaire assumer qu’il y avait aussi une res-ponsabilité collective, on a dû œuvrer defaçon un peu musclée. Au Conseil euro-péen des 28-29 juin 2012, pour faire adop-

dossier

«AUXETATS-UNIS,NOUS AVONSUN PROBLÈMECONCERNANTLES LIENSENTRE LESENTREPRISESET L’ETAT»Paul Krugman

L’entreprise qui transforme lemonde 4/4Derniervoletdenotresérieàl’occasiondusommetmondialdesthinktankséconomiques, lePrixNobeld’économiePaulKrugmanetl’ancienprésidentduconseil italien,MarioMonti,échangentsurl’avenirdel’Europe

«Lacrisepoussel’Europeversl’unionpolitique»l’unionpolitique»

C’ESTÀ L’ABRIdesmystérieusesfresques aborigènes et desmas-quesdes premières civilisationshumainesque lemondedes entre-prises réfléchit à sonavenir. LeSommet international des thinktanksd’entreprises va se réunir,mardi 18juin, auMuséedes artspremiers à Paris. Il rassemble lesprincipauxgroupesde réflexionéconomiquededouzepays, dontles Etats-Unis, l’Allemagne, leJaponou la Chine, à l’invitationdeleurhomologue français, l’Insti-tut de l’entreprise.

La journéede débat tourneraautourdu thèmede la transforma-tion. Faut-il réinventer l’écono-miedemarché?Donner à l’entre-priseun autrehorizonque celuiduprofit? Comment se transfor-me-t-elle?Quelsmodèles sont-ilsen train d’émerger? Patronsdegrandes entreprises, économistes,intellectuels vont échangerautourde ces questionsqui pour-raient se résumer enune seule:quelle sociétépour l’après-crise?

Chaquepaysestvenuavec sesidées, d’épaissescontributionsqui,sans surprises, soulignentenpréambuleque le capitalismeet

l’économiedemarchésont, endépitde la crise actuelle, lesmeilleursgarantsde laprospéritéfuturedesnations.«L’alliancedelapropriétéprivéedesmoyensdeproductionetde l’allocationdes res-sourcespar lemarchéaété etdemeure le système lepluspuis-sant, flexibleet résistantpourgéné-rerde laprospérité etdubien-êtresocial», assure l’Institutde l’entre-prisedans saproprecontribution.Commesi cette évidencedevaitêtre rappeléeavec forceprèsd’unquartde siècleaprès la chutedumurdeBerlin.

Traditionnellement, lesplus cri-tiquesenvers leurproprepays,qu’ils jugentglobalementenretardpar rapportà tous lesautresenmatièrede réforme, sont lesFrançais.Mais ilsne sontpas lesseulsà relayer l’inquiétudedesmilieuxd’affaires sur l’acceptabili-té socialedu«business».C’estmêmecequi constitue la tramedefonddes travauxdecesdéfenseursdesentreprises. Le très influentCommitteefor EconomicDevelop-mentaméricain (CED)s’alarmeain-sique l’environnementpolitiqueet économiquedevienne«moins

stableetmoinshospitalierpour lemondedesaffairesaméricain». Ilévoquemême«l’érosionde laconfiancepublique»quimettraitendanger le«permis social»(social licence) implicite, garantdelaprospéritédesentreprises.

Le grand retour du fordismeCréé en 1942par les grands

PDGaméricainspour influer surles politiques économiquesdel’après-guerre, le CED entend tra-vailler à lamise enplace d’un«capitalismedurable». Pour cela,il entend convaincre les actionnai-res que leur intérêt à long termeest servi par l’engagement socié-tal des entreprises, créateurd’ouvertureséconomiques. Legrand retour du fordisme!

Saufque l’enjeud’aujourd’huin’est plus l’industrialisationdecohortesdepaysans,mais la crois-sancedenouveauxmarchés et ladisponibilitéde talents, deuxconditionsà l’innovationet, donc,à la poursuitede la croissance.

Parmi les contempteursde leurpropre systèmepolitique, les Fran-çaisne sont plus seuls. Les indus-triels chinois ne craignentpas de

critiquer leur gouvernement.«Lacroissanceéconomiquepilotéeparle gouvernement s’est révélée inca-pablede résoudre les conflits et lesrisques sociaux», écrivent-ils. Ilsréclament la libéralisation totaledesmarchés et la fin de l’aide étati-que à ses propres entreprises etdesmonopoles qu’il protège.«Laissez les entreprises faire failli-te, y compris dans le solaire. C’estlemarché qui doit allouer les res-sources», affirment-ils en substan-ce. Pour eux, une économiedemarchématuredevra avoir vu lejour enChine d’ici à 2020.Desréformesqui devront égalementinclureunvolet fiscal et la réorien-tationde l’argentpublic vers laprotection sociale.

Les entrepreneursallemands,eux, s’inquiètentde ladivergencerégionaledesperformancesécono-miques. Les régionsdynamiquesdupaysontunecroissancesupé-rieurede40%à lamoyenne.Pasdesubventionsdirectes, préconi-sent-ils,maisuneffortd’infrastruc-tureetde créationdepôlesd’attrac-tion.Enréalité, ceque tentede fai-re l’Europe…p

Ph.E.

Alarecherched’uncapitalismedurableQuandlesentrepreneursde tous lespayss’inquiètentde leur«acceptabilité sociale»

8 0123Mardi 18 juin 2013

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dossier

«ENALLEMAGNE,L’ÉCONOMIEEST UN PANDE LA

PHILOSOPHIEMORALE»MarioMonti

ter cette ligne, qui exigeait l’unanimitédes 17 chefs d’Etat et de gouvernement dela zoneeuro, jen’avaisd’autremoyenqueledroitdeveto.Détestableenprincipe, j’aiessayéde l’utiliserpouraccélérer,nonpaspour freiner, l’avancée de l’Europe. Le28 juin au soir, j’ai émis mon veto à l’ac-cord à 27 sur le pacte de croissance, quepourtant nous souhaitions tous, tant quela chancelièreMerkel n’aurait pas donné,ausommetdelazoneeuroquisuivait,sonaccordà des actions de stabilisation sur ladette souveraine de ces Etats qui respec-taient la discipline budgétaire exigée parl’Europe. Après des discussions dures,mais très loyales, à 4heures dumatin, onarriva à cet accord, à la suite duquel je puslevermon veto au pacte de croissance. Cepassage politique complexe, pour lequelj’ai eu l’appui constant du président Hol-lande et finalement la compréhensiondeMmeMerkel (aussi grâce, je crois, à sonappréciation des politiques rigoureusesmenées en Italie), fournit la légitimationpolitique pour que la Banque centraleeuropéenne, dans sa pleine indépendan-

ce, se déclare prête, comme le présidentDraghi le fit après quelques semaines, àintroduire un nouvel instrument, lesOutright Monetary Transactions (OMT),surlabasedesprincipesarrêtésparlesom-met. L’affrontement de positions politi-ques au cours de cette longue nuit ne futpoint facile. Mais l’Europe en est sortiefournie d’une gouvernance plus efficace,pour la croissance et en même tempspour la stabilité.LesEtats-Unis sont déjà sur la voie duredressement. Le doit-on àBarackOba-ma, à BenBernanke (le président de laRéserve fédérale américaine) ou augazde schiste?

P.K.Unechoseest sûre, cen’estpasgrâ-ce au gaz de schiste. C’est une nouvelletechnologie, mais cela ne représentequ’un faible pourcentage de l’économie.Pourle reste, l’économieaméricainenevapas si bien que ça. La croissance avoisine3%. Ce n’est pas le rythme que nousdevrions avoir après une si grosse réces-sion. L’emploiprogresse,mais pas assez.

Barack Obama a fait ce qu’il fallait en

2009. Le plan de relance était plus quenécessaire, même s’il était trop limitédans son ampleur et sa durée. C’était cer-tainement mieux que ce qu’aurait fait lecamp adverse. Avec une politique de res-triction budgétaire, nous aurions eu unralentissement sévère de la croissance. EtBen Bernanke a été un bon banquier cen-tral. Bref, cela aurait pu êtrepire.Quemanque-t-il aux Etats-Unis pourrebondir?

P. K.Le secteurprivé est prêt à rebondir.Lemarché immobiliers’est assaini, ladettedes ménages s’est réduite. Si nous avionsune action budgétaire neutre – ni expan-sionnisteni restrictive –, nous aurionsunecroissance bien plus élevée. Malheureuse-ment, les Etats-Unis ont leur version del’austérité: leséquestre[mécanismedecou-pes budgétaires automatiques en placedepuismars]. L’Etatcentralet lesgouverne-mentsfédérauxvisentlastabilitébudgétai-re. Les Etats-Unis sont freinés par leur«européanisation». Nous pratiquons,pourdemauvaisesraisons, ceque l’Europea fait pendant des années. Tout cela alorsque les grandes craintes liées à l’ampleurde la dette américaine se sont nettementapaisées. Le déficit a été réduit de façonsignificative,et le ratiodedettesurproduitintérieur brut est maintenant stabilisé. Amoyen terme, en tout cas, il n’est pluseffrayant. Mais le séquestre a tout demêmeétémisenplace. C’est l’Amérique!

Nous avons une union politique quiinduit desmécanismes automatiquesquirendentlaviebeaucoupplussimplequ’enEurope. Regardez l’Espagne et la Floride.Leurs problèmes se ressemblaient, bulleimmobilière, banque en déconfiture. Ladifférence, c’est qu’en Floride les retraitesont continué à être payées, le soutien auxbanques, lesallocationschômages, les ser-vices de santé, tout cela n’a pas été inter-rompu, grâce aux transferts fiscaux del’Etat fédéral.Pensez-vous, commeMarioMonti, quela crise pousse à l’union politique del’Europe?

P.K. J’espèrequ’ilaraison,maisj’endou-te. C’est un peu comme penser qu’il fau-drait érigerune statuedeStaline àBruxel-les, enconsidérantqu’il a aidéàconstruirel’Europe. Qui sait, peut-être aurons-nousun jour une plaque en l’honneur de Leh-man Brothers, pour avoir rendu possibleuneunionpolitiqueen Europe!Comment aider l’Europe à retrouver dela compétitivité sans assommer lecontribuable?

M. M.L’Europe devrait mettre la pres-sion sur les pays pour faire des réformesstructurelles, comme elle l’a mise pourréduire les déficits. Bruxelles peut forcerles pays à respecter les contraintes budgé-taires par des sanctions, mais les outilspourlesinciteràmettresurpieddesréfor-mes structurelles sont beaucoup plus fai-bles. C’est pourquoi je suis en faveur d’ar-rangementscontractuelsentre l’Europeetchaquepays,un instrumentplus ciblé surles réformes.Pour l’Italie, cela commence à fonction-ner?

M.M.Oui.Mongouvernementaessayéd’utiliser ce facteur aumaximum.Le gou-vernement présidé par Enrico Letta sem-ble déterminé à poursuivre dans cetteligne. Aujourd’hui, l’Europe regarde sur-toutlaFranceetlepasaveclequelelleabor-de les réformes nécessaires pour resterdans la course avec l’Allemagne.

P. K.En Europe, la première source dedivergence n’est pas la compétitivité,mais l’inflation, longtemps trop élevée enEspagne, en Grèce, au Portugal, par rap-port à l’Allemagne. Il faut rappeler que lesproblèmes de l’Irlande n’avaient rien à

voiravecunmanquede réformes structu-relles. Sur ce point, l’Europen’est pas en simauvaiseposture.

En2007,aurait-onditde laFrancequ’el-le avait un grave problème lié aumanquederéformesstructurelles?LaFranceaclai-rement un problème de taux d’emploi, ettropdepersonnespartentà laretraitetropjeunes. En Italie, c’est une autre histoire.Quelque chose a dérapé dans les années1990, et, depuis, l’économie stagne. Maislevraiproblèmeest liéaufaitque l’Europeen est à sa sixième année de récession.Cela rend tout dramatique.Les entreprises ont-elles désormais uneplus grande responsabilité vis-à-vis dela société?

P.K. J’aimerais que ce soit le cas.Mais lamajeure partie d’entre elles sont là pourfaire des profits. Le slogan deGoogle, c’est«Don’t be evil » [« ne soyez pas mal-veillant»]. Pourtant, Google n’a pas uncomportement irréprochable [vis-à-vis dufisc].

M. M.Bien sûr, les entreprises sont làpour gagner de l’argent. Cela ne fait aucundoute. Mais la croissance d’un capitalismemondial a posé des problèmes de contrôle.Trop souvent, les pouvoirs publics ont eutendance à se courber devant les pouvoirséconomiques ou financiers. Pendant lesannéesdeGeorgeW.Bush,lafoidanslebusi-ness s’est traduite par une génuflexion del’Etat vis-à-vis des entreprises au lieu d’uncontrôlerenforcé.Faceauxgéantsmultina-tionaux, il fautunecoopérationinternatio-nale entre les régulateurs. Notammententre lesEtats-Uniset l’Europe.

P.K.AuxEtats-Unis,nousavonsunpro-blèmeconcernant les liens entre les entre-prises et l’Etat, et un problème d’évasionfiscale.LabonnenouvelleestquelesEtats-Uniset l’Europeontdémontrérécemmentqu’ils avaient encore des marges demanœuvre pour collectivement s’atta-quer, par exemple, auxparadis fiscauxouà la financede l’ombre.La crise devrait-elle pousser les entre-prises à assumer des dépenses jusqu’iciprises en charge par l’Etat?

P. K.Aux Etats-Unis, nous prenons unedirection opposée. Concernant les dépen-ses de santé, par exemple, nous avions unsystème qui, jusqu’ici, reposait sur lesentreprises, cela ne fonctionnait pas, cer-tainsn’avaientpas accès aux soins. L’idéalserait que nous retrouvions l’état d’espritque nous avions il y a trente à quaran-teans, quand les entreprises savaientqu’un comportement antisocial leurserait néfaste.

M. M.En Europe, nous venons d’unesituation où beaucoup repose sur l’Etat.Pour le reste, je pense que la concurrenceoblige les entreprises à se comporter cor-rectement. Mais c’est vrai aussi pour lessystèmespolitiques. Il y a quarante ans, lecapitalisme avait encore un concurrentqui exerçait une pression en l’obligeant àêtreplus acceptable socialement. La chutede l’Union soviétique a consacré le capita-lisme commemonopole. La correction deses fautes, souvent très graves, dépenddésormais d’actions sur les déséquilibreset les réglementations publiques, à l’inté-rieur du capitalisme lui-même.

P.K.Pourreveniràdeschosesplus terreà terre, mon «gouvernement», pas auxEtats-Unismaisdansmaville, s’estengagédansungrandmouvementde«déprivati-sation». La collecte des déchets jusqu’icifaite par des entreprises est maintenantgéréepar le secteurpublic. Et tous les indi-cateursmontrentque lepublic faitmieuxque le privé. p

Proposrecueillis parClaireGatinois, Philippe Escande

etNatalieNougayrède

¶Mario Monti,

(à droite)70 ans, est

économiste,universitaire.

Il a été présidentdu conseil italien

de 2011 à 2013;commissaireeuropéen au

marché intérieur(1995) puis à

la concurrence(1999)

¶Paul Krugman,

(à gauche)60 ans, est

économiste,professeur

à l’universitéde Princetonet à la London

Schoolof Economics.

Il a obtenule prix Nobeld’économie

en 2008

SEB JARNOT

SOURCE : OCDE

Une reprise modeste en vue pour 2014PRÉVISIONS DE CROISSANCE DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT, EN%

20122011 2013 20142010

0

2

− 2

− 4

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6

8

10

12Prévisions

Japon

Chine

France

Allemagne

Italie

Inde

Etats-Unis

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