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L’agriculture d’entreprise – L’agriculture pratique 179 e année DOSSIER Filière lait : relever le défi du marché Numéro 224 Août 2016 Prix au numéro : 8

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L’agr i cu l t u re d’en t repr i se – L’agr i cu l t u re prat i que • 179 e an n ée

DOSSIERFilière lait : relever le défi du marché

Numéro 224 Août 2016 Prix au numéro : 8 €

Page 2: COUVs 224 224 - agriDées · p. 26 † L’Adepta, une association au service de l’export et du « made in France » p. 27 † L’épargne salariale, qu’est-ce que c’est ?
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É D I T O R I A L

Forme juridique : association loi 1901 reconnue d’utilité publique • Directeur de la publication : Damien Bonduelle• Rédacteur en chef : Patrick Ferrère • Rédactrice en chef adjointe : Isabelle Delourme • Abonnements : Christelle Vasseur• Maquette, composition et photogravure : C.A.G., 169, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75011 Paris • Ont participéà ce numéro : C. Bonno, J.-L. Bergeot, J.-F. Bouchard, C. Bourguignon, F. Chausson, M.-C. Damave, I. Delataille, I. Delourme,P. Faucon, P. Férey, M.-L. Hustache, J.-B. Millard, M. Sartre, P. Ruelle • Liste des annonceurs : Agrica,saf agr’iDées, Kuhn • Crédit photo de couverture : © L. Gueneau/CNIEL • Dépôt légal : à parution • Imprimerie :Apothem, 47, rue Alexandre-Dumas, 59200 Tourcoing • Abon ne ment : 48 euros TTC • N° de CommissionParitaire de Presse : 1218 G 83987 • La reproduction, même partielle, de tout matériel publié dans la revue,sous quelque procédé que ce soit, est strictement interdite • ISNN : 0339-4433 • Périodicité bimestrielle.

3Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Agriculteurs de France est une revue éditée par la Société des Agriculteurs deFrance : 8, rue d’Athènes, 75009 Paris. Tél. : 01 44 53 15 15. Fax : 01 44 53 15 25.E-mail : [email protected]. Internet : www.safagridees.com

Filière lait : quellesréformes à l’aube de 2020 ?

Philippe FauconAdministrateur et membredu bureau de saf agr’iDées

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Depuis maintenant plus de deux ans, la chute importante du prix du lait a

provoqué une crise, qui a mis à mal la trésorerie d’un grand nombre de produc-

teurs laitiers. Des signaux encourageants sont apparus sur le marché mondial

depuis cet été.

Pour autant, il est nécessaire que les acteurs de la filière tirent les enseignements

de cette crise. En effet si la sortie des quotas et les questions de géopolitique

ont contribué à son accentuation, des causes structurelles ne doivent pas être

occultées.

La compétitivité des élevages français est au premier rang. Elle doit être renforcée

par une mobilisation optimum du second pilier de la PAC, au travers du Plan de

Compétitivité et d’Adaptation des Exploitations agricoles (PCAE), et avec une

amélioration des outils fiscaux afin de mieux lisser les revenus.

Dans le cadre de la future PAC 2020, il sera nécessaire d’envisager la mise en place

de dispositifs assurantiels, plus pertinents qu’un versement unique à l’hectare.

Ceci étant, l’amélioration de la compétitivité de la filière ne se limite pas au seul

maillon production. Il faut que dans le même temps, les transformateurs laitiers fran-

çais se structurent, pour mieux prendre leur place dans le développement des

marchés laitiers internationaux.

Revoir la relation contractuelleAutre point fondamental à retravailler : la relation producteur-transformateur,

avec une meilleure prise en compte du cycle de production du lait et du caractère

immatériel lié à son terroir qui ne peut plus être géré comme une « commodité ».

Le lait n’est pas seulement un produit agricole, c’est d’abord un produit frais, non

stockable, dont le cycle de production est long et peu flexible. La sécurité sanitaire

et alimentaire des élevages, comme le terroir sont autant d’éléments, mis en

valeur par les transformateurs, qui doivent être pris en compte dans le cadre de

la relation contractuelle qui les lie aux producteurs. Celle-ci doit être complètement

revue afin d’être rendue bien plus équilibrée. Autant de questions évoquées,

travaillées et diffusées par saf agr’iDées, notre think tank dédié aux secteurs

agricole, agroalimentaire et agro-industriel. n

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S O M M A I R E Numéro 224 – Août 2016 – 179e année

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ENTREPRISEÉDITORIAL

DOSSIERp. 12 • Filière lait : relever le défi du marché

p. 5 • Pour un allègementdes normesen agriculture

p. 6 • La disruption digitale...expliquée auxdirections générales

p. 7 • Le collaboratif : denouvelles opportunitésde croissance ?

p. 8 • La troisième Révolutionagricole

p. 9 • Regard sur...la compensationcollective agricole

p. 10 • Bananeseuropéennes : desfilières à pérenniser

FORUM

SAF AGR’IDÉES

p. 3 • Filière lait : quelles réformes à l’aube de 2020 ?

Conf

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p. 24 • Kevin Camphuis,l’accélérateurdes start-upde l’alimentaire

p. 25 • SIAL Paris 2016 :place àl’innovation etau bien-manger

p. 26 • L’Adepta, uneassociation au service de l’export et du « made in France »

p. 27 • L’épargne salariale, qu’est-ce que c’est ?

p. 25

p. 29 • Bureau délocaliséde saf agr’iDées dans la Manche

p. 28 • Des pommes de terre à l’agriculture deprécision : une journéedans l’Eure-et-Loir

p. 30 • La solution coopérative

CULTURE

p. 10

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Des recommandationsspécifiques pourl’outre-merDans le rapport d’informationintitulé « Agricultures des outre-mer : pas d’avenir sans acclimatationdu cadre normatif » qui a été adoptéle 7 juillet 2016, la délégationsénatoriale à l’outre-mer présente20 propositions concrètes quiont pour objectif de remédierà la prolifération normative poursauvegarder et valoriser lesproductions agricoles ultramarines.Ainsi, en matière sanitaire etphytosanitaire, le rapportd’information constate la grandediversité de situation des filièresagricoles ultramarines selon quela compétence normative appartientà l’État ou à la collectivité et quele territoire fait partie ou non del’Union européenne comme régionultrapériphérique. Il soulignel’absence de prise en comptedes caractéristiques de l’agricultureen contexte tropical. « L’applicationuniforme de la réglementation conçuepour des latitudes tempérées, sansforte pression de maladies et deravageurs, conduit à une impasse. »Par ailleurs, les régions ultra-périphériques doivent également« supporter les effets d’une politiquecommerciale de l’Union européennetrès favorable aux pays tiers, tant entermes de conclusion d’accords delibre-échange qui mettent en périlles grandes filières exportatricescomme la banane, le sucre et lerhum, qu’en matière de faible degréd’exigence des normes alimentairesimposées aux denrées importées »précise le rapport. Enfin, face àla concurrence des pays tiers dont lacompétitivité coût est insurpassable,il estime que « seule une montéeen gamme permettra de préserverles parts de marché des producteursultramarins ». C. B.

(1) www.senat.fr/notice-rapport/2015/r15-775-notice.html

5Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

REPÈRE

FORUMPropositions

Pour un allégement des normes en agriculture Neuf sénateurs se sont penchés sur « l’overdose normative » ressentie parl’ensemble des filières agricoles. Le rapport qu’ils viennent de publierpropose des solutions de bon sens et un changement d’approches et deméthodes de l’action publique.

Camille Bourguignon

«L’avalanche de normes, la surabondancedes réglementations » sont des facteursentravant la compétitivité des filières

agricoles. Déjà évoqués lors des débats sur laloi de modernisation de l’agriculture et de lapêche (LMAP) de 2010, puis à nouveau lors dela discussion de la loi d’avenir pour l’agriculture,l’alimentation et la forêt (LAAF) de 2014, ilssemblent n’avoir pas donné lieu à des modifi-cations législatives majeures dans le sens de lasimplification. C’est en tout cas ce qui a pousséla commission des affaires économiques duSénat à mettre en place un groupede travail sur cette question dès2015. Le rapport d’information« sur les normes agricoles » rendupar le Sénateur Daniel Dubois le29 juin 2016 a été rendu public le14 septembre 2016(1). « Le niveau européen està l’origine de 80 à 90 % des normes pour lesagriculteurs » a rappelé le sénateur. « Et il y aparfois au niveau national une surtransposi-tion des directives. » Par ailleurs, l’agriculteurest à la confluence de plusieurs domaines nor-matifs : calcul des surfaces donnant droit auxaides directes, normes environnementales, sani-taires, sociales applicables à l’agriculteuremployeur comme à n’importe quel employeurou encore en matière de propriété intellec-tuelle pour l’utilisation des semences.

Les 16 propositions d’allégement des normesapplicables à l’agriculture présentées dans ce rap-port se veulent un moyen de mettre un terme à l’in-flation normative tout en rétablissant la confiancedes agriculteurs dans la réglementation nationaleet européenne. Parmi les propositions, DanielDubois met l’accent sur quatre d’entre elles :• organiser l’association systématique de la pro-fession agricole lors de l’élaboration de normespilotées par d’autres ministères que le minis-tère de l’agriculture, mais qui peuvent avoir unimpact sur le secteur agricole ; « les agricul-

teurs sont souvent les grandsoubliés » déplore le sénateur DanielDubois ;• pour les normes prises en appli-cation de textes communautaires,mettre en place un contrôle appro-

fondi de la sur ou sous-transposition et s’inter-dire réellement de surtransposer ;• faire appliquer le principe voulant qu’unenorme agricole créée doit être « gagée » par unenorme abrogée ;• faire évoluer les règles de la PAC pour donnerune tolérance sur les calculs de surface.Pour Daniel Dubois, « la simplification desnormes en agriculture ne marchera que si elleest une véritable priorité politique, en se rap-pelant que l’agriculteur est un acteur écono-mique engagé dans une compétition au moins

européenne et parfois mêmemondiale, et que toute surrégle-mentation par rapport à nos voisins pénalise sa compétiti-vité ». Enfin, il souhaite que cerapport d’information soit la based’une démarche législative quise traduira concrètement parexemple sous la forme d’une proposition de loi. n

(1) Retrouvez le rapport complet et ledétail des 16 propositions sur Internet :www.senat.fr/notice-rapport/2015/r15-733-notice.html.

Rétablirla confiance

« Toute surréglementation pénalise la compétitivité des agriculteursfrançais », estime le sénateur Dubois, rapporteur de la missiond’information sur l’allégement des normes en agriculture.

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Les 8 disruptionsdigitales ◗ Paradigme 1 : la loi de Moore a 50 anset continue à nous surprendre. Desprofesseurs de la Singularity universitydans la Silicon Valley, ont fait ladémonstration qu’aujourd’hui huittechnologies surfent sur la loi de Moore,c’est-à-dire doublent de capacité chaqueannée en divisant leur prix par deux. Celas’applique à des secteurs d’activité, quivont du monde des capteurs intelligentsaux réseaux d’ordinateurs, de larobotique à l’impression 3D, de labiologie synthétique à la médecinedigitale, des nano-matériaux àl’intelligence artificielle.

◗ Paradigme 2 : la collaboration demasse grâce à internet et aux réseauxsociaux. L’accélération de l’innovationest le fruit d’un travail collaboratif fait aucours des dix dernières années au niveaude la planète, avec en moyenne1,2 milliard d’humains connectés àl’internet qui peuvent à tout momentéchanger. Cela va se poursuivre. « Troismilliards de cerveaux humains devraientrejoindre le jeu collaboratif mondialentre 2010 et 2020. ». Mais aussi...

◗ Paradigme 3 : nouveaux usageset les cinq tendances sociétalesincontournables (mobilité,dématérialisation, filtre humain,écosystème, capture d’information).

◗ Paradigme 4 : Tiers de confiance(TDC) et désintermédiation danscinq sphères de notre vie (gestiondu temps, argent, santé, affectif etéducation/développement personnel).

◗ Paradigme 5 : marketing 3.0, je suisune marque, je suis un média. Lesmarques doivent communiquer auprèsde leurs fans pour survivre.

◗ Paradigme 6 : la plateforme gagnetoujours.

◗ Paradigme 7 : innovation comes fromthe fringe (l’innovation vient de labordure).

◗ Paradigme 8 : couplage énergie etinfo et la fin annoncée du capitalisme.

REPÈRE

Soucieux d’éclairer les dirigeants d’en-treprise intrigués par l’émergence dela « sharing economy » (économie de

partage) et de les alerter sur l’urgenced’une remise en cause et d’une adapta-tion aux nouveaux contextes (sociétaux,environnementaux, économiques etc.), lelivre de Bertrand Petit propose une syn-thèse de la veille Innovation réalisée ausein de son associat ionInnoCherche. Après trenteannées passées dans desgrands groupes internationauxet ceci des deux côtés del’Atlantique, Bertrand Petit acréé cette structure en 2009, avec la volontéd’aider les dirigeants dans leur manage-ment de l’innovation. Il est aussi l’organi-sateur du TEDx Issy-les-Moulineaux quireprend les grands débats de société issusde cette veille. Ce livre « de vulgarisation », compilationdynamique (et volontairement un peu« fourre-tout ») des travaux d’observationet des pistes de réflexions apportées par les

« veilleurs » mobilisés sur ce thème de larévolution numérique en cours, s’adressedirectement aux directions d’entreprise« pour s’assurer qu’elles ont bien comprisquels sont les vecteurs de cette disruptiondigitale qui les attend ». La conviction estforte et les arguments issus de l’observationdes usages et des entreprises pionnièresdu collaboratif aussi. Pour les observateurs

de la disruption digitale mobi-lisés autour de l’ouvrage, lanouvelle génération (Y) « ques-tionne les anciens schémas, lesanciens systèmes de mono-poles et de fausses barrières à

l’entrée qui font que seuls les acteurs éta-blis et reconnus auraient le droit de pro-poser des services ». Boostés par l’envie de redonner du sens autravail, de ne pas s’attacher à un produit ouun bien, ces néo consommateurs, néo-entre-preneurs et néo-salariés « citoyens » bou-leversent toutes les règles en cours, à coupde nouvelles technologies et d’applicationspour smartphones. « Nous sommes dansune phase de transformation multiple ducommerce, et c’est par les nouveaux usagesdes consommateurs que les innovationsapparaissent » écrit Bertrand Petit pour quiinternet a « libéré la parole », obligeantles marques à un nouveau dialogue et unemeilleure réactivité. Forums d’utilisateurs,notation de sites marchands, échanges surles réseaux sociaux : « autant de poids surl’impression de la marque dans la mémoiredes utilisateurs » relève encore BertrandPetit. Autant de challenges nouveaux pourles marques en général, quand l’attentiondes publics est de plus en plus difficile à cap-ter et à fidéliser. Bienvenue à l’ère de laconsommation... de précision ! n

« La disruption digitale… expliquée auxdirections générales »Les usages évoluent et bousculent les entreprises qui doivent s’adapter.Avec ce livre, InnoCherche nous permet de prendre conscience de lavitesse de l’innovation et de la disruption digitale en cours.

Marie-Laure Hustache

La disruption digitale... expliquée aux directionsgénérales, de Bertrand Petit et l’associationInnoCherche, Kawa éditions, avril 2015, 180 pages.

Faussesbarrières

6 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

FORUMManagement

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FORUMVient de paraître

7Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Après le siècle de l’abondance, celui de la prise deconscience et du besoin de changement en profon-deur ? « Nous sommes aujourd’hui pleinement

conscients des limites de nos ressources et donc de la néces-sité d’optimiser leur utilisation en repensant la production debiens, et la consommation » rappelle Frédéric Mazzella,PDG de BlaBlaCar, en préface du livre de Gaëtan de SainteMarie et Antoine Pivot Ensemble on va plus loin – L’économiecollaborative, une chance pour l’économie française ! Pur pro-duit de l’économie collaborative en mode « Génération Y »,née d’un constat de départ d’un manque d’offre appropriée,Blablacar, est aujourd’hui souvent citée comme modèle de la« plateformisation » de l’économie. Sur Wikipedia (pion-nier du partage de savoirs en mode collaboratif !) l’économiecollaborative est définie comme une activité humaine qui viseà produire de la valeur en commun et qui repose sur denouvelles formes d’organisation du travail, en s’appuyant surune organisation plus horizontale que verticale, la mutuali-sation des biens, des espaces et des outils, l’organisation descitoyens en « réseau » ou en communautés généralement pardes plateformes internet et outils numériques.

Mode d’emploi

Cette « nouvelle » économie (que l’on connaît aussi enFrance à travers AirBnB, Leboncoin, Uber, KissKissBankBank,La Ruche qui dit Oui, Miimosa, WeFarmup, etc.) représen-terait-elle une menace ? Non, selon les deux auteurs de l’ou-vrage, Gaëtan de Sainte Marie, par ailleurs PDG de PME cen-tral et vice-président du CJD(1) International, et AntoinePivot, fondateur d’AskAntoine, guide touristique collaboratifen ligne. Au contraire même : les entreprises tradition-nelles peuvent et doivent s’inspirer des méthodes des nou-velles entreprises passées en mode « collaboratif » pourgrandir, car cette nouvelle économie est une source extra-ordinaire d’opportunités soulignent les deux experts. Fin juin2016, l’intérêt capitalistique du géant Danone envers lajeune entreprise de l’agroalimentaire Michel et Augustin(citée dans l’ouvrage avec ses codes internes de manage-ment et outils marketing innovants), leur donne raison ettémoigne de cette appétence nouvelle des « dinosaures »pour des modèles de fonctionnement décomplexés, plusproches des consommateurs.Écrit à l’attention des dirigeants, des managers, des cadres,des entrepreneurs et des étudiants, ce livre, basé sur de

nombreux exemples, donne ainsi un véritable mode d’emploien cinq chapitres pour faire évoluer le management et se réin-venter les entreprises en s’inspirant de l’économie collabo-rative. La réussite et la particularité de McDonald’s France,qui a fait ce choix osé il y a quelques années, est ainsi ana-lysée par les auteurs. Engagé depuis les années 2000 dansune nouvelle stratégie de transparence, d’approvisionne-ment auprès des agriculteurs français, de réduction de sonimpact carbone et de meilleure prise en considération des car-rières en interne McDonald’s France a réalisé en 2014,contrairement à sa maison mère américaine, la meilleureannée de son histoire et a vu tous ses indicateurs au vert, ausens propre comme au sens figuré. n

(1) Centres des jeunes dirigeants

Le collaboratif : de nouvelles opportunités de croissance ?Le basculement des entreprises en mode « collaboratif et management 3.0 » peut avoir un effetvertueux sur le long terme.

Marie-Laure Hustache

Ensemble, on va plus loin – L’économie collaborative, une chance pour l’économie française !,de Gaëtan de Sainte Marie et Antoine Pivot. Éditions Alisio, mars 2016, 287 pages.

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Cette journée internationale s’ins-crivait dans le cycle du « WorldForum for a responsible Economy »,

fondé il y a dix ans par Philippe Vasseur,ancien ministre de l’Agriculture et actuelprésident de la chambre de commerce etd’industrie Nord de France. Introduisantles débats de la journée, ce dernier asouligné la profonde mutation en cours :« Le paysage change, l’agricultures’adapte et s’est toujours adaptée.D’abord avec la mécanisation, puis avecla massification de la grande distributionet la PAC, et aujourd’hui avec une agri-culture durable, inclusive et connec-tée. Nous englobons donc bien l’agricul-ture dans la troisième révolutionindustrielle en cours ». Trois tables rondes ont permis de montrerla teneur de ces changements en France,et dans le monde. La première a illustré qu’il était possible auXXIe siècle et face à de nouvellescontraintes, de produire tout en préservantl’environnement et les ressources natu-relles, grâce à l’évolution des pratiques cul-turales. Les témoignages d’un éleveurfrançais, mais aussi de deux représen-tants Africains sont venus secouerquelques certitudes occidentales. Mathieu

Savadago, directeur de l’association pourla recherche et la formation en agro-éco-logie au Burkina-Faso a souligné « laprise de conscience des paysans ». « Noussommes à l’origine de nombreux projetsavec comme objectifs les conditions de viedes populations et la protection de l’en-vironnement. Nous démarrons notresixième pro gramme. Nouscomptons désormais qua-rante villages » a-t-il expli-qué. De son côté, GodfreyNzamujo, fondateur auBénin de Songhaï, l’écoledes fermiers entrepre-neurs, a insisté sur le potentiel de lanature du soleil et des micro-organismes.Bertrand Patenotre, éleveur françaisd’ovins et expert en agro-écologie, atémoigné sur le développement de tech-niques culturales simplifiées avec desintrants minimaux. Tous ont mis en évi-dence un retour aux principes et à l’im-pératif vital d’inventer et d’innover, touten étant rentable économiquement.La deuxième table ronde dédiée à l’agri-culture connectée a également choisi d’al-ler un peu à contre-courant. Certes, il a étédémontré à travers les exemples des entre-prises Naïo Technolo gies et Deep field

Robotics combien la technologie peutrépondre à de nombreux besoins du sec-teur agricole et être au service de l’envi-ronnement. Mais loin de faire l’apologiedu 100 % automatisé, cette table rondea, grâce aux personnalités de ses inter-venants, choisi aussi de souligner que la« smart agriculture » ne se fera pas sans

une approche humaine eten réseau. Elle nécessi-tera de la formation etdes échanges plus hori-zontaux et collaboratifs.« Nous ne vivons pas unerévolution mais plutôt une

“bifurcation anthropologique” : le numé-rique est à la portée de tous, ce qui induitde nombreux changements que ce soit àtitre privé ou professionnel, dans le par-tage vertueux des connaissances » adéclaré Hervé Pillaud, éleveur et auteur dulivre Agronumericus.Toujours dans l’optique de dessiner lescontours de l’agriculture de demain, letroisième temps fort de la journée a étéune présentation de plusieurs modèlesd’agriculture dite « inclusive », où l’agri-culture urbaine et l’agriculture nomadeont eu la vedette. Wil Bekkering, direc-trice de l’Université des SciencesAppliquées CAH Vilentum Almere, aainsi présenté le projet « Floriades »au Pays-Bas qui se concrétisera en 2022l’exposition « Growing Green Cities »(croissance des villes vertes). JavierPonce a détaillé le projet « smart floa-ting farms », une ferme flottante fonc-tionnant grâce à un système de pan-neaux solaires et d’hydroponie destinéeà diminuer les importations de nourritureet à rapprocher les clients du producteur.En agriculture aussi, la réalité se rap-proche de plus en plus des rêves lesplus fous. n

(1) Vous pouvez retrouver les temps forts etcompte rendu de cette journée sur le blog dusite www.responsible-economy.org.

La troisième Révolution agricoleFin du modèle unique. Les agricultures deviennent résilientes, connectées et résolument tournées vers l’humain. Retour sur la journée de conférences internationales du 22 juin 2016 organisée à Arras dans le cadredu Forum mondial de l’Économie responsable.

Marie-Laure Hustache

Le partagevertueux de

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En matièred’agriculturedurable, les

témoignagesd’un éleveur

français, maisaussi de deuxreprésentantsafricains sont

venus secouerquelques

certitudesoccidentales.

8 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

FORUMForum mondial de l’Économie responsable

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Regard sur...

La compensation collective agricoleNouvel outil de préservation des terres agricoles découlant de la loi d’avenir pourl’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, la compensation collective agricolese met en place avec la publication d’un décret paru début septembre au Journal officiel (1).Les maîtres d’ouvrage de projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements publics et privéssusceptibles d’avoir des conséquences négatives importantes sur l’économie agricoled’un territoire sont désormais tenus de produire une étude préalable comportant notammentles mesures envisagées pour éviter ou réduire la consommation des terres agricoles.En cas d’impact notable de la construction sur l’économie agricole du territoire concerné,ils devront proposer la mise en place de mesures de compensation collective visantà consolider l’économie agricole. Le décret précise la nature des projets devant faire l’objet d’une étude préalable, le contenude celle-ci et la procédure d’examen par les préfets de département qui, avant de rendreleur avis, saisissent les commissions départementales de préservation des espaces naturels,agricoles et forestiers.

(1) Décret n° 2016-1190 du 31 août 2016 relatif à l’étude préalable et aux mesures de compensation prévues

à l’article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime. JORF n° 0204 du 2 septembre 2016.

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Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016 9

Page réalisée en partenariat avec la photothèque du ministère de l’Agriculture – http://photo.agriculture.gouv.fr

Plaine agricole en zone périurbaine

(Yvelines).

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FORUM

Installées en dehors du territoire euro-péen, les Régions ultra-périphériquesfont partie de l’Union Européenne.

Parmi celles-ci, les Canaries, Madère, laGuadeloupe et la Martinique, produi-sent de la banane depuis longtemps. Labanane est d’ailleurs la première pro-duction agricole de ces territoires etleur principal produit d’exportation. Or,avec 670 000 tonnes produites par an,la part de marché de la filière commu-nautaire sur le marché européen estde 11,7 % seulement. Pour autant, les

filières de bananes européennes sontvitales pour l’équilibre socio-écono-mique des Régions ultra-périphériqueset contribuent à en préserver l’attracti-vité économique.Les agriculteurs, souvent en exploita-tions familiales, assurent non seule-ment la production d’une banane issuede pratiques culturales vertueuse, maiscontribuent de par leur activité au main-tien de la vie rurale en garantissantdes bassins d’emplois directs et induitsdans ces Régions.

La filière banane européenne est aussi laseule filière au monde qui préserve l’exis-tence des producteurs indépendants enleur permettant de maîtriser la filièrejusqu’à la commercialisation. Elle estorganisée par des producteurs indépen-dants unifiés au sein de groupementscoopératifs qui assurent la coordinationde l’activité, l’accompagnement tech-nique, le regroupement de l’offre, sonconditionnement et la commercialisa-tion, selon leurs intérêts communs. Les producteurs européens sont les seulsau monde à produire des bananes suivantles standards sociaux et environnemen-taux européens. Dans le même temps, ilsdoivent rester compétitifs face à uneconcurrence qui malgré son dumpingsocial et environnemental, a un accès deplus en plus facilité au marché européen.La banane européenne permet la valo-risation et le respect du travail dessalariés, Ainsi, aux Antilles et auxCanaries, les salariés perçoivent desrevenus respectivement 14,8 et 12,6fois plus élevés en valeur relative queles travailleurs équatoriens. Ils bénéfi-cient également de formations et desystèmes sociaux largement supérieursaux pays africains et américains.La production de la banane européenneest plus respectueuse de l’environne-

10 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Menacée par une concurrence internationale qui ne respecte pas les mêmes exigences sociales et environnementales,la production de bananes aux Canaries, à Madère, en Guadeloupe et en Martinique reste vitale pour ces Régions.

Philippe Ruelle, directeur général UGPBAN/Fruidor

« Les producteurs debanane européens

doivent restercompétitifs face

à une concurrencequi malgré son

dumping social etenvironnemental,

a un accès de plus en plus

facilité au marchéeuropéen » souligne

Philippe Ruelle, directeur généralUGPBAN/Fruidor.

Quelques chiffres◗ Îles Canaries : 9 500 ha, 9 000 producteurs, 364 000 tonnes. Marché : Espagne(72 %). En 2012, la filière banane a généré directement 31 % de la valeur ajou-tée agricole et 0,5 % du PIB des Canaries (Gobierno de Canarias, 2014) ◗Madère :1 156 ha, 2 300 producteurs, 17 300 t. Marchés : Portugal (85 %), Madère (15 %)◗ Guadeloupe et Martinique : 8 300 ha, 650 producteurs, 270 000 t. Marchés :France (70 %), export (30 %). 432 M€ de PIB généré (incluant 129 M€ d’aides etde subventions injectées dans la filière), soit 60 % du PIB agricole de Martinique.

Un marché qui se libéraliseAvant 1993, les filières européennes de la banane évoluaient dans un cadre de mar-chés protégés, qui garantissait des débouchés stables à leur production. Avec lamise en place de l’Organisation commune de marché (OCM), en 1993, s’est ini-tié un processus de libéralisation progressive du marché européen de la bananequi se poursuit encore, après plus de vingt ans. Depuis 1993, les producteurs euro-

péens sont soumis à une forte instabilité provoquée par l’ouverture de leurs mar-chés naturels à la concurrence internationale. Parce que l’UE ne protège pas sesfrontières extérieures, elle met ses producteurs dans l’impossibilité de s’aligner surles prix bas des concurrents dont les charges sont très inférieures. Pour compenser ce handicap, l’UE a mis en place un régime d’aide, le POSEI(Programme d’options spécifiques à l’éloignement et l’insularité). Ce programmevise à compenser les handicaps structurels de ces , au moyen d’instruments de sou-tien qui font contrepoids aux effets négatifs qu’elles subissent en raison de : leuréloignement, l’étroitesse de leur territoire et de leur marché, leur insularité, leurfaible diversification productive, le manque d’activité exportatrice. Ph. R.

La banane européenne sous pressionAlors que l’Union européenne négocie actuellement avec l’Équateur un tarif doua-nier à la baisse pour exporter ses bananes au sein du marché communautaire, troiseurodéputés socialistes français Éric Andrieu, Louis-Joseph Manscour et EmmanuelMaurel (membres du Groupe de l’Alliance progressiste des Socialistes et Démocrates)

Régions ultra-périphériques

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Bananes européennes : des filières à péren

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ment. Aux Canaries et à Madère, l’uti-lisation de produits phytosanitaires estlimitée grâce au climat sec et tempéré.En Martinique et en Guadeloupe,depuis 2008, le plan Banane durableformalise les engagements environne-mentaux et sociaux de la filière. Enfin,la banane européenne est la seulebanane à avoir totalement renoncé auxépandages aériens.

Le choixde la qualité et de

l’innovation

La banane des RUP doit conserver saplace sur un marché européen de prèsde 5,7 millions de tonnes, en forte crois-sance ces dernières années. Pour rele-ver ce challenge, la production euro-péenne a fait le choix de la qualité et del’innovation. La qualité au service desconsommateurs en choisissant la certi-fication IGP (Indication géographique-ment protégée), un signe officiel dequalité de l’Union européenne et l’in-novation au service des hommes et del’environnement de nos îles, en prati-quant notamment des méthodes deculture agro écologiques. n

11Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Pour conserver sa place sur le marché, la banane européenne

a fait le choix de la qualité et de l’innovation.

s’inquiètent des conséquences qui peuvent en découler pour les producteurs desRégions ultrapériphériques. Ils demandent une modification du règlement sur lemécanisme de stabilisation pour la banane crée lors des négociations commercialesentre l’UE et les pays de la Communauté Andine (Colombie, Équateur et Pérou),tout en déplorant que ce mécanisme qui prévoit de pénaliser certains pays pro-ducteurs de banane d’Amérique latine qui auraient dépassé leurs seuils d’expor-tation sur le marché communautaire n’ait jamais été appliqué. « Il est fondamen-tal de renforcer les mesures protectrices existantes, tout en réfléchissant à unecompensation financière, afin de préserver la production européenne » estiment-ils. « Nous demandons à l’UE de mieux soutenir la banane antillaise face à cettebanane “low cost” qui inonde le marché européen. Nous prenons date avec laCommission, qui prépare actuellement une révision du POSEI (Programme d’OptionsSpécifiques à l’Éloignement et l’Insularité), afin qu’une réflexion s’engage rapide-ment pour compenser financièrement les éventuelles pertes de marchés que pour-raient subir nos producteurs » a conclu Éric Andrieu, vice-président de la commissionAgriculture du Parlement européen. Isabelle Delourme

Groupe de travail saf agr’iDées« Quel modèle de développement pour les filières agricoles dans les DOM ? » Les filières agricoles demeurent un des piliers du développement des territoiresd’Outre-Mer et y représentent un des principaux employeurs privés de main-d’œuvre. Les besoins des marchés locaux sont importants en produits alimen-taires, mais les productions de bananes et de canne à sucre y restent prépon-dérantes. Ces dernières années, des réseaux de diversification sont expérimentés.Le groupe de travail mis en place par saf agr’iDées dès 2015 sur le thème« Quel modèle de développement pour les filières agricoles dans les DOM ? » aeu pour objectif, avec les acteurs concernés et en examinant les potentialités desfilières agricoles et les accompagnements financiers disponibles, d’explorer lesmodèles envisageables de développement des filières agricoles dans les Outre-Mer. Au terme de plusieurs réunions très intéressantes, une note d’analyse a étérédigée. Elle sera prochainement publiée. I. D.

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Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

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DOSSIER

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Dossier coordonné par Isabelle Delourme

Filière lait : relever le défi du marché

Première crise grave depuis la suppression des quotaslaitiers en 2015, la baisse des cours mondiaux a été dure-ment ressentie par les éleveurs laitiers français cet été. Lastratégie des opérateurs industriels a toutefois fait ladifférence sur la « paye de lait ». Les transformateurs quiont opté pour une valorisation du lait sur les marchés desfromages et du lait infantile sont moins exposés à la vola-tilité des cours mondiaux. Pour autant, les industriels dulait restent confiants dans les perspectives de croissance.Des mesures s’imposent pour permettre aux éleveurs deregagner en compétitivité et en revenu. Faudra-t-il attendreun prochain « paquet lait » ?

L’Union européenne agit pour réduire sa production de lait p. 13 Volatilité et compétitivité : réunion de haut niveau sur le lait p. 13Une nouvelle ère p. 14Marchés laitiers : des signaux encourageants p. 14Isigny Sainte-Mère, une coopérative « made in » qualité p. 15« Lait : opportunités et stratégies gagnantes » p. 16Sodiaal teste des contrats à marges sécurisées sur son volume B p. 16Le Finistère, terre d’innovation pour l’industrie laitière p. 17Bel : Partager avec les consommateurs la durabilité de la filière p. 18Agromousquetaires s’implique dans les partenariats avec les éleveurs p. 20Vers une interdiction des cessions onéreuses des « contrats lait » p. 21Vers un renforcement du pouvoir des organisations de producteurs p. 22

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Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Ces mesures de régulation du marché, permettent d’indemniser lesproducteurs qui réduisent leur production. Elles visent à répondreau déséquilibre de marché du lait qui a entraîné la baisse excep-

tionnelle de prix constatée depuis plus d’un an.Une enveloppe de 150 millions d’euros a été mise en place au niveaueuropéen pour réduire la production. Elle permet d’indemniser chaquekilo de lait non produit à hauteur de 14 centimes d’euro. En parallèle,350 millions d’euros ont été prévus par l’Union européenne pour appor-ter un appui aux filières d’élevage en difficulté, en priorité au lait. LaFrance bénéficie dans ce cadre de 49,9 millions d’euros. Cette annoncevient en complément d’un autre ensemble de mesures d’un montant de500 millions d’euros qui avait été présenté par la Commission en sep-tembre dernier et d’une série d’autres mesures, telles que l’activation d’uneclause (article 222) permettant la conclusion d’accords volontaires entreles producteurs de lait sur la planification de la production laitière.En France, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, avait ensuiteannoncé un doublement de l’aide d’ajustement conditionnelle avecdes crédits nationaux. Cet abondement devant permettre de renforcerla mesure européenne de réduction de la production en apportant uncomplément de 10 centimes d’euro par kilo non produit.Le 27 septembre 2016, on a appris que 13 000 producteurs avaientdéposé des demandes de réduction de production pour les trois pro-chains mois. Cela correspond à plus de 180 000 tonnes. « Au niveau euro-péen, la baisse de la production de lait est estimée à un peu plus de

1,071 million de tonnes, ce qui traduit la prise de conscience de collec-tive et la pertinence du dispositif souhaité par la France depuis desmois. L’intégralité de ces volumes sera indemnisée sans stabilisateur »a indiqué le ministère dans un communiqué. Le ministre a salué la réus-site du dispositif européen de maîtrise de la production laitière etconsidéré que c’était un signal positif donné par l’Europe au marché,s’inscrivant dans la dynamique actuelle de redressement du prix des produits laitiers au niveau mondial. n Camille Bourguignon

Politiques publiques

L’Union européenne agit pour réduire sa production de laitLe 18 juillet 2016, le Conseil des ministres de l’Agriculture de l’Union européenne a adopté des mesuresdestinées notamment à permettre la réduction de la production de lait.

Suite aux conclusions de la présidencedu Conseil du 14 mars 2016, uneréunion conjointe de haut niveau des

représentants des États membres avec legroupe de travail sur les Marchés agricoles(AMTF) (1) a été organisée le 16 septembre2016 à Bruxelles pour discuter des pro-blèmes structurels dans le secteur des produits laitiers. M. Cees Veerman – prési-dent du AMTF – a présenté les travaux encours, avant un rapport prévu pour la fin del’année. Parmi ceux-ci, la volatilité des prixau travers des outils de gestion des risqueset la compétitivité des agriculteurs, maisaussi la prévention des pratiques commer-ciales déloyales et la possibilité d’élargir lesdérogations aux règles de concurrence pourrenforcer le pouvoir des agriculteurs. LesÉtats membres ont ensuite été invités à don-ner leur avis sur trois questions connexes :l’efficacité du filet de sécurité pour le secteur

du lait, le rôle des paiements découplés et lefonctionnement des observatoires des prix. En ce qui concerne le filet de sécurité, la plu-part des États membres ont exprimé une largesatisfaction en ce qui concerne son fonction-nement et de l’efficacité pour stabiliser le mar-ché, bien que les expériences récentes ontmontré ses limitations dans le soutien durevenu agricole. Le paquet lait est considérécomme un instrument efficace pour améliorerles relations contractuelles, mais son potentielest encore à être pleinement exploité. La plupart des États membres voient dans lespaiements directs découplés un moyen efficacepour protéger et stabiliser les revenus des agri-culteurs. Ils permettent aux agriculteurs derépondre aux signaux du marché tout en gar-dant un certain niveau de revenu. Toutefois,plusieurs États membres ont souligné l’impor-tance des paiements couplés, notamment àpréserver la production laitière dans les zones

les plus vulnérables. Y compris la possibilitéd’avoir une partie de paiements contra cycliquespour être plus efficaces.Les observatoires de prix ne sont pas généra-lisés, bien que tous les États membres dispo-sent de la collecte de données et de systèmesde diffusion. L’Observatoire du marché du laitest considéré comme une grande améliora-tion en termes de transparence du marché. Ilpourrait être utilement complété par des infor-mations sur les autres étapes de la chaîned’approvisionnement du lait. À noter le soucid’évaluer toute amélioration de manière à éviter une bureaucratie excessive. n C. B.

(1) Le groupe de travail de haut niveau (AMTF-Agri-market Task Force) est présidé par Cees P. Veerman.Il comprend onze experts dont Jérome Bedier, direc-teur général délégué de Carrefour, Anne-LaurePaumier, directrice adjointe de Coopde France métiersdu grain, et Louise Frescot, présidente de l’Universitéet du Centre de recherche de Wageningen (PB).

Volatilité et compétitivité

Réunion de haut niveau sur le lait

Lors du conseil informel de Bratislava le 13 septembre 2016, les ministres de l’Agriculture ont discuté notamment de la question du renforcement

du rôle des agriculteurs dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire.

DOSSIER

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DOSSIER

14 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Une nouvelle èreLes quotas laitiers ont vécu. Les ministreseuropéens de l’Agriculture en ont pro-grammé dès 2003 la suppression à l’ho-rizon 2015. Après trente années d’unemaîtrise de la production protectricepour les producteurs de lait, c’est une èrede volatilité et d’incertitudes qui s’ouvre.La volatilité des marchés s’est fait sen-tir dès la fin de la décennie 2000 quandla flambée des cours des matières pre-mières a entraîné les cotations laitièresdans une spirale à la hausse puis à labaisse. Après de longues années degrande stabilité des prix, les produc-teurs de lait font l’apprentissage de leuradaptation permanente à des fluctua-tions importantes des cours.Mais la fin des quotas laitiers ne doitpas être perçue comme la seule find’une période de quiétude. Associée àune ouverture plus grande des mar-chés internationaux, elle doit être vueaussi comme une nouvelle périoded’opportunités. La hausse du niveaude vie des pays émergents en est une.La filière française, forte de ses condi-tions naturelles, de la compétence deses hommes et de la performance deses outils industriels doit être capablede la saisir. On pense évidemment à laChine, mais l’Inde et son 1,25 milliardd’habitants est aussi un marché enexpansion. N’oublions pas non plusl’Afrique, dont la population devraitdoubler et qui, à notre porte, est lar-gement francophone. Ces marchés peu-vent constituer le salut de notre filièreà condition de ne plus les considérercomme des marchés de dégagementpour excédents conjoncturels mais deles appréhender comme des clientsfidèles et de nouer avec eux des rela-tions qui s’inscrivent dans la durée.

Pascal Férey, président de la Chambre d’agriculture de la Manche

Tribune

Cours

Marchés laitiers : des signaux encourageantsLe redressement des cours des produits laitiers sur le marché mondialse confirme. Un espoir pour les producteurs européens.

En France, l’été 2016 aura été marqué par ladétresse de nombreux producteurs de lait,en raison de leurs difficultés financières. La

réduction du prix du lait payé aux producteursa été invoquée. Pourtant, la baisse enregistrée enFrance a été moins forte que dans les autres prin-cipaux pays producteurs et exportateurs de laiteuropéens, où les niveaux de prixsont demeurés plus bas qu’enFrance. La réduction du prix aux pro-ducteurs depuis 2014 est liée à latendance baissière des coursmondiaux de l’ensemble des produits laitiersjusque début 2016. La principale cause étaitl’inadéquation de l’offre avec la demande mon-diale : la première augmentant plus vite que laseconde, les surplus de volumes disponibles sesont matérialisés dans l’Union européenne parl’accumulation de stocks d’intervention depoudre de lait écrémée (proches de 300 000tonnes en juin 2016), et de beurre sous formede stockage privé aidé (100 000 tonnes).Cependant, on assiste depuis le mois de février2016 à un revirement de tendance : les coursmondiaux du beurre, de la poudre maigre, dela poudre grasse, et du cheddar sont tousorientés à la hausse, ce que reflète l’indiceFAO des produits laitiers. Les projections reflé-tées par les enchères Fonterra dans le « GlobalDairy Trade » sont également toutes à la hausse(voir graphique).

Le ralentissement de la production mondiale (enparticulier dans l’UE et en Océanie) est en effetconcomitant à la reprise de la demande (en par-ticulier de la Chine et du Brésil), ce qui permet derééquilibrer progressivement les marchés. Pour lapremière fois depuis la fin des quotas, la collecteeuropéenne était en baisse en juin 2016. Ce ralen-

tissement devrait se confirmer audeuxième semestre 2016. Du côtéde la demande, la Chine, principalmoteur de la demande mondiale,est de retour sur les marchés : sesimportations de poudre de lait écré-

mée, de beurre et de lactosérum sont en effet enhausse depuis le mois d’avril. Un signal positif,après une année 2015 marquée par le ralentisse-ment de la demande chinoise. Les statistiques du commerce extérieur françaispendant le premier semestre 2016 sont encou-rageantes, et en particulier à destination de laChine et des États-Unis. Vers la Chine, à l’ex-ception de la poudre de lait écrémée, les expor-tations françaises ont progressé pour tous lesproduits : lait liquide, lactosérum en poudre,crème, beurre, poudre grasse et caséines. Versles États-Unis, les ventes françaises de fromagesont augmenté aussi, profitant notamment durenchérissement du dollar par rapport à l’euro. n

Marie-Cécile Damave

Sources : CNIEL, Franceagrimer, European MilkObservatory Board, USDA, FAO, Global Dairy Trade.

Retournementamorcé

La plateforme d’enchères « Global Dairy Trade » est mise enplace par la coopérative laitière néozélandaise Fonterra, opérateur majeur sur le marché mondial. Elle donne une bonnevisibilité de la tendance à venir des marchés des produits laitiers mondiaux. Sources : www.globaldairytrade.info et CNIEL

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Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Évolution de la marge brute des producteurs laitiers européens

DOSSIER

Estimations of EU milk price, operating costs and margin per tonne

Source : FADN-base 2012 + index : Eurostat, DG Agri – http://ec.europa.eu/agriculture/market-observatory/milk/pdf/eu-prices-margins_en.pdf

Dans notre pays, le prix du lait payé aux producteurs a baisséde 9 % en un an, pour atteindre 277 €/1 000 l en moyennenationale en juillet 2016, contre 232 €/1 000 l en Allemagne.La baisse a été plus marquée au Danemark, en Irlande, aux Pays-Bas et en Allemagne, atteignant des niveaux de – 15 % à– 19 %. Comme par le passé, les fluctuations de prix sontatténuées en France par rapport à nos concurrents européens,à la hausse comme à la baisse, et arrivent avec un retard dequelques mois. L’Observatoire des produits laitiers (Milk Market Observatory)mis en place par la Commission publie également un indice demarge brute des producteurs laitiers européens par trimestre.Le calcul de cet indice tient compte du revenu des exploitationslié à la production de lait et de produits laitiers des exploitations,et des charges opérationnelles spécifiques à ces productions (ali-ments, frais vétérinaires...) et non spécifiques (entretien des équi-pements, coût de l’énergie, du travail, impôts fonciers...).L’indice de marge brute européen trimestriel a baissé signifi-cativement en 2014, passant de 150 à 105, à partir d’unebase 100 en 2008. En 2015, il a en revanche oscillé entre 85 et100, et semble se stabiliser début 2016 à 90, ce qui est encou-rageant pour nos producteurs. M.-C. D.

Transformation

Isigny Sainte-Mère, une coopérative« made in » qualitéInstallée au cœur des marais du Cotentin et du Bessin, la coopérative d’Isigny Sainte-Mère continuede se différencier par sa stratégie « haut de gamme ».

«

Notre salut, c’est le haut de gamme.Compte tenu de notre taille modeste,notre stratégie consiste à proposer des

produits différents et compliqués » confie ArnaudFossey, éleveur laitier et président de la coopé-rative normande. 211 millions de litres de lait sontproduits annuellement par 450 adhérents certi-fiés « Agriconfiance » et situés aux deux tiers dansle parc naturel régional des marais du Cotentin

et du Bessin. Ici le lait est prioritairement trans-formé en beurres, crèmes, fromages sous AOP(Beurre et crème d’Isigny) ou sous Label Rouge.Une production de qualité qui a trouvé sesdébouchés, et permis de payer le lait au pro-ducteur à 310 euros/1 000 l en juillet 2016.Pour valoriser le lait écrémé, la coopérative s’estengagée depuis plus de 50 ans dans la fabrica-tion de poudre de lait infantile. Un savoir-faire

qui lui a permis de concrétiser un projet lancéen 2013, juste avant la fin des quotas laitiers.Grâce à un client chinois, une nouvelle unité depoudre de lait infantile a pu voir le jour et êtreinaugurée en juin 2015. Elle a fait passer de20 000 à 50 000 tonnes la capacité de productionde la coopérative. « Ce projet a permis aux adhé-rents d’Isigny Sainte-Mère de pouvoir faire 20 %de lait en plus » souligne Olivier Dauguet, direc-teur production lait de la coopérative.L’investissement de 65 millions d’euros a étéfinancé pour les deux tiers par la coopérative etpour un tiers par la société chinoise Biostime.Celle-ci, assurant un débouché significatif pourla coopérative (un tiers des volumes produitspendant 15 ans), a pu à l’occasion d’une aug-mentation de capital, entrer au capital de lacoopérative et bénéficier d’un poste d’adminis-trateur. Une présence à l’exportation qui va serenforcer avec ces nouvelles capacités de pro-duction de poudre de lait. Déjà présente dans 50pays, la coopérative normande s’intéresse deprès aux marchés de la ceinture asiatique et del’Afrique. n Isabelle Delourme

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Isigny Sainte-Mère a investi 65 millions d’euros dans cenouveau bâtiment cofinancé avec son client chinois Biostime,afin d’accroître sa production de poudre de lait infantile.

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DOSSIER

16 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Coopération

TROIS QUESTIONS À... Frédéric Chausson, directeur du développementcoopératif de SodiaalPartenaire de Synutra, dont l’usine finistérienne récemmentinaugurée va transformer plus de 300 millions de litres de laitpar an pour la consommation infantile chinoise, Sodiaalpoursuit sa recherche de la valeur ajoutée et de l’innovation.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Quelle est la manièredont Sodiaal envisage le retour de la valeur ajou-tée aux producteurs sur les marchés très parti-culiers des nutriments et des ingrédients laitiers ? FRÉDÉRIC CHAUSSON : Le marché des ingrédients etde la nutrition est, effectivement, en plein essor, avecnotamment la poudre de lait infantile qui est unmarché bien valorisé. Il n’y a pas de retour de lavaleur spécifique envisagé sur ces créneaux, car celaest impossible dans notre logique coopérative. Lafixation du prix du lait au sein de Sodiaal suit unemécanique précise inscrite dans notre règlementintérieur et qui combine les cotations beurre/poudre,les cotations de fromages allemands et le prix du laitallemand. Par-delà l’application mécanique de ceprix, le conseil d’administration décide de la répar-tition du résultat constaté (com-plément de prix, ristournes…).L’application de la règle de prixet de la répartition du résultat estuniforme pour l’ensemble desadhérents. Les bonnes valorisa-tions des ingrédients à hautevaleur ajoutée améliorent donc lerésultat global de la coopérative, ce qui améliore leretour sous forme de ristournes.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Sodiaal a signé le12 juillet 2016 un accord de partenariat avec ledistributeur Système U à travers vos filialesCandia et Orlait, dans le cadre de la filière deconsommation de lait Bleu Blanc Cœur, quitient compte de l’évolution des coûts de production des éleveurs. Ce type de partenariatest-il possible en dehors des filières qualité etpourquoi ?F. C. : Il est sûr que les filières spécifiques (AOP,Bio, BBC) se prêtent plus facilement à des contrac-tualisations longues car la valorisation de ces pro-duits est souvent déconnectée des cotations mon-diales de beurre et de poudre. Nous testonsnéanmoins actuellement des contrats à margessécurisées sur notre volume B, à savoir le volumedirectement exposé au beurre/poudre mondial.L’idée est de mettre à disposition du producteur unoutil pour réduire l’hyper-volatilité de ce type devolume en lui sécurisant une marge sur coût ali-

mentaire calculée tous les mois. À l’autre bout ducontrat, nous proposons à nos grands clients ache-teurs de beurre/poudre un prix calé sur cette sécu-risation de marge au producteur. Ce type de contratexiste déjà en Irlande, au sein de la coopérativeGlanbia, et nous tirerons prochainement les ensei-gnements de cette expérimentation.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Sodiaal s’est engagédans l’amélioration de son empreinte carbone.Est-ce un atout dans la compétition internatio-nale pour le groupe coopératif et pour ses pro-ducteurs de lait ? (Outil Self CO2) ?F. C. : Oui, la diminution de l’empreinte carbone dulait est clairement un enjeu identifié des années àvenir. C’est d’ores et déjà une demande de nos

grands clients et tous nos concur-rents internationaux sont « à lamanœuvre » sur le sujet. Auniveau français, la filière s’estemparée du sujet et développe leprogramme « ferme laitière bascarbone » qui vise un objectif deréduction de 20 % des émissions

de gaz à effet de serre à l’horizon 2025. Sodiaal s’ins-crit dans cette démarche en proposant à ses éleveursun outil d’auto-évaluation simple développé parl’Institut de l’élevage, Self CO2. L’idée est de sensi-biliser nos producteurs à la problématique et de lesencourager à faire une expertise plus poussée deleur système et des plans d’action à mettre enœuvre pour réduire leur empreinte carbone. Parailleurs, Sodiaal suit les initiatives européennes etinternationales en étant membre de la SustainableAgriculture Initiative et de la Global Dairy Platform.Des standards internationaux sont aujourd’hui encours de gestation et il est important de ne pas raterle démarrage de ces réflexions. n

Propos recueillis par I. D.

Les notes de saf agr’iDées

Pour mémoire, saf agr’iDées, apublié en janvier 2015 une notede think tank intitulée « Lait :opportunités et stratégiesgagnantes ». Voici résumées ci-dessous les onze propositions.1. Développer les volumes deproduction française de pro-duits sous AOP ou IGP, en par-ticulier à l’exportation vers despays dont une partie de lapopulation possède un pouvoird’achat élevé, permettrait d’ac-croître la valeur ajoutée de lafilière laitière, d’augmenter lesexcédents commerciaux et derenforcer l’activité laitière dansles régions hors Grand Ouest.2. Développer l’élevage du veaude lait dans les zones de mon-tagne qui ont du mal à valoriserleur production laitière.3. Rendre disponible, pour lesopérateurs économiques del’amont et de l’aval, l’analyse finedes données de marchés, aujour-d’hui indispensables en tantqu’outils d’aide à la décision.4. Mettre en place un système demarchés à terme sur les produitslaitiers permettrait de mieux lirele marché, qui manque aujour-d’hui de prix directeur, et per-mettrait plus de visibilité et d’an-ticipation possible de la part desacteurs de l’amont et de la trans-formation.5. renforcer nos exportationsde produits adaptés à lademande des pays émergents,notamment la Chine : fro-mages, poudre de lactosérum,poudre de lait et poudre de laitinfantile en particulier.6. Organiser des systèmes d’éco-nomie circulaire de bassin par

Sodiaal en quelques chiffres◗ 12 500 exploitations, soit 20 000 sociétaires,répartis sur plus de 70 départements.◗ Avec 4,7 milliards de litres de lait collectés,Sodiaal est la 3e coopérative laitière européenne etla 5e mondiale. ◗ Plus de 70 sites industriels en France.

« Nous testonsdes contrats à marges

sécurisées surnotre volume B »

SUITE EN PAGE 17 ◗◗◗

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DOSSIER

Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Territoires

Le Finistère, terre d’innovationpour l’industrie laitièreFierté du conseil départemental et des chambres consulaires, les entrepriseslaitières finistériennes continuent de se développer et d’innover.

Spécialisée dans les produits de tradition(beurre de baratte, crème et lait), la Laiterie LeGall à Quimper cultive cette image qui plaît

à ses clients. Rattachée à SILL, le groupe familialagroalimentaire breton dirigé par Gilles Falchun,cette laiterie a optimisé la collecte de sa matière pre-mière pour répondre à ses critères qualité. Si enconventionnel l’approvisionnement vient d’un par-tenariat avec Entremont, sur les producteurs SILL,une partie de la collecte est dirigée vers la SILL pourtransformation en poudre de lait, une autre vers LeGall, en particulier le lait du pays des Abers ou deCornouaille. La laiterie transforme 80 millions delitres de lait, dont 15 millions sont collectés enpropre en Bio. Pour le solde, la laiterie s’approvi-sionne en Bretagne auprès de Biolait. Le chiffre d’af-faires (50 millions d’euros) est réalisé en grande par-tie sur la France. Seulement 4 % de la productionest exportée. Mais Frédéric Bourget, qui dirige lacoopérative depuis 7 ans, relève une nette pro-gression depuis 3 ans.A quelques dizaines de kilomètres, la constructionde l’usine chinoise Sinutra à Carhaix interpelle lesproducteurs de lait des environs qui affichent leurscraintes en plein contexte de crise laitière. Dans leFinistère on compte 2 800 producteurs de lait, quiont en moyenne 60 vaches laitières et produisentenviron 400 000 litres de lait par an. André Sergent,le président de la chambre d’Agriculture du Finistèrereconnaît l’opportunité de cet investissement situéen Centre Bretagne, tout en constatant les difficul-tés de ces éleveurs à gérer la situation actuelle, alorsmême que les perspectives de marché à 10 ou20 ans seraient favorables. Un peu plus au nord, à Ploudaniel, se trouve lesiège du groupe coopérative agroalimentaire EVEN.La coopérative Léonarde, crée en 1930 par 27 agri-culteurs pour transformer leur lait, compte aujour-d’hui 1 500 adhérents et actionnaires et a réalisé en2014 un chiffre d’affaires de 2,2 milliards d’eurosdont 1,3 milliard d’euros via LAITA, née en 2009 durapprochement des activités laitières d’Even, deTerrena et de Triskalia, et dont Even assure laconduite opérationnelle en tant qu’actionnaire majo-ritaire. 1,4 milliard de litres de lait ont été collectésauprès de 3 560 agriculteurs.Sur ses huit sites industriels, Laïta travaille le lait deses adhérents. Quatre grandes catégories peuventêtre distinguées selon la destination des produitsfabriqués : produits de grande consommation(beurre Paysan Breton, fromages, ultrafrais...), nutri-tion santé, ingrédients pour industriels, aliment

pour jeunes mammifères. « Avec la fin des quotasl’année dernière, Even a souhaité maîtriser sesvolumes. Pour répondre à la demande des adhérentsqui souhaitent augmenter la production un sys-tème de double volume et double prix a été mis enplace. En 2015, le prix A (référence historique) a étéde 327 €/1 000 l + 12 euros de ristourne, et le prixB au prix mondial, soit 230 €/1000 l. La logiqued’Even est de développer la production s’il y a unmarché et des outils industriels en face » expliqueChristian Griner, directeur général adjoint Laïta.Pour continuer à réduire l’exposition à la volatilitédes prix mondiaux, le groupe a prévu d’investir àCréhin (Côtes-d’Armor) en 2017 et d’augmenter lacapacité de production de poudre de lait infantile,en la faisant passer de 30 000 t à 55 000 t. n I. D.

Les notes de saf agr’iDées

des réseaux de producteurs lai-tiers et de grandes cultures dansles régions de forte ambiancelaitière.7. Augmenter la taille des exploi-tations pour réaliser des écono-mies d’échelle, en particuliergrâce au salariat et aux compé-tences managériales des chefsd’entreprises agricoles, et jus-qu’à l’émergence de grandstroupeaux au système écono-mique et environnemental ratio-nalisé et optimisé.8. Renforcer la connexion duprix du lait payé au producteuravec les tendances de marchés,sans lissage ni décalage dans letemps, comme dans les princi-paux pays producteurs et expor-tateurs européens.9. Clarifier le rôle des Orga -nisations de Producteurs de laitet opter pour les OP avec trans-fert de propriété pour mieuxdéfendre les prix des produc-teurs, pendant les négociationsavec les opérateurs de la trans-formation.10. Raisonner les charges liéesà l’alimentation en fonction desdemandes de la transformation,qui pourraient faire l’objet decontrats spécifiques en fonctiondes produits finis : systèmesbasés sur le pâturage et l’auto-nomie alimentaire si la saison-nalité de la production laitièren’est pas une contrainte (fabri-cation de produits stockablestypes poudres, beurres et fro-mages), ou peu ou pas de miseà l’herbe et importance desconcentrés pour une productionde qualité et de volumes plusréguliers (fabrication de pro-duits laitiers frais).11. Utiliser les outils technolo-giques disponibles pour amélio-rer la rentabilité économiquedes élevages en amont (géné-tique, robots de traite) et en aval(unités de biogaz pour unemeilleure autonomie énergé-tique des exploitations), et mieuxvaloriser les produits laitiers issusde la transformation.

La note intégrale esttélé chargeable sur le site

www.safagridees.com

À la recherche du lait bioParticulièrement courtisés, les producteurs laitiers biobénéficient d’une demande de plus en plus forte.Pour Philippe Arnaud, président de la maison de laBio du Finistère (qui regroupe les collèges consom-mateurs, producteurs, transformateurs, distribu-teurs) l’objectif est de développer la filière à tous leséchelons. Depuis octobre 2015, il constate unevague de conversion. Le prix du lait bio (environ430 €/1 000 l) laisse songeur plus d’un éleveur.« Les opérateurs ont deux ans pour anticiper, comptetenu des délais de conversion. Mais pour l’instant,malgré les gros volumes qui vont arriver, noussommes capables de gérer cette offre » fait-il tou-tefois remarquer. Pour ne pas subir les travers queconnaissent certains producteurs de lait conven-tionnels, les producteurs bio bretons ont déjà choiside s’organiser en OP et de faire front pour négocierles prix et peut-être parvenir aux prix payés auxAllemands (490 €/ 1 000 l). Pour eux, pas questionne pas voir le prix du lait bio augmenter tous les ans.

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Depuis 3 ans, le groupe Even a investi 17 millions d’eurospour moderniser la fromagerie de Ploudaniel, un site quireçoit quotidiennement 1 million de litres de lait et produit1 000 meules d’emmental/jour.

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DOSSIER

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Industrie fromagère

TROIS QUESTIONS À... Magali Sartre,directrice RSE et Communicationdu groupe BelLe groupe Bel, troisième producteur mondial des fromages de marques, dontLa Vache qui Rit®, promeut une production laitière durable et vise àrépondre aux attentes de ses 400 millions de consommateurs.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Quelles sont les actionsentreprises par Bel pour promouvoir la durabi-lité de la production laitière ? MAGALI SARTRE : Nous avons décidé de mettre l’ac-cent sur la filière laitière, car les analyses de cyclede vie menées sur nos produits ont montré que laplus grande part de notre empreinte environne-mentale était imputable aux étapes en amont de nosusines, et notamment la production laitière.Concrètement, nous avons signé un partenariatavec le WWF France en 2012 afin d’identifier lesenjeux environnementaux prioritaires pour la réduc-tion de l’impact environnemental de nos produits etapporter des solutions pratiques et mesurables.

Une première phase d’étude a démontré que l’ali-mentation des vaches laitières était un maillon essen-tiel d’une filière plus durable. La production de sojaet de tourteau de palmiste aussi appelé PKE (PalmKernel Expeller) qui entrent dans la composition dela ration de la vache laitière affiche des impacts envi-ronnementaux particulièrement élevés.Devenu membre de la RTRS (Table Ronde pour leSoja Responsable) en 2014, le groupe Bel a franchi

une nouvelle étape en 2015 en achetant des certi-ficats RTRS pour compenser l’équivalent de 100 %des volumes de soja utilisés dans l’alimentationdes vaches laitières de ses producteurs à traversl’Europe, soit 44 500 tonnes. Pour donner plus desens à son engagement, le groupe Bel soutientaussi depuis 2014 un projet de terrain pour aider desproducteurs de soja dans la région du Mato-Grossoau Brésil à accéder à la certification RTRS en adop-tant des pratiques plus responsables. À ce jour, 21 342 hectares de culture de soja ont étécertifiés RTRS au Brésil, couvrant ainsi les volumesnécessaires pour le groupe Bel. Neuf producteursparticipent aujourd’hui au projet et 60 000 hectaresde soja s’ajoutent à cette action en 2016. Toujours avec le WWF France, Bel a engagé en 2015une démarche identique concernant le tourteau depalmiste (ou PKE) et soutient aussi un programmesitué à Bornéo en Malaisie. Le groupe accompagneaujourd’hui des petits producteurs locaux pour la cer-tification RSPO (Table Ronde pour l’Huile de PalmeDurable), aide à la valorisation des résidus de pro-duction de l’huile de palme comme le Palm KernelExpeller (PKE) et favorise ainsi la mise en placed’une filière PKE plus transparente. Depuis 2016, Bel couvre l’équivalent de 100 %des volumes de soja (certification RTRS) et de PKE(certification RSPO) utilisés au niveau mondialpour produire le lait qui entre dans la compositionde ses fromages. Grâce à un partenariat de 3 ans, nous avons pu rapi-dement agir pour faire évoluer les pratiques.Aujourd’hui, nous renouvelons notre partenariatavec le WWF France pour aller plus loin dansnotre engagement commun d’action en faveur dela durabilité de la filière laitière. De nouveaux pro-grammes sont à l’étude pour privilégier uneapproche locale fondée sur plusieurs axes de tra-vail : substituer le soja d’importation dans l’alimen-tation des vaches laitières par de l’approvisionne-ment local lorsque cela est possible ou encoreaccompagner les producteurs dans leurs pratiquesen matière d’empreinte environnementale.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Le groupe Bel, entreprisefamiliale, a su préserver une identité forte et unlien étroit avec les consommateurs. Comment cechoix de la qualité a-t-il orienté votre stratégie ?

« Depuis 2016, Bel couvrel’équivalent de 100 % des volumes

de soja (certification RTRS) etde PKE (certification RSPO) utilisés

au niveau mondial pour produirele lait qui entre dans la composition

de ses fromages » expliqueMagali Sartre, directrice RSE

et Communication du groupe Bel.

Le groupe Bel en résuméGroupe familial, né il y a plus de 150 ans dans le Jura, Bel est une entreprise fromagère devenuen° 3 mondial des fromages de marques. Avec ses 12 000 collaborateurs, répartis dans 33 paysd’implantation et 30 sites de production, Bel est présent, avec plus de vingt-cinq marques inter-nationales et locales (La Vache qui rit®, Kiri®, Mini Babybel®, Leerdammer®, Boursin®...), dansprès de 130 pays (chiffres 2015. Rapport annuel).

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Un nouveau programme est à l’étudepour substituer le soja d’importationdans l’alimentation des vacheslaitières par de l’approvisionnementlocal lorsque cela est possible.

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DOSSIER

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M. S. : La force de nos marques réside dans leuruniversalité et leur capacité à créer des liens fortsavec leurs consommateurs. Elles sont synonymes dequalité, de plaisir sain et s’adaptent aux modes devie différenciés de nos consommateurs dans lemonde entier. Dans les 30 usines du groupe, nous appliquons lesmêmes exigences de qualité et de sécurité alimen-taire, c’est notre première priorité. Aujourd’hui, lesconsommateurs sont plus exigeants et il fautl’avouer, pour certains d’entre eux, parfois méfiantsvis-à-vis de l’industrie agroalimentaire. C’est pourquoi notre straté-gie vise tout d’abord à fairesauter les barrières entre nouset nos consommateurs : nousnous ouvrons au dialogueavec eux et renforçons le liende proximité, via les réseauxsociaux notamment. La qualité gustative, le plaisir et l’évolution du pro-fil nutritionnel de nos produits restent nos princi-pales priorités. Mais aujourd’hui l’exigence de qua-lité est aussi éthique. C’est pourquoi nous souhaitonspartager avec nos consommateurs les progrèsaccomplis en termes de durabilité de la filière,d’accès aux bienfaits du lait, de progrès nutrition-nel et d’amélioration de l’empreinte environne-mentale de nos emballages. Les actions menéesdepuis 2008 commencent à porter leurs fruits etentrent en résonance avec les valeurs de nosmarques et les attentes de nos consommateurs.

AGRICULTEURS DE FRANCE : Parlons innovation etproduits : quels sont vos dernières réalisations etprojets, notamment sur le créneau des produitsBel nomades et sains ? M. S. : Intrinsèquement nos fromages apportent lesbienfaits du lait dans le monde entier. L’un de nosaxes de développement de produits est d’ailleursl’adaptation des recettes et des formats en fonctiondes goûts et des besoins nutritionnels des consom-

mateurs. Par exemple, au Moyen-Orient, le Kiri® seconsomme essentiellement en barquette et au petit-déjeuner. En France par exemple, Bel a signéen 2011 deux chartes d’Engagements volontairesde progrès nutritionnels avec les pouvoirspublics – dans le cadre du Programme nationalnutrition santé (PNNS) – pour deux marques emblé-matiques du groupe : La Vache qui rit® et Kiri®. À tra-vers ces chartes, ce sont près de vingt références defromages qui ont vu leur qualité nutritionnelle amé-liorée (réduction de la teneur moyenne en lipideset en sodium, augmentation de la teneur moyenne

en calcium) entre 2011 et fin2014. Trois ans après la signa-ture des chartes avec l’Étatfrançais, les objectifs étaienttous atteints voire dépassésdans certains cas.Par ailleurs, l’une des marquesde fabrique de Bel, c’est la

portion. Chaque portion créée par Bel répond aussià l’évolution du mode de vie et des besoins desconsommateurs de plus en plus à la recherche deproduits de snacking sain. Le succès phénoménal deMini Babybel® en Europe et sur le continent améri-cain illustre parfaitement cette tendance.C’est pour cela qu’en août dernier, nous avonsannoncé être entrés en négociation exclusive pouracquérir le groupe MOM qui a notamment créé lacatégorie de la compote en gourde avec sesmarques Pom’Potes® et GoGosqueeZ®. Ensemble,nous avons l’ambition de constituer un acteur mon-dial majeur du snacking sain en portions, fondé surdes marques fortes et innovantes ainsi qu’une trèsforte complémentarité des gammes de produits etdes géographies. Notre volonté est de constituer avec le groupeMOM un acteur mondial majeur du snacking sain,fondé sur des marques fortes et innovantes ainsiqu’une très forte complémentarité des gammes deproduits et des géographies. nPropos recueillis par I. D. et Marie-Laure Hustache

« Partager avecles consommateurs les

progrès dans la durabilitéde la filière »

« Aujourd’hui l’exigence de qualitédes consommateurs est aussi éthique »Magali Sartre, directrice RSEet Communication du groupe Bel.

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DOSSIER

20 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Contractualisation

Agromousquetairess’implique dans les partenariatsavec les éleveursLe pôle agroalimentaire du Groupement des Mousquetaires compte aussideux laiteries qui contractualisent avec des éleveurs laitiers partenaires etadhérents à sa charte.

Plus de 500 éleveurs laitiers français, partenaires de notre filière lait, approvi-sionnent nos deux laiteries : la Laiterie Saint-

Père (Loire-Atlantique) et la Fruitière de Domessin(Isère). Nous formons ensemblele seul groupe laitier français quiréunit éleveurs, industriel(Agromousquetaires) et distribu-teur (Intermarché).100 % français, les produits laitiersPâturages fabriqués à la LaiterieSaint-Père sont issus du lait collecté chez les 400éleveurs laitiers partenaires. Tous les éleveurs du

réseau de collecte sont à moins de 100 km de lalaiterie. Le lait collecté est transformé et condi-tionné sur place, à Saint-Père-en-Retz, en Loire-Atlantique.

Nos partenaires, certains depuisplusieurs générations adhérent àla charte Agromousquetaires. Parcette charte, le producteur de laitet la laiterie s’engagent aux tra-vers d’un ensemble de démarchesau respect de valeurs essentielles,

et à toujours faire évoluer la maîtrise de qua-lité. Cette charte participe à l’améliorationconstante de la qualité des produits pour la sécu-rité des consommateurs. Elle constitue un soclecommun et un engagement réciproque pour ledéveloppement de la filière laitière dans notre bas-sin de production. Elle comporte quatre voletsessentiels :• un contrat de vente et d’achat de lait de vache ;• l’engagement du producteur dans la charte desbonnes pratiques d’élevage ;• l’engagement du producteur sur l’accès sécuriséde la collecte du lait et les bonnes conditions destockage du lait ;• un accompagnement de la Laiterie Saint-Père,par les conseils des agents relation culture et des

« Le partenariat unique,construit par Intermarché avec ses

partenaires éleveurs contribue àune meilleure valorisation de

la production et leur offre uneplus grande visibilité sur l’avenir

de leur exploitation » indiqueChristophe Bonno, directeur

général d’Agromousquetaires.

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Des produits alternatifs aux grandes marquesFort de 64 sites de production et 11 000 collaborateurs, Agromousquetaires permet auxenseignes du groupement de proposer des produits alternatifs aux grandes marques natio-nales. Ses objectifs sont triples :◗ favoriser l’indépendance d’approvisionnement du groupement ;◗ maîtriser les processus de fabrication, la qualité et le prix des produits proposés auxconsommateurs ;◗ adapter les produits aux besoins du marché.Le pôle Agromousquetaires a représenté près de 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2014.Les unités de production fabriquent les marques propres du groupement dans des secteurstrès diversifiés comme les produits laitiers (Pâturages), les céréales (Chabrior et Filet Bleu),les produits carnés (Jean Rozé, Monique Ranou), les produits de la mer (Capitaine Cook). Pour aller plus loin dans leur démarche, les Mousquetaires ont innové et créé une unité debiodiesel alimentée à partir des graisses animales non alimentaires issues de la filière.

En signant la charte Agromousquetaires,le producteur de lait et la laiteries’engagent à toujours faire évoluerla maîtrise de qualité.

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Projet de loi Sapin II

Vers une interdiction des cessionsonéreuses des « contrats lait »Le projet de loi Sapin II prévoit d’interdire la cession à titre onéreux descontrats de vente de lait de vache. Une nouvelle occasion manquée dedonner corps au fonds agricole.

DOSSIER

Le projet de loi relatif à la transparence, à lalutte contre la corruption et à la modernisationde la vie économique, encore appelé projet de

loi Sapin II, présenté en Conseil desministres le 30 mars 2016, a étéadopté en première lecture parl’Assemblée nationale le 14 juin 2016et modifié par le Sénat au terme d’un vote du8 juillet suivant. La commission mixte paritaire,qui s’est tenue le 14 septembre 2016 a échoué. Uneseconde lecture s’engage dans le cadre d’une pro-cédure accélérée.Selon le gouvernement, ce texte est destiné à por-ter la législation française aux meilleurs standardseuropéens et internationaux dans la lutte contre lacorruption. Plus étonnant, il constitue également levéhicule législatif choisi par l’exécutif pour interdirela cession à titre onéreux des contrats de vente delait de vache.Certes, la cession du contrat de vente de lait, dontle principe avait été validé par la Commissioninterprofessionnelle des pratiques contractuelles(CIPC) en 2012(1), demeure, mais le caractère oné-reux de cette cession est prohibé et cette prohibi-tion a un caractère d’ordre public. Concrètement, l’article 30 du projet de loi pro-pose l’insertion d’un nouvel article L 631-24-1 ducode rural et de la pêche maritime prévoyant quependant une période de cinq années, portée àsept ans par l’Assemblée nationale, les contratsentre producteurs et acheteurs mentionnés à l’ar-ticle L. 631-24 du même code, lorsqu’ils portent surl’achat de lait de vache, ne peuvent faire l’objetd’une cession à titre onéreux. Saisi conformément à l’article 39 de la Constitution,le Conseil d’État a validé dans son principe cettemesure, « malgré le caractère succinct des données

de l’étude d’impact sur l’ampleur d’un phénomènetrop récent pour être complètement évalué ». Enrevanche, la Haute juridiction s’est opposée à la dis-

position relative aux modalités d’unepossible prorogation de l’interdic-tion par l’autorité administrative, ren-dant « indéfinie la durée d’application

de la mesure » et, par conséquent, jugée « incom-patible avec les exigences de protection des libertésconstitutionnelles »(2).Au-delà de la question de sa conformité aux droitset libertés garantis par le bloc de constitutionnalité– liberté contractuelle, droit de propriété, libertéd’entreprendre – l’interdiction envisagée ne retirerapas au contrat de vente de lait la valeur écono-mique que les producteurs entendent lui conférer.Pour mémoire, bien que dépourvus de toute

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Valeur vénale

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réunions techniques proposées aux éleveurs, maisaussi par un soutien financier spécifique. En 2015, 205 millions de litres de lait ont été col-lectés, dont 25 millions en bio et 3 millions en« Bleu-Blanc-Cœur ». Nous avons été les premiers à apposer le logo col-lectif « Lait collecté et conditionné en France » sur tousnos produits à marque propre Pâturages. Et nousavons également été les premiers à signer la charteLaitière des valeurs de la FNPL. Nous rémunéronsnos producteurs autour de 300 € les 1 000 litres.

Le partenariat unique, construit par Intermarchéavec ses partenaires éleveurs apporte une garan-tie de débouchés et de rémunération. Il contri-bue à une meilleure valorisation de la productionet offre aux éleveurs une plus grande visibi-lité sur l’avenir de leur exploitation. Cela garan-tit aux consommateurs des produits laitiers dequalité, respectueux du travail des éleveurs, et àprix attractif. n

Christophe Bonno, directeur

général Agromousquetaires

À défaut de liberté totale dans lacession des contrats de vente de laitde vache, il est regrettable de nepas avoir à tout le moins envisagéla mise en place d’un marché encadré.

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22 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Contractualisation

Vers un renforcement du pouvoir des organisations de producteurs Un consensus se dégage au Parlement, dans le cadre du projet de loi Sapin II, pour rééquilibrer le rapportde force entre acheteurs et organisations de producteurs.

Présenté au Conseil des ministres du30 mars 2016, le projet de loi relatif à latransparence, à la lutte contre la cor-

ruption et à la modernisation de la vie éco-nomique, encore appelé loi Sapin II, disposaitcertes d’un chapitre consacré aux « mesuresrelatives à l’amélioration de la situation finan-cière des exploitations agricoles », mais quine prévoyait, pour l’essentiel, que l’interdic-tion à titre onéreux des contrats de vente delait de vache (1). Le législateur a profité de cetexte dont ce n’était pourtant pas l’objet ini-tial pour rouvrir le dossier de la contractuali-sation en agriculture.Pour mémoire, la loi de modernisation del’agriculture et de la pêche (LMAP) du

27 juillet 2010 a fixé un cadre spécifique pourla contractualisation dans la vente de pro-duits agricoles destinés à la revente ou à latransformation. Plus précisément, l’article L631-24 du code rural et de lapêche maritime a prévu laformalisation de contratsécrits et imposé l’insertiond’un certain nombre declauses dans ces contrats(durée, quantité de produits cédés, qualitémodalité de collecte ou de livraison, conditionde détermination du prix).Le même article a prévu la possibilité derendre obligatoire la proposition de contratsécrits par extension d’accords interprofes-

sionnels, ou par décret. À ce jour, un décretdu 30 décembre 2010 a rendu les contratsobligatoires pour les fruits et légumes frais etle lait de vache à compter du 1er avril 2011 et

un arrêté du 15 février 2011a rendu obligatoire l’accordinterprofessionnel signé spé-cifiquement dans le secteurde la viande ovine.Outre la loi « Hamon » du

17 mars 2014 et la loi « Macron » du 6 août2015, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’ali-mentation et la forêt (LAAAF) du 13 octobre2014 a également fait évoluer les mécanismesde contractualisation, en prévoyant en parti-culier que les décrets instaurant la contrac-

valeur patrimoniale (3), les quo-tas laitiers attribués au producteuront toujours eu une valeur écono-mique. Il en est de même descontrats de vente de lait quandbien même seraient-ils demain horsdu commerce. En effet, la valeuréconomique conférée à de telscontrats se retrouvera, comme parle passé, dans les autres élémentsvalorisables de l’exploitation :terres, bâtiments, matériel, droits à paiement...En outre, le projet de loi n’interdit pas la ces-sion des contrats à titre gratuit, si bien que ledroit comptable (4) peut conduire à traiter cetteopération comme l’acquisition d’un bien àtitre gratuit, en l’estimant à sa valeur vénale(règle de donation), c’est-à-dire au prix qu’ac-cepterait de payer un acquéreur éventuel dubien dans l’état et le lieu où se trouve le bienen question.Interdire la cession onéreuse du contrat devente de lait, c’est en revanche rendre impos-sible son intégration dans le fonds agricole.Car le contrat de vente de lait constitue un élé-ment incorporel valorisable en cas de ces-sion du fonds, au même titre que le droit aubail – quand il est cessible –, les marques, laclientèle ou tout autre contrat cessible dont le

producteur bénéficiepour exercer son acti-vité agricole et dégagerun revenu.Plutôt qu’une interdic-tion pure et simple dela cession onéreuse descontrats de vente delait, il apparaît plusopportun d’encadrer lapratique et de prévoirles hypothèses dans les-quelles elle peut avoirlieu. La valorisation ducontrat par un produc-

teur à l’occasion de son départ en retraite oud’un changement de production est-elle sicondamnable ?À défaut de liberté totale dans la cession descontrats de vente de lait de vache, il est regret-table de ne pas avoir à tout le moins envisagéla mise en place d’un marché encadré. Il fautse rappeler que dans un passé récent, l’Étatavait même mis en place un dispositif detransfert de quantités de référence laitière sansterre entre producteurs (TSST), dans lequel leproducteur cédant bénéficiait d’une indemnitédont le barème était fixé par arrêté.Mais peut-être que les parlementaires n’ont pasréussi à faire coexister un système d’encadre-ment du marché des contrats avec le rôle ren-forcé conféré aux organisations de produc-teurs. En effet, si l’on se réfère à la version du

texte modifié par les sénateurs, l’organisationde producteurs ou l’association d’organisa-tions de producteurs sera, à l’avenir, habilitéeà négocier les contrats au nom et pour lecompte de ses membres en vertu d’un man-dat donné à cet effet, la conclusion descontrats étant alors subordonnée à la conclu-sion d’un accord-cadre écrit entre cette orga-nisation ou association et l’acheteur. Or cet accord-cadre peut notamment portersur les modalités de cession des contrats et derépartition des quantités à livrer entre les pro-ducteurs membres de l’organisation ou repré-sentés par l’association (5). Une telle organisation s’accommode certes mald’une cession onéreuse des contrats de ventede lait de vache. Néanmoins, une conciliationentre cette nouvelle organisation et le caractèrecessible et marchand des « contrats lait » n’était-elle pas envisageable ? Il est à craindre que laquestion ne soit pas expertisée par les parle-mentaires. n Jean-Baptiste Millard

(1) Avis n° 2012-10 de la CIPC du 5 mars 2012 rela-tif à la cessibilité du contrat.(2) Avis n° 391.262 du Conseil d’État du 24 mars2016.(3) Dans un arrêt du 31 octobre 2012, la Cour decassation a qualifié les quantités de référence laitièred’autorisations administratives non négociables(Cass. 3e civ., 31 octobre 2012, n° 10-17851, Bull. civ.2012, III, n° 156).(4) Article 213-4 du plan comptable général.(5) Article 30 C du projet de loi modifié par le Sénat.

Renforcerl’accord-cadre écrit

◗◗◗

Jean-Baptiste Millard

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DOSSIER

Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

tualisation obligatoire pourraient imposer l’inter-vention d’un contrat-cadre, signé par l’organisationde producteurs, lorsque celle-ci a reçu mandatde négociation de ses adhérents. Aucun décretn’est toutefois intervenu à ce jour pour imposer detels contrats-cadres.Aussi, dans le cadre de la loi Sapin II, les parle-mentaires proposent de conférerplus de force à l’accord-cadreécrit, puisque celui-ci devientobligatoire lorsque la conclusionou la proposition de contratsécrits a été rendue obligatoire soitpar un décret, soit par un accordinterprofessionnel et qu’une organisation de pro-ducteurs (OP) ou une association d’organisationsde producteurs (AOP) est habilitée à négocier lescontrats au nom et pour le compte de ses membresen vertu d’un mandat donné à cet effet (2). Cet accord-cadre serait en mesure de porter sur l’ensemble des clauses exigées dans le contratécrit et préciserait en outre :• la quantité totale et la qualité à livrer par les pro-ducteurs membres de l’OP ou les producteursreprésentés par l’AOP ainsi que la répartition decette quantité entre les producteurs ;• les modalités de cession des contrats et derépartition des quantités à livrer entre les produc-teurs membres de l’organisation ou les producteursreprésentés par l’association ;• les règles organisant les relations entre l’acheteuret l’organisation de producteurs ou l’associationd’organisations de producteurs ; • les modalités de la négociation annuelle sur lesvolumes et le prix ou les modalités de détermi-nation du prix entre l’acheteur et l’organisation deproducteurs ou l’association d’organisations deproducteurs ;• il pourrait enfin préciser les modalités de gestiondes écarts entre le volume ou la quantité à livreret le volume ou la quantité effectivement livré

par les producteurs membres de l’orga nisation oules producteurs représentés par l’association.S’il devait être voté en l’état, ce texte renforceraitsignificativement le pouvoir des OP Laitières, d’au-tant plus que l’acheteur serait tenu de transmettremensuellement à l’OP ou l’AOP avec laquelle unaccord-cadre a été conclu les éléments figurant sur

les factures individuelles des pro-ducteurs membres ayant donnéun mandat de facturation àl’acheteur et les indices et don-nées utilisés dans les modalitésde détermination du prix d’achataux producteurs.

Enfin, le projet de loi prévoit que les critères etmodalités de détermination du prix dans le contratdevront faire référence à un ou plusieurs indicateurspublics des coûts de production en agriculture et àun ou plusieurs indices publics des prix des produitsagricoles ou alimentaires. L’idée des parlementairesest que l’indicateur des coûts de production soit unindicateur des variations de ces coûts, qui doiventavoir un effet sur le calcul du prix. Définis par toute structure leur conférant un carac-tère public, ces indicateurs et indices peuvent êtrerégionaux, nationaux et européens selon le texte.Et leur évolution doit est communiquée sur unebase mensuelle par l’acheteur à l’organisation deproducteurs ou à l’association d’organisations deproducteurs signataire de l’accord-cadre.Le texte est ambitieux, et il devrait être rapidementvoté, dans la mesure où la loi Sapin II est soumiseà une procédure accélérée et que les parlemen-taires des deux hémicycles semblent être d’ac-cord sur l’essentiel des points ici évoqués. n

Jean-Baptiste Millard

(1) Voir sur ce point notre article en page 21 de ce dossier :« Loi Sapin II : vers une interdiction de la cession onéreusedes contrats lait ».(2) Article 30 C du projet de loi Sapin II modifié par le Sénat.

L’accord-cadre pourraitpréciser la répartition entreproducteurs de la quantitétotale et de la qualité à livrer.

Des précisionssur le prix d’achataux producteurs

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AGRICULTEURS DE FRANCE : « Après l’uberisation, vous pressentezdans l’agroalimentaire une « amazonisation » de l’offre de pro-duits alimentaires, pouvez-vous nous en dire plus ? »KEVIN CAMPHUIS : Amazon a annoncé au printemps 2016 à lafois la livraison de produits frais en une heure à Paris, Londreset dix villes américaines et le lancement de ses propresgammes de produits alimentaires, qui représentent l’abou-tissement de 15 ans de développement pour offrir une expé-rience d’usage complète à ses millions d’utilisateurs. C’estexemplaire de la manière dont des acteurs venusdu digital sont capables de totalement révolu-tionner une industrie dont ils ne sont pas issus. Etce par la combinaison d’une maîtrise de techno-logies numériques et d’une approche centrée uti-lisateurs hors pair, deux processus avec lequel la majorité desacteurs de l’agroalimentaire n’est pas familière. Et la consé-quence en est une remise en cause complète d’une chaîne devaleur producteurs > transformateurs > distributeur qui n’apas évolué depuis des décennies et se trouve désormais tota-lement « disruptée ».

AGRICULTEURS DE FRANCE : « Les acteurs traditionnels sont-ilsprêts à saisir l’opportunité de cette révolution des usages ? » K. C. : La prise de conscience est on ne peut plus récente, sur-tout en France. Car c’est tellement nouveau, et venu de l’ex-térieur, que nombre d’acteurs n’ont pas vu venir les milliers destart-up qui à l’instar d’Amazon inventent de nouvelles réponsesà de vrais besoins quotidiens. Une fois la prise de conscience,il faut leur donner le temps de comprendre la dynamique etmesurer les enjeux : c’est l’étape nécessaire pour passer de ce

qui peut être une menace à une source d’oppor-tunités de changer de modèle, se réinventer, explo-rer de nouvelles voies... Certains acteurs, encorepeu nombreux, sont en train de mettre en place desprojets de transformation et doivent faire le tri

entre de nombreux modèles et sollicitations. Une chose est cer-taine, ce que j’appelle la nouvelle économie de la food est làpour se développer durablement, avec ou sans les acteurstraditionnels : ceux qui sauront collaborer efficacement vontaccélérer leur nécessaire mutation, et les projets que nous avonsdéjà accompagné en ce sens en sont la preuve. Et compte tenude l’ampleur de la révolution, cela leur demande de mettre enplace des changements d’organisation, de process et desmoyens à la mesure des enjeux.

AGRICULTEURS DE FRANCE : « En France, cette hyper-person-nalisation de l’alimentation, où le consommateur n’a mêmeplus à sortir de chez lui, aura-t-elle la même ampleur ? » K. C. : Regardez le nombre de livreurs dans Paris le soir : quiaurait imaginé que, dans le pays de l’expertise culinaire, tant defoyers se convertiraient si vite à la livraison de repas à domicile ?Parce que c’est une bonne réponse à de vrais besoins de variété,de simplicité et à coût abordable. De même la livraison à domi-cile n’est que la prochaine étape des « drives » qui se sont déve-loppés rapidement en France. Donc oui, même si nos spécifici-tés culturelles resteront, ces modèles de simplification et cessolutions de personnalisation vont attirer de plus en plus declients, à commencer par les plus jeunes. N’est-ce pas uneopportunité pour nombre d’acteurs traditionnels de se réinven-ter ? Et de s’approprier ces nouvelles technologies pour enrichirleurs propositions de valeur, ce qu’ils essaient déjà d’une manièreou d’une autre de faire en mettant en place des démarchesCRM(1), par exemple. La différence c’est que l’innovation neconcerne plus seulement les démarches de marketing digital maisconcerne désormais l’offre produit elle-même. Et là, les start-upque nous accompagnons ne manquent pas d’idées ! n

(1) CRM (Custom Relashionship Manage ment) : gestion de la relation clients.

TROIS QUESTIONS À... Kevin Camphuis, accélérateur des start-up de l’alimentaire Kevin Camphuis, cofondateur de ShakeUp Factory, accélérateur de start-up dédiée à la « foodtech »a accepté de répondre à nos questions.

Propos recueillis par Marie-Laure Hustache

Saisir ladynamique

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ShakeUpFactory, estune société

de LBO etVentureCapital,

cofondée par Kevin

Camphuis. Elleaccompagneles start-up

qui souhaitentse développer

dans le secteuralimentaire.

FORUMInterview

24 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

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ENTREPRISEAgroalimentaire

25Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

SIAL Paris 2016 : place à l’innovationalimentaire et au bien-manger7 000 exposants, plus de 155 000 visiteurs professionnels attendus dont 70 % d’internationaux...le SIAL Paris qui ouvrira ses portes du 16 au 20 octobre 2016 au Parc Paris-Nord Villepinte, 52 ans aprèssa création, se veut plus que jamais le rendez-vous mondial de l’innovation alimentaire.

Isabelle Delourme

Installé au cœur d’un réseau de sixautres salons experts (Toronto,Montréal, Abu Dhabi, Jakarta,

Manille, Shanghai), SIAL Paris, présen-tera près de 400 000 produits venusde plus de 100 pays, soit l’équivalent de100 supermarchés.Au-delà de ces chiffres, SIAL Paris, reflètele dynamisme et l’innovation d’une indus-trie alimentaire mondiale, soucieuse derépondre le mieux possible aux attentesdes consommateurs. Pour mieux connaîtrecelles-ci, l’étude « Food 360 » réalisée parTNS Sofres pour le SIAL, en synergie avecle cahier de tendances alimentaires FuturFood de XTC World Innovation et pré-sentée à la presse le 6 septembre 2016,a sondé les consommateurs de neuf zones(France, Royaume-Uni, Allemagne,Espagne, Russie, Chine, Moyen-Orient,Asie du Sud-Est et États-Unis). Quatrethèmes ont été choisis :Pourquoi les basiques sont-ilstoujours incontournables ? Jeconsomme pour mieux man-ger ou manger mieux ? Est-ilpossible d’allier alimentation et durable ?L’assiette connectée a-t-elle un avenir ?Cinq évolutions marquantes peuvent enêtre déduites depuis les deux précédentesétudes réalisées en 2012 et 2014.Globalement, les comportements amor-cés il y a 4 ans se prolongent. Ils pourrontinspirer les industriels pour construire leuroffre des prochaines années. Ainsi, touspays confondus, il apparaît que les consom-mateurs sont moins enclins à payer pluscher des produits alimentaires dans cer-taines occasions (62 % en 2016, contre66 % en 2012). Leur confiance à l’égard dela qualité des produits alimentaires a légè-rement baissé (83 % contre 85 % en2012). Ils sont de plus en plus persuadésque l’alimentation peut engendrer desrisques pour la santé (66 % contre 53 %en 2012). Ils se disent plus intéressés par

magne (26 %), les États-Unis (40 %), etle Royaume-Uni (39 %), par rapport à laChine (86 %), l’Asie du Sud-Est (85 %),le Moyen-Orient (55 %) ou mêmel’Espagne (57 %). En rappelant que chaque année, entre25 000 et 30 000 nouveaux conceptsde produits alimentaires sont lancés dansle monde, Xavier Terlet (XTC world inno-vation) a mis en évidence la créativitéde l’industrie alimentaire. Parmi les pro-duits plus sains, plus authentiques, pluslocaux, vous pourrez notamment décou-vrir sur le SIAL, des purées de légumessans additif, ni conservateur (Agro -mousquetaires), des pâtes à la farine delégumineuse (Pedon), des viandes mâtu-rées (Puigrenier), ou encore du coulis defraises des Hauts de France (Fruits rougesand Co), des sauces tomate made inFrance (Le Cabanon). À noter que sur la question du bien-man-ger, le think tank saf agr’iDées s’est saisi decette question dans sa note d’analyse« Bien manger, cela s’apprend et prenddu temps » (www.safagridees.com/publication/bien-manger-cela-sapprend-et-prend-du-temps). Il a souligné quepour sensibiliser la population au « bienmanger » il convient d’agir sur le longterme et par la pédagogie tournée vers lebénéfice, recréant l’envie et la réappro-priation, au-delà des actions de commu-nication des différents acteurs souventculpabilisantes et superficielles. n

les produits issus de l’agriculture biolo-gique et essaient d’en consommer dès quepossible (53 % contre 48 % en 2012), etportent plus d’intérêt aux mentions « sansantibiotique » (73 % contre 71 %) ou« sans huile de palme » (56 % contre50 %) sur les emballages. Enfin, ils mon-trent une attention croissante au dévelop-pement durable, et en particulier sur lesemballages recyclages (54 % contre 50 %). Bien sûr, ces moyennes cachent des dis-parités entre les pays. On peut ainsi s’éton-ner que la qualité gustative soit un critèred’achat pour 66 % des Allemands, pour57 % des consommateurs d’Asie du Sud-Est et même 66 % des Anglais, contre seu-lement 49 % des Français interrogés. Pascale Grelot-Girard (TNS Sofres) a tou-tefois souligné le poids de la pressionéconomique et de la situation morosequi influait sur le comportement de nos

compatriotes et les incitait àmoins s’octroyer de petitsplaisirs alimentaires. Elle aégalement relevé leur hyper-sensibilité entre risques per-

çus et alimen ta tion/santé (79 % jugentprobable le risque que les aliments nui-sent à leur santé, contre 59 % en 2014,alors que le reste des consommateurseuropéens ou américains se situe autourde 50 %). Ce dernier point créé unbesoin de réassurance en faveur desproduits d’origine, du « made inFrance », des produits locaux, des circuitscourts, et des produits bio. Évolution oblige, le consommateurconnecté est de plus en plus présent.Tous pays confondus, 81 % utilisentInternet pour rechercher des recettes et57 % pour s’informer sur des marques oudes produits alimentaires. Toutefois, l’in-térêt pour l’utilisation d’une imprimante3D alimentaire dans un futur proche/éloi-gné marque un clivage entre des « vieux »pays comme la France (31 %), l’Alle -

Besoin deréassurance

En avant-premièredu Sial 2016 quise tiendra du16 au 20 octobreau Parc desExpositions Paris-Nord Villepinte,les organisateursont présentéles dernièrestendanceset attentes enmatière de produitsalimentaires desconsommateursoccidentaux,asiatiques etdu Moyen-Orient.

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ENTREPRISEFilières agroalimentaires

26 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Forte de plus de 245 entreprises adhé-rentes, l’Adepta (Association pour ledéveloppement des échanges interna-

tionaux de produits et techniques agroali-mentaires), fédère depuis 1977 le savoir-faire des entrepreneurs français des secteursdes intrants, des équipements et des ser-vices pour l’agriculture et l’agroalimentairepour répondre de manière globale auxbesoins des porteurs de projets agro-indus-triels internationaux.Une volonté de « jouer groupé » plus quejamais indispensable, pourceux qui « osent » aller àl’export. Comme l’expliqueFrançois Burgaud, présidentde l’Adepta(1), il s’agit d’em-mener à l’international, enAfrique, en Asie ou enAmérique latine des entreprises qui ne sontpas couvertes par le dispositif public d’appuià l’export et qui ont besoin d’être aidées.L’Adepta, avec son statut associatif, estnéanmoins capable d’accompagner les entre-prises dans la durée. Toutefois au lieu de sedisperser un peu partout, des actions focussur certains pays sont organisées. Plusieurs

marchés prometteurs et opportunités d’af-faires pour les équipementiers français ontété identifiés par l’Adepta et précisés le24 juin 2016 lors de son assemblée géné-rale : « États-Unis, Mexique, Kazakhstan,

Chine, Iran, Nigéria etAngola apparaissent, entreautres, comme les marchésprioritaires dans les mois àvenir ».Pour renforcer l’efficacitéde ses actions, l’Adepta

s’est beaucoup rapprochée de MEDEFInternational. Elle fait désormais partie de saTask-force agroalimentaire, avec l’ANIA(Association nationale des industries ali-mentaires), la FC2A (Fédération du com-merce agricole et agroalimentaire) et la CGI(Confédération du commerce de gros et inter-national). L’objectif de cette Task-force est

triple, à savoir : « constituer un vivier d’en-treprises du secteur souhaitant se dévelop-per à l’international et favoriser le partaged’information entre les acteurs de l’ensemblede la filière de l’amont à l’aval ; constituerdes groupes d’entreprises capables de four-nir une offre intégrée et organisée selon uncouple produit/pays ou marché/pays ; orga-niser en France ou à l’étranger des ren-contres avec les décideurs publics et privés enprésentant une offre française qui répondeaux besoins et attentes des pays émergentset en développement ». L’idée est d’agir surle moyen et long terme pour prendre despositions à l’international, en termes de mar-ché et surtout d’investissement. La Task-force est coordonnée par un comitéd’orientation constitué de têtes de réseauxpublics et privés et d’experts des probléma-tiques de l’agriculture, de l’agroalimentaireet de l’agro-industrie dans les pays émergentset en développement sur l’ensemble de lafilière. Le comité d’orientation est coprésidépar François Burgaud, président de l’Adeptaet Michel Nalet, président de la commissionExport de l’ANIA, directeur de la zone MENA(Middle East & North Africa) et porte-paroledu groupe Lactalis. MEDEF Internationalassure l’animation du Comité d’orientation etde la Task-force. La première réunion de la Task-force agroa-limentaire s’est déroulée le 7 juillet 2016sur le thème « Nouveaux business modelsagroalimentaires : la force des informels afri-cains ». Cette rencontre a été basée surl’échange et le partage d’expérience. n

(1) François Burgaud, président de l’Adepta aété l’invité du club des agr’iDécideurs desaf agr’iDées le 16 juin 2016.

S’insérer dansla Task-force

agroalimentaire

« Le gouvernement chinois mobilise une part importante d’aides publiques pour moderniser le secteur agricole etfaire émerger de grandes unités agro-industrielles » souligne l’Adepta dans son rapport d’activité de l’année 2015.

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L’Adepta, une association au service de l’export et du « made in France » Exporter « en meute » sur des destinations choisies, un atout pour les entreprises et les équipementiersde l’agroalimentaire tentés par les marchés internationaux.

Camille Bourguignon Une démarche d’exportation collaborativeLes entreprises membres de l’Adapta se sont groupées par filières de production pour proposerune offre de matériels et services complète et coordonnée pour la fabrication de produits alimentairesde qualité : élevage, grandes cultures et stockage de céréales, industries carnées, industrie laitière,boulangerie et transformation des céréales, vitiviniculture, fruits et légumes et fleurs, emballage.Chaque groupe de filière propose une offre de services, produits et matériels adaptés aux besoinsd’un secteur d’activité. Chaque adhérent de l’Adepta est affilié à une plusieurs filières et plus pré-cisément à une gamme de process au sein d’une filière en fonction de la place de ses matérielsou de son activité dans le processus de fabrication. (Source : Adepta)

Page 27: COUVs 224 224 - agriDées · p. 26 † L’Adepta, une association au service de l’export et du « made in France » p. 27 † L’épargne salariale, qu’est-ce que c’est ?

ENTREPRISEIngénierie sociale

L’épargne salariale est un moyen,comme le dit Michel Bon, prési-dent du FONDACT (1), de réconcilier

les intérêts apparemment contradic-toires des salariés et des dirigeantsactionnaires ; tous veulent recevoir lemaximum, les uns par rapport à leurtravail et les autres par rapport à leursinvestissements...C’est également un moyen, dans uncontexte économique sans visibilité danslequel aucun dirigeant n’est tenté d’aug-menter les salaires de manière pérenneet automatique, de permettre le par-tage d’une partie de la performancefinancière de l’entreprise. Ce qui veutdire en creux que lorsqu’il y a moins derichesses à distribuer, l’entreprise peutréduire sans drame les montants versésà ses salariés...L’épargne salariale bénéficie actuelle-ment d’un fort développement, mais ilreste à faire car si la plupart des entre-prises de plus de 50 salariés bénéficientde la Participation instaurée depuis 1968par le Général de Gaulle, seulement20 % des entreprises employant de dixà quarante-neuf salariés et 12 % desentreprises de moins de dix salariés sontpourvues d’un dispositif (source LesÉchos 2016). Les entreprises agricoles sont bien sûrtout à fait éligibles. On constate toute-fois que peu d’agriculteurs connaissentces dispositifs.

Pourquoi utiliserl’épargne salariale ?

• Pour motiver et fidéliser les salariés enles associant à la performance de l’en-treprise par la mise en place d’un accordd’intéressement. En distribuant un inté-ressement à ses salariés, l’entrepriserenforce son attractivité sur le marché del’emploi, améliore ses résultats tout enbénéficiant d’avantages sociaux et fis-

caux très attractifs à la fois pour l’en-treprise et pour ses salariés : la loiMacron (août 2015) a abaissé le forfaitsocial de 20 à 8 % sur les primes verséespour les entreprises de moins de 50salariés qui mettent en place pour lapremière fois un accord d’intéresse-ment. De son côté, le salarié ne verseque la partie CSG/CRDS des cotisationssociales (8 % au lieu de 23 % enmoyenne).• Pour se constituer une épargne avecl’aide de son entreprise : la prime d’in-téressement qui concerne aussi le chefd’entreprise (si moins de 250 salariés)est payable au plus tard le dernier jourdu 5e mois après la clôture du bilan Elleest disponible immédiatement, sousforme de complément de salaire et doitdans ce cas être déclarée. Pour échapper à l’impôt sur le revenu,chaque bénéficiaire (salarié agricole,comme dirigeant) peut choisir de placersa prime sur un plan d’épargne salariale.Les sommes versées au titre de l’inté-ressement sont alors investies dans desFonds communs de placement entre-prises (FCPE). Ces fonds couvrent toutela gamme des supports financiers :monétaires obligations actions.Deux choix se présentent : • le PEE (Plan épargne entreprise) :d’une durée de cinq ans, sauf neuf casde sortie anticipée qui permettent derécupérer un capital net d’impôt plusles éventuelles plus-values taxées à15,5 % ;• le PERCO (Plan épargne retraite col-lectif). Il est bloqué jusqu’à la retraite del’épargnant, sauf cinq cas de retraitanticipé dont l’acquisition d’une rési-dence principale. C’est actuellement lemeilleur dispositif d’épargne retraiteindividuelle pour les dirigeants non-salariés (TNS). En plus du placement de la prime d’in-téressement, l’entreprise peut « l’abon-der » dans la limite de 8 % du PASS (2)

pour le PEE (soit 3 089 € pour 2016) et

de 16 % du PASS pour le PERCO (soit6 178 €).Le forfait social est de 20 % pour lePEE et 16 % pour le PERCO.À noter que depuis la loi Macron, l’en-treprise peut même alimenter réguliè-rement le PERCO de ses salariés sanscontrepartie dans la limite de 2 % duPASS (772 €). Compte tenu de tous ces avantages,dispositif gagnant-gagnant, épargneaidée et défiscalisée, on assiste actuel-lement à un très fort développementdes accords d’intéressement, y comprisdans les toutes petites structures agri-coles employant seulement un ouquelques salariés.Un exemple parmi bien d’autres : un denos clients producteur de fromages dechèvres, exploitant sous forme juridiqued’EARL, vient de mettre en place unaccord d’intéressement pour motiver sescinq chevriers, tout en souscrivant PEE etPERCO. Sur ce dernier, le dirigeant pro-fitera d’un abondement maximum envue de capitaliser pour sa retraite... n

(1) FONDACT : association qui fédère ceuxqui croient aux vertus du partage des profitspour faire réussir ensemble les salariés et lesentreprises.(2) PASS : Plafond annuel de la Sécuritésociale : 38 616 € pour 2016.

27Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

L’épargne salariale, qu’est-ce que c’est ?Les entreprises agricoles sont éligibles à l’épargne salariale. Un dispositif fiscalement et socialementintéressant pour les salariés comme pour le chef d’entreprise.

Jean-François Bouchard

Jean-FrançoisBouchard,experten ingénieriesociale, départementIngénierieset Expertises,BanquePopulaireAtlantique.

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28 Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

SAF AGR’IDÉES

Des pommes de terre à l’agriculture de précision : une journée dans l’Eure-et L Les visites des membres du Saf-Club de Chartres ont mis en évidencela performance économique et environnementale de certaines entre-prises agricoles d’Eure-et-Loir.

Jean-Louis Bergeot

Saf-Club de Chartres

La réunion du SAF-Club de Chartres, le28 juin 2016, avait pour but de décou-vrir :

– une usine moderne de triage, lavage et condi-tionnement de pommes de terre ;– une démonstration de drone dans une exploi-tation agricole ;– une ferme de Beauce avec son matériel et sonorganisation ;– l’agriculture de précision.Pour ce faire, cinquante participants avaientd’abord rendez-vous à la société Parmentine-Production, route de Lhopiteau à Voves (Eure-et-Loir). Parmentine s’est implantée sur le sitede Voves en 1997(1). Unincendie a détruit le pre-mier centre de condition-nement le 13 mai 2013.En juillet 2014, un nou-veau centre de conditionnement (certifié Inter-national Food Standard) a été mis en routeavec des matériels, innovants, performants etspectaculaires. Aujourd’hui, le site disposed’une capacité frigo de 55 000 tonnes. Sonnouveau centre de conditionnement de plus de8 000 m2 est construit avec des matériaux résis-tant au feu avec un objectif d’amélioration desa performance énergétique. Il est équipé destechnologies les plus modernes en termes de

triage et calibrage des pommes de terre. Laréception et le réchauffage des pommes deterre se font dans l’eau, ce qui en fait le seulcentre en France équipé de cette technique. Saconception et ses équipements concourent à unobjectif prioritaire qui est le respect de la qua-lité du produit. Les technologies utilisées ontpermis d’améliorer les conditions de travail,de réduire voire supprimer les postes à fortepénibilité et offrent des perspectives de progrèsà l’ensemble du personnel.Après un exposé en salle par l’équipe diri-geante, nous avons pu emprunter les passe-relles d’où nous avons pu suivre le parcours de

la pomme de terre, de lalivraison jusqu’à sonconditionnement après leslavages, le calibrage et leconditionnement.

Nous avions rendez-vous ensuite auprès d’unchamp de la ferme de Bessay, à (Villeau) appar-tenant à M. et Mme Philippe Lirochon, ancienprésident de la Chambre d’Agriculture d’Eure-et-Loir. Là nous attendait un représentant de laSociété Airinov.L’exploitant actuel Benjamin Lirochon a recoursà la Société Airinov pour définir son plan defertilisation : un premier pas vers la modula-tion, c’est-à-dire, l’adaptation de la dose

d’azote apportée aux cul-tures, avec une technolo-gie de précision. Le technicien avait un véhi-cule équipé d’un ordina-teur et d’un modem qu’ilinstalle sur le toit. Il déposesur le sol une mallette noired’une cinquantaine de cen-timètres. Tout est là ! Ledrone est pliable et mesure1 mètre d’envergure pour900 grammes. Un poidsplume fabriqué en poly-propylène et résine. Lors-qu’il est secoué trois fois,son hélice se met automa-

tiquement à tourner. Une fois lâché, face auvent, le drone monte en spirale jusqu’à atteindreson altitude de croisière : 150 mètres. En àpeine 5 minutes, il va cartographier la parcelleconcernée grâce à son capteur quatre optiques.Les images multispectrales à base de vert,rouge, proche infrarouge et infrarouge sontfournies par l’appareil. Elles nécessiteront unretraitement par la société prestataire pourapporter, en moins de 24 heures, un diagnos-tic de biomasse à l’exploitant.Ce matériel de pointe permet d’élaborer unplan de fertilisation des cultures et d’apporterjuste ce qu’il faut d’azote pour la bonne crois-sance des plantes. Par parcelle, par zone oupar modulation, les préconisations s’adap-tent au besoin de l’agriculteur. Résultat, desdépenses en fertilisants mieux maîtrisées,moins de résidus dans le sol. Le drone répondà une logique de double performance envi-ronnementale et économique.Il restait ensuite à se rendre dans les bâtimentsde la ferme où Philippe Lirochon a montré auxmembres du Saf-Club de Chartres, le matérielnécessaire pour l’exploitation d’une ferme de390 ha qui a su se diversifier : blé, colza, pommesde terre, légumes pour les conserveries...Philippe Lirochon a eu encore l’occasion de par-ler de l’agriculture de précision qui est un principe

Le drone, utilepour la cartographie

Visite du centre de conditionnement de la société Parmentine par les membres du Saf-Club de Chartres.

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29Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

SAF AGR’IDÉES

de gestion des parcelles agricoles qui vise l’opti-misation des rendements et des investissements encherchant à mieux tenir compte des variabilités desmilieux et des conditions entre parcelles diffé-rentes ainsi qu’à des échelles intraparcellaires.

L’agriculture de précision a pour objectif géné-ral de récolter le plus possible de matière et deproduits, tout en consommant le moins possibled’énergie et d’intrants (engrais, phytosanitaires,eau). Il s’agit d’optimiser la gestion d’une par-celle d’un triple point de vue : agronomique,environnemental et économique.Rendez-vous a été pris pour la prochaineréunion du Saf-club de Chartres fin septembrepour des visites sur le thème de l’eau et del’horticulture. n

(1) Parmentine compte pour le site de Voves 297 pro-ducteurs et près de 3 500 ha de pommes de terre :www.parmentine.fr.

oirBureau délocalisé de saf agr’iDées dans la MancheÀ l’initiative de son président Damien Bonduelle, saf agr’iDéess’est déplacé dans la Manche pour rencontrer des acteurs agri-coles, agroalimentaires et environnementaux.

Isabelle Delourme

Rencontres

Agriculturede précision

En à peine 5 minutes, le drone va cartographier la parcelle concernée grâce

à son capteur quatre optiques. Un outil de plus au service de l’agriculture de précision.

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Du 26 au 27 septembre 2016, lesmembres du Bureau de saf agr’iDéeset ses collaborateurs ont posé leurs

bagages dans la Manche, près de Caren-tan, dans le cadre d’un bureau délocalisé.Accueillis par Philippe Faucon, éleveur lai-tier dans ce département et égalementmembre du bureau de saf agr’iDées, lesadministrateurs ont pu se rendre comptedes atouts et des contraintes de ce territoireet rencontrer de nombreuses personnalitéslocales et régionales. Plusieurs visitesétaient organisées avant la veille du bureaudu 27 septembre. Ainsi, celle de la Coopé-rative d’Isigny-Sainte Mère sous la houletted’Olivier Dauguet, directeur productionlait a permis de comprendre les différentesétapes de fabrication des produits laitiers(beurre, lait, crème, fromage, poudre delait) produits sur ce site, et l’interactionavec les spécificités des cahiers des chargesdes producteurs de lait. Ensuite ArnaudFossey, Président a présenté la stratégie dela Coopérative (voir également en dossiercentral), son ouverture à l’export et sesperspectives de développement à moyenterme. Après cette rencontre le groupe

avait rendez-vous à la Maison du Parcnaturel régional des Marais du Cotentin etdu Bessin et son Président Marc Lefèvre. Lerôle fédérateur et catalyseur de ce Parcnaturel a permis d’engager des actionsbénéfiques à l’environnement et à l’éco-nomie de ce territoire qui maintiennentaussi une population. Ces visites et ren-contres ont permis d’échanger et de dif-fuser également sur les travaux actuels etfuturs de saf agr’iDées, en particulier ceuxsur les thèmes des productions animales etde l’environnement. n

Visite de la coopérativelaitière d’Isigny Sainte Mère.

Le Parc naturel régional des marais du Cotentinet du Bessin recouvre 146 650 hectares,quasiment tous en zone Appellation d’origineprotégée pour le beurre et la crème d’Isigny.

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Agriculteurs de France - n° 224, juillet-août 2016

Dans le livre qu’il vient de publieret intitulé La solution coopérative,Pierre Liret(1) s’attache à analyser

les atouts et limites des coopératives auregard des défis économiques et sociauxcontemporains.Qu’il s’agisse de coopératives de pro-

ducteurs, d’entrepreneurs, de salariés ou même de consom-mateurs, toutes ont en commun les mêmes règles, à savoirune association économique, la volonté d’être collectivementmaître de son destin en créant un outil durable. À l’heure dela mondialisation, leurs principes « extra-économiques », leurancrage territorial peuvent-ils leur permettre d’offrir une alter-native à d’autres modèles d’entreprises ? Comme le soulignel’auteur, le statut coopératif ne les protège pas de l’échec,car, comme dans toute entreprise, la qualité du managementreste fondamentale. Pour autant, les coopératives véhiculentdes valeurs et une gouvernance qui leur permettent souventde réguler les aléas d’une économie mondialisée. La finalitéde service, la notion de bien commun, de gestion désintéressée,mais aussi de but commun, qui sont regroupées au sein de lapremière partie de ce livre, sous le chapitre dénommé « l’identité

coopérative », concourent à expliquer ladifférence entre les entreprises à projetcoopératif et les autres organisations éco-nomiques.Les exemples concrets choisis par l’auteurpour illustrer cette capacité des coopéra-

tives à concilier réussite économique, sociale et territoriale,nous emmènent en Alsace. Sur cette terre de naissance dugroupe bancaire coopératif Crédit Mutuel, Pierre Liret a interrogépour la partie agricole, Michel Debes, président de la coopé-rative Alsace Lait et Matthieu Goehry, président de la Cuma(Coopérative d’utilisation de matériels agricoles) de Mittelhausensur les raisons et l’intérêt de leur engagement coopératif. Cedernier est aussi adhérent d’Alsace Lait. « J’ai un avantage surun autre producteur, car je m’implique dans la transformationde mon lait via la coopérative. À Alsace Lait, la fin des quotaslaitiers européens ne nous a pas fait peur. On a su trouver lesmarchés pour atteindre la taille critique qu’on souhaite.

Maintenant on pourra produire plus qu’avant » explique-t-il.La Cuma lui permet de mutualiser les investissements en maté-riel, mais aussi les achats d’aliments ou de semences, et d’or-ganiser les chantiers. À terme, elle facilitera la transmission deson exploitation. Mais, les jeunes générations pourront-ellesaccepter de privilégier le long terme ? Un nouveau défi estpeut-être à relever comme le constate le président d’AlsaceLait : « chez les adhérents de notre coopérative, la dynamiquede déresponsabilisation et d’individualisation est la même quedans le reste de la société. La coopération, dont le projet idéo-logique est de faire ensemble durablement, va clairement àcontre-courant de l’évolution de la société ». n

(1) L’auteur : directeur de formation à la Confédération générale desScop, Pierre Liret enseigne sur le thème des coopératives et a publiénotamment Coopérative, une entreprise socialement responsable ?

La solution coopérative« Ensemble, on est plus forts. » Voici résumée la phrase qui permet à plusd’un milliard de personnes de bénéficier chaque année dans le monde desservices des coopératives.

Isabelle Delourme

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APPRÉCIER DÉCOUVRIR LIRE COMPRENDRE

VIENT DE PARAÎTRE. Les clés pour créer ou reprendre une exploitation agricole Indispensable pour celui ou celle qui souhaite se lancer dansl’aventure d’une installation en agriculture, il sera aussiutile à ceux qui envisagent de faire évoluer ou transmettreleur exploitation. Cette dernière édition du Guide de l’ins-tallation des jeunes agriculteurs a été réactualisée avec les

dernières mesures mises en place par loi d’avenir pour l’agri-culture depuis 2015. Construit en quatre parties (s’installer avec les aides, financerson installation, choisir la structure juridique de son exploitation,accéder aux fonciers et aux paiements directs), ce guide permetde prendre les bonnes décisions pour assurer au mieux l’avenirde son projet. I. Delourme

Rosanne Aries, Guide de l’installation des jeunes agriculteurs, ÉditionsFrance Agricole et Jeunes Agriculteurs, 5e édition, mai 2016, 240 pages.

Alsace Lait et laCuma de la Rosée

Pierre Liret, La solution

coopérative,Éditions Les

Petits Matins,octobre 2016.

Les frères Marchand, fromagers nancéens depuis six générationset adhérents des Fromagers de France, ont battu le recorddu « plus grand plateau de fromages du monde », précédem-ment détenu parla Chine. Avec2 124 pièces defromages et 730types de fro-mages différents,ce sont plus de5 tonnes de fro-mages qui ontété présentéessur un plateaude 40 m de longet exposées du -rant trois jours,du 23 au 25 sep-tembre 2016 àNancy, dans lecadre de la Fête de la Gastrono mie. Les deux tiers deces fromages viennent de France et pour l’essentiel de petits producteurs. Prochaine étape : l’homologation par leGuinness Book des records.

Record battu pour le plus grandplateau de fromages du monde

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2 124 pièces de fromages et 730 types de fromagesdifférents, pour ce plateau de fromages « hors normes ».

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