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CHAPITRE 3 : ÉTUDE DE LA MATURATION «NATURELLE» DES MIOM EN PILOTES INSTRUMENTÉS

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CHAPITRE 3 :

ÉTUDE DE LA MATURATION «NATURELLE» DES MIOM EN PILOTES INSTRUMENTÉS

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

SOMMAIRE

1 Introduction .....................................................................................121

2 Matériels et méthodes.....................................................................122 2.1 Cahier des charges pour la conception des pilotes ........................ 122 2.2 Présentation des pilotes................................................................ 122

2.2.1 Dispositif expérimental...................................................................... 122 2.2.2 Le carottier ..................................................................................... 125

2.3 Instrumentation et choix des paramètres ..................................... 125 2.4 Nature des matériaux ................................................................... 127 2.5 Protocole expérimental ................................................................. 127

2.5.1 Remplissage des pilotes .................................................................... 127 2.5.2 Echantillonnage initial ....................................................................... 128 2.5.3 Protocole des prélèvements à l’aide du carottier ................................... 128 2.5.4 Emplacement et planning des prélèvements......................................... 129

3 Résultats ..........................................................................................131 3.1 Observations après la mise en place des mâchefers ..................... 131 3.2 Résultats de l’étude ...................................................................... 131

3.2.1 Evolution de la température............................................................... 131 3.2.2 Evolution du taux d’humidité.............................................................. 134 3.2.3 Evolution de la teneur des gaz dans les pilotes ..................................... 135 3.2.4 Evolution du pH ............................................................................... 135 3.2.5 Relargage des éléments .................................................................... 137

3.3 Analyses complémentaires............................................................ 140 3.3.1 Evolution de pH des lixiviats en fin d’expérimentation............................ 140 3.3.2 Evolution des teneurs en carbone organique et inorganique.................... 141

4 Synthèse ..........................................................................................144 4.1 Bilan scientifique .......................................................................... 144 4.2 Bilan critique................................................................................. 145

5 Conclusion.......................................................................................147

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

1 Introduction

En sortie de four d’incinération, le mâchefer est refroidi brutalement par trempe à l’eau. A ce stade, le matériau est totalement en déséquilibre d’un point de vue chimique et minéralogique. La maturation des MIOM est de toute évidence une étape importante pour la stabilisation de ceux-ci surtout vis-à-vis de l’environnement. Cette étape de maturation a lieu habituellement en IME, installation de maturation et d’élaboration, et elle ne doit pas dépasser le délai légal de 12 mois. L’objectif du travail décrit dans ce chapitre est de suivre, d’une manière comparative, l’évolution des MIOM A (collecte classique) et MIOM B (collecte sélective optimisée) soumis à une maturation contrôlée sur une durée inférieure à 12 mois. Pour cela, nous avons tenté de reproduire une maturation proche de la réalité en représentant le cœur confiné d’un tas de mâchefer, avec la conception de deux pilotes instrumentés d’une capacité de 3 tonnes chacun. Ces pilotes doivent permettre d’évaluer l’évolution physico-chimique des MIOM en fonction du volume d’air ayant traversé le matériau. Les paramètres pouvant être contrôlés sont la température et le renouvellement d’air (débit) dans le tas. Les paramètres suivis à partir de prélèvements réguliers effectués au sein du tas de MIOM dans les pilotes sont le taux d’humidité sur le solide et le pH et le relargage des éléments sur les lixiviats. Cependant, le but de cette étude n’était pas d’analyser systématiquement la teneur en éléments relargués. Il a alors été décidé que ce dernier ne serait effectué seulement si une baisse sensible du pH était observé car se serait une bonne indication de l’évolution des MIOM. Ce chapitre présente alors les résultats obtenus sur les différents paramètres suivis au cours de la maturation contrôlés des deux MIOM étudiés. Une discussion scientifique et critique sur la conception des pilotes est également abordée.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

2 Matériels et méthodes

2.1 Cahier des charges pour la conception des pilotes Les pilotes de maturation artificielle ont été conçus en fonction d’une double démarche:

Suivre un certain nombre de paramètres physico-chimiques représentatifs de l’évolution des MIOM pendant la phase de maturation

Comparer, en fonction de la durée de maturation, les évolutions respectives des deux échantillons de MIOM provenant de filières différentes

Pour ce faire, des paramètres de suivi (analyses) ont été fixés, à priori. Ils ont déterminé l’aspect technique des modes de prélèvement (solide, liquide, gaz). De même, des paramètres physiques de manipulation ont dû être définis à l’avance compte tenu de l’inertie prévisible des pilotes. Ce sont essentiellement la quantité de MIOM utilisée dans chaque pilote, le débit d’air insufflé au sein du matériau et la température minimum de fonctionnement. Enfin, l’instrumentation devait permettre de suivre en continu la température et l’humidité des MIOM en différents points représentatifs de la géométrie des pilotes.

2.2 Présentation des pilotes

2.2.1 Dispositif expérimental En fonction du cahier des charges défini, la maturation expérimentale des deux MIOM à été réalisée dans deux pilotes de conception strictement identique (Figure 1). Chacun est constitué d’une enceinte parallélépipédique de 1,25 m * 1,25 m à la base et de 1,75 m de haut dont un schéma type est représenté ci-après.

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Gravier roulé 10-20mm

Sable compacté

0-4

Bidim

Equerre pour encrage au sol Système

d ’évacuation

Entrée d ’air

Polyolefine

Sonde de température

Système de prélèvement

de gaz

Pompe de circulation

Pompe d ’injection

d ’air

couvercle

Sortie d'air

Figure 1: Schéma des pilotes de maturation

- Le caisson extérieur est réalisé avec des plaques en acier et renforcé par des cerclages, également en acier. - Une couche de sable compacté est installée au fond pour surélever le pilote et pour réaliser une double pente de façon à drainer les éventuels percolats vers une diagonale puis vers un point bas. - Les parois latérales et la base sont isolées par une membrane en polyoléfine prise en sandwich, pour sa protection, entre deux couches de bidim® (revêtement semi-poreux). - Un lit de gravier roulé et lavé est déposé au fond pour constituer une couche drainante.

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- Un réseau de tuyauteries (Figure 2) est déposé dans cette couche pour permettre l’insufflation d’air à travers le tas de MIOM. Cette couche est recouverte d’un bidim® afin de séparer la couche de mâchefer et d’éviter la migration des fractions fines dans la couche drainante.

Figure 2: photos de la disposition du réseau de tuyauteries permettant l’ascension du flux d’air dans les pilotes

- Le mâchefer (environ 3 tonnes) est ensuite mis en place dans chaque pilote, la hauteur du tas étant d’environ 1,25 m. Lors de cette mise en place, des sondes de température et des réseaux de prélèvements de gaz sont installés sur trois niveaux en hauteur et sur un quart du pilote dédié à l’instrumentation. - Les deux pilotes ont été accolés et entourés d’une double enveloppe commune calorifugée (Figure 3). Les pilotes sont calorifugés avec du polystyrène et sont équipés d’un système de ventilation chauffant entre la paroi externe des pilotes et le polystyrène. Ce système doit permettre de maintenir les MIOM à une température minimum de 30°C afin de favoriser les réactions d’oxydation et de carbonatation provoquées par la circulation d’air continue. Le chauffage est assuré par des pistolets à air chaud dont l’alimentation électrique est reliée à un thermostat de régulation (avec sonde de platine).

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Figure 3: Photos des deux pilotes calorifugés

2.2.2 Le carottier Au cours de l’étude, des prélèvements réguliers sont effectués à l’aide d’un carottier. Celui-ci doit permettre de réaliser des prélèvements sur toute la hauteur du pilote sans dénaturer l’ensemble du tas de MIOM. Après plusieurs essais infructueux, le carottier qui s’est avéré le plus efficace a été réalisé à l’aide d’un tube en PVC de 10 cm de diamètre et de 1,60m de hauteur. Un orifice est percé à l’extrémité haute du tube afin de pouvoir passer une tige en acier pour permettre d’enfoncer le tube dans la masse de MIOM par rotations alternées. Et, afin de faciliter l’enfoncement, des dents sont découpées à l’extrémité inférieure du tube.

2.3 Instrumentation et choix des paramètres Les paramètres de cette étude ont été choisis en concertation avec les industriels (Novergie) et le concepteur des pilotes (POLDEN). La durée de l’étude avait été fixée à 6 mois au départ mais celle-ci a été finalement de 11 mois car l’évolution des MIOM (à 6 mois) ne nous a pas semblé flagrante. Le cahier des charges ayant conduit à l’élaboration des pilotes a été défini de façon à se rapprocher le plus possible des conditions réelles tout en ayant le contrôle de certains paramètres. Afin de s’affranchir de l’hétérogénéité et travailler avec une quantité représentative, une masse d’environ 3 tonnes de MIOM a été choisie. De plus, afin de pouvoir contrôler la quantité d’air passée au cours de cette étude, nous avons opté pour une circulation d’air forcée ascendante, avec mesure du débit par un rotamètre à l’entrée de chaque pilote. Il a donc fallu concevoir un pilote étanche avec une ouverture sur le haut du pilote pour que l’air passé à travers le tas puisse s’échapper. Après concertation avec les partenaires industriels, il a été

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estimé que, dans un tas réel, le volume d’air est renouvelé entre 1 et 3 fois par jour. En pensant accélérer les réactions nous avons alors choisi d’augmenter ce renouvellement et de travailler avec un débit de 12L/min. Le suivi de la maturation se décompose en deux parties: Etude in-situ: Pour cela des capteurs ont été installés à l’intérieur des tas de MIOM:

Suivi de la température: 5 thermocouples souples protégés gainés Teflon FEP de longueur 3m de type T, Cuivre – Constantan, avec une précision de 0,5°C ont été installé à 3 hauteurs différentes. A 30 et 90 cm, un thermocouple est installé au centre du pilote. Et à 60 cm, 3 thermocouples sont installés suivant le schéma de la Figure 4. Le premier se situe au centre du pilote, le second au centre de la partie instrumentée (sur un quart du pilote) et le troisième plus proche de la paroi du pilote afin d’observer l’évolution de la température suivant la géométrie du pilote.

b

ac

b

ac

Figure 4: Disposition des 3 thermocouples à la hauteur de 60 cm

Cette disposition nous permet de suivre les variations de température en hauteur et en largeur.

Suivi des gaz: 3 systèmes de prélèvement des gaz sont également installés aux 3 hauteurs définies. Ce système se compose d’un tuyau souple de diamètre interne 10 mm. Le suivi des gaz peut se faire ponctuellement par chromatographie en phase gazeuse en analysant les teneurs en dioxyde de carbone et oxygène.

Etude ex-situ: Cette étude a été réalisée à partir des prélèvements réguliers effectués dans les pilotes à l'aide du carottier: Dans un premier temps, le taux d’humidité a été déterminé sur chaque prélèvement par séchage à l’étuve de plusieurs échantillons selon le protocole décrit dans le chapitre 2, paragraphe 3.2.1.

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Ensuite, les prélèvements effectués ont subi des tests de lixiviations (cf protocole chap 2, paragraphe 3.6.2) afin d'étudier l’évolution du pouvoir tampon des deux MIOM et le relargage des espèces chimiques (métaux en particulier) à pH contrôlé. Le suivi du pH naturel (lixiviation à l’eau) donne des indications quant à l’évolution de la maturation/carbonatation. Des analyses du carbone organique et inorganique sont également effectuées afin d'observer l'évolution de la carbonatation des MIOM.

2.4 Nature des matériaux Cette étude a porté sur les MIOM A et MIOM B dont les caractéristiques initiales sont décrites dans le chapitre 2. Nous rappelons que le MIOM A est issu d’une collecte sélective partielle (représentant la collecte moyenne en France) et le MIOM B est issu d’une collecte sélective optimisée.

2.5 Protocole expérimental

2.5.1 Remplissage des pilotes L’échantillonnage des mâchefers sur site est décrit dans le chapitre 2, paragraphe 3.1.1. Le remplissage des pilotes a dû être effectué avec précaution afin de ne pas endommager l’instrumentation (géomembrane, thermocouples, système de prélèvement de gaz). Pour cela, la mise en place des MIOM est réalisée à l’aide de seaux de 20L. Chaque seau est pesé afin de connaître la masse exacte de MIOM introduite dans chaque pilote. Les seaux sont alors déversés sur toute la surface du pilote sans tassage. Seul un compactage naturel est réalisé par le poids du manipulateur dans le pilote pendant le remplissage. La hauteur total du tas de MIOM dans les pilotes étant estimée à 1,25m, il a été décidé, comme indiqué précédemment, que chacun des pilotes serait instrumenté à 30 cm, 60 cm et 90 cm. Cette instrumentation est réalisée sur un quart du pilote, une zone où aucun prélèvement ne sera effectué. Les quantités exactes de matériaux utilisés sont:

2920 kg pour le MIOM A soit une densité de 1,5

2690 kg pour le MIOM B soit une densité de 1,4

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2.5.2 Echantillonnage initial Pour réaliser la caractérisation des deux échantillons de MIOM, l’échantillonnage a été réalisé au moment du remplissage des pilotes. A chaque hauteur définie précédemment, un échantillon d’environ 1,5 kg de MIOM est prélevé au centre de chaque quart du pilote. Au total, nous avons recueilli 12 mini-lots pour chaque pilote. Les quatre échantillons prélevés à 30 et 90 cm sont réunis pour former un seul échantillon à chaque niveau. Les quatre échantillons prélevés à 60 cm sont réunis deux à deux pour former deux échantillons. Au total, quatre échantillons seront analysés pour chaque MIOM (A et B) afin de les caractériser d’un point de vue physico-chimique et dont les résultats sont fournis dans le chapitre 2.

2.5.3 Protocole des prélèvements à l’aide du carottier Les prélèvements ont été effectués par enfoncement et rotations alternées sur toute la hauteur du tas (Figure 5) par fraction de 15 cm. Cependant, il a été décidé de s’arrêter à 10 cm au dessus de la géomembrane inférieure afin de s’assurer que celle-ci ne soit pas détériorée et trouée par les dents du carottier.

Figure 5: Photo d’un prélèvement dans un pilote

Une fois l’enfoncement terminé, le carottier est retiré lentement afin de ne pas dénaturer l’ensemble du tas. Nous observons alors un trou régulier dans le tas, la surface extérieure du tube PVC a compacté le mâchefer périphérique ce qui empêche celui-ci de combler le trou formé. Afin de limiter les effets «cheminée»,

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le trou est alors rebouché avec le même lot de MIOM qui avait été conservé dans un fût lors du remplissage du pilote. Après le prélèvement, l’échantillon de MIOM est conditionné dans des pots de 1L. Les pots sont repérés suivant la hauteur que l’échantillon occupait dans le pilote. Ceci permet de diminuer le nombre d’analyses. En effet, comme le flux d’air injecté est ascendant, nous considérons que l’évolution du MIOM débutera par le bas. Par conséquent, nous avons réalisé les analyses sur les échantillons prélevés en bas du pilote. Et il a été décidé que si nous observions une évolution notable du pH à l’eau, l’échantillon de hauteur supérieure serait analysé et ainsi de suite. Au total une dizaine de pots de 1L sont remplis à chaque prélèvement par carottage.

2.5.4 Emplacement et planning des prélèvements La Figure 6 présente les emplacements des prélèvements de mâchefer qui ont été effectués dans les deux pilotes. Ceux-ci ont été effectués à au moins 10 cm de la paroi des pilotes afin d’éviter les effets de bords. Après chaque prélèvement, l’emplacement est repéré afin de ne pas réaliser le suivant dans la même zone. Les emplacements ont été choisis de manière à limiter la déstructuration de l’ensemble du matériau et parfois en raison de blocage du carottier par des éléments métalliques dans certaines zones.

1

2

3

6

4 5

6

5

1

2

3

4

MIOM A MIOM B Partie

instrumentée

Figure 6: Schéma des emplacements des prélèvements effectués dans les pilotes

Le Tableau 1 présente le planning des six prélèvements effectués. Il est alors possible de connaître le temps de séjour du mâchefer dans le pilote avant analyse.

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Notation Jours cumulés Notation Jours cumulésInitial A0 0 Initial B0 0

prélèvement 1 A1 14 prélèvement 1 B1 21prélèvement 2 A2 40 prélèvement 2 B2 37prélèvement 3 A3 55 prélèvement 3 B3 50prélèvement 4 A4 85 prélèvement 4 B4 80prélèvement 5 A5 188 prélèvement 5 B5 183prélèvement 6 A6 226 prélèvement 6 B6 224

Final AF 328 Final AF 325

MIOM A MIOM B

Tableau 1: Planning des prélèvements

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3 Résultats

3.1 Observations après la mise en place des mâchefers Après la mise en place des deux mâchefers dans les pilotes, il s’est avéré qu’environ 3 litres de percolât de couleur noirâtre ont été obtenus pour le MIOM B. Cet égouttage n’est en fait pas étonnant au vu du taux d’humidité de ce mâchefer (environ 26%). Le pH de ce percolât a été déterminé à 12,8. Aucun égouttage n’a été constaté pour le MIOM A. Des champignons/moisissures et des sels minéraux jaunes, blancs et bleus ont également été observés en surface tout au long de l’étude (Figure 7). Nous n’avons pas cherché à identifier la nature de ces composés mais nous pensons que, les jaunes doivent correspondent à des composés soufrés, les bleus à des sels de cuivre et les blancs peuvent correspondre à différents composés tels que des sels alcalins ou alcalino-terreux. Par ailleurs, un assèchement du MIOM B à la surface a également été observé au cours de l’étude.

Figure 7: Photos des moisissures et sels observés

3.2 Résultats de l’étude

3.2.1 Evolution de la température Les Figure 8 et 9 présentent les évolutions de température à l’intérieur des pilotes au cours des trois premiers mois de l’étude. Les notations 30, 60 et 90 correspondent respectivement aux niveaux 30 cm, 60 cm et 90 cm dans le pilote. Pour le niveau 60, les notations a, b et c correspondent à la disposition des thermocouples représentée sur la Figure 4. A l’état initial, le MIOM A a une température proche de 18°C alors que le MIOM B est encore chaud (entre 35 et 40°C). Cette différence entre les températures initiales des échantillons est délicate à interpréter. Elle traduit néanmoins

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obligatoirement une différence dans leur «histoire». Le MIOM A a été prélevé le jour même de sa sortie de l’incinérateur, mais il a subi un déferraillage et une manipulation qui lui ont permis de refroidir jusqu’à la température ambiante. Il a ensuite été transporté vers son pilote sur une distance très courte de quelques kms. Par contre, le MIOM B n’a pu subir aucun traitement après sortie du four et extinction à l’eau, il a été immédiatement chargé et transporté par camion sur 150 kms environ. Sa température initiale pourrait s’expliquer par cette différence de traitement. Il est possible, et même probable, que les nombreuses réactions exothermiques d’hydratation (consécutives à son extinction à l’eau) des oxydes formés dans le four n’aient pas été tout à fait terminées lors de son chargement dans le pilote. Il est également possible, mais moins probable, que certaines réactions de maturation (oxydation des ferrailles, oxydation de la matière organique résiduelle, carbonatation) aient pu commencer pendant le transport.

15

20

25

30

35

40

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Durée (jours)

Tem

péra

ture

(°C

)

A30 A60a A60b A60c A90

Figure 8: Evolution de la température dans le pilote MIOM A

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0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Durée (jours)

Tem

péra

ture

(°C

)B30 B60c B60b B60a B90

Figure 9: Evolution de la température dans le pilote MIOM B

Si l’on observe maintenant l’évolution des températures dans les 20 jours suivant les chargements des MIOM dans les pilotes, on constate une montée en température, des deux lots, d’environ 10°C pour atteindre une valeur très proche de la consigne. Pour la suite, aucune évolution notable n’a été enregistrée jusqu’à 90 jours, ni par la suite d’ailleurs. On peut remarquer l’écart systématique de quelques degrés entre le bas et le haut de chaque pilote. Cela peut être expliqué par le fait que l’air qui entre par le bas du pilote est à la température ambiante (<30°C), il s’échauffe naturellement en traversant la masse de MIOM chaud. D’autre part, la disposition géométrique des deux points chauds (visible sur la Figure 3) dans la double paroi (au ¼ et ¾ de la hauteur, et proche du pilote B) permet à elle seule d’expliquer à la fois les écarts de température haut/bas pour chaque pilote et l’écart de quelques degrés entre les deux pilotes. Très clairement, les réactions attendues entre les MIOM et les constituants potentiellement réactifs de l’air (O2, CO2) n’ont pas eu lieu (ou très peu) dans nos conditions expérimentales. En condition naturelle, la maturation des MIOM conduit couramment à des températures de 70-80°C pendant les premiers mois avec une stabilisation autour de 40°C les mois suivants. En cours d’expérience, un arrêt accidentel des sources des chaleurs pendant plusieurs jours a provoqué une chute de la température, indiquant ainsi qu’il n’y

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

avait aucune libération de chaleur d’ordre réactionnel au sein des MIOM sous flux d’air.

3.2.2 Evolution du taux d’humidité La Figure 10 nous montre l’évolution du taux d’humidité déterminé à partir des prélèvements effectués sur les deux MIOM à l’intérieur des pilotes tout au long de l’étude. Celui-ci diminue fortement pour le MIOM B, d’environ 10%, alors que pour le MIOM A, la teneur en eau est plus stable autour de 12-13%. La baisse du taux d’humidité est due à l’entraînement de l’eau par la circulation d’air forcée, l’air se sature en eau à la température moyenne de 30°C. Le MIOM B a une perte plus importante du fait de son taux d’humidité plus élevé initialement et à sa température moyenne légèrement supérieure pendant toute l’expérience. Lors des prélèvements, nous avons remarqué de la condensation sur le couvercle du pilote B, ce qui peut expliquer l’assèchement du mâchefer observé en surface. Par ailleurs, la chute nette du taux d’humidité dans ce même pilote est liée à une modification de la consigne de température qui a été portée à 40°C entre le 5ème et le 6ème prélèvement (après environ 200 jours d’étude) Quoiqu’il en soit, les taux d’humidité des 2 MIOM sont restés supérieurs à 12% pendant toute l’expérimentation.

Eta

t ini

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1er

prél

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ent

2e p

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3e p

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5

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15

20

25

30

Tau

x d'

hum

idité

(%)

MIOM A MIOM B

Chauffage à 40°C

Figure 10: Evolution du taux d’humidité

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

3.2.3 Evolution de la teneur des gaz dans les pilotes Les teneurs en oxygène et dioxyde de carbone ont été suivies à l’intérieur des pilotes sur les trois hauteurs définies précédemment. Le suivi a été réalisé à l’aide d’un chromatographe en phase gazeuse portable Varian CP-2003 dont les caractéristiques d’utilisation sont décrites en annexe. Les taux d’O2 et CO2 n’ont révélé aucune différence notable par rapport aux teneurs présentes dans l’atmosphère à l’extérieur des pilotes. Ces mesures ponctuelles n’ont pu être poursuivies au-delà de 10 semaines car les tuyaux de prélèvement se sont assez rapidement remplis d’eau liquide au moment des prélèvements de gaz par aspiration. Cette eau, probablement de condensation en provenance des MIOM humides, étant totalement incompatible et destructrice pour les colonnes du chromatographe, il a été décidé de suspendre les prélèvements. Par la suite, quelques analyses ont été effectuées sur l’air sortant des mâchefers dans le compartiment supérieur des pilotes. Là encore, aucune consommation mesurable d’oxygène ou de dioxyde de carbone n’a été mise en évidence. Ces mesures n’ont donc apporté aucune information permettant de quantifier les interactions entre les MIOM et les constituants réactifs de l’air pendant cette expérience de maturation contrôlée.

3.2.4 Evolution du pH Le Tableau 2 présente l’évolution du pH naturel des deux MIOM pour 7 échantillons prélevés de l’état initial (remplissage) à l’état final (ouverture des pilotes). Les variations maximales sont identiques et de l’ordre de 0,5 unité pH. Excepté pour les échantillons initiaux et finaux, tous les échantillons analysés proviennent de la partie basse du pilote (10 à 20 cm au dessus de la géomembrane). Toutes les valeurs de pH correspondants aux échantillons prélevés par carottage (A1 A6 et B1 B6) au cours de la maturation sont extrêmement proches si l’on considère une incertitude raisonnable de ± 0,1 unité pH sur les mesures. Dans les deux cas, le pH s’établit à des valeurs de 11,0 ± 0,1. Il faut, par ailleurs, garder à l’esprit qu’un MIOM est un matériau hétérogène et que la représentativité des échantillons prélevés est toute relative. Pendant sa maturation naturelle en UIOM, un MIOM voit fréquemment le pH de ses lixiviats passer en quelques mois de valeurs voisines de 12 à des valeurs proches de 10 ou inférieures.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

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N° Durée en jours pH N° Durée en jours pHA0 0 11,24 B0 0 11,38A1 14 10,95 B1 21 11,12A2 40 10,82 B2 37 11,04A3 55 10,94 B3 50 11,01A5 188 11,09 B5 183 11,13A6 226 10,91 B6 224 11,10Fin 328 10,70 Fin 325 10,80

MIOM A MIOM B

Tableau 2: Evolution du pH dans les pilotes

La seule connaissance du pH naturel des lixiviats et de son évolution pendant cette expérience ne permet pas de conclusion décisive sur la maturation des deux MIOM. Aucune différence nette n’est mise en évidence et qui pourrait être reliée à leur provenance. Afin d’apporter des éléments de réflexion plus précis, nous avons réalisé des tests de dépendance au pH (test CNA). Comme il a été indiqué précédemment (chapitre 2, paragraphe 3.6.1), ces tests permettent de préciser le comportement des deux matériaux face à une agression acide ou basique. Pour une question de lisibilité, seules les courbes des prélèvements initiaux, finaux et de mi-parcours sont représentées. Les résultats sont présentés sur la Figure 11 (MIOM A) et la Figure 12 (MIOM B).

0

2

4

6

8

10

12

14

-1 -0,5 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,

meq H+/g de MIOM

pH

5

A0 A6 A final

Figure 11: Test de dépendance au pH pour le MIOM A

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

0

2

4

6

8

10

12

14

-1 0 1 2 3 4 5 6 7

meq H+/g de MIOM

pH

8

B0 B6 B final

Figure 12: Test de dépendance au pH pour le MIOM B

En ce qui concerne le MIOM A, les points expérimentaux correspondant aux échantillons ayant subi 3 durées de maturation différentes sont pratiquement confondus. La quantité d’acide permettant d’obtenir un lixiviat à pH 4 est la même, elle de 3,5 meq H+/g de MIOM sec. Dans le cas du MIOM B, pour les trois échantillons, il faut 6 à 7 meq H+/g de MIOM sec pour avoir un lixiviat à pH 4, ce qui indique une meilleure capacité de résistance aux attaques acide. Les courbes CNA des échantillons B6 et Bfinal sont extrêmement proches et paradoxalement c’est l’échantillon initial, non maturé, qui présente tout de même un palier (peu marqué) aux environs de pH 7, caractéristiques de la présence de carbonates. Sur ce dernier point, nous n’avons pas d’explication si ce n’est la possibilité d’un artefact lié à l’échantillonnage au moment du prélèvement. En résumé, ces analyses de la capacité de neutralisation acido-basique ne permettent pas de déceler de fortes évolutions des MIOM pendant leur maturation artificielle.

3.2.5 Relargage des éléments Les Figure 13 et Figure 14 présentent les teneurs des éléments relargués dans les lixiviats obtenus à l’eau déminéralisée pour les MIOM A et B, à l’état initial et final (2 hauteurs) ainsi que pour le premier prélèvement. Les différentes

137

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

concentrations ont été déterminées par ICP-AES et chromatographie ionique pour les chlorures (Cl-) et les sulfates (SO4

2-).

0,001

0,01

0,1

1

10

100

1000

10000

Con

cent

ratio

n de

s élé

men

ts r

elar

gués

en

mg/

kg

Ca K Na Mg Fe Al Pb Zn Cu Cr Cl SO4

A0 A1 Afinal30 Afinal60

Limite de Détection

Figure 13: Relargage des éléments lors de la lixiviation à l’eau déminéralisée du MIOM A initial et final

0,001

0,01

0,1

1

10

100

1000

10000

Con

cent

ratio

n de

s élé

men

ts r

elar

gués

en

mg/

kg

Ca K Na Mg Fe Al Pb Zn Cu Cr Cl SO4

B0 B1 Bfinal30 Bfinal60

Limite de détection

Figure 14: Relargage des éléments lors de la lixiviation à l’eau déminéralisée du MIOM B initial et final

L’interprétation de ces diagrammes nécessite une approche en plusieurs points. Tout d’abord en ce qui concerne les éléments majoritairement lixiviés, on ne constate que très peu d’écarts entre l’état initial et final des MIOM. Compte tenu des connaissances sur la maturation naturelle des MIOM et ses conséquences vis-à-vis du relargage des éléments alcalins (Na, K) et des chlorures, les résultats sont

138

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

plutôt cohérents. Leur teneur dans les lixiviats est quasi-indépendante du pH, il est donc normal que leur relargage reste constant tant qu’ils sont disponibles dans la matrice solide. La concentration en calcium relarguée aurait dû augmenter en cours de maturation si le pH avait diminué, ce qui n’est pas le cas, les résultats sont donc également cohérents. L’interprétation est identique pour les sulfates dont les quantités relarguées auraient dû augmenter en fonction de la durée de maturation (Pascual & al., 1994). Concernant ces éléments majeurs, le comparatif entre les deux MIOM ne montre pas de différences significatives dans les relargages. Les quantités lixiviées sont très proches de 1000 à 2000 mg/kg en ce qui concerne Ca, Na, K, Al, Cl- et SO4

2- et n’évoluent que très faiblement entre l’état initial et la fin de l’expérience de maturation soit environ 300 jours sous flux d’air continu. L’interprétation des évolutions des teneurs en éléments minoritaires dans les lixiviats est nettement plus difficile. Ces éléments, en particulier le plomb (Pb), le zinc (Zn) et le chrome (Cr) sont présents à l’état de traces dans les MIOM. Compte tenu du mode de prélèvement par carottage de quantités de résidus relativement faibles à chaque profondeur, il était impossible de réaliser un quartage fiable du résidu. Avec beaucoup de précautions, on peut tout de même constaté que le plomb est moins relargué dans les lixiviats des prélèvements en fond de pilote (A1 et Afinal30, B1 et Bfinal30). Ceci est plutôt cohérent avec la baisse (faible) de pH observée pour les mêmes échantillons. Le plomb, métal amphotère, est proche de son minimum de solubilité dans les lixiviats de fond de pilote et son comportement au relargage est très proche dans les 2 MIOM. A l’état final et à 60 cm du fond, les quantités de plomb lixiviées sont plus importantes qu’à 30 cm, ce qui paraît logique, mais paradoxalement également supérieures à celles des lixiviats des MIOM initiaux. Cette constatation confirme la prudence nécessaire pour interpréter les résultats concernant tous les autres éléments. Compte tenu de l’hétérogénéité des MIOM, souhaitée pour rester proche de la réalité, il est probable que les incohérences constatées soient essentiellement liées à ce que l’on pourrait appeler un effet «pépite» (prélèvement non représentatif). Une deuxième hypothèse liée à la précédente concerne les valeurs absolues des quantités d’éléments traces lixiviées, elles sont faibles et parfois à la limite de détection analytique. A ce niveau, un facteur 10 dans les écarts de concentration n’a pas la même signification que pour un élément fortement lixivié. Enfin, ces analyses comparatives auraient pu être pertinentes si, comme nous l’attendions, les matériaux avaient évolué de manière plus significatives. Elles confirment les résultats précédents (pH, CNA) et vont dans le sens d’une très (trop) faible carbonatation des MIOM dans nos conditions expérimentales.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

3.3 Analyses complémentaires Compte tenu des résultats ambigus obtenus sur les échantillons prélevés par carottage, nous avons décidé de pratiquer une «autopsie» des MIOM à l’ouverture des pilotes. Des prélèvements d’environ 1 kg ont été réalisés à différents endroits selon 3 coordonnées x, y et z repérées le plus précisément possible. Le premier critère d’évolution choisi a été le pH des lixiviats à l’eau qui est, comme indiqué précédemment, un bon indicateur de l’état d’avancement de la carbonatation des MIOM. Les valeurs de pH obtenues sont représentées suivant la géographie des pilotes sur les Figure 15 et Figure 16. Le second paramètre suivi est le taux de carbone sous ses formes organique (COT) et inorganique (CIT). L’évolution de la teneur en carbone inorganique total est un bon indicateur de la formation de carbonates (CO3

2-) dans les matériaux. Les analyses ont été réalisées par le SARM de Nancy comme indiqué dans le chapitre 2. Les valeurs de COT et CIT obtenues sont représentées suivant la géographie des pilotes sur les Figure 17 et Figure 18.

3.3.1 Evolution de pH des lixiviats en fin d’expérimentation

Dans la partie centrale des pilotes Cinq échantillons ont été prélevés à différentes hauteurs au centre des pilotes. Les résultats des analyses sont présentés sur la Figure 15 ci-après.

MIOM A MIOM B

pH pH

120 cm 10,68 9,84

90 cm 10,67 10,85

70 cm 10,87 10,83

30 cm 10,68 10,80

0 10,70 10,80

Figure 15: pH obtenus sur lixiviats des MIOM A et B prélevés à différentes hauteurs, au centre des pilotes

140

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

Les résultats montrent qu’au cœur du tas, les valeurs de pH sont assez homogènes quelque soit la hauteur où a été effectué le prélèvement. Une différence subsiste cependant pour le MIOM B à la surface du tas (120 cm). En effet, nous voyons que la valeur de pH est d’une unité inférieure, ce qui montre que cette partie a été carbonatée de façon significative.

Sur les bords du pilote Les prélèvements effectués sur 3 côtés de chaque pilote (à 2 hauteurs) ont conduit aux résultats présentés sur la Figure 16.

côté 3 côté 2 côté 1 côté 1 côté 2 côté 3120 cm

90 cm10,91 10,68 10,63 10,84 10,73 10,65

60 cm

30 cm10,32 9,88 9,86 10,06 10,47 10,76

0

MIOM ApH

MIOM BpH

Figure 16: pH obtenus sur lixiviats des MIOM A et B prélevés à différentes hauteurs, sur les cotés extérieurs des pilotes (le côté 4 étant commun aux deux pilotes)

L’analyse de ces résultats confirme que les MIOM à mi-hauteur n’ont pas (ou peu) évolué, les valeurs de pH (10,7±0,1) sont très proches de celles du cœur du tas portées sur la Figure 15. Par contre, on peut noter une évolution sensible avec quelques valeurs de pH inférieures à 10 dans certaines zones des compartiments inférieurs des pilotes. Ces informations confirment certaines hypothèses faites précédemment, une partie des MIOM en contact avec le flux d’air entrant a subi au moins une carbonatation partielle. La répartition géographique des évolutions de pH les plus marquées pourrait également indiquer l’existence de chemins préférentiels dans la circulation de l’air au sein des MIOM, en particulier en bordure de paroi.

3.3.2 Evolution des teneurs en carbone organique et inorganique Les analyses effectuées sur les MIOM à l’état initial révélaient les teneurs suivantes : CIT COT MIOM A 1% 1,1% MIOM B 1,4% 1,2%

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

Il faut signaler que ces valeurs représentent des teneurs moyennes auxquelles il convient d’affecter une incertitude raisonnable de 10 à 20% pour tenir compte de l’hétérogénéité des matériaux et des incertitudes expérimentales. Sur la Figure 17 sont présentés les résultats des analyses concernant les prélèvements effectués en fin d’expérience au centre des pilotes et à différentes hauteurs.

carbone carbone carbone carboneinorganique organique inorganique organique

120 cm 0,9 0,9 2,3 0,8

100 cm 0,8 0,9 1,7 0,8

70 cm 0,7 0,8 1,5 0,8

30 cm 0,8 0,9 1,4 0,7

0 1,1 1,1 1,7 0,8

MIOM A MIOM B

Figure 17: Teneurs en COT et CIT des MIOM A et B prélevés à différentes hauteurs, au centre des pilotes

Pour le MIOM A, on ne note pas d’évolution importante du CIT et COT. Les valeurs restent plutôt homogènes avec une faible baisse du carbone organique et aucune augmentation du CIT qui pourrait traduire une carbonatation, si ce n’est une possible carbonatation partielle en partie inférieure du pilote. Pour le MIOM B, le taux de CIT a un peu augmenté dans le compartiment inférieur, mais surtout en surface du tas. La valeur de 2,3% est significativement différente de la valeur initiale de 1,4%. Ce résultat est cohérent avec la baisse de pH enregistré pour le même échantillon et confirme une carbonatation du MIOM dans cette zone. Dans ce même pilote, on constate également une légère diminution, plutôt homogène, du taux de carbone organique indiquant une petite dégradation de la matière organique.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

En ce qui concerne les analyses des échantillons à mi-hauteur sur les bords du pilote, les résultats sont portés sur la Figure 18.

côté 3 côté 2 côté 1 côté 1 côté 2 côté 3120 cm

90 cm

0,8 / 0,8 0,8 / 0,7 1 / 0,8 60 cm 2 / 0,6 1 / 0,5 1,2 / 0,6

30 cm

0

MIOM ACinorg/Corg

MIOM BCinorg/Corg

Figure 18: Teneurs en COT et CIT des MIOM A et B prélevés à mi-hauteur, sur les bords extérieurs des pilotes

On ne constate aucune évolution significative pour le MIOM A. Les écarts sont plus marqués pour le MIOM B avec globalement une augmentation du rapport CIT/COT qui était de 1,4/1,2 à l’état initial. Le COT est divisé par un facteur 2 environ, indiquant une dégradation significative de la matière organique, plus importante qu’au cœur du tas. Malgré tout, par rapport à la masse totale du MIOM, cette évolution doit être considérée comme marginale et probablement liée à des paramètres expérimentaux spécifiques à ces zones proches des parois du pilote (flux d’air, température). L’autopsie des 2 MIOM après circulation d’air pendant plus de 300 jours apporte globalement la confirmation que les matériaux ont assez peu évolué, au moins du point de vue de leur carbonatation.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

4 Synthèse

4.1 Bilan scientifique Les résultats obtenus nous ont amené à nous poser des questions sur les conditions expérimentales choisies. En effet, les paramètres suivis ne nous ont pas montré d’évolution notable au cours de cette année de maturation expérimentale. Tout d’abord, lorsque l’on se penche sur les variations de température, nous voyons que celles-ci ont été conditionnées par la température de 30°C imposée par la circulation d’air chaud autour de la paroi. Nous n’avons à aucun moment obtenu des maxima proches de 70 à 90°C comme il est souvent observé sur les tas réels en IME. Il existe différents facteurs qui peuvent être responsables de ce peu d’évolution. Le débit d’air insufflé semble être l’un des facteurs majeurs puisque se sont ses constituants (O2, CO2) qui conditionnent la maturation des mâchefers (oxydation, carbonatation). Le choix concernant le taux de renouvellement de l’air au sein des MIOM a été effectué, à priori, sans données réelles de terrain. Les quelques études (Pascual & al., 1994; Freyssinet & al., 1998) de suivi continu de mâchefers en cours de maturation atmosphérique naturelle n’ont jamais abordé ce point. Il est possible que le débit d’air choisi ait été insuffisant et ait limité la quantité de réactifs disponibles pour réagir avec le MIOM. Mais si cette hypothèse est cohérente avec l’évolution toute relative des MIOM au fond et sur certains côtés des pilotes, elle ne l’est plus si l’on se replace dans les conditions de maturation des MIOM en IME. Les tas de mâchefers de plusieurs centaines de tonnes ne permettent pas, de toute évidence une circulation massive d’air à l’intérieur où les élévations de température sont maximales. Nous pensons plutôt que le débit d’air était trop important et peu représentatif du confinement du cœur d’un tas de mâchefer. Certains résultats décrits ultérieurement et repris dans la discussion finale semblent étayer cette deuxième hypothèse. Un second facteur déterminant pour la maturation des MIOM est leur taux d’humidité. Compte-tenu des volumes d’air ayant traversé les MIOM, la diminution des taux d’humidité n’a été que de quelques pourcents dans chaque pilote. Ce résultat est conforme aux calculs qui avaient été effectués en tenant compte du débit d’air, de la durée de l’expérience et des pressions de vapeur d’eau à 20°C (extérieur) et à 30°C (intérieur). Il n’y a pas eu assèchement des MIOM qui aurait pu compromettre leur maturation.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

En ce qui concerne maintenant le choix du pH des lixiviats comme indicateur majeur de carbonatation, les analyses réalisées sur les prélèvements, et tout particulièrement lors de «l’autopsie» des pilotes, ont montré qu’il était assez pertinent pour suivre des évolutions, mêmes légères. L’indicateur de suivi des réactions d’oxydation (exothermique) des métaux aurait pu être la température au sein des MIOM. Les faibles variations de température enregistrées sont sans commune mesure avec celle qui étaient attendues et n’ont permis aucun calcul d’ordre thermodynamique. A ce stade de la réflexion, nous ne pouvons donc que faire le constat que les conditions expérimentales définies n’ont pas permis une maturation significative des deux MIOM.

4.2 Bilan critique Compte-tenu des remarques précédentes, il nous est apparu nécessaire de formuler un certain nombre de critiques objectives de l’expérimentation mise en œuvre. La quantité de matériau solide utilisée (environ 6 tonnes au total) a entraîné de sérieuses contraintes techniques. L’inertie des pilotes, en particulier thermique, a constitué une des principales difficultés rencontrées. Elle est bien entendu directement reliée à leur dimensionnement. Si le système de régulation de température s’est révélé satisfaisant dans les conditions initiales à 30°C, il a fallu plusieurs jours de fonctionnement quasi-continu des pistolets à air chaud pour monter à 40°C. La conséquence de cette modification de la température a été l’arrêt total, pendant quelques jours, de l’installation suite à la destruction des sources d’air chaud et à un début d’incendie. Dans un autre domaine, le système de prélèvement de gaz s’est révélé inutilisable après quelques semaines en raison de la présence d’eau liquide dans les tuyaux. Cela était probablement dû à leur positionnement initial et à un tassement naturel des MIOM qui a provoqué des points bas et des siphons. Sur de telles installations avec des matériaux humides, il serait plus judicieux d’installer des tubes de prélèvements rigides positionnés plutôt de manière verticale qu’horizontale, pour empêcher toute entrée d’eau à l’intérieur. Enfin, comme il a déjà été expliqué, les prélèvements de MIOM ont nécessité la conception successive de deux carottiers avant d’obtenir une bonne efficacité. Les carottages se sont malgré tout toujours révélés très délicats en raison de l’hétérogénéité granulométrique des MIOM, et de la présence aléatoire d’objets indésirables (fils de fer, piles, morceaux métalliques…). Plusieurs heures ont été

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

nécessaires à chaque prélèvement d’une «carotte» de mâchefer d’environ 1m de hauteur et de 10 cm de diamètre. En ce qui concerne la circulation d’air, la régulation des débits dans chaque pilote s’est révélée efficace et stable dans le temps. Malgré une légère déformation des pilotes dans les parties basses (tassement des MIOM) qui ont pu permettre la formation de quelques poches d’air très localisées, aucune fuite latérale n’a été constatée. Des tests (après étanchéification des couvercles des pilotes) ont montré que le débit d’air traversant les MIOM était conforme au débit d’entrée. Même si quelques chemins préférentiels, liés à l’hétérogénéité granulométrique, ont pu exister, nous considérons que la majorité des MIOM a effectivement été en contacte avec le flux d’air. Dans ce type d’expérimentation, il est impossible de suivre en continu l’évolution physico-chimique des matériaux. La durée entre deux prélèvements successifs et l’inertie des pilotes ne permet pas une véritable réactivité pour changer les paramètres expérimentaux (débit d’air, température). Il est nécessaire d’attendre la fin de l’expérience pour en réaliser un réel bilan.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

5 Conclusion

Dans l’expérience qui vient d’être décrite, nous avons tenté de reproduire, dans des pilotes instrumentés de grande taille, la maturation de 2 MIOM de provenance différente. L’objectif était de pouvoir suivre l’évolution physico-chimique des matériaux sur plusieurs mois et de relier leurs évolutions respectives aux filières dont ils étaient issus. Cependant, les résultats obtenus n’ont pas été à la hauteur de nos attentes :

Pas d’élévation significative de température à l’intérieur des pilotes permettant de démontrer l’existence de réactions exothermiques (carbonatation et oxydation)

Pas d’évolution décelable de la teneur en O2 et CO2 à l’intérieur des tas montrant une éventuelle consommation par les constituants du mâchefer

Faible diminution du pH des lixiviats confirmant la carbonatation des MIOM

Pas d’évolution significative de la teneur des éléments lixiviés sur les matériaux initiaux et finaux démontrant une stabilisation

Au cours de ce travail, les conditions expérimentales ne nous ont pas permis d’atteindre les objectifs fixés. Cependant, il n’en ressort pas que des points négatifs. Les résultats nous ont amenés à nous poser des questions qui nous font rebondir sur d’autres idées d’expérimentations afin de mieux comprendre les mécanismes de réactions qui se produisent au cours de la maturation. La proportion de mâchefer s’étant carbonatée au cours de notre étude semble très faible Ce résultat nous a amené à mettre au point un pilote permettant une carbonatation accélérée des MIOM afin de quantifier la quantité de CO2 nécessaire et réellement mise en jeu pour réaliser cette carbonatation. De même, ce constat nous a amené à nous poser des questions sur le rôle de la matière organique présente au sein du mâchefer qui pourrait être prépondérant dans le processus de carbonatation. Ces deux derniers points sont détaillés dans les chapitres 4 et 5 où la réflexion sur la carbonatation sera plus développée et permettra de revenir sur l’interprétation de ces premiers résultats.

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Chapitre 3 : Etude de la maturation naturelle des MIOM en pilotes instrumentés

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