arrêt de nutrition et d’hydratation artificielles (anha ... · anha chez l’adulte en cas de...

27
Arrêt de nutrition et d’hydratation artificielles (ANHA) commentaires et enquête du CEC Cochin Guy Moriette 23 05 2016

Upload: truongduong

Post on 14-Sep-2018

216 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Arrêt de nutrition et d’hydratation artificielles(ANHA)

commentaires et enquête du CEC Cochin

Guy Moriette

23 05 2016

Circonstances des décès

USA 80 % de décès en institution National Reference Center for Bioethics literature 70 % d’entre eux précédés de l’arrêt d’un traitement

au moins > 50 % avec LAT. Petit n de cas soumis à la justice

France 60 % de décès en institution INED + obs fin de vie

3 % des décès font suite à une décision médicale dont l’intention est de mettre fin à la vie (le plus souvent sans demande du patient)

ANHA chez l’adulte

En cas de coma irréversible de phase terminale d’état végétatif persistant

USA des dizaines de cas soumis à la justice depuis 25 ans 1er cas Nancy Cruzan 1990 arrêt de

gastrostomie soumis à la Cour suprême après 7 ans d’état végétatif

ANHA chez l’enfant et le nouveau-né

Enfant Diekema et al 2009 Oriot et Carnevale 2009

Nouveau-néCarter et Leuthner 2003 Béranger, Boize et Viallard 2014 Enquête CEC 2014

AHA artificielles chez l’enfant (1)

Diekema et al, Pediatrics 2009. AAP general principles

Children capable of … and who show signs of wanting to eat or drink should be provided…

Medically provided fluids and nutrition constitute a medical intervention that may be withheld or witdrawn for the same types of reason …

Decisions … should be based on whether the intervention provides net benefit to the child

The primary focus should be the interests of the child

Although withholding or withdrawing medically provided fluids and nutrition may be morally permissible, it is not morally required

Medically provided fluids and nutrition may be withdrawn from a child who

permanently lacks awareness and the ability to interact… (vegetative state, anencephaly)…

can be withdrawn when such measures only prolong and add morbidity to the process of dying. (Ex : terminal illness from heart defects, renal

agenesis, severe gastro intestinal malformation or disease)

Parents should be fully involved. Appropriate sedation…

Ehics consultation recommended

ANHA chez l’enfant (2)

Diekema et al, Pediatrics 2009. AAP general principles

ANHA chez le nouveau-né

Carter et Leuthner 2003 Béranger, Boize et Viallard 2014 Enquête CEC (article refusé par

Arch Pédiatr…)

ANHA chez le nouveau-néCarter et Leuthner Seminars in Perinatology 2003

No difference in artificially administered nutrition and other medical interventions that might become inappropriate No moral distinction between ET and feeding tube

In adults,withholding artificially administered nutrition near the end of life does not prolong life. This may not be true in pediatrics.

Parents = principal decision makers for their children Eating and drinking vs feeding tube

« starvation » and « food » vs artificially administered nutrition (l’argument inepte du « laisser mourir de faim »)

Time : la longue durée n’est pas du tout un obstacle selon les auteurs (vs avis 121 du CCNE et étude CEC)

Béranger, Boize et Viallard 2014Arch Pediatr. 2014 21(2):170-6.

Etude pilote sur les pratiques de l’arrêt de la nutrition et de l’hydratation artificielles en réanimation néonatale

Quels apports récents à la réflexion ?

L’ANHA est-il légal ?

Interprétation dominante : La loi Leonetti de 2005 (art L 1111-4 du CSP) a donné au malade

en capacité de s’exprimer la possibilité de refuser « tout » traitement, ce qui intègre donc la nutrition et l’hydratation artificielle. (Marc Dupont, juriste APHP)

Décision N° 375081 du Conseil d’Etat (14 02 2014 (sur l’affaire V Lambert) : «Au nom du peuple français « Considérant… que l’alimentation et l’hydratation artificielle

relèvent de ces actes (qui tendent à assurer de façon artificielle le maintien des fonctions vitales..), et sont, par suite, susceptibles d’être arrêtés lorsque leur poursuite traduirait une obstination déraisonnable… »

Loi Claeys Léonetti 2016

Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie

(Alain Claeys et Jean Leonetti)

La loi précise les cas dans lesquels une sédation profonde et continue, pouvant altérer la conscience, maintenue jusqu’au décès, et associée à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie, peut être entreprise.

Il s’agit des « affections graves et incurables, engageant à court terme le pronostic vital », en cas de « souffrances réfractaires aux traitements ».

Dans le cas des personnes ne pouvant exprimer leur volonté, même conduite en se fondant sur la décision médicale de LAT (loi de 2005).

Mais dans le cas des nouveau-nés, une interprétation spécifique, très délicate et discutable, est nécessaire. 1. Pour établir qu’une souffrance est «réfractaire aux traitements», on doit

s’appuyer sur des éléments cliniques objectifs (scores de douleur-inconfort)2. Mais en cas (par ex.) d’agitation quasi permanente, réfractaire à la sédation

et l’analgésie, d’un bébé en ventilation mécanique présentant une DBP très sévère S’agit-il d’une « affection incurable » et de « souffrance réfractaire aux

traitements» ? Ou non (si l’on nie le caractère incurable de la pathologie, que cette

agitation soit une souffrance…)

L’ANHA est bien légal

Autres réflexionsPenser solidairement la fin de vie (1)

COMMISSION DE REFLEXION SUR LA FIN DE VIE EN FRANCE 18 décembre 2012

Si l’arrêt de traitement est relativement bien compris, celui des soins élémentaires tels que l’alimentation et l‘hydratation, l’est beaucoup plus mal.

Il faut distinguer 3 situations en fonction de la personne : 1. elle-même manifeste son souhait…2. Elle n’est pas en état d’exprimer sa volonté. Si elle continue à

se nourrir « par la bouche » et à boire… arrêter de donner à manger et à boire à quelqu’un qui ne le refuse pas s’apparente à de la maltraitance

Penser solidairement la fin de vie (2)

3. Elle n’est pas en état d’exprimer sa volonté et est nourrie et hydratée de façon artificielle (perfusion ou sonde dans l’estomac). La décision d’’ANHA ne peut se prendre qu’au terme d’une véritable discussion collégiale faisant l’objet d’une trace écrite. La place de la sédation se justifie s’il existe un doute sur la souffrance susceptible d’être engendrée par l’arrêt de la nutrition/hydratation (sensation de faim ou de soif).

Même si la médecine réaffirme qu’arrêt de traitement ne signifie pas arrêt des soins, la question de l’ANHA est vécue avec un imaginaire d’effroi par l’entourage en raison de la forte symbolique qui lui est attachée.

Si l’on suspend l’hydratation et la nutrition, et que pour rendre cet arrêt moins insupportable la décision est prise d’une sédation profonde, quelle est la place et la fonction réelle de ce geste si ce n’est de permettre d’accélérer la mort ?

Autres réflexionsCCNE Avis 121 (2013) 1

« Le CCNE souhaite ici attirer l’attention sur une situation « limite » rencontrée parfois en néonatalogie. La question de la sédation profonde de nature à accélérer le processus de mort se pose d'une manière particulière dans le cas des nouveau-nés, atteints de lésions cérébrales sévères et irréversibles, pour lesquels, avant la loi … un geste létal était parfois pratiqué, et pour lesquels, depuis son entrée en vigueur, une décision d'arrêt des traitements est prise ».

« Lorsque ces nouveau-nés ont une ventilation assistée, l’arrêt de la ventilation et la mise en oeuvre d’une sédation sont généralement admis, d’autant que la technique est en soi génératrice d’inconfort et de souffrance.

CCNE Avis 121 (2013) 2

Parfois ces nouveau-nés respirent de façon autonome. Se pose alors la question de l’arrêt de la nutrition et de l'hydratation et de la mise en oeuvre d’une sédation. Cette question est beaucoup plus débattue. « D’une part cet arrêt fait craindre qu’on « laisse

l’enfant mourir de faim ». « D’autre part, il pose la question du délai de

survenue de la mort qui peut parfois être long ».

CCNE Avis 121 (2013) 3 « Une étude … réalisée par le Centre d'éthique

clinique de l'hôpital Cochin, constate… que la perception des familles est très positive

lorsque la mort est survenue peu de jours après la mise en oeuvre de cette décision, ce laps de temps leur permettant de tenir dans leurs bras leur enfant débarrassé de tout l'appareillage médical et de se sentir parents.

En revanche, lorsque la survie se prolonge, parfois plusieurs semaines, il semble que le temps ait un effet destructeur sur les parents qui assistent à une détérioration physique progressive du nouveau-né, avec un sentiment très fort de culpabilité du fait qu'ils ne remplissent pas leur rôle de nourriciers ».

CCNE Avis 121 (2013) 4

« Ces situations, qui requièrent bien entendu une sédation profonde du nouveau-né et un accompagnement rapproché des parents, restent l’objet de débats chez les néonatalogistes et les gynécologues-obstétriciens.

Pour le CCNE, il est souhaitable que la loi soit interprétée avec humanité afin que, grâce à la manière de mener la sédation, le temps de l'agonie ne se prolonge pas au-delà du raisonnable.

Etude du Centre d’Ethique Clinique de Cochin

Fournier V, Maglio M, eds. L’arrêt d’alimentation et d’hydratation

en contexte de fin de vie.

Centre Ethique Clinique et MGEN éditeurs 2015.

CEC Matériel et méthodes (1)

5 sites 25 cas AG 36 SA PN 2750 Dates d’ANHA

Premiers jours : 6 cas (neuro 4/6) 1 à 6 semaines : 16 cas (neuro 5; grand

préma 3) 3 mois : 1 cas

CEC Matériel et méthodes (2)

25 cas 14 entretiens parents 41 entretiens équipes portant sur les 25 cas 9 entretiens avec des néonatologistes dont 3 font

partie des centres ayant effectué des ANHA

CEC Résultats : ressenti sur 14 cas

T Bon +/- Bon +/-Mauvais T mauvaisParents 1 5 5 3

Equipe3 5 1 5

CEC Résultats : ressenti équipe sur 11 cas(parents non rencontrés)

Très mauvais : 9 / 11

CEC Résultats : classement des attitudesselon avis de 9 néonatologistes

1. Respect de la vie : 5/14 cas (parents vus) et 7/25 cas Pas d’intention de faire mourir, retour à

la nature Survie si le bébé tête Handicap accepté

CEC Résultats : classement des attitudesselon avis de 9 néonatologistes

2. Aide à mourir 1/14 cas (parents vus) et 3/25 cas Intention de faire mourir transgression assumée de la loi éthique de responsabilité

CEC Résultats : classement des attitudesselon avis de 9 néonatologistes

3. Accompagnement de fin de vie, entre attitudes 1 et 2 8 /14 cas (parents vus) et 15/25 cas Intention : complexe espoir que l’enfant ne vive

pas, mais refus de faire mourir Respect de la loi

Analgésie sédation selon arguments cliniques Pas trop d’efforts pour faire téter