31-07-12 amnesty international 2012 - rapport des drois humains dans le monde
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AMNESTYINTERNATIONAL
1AMNESTY INTERNATIONAL - RAPPORT 2012
LA SITUATION DES DROITS HUMAINS DANS LE MONDE
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uyMartin/Panos
Sur la place Tahrir, au Caire (gypte), lafoule allume des fuses clairantes pourfter lannonce de la dmission dHosni
Moubarak, le 11 fvrier 2011.
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amnesty.or
AILRC-FR, 2012
Amnesty InternationalCentre de ressources linguistiquesUnit charge de la langue franaise,www.amnesty.org/fr
DIFFUSIONCe livre est en vente auprsdes sections et groupesdAmnesty International(voir adresses p. 406-409).
Il est galement en venteen librairie.
IMPRESSIONCLAES-printing St Pieters-Leeuw, Belgique
Version originale anglaise :
Amnesty InternationalPublications 2012,1 Easton Street,Londres WC1X 0DW,Royaume-Uni.
Index AI : POL 10/001/2012
Tous droits de reproduction
rservs. Il est interdit dereproduire intgralementou partiellement le prsentouvrage sur quelque supportque ce soit sans autorisationdes diteurs.
ISBN : 978-2-8766-6187-5
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1AMNESTY INTERNATIONAL - RAPPORT 2012
LA SITUATION DES DROITS HUMAINS DANS LE MONDE
Ce rapport couvre la priode allant de janvier dcembre 2011
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Des journalistes interviewent lartistemilitant Ai Weiwei devant chez lui, Pkin (Chine), aprs sa libration le22 juin 2011.
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PPhoto/NgHanG
uan
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VIII Amnesty International - Rapport 2012
PRFACE, XI
CHAPITRE IRsums rgionauxAfrique, XXIAmriques, XXXI
Asie-Pacique, XLIEurope et Asie centrale, LIMoyen-Orient et Afrique du Nord, LXI
CHAPITRE IIPaysAfghanistan, 1Afrique du Sud, 5Albanie, 9Algrie, 11Allemagne, 14Angola, 16
Arabie saoudite, 19Argentine, 23Armnie, 25Australie, 26Autorit palestinienne, 27Autriche, 30Azerbadjan, 32Bahamas, 34Bahren, 35Bangladesh, 39Blarus, 41Belgique, 44Bnin, 45Bolivie, 46Bosnie-Herzgovine, 47Brsil, 51Bulgarie, 56Burkina Faso, 57Burundi, 58Cambodge, 61Cameroun, 64Canada, 66Chili, 68Chine, 70Chypre, 75
Colombie, 76Congo, 81
Core du Nord, 82Core du Sud, 85Cte dIvoire, 86Croatie, 89Cuba, 92Danemark, 94
gypte, 96mirats arabes unis, 101quateur, 103rythre, 105Espagne, 107tats-Unis, 111thiopie, 115Fidji, 119Finlande, 120France, 121Gambie, 124Gorgie, 125
Ghana, 127Grce, 128Guatemala, 131Guine, 133Guine-Bissau, 135Guine quatoriale, 136Guyana, 139Hati, 140Honduras, 142Hongrie, 143Inde, 146Indonsie, 150Irak, 153
Iran, 157Irlande, 162Isral et territoires palestiniens occups, 164Italie, 169Jamaque, 177Japon, 175Jordanie, 176Kazakhstan, 179Kenya, 182Kirghizistan, 185Kowet, 188Laos, 190
Liban, 191Liberia, 194
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SOMMAIRE
RAPPORT 2012
Amnesty International - Rapport 2012 IX
Libye, 196Lituanie, 202Macdoine, 203Madagascar, 206Malaisie, 207Malawi, 209
Maldives, 211Mali, 212Malte, 213Maroc et Sahara occidental, 214Mauritanie, 217Mexique, 219Moldavie, 224Mongolie, 226Montngro, 227Mozambique, 229Myanmar, 231Namibie, 235Npal, 236Nicaragua, 238Niger, 239Nigeria, 240Norvge, 245Nouvelle-Zlande, 246Oman, 247Ouganda, 248Ouzbkistan, 254Pakistan, 252Panama, 258Paraguay, 259Pays-Bas, 261
Prou, 262Philippines, 263Pologne, 266Porto Rico, 268Portugal, 268Qatar, 269Rpublique centrafricaine, 270Rpublique dmocratique du Congo, 273Rpublique dominicaine, 278Rpublique tchque, 280Roumanie, 282Royaume-Uni, 284Russie, 288Rwanda, 293
Salvador, 297Sngal, 298Serbie, 299Sierra Leone, 304Singapour, 307Slovaquie, 308
Slovnie, 310Somalie, 312Soudan, 316Soudan du Sud, 320Sri Lanka, 322Sude, 325Suisse, 326Swaziland, 327Syrie, 330Tadjikistan, 336Taiwan, 337Tanzanie, 338Tchad, 340Thalande, 343Timor-Leste, 346Togo, 347Trinit-et-Tobago, 348Tunisie, 349Turkmnistan, 353Turquie, 354Ukraine, 359Uruguay, 362Venezuela, 363Vit-Nam, 365Ymen, 367
Zimbabwe, 372
CHAPITRE IIItat des ratications de certainstraits relatifs aux droits humains, 379Traits internationaux, 386Traits rgionaux, 396
CHAPITRE IVAdresses, 406Index, 414
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mnestyInternational(photo:GraceGonzalez)
Des femmes et des lles, des hommeset des garons manifestent au Nicaraguale 28 septembre 2011, loccasion de
la Journe pour la dpnalisation delavortement en Amrique latine et dansles Carabes.
Le papillon symbolise pour nous le dsir
de raliser nos rves, de dployer nos ailes
[et] de dfendre avec force nos droits.
Martha Mungua, de lAlliance des centres nicaraguayens
pour les femmes
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Amnesty International - Rapport 2012 XI
PRFACE
SI qUELqUE CHOSE MARRIvE, SACHEz qUELE RgIME NE CRAINT PAS LES PRISONNIERSMAIS PLUTT CEUx PARMI vOUS qUI NE LESOUbLIENT PAS. Razan Ghazzawi, blogueuse syrienne dtenue pendant 15 jours en Syrie en dcembre 2011
Le Rapport 2012 dAmnesty International rend compte de la situation des droits
humains dans le monde en 2011. travers cinq rsums rgionaux et une tude au
cas par cas de 155 pays et territoires, il se fait lcho des appels exigeant le respect
des droits humains qui nont cess de rsonner dans le monde entier.
Des millions de personnes sont descendues dans la rue, soulevant une gigantesque
vague despoir de libert et de justice. Mme la plus brutale des rpressions semblait
incapable dtouffer les revendications de plus en plus pressantes de populations qui
ntaient plus prtes supporter des systmes politiques ignorant les idaux dgalit
tout autant que les principes de la responsabilit, de la justice et de la transparence.
La rsistance contre linjustice et la rpression a pris bien des formes et sest plus
dune fois incarne dans des actes dmontrant un courage et une dtermination
immenses de la part dhommes, de femmes et de groupes de personnes confronts
des obstacles qui semblaient insurmontables. Malgr lindiffrence, les menaces
et les attaques, les dfenseurs des droits humains ont men des actions en justice
aux niveaux national et international, pour faire reculer une impunit et unediscrimination profondment enracines.
Ce rapport rete lapproche dAmnesty International qui, dans son combat contre
les violations des droits humains, examine les problmes poss et les possibilits de
changement dans un pays ou une rgion donns. lheure o Amnesty International
vient de franchir le cap de son 50e anniversaire, ce rapport tmoigne non seulement
du sort rserv toutes ces femmes et tous ces hommes dont lexistence est
marque par les atteintes aux droits humains, mais galement de laction de celles et
ceux qui continuent de se mobiliser au nom du principe de la dignit humaine.
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XII Amnesty International - Rapport 2012
Les donnes gurant au dbut de chaque entre pays proviennent des sources indiques ci-aprs.
Les chiffres sur lesprance de vie et le taux dalphabtisation des adultes sont tirs du Rapport sur ledveloppement humain 2011 du Programme des Nations unies pour le dveloppement (PNUD), disponible ladresse http://hdr.undp.org/fr/rapports/mondial/rdh2011.
Les derniers chiffres disponibles concernent lesprance de vie la naissance (pour 2011) et le tauxdalphabtisation des adultes (en pourcentage de la population de 15 ans et plus, pour la priode 2005-2010).Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du PNUD ou sur celui de lInstitut de statistique de lUNESCO(www.uis.unesco.org).
Le PNUD a plac certains pays ayant un taux dalphabtisation de 99 % dans la catgorie des pays dveloppement humain lev . Dans ces cas, nous navons pas jug utile de prciser ce chiffre.
Les chiffres concernant la population portent sur lanne 2011 et ceux qui concernent le taux de mortalitdes enfants de moins de cinq ans sur lanne 2009. Ils proviennent tous du rapport tat de la populationmondiale 2011 du FNUAP, disponible ladresse http://foweb.unfpa.org/SWP2011/reports/FR-SWOP2011.pdf.
La population nest indique que pour donner une ide du nombre de personnes concernes par les sujets quenous traitons. Amnesty International reconnat que ce type dinformation a une utilit limite, et ne prend pasposition sur des questions telles que la dlimitation de territoires litigieux ou la prise en compte ou non decertains groupes dans le dcompte de la population.
Certaines entres de ce rapport ne mentionnent quune partie de ces lments. Diffrentes raisons expliquentces omissions, notamment labsence de telles informations dans les tableaux des Nations unies voqus plushaut.
Les chiffres indiqus sont les derniers disponibles lheure de la mise sous presse et leur seul objectif est desituer le pays dans son contexte. Toute comparaison entre pays doit tre faite avec la plus grande prcaution,compte tenu des diffrences de mthodologie et du caractre temporaire des donnes fournies.
LES REPRES CONCERNANT LES PAYS
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Amnesty International - Rapport 2012 XIII
ANASE
Association des Nations de lAsie du Sud-EstCIAAgence centrale du renseignement des tats-Unis
CEDEAOCommunaut conomique des tats de lAfrique de lOuest
CICRComit international de la Croix-Rouge
DESCDroits conomiques, sociaux et culturels
FNUAPFonds des Nations unies pour la population
OEAOrganisation des tats amricains
OITOrganisation internationale du travail
OMSOrganisation mondiale de la sant
ONgOrganisation non gouvernementale
ONUOrganisation des Nations unies
OTANOrganisation du trait de lAtlantique nord
PIDCPPacte international relatif aux droits civils et politiques
PIDESCPacte international relatif aux droits conomiques,sociaux et culturels
UNESCOOrganisation des Nations unies pour lducation, la scienceet la culture
UNICEFFonds des Nations unies pour lenfance
Comit europen pour la prvention de la tortureComit europen pour la prvention de la torture et despeines ou traitements inhumains ou dgradants
Comit sur les travailleurs migrantsComit pour la protection des droits de tous les travailleursmigrants et des membres de leur famille
Convention contre la tortureConvention contre la torture et autres peines ou traitementscruels, inhumains ou dgradants
Convention contre les disparitions forcesConvention internationale pour la protection de toutes
les personnes contre les disparitions forcesConvention europenne des droits de lhommeConvention de sauvegarde des droits de lhomme et desliberts fondamentales
Convention sur la discrimination raciale
Convention internationale sur llimination de toutesles formes de discrimination raciale
Convention sur la protectiondes travailleurs migrantsConvention internationale sur la protectiondes droits de tous les travailleurs migrants etdes membres de leur famille
Convention sur les femmesConvention sur llimination de toutes les formesde discrimination lgard des femmes
Convention n 169 de lOIT
Convention n 169 de lOIT relative aux peuplesindignes et tribaux
Deuxime Protocole facultatifse rapportant au PIDCPDeuxime protocole facultatif se rapportant au PIDCP,visant abolir la peine de mort
Protocole la Charte portant cration dune Courafricaine des droits de lhomme et des peuplesProtocole la Charte africaine des droits de lhomme et despeuples portant cration dune Cour africaine des droits delhomme et des peuples
Protocole facultatif la Convention
contre la tortureProtocole facultatif se rapportant la Conventioncontre la torture et autres peines ou traitements cruels,inhumains ou dgradants
Protocole facultatif la Conventionrelative aux droits de lenfantProtocole facultatif se rapportant la Conventionrelative aux droits de lenfant, concernant limplicationdenfants dans les conits arms
Rapporteur spcial des Nationsunies sur la tortureRapporteur spcial des Nations unies sur la tortureet les autres peines ou traitements cruels, inhumainsou dgradants
Rapporteur spcial des Nationsunies sur le racismeRapporteur spcial des Nations unies sur les formescontemporaines de racisme, de discrimination raciale,de xnophobie et de lintolrance qui y est associe
Rapporteur spcial des Nationsunies sur les populations autochtonesRapporteur spcial des Nations unies sur la situationdes droits de lhomme et des liberts fondamentalesdes populations autochtones
Rapporteuse spciale des Nations uniessur la violence contre les femmesRapporteuse spciale des Nations unies charge de laquestion de la violence contre les femmes, y compris sescauses et ses consquences
SIgLES ET AbRvIATIONS
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mosGumulira/AfricaMediaOnline
La police du Malawi poursuit desmanifestants. Des mouvements deprotestation contre la mauvaisegouvernance, les pnuries de carburantet les atteintes aux droits humainsont eu lieu dans plusieurs villes dupays le 22 juillet 2011. Lors de cesmanifestations, la police a tir ballesrelles, tuant au moins 19 personnes et enblessant des dizaines dautres, dont desmineurs.
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PPhoto/ItalianCo
astGuard,FrancescoMalavolta
Des migrants sont secourus par desgarde-ctes italiens au large de lle dePantelleria (Italie), le 13 avril 2011.
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CHAPITRE I - RSUMS RgIONAUx
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Soudan, aot 2011. Un homme observedes avions militaires qui traversent leciel de Kurchi (Kordofan mridional).Un conit a clat dans la rgion en juinet, plusieurs reprises, le gouvernementsoudanais a bless et tu des civils dansdes bombardements ariens aveugles.
C
arstenStormer
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RSUMSRgIONAUx
AFRIqUE
Amnesty International - Rapport 2012 XXI
AFRIqUE
Cette anne pourrait tre celle o la libert dexpression et dassociationsera respecte. [] Celle o les thiopiens ne seront plus incarcrs en
raison de leurs convictions politiques. Le journaliste et ancien prisonnier dopinion thiopien Eskinder Nega, dans un discours sur lalibert de la presse prononc en septembre 2011 la veille du Nouvel An thiopien. EskinderNega a t arrt quelques jours plus tard et inculp de trahison et dinfractions lies auterrorisme.
Les mouvements populaires qui ont dferl en Afrique du Nord ont trouv
un cho chez les populations dAfrique sub-saharienne, en particulier dans
les pays dirigs par des gouvernements rpressifs. Syndicalistes, tudiants et
gures de lopposition politique se sont mobiliss pour organiser des mani-festations. Mus par leurs aspirations politiques, leur qute dune plus grande
libert et un profond sentiment de frustration n dune vie marque par le
dnuement, des hommes et des femmes sont descendus dans la rue pour
dnoncer laugmentation du cot de la vie et protester contre leur situation
conomique et sociale dsespre.
Beaucoup des facteurs sous-jacents qui ont conduit aux soulve-
ments en Afrique du Nord et au Moyen-Orient existent galement dans
dautres rgions dAfrique. Cest notamment le cas des dirigeants auto-
ritaires qui se maintiennent au pouvoir depuis plusieurs dcennies en
sappuyant sur leurs services de scurit pour rprimer la dissidence.En outre, la pauvret et la corruption sont trs rpandues, les liberts les
plus lmentaires font dfaut et de vastes catgories de population sont
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XXII Amnesty International - Rapport 2012
souvent tenues lcart du reste de la socit. En rprimant avec bruta-
lit les manifestations de 2011, les responsables politiques de la rgion
ont montr quils nont pas su tirer les leons de ce qui est arriv leurs
homologues du nord.
PauvretAu cours de la dernire dcennie, les taux de pauvret ont progressivement
diminu en Afrique et des avances ont t enregistres dans la ralisationdes Objectifs du millnaire pour le dveloppement. Il nen demeure pas
moins que plusieurs millions de personnes vivent toujours dans la pauvret,
prives des services essentiels que sont une eau propre, des installations
sanitaires, laccs aux soins et lducation.
Du fait de la rapidit de lurbanisation, de nombreux Africains nont pas
de logement dcent ; ils sont nombreux vivre dans des bidonvilles, o les
installations les plus lmentaires font dfaut et o ils risquent tout moment
dtre expulss de force par les autorits. Bien souvent, les personnes expul-
ses perdent leurs biens lorsque leurs habitations sont dmolies. Beaucoup
perdent galement leurs moyens de subsistance, ce qui les entrane encoredavantage dans la spirale de la misre. Les expulsions forces massives qui
ont eu lieu dans au moins cinq zones dimplantation sauvage de Nairobi
(Kenya) ont touch plusieurs milliers de personnes. Des centaines dautres
ont t chasses dun campement du Territoire de la capitale fdrale, au
Nigeria. NDjamena (Tchad) et dans diffrentes rgions dAngola, les expul-
sions forces se sont poursuivies.
Le fort taux de chmage et le niveau lev de pauvret ont t en partie
lorigine de certaines violences, y compris lors de manifestations antigou-
vernementales. Les mesures de lutte contre la corruption ont t souvent
rduites nant parce quelles ne bnciaient daucun soutien politique. AuNigeria, par exemple, le chef de ltat a limog la prsidente de la Commission
des crimes conomiques et nanciers six mois avant la n de son mandat,
sans fournir la moindre explication.
Rpression politiqueGalvaniss par les vnements en Afrique du Nord, des manifestants
antigouvernementaux sont descendus, partir de la n janvier, dans les
rues de Khartoum et dautres villes du Soudan. Ils ont subi les coups des
forces de scurit et de trs nombreux militants et tudiants ont t arrts
et dtenus arbitrairement. Beaucoup auraient t torturs en dtention.En Ouganda, des personnalits de lopposition ont appel la population
reproduire les mouvements de protestation gyptiens en descendant
dans la rue, mais les rassemblements ont t marqus par des violences.
En fvrier, le gouvernement ougandais a interdit toute manifestation. La
police et larme ont recouru une force excessive contre les manifes-
tants et le dirigeant de lopposition Kizza Besigye a t harcel et arrt. Au
Zimbabwe, une quarantaine de militants ont t arrts en fvrier pour la
seule raison quils avaient discut des vnements dAfrique du Nord. Six
dentre eux ont dans un premier temps t accuss de trahison. En avril,
les autorits du Swaziland ont rprim des manifestations similaires avecune force excessive.
En rprimantavec brutalit lesmanifestations de2011, les responsablespolitiques de la rgionont montr quilsnont pas su tirerles leons de ce quiest arriv leurshomologues du nord.
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AFRIqUE
Amnesty International - Rapport 2012 XXIII
Les forces de scurit ont tir balles relles contre des manifestants anti-
gouvernementaux en Angola, au Burkina Faso, en Guine, au Liberia, au
Malawi, en Mauritanie, au Nigeria, au Sngal, en Sierra Leone et au Soudan
du Sud, ce qui a fait de nombreuses victimes. Les autorits nouvraient en
gnral pas denqute sur lutilisation excessive de la force et personne na
t amen rendre des comptes sur les homicides.
Dans la plupart des pays dAfrique, des dfenseurs des droits humains,
des journalistes et des opposants ont, cette anne encore, t victimesdarrestations et de placements en dtention arbitraires ; certains ont t
passs tabac, menacs, intimids ; certains ont t tus par des groupes
arms ou par les forces de scurit gouvernementales. Les enqutes ouvertes
au Burundi sur le meurtre, en 2009, du dfenseur des droits humains Ernest
Manirumva nont pas enregistr de vritables avances. En Rpublique
dmocratique du Congo (RDC), cinq policiers ont t reconnus coupables,
en juin, de lassassinat en 2010 du militant des droits fondamentaux Floribert
Chebeya. Mais aucune enqute navait t mene sur certaines personnes
qui semblaient pourtant avoir eu un rle dans ce meurtre.
Au Burundi, en thiopie, en Gambie, en Guine, en Guine-Bissau, enGuine quatoriale, au Liberia, Madagascar, en Ouganda, en RDC, en
Somalie et au Soudan, les autorits cherchaient garder le contrle des infor-
mations destines au public. Elles ont impos des restrictions sur la couver-
ture de certains vnements, ferm ou suspendu des stations de radio,
bloqu des sites Internet spciques ou interdit la publication de journaux. Le
Rwanda sest engag dans une srie de rformes en vue daccrotre la libert
des mdias, mais certains organes de presse ferms par les autorits en 2010
navaient toujours pas repris leurs activits. Deux journalistes ont par ailleurs
t condamns de lourdes peines demprisonnement.
Les assembles nationales dAfrique du Sud et dAngola ont examin desprojets de loi susceptibles de restreindre fortement la libert dexpression et
laccs linformation. Un point positif est cependant noter : au Nigeria, le
prsident Goodluck Jonathan a enn promulgu la Loi relative la libert de
linformation.
ConitsLes violences politiques qui avaient clat en Cte dIvoire en novembre 2010,
la suite de llection prsidentielle, ont dgnr en conit arm durant la
premire moiti de lanne 2011. Les forces allies Alassane Ouattara ont
reu le soutien dune force franaise et de la mission de maintien de la paixdes Nations unies. Elles ont pris le contrle du pays la n du mois davril
et ont arrt lancien prsident Laurent Gbagbo, ainsi quun grand nombre
de ses sympathisants. Plusieurs centaines de milliers de personnes ont t
dplaces par le conit ; beaucoup se sont rfugies dans des pays voisins,
en particulier au Liberia. Des milliers de civils ont t tus ou blesss dans la
capitale conomique, Abidjan, et dans louest du pays. En mars et en avril, les
deux parties au conit ont tu en toute illgalit plusieurs centaines de civils
Dukou (ouest du pays) et dans des villages alentour o les gens taient
pris pour cible en raison de leur origine ethnique ou de leur afliation poli-
tique suppose. La mission de maintien de la paix de lONU na pas protgefcacement la population civile Dukou. Les forces des deux camps en
Les forces de scuritont tir balles rellescontre des manifestantsantigouvernementaux,ce qui a fait denombreuses victimes.
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XXIV Amnesty International - Rapport 2012
prsence se sont galement rendues coupables de violences sexuelles, y
compris de viols, et en octobre la Cour pnale internationale (CPI) a auto-
ris louverture dune enqute sur les crimes de guerre et les crimes contre
lhumanit commis par les deux parties au conit. Sous le coup dun mandat
darrt mis par la CPI, Laurent Gbagbo a t transfr aux Pays-Bas et remis
la Cour en novembre. Pour prserver sa crdibilit, la CPI doit veiller ce
que les crimes commis par les forces dles au prsident Ouattara fassent
eux aussi lobjet dune enqute et que les responsables prsums soientpoursuivis. La CPI doit aussi enquter sur les crimes de guerre et les crimes
contre lhumanit perptrs avant llection prsidentielle de novembre 2010,
dans la mesure o, ce jour, lappareil judiciaire ivoirien na pas eu la capa-
cit ou la volont de le faire.
Les Sud-Soudanais se sont prononcs, de faon crasante, en faveur de
lindpendance du Soudan du Sud lors du rfrendum de janvier sur lauto-
dtermination. Une fois la date de lindpendance xe (au 9 juillet), les
tensions se sont accrues dans les zones de transition que sont la rgion
dAbyei et les tats du Kordofan mridional et du Nil bleu. Un autre rf-
rendum prvu en janvier, concernant Abyei, na nalement pas eu lieu. Unconit a clat en mai dans la rgion : soutenues par des milices, les Forces
armes soudanaises ont pris le contrle dAbyei, obligeant plusieurs dizaines
de milliers de membres du groupe des Dinkas Ngoks se rfugier au Soudan
du Sud. Dans la ville dAbyei, des habitations ont t pilles et dtruites. L
encore, la mission de maintien de la paix de lONU, dploye Abyei, na
pas pris de mesures signicatives pour empcher les attaques et protger
la population civile. la n de lanne, aucune solution navait t trouve
concernant le statut dAbyei.
En raison de dissensions sur des questions de scurit et sur lissue des
lections au Kordofan mridional, la situation dans cet tat a dgnr enconit arm entre le Mouvement populaire de libration du Soudan-Nord
(MPLS-Nord) et les Forces armes soudanaises. Des centaines de milliers
de personnes ont t dplaces par le conit et par le climat gnral din-
scurit. Les troupes gouvernementales ont procd des bombardements
ariens aveugles qui ont fait de nombreuses victimes civiles. Les Nations
unies et diverses autres organisations, dont Amnesty International, ont
recueilli des informations sur ces attaques menes sans discrimination et
ces homicides illgaux. Angelo al Sir, un agriculteur, a ainsi dcrit la mort de
son pouse, qui tait enceinte, de deux de leurs enfants et de deux autres
parents, tus le 19 juin lors du bombardement dUm Sirdeeba, un village lest de Kadugli.
En septembre, le conit au Kordofan mridional stait tendu ltat du
Nil bleu, contraignant plusieurs dizaines de milliers de personnes se rfu-
gier au Soudan du Sud et en thiopie. En refusant laccs aux organisations
humanitaires indpendantes et aux observateurs, des droits humains entre
autres, le gouvernement soudanais a de fait ferm les tats du Kordofan mri-
dional et du Nil bleu au monde extrieur. Le Conseil de paix et de scurit de
lUnion africaine et le Conseil de scurit des Nations unies nont pris aucune
mesure concrte face cette situation. Ils se sont notamment abstenus de
condamner les obstacles opposs aux organisations humanitaires et la pour-suite des atteintes aux droits humains.
Rares sont lespersonnes qui ont t
amenes rendredes comptes pourdes atteintes auxdroits fondamentaux.Cest pourquoi dansbeaucoup de pays dela rgion, la populationna plus conancedans les organeschargs de faire
appliquer la loi ni danslappareil judiciaire.
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AFRIqUE
Amnesty International - Rapport 2012 XXV
Le conit au Darfour (Soudan) sest poursuivi sans relche et le nombre
dhabitants contraints de quitter leur foyer a encore augment. Les auto-
rits soudanaises sen sont prises aux personnes qui vivaient dj dans
des camps de dplacs car elles les considraient comme soutenant les
groupes dopposition arms. De nouveaux cas de viol et dautres formes
de violences sexuelles ont t signals. Le Soudan refusait toujours de
cooprer avec la CPI. Le procureur de la CPI a requis la dlivrance dun
mandat darrt contre le ministre de la Dfense, Abdelrahim MohamedHussein, pour des crimes de guerre et des crimes contre lhumanit
commis au Darfour.
En Somalie, les combats qui se poursuivaient contre le groupe arm isla-
miste Al Shabab ont pris une dimension rgionale lorsque des soldats kenyans
et thiopiens sont intervenus directement dans les combats. Plusieurs milliers
de civils ont t blesss ou tus au cours dattaques menes sans discerne-
ment par diffrentes parties en prsence, essentiellement Mogadiscio. Des
centaines de milliers de personnes ne pouvaient toujours pas rentrer chez
elles en raison du conit et de linscurit. La scheresse qui svissait dans la
sous-rgion a aggrav une situation humanitaire dj catastrophique et ltatde famine a t dclar dans certaines parties de la Somalie. Les organisa-
tions humanitaires avaient dimmenses difcults accder aux populations
pour leur apporter une aide durgence.
Le conit qui dchirait lest de la RDC semblait lui aussi sans issue. Les
violences sexuelles, dont le viol, constituaient une pratique gnralise tant
des forces de scurit gouvernementales que des groupes dopposition
arms. Dautres atteintes aux droits humains homicides illgaux, pillages,
enlvements se poursuivaient galement, essentiellement imputables aux
groupes arms. Lappareil judiciaire de la RDC ntait pas en mesure de traiter
les nombreuses affaires de violations des droits fondamentaux commises aucours du conit. Cette anne encore, des enfants ont t recruts et utiliss
comme soldats, notamment en Rpublique centrafricaine, en RDC et en
Somalie.
Certains gouvernements africains taient toujours peu disposs faire en
sorte que les responsables de crimes de droit international rendent compte
de leurs actes. Ainsi, le Sngal refusait toujours de poursuivre ou dextrader
Hissne Habr, lancien prsident du Tchad. Le gouvernement burundais,
quant lui, a examin en n danne une proposition de rvision de la loi
visant mettre en place une commission de vrit et de rconciliation, mais
manquait manifestement de la volont politique ncessaire pour crer untribunal spcial, ainsi que les Nations unies lavaient recommand en 2005.
Justice et impunitNombre daffaires de violations commises par les forces de scurit ou les
forces de lordre ntaient pas traites. Les autorits nouvraient presque
jamais denqute indpendante et impartiale sur les arrestations et les dten-
tions arbitraires, les actes de torture et les autres mauvais traitements, les
homicides illgaux (y compris les excutions extrajudiciaires) ou les dispari-
tions forces qui leur taient signals. Rares sont les personnes qui ont t
amenes rendre des comptes pour des atteintes aux droits fondamentaux.Cest pourquoi dans beaucoup de pays de la rgion, la population na plus
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XXVI Amnesty International - Rapport 2012
conance dans les organes chargs de faire appliquer la loi ni dans lappa-
reil judiciaire. Ceux qui tentent de saisir la justice ofcielle, notamment les
victimes datteintes aux droits humains, se voient par ailleurs confronts un
autre obstacle, celui du cot.
Limpunit pour les violations des droits humains perptres par des
agents de la force publique tait gnralise au Burundi, au Cameroun,
au Congo, en rythre, en thiopie, en Gambie, en Guine, en Guine-
Bissau, au Kenya, Madagascar, au Malawi, au Mozambique, au Nigeria,en RDC, au Sngal, au Soudan, au Swaziland, en Tanzanie et au
Zimbabwe. La commission denqute sur les excutions extrajudiciaires
mise en place par le gouvernement burundais na pas publi ses conclu-
sions. Les autorits burundaises nont pas non plus ouvert denqute sur
les informations selon lesquelles des membres du Service national de
renseignement (SNR) se seraient rendus coupables de torture en 2010.
Autre exemple agrant du caractre institutionnalis de limpunit : au
cours de lExamen priodique universel du Soudan par le Conseil des
droits de lhomme [ONU], en septembre, ce pays a rejet les recomman-
dations qui lui taient faites de rexaminer sa Loi de 2010 relative lascurit nationale et de rformer le Service national de la sret et du
renseignement (NISS). De ce fait, les agents du NISS demeurent labri
de toute poursuite et de toute sanction disciplinaire pour les violations des
droits humains quils ont commises.
Le nombre de personnes en dtention provisoire demeurait trs lev car,
dans la plupart des pays, lappareil judiciaire ntait pas en mesure de garantir
un procs quitable dans un dlai raisonnable. Beaucoup de personnes ne
pouvaient pas bncier des services dun avocat aprs leur arrestation.
Dans de nombreux pays, les conditions de dtention taient pouvantables :
la surpopulation et la pnurie de personnel pnitentiaire semblaient tre largle, tout comme le manque de soins, deau, de nourriture et dquipements
sanitaires de base pour les dtenus. Bien souvent, elles ne rpondaient pas
aux critres minimaux xs par les normes internationales et sapparentaient
une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dgradant. Dans une
affaire particulirement horrible intervenue en septembre, neuf hommes sont
morts asphyxis dans les locaux de la gendarmerie nationale de Lr (Tchad)
o ils taient entasss.
La tendance vers labolition de la peine de mort sest poursuivie.
LAssemble nationale du Bnin a vot en faveur de la ratication du
Deuxime Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatifaux droits civils et politiques, conrmant ainsi son intention dabolir la
sentence capitale. Au Ghana, labolition de cette peine a t recommande
par la Commission de rvision de la Constitution. En octobre, le procureur
gnral fdral et ministre de la Justice du Nigeria a inform une dlgation
dAmnesty International que le gouvernement avait instaur un moratoire
ofciel sur les excutions. Le gouvernement de Sierra Leone avait fait une
dclaration similaire en septembre. loppos de ces volutions encoura-
geantes, la Somalie, le Soudan et le Soudan du Sud guraient parmi les
derniers pays dAfrique sub-saharienne procder encore des excu-
tions, souvent lissue de procs contraires aux rgles dquit les pluslmentaires.
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AFRIqUE
Amnesty International - Rapport 2012 XXVII
MarginalisationDans de nombreux pays, rfugis et migrants taient plus que dautres
victimes datteintes aux droits fondamentaux. Des Congolais ont, cette anne
encore, t en butte des violences sexuelles au moment o ils taient
expulss dAngola. En Mauritanie, les autorits ont arrt arbitrairement
plusieurs milliers de migrants avant de les renvoyer vers des pays voisins. Au
Mozambique aussi, des rfugis et des migrants ont t victimes de violations
de leurs droits fondamentaux. Des homicides illgaux commis par des agents
de la force publique ont notamment t signals. Les rfugis et des migrants
en Afrique du Sud continuaient dtre la cible de violences et de destructions
de biens. En dcembre, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les
rfugis (HCR) a recommand que les pays daccueil prennent des mesures
pour mettre un terme au statut de rfugi accord jusque-l la plupart
des Rwandais prsents sur leur territoire. Les rfugis et les organisations
de dfense des droits humains se sont mus du fait que le HCR navait pas
vritablement expos le fondement de cette recommandation, ainsi que du
fait que sa mise en uvre par les tats risquait dexposer au risque de renvoi
forc vers le Rwanda un grand nombre de personnes ayant toujours besoin
dune protection.
Plusieurs dizaines de milliers de Sud-Soudanais ont dcid de quitter le
Soudan pour le Soudan du Sud, car ils risquaient de perdre leurs droits la
nationalit soudanaise aprs la dclaration dindpendance de la partie mri-
dionale du pays. En butte de nombreuses difcults, ils ont notamment t
harcels avant et pendant leur priple ; une fois arrivs au Soudan du Sud, ils
ont t confronts une situation humanitaire dramatique.
Les violences et les discriminations lgard des femmes demeuraient trs
rpandues dans de nombreux pays, notamment en raison de certaines tradi-
tions et normes culturelles. Dans certains tats, la lgislation en vigueur insti-tutionnalisait la discrimination envers les femmes. Celle-ci pesait galement
sur laccs des femmes aux services de sant.
Des femmes et des lles ont, cette anne encore, t victimes de viol ou
dautres svices sexuels dans plusieurs pays en conit ou dans des rgions
comptant un nombre lev de rfugis ou de personnes dplaces, notam-
ment lest du Tchad, la Cte dIvoire, lest de la RDC, la Rpublique centrafri-
caine et le Soudan (en particulier le Darfour). Ces violences taient souvent
le fait de membres des forces de scurit gouvernementales ; dans la plupart
des cas, aucune enqute ntait ouverte.
DiscriminationLa discrimination fonde sur lorientation sexuelle ou sur lidentit de genre,
relle ou suppose, sest aggrave. Non seulement les responsables poli-
tiques ne protgeaient pas le droit ne pas subir de discrimination, mais
souvent ils se servaient de dclarations et de mesures pour inciter la
discrimination et aux perscutions fondes sur une orientation sexuelle
suppose.
Au Cameroun, des personnes souponnes dentretenir une relation
homosexuelle ont t perscutes. Un grand nombre ont t arrtes et
certaines, dont Jean-Claude Roger Mbede, condamnes de lourdespeines demprisonnement. Le gouvernement camerounais a galement
La discriminationfonde sur lorientationsexuelle ou surlidentit de genre,relle ou suppose,sest aggrave.Les responsablespolitiques se servaientde dclarations et demesures pour inciter
la discrimination et auxperscutions fondessur une orientationsexuelle suppose.
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XXVIII Amnesty International - Rapport 2012
propos de modier le Code pnal en vue dalourdir les peines dempri -
sonnement et les amendes pour les personnes reconnues coupables de
relations homosexuelles. Au Malawi, en Mauritanie et au Zimbabwe gale-
ment, des hommes ont t arrts et poursuivis en raison de leur orientation
sexuelle suppose. Au Malawi, le gouvernement a adopt une loi rigeant
en infraction les relations sexuelles entre femmes et, lors dun rassemble-
ment politique, le prsident Bingu wa Mutharika a dclar que les gays
taient pires que des chiens . Au Nigeria, le Snat a adopt un projet deloi rigeant en infraction les relations entre personnes du mme sexe. Au
Ghana, le ministre charg de la Rgion occidentale a ordonn aux forces de
scurit darrter tous les gays et toutes les lesbiennes vivant dans louest
du pays.
En Ouganda, la proposition de loi relative la lutte contre lhomosexualit
na pas t examine par le Parlement, mais na pas non plus t retire.
David Kato, minent dfenseur des droits humains en gnral et des droits
des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles ou transgenres en
particulier, a t assassin son domicile en janvier. Un homme a t arrt et
condamn, en novembre, 30 ans de rclusion pour ce meurtre. En Afriquedu Sud, la socit civile a fait pression auprs des autorits pour quelles
sattaquent au problme des violences contre les lesbiennes, les gays et les
personnes bisexuelles ou transgenres en particulier contre les lesbiennes.
la suite de ces actions, les pouvoirs publics ont mis en place un groupe de
travail charg de la prvention des violences fondes sur lorientation sexuelle
suppose.
En rythre, les perccutions fondes sur des motifs religieux se sont pour-
suivies. Un trs grand nombre de personnes ont t arrtes arbitrairement
et auraient t maltraites en dtention.
Scurit et droits humainsLAfrique est, de plus en plus, expose des actes de terrorisme commis
par divers groupes arms islamistes, dont Al Qada au Maghreb islamique
(AQMI), actif dans plusieurs pays du Sahel ; le groupe religieux Boko
Haram, qui a multipli les attentats lexplosif au Nigeria tout au long de
lanne ; et le groupe arm Al Shabab, qui opre au Kenya et en Somalie.
Ces formations ont commis de nombreuses atteintes aux droits humains,
dont des attaques aveugles, des homicides illgaux, des enlvements et des
actes de torture.
En raction ces violences, certains gouvernements ont accru leurcoopration militaire, notamment au Sahel, et des pays voisins sont inter-
venus militairement. Le Nigeria a mis en place une Force dintervention
conjointe (JTF) pour lutter contre Boko Haram dans certains tats. Lorsque
les forces de scurit gouvernementales tentaient de contrer les groupes
arms, elles commettaient souvent elles-mmes des violations des droits
humains. En Mauritanie, 14 dtenus condamns pour des infractions
lies au terrorisme ont t victimes de disparition force au cours dun
transfert. Au Nigeria, les forces de scurit ont rpondu lescalade des
violences dans certains tats en procdant des centaines darrestations
et de dtentions arbitraires, des disparitions forces et des excutionsextrajudiciaires.
Toute la question est de
savoir si les dirigeantsdAfrique adhreront ces changements, ousils les considrerontcomme une menace leur maintien aupouvoir. voir la faondont ils ont ragi auxmanifestations et ladissidence, on peut
dire que la plupart desresponsables politiquesfaisaient partie en 2011non pas de la solution,mais bien du problme.
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AFRIqUE
Amnesty International - Rapport 2012 XXIX
Lheure du changementSans doute lAfrique sub-saharienne ne connatra-t-elle pas une amliora-
tion du respect et de la protection des droits fondamentaux aussi rapide et
spectaculaire que lAfrique du Nord. Par endroits, il se pourrait mme que la
situation empire. Cependant, certains facteurs une croissance conomique
durable, les pressions en faveur dune meilleure gouvernance, lmergence
dune classe moyenne, une socit civile plus puissante, un meilleur accs
aux technologies de linformation et de la communication vont peu peu
contribuer amliorer la situation des droits humains. Toute la question est
de savoir si les dirigeants dAfrique adhreront ces changements, ou sils
les considreront comme une menace leur maintien au pouvoir. voir la
faon dont ils ont ragi aux manifestations et la dissidence, on peut dire que
la plupart des responsables politiques faisaient partie en 2011 non pas de la
solution, mais bien du problme.
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Martina Correia xe la prison au moment prciso son frre, Troy Davis, est excut alors quede nombreux doutes planent sur sa culpabilit(Gorgie, tats-Unis, 21 septembre 2011). MartinaCorreia est elle-mme dcde deux mois plus tarddes suites dune longue maladie.
Le combat pour la justice ne sarrte pas avec moi.
Cette lutte vaut pour tous les Troy Davis qui mont
prcd et tous ceux qui viendront aprs moi.
Troy Davis, excut aprs avoir pass 20 ans dans le couloirde la mort
S
cottLangley
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Amnesty International - Rapport 2012 XXXI
RSUMSRgIONAUx
AMRIqUESAMRIqUES
[Cest] un affront la dmocratie [et] un affront ltat de droit.
Marcelo Freixo, dput de ltat de Rio de Janeiro (Brsil), voquant lassassinat de la juge
Patrcia Acioli. Il a lui-mme reu de nombreuses menaces de mort pour avoir men desinvestigations sur les bandes criminelles et dnonc leurs agissements.
Le 11 aot 2011, la juge Patrcia Acioli est morte devant son domicile,
Niteri, dans ltat de Rio de Janeiro, atteinte de 21 balles tires par des
agents de la police militaire brsilienne. Sa longue exprience en matire
pnale dans des affaires concernant des policiers impliqus dans des viola-
tions des droits humains lui avaient dj valu de nombreuses menaces de
mort. En octobre, 11 policiers, dont un commandant, ont t arrts et
inculps. Selon certaines informations, lorsquelle a t assassine Patrcia
Acioli dirigeait une enqute sur limplication prsume de ces policiers dansdes excutions extrajudiciaires et des activits criminelles. Sa mort a port un
coup dur au mouvement brsilien de dfense des droits humains, mais son
inlassable qute de justice reste un exemple pour toutes celles et tous ceux
qui, comme elle, refusent que les atteintes aux liberts fondamentales soient
passes sous silence.
En 2011, les revendications en matire de droits humains se sont fait
entendre travers toute la rgion, tant devant les tribunaux nationaux que
dans le systme interamricain de protection de ces droits et dans la rue. Les
appels la justice lancs par de simples citoyens, des dfenseurs des droits
humains, des organisations de la socit civile et des peuples indignes ontpris de lampleur, et plusieurs ont dbouch sur une confrontation directe
avec de puissants intrts conomiques et politiques. Ces conits taient
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XXXII Amnesty International - Rapport 2012
pour beaucoup provoqus par des politiques de dveloppement conomique
qui exposaient nombre dhabitants en particulier les plus dmunis et les
populations marginalises un risque accru de subir des violations et dtre
exploits.
Exiger la justice et la n de limpunitNombre daffaires de droits humains ne progressaient que lentement, frei-
nes par une justice difcilement accessible, par le manque dindpendancedu pouvoir judiciaire et par la volont de certains milieux de protger des
intrts politiques, conomiques et judiciaires et de recourir des mesures
extrmes pour ne pas avoir rendre des comptes. Dans certains pays comme
le Brsil, la Colombie, Cuba, le Guatemala, Hati, le Honduras et le Venezuela
il tait dautant plus difcile de faire respecter ces droits que leurs dfen-
seurs, les tmoins, les avocats, les procureurs et les juges taient frquem-
ment menacs, voire tus. Les journalistes qui tentaient de dnoncer les abus
de pouvoir, les atteintes aux droits fondamentaux et la corruption taient eux
aussi souvent pris pour cibles en Amrique latine et dans les Carabes.
Dans certains pays, toutefois, malgr les obstacles et de frquents revers,des avances non ngligeables ont t enregistres dans les enqutes et les
poursuites portant sur les violations des droits humains commises dans le
pass. Un certain nombre danciens dirigeants militaires de facto et dof-
ciers suprieurs de larme ont t reconnus coupables et condamns des
peines demprisonnement.
En Argentine, lancien gnral Reynaldo Bignone et lhomme politique et
ex-policier Luis Abelardo Patti ont t condamns en avril la rclusion
perptuit pour plusieurs meurtres, enlvements et actes de torture commis
dans la ville dEscobar pendant les annes 1970. En octobre, lex-capitaine
de la marine Alfredo Astiz et 15 autres militaires ont t condamns despeines demprisonnement allant de 18 ans la perptuit pour leur impli-
cation dans 86 crimes contre lhumanit commis dans les annes 1970.
Leurs victimes avaient t enleves puis dtenues dans le centre de dten-
tion secrte install au sein de lcole suprieure de mcanique de la Marine
(ESMA), Buenos Aires, o certaines sont mortes sous la torture ou aprs
avoir t jetes dun avion en plein vol. Parmi les personnes tues se trou-
vaient les deux religieuses franaises Lonie Duquet et Alice Domon, les mili-
tantes des droits humains Azucena Villaor, Mara Bianco et Esther Careaga,
co-fondatrices du mouvement des Mres de la place de Mai, et lcrivain et
journaliste Rodolfo Walsh.En Bolivie, la Cour suprme a dclar coupables sept anciens hauts
responsables, militaires et civils, pour leur implication dans les vnements
dits d octobre noir , qui ont fait 67 morts et plus de 400 blesss au cours
de manifestations survenues en 2003 El Alto, prs de La Paz. Il sagissait
du premier procs de responsables militaires accuss de violations des droits
humains se concluant devant un tribunal civil bolivien. Cinq anciens ofciers
de larme se sont vu iniger des peines allant de 10 15 ans de rclusion.
Deux anciens ministres ont t condamns trois annes demprisonne-
ment, assorties par la suite du sursis.
Au Brsil, la prsidente Dilma Rousseff a promulgu une loi portant cra-tion dune commission vrit charge denquter sur les violations des droits
Le capitaine de lamarine Alfredo Astizet 15 autres militairesont t condamns des peinesdemprisonnementallant de 18 ans la perptuit pourleur implication dans
86 crimes contrelhumanit commisdans les annes 1970.
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Amnesty International - Rapport 2012 XXXIII
RSUMSRgIONAUx
AMRIqUES
humains commises entre 1946 et 1988. Au Chili, le nombre de violations
faisant lobjet dune instruction judiciaire est parvenu un niveau jamais
atteint, avec louverture de 726 nouvelles affaires pnales et le dpt de
plus dun millier de plaintes, constitues au l des ans par les proches de
personnes excutes pour des motifs politiques sous le rgime militaire du
gnral Augusto Pinochet.
Aprs presque 25 ans dexil en France, Jean-Claude Duvalier, ancien
prsident dHati, a regagn le pays et a immdiatement fait lobjet duneenqute pnale pour de graves violations des droits humains, la suite de
plaintes dposes par des victimes et des proches de victimes. En Colombie,
le gnral la retraite Jess Armando Arias Cabrales a t condamn en avril
35 ans demprisonnement pour son implication dans la disparition force
de 11 personnes en novembre 1985 ; celles-ci avaient t enleves aprs
que larme eut pris dassaut le palais de justice o des lments du mouve-
ment de gurilla M-19 retenaient des otages. En septembre, Jorge Noguera,
ancien directeur du Dpartement administratif de scurit (DAS) colombien,
a t condamn 25 annes demprisonnement pour lassassinat en 2004
du professeur duniversit Alfredo Correa de Andreis et pour ses liens avecdes groupes paramilitaires.
Si importantes que soient ces affaires, elles constituaient des exceptions
et limpunit tait la norme. Ainsi, en Colombie, lancienne directrice du
DAS Mara del Pilar Hurtado continuait dchapper la justice alors quelle
tait implique dans un scandale li des coutes et des oprations de
surveillance illgales, ainsi qu des menaces contre des opposants de lex-
prsident colombien, Alvaro Uribe. Elle stait vu accorder lasile au Panama
en 2010.
Au Mexique, les actions en justice intentes contre les auteurs de graves
violations des droits humains commises dans les annes 1960, 1970 et 1980taient au point mort. La Cour suprme a toutefois conclu que les arrts de
la Cour interamricaine des droits de lhomme sur le Mexique taient contrai-
gnants, notamment lobligation de transfrer la justice civile les affaires de
militaires impliqus dans des violations des droits humains.
Dans le domaine de la justice internationale les avances ont t ingales.
Ainsi, en octobre, les autorits canadiennes nont pas arrt lancien prsident
des tats-Unis George W. Bush, en dplacement en Colombie-Britannique,
en dpit dlments probants attestant sa responsabilit dans des crimes de
droit international, notamment des actes de torture. En revanche, la France
a extrad en dcembre lancien chef dtat de facto du Panama, ManuelNoriega, vers son pays, o il avait t reconnu coupable par contumace du
meurtre dopposants politiques, entre autres crimes.
Le systme interamricain de protection des droitsfondamentauxAu cours de lanne, le systme interamricain, en particulier la Commission
interamricaine des droits de lhomme, a t la cible dattaques virulentes
de la part de plusieurs tats. Les autorits brsiliennes ont ainsi rappel leur
ambassadeur auprs de lOEA, en raction aux mesures ordonnes par la
Commission sur le projet damnagement hydrolectrique de Belo Monte.La Commission avait demand la suspension du projet tant que les commu-
nauts indignes concernes nauraient pas t dment consultes. Plus
Au Brsil, les agentsde la force publiqueavaient toujoursrecours despratiques marquespar la discrimination,les atteintes auxdroits humains et lacorruption ; certaines
de leurs oprationstaient de vritablesinterventions militaires.
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XXXIV Amnesty International - Rapport 2012
inquitant encore, le secrtaire gnral de lOEA, Jos Miguel Insulza, a
ouvertement soutenu la position brsilienne et publiquement demand
la Commission de rexaminer sa dcision dans laffaire Belo Monte. La
Commission a, par la suite, modi les mesures conservatoires ordonnes
dans cette affaire, nexigeant plus du Brsil que le projet soit suspendu dans
lattente de la consultation des populations concernes.
Lquateur, le Prou et le Venezuela ont galement critiqu la Commission
interamricaine des droits de lhomme, lui reprochant doutrepasser sonmandat et de porter atteinte leurs droits souverains. Les critiques formu-
les par lquateur et le Venezuela concernaient essentiellement le Bureau
du rapporteur spcial pour la libert dexpression. Quant au Prou, il repro-
chait vivement la Commission sa dcision ordonnant le renvoi devant la
Cour interamricaine des droits de lhomme dune affaire relative des
excutions extrajudiciaires qui auraient t perptres en 1997, au moment
de la libration de 71 otages (dans le cadre de lopration appele Chavn
de Huntar).
Au cours du second semestre de 2011, les tats membres de lOEA ont
continu de dbattre dventuelles rformes du systme interamricain deprotection des droits fondamentaux. lissue de ces discussions, un rapport
a t remis au Conseil permanent de lOEA, qui devait lexaminer dbut
2012. Bien que les recommandations nonces dans ce document aient
t prsentes comme ayant pour objectif de renforcer le systme, certaines
des mesures proposes risquaient en ralit de compromettre son indpen-
dance et son efcacit et davoir dimportantes rpercussions sur laction de
la Commission et de ses rapporteurs.
Scurit publique et droits humainsLes tats ont, cette anne encore, tir prot de proccupations lgitimes ausujet de la scurit publique et du taux lev de criminalit pour justier ou
feindre dignorer les violations des droits humains perptres par leurs forces
de scurit lorsquelles combattaient les activits criminelles ou les groupes
arms.
Tandis quil poursuivait sa campagne contre les cartels de la drogue, le
gouvernement mexicain a ferm les yeux sur les nombreuses informations
faisant tat de torture, de disparitions forces, dhomicides illgaux et de
recours excessif la force imputables larme de terre et, de plus en plus,
la marine. Plus de 12 000 personnes ont t tues dans des violences attri-
bues aux organisations criminelles et 50 000 soldats de larme de terre etde la marine taient toujours dploys par le chef de ltat, Felipe Caldern,
pour assurer le maintien de lordre. Certains lments attestaient de la
collusion entre agents de police ou des forces de scurit et associations
criminelles, notamment travers lenlvement et lassassinat de membres
prsums dautres organisations criminelles. Le gouvernement maintenait
que ces violations taient exceptionnelles et que leurs auteurs taient amens
rendre des comptes mais, au cours de lanne, une seule affaire a entran
la comparution en justice de militaires.
Dans une moindre mesure, larme a t utilise pour assurer le maintien de
lordre dans un certain nombre dautres pays de la rgion, dont le Guatemala,le Honduras, la Rpublique dominicaine, le Salvador et le Venezuela, o le
Il y avait lieu de penserque, dans un certainnombre de cas, lapolice dominicaineavait recouru despratiques dlibrmentmeurtrires au lieu dechercher arrter dessuspects non arms.
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Amnesty International - Rapport 2012 XXXV
RSUMSRgIONAUx
AMRIqUES
prsident Hugo Chvez a ordonn le dploiement dans les rues de soldats
de la Garde nationale pour lutter contre la multiplication des crimes violents.
Confronts un niveau trs lev de criminalit violente dans le pays,
les agents de la force publique brsilienne avaient toujours recours des
pratiques marques par la discrimination, les atteintes aux droits fondamen-
taux et la corruption. Certaines de leurs oprations taient de vritables inter-
ventions militaires. Si quelques projets en matire de scurit publique ont
favoris, dans une certaine mesure, une baisse des niveaux de violence, lesrformes promises dans ce domaine par les autorits fdrales ont t mises
mal par dimportantes coupes budgtaires et le manque de dtermina-
tion politique. Cette anne encore, des quartiers dfavoriss ont t pris en
tau entre les violences des gangs et des mthodes policires abusives, les
habitants tant souvent traits comme des dlinquants. Rio de Janeiro, le
pouvoir des milices sest encore accru. Ces bandes criminelles, composes
dagents ou dex-agents des forces de lordre, ont renforc leur mainmise sur
un grand nombre des communauts les plus pauvres de la ville, recourant
aux violences et lextorsion de fonds et sappuyant sur des activits nan-
cires illicites et sur la mise en place dappuis politiques. Lassassinat de lajuge Patrcia Acioli a mis en lumire linuence et lassurance de ces gangs.
Adoptant une approche radicale dans sa lutte contre la criminalit, la police
dominicaine sest rendue coupable de dtentions arbitraires, de torture et
dautres traitements cruels, inhumains ou dgradants, dhomicides illgaux
et de disparitions, entre autres graves violations des droits humains. Il y avait
lieu de penser que, dans un certain nombre de cas, elle avait recouru des
pratiques dlibrment meurtrires au lieu de chercher arrter les suspects
qui, pour beaucoup, ntaient pas arms.
Conit armLe conit arm qui dchire de longue date la Colombie inigeait toujours
dindicibles souffrances aux populations civiles de lensemble du pays. Les
affrontements avaient des consquences en matire de droits humains parti-
culirement graves pour les habitants des zones rurales, en particulier les
communauts indignes, afro-colombiennes et paysannes. Plusieurs milliers
dentre eux ont t contraints de fuir leur foyer. Des mouvements de gurilla
et des paramilitaires se sont rendus coupables de graves exactions, dont des
violations du droit international humanitaire, dans certains cas avec la collu-
sion des forces de scurit.
Certaines des mesures lgislatives adoptes par les autorits ont marqudes tapes importantes. La loi sur les victimes et la restitution de terres recon-
naissait notamment les droits rparation de certaines victimes et prvoyait
la restitution dune partie des millions dhectares de terres drobes au cours
du conit. Ce texte excluait toutefois de nombreuses victimes ; une vague
dhomicides et de menaces visant les dfenseurs des droits humains, en
particulier ceux qui uvraient en faveur de la restitution des terres, susci-
tait des doutes quant la capacit des autorits restituer les terres leurs
propritaires lgitimes, comme elles sy taient engages.
La dtermination du gouvernement colombien protger les droits humains
et lutter contre limpunit a t remise en question par les mesures visant largir la comptence des juridictions militaires, susceptibles de permettre
Le conit arm quidchire de longue datela Colombie inigeaittoujours dindiciblessouffrances auxpopulations civiles delensemble du pays.
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XXXVI Amnesty International - Rapport 2012
aux membres des forces de scurit souponns de violations des droits
humains dchapper la justice. Le prsident Juan Manuel Santos et le
chef dtat-major des forces armes ont, par ailleurs, critiqu la condamna-
tion pour violations des droits humains de plusieurs hauts responsables de
larme.
Lutte contre le terrorisme et scurit la n de lanne, prs de deux ans aprs lexpiration du dlai x par leprsident des tats-Unis Barack Obama pour la fermeture du centre de
dtention de Guantnamo, plus de 150 hommes y taient toujours dtenus.
Lespoir que le gouvernement amricain respecte sa propre dclaration
de 2009, selon laquelle cinq de ces hommes, accuss de participation aux
attentats du 11 septembre 2001, comparatraient devant une juridiction fd-
rale ordinaire, a t ananti lorsque le ministre de la Justice a annonc en
avril quils seraient jugs par une commission militaire. Les autorits nont pas
cach leur intention de requrir la peine de mort contre les cinq prisonniers.
Dans une autre affaire juge par une commission militaire, le Saoudien Abd al
Rahim al Nashiri a t renvoy devant la justice en septembre. Il risque dtrecondamn mort sil est dclar coupable.
Les responsables prsums des violations des droits humains perptres
dans le cadre du programme de dtentions secrtes de la CIA, mis en place
par le gouvernement prcdent, jouissaient toujours dune parfaite impunit.
En juin, le ministre de la Justice a annonc que, hormis dans deux cas de
morts en dtention, il ne garantissait pas de nouvelles investigations sur ces
dtentions, alors que la torture et la disparition force faisaient partie int-
grante du programme secret et quau nombre des victimes guraient des
dtenus faisant actuellement lobjet dun procs inique devant une commis-
sion militaire et risquant dtre excuts, sils taient dclars coupables.
Peuples indignesMalgr quelques volutions encourageantes, les violations des droits des
peuples indignes constituaient toujours un motif de proccupation majeur.
Bien souvent, les peuples indignes ont t privs de leur droit dtre
consults en bonne et due forme et de donner un consentement libre, pra-
lable et clair au sujet de vastes projets de dveloppement les concernant,
y compris dans le secteur des industries extractives. Le Prou a adopt cette
anne une loi historique, qui a rendu obligatoire la consultation des popula-
tions autochtones avant la mise en place de tout projet de dveloppement surdes terres ancestrales. De telles dispositions demeuraient toutefois exception-
nelles. Bien que tous les tats de la rgion aient approuv la Dclaration sur
les droits des peuples autochtones [ONU, 2007], les droits noncs dans ce
texte taient encore loin dtre respects.
Le non-respect des droits des peuples indignes avait des rpercussions
ngatives non seulement sur leurs moyens de subsistance, mais aussi sur
ces communauts elles-mmes, qui taient menaces, harceles, expul-
ses ou dplaces de force, attaques ou tues, mesure que lexploita-
tion des ressources sintensiait dans les rgions o elles vivaient. Au
Brsil, en Colombie, au Guatemala et au Mexique, des indignes ont tchasss de leurs terres, souvent par la violence. En Bolivie et au Prou, les
Prs de deux ansaprs lexpirationdu dlai x par leprsident des tats-Unis Barack Obamapour la fermeture ducentre de dtention deGuantnamo, plus de150 hommes y taienttoujours dtenus.
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Amnesty International - Rapport 2012 XXXVII
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AMRIqUES
informations recueillies ont fait tat dun recours excessif la force len-
contre de personnes qui manifestaient en faveur des droits de ces habitants
et dnonaient des projets damnagement. Les motifs fallacieux invoqus
pour poursuivre des dirigeants indignes taient un motif de proccupation
en quateur et au Mexique.
Comme les annes prcdentes, il y avait lieu de penser que les tats ne
prenaient pas au srieux les droits des peuples indignes ou nafchaient pas
la volont politique ncessaire pour mettre n la discrimination qui svissaitdepuis de nombreuses dcennies. En avril, la Commission interamricaine
des droits de lhomme a exhort le Brsil suspendre la construction du
barrage de Belo Monte tant que les communauts indignes nauraient pas
t pleinement et dment consultes et en particulier tant quelles nau-
raient pas eu accs dans les langues appropries une valuation exhaus-
tive des consquences sociales et environnementales du projet , et que des
mesures nauraient pas t mises en uvre pour protger les communauts
volontairement isoles. Le Brsil sest farouchement oppos ces mesures
conservatoires, que la Commission a par la suite allges.
En Bolivie, aprs plusieurs semaines de manifestations au cours desquellesde trs nombreuses personnes ont t blesses, les forces de scurit ayant
utilis du gaz lacrymogne et des matraques pour disperser les occupants
dun campement de fortune, le prsident Morales a dcid dannuler le
projet damnagement dune route traversant le Territoire indigne et parc
national Isiboro-Scure (TIPNIS). Les manifestants indignes considraient
que ce projet avait t plani en violation des garanties constitutionnelles
relatives la consultation pralable et des lois en matire de prservation de
lenvironnement.
Au Canada, daprs un audit fdral rendu public en aot, 39 % des
systmes dapprovisionnement en eau des Premires nations comportaientde graves dfaillances, et 73 % des rseaux deau potable et 65 % des circuits
dvacuation des eaux uses prsentaient un risque moyen ou lev pour la
sant.
Droits des femmes et des llesLes tats de la rgion nont pas donn la priorit sur le plan politique la
protection des femmes et des lles contre le viol, les menaces et les homi-
cides. La mise en uvre des lois visant combattre les violences lies au
genre constituait toujours un sujet de proccupation majeur. De plus, devant
le manque de ressources disponibles pour ouvrir des enqutes et engagerdes poursuites en lien avec ces crimes, on sinterrogeait sur lexistence dune
volont vritable, de la part des pouvoirs publics, de sattaquer au problme.
Dans de nombreux pays, le manque de dtermination traduire en justice
les responsables de ces crimes contribuait perptuer limpunit pour les
auteurs de violences lies au genre et favorisait un climat de tolrance envers
les violences faites aux femmes et aux lles.
Les violations des droits sexuels et reproductifs des femmes et des lles
demeuraient monnaie courante et avaient des consquences effroyables
sur leur vie et leur sant. Le Chili, le Nicaragua et le Salvador interdisaient
toujours toute forme davortement, y compris pour les jeunes lles et lesfemmes enceintes la suite dun viol ou dont la poursuite de la grossesse
Au Brsil, en Colombie,au Guatemala et auMexique, des indignesont t chasss deleurs terres, souventpar la violence.
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XXXVIII Amnesty International - Rapport 2012
mettait la vie en pril. Quiconque pratiquait ou sollicitait une interruption de
grossesse sexposait une lourde peine demprisonnement.
Dans dautres pays, laccs des services davortement srs tait garanti
par la loi mais refus dans la pratique, des procdures judiciaires intermi-
nables le rendant quasiment impossible en particulier pour les femmes
nayant pas les moyens de recourir des structures prives. Laccs la
contraception et linformation sur les questions lies la sexualit et la
procration demeurait un motif de proccupation, en particulier pour lesfemmes et les lles les plus marginalises de la rgion.
Migrants : des victimes visibles, des droits invisiblesDans un certain nombre de pays, plusieurs centaines de milliers de migrants,
en situation rgulire et irrgulire, nont pas t protgs par la loi.
Au Mexique, plusieurs centaines de corps ont t dcouverts dans des
fosses communes. Certains ont t identis comme les cadavres de migrants
victimes denlvement. Les familles de migrants dAmrique centrale disparus
ont organis des manifestations travers le pays pour que leurs proches
soient localiss et pour attirer lattention sur le sort subi par de nombreuxmigrants. Ceux-ci taient plusieurs dizaines de milliers, originaires dAm-
rique centrale, traverser chaque anne le Mexique. Certains taient enlevs,
torturs, viols, voire tus par des bandes criminelles, qui opraient souvent
avec la complicit de reprsentants de ltat. Par crainte de reprsailles ou de
mesures dexpulsion, les migrants sans papiers taient rarement mme de
dnoncer les graves violations dont ils taient victimes.
Au Mexique, les dfenseurs des droits des migrants, en particulier ceux qui
uvraient au sein du rseau de centres daccueil assurant une aide huma-
nitaire ces personnes, ont t pris pour cible comme jamais auparavant.
Dans le sud-ouest des tats-Unis, le long de la frontire mexicaine, desmigrants en situation rgulire et irrgulire ont t victimes de discrimi-
nation et de prolage aux mains dagents de la force publique, lchelle
locale, fdrale et des tats. En butte des pratiques discriminatoires
lorsquils tentaient de se tourner vers la justice et de demander une protec-
tion, ils se heurtaient aussi des obstacles les empchant daccder
lducation et aux soins mdicaux. Ils faisaient, par exemple, lobjet de
politiques visant surveiller plus troitement les migrants par rapport
au reste de la population, ou risquaient dtre dnoncs aux services de
limmigration. la suite de nouvelles propositions de lois contre limmi-
gration, certains lves ont abandonn leur scolarit par crainte que leursparents ne soient arrts. Des textes lgislatifs contre limmigration adopts
par la Caroline du Sud, la Gorgie, lUtah et lIndiana ont t contests
devant la justice fdrale.
En Rpublique dominicaine, des migrants hatiens en situation rgulire
et irrgulire ont t victimes de violations de leurs droits humains, dont
des expulsions massives, illgales et violentes, au cours desquelles des
Dominicains dorigine hatienne ont, comme les annes prcdentes, t
privs de leur droit la nationalit dominicaine. Au cours des oprations
dexpulsion, certains migrants auraient t battus et des enfants auraient
t spars de leurs parents. Plusieurs pays, dont les Bahamas, nont pastenu compte des appels lancs par lONU pour que cessent, pour des motifs
Les familles demigrants disparusont organis desmanifestations travers le pays pourque leurs prochessoient localiss.
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Amnesty International - Rapport 2012 XXXIX
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AMRIqUES
humanitaires, les expulsions vers Hati compte tenu de la crise que traverse
le pays depuis le sisme de 2010 et lpidmie de cholra.
Peine de mortQuarante-trois hommes ont t excuts aux tats-Unis au cours de lanne,
tous par injection ltale. Ce chiffre portait 1 277 le nombre total de prison-
niers excuts depuis que la Cour suprme amricaine a lev le moratoire
sur la peine de mort en 1976. Deux points positifs sont cependant noter: lIllinois est devenu en mars le 16e tat abolitionniste des tats-Unis et, en
novembre, le gouverneur de lOregon a impos un moratoire sur les excu-
tions et prconis une rexion sur la peine de mort.
Au nombre des personnes excutes en 2011 gurait Troy Davis. Il a t
mis mort en Gorgie en septembre, alors que de srieux doutes planaient
toujours sur la abilit de sa condamnation. Martina Correia, sa sur, qui a
milit courageusement et sans relche contre la peine capitale jusqu son
dcs en dcembre 2011, demeure une source dinspiration pour tous ceux
qui dfendent haut et fort la dignit humaine et la justice dans lensemble de
la rgion et dans le reste du monde.Elle a dclar : La peine de mort est une abomination, une ngation de
la dignit humaine. Elle nest pas seulement fonde sur la couleur et la race,
mais sur la capacit affronter le systme. Jessaye dtre une voix pour
les sans-voix. Je ne me considre pas comme quelquun de spcial, je suis
simplement persuade que ma communaut ne se limite pas mes voisins
de quartier elle englobe le monde entier. Lorsque quelquun est excut en
Chine, en Ouganda, au Nigeria, en Gorgie ou au Texas, cest un peu chacun
de nous qui meurt.
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A
mnestyInternational
Su Su Nway, militante des droits dutravail, son arrive laroport deYangon (Myanmar) le 16 octobre 2011.Elle avait t condamne 12 ans etsix mois de rclusion mais a t libre la faveur dune amnistie accorde le12 octobre 2011 par le gouvernement environ 240 prisonniers politiques.
R
EUTERS/SoeZeyaTun
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Amnesty International - Rapport 2012 XLI
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ASIE-PACIFIqUEASIE-PACIFIqUE
Il est temps, peuple de Chine ! Il est temps.La Chine appartient tous.
Il est temps de choisir vous-mme ce que deviendra la Chine. Zhu Yufu, dissident chinois
Sentant le vent du changement politique soufer depuis le Moyen-Orient
et lAfrique du Nord, plusieurs gouvernements de la rgion Asie-Pacique
ont ragi en accentuant, dans leurs efforts pour se maintenir au pouvoir, la
rpression des revendications relatives aux droits humains et la dignit.
Paralllement, le succs des soulvements en Tunisie et en gypte a incit
les dfenseurs des droits humains, les militants et les journalistes en Asie faire entendre eux aussi leur voix, en utilisant la fois les nouvelles
technologies et des mthodes militantes plus classiques pour dnoncer
les violations de leurs droits.
Zhu Yufu, lauteur du pome cit plus haut, a t arrt en mars par
les autorits chinoises. Le procureur a cit ce pome comme principal
lment charge pour tayer linculpation d incitation la subversion
du pouvoir de ltat . Cet homme, qui avait dj pass prs de neuf ans
en prison au cours des 13 dernires annes pour avoir rclam une plus
grande libert politique, tait au nombre des dizaines de dtracteurs,
militants et dissidents qui ont t arrts et harcels partir de fvrierpar les autorits chinoises, dans le cadre de lune des pires campagnes
de rpression politique qui ait t mene depuis les manifestations de
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XLII Amnesty International - Rapport 2012
Le succs dessoulvements en
Tunisie et en gypte aincit les dfenseursdes droits humains,les militants et lesjournalistes en Asie faire entendre eux aussileur voix, en utilisant la fois les nouvellestechnologies et desmthodes militantes
plus classiques pourdnoncer les violationsde leurs droits.
la place Tiananmen en 1989. Outre Zhu Yufu, sur la longue liste des
personnes arrtes, assignes domicile de manire illgale ou victimes
de disparition force guraient Liu Xia, lpouse de Liu Xiaobo, laurat
du prix Nobel de la paix, ainsi que Gao Zhisheng, juriste, et Ai Weiwei,
artiste de renomme mondiale. Dans plusieurs cas, les autorits chinoises
ont tortur des prisonniers pour leur arracher des aveux et leur faire
promettre de ne pas parler des mauvais traitements quils avaient subis
sur les rseaux sociaux ni des journalistes ou toute autre personne.La duret de la rpression a montr quel point le gouvernement
chinois tait proccup par les messages anonymes lancs sur Internet
partir de fvrier en faveur dune rvolution de jasmin . Ces messages
appelaient les citoyens chinois qui en avaient assez de la corruption, de
la mauvaise gouvernance et de la rpression politique se rassembler
paciquement et simplement dambuler dans un certain nombre de
lieux publics dsigns, dans plusieurs villes. Aussi inoffensifs quaient t
ces appels, le gouvernement chinois a ragi en interdisant plusieurs fois
au cours de lanne les recherches des mots jasmin et gypte sur
Internet. Des dizaines de milliers de manifestations ont toutefois eu lieudans tout le pays, les protestataires rclamant une meilleure protection
de leurs droits fondamentaux civils, politiques, conomiques, sociaux
et culturels.
Les revendications dynamiques des citoyens chinois en faveur de leurs
droits ont contrast avec la situation dans la Rpublique populaire dmo-
cratique de Core (Core du Nord) voisine. Rien nindiquait une amlio-
ration de la situation catastrophique des droits humains dans le pays
aprs laccession au pouvoir, le 17 dcembre, de Kim Jong-un, g d
peine 30 ans, qui a succd son pre comme matre absolu du pays.
Il semblait plutt que les autorits aient arrt des agents de ltat soup-onns dtre susceptibles de contester ou de remettre en cause une
transition en douceur. Il est craindre que ces dtenus ne soient alls
rejoindre les centaines de milliers de personnes soumises la dtention
arbitraire, au travail forc, une excution publique et la torture ou
dautres mauvais traitements dans les nombreux camps de prisonniers
politiques du pays.
Rpression de la dissidence
Peu de gouvernements de la rgion ont touff la voix de leur propre
peuple avec autant de brutalit que le rgime nord-coren, mais les viola-tions du droit dexprimer et de recevoir librement des opinions se sont
poursuivies dans toute la rgion. Plusieurs gouvernements ont dlibr-
ment cras toute opinion dissidente. En Core du Nord, les personnes
qui scartaient de lidologie ofcielle risquaient de passer le restant
de leur vie dans un camp de prisonniers politiques sinistre et isol. Le
Vit-Nam et le Myanmar ont rig en infraction pnale la libre expression
dopinions dissidentes et disposent de services de renseignement spci-
quement chargs dintimider les dtracteurs du gouvernement et de les
rduire au silence.
Dautres pays ont galement musel les dissidents, en recourant toute-fois des moyens moins ouvertement violents. Singapour, qui ntait
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Amnesty International - Rapport 2012 XLIII
RSUMSRgIONAUx
ASIE-PACIFIqUE
toujours pas dispos respecter les normes internationales relatives
la protection de la libert dexpression, a plac en dtention pour une
courte priode Alan Shandrake, crivain britannique de 76 ans, inculp
doutrage lautorit de la justice pour avoir critiqu lusage de la peine de
mort par le pouvoir judiciaire.
En Inde, pays er de son pass de libert de parole et du dynamisme de
ses mdias, le gouvernement a tent dimposer de nouvelles restrictions
aux rseaux sociaux, notamment aux services de messagerie instantane.Les mdias sur Internet ont galement continu de faire lobjet de pres-
sions en Malaisie, o ils taient toutefois moins entravs que la presse, la
radio et la tlvision, soumises une censure stricte.
En Thalande, le gouvernement nouvellement lu de Yingluck Shinawatra
sur de lancien Premier ministre Thaksin Shinawatra na pas mis n
lapplication trs svre de la loi particulirement problmatique sur le
crime de lse-majest, qui prohibe toute critique de la famille royale. Bon
nombre des personnes qui ont t prises pour cible avaient mis en ligne
des crits jugs rprhensibles par le parquet ; Ampon Tangnoppakul, un
grand-pre de 61 ans, a quant lui t condamn 20 ans demprison-nement pour avoir envoy des SMS considrs comme insultants.
Les autorits de la Rpublique de Core (Core du Sud) ont utilis de
plus en plus souvent la Loi relative la scurit nationale pour harceler les
opposants prsums la politique mene par le gouvernement lgard
de la Core du Nord. Cela sest parfois traduit par une application absurde
de la loi, par exemple dans le cas de Park Jeonggeun, qui a t plac en
dtention et a fait lobjet de poursuites pour avoir mis en ligne des versions
parodiques de la propagande nord-corenne.
Des personnes qui critiquaient les autorits et rclamaient le respect
des droits humains et de la dignit dans la rgion se sont heurtes unerpression encore plus dure et, dans certains cas, ont pay de leur vie
le fait davoir lev la voix. Les journalistes pakistanais sont parvenus
prserver un environnement mdiatique anim et parfois critique en dpit
de la raction violente du gouvernement, ainsi que de partis politiques et
de groupes insurgs, comme les talibans pakistanais. Neuf journalistes au
moins ont t tus au cours de lanne, dont Saleem Shahzad, un cyber-
journaliste qui avait critiqu ouvertement larme et les services de rensei-
gnement tout-puissants. Dautres journalistes ont dclar Amnesty
International quils avaient subi de graves menaces de la part des puis-
sants et mystrieux services de renseignement, ainsi que des forces descurit, de partis politiques ou de groupes extrmistes.
Les journalistes nont pas t les seuls tre attaqus cause de leurs
opinions au Pakistan. Deux hommes politiques de premier plan ont t
assassins pour avoir dnonc lutilisation des lois trs problmatiques
sur le blasphme : Salman Taseer, gouverneur du Pendjab connu pour
son franc-parler, et Shahbaz Bhatti, ministre des Minorits (et seul chr-
tien du gouvernement).
Minorits
linstar de nombreux autres pays de la rgion Asie-Pacique, lePakistan a t marqu par une discrimination persistante et grave envers
En Core du Nord,les personnes quiscartaient delidologie ofciellerisquaient de passerle restant de leurvie dans un camp deprisonniers politiquessinistre et isol.
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XLIV Amnesty International - Rapport 2012
les minorits religieuses et ethniques. Les membres des minorits ont
souvent t marginaliss et, dans bien des cas, ils ont t victimes dun
harclement exerc directement par le gouvernement. Souvent, les
gouvernements nont pas respect leur obligation de protger les droits
des membres des minorits. Cette discrimination bien ancre a aggrav la
pauvret, ralenti le dveloppement et attis la violence dans de nombreux
pays.
Dans la province pakistanaise du Baloutchistan, riche en ressourcesnaturelles, les forces de scurit, ainsi que certains groupes insurgs,
ont t impliqus dans des atteintes aux droits humains, notamment
des disparitions forces, des actes de torture et des excutions extra-
judiciaires. Le gouvernement na pas tenu toutes ses promesses de
rpondre aux revendications exprimes de longue date par la commu-
naut baloutche propos de la distribution des revenus issus des prin-
cipaux projets de lindustrie extractive et dinfrastructure. La province a
galement t le thtre de plusieurs attaques violentes visant la commu-
naut chiite, et tout particulirement les Hazaras chiites vivant Quetta,
capitale du Baloutchistan, dont un certain nombre sont dorigine afghane.Des groupes religieux extrmistes ont appel ouvertement la violence
contre les chiites et nont pas t empchs de mener leurs activits ni
de perptrer des violences, par exemple lexcution de 26 plerins chiites
le 20 septembre. Des groupes extrmistes pakistanais ont revendiqu
des attaques contre les chiites perptres jusquen Afghanistan, o deux
attentats-suicides simultans ont tu quelque 70 chiites qui participaient
aux processions religieuses de lAchoura Kaboul et Mazar-e-Charif.
La communaut ahmadiyya, groupe religieux essentiellement bas
en Asie et qui se dnit comme musulman, a t lobjet de discrimi-
nation systmatique au Pakistan et en Indonsie. Au Pakistan, o la loiinterdit aux ahmadis de se dire musulmans, la communaut a subi un
harclement constant de la part de responsables gouvernementaux et,
faute de protection et de soutien sufsants, a t prise pour cible par
des groupes extrmistes religieux. En Indonsie, la police a t critique
pour navoir pas empch une foule de 1 500 personnes dattaquer des
ahmadis en fvrier dans le sous-district de Cikeusik ; trois personnes
ont t tues et beaucoup dautres blesses. Le gouvernement central a
permis que des rglements locaux restreignant les activits des ahmadis
restent en vigueur. Les ahmadis ont galement t victimes de discri-
mination cause de leurs croyances religieuses dans dautres pays majorit musulmane de la rgion Asie-Pacique, tels que le Bangladesh
et la Malaisie. Leurs enfants ont notamment t empchs de frquenter
certaines col