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Intégration des musulmans au Royaume-Uni p.7 Spotlight : coke, prêtres, pédophilie, au cinéma p.6 Croisade contre la laïcité p.3 www.10dumat.iscpalyon.com Actualité, analyse et dérision, tout sur les religions à Lyon PROMOTION 2015 / 2016 - ISCPA - J3 - VENDREDI 22 JANVIER 2016 N° 5 Le halal religieusement marketing @le10duMat

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Le numéro 5 du 10dumat, le quotidien des étudiants en spcécialisation presse écrite de l'ISCPA Lyon.

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Page 1: 10 du mat n5 22-01-2016

Intégration des musulmans au Royaume-Uni p.7

Spotlight : coke, prêtres,pédophilie, au cinéma p.6

Croisade contre la laïcité p.3

www.10dumat.iscpalyon.com

Actualité, analyse et dérision, tout sur les religions à LyonPR

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N°5

Le halal

religieusement marketing

@le10duMat

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EDITODavid Hernandezrédacteur en chef

Depuis la loi de 1905, les Églises et l’Etat se retrouvent séparés, s’interdisant d’inter-venir chez l’autre. Au cours de ce XXème

siècle, la laïcité ne concernait finalement que les ins-titutions publiques afin de permettre aux citoyens de garder une certaine liberté. L’Etat se devait de res-ter neutre. C’est alors que les principes de neutra-lité et de laïcité se mélangent. Ainsi, au cours de ce siècle, en France, un enseignant, un agent d’accueil dans une préfecture, ou bien encore un policier ne peuvent porter de signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions. Mais depuis une dizaine d’années, une autre vision de la laïcité se dessine, y compris dans le champ juridique qui nous intéresse : celle-ci tend à imposer l’obligation de neutralité aux per-sonnes privées. Une neutralité propre à la France vu qu’au Royaume-Uni, par exemple, un agent peut demander l’autorisation de porter un turban en guise de symbole religieux. La France serait donc rentrée dans une « laïcité de contrôle » depuis 2004 et l’interdiction des signes religieux dans les écoles ? En 2015, la plupart des politiques pointent du doigt l’attaque de Daesh contre la liberté d’expression, la laïcité. Pourtant, Manuel Valls ne trouve qu’une chose à faire cette semaine, critiquer un texte contre le terrorisme signé par le président de l’Observa-toire de la laïcité – Jean-Louis Bianco, ancien mi-nistre de gauche - et 90 personnalités d’horizons différents. La France est en train de se tromper de combat avec des guéguerres politico-politicienne, à l’heure où le nombre des actes antimusulmans et antisémites recensés ne font qu’augmenter. Un comble pour un pays qui se dit laïc… Le rédaction, de part sa ligne éditoriale, ne pouvait pas passer à côté de ce sujet qu’est la laïcité.

Le monde des religionsVatican :

fin de l’esclavageLa communication du Saint-Siège a annoncé ne plus vouloir avoir affaire à des distributeurs dont les produits sont issus du travail forcé.

Dans le but de redonner de la « crédibilité » au Vatican, le préfet du Secrétariat pour l’économie du Saint-Siège a annoncé que l’État de 44 hectares ne cautionnerait plus le travail forcé. Le cardinal australien a ainsi fait part à la presse sa volonté d’ « ap-

pliquer les meilleures pratiques de management au monde dans les affaires économiques et financières ». Bien que l’on ignore encore les dispositions qui seront mises en place pour en-rayer ce phénomène, cette décision intervient sous l’égide du pape François Ier qui, depuis le début de son pontificat, tente de sensibiliser l’opinion publique au drame de l’esclavage. Le Vatican traitait en effet avec vdes fournisseurs dont les produits étaient issus de l’escla-vage. Des magasins d’alimentation, de luxe et technologique installés près de la résidence papale de Sainte Marthe. Ces derniers devront désormais prouver qu’ils n’ont plus recours au travail forcé pour espérer pouvoir encore faire affaire avec l’Église.

1400 ans puis…

plus rien

Nommé Dair Mar Elia ou Saint-Elie, le plus vieux monastère chrétien d’Irak bâti il y a 1400 ans, a été

détruit par les membres de l’État isla-mique au bulldozer et à l’explosif. Selon l’Associated Press qui a révélé les images satellites du site, sa destruction remon-terait à l’été 2014, entre le 27 août et le 28 septembre. Situé au sud de Mossoul, le monastère avait été construit entre 582 et 590. Le monastère de Saint-Elie vient s’ajouter à la longue liste de monuments appartenant au patrimoine mondial détruits par Daesh

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Lever de voile

Dans les quartiers nord de Marseille, dix-huit comédiennes amatrices âgées de 35 à 73 ans ont pris part

à un projet mené par la metteuse en scène de la compagnie La Criatura et financé par la fondation Abbé Pierre. Leur spectacle « Nous sommes toutes des reines » est joué au théâtre du Merlan depuis le début de l’année. Dans la troupe certaines femmes ont fait le pari de monter sur les planches, habillées de leurs costumes tout en étant voilées. C’est le cas d’Amina qui sur son voile pose un chapeau jaune éclatant et par des-sus ses vêtements noirs, une robe fuchsia. Sur scène leurs costumes leur permettent ainsi d’aborder des thèmes sensibles dans ces arrondissements phocéens, comme la féminité et la sexualité.

Vers une nouvelle laïcité ?

Directrice de la publicationIsabelle DumasDirectrice de la rédactionClaire PourprixRédacteur en chefDavid HernandezRédacteursAxel Poulain, Lilian Gaubert, Laura Turc, Florentin Schweppes, Maxime Feuillet, Leo Roynette, Léa Masseguin, Charline Bakowski, Hugo Borrel, Charlène Ravella, Pierre-Antoine Barut, Arnaud Bastion, Johanne-Eva Desvages, Paul Dalas, Stéphane Monier, Morgan [email protected]

Pour réagir et approfondir la lecture

www.10dumat.iscpalyon.com

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Morgan Couturier

Liberté, égalité, fraternité, laïcité ?

Actualité

"La laïcité se cherche, s’exprime, se dis-cute, s’exerce et, s’il faut, se corrige et se répand », disait en son temps

l’historien Claude Nicolet. Un mois après avoir soufflé ses 110 bougies, la loi 1905 sur la laïcité est au cœur d’un débat houleux. Concept abs-trait, la laïcité ouvre la voie aux interprétations personnelles, aussi dangereuses soient-elles. Le Premier ministre, Manuel Valls lui-même, s’est essayé à cet exercice (voir encadré) sans peu de réussite, démontrant l’importance de rappeler la définition exacte de ce principe acquis pendant la Révolution française. « Il y a toujours eu plusieurs conceptions sur ce que devait être la laïcité, ce qu’elle était, déclare Nicolas Cadène, rapporteur général de l’Obser-vatoire de la laïcité. Mais en revanche, il n’y a qu’une laïcité qui s’applique, c’est celle définie par les textes juridiques dont l’article 10 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen ou bien évidemment la loi du 9 décembre 1905. Elle repose sur trois principes : la liberté de conscience et de cultes ; la séparation des ins-titutions publiques et des institutions religieuses et enfin, l’égalité de tous les citoyens devant la loi quel que soient leurs croyances ou leur religion.

C’est la liberté de croire ou de ne pas croire ». Concept fort de la République française, la laïcité n’en demeure pas moins la cible privilégiée de détracteurs partisans d’un plus grand contrôle religieux. Une certaine forme de « laïcité fermée » apparaît ainsi depuis quelques années, embra-sée par la recrudescence des actes anti-religieux. « Pour certains, le souhait est qu’elle aille au-delà de l’actuelle loi, voire d’en créer une nouvelle », enchaîne Nicolas Cadène. Cette « vision anti-reli-gieuse », dixit la sociologue Valentine Zuber va « à l’encontre des libertés publiques garanties par notre État de droit ». Pour la spécialiste de la liberté religieuse comme pour le rapporteur général, cette remise en cause de la laïcité s’explique en grande partie par ce contexte de peur, palpable depuis les tue-ries de Mohammed Merah et les récents atten-tats. « Mais changer la loi, ce serait radicaliser des positions et diviser encore plus la population », témoigne Nicolas Cadène. Un constat soutenu par Valentine Zuber : « La tentation est grande de penser que si on supprime l’expression reli-gieuse, on supprime le problème. Mais si on les cache, c’est comme un secret de famille. Un se-cret caché fait plus de mal qu’un secret débattu ».

« On est dans une société qui a beaucoup de mal à accepter l’étrangeté » Si la population en vient à baigner dans le trau-matisme autant qu’elle a baigné dans le sang en novembre dernier, elle le doit également à une surmédiatisation des problèmes religieux, où les médias « attisent les tensions, sans apporter beaucoup de réflexions sur ces sujets complexes », enchaîne Nicolas Cadène. « Ils parlent tout le temps des problèmes mais jamais des solutions ». De ce fait, la France se retrouve avec une société « qui a beaucoup de mal à accepter l’étrangeté et qui s’arque-boute derrière une vision erronée de la laïcité », poursuit Valentine Zuber. Pourtant et c’est bien là que se trouve le nœud du problème, la laïcité reste ouverte au débat comme aux critiques. Des actions proscrites au-jourd’hui mais nécessaires pour contrecarrer les discours dangereux, toutes religions comprises. La laïcité, si chèrement acquise, doit passer par un débat démocratique. Après 110 d’existence, elle doit surtout rester un principe et non une valeur. Car « à partir du moment où en en fait une valeur, présente Valentine Zuber, on en fait une type de conviction parmi d’autres ».

Le Premier Ministre s’en est vivement pris, par micros interposés, à Jean-Louis Bianco sur la question de laïcité, lui reprochant de dénaturer la laïcité après que le président de l’Observatoire de la laïcité ait signé une tribune réunissant le controversé Collectif contre l’islamophobie en France et des proches des non moins contreversés Frères musulmans.

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De la viande halal dans les cuisines d’une grande chaîne de fast-food. L’histoire dure depuis maintenant six ans. Fin

2009, le géant de la restauration rapide Quick se lançait dans ce marché florissant. Huit restau-rants tests étaient alors choisis pour proposer des offres halal aux consommateurs. Le Quick de Toulouse est le premier à avoir franchi le pas, il a immédiatement doublé son chiffre d’affaires. Idem pour le Quick Saint-Louis à Marseille. Wil-liam Warzee, l’un des managers du restaurant en 2009, expliquait à Saphir News : « Le res-taurant de Saint-Louis est situé dans un secteur où 80 % de la population est musulmane. On savait donc qu’en faisant du halal, ça allait nous apporter des nouveaux clients. On a touché des clients qu’on ne touchait pas avant. Cela a donc développé le chiffre d’affaires ». Le Quick de Villeurbanne, situé Route de Genas, faisait lui aussi partie des huit restaurants tests. Karim Bouzenada, gérant de l’établissement, assurait auprès de 20minutes en 2010, avoir vu sa fré-quentation doubler après le lancement de l’offre halal. « Lors de l’ouverture, l’attente pouvait dé-passer une heure. Cela s’est ensuite stabilisé et puis nous avons plus que doublé le nombre de salariés pour faire face à la demande. » Contac-tés, les directeurs de ces établissements ne sou-haitent plus s’exprimer sur ce sujet aujourd’hui.

Au vu du succès rencontré par les restaurants tests, Quick décide en 2010 d’étendre son offre halal à quatorze nouveaux établissements en France. Dans ces restaurants, le bacon disparaît des burgers pour faire place à la dinde fumée halal et les sandwichs à base de bœuf et de volaille sont certifiés halal par l’Association Ri-tuelle de la Grande Mosquée de Lyon (ARGML). Pour qu’un Quick mette en place une offre halal, celui-ci doit répondre à des critères bien pré-cis. Jean-Edouard Charret, président du groupe Quick France entre 2009 et 2013, revenait sur ceux-ci lors d’une conférence de presse en août 2010 : « Le premier critère est la part des ventes réalisée par les burgers à base de poisson dans les ventes totales du restaurant. On voit dans l’ensemble des restaurants choisis que le poids de ces burgers est plus de deux fois supérieur à celui de la moyenne nationale. Le deuxième critère est le faible poids des produits à base de bacon dans les ventes. Le troisième est la variation de la fréquentation très forte dans les périodes pré-, pendant et post-Ramadan. Enfin, le quatrième critère est géographique : avoir à moins de dix minutes en voiture une alternative sur un Quick standard. » Six ans plus tard, le parc Quick halal compte 28 restaurants sur les 401 Quick éparpillés sur toute la France. 28 restaurants qui ne savent pas encore de quoi

leur avenir sera fait. Après le rachat de Quick par Burger King, le 17 décembre dernier, les stra-tégies marketing mises en place dans chaque restaurant devront évoluer. Ceux qui offrent du halal n’y échapperont pas.

Un marché gigantesqueLe « boom » du halal en France est assez récent. Karim Baouz, journaliste spécialiste de la ban-lieue et auteur Plongée au coeur de la fabrique djihadiste aborde le sujet dans son livre : « En 1980, dans la cité, la mode est au walkman. Personne ne fait le ramadan ou ne mange ha-lal. ». La consommation se limite alors à la vente de produits carnés en boucheries spécialisées, pour répondre à la demande du « comme au pays ». C’est au début des années 2000 que les industriels vont transformer le traditionnel en marketing, à grands coups d’études statis-tiques. En France, six à sept millions de musul-mans cohabitent. Ces derniers accordent 30% de leur budget à la nourriture, contre 14% pour la moyenne nationale. En dix ans, le marché connait donc un essor considérable et arbore une croissance à deux chiffres (10 à 15% par an). Une prouesse rare en période de crise. Longtemps considéré comme un phénomène de mode à ses débuts (à l’image du bio quelques années auparavant), le halal devient un produit

Restriction religieuse à l'origine, le halal est devenu un produit marketing. En plein essor, il suscite l'intérêt des commerciaux qui redoublent d'inventivité pour développer le business, au risque de lui faire perdre son sens originel.

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Stéphane Monier

L’eldorado dumarketing éthnique

Le dossier

Florentin Perrier Maxime Feuillet

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de marketing ethnique aux retombées écono-miques astronomiques (chiffre d’affaires estimé à 3 milliards d’euros en 2015). La grande dis-tribution tient sa nouvelle poule aux œufs d’or et compte bien optimiser ses chances d’en tirer un maximum de profit.

"Impossible de se priver d'un rayon halal"Au Carrefour Market de Villeurbanne, le rayon ne désemplit pas. S’il ne peut pas nous com-muniquer de chiffres, Stéphane Levan, directeur et responsable des produits frais admet que « le produit est en constante évolution depuis plusieurs années dans le magasin ». Dans ces conditions, « impossible de se priver d’un tel rayon, au risque de perdre des clients ». Pour parfaire cette progression et optimiser les ventes, chaque détail compte, jusqu’au position-nement-même du rayon au sein de l’établisse-ment. Stéphane Levan nous explique : « L’em-placement du rayon est minutieusement étudié. Il se trouve proche de l’entrée du magasin, afin que les consommateurs puissent rapidement le voir, comprendre qu’il est là, à portée de main ». Dans un souci d’organisation et de cohérence, l’échoppe se trouve à la fin du rayon charcuterie traditionnelle. Le directeur nous livre alors une anecdote inattendue : « Beaucoup d’Européens,

non-musulmans, mangent halal. Ils expliquent que la viande est meilleure au goût, moins gorgée de sang ». Florence est assistante com-merciale au sein de la société de transport Stef. Non-musulmane et non pratiquante, elle déclare consommer de la viande halal régulièrement : « Il y a quelques années, au moment où le halal fleurissait dans nos magasins, je me suis laissé tenter ». Pourquoi ? Florence nous résume en une phrase toute la puissance de pénétration du marketing ethnique contemporain : « Grâce à la publicité, à l’abondance des rayons présents dans nos enseignes, à la diversité des produits, j’ai essayé et adopté ». Le halal se vend, vite et bien. Si bien que des nouvelles offres et de nouveaux besoins se créent.

Un restaurant gastronomique halalLe marché est tel que certains se sont mis en tête d’associer gastronomie et cuisine halal. À Roubaix, « La Fonderie » laisse place à « La Fu-sion ». L’ancienne table particulièrement réputée n’aura donc pas survécu à sa deuxième ferme-ture administrative en juillet dernier. « Cela faisait plus d’un an que l’idée me trottait dans la tête. » explique Mahyadine Yassi, le patron de la bras-serie « La Fusion ». C’est donc un établissement d’un nouveau genre qui ouvrira ses portes début février : le premier restaurant gastronomique

halal de la région. Et pour mieux réussir que ses prédécesseurs, Mahyadine compte d’abord s’appuyer sur la forte demande régionale : « J’ai constaté qu’aucun restaurant halal ne proposait de la bonne cuisine française. Et il y a véritable-ment un marché à prendre » explique le gérant. En France, le constat était clair les restaurants gastronomiques halal n’existaient qu’en région parisienne et les musulmans devaient se rendre dans la capitale. Un constat obligeant les musul-mans provinciaux à se rendre dans la capitale. « Il était important pour moi de conserver l’es-prit de la cuisine française traditionnelle. Il y a beaucoup de musulmans dans le secteur qui se rendaient à Paris ou Bruxelles pour bien manger. J’ai donc saisi l’opportunité. » conclut-il. Les professionnels du secteur se sont déjà en-gagés dans la brèche du marché halal, au risque de transformer un fruit religieusement noble en simple produit marketing. Les aléas du ca-pitalisme contemporain. Car, comme l’indiquait Jules Barbey d’Aurevilly : « l’idéal économique des bourgeois est d’augmenter indéfiniment le nombre de consommateurs. »

Le halal, un argument marketing largement mis en avant. ©DR

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Pierre-Antoine Barut

Culture

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Des journalistes en quête de vérité. En 2002, la Team Spotlight, un groupe de

journalistes du Boston Globe, qui donnera son nom au film de Thomas McCarthy quinze ans plus tard, fait éclater le scandale des abus sexuels sur des mineurs. Abus perpétrés par des prêtres américains dans le dio-cèse de Boston. L’investigation de douze mois révéla au grand jour un véritable réseau pédophile au cœur même de l’Eglise catholique. Elle sera couronnée par le prix Pulitzer en 2003, le dix-huitième obtenu par des membres du Boston Globe de-puis sa fondation en 1872.

Les faitsAu début de l’année 2002, la Team Spotlight du Boston Globe mène une investigation de grande am-pleur visant à mettre en lumière un réseau de pédophiles au sein

de l’Eglise catholique, impliquant des personnalités religieuses mais aussi juridiques et politiques parmi les plus en vue de Boston. Voulant briser la loi du silence et l’omerta qui empêchait des centaines de victimes de s’exprimer, cette équipe de journalistes a fait éclater le plus grand scandale qu’ait connu l’Eglise catholique. L’enquête a prouvé que des centaines de prêtres de Bos-ton, mais également de l’Amérique toute entière, avaient pu, sans être inquiétés, abuser sexuellement des centaines d’enfants durant des an-nées. Des faits choquants ont ainsi été révélés : , un prêtre échangeant des faveurs sexuelles avec un ado-lescent contre de la cocaïne, un curé accusé d’avoir abusé sexuellement un enfant durant 21 nuits consécu-tives ou encore un prêtre qui battait sa servante... Au cœur de ce scan-dale, le cardinal de Boston, Bernard Low, accusé d’avoir protéger ces

prêtres durant plusieurs années. Le 13 décembre 2002, sous la pres-sion populaire, le cardinal Low fût contraint de démissionner, comme près de 300 autres prêtres à travers les Etats-Unis. A l’époque, Thomas F. Reilly, procureur du Massachusetts, déclara : « On a tenté d’étouffer l’af-faire. Il y a eu un complot élaboré pour garder les choses sous silence, loin de la justice. »

Le filmQuinze ans après cette sombre af-faire, Thomas McCarthy remet en lumière cette enquête journalistique et ce scandale qui avait fait trembler l’Amérique. « Généralement, l’Église ne donne pas d’avis sur des œuvres culturelles. Mais parfois, l’histoire est tellement lourde que ces films sont nécessaires. Si le récit est fidèle à la véritable histoire alors, je trouve ça très bien », estime Pierre Durieux,

directeur du cabinet du cardinal Bar-barin. Dans son film, Thomas McCar-thy voulait surtout mettre en avant le « quatrième pouvoir » exercé par la presse et porter le débat sur le journalisme d’investigation à notre époque, comme il le révélait à nos confrères d’Euronews au début du mois : « Qu’est devenu le journalisme d’investigation ? Aujourd’hui, tout le monde peut se prétendre journaliste mais le journaliste citoyen peut-il résoudre de telles enquêtes ? Cette nouvelle génération peut-elle passer des mois dans des tribunaux, à dis-cuter, à interviewer des gens ? Non. Car la plupart ont déjà un métier ». Au cœur du film, il y a donc ce scan-dale mais aussi et surtout le travail journalistique mené par l’équipe du Boston Globe, devenus de véritable héros de l’ombre.

Le 27 janvier prochain, le film « Spotlight » sortira dans les salles de cinéma françaises. Ce long-métrage retrace l’investigation d’un groupe de journalistes du Boston Globe, au dé-but des années 2000, ayant fait éclater au grand jour un scandale impliquant des prêtres pédo-philes. Quinze ans plus tard, le film de Thomas McCarthy, nominé aux Oscars, s’attaque donc à un sujet brûlant, qui a fait vaciller l’Eglise catholique

Prêtres pédophiles sous les

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Arnaud Bastion

Société

Renforcer l’encadrement des jeunes musulmans britanniques pour lutter

contre la radicalisation. C’est l’ob-jectif que David Cameron s’est fixé. Et pour parvenir à ses fins, il a mis les moyens en annonçant le déblo-cage de 20 millions de livres (26 millions d’euros) pour un fonds dédié à l’apprentissage de l’an-glais pour les nouveaux migrants arrivés au Royaume-Uni. Une mesure qui semble directement viser les femmes musulmanes rejoignant leur époux et qui ne maîtrisent pas ou peu la langue de Shakespeare. Au bout de deux ans de présence sur le ter-ritoire britannique, un test de langue sera effectué. Et si leur niveau s’avère insuffisant, elles courront le risque de se faire ex-pulser du territoire britannique.

Pour justifier cette annonce, le Premier ministre avance la thèse de la lutte contre la ségrégation sexuelle et la radicalisation. Selon lui, les personnes ne parlant pas anglais seraient « plus réceptives aux messages extrémistes ». Des propos qui n’ont pas manqué de faire réagir outre-Manche. Le jour-naliste du Daily Telegraph, James Kirkup s’est exprimé sur le sujet en démontant le raisonnement du gouvernement : « De nombreux djihadistes parlent couramment

l’anglais. » Il insiste sur le fait que David Cameron au-rait pu mettre en avant l’ap-prentissage de

la langue dans le but de trouver un travail et de s’intégrer. Même son de cloche pour le chef du parti libéral, Tim Farron, pourtant allié des conservateurs, qui a déclaré que « faire le lien entre les femmes

musulmanes qui se battent avec la langue anglaise et l’extrémisme local ne sert qu’à isoler un peu plus ces personnes ».

"Ce n'est pas la bonne so-lution"Pour Hacène Taibi, enseignant à la grande mosquée de Lyon, ces annonces de David Cameron n’ont aucun sens : « Ce n’est pas la bonne solution, il faut prendre le problème à la source. Favoriser l’encadrement en offrant à tous les mêmes chances de réussite. . Il condamne le raccourci fait par David Cameron, entre la non-maî-trise de la langue et les risques de radicalisation, qui lui semble bien trop proche de l’amalgame. En revanche, il reconnaît que l’apprentissage de la langue du pays hôte est forcément un plus pour s’intégrer, particulièrement dans le cadre du regroupement familial. Mais tout comme James Kirkup, Hacène Taibi ne comprend

pas que l’on puisse tirer de telles conclusions. « Si l’on s’attarde un peu sur les attentats de Charlie Hebdo de janvier ou ceux du 13 novembre dernier, il est clair que les assaillants maîtrisaient parfai-tement la langue française. Ça ne les a pas empêchés de passer à l’acte. » Un exemple concret qui prouve bien que David Cameron n’a pas encore trouvé la solu-tion idoine pour lutter contre le terrorisme. Pire. Pour The Inde-pendent, ces annonces serviraient simplement à « rassurer les élec-teurs blancs » et à montrer que le gouvernement « reste ferme en ce qui concerne l’immigration et le terrorisme ». Reste à savoir si le fait d’expulser des mères qui ne parlent pas anglais diminuera réellement les risques de radicali-sation. Pas si sûr.

RoyaumeUni :

Les musulmanes contraintes

à la langue de

SHAKESPEAREDavid Cameron, Premier ministre britannique ©DR

"Ce n’est pas la bonne solution, il faut prendre le problème à la source"

David Cameron remet sur la table le débat sur l’intégration des musulmans au Royaume-Uni. Le Premier ministre britannique a créé la polémique en menaçant d’expulsion les femmes musulmanes qui ne parlent pas correctement l’anglais. Il estime qu’elles augmenteraient les risques de radicalisation. Il souhaite également interdire le port du niqab dans les établissements scolaires.

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Le quiz de la rédac

QUESTION 1 QUESTION 2

QUESTION 3 QUESTION 4

REPONSE 3 :.B Avec une population de 7 150 000, Israël compte environ 75% de juifs (5 415 000 habitants). C’est le seul pays au monde avec une majorité juive. La population est originaire du monde entier : Russie, Argentine, France, Etats-Unis… Israël compte également 20% d’Arabes israéliens, des Druzes, une communauté circassienne et une petite communauté arménienne. Dans ce pays, les relations entre les communautés religieuses sont tendues.

REPONSE 4 : A Le Pakistan. Les députés pakistanais viennent de refuser un texte de loi proposant de faire passer l’âge légal du mariage de 16 à 18 ans. La plus haute instance religieuse du pays l’a jugée « blasphématoire » et non-conforme à la loi islamique. Proposé par le texte de la députée Marvi Me-mon, demandait des peines sévères allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement pour les parents mariant leur enfant avant la majorité. Finalement, marier sa fille restera autoriser au Pakistan (dans ce pays 21% des filles sont mariées avant leur 18e anni-versaire, selon l’ONG Girls Not Bride).

REPONSE 2 :C. La jalousie ne fait pas partie des sept péchés capitaux qui sont l’orgueil, l’avarice, l’envie, la colère, la luxure, la paresse et la gourmandise. Ils ont été identi-fiés par Thomas d’Aquin, un religieux du XIIIe siècle. Dans la religion catholique, les péchés capitaux correspondent aux péchés dont découlent tous les autres. Cela signifie que si l’on évite l’un des péchés, on évite aussi les autres. Ils repré-sentent un but, une finalité et ont quelque chose d’attractif. Les sept péchés capitaux sont les « sept idoles de l’âme ».

REPONSE 1 B. L’Indonésie est le plus grand pays mu-sulman du monde. Avec 250 millions d’habitants, la plupart d’entre eux se réclament de l’islam sunnite. Selon un recen-sement de 2010, 87,2% des Indonésiens sont musulmans (7% protestants, 2,9% catholiques, 1,7% hindouistes, 1,3% autres). La liberté de religion est stipulée dans la constitution indonésienne. D’ailleurs, le gouvernent recon-naît six religions : l’islam, le protestantisme, le catholicisme, l’hindouisme, le bouddhisme et le confucianisme.

ntio

Quel est le pays où il y a le plus de musulmans ?

Quel péché ne fait pas partie des «sept péchés capitaux» de la religion catholique ?

Quel est le pourcentage du nombre de juifs en Israël ?

Quel pays vient de rejeter l’interdiction au mariage des mineures ?

A-65%B-75%C-85%

A- Le PakistanB- L’Afghanistan

C- L’Iran

A-L’Arabie SaouditeB-L’Indonésie

C-L’Inde

A- La colèreB- La luxureC- La jalousie