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Devenir et comportement des mtaux dans l'eau : biodisponibilit et modles BLMRapport technique

Ministre de lEcologie et du Dveloppement Durable Direction de lEau 20, avenue de Sgur 75302 PARIS 07 SP Convention DE n CV03000081 Opration n 2

Franois LE GOFF - Vincent BONNOMET Direction des Risques Chroniques Unit Evaluation des Risques Ecotoxicologiques

MARS 2004

INERIS DRC-03-46822-FLg/JL-03.0693

Devenir et comportement des mtaux dans l'eau : biodisponibilit et modles BLMRapport technique

Ministre de lEcologie et du Dveloppement Durable Direction de lEau 20, avenue de Sgur 75302 PARIS 07 SP Convention DE n CV03000081 Opration n 2MARS 2004

PERSONNES AYANT PARTICIPE A LETUDE : J.P. BLANQUET - V. BONNOMET - M. COQUERY - A. GAUDILLOT - F. GONDELLE - N. HOUEIX - F. LE GOFF - H. MAGAUD L. MEUNIER - W. SANCHEZCe document comporte 85 pages (hors couverture)

Rdaction NOM QualitF. LE GOFF

VrificationH. MAGAUD

ApprobationE. THYBAUD Responsable de lUnit Evaluation des Risques Ecotoxicologiques

V. BONNOMET Ingnieurs lUnit Evaluation des Risques Ecotoxicologiques Ingnieur lUnit Evaluation des Risques Ecotoxicologiques

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RESUMELa directive europenne 2000/60/CE tablit un cadre pour maintenir et amliorer la qualit des eaux dici 2015. Cette directive prsente, en particulier, une stratgie pour le contrle de la pollution par les substances les plus proccupantes en imposant de dfinir des normes de qualit. Ces normes de qualit sont des concentrations seuils qui ne doivent pas tre dpasses dans leau pour assurer la protection des cosystmes et de la sant humaine. Quatre mtaux font partie de la liste des substances prioritaires accompagnant cette directive : le cadmium, le plomb, le mercure et le nickel. La dtermination des normes de qualit est problmatique pour les mtaux : Les lments mtalliques sont prsents, de faon ubiquitaire, en traces dans lenvironnement. Il est ncessaire de distinguer les contributions dorigine naturelle des apports anthropiques. Les organismes vivants ont volu en prsence des lments mtalliques. Les tres vivants ont besoin de mtaux qualifis d'essentiels et certains sont adapts pour vivre dans des environnements particulirement riches en mtaux. Dans leau, les mtaux sont prsents sous forme d'ions libres mais ils peuvent aussi se complexer avec des ligands inorganiques et organiques prsents, sous forme dissoute, en solution. Seules certaines formes du mtal peuvent tre assimilables et induire un effet sur les organismes : ce sont les formes biodisponibles.

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L'ensemble de ces particularits fait que l'valuation des risques lis aux mtaux ne peut tre conduite de la mme manire que pour les substances chimiques organiques. De nouvelles mthodes dvaluation prenant en compte ce particularisme ont commenc tre appliques dans les valuations des risques pour les mtaux au niveau europen1. C'est notamment le cas pour le cadmium, le nickel, le zinc, le chrome, le plomb et le cuivre, ces deux derniers faisant l'objet d'valuations des risques proposes par l'Industrie. Les interactions entre les espces mtalliques en solution et les organismes vivants font l'objet de nombreuses tudes. De la mme manire que pour la spciation des mtaux avec les ligands inorganiques et organiques, des programmes de calcul ont t dvelopps pour modliser la fixation du mtal au niveau des ligands biotiques (sites de fixation des mtaux sur les organismes vivants). Ces modles dits Biotic Ligand Models ont t mis au point, pour quelques espces aquatiques et quelques mtaux, afin de prdire la toxicit (aigu) de ces mtaux en fonction des conditions physico-chimiques d'un milieu donn. Dans le cadre du rglement CE/793/93 pour lvaluation et le contrle des risques prsents par les substances existantes, lvaluation des risques lis la production et lutilisation du zinc pour le milieu aquatique tient compte de la biodisponibilit de celui-ci suivant les milieux tudis. La mthodologie retenue utilise les BLM dvelopps pour le zinc, pour diffrents organismes vivants (une algue, un invertbr et un poisson). Des approches similaires seront peut-tre proposes dans les annes venir pour la dtermination de seuils de qualit. Toutefois ces modles rcents sont encore en cours d'laboration pour certains et ncessitent des tapes de validation supplmentaires pour d'autres. L'tude prsente ici a montr lintrt mais aussi les limites des BLM proposs pour l'estimation de la biodisponibilit des mtaux dans les milieux naturels. En effet, les incertitudes sur les rsultats sont encore trs importantes et de nombreuses hypothses nont pas encore t valides. Par ailleurs, il est indispensable de bien cerner le domaine dutilisation des modles dvelopps compte tenu du peu de validation de leur applicabilit diffrentes espces, diffrents stades de dveloppement et milieux aquatiques.

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Evaluation des risques des substances existantes (Rglement CE/793/93)

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TABLE DES MATIERESRSUM ____________________________________________________________________________ 1 TABLE DES MATIRES_______________________________________________________________ 2 TABLE DES ILLUSTRATIONS _________________________________________________________ 4 INTRODUCTION _____________________________________________________________________ 7 1. GNRALITS SUR LES MTAUX ________________________________________________ 8 1.1. ORIGINE ET DEVENIR DES MTAUX DANS LENVIRONNEMENT_____________________________ 8 Apports telluriques naturels : rosion, transport, sdimentation________________________ 8 Autres apports dorigine naturelle_______________________________________________ 9 Apports anthropiques_________________________________________________________ 9 Devenir des mtaux dans lenvironnement aquatique _______________________________ 10 Dtermination des concentrations naturelles en mtaux _____________________________ 10Concentrations de rfrence ______________________________________________________ 11 Modlisation gochimique _______________________________________________________ 18

1.1.1. 1.1.2. 1.1.3. 1.1.4. 1.1.5.

1.1.5.1. 1.1.5.2.

1.2.

EVOLUTION DES ORGANISMES EN PRSENCE DES MTAUX ______________________________ 19 Le caractre essentiel de certains mtaux ________________________________________ 19 Acclimatation, adaptation, slection ____________________________________________ 21Acclimatation _________________________________________________________________ 21 Slection et adaptation.__________________________________________________________ 21 Implications __________________________________________________________________ 22

1.2.1. 1.2.2.

1.2.2.1. 1.2.2.2. 1.2.2.3.

2.

COMPORTEMENT DES MTAUX ET BIODISPONIBILIT __________________________ 23 2.1. FORMATION DE COMPLEXES INORGANIQUES _________________________________________ 24 Rappels sur les complexes inorganiques _________________________________________ 24 Modles de spciation inorganique _____________________________________________ 25

2.1.1. 2.1.2. 2.2.

COMPLEXATION AVEC LA MATIRE ORGANIQUE ______________________________________ 25 Gnralits sur la matire organique dissoute ____________________________________ 25 Ractions de complexation avec les mtaux ______________________________________ 27 Analyse et mthodes de mesure ________________________________________________ 27Mesure des concentrations en matire organique ______________________________________ 27 Caractrisation qualitative de la matire organique dissoute par fractionnement ______________ 28

2.2.1. 2.2.2. 2.2.3.

2.2.3.1. 2.2.3.2.

2.2.4.

Modlisation de la complexation des mtaux avec la matire organique ________________ 29WHAM ______________________________________________________________________ 30 Modle NICA - Donnan _________________________________________________________ 38

2.2.4.1. 2.2.4.2.

2.3.

COMPLEXATION AVEC LE LIGAND BIOTIQUE ______________________________________ 40 Gnralits________________________________________________________________ 40 Les ligands biotiques I : chez les poissons (les branchies) ___________________________ 41 Les ligands biotiques II : chez les invertbrs _____________________________________ 42 Les ligands biotiques III : chez les algues ________________________________________ 43

2.3.1. 2.3.2. 2.3.3. 2.3.4.

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2.3.5.

Modlisation de la complexation mtal / ligand biotique ____________________________ 43Le FIAM (Free Ion Activity Model)________________________________________________ 44 Le FIAM modifi ______________________________________________________________ 44 GSIM _______________________________________________________________________ 48 Limites des modles ____________________________________________________________ 49

2.3.5.1. 2.3.5.2. 2.3.5.3. 2.3.5.4.

3.

LE BLM : UN MODLE INTGR ________________________________________________ 51 3.1. 3.2. UNE APPROCHE CONCEPTUELLE __________________________________________________ 51 LES INTERACTIONS PRISES EN COMPTE _____________________________________________ 52 Influence des ions comptiteurs sur la toxicit des mtaux ___________________________ 52Duret de leau (Ca2+, Mg2+) _____________________________________________________ 52 pH (ions H+, OH-)______________________________________________________________ 55 Lalcalinit (ions CO32-) _________________________________________________________ 56 Autres ions comptiteurs (Na+, K+, S2-, Cl-) __________________________________________ 56

3.2.1.

3.2.1.1. 3.2.1.2. 3.2.1.3. 3.2.1.4.

3.2.2. 3.2.3. 3.3.

Influence de la matire organique sur la toxicit des mtaux _________________________ 56 Accumulation du mtal au niveau du ligand biotique et toxicit _______________________ 57

UN EXEMPLE : BLM-CUIVRE POUR LES DAPHNIES ____________________________________ 60 Construction d'un BLM-cuivre pour les daphnies (invertbrs) _______________________ 60 Validation du modle mis au point______________________________________________ 62 Test du BLM-cuivre pour les daphnies __________________________________________ 62 65

3.3.1. 3.3.2. 3.3.3.

3.4. ETUDE EXPRIMENTALE 1 : INFLUENCE DE LA MATIRE ORGANIQUE SUR L'ACCUMULATION DE CUIVRE AU LIGAND BIOTIQUE ___________________________________________________________ 3.4.1.

Etudes prliminaires ________________________________________________________ 65Modlisation du devenir du cuivre en prsence de matires organiques dissoutes _____________ 65 Modlisation de la toxicit du cuivre vis--vis de Pimephales promelas ____________________ 66

3.4.1.1. 3.4.1.2.

3.4.2. 3.4.3. 3.5. 3.6.

Matriels et mthodes _______________________________________________________ 68 Rsultats et discussion _______________________________________________________ 69

ETUDE EXPRIMENTALE 2 : TEST DE MODLES DE SPCIATION ___________________________ 71 LIMITES DES BLM_____________________________________________________________ 73

CONCLUSION ______________________________________________________________________ 75 RFRENCES_______________________________________________________________________ 76

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TABLE DES ILLUSTRATIONSEquationsquation 2-1 : Constantes de dissociation pour les diffrents sites protons de la matire humique (d'aprs Tipping, 1994) ________________________________________________________________________ 31 quation 2-2 : Raction d'change proton / mtal au niveau des sites de complexation avec la matire humique et constante d'quilibre associe ___________________________________________________ 31 quation 2-3 : Effet des interactions lectrostatiques sur les constantes de dissociation des protons de la matire humique ______________________________________________________________________ 32 quation 2-4 : Expression du facteur d'interaction lectrostatique ________________________________ 32 quation 2-5 : Relation entre les constantes d'affinit des mtaux pour les sites A (pKMHA) et B (pKMHB) _ 33 quation 2-6 : Constante de complexation mtal / substances humiques ___________________________ 37 quation 2-7 : Constantes d'quilibre pour les systmes bidendate et tridendate _____________________ 37 quation 2-8 : Raction de complexation entre le mtal et le ligand biotique________________________ 43 quation 2-9 : Raction de complexation du mtal au niveau du ligand biotique _____________________ 44 quation 2-10 : Expression de l'activit du complexe {ligand biotique / mtal}______________________ 45 quation 2-11 : Relation entre la rponse biologique et la concentration en mtal ____________________ 45 quation 2-12 : Relation entre la rponse biologique et l'activit du complexe {ligand biotique / mtal} __ 45 quation 2-13 : Gnralisation de la relation entre la rponse biologique et l'activit du complexe {ligand biotique / mtal} diffrentes allures de courbes dose / rponse _________________________________ 45 quation 2-14 : Expression de la rponse biologique au niveau 1 ________________________________ 47 quation 2-15 : Expression de l'activit du complexe {ligand biotique / mtal}______________________ 47 quation 2-16 : Linarisation de la rponse biologique en fonction de la concentration en mtal ________ 47 quation 2-17 : Extension de la linarisation de la rponse biologique en fonction de la concentration en mtal en fonction de l'allure de la courbe dose / rponse________________________________________ 47 quation 2-18 : Expression de la rponse biologique au niveau 1 en fonction de l'allure de la courbe dose / rponse______________________________________________________________________________ 47

FiguresFigure 1-1 : Devenir des particules sdimentaires dans le cours deau : graphique empirique de Hjulstrm (Hjulstrm, 1935) ______________________________________________________________________ 8 Figure 1-2 : Classement biologique des lments chimiques (Biological System of the Elements, extrait de Markert, 1994) ________________________________________________________________________ 20 Figure 1-3 : Evolution de l'activit biologique en fonction des concentrations en mtaux essentiels (A) et non essentiels (B) _________________________________________________________________________ 21 Figure 2-1 : Phnomnes de complexation des mtaux dans l'eau_________________________________ 23 Figure 2-2 : Mthodologie de fractionnement de la matire organique dissoute issue d'eaux du milieu naturel (d'aprs Ma et al., 2001) ________________________________________________________________ 26 Figure 2-3 : Classification de la matire organique dissoute (d'aprs Leenheer et Crou, 2003) _________ 28 Figure 2-4 : Reprsentation du systme des branchies _________________________________________ 41 Figure 2-5 : Aspect de diffrentes courbes dose-rponse thoriques, avec diffrentes valeurs de pente (avec n la valeur de la pente de la courbe dose-rponse) ______________________________________________ 46 Figure 2-6 : Raction de complexation mtal / ligand biotique (membranes des branchies)_____________ 48

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Figure 2-7 : Concentrations en Pb dans les cellules de l'algue Chlorella kesslerii, pH 6, aprs 50 min, lors dune exposition au plomb libre Pb2+ constante (pour des concentrations croissantes en Pb total et en acides fulviques (SRFA)). D'aprs Slaveykova et al., 2003. __________________________________________ 49 Figure 3-1 : Schmatisation du fonctionnement du BLM _______________________________________ 52 Figure 3-2 : Influence de la duret de l'eau sur la toxicit des mtaux envers les organismes vivants _____ 53 Figure 3-3 : Distribution de certaines espces inorganiques du cuivre en fonction du pH ______________ 55 Figure 3-4 : Accumulation de cuivre dans les branchies de Lepomis gibbosus exposs des concentrations proches des concentrations ltales (d'aprs Anderson et Spear, 1980) _____________________________ 58 Figure 3-5 : Dtoxication des branchies de poissons ayant subis une exposition au cuivre (d'aprs Anderson et Spear, 1980) ________________________________________________________________________ 59 Figure 3-6 : Reprsentation de la mortalit en fonction de laccumulation de cuivre sur les branchies ____ 60 Figure 3-7 : Influence des paramtres du BLM sur la toxicit du cuivre vis--vis de Daphnia magna. Sur les graphiques sont indiqus, en abscisse, les paramtres tests et, en ordonnes, la LC50 calcule et exprime en cuivre dissous. Calculs effectus avec le Cu-BLM pour Daphnia magna (Hydroqual, 2002). ___________ 63 Figure 3-8 : Modlisation de la complexation du cuivre (cuivre libre) avec la matire organique dissoute (eau des msocosmes, [Cu]init = 10 M) WinHumic V version 6____________________________________ 65 Figure 3-9 : Modlisation de la complexation du cuivre (cuivre libre) avec la matire organique dissoute (eau des msocosmes, [Cu]init = 0.39 M) WinHumic V version 6 __________________________________ 66 Figure 3-10 : Evolution de la toxicit du cuivre vis--vis de Pimephales promelas calcule au moyen du BLM (Hydroqual, 2002). Les caractristiques physico-chimiques du milieu employ pour les tests conduits sur l'pinoche Svecevicius et Vosyliene, 1996 ont t utilises. __________________________________ 67 Figure 3-11 : Distribution des concentrations en cuivre mesures dans les branchies des pinoches en prsence (1) ou non (2) de matires organiques dissoutes _______________________________________ 70 Figure 3-12 : Comparaison entre des mesures de la concentration en cuivre libre par ISE (Ion Selective Electrode) et des donnes obtenues par modlisation __________________________________________ 72

TableauxTableau 1-1 : Concentrations de rfrence pour la Mer du Nord pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdiments __________________________________________ 12 Tableau 1-2 : Concentrations de rfrence pour la Manche pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdiments __________________________________________ 12 Tableau 1-3 : Concentrations de rfrence pour l'Atlantique pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdiments __________________________________________ 12 Tableau 1-4 : Concentrations de rfrence pour la Mditerrane pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdiments __________________________________________ 13 Tableau 1-5 : Concentrations en mtaux dans les matires en suspension (MES) et dissous dans l'eau: rfrences donnes par la littrature pour des cours d'eau rputs non-pollus _______________________ 13 Tableau 1-6 : Concentrations de rfrence en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour la Seine 15 Tableau 1-7 : Concentrations de rfrence en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour le bassin Artois-Picardie________________________________________________________________________ 15 Tableau 1-8 : Intervalles des concentrations mesures dans les sdiments de ruisseaux et dans les sols en fond de vallons sur le bassin Loire-Bretagne _____________________________________________________ 16 Tableau 1-9 : Concentrations mesures dans les alluvions anciennes sur le bassin Adour-Garonne. ______ 17 Tableau 1-10 : Concentrations de rfrence (nerlandaise) en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour le Rhin __________________________________________________________________________ 17 Tableau 1-11 : Liste (non exhaustive) des lments essentiels et non essentiels et exemples de proprits des lments connus pour leur essentialit______________________________________________________ 19

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Tableau 2-1 : Dimension des jeux de donnes utiliss pour la calibration du Model V (partie complexation entre la MO et les cations mtalliques) _____________________________________________________ 33 Tableau 2-2 : Valeurs par dfaut des paramtres dcrivant les proprits de la matire organique (WHAM 1.0 - Model V) ___________________________________________________________________________ 34 Tableau 2-3 : Principales caractristiques des eaux tudies pour tester le WHAM, Model V (d'aprs Dwane et Tipping, 1998) ______________________________________________________________________ 36 Tableau 2-4 : Nouveaux paramtres utiliss dans le Model VI ___________________________________ 38 Tableau 2-5 : Etapes de l'interaction mtal / organisme et hypothses ncessaires la modlisation (d'aprs Campbell et al., 2002) __________________________________________________________________ 40 Tableau 3-1 : Qualification des eaux en fonction de leur duret __________________________________ 53 Tableau 3-2 : Mise en parallle des constantes dtermines pour Daphnia magna et Pimephales promelas 61 Tableau 3-3 : Caractristiques physico-chimiques de l'eau utilise pour la modlisation _______________ 62 Tableau 3-4 : Rcapitulatif des essais cotoxicologiques testant les effets du cuivre sur lpinoche ______ 67 Tableau 3-5 : Qualit de leau utilise pour la modlisation _____________________________________ 67 Tableau 3-6 : Caractristiques des aquariums utiliss au-cours du test _____________________________ 68 Tableau 3-7 : Paramtres physico-chimiques de l'eau des diffrents aquariums ______________________ 69 Tableau 3-8 : Suivi de la temprature, du pH et de l'oxygne dissous au cours du test _________________ 70 Tableau 3-9 : Concentrations en cuivre accumul au niveau des branchies des pinoches ______________ 70

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INTRODUCTIONLa directive europenne 2000/60/CE tablit un cadre pour maintenir et amliorer la qualit des eaux dici 2015. Cette directive prsente, en particulier, une stratgie pour le contrle de la pollution par les substances les plus proccupantes en imposant de dfinir des normes de qualit. Ces normes de qualit sont des concentrations seuils qui ne doivent pas tre dpasses dans leau pour assurer la protection des cosystmes et de la sant humaine. Quatre mtaux font partie de la liste des substances prioritaires accompagnant cette directive : le cadmium, le plomb, le mercure et le nickel. L'ensemble des particularits des mtaux (prsence naturelle - Cf. point 1.1, essentialit - Cf. point 1.2.1, biodisponibilit - Cf. point 2, etc.) fait que lvaluation des risques lis leur utilisation diffre de celle des autres substances chimiques. De nouvelles mthodes prenant en compte ce particularisme ont commenc tre appliques dans les valuations des risques pour les mtaux au niveau europen2. C'est notamment le cas pour le cadmium, le nickel, le zinc, le chrome, le plomb et le cuivre, ces deux derniers faisant l'objet d'valuations des risques proposes par l'Industrie. Des modles permettant d'estimer la biodisponibilit des mtaux pour les organismes aquatiques, en fonction des caractristiques physico-chimiques des milieux (BLM : Biotic Ligand Models ), ont fait leur apparition dans ce contexte, et notamment pour le zinc, le nickel et le cuivre. Il est important de mieux apprhender des outils tels que les BLM afin de pouvoir porter des jugements critiques et tays sur leur ventuelle utilisation pour l'application de la directive cadre sur l'eau (i.e., dfinition et application des normes de qualit environnementale). Cette meilleure apprhension passe : par une tude bibliographique sur la biodisponibilit des mtaux comprenant des lments sur leur comportement dans l'eau (complexation inorganique - Cf. point 2.1 - et organique - Cf. point 2.2, affinit pour les organismes vivants - Cf. point 2.3) ainsi que sur le dveloppement des BLM (Cf. point 3), par des tudes exprimentales permettant, d'une part, de tester certaines hypothses des modles, dans des conditions de laboratoire (Cf. point 3.4) et, d'autre part, de tester les modles eux-mmes (Cf. point 3.5).

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La majeure partie des exemples utiliss tout au long de ce rapport, aussi bien dans la partie analyse bibliographique que dans la section exprimentale, font rfrence au cuivre. En effet, l'INERIS, une tude en msocosmes, ralise sur ce mtal, a servi de support la ralisation des expriences exposes en fin de rapport. En outre, lvaluation des risques lis au cuivre, propose par l'Industrie la Commission Europenne, a conduit, entres autres, au dveloppement de BLM pour ce mtal. Ce rapport a pour thme principal la biodisponibilit des mtaux, et en particulier l'utilisation de modles permettant de l'valuer. La partie 2 traite ainsi du comportement des mtaux et de leur biodisponibilit pour les organismes vivants dans les milieux aquatiques tandis que la partie 3 repose sur la description et lutilisation de modles dits BLM . Il est galement ncessaire dintroduire galement les autres lments qui font des mtaux un groupe de substances chimiques particulier (partie 1), et notamment : leur prsence ubiquitaire la surface du globe. Les origines la fois naturelle et anthropique des mtaux ncessitent la diffrenciation des concentrations de fond (naturelle) de celles ajoutes par l'homme (point 1.1), le caractre essentiel de certains mtaux pour les organismes vivants (point 1.2.1), les phnomnes d'acclimatation, de slection et d'adaptation (point 1.2.2).

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1. Gnralits sur les mtaux1.1. Origine et devenir des mtaux dans lenvironnement1.1.1. Apports telluriques naturels : rosion, transport, sdimentation Les mtaux sont naturellement prsents dans la crote terrestre. Les mtaux sont des lments lourds, concentrs dans le magma granitique. Depuis la formation de la Terre, ils suivent un cycle gochimique qui conduit une distribution htrogne de leurs concentrations la surface du globe (Garret, 2000). Les mtaux sont prsents dans tous les compartiments de lenvironnement, mais en gnral en quantits trs faibles (en traces). Nanmoins, des concentrations importantes peuvent tre mesures dans certains sites, tout particulirement autour des massifs granitiques. Lrosion de lcorce terrestre est susceptible denrichir les cours deau en lments mtalliques. En tte de bassin, les roches sont altres et dsagrges par laction mcanique de lrosion (agents mtoriques) et par lattaque des acides forms dans latmosphre (acide carbonique) ou issus de la dcomposition de la matire organique (acides humiques). Les mtaux fixs dans les roches sous forme doxydes ou de silicates sont peu altrables chimiquement : les oxydes et silicates mtalliques sont librs de la roche par rosion et transports sous forme de particules. Les mtaux prsents dans les roches sous forme de sulfures et de carbonates sont au contraire attaqus chimiquement et trs facilement dissous dans leau. Leau transporte en aval les dbris rocheux et les divers sels mis en solution. En plaine, lorsque le courant de leau devient insuffisant pour assurer le transport des particules rocheuses, celles-ci saccumulent dans le lit du cours deau : il y a sdimentation. Erosion, transport et sdimentation sont fonction du dbit de leau et de la taille des particules (Cf. Figure 1-1).

Figure 1-1 : Devenir des particules sdimentaires dans le cours deau : graphique empirique de Hjulstrm (Hjulstrm, 1935)

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Dans les conditions environnementales, les mtaux sont relativement peu solubles dans leau et restent majoritairement associs la phase solide. Les concentrations en lments mtalliques dans la phase aqueuse sont comparativement bien moindres par rapport celles dans la phase solide. Ainsi, le dpt des particules au fond du lit des cours deau conduit potentiellement une accumulation des lments mtalliques dans les sdiments. Ces particules solides sont plus ou moins riches en lments mtalliques selon la nature gologique du terrain dont elles sont issues. Quatre fractions minralogiques majeures peuvent tre distingues : carbonates (calcaires), quartz (silices), argiles (aluminosilicates), matire organique. Comparativement aux terrains siliceux, les terrains carbonats sont pauvres en lments mtalliques. Les mtaux (lectropositifs) sont prfrentiellement associs chimiquement aux aluminosilicates (chargs ngativement). Les mtaux inclus dans la matrice rocheuse des particules sdimentaires ne sont pas susceptibles de se dissoudre directement dans leau. Les mtaux dissous dans leau, notamment ceux apports ultrieurement par lactivit humaine, ont tendance sadsorber la surface des particules en suspension. Ces mtaux adsorbs peuvent tre remis en solution en cas de changements des conditions physico-chimiques du milieu (Windom, 1988). Ladsorption sur les particules dpend de la surface expose et donc de la granulomtrie du sdiment. Plus les particules sdimentaires sont petites et plus la surface de contact avec le milieu est importante. Les mtaux sadsorbent en particulier trs facilement sur les argiles, trs fines particules daluminosilicates. Ladsorption est galement favorise lorsque les concentrations en matire organique sont leves (Cf. partie 2.2). 1.1.2. Autres apports dorigine naturelle Des apports par la voie atmosphrique existent galement : volcanisme, rosion et transport oliens de poussires, transport darosols dorigine ocanique, feux de forts, etc. Certaines eaux souterraines, en particulier dans les rgions volcaniques ou les nappes profondes, sont trs riches en mtaux. Pour le cas particulier des eaux marines, lactivit tectonique et le volcanisme sous-marins sont galement lorigine dun apport en lments mtalliques. 1.1.3. Apports anthropiques Du fait de leurs proprits physiques intressantes (bons conducteurs de chaleur et dlectricit, caractristiques de duret, de mallabilit, possibilits dalliages, proprits catalytiques, etc.) les mtaux sont trs largement utiliss par lhomme. Cette utilisation na apport aucun changement quant aux quantits de mtaux prsentes sur Terre : lactivit humaine ne cre ni ne dtruit des lments mtalliques3. En revanche, elle modifie trs significativement leur rpartition et les formes chimiques sous lesquelles ils sont prsents dans lenvironnement (Miquel, 2001). Les gisements et les filons mtallifres sont exploits, parfois de trs longue date. Mais lactivit minire peut tre lorigine dune dispersion des mtaux dans lenvironnement. Le milieu aquatique, notamment, peut tre contamin via les eaux de ruissellement. Suite un durcissement des rglementations mais aussi aux efforts importants des industriels euxmmes, les missions industrielles en mtaux ont fortement diminu. Toutefois lindustrie est toujours responsable de la majorit des rejets directs dans leau. Par ailleurs, le traitement des minerais et lindustrie mtallurgique restent lorigine dmissions atmosphriques importantes. Les mtaux transports par latmosphre peuvent tt ou tard contaminer les milieux aquatiques

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La transmutation dun lment vers un autre, ncessite dintervenir directement sur le noyau atomique. Cela requiert des nergies considrables et nest effectu que pour des applications nuclaires trs spcifiques et trs contrles.

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La combustion du charbon et du fioul lourd, souvent chargs en mtaux, est aussi responsable dune dispersion atmosphrique significative de ces derniers. Lutilisation du plomb comme antidtonant dans lessence a constitu un mode de contamination majeur de lenvironnement par cet lment. Les rejets associs la mise en dcharge ou lincinration des produits arrivs en fin de vie sont galement notables : par exemple pour le plomb et le cadmium dans les piles, batteries et accumulateurs ; pour le mercure dans les instruments de mesure (e. g. thermomtres, baromtres). Les activits agricoles sont galement lorigine dune contamination de lenvironnement. Le sulfate de cuivre (bouillie bordelaise) est utilis pour traiter les vignes et les arbres fruitiers. Larsniate de plomb ou des drivs mercuriels ont t utiliss dans le pass comme pesticides. Certains engrais, fabriqus partir de minerais riches en phosphates, peuvent aussi avoir de fortes concentrations en cadmium prsent en impuret. Les boues des stations dpuration, les composts dordures mnagres ou le lisier utiliss pour amender les surfaces agricoles sont galement susceptibles dtre contamins par les mtaux. Certaines utilisations posent encore des problmes particuliers : par exemple, dispersion des plombs de chasse, usure des pneus (le zinc, accompagn du cadmium comme impuret, est utilis comme durcisseur pour la fabrication des pneus). 1.1.4. Devenir des mtaux dans lenvironnement aquatique Les diffrentes formes chimiques sous lesquelles peuvent tre retrouvs les mtaux, dpendent de la physico-chimie du milieu (Cf. partie 2). Par exemple, les mtaux dissous peuvent prcipiter en cas de changements de pH ou de conditions redox, ce qui peut tre le cas au niveau des zones de confluences de cours deau par exemple. A mesure que le cours deau grandit, la concentration en carbone organique dissous augmente. Ceci permet la formation de complexes stables entre les mtaux et la matire organique. Par ailleurs, par lactivit bactrienne, les conditions peuvent devenir anoxiques et rductrices ; les mtaux tendent alors prcipiter sous forme de sulfures mtalliques. Cest galement dans ces conditions rductrices que le mercure est mthyl par les bactries rductrices de sulfate. Le mercure mthyl est trs fortement accumul par les organismes vivants. Le cas particulier du devenir des mtaux dans les eaux saumtres et sales des estuaires et du milieu marin, peut poser des problmes particuliers qui ne seront pas traits dans ce rapport. 1.1.5. Dtermination des concentrations naturelles en mtaux Il est essentiel de distinguer la concentration naturelle en mtaux de la concentration ambiante. La concentration naturelle (ou concentration de fond) nest imputable quaux phnomnes naturels de dispersion exposs dans les paragraphes 1.1.1 et 1.1.2. La concentration ambiante inclut les concentrations naturelles auxquelles sajoute la pollution induite par les activits humaines telles celles exposes dans le paragraphe 1.1.3. Les concentrations naturelles sont en gnral dtermines par des prlvements en des sites de rfrence, prservs de la pollution, ou grce la modlisation partir de donnes gologiques et hydrologiques.

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1.1.5.1.

Concentrations de rfrence

Il est en gnral problmatique de trouver des sites prservs de toute pollution en Europe. Des pollutions par les mtaux peuvent tre mises en vidence par carottage dans des couches sdimentaires parfois trs profondes, tmoignages dactivits mtallurgiques trs anciennes (ElbazPoulichet et al., 2001). Mme pour les sites prservs de toute pollution directe, on ne peut pas exclure quintervienne la pollution diffuse, notamment la pollution atmosphrique. Plutt que des concentrations vritablement naturelles, ce sont en pratique des concentrations ambiantes qui sont mesures. Elles peuvent toutefois tre utilises comme concentrations de rfrence, utiles pour dtecter une source ponctuelle de pollution. Il est par contre beaucoup plus problmatique d'valuer l'ampleur d'une pollution diffuse par les mtaux. 1.1.5.1.1 Concentrations de rfrence pour les eaux marines

Des concentrations ambiantes pour les 4 mtaux lists dans la Directive Cadre, compiles par l'Ifremer, sont donnes titre indicatif dans les tableaux suivants (Tableau 1-1 Tableau 1-4). Elles ne reprsentent pas vritablement des concentrations naturelles : les apports dus la pollution diffuse, notamment atmosphrique, ne peuvent en effet pas tre exclus. Dans la mesure du possible, pour la dtermination de concentrations de rfrence, il est ainsi prfrable de privilgier les mesures effectues au large, relativement prserv de la pollution. Les concentrations en mtal dissous sont variables selon les mers. Ces variations peuvent s'expliquer par les diffrences sur le temps de rsidence des eaux (qui dpend notamment des courants et de l'enclavement des masses d'eau) et par les diffrences dans la production primaire (plus importante dans les eaux froides qui sont mieux oxygnes). En pratique, le degr d'industrialisation des pays avoisinants a galement une influence4. Les concentrations dans les sdiments et dans les matires en suspension dpendent de la physicochimie et de la granulomtrie des particules solides. L'eau marine est gnralement peu charge en matire en suspension ; en surface il s'agit surtout de phytoplancton. Lors de bloom algaux, l'adsorption des polluants sur le phytoplancton peut tre importante et influencer en particulier la distribution des mtaux : d'une part, la proportion de mtal dissout dans la phase aqueuse sera ainsi respectivement moins importante par rapport au mtal adsorb ; d'autre part, le mtal peut contaminer la chane alimentaire via l'ingestion du phytoplancton. Les diffrences de production primaire peuvent tre l'origine de variations spatio-temporelles sur les concentrations mesures : La densit du phytoplancton est maximale au printemps et en t. Ces variations saisonnires influenceront sur l'anne la distribution des mtaux entre les diffrentes phases: aqueuse, solide et biotique. En profondeur, labsence de production primaire et la minralisation des matires en suspension (phytoplancton qui meurt ou pelotes fcales mises par le zooplancton) se traduisent par une augmentation de la fraction dissoute dans l'eau.

-

En rsum, il existe des disparits gographiques sur les concentrations naturelles en mtaux dans l'eau marine. Mais il n'est en pratique pas possible de faire abstraction de la contamination par les apports anthropiques. En outre les niveaux mesurs dans l'eau dpendent des variations saisonnires et de la profondeur du prlvement. Les mesures dans les sdiments et les matires en suspension dpendent quant elles de la nature des particules solides.

4

C'est particulirement le cas pour le mercure, dont les apports sont principalement d'origine atmosphrique, et dont la contamination est principalement conditionne par les missions et les vents dominants. Les ocans du Nord sont ainsi plus contamins au mercure que les ocans du Sud.

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Tableau 1-1 : Concentrations de rfrence pour la Mer du Nord pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdimentsCd Hg Pb Ni Eau (ng/L) 5.6 - 19.1 (au large)Balls, 1985

MES (g/g)

Sdiments (g/g) 0.10 - 0.30 (au large, tamis 63 m)Laane et al., 1999

Coquery et Cossa, 1995 Brgmann et al., 1985, Haarich et al., 1993 Mart et Nuernberg, 1986, Haarich et al., 1993

< 0.05 - 0.80 (au large) 30 - 60

Tappin et al., 1995, Haarich et al., 1993 Haarich et al., 1993

15 - 64 40 - 72

35 - 135 (mer des Wadden),Hagner, 2002 Lichtfuss et Brmmer, 1981

100 - 900

20

Tableau 1-2 : Concentrations de rfrence pour la Manche pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdimentsEau (ng/L) Cd HgTappin et al., 1993

MES (g/g)

Sdiments (g/g)(RNO sed 98)

5.6 - 22.48 0.1 - 1.3 (au large) 12 - 60

1.01

Cossa et al., 1994, Cossa et Fileman, 1991

Pb Ni

Brgmann et al., 1985, Statham et al., 1999, JF Chiffoleau (comm pers) Statham et al., 1999, JF Chiffoleau (comm pers)

JF Chiffoleau (comm pers)

21 - 33 18 - 20

3 - 35 3 - 33

100 - 400

JF Chiffoleau (comm pers)

rmannsson et al., 1985, RNO sed 2001

Tableau 1-3 : Concentrations de rfrence pour l'Atlantique pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdimentsEau (ng/L) Cd 2.25 - 13.49 (large, surf.) 30.35 (large, prof: 800 m) 39.34 (large, prof: 3300 m)(B. Boutier, comm pers)

MES (g/g)

Sdiments (g/g) 0.10 - 0.66 (Golfe de Gascogne, plateau continental)(B. Boutier, comm pers)

Hg Pb

0.1 - 2.0 (Golfe de Gascogne)Cossa et al., 1992 Patterson, 1983, Lambert et al., 1991

< 0.05 - 0.52 (Golfe de Gascogne)(donnes RNO)

30 - 40 (prof: 0-200 m) Shaule et 5 (prof: 200-4000 m) Shaule etPatterson, 1983,

(donnes PNOC Atlantique)

6 - 32 (Golfe de Gascogne)

19 - 55 (Golfe de Gascogne)(RNO sed 99)

Ni

11 - 49 (Golfe de Gascogne, Sud Bretagne) Boutier et al., 1993 120 - 240 (prof: 0-200 m)Bruland et Franks, 1983, Kremling, 1985, Kremling et Pohl, 1989

(JF Chiffoleau, comm pers)

29 (Golfe de Gascogne)

Turekian et Wedepohl, 1961

79

Yeats et Campbell, 1983, Sclater et al., 1976

180 - 400 (prof: 200-4000 m)

12 - 32 (Golfe de Gascogne)(RNO sed 99)

170 - 270 (Golfe de Gascogne)Kraepiel et al., 1997

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Tableau 1-4 : Concentrations de rfrence pour la Mditerrane pour les mtaux dissous dans l'eau, sur les matires en suspension (MES) et dans les sdimentsEau (ng/L) Cd Hg 5.62 - 12.37 (au large, en surface)Morley et al., 1990

MES (g/g)

Sdiments (g/g) 0.068 (au large)

(B. Boutier, comm pers)

(Donnes du programme UE, Eros2000)

< 0.05 - 0.50 (au large, Golfe du Lion) 31 - 120 (prof: 0-200 m)

(Donnes du programme UE, Eros2000) (JF Chiffoleau, comm pers)

< 0.05 - 0.2 (au large, Golfe du Lion) 6 - 30

Pb

Nicolas et al., 1994, Laumond et al., 1984

Nicolas et al., 1994, Laumond et al., 1984

22 - 44 (prof: 200-4000 m) 130 - 260 (prof: 0-200 m)

17 - 64 (Golfe du Lion)(RNO sdiment)

Ni

(JF Chiffoleau, comm pers), Spivack et al., 1983

29 - 130 (prof: 0-200 m)(JF Chiffoleau, comm pers)

(JF Chiffoleau, comm pers)

9 - 44

240 - 300 (prof: 200-4000 m)Boyle et al., 1985

40 - 60 (Golfe du Lion)Nolting et Helder, 1990

240 - 480 (Golfe du Lion)Zhang et Wollast, 1990

1.1.5.1.2

Concentrations de rfrence pour les eaux continentales

Des concentrations en mtaux pour les fleuves rputs peu pollus peuvent tre trouves dans la littrature, aussi bien dans les matires en suspension (MES) que dissous dans l'eau. Ces concentrations sont prsentes dans le Tableau 1-5.Tableau 1-5 : Concentrations en mtaux dans les matires en suspension (MES) et dissous dans l'eau: rfrences donnes par la littrature pour des cours d'eau rputs non-pollusCd MES (g/g) 0.3 - 0.8 (Thomas et Meybeck, 1992) Dissous (ng/L) 1 - 3 (Thomas et Meybeck, 1992) 10 - 350 (Laane, 1992) 2 (van de Berg et Zwolsman, 2000) 20 (Mrian, 1991) 2 - 130 (Laane, 1992) 1 (van de Berg et Zwolsman, 2000) 20 - 40 (Thomas et Meybeck, 1992) 50 - 8400 (Laane, 1992) 70 (van de Berg et Zwolsman, 2000) 200 (Frstner et Wittman, 1983) 500- 13300 (Laane, 1992) 1200 (van de Berg et Zwolsman, 2000) 7000 (Mrian, 1991) 300 (Frstner et Wittman, 1983)

Hg Pb 20 - 40 (Thomas et Meybeck, 1992)

Ni

Les valeurs rapportes dans Laane, 1992 sont extrmement variables. Elles sont principalement issues de deux tudes celle de Zuurdeeg et al., 1992 et celle de Bewers et Yeats, 1989. Dans l'tude de Zuurdeeg et al., 1992, commande par le ministre de l'environnement nerlandais, 11740 donnes ont t compiles pour les eaux naturelles (i.e., a priori peu pollues) situes dans des rgions gologiquement comparables au Pays Bas (rgions sdimentaires allant du Nord de la France la Bilorussie). Ces donnes proviennent majoritairement de littrature grise (non publie). Pour la slection de ces donnes, il a t vrifi que les chantillons prlevs taient issus de zones pargnes de toute pollution directe (situes plus de 50 km d'industries ou d'activits agricoles intensives), et rpondaient au critre d'oligotrophie (concentration en oxygne > 8 mg/L, faible concentration en azote et en matire organique: DBO5 < 1 mg/L). Compte tenu de 13/85

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l'volution des exigences qualitatives pour l'analyse, les donnes antrieures 1978 ont t exclues5. Pour cette mme raison, des donnes de la littrature ont t slectionnes par rapport la rputation des laboratoires, dans l'tude de Bewers et Yeats, 1989. Il est difficile de savoir si la variabilit des concentrations observes reflte une relle variabilit des concentrations naturelles, ou de protocoles de prlvement et d'analyse perfectibles. Les valeurs provenant de van de Berg et Zwolsman, 2000 ont t finalement retenues par les autorits nerlandaises (Struijs et al., 2000). Thomas et Meybeck, 1992 ont calcul la moyenne des concentrations en mtaux dans les fleuves considrs comme peu pollus (Amazone, Orenoque, Parana, Mackenzie, Huang He, Purari) partir de publications prcisant l'utilisation de mthodes ultra-propres. Les valeurs de Mrian, 1991 et de Frstner et Wittman, 1983 sont cites dans Baqu et al., . Les valeurs fondes sur des moyennes sont relativement basses. Des concentrations plus importantes peuvent tre attendues localement, pour les petits cours d'eau drainant des terrains fortement minraliss. Pour les fleuves plus importants les concentrations en mtaux diminuent rapidement vers l'aval par effet de dilution (dans l'eau, et dans les sdiments par apport de matriaux faiblement minraliss). La distribution du mtal entre la phase aqueuse et la phase solide peut varier dans le temps et l'espace. Elle dpend des facteurs physico-chimiques. Pour la France, Meybeck, 1986 a tudi la chimie de l'eau de 232 bassins versants monolithologiques pour 25 diffrents types de roches. Par exemple, les eaux draines par un socle cristallin ou basaltique sont caractrises par un faible pH et une faible charge anionique ce qui favorise la dissolution des mtaux dans l'eau. Les pisodes forte pluviomtrie conduisent au transport de grandes quantits de matires en suspension sur lesquelles les mtaux vont avoir tendance s'adsorber. Les variations saisonnires de la population en phytoplancton, sur lequel les mtaux sont galement susceptibles de s'adsorber, influent galement sur la distribution des mtaux. 1.1.5.1.2.1 Seine - Normandie Pour le programme PIREN Seine6, la concentration naturelle en mtaux a t value partir de prlvements (particules en suspension et sdiments principalement) sur des ruisseaux forestiers pargns par la pollution7. Le lit lithologique du bassin de la Seine est trs homogne : il est constitu 97% de roches sdimentaires et, en particulier, 78% de carbonates. Seule la source de lYonne, situe dans le Morvan, est en terrain siliceux. Du fait de cette homognit gologique, la gochimie pour les sites de rfrence peut tre considre comme reprsentative de celle pour lensemble du bassin. Les carbonates tant trs pauvres en lments mtalliques, les apports naturels en mtaux via lrosion tellurique sont donc faibles pour la Seine. En outre le site archologique (dpts vieux de 5000 ans) prs de Bercy permet davoir une ide des concentrations prhistoriques. Les concentrations de fond dtermines partir des ruisseaux forestiers sont similaires celles releves sur le site de Bercy et galement aux concentrations de fond dtermines sur des terrains calcaires dAmrique du Nord (Horowitz et al., 1999).

5

Les mesures dans l'eau (fraction dissoute) sont particulirement dlicates et ncessitent des protocoles de prlvement et d'analyse ultra-propres (Cf Monbet et Coquery, 2003). C'est rarement le cas pour les tudes antrieures 1980. Programme Interdisciplinaire de Recherche Environnementales sur la Seine : http://www.sisyphe.jussieu.fr/internet/piren/ Il faut toutefois noter que les couverts forestiers, compte tenu de la plus grande surface de contact offerte par le feuillage aux dpts ariens, ne sont pas ncessairement prservs des pollutions diffuses dorigine atmosphrique (Biger, E., 1996). Sajoutent cela les biais introduits par lactivit forestire (djections doiseaux, nids, ruches, etc.) et lapport important en carbone organique (Azimi, S., 2000).

6

7

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Meybeck et al., 2003 ont estim les concentrations naturelles dans la Seine partir de prlvements dans des cours d'eau situs en tte de bassin (50 lithologies homognes). Ces prlvements sont considrs comme relativement prservs de la pollution anthropognique directe. Ce sont les particules sdimentaires en suspension qui ont t analyses. L'analyse se fait aprs une digestion totale triacide (HF/HClO4/HNO3) 200C: la totalit des particules sdimentaires est donc dissoute, ce qui n'est pas reprsentatif de la fraction biodisponible. Les valeurs donnes dans le Tableau 1-6 sont ajustes pour une concentration en aluminium moyenne de 3.3 0.2 % (normalisation selon la taille des particules). Les valeurs de rfrence retenues antrieurement par l'agence de l'eau Seine-Normandie (AESN), galement prsentes dans le Tableau 1-6, sont sensiblement diffrentes. Elles ont t calcules pour l'ensemble du bassin Seine-Normandie par une mthode statistique utilisant la distribution des rsultats par classes de concentrations. Il sagit donc de concentrations ambiantes (pouvant intgrer des apports anthropiques) plutt que de concentrations vritablement naturelles (Pereira-Ramos, 1989).Tableau 1-6 : Concentrations de rfrence en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour la SeineMES (g/g), Meybeck et al., 2003 Cd Hg Pb Ni 0.22 0.05 0.03 0.015 20 3 16 2 MES (g/g), rfrence AESN, Pereira-Ramos, 1989 0-1 0 - 0.1 37.5 12.5

1.1.5.1.2.2 Artois Picardie Le bassin Artois-Picardie draine galement majoritairement des terrains carbonats. Les concentrations de rfrence retenues par l'agence de l'eau Artois-Picardie (AEAP) sont prsentes dans le Tableau 1-7. Elles sont dtermines partir des valeurs les plus basses obtenues parmi les stations de mesures du bassin (asymptote basse de la distribution statistique des concentrations mesures). Il sagit l encore de concentrations ambiantes plutt que de concentrations naturelles.Tableau 1-7 : Concentrations de rfrence en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour le bassin Artois-PicardieCd Hg Pb Ni MES (g/g), rfrence AEAP 1.0 0.2 40 -

1.1.5.1.2.3 Loire Bretagne Dautres bassins ont des gochimies naturelles plus complexes. En effet, en cas de prsence dun gisement ou dun filon mtallifre, la concentration dun mtal peut tre localement importante. Parce que ces sites peuvent prsenter un intrt pour lexploitation minire, le BRGM8 et la SNEA (P)9 ont procd, entre 1975 et 1993, un inventaire des formations gochimiques en France. Des donnes gochimiques sont ainsi disponibles pour les principaux mtaux dintrt mtallurgique (17 lments ; le mercure et luranium nen font nanmoins pas partie). Ces donnes ont t recueillies dans les sdiments de ruisseaux et dans les sols en fond de vallons (voir Tableau 1-8).8 9

Bureau de Recherches Gologiques et Minires Socit Nationale Elf Aquitaine (Ptroles)

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Les rsultats de cet inventaire minier ont t utiliss pour tablir un atlas gochimique du bassin Loire-Bretagne (Leduc et al., 1996). Prs du tiers (235000 points de prlvements) de la superficie du bassin Loire-Bretagne (en priorit dans les massifs cristallins, a fort potentiel mtallique, et au dtriment des bassins sdimentaires, qui sont a priori faiblement minraliss) a t couvert dans le cadre de cette prospection.Tableau 1-8 : Intervalles des concentrations mesures dans les sdiments de ruisseaux et dans les sols en fond de vallons sur le bassin Loire-BretagneSdiments de ruisseaux, sols en fond de vallons (g/g), donnes BRGM & SNEA (P) 1 - 776 6 - 953 1 -213

Cd Pb Ni

Cet inventaire met en vidence une trs grande htrognit gochimique du bassin de la Loire et des concentrations en mtaux qui peuvent tre localement trs importantes. 300 400 sites prsentant des anomalies gochimiques naturelles ont t recenss, notamment lors de la prsence de filons mtalliques, ou encore, l o les roches d'origine ruptive prdominent. Globalement, le plomb et le cadmium (souvent associs sous forme de sulfures dans les minerais) se rencontrent surtout aux bordures du Massif central (nord du dpartement de la Haute Loire, aux bordures nord et nord-est du Massif central) mais aussi dans le Morvan, et dans le Massif armoricain (prs de la limite nord du dpartement de Loire-Atlantique, sur la presqu'le de Plougastel, au nord-est de Saint-Brieuc). Le nickel se retrouve surtout dans le Massif central (coules basaltiques du Velay, Cantal, Chane des Puys), dans les roches volcaniques du Tertiaire et du Quaternaire (hauts bassins de la Loire et de l'Allier), la bordure est du Morvan, sur la rive droite du Maine, au sud-est de la zone BretagneVende. Mais il est difficile de synthtiser les rsultats de cette tude et de donner des tendances globales. Les concentrations mesures peuvent varier fortement, et ce, l'chelle du kilomtre. Ainsi, par exemple, des concentrations en plomb jusqu' 953 g/g ont t mesures dans des roches non mtamorphiques du Palozoque infrieur du Massif Armoricain. Pourtant la concentration mdiane parmi les 22 475 prlvements effectus dans ce type de roche n'est que de 28 g/g. A contrario, la concentration mdiane parmi les 1835 prlvements effectus dans les roches du Mzoque (Trias, Jurassique et Crtac) est de 78 g/g, mais la concentration maximale mesure dans ce type de roche n'excde pas 395 g/g. 1.1.5.1.2.4 Garonne Pour le bassin de la Garonne, des enrichissements mtalliques spcifiques certaines formations gologiques ont galement t observes localement. Une tude gochimique de ce bassin a t ralise par l'universit Paul Sabatier de Toulouse (Baqu et al., ). Le mercure n'y a pas t considr. L'tude a rvl que les concentrations en mtaux mesures dans les rivires taient principalement induites par la pollution diffuse. Compte tenu de la gologie du bassin, certains sites sont aussi naturellement plus riches en lments mtalliques. Des alluvions anciennes (sur diffrentes strates gologiques anciennes) ont t prleves proximit des rivires. Le Tableau 1-9 donne une ide de la variabilit des concentrations naturelles entre les diffrents sites. Le site de Salat se singularise ainsi par une forte concentration en cadmium et en plomb.

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Tableau 1-9 : Concentrations mesures dans les alluvions anciennes sur le bassin Adour-Garonne.Concentrations dans les alluvions anciennes (g/g) Agout Gers Garonne Brax Garonne Muret Arige (amont) Salat Garonne aval St Gaudens0.6 ; 0.6 29.3 ; 25.4 59.9 ; 52.4

0.7 ; 0.5 0.4 0.6 ; 0.7 0.7 ; 0.5 0.2 ; 0.2 2.1 ; 3.0 Cd 43.6 ; 15.7 20.6 18.6 ; 30.1 30.1 ; 24.6 9.4 ; 16.2 222.2 ; 324.3 Pb 44.9 ; 25 27.7 34.3 ; 45.9 59.3 ; 49.7 32.9 ; 44.5 52.5 ; 52.0 Ni Pour certains sites, les prlvements ont t effectus sur deux strates gologiques (deux valeurs)

1.1.5.1.2.5 Rhin Le Rhin est majoritairement aliment par la fonte des glaciers alpins en t, alors quen hiver ce sont le lessivage des plaines par la pluie et les eaux de ruissellement qui apportent la plus grosse contribution aux eaux du fleuve. Une variation saisonnire de la gochimie du Rhin est ainsi observe (van der Weijden et Middelburg, 1989). Pour ces derniers cas, il est beaucoup plus difficile de choisir des sites de rfrence reprsentatifs de lensemble du bassin et sur lensemble de lanne. Le Tableau 1-10 prsente des valeurs extraites de l'tude de Zuurdeeg et al., 1992. Elles ont t calcules sur la base de MES comprenant 20% de matire organique, et partir de prlvements raliss dans des sdiments datant de l'poque mdivale, proximit d'Utrecht (Pays Bas). Ces valeurs issues de mesures sur sdiments anciens intgrent les concentrations sur une longue priode, ce qui permet de lisser les variations saisonnires. Elles peuvent donner une ide des concentrations naturelles attendues prs de l'embouchure du Rhin, l o les particules sdimentaires sont dilues par des matires faiblement minralises. Mais, il faut probablement s'attendre des concentrations naturelles plus fortes et variables en tte de bassin.Tableau 1-10 : Concentrations de rfrence (nerlandaise) en mtaux dans les matires en suspension (MES) pour le RhinMES (g/g), Zuurdeeg et al., 1992 Cd Hg Pb Ni 0.23 0.15 21 41

1.1.5.1.2.6 Rhne - Mditerrane Il n'y a pas, notre connaissance, d'tudes publies permettant de dfinir des concentrations de fond pour le bassin versant du Rhne. Signalons tout de mme le programme ORME (Observatoire Rgional Mditerranen sur lEnvironnement), en cours, pour lequel des tudes sur la gochimie du bassin versant du Golfe du Lion devraient tre ralises.

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1.1.5.2. 1.1.5.2.1

Modlisation gochimique Apports telluriques

La gochimie dun cours deau, et en particulier les concentrations naturelles en mtaux, sexpliquent, nous lavons vu (Cf. point 1.1.1), en grande partie par lrosion des roches en tte de bassin. La composition naturelle dun fleuve est donc conditionne par la lithologie de son bassin versant, cest dire par la nature gologique des terrains drains par le fleuve. En Grande Bretagne, pour plusieurs bassins versants aboutissant la Mer d'Irlande, Ridgway et al., 2003 ont mis en vidence une trs bonne corrlation entre les concentrations prdites partir de la lithologie et les concentrations mesures dans des cours deau de rfrence, pargns de toute pollution. Les proportions relatives des diffrents lments traces constituent une signature gochimique caractristique dune lithologie. Par des analyses multifactorielles on peut tudier les relations existant entre ces signatures gochimiques et les donnes gologiques, gographiques, etc. et identifier des traceurs caractristiques (Selinus et Esbensen, 1995 ; Rantisch, 2000). Il est ainsi possible de prdire les apports naturels dorigine tellurique (Ridgway et al., 2003) :

dune part en dterminant les signatures gochimiques pour chaque lithologie dun bassin, et dautre part en tenant compte des proportions des diffrents types de lithologies rencontres sur un bassin (pour pondrer leur contribution la gochimie gnrale du cours deau).

Les signatures gochimiques peuvent tre suivies et compares en diffrents points du bassin et au cours du temps. Les excs ventuellement observs entre les concentrations prdites et les concentrations effectivement mesures peuvent tre attribus une influence anthropique. En pratique, il est difficile de recenser toutes les lithologies susceptibles dtre rencontres sur un bassin. De larges variations spatiales sont en effet couramment observes. 1.1.5.2.2 Autres apports

Les traceurs chimiques ou isotopiques permettent didentifier plus particulirement la contribution de certaines sources. Certains lments ou isotopes sont en effet caractristiques dune rgion gologique (Ngrel et al., 2003). Il est galement possible de prendre en compte les apports atmosphriques en analysant les eaux de pluies en diffrents points du bassin versant. La proportion dlments provenant des arosols marins peut tre value en utilisant les chlorures comme traceur (en faisant lhypothse que les chlorures sont exclusivement dorigine marine). On considre que les lments qui ne concordent pas avec les concentrations dans leau de mer sont dorigine anthropique (Markich et Brown, 1998). Par ailleurs, le 7Be peut tre utilis comme traceur de la fraction deau apporte par ruissellement direct. Le 7Be est en effet un lment radioactif naturel produit dans latmosphre et entran par les eaux de pluies. Les apports de 7Be dans les eaux de surface sont donc fonction de lintensit et de la frquence des pluies (Tessier et al., 2002).

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1.2. Evolution des organismes en prsence des mtaux1.2.1. Le caractre essentiel de certains mtaux Les organismes vivants ont volu en prsence des lments mtalliques. Certains mtaux sont mme essentiels aux processus biologiques. Les lments mtalliques ont la proprit de se fixer sur des protines et ainsi de modifier la structure molculaire et le mode d'action de ces dernires. Ces modifications de structure peuvent tre essentielles la bonne fonctionnalit de certaines protines (enzymes, pigments respiratoires), ou au contraire induire un effet toxique en les inactivant. Les organismes sont capables, dans une certaine mesure, dutiliser et de rguler les concentrations en mtaux qui leur sont essentiels (Cf. partie 1.2.2). Des effets toxiques apparaissent lorsque cette rgulation ne peut plus avoir lieu. Il est important de diffrencier les mtaux qui sont essentiels la vie de ceux qui ne le sont pas ou dont on ne connat pas de proprit vitale pour au moins une catgorie d'organismes. En effet, le caractre essentiel d'un mtal dpend aussi des organismes : un mtal donn pouvant tre essentiel un organisme tout en ne l'tant pas pour d'autres. Le Tableau 1-11 propose une liste des mtaux prsentant un intrt pour les organismes vivants.Tableau 1-11 : Liste (non exhaustive) des lments essentiels et non essentiels et exemples de proprits des lments connus pour leur essentialitProprits connues Impliqu dans le mtabolisme du glucose (insuline) Prsent dans la vitamine B12 intervenant dans la formation de l'hmoglobine Prsent dans les cytochromes et l'hmocyanine, des molcules impliques dans la Cuivre (Cu) respiration cellulaire Fer (Fe) Prsent dans l'hmoglobine pour le transport de l'oxygne Prsent dans la thyroxine et li aux composants assurant le bon fonctionnement du systme Iode (I) thyrodien Rle dans le mtabolisme des sucres (pyruvate carboxylase) Manganse (Mn) Impliqu dans la synthse des acides gras et des glycoprotines Impliqu dans les transferts d'lectrons Molybdne (Mo) La fixation de l'azote est aussi couple une raction au molybdne Nickel (Ni) Composant de l'urase et fait donc partie du cycle du CO2 Slnium (Se) Active la glutathion peroxydase pour l'limination des radicaux libres Rgulation des messages intracellulaires Vanadium (V) Cofacteur d'enzymes impliques dans le mtabolisme nergtique Agent thrapeutique possible pour les diabtes Ncessaire au fonctionnement des dshydrognases, aldolases, isomrases, transphosphorylases, ARN et ADN polymrase, anhydrase carbonique, Cu-Zn superoxyde Zinc (Zn) dismutase (et autres) Mtaux non essentiels : Antimoine (Sb) ; Argent (Ag) ; Arsenic (As) ; Cadmium (Cd) ; Etain (Sn); Mercure (Hg) ; Plomb (Pb) ; Thallium (Tl) Mtal Chrome (Cr) Cobalt (Co)

Les lments prsents dans le Tableau 1-11 ont t ajouts la liste des lments essentiels au fur et mesure de la dcouverte de leur implication au cur de processus biologique, c'est dire de manire exprimentale. Une approche empirique a galement t mise au point pour prdire le caractre d'essentialit d'un lment. Ce systme a t ralis suivant une dmarche similaire celle adopte en son temps par les chimistes Mendeleyev et Meyer (1869) lors de l'invention de leur classement priodique des lments, bas sur un certain ordre dans l'volution de leurs proprits caractristiques. Les proprits dun mtal sont conditionnes en particulier par sa charge ionique, son lectrongativit (qui influe sur lassociation avec dautres lments), son rayon atomique (encombrement strique). Les mmes variations que l'on observe pour ces caractristiques physiques et chimiques influent aussi sur les proprits biologiques, la forme chimique et les fonctions possibles des lments. Aprs plusieurs essais de classification biologique des lments 19/85

Mtaux essentiels

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pour les ions mtalliques (Nieober et Richardson, 1980) un systme biologique des lments a t mis au point : Biological System of the Elements ou BSE (Markert, 1994). De cette premire vraie tentative de systmatisation des lments selon leurs fonctions biologiques rsulte le diagramme suivant (Figure 1-2).

Figure 1-2 : Classement biologique des lments chimiques (Biological System of the Elements, extrait de Markert, 1994)

Les donnes ayant servies la ralisation de cette premire version du BSE sont varies. Elles proviennent pour la plupart de l'observation : des caractristiques chimiques des lments, des fonctions physiologiques de certains lments de la manire dont les lments et leurs composs sont incorpors aux matrices vivantes.

Les diffrentes configurations dans le BSE permettent de supposer, a priori, l'essentialit de certains lments tels que le brome (Br), le strontium (Sr), le csium (Cs), le germanium (Ge) ou le tellure (Te). Ceux-ci seront sans doute reconnus comme essentiels dans le futur, au moins pour certains groupes d'organismes. De la mme manire, la non essentialit d'autres lments peut galement tre souponne. C'est le cas du thallium (Tl), du plomb (Pb), du mercure (Hg) et du cadmium (Cd), qui n'ont rvl que des effets toxiques sur les espces vivantes. Les mtaux essentiels peuvent aussi tre dsigns sous lappellation doligo-lments. Les oligolments rpondent aux critres fixs par Cotzias, 1967 : Etre prsents dans les tissus vivants une concentration relativement constante, Provoquer, par leur absence de l'organisme, des anomalies structurelles et physiologiques voisines chez plusieurs espces, Prvenir ou gurir ces troubles par l'apport de ce seul lment.

Comme tout compos chimique, l'effet de l'apport d'un mtal dpend de la dose. Mais lorsque le mtal est essentiel, aussi bien sa carence que son excs sont dommageables. 20/85

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Figure 1-3 : Evolution de l'activit biologique en fonction des concentrations en mtaux essentiels (A) et non essentiels (B)

La Figure 1-3 illustre la rgulation homostatique qui entre en jeu chez les organismes vivants la fois pour les mtaux essentiels (A) et non essentiels (B). Pour ces deux groupes, des effets nfastes sur l'activit biologique apparaissent lorsque ce processus de rgulation sature. Pour les mtaux essentiels, ces effets nfastes interviennent la fois en prsence de trop faibles ou de trop fortes concentrations dans l'environnement alors que, dans le cas des mtaux non-essentiels, seules des concentrations environnementales excessives conduisent l'apparition d'effets. 1.2.2. Acclimatation, adaptation, slection 1.2.2.1. Acclimatation

Les organismes sont, dans une certaine mesure, capables de dvelopper une acclimatation physiologique pour faire face une exposition continue aux mtaux. Des protines appeles mtallothionines ont la proprit de chlater et de complexer les mtaux. La synthse de ces protines est induite par une augmentation de lexposition aux mtaux. Ces protines assurent ainsi la rgulation des concentrations intracellulaires de diffrents lments mtalliques essentiels ou non (Hamilton et Mehrle, 1986). Les mtallothionines sont dailleurs utilises comme biomarqueurs, indices prcoces dune pollution aux mtaux lourds. Les mtaux peuvent aussi tre squestrs au sein de granules ou vsicules (Depledge et Rainbow, 1990). Il faut noter que, si les mtaux ainsi squestrs ninduisent plus deffet toxique pour lorganisme (ne sont plus biodisponibles), ils ne sont pas pour autant ncessairement excrts, et peuvent saccumuler dans les tissus (McGeer et al., 2003). Ils peuvent ainsi reprsenter un danger pour les prdateurs. 1.2.2.2. Slection et adaptation.

Les mcanismes physiologiques de dtoxication dcrits prcdemment sont nanmoins saturables. Lorsque lexposition aux mtaux est excessive, des effets dltres apparaissent. Les espces sont plus ou moins tolrantes aux variations de leur environnement. Certaines espces, dites stnoces, sont sensibles de faibles variations des conditions environnementales. Au contraire, les espces dites euryces tolrent des variations importantes. Les espces stnoces sont le plus souvent des espces trs bien adaptes leur environnement, optimises pour vivre dans une niche cologique particulire. Au contraire les espces euryces sont le plus souvent des espces opportunistes et invasives avec une stratgie de colonisation rapide. Toutes modifications (augmentation ou diminution) des concentrations en mtaux dans le milieu sont ainsi susceptibles 21/85

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de porter atteinte la biodiversit des milieux. Cest sur ce principe que sont fonds les bioindicateurs cologiques : linventaire et les mesures dabondance des organismes aquatiques indicateurs de pollution prsents dans le milieu permet de diagnostiquer le niveau de contamination de ce milieu (Vindimian et Garric, 1993). Pour une mme espce, des diffrences interindividuelles sont galement observes. Les individus les plus sensibles sont dabord affects alors que les plus rsistants (cest dire ceux qui sont capables de survivre et de se reproduire) sont slectionns. En accord avec le paradigme darwinien, cette diffrence de sensibilit nest pas induite pas le stress toxique ( lexception possible des composs mutagnes) mais est prexistante. Elle est hrditaire et sexplique par les diffrences de gnotype des individus (Cf. exprience classique de Luria et Delbrck, 1943). Les gnotypes rsistants sont favoriss et finissent par devenir majoritaires au sein de la population. Sur le long terme, la population peut ainsi sadapter progressivement en raction la pression slective. Toutefois, la diversit gntique de la population soumise une pression slective trop forte est appauvrie. Les populations avec une faible diversit gntique sont vulnrables et moins souples face un nouveau stress : tous les individus de la population ragiront dune faon similaire. 1.2.2.3. Implications

Il semble que les organismes vivant dans des rgions avec une concentration de fond leve en un mtal y sont gnralement comparativement moins sensibles que les organismes qui vivent au sein de milieux pauvres en lments mtalliques (pour une revue bibliographique voir Klerks et Weis, 1987 ; voir aussi articles rcents tels que McLaughlin et Smolders, 2001 ; Barata et al., 2002). Toutefois, ce nest pas systmatiquement le cas. Par ailleurs il est possible que les rsultats publis ne soient pas reprsentatifs de la situation relle : les rsultats ngatifs sont jugs moins intressants sur le plan scientifique et ne sont pas ncessairement publis (Klerks et Weis, 1987). Il faut aussi rappeler que la pression induite par la pollution anthropognique sopre sur une chelle de temps beaucoup plus courte que celle ncessaire aux populations pour sadapter (au moins en ce qui concerne les macro-organismes). Dautre part, nous avons vu que les populations spcifiquement adaptes une contrainte donne sont souvent plus vulnrables face aux variations de leur environnement, par exemple lors de pollutions multiples (Klerks et Moreau, 2001). Il convient donc de ne pas surestimer les capacits dadaptation des espces. Quelques lments retenir

Les lments mtalliques sont des constituants naturels de lcorce terrestre qui peuvent se dissminer naturellement dans le milieu aquatique. Certains cosystmes peuvent donc tre naturellement trs riches en lments mtalliques et abriter des communauts despces qui y sont adaptes. Sous leffet de la pression des activits anthropiques (activits industrielles, agricoles), la contamination mtallique des milieux aquatiques peut augmenter significativement. Au-del dune certaine concentration (parfois trs faible) dans le milieu, les mtaux ont des effets nfastes. Les concentrations naturelles varient en fonction de la nature gologique du milieu. Il est ainsi difficile, pour les cosystmes affects par la prsence de mtaux, d'estimer la part de mtal d'origine naturelle. Certains mtaux prsentent la particularit dtre, pour les organismes vivants, la fois essentiels mais aussi toxiques au-dessus dune certaine concentration. Les seuils dessentialit et de toxicit peuvent tre trs variables suivant les espces. Les organismes vivants sont adapts aux concentrations naturelles en mtaux prsentes dans leur environnement. La sensibilit des diffrentes espces peut ainsi tre trs variable entre les rgions. De mme, les organismes sauvages peuvent avoir des sensibilits trs diffrentes de ceux tests en laboratoire.

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2. Comportement des mtaux et biodisponibilitDans les milieux aqueux, les mtaux sont prsents sous diffrentes formes chimiques. Les lments et composs chimiques inorganiques (anions majeurs tels que les carbonates, chlorures et hydroxydes) et organiques (e. g. composs formant la matire organique dissoute) prsents dans ces milieux constituent des ligands capables de complexer les ions mtalliques. C'est ce que l'on appelle complexation inorganique dans le premier cas (voir point 2.1) et complexation organique dans le second (voir point 2.2). La Figure 2-1 illustre les interactions entre un ion mtallique libre (M2+) et les ligands avec lesquels des complexes peuvent se former.

Figure 2-1 : Phnomnes de complexation des mtaux dans l'eau

L'interaction entre les organismes vivants et le mtal dpend entre autres de la forme sous laquelle ce dernier se trouve dans le milieu. Par analogie, on appelle galement complexation avec le ligand biotique la fixation du mtal par les organismes (voir point 2.3). Les phnomnes de complexation faisant intervenir les mtaux sont gouverns par un ensemble de paramtres physico-chimiques. Ceux-ci modifient la spciation des mtaux, c'est dire qu'ils influent sur la rpartition des diffrentes formes chimiques mtalliques, mais agissent galement sur lassimilation par les organismes vivants. Parmi ces paramtres, on peut citer le pH, le potentiel doxydorduction et bien sr la quantit de ligands disponible (aussi appele capacit complexante). Cest ainsi que, dans la plupart des cas, les concentrations mtalliques totales (voir dfinitions dans l'encadr ci-dessous) sont connues pour tre de mauvais indicateurs deffets sur les organismes du compartiment aquatique (Meyer, 2002). Pour quelques mtaux (e. g. Ag, Cd, Cu, Ni, Pb, Zn), les concentrations en ions mtalliques libres ainsi que celles de certains complexes sont, semble-t-il, principalement responsables de la toxicit (Campbell, 1995). Quelques dfinitions : termes frquemment utiliss pour qualifier la fraction des mtaux mesure dans l'eau

Mtal total : quantit totale de mtal, sous toutes ses formes. Le mtal total englobe la fois les quantits fixes sur les particules (mtal particulaire) et celles dissoutes dans le milieu (mtal dissous). Mtal particulaire : quantit de mtal fixe sur des particules retenues par un filtre de 0,45 m. Mtal dissous : quantit de mtal en solution qui nest pas retenue par un filtre de 0,45 m. Mtal libre : espce mtallique la plus simple, sous sa forme ionise (ex : Cu2+), accompagne, en solution aqueuse, de sa sphre dhydratation (ex : Cu(H2O)62+). Les espces libres appartiennent la fraction mtallique dissoute.

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Pour que les mtaux prsents dans les diffrents compartiments de l'environnement aquatique exercent un effet sur les organismes, ils doivent tre sous une forme chimique ayant la capacit datteindre les cibles biologiques. En dautres termes, il est ncessaire quils soient biodisponibles. Certains auteurs considrent quun mtal est biodisponible sil est assimilable par les organismes, pour dautres il faut en plus quil soit susceptible dinduire un effet : Selon Newman et Jagoe, 1994, la biodisponibilit est dfinie comme la possibilit quun contaminant soit assimil et/ou adsorb sur un organisme vivant. Selon Campbell, 1995, un mtal est considr comme biodisponible quand il est assimil par un organisme et peut entraner un effet sur celui-ci.

Les effets biologiques associs aux mtaux (M) ont souvent t relis la concentration de lion mtallique libre (Mn+) mais aussi celles de certaines formes complexes des ligands inorganiques (Campbell, 1995) et organiques. Les modles mis au point pour valuer la toxicit des mtaux dans des conditions physico-chimiques spcifiques (Biotic Ligand Models) sont d'ailleurs bass sur ce type de relations. Des mthodes danalyse de ces diffrentes formes chimiques10, cest dire dvaluation des concentrations en ions libres et en complexes inorganiques et organiques, sont donc ncessaires une bonne interprtation des effets des mtaux sur les organismes vivants.

2.1. Formation de complexes inorganiques2.1.1. Rappels sur les complexes inorganiques Les mtaux, en solution aqueuse, subissent un phnomne de solvatation. Ils fixent autour de leurs atomes, plus ou moins fortement, des molcules deau. Certains de ces composs ainsi forms peuvent tre stables : les liens entre lion et les molcules deau sont alors de vritables liaisons chimiques. Cest par exemple le cas de lhydrate de cuivre [Cu(H2O)4]2+. Ces hydrates sont des exemples dions complexes : lassociation dun cation mtallique, au centre, et dun certain nombre despces molculaires ou ioniques (les ligands). Les mtaux de transition (e. g. Cu, Zn, Ni, Cr, Au, Ag, Cd, Hg) sont particulirement susceptibles de former des complexes avec des ligands varis (Arnaud, 1997). Un bref rappel sur la formation d'un complexe inorganique partir des mtaux est prsent dans l'encadr ci-dessous.n+ La formation d'un complexe entre un ligand (L) et un cation M peut tre dcrite par l'quation suivante :

Lm + M n + LM n mLa constante de stabilit correspondante est dfinie selon l'quation :

K=

[ LM n + ] [ Lm ][ M n m ]

Parmi les ligands possibles pour les mtaux, on trouve les anions suivants : chlorure (Cl-), bromure (Br-), cyanure (CN-), nitrite (NO2-), carbonate (CO32-), hydroxyde (OH-) etc.

10

A ce sujet, se reporter au rapport technique tablissant une revue des mthodes analytiques de spciation chimique (Monbet and Coquery, 2003).

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2.1.2. Modles de spciation inorganique Les modles de spciation permettent de calculer les parts relatives des diffrentes formes chimiques prsentes dans diffrentes phases (dissoute, adsorbe, solide ou gazeuse). Les calculs sont raliss pour des systmes aqueux naturels ou reconstitus en laboratoire, sous l'hypothse qu'ils soient l'quilibre. Les donnes indispensables la modlisation se composent en gnral des concentrations totales dissoutes des diffrentes espces (mtaux tudis, ions majeurs) ainsi que d'autres donnes caractrisant le milieu d'tude comme le pH, le pe (potentiel rdox) ou encore la prsence de composs solides pouvant se solubiliser avant qu'un quilibre ne soit atteint. De nombreux exemples de ces modles sont disponibles dans la littrature et plusieurs programmes informatiques sont mis la disposition des utilisateurs. Parmi les modles les plus couramment utiliss, on peut citer MINEQL+ (Schecher et McAvoy, 1998), MINTEQA2 (Allison et al., 1991 ; HydroGeoLogic, 1998) ou encore PHREEQC version 2.8 (Parkhurst et Appelo, 1999).11 Ce type de programmes de calcul fait partie du package informatique des Biotic Ligand Model . Ils sont chargs de calculer la rpartition des diffrentes formes chimiques d'un mtal, dans un systme donn. Cette rpartition est ensuite reprise pour servir de donne d'entre aux autres modules de calcul.

2.2. Complexation avec la matire organiqueLa place importante accorde, dans ce rapport, aux phnomnes de complexation des mtaux avec la matire organique est proportionnelle linfluence que ces phnomnes ont sur la biodisponibilit des mtaux. Il est donc important de dfinir la matire organique, de prsenter les moyens de la quantifier et de la qualifier avant de sintresser la manire dont elle est prise en compte dans le dveloppement de modles type BLM . Quelques sigles

COD : carbone organique dissous. La mesure du COD permet de quantifier la matire organique dissoute. COP : carbone organique particulaire. La mesure du COP permet de quantifier la matire organique en suspension. COT : carbone organique total, somme des fractions particulaire et dissoute. Cette mesure permet de quantifier la totalit de la matire organique. MO : matire organique, terme gnrique. MOD : matire organique dissoute.

2.2.1. Gnralits sur la matire organique dissoute Les matires organiques dissoutes (MOD) sont souvent responsables de la couleur, du got ou de l'odeur de l'eau. Mais elles interviennent aussi au sein de diffrents processus biogochimiques en tant que source de carbone et d'nergie pour les organismes vivants. Elles agissent galement sur les niveaux d'oxygne dissous, d'azote, de phosphore, de sulfures, de mtaux traces ou encore d'acidit. La matire organique dissoute possde souvent des caractristiques similaires l'humus du sol. De ce fait on estime, pour simplifier, qu'environ 50% de la MOD d'une rivire type est constitue de substances humiques. Ce sont des composs macromolculaires complexes produits par la dgradation biologique et chimique des rsidus de plantes et d'animaux. En fonction du milieu aquatique tudi, ces substances se composent de polysaccharides, d'acides organiques hydrophiles, d'acides gras aliphatiques, de protines et de lignine en diffrentes proportions. Les substances humiques reprsentent entre un tiers et la moiti du carbone organique dissous (COD) dans les eaux, en milieu naturel (Ma et al., 2001).11

Comprenant galement les programmes de complexation avec la matire organique et ceux spcifiquement ddis aux interactions entre le mtal et les organismes vivants (voir points 2.2 et 2.3).

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Les substances humiques peuvent tre fractionnes en plusieurs sous ensembles : les acides humiques (AH), les acides fulviques (AF) et les composs hydrophiles (Hy) (voir Figure 2-2).

Figure 2-2 : Mthodologie de fractionnement de la matire organique dissoute issue d'eaux du milieu naturel (d'aprs Ma et al., 2001)

Les concentrations en matires organiques dissoutes, leurs compositions ainsi que leurs caractristiques chimiques sont extrmement variables et dpendent principalement des sources de matires organiques (source allogne - d'origine pdologique - ou autogne - produits par les macrophytes, les algues ou les bactries, etc.), de la temprature, de la force ionique, du pH, de la composition de l'eau en cations majeurs, de la qualit des couches superficielles des sdiments ou encore de l'activit photolytique et microbiologique. La MOD, dont les diffrents composants prsentent une masse molaire comprise entre quelques centaines et 100 000 Da12, est un mlange complexe de composs organiques aromatiques et aliphatiques accueillant des groupements amide, carboxylique, hydroxyle, ctone, etc.

Le dalton est une unit de masse dfinie de la faon suivante : le dalton est la douzime partie de la masse d'un atome de 12C. De cette dfinition dcoule que la masse molaire du 12C est 12 uma (unit de masse atomique) ou 12 g.mol-1. Soit 1 Da = 1 g.mol-1.

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2.2.2. Ractions de complexation avec les mtaux La matire organique (MO) est connue pour jouer un rle important dans la chimie des polluants puisqu'elle a la capacit de former des complexes avec les mtaux. Les mtaux peuvent tre complexs par les substances composant la MO et plus particulirement par les sites carboxyliques (groupements contribuant la majorit des sites de complexation), azots et sulfurs qui s'y trouvent. La capacit totale de fixation des ions mtalliques par la MO dans les eaux a t estime entre 200 et 600 mol.g-1. Mme si certains mtaux sont connus pour se fixer prfrentiellement sur certains sites (cas du cuivre avec les groupes carboxyles ou bien le mercure pour les groupements sulfurs), la plupart des lments entrent en comptition pour l'accs aux sites de complexation de la MO. Une squence de stabilit des complexes a t tablie, pour les sols, par Irving-Williams (1948), cit dans Frstner et Wittman, 1983. L'ordre de stabilit dcroissant est le suivant : Pb > Cu > Ni > Co > Zn > Cd > Fe > Mn > Mg. Certaines tudes ont par ailleurs montr que les fortes concentrations en certains mtaux (Al et Fe) empchaient en partie des mtaux moins prsents de se fixer la matire organique (Takacs et al., 1999). Pour mieux apprhender les mcanismes de la complexation des mtaux par la matire organique, il est ncessaire, d'une part, de pouvoir la caractriser et la quantifier et, d'autre part, de connatre prcisment la nature des ligands (sites carboxyliques, protines, etc.) impliqus dans ce type de ractions.

Des outils analytiques ont t dvelopps de manire dfinir qualitativement et quantitativement la MO. La partie 2.2.3 en donne un aperu.

2.2.3. Analyse et mthodes de mesure Il existe deux principales techniques de caractrisation de la MOD selon que l'on s'intresse aux concentrations prsentes dans l'eau (caractrisation globale - sparation dissous / particulaire) ou bien aux diffrentes fractions qui la compose (caractrisation qualitative). 2.2.3.1. Mesure des concentrations en matire organique

La mesure du carbone organique total (COT) permet de prendre en compte et de quantifier la totalit de la MO d'un systme aquatique analys, la MO tant constitue en grande partie d'atomes de carbone. Il est admis que cette mesure reflte la concentration en matires organiques (MO), pour les milieux naturels. En effet, les contaminants organiques dans les systmes naturels reprsentent normalement une faible fraction du COT. Cette mesure du COT peut ensuite tre subdivise en diffrentes fractions selon les objectifs des tudes. Les mesures du carbone organique dissous (COD) et de sa fraction associe, le carbone organique particulaire (COP), permettent d'accder des informations plus oprationnelles dans certains cas, i.e. l'utilisation de la concentration en COD pour valuer les phnomnes de complexation des mtaux avec la MOD. La fraction de COP reprsente en gnral moins de 10% du COT mais cette proportion augmente avec la taille et le dbit d'une rivire par exemple (et donc avec la concentration en matires en suspension dans l'eau). Les concentrations en COD varient entre 0,1 mg/L dans les eaux souterraines et 50 mg/L dans les marais. Ces concentrations ne dpendent pas uniquement de la nature des bassins versants mais sont galement sujettes aux variations saisonnires et aux apports de MO lors de blooms algaux13 par exemple.

13

Prolifration d'algues, par exemple lors d'une eutrophisation (processus naturel d'enrichissement en lments minraux nutritifs des eaux d'un cosystme).

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2.2.3.2.

Caractrisation qualitative de la matire organique dissoute par fractionnement

La MOD est constitue d'un ensemble vari de composs chimiques. Ceux-ci prsentent des affinits diffrentes pour les mtaux avec lesquels ils peuvent former des complexes. C'est pourquoi il est galement important de procder une analyse qualitative de la MOD. Les diffrentes mthodes et techniques employes pour y parvenir sont prsentes dans cette partie. Fractionnement par rsines adsorbantes : la MOD est couramment caractrise par son fractionnement en diffrents sous-ensembles au moyen de rsines adsorbantes. L'utilisation de rsines XAD-8 par exemple, est frquente pour l'isolement des substances humiques (acides fulviques et humiques). Cette tape est la base de la dtermination d'un rapport caractristique de la MO : la distribution des fractions humique / non-humique. Une autre technique de fractionnement base de rsines est aussi utilise. Celle-ci met en uvre deux colonnes contenant des rsines, disposes en srie. Ce systme permet de sparer la MOD en diffrentes catgories : hydrophobe, hydrophile, acide, basique et neutre. Un fractionnement supplmentaire de la partie hydrophile, l'aide d'une troisime rsine, permet de diffrencier la fraction charge de la fraction neutre. Le schma suivant (Figure 2-3) prsente les diffrents niveaux de caractrisation de la MOD.

Figure 2-3 : Classification de la matire organique dissoute (d'aprs Leenheer et Crou, 2003)

Analyses spectrophotomtriques : des mesures spectrophotomtriques, telles que l'absorbance ultraviolet (UV) ou encore la fluorescence, viennent complter la caractrisation de la MOD. L'absorption dans les domaines du visible et de l'ultraviolet des eaux de surface est principalement imputable aux groupements aromatiques chromophores prsents sur les molcules (acides humiques pour la plupart) composant la matire organique dissoute. Les molcules d'acides humiques sont aussi connues pour tre responsables de la fluorescence des eaux naturelles. Du fait d'un grand nombre de groupes chromophores et de l'impossibilit de dtecter des rponses spcifiques permettant de les caractriser, la plupart des recherches menes en milieu aquatique se sont limites des mesures de l'absorbance 254 nm ; cette mesure servant d'indicateur de la concentration en MO. Un autre indicateur, l'absorbance UV spcifique (SUVA ou SUVA254 : Specific UV Absorbance) se dfinit comme le rapport de l'absorbance de l'chantillon 254 nm et de la concentration en COD. Des eaux ayant un fort SUVA sont gnralement riches en substances 28/85

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hydrophobes telles que les acides humiques (composs aromatiques). Il faut cependant noter que de faibles concentrations en COD associes de fortes concentrations en nitrates peuvent fausser ce type de mesure. Enfin, mme si seulement moins de 1% des groupes aromatiques inclus dans la MO sont fluorophores, les techniques d'analyse spectroscopique de la fluorescence en trois dimensions constituent un outil intressant dans la mesure o elles sont environ un ordre de grandeur plus sensibles que les techniques d'absorption UV. Nanmoins, l'utilisation de la mthode par absorption UV 254 nm n'est pas recommande pour l'estimation de la distribution des masses molaires des diffrents constituants de la MO. En effet, cette technique ne permet la dtection que d'un nombre limit de composs (chromophores) comme on l'a vu ci-dessus ; de plus l'absorbance n'est pas homogne d'un compos dtect l'autre ce qui conduit en fin de compte la surestimation des substances humiques par rapport aux autres composants de la M