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  • Travail, formation et recherche

    61 La Vie conomique Revue de politique conomique 6-2003

    Les errements de la mondialisation

    Stiglitz rappelle au dbut de son ouvrageque la mondialisation a apport dimmen-ses bienfaits. Cest sur elle en particulier quelAsie orientale a fond son succs.Pourtant, siceux qui la vilipendent ngligent trop souventses avantages, ceux qui la louent sans nuancesont tout autant dans lerreur.Dans le chapitreintitul Qui a perdu la Russie?, Stiglitz rap-pelle ainsi que la mondialisation et la transi-tion vers lconomie de march nont produitles effets escompts ni en Russie ni dans laplupart des autres conomies anciennementplanifies. LOccident avait promis ces paysque le nouveau systme conomique allait leurapporter une opulence sans commune me-sure. Il leur a apport une pauvret sans pr-cdent.

    Selon Stiglitz, le problme nest donc pas lamondialisation mais la faon dont elle est g-re, en particulier par les institutions deBretton Woods (FMI, Banque Mondiale etOMC) qui en fixent les rgles du jeu.Elles lonttrop souvent appliqu en fonction des seulsintrts des pays industrialiss. Lauteur rap-pelle ainsi juste titre que les pays occidentauxont refus de laisser les produits des pays lesplus pauvres accder leurs marchs tout eninsistant pour quils ouvrent les leurs aux ex-portations des pays dvelopps. Les banquesoccidentales ont galement tir profit de las-souplissement du contrle du march des ca-pitaux en Amrique latine et en Asie. Ce sontces mmes rgions qui ont ensuite souffert lespires maux lorsque les capitaux spculatifs quiy avaient afflu sen sont brusquement retirs.Ce reflux a laiss derrire lui des devises effon-dres et des systmes bancaires terriblementaffaiblis.

    Une ncessaire intervention de ltat

    Pour Stiglitz, les institutions financiresinternationales ont une vision de la mondiali-sation trs trique, fonde sur lide que lemarch fonctionne toujours parfaitement.Or,la recherche conomique a dmontr au coursdes trente dernires annes que dans certainescirconstances, en particulier lorsque linfor-mation est imparfaite, le mcanisme mar-chand est mis en chec. Ltat doit alors inter-venir pour amliorer lallocation des

    Le conseil de lecture en politique conomique

    Joseph E. Stiglitz: La grande dsillusionAujourdhui, la mondialisation,

    a ne marche pas. a ne marche

    pas pour les pauvres. a ne mar-

    che pas pour lenvironnement.

    a ne marche pas pour la stabilit

    de lconomie mondiale.

    Lauteur de ces lignes? Le profes-

    seur Joseph Stiglitz, prix Nobel

    dconomie et ancien conseiller

    de Bill Clinton. Jusquen novem-

    bre 1999, il a aussi assum la

    fonction dconomiste en chef et

    de vice-prsident de la Banque

    mondiale. Des rfrences im-

    pressionnantes pour un ouvrage

    que tout conomiste se doit

    davoir lu. Ce livre nest toutefois

    pas un plaidoyer contre la mon-

    dialisation mais sur la faon dont

    elle est gre.

    Pr Yves FlckigerProfesseur au dpar-tement dconomiepolitique de luniversitde Genve

    Le livre

    Joseph E. Stiglitz, La grande dsillusion, d. Fayard,Paris, 2002. dition originale: Globalization and Its Discontents, W.W. Norton, New York, 2002

    ressources et corriger les dfaillances du mar-ch, ce que nombre dconomistes bien pen-sants oublient.

    Stiglitz rappelle dailleurs que dans tous lespays qui ont russi leur dveloppement co-nomique, aux tats-Unis comme en Europeou en Asie, ltat sest charg de corriger leslacunes du march. Il a assur tous une ins-truction de qualit et forg une grande partiedes infrastructures, notamment institution-nelles, ncessaires une allocation efficace desressources. Il a rglement le secteur financierafin que les marchs des capitaux fonction-nent de manire optimale. Il a cr des filets descurit pour les plus dmunis et il a contribuau dveloppement technologique. Or toutesces leons tires de lhistoire conomique despays dvelopps semblent avoir t perdues.Les institutions financires internationalesexigent aujourdhui une ouverture incondi-tionnelle des pays en dveloppement sans leurlaisser le temps de mettre en place les infra-structures ncessaires une ouverture profi-table tous.

    travers une analyse pertinente des checsqui ont marqu la transition des anciens payscommunistes et des erreurs commises par leFMI lors de la crise asiatique, Stiglitz numreles principes fondamentaux qui devraient lavenir guider les politiques menes par lesorganisations internationales. Car, comme ille dit si bien: Si nous demeurons incapablesde tirer les leons de nos erreurs, si la mondia-lisation reste gre comme par le pass, non seu-lement elle nengendrera pas le dveloppementespr mais elle continuera de rpandre la pau-vret et linstabilit (provoquant une) hos-tilit croissante envers la mondialisation. Uneconclusion forte,base sur une dmonstrationconvaincante, qui ne devrait laisser personneindiffrent.