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Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2010 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 7 juil. 2021 05:39 Lien social et Politiques Vieillissement et pratiques sportives : entre modération et intensification Aging and sports: Between moderation and intensification Pia-Caroline Hénaff-Pineau Vieillir pose-t-il vraiment problème ? Numéro 62, automne 2009 URI : https://id.erudit.org/iderudit/039315ar DOI : https://doi.org/10.7202/039315ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Lien social et Politiques ISSN 1204-3206 (imprimé) 1703-9665 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Hénaff-Pineau, P.-C. (2009). Vieillissement et pratiques sportives : entre modération et intensification. Lien social et Politiques,(62), 71–83. https://doi.org/10.7202/039315ar Résumé de l'article Cet article propose une analyse sociologique des transformations des pratiques sportives avec l’avancée en âge. Si le vieillissement semble inexorablement se traduire par une réduction des activités, de plus en plus nombreux sont les seniors, même âgés, qui persistent dans une pratique physique ou sportive, quelquefois éloignée de la norme médicale de modération. Une enquête par entretiens menée auprès de 124 seniors, hommes et femmes, âgés de 50 à 89 ans, pratiquant notamment des gymnastiques d’entretien, des courses de longue durée, du tennis, permet de mettre en évidence une typologie des trajectoires sportives et des stratégies contrastées d’adaptation au vieillissement, entre économie et surenchère d’efforts.

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  • Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2010 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation desservices d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politiqued’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/

    Cet article est diffusé et préservé par Érudit.Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé del’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec àMontréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.https://www.erudit.org/fr/

    Document généré le 7 juil. 2021 05:39

    Lien social et Politiques

    Vieillissement et pratiques sportives : entre modération etintensificationAging and sports: Between moderation and intensificationPia-Caroline Hénaff-Pineau

    Vieillir pose-t-il vraiment problème ?Numéro 62, automne 2009

    URI : https://id.erudit.org/iderudit/039315arDOI : https://doi.org/10.7202/039315ar

    Aller au sommaire du numéro

    Éditeur(s)Lien social et Politiques

    ISSN1204-3206 (imprimé)1703-9665 (numérique)

    Découvrir la revue

    Citer cet articleHénaff-Pineau, P.-C. (2009). Vieillissement et pratiques sportives : entremodération et intensification. Lien social et Politiques,(62), 71–83.https://doi.org/10.7202/039315ar

    Résumé de l'articleCet article propose une analyse sociologique des transformations des pratiquessportives avec l’avancée en âge. Si le vieillissement semble inexorablement setraduire par une réduction des activités, de plus en plus nombreux sont lesseniors, même âgés, qui persistent dans une pratique physique ou sportive,quelquefois éloignée de la norme médicale de modération. Une enquête parentretiens menée auprès de 124 seniors, hommes et femmes, âgés de 50 à 89ans, pratiquant notamment des gymnastiques d’entretien, des courses delongue durée, du tennis, permet de mettre en évidence une typologie destrajectoires sportives et des stratégies contrastées d’adaptation auvieillissement, entre économie et surenchère d’efforts.

    https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/https://www.erudit.org/fr/https://www.erudit.org/fr/https://www.erudit.org/fr/revues/lsp/https://id.erudit.org/iderudit/039315arhttps://doi.org/10.7202/039315arhttps://www.erudit.org/fr/revues/lsp/2009-n62-lsp3629/https://www.erudit.org/fr/revues/lsp/

  • Alors que l’espérance de vie àla naissance en France a franchidepuis 2004 le seuil de 80 ans(Pison, 2005), la question desconditions de santé et des modesde vie de cette nouvelle tranchede vie représente indéniablementle défi social du XXIe siècle. Car sivivre plus longtemps apparaîtcomme une victoire de l’humanitédans la poursuite du «†mythe deMathusalem†» (Bois, 2001), poli-tiques, démographes et écono-mistes s’accordent fréquemment àvoir dans le déséquilibre annoncéentre jeunes et vieux ou entreactifs et inactifs une menace pourle système de protection sociale,voire le déclin des sociétés vieillis-santes et nourrissent le «†mythe dupéril vieux†»1. L’inquiétude sur lescoûts sociaux de cette longévitécroissante aboutit toujours à laquestion cruciale†: vivre vieux,certes, mais dans quel état†?

    À l’heure actuelle, les poli-tiques publiques de la santé et dela vieillesse s’emparent de l’acti-vité physique pour constitueravec la nutrition «†le socle d’unebonne sant醻 (INPES, 2004) àtous les âges de la vie, et tous lesprogrammes internationaux etnationaux du «†bien vieillir†»2 pro-meuvent un mode de vie actifpour les personnes âgées. Cepen-dant les activités physiques etsportives (APS)3 pour les seniors4

    se trouvent au cœur de plusieursparadoxes.

    Vieillir est un processus quis’entend communément commeun affaiblissement des fonctionset des facultés, et une réductiondes activités sous l’effet de l’âge.Les pratiques physiques n’échap-pent pas à cette tendance commele révèlent toutes les grandesenquêtes. Le monde du sport,dans lequel un trentenaire est déj૆vieux†», symbolise indéniable-

    ment la jeunesse. Pourtant de plusen plus nombreux, les seniors per-sistent dans des activités phy-siques jusqu’à un âge avancé.Quelle évolution des pratiquesphysiques des seniors se dessinedepuis une vingtaine d’années†?Que savons-nous de ces sportifsâgés qui bouleversent le jeunismeentourant le sport†? Faut-il des dis-positions particulières pour devenirou rester un sportif avec l’avancéeen âge†? Et quelles dispositionspour quelle(s) sportivité(s)†?

    Les représentations de lavieillesse et du vieillissement dontle senior est porteur contribuent àforger cette sportivité en mêmetemps qu’elles en sont la consé-quence. Parce que les liens entrel’exercice physique, la santé et levieillissement sont complexes etreposent sur des perceptionsambivalentes des effets de l’exer-cice physique, l’engagement spor-tif des seniors relève selon nous de

    Lien social et Politiques, 62, Vieillir pose-t-il vraiment problème ? Automne 2009, pages 71 à 83.

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  • l’articulation de plusieurs niveauxde représentations.

    D’une part, si le vieillissementn’est pas une maladie, encore fau-drait-il qu’il en soit exempt le pluslongtemps possible. L’exercicephysique est-il perçu comme unfacteur de fragilisation ou aucontraire de fortification de lapersonne âgée†? Alors que lavieillesse a rimé pendant dessiècles avec repos, inactivité,immobilité, appliquant les pré-ceptes d’une hygiène qui ne dila-pide pas les forces dans l’effortphysique, les dernières décenniesvoient les exhortations à «†vieillirjeune†» se multiplier et le devoirde «†bien bouger pour bienvieillir†» s’affirmer. Cette récenteinjonction à adopter une hygiènequi entraîne à l’effort commeremède moderne de bonne santéet de longévité sans dépendanceest notamment illustrée par lePasseport pour une retraite activeremis à chaque nouveau retraitéfrançais ou par le plan québécois2002 de Kino-Québec intituléL’activité physique déterminant dela qualité de vie des personnes de65 ans ou plus. Cependant, si lesavis sur les bienfaits de l’exercicephysique deviennent consensuels,

    la nature de l’effort préconisédonne lieu à de nombreux débats.La norme médicalisée qui dominemassivement en France conseilledes activités physiques modéréesqui doivent respecter la règle des3 R†: raisonnée, régulière, raison-nable. La médicalisation de l’acti-vité physique normalise nonseulement la dépense physiqueque les seniors doivent libérerchaque jour mais aussi le typed’activité. Entre la prescription de30 minutes d’activités modéréesquotidiennes et la proscriptiondes activités «†à risque†», toutes lesAPS n’ont pas le même statut. Or,les activités que les seniors prati-quent ne s’inscrivent pas toujoursdans cette norme du «†ni trop, nitrop peu†». Un centenaire n’a-t-ilpas couru l’édition 2008 du mara-thon de Londres†?

    D’autre part, et comme l’a déjàévoqué R. Feillet, «†les activitéssportives risquent d’accentuer laconscience de vieillir†» (1997†: 35).L’expérience de la pratique phy-sique repose sur le paradoxed’amplifier la perception du pro-cessus de dégradation physique enmême temps qu’elle contribue à yrésister et peut-être à repousser lasensation de vieillir. Probable-ment, pour nombre de sportifs debon niveau, le sport a été la pre-mière expérience du vieillisse-ment à un âge où le regard socialles classait encore parmi lesjeunes. Mais à l’inverse, les activi-tés physiques constituent desmoyens supposés efficaces pourralentir le vieillissement. Peut-êtremême participent-elles à la sensa-tion de ne pas vieillir.

    C’est pourquoi, dans ce jeu detensions, la pratique sportive per-met de rendre compte de formes

    de vieillir plurielles et constitueun analyseur particulièrementpertinent du processus de vieillis-sement. Notre propos sera menéen deux temps†: un premier tempsqui met en évidence l’évolutionquantitative de l’engagementsportif des seniors en France cesvingt dernières années et leursprincipales caractéristiques socio-culturelles, et un deuxième temps,le noyau central de notre travailsociologique, qui propose uneanalyse qualitative des trajec-toires sportives de seniors sportifset des stratégies de transforma-tions de leur sportivité avecl’avancée en âge, articulées avecleurs perceptions de la vieillesseet du vieillissement.

    Qui sont les seniors sportifs ?

    Ignorée des grandes enquêtessur les pratiques physiques desFrançais, la pratique physique despersonnes âgées de 50 ans et plussuscite peu d’analyses de la partdu monde du sport. Il fautattendre 2002 pour trouver dansla publication des résultats del’enquête Les pratiques sportivesen France en 2000, menée par leministère des Sports et l’Institutnational du sport et de l’éducationphysique (INSEP), une synthèsede quelques caractéristiques spé-cifiques aux pratiquants seniors.Pourtant, l’analyse des études sta-tistiques sur les quarante der-nières années montre que laprogression du taux de pratiquephysique des Français n’est plus leseul fait des jeunes et deshommes, et qu’elle tient à l’aug-mentation de la pratique desfemmes et des seniors. Déjà, lacomparaison entre les deuxenquêtes de l’INSEE5 de 1967 et1987 sur les pratiques de loisirs de

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  • Français, mettait en évidence uneaugmentation des taux de pra-tique des personnes de plus de 50ans†: le taux de pratique des 50-60ans était de 27,8†% en 1967 et de30,6†% en 1987, et celui des plus de60 ans était de 11,1†% en 1967 etde 18,7†% en 19876.

    La définition de la sportivité :une question sensible, accentuéechez les seniors

    Plusieurs enquêtes7 se sont suc-cédé depuis les années 1980 ettémoignent toutes d’une nettehausse de la pratique des seniors†;en revanche les comparaisonsdemeurent délicates car la sporti-vité ne relève pas des mêmes défi-nitions selon les organismesenquêteurs. L’inclusion ou l’exclu-sion de certaines formes de pra-tiques dans le recensement despratiques physiques tient à desdéfinitions variables du sport. Querecouvrent les notions «†faire dusport†» ou «†faire une activité phy-sique†»†? Car décrire la «†sporti-vit醻 «†ne fait pas seulement appelà la réalité d’une pratique, maismobilise aussi les représentationsque l’on a du sport, ou, plus préci-sément, les propres classificationsdu répondant, qui sont éminem-ment culturelles†» (Louveau, 2002†:31-32). Ce fut d’ailleurs l’objetd’un débat méthodologique en1985, entre les statisticiens del’INSEE et les sociologues del’INSEP, lorsque ces derniers,novateurs, tentèrent, dans l’en-quête Les pratiques sportives desFrançais. Usages sportifs du tempslibéré, de ne laisser échapperaucune activité physique et/ousportive vécue comme telle par lepratiquant†: «†le sport est ce que fontles gens quand ils pensent qu’ilsfont du sport†» (Irlinger, Louveau,

    Métoudi, 1987†: 15). Quinze ansaprès cette enquête nationale1985-1987, le ministère de laJeunesse et des Sports et le labo-ratoire de sociologie de l’INSEPconduisent une enquête similairesur les pratiques physiques etsportives des Français en 2000 etconservent l’acception large don-née au sport. Cette orientationthéorique est d’autant plus inté-ressante quand il s’agit d’exami-ner la pratique physique despersonnes âgées. Moins encline àdes pratiques compétitives, cettepopulation s’avère grandementsous-estimée dans le cas d’unesportivité uniquement définie parune licence sportive. De plus, laquestion de relance8 systémati-quement proposée aux personnesqui déclarent spontanément nepas pratiquer, paraît particulière-ment adaptée pour cerner lapopulation âgée, car beaucoup nese sentent pas ou plus sportifs, cequi les conduit à minimiser ouomettre leurs pratiques (tableau1). En effet, la perception de sapropre sportivité est non seule-ment liée à la définition que l’ons’est construite du sport mais aussià l’ajustement de cette représen-

    tation en fonction de l’âge par unedouble opération de comparai-son†: comparaison avec la massedes sportifs, et comparaison avecd’autres phases, passées ou àvenir, plus ou moins intenses, de satrajectoire sportive personnelle.

    Des seniors de plus en plussportifs

    En 1985, 73,8†% de la popula-tion de 12 à 75 ans s’adonnent à aumoins une pratique physique ousportive, pendant l’année ou pen-dant les vacances. En 2000, ce sont83†% de la population de 15 à 75ans qui déclarent se dépenser phy-siquement au moins une fois dansl’année. La superposition desdeux courbes de taux de pratique1985 et 2000 (figure 2) permet desouligner deux tendances. D’unepart, que ce soit en 1985 ou en2000, l’avancée en âge se traduitpar un net fléchissement des tauxde pratique, laissant à penser quel’âge demeure un facteur de dimi-nution de la pratique physique.D’autre part, si l’augmentation dela pratique est sensible à tous lesâges, elle est particulièrementmarquée chez les sexagénaires.

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    Tableau 1. Comparaison des taux de pratique sportive enquêteMJS/INSEP 2000

    moins de 50 ans 50 ans et plus

    Pratique déclarée spontanément 67,95 % 47,35 %

    Pratique déclarée après relance 19,43 % 27,11 %

    Non pratique 12,61 % 25,54 %

    Total 100 % 100 %

    Source : Base de données enquête MJS/INSEP 2000

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  • En supposant que les chiffresdes deux enquêtes sont parfaite-ment comparables, les sexagé-naires à l’aube du XXIe sièclepratiquent autant que les trente-naires de 1985, mais surtout, ilspratiquent plus que lorsqu’ilsavaient 15 ans de moins. Pourcette génération, non seulementla pratique ne baisse pas avecl’âge mais au contraire elle aug-mente, mettant en défaut l’idéed’une diminution progressive dela pratique avec l’âge. Ce qui,confirmant les résultats del’étude du CREDOC (Berthuit etcoll., 1999) sur un suivi encohorte d’une génération née en1935, montre que la pratiqued’une activité physique s’intègrede plus en plus au fil des généra-tions dans les modes de vie auxdifférents âges.

    Les caractéristiques socioculturelles des seniors sportifs en 2000

    Mais au-delà de cette haussesensible en quinze ans, la pratiquesportive demeure toujours unepratique sexuée, plus masculineque féminine (figure 3), à tous lesâges de la vie.

    Néanmoins, entre 50 ans et 75ans, l’effet d’âge marque demanière très comparable la pra-tique des hommes et desfemmes (figure 3), voire demanière identique la tranched’âge entre 50 et 69 ans†: un effetde plateau est visible pour lesdeux sexes, repoussant après lecap de 70 ans la forte diminutionde la pratique.

    Enfin, le niveau scolaireinfluence fortement l’engagementsportif des seniors (figure 4), lesplus diplômés pratiquant davan-tage que les moins diplômés. Cettevariation confirme le poids déter-minant dans toutes les enquêtes

    du niveau socioculturel sur la pra-tique sportive. En revanche, ceque met en évidence le croise-ment des variables d’âge et deniveau de diplôme, c’est uneremise en cause de l’effet d’âgepour les seniors les plus diplômés.Pour ces seniors au moins bache-liers, non seulement l’âge ne s’ac-compagne pas d’un fléchissementde la pratique sportive, mais aucontraire la pratique s’accroît de50 ans jusqu’à 75 ans, à l’inversedes moins diplômés et de l’obser-vation usuelle d’un désengage-ment progressif et constant avecl’avancée en âge.

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    Figure 2. Comparaison Pratique sportive enquête 1985 et 2000

    Source : Données des enquêtes INSEP 1985 et MJS/INSEP 2000

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  • Aussi, si l’espace des pratiquesphysiques des seniors persiste àêtre fortement structuré par lespropriétés sociales que sont l’âge,le sexe et le niveau culturel, lepoids relatif de chacune de cespropriétés sur l’engagement spor-tif des seniors demeure une ques-tion à discuter qui remet en causela primauté de l’influence del’âge. Le niveau socioculturelpourrait-il contrarier le processusde déprise progressive couram-ment décrit†?

    Les grandes enquêtes sur lespratiques des Français offrent unephotographie des pratiquantsseniors, mais les seuls indicateurs

    d’âge, de sexe et de niveau dediplôme ne peuvent suffire à cer-ner les dispositions sociocultu-relles des seniors à la pratiquephysique. La notion de «†disposi-tions†», au cœur des théories deP. Bourdieu à travers le conceptd’habitus, comme «†systèmes dedispositions acquises par l’appren-tissage implicite ou explicite quifonctionne comme un système deschèmes générateurs†» (1980†: 120-121) a été reprise et prolongée parB. Lahire. Il propose de saisir le«†degré d’homogénéité ou d’hété-rogénéité des dispositions dontsont porteurs les acteurs indivi-duels en fonction de leur parcoursbiographique et de leurs expé-

    riences socialisatrices†» et d’exami-ner la question des «†dispositionssous conditions†» d’actualisation,de recul ou de mise en veille(Lahire, 2002†: 88-89). Aussi, pouraccéder aux conditions et aux cir-constances sociales et historiquesde l’engagement sportif et de ladynamique des transformations dela pratique avec l’avancée en âge,une approche qualitative destrajectoires de seniors sportifss’impose.

    Transformations des pratiquesde seniors sportifs avec l’avancée en âge

    Nous présentons ici une partiedes résultats d’une enquête parentretiens semi-directifs que nousavons menée (Hénaff-Pineau,2008) auprès d’une populationconstituée de 124 seniors sportifs,des hommes et des femmes, âgésde 50 à 89 ans et répartis en troisgénérations9, les quinquagénaires,les sexagénaires et les plus de 70ans. Nous avons reconstitué etanalysé leurs trajectoires spor-tives à partir de plusieurs élé-ments†: la présence ou l’absenced’éducation physique et/ou spor-tive durant la jeunesse, l’âge desdébuts de l’engagement sportif, lacontinuité ou les interruptions dece parcours, les étapes biogra-phiques dont notamment laretraite, qui transforment éven-tuellement l’engagement sportif,les types d’activités et lesmanières de pratiquer.

    C’est à l’interface d’une socio-logie du sport abordée sousl’angle des dispositions sociocul-turelles et d’une sociologie del’expérience du vieillissementque nous avons mis en relationde manière compréhensive les

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    Figure 3. Pratique sportive selon sexe et âge, enquête MJS/INSEP2000

    Source : données enquête MJS/INSEP 2000

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  • transformations de la sportivitéau cours de la trajectoire avec lesperceptions de se sentir vieillir.Le fait que nous n’ayons affairequ’à des seniors sportifs évacueipso facto une des réponsespossibles conséquentes à cetteperception, l’abandon de la pra-tique, et la comparaison avec desnon-pratiquants. En nous réfé-rant aux théories de la (dé)priseet (re)prise (Barthe, Clément,Druhle, 1988†; Caradec, 2004),conçue non pas dans la visionmonolithique du désengagementcontinu mais comme la mise aujour de formes sociales pluriellesde réaménagements entre désen-gagements et réengagements10,notre objectif consiste à identi-fier les différentes stratégies detransformations des pratiquessportives, qui permettent uneadaptation au vieillissement,mais aussi le maintien d’une acti-vité physique et à en dégagerpeut-être un processus généralde transformations des pratiquesavec l’avancée en âge. C’est doncdans la dynamique des pratiqueset non dans les logiques d’aban-don que nous analysons levieillissement.

    Typologie des trajectoires sportives

    Conversions, reconversions, inter-ruptions, investissements compéti-tifs, ponctuent différemment lestrajectoires sportives selon lescaractéristiques et conditions socia-les des individus et de leur généra-tion. Pour en rendre compte, nousavons dégagé quatre parcours-types.

    Les sportifs et sportives inter-viewés n’ont pas tous profitéd’une éducation corporelle durantleur jeunesse mais une forte pro-portion (79†%), qui tient probable-ment au niveau de diplôme élevé

    chez les sportifs, a été exposée àune éducation physique et/ousportive dans le cadre scolaire oufamilial. Entre les septuagénairesnés avant 1935 et les quinquagé-naires nés après la SecondeGuerre mondiale, les éducations sesont beaucoup transformées, mar-quant différemment les jeunessesselon les générations, le sexe et lesmilieux sociaux. Deux des par-cours-types rendent particulière-ment compte de ces différences.

    Le premier est un parcourscontinu engagé tardivement, typi-quement féminin, particulière-ment répandu parmi les femmesde 70 ans et plus qui n’ont connu

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    Figure 4. Taux de pratique sportive des seniors en fonction duniveau de diplôme, enquête MJS/INSEP 2000

    Source : données enquête MJS/INSEP 2000

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  • aucune éducation physique ousportive durant leur jeunesse. Unefois libérées des contraintes fami-liales et professionnelles, elles ontprofité de la disponibilité socialeque leur procurait la retraite pours’engager dans des loisirs sportifsqu’elles n’avaient jamais connus.«†Je n’ai jamais fait de sport parmoi-même, on n’avait pas le temps,la famille, le travail cela passaitavant tout. […] Et puis mon marin’aimait pas trop cela†; alors à laretraite, j’y ai pensé tout de suite, jesuis allée m’inscrire dans ce clubde loisirs. Je voulais bouger, et peuimportait le sport, … enfin à maportée, pour mon âge. Et j’ai com-mencé par pratiquer la gymnas-tique, deux fois par semaine†»(Liliane, 77 ans, certificat d’études).Cela confirme la logique sociale

    dégagée par S. Laberge (2003)concernant les femmes adultes demilieux défavorisés face à la pra-tique d’activités physiques†: lesactivités pour soi sont délaisséesau profit de la «†priorité famille-travail†». Mais c’est dans une acti-vité peu exigeante techniquementqu’elles s’engagent alors†: dans lecas de notre population, surtout lagymnastique mais jamais le tennis.«†À l’âge que j’avais, je n’allais pasme lancer dans le tennis, je n’yavais jamais joué†! Débuter à 60ans, alors que tous les autres saventdéjà jouer et que vous n’avezjamais fait de sport, alors là cen’était pas possible. J’ai choisi laseule activité que je me sentaiscapable de faire, avec des gens demon âge, un cours de gymnastiquepour retraités†» (Marie-Jeanne, 71

    ans, brevet élémentaire). Régu-larité, intensité modérée, absencede compétition, pratique d’entre-tien monovalente ou associée à lamarche, recherche de santé etconvivialité, sont les traits distinc-tifs de la pratique choisie par cesfemmes, pour beaucoup peudiplômées. «†Suite à une grave opé-ration du dos, j’ai pris des coursd’aquagym. J’avais 63 ans et jen’avais jamais fait de sport de mavie. J’avais juste appris à nageravec mes frères dans la rivièrequand j’avais 12 ans†» (Germaine,72 ans, brevet élémentaire).L’effet de génération et depériode s’avère particulièrementsensible pour l’éducation phy-sique et sportive des femmes. Al’inverse des femmes sportivesactuellement âgées de plus de 70

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    Eléments méthodologiques

    Plusieurs choix ont présidé à la constitution de la population interviewée :

    Nous avons retenu trois tranches d’âge (50-59 ans, 60-69 ans, plus de 70 ans), des hommes et des femmes, etvalorisé numériquement les seniors âgés de 70 ans et plus (76 sur les 124 interviewés) car ces derniers, souventexclus des grandes enquêtes, nous semblent pouvoir mettre en tension maximale le rapport vieillissement/pra-tique physique.

    Nous avons privilégié l’étude de seniors engagés dans trois APS répandues après 50 ans, combinées avec deuxmodalités de pratique, compétitive ou non compétitive, et qui mettent en jeu des engagements corporels ettechniques contrastés :

    – les activités physiques d’entretien, telles la gymnastique volontaire, individuelles, le plus souvent encadréesen cours collectif, non compétitives, modérées dans l’intensité. Ces formes de gymnastique (Gymnastiquevolontaire, clubs de 3e âge…) correspondent bien à la norme médicalisée actuelle.

    – le tennis, jeu pouvant se pratiquer selon plusieurs modalités, compétitive ou non compétitive, individuelleou collective, mixte ou pas, encadrée ou pas, et d’intensité variable. Les joueurs et joueuses, inscrits dans desclubs de tennis, déterminent eux-mêmes leurs modalités de pratique et peuvent se livrer à des efforts trèsintenses assez éloignés des recommandations usuelles des professionnels de la santé ou au contraire amé-nager leur pratique, en dehors de tout système compétitif officiel.

    – les courses longues (marathons, 100 km de Millau, triathlon,…) essentiellement individuelles, compétitivesmajoritairement, peu encadrées malgré l’adhésion fréquente à un club, qui sollicitent un effort long etintense ; l’adjectif « exténuantes » pourrait les qualifier. Selon l’âge et l’intensité, la modalité compétitivetransgresse la modération préconisée.

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  • ans, les femmes quinquagénairesde ce début de XXIe siècle onttoutes profité d’une éducationphysique et sportive durant leurjeunesse. Ces «†baby-boomeuses†»ont bénéficié de deux évolutionsqui marquent un moment de bas-cule entre des générations. D’unepart, la massification et la démo-cratisation de la scolarisationsecondaire, enfin accessible auxfilles et aux garçons de manièrepresque identique, ont permis unehomogénéisation du niveau deformation de la jeunesse françaised’après-guerre. D’autre part, unevéritable politique sportive tour-née vers la jeunesse est mise enplace, sous l’impulsion deM. Herzog, haut-commissaire à laJeunesse et aux Sports, à partir de1958. Et même si des différencespersistent entre la culture sportivedes filles et celle des garçons, lesport devient le moyen privilégiéde l’éducation physique et spor-tive pour les deux sexes. Cettegénération de filles du baby-boomaura connu toutes les étapes deforte croissance du développe-ment du sport en France†: l’essordes éducations et des loisirs spor-tifs de l’après Seconde Guerremondiale, l’explosion des pra-tiques de la forme dans les années

    1980 et maintenant les exemplesde seniors actifs.

    Le second parcours-type se pré-sente comme un parcours sportifcontinu, engagé depuis la jeu-nesse, plutôt masculin, notammentdans les âges élevés, même siquelques sportives diplômées s’yretrouvent, au cours duquel lareconversion d’activités physiquesest fréquente. La pratique spor-tive, assidue, souvent compétitiveet plutôt monovalente, a constituéun élément identitaire stable et àla fois évolutif du mode de vie dusenior à toutes les étapes de sonexistence. De manière générale,hormis pour quelques compéti-teurs et compétitrices passionnéset de très bon niveau, plus la car-rière sportive a débuté tôt avec uninvestissement compétitif, plus lareconversion dans une nouvelleactivité sportive risque de se pro-duire, et cela avant 50 ans. La per-ception du vieillissement à traversla baisse du niveau de perfor-mance, l’incapacité à suivre, ou unproblème physique conduit à cechangement de pratique qui offrede nouvelles voies de progression.«†Je voyais bien à 38 ans que je nepouvais plus suivre [en volleyball]. Soit il fallait que je m’en-traîne plus, ce que je ne pouvaispas faire, soit il fallait descendre enéquipe réserve. J’ai préféré arrêteret passer à une activité que je pour-rais continuer plus longtemps.Alors je me suis mis à jouer au ten-nis. J’avais commencé en dilettantequelques années auparavant avecun ami et là je me suis engagé dansles tournois†» (Paul, 71 ans, bache-lier). En revanche, les reconver-sions après 50 ans s’effectuentsouvent sous la contrainte desproblèmes de santé. «†J’ai étéobligé d’arrêter le tennis parce que

    j’ai eu des problèmes à la fois car-diaques et des problèmes de lom-baires, et le tennis m’a étéfortement déconseillé par mesmédecins. Comme j’avais envie decontinuer à pratiquer, je suis passéau golf, […] et depuis l’âge de 65ans, je pratique le golf†» (Jean, 79ans, bac + 4).

    Le troisième parcours-type estune forme accentuée et densifiéedu second. Il concerne des seniorschampions dans leur discipline(courses longues ou tennis), quiaboutissent à l’excellence sportivedans la catégorie vétérans, à lasuite d’une pratique physiqueintense et ininterrompue depuisl’enfance. Ces hommes et cesfemmes, comme tout athlète dehaut niveau, s’entraînent tous lesjours, et cela quel que soit leur âgepuisque six d’entre eux (troishommes et trois femmes) sontâgés de 68 à 83 ans. À la définitionclassique de la performance «†plusvite, plus haut, plus fort†» pourraits’ajouter «†plus longtemps†», car cerecord sans fin constitue le véri-table moteur de la permanence deleur engagement compétitif. «†Jesuis parti jusqu’à, je sais pas quelâge, mais tant que ça tient, tant quele bonhomme, il peut courir etsaute, c’est bon†! […] Je voudraisbien que cela dure jusqu’au bout…je me vois bien centenaire et encoreathlète†» (Joseph, 83 ans, championdu monde vétéran, 20 km). Lesseniors les plus âgés de ce par-cours marqué par l’intensité et lafréquence ne se sentent pas vieilliret développent même un senti-ment d’invulnérabilité, loin del’image de la fragilité courammentassociée aux personnes de plus de70 ans.

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  • Le quatrième parcours, un par-cours discontinu, concerne tant leshommes que les femmes quandces dernières ont donc reçu uneéducation physique et sportivedurant leur jeunesse. Les interrup-tions interviennent surtout à deuxmoments, après la scolarité obliga-toire et à l’entrée dans la vie pro-fessionnelle et/ou familiale. Lareprise de pratique, plus précocechez les hommes que chez lesfemmes, s’accompagne d’unereconversion fréquente d’APS etrépond à une nouvelle liberté quel’on s’accorde avec la fin des obli-gations familiales lourdes, la fin del’activité professionnelle, ou àl’heure d’une rupture biogra-phique (un divorce, par exemple).Selon les circonstances, l’âge de lareprise et le sexe, les activités etles modalités de pratique diffèrententre polyvalence et monova-lence, entre intensité et modéra-tion. Les objectifs de santé se lientaisément à la pratique modérée etmonovalente tandis que le besoinde reconstruction identitaireengage dans une pratique achar-née, souvent polyvalente. «†Monmari m’a quittée, ma fille a fait sesétudes et est allée sur P., et moi jeme droguais de kilomètres pourcombler les différentes absences.J’en faisais tous les jours, tous lesjours pour courir le marathon.†»(Josette, 66 ans, CAP).

    Pour tous les seniors de 60 anset plus, hormis les championsvétérans, la retraite représente unmoment charnière dans le par-cours sportif. Étape privilégiéepour un engagement ou un ré-engagement dans la pratique phy-sique, la retraite constitue aussil’occasion d’amplifier la pratiqueantérieure par l’augmentation dela fréquence d’entraînement, l’in-

    vestissement dans la compétitionet la multiplication des activitéspratiquées. De plus, c’est à unepratique assidue que les seniorssportifs s’adonnent puisque, lestrois quarts des seniors inter-viewés pratiquent au moins troisfois par semaine. Les sexagénairessont les plus assidus, les quinqua-génaires les moins et, même si lafréquence s’amenuise légèrementavec l’âge, les octogénaires spor-tifs pratiquent plus régulièrementque les quinquagénaires, et lesfemmes plus que les hommes.Compte tenu des caractéristiquesde la sportivité des seniors spor-tifs, les jeunes retraités pourraientbien prétendre au titre de sportifsaccomplis alors même qu’ils n’in-téressent guère le monde du sport.

    Quelle culture du corps pourquelle forme du « bien vieillir » ?

    Si tous les seniors marquentleur volonté de prendre en mainsleur vieillissement, les stratégiescorporelles qu’ils mettent enœuvre pour ne pas en subir leseffets, dépendent de leurs repré-sentations de la santé et du corpsvieillissant. L’engagement dans lestrois APS que nous avons privilé-giées implique des mises en jeucorporelles très différentes de lavieillesse et de la santé.

    Les seniors engagés dans lesgymnastiques d’entretien mettenten avant les vertus de la «†régula-rité de l’effort†», car «†plus onvieillit, plus la pratique doit êtrecontinue†». L’âge oblige à «†ne pluslâcher†», «†ne pas se laisser aller†»,mais aussi à «†ne pas forcer†»,«†atteindre la fatigue mais nejamais la dépasser†». La modéra-tion s’impose pour «†ne pas user lamachine†». L’excès ferait «†souffrir

    le corps†» et produirait les effetsinverses de ceux recherchés. Cettevision d’une santé en équilibrequ’il faut activer sans à-coup,répond parfaitement à la règle du«†ni trop, ni trop peu†». C’est unentretien physique et non uneperformance qu’il faut poursuivrepour conserver l’intégrité corpo-relle. Faire une activité «†à sonniveau†» et «†à sa vitesse†» et éviterles sports trop rapides, tropintenses qui feraient encourir desrisques inutiles. La compétitionest alors inadaptée à l’âge. «†Faireà notre rythme sans tirer trop fortsur la machine sinon vous la cas-sez. […] À chaque âge sesexploits†» (Solange, 74 ans). Leproverbe «†Qui veut voyager loinménage sa monture†» correspondtout à fait à ce rapport au corpsdans le vieillissement, majoritaire-ment exprimé par des femmes peudiplômées.

    Les efforts longs et exténuants,tels les marathons, les 100 km deMillau, les triathlons, engagent desreprésentations du corps et de lasanté quasiment opposées. Tou-jours dans la régularité de l’effortmais avec une «†rigueur†» et une«†discipline†» qui permettent ledépassement de soi. L’idée que lasanté se conquiert et se dépasse,que les limites du corps et de l’âgese repoussent dans la capacité àsupporter des efforts très fati-gants, perce dans la plupart desdiscours des seniors adeptes deces activités. «†J’ai l’impression querien ne peut m’arrêter […]†; aller aubout de ses forces et se rendrecompte qu’on peut encore†»(Paulette, 74 ans, marathon, 100km de Millau). Loin de la modéra-tion, il faut «†accepter de se fairemal†», «†se faire violence sinon onse laisse mourir†», «†ne pas tomber

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  • dans le piège du confort†», «†allerau bout de soi†», toujours pousserplus loin une machine qui ne courtque le risque de s’encrasser. Unedes femmes marathoniennesemploie l’image de «†nettoyer lecorps†» comme si l’épuisement desforces dans l’effort permettaitaussi d’évacuer les impuretés de lavieillesse et de restaurer les forcesvives d’une nouvelle jeunesse.S’épuiser pour renaître, ne plussentir son corps pour mieuxéprouver la vie. «†Dans le mara-thon, après la douleur, on plongedans un état second avec l’impres-sion de ne plus avoir de corps […],le corps se dématérialise, on flotte†»(Jean-Yves, 64 ans†; Paulette, 74ans). L’apprentissage de la per-ception des effets qui permet deressentir et donc de concevoir l’ef-fort de longue durée comme unesource de plaisir et de dépasser lasensation de douleur ne manquepas non plus de rappeler lesétapes du fumeur de marijuanadécrites par Becker (1985).Certainement sommes-nous aussidans une relation au corps que D.Le Breton (1991†: 13-15) qualifiede «†corps-adversaire qu’il fautsoumettre au cours d’épreuvesharassantes. […] Le corps est l’in-terface qui prend de plein fouet la

    dureté de l’effort […]†; il faut sen-tir contre soi la tangibilité d’unmonde qui ne se dérobe plus etsollicite dans toute sa force le sen-timent d’exister†». «†Dans un mara-thon, il faut avoir la lucidité decerner l’envie d’arrêter par néces-sité et celle classique des 30 km†»(Serge, 77 ans). C’est cetteconscience de soi affinée qui faitdire aux seniors engagés dans cesefforts de longue durée qu’aucuneactivité sportive ne devrait êtreproscrite au nom de l’âge, puisquele sportif contrôle son effort. «†Jene joue pas ma santé quand je faisMillau […]. On peut marcher, cou-rir, chacun fait selon ses moyens†»(Stéphane, 65 ans). Mais tous évo-quent une sensation unique†:«†C’est formidable d’avoir l’im-pression que tout est possible†: onest tout petit face aux éléments ouface à la distance mais on se sent…comment… infini… sans limite†»(Stéphane, 65 ans). Et c’est cettesensation d’invulnérabilité aprèslaquelle ils semblent courir etqu’ils testent dans les compéti-tions, au prix d’une volonté sansfaille. «†Vouloir c’est pouvoir†»pourrait caractériser la posturedes seniors athlètes des efforts detrès longue durée.

    Pour les seniors, joueurs etjoueuses de tennis, les conceptionsde l’effort compatible avec l’avan-cée en âge sont plus entremêlées.Ni dans la modération, ni dansl’exténuation, ils mettent en avantd’autres priorités. Plaisir du jeu,gaieté et convivialité sont lesingrédients que le tennis continuede leur offrir. «†Le tennis, c’est mapassion†: les copines, le jeu… le ten-nis c’est joyeux. On rit comme desjeunes, mais on ne joue pluscomme des jeunes†!†» (Ginette, 75ans). Rires et jeux, symboles d’une

    jeunesse dont ils veulent conser-ver l’esprit et le dynamisme. Avecle tennis, c’est aussi un réseaurelationnel qui se maintient àtoutes les étapes de la vie, sous laforme d’une «†bande de copains†»(ou copines) assurant une fonc-tion sociale essentielle†: se retrou-ver entre personnes de mêmesaffinités culturelles. «†Sur un court,on a vite fait le tour et l’on voit sil’on est sur la même longueurd’ondes pour certaines choses.†»(Jean-Charles, 83 ans). Bien vieillirrepose alors sur une qualité rela-tionnelle et une combativité quipermettent de maintenir jeune. Lacombativité peut entraîner desefforts intenses et violents dans lapassion de la compétition mais leduel permet aussi de développerdes stratégies de jeu adaptées àl’adversaire et à ses propres res-sources pour économiser sesforces. La balance risque/sécuritéinhérente au duel se retrouvedans la gestion des forcesdéployées pour marquer un point,et ces seniors savent en user. Lecorps est cultivé pour que sonvieillissement n’entrave pas l’ex-pression de l’individu, la réalisa-tion des passions et la conduited’une vie sociale riche. D’ailleurs,les trois quarts des joueurs etjoueuses de tennis septuagénaires,fortement diplômés, sont aussiengagés dans du bénévolat asso-ciatif. Ils souhaitent maîtriser leurvieillissement et leur santé commeils ont maîtrisé toutes les étapesde leur vie, en acceptant desrisques physiques calculés auregard de l’affirmation de leuridentité et de leur libre-arbitre.«†Qui ne risque rien n’a rien†»†;mieux vaut une vie pleine, activeet autonome qu’une longévitéterne et repliée.

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  • Les stratégies de résistance auvieillissement dans les pratiquesphysiques

    Tous les seniors sportifs inter-viewés, même les septuagénaireset octogénaires, ne se sentent pas«†vieux†» et refusent d’être catalo-gués parmi les «†vieux†». Ils affir-ment une conception active etresponsable de leur vieillissement,mais empruntent des chemins dif-férents d’adaptation au vieillisse-ment. Se distinguent plusieursstratégies de réponses aux sensa-tions de vieillir pour ne pass’abandonner au vieillissement etlutter contre le désengagementdes pratiques physiques†:

    – la reconversion (ou substitu-tion) dans une pratique diffé-rente. Cette reconversion,lorsqu’elle est effectuée jeune,s’oriente vers des APS quioffrent de nouvelles perspec-tives de progrès et/ou de réali-sation compétitive. À un âgeavancé, l’éventail des activitésse réduit à celles qui paraissentcompatibles avec le vieillisse-ment. Chez les joueurs de ten-nis, la reconversion au golf esttypique. Chez les athlètes, lasubstitution s’opère par un glis-sement de disciplines athlé-tiques†: le passage des épreuvesde vitesse et de force aux disci-plines de longue distance etlongue durée. Lorsque la recon-version s’effectue sous la pres-sion médicale, seules lesgymnastiques douces, la nata-tion ou la marche semblentenvisageables.

    – l’adaptation des modalités depratique. Le senior ne change nid’activité, ni de discipline maisen modifie des modalités de

    pratique†: arrêter la compétition,refuser les confrontations avecles plus jeunes, diminuer la fré-quence d’entraînement, dimi-nuer l’intensité. Par exemple, lesjoueurs de tennis jouent endouble, les gymnastes adaptentle nombre des répétitions…

    – l’adaptation de la technique. Cesont les seniors des parcourssportifs continus depuis la jeu-nesse (ou repris avant 35 ans)qui usent de cette adaptationtechnique qui leur permetnotamment de conserver unemodalité compétitive et d’ajus-ter leur pratique à l’évolution deleurs ressources. Par exemple,les joueurs de tennis dévelop-pent le versant tactique et stra-tégique du jeu pour compenserla force et la vitesse défaillantes.

    Ces trois premières formes,substitution, adaptation desmodalités de pratique et adapta-tion de la technique visent à allé-ger la pratique et relèvent d’unprincipe d’économie des forces.Mais plusieurs seniors réagissent àl’avancée en âge et au vieillisse-ment par une intensification deleurs pratiques physiques. Cetteréponse, loin de caractériser uni-quement les jeunes retraités quiont amplifié leurs pratiques àl’étape de la retraite profession-nelle, concerne aussi de nombreuxseniors septuagénaires et octogé-naires, des hommes et des femmesmarqués par des socialisationscorporelles précoces et des par-cours sportifs continus depuis lajeunesse et qui possèdent un hautniveau de diplôme pour l’époque.Aux sensations croissantes devieillissement, ils ripostent parune augmentation des pratiquesphysiques selon deux modalités†:

    – l’augmentation de la polyva-lence des pratiques qui per-met de compenser les effortsentre eux et d’équilibrer lesparties du corps sollicitées parla pratique dominante. Parexemple, plusieurs joueurs detennis ont adopté, depuis leursderniers signes de vieillisse-ment, la pratique régulièred’une gymnastique personnelleà domicile, qui contribue à évi-ter les mises en route doulou-reuses et raides sur le court.

    – l’augmentation de la fréquenced’entraînement jusqu’à la pra-tique quotidienne pour endi-guer les effets du vieillissement.Ne pas s’arrêter pour éviter lareprise, de plus en plus diffi-cile. «†Après 70 ans, arrêtez huitjours, vous mettez troissemaines pour revenir†» (Guy,72 ans). Cela n’exclut pasd’avoir substitué certaines acti-vités à d’autres pour diminuerl’intensité mais l’augmentationde l’assiduité de la pratiquepermet de «†soigner le mal parle mal†» (Lucette, 71 ans).

    Fréquemment polyvalence etfréquence se conjuguent pourcontrecarrer le processus devieillissement en redoublant d’ef-forts, pour les seniors âgés enga-gés dans les pratiques exténuanteset les jeux de raquettes.

    Conclusion

    Tous les seniors sportifs parta-gent la conviction que leurs pra-tiques physiques et la régularitéde leurs efforts actuels vont payerà terme et les protéger d’unevieillesse dépendante. Persuadésqu’une vieillesse autonome jus-qu’au bout se mérite, et en ce sensconformes à la norme actuelle du

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  • bien vieillir, ils déploient uneénergie et une volonté impor-tantes à ne pas céder aux sensa-tions inévitables de fatigue et dedouleur qui se multiplient et lesappellent à se reposer. Pour lesseptuagénaires et les octogénaires,lâcher, ce serait plonger dans ladéprise ultime, se désengager de la«†vraie†» vie symbolisée par lemouvement et entrer dans lavieillesse redoutée et redoutable,sans espoir de retour en arrière.

    Deux processus de résistance auvieillissement dans et par les pra-tiques physiques se dessinent. L’unrepose sur le principe d’économiedes forces. Par des stratégies desubstitution et d’adaptation despratiques, il permet de maintenirun mode de vie actif avec l’avan-cée en âge. (Dé)prises partielles et(re)prises (Caradec, 2004) répon-dent à une négociation évolutivedu senior entre ses pouvoirs et sesdésirs, mais permettent d’avoirprise sur les priorités essentiellesde vie à travers le choix des pra-tiques physiques. L’autre reposesur un principe inverse de suren-chère d’efforts, et bouscule lanorme sociale et le processus cou-ramment décrit et admis. Plus lesenior avance en âge, plus il pres-

    sent qu’il faut redoubler d’effortset de volonté pour maintenir lavieillesse éloignée. À cet égard, leschampions illustrent le pôle de lasurenchère, alors que les femmes,peu diplômées, engagées tardive-ment dans une gymnastique d’en-tretien, incarnent le principed’économie des forces. Mais cesdeux principes peuvent aussicohabiter. Les seniors sportifs,hommes ou femmes, diplômésavec un passé sportif important,nous paraissent s’inscrire dans cedouble mouvement d’adaptationau vieillissement†: anticiper denécessaires transformations etmultiplier les efforts pour sauve-garder les activités qui garantis-sent à leurs yeux une vie encoredigne d’être vécue. Ainsi, la diver-sité des investissements sportifsrend-elle compte de formes et deconceptions plurielles de lavieillesse et du vieillissement.

    Pia-Caroline HÉNAFF-PINEAU

    Professeure agrégée d’EPSUniversité Paris-Sud 11

    Laboratoire JE 2496 Sports,Politiques et Transformations

    Sociales

    Notes

    1 Titre d’un article de la revue Alter-natives économiques, n° 233, février2005.

    2 Par exemple, le guide français «†Lasanté vient en bougeant†» (INPES,2004) et le Plan national français«†Bien vieillir†» lancé en 2003.

    3 Nous emploierons, dans un premiertemps, les termes sport, activité phy-sique, APS, au sens général et com-mun, souvent indifférencié, depratique physique. Cependant, au fur

    et à mesure du propos, nous précise-rons le type de pratique et les moda-lités de pratique.

    4 Le terme senior, employé dans cetarticle, ne désigne pas la catégoriesportive située entre les juniors et lesvétérans mais englobe l’ensemble despersonnes âgées de 50 ans et plus.

    5 Ces deux enquêtes de l’INSEE envi-sagent la pratique sportive par lenombre de licenciés.

    6 Source†: Paranteau A., Cellule Banquede données du ministère de laJeunesse et des Sports, mars 1998.

    7 Parmi ces enquêtes, notamment†: lesystème d’enquêtes du CREDOC sur20 vagues d’enquêtes annuelles effec-tuées entre 1979 et 1998 (Berthuit etcoll., 1999), l’enquête INSEP 1985-1987 (Irlinger et coll., 1987), l’en-quête MJS/INSEP 2000 (Mignon etTruchot, 2001†; Ministère des Sportset INSEP, 2002), le dispositif d’en-quêtes permanentes sur les condi-tions de vie des ménages de l’INSEEdont la partie variable de l’enquêtePCV 2003 (Muller, 2005).

    8 Cette question de relance proposaitalors une liste de d’activités, de sportset de loisirs susceptibles d’avoir étépratiqués durant les douze derniersmois.

    9 Nous avons employé le mot générationnon pas comme une période corres-pondant à la durée de renouvellementdes hommes, généralement évaluée à30 ans, mais selon une définition socio-logique. La génération désigne alors«†un ensemble de personnes ayant àpeu près le même âge, dont la princi-pale caractéristique est d’avoir desexpériences historiques communesdont elles ont tiré une vision communedu monde†» (Attias-Donfut, 1998†:159).

    10 «†Concept ambivalent qui, d’un côté,désigne un processus de transforma-tion des engagements marqué à lafois par une dé-prise et par de nou-velles prises et, de l’autre, une ten-dance à la baisse des activités aucours de l’avancée en âge†» (Caradec,2004).

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