viabilité financière du programme de défense nationale du canada

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Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada Ottawa, Canada 26 mars 2015 www.pbo-dpb.gc.ca

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Le DPB présente son estimation de l’écart financier entre les allocations budgétaires actuelles et le coût du maintien des Forces de défense nationale du Canada (Forces).

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Page 1: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Ottawa, Canada 26 mars 2015

www.pbo-dpb.gc.ca

Page 2: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

i

Le directeur parlementaire du budget (DPB) a pour mandat de présenter au Parlement une analyse indépendante de la situation financière du pays, des prévisions budgétaires du gouvernement, ainsi que des tendances de l’économie nationale et, à la demande de tout comité parlementaire ou de tout parlementaire, de faire une estimation des coûts de toute proposition concernant des questions qui relèvent de la compétence du Parlement.

Dans le présent rapport, le DPB présente son estimation de l’écart financier entre les allocations budgétaires

actuelles et le coût du maintien des Forces de défense nationale du Canada (Forces). Les parlementaires

pourront envisager des scénarios qui réduiront ou élimineront cet écart entre le coût de la structure des

Forces actuelle et le financement qui lui est accordé.

Préparé par : Peter Weltman*

* L’auteur tient à remercier David Perry et George Petrolekas pour leur aide lors de la recherche et de la préparation du

présent document; Mostafa Askari, Erin Barkel, Negash Haile, Jason Jacques et Rod Story pour leurs observations; de

même que Pat Brown et Jocelyne Scrim pour leur aide lors de la production du rapport. L’auteur veut aussi remercier nos

examinateurs : David Arthur, analyste principal, Division de la sécurité nationale, Congressional Budget Office; Mark

Thomson, analyste principal, et Andrew Davies, analyste principal et directeur de la Recherche, Australian Strategic Policy

Institute; Craig Stone, directeur des Programmes d’études, Collège des Forces canadiennes. L’auteur assume seul la

responsabilité de toute erreur ou omission. Pour plus de renseignements, prière de communiquer avec Peter Weltman

([email protected]) ou Mostafa Askari ([email protected]).

Page 3: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

ii

Table des matières

Résumé ............................................................................................................................... 1

1 Introduction : La viabilité financière du programme de défense nationale du Canada .. 2

1.1 Contexte – le portefeuille de la défense ................................................................. 3

1.2 Utilisation des fonds – le programme de défense nationale du Canada .................. 3

1.3 Qu’est-ce que la structure des Forces? ................................................................... 4

1.4 Source de fonds – le budget de la défense au fil des années .................................. 4

2 Méthodologie – évaluation de la viabilité financière du programme de défense .......... 6

2.1 Prévoir les budgets de la défense ........................................................................... 6

2.2 Projection du coût futur de la structure des Forces ................................................ 7

3 Résultats ..................................................................................................................... 11

3.1 Coût de la structure des Forces vs dépenses ......................................................... 11

3.2 Coût de la structure des Forces : l’Armée, la Marine et l’Aviation ......................... 12

3.3 Coût de la structure des Forces : personnel, immobilisations, autres dépenses ... 12

3.4 Scénarios de prévisions budgétaires ..................................................................... 13

3.5 Sensibilité du modèle ........................................................................................... 14

4 Conclusion et observations ......................................................................................... 15

Annexe A – postulats du modèle ...................................................................................... 17

Bibliographie ..................................................................................................................... 18

Notes de fin ....................................................................................................................... 19

Page 4: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

1

Résumé

Le présent rapport sur la viabilité financière de la

structure du programme de défense national

propose deux estimations distinctes : une projection

des « sources de fonds », c’est-à-dire des budgets

futurs de la défense; et une estimation de «

l’utilisation des fonds », c’est-à-dire des coûts du

programme de défense nationale.

Le directeur parlementaire du budget (DPB) estime

que les niveaux de financement actuels sont

insuffisants au maintien de la structure des Forces du

ministère de la Défense nationale (MDN). Pour

assurer la viabilité de la structure des Forces, il

faudra soit les restructurer, soit accroître le

financement du MDN, ou les deux.

Pendant l’exercice 2013-2014, les dépenses du MDN

ont totalisé 21,5 milliards de dollars, ce qui

représente 1,1 % du produit intérieur brut (PIB). De

ce montant, la moitié environ a payé les frais de

personnel, environ le tiers a été consacré au

fonctionnement et à l’infrastructure, et le reste a

servi à l’acquisition et au remplacement des biens

d’équipement.

La Stratégie de défense Le Canada d’abord (SDCD) du

gouvernement promettait de faire passer à 2 %, à

compter de l’exercice 2011-2012, l’augmentation

annuelle nominale (non rajustée à l’inflation) du

montant alloué à la défense, et d’investir en tout 490

milliards de dollars sur une période de 20 ans, le tout

afin d’assurer à l’armée un financement solide1.

Cependant, le DPB estime que le programme de

défense ne sera pas viable financièrement au cours

des 10 prochaines années. Notre modèle montre

que, jusqu’en 2014, les fonds suffisaient au maintien

du programme. En effet, les coûts de la structure des

Forces nationales ont augmenté d’environ 1,5 % par

année (en chiffres absolus, c.-à-d. indexés à

l’inflation) de 1995 à 2014, tandis que les dépenses

de défense ont augmenté de 1,9 % annuellement (en

chiffres absolus).

Comme le montre la Figure du résumé 1-1, le DPB

estime que le coût pour maintenir la structure des

Forces augmentera annuellement au taux indexé à

l’inflation de 2,5 %.

Afin que la pente de la courbe des dépenses jusqu’en

2012 et après soit raisonnable, le DPB a calibré le

modèle en fonction de la structure des Forces de

1995. Or, c’est la structure des Forces – notamment

la taille de la Force régulière et les coûts

d’équipement/des services de soutien – qui

détermine les résultats du modèle. Si une autre

année de calibration est choisie, les résultats seront

différents. Le lecteur doit garder ce fait à l’esprit.

Voir la section 3.5 Sensibilité du modèle, à la page

14, pour de plus amples détails.

Page 5: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

2

Figure du résumé 1-1 : Budgets passés/projetés de la défense, et coût du maintien de la structure des Forces

1 Introduction : La viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Le mandat législatif du directeur parlementaire du

budget (DPB) consiste entre autres à fournir des

analyses indépendantes de la situation financière du

pays. Le présent rapport sur la viabilité financière de

la structure de défense propose deux estimations

distinctes : une projection des « sources de fonds »,

c’est-à-dire des budgets futurs de la défense; et une

projection de « l’utilisation des fonds », c’est-à-dire

des coûts du programme de défense nationale.

Le programme de défense nationale du Canada

représente environ 7 % des dépenses totales du

gouvernement, et environ 20 % de ses charges de

programmes directes. À l’heure actuelle, le

Parlement dispose de données incomplètes sur la

viabilité à moyen et à long termes du programme de

défense.

Le MDN publie dans le Rapport sur les plans et les

priorités une estimation de ses besoins financiers sur

les trois prochains exercices, mais cette projection

peut subir d’importantes variations lorsqu’on passe

de la planification à l’exécution2. Par conséquent, les

parlementaires n’ont pas de portrait global de la

viabilité du programme de défense aux niveaux de

financement actuels ou futurs.

Les décisions de budgétisation ou d’acquisition à

court terme peuvent se répercuter pendant de

nombreuses années sur la composition et les coûts

du programme de défense. C’est pourquoi, dans

d’autres pays, on expose en détail les plans de

dépenses de défense à long terme.

Aux États-Unis, le département de la Défense (DoD)

publie, conjointement au budget du président, un

plan où il expose les dépenses militaires prévues sur

les 5 prochaines années. Ce plan est ensuite évalué

par le Congressional Budget Office, qui fournit au

Congrès une projection sur 15 ans des besoins

financiers du DoD3.

Au Royaume-Uni, le ministère de la Défense (MoD),

partiellement en réponse aux problèmes de viabilité

Page 6: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

3

financière du budget de 2009, et dans le sillage de

l’Examen stratégique de la défense et de la sécurité

réalisé en 2010, s’est engagé à attester dans une

déclaration officielle au Parlement l’écart entre le

coût du programme de défense et les allocations

budgétaires à long terme.

Conjointement à cette déclaration, le MoD divulgue

ses plans d’acquisition détaillés sur 10 ans4. Le

National Audit Office du Royaume-Uni, de son côté,

fournit à la Chambre des communes une analyse

indépendante de ces plans, et il entend aussi, à

terme, produire une vérification de l’écart financier

déclaré par le Ministère.

En Australie, le Australian Strategic Policy Institute,

un centre de recherche sur la défense financé par

l’État, produit un rapport annuel sur le budget de la

défense. On y trouve une analyse détaillée des

dépenses, des coûts et des décisions stratégiques

dans une perspective à long terme5.

Certes, les plans à long terme établis aux États-Unis

et au Royaume-Uni peuvent eux aussi subir des

variations à l’étape de l’exécution, mais ils sont

néanmoins communiqués à l’Assemblée législative.

Toutes ces analyses ont pour but fondamental de

renseigner les législateurs et les citoyens de ces pays

sur la viabilité à long terme de leur programme de

défense, et de jeter les bases d’un débat éclairé sur

le budget des forces militaires. Actuellement, le MDN

ne fournit rien de comparable au Parlement du

Canada6.

1.1 Contexte – le portefeuille de la défense

Aux fins de la présente analyse, les dépenses

budgétaires portées au portefeuille de la défense

nationale dans les Comptes publics du Canada sont

considérées comme une approximation acceptable

du budget consacré au maintien de la structure

actuelle des Forces. On peut voir au Tableau 1 ci-

dessous comment les dépenses de la défense sont

réparties dans les Comptes publics.

Il est vrai, comme le montre le tableau, que le

portefeuille englobe des dépenses qui ne sont pas

liées strictement à la structure des Forces, mais ces

montants sont négligeables.

Tableau 1 Portefeuille de la défense nationale du Canada

Organisme Dépenses (M$) Pourcentage

du total

Ministère de la Défense

nationale

18 764,4 98

Centre de la sécurité des

télécommunications (CST)

443,6 2

Comité externe d’examen des

griefs militaires

5,9 -

Commission d’examen des

plaintes concernant la police

militaire

5,5

-

Bureau du commissaire du

CST

1,9 -

Source : Comptes publics du Canada, 2014

1.2 Utilisation des fonds – le programme de défense nationale du Canada

La défense nationale est un programme

gouvernemental dont les trois grands objectifs sont

les suivants7 :

La défense du Canada : protéger les intérêts du Canada au pays et à l’étranger.

La défense de l’Amérique du Nord en partenariat avec les États-Unis.

Contribuer à la paix et à la sécurité internationale.

Page 7: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

4

Ce programme est exécuté par le MDN, et il vise

fondamentalement à défendre les intérêts et la

souveraineté du pays et à assurer la sécurité de tous

les Canadiens.

Plus précisément, le programme de défense

nationale « emploie légitimement, sous la conduite

du gouvernement, des forces armées militaires et

potentiellement létales, au pays et à l’étranger8 ». La

réalisation de ces objectifs repose principalement sur

la capacité du programme de déployer des Forces

militaires.

Le MDN doit donc combiner souplesse, préparation

et capacité, afin de maintenir en tout temps une

force armée de premier ordre, agile et capable de

protéger efficacement les Canadiens au pays, de

demeurer un partenaire solide et fiable sur le

continent, et d’apporter une contribution utile à la

sécurité internationale9.

Le MDN, afin de gérer le programme de défense du

Canada, s’assure de la « disponibilité

opérationnelle » du personnel et de l’équipement.

Autrement dit, il consacre les efforts et les

ressources nécessaires au maintien de leur capacité

de combat prescrite.

Dans le cas de l’équipement, il s’agit d’activités

régulières de renouvellement, de remplacement et

de maintenance, afin d’assurer la capacité de

défense voulue. Quant à la disponibilité

opérationnelle du personnel, elle passe par

l’entraînement régulier, presque toujours avec de

l’équipement.

1.3 Qu’est-ce que la structure des Forces?

La structure des Forces représente la partie de

l’entité militaire qui est conçue pour le combat; elle

décrit l’organisation du personnel militaire, de

l’armement et de l’équipement dans l’optique du

combat, tel que l’exigent les circonstances du conflit.

La structure des Forces considère l’affectation du

personnel militaire, son expertise et le soutien

mutuel entre unités lors des opérations militaires

comme autant d’aspects de la capacité militaire des

Forces armées. Au Canada, l’entité militaire s’appelle

les Forces armées canadiennes.

La partie des Forces apte au combat a grandement

besoin du soutien du personnel non combattant, qui

lui fournit matériel et ressources : il construit et

entretient l’infrastructure et les installations de

soutien des Forces armées canadiennes partout au

pays, réalise des recherches scientifiques et

technologiques sur la défense et la sécurité, et

fournit l’équipement et les technologies nécessaires

à la défense des intérêts du Canada.

Les changements à la structure des Forces peuvent

être causés par l’évolution des méthodes, des

doctrines militaires et des menaces, mais aussi par

les bouleversements technologiques ou budgétaires

à l’échelle de l’économie nationale10.

Aux fins de la présente analyse, les dépenses

engagées à l’appui des Forces combattantes et non

combattantes constituent les coûts de la structure

des Forces du programme de défense. Quant à

l’allocation budgétaire consacrée au soutien de la

structure des Forces, elle est assimilée à la portion

« Défense nationale » des charges de programmes

directes, telle qu’elle est présentée dans les Tableaux

de référence financiers (TRF) du ministère des

Finances11.

1.4 Source de fonds – le budget de la défense au fil des années

Comme le montre la Figure 1-1 ci-dessous, les

dépenses annuelles consacrées à la défense au

Canada ont augmenté, en nombres absolus (indexés

à l’inflation), à un taux annuel moyen de 1,2 % ces

30 dernières années. Mais il y eu de fortes variations

entre les périodes de croissance et de déclin.

Page 8: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

5

Figure 1-1 Dépenses de défense au fil des ans (G$ de 2012)

Sources : Tableaux de référence financiers, Anciens Combattants Canada

Après la fin de la guerre froide en 1989, les dépenses

de défense ont diminué de près de 30 %, en chiffres

absolus, des années 1990 jusqu’à la moitié des

années 2000, période pendant laquelle le Canada

s’est attaqué à son important déficit financier.

Ainsi, au début des années 1990, les Forces

régulières comptaient 87 000 membres, contre

seulement 60 000 en 1999, après l’Examen des

programmes. En 2008, dans le cadre de la SDCD, les

effectifs des Forces régulières sont passés à

70 000 personnes, et ceux de la première réserve, à

30 000. Aujourd’hui, ils sont de 68 000 et de

27 000 personnes respectivement12,13.

Comme on peut le voir à la Figure 1-2 , les dépenses

de défense ont représenté environ 1,7 % du PIB de

1984 à 1991. Par la suite, cette proportion a

constamment diminué, passant de 1,5 % en 1992 à

1 % en 1999. Elle est restée à ce niveau jusqu’en

2010, année où les augmentations promises dans la

SDCD ont porté les dépenses de défense à 1,3 % du

PIB.

Figure 1-2 Les dépenses de défense, exprimées comme proportion des charges de programmes directes (à gauche) et du PIB (à droite)

Sources : DPB, Tableaux de référence financiers.

Depuis 1995, les dépenses de défense n’ont pas

dépassé 1,3 % du PIB. En 2013-2014, elles étaient de

21,5 milliards de dollars, ce qui équivalait à 1,1 % du

PIB. Depuis 30 ans, elles représentent relativement

constamment de 18 à 22 % de l’ensemble des

charges de programme directes.

La Figure 1-3 illustre l’importance relative des

dépenses de défense et des autres grandes charges

publiques par rapport à la totalité des dépenses du

gouvernement.

Page 9: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

6

Figure 1-3 Dépenses du gouvernement fédéral (pourcentage du total)

Source : Tableaux de référence financiers

Pendant la période couverte, les dépenses de

défense ont représenté en moyenne 6,9 % de

l’ensemble des dépenses gouvernementales (frais de

la dette publique, transferts aux particuliers et

transferts aux autres ordres de gouvernement) ces

30 dernières années.

2 Méthodologie – évaluation de la viabilité financière du programme de défense

Le présent rapport présente une évaluation du coût

de la structure des Forces actuelle, une projection de

ce coût sur les 10 prochaines années, et une

comparaison avec les projections budgétaires pour la

même période. Il présume qu’aucun changement

substantiel ne sera apporté à la structure des Forces,

puisqu’il se veut une estimation de référence, fondée

sur le statu quo, qui servira de point de départ aux

discussions.

2.1 Prévoir les budgets de la défense

Le ministère de la Défense nationale présente sa

demande de crédits budgétaires au Parlement selon

la comptabilité d’exercice partielle14, mais les

prévisions budgétaires du DPB se fondent plutôt,

elles, sur les dépenses réelles enregistrées par le

ministère des Finances dans les Tableaux de

référence financiers, ainsi que sur les dépenses

projetées inscrites dans les budgets fédéraux

successifs.

Les unes et les autres sont calculées selon la

comptabilité d’exercice. Le coût de la structure des

Forces (voir section 2.2, Projection du coût futur de

la structure des Forces, ci-dessous) est lui aussi

calculé selon la comptabilité d’exercice. Voir

l’encadré 1 ci-dessous pour une explication de ce

choix15.

Tous les chiffres cités dans la présente section

viennent des Tableaux de référence financiers, des

plans budgétaires de 2010, 2012 et 2014, ou des

documents fournis par le ministère des Finances à la

demande du DPB16; ces documents présentaient une

estimation des allocations annuelles de la défense de

2008 à 202017. De plus, le DPB a intégré à ses

estimations budgétaires la hausse projetée des

salaires que ne mentionne pas le Ministère dans son

budget prévu18. Sauf indication contraire, tous les

chiffres sont en dollars constants de 2012, calculés

d’après l’Indice des prix à la consommation de

Statistique Canada19.

Page 10: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

7

Encadré 1 La budgétisation au gouvernement fédéral : comptabilité de trésorerie modifiée et comptabilité d’exercice

Box 1Le gouvernement du Canada utilise la comptabilité d’exercice depuis le budget de 2003. Cette méthode permet de fournir de l’information sur : a) la capacité du gouvernement de remplir ses obligations financières à court et à long termes; b) la capacité du gouvernement de maintenir le niveau et la qualité de ses services et de financer de nouveaux programmes

20.

Box 2Le présent rapport s’intéresse à la viabilité future du programme de défense. Les montants alloués au MDN dans les budgets fédéraux sont les ressources que le gouvernement s’engage à fournir pour l’exécution du programme de défense. Ces fonds sont donc affectés dans le cadre financier selon la comptabilité d’exercice. Or, les ministères utilisent plutôt la comptabilité de trésorerie pour adresser leurs demandes de fonds au Parlement, question d’avoir assez de ressources pour exécuter leur programme à court terme. Cette méthode ne fournit cependant pas assez de renseignements pour répondre aux points a) et b) ci-dessus.

Box 3Pour un même exercice, les dépenses peuvent être considérablement différentes selon qu’on les calcule avec l’une ou l’autre méthode. Par exemple, en 2013-2014, le MDN a dépensé 19,2 milliards de dollars selon la comptabilité de trésorerie, mais a utilisé 21,5 milliards de dollars de sa « marge de manœuvre financière » selon la comptabilité d’exercice. La différence représente les frais hors caisse de l’amortissement, ou de l’usure, des immobilisations et de l’équipement du MDN, ainsi que les fonds réservés aux dépenses en immobilisations actuelles ou futures.

Depuis l’introduction de la Stratégie de défense Le

Canada d’abord en 2008, la récession qui a débuté la

même année a entraîné la modification, dans les

budgets fédéraux successifs, des dépenses

consacrées au programme de défense.

Dans la Figure 2-1, si on suit la ligne grise, on voit

d’abord les dépenses réelles au cours des années,

puis une suite de réductions annoncées tout d’abord

dans le budget de 2010. À noter que les dépenses de

défense comprennent les augmentations liées aux

opérations militaires à l’étranger et aux Jeux

olympiques de 201021.

Figure 2-1 Budgets de la défense passés et prévus ($ de 2012)

Sources : Tableaux de référence financiers, DPB

2.2 Projection du coût futur de la structure des Forces

Afin de déterminer la viabilité du programme de

défense, il fallait estimer le coût du maintien de la

structure des Forces à long terme.

Pour obtenir ces chiffres, le DPB a engagé Decision

Analysis Services Limited (DAS), un cabinet-conseil du

Royaume-Uni qui a fourni des services similaires au

ministère de la Défense britannique.

2.2.1 Le modèle des structures des Forces de DAS

Le modèle des structures des Forces de DAS cherche

à révéler l’impact à long terme des principaux

Page 11: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

8

inducteurs de coût sur les besoins budgétaires futurs

du ministère de la Défense. Il se fonde sur une série

de postulats (Annexe A – postulats du modèle) et

projette l’ensemble des coûts – soutien, « dents-

queue » et acquisition d’équipement – sur une

période prolongée (plutôt que sur trois ans, comme

c’est habituellement le cas). La Figure 2-2 ci-dessous

illustre le fonctionnement du modèle.

Figure 2-2 Aperçu du modèle des structures des Forces

Source : DAS

Ce modèle permet de mieux comprendre les

enveloppes budgétaires, les contraintes et les

conséquences probables des grands changements de

la politique de défense. Il ne sert pas à obtenir des

prévisions annuelles, mais plutôt à dégager les

tendances de coûts à long terme. Il ne s’arrête pas

aux programmes d’approvisionnement individuels ni

aux changements à court terme des programmes de

gestion, comme le plan d’action pour la réduction du

déficit22. Il ne propose pas non plus d’analyse

détaillée, de bas en haut, des structures des Forces

présentes ou futures.

2.2.2 Fonctionnement du modèle

Le modèle de DAS se fonde sur des données tirées de

sources publiques, auxquelles on applique des

techniques paramétriques23. L’estimation

paramétrique permet de prévoir des coûts futurs en

fonction de relations observées et validées

antérieurement. Par exemple, il existe une relation

statistique bien attestée entre le poids d’un avion à

réaction et ses coûts de construction et de soutien.

Le modèle de DAS combine des douzaines de

relations de cet ordre. Il intègre les résultats de

recherches poussées sur l’indice d’indexation des

différentes catégories d’équipement militaire, le coût

unitaire de l’équipement contemporain, les

tendances quant aux délais d’élaboration et à la

durée de vie, et les taux réels de croissance des frais

de personnel. Une partie de ces données se trouve

dans le Source Book of Defence Equipment Costs24.

Le modèle a besoin qu’on emploie les unités

traditionnelles des structures des Forces de première

ligne (navire, régiment, escadron, etc.); c’est ainsi

qu’il peut estimer la taille des effectifs

correspondants (en formation, au sein du

commandement, dans l’administration, etc.) et, ainsi,

les frais de personnel de base.

2.2.2.1 Acquisition d’équipement À tout moment de la période étudiée, un certain

nombre de projets majeurs d’acquisition

d’équipement sont en cours. Dans le modèle, les

écarts d’un exercice à l’autre sont réduits, afin de

lisser le cycle de financement.

Le modèle attribue donc à chaque projet, chaque

année, une somme moyenne pour son financement.

Cette façon de faire ne permet pas de représenter les

détails d’un projet donné à une année donnée, mais

le but du modèle est autre : prévoir combien il en

coûtera pendant la période étudiée pour mener à

bien l’ensemble des projets qui coïncident avec elle.

Les facteurs de coûts indirects – projets mineurs,

logistique, frais de formation, effectif des postes de

soutien – sont établis à partir des données de la

structure des Forces actuelle. Ces facteurs sont

appliqués toutes les années.

Page 12: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

9

Pour calculer le montant annuel requis pour

maintenir une structure des Forces donnée, le

modèle prévoit la démarche ci-dessous :

Détermination des stratégies de remplacement de chaque catégorie d’équipement et calcul des coûts de l’équipement de remplacement, conformément à un cycle normalisé (Figure 2-3).

Figure 2-3 Le processus d’acquisition d’une unité d’équipement, représenté par le cycle de projet typique du secteur industriel

Source : DAS (DES = date d’entrée en service)

Détermination des effectifs de première ligne nécessaires à la structure, et calcul, par application du ratio antérieur, des frais de personnel totaux de la structure (employés de soutien compris).

Calcul du coût des pièces de rechange, des réparations et des produits consomptibles liés à la structure des Forces.

Présomption que les responsables de l’acquisition commencent à travailler activement à l’élaboration de l’équipement de prochaine génération dès la fin du programme d’acquisition en cours. On présume également que le cycle

d’acquisition est composé d’étapes qui se répètent sans cesse : élaboration, investissement de production, production et soutien (voir Figure 3- ci-dessous).

Ajout des frais de soutien du personnel et autre; on obtient ainsi le coût total d’utilisation du matériel.

Saisir les données ci-dessous pour les années de début et de fin de la période étudiée, et pour les années qui les suivent immédiatement; on obtient ainsi le taux de croissance (ou de baisse) des coûts. Le modèle calcule, pour le début et la fin de la période de planification, le taux de dépenses et le taux d’indexation des coûts nécessaires au maintien de la structure des Forces.

Par interpolation de ces données de début et de fin (dépenses et taux de changement des dépenses), le modèle estime les dépenses pour chacune des années de la période étudiée, et ce, pour les neuf catégories de dépenses – immobilisations, personnel et autres coûts opérationnels, dans les domaines de la Marine, de l’Armée de terre et de l’Aviation.

Enfin, le modèle fait la somme de tous ces calculs pour obtenir approximativement les dépenses de défense totales nécessaires au maintien dans l’avenir de la structure des Forces telle qu’elle se présente actuellement, sans perte de capacité25.

Page 13: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

10

Figure 2-4 L’acquisition est un processus continu

Source : DAS

Par conséquent, à toute année donnée (par exemple

l’année « A »), plusieurs processus d’acquisition

d’équipement sont en cours simultanément, mais à

des étapes différentes. C’est ainsi que sont calculés

les coûts moyens d’élaboration, de production et de

soutien, à l’aide des relations paramétriques décrites

ci-dessus.

Les coûts d’utilisation de l’équipement comprennent

les pièces de rechange, les réparations et les autres

mesures nécessaires au maintien en service de

l’équipement; le logement et le soutien du personnel

(bases, infrastructure, etc.); et d’autres activités de

soutien (notamment, les importantes ressources

consacrées aux processus d’acquisition de matériel

de défense).

Le coût des pièces de rechange, des réparations et

des articles consomptibles est estimé à partir du coût

de production, de la quantité et de la nature de

l’équipement, au moyen de relations statistiques

tirées de l’analyse d’un grand nombre de projets

comparables antérieurs.

Le coût du soutien du personnel et les dépenses

d’appui aux autres activités (comme les processus

d’acquisition) sont considérés comme coûts

indirects, respectivement, du personnel et des

dépenses d’immobilisations. Le ratio entre le soutien

du personnel et les coûts du personnel, et entre les

autres activités de soutien et les dépenses

d’immobilisations, est tiré du budget de la défense

du Royaume-Uni en 2007 (et calibré à la situation

canadienne)26.

2.2.3 Calibration et entrants – adapter le modèle au Canada

Le modèle a été calibré en fonction des entrants

actuels et passés de la structure des Forces du

Canada. Pour ce faire, les sources de données ont dû

être regroupées, synthétisées, triangulées avec

précision27.

Le modèle de DAS permet d’estimer ce qu’il en

coûterait de maintenir la structure des Forces telle

qu’elle existait en 2012. Afin que la courbe des

dépenses ait une pente raisonnable, le modèle a été

calibré selon l’année 1995. Cette année a été choisie

parce qu’elle est la dernière année des grandes

compressions budgétaires apportées pendant

l’Examen des programmes; elle représente donc le

point-milieu de l’impact de ces réductions.

Avec l’aide d’experts et au moyen de données du

domaine public, le DPB a dressé l’inventaire des

Page 14: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

11

éléments des structures des Forces de 1995 et

de 2012.

Il fallait saisir dans le modèle les dépenses ventilées

selon trois catégories : immobilisations, personnel et

autres. Le MDN ne présente pas ses dépenses sous

cette forme, mais le DPB a pu trouver les données

nécessaires dans les comptes publics, avec l’aide

d’analyses indépendantes28.

Une fois établis les entrants pour 1995, le modèle a

pu estimer les dépenses nécessaires au passage de la

structure des Forces de 1995 à celle de 2012. On a

ensuite comparé cette estimation aux dépenses

réelles engagées pendant cette période.

Le plus difficile a été d’aligner la base de coûts du

modèle sur celle du MDN. Pour s’acquitter de cet

aspect de la calibration, il a fallu normaliser les taux

d’inflation et de change, et veiller à ce que les

modifications aux catégories d’équipement soient

prises en compte adéquatement dans le modèle.

3 Résultats

Le modèle de DAS présente ses résultats sous

diverses formes. Afin de nous assurer que les

prédictions du modèle étaient raisonnables dans le

contexte canadien, nous avons confronté les

changements du coût estimé de la structure des

Forces de 1995 à 2014 avec les dépenses de défense

réelles engagées pendant cette période.

Nous avons aussi ventilé les dépenses de défense par

domaine (air, terre, mer) et catégorie de dépenses. Si

les changements prévus aux coûts et à la

composition de la structure des Forces se

rapprochent suffisamment de la réalité, c’est que le

modèle est fiable.

Le modèle présume que les immobilisations seront

constamment renouvelées et remplacées. Il réduit

aussi au minimum les variations d’une année à

l’autre. À chaque exercice, il pourra y avoir un léger

écart entre les dépenses réelles et les coûts

« théoriques » du modèle.

3.1 Coût de la structure des Forces vs dépenses

La Figure 3-1 ci-dessous illustre le caractère cyclique

des dépenses de défense au Canada. Les plus

importantes compressions budgétaires dans le cadre

de l’Examen des programmes ont eu lieu de 1995

à 2004; c’est la période de « sous-investissement ».

Pendant cette période, les dépenses de défense

cumulatives ont été d’environ 13,4 milliards de

dollars inférieures à ce qui était requis selon notre

modèle pour maintenir la structure des Forces

existante. Plusieurs études réalisées depuis ont

confirmé que le programme de défense présentait

alors des symptômes de détérioration29, 30, 31, 32.

Figure 3-1 Coût estimé de maintien de la structure des Forces, par comparaison aux dépenses réelles, 1995-2014 (G$ de 2012)

Sources : Tableaux de référence financiers, modèle de DAS

Une fois que la situation financière du pays a été

stabilisée, le gouvernement a commencé l’année

suivante à augmenter les dépenses de défense,

conscient que le programme de défense devait être

rebâti33.

« Période de sous-

investissement »

« Période de

surinvestissement »

»

Page 15: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

12

C’est pourquoi les dépenses cumulatives ont dépassé

les « coûts théoriques » de quelque 20,9 milliards de

dollars pendant la période allant de 2005 à 2014. De

1995 jusqu’à la fin de l’exercice 2014, l’excédent

cumulatif entre le coût estimé du soutien à la

structure des Forces et les fonds réellement

dépensés s’est maintenu à 7,5 milliards de dollars.

Mais les compressions budgétaires apportées

récemment au MDN semblent annoncer une

nouvelle période potentielle de sous-investissement.

Le modèle montre que le coût du maintien de la

structure des Forces actuelle augmentera de 2,5 %

par année (indexé à l’inflation) de 2014 à 2025

(Figure 3-6 ci-dessous), alors que la croissance

prévue du PIB réel sera de 1,6 % par année pendant

la même période.

3.2 Coût de la structure des Forces : l’Armée, la Marine et l’Aviation

La Figure 3-2 illustre les coûts de la structure des

Forces, ventilés selon le domaine (air, terre, mer), de

1995 à 2014.

Figure 3-2 Budgets de la défense, ventilés par domaine, 1995-2014 (G$ de 2012)

Source : modèle de DAS. TCC = taux de croissance composé

L’Armée représente la majeure partie des dépenses

de 1995 à 2014, mais sa proportion du total a

diminué parce que l’indexation des coûts y est

relativement faible. En effet, les trois branches ont

apporté des changements à leur structure des Forces

de 1995 à 2014, mais c’est dans la Marine et

l’Aviation que ces changements ont été

particulièrement coûteux34.

3.3 Coût de la structure des Forces : personnel, immobilisations, autres dépenses

La Figure 3-3 illustre les coûts de la structure des

Forces, ventilés selon trois catégories de dépenses :

effectifs, immobilisations, autres.

Figure 3-3 Budgets de la défense, ventilés par catégorie de dépenses, 1995-2014 (G$ de 2012)

Source : modèle de DAS. TCC = taux de croissance composé

Les frais de personnel représentaient 51 % des

dépenses de défense en 1995, contre seulement

47 % en 2014. Par contre, la proportion représentée

par les dépenses en immobilisations est passée

de 18 % à 23 % du budget total pendant la même

période35.

Page 16: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

13

La Figure 3- illustre l’augmentation considérable des

dépenses en immobilisations qu’il faudrait engager

sur les dix prochaines années pour maintenir telle

quelle la structure des Forces.

Figure 3-4 Dépenses de défense projetées, ventilées par article courant de dépense, 2015-2025 (G$ de 2012)

Source : modèle de DAS. TCC = taux de croissance composé

3.4 Scénarios de prévisions budgétaires

Le gouvernement ne publie pas selon la comptabilité

d’exercice les allocations budgétaires qu’il accordera

à long terme au programme de défense; seules

existent les données obtenues par le DPB jusqu’à

l’exercice 2019-2020. Dans son Rapport sur les plans

et les priorités (RPP), le MDN présente, selon la

comptabilité d’exercice partielle, les sommes qu’il

demandera au Parlement ces trois prochaines

années.

Comme des chercheurs l’ont signalé36, les chiffres du

RPP ne donnent pas nécessairement une idée exacte

des dépenses qui seront réellement engagées, et la

comptabilité d’exercice partielle ne permet pas de

juger de la viabilité financière à long terme (voir l’0

ci-dessus).

En se fondant sur l’exercice 2019-2020, le dernier

pour lequel le ministère des Finances a révélé les

allocations budgétaires prévues, le DPB a appliqué

les trois scénarios à moyen terme suivants :

Le taux de croissance réelle des dépenses de défense

sera de 0 % (autrement dit, la croissance sera égale

au taux d’inflation prévu). D’aucuns diront que c’est

le pire des scénarios, mais il est conforme à la SDCD

révisée37.

Les dépenses de défense représenteront la même

proportion moyenne du PIB que depuis 20 ans. C’est

le statu quo par rapport à l’année de référence. Au

cours de la dernière décennie, les dépenses de

défense se sont maintenues à 1,1 % du PIB, ce qui se

rapproche du taux de croissance prévu du PIB réel38.

Le taux de croissance réelle des dépenses de défense

sera de 1,9 % par année, comme depuis 1995.

Page 17: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

14

Figure 3-5 Budgets passés/projetés de la défense, et coût du maintien de la structure des Forces (2008-2025)

Sources : Tableaux de référence financiers, DPB, projections du modèle de DAS

La figure 3-5 illustre les résultats produits par le

modèle selon les trois scénarios. La ligne bleue

continue désigne le coût estimé du maintien de la

structure des Forces, et la ligne rouge, les dépenses

de défense passées et les budgets militaires prévus

jusqu’en 2020. Les lignes pointillées représentent les

projections selon les trois scénarios décrits ci-dessus.

L’écart entre la ligne bleue et chacune des trois lignes

pointillées illustre la différence entre le coût estimé

de la structure des Forces et le financement accordé.

Autrement dit, cet écart montre dans quelle mesure

le financement estimé est insuffisant pour maintenir

la structure des Forces de 2012. Tous les chiffres sont

en milliards de dollars. Les nombres négatifs

indiquent que le budget est inférieur au coût estimé,

tandis que les nombres positifs révèlent un excédent

du budget sur le coût. L’écart cumulatif le plus faible

est de 33,0 milliards de dollars : on l’obtient par

l’addition des chiffres aux lignes « Écart selon les

dépenses passées / le budget actuel » et « Écart au

taux de croissance depuis 1995 ». L’écart cumulatif le

plus élevé est de 42,1 milliards de dollars; c’est celui

qui se concrétiserait si la croissance des dépenses de

défense de 2015 à 2020 ne dépassait pas le taux

d’inflation.

3.5 Sensibilité du modèle

Le modèle révèle que les allocations budgétaires

projetées pour la défense ne suffiront plus, à partir

de 2015, à assurer le maintien des capacités de la

structure des Forces de 2012. Toutefois, le modèle

est sensible à la taille de la structure des Forces.

Ainsi, la Figure 3-6 illustre l’écart entre le budget

estimé et le coût estimé du maintien de la structure

des Forces de trois années différentes : celle de

1994, celle de 1996 et celle de 1997. Par rapport à

celle de 2012, la première est de taille supérieure; la

deuxième, de taille comparable; et la troisième, de

taille inférieure. Par exemple, l’effectif des Forces

régulières n’était plus que de 60 300 soldats en 1997,

contre 75 693 en 1994. Évidemment, les coûts

d’équipement et de fonctionnement sont moindres

Page 18: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

15

quand l’armée compte presque 15 000 soldats en

moins.

Lorsque le modèle est calibré à la structure des

Forces de 1994, l’écart cumulatif est de 54,2 à

63,3 milliards de dollars. Il est de 33,0 à 42,1 si le

modèle est calibré à 1995, et de 10,1 à 19,1 si la

calibration est selon l’année 1996. Si l’année de

référence est 1997, le modèle calcule alors un

excédent de 9,7 à 18,7 milliards de dollars39.

Figure 3-6 Sensibilité des coûts estimés de la structure des Forces selon différentes années de calibration

Source : Projections du modèle de DAS

Évidemment, les structures des Forces de grande

taille, comme celle de 1994 (ligne bleue pointillée),

impliquent des coûts estimés accrus, tandis que les

structures des Forces allégées, comme celle de 1997

(ligne mauve continue), s’accompagnent de coûts

réduits. Ces résultats montrent ce qu’il en coûterait

de maintenir des structures de différents niveaux

dans le contexte du budget estimé.

Mais c’est le maintien de la structure des Forces de

2012 qui s’aligne le mieux sur les objectifs de la

SDCD. La baisse des dépenses de défense annoncée à

partir du budget de 2012 semble ouvrir une nouvelle

période de sous-investissement. Même si les fonds

supprimés dans les budgets récents étaient

réaffectés à des exercices subséquents, il faudrait

que les dépenses de défense augmentent

considérablement, par rapport à leur tendance

moyenne de 1,9 %, pour égaler les coûts du maintien

de la structure des Forces sur les 10 prochaines

années; rappelons que ces coûts augmenteront, eux,

de 2,5 %. Certainement, la croissance à long terme

de 0,6 % projetée par le MDN dans la SDCD ne suffira

pas40.

4 Conclusion et observations

Le modèle nous montre que, en raison du

sous-investissement des années 1990, la période se

terminant au début des années 2000 a été marquée

par un écart de financement cumulatif.

C’est seulement dans la seconde moitié des années

2000 que les dépenses ont augmenté suffisamment

pour maintenir et rebâtir (jusqu’à un certain point) la

capacité de la structure des Forces. Mais les

Page 19: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

16

compressions apportées récemment laissent

présager le retour de l’écart de financement, dès cet

exercice.

Ce n’est pas l’objectif de la présente étude que de

conjecturer les conséquences de cet écart de

financement41, mais on peut affirmer que si les coûts

du programme de défense l’emportent sur les

ressources qui lui sont allouées, la structure de

forces actuelle subira une diminution de ses

capacités, c’est-à-dire une réduction du nombre et

de la variété de ses biens d’équipement et

potentiellement de ses effectifs42. Et le

gouvernement n’atteindra alors plus ses objectifs de

la SDCD.

Quel sera le rôle futur du programme de défense?

Comment la structure des Forces l’appuiera-t-elle?

Quel budget lui consacrera-t-on? Autant de

questions auxquelles devront répondre nos

décideurs.

Page 20: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

17

Annexe A – postulats du modèle

Les dépenses en immobilisations sont les dépenses consacrées :

aux Forces armées et aux Forces de maintien de la paix

au ministère de la Défense et aux autres organismes gouvernementaux participants à la défense

aux Forces paramilitaires, lorsqu’elles sont formées, équipées et mises en disponibilité aux fins d’opérations militaires

aux activités spatiales militaires

Les frais de personnel sont :

les dépenses consacrées au personnel actuel (militaire et civil)

les pensions de retraite du personnel militaire

les services sociaux accordés au personnel militaire et à leurs familles

Les dépenses d’acquisition sont les dépenses consacrées :

à la recherche développement militaire

à la construction militaire

à l’aide militaire (fait partie des dépenses du pays donateur)

Dépenses exclues :

Défense civile

Dépenses actuelles liées à une activité militaire antérieure

Prestations aux anciens combattants

Démobilisation

Conversion des usines de fabrication d’armements

Destruction d’armements

Page 21: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

18

Bibliographie

Loi sur le Parlement du Canada, L.R.C. (1985), ch. P-1, gouvernement du Canada, art. 79.1, Ottawa, 2007. Future Years Defense Program (FYDP), 2010, consulté le 4 novembre 2014, https://dap.dau.mil/acquipedia/Pages/ArticleDetails.aspx?aid=a2cc2ade-6336-433e-a088-42f497cdf7ef. Bland, D. L. et B. MacDonald. « Canada's Defence and Security Policies after 2011: Missions, Means and Money », Canada's National Security in the Post-911 World, Strategy, Interests and Themes, D. S. McDonough, Toronto, University of Toronto Press, 2012, p. 227. Cohen, A. While Canada Slept, Toronto, McClelland & Stewart, 2003. DeKerckhove, F. et G. Petrolekas. « Les perspectives stratégiques du Canada », Cahier Vimy, Institut de la Conférence des associations de la défense, 2014, p. 57-64. Ministère des Finances. Tableaux de référence financiers, octobre 2014, gouvernement du Canada, Ottawa. Douglas L. Bland, dir. Canada Without Armed Forces, Montréal, McGill-Queen's University Press, 2004. Hood, J. Investment Planning at National Defence, document présenté au Financial Management Institute, Ottawa, 22 janvier 2015. International Society of Parametric Analysts. Parametric Estimating Handbook, Vienna, Virginie, I.S.P.A., 2008. National Audit Office. Ministry of Defence Equipment Plan 2012-2022, Londres, 2013. Défense nationale et Forces armées canadiennes. « Stratégie de défense Le Canada d'abord», 2008, consulté le 5 octobre 2014, http://www.forces.gc.ca/assets/FORCES_Internet/docs/fr/a-propos/CFDS-SDCD-fra.pdf.

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Page 22: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

19

Notes de fin

1 Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2008.

2Par exemple, le budget de 2014 a supprimé 3,1 milliards de dollars

du budget d’acquisition de la défense, mais une partie seulement de cette réduction se reflète dans les plans de dépenses de 2014-2015 à 2016-2017 du MDN. 3Future Years Defense Program (FYDP), 2010.

4 National Audit Office, 2013.

5 Thomson, 2014.

6En 1998, le vérificateur général a conclu que le MDN manquait de

fonds pour moderniser les Forces armées du pays. Voir Bureau du vérificateur général du Canada, 2008. 7 Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2014.

8 Bland et MacDonald, 2012.

9 Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2008.

10 United States Air Force, 2010.

11 Ministère des Finances, 2014.

12 Ministère de la Défense nationale, 2011.

13 Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2014.

14 La comptabilité d’exercice peut être intégrale, modifiée ou

partielle. La principale différence entre la comptabilité d’exercice « modifiée » et « intégrale » est que, selon la comptabilité « modifiée », les actifs non financiers comme les immobilisations sont portés aux dépenses lors de leur acquisition, alors que selon la comptabilité « intégrale », ils le sont à mesure qu’ils sont consommés (amortissement) le long de leur vie utile. La comptabilité d’exercice « partielle » utilisée pour les budgets des dépenses est à mi-chemin entre la comptabilité de trésorerie et la comptabilité d’exercice « modifiée ». Selon la comptabilité d’exercice « partielle » utilisée actuellement par les ministères, certaines dépenses (mais non pas toutes) sont constatées par régularisation; les recettes sont enregistrées selon la comptabilité de trésorerie intégrale; et les actifs non financiers sont portés aux dépenses lors de leur acquisition. Voir Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, 2000. 15

L’« enveloppe selon la comptabilité d’exercice » est le financement réservé à la défense dans le cadre financier. C’est dans cette enveloppe que sont puisés, l’année de l’achat, les fonds pour les acquisitions d’immobilisations. C’est également cette enveloppe qui contient les fonds d’exploitation servant à la mise en œuvre de la SDCD et au maintien des nouvelles dépenses en capital. Hood, 2015. 16

Le DPB est habilité par la loi à réclamer des données économiques et financières aux ministères; ces demandes ainsi que les réponses du gouvernement se trouvent sur le site Web du DPB. Les plans budgétaires fédéraux de 2011 et

de 2013 sont exclus en raison du peu d’information sur le budget de défense. 17

http://www.pbo-dpb.gc.ca/files/files/Response_IR0115_FC_Defence_Expenditures_FR.pdf. 18

Par suite de rajustements aux modalités d’emploi, à moins qu’il y ait gel du budget de fonctionnement, les ministères sont compensés à même une affectation de crédit central, le crédit 15 du SCT. Voir http://www.tbs-sct.gc.ca/ems-sgd/sups/c/20142015/atbcv-accct-fra.asp. Le DPB présume que les salaires nominaux augmenteront de 4,5 % par année (http://www.pbo-dpb.gc.ca/files/files/Fed_Personnel_Expenses_FR.pdf), c’est-à-dire d’environ 2,5 % par année en dollars constants. Le rajustement pour transfert de dépenses à Services partagés Canada est de 306 millions de dollars par année selon le Budget des dépenses de 2012-2013 (http://www.tbs-sct.gc.ca/est-pre/20122013/me-bpd/me-bpd-fra.pdf). Le DPB présume que des services de valeur comparable seront fournis au MDN, ce qui réduira d’autant ses dépenses. 19

L’indice implicite du PIB, qui mesure le changement survenu dans le prix de tous les biens et services produits (plutôt que dans un panier fixe de biens, comme dans le cas de l’indice des prix à la consommation), serait également un étalon valide; les résultats seraient à peu près les mêmes. 20

Conseil sur les normes comptables pour le secteur public, 2014. 21

Ces augmentations ont totalisé 6 milliards de dollars (dollars constants de 2012) de 2001 à 2011. Ce montant diffère du coût de la mission en Afghanistan tel que le DPB l’avait estimé en 2008 (http://www.pbo-dpb.gc.ca/files/files/Publications/Afghanistan_Fiscal_Impact_FINAL_F_WEB.pdf). Le MDN publie le coût des opérations militaires dans son RPP. Parfois, il doit absorber une partie du coût des opérations à l’étranger dans son budget existant. Ces chiffres ont été obtenus du MDN dans le cadre de la demande d’information A 2011-1104. 22

Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, 2011. 22

Pour de plus amples renseignements sur l’estimation paramétrique des coûts, voir International Society of Parametric Analysts, 2008. 24

Pugh, 2007. 25

Le maintien de la capacité ne se traduit pas nécessairement par le remplacement de chaque unité par une autre unité; parfois, le nombre d’unités sera moindre, mais la capacité de chacune, supérieure. 26

Par exemple, des ajustements ont été apportés à la taille des différents éléments de la structure des Forces (bataillon,

Page 23: Viabilité financière du programme de défense nationale du Canada

Viabilité financière du programme de défense nationale

20

escadron, régiment, navire) entre le Royaume-Uni et le Canada. 27

Le DPB expliquera dans un autre document la méthodologie et les hypothèses qu’il a utilisées pour recueillir et évaluer les entrants de la structure des Forces. 28

Stone, 2009. 29

Cette détérioration se manifestait particulièrement par une pénurie de personnel qualifié, la diminution des capacités de transport aérien et de surveillance dans l’Aviation, la perte de plateformes de commande, de contrôle et de défense aérienne dans la Marine, et le manque d’équipement de tir direct/indirect et de véhicules de soutien logistique sur roues dans l’Armée. Douglas L. Bland, 2004. 30

Exemple très récent : la disparition complète de la capacité de ravitaillement en mer dans la Marine. 31

Institut de la Conférence des associations de la défense, 2002. 32

Cohen, 2003. 33

Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2008. 34

Il ne faut pas oublier que l’Armée, qui a de forts besoins en effectifs, dépend dans une moindre mesure que la Marine et l’Aviation des biens immobilisés. Les changements aux dépenses en immobilisations ont donc un effet disproportionné dans ces deux secteurs. 35

Ces chiffres se rapprochent de ceux que l’on trouve dans les Comptes publics, mais ils n’y sont pas identiques. Les dépenses d’immobilisations projetées par le modèle sont plus élevées que dans les Comptes publics en raison des entrants existants de la structure des Forces, et parce que des fonds d’immobilisations considérables sont restés inutilisés au MDN ces dernières années. 36

Perry, 2014. 37

Le TCC des dépenses de défense de 2008 (point de départ de la SDCD) à 2020 (dernière année pour laquelle nous avons de l’information sur le budget du MDN) est pratiquement nul en valeur constante. 38

Le DPB prévoit que le taux de croissance du PIB réel sera de 1,5 % par année de 2020 à 2025. 39

La modification de l’année de calibration déplace la courbe des dépenses, mais n’en change pas la pente : celle-ci dépend des deux exercices pour lesquels le DPB dispose de données sur la structure des Forces réelle, soit 2012 et 1995. 40

Défense nationale et Forces armées canadiennes, 2008. 41

Dans ses Perspectives stratégiques du Canada 2014 (DeKerckhove, F. et G. Petrolekas, Cahier Vimy, Institut de la Conférence des associations de la défense, 2014), l’Institut

de la CAD offre une réflexion des plus intéressantes sur la sécurité du Canada, et décrit cinq scénarios d’avenir pour la structure des Forces, avec les besoins budgétaires de chacun. 42

Par exemple, le modèle montre que le budget de défense projeté serait plus que suffisant au maintien d'une structure des Forces semblable à celle de 1997. Mais la structure des Forces actuelle devra être allégée si on veut l'équilibre avec le budget prévu.