Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

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Rapport JEFF 18 ÉVALUATION ET ANALYSE DES DONNÉES RELATIVES AUX RÉSONANCES NUCLÉAIRES F.H. Fröhner Forschungszentrum Karlsruhe Institut für Neutronenphysik und Reaktortechnik D-76021 Karlsruhe, Allemagne Avec la contribution de Électricité de France et du Commissariat à l’énergie atomique AGENCE POUR L’ÉNERGIE NUCLÉAIRE ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES

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Page 1: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

Rapport JEFF 18

ÉVALUATION ET ANALYSE DES DONNÉES RELATIVES

AUX RÉSONANCES NUCLÉAIRES

F.H. FröhnerForschungszentrum Karlsruhe

Institut für Neutronenphysik und ReaktortechnikD-76021 Karlsruhe, Allemagne

Avec la contribution de

Électricité de France

et du

Commissariat à l’énergie atomique

AGENCE POUR L’ÉNERGIE NUCLÉAIREORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES

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ORGANISATION DE COOPÉRATION ETDE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES

En vertu de l‘article 1er de la Convention signée le 14 décembre 1960, à Paris, et entrée en vigueur le 30 septembre1961, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a pour objectif de promouvoir des politiquesvisant :

• à réaliser la plus forte expansion de l’économie et de l’emploi et une progression du niveau de vie dans les paysMembres, tout en maintenant la stabilité financière, et à contribuer ainsi au développement de l’économiemondiale ;

• à contribuer à une saine expansion économique dans les pays Membres, ainsi que les pays non membres, en voie dedéveloppement économique ;

• à contribuer à l’expansion du commerce mondial sur une base multilatérale et non discriminatoire conformémentaux obligations internationales.

Les pays Membres originaires de l’OCDE sont : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Canada, le Danemark,l’Espagne, les États-Unis, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Islande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, lePortugal, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse et la Turquie. Les pays suivants sont ultérieurement devenus Membres paradhésion aux dates indiquées ci-après : le Japon (28 avril 1964), la Finlande (28 janvier 1969), l’Australie (7 juin 1971), laNouvelle-Zélande (29 mai 1973), le Mexique (18 mai 1994), la République tchèque (21 décembre 1995), la Hongrie (7 mai1996), la Pologne (22 novembre 1996) et la Corée (12 décembre 1996). La Commission des Communautés européennesparticipe aux travaux de l’OCDE (article 13 de la Convention de l’OCDE).

L’AGENCE DE L’OCDE POUR L’ÉNERGIE NUCLÉAIRE

L’Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire (AEN) a été créée le 1er février 1958 sous le nom d’Agence européennepour l’énergie nucléaire de l’OECE. Elle a pris sa dénomination actuelle le 20 avril 1972, lorsque le Japon est devenu sonpremier pays Membre de plein exercice non européen. L’Agence compte actuellement 27 pays Membres de l’OCDE :l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Canada, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la Finlande, la France,la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Islande, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal,la République de Corée, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse et la Turquie. La Commission desCommunautés européennes participe également à ses travaux.

La mission de l’AEN est :

• d’aider ses pays Membres à maintenir et à approfondir, par l’intermédiaire de la coopération internationale, lesbases scientifiques, technologiques et juridiques indispensables à une utilisation sûre, respectueuse del’environnement et économique de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques ; et

• de fournir des évaluations faisant autorité et de dégager des convergences de vues sur des questions importantes quiserviront aux gouvernements à définir leur politique nucléaire, et contribueront aux analyses plus générales despolitiques réalisées par l’OCDE concernant des aspects tels que l’énergie et le développement durable.

Les domaines de compétence de l’AEN comprennent la sûreté nucléaire et le régime des autorisations, la gestion desdéchets radioactifs, la radioprotection, les sciences nucléaires, les aspects économiques et technologiques du cycle ducombustible, le droit et la responsabilité nucléaires et l’information du public. La Banque de données de l’AEN procure auxpays participants des services scientifiques concernant les données nucléaires et les programmes de calcul.

Pour ces activités, ainsi que pour d’autres travaux connexes, l’AEN collabore étroitement avec l’Agence internationalede l’énergie atomique à Vienne, avec laquelle un Accord de coopération est en vigueur, ainsi qu’avec d’autres organisationsinternationales opérant dans le domaine de l’énergie nucléaire.

© OCDE 2000

Les permissions de reproduction partielle à usage non commercial ou destinée à une formation doivent être adressées auCentre français d’exploitation du droit de copie (CFC), 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris, France. Tél. (33-1) 44 0747 70. Fax (33-1) 46 34 67 19, pour tous les pays à l’exception des États-Unis. Aux États-Unis, l’autorisation doit êtreobtenue du Copyright Clearance Center, Service Client, (508)750-8400, 222 Rosewood Drive, Danvers, MA 01923 USA, ouCCC Online : http://www.copyright.com/. Toute autre demande d’autorisation ou de traduction totale ou partielle de cettepublication doit être adressée aux Éditions de l’OCDE, 2, rue André-Pascal, 75775 Paris Cedex 16, France.

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AVANT-PROPOS

Les données nucléaires sont essentielles au développement et à l'application des sciences ettechniques nucléaires. Les données nucléaires de base, qu'elles soient mesurées ou calculées, sontsoumises à un processus complexe d'évaluation de correction et d'analyse avant d'être disponiblespour les applications. Ce rapport décrit ce processus dans le cas des données d'interaction neutron-matière dans le domaine des résonances.

Sachant qu'il n'existe pas de théorie capable de prédire les données nucléaires dans le domainedes résonances, la mesure, auprès de machines dédiées (accélérateur linéaire par exemple), reste laseule source primaire d'information. Les données mesurées sont corrigées de divers effetsexpérimentaux comme les impuretés, le bruit de fond et l'efficacité des détecteurs. Ceci étant, cesrésultats expérimentaux ne peuvent pas être utilisés en l'état dans les calculs puisque l'informationrecueillie est fragmentaire. Une étape d'analyse est nécessaire pour compléter les mesures et produireun jeu de données cohérent.

Fritz Frohner, l'auteur du présent rapport, décrit en détail les deux éléments nécessaires pourmener à bien l'analyse des données : la théorie de l'interaction neutron-noyau dans le domaine desrésonances et les formalismes mathématiques d'inférence statistique. Concernant ce dernier point,l'auteur exprime clairement son penchant pour l'approche Bayesienne qu'il considère la plusappropriée.

Ce rapport s'inscrit dans le cadre d'un effort coordonné à l'échelle internationale et auquelparticipent les organismes nationaux de recherche et l'industrie nucléaire. Il vise à sauvegarder lesconnaissances en données nucléaires, domaine dans lequel une grande partie des spécialistes sontrécemment partis à la retraite. Il a été possible grâce à la collaboration du CEA Cadarache,d'Électricité de France et de l'Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire. Vincent Greissier a assuréla traduction française du rapport et Pierre Ribon a révisé à la fois la version originale et la traduction.Laurent Carraro a passé en revue la partie mathématique du rapport.

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TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS ...................................................................................................................3

ÉVALUATION ET ANALYSE DES DONNÉES RELATIVESAUX RÉSONANCES NUCLÉAIRES ....................................................................................7

1. FONDEMENTS MATHÉMATIQUES DE l’ÉVALUATIONDES DONNÉES......................................................................................................................9

1.1. La probabilité, une mesure quantitative d’une prévision rationnelle ............................91.2. Le théorème de Bayes, la règle pour réactualiser la connaissance

avec de nouvelles données.............................................................................................111.3. Valeurs recommandées à partir de l’estimation par perte quadratique .........................141.4. Généralisation à plusieurs observations et paramètres ..................................................151.5. Approche plus détaillée des probabilités a priori, attribution

par la théorie des groupes ..............................................................................................161.6. Estimation Bayesienne de paramètre pour une Gaussienne à une variable...................181.7. Attribution de probabilités par maximisation de l’entropie ..........................................231.8. Une approximation : le maximum de vraisemblance ....................................................271.9. Une approximation : les moindres carrés ......................................................................28

2. ÉVALUATION DES DONNÉES NUCLÉAIRES POUR DES APPLICATIONS ..........33

2.1. Préparation par étape des données nucléaires pour applications...................................332.2. Ajustement par moindres carrés avec itération..............................................................402.3. Erreurs statistiques : statistique de Poisson...................................................................442.4. Erreurs systématiques : Incertitudes corrélées et leur propagation ...............................452.5. Qualité de l’ajustement ..................................................................................................492.6. Données incompatibles ..................................................................................................512.7. Estimation d’erreurs systématiques inconnues..............................................................56

3. THÉORIE DES RÉSONANCES POUR LE DOMAINE RÉSOLU .................................59

3.1. Le formalisme de Blatt-Biedenharn...............................................................................643.2. Les expressions exactes de la matrice-R .......................................................................673.3. Les approximations importantes d’un point de vue pratique ........................................71

3.3.1. Expressions de Kapur-Peierls pour les sections efficaces ................................733.3.2. Expressions des sections efficaces dans le cadre de SLWB.............................743.3.3. Expressions des sections efficaces dans le cadre de MLWB ...........................763.3.4. Expressions de Reich-Moore des sections efficaces ........................................783.3.5. Expressions d’Adler-Adler des sections efficaces............................................793.3.6. Conversion des paramètres de Wigner-Eisenbud en paramètres

de Kapur-Peierls................................................................................................80

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3.4. Niveaux externes ...........................................................................................................823.4.1. Représentation statistique des niveaux externes...............................................833.4.2. Représentations des termes de bord par deux larges résonances......................853.4.3 Niveaux liés étroits pour imposer les sections efficaces thermiques

prescrites pour les niveaux liés. ........................................................................883.5. Élargissement Doppler...................................................................................................92

3.5.1. Approximation du gaz libre ..............................................................................923.5.2. Cristal cubique ..................................................................................................943.5.3. Élargissement Gaussien avec profils de Voigt .................................................943.5.4. Élargissement Gaussien avec la méthode de Turing.........................................953.5.5. Élargissement de données ponctuelles tabulées

et linéairement interpôlables.............................................................................963.6. Analyse pratique des sections efficaces expérimentales dans le

domaine des résonances.................................................................................................983.6.1. Les observables.................................................................................................993.6.2. Complications expérimentales ..........................................................................1023.6.3. Attribution de spin et de parité .........................................................................104

4. THÉORIE STATISTIQUE DES RÉSONANCES POUR LE DOMAINENON RÉSOLU .......................................................................................................................107

4.1. Statistique des niveaux ..................................................................................................1074.1.1. Hypothèse de Porter et Thomas ........................................................................1074.1.2. Loi de Wigner et l’Ensemble Gaussien orthogonal ..........................................1104.1.3. Coefficients de transmission.............................................................................1134.1.4. Densités nucléaires de niveaux .........................................................................1154.1.5. Information provenant des résonances résolues ...............................................123

4.2. Sections efficaces résonnantes moyennes .....................................................................1264.2.1. Section efficace totale moyenne .......................................................................1264.2.2. Sections efficaces partielles moyennes : Formules heuristiques ......................1274.2.3. Sections efficaces partielles moyennes : moyenne exacte sur l’EGO ..............1294.2.4. Analyse de données moyennes .........................................................................131

4.3. Constantes de groupes ...................................................................................................1374.3.1. Facteurs de Bondarenko....................................................................................1384.3.2. Méthodes analytiques et de Monte Carlo pour la génération

de constantes de groupe ....................................................................................139

5. CONCLUSIONS ....................................................................................................................141

ANNEXES .........................................................................................................................................143

A. Distributions de probabilités d’importance pratique .....................................................144

A.1. Distributions binomiale et bêta......................................................................................147

A.2. Distributions gamma et de Poisson................................................................................145

A.3. Gaussienne à une variable .............................................................................................146

A.4. Gaussienne à plusieurs variables ...................................................................................149

B. Propriétés mathématiques des profils de Voigt Voigt ψ et χ ........................................153

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ÉVALUATION ET ANALYSE DES DONNÉESRELATIVES AUX RÉSONANCES NUCLÉAIRES

Résumé

Les fondements probabilistes de l’évaluation des données sont examinés avec un accent particulier surl’estimation de paramètres à l’aide du théorème de Bayes et d’une fonction de perte quadratique, ainsique sur les méthodes modernes d’attribution de probabilités a priori. Les grandes lignes du processusde réduction des données, menant des données expérimentales brutes aux fichiers informatiquesd’évaluations des sections efficaces de réaction nucléaire, sont exposées avec une discussion sur leserreurs systématiques et statistiques, sur leur propagation et sur le formalisme généralisé des moindrescarrés comprenant une information a priori et des modèles théoriques non-linéaires. Il est expliquécomment des erreurs communes peuvent induire des corrélations entre les données, quelles sont leursconséquences sur la propagation des incertitudes et les études de sensibilité, et comment lesévaluateurs peuvent construire des matrices de covariance d’après les informations sur les erreursclassiques données par les expérimentateurs. De nouvelles techniques d’évaluation, à partir dedonnées incompatibles, sont également présentées. Les principes généraux sont ensuite appliquésspécifiquement à l’analyse et à l’évaluation des données relatives aux résonances nucléaires sousforme de modèles théoriques-théorie de la matrice-R (en particulier ses variantes Breit-Wignermultiniveaux et Reich-Moore, d’usage pratique) dans le domaine résolu et théorie de la matrice-Rappliquée aux valeurs moyennes (théorie d’Hauser-Feshbach avec correction des fluctuations deslargeurs) dans le domaine non-résolu. Des complications apparaissent du fait que les valeurs mesuréesde la transmission, du taux de capture ou de fission, des rapports d’auto-indication ou encore d’autresobservables ne sont pas directement les sections efficaces recherchées. Celles-ci ne sont obtenuesqu’au travers d’une paramétrisation. Par conséquent, une discussion est également menée sur leseffets affectant ces valeurs : élargissement Doppler, résolution expérimentale, auto-protection,diffusions multiples, bruit de fond, impuretés dans les échantillons, efficacités des détecteursdépendant de l’énergie, données de référence imprécises, etc.

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1. FONDEMENTS MATHÉMATIQUES DE L’ÉVALUATION DES DONNÉES

Historiquement, l’évaluation des données, au sens actuel, débuta par les efforts de Dunnington(1939), de DuMond et Cohen (1953) et de leurs collaborateurs pour déterminer un ensemble devaleurs recommandées des constantes physiques fondamentales (vitesse de la lumière, quantumd’action de Planck, constante de structure fine, etc...), et établir leurs incertitudes, grâce à unajustement global par moindres carrés de l’ensemble des données expérimentales utiles. Comme lesmesures sont invariablement affectées par des erreurs instrumentales incontrôlables, des étalonsimprécis, des statistiques de comptage finies et d’autres sources d’incertitudes, l’évaluation desdonnées implique de raisonner à partir d’une information incomplète, c’est-à-dire en terme de théoriedes probabilités. C’est pourquoi nous allons commencer par une brève revue des fondementsthéoriques, basés sur les probabilités, de l’évaluation des données. Cela nous aidera à relier entre ellesdiverses règles pour extraire des données expérimentales les « meilleures » valeurs et les incertitudes,et des prescriptions pour les ajustements sur les données. La plupart des scientifiques apprennent cesrègles et formules durant des cours de laboratoire et au travail, en constatant que la plupart des livresde probabilités sont remplis d’intimidantes terminologies de statistique et de considérations « ad-hoc »peu évidentes (Good 1965) provenant de tentatives mal venues pour éviter le théorème de Bayes et sestrès dénigrées probabilités a priori. Le présent exposé qui (a) est fermement basé sur le théorème deBayes et (b) utilise les progrès récents sur les probabilités a priori, va mener à un traitement concis etmathématiquement simple de l’estimation des paramètres et de l’ajustement des données dans le cadregénéral de la conclusion par induction, ou de l’étude à partir d’observations réelles, toujours affectéesd’une erreur et incomplètes.

1.1 La probabilité, une mesure quantitative d’une prévision rationnelle

Tous nos résultats, dans cette partie, seront clairement des conséquences directes des règles desomme et de multiplication élémentaires de la théorie des probabilités,

( ) ( )P A C P A C+ = 1, (1)

( ) ( ) ( ) ( ) ( )P AB C P A BC P B C P B AC P A C= = , (2)

oùA B C, , = propositions telles que « la pièce tombe sur face »

ou « la section efficace est supérieure à 12 b »,

AB = A et B sont tous les deux vrais,

A = A est faux,

( )P A C = probabilité de A sachant C.

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Nos notations indiquent que toutes les attributions de probabilité sont conditionnelles, basées surdes informations empiriques ou théoriques ou sur des hypothèses. D’après J. Bernouilli (1713) etLaplace (1812), nous interprétons ces probabilités comme des degrés de plausibilité ou de prévisionrationnelle sur une échelle numérique allant de 0 (impossibilité) à 1 (certitude), les valeursintermédiaires indiquant des degrés de plausibilité intermédiaires. La règle de somme nous dit que,

sous toute condition C, plus A est probable et moins A l’est, la somme égale à l’unité des deuxprobabilités traduisant la certitude que l’une de ces alternatives est vraie. La règle de multiplicationexprime que, sous toute condition C, la probabilité qu’à la fois A et B soient vrais est égale à laprobabilité de A sachant B multipliée par la probabilité que B soit vraie. Puisque A et B interviennentde manière symétrique, il est également possible de considérer la probabilité de B sachant A et de lamultiplier par la probabilité de A.

L’interprétation des P en tant que degrés de plausibilité (pas les équations les reliant) a étécritiquée par les statisticiens qui tiennent à ce que, par probabilité, on entende uniquement« fréquence relative dans une expérience aléatoire » telle que lancer de pièce, dans la limite d’un trèsgrand nombre de répétitions, et que l’on puisse assigner des probabilités « directes » à des effets(observations) si les causes (lois stochastiques et leurs paramètres) sont données, mais pas desprobabilités « inverses » à diverses causes possibles si les observations sont données. Ils affirmentque, puisque les constantes physiques ne sont pas des variables aléatoires qui supposent des valeursdonnées avec une certaine fréquence, il ne faut associer des probabilités qu’avec les erreurs observéeset pas avec les constantes physiques. Pour les scientifiques en général, et les évaluateurs de donnéesen particulier, ce point de vue est trop restrictif. Il ne leur permettrait pas de dire que, d’après lesdonnées mesurées, une constante physique a telle ou telle probabilité d’exister dans des bornesdonnées. La tâche consistant à déduire les valeurs de constantes naturelles, de temps de demi-vie, desections efficaces de réaction, etc, à partir de données affectées d’erreurs systématiques, incertaines etincomplètes n’est pas une expérience aléatoire qui peut être répétée à volonté, mais plutôt un exercicede conclusion par induction (raisonner face à l’incertitude). Le concept de probabilité de Laplacesemble par conséquent plus approprié pour l’évaluation des données scientifiques.

Tous ces doutes furent dissipés par R.T. Cox (1946). En utilisant l’arithmétique de la logique,l’algèbre de Boole, il prouva que tout système formel d’inférence logique utilisant des degrés deplausibilité doit soit être équivalent à la théorie des probabilités telle que dérivée des règles de sommeet de multiplication de base, soit violer des conditions de consistence élémentaire. Dans sadémonstration, les conditions de consistence les plus générales s’expriment sous la forme de deuxéquations fonctionnelles dont les solutions sont justement les règles de base. Le fait critiquable queCox a supposé la différentiabilité de ces fonctions de probabilité fut résolu par A. Rényi (1954) quidonna une démonstration sans cette hypothèse. Il est intéressant que Schrödinger (1947), l’un despères de la mécanique quantique, arriva pratiquement, et indépendamment, aux même conclusions queCox : les règles de base, clairement valables pour les fréquences relatives, sont également valablepour les probabilités de Laplace. Dans la théorie quantique, il a toujours été compris que lesprobabilités quantifient une connaissance incomplète mais une croyance largement répandue était queles probabilités des mécaniques classique et quantique différaient d’une manière ou d’une autre.Aujourd’hui, il peut être montré que le formalisme des probabilités de la mécanique quantique estparfaitement compatible avec le concept de probabilité de Laplace et les règles de somme et demultiplication (Fröhner, 1998). D’après la démonstration de Cox, deux choses devraient être claires :

1. Les probabilités ne sont pas des fréquences relatives. Elles peuvent s’appliquer tout aussibien à des situations non-répétitives qu’à des expériences répétées.

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2. Les schémas présumés supérieurs de l’inférence logique, tels qu’une logique floue oul’intelligence artificielle, sont équivalents à la théorie des probabilités dans le meilleur descas sinon, ils sont contraints de violer les obligations de consistance élémentaires.

Bien que les probabilités ne soient pas des fréquences, elles sont certainement toutes deuxreliées. Dans les situations répétitives, on considère que les probabilités sont essentiellement desvaleurs attendues de fréquences relatives-voir par exemple Jaynes (1968) et Fröhner (1997).

1.2 Le théorème de Bayes, la règle pour réactualiser la connaissance avec de nouvelles données

Les expériences scientifiques sont d’ordinaire décrites à l’aide d’un modèle statistique, deséléments statistiques étant introduit par des effets instrumentaux incontrôlables, apparemmentaléatoires, par des erreurs inconnues et souvent par la théorie elle-même (par exemple les mécanismesstatistiques, ou la théorie quantique, ou la théorie statistique des niveaux, pour les réactions par noyaucomposé). Le modèle statistique nous permet de calculer la probabilité « directe » d’un jeuquelconque de données observées (« échantillon »), pourvu que les quantités physiques et lesparamètres statistiques du modèle soient donnés. En science empirique, la situation est ordinairementinversée : un échantillon de données expérimentales est donné, et on désire trouver les probabilités« inverses » pour les différentes valeurs possibles des quantités physiques et des paramètresstatistiques du modèle. Les probabilités directes (des effets sachant les causes) et les probabilitésinverses (des causes sachant les effets) sont reliées par le théorème de Bayes (1763). Dans sa forme laplus simple,

( ) ( ) ( )( )P A BC

P B AC P A C

P B C= , (3)

c’est une conséquence immédiate de la symétrie de la règle de multiplication (2) appliquée à A et B.La situation typique est que nous avons la donnée B qui dépend de la valeur d’une quantité physiqueinconnue A et d’autres conditions C. Si nous avons un modèle statistique, représenté par ce qu’on

appelle fonction de vraisemblance ( )p B AC , nous disant à quel point serait probable l’observationde la donnée B sous la condition C si la quantité inconnue était A, et si nous avons également une

probabilité a priori ( )P A C (notée plus brièvement « l’a priori »), alors la probabilité réactualisée ou

a posteriori ( )P A BC (« l’a posteriori ») est proportionnelle au produit ( ) ( )P B AC P A C . Lea priori résume ce que nous savons à propos de A avant que les données ne soient disponibles, lafonction de vraisemblance traduit l’impact des données, et le a posteriori contient l’informationcomplète disponible pour une nouvelle inférence ou prédiction. Laplace (1812) donna lagénéralisation pour plusieurs alternatives Aj distinctes et mutuellement exclusive :

( ) ( ) ( )( ) ( )P A BC

P B A C P A C

P B A C P A Cj

j j

j j

=∑

, j = 1,2 , ....n, (4)

normalisée à 1 comme le demande la règle de somme. Pour des alternatives continues A et B, nous

remplaçons les probabilités discrètes finies ( )P A C , ( )P B AC , etc., par des probabilités

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infinitésimales ( )p A C dA , ( )p B AC dB , etc., avec les densités de probabilités ( )p A C , ( )p B AC ,etc., et la somme sur les alternatives par une intégrale,

( ) ( ) ( )( ) ( )

p A BC dAp B AC p A C dA

p B AC p A C dA=

∫, A A Amin max≤ ≤ . (5)

Ces formes du théorème de Bayes peuvent être considérées comme la pierre angulaire del’évaluation et de l’ajustement des données. Elles montrent comment une connaissance a priori(un fichier de données existant) peut être réactualisée avec une nouvelle information (nouvellesdonnées). Dans toutes les formulations, le dénominateur n’est qu’une constante de normalisation, sibien que la règle formelle pour apprendre à partir d’observations peut être résumée par

a posteriori ∝ vraisemblance × a priori

Il faut comprendre que ces expressions a priori et a posteriori ont une signification logiqueplutôt que temporelle. Elles signifient simplement que les nouvelles données ne sont pas ou sontprises en compte.

Comme illustration bien réelle, considérons la détermination des constantes de décroissance λd’un radio-isotope quelconque de courte durée de vie à partir de décroissances enregistrées à destemps t1, t2, ...tn. Manifestement, nous devons identifier λ avec A, et les données t1, ...tn avec B, alorsque C correspond à toutes les autres information sur la situation telles que validité de la loi dedécroissance exponentielle, pureté de l’échantillon, fiabilité des appareils d’enregistrement, duréesuffisante du temps d’observation pour l’enregistrement de toutes les décroissances observables, etc.Le modèle statistique pour l’expérience est représenté par ce qu’on appelle distributiond’échantillonnage, c’est à dire par la probabilité avec laquelle nous pouvons « raisonnablementattendre » les différentes alternatives si nous échantillonnons une seule fois, les paramètres du modèleétant données. Dans notre exemple, c’est la probabilité que, pour λ donnée, une décroissanceparticulière, disons la i-ème, soit enregistrée dans l’intervalle de temps dti à ti,

( ) ( )p t dt t dti i i iλ λ λ= −exp , 0 < < ∞ti (6)

Nous allons écrire sous cette forme la distribution des probabilités continues, avec la densité deprobabilité p multipliée par la différentielle correspondante, soit en tant que probabilité infinitésimale,et avec le domaine des valeurs possibles établie explicitement. Cela accentue le fait qu’en fin decompte toutes les distributions de probabilités sont utilisées pour le calcul des valeurs attendues, sibien qu’elles font partie des fonctions à intégrer, sujettes à de possibles changement de variables.

Puisque nous utilisons généralement la lettre p pour les densités de probabilité sans sesoucier de leur forme fonctionnelle, un changement de variable se traduit par

( ) ( ) ( )p x dx p x dx dy dy p y dy. . / .= ≡ . (Nous avons simplifié ici la notation en omettant une

référence explicite aux informations conditionnelles C).

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D’après la règle de multiplication, la probabilité conjointe d’observer les données mutuellementindépendantes t1, ...tn, connaissant λ, est

( )p t t dt dt t dt dtn n jj

nn

n1 11

1,... ... exp ...λ λ λ= −

=∑ . (7)

Cela correspond à l’expression ( )p A B dB précédente. En multipliant la fonction de vraisemblance

( )p t tn1 ,... λ par l’a priori ( )p dλ λ , nous obtenons

( ) ( )p t t d t p dn ii

nnλ λ λ λ λ λ1

1

,... exp∝ −

=

∑ , 0 < < ∞λ . (8)

Notons que dans notre problème la fonction de vraisemblance ne dépend pas de toutes les valeurs

individuelle de l’échantillon. Elles apparaissent seulement sous la forme t ntii

∑ ≡ , de telle façon

que, pour un échantillon donné de taille n, la moyenne t de l’échantillon comporte toute l’informationcontenue dans les données. Dans le jargon statistique, t est une « statistique exhaustive », n une« statistique ancillaire », où statistique s’applique à toute fonction de l’échantillon, c’est à dire desdonnées.

Si nous considérons toutes les valeurs de λ entre 0 et ∞ comme a priori équiprobable, demanière à ce que ( ) λ∝λλ ddp , nous obtenons

( )p nt d e dnt nλ λ λ λλ∝ − , 0 < < ∞λ . (9)

Or la fonction gamma est définie par

( )Γ n e x dxx n+ ≡ −∞

∫10

(10)

(qui pour des entiers non négatifs n’est autre que la factorielle n!). Il s’ensuit que le résultat final denotre estimation Bayesienne, correctement normalisée, peut être écrite comme

( ) ( )p nt d n e x dxx nλ λ = + − −Γ 1 1 , 0 < ≡ < ∞x ntλ . (11)

Cet a posteriori, une distribution gamma (aussi connue comme distribution du χ2 avec χ 2 2≡ xet ν = +2 2n degrés de liberté) représente l’information complète sur λ qui est contenue dans lesdonnées et l’a priori considéré. La figure 1 représente la distribution du χ2 pour différentes valeurs deν. À mesure que la taille n de l’échantillon augmente, notre a posteriori devient de plus en plusconcentré : plus il y a de données récupérées et meilleure est la connaissance de λ.

Page 14: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

14

Figure 1. Distributions du χ2 pour différents degrés de liberté v (cf. équation 105 etKorn & Korn (1968) pour la définition normale et les propriétés principales)

1.3 Valeurs recommandées à partir de l’estimation par perte quadratique

La plupart des utilisateurs de données de décroissance radioactive ne désirent pas être ennuyéspar les détails de la distribution a posteriori. Ce qu’ils veulent généralement est une constante dedécroissance recommandée et son incertitude, et rien d’autre. Par conséquent, à l’aide de l’équation11, nous calculons la valeur attendue,

( )λ λ λ λ= =+∞

∫ p nt dn

nt0

1, (12)

et l’écart quadratique moyen (aussi appelé écart type, dispersion de l’erreur ou incertitude à unsigma),

Page 15: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

15

( ) ( )∆λ = −

=

+∞

∫ λ λ λ λ2

0

1 21

p nt dn

nt

/

, (13)

et établissons le résultat sommairement comme λ λ= ± ∆λ . Ce choix se justifie de la manièresuivante. La valeur attendue est celle estimée λ0 qui minimise le carré de l’erreur attendu,

( ) ( ) min0

20 =λλλ−λ∫

dtnp , (14)

comme cela peut être aisément vérifié en dérivant par rapport à λ0, et en égalant à 0. Avec cette valeurrecommandée, le carré de l’erreur moyenne (sa valeur attendue) n’est autre que la variance,

( )var λ ≡ ∆λ 2, ce qui justifie également notre spécification de l’incertitude. Ce que nous venons

juste de faire est appelée « estimation par perte quadratique » dans la théorie de la décision. L’idée debase est qu’il y a habituellement une pénalité pour les mauvaises estimations, d’autant plus dure quel’estimation diffère de la valeur réelle, et que cette pénalité peut être décrite par une « fonction deperte » qui disparaît pour la valeur réelle et est positive partout ailleurs. Au voisinage de la valeurréelle, une fonction de perte raisonnablement lisse peut être prise comme quadratique en erreur (λ0-λ),puisque son développement de Taylor autour de 0 commence par le terme au carré (cf, par exemple,DeGroot 1970, Berger 1985). L’équation 14 est de ce fait la condition pour obtenir la pénalitéminimale attendue dans cette approximation parabolique.

Évidemment, la recommandation λ ± ∆λ tend à cacher l’asymétrie de la distribution gammaqui, spécialement pour les faibles de valeurs de n, est assez importante (voir figure 1). Si de telsdétails importent, on doit retourner à la distribution a posteriori complète. Jusqu’ici nos résultatsapparaissent suffisamment raisonnables, mais comme nous allons le voir, il y a un problèmeprovenant de la manière quelque peu cavalière avec laquelle nous avons attribué les probabilitésa priori.

1.4 Généralisation à plusieurs observations et paramètres

Avant de traiter les a priori avec plus de précautions, regardons l’impact qu’aura une deuxièmemesure (avec un nouvel échantillon radioactif) sur notre connaissance de la constante de décroissance.En utilisant la distribution a posteriori de la première mesure comme celle a priori pour la seconde,nous obtenons pour la nouvelle distribution a posteriori

( ) ( ) ( )p t t t t d p t t p t t dn m m nλ λ λ λ λ1 1 1 1,... , ’ ,... ’ ’ ,... ’ ,...∝ , (15)

où t t m’ ,... ’1 sont les nouvelles données. Plus généralement, s’il y a k mesures, avec des jeux dedonnées associés D1,...Dk et des fonctions de vraisemblances L1,... Lk, on obtient

( ) ( ) ( )p D D d L D p dk j jj

k

λ λ λ λ λ11

,... ∝

=∏ , (16)

qui montre de quelle belle façon le théorème de Bayes modélise le processus d’apprentissage parl’expérience : chaque nouveau résultat expérimental peut être formellement incorporé dans le corpsexistant de la connaissance par multiplication de sa fonction de vraisemblance avec les distributionsde probabilité existantes (et renormalisation). Il n’est en aucune manière nécessaire que toutes les

Page 16: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

16

expériences soient du même type. Dans l’analyse des résonances nucléaires, par exemple, on combinegénéralement les fonctions de vraisemblance d’expériences de transmission, capture, diffusion etfission faisant intervenir tout type de détecteur et de géométrie d’échantillon afin d’obtenir lesmeilleures valeurs de l’énergie et des largeurs partielles des résonances. Avec chaque jeu de donnéesadditionnel, la distribution a posteriori devient plus étroite, ce qui signifie que l’incertitude sur leparamètre estimé devient plus faible. Notre exemple le montre explicitement : pour de grands n,

l’incertitude relative sur λ tends vers 0 en 1/ n .

Une dernière généralisation concerne les paramètres estimés. Dans l’évaluation et ajustement dedonnées, nous ne traitons pas seulement de grandes quantités de données provenant de multiplesexpériences différentes, mais également de nombreux paramètres, bien souvent corrélés, qui doiventêtre déterminés simultanément. À la place d’un seul paramètre λ on a donc un vecteur de paramètresλ, au lieu de la différentielle dλ on a un élément de volume dNλ dans l’espace des paramètres, et lesdistributions a priori et a posteriori représentent les probabilités conjointes pour l’ensemble des Nparamètres (les coordonnées du vecteur de paramètres), complétées par les corrélations. A nouveau,l’analyse des résonances fournit des exemples. À l’aide des programmes modernes d’analyse deforme, on peut estimer simultanément l’énergie et les largeurs de dizaines de résonances en ajustantdes expressions théoriques appropriées à des combinaisons de données provenant de plusieurs typesde mesures de résonance, chaque expérience fournissant des centaines ou milliers de pointsexpérimentaux (voir Figure 4 en bas).

1.5 Approche plus détaillée des probabilités a priori, attribution par la théorie des groupes

Nous devons maintenant traiter plus rigoureusement les probabilités a priori. Dans notreexemple de taux de décroissance, nous avons utilisé l’a priori ( )p d dλ λ λ∝ , ce qui en terme de

temps de vie τ λ≡ 1 / peut être réécrit comme ( ) ( )p d p d d1 2 2/ / /τ τ τ τ τ τ τ≡ ∝ . Évidemment,

nous pourrions avoir aussi bien pu estimer τ plutôt que λ, et considérer tous les τ équiprobables,c’est-à-dire ( )p d dτ τ τ∝ . Ceci, toutefois, aurait donné une distribution a posteriori différente. Il estvrai que l’a posteriori ne dépend que faiblement de l’a priori si les données sont abondantes, maisd’un point de vue fondamental ce n’est que piètre consolation. Il semble y avoir un caractèrebassement arbitraire concernant les a priori, en particulier pour les paramètres continus.

Durant plus d’un siècle, ce caractère arbitraire apparent a conduit de nombreux statisticiens àrépudier l’estimation Bayesienne des paramètres et à rechercher d’autres méthodes pour circonvenirles a priori. D’autres, en comparant cela à une tentative de faire de l’arithmétique sans le zéro,défendirent le théorème de Bayes comme dérivable en quelques lignes des règles de somme et demultiplication. Ils utilisèrent ainsi des a priori « subjectifs » ou, comme H. Jeffreys (1939),invoquèrent des arguments d’invariance pour trouver des a priori qui évitaient d’être ambigus. Uneimportante avancée fut amenée par A. Wald (1950). Il avait commencé par chercher des méthodesplus fondées (théorie décisionnelle) d’inférence statistique, sans le théorème de Bayes, mais finit parprouver que la stratégie optimale pour prendre une décision (recommander une valeur, par exemple)vis à vis de l’incertitude était justement les lois Bayesiennes.

Encore plus importante fut l’application de la théorie des groupes et de la théorie del’information au problème des a priori par E.T. Jaynes (1968, 1973). Il démontra, pour un nombre decas simples mais ayant une grande importance d’un point de vue pratique, que même si l’on ignorecomplètement les valeurs numériques des paramètres estimés, la symétrie du problème détermine sans

Page 17: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

17

ambiguïté l’a priori. Si ce qu’on appelle un paramètre de position doit être déterminé, par exemple lamoyenne µ d’une Gaussienne, la forme de l’a priori doit être invariante pour un déplacement c de la

position, ( ) ( ) ( )p d p c d cµ µ µ µ= + + . Autrement dit, les positions de la Gaussienne ne seront pas

toutes équiprobables a priori, contrairement à ce qu’on attendrait d’une complète ignorance.L’équation fonctionnelle a pour solution

( )p d dµ µ µ∝ , − ∞ < < ∞µ , (17)

un résultat totalement plausible. Moins évident est le cas d’un paramètre d’échelle tel que l’écart typeσ d’une Gaussienne. S’il n’y a pas d’échelle préférée, on s’attend à une invariance par changementd’échelle, ( ) ( ) ( )p d p c d cσ σ σ σ= . La solution de cette équation fonctionnelle est

( )p dd

σ σσ

σ∝ , 0 < < ∞σ , (18)

comme le préconisait déjà H. Jeffreys (1939). Malgré son importance et sa simplicité, ladémonstration de Jaynes (1968) semble si peu connue que nous allons la citer ici pratiquement motpour mot pour le cas d’une constante qui multiplie (changement d’échelle) tous les temps ouintervalles de temps dans un problème (comme le fait λ dans l’équation 6) :

Supposons que deux observateurs, Messieurs X et X’, veuillent estimer un rapport constant àpartir d’un nombre d’événements. Si leurs observations sont effectuées pour différents rapports detelle manière que leurs mesures sont reliées par t = ct’, leurs paramètres de rapport ou d’échelle serontreliés par λ’ = cλ. Ils attribuent les probabilités a priori p(λ)dλ et q(λ’)dλ’, et si elles doiventreprésenter le même état d’ignorance, alors p et q doivent être la même fonction et doncp(λ)dλ=p(λ’)dλ’. À partir des deux équations pour λ et λ’, on obtient l’équation fonctionnellep(λ)=cp(cλ). Son unique solution est l’a priori de Jeffrey,

( )p dd

λ λλ

λ∝ , 0 < < ∞λ . (19)

Il est certain que c’est l’a priori approprié pour notre exemple de taux de décroissance, puisquela constante de décroissance n’est autre qu’un paramètre d’échelle dans nos équations. Elle satisfait

( )p d d dλ λ λ λ τ τ∝ ∝/ / qui élimine toute ambiguïté : que nous estimions le paramètre d’échelle λou le paramètre d’échelle τ, nous obtenons toujours le même a posteriori,

( ) ( )p nt de x

n

dx

x

x n

λ λ =−

Γ, 0 < ≡ < ∞x ntλ , (20)

avec

λ =1

t, (21)

∆λλ

=1

n. (22)

Cela semble plus juste que notre résultat précédent, illustrant le principe de parcimonied’Ockham (1349) (« le rasoir d’Ockham ») : le résultat le plus simple est souvent le plus correct. Si ce

Page 18: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

18

n’est pas la constante de décroissance, mais la vie moyenne qui est à estimer, il est alors tout aussifacile de trouver

τ λ= =−

−1

1

nt

n, (23)

∆ττ

=−1

2n, (24)

applicable si n > 2.

D’autres exemples d’a priori issus des invariances de la théorie des groupes peuvent être trouvésdans les travaux de Jaynes (1968, 1973, 1976,1980). Dans le langage de la théorie des groupes, l’apriori qui correspond à l’invariance dans un groupe de transformation est la mesure du bon invariantde Haar de ce groupe (voir Berger 1985, chapitre 6.6).

Le fait que de tels a priori « moins informatifs » ne puissent être normalisés est parfois critiqué,et ils sont appelés a priori « impropres ». Maintenant, on peut employer à la place un a prioricomplètement normalisable de forme mathématique acceptable (« conjuguée »). Dans notre exemple,cela serait une distribution gamma. L’a posteriori dépendrait alors, bien sûr, de la largeur de ceta priori. Si on laisse la largeur augmenter indéfiniment, on trouvera toujours que l’a posteriori tendsvers l’a posteriori obtenu bien plus facilement avec l’a priori moins informatif. Nos a priori moinsinformatifs peuvent par conséquent être considérés comme les limites de distributions extrêmementlarge, normalisable, sur l’échelle linéaire (dµ) et logarithmique (dσ/σ = d ln σ), tout comme lafonction delta de Dirac est le cas limite de distributions extrêmement étroites et normalisées. Il n’y apas de difficulté conceptuelle ou mathématique si l’on garde en mémoire que les a priori les moinsinformatifs et les fonctions delta les « plus informatives » ne sont rien d’autre que des notationssténographiques pratiques pour des distributions extrêmement larges ou extrêmement fines, n’ayantun sens que dans la convolution avec d’autres distributions, moins extrêmes.

1.6 Estimation Bayesienne de paramètre pour une Gaussienne à une variable

Appliquons également les a priori les moins informatifs sur la distribution Gaussienne à unevariable, importante tant sur le principe que d’un point de vue pratique. Supposons qu’une mesurerépétée de la même quantité physique m ait donné les résultats x1,... xn, avec des erreurs expéri-mentales qui peuvent être considérées distribuées normalement. La distribution d’échantillonnage estalors

( )p x dxx

dxj j

j

jµ σπσ

µσ

, = −−

1

2

1

22

2

exp , − ∞ < < ∞x j , (25)

avec une dispersion de l’erreur σ inconnue, L’a priori exprimant une ignorance complète de laposition (moyenne) et de l’échelle (largeur) de la Gaussienne est (voir Jaynes 1968)

( )σ

σµσµσµ dddd,p ∝ , − ∞ < < ∞µ , 0 < < ∞σ . (26)

L’a posteriori est alors

Page 19: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

19

( ) ( )p x x d d xd d

n n jj

n

µ σ µ σσ σ

µµ σσ

, ,... ,1 21

21 1

2∝ − −

=

∑exp . (27)

En terme de moyenne de l’échantillon et de variance de l’échantillon,

xn

x jj

n

≡=

∑1

1

, (28) ( )sn

x xjj

n

’2

1

21

≡ −=

∑ , (29)

l’exposant peut être écrit comme

( ) ( )v12

’1

2

1 2

2

222

12

uns

s

xx

n

jj +≡

σ

−µ+=µ−

σ ∑=

. (30)

La probabilité conjointe a posteriori pour µ et σ, correctement normalisée et en notationsimplifiée, peut alors être représentée sous les formes suivantes qui correspondent aux deuxfactorisations de la règle fondamentale de multiplication (2),

( )

( ) ( ) ( )( ) ( )

( ) ( )[ ]( ) ( )( ) ,

1v

vv1vv

v

vvvvv

22

2

1

2

12

22v1

2

1

21vv

2

2

/nn,

n

/nu

n

/)n(u

uB

duduedunupdn,up

dedu

edvnpdun,up

ddn,’s,x,p

+Γ+=⋅=

Γ=⋅=

+−

−−−

π

σµσµ

− ∞ < ≡−

< ∞ux

s

µ’

, ∞<σ

≡<2

2

2

’v0

ns, (31)

où ( ) ( ) ( ) ( )B n n n1

2

1

2

1

2

1

2 2, /− −≡ Γ Γ Γ est une fonction beta. Notons que u est essentiellement µ, que v est

essentiellement σ-2, et que dans les deux factorisations l’a posteriori dépend de l’échantillonuniquement au travers de la moyenne x de l’échantillon et de la variance s’2 de l’échantillon(indépendamment de la taille n de l’échantillon). C’est pourquoi ces quantités sont, dans le jargon desfréquencistes, des « statistiques exhaustives conjointes ». Dans la première factorisation, ladistribution de probabilité de µ sachant σ est Gaussienne alors que celle de σ-2 est une distributiongamma. Dans la seconde, la distribution de probabilité de σ sachant µ est une distribution gammatandis que celle de µ est une distribution t de Student. Les deux alternatives montrent explicitementles deux distributions marginales pour µ et σ :

Si le seul intérêt est µ, quoi que puisse valoir σ, nous intégrons sur toutes les valeurs possibles du« paramètre dérangeant » σ (ou v) afin d’obtenir la distribution marginale des valeurs possibles de µ,

( ) ( )( )p x s d

du

B un nµ µ, ’,

/=+−1

2

1

2

2 21

, − ∞ < ≡−

< ∞ux

s

µ’

. (32)

Page 20: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

20

C’est la distribution t de Student pour ν≡ /ut avec ν = n-1 degrés de liberté. Voir figure 2 et

annexe A. Sa moyenne et sa variance sont u = 0 et ( )u n2 1 3= −/ , d’où

µ = x , (33) var µ=s

n

’2

3−. (34)

Nous rencontrons ici la formule (plausible) des fréquencistes pour utiliser la moyenne del’échantillon comme « estimateur » de la moyenne de la population. Aucune erreur type finie et réellene peut être établie tant que n ≤ 3 . D’un autre côté, la demi-largeur est toujours bien définie et peutêtre utilisée pour signifier la largeur de la distribution t, comme cela est communément pratiqué dansle cas n = 2, la distribution de Cauchy (connue des physiciens sous le nom de Lorentzienne ou profilsymétrique de Breit et Wigner).

Figure 2. Distributions t de Student pour différents degrés deliberté (voir Korn & Korn 1986). La distribution de Cauchy

(Lorentzienne, ν = 1) et la Gaussienne ( ν = ∞ ) sont des cas limites

Si seul σ représente un intérêt, sans considération sur µ, on obtient en intégrant sur u ladistribution gamma (ou du χ2)

( )( )

( ) ,v

vv’,

2

1

21

de

dsxpn

/nv

−−

Γ=σσ ∞<

σ≡<∞−

2

2

2

’v

ns. (35)

Sa moyenne et sa variance sont égales, ( ) 2/1 var vv −== n . L’estimation par perte

quadratique pour σ-2 est alors

σ − − −=−

≡2 2 21n

ns s’ , (36)

( )∆ σσ

− =−

2

2

2

1n. (37)

Page 21: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

21

Ceci étaye une extension de l’autre (pas si plausible) formule des fréquencistes consistant à nepas prendre la variance de l’échantillon s’2 mais s2 comme estimateur de σ2, malgré le fait que cetestimateur soit « biaisé », c’est à dire que sa valeur attendue, la moyenne sur tous les échantillons

possibles, n’est pas égale au paramètre estimé, s2 2≠ σ . Or, σ-2/2 est également appelé précision

(voir par exemple DeGroot 1970) et nous devons donc désormais reconnaître que s-2/2 est unestimateur non biaisé pour la précision. L’estimation Bayesienne correcte de σ2 provient toutefois de

( )3/2v 1 −=− n et ( )( )[ ]53/4v 2 −−=− nn . Sans aucun empirisme, on obtient

σ − =−

2 2

3

n

ns’ , (38)

( )∆ σσ

2

2

2

5=

−n. (39)

Notons qu’un échantillon de moins de six valeurs ne contient pas suffisamment d’informationpour une estimation complète de σ2 alors que σ-2 peut être estimée à partir d’un échantillon de deux.

La covariance entre u et v s’annule du fait qu’après intégration sur v, l’intégrand restant est unefonction impaire de u. Par voie de conséquence, on a

( )cov , -2µ σ = 0 . (40)

Le cas avec une seule donnée, n = 1, doit être traitée différemment car s’ = 0 empêche de définiru, mais cela est aisé. L’a posteriori est simplement

( )p x d dx d d

µ σ µ σπσ

µσ

µ σσ

, 1 2

12

1

2∝

exp -1

2, (41)

à partir duquel nous obtenons les distributions marginales

( )p x dd

xµ µ

µµ1

1

≡−

, (42)

( )p x dd

σ σσ

σ1 ∝ . (43)

La distribution marginale de µ présente un maximum très marqué au niveau de la valeur observéemais celle de σ apparaît être toujours égale à l’a priori le moins informatif-ce qui a un sens, puisqu’unéchantillon de taille n = 1 peut apporter quelque chose sur la position mais rien concernant la largeurde la distribution. C’est toutefois un exemple montrant que la méthode Bayesienne s’accorde avec lesens commun même dans des cas extrêmes, en particulier pour de très petits échantillons, où les autresméthodes sont vouées à l’échec. Mentionnons que l’a posteriori (31) pour n > 1 fut trouvé bien avantque l’a priori (26) ne soit disponible, mais ceux qui connaissent l’approche « fiducielle » deR.A. Fisher (1935) apprécieront à quel point la dérivation Bayesienne est plus simple et plus directe,et avec quelle facilité elle peut être étendue au cas n = 1 (Jeffreys 1939). En outre, la dérivation peutêtre étendue de manière directe aux distributions Gaussiennes à plusieurs variables. Avec desgénéralisations appropriées des relations scalaires aux formes matricielles, soit de la variance (erreur

Page 22: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

22

quadratique moyenne au carré) à la matrice de covariance ( σ 2 → C ), d’une différentielle avec une

variable à un élément de volume dépendant de plusieurs variables ( ( )dx d dx→ ≡ ∏x ν ν ,

( )d d Ck kσ ν ν2 → ≡ ≤∏C , ) etc., on obtient des expressions matricielles qui ressemblent beaucoup

aux expressions scalaires pour la Gaussienne avec une variable (voir Annexe 1 et Fröhner 1990).

Assez généralement, une estimation Bayesienne des paramètres est, d’un point de vue logique etmathématique, plus simple que d’autres approches et au moins aussi rigoureuse. Des concepts tels quebiais, efficacité, suffisance, acceptabilité, compression de James-Stein (voir par exemple Berger1985), essentiels pour les méthodes d’estimation fréquenciste, n’ont nullement besoin d’êtreintroduits puisqu’ils apparaissent en tant qu’éléments plus ou moins fortuits de la distributiona posteriori, de sa moyenne ou de sa variance. Il n’y a pas de risque que les meilleures estimationssoient déterminés en dehors de l’intervalle des valeurs autorisées, comme cela peut arriver parfoispour les autres méthodes. Bien que les taux de réactions ou les sections efficaces soient des quantitésfondamentalement positives, les données mesurées peuvent très bien contenir des points négatifsaprès soustraction du bruit de fond. Ce serait une erreur que d’écarter les points négatifs. On peut sefier au fait que l’a priori garantit un intervalle correct pour les quantités estimées, par exemple µ<0,indépendamment de la plage des valeurs observables admise par la fonction de vraisemblance, parexemple − ∞ < < +∞x j . La fondamentale simplicité et supériorité de l’approche Bayesienne

comparativement aux autres méthodes d’estimation a été démontrée assez puissamment par Jaynes(1976) à l’aide de toute une série d’exemples de la vie courante.

La distribution conjointe a posteriori de la moyenne µ et de la variance σ2 est l’informationcomplète sur les paramètres d’une Gaussienne qui peut être extraite des données. À partir del’a posteriori, on peut obtenir des valeurs recommandées et leurs incertitudes à partir de fonctions deperte quadratique ou autre, comme nous l’avons vu. Souvent, toutefois, nous ne sommes passeulement intéressés par les paramètres du modèle statistique mais également par les prédictions denouvelles mesures. Ceci est peut être, en fait, la raison pour laquelle un modèle statistique futintroduit la première fois. Que pouvons-nous dire, après déduction de l’a posteriori (31) pour lesparamètres du modèle Gaussien, à propos du résultat d’une nouvelle expérience, x xn≡ +1 ? Onpourrait songer à prendre la Gaussienne avec l’a posteriori le plus probable ou avec la valeurmoyenne des paramètres, ou bien à calculer la moyenne de la Gaussienne sur la distributiona posteriori de ses paramètres. La dernière solution est la bonne. Cela devient clair si nous notons laprobabilité conjointe de x, µ et σ pour des données connues x et s’2, puis utilisons la règle demultiplication et enfin intégrons sur les paramètres dérangeants µ et σ, ce qui donne

( ) ( ) ( )( ) ( ) ,v v

’,,,’,

2/1v/v

0

2

∫∫

∫ ∫∞

∞−

−−−−∞

σµσµµσ∝

nnwu eeduddx

sxpxpdddxdxsxxp

(44)

où u, v sont définis comme précédemment et ( ) ’/ sxxw −≡ . En intégrant d’abord la Gaussienne(sur tous les u) puis la fonction gamma restante (sur tous les v) nous obtenons, pour n > 1, ladistribution « prédictive »

( ) ( )( )p x x s d

dy

B yn n, ’,

/µ =+−1

2

1

2

2 21

, − ∞ < ≡−

+< ∞y

x x

s n’ 1. (45)

Page 23: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

23

Bien que la distribution d’échantillonnage soit Gaussienne, la distribution prédictive pour lerésultat d’une mesure additionnelle n’est pas une Gaussienne mais une distribution t. Il est vrai qu’unedistribution t s’approche d’une Gaussienne pour des n élevés, mais pour des valeurs de n finies, elleest toujours plus large (voir Figure 2). La meilleure estimation pour toute fonction f(x) des données

suivantes est sa valeur attendue f selon la distribution prédictive.

1.7 Attribution de probabilités par maximisation de l’entropie

Jaynes (1968, 1973, 1978, 1980) considéra également le cas où l’on n’est pas totalement a prioriignorant des valeurs numériques. Il montra dans quelle mesure les probabilités pouvaient êtreattribuées d’une manière bien déterminée si l’on dispose au moins d’une information vague sur lesquantités moyennes, par exemple d’estimations des valeurs attendues telles que les premier et secondmoments. Le concept clé est celle de l’entropie d’information, introduite par C.E. Shannon (1948) entant qu’unique mesure de l’indétermination ou de l’information manquante implicite d’unedistribution donnée de probabilités. L’entropie d’information d’une distribution discrète deprobabilités pj avec des alternatives mutuellement exclusives j est (à une constante près)

S p pj jj

= −∑ ln . (46)

Shannon prouva que c’est l’unique mesure d’indétermination qui satisfait les exigencessuivantes :

(i) C’est une fonction lisse des pj.

(ii) S’il y a N alternatives, toutes équiprobables, alors l’indétermination et donc S doivent croître demanière monotone si N augmente.

(iii) Un simple regroupement des alternatives n’engendre aucune différence : si nous ajoutonsl’entropie quantifiant l’ignorance du groupe réel, et les entropies convenablement pondéréesquantifiant l’ignorance de chaque membre réel à l’intérieur de chaque groupe, nous devonstrouver la même entropie globale S que pour les alternatives non groupées.

Pour des distributions continues ayant une densité de probabilité p(x), nous prenons l’expressionapparemment analogue

( ) ( )S dx p x p x= −∫ ln . (47)

Supposons maintenant que nous ne connaissons pas p(x) mais que nous en avons une informationglobale sous forme de valeurs attendues pour plusieurs fonctions connues fk(x),

( ) ( )f dx p x f xk k= ∫ , k = 1,2, ... K. (48)

Quelle est la densité de probabilité p(x) qui satisfait ces K équations sans impliquer d’autresinformations, faussées, ou des hypothèses cachées ? La réponse est fournie par le principe dumaximum d’entropie : si nous désirons qu’il y est compatibilité entre l’information donnée, tout enayant un contenu d’information minimal, nous devons varier p(x) de telle manière à ce que son

Page 24: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

24

entropie soit maximale, S = max, sous les K contraintes (48). La solution bien connue de ce problèmevariationnel, obtenue par la méthode des multiplicateurs de Lagrange, est

( ) ( ) exp -k=1

K

p xZ

f xk k=

∑1

λ . (49)

Cette densité de probabilité est manifestement positive pour λk réel, et correctement normalisée àun avec

( ) exp -k=1

K

Z dx f xk k=

∫ ∑ λ . (50)

Les multiplicateurs de Lagrange λk doivent être déterminés à partir des K contraintes (48) ou àpartir des équations équivalentes

ln f Zkk

= −∂

∂λ. (51)

La dernière manière est plus commode si Z peut être exprimé sous forme d’une fonctionanalytique des paramètres de Lagrange.

À chaque fois qu’une nouvelle donnée « globale » est disponible, on doit multiplier ladistribution existante par un facteur exp[-λk fk(x)] (et renormaliser). Ceci montre comment on peutgénéraliser aux cas où une distribution a priori donnée m(x)dx est réactualisée avec de nouvelles

données globales f k : la densité de probabilité réactualisée doit s’exprimer sous la forme

( ) ( ) ( ) exp -k=1

K

p xm x

Zf xk k=

∑ λ (52)

avec

( ) ( ) exp -k=1

K

Z dx m x f xk k=

∫ ∑ λ . (53)

Les multiplicateurs de Lagrange peuvent être déterminés à partir des équations (48) ou (51)comme ci-dessus. Ce résultat peut être obtenu par maximisation de l’entropie d’informationcorrespondante (entropie croisée)

( )( )( )S dx p x

p x

m x= −∫ ln , (54)

sujettes aux contraintes (48). L’entropie croisée possède l’invariance requise par changement devariable, contrairement à l’équation (47) que nous reconnaissons maintenant être limitée au casspécifique d’un a priori uniforme pour la variable d’intégration x.

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L’algorithme de l’entropie maximale (48)-(51) doit sembler familier aux physiciens : il neconstitue rien d’autre que le rationnel manquant dans l’approche axiomatique de Gibbs enthermodynamique. Sur ce point, l’entropie d’information maximisée, multipliée par la constante deBoltzmann, est l’entropie thermodynamique de Clausius, et la constante de normalisation Z est lafonction de partition à partir de laquelle tout ensemble de moyennes observables macroscopiquementou contrôlables peut être obtenu par une dérivation appropriée. Par exemple, si E est l’énergie (nonnégative) des particules d’un système thermodynamique, à propos desquelles on ne connaît rienhormis leur énergie moyenne (déterminée par la température du système), on a la distribution

canonique, ( ) ( )p E E E∝ − exp λ , c’est-à-dire un facteur de Boltzmann avec l’inverse de latempérature apparaissant en tant que paramètre de Lagrange. Si le nombre moyen de particules est

également connu, on obtient l’ensemble grand-canonique, ( ) ( )p E N E N E N, , ∝ − − exp λ µ , le

potentiel chimique étant le deuxième paramètre de Lagrange, et ainsi de suite.

Les évaluateurs de données sont la plupart du temps confrontés à des données exprimées sous laforme x x± ∆ . Notre notation indique que nous interprétons ces nombres comme la meilleure

estimation des expérimentateurs par perte quadratique. Les deux premiers moments, x et x 2 ,

d’une distribution inconnue sont ainsi déterminés. (Rappelons que ( )∆x x x x2 2 2= = −var .) Si

l’intervalle de définition est − ∞ < < ∞x , l’algorithme de l’entropie maximale donne pour ce genre

d’information ( ) ( )p x x x∝ − −exp λ λ1 22 comme la densité de probabilité la moins restrictive et

moins informative, et par conséquent la plus conservative et objective. C’est manifestement uneGaussienne qui en terme de donnée d’entrée doit s’écrire sous la forme (confirmée, bien sûr, parl’algorithme de l’entropie maximale)

( )( )

p x x x dxx

x x

xdx,∆

∆ ∆=

1

2 2

2

πexp -

1

2, − ∞ < < ∞x . (55)

Le cas d’une variable strictement positive, 0 < < ∞x , est ramené au cas précédent en la remplaçantpar y = ln x, et ainsi ∞<<∞− y . Avec des premier et second moments connus sur l’échellelogarithmique en y, nous obtenons une Gaussienne sur l’échelle logarithmique, c’est à dire unedistribution lognormale sur l’échelle linéaire en x. Si nous connaissons uniquement la moyenne x ,et que x est strictement positif, nous obtenons une exponentielle décroissante. Nous rencontrons iciune des raisons de l’ubiquité de ces distributions en statistique et dans l’analyse des données.

Traditionnellement, la Gaussienne n’est considérée correcte que si la variable est affectée par detrès nombreuses erreurs indépendantes de telle manière que le théorème de la limite centrale soitapplicable, ou alors elle est simplement invoquée pour des raisons de commodités mathématiques,avec de sombres avertissements sur les terribles conséquences d’une distribution réelle nonGaussienne. Le principe du maximum d’entropie ne peut éliminer ces conséquences, mais elle évitemauvaise conscience ou paralysie : si seules la meilleure valeur (la moyenne) et l’erreur quadratiquemoyenne (l’écart type) sont données, la distribution de probabilités optimale pour une nouvelleinférence est la gaussienne correspondante, quoi que la distribution réelle inconnue puisse être.Contrairement au théorème de la limite centrale, le principe du maximum d’entropie fonctionneégalement avec des données corrélées.

Un autre mythe repose sur le fait que les erreurs systématiques doivent être décrites par desdistributions de probabilité rectangulaires. Si nous ne connaissons pas leur signe mais possédons au

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moins une vague idée de leur grandeur (grâce à l’état de l’art, par exemple), le principe du maximumd’entropie nous dit d’utiliser une Gaussienne de moyenne nulle et dont la largeur correspond à cettegrandeur, plutôt qu’une distribution rectangulaire.

La généralisation aux distributions à plusieurs variables est directe. Prenons, par exemple, un jeu

d’erreurs expérimentales x xj j j− ≡ ε , j = 1, 2, ...n, dont nous ne connaissons que les valeurs

attendues ε εj k , c’est à dire leurs variances et covariances. Les erreurs εj sont les coordonnées

Cartésiennes de la variable vecteur ε, et les valeurs attendues ε εj k sont les éléments de la matrice

de covariance symétrique et définie positive C = εεΤ , où Τ identifie la transposée. Pour chaque

valeur attendue Cjk=Ckj, nous introduisons un multiplicateur de Lagrange Λjk=Λkj. La distributiond’entropie maximale est alors

( ) exp -j

p dZ

dnj jk k

k

nε C ε ε ε ε=

∑∑1 Λ . (56)

La normalisation est aisée dans le système de coordonnées où la matrice carrée symétrique Λ estdiagonale. Nous effectuons donc les substitutions suivantes : ε’ = Οε, où Ο est la matrice orthogonalequi rend Λ’=ΟΛΟΤ diagonale, det Λ’ = det Λ, et dnε’ = dnε. L’intégrale Z de dimension n se factorisealors en n intégrales élémentaires sur des Gaussiennes à une variable,

( )Z d j jj jj

n

= − =∫∏ ε επ

’ ’ ’ exp det

Λ 2

Λ. (57)

La relation entre la matrice Λ des paramètres de Lagrange et la matrice connue des covariances Cest obtenue par dérivation de ln Z, voir équation (51). On a

( )C Zjkjk

jk= − = −∂

∂Λln

1

21Λ , (58)

puisque la dérivation du déterminant par rapport à un élément de la matrice donne le cofacteur pourcet élément, qui pour une matrice non singulière est égal à l’élément correspondant de la matriceinverse multipliée par le déterminant. La distribution avec l’entropie maximale parmi toutes cellesayant la même matrice de covariance C est alors

( ) ( ) ( ) ( ) det

exp -1

2p d dTε ε ε ε εC

CC=

−1

21

π, − ∞ < < ∞ε j , (59)

où ( ) ( ) ( )ε εε ε= 0, = det det et T n nd dC C C, ,2 2π π ε= ≡ . Nous obtenons ainsi, pour des

moments de second ordre définis, une Gaussienne à n variables centrée sur l’origine. Puisque rienn’est établi pour les premiers moments des erreurs, c’est à dire pour le centre de leur distribution, iln’y a aucune raison de préférer des εj positifs ou négatifs, et donc l’algorithme aboutit à une symétriepar rapport à zéro. Que se passe-t’il si seules les variances Cjj sont connus et non pas les covariancesCjk, comme cela arrive couramment en pratique ? Dans ce cas, seuls les paramètres de Lagrange Λjj

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apparaissent dans (56), c’est à dire que les matrices Λ et C sont a priori diagonales. Des covariancesinconnues peuvent ainsi être considérées nulles, et cette règle simple peut être également appliquéedans les cas où certaines covariances sont connue et d’autres non. Ceci est un autre exemple, aprèscelui de l’annulation des premiers moments, d’une propriété générale des distributions d’entropiemaximale : toutes les valeurs attendues sont nulles à moins que des contraintes n’en décidentautrement. Ainsi, il n’y a aucune différence entre le fait de considérer des moyennes inconnuescomme nulles après avoir introduit des paramètres de Lagrange pour celles-ci, ou de les ignorercomplètement dès le début. Avec ε = −x x , nous pouvons réécrire la distribution des erreurs (59)sous la forme

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) det

exp -1

2p d d

Tx x ,C x

Cx - x C x - x x=

−1

21

π,

− ∞ < < ∞x j (60)

qui est la généralisation à plusieurs variables de la distribution Gaussienne à une variable (55).

Il devrait être clair désormais que la maximisation de l’entropie est un outil puissant pourl’attribution de l’a priori ou de tout autre probabilité. Une publication fascinante et très riche eninformations sur la méthode du maximum d’entropie, incluant une grande variété d’applications allantdes tests d’hypothèses à la thermodynamique hors équilibre et la théorie des fluctuations, est celle deJaynes (1978).

1.8 Une approximation : le maximum de vraisemblance

Plus les données sont nombreuses, et moins l’a priori est important. C’est pourquoi, l’utilisationd’un a priori constant est souvent une approximation raisonnable, comme nous l’avons fait dans notreexemple de constante de décroissance. Cela signifie que la densité de probabilité de la probabilitéa posteriori est prise égale à la fonction de vraisemblance. La méthode largement utilisée dumaximum de vraisemblance est essentiellement constituée de la règle recommandant de prendre lavaleur du paramètre (ou le vecteur) qui maximise la fonction de vraisemblance. Puisque la fonction devraisemblance dépend seulement de l’échantillon, la valeur du paramètre (ou le vecteur) lamaximisant ne dépend de rien d’autre : elle est statistique et sa distribution de probabilité « directe »,c’est-à-dire la probabilité que son écart par rapport à la valeur (ou au vecteur) réelle soit dans deslimites données si on choisit un échantillon, peut être calculée comme l’intégrale de la fonction devraisemblance sur un domaine correspondant à l’espace de l’échantillon. Si la distribution ainsiobtenue est étroite, le paramètre réel est vraisemblablement proche de l’estimation par le maximum devraisemblance bien spécifique obtenu à partir d’un échantillon bien spécifique. La distribution de lastatistique doit par conséquent être reliée à l’a posteriori Bayesien. Dans les cas simples, lorsque lastatistique est suffisante, on peut, en fait, déduire rigoureusement l’a posteriori Bayesien de ladistribution de l’estimation par le maximum de vraisemblance. C’est l’approche fiducielle deR.A. Fisher (1935). Dans de tels cas favorables, on remarque que le résultat du maximum devraisemblance coïncide avec le résultat Bayesien obtenu avec le convenable a priori le moinsinformatif.

Illustrons ceci avec notre exemple de constante de décroissance. La fonction de vraisemblance del’équation (7) devient maximale pour λ = 1 / t : l’estimation par le maximum de vraisemblance estdonc la même que l’estimation « ponctuelle » Bayesienne (21). La probabilité pour que la statistique

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suffisante t soit dans l’intervalle infinitésimal dt , si un échantillon est tiré au sort, peut être obtenuepar intégration de la fonction de vraisemblance sur une coque sphérique de rayon t et d’épaisseur dtdans l’espace des ti. En passant en coordonnées polaires, t r dt rdr d t r drdn n= = ∝ −2 2 12, , Ω et eneffectuant une intégration (triviale) sur les coordonnées angulaires Ω, on obtient

( )p t n dt e r drnr n,λ λ∝ − −2 2 1 , 0 < ≡ < ∞r t . (61)

Après renormalisation, le membre de droite de cette relation de proportionnalité est identique àl’a posteriori Bayesien (20) obtenu avec l’a priori de Jeffrey. Manifestement, nous avons ici ladistribution de probabilité universelle du produit λnt qui peut aussi bien être interprétée comme laprobabilité de λ sachant nt (un échantillon spécifique et un continuum de constantes de décroissancepossibles) que comme celle de nt sachant λ (une constante de décroissance spécifique et uncontinuum de d’échantillons possible pour chaque valeur du nombre naturel n).

La méthode du maximum de vraisemblance, une des techniques inventées pour contourner lesa priori, est donc, dans les cas favorables, équivalente à l’approche Bayesienne, mais malgré tout ellereste plus lourde : tout d’abord il faut identifier des statistiques suffisantes, puis il faut calculer leurdistribution de probabilité « directe » par intégration de la fonction de vraisemblance sur un domaineconvenable de l’espace des échantillons, et finalement il faut « inverser » pour obtenir la distributionde probabilité des paramètres. Dans des cas plus complexes, les statistiques suffisantes peuvent ne pasexister du tout et même si elles existent, des approximations sont requises de manière à ce que lerésultat par maximum de vraisemblance donne uniquement une approximation du résultat Bayesienexact.

1.9 Une approximation : les moindres carrés

L’approximation qui va être étudiée, la méthode des moindres carrés, est la plus importante pourl’évaluation et l’ajustement des données. Comme exemple le plus simple, considérons le cas d’unequantité µ mesurée n fois, sous différentes conditions expérimentales, et que nous obtenions lesrésultats sous la forme x j j± σ . La meilleure façon d’interpréter ces nombres est de les considérer

comme les moyennes et erreurs types de distributions de probabilité non spécifiées. Qu’elles soientGaussiennes ou non, le principe du maximum d’entropie nous dit de fonder toute nouvelle inférencesur des Gaussiennes si les erreurs inconnues peuvent avoir une valeur quelconque entre -∞ et +∞. Lafonction de vraisemblance est le produit de ces distributions d’erreur Gaussiennes, et l’a prioriapproprié pour la position du paramètre µ est uniforme, et donc l’a posteriori est également uneGaussienne,

( )p x dx

dj jj

jj

µ σ µµ

σµ, ∝ −

∑ exp

1

2

2

. (62)

En introduisant les moyennes sur les échantillons pondérées par σ-2,

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x

xj jj

jj

∑∑

σ

σ

2

2, (63) σ

σ σ

σ σ2

2 2

2 2≡ =

− −

∑∑ ∑

j jj

jj

jj

n, (64)

ainsi que x 2 , et en normalisant correctement, nous obtenons

( ) ( )p x d

/n

x

/ndj jµ σ µ

πσ

µ

σµ, = −

1

2exp

2 2

2

2, (62)

avec pour la moyenne et la variance

µ = x , (66) ( )var µσ

≡ =∆µ2

2

n. (67)

L’erreur standard relative sur le résultat, ∆ var µ µ/ , est apparemment une nouvelle fois

proportionnelle à 1/ n . La meilleure estimation par perte quadratique est la moyenne pondérée parσ-2 sur l’ensemble des données. Elle minimise la somme des carrés dans l’exponentielle de l’aposteriori (62). Cette propriété des moindres carrés sera à nouveau rencontrée dans la généralisation àplusieurs variables :

Considérons

• Des observables yj, j = 1, 2, ... J (par exemple des données de capture neutronique).

• Des paramètres xµ, µ = 1, 2, ... M (par exemple des paramètres de résonance).

• Un modèle théorique y = y(x) (par exemple, la théorie de la matrice-R des réactionsnucléaires).

où x = x x M1 ,... , y = y yJ1 ,... sont des vecteurs respectivement dans l’espace des paramètres et

l’espace des échantillons. D’ordinaire M<J, mais nous verrons que ce n’est pas nécessaire. Supposonsmaintenant qu’avant que les données ne soient obtenues, on ait une connaissance a priori du vecteur

de paramètres sous la forme d’un vecteur estimé ξ et d’une matrice de covariance A = δ δξ ξ T ,

avec δξ ξ≡ − x , décrivant les incertitudes et les corrélations des paramètres estimés. La distribution

de probabilité a priori de x, sachant ξ et A, peut alors être considérée comme

( ) ( ) ( ) ( ) ( )p d dx A x x A x xT -1ξ ξ − ξ −, ∝ −

exp 1

2, (68)

où d(x) ≡ dMx est l’élément de volume de l’espace des paramètres, de dimension M (à ne pasconfondre avec le vecteur infinitésimal dx).

Supposons de plus que les mesures donnent un vecteur de données η, affecté par des erreursexpérimentales dont les incertitudes et corrélations sont spécifiées par la matrice de covariance

B = δ δη η T , avec δη η≡ − y , de sorte que la vraisemblance d’obtenir ces valeurs, pour un vrai

vecteur y d’observables, est

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( ) ( ) ( ) ( ) ( )p d dη η η − η − ηy B y B yT -1, ∝ −

exp 1

2, (69)

où d(η) ≡ dMη est l’élément de volume de l’espace des échantillons, de dimension J.

Ces attributions de probabilité sont les Gaussiennes à plusieurs variables imposées par leprincipe du maximum d’entropie (comparer avec l’équation 59). En multipliant distribution a priori etfonction de vraisemblance, on obtient la distribution a posteriori,

( ) ( )

( ) ( ) ( )( ) ( )( ) ( )

p d

d

x A B x

x A x y x B y x xT -1 T -1

ξ η

ξ − ξ − η − η −

, , ,

.∝ − −

exp 1

2

1

2

(70)

Jusqu’ici nous avons négligé les corrélations entre l’information a priori et les nouvellesdonnées. Ce n’est toutefois pas toujours possible, par exemple si l’information a priori vient demesures plus anciennes où les mêmes méthodes et standards que pour les nouvelles mesures ont étéemployés. Une généralisation à cette situation n’est pas difficile. L’équation (70) montre que l’onpeut considérer les estimations des anciens paramètres et les nouvelles données sur un pied d’égalité.Les estimations a priori et leurs incertitudes ont exactement le même impact que si elles étaient desdonnées obtenues dans une mesure des observables spéciales yµ=xµ. Ainsi, nous pouvons combiner lesvecteurs x et y(x) dans un hypervecteur z(x) ≡ x, y(x). Si le vecteur donnée correspondantζ ≡ ξ, η et la matrice de covariance C ≡ δζ, δζT sont connus, la distribution d’entropie maximaleest

( ) ( ) ( )( ) ( )( ) ( )p d dx C x z x C z x xT -1ζ ζ − ζ −, ∝ −

exp 1

2, (71)

où C contient désormais également les covariances entre les estimations a priori et les nouvelles

données, δξ δηµ i . Cette distribution a posteriori est le résultat le plus général, le plus détaillé pour

notre estimation de paramètre Bayesienne. Il contient sous forme analytique toute l’information sur levecteur paramètre x que contiennent l’information a priori et les nouvelles données considérées.

La tâche restante est de se ramener à un vecteur paramètre recommandé et à son incertitude. Lathéorie décisionnelle nous dit ce que nous devons faire si une fonction de perte est donnée. Si aucunen’est donnée, nous supposons une perte quadratique qui nécessite de recommander le vecteur demoyenne a posteriori réactualisé x et de spécifier les incertitudes et corrélations par la matrice de

covariance a posteriori δ δx xT , avec δx x x≡ − . Pour un modèle linéaire y(x), les intégrations

nécessaires sont faciles comme nous le verrons dans la partie 2.2. Pour un modèle non-linéaire, ondoit soit intégrer numériquement, ce qui n’est pas pratique si de nombreux paramètres doivent êtreestimés (excepté peut être avec des techniques de Monte Carlo), soit avoir recours à la méthode de laplus grande pente (approximation de Laplace). Cela signifie essentiellement que l’a posteriori exactest remplacé par une Gaussienne à plusieurs variables ayant le même maximum et le même tenseur decourbure au maximum, si bien que l’intégrand est déterminé avec une bonne approximation au moinsdans le domaine qui contribue le plus à l’intégrale. Ceci est réalisé par un développement de Taylor del’exponentielle de l’équation (71) autour de son minimum et par une troncation après les termes dusecond ordre (voir par exemple Bernardo et Smith 1994, Lange 1999). Le vecteur paramètre xmaximum, c’est-à-dire a posteriori le plus probable, est spécifié par

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( )( ) ( )( )ζ − ζ −z x C z xT -1 = min . (72)

Ceci est l’établissement formel du principe des moindres carrés sous sa forme la plus générale.(Dans le système d’axes principaux, la forme quadratique apparaît en tant que somme de carrés, d’oùson nom).

En statistique fréquenciste, le principe des moindres carrés est introduit de manière plus oumoins ad hoc, ou est dérivé du principe de maximum de vraisemblance qui à son tour est introduitad hoc. Dans les deux cas, seule la fonction de vraisemblance est utilisée. À ce stade, nousreconnaissons que la condition pour les moindres carrés est une conséquence naturelle de critères plusfondamentaux et qu’elle demande la maximisation non seulement de la fonction de vraisemblancemais également de toute la distribution a posteriori. Sans trop simplifier, on peut dire que lesmoindres carrés généralisés ne sont rien d’autre qu’une estimation Bayesienne de paramètres parperte quadratique dans l’approximation de Laplace, dans des problèmes où seules les données etl’incertitude sur les données sont connues de sorte que le principe du maximum d’entropie demandedes Gaussiennes, que les distributions réelles inconnues soient des Gaussiennes ou non. Un principedes moindres carrés ad hoc n’est pas requis.

Nous terminons ce chapitre en résumant la différence essentielle entre l'approche fréquentiste(également appelés orthodoxe ou classique ou échantillonnage-théorique) et l'approche Bayesienne del'inférence inductive : les fréquentistes moyennent sur tous les résultats imaginables d'une mesure,conditionnés par des causes données, alors que les bayésiens moyennent sur toutes les causespossibles conditionnées par le résultat observé et la connaissance a priori. Il ne peut y avoir de douteque l'approche Bayesienne est celle qui convient pour un physicien qui doit déduire des sectionsefficases ou des paramétres nucléaires à partir d'observations affectées d'incertitudes.

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2. ÉVALUATION DES DONNÉES NUCLÉAIRES POUR DES APPLICATIONS

Dans les paragraphes suivants, nous allons discuter de certains aspects plus pratiques del’évaluation des données, avec une attention particulière sur le formalisme des moindres carrés, surl’opposition entre erreurs statistiques et erreurs systématiques et sur la manière dont ces dernièresamènent des corrélations. Historiquement, l’évaluation des données au sens moderne commença avecles efforts de Dunnington (1939), Cohen, Dumond et de leurs collaborateurs (1957, 1992) pourdéterminer un ensemble de valeurs recommandées pour les constantes fondamentales (Constante dePlanck, constante de structure fine, masse de l’électron, etc.), et établir les incertitudes, par unajustement général par moindres carrés sur l’ensemble des données expérimentales significatives. Àpeu près au même moment, l’industrie nucléaire, qui prenait rapidement de l’ampleur, commença àdévelopper un appétit vorace pour des données nucléaires précises, principalement des sectionsefficaces neutroniques et photoniques, mais également des données de structure nucléaire et dedécroissance. Les données pour des réactions nucléaires induites par des neutrons ayant des énergies« thermiques » autour de 25.3 meV furent évaluées en première priorité (voir Westcott et al. 1965,Lemmel 1975), mais le champ grandissant de la technologie nucléaire, des réacteurs à fissionthermiques aux réacteurs à fission rapides et éventuellement aux réacteurs à fusion, amena uneextension correspondante du domaine d’énergie d’intérêt. Les fichiers modernes de donnéesneutroniques contiennent des millions de valeurs de section efficace couvrant la totalité du domaineallant de 10 µeV à au moins 20 MeV pour des centaines d’isotopes et des ordinateurs sontindispensables pour leurs maintenance et utilisation. Les données nucléaires fournissent un exempleparticulièrement développé du processus permettant d’aller de données expérimentales brutes à desfichiers de données évaluées.

2.1 Préparation par étape des données nucléaires pour applications

Les données nucléaires (et pour d’autres sciences) pour des applications technologiques sonthabituellement préparées en plusieurs étapes, par différents groupes de spécialistes. Considérons lesdonnées de sections efficaces neutroniques pour illustrer ces étapes.

1. Mesure :

Les expérimentateurs prennent des données, généralement auprès d’accélérateurs fournissant desfaisceaux continus ou pulsés, ces derniers permettant d’utiliser la méthode du temps de vol. Cetteméthode produit en une expérience, et par conséquent sous exactement les mêmes conditionsexpérimentales, de grandes quantités de points de mesure couvrant de larges plages d’énergie avecune très bonne résolution. La plus simple de ce type de mesures est celle de la section efficace totaleσ. On mesure la fraction du faisceau de particules ayant une énergie donnée (un temps de vol donné)qui traverse, sans interagir, un échantillon ayant une épaisseur n (en atomes/barn). Cette fraction, latransmission, est 1-σ∆n pour une couche très mince de matière. Pour tout l’échantillon, elle vaut

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( )T n en n n= − =→

−limn 0∆

∆1 σ∆ σ/. (73)

En pratique, la transmission est obtenue par le rapport entre les nombres de coups d’expériences« avec échantillon » et « sans échantillon ». Le flux incident et l’efficacité du détecteur n’inter-viennent plus, et il n’y a donc pas d’incertitude liée à la normalisation. Le bruit de fond, toutefois,demande des corrections. Si la section efficace présente une structure résonante, on utilise à la foisdes échantillons « minces » et « épais » afin d’obtenir une bonne précision sur les sections efficacesextraites aussi bien au pics des résonances que dans les vallées entre les résonances.

Les sections efficaces partielles sont plus difficiles à mesurer. Expérimentalement, on obtient untaux de réaction, par exemple, en enregistrant les produits de fission ou les rayons gamma de captureémis par un échantillon mince bombardé par des neutrons. Le taux de réaction est défini comme lafraction des particules du faisceau qui subissent la réaction du type mesuré dans l’échantillon. C’estune somme de contributions d’évènements de collisions multiples où la particule du faisceau subitzéro, une, deux, etc. diffusions avant d’induire finalement la réaction enregistrée,

Y Y Y Yx x x x= + + +0 1 2 ... . (74)

Le taux de premier choc est le produit de la probabilité d’interaction des neutrons incidents et durapport σx/σ du nombre d’événements (n,x) au nombre total d’interactions,

( )Y exn x

0 1= − − σ σσ

, (75)

où σx est la section efficace partielle pour la réaction (n,x) considérée. Pour des échantillons trèsminces, nσ <<1, on peut négliger les collisions multiples et prendre Y Y nx x x≈ ≈0 0σ , mais pour deséchantillons plus épais le terme de premier choc (75) doit être utilisé en entier. En particulier, dans lecas des réactions avec résonances, les termes de collisions multiples sont des fonctions de plus en pluscomplexes des sections efficaces, de sorte qu’elle doivent être calculées par simulation Monte carlo(voir Fröhner 1989). Le taux de comptage observé est le produit du taux de réaction, du flux incidentet de l’efficacité de des détecteurs. Ces deux dernières quantités doivent être déterminées séparémentet introduisent des incertitudes corrélées sur la normalisation comme nous allons en discuter ci-dessous. La figure 3 montre des données de capture neutronique mesurée pour des résonances, sesuperposant, de 53Cr+n avec une forte contribution des captures avec collisions multiples (Brusegan etal. 1992). La figure 4 prouve la qualité des données modernes de temps de vol : il y a trois jeux dedonnées de transmission et deux jeux de taux de fission induite par des neutrons, montrant tous lescinq les mêmes résonances du système composé 239Pu+n (Derrien et al. 1988).

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Figure 3. Taux de capture neutroniques mesurés avec la méthode du temps de vol auprès del’accélérateur linéaire de Geel (Gelina) autour de quatre résonances d’onde s et d’une étroite

résonance d’onde p se superposant, incluant les élargissements par la résolution expérimentale etl’effet Doppler et présentant une forte capture après collisions multiples. En trait fin : ajustementpar moindres carrés avec le code FANAC (Fröhner 1977) utilisant la matrice-R ; en trait épais :

calcul correspondant pour le taux de simple collision (Brusegan et al. 1992)

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Figure 4. Données de transmission pour trois échantillons et deux jeux de sectionsefficaces de fission, mesurés avec la méthode du temps de vol auprès de l’accélérateur

linéaire d’électrons de Saclay (Blons) et à Oak Ridge (les autres), montrant lesrésonances de 239Pu+n. Les courbes correspondent à un ajustement simultané,

en utilisant la matrice-R, des données d’Oak Ridge à l’aide du code de moindrescarrés généralisés SAMMY (Larson and Perey, 1980). D’après Derrien et al. (1988)

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2. Réduction des données brutes :

Des bruits de fond constants et dépendant du temps sont soustraits, des impuretés dansl’échantillon sont prises en compte, et, dans le cas de sections efficaces partielles (taux de réaction), leflux et l’efficacité des détecteurs sont mis en facteur. Les corrections de diffusion multiple et derésolution expérimentale sont d’ordinaire traitées à l’étape suivante si elles nécessitent, par exemple,la théorie des résonances. Du fait de relations complexes entre les sections efficaces et les observables(Equations 73-75), les sections efficaces ne peuvent pas encore être obtenues lors de cette étape,excepté peut être pour des mesures d’échantillons minces.

3. Analyse des données corrigées :

Chaque fois que possible, les sections efficaces mesurées sont paramétrisées au moyen d’unethéorie des réaction nucléaires. Ceci assure la consistance entre les sections efficaces partielles ettotale, permet d’inter- et d’extrapoler dans les régions où aucune donnée n’a été mesurée et évite larecommandation de valeurs n’ayant pas de sens physique. Les théories et modèles suivants sontemployés, par ordre croissant d’énergie :

• Théorie de la matrice-R dans le domaine thermique et des résonances résolues (paramètres :énergie et spins des niveaux, largeurs partielles), voir figures 3, 4.

• Théorie statistique des niveaux (Hauser-Fesbach) dans le domaine des résonancesnon-résolues (paramètres : densité de niveaux, fonctions densités et largeurs partiellesmoyennes, ou les facteurs de transmission des voies équivalents), voir figure 5.

• Le modèle optique à plus hautes énergies, où les niveaux se recouvrent fortement mais où lesréactions par noyau composé dominent toujours (paramètres : rayon, profondeur, largeurs etdéformation des parties réelles et imaginaires du puit de potentiel), voir figure 6.

• Théories du noyau précomposé, des réactions directes et semi-directes à des énergies encoresupérieures où les processus directs et de prééquilibre sont importants.

• Ceci est complété par le modèle de la résonance dipolaire géante pour les réactionsphotoniques, les modèles de barrière de fission pour les réactions de fission, etc. À ce niveau,les techniques d’estimation de paramètre (d’ajustement de courbe) sont largement utilisées.Les sections efficaces sont générées à partir des paramètres estimés et des incertitudes quel’utilisateur trouve dans les fichiers de données nucléaires évaluées. Lorsqu’il n’existe pas demodèle adapté, des ajustements avec des polynômes ou des fonctions similaires sont utilisésafin d’interpoler entre les points dont les valeurs ont été évaluées. Les trous entre les donnéesmesurées sont comblés par des calculs avec modèle ou avec la systématique. Les figures 3-6donnent des exemples de courbes théoriques ajustées sur les données mesurées.

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Figure 5. Trois jeux de données de section efficace de capture mesurées à Oak Ridge (1976),Harwell (1977) et Karlsruhe (1980) pour 241Am dans le domaine des résonances non-résolues.

La courbe lisse est un ajustement par moindres carrés généralisés obtenu avec le code FITACS,utilisant la théorie d’Hauser-Feshbach. D’après Fröhner et al. (1982)

4. Création de constantes de groupe :

Les sections efficaces ponctuelles élargies par effet Doppler pour toutes les voies de réactionouvertes et pour différentes températures peuvent maintenant être calculées et moyennées sur desintervalles d’énergie finis comme cela est requis pour les calculs de réacteur ou de protection. Lerésultat est un ensemble de constantes de groupe, comprenant habituellement des sections efficacesmoyennées sur le groupe (« de dilution infinie ») pour la température ambiante et des facteursd’auto-protection dépendant de la température et de la dilution sur une grille spécifique detempératures et de « dilutions » (décrivant le mélange avec les autres noyaux), voir, par exemple,Fröhner (1989). Ces ensembles de constantes de groupe sont souvent des fichiers ayant une utilitéspécifique pour des applications particulières, au contraire de la finalité générale des fichiers« microscopiques » dont ils sont issus. Afin d’améliorer la fiabilité de leur but spécifique, ils sontsouvent ajustés (par moindres carrés) sur les données obtenues dans des expériences « intégrales »menées dans des réacteurs d’essai spéciaux ou des installations similaires.

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Figure 6. Dépendance angulaire des sections efficaces de diffusion élastique de 93Nbmesurée au Laboratoire National d’Argonne. Les sections efficaces différentielles

sont exprimées en barn/sr et les angles de diffusion (θ, dans le système du laboratoire)en degrés. Les points représentent les données et leurs erreurs, les courbes sont

calculées à partir d’un potentiel ajusté du modèle optique. D’après Smith et al. (1985)

Toutes ces étapes demandent du temps et plusieurs années peuvent s’écouler avant que desdonnées nucléaires mesurées pour le besoin d’applications technologiques ou scientifiques ne soientdisponibles sous forme de fichiers informatiques d’évaluation. Cet aspect a motivé des efforts decoordination des travaux à une échelle internationale. Les demandes formelles de données nucléairessont désormais publiées régulièrement par l’AIEA dans les « Worldwide Requests for Nuclear Data »,connue sous le nom de liste WRENDA.

Les données mesurées sont collectées par un réseau de centres de données, chacun d’eux agissantdans son aire de service agréée :

NNDC (National Nuclear Data Centre) à Brookhaven, USA, servant lesUSA et le Canada.

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NEADB (Banque de données AEN/OCDE) à Saclay, France, servant les paysnon américains de l’OCDE .

CJD (Centr po Jadernym Dannym) à Obninsk, Russie, servant leterritoire de l’ancienne Union soviétique.

NDS (Nuclear Data Section, IAEA), à Vienne, Autriche, servant tousles autres pays.

Des échanges de données réguliers assurent que la base de donnée est essentiellement la mêmepour les quatre centres. Les données évaluées sont également rassemblées, notamment les fichiersENDF (USA), JEF (pays membres de la NEADB), JENDL (Japon) et BROND (pays du Comecon).Les centres produisent également la bibliographie très utilisée « Computer Index to Neutron Data »(CINDA). Le très connu « barn book » (NdT : le « BNL ») (Mughabghab et al. 1984) contenant devastes tableaux de paramètres de résonance et des graphes de sections efficaces, sont des produits duNNDC. Des réseaux similaires de centres de données rassemblent et distribuent les données departicules chargées, de structure nucléaire et de décroissance. Le fichier de type ENSDF contient desdonnées du dernier type, évaluées : c’est une version lisible sur machine des très connus « NuclearData Sheets » et « Table of Isotopes » (Lederer et al., 1979).

Des coopérations internationales comparables impliquant des réseaux de bases de donnéesexistent en météorologie, physique des hautes énergies, recherche en matériaux, recherche aéro-spatiale et bien d’autres domaines scientifiques et technologiques.

2.2 Ajustement par moindres carrés avec itération

La plus grande partie du travail d’estimation de paramètre dans l’analyse des données corrigées(étape 3 du paragraphe précédent) repose sur la méthode des moindres carrés. Retournons donc à lacondition des moindres carrés,

( )( ) ( )( )ζ − ζ −z x C z xT -1 = min . (76)

Nous rappelons que le vecteur ζ est le jeu combiné des estimations a priori des paramètres et desdonnées mesurées, JM ,...,,..., ηηξξ 11== ηξζ . Les données expérimentales peuvent provenir de

types de mesures assez différents qui, bien sûr, doivent être décrites par les coordonnéescorrespondantes du vecteur du modèle y(x).

Sans information a priori sur les paramètres on a simplement

( )( ) ( )( )η − η −y x B y xT -1 = min . (77)

Si on néglige également les corrélations entre les données ηj, la matrice B devenant ainsidiagonale, on obtient les équations pour un ajustement par moindres carrés « primitif » qui est encoreemployé dans de nombreux codes. Il utilise uniquement les nouvelles données et leurs incertitudes,ignorant toute information a priori qui pourrait être disponible. Les estimations des paramètres endécoulant et leurs incertitudes doivent ensuite être combinés avec l’information a priori, issue parexemple de mesures précédentes, par une sorte de moyenne pondérée après l’ajustement. Or, un

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principe fondamental de la logique inductive est que les probabilités devraient coder toutel’information disponible, la connaissance a priori tout comme les nouvelles indications. Il est doncplus correct – et également plus commode – d’inclure les estimations a priori (ou premièressuppositions) et leurs incertitudes (variances) dès le début sous forme d’une distribution a prioricomme dans l’équation (70). En outre, la convergence d’ajustement non linéaires par moindres carrésest toujours améliorée-souvent de manière spectaculaire-après avoir inclus l’information a priori pardes Gaussiennes ou des a priori similaires. On ne doit pas se soucier outre mesure des corrélationsinitiales inconnues. En se référant au principe du maximum d’entropie, nous pouvons simplementnégliger celles que nous ne connaissons pas et mettre les éléments correspondants de la matrice decovariance initiale à zéro. D’un autre côté, il n’est pas difficile de construire complètement desmatrices de covariance si les incertitudes sur les données sont bien détaillées, avec une spécificationclaire des diverses composantes de l’erreur, incluant leurs erreurs quadratiques moyennes. Cela seraexpliqué ci-dessous, mais dans l’immédiat nous allons supposer que la matrice de covariance initialeC est donnée, au moins sous forme diagonale.

Essayons de calculer l’estimation des paramètres par perte quadratique, c’est à dire la moyenne etla matrice de covariance (finale) de la distribution a posteriori (71). L’intégration numérique esttoujours possible, mais afin d’obtenir des expressions analytiques, nous devons employerl’approximation de Laplace (méthode de la plus grande pente, intégration au point selle) qui n’eststrictement exacte que dans le cas d’un modèle linéaire y(x). Pour des modèles non linéaires, elle estadéquate pour la plupart des applications pratiques, mais on doit garder en mémoire qu’elle peut neplus fonctionner si les non linéarités sont importantes autour du pic de l’a posteriori. Ledéveloppement de Taylor de l’exposant de l’équation (70) autour de son minimum à x x= mène à

( ) ( )( ) ( )( )( ) ( ) ( )

Q

Q

x z x C z x

x x - x A x - x

T -1

T -1

+ +

ζ − ζ −

= ’ ... ,(78)

Le vecteur paramètre x le plus probable est défini par ∇ Q=0 avec ∇ µ≡∂/∂xµ), c’est à dire par leséquations « normales »

( ) ( )( )S x C z xT -1 ζ − = 0 , (79)

et la matrice A’ par

[ ] ( ) ( )A = S x C S xT

x=x

T -1’ Q-1 1

2≡ ∇∇ +

$

..., (80)

où S est la matrice rectangulaire des coefficients de sensibilité

Sz

xj

j

µµ

∂∂

= . (81)

Le vecteur x peut être déterminé à partir des équations normales (79) par itération deNewton-Raphson : si on a, après n itérations, une solution approchée xn, on peut faire intervenir lesapproximations linéaires

( ) ( ) ( )( )z x z x S x x - xn n n ≈ + (82)

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et ( ) ( )S x S xn ≈ dans les équations normales et résoudre pour x . La solution améliorée obtenue par

cette méthode est

( ) ( )[ ] ( ) ( )[ ]x = x + S x C S x S x C z xn+1 n n

T -1n

-1

n

T -1nζ − . (83)

Ainsi, on peut commencer avec la valeur de l’a priori la plus probable, x0 = ξ, dans le membre dedroite, calculer la valeur améliorée x1, la réinsérer à droite, et ainsi de suite jusqu'à ce qu’on obtiennedes valeurs constantes en simple précision de l’ordinateur (ou jusqu'à ce qu’un autre critère deconvergence soit satisfait). À chaque itération, nous devons recalculer z(x) et la matrice de sensibilitéS(x). Pour un modèle linéaire, z est une fonction linéaire de x, c’est à dire que l’équation (82) estexacte pour n=0, avec S ne dépendant pas de x. Par conséquent, le résultat final est obtenu dès lapremière itération, x = x1 , comme attendu.

Une fois que nous avons établi le résultat final x de l’itération, nous pouvons calculer la valeurrecommandée (dans l’approximation du point selle)

( ) ( )[ ] ( ) ( )[ ]x = S x C S x S x C z xT -1-1 T -1 ζ − , (84)

( ) ( )[ ]δ δx x = S x C S xT T -1-1

. (85)

Pour un modèle linéaire, on effectue simplement x = ξ et les valeurs moyennes ainsi obtenuessont exactes.

Remarquons que dans le processus d’itération, il est nécessaire de calculer des vecteurs améliorész(x) contenant à la fois les paramètres améliorés xn et les données améliorées y(xn). Les changementssont faibles si les coefficients de sensibilités sont petits et si les valeurs calculées sont déjà prochesdes estimations a priori des paramètres et des données. Dans l’évaluation des données neutroniques etdans la paramétrisation des sections efficaces, le nombre M de paramètres est habituellementbeaucoup plus petit que le nombre J de points expérimentaux. L’opposé est vrai pour l’ajustement deconstantes de groupe puisque le nombre M de constantes de groupe ajustées dans les librairies dedonnées est d’ordinaire beaucoup plus grand que le nombre J de données intégrales (réponsesmesurées en réacteur). Les équations utilisées sont les mêmes dans les deux cas. Le formalismeBayésien de moindres carrés par itération est employé dans le code d’analyse de résonance SAMMY(Larson and Perey 1980) et dans le programme FITACS (Fröhner et al.,1982), basé sur la théoried’Hauser-Feshbach, qui est utilisé pour analyser des données de sections efficaces moyennes dans ledomaine des résonances non résolues. L’expérience acquise au travers de ces codes a clairementmontré l’avantage de la prise en compte explicite d’une information a priori sous forme d’uneGaussienne. L’a priori contraignant la recherche de paramètre d’une manière progressive dans undomaine raisonnable, les problèmes (de programmation linéaire) aux frontières abruptes sont évités, etla convergence s’en retrouve grandement améliorée comparativement aux précédentes versions demoindres carrés « primitifs » de ces codes qui n’utilisaient pas les incertitudes a priori. Un problèmetypique des ajustements par moindres carrés « primitifs », à savoir l’absence de convergence si trop deparamètres sont ajustés simultanément, est pratiquement éliminé avec le système des moindres carrésgénéralisés qui tolère de grands nombres de paramètres ajustés (plusieurs douzaines dans l’analyse derésonances), même si les incertitudes a priori sont assez importantes.

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En physique des réacteurs, on travaille souvent avec des erreurs relatives, ( )ζ ζj j jz− / , avec

les éléments correspondants de la matrice des covariances relatives ( )∂ζ ∂ζ ζ ζj k j k/ et les

coefficients de sensibilité relatifs S j jµ ζ/ . Cela amène aux remplacements suivants :

( )ζ − ζ −z D z→ , C DCD→ , S DS→ avec Djk jk j= δ ζ/ . (86)

Bien entendu, les matrices diagonales D insérées sont annulées par leurs inverses dans leséquations de moindres carrés, si bien que l’utilisation de quantités relatives modifie uniquement laforme des équations et non leur contenu. L’avantage est bien sûr que les erreurs relatives (lespourcentages) et les sensibilités relatives sont plus facilement saisissables et mémorisables ce qui rendplus aisée leur comparaison et facilite l’établissement de leur importance relative dans des problèmesavec de nombreux paramètres physiquement différents. Des difficultés apparaissent toutefois si lesvaleurs ζ j sont beaucoup plus petites que leurs incertitudes, si bien que l’on en arrive pratiquement àdevoir diviser par zéro. Dans ce cas, il est préférable d’utiliser des valeurs absolues plutôt querelatives.

Occasionnellement se pose la question de savoir s’il est correct d’utiliser les données ζ j

(mesurées ou estimées a priori) comme référence ou s’il ne serait pas préférable d’utiliser les valeursréelles zj. La réponse est simple : les valeurs réelles sont généralement inconnues si bien qu’il estimpossible de les utiliser en tant que référence, par exemple dans des fichiers informatiques dematrices de covariances relatives ou de coefficients de sensibilités. Tout ce que l’on peut faire, c’estutiliser les meilleures estimations disponibles à un niveau donné. Avant l’ajustement des moindrescarrés, il s’agit des estimations a priori des paramètres ξµ et des données expérimentales ηi, donc des

quantités ζ j. Après l’ajustement on a les estimations des paramètres améliorés xµ et des données

calculées améliorées ( )y xj , et elles sont donc les valeurs de références correctes pour les matrices

de covariances finales relatives. Les valeurs réelles ne sont jamais connues, elles apparaissentseulement dans les équations en tant qu’arguments des distributions de probabilité, c’est à dire en tantque valeurs possibles, et s’intègrent à n’importe quel moment aux valeurs attendues ou autresquantités recommandées calculées pour des applications pratiques.

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Figure 7. Illustration de non linéarités et de corrélations dans les ajustements par moindrescarrés : la largeur neutronique Γn et la largeur radiative Γγ de la résonance à 23.52 eV de

232Th+n sont estimées par des ajustements simultanés de deux aires importantes detransmission (TA), cinq aires de pic de capture (CA) et deux rapports d’auto-indication (SIR).Les courbes représentent les huit composantes du vecteur y(x) du modèle théorique, le vecteur

paramètre x ayant deux coordonnées, Γn et Γγ. « L’ellipse d’erreur » montre la meilleureestimation et les incertitudes corrélées (code TACASI). D’après Fröhner (1966)

2.3 Erreurs statistiques : statistique de Poisson

Nous allons maintenant discuter de l’information relative à l’erreur nécessaire pour lareconstruction de la matrice de covariance Cη qui décrit les incertitudes sur les données et leurscorrélations. Dans pratiquement toutes les mesures de données nucléaires, on détecte et on compte desparticules d’un type particulier, par exemple des fragments de fission signalant des événements defission nucléaire, ou des rayons gamma signalant des événements de capture radiative. Les taux decomptage sont une mesure des probabilités de fission ou de capture correspondantes (exprimées parconvention sous forme de sections efficaces de fission nucléaire ou de capture). Dans le cas limited’un temps de comptage infini, et en l’absence d’autres erreurs, on mesurerait les probabilités (dans lesens fréquenciste) directement, mais en pratique, il y a toujours une incertitude statistique sur le tauxde comptage final (ou section efficace) du fait d’un temps de comptage fini. Que pouvons nous dire àpropos du vrai taux λ, et en particulier sur son incertitude, si n événements ont été enregistrés durantun temps t ?

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Un taux de comptage constant signifie qu’il y a un intervalle de temps moyen t bien définientre les comptages. Avec cette information globale, le principe du maximum d’entropie mèneimmédiatement à la familière distribution exponentielle des intervalles de la statistique de Poisson,

( )p t e dttλ λλ= − 0 < < ∞t . (87)

Le multiplicateur de Lagrange, le taux constant, est l’inverse de l’intervalle moyen, λ = 1/ t .Connaissant la distribution des intervalles, on peut noter la probabilité conjointe que les comptagessoient enregistrés dans des intervalles de temps infinitésimaux dt1, dt2,... dtn situés dans un tempsécoulé t, et intégrer sur l’ensemble des positions possibles de ces intervalles. Le résultat est laprobabilité d’enregistrer n coups à des temps arbitraires, dans l’intervalle t, pour un taux constant λdonné,

( ) ( )p n t

e t

n

t n

λλλ

, =−

! , n = 012, , ,... (88)

C’est la distribution de Poisson. Le théorème de Bayes avec l’a priori de Jeffreys pour leparamètre d’échelle λ donne directement la probabilité inverse (voir section 1.5, équation 20)

( ) ( )p t ne x

n

dx

x

x n

λ , =−

Γ , 0 < ≡ < ∞x tλ , (89)

avec

λ =n

t, (90)

∆λλ

=1

n. (91)

L’incertitude relative n’est autre que la loi familière en 1 / n pour l’estimation des incertitudesstatistiques, largement utilisée pour toute sorte de comptages en statistique en général et en calcul deMonte Carlo en particulier.

2.4 Erreurs systématiques : Incertitudes corrélées et leur propagation

Nous allons maintenant discuter rapidement les cas typiques d’erreurs systématiques et de quellefaçon elles induisent des corrélations entre les estimations. Comme précédemment, nous notons leserreurs inconnues sur les données par δη ηi i iy= − . Si elles étaient d’origine purement statistique,

elles ne seraient pas corrélées et les éléments de la matrice de covariance B seraient

( )δη δη δ η δj k jk j jk j= ≡ var ∆η2

, (92)

c’est-à-dire que la matrice serait diagonale. Ceci est supposé dans beaucoup de codes de moindrescarrés « primitif » : chaque erreur quadratique est pondérée par l’inverse de la variance. Parallèlementaux erreurs statistiques, il y a cependant toujours des erreurs expérimentales de mesure de flux, decalibration de détecteur, d’incertitude en temps, etc. Contrairement aux erreurs statistiques, ceserreurs appelées erreurs systématiques sont communes à tout un jeu de données, par exemple à toutesles données accumulées dans les canaux en temps dans des expériences de temps de vol.

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Assez généralement, les corrélations entre les données sont usuellement produites par deserreurs communes. Pour représenter ceci, nous écrivons les erreurs totales inconnues sous la forme

δη δη δηj j= +’ ’ , (93)

où δη’ j est l’erreur systématique et δη’ l’erreur systématique. Cette dernière est la même pour

l’ensemble du jeu de données et donc ne possède pas d’indice. Les éléments de la matrice decovariance B sont

( ) ( )δη δη δη δ δηj k j jk= +’ ’2 2

, (94)

puisque les erreurs statistiques des différents points expérimentaux ne sont pas corrélées,

( )δη δη δη δ’ ’ ’j k j jk=2

, avec une moyenne nulle, δη’j = 0 , et puisqu’il n’y a pas de

corrélations entre erreurs statistique et systématique, δη δη’ ’j = 0 . Nous concluons que les erreurs

communes, c’est à dire systématiques, engendrent toujours des corrélations entre les éléments d’unjeu de données expérimentales.

Les erreurs systématiques les plus fréquentes sont celles qui produisent un déplacement desvaleurs observées (par exemple des erreurs sur le bruit de fond) ou qui les multiplient (comme deserreurs sur la normalisation du flux ou sur la calibration du détecteur). Si nous modifions un bruit defond soustrait b pour un des points expérimentaux, nous devons faire de même pour tous les autres :toutes les valeurs signalées ηj doivent être modifiées ensemble. C’est, bien sûr, la significationlittérale de la covariance. Plus généralement, si les données ont été obtenues à partir de taux decomptage brut aj, en leur appliquant des corrections communes b, c, ..., les erreurs totales sont :

( ) ( ) ( ) .../// +δ∂η∂+δ∂η∂+δ∂η∂≈δη ccbbaa jjjjjj

Or les erreurs statistiques ainsi que, très souvent, les erreurs systématiques ne sont pas corrélées,

si bien que leurs covariances sont nulles, ( ) ( ) ( )δ δ δ δ δ δa a a b b cj k j= = = 0 . Les éléments totaux de

covariance dépendent donc seulement des carrés des erreurs quadratiques moyennes (variances) descomposantes et des coefficients de sensibilités (les dérivées),

( ) ( ) ( ) ...222

2

+∂η∂

∆∂η∂

+∂η∂

∆∂η∂

+δ∆

∂η∂

≈δηδηc

ccb

bb

aa

kjkjjkj

j

jkj (95)

Ceci montre que pour la construction des matrices de covariances, l’évaluateur a besoin de lapart de l’expérimentateur :

• Des erreurs quadratiques moyennes pour chaque composante de l’erreur.

• D’information sur la réduction des données de manière à pouvoir calculer les coefficients desensibilité.

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S’il lui est dit que la réduction des données a consisté dans la soustraction d’un bruit de fond

commun b et dans la multiplication par un facteur de calibration c, c’est à dire ( )η j ja= ⋅- b c , alors il

n’a pas de mal à calculer ( ) ( ) ( ) 2222 / ccbcac kjjjkkj ∆ηη+∆+∆δ≈δηδη . Évidemment, il est

essentiel que les expérimentateurs établissent clairement, et avec suffisamment de détails, les différentescomposantes des erreurs statistiques et systématiques quand ils publient leurs données alors qu’ils nedoivent pas se soucier des corrélations puisque celles-ci peuvent être construites directement à partir descomposantes des erreurs, même pour de très grands jeux de données (à l’aide d’ordinateurs si nécessaire,voir N. Larson 1986, 1992). Comme exemple instructif d’incertitudes corrélées sur les données et de leurimpact sur les paramètres estimés, voir la discussion sur les références pour l’énergie des résonances parF. Perey (1978).

L’union des erreurs statistiques et systématiques dans une erreur totale est souvent considéréeincorrecte. Nos équations montrent, toutefois, que le calcul du carré de l’erreur totale quadratiquemoyenne en tant que somme des carrés des erreurs quadratiques moyennes (variances) de toutes lescomposantes de l’erreur, statistiques aussi bien que systématique, est immédiat. La ligne dedémarcation entre les deux types d’erreur est toutefois discutable : une erreur statistique pour unepersonne pourra être une erreur systématique pour une autre personne. Le seul problème dans lasomme quadratique des erreurs moyennes est qu’en elle-même elle ne révèle pas à quel point elle eststatistique ou systématique, c’est à dire quel niveau de corrélation il peut y avoir. Cette question peutuniquement être répondue si la signification physique et l’erreur type de chacune des composantes del’erreur sont connues.

Une critique relativement reliée à ceci a été soulevée à l’encontre des moindres carrés appliquésà des combinaisons de données obtenues de sources différentes : supposons qu’un taux de comptageconstant, par exemple celui d’un bruit de fond, soit mesuré de manière répétée avec des nombres decoups nj enregistrés durant des intervalles de temps tj. La moyenne sur l’échantillon pondérée par

σ j−2 , calculée avec les incertitudes relatives 1 / n j appropriées pour les comptages, devient

( )∑∑ j jjj j n/t/t 2 . Ceci ne semble pas correct et il a été considéré à tort comme une évidence qu’il

y a quelque chose de fondamentalement faux dans le formalisme des moindres carrés qui doit êtreclarifié et corrigé. L’origine de cette difficulté n’est toutefois pas dans le formalisme des moindrescarrés, mais de son utilisation dans une situation où l’on sait que s’applique une distributionnon-Gaussienne d’échantillons-la distribution de Poisson. Il n’y a pas ici nécessité de remplacer lesdistributions inconnues par des Gaussiennes via la maximisation de l’entropie ou le théorème de lalimite centrale et donc d’utiliser les moindres carrés. L’a posteriori correct est un produit desprobabilités de Poisson, équation (88), et de l’a priori de Jeffreys pour des taux constants. Les

estimations en découlant, λ = ∑ ∑n tjj jj/ et ∆λ / /λ = ∑1 n jj

, font intervenir le

nombre total de coups et temps de comptage total de la manière précise où l’entendait le bon senscommun à partir des équations (90) et (91). La leçon est que la méthode des moindres carrés ne doitpas être utilisée aveuglément si l’information disponible admet un traitement plus rigoureux. C’estune autre illustration de la vérité fondamentale selon laquelle la solution correcte à un problème deprobabilité demande à ce que toute l’information connue soit utilisée.

La stipulation que les expérimentateurs n’ont pas besoin de se soucier outre mesure descorrélations ne doit pas être mal interprétée. Cela ne signifie pas que les corrélations sont sansimportance. Cela signifie seulement qu’elles ne sont pas nécessaires pour la construction de matricesde covariances pourvu que la procédure de réduction des données et les erreurs quadratiques

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moyennes correspondantes soient correctement précisées. Les incertitudes corrélées finales dessections efficaces ou des paramètres des sections efficaces, contenues dans la matrice de covariance

a posteriori δ δx xT , constituent une information particulièrement adaptée pour les utilisateurs des

données. L’incertitude de toute fonction f des sections efficaces xµ, par exemple la criticalité calculéed’un réacteur nucléaire, est donnée dans le cadre d’une approximation linéaire par la racine carrée de

( )δ∂∂

δ δ∂∂µ

µ ννµ ν

ff

xx x

f

x2

= ∑∑ , (96)

où δ δµ νx x est un élément de la matrice de covariance, et où les dérivées ou coefficients de

sensibilités sont à calculer avec les meilleures estimations xµ . Il est évident qu’une bonne étude de

sensibilité ne peut être entreprise sans la matrice de covariance. Par le passé, quand l’information surla covariance était ignorée, on observait systématiquement que tout se passait comme si les donnéesnucléaires n’étaient pas assez précises pour certaines applications. Lorsque cette information estcorrectement prise en compte, la précision devient assez acceptable du fait de termes négatifs dans ladouble somme venant d’erreurs anticorrélées (se compensant). Ainsi, ceux qui extraient desparamètres de section efficace à partir de données expérimentales ne devraient pas seulementdéterminer les paramètres et leurs incertitudes, mais au moins également les éléments les plusimportants de la matrice de covariance.

Nous terminons cette partie en notant que les éléments Cµν de la matrice de covariance sont reliés

aux écarts types µµ xvarx =∆ et aux coefficients de corrélation ρµν de la manière suivante,

C x x x xµν µ ν µ µν νδ δ ρ≡ = ∆ ∆ , (97)

avec ρµµ = 1. L’inégalité de Schwarz limite l’intervalle de définition des coefficients de corrélations,

( )− ≤ ≡ ≤ +1 1ρµν

µ ν

µ ν

cov

var var

x x

x x

,. (98)

Les incertitudes peuvent donc être établies de plusieurs manières équivalentes :

1. Comme variances et covariances.

2. Comme variances relatives et covariances relatives.

3. Comme erreurs types et coefficients de corrélation.

4. Comme erreurs types relatives et coefficients de corrélation.

De loin, la méthode la plus économique et la plus sûre mnémotechniquement est la dernière(au moins si les données ne sont pas négligeables devant les incertitudes). D’abord, les erreurs typesrelatives (pourcentages) sont plus facilement saisissables, mémorables et comparables aux absolues,spécialement si les vecteurs données contiennent des quantités distinctes d’un point de vue physique(par exemple des paramètres de résonance et des sections efficaces, ou des sections efficacesmultigroupe et des facteurs d’auto-protection). Ensuite, les erreur types relatives et les coefficients de

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corrélation ont une signification intuitive claire contrairement aux variances et covariances. Si on m’adit que les variances de x et y sont 0.04 et 0.000009 et que leur covariance est -0.000012, je suisdésemparé. C’est seulement avec l’information supplémentaire disant que les valeurs recommandéessont x = 10 et y = 0.1 que je peux déduire que les écarts types relatifs sont de 2% pour x et 3% pour yet que le coefficient de corrélation est de -0.02. Si on m’avait parlé directement des trois dernièresgrandeurs, j’aurai immédiatement compris que les deux quantités sont connues avec une bonneprécision et que leur anticorrélation est négligeable pour la plupart des applications.

Il est difficile de comprendre pourquoi le format actuel ENDF-6 (Rose et Dunford 1990) n’admetque des variances et covariances. Une extension du format aux erreurs types et coefficients decorrélation permettraient aux évaluateurs et utilisateurs de travailler avec des fichiers d’incertitudesqui seraient plus faciles à construire, à lire et à réactualiser, donc considérablement moins sujets auxerreurs que ceux existant, sans occuper plus de place.

2.5 Qualité de l’ajustement

La qualité et la consistance d’un ajustement par moindres carrés est indiquée par la valeur aposteriori de

( ) ( )χ 2 ≡ ζ − ζ −z C zT -1 . (99)

Plus les résidus ζ j jz− sont petits, meilleur est l’ajustement et plus χ2 est faible. Des

désaccords, tels qu’un mauvais modèle théorique (une résonance manquante, par exemple) ou deserreurs sous-estimées, tendent à rendre χ2 trop grand, alors que des erreurs surestimées le rendent tropfaible. Afin de voir ce qui est entendu par trop grand ou trop faible, considérons la distribution deprobabilité de la variable χ2 (dans l’espace des échantillons, pour des paramètres connus). Dans le casd’un modèle linéaire y(x), il est facile de voir que la distribution de χ2 est une distribution gamma : ladistribution du maximum d’entropie du vecteur de données ζ , connaissant le vecteur réel z, est

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )p d d dζ ζ ζ − ζ − ζ ζz, C z C zT -1∝ −

exp exp -

21

2 2

χ. (100)

Nous simplifions par une transformation orthogonale sur le système d’axes principaux danslequel χ2 est une somme de N = M + J carrés,

χζ

σχ2

1

2

2=−

=∑ ∑

’ ’

’j j

jj

N

jj

z. (101)

Les primes se réfèrent au système d’axes principaux et les σ’j2 sont les éléments de la matrice

diagonale C’ = OTCO, avec OTO = 1. Les écarts relatifs χj peuvent être considérés comme lescoordonnées Cartésiennes dans l’espace des ζ j. L’élément de volume correspondant est invariant partransformation orthogonale (rotation) O,

( ) ( ) ( )d d d d dNζ ζ χ Ω= ∝ ∝ −’ χ χ1 . (102)

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Dans le dernier terme, nous introduisons les coordonnées polaires avec la coordonnée radiale χ,comme le suggère l’équation (101). Avec cet élément de volume, il est trivial d’intégrer l’équation(100) sur les coordonnées angulaires Ω. La distribution radiale en découlant peut être écrite commeune distribution du χ2 à N degrés de liberté,

( )222

-exp 2

212221-

22 χ

χ

χ

Γ=χχ

−dN

dp

N

Cz, ,

( ) ( )0 2< ≡ < ∞χ ζ − ζ −z C zT -1 . (103)

Malheureusement, nous ne connaissons pas le vecteur réel des observables z = z(x). Tout ce quenous connaissons, c’est l’estimation ( ) z z x≡ , où x satisfait la condition d’application des moindrescarrés (76) ou les équations normales (79) que nous écrivons maintenant sous une forme plus abrégéecomme

( ) S C zT -1 ζ − = 0 . (104)

Du fait de ce système de M équations, tous les ζ j ne sont pas mutuellement indépendant maisseulement J d’entre eux. Un développement de Taylor autour de l’estimation x mène à (comparer leséquations 78 et 80)

( ) ( )χ χ2 2= + x - x S C S x - xT T -1 , (105)

’ ’

’χ

ζσ

χ2

1

2

2=−

=∑ ∑j j

jj

N

jj

z. (106)

Pour une théorie linéaire, on a ( )z’= z’+O S x - xT et par conséquent

( )χ χσ µ µ µ

µj j

j

jkT

kk

O S x x= +’

,

1 −∑ . (107)

On peut maintenant remplacer les variables d’intégration χj par χ j pour j = 1,2,...J et par xµ pour

j=J+1, J+2,...N. Le Jacobien pour cette distribution est constant du fait de la relation linéaire (107)entre les anciennes et les nouvelles variables, si bien que

( ) ( )d d d d d xJ Mζ χ Ω∝ ∝ − χ χ1 . (108)

En intégrant (100) sur toutes les coordonnées angulaires et tous les xµ, on obtient finalement la

distribution de la somme de l’écart quadratique χ 2 qui peut être calculé à partir de quantités connues,

Page 51: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

51

( )2

ˆ

2

ˆ

2

ˆ-exp

2ˆˆˆ

212221-

22 χ

χ

χ

Γ=χχ

−dJ

dp

J

C,z ,

( ) ( )0 2< ≡ < ∞ χ ζ − ζ −z C zT -1 . (109)

Cette distribution du χ2 à J degrés de liberté est plus large que la distribution du χ2 (103) à J+Mdegrés de liberté. Sa moyenne et sa variance sont

χ 2 = J , (110) var χ 2 2= J . (111)

Ce résultat est exact pour des modèles théoriques linéaires z(x) ; pour des modèles non linéairesil est valide dans l’approximation du point selle (Laplace). Il s’applique certainement à chaque foisque l’ajustement par moindres carrés (voir partie 2.2) est possible. Les deux dernières équationsmontrent qu’un bon ajustement est caractérisé par une valeur du χ2 proche du nombre J de points

expérimentaux, approximativement entre JJ 2− et JJ 2+ . Le fait qu’un ajustement « donneun χ2 de 1 031 pour 1 024 points expérimentaux » indiquerait ainsi un bon accord entre les donnéesinitiales et le modèle théorique. Une valeur du χ2 supérieure pourrait mettre en évidence desincertitudes sous-estimées, et il est bien souvent d’usage pratique de multiplier, dans ce cas, toutes lesincertitudes (c’est-à-dire les éléments de la matrice C) par un facteur d’échelle commun afin de forcerl’égalité χ2 = J (et de modifier en conséquence les paramètres de la matrice de covariancea posteriori). Ceci est toutefois dangereux, du fait qu’une valeur élevée du χ2 peut également être dueà un modèle théorique inadéquat (des spins attribués aux niveaux de manière incorrecte ou des petitesrésonances omises, par exemple). Une valeur du χ2 anormalement faible, d’un autre côté, pourraitindiquer des estimations d’incertitude trop prudents, mais cela pourrait également être dû à desfalsifications de données telles qu’éliminations de données (« données écartées ») qui semblaient encontradiction avec la théorie en faveur. Le réajustement des incertitudes ne devrait ainsi êtreconsidéré qu’après avoir acquis la certitude qu’il n’y a rien d’apparemment faux au niveau dumodèle ou des entrées.

Dans les ajustements par moindres carrés « primitifs », où l’information a priori est négligée , la

même argumentation conduit au résultat amplement utilisé que ( ) ( ) χ 2 = η − η −y B yT -1 suit une

loi de distribution du χ2 à J-M degrés de liberté de sorte que la valeur du χ 2 est attendue grosso modo

entre ( ) ( )J M J M− − −2 et ( ) ( )J M J M− + −2 . L’établissement de la qualité del’ajustement doit alors inclure à la fois le nombre de points expérimentaux mesurés et de paramètres.Une « valeur du χ2 de 1 031 pour 1 024 points expérimentaux et 20 paramètres ajustés (1 004 degrésde liberté) » indiquerait un accord raisonnable.

2.6 Données incompatibles

Un des problèmes les plus épineux de l’évaluation des données est celui des donnéesincompatibles. Supposons que nous soient donnés les résultats de n mesures complètementindépendantes et expérimentalement différentes de la même quantité physique µ, sous la forme xj ± σj,

j = 1,2,...,n. Si la distance entre tout couple de valeurs, x xj k− , est plus faible ou au moins pas

Page 52: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

52

beaucoup plus grande que la somme des incertitudes correspondantes, σj + σk , les données sont ditescompatibles ou en accord « dans les barres d’erreurs ». (La probabilité que deux mesures de mêmeprécision conduisent à une distance supérieure à σj + σk = 2σ est seulement égale à erfc 1 ≈ 0.157pour deux distributions d’échantillonnage Gaussiennes de même écart type σ). Si certaines desdistances sont bien plus importante, les données ne sont pas compatibles avec les incertitudes établies.Les incompatibilités ont pour origine des effets expérimentaux non identifiés ou mal corrigés tels quebruits de fond, temps mort de l’électronique de comptage, résolution expérimentale, impuretés dansles échantillons, erreurs de calibration, etc. Comme nous l’avons mentionné précédemment, unarrangement rapide et populaire consiste à multiplier toutes les erreurs initiales par un facteurcommun afin que le χ2 ait la valeur attendue (et que toutes les barres d’erreur se recoupent). Ceci nechange toutefois pas les poids relatifs, d’où l’aspect tout aussi pénalisant d’attribuer des incertitudestrop optimistes ou trop prudentes. Le traitement Bayésien qui va suivre rend une justice pluséquitable. Il considère non seulement les incertitudes revendiquées mais également à quel point unevaleur donnée est distante de la moyenne.

Que pouvons nous dire des erreurs non identifiées ? Si nous ne connaissons que les données etnon la manière dont elles ont été mesurées, des erreurs positives et négatives sont équiprobables et,par conséquent, la distribution de probabilité pour l’erreur non identifiée εj de la j-ème expériencedevrait être symétrique par rapport à 0, et la même distribution devrait s’appliquer à toutes lesexpériences. Supposons donc, en accord avec le principe du maximum d’entropie, que lesdistributions pour tous les εj soient Gaussiennes,

( )p d dj j j

j

j

j

jε τ επτ

ετ

ε= −

1

2

1

22

2

exp , − ∞ < < ∞ε j . (112)

La probabilité de mesurer la valeur xj, connaissant la valeur réelle µ, l’erreur non identifiée εj etl’incertitude σj due à toutes les sources d’erreurs non identifiées, est alors donnée par

( )p x dxx

dxj j j j

j

j j

jjµ σ ε

πσ

µ εσ

, , = −− −

1

2

1

22

2

exp , − ∞ < < ∞x j . (113)

Si les dispersions τj des erreurs non identifiées sont connues, alors la distribution conjointea posteriori pour µ et les εj est

( ) ( ) ( )p d d d d

x

j

n

j

j j

j

j

j

µ µ µ εµ ε

σετ

, , ,ε σ τ εx ∝ −− −

=

∏1

2

2

2

22 2 exp . (114)

(ε, σ, τ, dans le membre de gauche, doivent être interprétés comme des vecteurs dans l’espacedes échantillons, dont les coordonnées sont εj, σj, τj). En effectuant les carrés dans l’exponentielle, onpeut facilement intégrer sur les εj. La distribution de µ a posteriori en découlant est une Gaussienne,

Page 53: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

53

( )( )

( )( )

p x s dn

x

ndµ µ

π σ τ

µ

σ τµ,

/ /=

+−

+

1

2 22 2

2

2 2 exp , − ∞ < < ∞µ . (115)

avec

µ = x , (116) ( )var µ σ τ= +1 2 2

n. (117)

où les barres supérieures signifient que les moyennes sont effectuées sur les j (sur les mesures) avec

des poids ( )1 2 2/ σ τj j+ . En intégrant (114) par rapport à µ, on obtient la distribution conjointe des

erreurs non identifiées,

( ) ( ) ( ) ( ) ( )p d dε σ τ ε ε − ε − ε ε εx x A x BT 1 T 1, , ∝ − −

− − exp1

2

1

2, (118)

où A-1 et B-1 sont des matrices définies positives, symétriques dont les éléments sont

( )A 1− −− −

−≡ − ∑jk j jk

j k

ll

σ δσ σ

σ2

2 2

2, (119) ( )B 1− −≡

jk j jkτ δ2 . (120)

Ce produit de deux Gaussiennes à plusieurs variables est également une Gaussienne à plusieurs

variables, avec le vecteur de moyenne ε = −CA x1 et la matrice de covariance inverseC-1 = A-1 + B-1, si bien que

( )A B A x1 1 1− − −+ =ε . (121)

En résolvant la dernière équation pour ε j , on obtient

( )ετ

σ τj

j

j jjx x=

+−

2

2 2 . (122)

La meilleure estimation de εj est alors l’écart x xj − de la j-ème donnée de la moyenne

(pondérée) x , multiplié par « un facteur réducteur » ( )222 / jjj τ+στ qui est proche de zéro si les

erreurs non identifiées attendues sont beaucoup plus petites que les incertitudes connues σj, et prochede l’unité si elles sont beaucoup plus grandes. Ceci, toutefois, est trivial : si nous connaissons les

variances τ j2 des erreurs non identifiées, c’est qu’elles ne sont pas réellement inconnues. Nous en

savons autant sur elles que sur les autres erreurs. Nous pouvons donc ajouter les variances comme

d’habitude pour obtenir les variances totales σ τj j2 2+ . On s’attend à ce que leurs inverses

apparaissent en tant que poids dans chaque moyenne j et c’est en fait ce que nous venons de trouver.

Le cas non trivial le plus simple est celui où les τj ne peuvent pas être considérés comme leserreurs quadratiques moyennes non identifiées mais plutôt comme leurs estimations, basés parexemple sur la qualité générale des diverses mesures, sur la précision des techniques employées, peutêtre même sur la crédibilité des expérimentateurs d’après leurs travaux précédents. (Notons qu’il estparfaitement correct de mettre τj = 0 pour les expériences qui peuvent être considérés exemptes de

Page 54: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

54

toute erreur non identifiée). La variance réelle inconnue peut alors être prise égale à τ j c2 / , où c est

un paramètre d’échelle commun ajustable avec un a priori p(c)dc, et la probabilité conjointe pour µ etle vecteur ε être prise égale à

( ) ( ) ( ) ( )p d d d dcp c c d

x c

j

n

j

j j

j

j

j

µ µ µ εµ ε

σετ

, , , /ε σ τ εx ∝ −− −

=∫ ∏0

1 2

1

2

2

2

22 2 exp . (123)

En intégrant sur tous les εj, on obtient la distribution a posteriori de µ,

( ) ( ) ( ) ( )( )

p d d dcp c cx

cj j

j

nj

j j

µ µ µ σ τµ

σ τx, , /

/

/σ τ ∝ + −

+

∞ −

=∫ ∏0

2 2 1 2

1

2

2 2

1

2 exp . (124)

Si nous n’avons pas du tout d’information numérique sur le paramètre d’échelle c, l’a priori deJeffreys dc/c semble approprié. L’intégration sur c est donc facile si les incertitudes connues sontnégligeables. Avec σj = 0 pour tous les j, l’intégrand devient essentiellement une distribution gammade c, et l’intégration mène à une distribution t de Student,

( ) ( )( )p x s d

du

B un nµ µ, ’,

/=+−1

2

1

2

2 21

, − ∞ < ≡−

< ∞ux

s

µ’

, (125)

avec

µ = x , (126) var µ =−

s

n

’2

3, (127)

où s x x’2 2 2≡ − , les barres supérieures indiquant des moyennes sur l’échantillon pondérées par τ j−2 .

Ainsi, l’incertitude sur µ dans ce cas extrême est égale à la variance s’2 de l’échantillon, déterminéepar la dispersion des données xj (parfois appelée « l’erreur externe »). Ceci, bien entendu, n’est autreque ce que nous avons trouvé lorsque nous discutions des estimations de µ à partir d’un échantillondécrit par une Gaussienne dont l’écart type est inconnu (équation 34). Pour des valeurs élevées de n,la distribution de µ est pratiquement Gaussienne.

Dans le cas général, σj > 0, τj > 0, l’intégrale (124) avec l’a priori de Jeffreys le moins informatif( )p c dc dc/c∝ diverge logarithmiquement car l’intégrand devient proportionnel à 1/c pour c→0. Le

formalisme Bayesien signale de cette manière que l’information a priori est insuffisante pour lesprédictions désirées. Y a t’il autre chose que nous sachions outre le fait que c est un paramètred’échelle ? Si les τj sont en fait les meilleures estimations que nous ayons pour les incertitudesengendrées par les erreurs non identifiées, alors nous nous attendons à ce que c soit proche de l’unité.L’a priori d’entropie maximale, avec la contrainte c = 1est

( )p c dc e dcc= − , 0 < < ∞c . (128)

Page 55: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

55

Il n’engage à pratiquement rien de plus que l’a priori de Jeffreys, décroissant également demanière monotone quand c augmente, mais est normalisable et donne moins de poids aux extrema.Avec cet a priori, l’intégrale sur c et la constante de normalisation de la distribution a posteriori de µ(124) sont toutes deux finies et peuvent être calculées numériquement sans difficultés. La figure 8montre un exemple concret, la distribution a posteriori de la section efficace de fission du 239Pu pourdes neutrons de 14.7 MeV ainsi que les distributions Gaussiennes représentant les six résultatsexpérimentaux donnés dans le tableau 1. Des incertitudes a priori valant τj = 0.1 barn furent attribuéssans discrimination à toutes les expériences, en se basant sur l’état de l’art. La moyenne a posterioriet l’incertitude quadratique moyenne, calculées numériquement, sont également données dans letableau 1.

Figure 8. Densités de probabilité représentant les résultats expérimentaux retranscritsdans le Tableau I (Gaussiennes en pointillé), et densité a posteriori de la valeur réelle (courbecontinue) estimée avec le modèle Bayésien à deux étages, équation (124), avec l’hyper a priori

donné par l’équation (128). Des incompatibilités sont évidentes entre les expériences2,3 et 4 (l’étiquette des courbes est donné dans la première colonne du tableau)

Page 56: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

56

Tableau 1. Résultats expérimentaux et après estimation de 239Pu(n,f)pour des neutrons de 14.7 MeV d’énergie incidente.

N° Auteurs Année Section efficace defission mesurée

(barn)

erreur nonidentifiée estimée

(barn)123456

KariCancé et al.

Adamov et al.Li et al.

Mahdawi et al.Arlt et al.

197819781979198219821983

2.37 ± 0.092.29 ± 0.052.51 ± 0.052.53 ± 0.052.44 ± 0.092.39 ± 0.03

-0.019 ± 0.056-0.086 ± 0.0500.056 ± 0.0480.069 ± 0.0490.006 ± 0.056-0.027 ± 0.041

meilleure estimation estimation a priori pour toutes les erreurs systématiques

2.42 ± 0.05τj = 0.1 b

2.7 Estimation d’erreurs systématiques inconnues

Que pouvons-nous apprendre sur les erreurs systématiques non identifiées εj à partir d’unensemble de données incompatibles, xj ± σj, j = 1,2,...,n ? Avec l’a priori (128), il est facile d’intégrerla distribution de probabilité a posteriori (124) d’abord sur la distribution gamma de c, puis sur ladistribution Gaussienne de µ. Le résultat peut s’écrire sous la forme

( ) ( ) ( ) ( ) ( )p d dn

ε σ τ ε ε − ε − ε ε εx x A x BT 1 T 1, ,/

∝ −

+

− −− −

exp1

21

1

2

2 1

, (129)

avec les matrices A et B définies comme précédemment dans les équations (115) et (116). Afind’obtenir le vecteur de moyenne et la matrice de covariance de cette distribution sous formeanalytique, nous utilisons l’intégration au point selle, en remplaçant la distribution exacte par uneGaussienne à plusieurs variables ayant le même maximum et la même courbure au maximum,

( ) ( )[ ] ( ) ( ) ( ) ( )p -F -F Fε σ τ ε ε ε − ε ε − εε =ε

x T, ,

$

≡ ≈ − ∇∇

exp exp T1

2, (130)

où l’opérateur nabla a pour coordonnées ∇ ≡i j∂ ∂ε/ . Nous avons ainsi

ε ε≈ , (131) ( )[ ]δ δε εε = ε

T ≈ ∇∇−

T F$

1

. (132)

Le vecteur le plus probable ε peut être déterminée en résolvant l’équation

( )∇ = ++

=−−

−Fn

A xB

1 + B1

1

T 1ε −ε

ε ε2

2 20

/(133)

et la matrice de covariance approximative comme l’inverse de

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57

( )( )

∇∇ = ++ −−

− − − −

T Fn

AB 1 + B B B

1 + B1

1 T 1 1 T 1

T 1

2

2

2

22

ε ε εε

ε ε

/

/, (134)

évaluée pour ε ε= . A partir des définitions (119) et (120) pour A et B, nous obtenons

ε ε

τ σ ετ εj j

j j j

k kk

x xn

/= − + − +

+

−∑2

2 1 2

2 2

2 2, (135)

où x et ε sont les moyennes pondérées par σ j−2 . Ceci est approprié pour itérer. En insérant

ε j jx x≈ − , pour tous les j, comme première estimation dans le membre de droite, on obtient la

seconde approximation

( ) ( )ετ σ

τj

j j

k kk

j

n

x xx x≈ −

+

+ −

−−

−∑1

2

2 1

2 2

2 2 , (136)

et, en répétant l’opération, des approximations de plus en plus bonnes. Notre traitement des erreurssystématiques non identifiées est un exemple de méthode Bayesienne « hiérarchique » (ici à deuxétages). Elle implique une application répétée du théorème de Bayes : la distributiond’échantillonnage (113) dépend des paramètres εj avec l’a priori (112) qui, à son tour, dépend de

« l’hyper paramètre » c avec « l’hyper a priori » (128) si nous remplaçons τ j2 par τ j c2 / .

Les estimations finales et leurs incertitudes (racines carrées des éléments diagonaux de la matrice

δε ε T ) dans le cas de notre problème pour 239Pu, obtenus de cette manière, sont retranscrits dans la

dernière colonnes du tableau 1. Aucune erreur non identifiée significative n’a été trouvée pour lesmesures 1, 5 et 6 alors que 2, 4 et peut être 3 semblent être affectées par des erreurs non identifiéesqui sont du même ordre de grandeur que les incertitudes établies par les auteurs. Bien sûr, cetteconclusion aurait pu déjà être tirée des données expérimentales (et spécialement de la représentationgraphique par des Gaussiennes de la figure 8), mais notre formalisme donne également un supportquantitatif pour notre sens commun dans des cas moins évidents. En outre, il éclaire quelque peu unerécente méthode d’estimation dont on fait le plus grand cas :

Notre seconde approximation (136) ressemble aux estimateurs de James-Stein (Stein 1956) qui,depuis leur introduction, ont provoqué une grande quantité d’excitation, de confusion et un flot depublications. C. Stein montra, en utilisant la définition fréquenciste du risque (l’erreur quadratiquemoyennée sur tous les échantillons possibles, pour un ensemble donné de paramètres), que desestimateurs similaire à (136) ont parfois un risque moindre que celui des estimations issues del’estimation Bayesienne par perte quadratique (qui minimise l’erreur quadratique moyennée sur tousles paramètres possibles pour l’échantillon dont on dispose). Beaucoup d’améliorations ont étésuggérées pour les estimateurs originaux de Stein, basées sur la théorie des distributions fréquencisteset d’un empirisme plus ou moins instruit. Par exemple, l’estimateur de « loi positive »

( )εσ

j j

n

sx x∗ ≈ −

+

−12

2

2

2’, (137)

fut proposé pour le cas particulier d’incertitudes égales (σj = σ pour tous les j). L’indice + signifie queseules les valeurs positives du « facteur réducteur » sont acceptées. Pour les valeurs négatives, il faut

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58

mettre ε j∗ = 0 . De plus, l’estimateur de « loi positive » ne doit être utilisé que pour n ≥ 3. Des

discussions endiablées eurent lieu au sujet du « paradoxe » que l’estimateur pour εj ne dépend passeulement de xj mais de tous les autres xk, k ≠ j, échantillonnés indépendamment. La question fut posési l’inclusion d’autre données sans lien apparent n’améliorerait pas l’estimation. (« Si je veux estimerla consommation du thé à Taiwan, ferai-je mieux d’estimer simultanément la vitesse de la lumière etla masse des porcs dans le Montana ? » (Efron et Morris 1973).Ce qu’on appelle les formulesBayesiennes d’empirisme paramétrique ne semblent pas manquer de perspicacité, par exemple par leremplacement de τ2 dans l’équation 121 (dans le cas τj = τ pour tous les j) par la variance s’2 del’échantillon. Aussi plausibles que de telles formules puissent paraître (voir par exemple Berger1985), sans une justification rigoureuse elles restent des considérations ad hoc.

Avec les même conditions (σj = σ, τj = τ), notre équation 136 devient

( ) ( )εστj j

n

nsx x≈ −

++

−1

2

2

2

2 2’, (138)

valide pour toute valeur n ≥ 2, sans discontinuités ou problème d’interprétation. Un paradoxe n’existeque pour les fréquencistes qui se refusent à utiliser les a priori. Pour un Bayésien, il n’y a pas deparadoxe. Il ou elle code l’information que les données sont toutes du même type, mesurées dans desexpériences liées entre elles et donc comparables, dans un a priori de second étage qui induit descorrélations et des facteurs « diminuant » de manière naturelle. Des données sur la vitesse de lalumière n’ont aucun lien avec les nôtres et sont donc exclues. Du point de vue Bayesien, d’un autrecôté, il semble curieux de ne pas baser le critère de risque sur un échantillon donné et uneconnaissance a priori, mais sur un échantillon donné et tous les autres échantillons non observésqu’on puisse imaginer, sans l’utilisation de la connaissance a priori. Les estimateurs « dans les longsrun » (moyennés sur plusieurs échantillons), dont les Fréquencistes affirment la supériorité, ne sontpas très adéquat pour l’évaluation des données, où l’on doit inférer les meilleures valeurs (par pertequadratique ou de tout autre type) à partir d’un échantillon disponible. Il se peut qu’un estimateuravec un faible risque soit plus proche de la valeur réelle pour une large proportion de tous leséchantillons possibles qu’un estimateur qui assure une perte quadratique minimale, mais la partierestante des échantillons possibles tend à être si grande que l’avantage apparent devient un netdésavantage (voir Jaynes 1976). Dans tous les cas, la méthode Bayesienne à deux étages mène, dansl’approximation du second point selle, à des estimateurs qui sont similaires, et pour des petitséchantillons particulièrement meilleurs, aux estimateurs de James-Stein. De plus, les itérations traitenttoutes les améliorations possibles et également les incertitudes de manière systématique et sansambiguïté, sans les discontinuités curieuses (Efron et Morris 1973) de bien des estimateurs améliorésde James-Stein. La méthode Bayesienne ne laisse aucune place à l’empirisme une fois qu’unefonction de perte, un modèle statistique et des a priori sont spécifiés.

De manière certaine, l’interprétation correcte de données incompatibles n’est jamais facile, et levieil adage selon lequel « l’évaluation des données est plus un art qu’une science » reste vrai dans unecertaine mesure, malgré les nombreux progrès réalisés dans la formalisation et la quantification durantles trois dernières décennies.

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59

3. THÉORIE DES RÉSONANCES POUR LE DOMAINE RÉSOLU

Si des noyaux d’un élément donné, par exemple 235U, sont bombardés par des neutrons, onobserve des réactions nucléaires telles que diffusion élastique, capture radiative ou fission. Lesprobabilités de ces processus (n,n), (n,γ) ou (n,f), exprimées par coutume sous forme de sectionsefficaces dont l’unité est le barn (1 b = 10-24 cm2), dépendent fortement de l’énergie des neutronsincidents. La section efficace de diffusion, par exemple, est le plus souvent proche de la sectionefficace géométrique du noyau (quelques barns) mais à certaines énergies, elle augmente brusquementde plusieurs ordres de grandeur. Un comportement résonnant similaire, aux mêmes énergies, est suivipar les sections efficaces de capture radiative et de fission. La figure 9 (en haut et au milieu) montrece comportement pour le noyau 238U pour lequel seules les réactions neutroniques de diffusionélastique et de capture radiative sont autorisées d’un point de vue énergétique aux basses énergies(en négligeant la fission en dessous du seuil). Pour 235U, on aurait également vu des résonances dansla fission. Chacune de ces résonances est due à l’excitation d’un état de durée de vie relativementlongue (quasi-stationnaire) du noyau composé qui est formé temporairement lorsqu’un neutroninteragit avec un noyau cible. Notons la forme des différents pics : les résonances de la sectionefficace de capture sont symétriques alors que celles de la section efficace de diffusion sontasymétriques avec un minimum prononcé et une section « potentielle » de diffusion d’une certaineimportance entre les résonances.

L’impact des résonances sur le spectre neutronique dans un réacteur de puissance est visible surla figure 9 (en bas). Les creux marquants dans le flux de neutrons coïncident avec les pics desrésonances dans les sections efficaces. L’explication est simple : les neutrons ne peuvent survivrelongtemps à des énergies où 238U, le constituant principal du combustible, possède des sectionsefficaces élevées, car ils sont bien vite capturés (ils disparaissent complètement) ou diffusés(transférés à d’autres énergies, habituellement plus faibles). Il en résulte que le flux est appauvri auniveau des résonances de 238U. Des creux plus faibles dans le flux sont dus à d’autres composantsmoins abondants du combustibles tels que le noyau fissible 235U.

Aux basses énergies, les résonances apparaissent bien séparées mais lorsque l’énergie augmente,leurs espacements diminuent alors que leurs largeurs augmentent. Éventuellement, elles sesuperposent tellement les unes aux autres que la structure résonnante du noyau composé se moyenneet que seules survivent des structures beaucoup plus larges, telles que les larges résonances (ou departicules indépendantes) décrites par le modèle optique ou les résonances géantes dipolairesobservées dans les réactions photonucléaires. En général, seules les résonances à relativement basseénergie peuvent être observées directement. Aux énergies intermédiaires, elles ne sont pascomplètement résolues du fait de la résolution expérimentale, alors que la disparition de la structurerésonnante du noyau composé due à des superpositions très importantes de niveaux n’apparaît qu’àdes énergies encore supérieures. Aussi distingue-t-on le domaine des résonances résolues du domainedes résonances non-résolues (ou seulement en partie résolues).

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60

Plus il y a de nucléons dans le système composé et plus la structure résonnante est fine. Lesespacements typiques entre les niveaux observés dans les réactions neutroniques sont de l’ordre

du MeV pour les noyaux légersdu keV pour les noyaux intermédiairesde l’eV pour les noyaux lourds

Les espacements entre les niveaux des noyaux cibles avec un nombre pair de nucléons sontsouvent plus grands que ceux des noyaux avec un nombre impair de nucléons. Les noyaux magiquesou proche de la magicité ont des espacements de niveaux inhabituellement grands. Le noyau lourddoublement magique 208Pb, par exemple, a des espacements moyens ressemblant à ceux de noyauxlégers.

L’agitation thermique des noyaux cibles engendre l’élargissement Doppler des résonancesobservées dans le système du laboratoire : lorsque la température de la cible augmente, les résonancess’élargissent tout en conservant une aire pratiquement constante. Cela modifie les taux moyen dediffusion, de capture et de fission et l’équilibre neutronique global dans un réacteur à fission. Par voiede conséquence, les caractéristiques de sécurité des divers modèles de réacteur à fission dépendent demanière cruciale des résonances dans les sections efficaces des principaux constituants ducombustible et en particulier de leur élargissement Doppler. L’effet Doppler est le seul phénomènenaturel donnant une rapide contre-réaction à une excursion soudaine de puissance dans un réacteur àfission. L’expansion thermique agit de même mais est beaucoup plus lente. De manière générale, ondemande que l’augmentation de température accompagnant une excursion de puissance se traduise parune diminution du nombre de neutrons produits par neutron absorbé, de sorte qu’on ne perde pas lecontrôle de la réaction en chaîne de fission. En termes plus techniques, le coefficient instantané deréactivité pour l’effet Doppler doit être négatif.

Dans les applications liées à la protection, les minima présentés par les sections efficaces dediffusion et donc également par les sections efficaces totales (sommes de toutes les sections efficacespartielles de diffusion, capture, fission, etc.) donnent lieu, pour les neutrons, à des « fenêtres » enénergies dangereuses. Dans les modèles de réacteurs à fusion, tels qu’ITER (InternationalThermonuclear Experimental Reactor), encore dans les planches à dessins, un blindage en fer estprévu pour les bobines supraconductrices de l’aimant. Les fenêtres dans la section efficace descomposantes principales du fer limitent de manière significative l’efficacité du blindage. (voirfigure 10 pour 56Fe).

Ces exemples devraient suffire à illustrer l’importance des résonances des sections efficaces enphysique et techniques nucléaires. Les résonances résolues sont décrites de la manière la plus pratiquepar la théorie de la matrice-R. Elle atteignit sa forme standard avec l’article de revue très détaillé deLane et Thomas (1958). Cet article se doit d’être lu par tout spécialiste du domaine. De façon trèsbrève, les principes de la théorie de la matrice-R sont les suivants. Toutes les collisions sontconsidérées binaires, une fonction d’onde entrante décrivant les deux particules incidentes, unefonction d’onde sortante décrivant les deux produits de la réaction. Les particules incidentes peuventêtre, par exemple, un neutron et un noyau 235U, les produits de réaction pourraient être deux fragmentsde fission ou un noyau 236U excité et un photon ou encore un noyau 235U dans son état fondamental etun neutron diffusé élastiquement. Puisque les forces nucléaires sont de courtes portées mais ne sontpas très bien comprises, on divise l’espace des configurations en (i) une région externe où les forcesnucléaires sont négligeables, si bien que les fonctions d’onde bien connues pour des particules libres,ou interagissant tout au plus électromagnétiquement, peuvent être utilisées ; et (ii) une région interne,

Page 61: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

61

où les forces nucléaires prédominent. Même si la fonction d’onde interne est inconnue, elle peut aumoins être écrite comme un développement des fonctions propres d’un problème aux valeurs propres.Le problème aux valeurs propres est caractérisé par l’équation (non relativiste) de Schrödinger quidéfinit les dérivées logarithmiques des fonctions propres à la limite entre les deux régions. Enassurant la continuité des fonctions d’onde externes et internes à la limite, et en demandant desprobabilités finies dans tout l’espace, on trouve que pour une fonction d’onde entrante donnée, toutesles fonctions d’onde sortantes, et donc toutes les sections efficaces, sont paramétrisées par lesfonctions propres et valeurs propres intervenant dans le problème. Celles-ci peuvent être identifiéesavec les énergies et les amplitudes de décroissance des états quasi-stationnaires du système composé.Tout ceci va être discuté en détail ci-dessous.

Alors que les principes de la théorie des résonances sont assez simples, les expressions généralespeuvent apparaître impressionnantes aux débutants. Nous ne pouvons pas en donner tous lesdéveloppements (ceux-ci peuvent être trouvés dans l’article de revue de Lane et thomas 1958) et lathéorie fondamentale des collisions en mécanique quantique sera supposée connue, mais nous allonsessayer de présenter le formalisme de manière suffisamment détaillée pour les applications ensciences et technologie. Les variantes importantes d’un point de vue pratique sont

• Le formalisme de Blatt-Biendenharn.

• L’approximation de Breit et Wigner simple niveau (SLBW).

• L’approximation de Breit et Wigner multi-niveaux (MLBW).

• L’approximation (multi-niveaux) d’Adler-Adler.

• L’approximation (multi-niveaux) de Reich-Moore.

La première est assez générale. Elle montre comment les sections efficaces peuvent êtreexprimées en fonction de la matrice de collision symétrique unitaire (matrice-S) avec un accentparticulier sur les distributions angulaires et le spin des particules. Elle peut être combinée avecn’importe quelle des quatre autres qui imposent différentes approximations à la matrice de collision.

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62

Figure 9. En haut : section efficace de capture de 238U en dessous de 200 eV, élargiepar effet Doppler à 300 K. Au milieu : section efficace de diffusion de 238U, également

élargie à 300 K. En bas : Spectre neutronique dans un réacteur à eau pressurisé depointe (C. Broeders, FZK, communication privée). L’axe des ordonnées est en

échelle logarithmique. Les énergies sont données dans le référentiel du laboratoire

Page 63: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

63

Figure 10. Section efficace totale expérimentale de 56Fe+n entre 305 et 600 keV (en barns) etajustement théorique des résonances (ligne continue, à peine visible) avec le formalisme de

Reich-Moore à une voie. Les larges pics asymétriques sont des résonances d’onde s, les étroitspics symétriques sont des résonances d’onde p ou d. Les données ont été obtenues dans une

mesure de transmission par temps de vol avec une base de vol de 201.6 m, auprès d’ORELA,l’accélérateur linéaire d’électron d’Oak Ridge (d’après Perey et al. 1990)

Page 64: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

64

3.1 Le formalisme de Blatt-Biedenharn

Notre notation dans cette sous-partie et les suivantes sera fondamentalement la même que cellede Lane et Thomas (1958). Nous rappelons que, dans la théorie des réactions nucléaires, on parle devoies de réactions. Chaque voie est complètement déterminée par

• α, la division du système composé en partenaires de la réaction, par exemple 235U + n ou 236U+ γ (dans les deux cas, c’est le même noyau composé).

• J, le moment angulaire total en unité .

• , le moment angulaire orbital en unité .

• s, le spin de la voie en unité .

Les moments angulaires satisfont les relations triangulaires de mécanique quantique

sJ

+= c’est à dire sJs +≤≤− , (139)

iIs += c’est à dire iIsiI +≤≤− , (140)

où I

et i

sont les spins (en unité ) des deux partenaires de la collision. L’énergie totale, le momentangulaire total et (dans tous les cas pratiques) la parité sont conservés dans les réactions nucléaires.

Nous rappelons à nouveau que, pour des particules neutres et de spin nul, il est possible derésoudre l’équation non relativiste de Schrödinger pour la condition aux limites « onde entrantestationnaire plane + onde sortante stationnaire sphérique » avec comme résultat

( )( ) ( )πΩϑ−+π=σ ∑

=ααα 4

cos1122

0

2 dPUd l

l

l (141)

pour la section efficace différentielle de diffusion élastique. La longueur d’onde de de Broglie( )relvαα µ=π /2 correspond au mouvement relatif des partenaires de la collision, avec la masse

réduite µα et la vitesse relative vrel. Les fonctions propres l

P du moment angulaire sont des

polynômes de Legendre d’ordre . Les termes dans la somme avec ...2,1,0= sont dits apparteniraux ondes s, p, d, f, …, une nomenclature historique venant de la spectroscopie atomique (où elle seréfère à ce qu’on appelle séries spectrales « sharp », « principal », « diffuse », « fundamental »). Lafonction de collision

lU décrit la modification de la -ème onde partielle sortante par rapport au cas

où il n’y a pas d’interaction. Sa valeur absolue donne l’atténuation en amplitude, son argument le

déphasage amené par la réaction. Avec ( ) LPLPP 2’ 0,00’

ll= où ( )0,00’ L est un coefficient de

Clebsch-Gordan s’annulant à moins que ’’ +≤≤− L et ( ) ( )L−=− + ’ll

, on peut écrire la

section efficace différentielle sous forme de développement linéaire en polynômes de Legendre,

( ) Ωϑ=σ ∑∞

=αα dPBd

LLL

0

2 cos (142)

Page 65: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

65

avec les coefficients

( )( )( ) ( )( )’*2

’,

110,00’1’2124

1ll

ll

UULBL −−++= ∑ . (143)

Blatt et Biedenharn (1952) menèrent à bien la généralisation pour des particules de spin non nulet pour des collisions amenant un changement (un réarrangement) de la composition du système. Dansle cas où il n’y a pas d’interaction coulombienne, ils obtinrent

( )( ) ( ) ( )∑∑ Ωϑαα++

=σ∞

=αα

’, 0

2

’ cos’,1212 ss L

LL dPssBIi

d

, (144)

avec les coefficients

( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( ),

’,’’,4

’,

2

2222

1

1111

21 21 21

’’’,’’’

*

’’’,’’’

, , ’,’22112211

Jssss

Jssss

JJ

ss

L

UU

LsJJZsLJJZssB

llllllll

ll ll

αααααααα

−δδδ−δδδ×

−=αα ∑ ∑ ∑(145)

( ) ( )( )( )( )( ) ( ),,0,00

12121212,

221121

21212211

sLJJWL

JJsLJJZ

×++++=

(146)

où ( )sLJJW ,2211 est un coefficient de Racah, voir par exemple Fano et Racah (1959) ou deShalit et Talmi (1963). Notre convention de phase est celle de Lane et Thomas (1958) ; uneconvention légèrement différente est adoptée dans les tables de Z de Biedenharn (1953). Lescoefficients Z sont nuls à moins que les relations triangulaires de mécanique quantique pour la sommedes vecteurs

2121 ’’

+==+ L (147)

’’ sJs iii

+==+ (i = 1,2) (148)

ne soient vérifiées. La conservation de la parité exige que ( ) ( ) ’’

αα Π−=Π=Π− ll

i où ’, αα ΠΠsont les parités propres des particules entrantes et sortantes (positives pour les neutrons, protons,particules α et photons) et iΠ est la parité du système composé avec le moment orbital total

Ji (i = 1,2). S’il y a une interaction coulombienne entre les partenaires de la collision, des termesadditionnels doivent être introduits, voir Lane et thomas (1958).

Intégrons l’équation (144) sur les angles. Tous les termes avec L<0 disparaissent du fait del’orthogonalité des PL et car

( ) ( )2121

1 120, 12211 ll δδ+−= +

JJsJ JsJJZ , (149)

(voir de-Shalit et Talmi 1963) et on obtient

Page 66: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

66

2

’, ’,’’’,’,’,’,

2’ ∑ ∑∑ ααααααα −δδδπ=σ

J ss

JssssJ Ugd

ll

llll , (150)

où ce qu’on appelle les facteurs statistiques de spin

( )( )1212

12

+++≡

Ii

Jg J , (151)

sont les poids pour les différents moments angulaires totaux possibles.

Nous ne pouvons pas aller dans le détail des distributions angulaires, mais nous mentionnonsqu’elles présentent des interférences entre les différentes ondes partielles, par exemple ondes s et p,alors qu’il n’y en a pas entre les sections efficaces intégrées sur les angles. Ces dernières sont desimples sommes sur les termes ayant des et s donnés, sans termes croisés, voir équation (150).Néanmoins, il existe une certaine connexion entre les différentes ondes partielles. Comme nousl’avons déjà mentionné, le noyau composé et ses états quasi-stationnaires sont caractérisés, outre parl’énergie, par le moment angulaire total, J, et la parité, Π. Le Tableau 2 montre, pour une cible de spinet de parité positive donnés, les combinaisons possibles de , s et J pour des particules incidentes despin i = ½. Certaines combinaisons JΠ peuvent être formées au travers de plus d’une voie si >0 etI >0. Si IΠ0 = ½+, par exemple, des résonances avec JΠ = 1- peuvent être excitées par deux ondes pavec s = 0 et s = 1 et les niveaux 2+ peuvent être excités par des ondes d avec s = 0 et s = 1. Leslargeurs neutroniques (qui donnent la force de l’excitation, voir plus loin) pour les niveaux 1- et2+ sont donc les sommes de deux largeurs partielles pour deux voies de spin. Pour IΠ0 = 1+, lesniveaux ½+ peuvent même être excités par des ondes partielles de différent, une onde s avec s = ½et une onde d avec s = 3/2, tandis que les niveaux 3/2+ sont excitables par trois ondes partielles, uneonde s avec s = 3/2 et deux ondes d avec s = ½ et s = 3/2, et ainsi de suite.

Tableau 2. Combinaisons possibles du spin I de la cible, du moment angulaire orbital et du spinde la voie s donnant le spin total J, la parité Π et le facteur statistique de spin g, pourune cible de parité Π0 positive et un projectile de spin i = ½

IΠ0 s JΠ g Σg onde0+ 0

12

1/21/21/2

1/2-1/2-, 3/2- 3/2+, 5/2+ etc.

11, 2 2, 3

135

spd

1/2+ 0

1

2

010101

0+ 1+ 1-0-, 1-, 2-, 2+ 1+, 2+, 3+ etc.

1/4 3/4 3/41/4, 3/4, 5/4 5/4 3/4, 5/4, 7/4

1

3

5

s

p

d

1+ 0

1

2

1/23/21/23/21/23/2

1/2+ 3/2+1/2-, 3/2-1/2-, 3/2-, 5/2- 3/2+, 5/2+1/2+, 3/2+, 5/2+, 7/2+ etc.

1/3 2/31/3, 2/31/3, 2/3, 3/3 2/3, 3/31/3, 2/3, 3/3, 4/3

1

3

5

s

p

d

Page 67: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

67

Ainsi, nous trouvons que chaque état quasi-stationnaire du noyau composé se révèle en tant querésonance dans toutes les voies ouvertes qui ne sont pas exclues par les règles de sélection de spin etde parité. Les intensités (les aires des pics) peuvent différer, mais la largeur de la résonance doit êtrela même dans toutes ces voies, étant proportionnelle à l’inverse du temps de demi-vie de l’état dunoyau composé. Dans ce contexte, il peut être alors compris que les termes couramment employés derésonance d’onde s ou p signifient que le niveau peut au moins être excité par des ondes s ou p, maisaussi, éventuellement, par des ondes partielles de même parité d’ordre plus élevé. Pour donner unexemple : les résonances d’onde s 3/2+ observées dans des réactions nucléaires avec des noyauxcibles ayant IΠ0 = 1+ contiennent également une composante d’onde d. Il est vrai qu’aux bassesénergies incidentes, la composante d’onde s est beaucoup plus grande du fait de la plus grandebarrière centrifuge pour les neutrons d’onde d (voir plus loin) mais il faut prendre conscience quecertaines séquences de résonances d, f, … sont masquées par des séquences s, p, …. C’est un pointimportant, par exemple pour l’interprétation statistique des densités de niveaux observées ou pour lasimulation des effets de résonance dans le domaine des résonances non résolues avec des « mailles »de résonances obtenues en échantillonnant par Monte Carlo (voir la partie 4, ci-dessous).

3.2 Les expressions exactes de la matrice-R

La section efficace intégrée sur les angles σαα’, équation (150), peut être écrite en tant quesomme des sections efficaces partielles, σcc’, obtenue par sommation sur toutes les voies d’entrée

sJc α≡ et de sortie ’’’’ sJc α≡ qui mènent de la répartition α à la répartition α’. Dans unenotation légèrement simplifiée, ces dernières s’écrivent

2

’’2

’ cccccccc Ug −δπ=σ . (152)

Notons que, pour c ≠ c’, la section efficace partielle est proportionnelle à la probabilité, au sens

de la mécanique quantique, 2

’ccU d’une transition de la voie c à la voie c’, et à la probabilité gc

d’avoir le moment angulaire correct à partir des spins des partenaires de la collision. Le symbole deKronecker δcc’ intervient puisque les particules entrantes et sortantes ne peuvent être distinguées si

c = c’. Le facteur cinématique 2cπ permet de relier probabilités et sections efficaces. La matrice de

collision U, souvent appelée matrice de diffusion ou matrice-S, est symétrique car, pour tous les caspratiques, nous pouvons considérer les interactions nucléaires (et coulombiennes) comme invariantepar rapport à l’inversion du temps. De plus, U est unitaire puisque le cumul des probabilités des

transitions dans les différentes voies est égal à un, ∑ =’

2

’ 1c ccU . De l’unitarité de U et de l’équation

(152), il s’ensuit que la section efficace totale pour la voie d’entrée c est une fonction linéaire de Ucc,

( )ccccc

ccc Ug Re 12

’’ −π=σ≡σ ∑ , (153)

contrairement aux sections efficaces partielles qui dépendent de manière quadratique de Ucc’. Lesexpressions obtenues sont donc les plus simples pour la section efficace totale, et les pluscompliquées pour la section efficace de diffusion élastique (à cause du symbole de Kronecker). Il estpar conséquent plus commode de calculer σcc comme une différence entre σc et des autres sections

Page 68: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

68

efficaces partielles plutôt que directement à partir de l’équation (152). La relation de réciprocité entreles sections efficaces pour une réaction c → c’ et la réaction inverse c’ → c,

2’

2’’

cc

cc

cc

cc

gg

σ=

σ, (154)

découle directement de la symétrie de U.

Ces équations sont assez générales. Afin d’introduire les résonances, nous faisons appel à lathéorie de la matrice-R qui nous permet d’exprimer U en fonction de la matrice des voies R(voir Lane et Thomas 1958, Lynn 1968),

( ) ( )[ ] ( )[ ] ( ) ( )[ ] ,2 2/1

’’

12/1’

2/1’’

12/1’

cccccci

cccci

cc

PiPe

PPeU

cc

cc

RRL-1

B-LR-1B-LR-10

*

−ϕ+ϕ−

−ϕ+ϕ−

+δ=

=(155)

∑λ λ

λλ

−γγ

=EE

R cccc

’’ , (156)

( ) ( ) ’’’’0

’ ccccccccccccccc BiPSBLBLL δ−+≡δ−=−≡ . (157)

Une autre possibilité est d’exprimer la matrice de collision en fonction de la matrice des niveauxA,

( )

ΓΓ+δ= ∑

µλµλµλ

ϕ−ϕ−

,

2/1’

2/1’’

’cccc

icc AieU cc , (158)

ccc P22/1λλ γ≡Γ , (159)

( ) ( ) ∑ µλλµλλµ− γγ−δ−=

cccc LEE 01A . (160)

Remarque : Les indices en Roman renvoient aux voies de réaction, les indices Grec au niveauxdu noyau composé et 1 est la matrice unité. Trois groupes de quantités physiques apparaissent dansces équations :

D’abord, il y a les paramètres de résonance, c’est à dire les énergies formelles des niveaux Eλ etles amplitudes de probabilité γλc pour la décroissance (ou formation) des états du noyau composé viales voies de sortie (ou d’entrée) c, toutes parfaitement incluses dans la matrice-R (156), chaque niveaucontribuant à un terme de la somme (une hyperbole en fonction de l’énergie E). Les γλc (ndT :appelées aussi amplitudes de voies) peuvent être positives ou négatives, de manière pratiquementaléatoires sauf à proximité de l’état fondamental. Les formules des sections efficaces sont d’ordinaireécrite en fonction des largeurs partielles Γλc et des largeurs totales Γλ ≡ ΣcΓλc plutôt que desamplitudes de décroissance.

Page 69: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

69

Le deuxième groupe, les déphasages de sphère dure ϕc et les dérivées logarithmique Lc, dépenduniquement des fonctions d’onde radiales entrantes et sortantes (connues) Ic et Oc au rayon de la voieac,

( ) ( )( )cc

ccccc aO

aOaO

Re

Im tan arc arg =≡ϕ , (161)

( )( )

cc arc

cc

cc

cccc r

Or

aO

aOaL

=

∂=≡

ln ’ . (162)

Les Sc ≡ Re Lc sont appelés facteurs de décalage pour des raisons qui deviendront claires par lasuite, les Pc ≡ Im Lc sont les pénétrabilités de la barrière centrifuge. Les quantités Bc et ac forment letroisième groupe. Elles définissent le problème aux valeurs propres avec les valeurs propres Eλ. Leurchoix est principalement une affaire de commodité. Les Bc sont les dérivées logarithmiques desfonctions propres radiales pour les rayons des voies ac. Ces rayons définissent la limite entre la régioninterne et externe. Ils doivent être choisis suffisamment grands pour que l’interaction nucléaire puisseêtre parfaitement négligée si la distance rc entre les partenaires de la réaction est supérieure à ac,autrement ils sont arbitraires. Il est préférable de choisir ac juste légèrement supérieur au rayon dunoyau composé (voir Lynn 1968). Un choix raisonnable pour les voies neutroniques est ac = (1.23A1/3

+0.80) fm, où A est le nombre de nucléons dans le noyau cible. Nous mentionnons ici que, dans lesapplications, toutes les énergies et largeurs des résonances sont données dans le référentiel dulaboratoire, comme par exemple dans la compilation de paramètres de résonance largement utilisée deMughabghab et al. (1981, 1984) connu sous le nom de « barn book » (NdT : ou BNL-325), ou danscelle de Sukhoruchkin et al. (1998), ou encore dans les fichiers informatiques d’évaluation de donnéesnucléaires.

Pour des projectiles neutres, les fonctions d’onde radiales sortantes sont proportionnelles aux

fonctions sphériques de Hankel de première espèce, ( )1l

h ,

( ) ( ) ( )( ) 1 si 1* +>>≈== l

l ccrik

cccccc rkeirkhrikIO cc , (163)

où cck /1= . Les propriétés des fonctions de Hankel donnent les relations récursives

00 iPaikL cc == , ( )

l

l −−−=

−1

2

L

akL cc , (164)

cc ak=ϕ 0 , ( )11 arg −− −+ϕ=ϕlll

L , (165)

avec lesquelles le tableau 3 est construit. Notons que Sc = 0 pour 0= , et que −→cS pour

0→cc ak (aux basses énergies). Par conséquent, −=cB est un bon choix pour le domaine des

résonances résolues : assez généralement, cela simplifie toutes les expression de la matrice-R et, enparticulier, élimine de manière rigoureuse les facteurs de décalage pour les ondes s ainsi que, commenous le verrons plus loin, de manière approximative pour les ondes partielles d’ordre supérieur. Celasignifie que les pics de section efficace apparaissent aux énergies formelles de résonance Eλ commeelles le devraient, au lieu d’être décalés. Sc et Pc pour les voies photon et fission sont habituellementconsidérés constants.

Page 70: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

70

Tableau 3. Fonctions d’onde de voie et quantités associées pour des projectiles neutres( cccc akrk ≡α≡ρ , )

cO cϕ cS cP

1 ρie α 0 α2

−ρ

ρ iei 1 α−α tan arc

1

12 +α−

12

3

+αα

3

ρ−

ρρ 1

332

iei

23

3 tan arc

α−α−α ( )

93

6324

2

+α+α+α−

93 24

5

+α+αα

… … … … …

Les paramètres de résonance fondamentaux, Eλ, γλc, dépendent d’interactions nucléairesinconnues. Ils ne peuvent de ce fait être calculés à partir des principes de base (excepté pour desmodèles simples comme un puits de potentiel carré, voir plus loin.) Dans les applications courantes dela théorie de la matrice-R, ce sont uniquement des paramètres ajustables sur les donnéesexpérimentales. En fonction du choix de Bc, ils peuvent être réels et constants tout comme complexeset dépendants de l’énergie.

Dans la version de Wigner-Eisenbud de la théorie de la matrice-R, les paramètres Bc choisissont des constantes réelles (Wigner et Eisenbud 1947). Les paramètres de résonance Eλet γλc sontdonc également réels et constants, et la dépendance en énergie de la matrice U est seulement due auxϕc et Lc, toutes des fonctions connues de kcac, c’est à dire de l’énergie. Ceci fait de la version deWigner-Eisenbud le formalisme le plus pratique pour la plupart des applications, et particulièrementen choisissant −=cB . Il est facile de vérifier que la matrice-R réelle donne une matrice de collision

unitaire, ce qui signifie que la somme des sections efficaces partielles, équation (152), est strictementégale à la section efficace totale correcte, équation (153). Un problème réside cependant dans lanécessité d’inverser la matrice des voies 1-RL0 de l’équation (155), ou la matrice inverse des niveauxA-1 de l’équation (160). Ces deux matrices ont un rang très élevé. De manière pratique, la difficultéest contournée par diverses approximations sur la matrice inverse des niveaux, comme nous le verronsplus loin.

La version de Kapur-Peierls de la théorie de la matrice-R est obtenue en effectuant le choix

Bc = Lc, c’est à dire 00 =cL (Kapur et Peierls 1938). Ceci enlève complètement la nécessité d’inverser

les matrices, mais mène à des paramètres de résonance complexes qui dépendent implicitement del’énergie d’une manière plutôt obscure du fait que la vraie solution du problème aux valeurs propresvarie maintenant avec l’énergie, et donc également les valeurs propres et l’ensemble des fonctionspropres. De plus, la matrice de collision n’est pas manifestement unitaire car la matrice-R estcomplexe. Malgré ces handicaps, les formules du type Kapur-Peierls sont utiles dans des petitsintervalles d’énergie, en particulier pour la description de l’effet Doppler. Nous allons écrire les

paramètres complexes et dépendants de l’énergie de Kapur-Peierls sous la forme λε , gλc afin de les

distinguer des paramètres réels et constants de Wigner-Eisenbud Eλ, γλc. Ainsi

( )

+δ= ∑λ λ

λλϕ+ϕ−

E

GGieU cc

cci

cccc

ε2/1’

2/1

’’’ , (166)

Page 71: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

71

ccc PgG 22/1λλ = . (167)

Notons que la forme de Kapur-Peierls de la matrice de collision (et donc des expressionscorrespondantes de la section efficace totale) n’implique qu’une simple somme sur les niveaux alorsque l’expression (158) de Wigner-Eisenbud implique une double somme.

Les équations de la matrice-R passées en revue jusqu’ici représentent pratiquement tout ce quiest nécessaire pour les applications utilisant la théorie des résonances. Elles doivent cependant êtrepleinement comprise et l’expérience montre que ce n’est pas chose aisée pour un débutant. Il pourraitpar conséquent souhaiter voir une illustration simple qui montre les étapes essentielles dans ledéveloppement de la théorie et présente la signification des différentes quantités sans lescomplications de l’algèbre de spin et des notations matricielles. Une telle illustration est donnée par lemodèle optique sphérique, particulièrement avec un puit de potentiel carré complexe, pour lequel toutpeut être calculé explicitement (voir Fröhner 1996), les résultats étant de première utilité pour ledomaine des résonances non résolues.

3.3 Les approximations importantes d’un point de vue pratique

Un point de départ commode pour les versions pratiques de la théorie de la matrice-R est lamatrice inverse des niveaux. Nous allons considérer les représentations et approximations suivantes.

Représentation de Wigner-Eisenbud (exacte)

Avec Bc réel et constant :

( ) ( ) ∑ µλλµλλµ− γγ−δ−=

cccc LEE 01A (168)

(valeurs propres Eλ et amplitudes de décroissance γλc réelles et constantes, dépendance en énergie de0cL connue)

Représentation de Kapur-Peierls (exacte)

Avec Bc = Lc :

( ) ( ) λµλλµ− δ−= Eε1A (169)

(valeurs propres ελ et amplitudes de décroissance gλc complexes, dépendances en énergie implicites,obscures)

Page 72: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

72

Approximation de Breit et Wigner simple niveau (SLBW)

Un seul niveau retenu, tous les autres sont négligés :

( ) 2020

01 /iEELEE

ccc Γ−−∆+≡γ−−→ ∑λµ

−A (170)

(décalage de niveau ∆ et largeur totale Γ = ΣcΓc réels, dépendances en énergie explicites, bienconnues)

Approximation de Breit et Wigner multiniveaux (MLBW)

Les éléments non diagonaux de A-1 sont négligés :

( ) ( ) λµλλλλµλλλµ− δΓ−−∆+≡δ

γ−−= ∑ 2201 /iEELEE

cccA (171)

(décalage de niveau ∆λ et largeur totale Γλ = ΣcΓλc réels, dépendances en énergie explicite, bienconnues)

Approximation de Reich-Moore

Les contributions non diagonales des voies photons, γ∈c , sont négligées :

( ) ( ) ∑γ∉

µλλµλγλγλλµ− γγ−δΓ−−∆+=

cccc L/iEE 01 2A (172)

(décalage de niveau ∆λ réel des voies photon usuellement intégrées dans la valeur réelle et constante

de Eλ, largeur radiative ∑ γ∈ λγλ Γ=Γc c réelle considérée habituellement constante ; autres

dépendances en énergie explicites).

Approximation de Adler-Adler

La dépendance en énergie de 0cL est négligée :

( ) ( ) ( ) ( )∑ µµλλλµλλµ− γγ−δ−=

ccccc ELELEE 001A (173)

Parmi ces approximations, celle de Reich-Moore est la plus précise et SLBW la moins. Avec unchoix judicieux des conditions limites des paramètres, les facteurs de décalage ∆λ s’annulent au moinslocalement. Aux basses énergies, ceci est réalisé pour des voies neutron avec −=cB (voir

tableau 3) comme spécifié plus haut. Le tableau 3 montre également que les pénétrabilités de labarrière centrifuge

lPPc = pour les neutrons, et donc pour toutes les largeurs neutroniques,

Page 73: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

73

( ) ( ) ( ) ( )( )λ

λλλλ Γ=γ≡ΓEP

EPEEPE ccc

l

l

l

22 ( )nsJc ∈α≡ , (174)

contiennent au moins un facteur E . Les facteurs additionnels dans les pénétrabilités p, d, … secomportent aux basses énergies en E, E2,… Il en découle que les niveaux d’onde s dominent à basseénergie alors que les niveaux d’onde p apparaissent seulement à plus haute énergie, les niveauxd’onde d à encore plus haute énergie, etc.

Les valeurs absolues dans la définition conventionnelle des largeurs neutroniques (170) rendentcelle-ci applicable non seulement avec les états du noyau composé dont Eλ>0, mais aussi avec lesétats sous le seuil (états liés, « négatifs ») dont Eλ<0 alors que, à strictement parler, les pénétrabilités

( )EPl

de la barrière centrifuge et donc les largeurs s’annulent sous le seuil de la réaction (E<0). Les

largeurs neutroniques données dans les tables et les fichiers informatiques doivent être comprises

comme étant ( )λλΓ Ec . Une autre convention concerne le signe des amplitudes de largeur. Il est

important dans les cas à plusieurs voies mais cette information est perdue lorsque les largeurs sontcalculées. C’est pourquoi il est coutumier de tabuler les largeurs partielles avec le signe (relatif àl’amplitude de largeur neutronique) de l’amplitude de la largeur correspondante. D’un point de vuegénéral, il serait plus approprié (et moins confus) de tabuler les amplitudes de largeur plutôt que leslargeurs partielles – non seulement elles ne dépendent pas de l’énergie, mais encore elles nes’annulent pas en dessous du seuil, et enfin le signe ne doit pas être expliqué – mais il est trop tardpour changer des habitudes fortement ancrées.

Les décalages et pénétrabilités pour les voies photon et fission peuvent d’ordinaire êtreconsidérés constants. Par conséquent, ces décalages disparaissent si nous choisissons Bc = Sc, et leslargeurs de fission et radiatives ne dépendent pas de l’énergie. Regardons maintenant les expressionsdes sections efficaces provenant des différentes représentations et approximations.

3.3.1 Expressions de Kapur-Peierls pour les sections efficaces

Pour anticiper l’étude de l’élargissement Doppler, nous écrivons la matrice de collision deKapur-Peierls (166) sous la forme

( ) ( )

χ+ψ−δ= ∑

λλλ

λ

λλϕ+ϕ− iG

GGeU cc

cci

cccc

2/

2/1’

2/1

’’’ , (175)

où les profils de résonance symétriques et asymétriques ou fonctions de forme λψ et λχ sont définis

par

( )( )

( ) 4/~

2/~

4/~

4/2/2222

2

λλ

λλ

λλ

λ

λ

λλλ

+−

−+

+−=

−≡χ+ψ

GEE

GEEi

GEE

G

E

iGi ε , (176)

les énergies réelles de Kapur-Peierls λE~

des résonances et les largeurs Gλ par

2/~

λλλ −≡ iGEε . (177)

Page 74: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

74

Le profil de résonance symétrique est essentiellement (si on néglige les faibles dépendances enénergie de λε et de λG ) une Lorentzienne, et le profil asymétrique est sa dérivée en énergie. Les

expressions des sections efficaces en résultant sont

( )

χ+ψ+ϕπ=σ ∑

λλλ

λ

λϕ− iG

Geg ci

ccccc222 Resin4 , (178)

( ) ( )

χ+ψπ−δσ=σ ∑

λλλ

λλ

λλ iWG

GGg cc

ccccccccc

*

2/1’

2/12

’’ Re4 ε , (179)

( ) ∑µ ∗

λµ

µµ∗

λ−

+δ≡εε

ε2/1’

2/1

’’cc

cccc

GGiW . (180)

Les profils de résonance contiennent les variations rapides avec l’énergie, liées aux résonances,qui sont sensibles à l’élargissement Doppler, alors que les autres quantités varient lentement avecl’énergie. Nous insistons sur le fait que le formalisme de Kapur-Peierls est formellement exact bienque les faibles dépendances des paramètres de Kapur-Peierls avec l’énergie ne soient pas connuesexplicitement.

3.3.2 Expressions des sections efficaces dans le cadre de SLWB

La matrice de collision pour un seul niveau,

( )

Γ−−∆+

ΓΓ+δ= ϕ+ϕ−

2/0

2/1’

2/1

’’’

iEE

ieU cc

cci

cccc , (181)

est unitaire. Les expressions des sections efficaces en découlant sont

( )

ϕχ+ϕψ

ΓΓ

+ϕπ=σ ccc

cccc g 2sin 2 cos sin4 22 , (182)

ψπσ2

24ΓΓΓ

= ’cccc’cc g , ( )’cc ≠ , (183)

∑≠

σ−σ=σcc

ccccc’

’ , (184)

avec les profils de résonance donnés par

( )( )

( ) 4

2/

4

4

2/

2/22

0

0

220

2

0 /EE

EEi

/EE

/

iEE

ii

Γ+−Γ−

+Γ+−

Γ=Γ+−

Γ≡χ+ψ . (185)

La forme primordiale de la résonance, dans les différentes sections efficaces partielles telles quec’ ≠ c, est principalement symétrique, alors que celle des sections efficaces totales et de diffusion est

Page 75: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

75

la somme de trois termes : la section efficace pratiquement constante de diffusion potentielle, unterme résonnant symétrique et un terme asymétrique venant de l’interférence entre la diffusionpotentielle (sphère dure) et résonnante. Il est facile de déduire des équations (182) et (185) que lavaleur du pic de la section efficace totale,

( )

ϕ

ΓΓ

−π=σ + ca

ccc gE 22 cos14 , (186)

est atteinte à l’énergie

cEE ϕΓ+=+ tan20 , (187)

tandis que la valeur minimale dans le creux d’interférence est

( ) cpa

ca

ccc gE ,22 sin4 σ

ΓΓ

=ϕΓΓ

π=σ − , (188)

pour l’énergie

cEE ϕΓ−=− cot20 , (189)

où na Γ−Γ≡Γ est la largeur d’absorption et σp,c la section efficace de diffusion potentielle pour la voie

d’entrée c. Ces dernières expressions sont valables si les lentes dépendances en énergie de 2c , ϕc, Γ et

Γn sont négligeables. Pour une diffusion élastique pure (Γa = 0), la valeur minimale de la section efficace

est zéro, la valeur au pic est égale à la limite unitaire cc g24 π (par rapport à l’équation 153). Le facteur

de spin, c’est-à-dire le spin J des niveaux, peut donc souvent être obtenu en mesurant juste la hauteur dela résonance. Cela marche le mieux pour les noyaux légers ou des matériaux de structure tels que 56Fe etd’autres isotopes du fer, du nickel, et du chrome qui sont presque des diffuseurs purs, et pour de largesrésonances « isolées » qui sont virtuellement insensibles à l’élargissement Doppler, aux interférencesmultiniveaux et observables avec une bonne résolution expérimentale. La profondeur du minimum dû àl’interférence, qui est le point le plus important pour les calculs de protection, est essentiellement donnépar le rapport Γa/Γ multiplié par la section efficace de diffusion potentielle. Aux basses énergies, lesréactions d’onde s dominent, la section efficace de diffusion potentielle est pratiquement constante alorsque les sections efficaces de capture et de fission ont un comportement en 1/v. Ce comportement à basseénergie est vrai de manière assez générale et pas uniquement dans l’approximation SLBW.

Du fait de la lente variation des sinus et cosinus en fonction de l’énergie, les résonances de lasection efficace totale ne se ressemblent pas quelle que soit l’énergie : à basse énergie, elles ont laforme représentée sur la figure 11, avec le minimum (« fenêtre ») dû au terme d’interférence du côtédes basses énergies des résonances. Cette forme est caractéristique du domaine résolu. À plus hauteénergie, le terme symétrique devient de moins en moins important jusqu’à ce que le termeasymétrique domine. À des énergies encore supérieures, lorsque ϕc ≈ π, les résonances apparaissentcomme des creux plutôt que comme des pics (un exemple bien connu est celui de la résonance de16O+n à 2.35 MeV) et éventuellement les fenêtres dues à l’interférence réapparaissent du côté deshautes énergies des résonances.

Page 76: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

76

Figure 11

En pratique, on doit cependant décrire les sections efficaces par de nombreuses résonances. Onpeut simplement additionner les termes résonnants SLBW (et additionner la diffusion potentielle pourσc et σcc). C’est la définition SLBW du format ENDF (cf. Rose et Dunford 1990) qui est utilisée auniveau mondial pour les librairies, à but applicatif et consultable informatiquement, de donnéesneutroniques évaluées. Puisque ce principe ad hoc n’est pas issu d’une matrice de collision unitaire, la

contrainte unitaire ccc g240 π<σ< n’est pas garantie. En fait, cette approximation SLBW « à

plusieurs niveaux » est réputée pour l’apparition de sections efficaces totale et de diffusion négatives,n’ayant aucun sens physique. La raison est simple à comprendre : à basse énergie, les contributionsnégatives ne peuvent venir que des profils asymétriques des résonances d’énergie supérieure. Enmoyenne, elles sont compensées par les contributions des résonances d’énergie inférieure, mais si lesrésonances d’énergie supérieure sont inhabituellement grandes ou celles d’énergie inférieureinhabituellement faibles, les sections efficaces de diffusion peuvent devenir négatives dans lesminima provenant de l’interférence. L’effet opposé est moins notable mais tout aussi mauvais : lespics de section efficace dans l’approximation SLBW peuvent dépasser la limite unitaire si lesrésonances au dessus sont faibles ou celles en dessous sont fortes.

3.3.3 Expressions des sections efficaces dans le cadre de MLWB

L’approximation MLWB est meilleure que l’approximation SLBW à plusieurs niveaux. Lamatrice de collision issue de l’équation (171),

Page 77: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

77

( )

Γ−−∆+

ΓΓ+δ= ∑

λ λλλ

λλϕ+ϕ−

2/

2/1’

2/1

’’’

iEEieU cc

cci

cccc , (190)

implique une simple somme sur les résonances à l’instar de la matrice de collision de Kapur-Peierls. Ilen découle que nous pouvons prendre les expressions de Kapur-Peierls en effectuant les

remplacements ∑ λλλλλλλλ Γ→Γ=Γ→∆+→c cccGEE 2/11/2G , ,’ , d’où

( )

ϕχ+ϕψΓΓ

+ϕπ=σ λλλ

λ∑ ccc

cccc g 2sin2cossin4 c22 , (191)

( ) ( )

χ+ψ

ΓΓΓ

π−δσ=σ ∑λ

λλ∗

λλ

λλ iWg cccc

ccccccc

*

2/1’

2/12

’’ Re4 ε , (192)

( ) ( )∑µ

λµλµ

µµ∗

λΓ+Γ−−

ΓΓ+δ=

2/

2/1’

2/1

’’

iEEiW cc

cccc ε . (193)

Puisque les sections efficaces partielles (192) sont issues de la matrice de collision sous forme decarrés absolus (voir équation 152), elles sont garanties d’être positives, et ce sont à nouveau desfonctions linéaires des profils de ligne λψ et λχ définis exactement comme dans le cas du SLBW,

d’après l’équation (185). Nous reconnaissons ensuite que σc, équation (191), n’est autre quel’approximation SLBW « à plusieurs niveaux ». Comme la matrice de collision du MLWB n’est pasunitaire, σc n’est toutefois pas la somme des sections efficaces partielles, d’après l’équation (192).L’approximation MLWB, telle que définie dans le format ENDF (cf. Rose et Dunford 1990) est mêmeplus grossière, c’est en fait un hybride SLBW/MLBW : seule la diffusion élastique est réellementcalculée dans l’approximation MLBW. Toutes les autres sections efficaces partielles sont calculéesdans l’approximation SLBW (à plusieurs niveaux), et la section efficace totale comme somme detoutes les partielles. Cela évite que les sections efficaces deviennent négatives mais n’exclutnullement des pics de sections efficaces sans signification physique ni des minima, dus auxinterférences, mal décrits pour des niveaux se recouvrant fortement. Pour des noyaux légers etintermédiaires et pour les actinides fissiles, l’approximation MLBW est de ce fait souvent inadéquate,alors qu’elle marche assez bien pour des noyaux composés avec des niveaux largement espacés et trèsétroits tels que 232Th+n ou 238U+n.

Notons que le calcul des sections efficaces dans le cadre de MLBW, d’après les équations (192)et (193), implique des doubles sommes sur les niveaux. Même avec les ordinateurs modernes, celapeut prendre du temps si des centaines de niveaux doivent être considérés, ce qui n’est pas si rare avecles fichiers d’évaluation modernes. Il est donc préférable de calculer les sections efficaces partiellesdirectement à partir de la matrice de collision (c’est-à-dire des équations (152) et (190)) quin’implique qu’une seule sommation sur les niveaux. Toutefois, pour l’élargissement Doppler, lareprésentation (192), (193) en fonction des profils de forme a des avantages ainsi que nous le verronsplus loin.

Page 78: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

78

3.3.4 Expressions de Reich-Moore des sections efficaces

Très souvent, un grand nombre de voies photon contribue à la somme cc cc L µλ γγ∑ 0 intervenant

dans la matrice inverse des niveaux A-1, cf. équation (160). Tandis que leurs contributionss’additionnent toutes avec le même signe dans les éléments diagonaux, elles tendent à s’annuler dansles éléments non diagonaux car si les amplitudes de décroissance ont un signe pratiquement aléatoire,elles ont des amplitudes comparables. C’est pourquoi l’erreur est assez faible si l’on néglige purementet simplement les contributions de toutes les voies photon dans les éléments non diagonaux, commecela fut indépendamment proposé par Thomas (1955) et par Reich et Moore (1958). La matriceinverse des niveaux ainsi obtenue, l’équation (172), correspond évidemment à un problème auxvaleurs propres où Eλ est remplacé par Eλ-iΓλγ/2, avec une matrice R « réduite »

∑λ λγλ

λλ

Γ−−γγ

=2/

’’ iEE

R cccc , ( )γ∉’, cc , (194)

réduite dans le sens où elle est seulement définie dans un sous-espace de voies sans photon. Les seulestraces des voies photons éliminées sont les largeurs radiatives totales, Γλγ, dans les dénominateurs.Une fonction R complexe semblable est rencontrée dans le traitement par la matrice-R du modèleoptique (voir Fröhner 1996) qui suggère de considérer la partie imaginaire des dénominateurs de lamatrice-R réduite et la partie imaginaire du potentiel complexe comme des conséquences différentesdu même phénomène : l’absorption dans les états du noyau composé et la décroissance associée dansles voies exclues.

De la matrice-R réduite, on obtient une matrice de collision réduite et, de là, comme d’habitude,les sections efficaces pour toutes les voies non photoniques retenues grâce aux équations (152) et(153). La matrice-R réduite est de rang faible, et donc l’inversion de 1-RL0 est aisée. En fait, le plushaut rang employé dans l’analyse des résonances neutroniques est jusqu’à présent de 3 (1 voieélastique, 2 de fission). Les cas de rang 2 impliquent 1 voie élastique plus 1 de fission ou1 inélastique. Pour l’écrasante majorité des données de résonance neutronique, les seuls processusautorisés d’un point de vue énergétique sont la diffusion élastique et la capture radiative, pourlesquels des expressions de Reich-Moore à une voie, avec les fonctions-R plutôt que les matrices-R,sont suffisantes. (L’ajustement des données de la section efficace totale de 56Fe, avec l’approximationde Reich-Moore à une voie, représenté sur la Figure 10 en est un exemple.) La section efficace decapture peut être obtenue à partir de

( )[ ] 2

2/1’

2/1’

102/12

2/∑ ∑λ γ∉ λγλ

λ−−

λγγ Γ−−Γ−

Γπ=σc

cccccc iEE

PPg

RL1 , (195)

(cf. Reich et Moore 1958). Nous insistons sur le fait que cette approximation est exacte dans la limitede l’annulation des largeurs radiatives (plus généralement : l’annulation des largeurs pour les voieséliminées) où elle se réduit au formalisme général de Wigner-Eisenbud. Elle est également exactepour un seul niveau puisque, dans ce cas, la matrice des niveaux A de Reich-Moore se ramène à lamatrice des niveaux correspondante dans SLBW. Par ailleurs, s’il est également vrai que la matrice decollision réduite ne peut être unitaire – du fait des transitions entre les voies exclues – la matrice decollision globale peut toujours être considérée unitaire, c’est-à-dire qu’elle conserve le flux desprobabilités, si bien que la section efficace de capture peut également être obtenue par la différence

Page 79: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

79

∑γ∉

γ σ−σ=σ’

’c

cccc , (196)

avec σc calculée à partir des éléments de la matrice de collision réduite Ucc d’après l’équation (153).L’expérience a montré qu’avec cette approximation toutes les sections efficaces expérimentales dansle domaine des résonances pouvaient être décrites en détail, dans les fenêtres aussi bien qu’au niveaudes pics, y compris les exemples d’interférences multiples entre les niveaux les plus étranges (voirfigure 10). Elle marche tout aussi bien pour les noyaux légers, intermédiaires ou lourds, fissiles ounon. On croit souvent que l’approximation de Reich-Moore ne peut s’appliquer qu’aux noyauxfissiles, mais les voies conservées peuvent réellement être de tout type-voie élastique, inélastique, defission, même des voies photon individuelles comme celles pour les transitions vers l’étatfondamental ou des états métastables spécifiques. De plus, les programmes informatiques écrits pourle formalisme de Reich-Moore peuvent être utilisés pour les calculs de la matrice-R deWigner-Eisenbud – on doit simplement mettre toutes les largeurs radiatives (largeurs de voieséliminées) égale à 0.

On pourrait s’attendre à ce qu’avec tous ces avantages le formalisme de Reich-Moore soit le pluslargement utilisé, mais ce n’est pas vrai. La raison principale est que les sections efficaces deReich-Moore ne peuvent pas s’exprimer en tant que somme de profils de résonance de Breit-Wigner,tout au moins pas sans travail de préparation. C’est souvent considéré comme un désavantage pour lescalculs d’élargissement Doppler. Nous verrons plus loin, toutefois, que ce n’est pas un problème aussisérieux que certains le croient. Pour les spécialistes de l’analyse des résonances, la question de lasupériorité de l’approximation de Reich-Moore sur les autres variantes simple ou multi-niveaux de lathéorie de la matrice-R ne se pose pas.

3.3.5 Expressions d’Adler-Adler des sections efficaces

L’approximation (173) pour la matrice A-1 est une généralisation de l’expression pour les ondes sutilisée par Adler-Adler (1970), une généralisation qui préserve la symétrie par rapport aux indices deniveau λ et µ. La diagonalisation de la matrice des niveaux A donne une matrice de collision de laforme de Kapur-Peierls, équations (172) et (173), mais avec des paramètres ελ et gλc qui ne dépendentpas de l’énergie, contrairement aux authentiques paramètres de Kapur-Peierls. Les expressions dessections efficaces correspondantes sont souvent exprimées non pas en fonction de voies particulières(c, c’, …), mais pour des types de réaction spécifique (x = f, γ,…, totale), en se limitant à = 0 :

( ) ( )( )λλλλ∈ λ λ

χ−ψν

+σ=σ≡σ ∑ ∑ TT

ncpc HG

E

11, (197)

( ) ( )( )λλλλ∈ λ λ∈

χ−ψν

=σ≡σ ∑ ∑∑ xx

nc xcccx HG

E

11

’’ , (x = γ, f, …) (198)

où σp est la section efficace de diffusion potentielle, ( ) ( )EG xλλ ν/ et ( ) ( )EH x

λλ ν/ sont les

sommes sur tous les coefficients de ψλ et χλ dans les équations (178) à (180), avec νλ ≡ Γλ/2 et Eprovenant de Pc(E). Les sommes sur λ se font sur les niveaux sans se soucier de la valeur de JΠ, avec

les facteurs de spin inclus dans les coefficients ( )xGλ et ( )xH λ . Ces coefficients, ainsi que les énergies

des niveaux λλ ≡µ ’E , les (demi-) largeurs νλ et les sections efficaces de diffusion potentielle σp

Page 80: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

80

(ou un rayon effectif) sont les paramètres de Adler-Adler. En principe, on pourrait même les définirpour des mélanges isotopiques, en intégrant d’une façon similaire les abondances dans lescoefficients. L’approximation (173) signifie principalement que la dépendance énergétique desdécalages de niveaux et des largeurs totales sont négligées dans les dénominateurs des résonances.C’est pourquoi, l’approximation de Adler-Adler marche bien pour les noyaux fissiles, pour lesquels

fλλγλ Γ+Γ≈Γ mais pas aussi bien pour les noyaux légers ou intermédiaires, pour lesquels

( ) 22 ncn EP λλλ γ=Γ≈Γ .

3.3.6 Conversion des paramètres de Wigner-Eisenbud en paramètres de Kapur-Peierls

Les paramètres de Wigner-Eisenbud peuvent être convertis en paramètres de Kapur-Peierls de lamanière suivante (Fröhner 1980). La matrice de collision doit être invariante par changement des

paramètres aux limites, par exemple de −=cB à 0~cc LB = . (Nous allons utiliser la notation tilde

pour les quantités de Kapur-Peierls). L’équation (155) montre que cela implique que (1-RL0)-1R = R~

,ce qui, avec les abréviations

01/201/2 RLLK ≡ , 01/201/2 LRLK~~ ≡ (199)

donne

( ) K1K-1~1 +=−

. (200)

Les énergies de Kapur-Peierls des résonances λε sont les pôles complexes de K~

, c’est à dire les

solutions de

( )[ ] 0det =λεK-1 (201)

car A-1 = C[A]/det(A) pour toute matrice non singulière A, où nous utilisons la notation det(A) pour ledéterminant et C[A] pour la matrice des cofacteurs. Les résidus sont obtenus à partir de l’équation

(200). En passant à la limite λ→εE , on obtient ( )[ ] ( )λλλ −≈+ εELggLE cccccc /~ 2/01

’’2/01

’K1 du

côté droit, alors qu’à gauche on a ( )[ ] ( )[ ]λλ εε K-1K-1C det/’cc , où le développement de Taylor

du déterminant donne ( )[ ] ( ) ( )[ ] ( ) λλλ−≈ εεε K’K-1CK-1 trdet EE . Les résidus au pôle λεsont donc

( ) ( )( )[ ]

( )[ ] ( ) λλ

λ

λλ

λλ = εεε

εε K’K-1C

K-1C

tr

1 ’

0’

0’

cc

cc

ccLL

gg , (202)

où tr réfère à la trace et K’ est la dérivée de K,

( ) ( ) ( ) ( )∑µ µ

µµ

γγ≈

∂∂=

2

’0’

02/01’’

2/01’’

EEELELLRL

EEK cc

cccccccc . (203)

Nous savons donc calculer les résidus pour des pôles donnés, mais comment trouver les pôlescorrespondant à des paramètres de Wigner-Eisenbud donnés, c’est-à-dire comment pouvons nousrésoudre l’équation (201) dont la simplicité apparente est trompeuse ? Fort heureusement, nousconnaissons déjà l’approximation MLBW 2/λλλλ Γ−∆+≈ iEε , voir l’équation (190). Nous

Page 81: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

81

devons la considérer comme une proposition initiale à améliorer par itération. Pour trouver un schémad’itération, nous écrivons le déterminant (201) sous la forme

( ) ( )KKK-1 F+−= tr 1det , (204)

où-tr K + F(K) est la somme de det(-K) et de tous ces principaux mineurs (voir par exemple Korn etKorn 1968), en particulier

F = 0 pour 1 voie (élastique),F = det(-K) pour 2 voies,F = det(-K) + tr C[-K] pour 3 voies.

Ensuite, nous extrayons le λ-ème terme de tr K,

( ) ∑ ∑ ∑µ λ≠µ µµ

µµ

λλ

λλµ

λµλ −

Γ−∆+

−Γ−∆=γ

−=

ccc E

i

E

iL

E εεεε 2/2/1tr 20K , (205)

qui, avec l’aide de l’équation (204) nous permet de réécrire l’équation (201) sous la forme

( )∑λ≠µ

λµµ

µµ

λλλλ

+−Γ−∆

+

Γ−∆+=

εεε

FE

i

iE

2/1

2/. (206)

Cette équation est pratique pour l’itération : en insérant l’approximation initiale MLBW dans lemembre de droite, on obtient une valeur améliorée qui peut être réinsérée à droite, et ainsi de suite.Après quelques itérations, le résultat devient stable avec une précision raisonnable et peut être insérédans l’équation (202) afin de donner les résidus. Une fois que tous les paramètres de Kapur-Peierls

λε et gλc gλc’ sont connus, on peut les insérer dans les expressions de Kapur-Peierls des sections

efficaces faisant intervenir les profils des résonances.

La conversion des paramètres de Reich-Moore en paramètres de Kapur-Peierls fonctionne de lamême manière, le seul changement étant que Eµ doit être remplacé partout par Eµ–iΓµγ/2, et Γµ parΓµ - Γµγ. La Figure 12 montre des sections efficaces calculées directement à partir des paramètres deReich-Moore et à partir des paramètres de Kapur-Peierls après conversion. La conversion desParamètres de Wigner-Eisenbud en ceux de Adler-Adler par inversion de matrice est possible, avec lecode POLLA, par exemple (de Saussure et Perez 1969).

Page 82: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

82

Figure 12. Vérification de la technique de conversion des paramètres expliquéedans la sous-partie 3.3.6 : les sections efficaces de Reich-Moore à 3 voies (croix)sont en accord avec les sections efficaces de Kapur-Peierls calculées à partir des

paramètres de résonances convertis (ligne continue). (D’après Fröhner 1978)

3.4 Niveaux externes

La théorie de la matrice-R montre que, dans un intervalle d’énergie limité, les sections efficacesne dépendent pas seulement des niveaux « internes » de cet intervalle mais également des niveaux« externes » situés avant et après cet intervalle. Des problèmes surviennent dans l’ajustement desrésonances et le travail de paramétrisation car sous le seuil de séparation du neutron ou du proton(E<0), les niveaux du noyau composé ne sont pas observables et par conséquent inconnus. Au-delà del’intervalle analysé, les résonances peuvent encore être observables, mais elles sont de moins enmoins bien résolues lorsque l’énergie augmente, car la résolution expérimentale se détériore tandisque la densité de niveaux et la largeur des résonances augmentent – tout ceci faisant que la distinctionentre des résonances simple et des multiplets non identifiés devient progressivement plus difficilevoire impossible. Si les niveaux externes sont omis, on ne peut ajuster les données expérimentales demanière satisfaisante. En particulier, pour les sections efficaces de diffusion et totales, on observerades effets de bord assez gênants et des problèmes au niveau de la section efficace de diffusionpotentielle entre les résonances. Différentes méthodes ad hoc ont été développées par le passé afin devenir à bout des niveaux externes inconnus, allant de simulations à l’aide du « modèle de haie » ou deséquences (« échelles ») de résonances fictives échantillonnées par Monte Carlo en répétantpériodiquement les niveaux internes avant et après l’intervalle de ces niveaux. Les parties suivantesprésentent des méthodes plus fondées, testées avec succès et plus pratiques qui existent depuisplusieurs décennies mais ne sont pas aussi largement utilisées qu’elles le mériteraient.

Page 83: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

83

3.4.1 Représentation statistique des niveaux externes

Les librairies modernes de données nucléaires évaluées contiennent des paramètres pour descentaines de résonances par isotope. Des nombres aussi grands suggèrent de traiter statistiquement lesniveaux plus éloignés si une section efficace doit être calculée à une énergie donnée. De plus, il y atoujours des nombres gigantesques de niveaux inconnus de part et d’autre du domaine des résonancesrésolues contribuant de manière notable à la matrice-R, en particulier à proximité des limites de cedomaine. Afin d’inclure ces niveaux au moins statistiquement, nous divisons la matrice-R(de Reich-Moore) pour une séquence de niveaux donnée (une valeur de JΠ) en une somme sur lesniveaux inconnus (« éloignés » ou « externes ») et en une autre sur les niveaux connus (« locaux » ou« internes »),

∑Λ

=λ λγλ

λλ

Γ−−γγ

+=1

’0’’ 2/iEE

RR cccccc , (207)

et nous remplaçons les sommes sur les termes des niveaux éloignés par des intégrales,

( ),

4/’

2/’’

2/

22’

2/

2/

1

0’

γ

γ∞

∞−

+

λγλ

λλΛ

=λλ

Γ+−

Γ−−γγ

−≈

Γ−−γγ

−=

∫ ∫

ΣΣ

EE

iEE

D

dE

iEER

ccc

IE

IE

cccc

(208)

où E et I sont la valeur centrale et la longueur de l’intervalle contenant les niveaux locaux,1/Dc = 1/Dj est la densité des niveaux de spin J (et de parité donnée) qui est nécessaire pour

l’approximation des sommes par des intégrales et γΓ est la largeur radiative moyenne. En particulier

pour les noyaux lourds, la largeur radiative, somme de très nombreuses largeurs radiatives partielles,

varie peu d’un niveau à l’autre, si bien que γλγ Γ≈Γ . Puisque ( ) 4/’ 22γΓ>>−EE , nous pouvons

négliger 4/2γΓ pour les niveaux éloignés dans la dernière expression. De plus, nous pouvons

négliger les éléments non diagonaux de la matrice des moyennes ’cc γγ du fait du signe

pratiquement aléatoire des γλc. En utilisant la définition usuelle de l’intensité de pôle sc et de sa

transformée de Hilbert, le paramètre des niveaux éloignés ∞cR ,

c

c

c Ds

2γ≡ , (209) ( ) ( )

EE

EsdECER c

c −

≡ ∫∞+

∞−

’’ , (210)

où ∫+∞

∞− C indique une intégrale en valeur principale (de Cauchy), et en négligeant la (faible) variation

de l’énergie de ces deux quantités dans l’intervalle interne, nous trouvons avec l’approximation deReich-Moore

( ) ( ) ’22

0’

4/

4/

2/tanhar2 cccccc

EEI

Ii

I

EEsRER δ

−−

Γ+−+= γ∞ . (211)

La fonction cyclométrique ou fonction d’aire ar tanh x = (1/2) ln[(1+x)/(1-x)] (où ar signifie aire etnon arc) est l’inverse de la tangente hyperbolique, également écrite de façon quelque peu abusive,

Page 84: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

84

tanh-1 x ou arc tanh x. La contribution analogue des niveaux éloignés à la matrice-R générale de

Wigner-Eisenbud est obtenue en mettant simplement partout 0=Γλγ et 0=Γγ :

( ) ’0

’ 2/tanhar2 cccccc I

EEsRER δ

−+= ∞ . (212)

Si l’intensité de pôle n’est pas considérée constante dans l’intervalle interne mais comme variant

linéairement, la seule modification est que sc doit être interprétée comme sc( E ) et qu’un terme

additionnel ( )IEs c’− apparaît, qui peut toutefois être incorporé dans ∞cR . L’expérience a montré

qu’il est d’ordinaire assez acceptable dans les ajustements de ne laisser varier que deux constantes,∞cR et sc.

L’intensité de pôle sc est reliée à la fonction densité l

S , couramment employée dans les études

appliquées des résonances neutroniques, par

EsakS ccc

eV 12≡

l. (213)

Cela vient de la définition (historique) des largeurs neutroniques réduites comme étant leslargeurs neutroniques à l’énergie de référence arbitraire de eV 1=rE . Pour des résonances d’onde s,

on a ( ) 20

0n 2 nrEP γ=Γ . La même convention fut utilisée par la suite également pour les résonances

d’onde p, d, …, de sorte que les largeurs neutroniques réduites pour une seule voie snJc = sont

définies assez généralement comme étant ( ) 20

cn 2 crEP γ=Γ . En moyennant et divisant par

l’espacement moyen de niveaux Dc, on obtient avec ( ) EakEP ccr /eV 10 = la fonction densité

( ) crc sEPS 02= qui est le membre de droite de l’équation (213). Le modèle optique suggère, et les

expériences le confirment, que l’on puisse prendre l

ssc = , donc l

SSc = que nous utilisons dans le

membre de gauche.

Le paramètre des niveaux éloignés ( )ERc∞ est essentiellement la différence entre les

contributions à la matrice-R provenant des résonances d’énergie inférieure et supérieure à E. Il estnégatif si les niveaux d’énergie inférieure (y compris les niveaux liés) ont une force plus élevées queles niveaux d’énergie supérieure et positif dans le cas contraire. Autour de E, l’intégrand estpratiquement une fonction impaire de E’-E, si bien que les contributions des niveaux proches tendentà s’annuler. Par conséquent, la plupart des niveaux éloignés contribuent, d’où l’appellation, et les

valeurs typiques sont faibles, 1<<∞cR . Dans les études appliquées des résonances neutroniques, le

rayon nucléaire effectif,

( )∞−= ccc RaR 1’ (pour des voies d’ondes s), (214)

est souvent utilisé à la place du paramètre des niveaux éloignés. La raison est qu’à basse énergie, lasection efficace de diffusion potentielle apparaît modifiée par une contribution régulière des niveauxéloignés avec comme résultat

( ) 222pot ’414 RRa ccc π=−π→σ ∞ pour 0→ck . (215)

Page 85: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

85

Il fut conclu que les phases de sphère dure devaient être calculées comme des fonctions de cc Rk ’

plutôt que de cc ak mais ceci est faux, ne résistant pas à la première utilisation un tant soit peu

rigoureuse et corrompant les formats ENDF. Le rayon effectif n’est bien défini et applicable que dansla cas limite des basses énergies et uniquement pour les ondes s. Pour des calculs précis de la sectionefficace totale et de diffusion au delà de l’énergie thermique, il faut utiliser le paramètre des niveauxéloignés comme le concept le plus fondamental et le plus valable d’un point de vue général. Il modifiela matrice-R et non le déphasage de sphère dure.

Nous concluons que les paramètres initiaux issus des calculs du modèle optique, par exemple àpartir des graphes de fonctions densité d’ondes s ou p et des rayons nucléaires effectifs donnés dans le« BNL-325 » (Mughabghab et al. 1981, 1984), peuvent être utilisés pour estimer la contribution desniveaux éloignés. Si on néglige cet aspect, on obtient des effets de bords anormaux à proximités desbornes de l’intervalle interne (avec les résonances données explicitement).

3.4.2 Représentations des termes de bord par deux larges résonances

La représentation statistique des niveaux externes est assez commode pour paramétriser lessections efficaces, mais une représentation encore plus simple est obtenue en faisant l’approximationque les termes de « bord » dépendant de l’énergie (fonction d’aire) dans les équations 211 et 212peuvent être décrits par les queues de deux résonances très larges de force égale, situéesymétriquement de part et d’autre de l’intervalle interne,

2/2/2/1

2/tanhar2

2212

γ+γ−

γ

Γ−−γ

+Γ−−

γ≈

−−Γ

+−iEEiEEI

EE

Ii

I

EEs nn

c . (216)

Nous voulons fixer les paramètres −+ −=− EEEE , 2nγ , et Γγ de manière à ce que le membre

de droite deviennent semblable au membre de gauche. Un degrés de similarité suffisant est atteint, parexemple, si les deux membres ont des valeurs, des pentes (première dérivée) et des courbures

(deuxièmes dérivées) égales à l’énergie centrale E . Les trois équations obtenues pour les troisinconnues peuvent être résolues rigoureusement. La solution peut ensuite être simplifiée en

considérant I<<Γγ , ce qui donne les approximations finales

IEE2

3±≈± , (217)

eV 12

3 ±± ≈Γ

EISn l

, (218)

γγ Γ≈Γ . (219)

Leur insertion dans le membre de droite de l’équation (216) révèle qu’elles sont équivalentes aux

approximations ( )23/3ar tan xxx −≈ et ( ) ( ) ( )2222 3/331/1 xxx −+≈− . La figure 13 montre queles différences entre les fonctions originales et leur approximations sont faibles sur pratiquement tout

Page 86: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

86

l’intervalle. À proximité des bornes, elles deviennent plus importantes, mais puisque lesapproximations restent finies, contrairement aux fonctions originales, ce n’est pas nécessairementmauvais pour nos études. L’expérience a montré que la représentation des niveaux externes par unparamètre de niveaux éloignés constant ainsi que par deux niveaux externes très larges placéssymétriquement est acceptable pour les effets de bord dépendant de l’énergie et est une entrée adaptéeà l’ajustement de résonance, aisément ajustable elle même (si nécessaire) avec les résonancesinternes. Dans le format ENDF actuel, il est trivial d’ajouter deux résonances supplémentaires, mais iln’y pas de place prévue pour le paramètre des niveaux éloignés. Il est par conséquent préférable demettre sa valeur à zéro dans les ajustements de résonance orientés ENDF (ce qui signifie que

cc aR =’ à basse énergie, voir équation 214) et d’ajuster les deux grands niveaux indépendamment

l’un de l’autre (en même temps que les résonances internes). Ainsi, l’un d’entre eux peut devenir plusfort que l’autre, ce qui produit le déséquilibre initialement décrit par le paramètre des niveauxéloignés. La figure 14 montre à quel point cette méthode fonctionne pour un ajustement récent dedonnées de transmission de 52Cr.

Afin d’améliorer la rapidité du calcul des sections efficaces ponctuelles lorsqu’un très grandnombre de résonances est explicitement donné, on peut ne retenir que celles situées dans un intervallelimité autour de l’énergie considérée et laisser les autres être décrites sommairement par la partie desniveaux externes (211) de la matrice-R. L’introduction explicite de quelque chose comme50 résonances en dessous et au dessus de l’énergie d’intérêt ( cDI 100≈ ) est suffisant dans la plupart

des cas.

Page 87: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

87

Figure 13. Comparaison des fonctions décrivant les effets de bord. Lignes continues : niveauxexternes moyennés statistiquement (membre de gauche de l’équation 216) ; en tirets :approximation par deux grandes résonances fictives (membre de droite de l’équation 216)

Page 88: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

88

Figure 14. Données de transmission provenant de ORNL (Harvey 1995) ajustées par O.Bouland (1999) en utilisant le code SAMMY (Larson et Perey 1980). La prise en compte des

niveaux externes par deux larges résonances fictives (avec 0=∞cR ) semble suffisante pour une

description correcte de la section efficace sur toute la longueur de l’intervalle interne jusqu’àla borne inférieure (et en fait également jusqu’à la borne supérieure), 45-1 400 keV

3.4.3 Niveaux liés étroits pour imposer les sections efficaces thermiques prescrites pour lesniveaux liés

La simulation des niveaux externes par le paramètre de niveaux éloignés ainsi que par le termestatistique de niveaux (fonction d’aire) pour les bords dans les équations (211) et (212) ou une pairefictive de larges résonances dont les paramètres sont donnés par les équations 217 à 219 estd’ordinaire insuffisante pour répondre, avec les niveaux internes connus, de la section efficacethermique qui, pour la plupart des noyaux, est connue avec une grande précision. Les sectionsefficaces thermiques données peuvent néanmoins être parfaitement reproduite en ajoutant juste unniveau fictif supplémentaire (Fröhner 1978, 1981).

Considérons un noyau non fissile ( γγ Γ+Γ=Γσ+σ=σ ncccc , ) pour lequel les paramètres de

toutes les résonances internes sont donnés, ainsi que l’approximation statistique des niveaux 0ccR pour

la partie externe de la matrice-R. Ces paramètres, habituellement déterminés en ajustant lesrésonances internes sur les données, ne reproduiront pas exactement les sections efficaces thermiques,mais nous pouvons obtenir un excellent accord en ajoutant un niveau lié (négatif) ayant desparamètres appropriés. Aux énergies thermiques, seules les ondes s doivent être considérées, toutes

Page 89: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

89

les autres résonances étant négligeables du fait des faibles facteurs de pénétrabilité l

P de la barrière

centrifuge. En effectuant le choix naturel 00 =B , on a cccc aikiL =ϕ=0 , si bien que la fonction de

collision de Reich-Moore pour chaque voie d’onde s (une pour une cible de spin nul, deux pour unecible de spin non nul) est

λ λγλ

λ

λ λγλ

λ

Γ−−Γ

Γ−−Γ

+=

2/

2/1

2/

2/1

2

iEEi

iEEi

eUn

n

aikcc

cc ( )nc ∈ . (220)

La somme se fait sur tous les niveaux d’onde s, aussi bien internes qu’externes, dont le spin et laparité est sous-entendue par c. Nous divisons maintenant la somme en trois parties à savoir la partie

des niveaux internes ( Λ=λ ,...2,1 ), la partie des niveaux externes 0ccR calculée soit à partir de

l’équation (211) soit à l’aide de deux résonances larges, d’après les équations (217) à (219), et enfinla partie du niveau lié supplémentaire ( 0=λ ). Nous obtenons pour la troisième partie ( 0=λ )

cc

cc

aikcc

aikcc

ccccnn

cceU

eURaik

iEE

i

iEE

i2

20

10 2/

2/

2/

2/−

−Λ

=λ λγλ

λ

γ +−

+−Γ−−

Γ−=

Γ−−Γ

≡∆ ∑ . (221)

Le membre de droite, identifié par cc∆ , peut être calculé à partir des paramètres des résonances

connues et des sections efficaces thermiques prescrites avec

2

222 221

π

σ−

πσ

±

π

σ−=

cc

c

cc

cc

cc

ccc

ggi

gU

, (222)

d’après les équations basiques (152) et (153). En séparant les parties réelles et imaginaires del’équation (221) on obtient

( )0

4/

4/ Re

220

<Γ+−

ΓΓ−=∆

γ

γ

EE

ncc , (223)

( )( )

04/

2 Im

220

0 <Γ+−Γ−−

=∆γEE

EE ncc , pour E0 < 0, (224)

et finalement

2 Re

Im0

γΓ∆∆

−=cc

ccEE , (225)

2 Re2

2

γΓ∆

∆−=

Γ

cc

ccn . (226)

Page 90: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

90

Avec seulement deux équations pour trois inconnues E0, Γn et Γγ, nous pouvons choisir l’uned’elle arbitrairement. La faible variation des largeurs radiatives d’une résonance à une autre suggèred’appliquer à Γγ la valeur de la largeur radiative moyenne des niveaux internes,

γγ Γ=Γ , (227)

mais la reproduction exacte des sections efficaces dans le domaine thermique est également assuréeavec d’autres choix. L’ambiguïté sur le signe dans l’équation (122) vient du fait que les sections

efficaces dépendent uniquement de ccU Re et de 2

ccU . D’ordinaire, le signe plus peut être écarté

immédiatement car il conduit à 00 >E qui est contraire à l’hypothèse d’un niveau lié.

Pour des noyaux fissiles par neutrons thermiques, on trouve que les équations (225) et (226),quoique n’étant plus rigoureuses, sont des approximations correctes au moins dans le cas où il n’y a

pas de résonance très proche du domaine thermique, de sorte que ccc g24 π<<σ . Il y a maintenant

une équation supplémentaire pour la largeur de fission,

2 Re2

2

γΓ∆

∆−=

Γ

cc

cff, (228)

avec

( )∑Λ

λλ

λ

−−Γ

−Γ+−

ΓΓ−

π

σ≡∆

1

1

0222

2

2/1

eV 14/

4/

I

EE

I

ES

EEg

fnfn

cc

cf

cf

, (229)

où σcf est la section efficace thermique de fission pour la voie d’entrée c.

Pour un noyau cible de spin non nul, si les spins des résonances sont inconnus et que seul ngΓest connu pour les niveaux non liés, mais ni g ni Γn séparément, on obtient les équations

2 Re

Im0

γΓ∆∆

−=g

EEnn

nn , (230)

2 Re2

2

γΓ∆

∆−=

Γ gg

nn

nnn , (231)

2 Re2

2

γΓ∆

∆−=

Γ gg

nn

nff, (232)

avec

( )∑Λ

=λ−

λγλ

λ

+−

+−Γ−−

Γ−=∆

12

20

2/

2/ika

nn

ikann

nnn

nneU

eUikaR

iEE

gi , (233)

Page 91: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

91

( )( )∑

Λ

=λ λλ

λλ

πσ

−−Γ+−

ΓΓ−=∆

12022 eV 14/

4/

ffn

nf

ES

EE

g, (234)

et

( )2

2

2coh2 2

22

1

πσ−±

πσ−=

kaiU nn . (235)

Les sections efficaces totales et de fission directement observables à l’énergie thermique sont des

sommes sur deux voies c d’onde s (avec les spins I+½ et I-½), ∑ σ=σc cc et ∑ ∑ ∈

σ=σc fc ccf ’ ’ .

La valeur approchée des largeurs totales est prise comme étant ( ) fng λλγλλ Γ+Γ+Γ≈Γ 2 . Le terme

des niveaux externes 0nnR , c’est à dire les paramètres de niveaux éloignés, les fonctions densité et les

largeurs radiatives moyennes sont supposés les mêmes pour les deux états de spin, et l’indice de voiede cλ et ck a été enlevé. De plus, nous utilisons la relation entre la longueur de diffusion cohérente

acoh et les sections efficaces de diffusion élastique pour les deux états de spin,

∑ πσ

=c

cccga

4coh . (236)

En se limitant à un état de spin (cible de spin nul, cgg =λ ) ou à un noyau non fissile

( 0 ,0 =Γ=Γ=σ λ fff ) on retrouve les équations précédentes.

Avec les paramètres du niveau lié calculés analytiquement de cette façon, les sections efficacesne sont pas seulement correctement reproduites à l’énergie thermique, E = 0.0253 eV, mais dansl’ensemble du domaine thermique en dessous de la première résonance. Il arrive cependant parfoisque le niveau lié fictif soit plus proche du seuil de séparation du neutron que le premier niveau non lié

(c’est à dire 10 EE < ). Bien que la courbe de la section efficace calculée de capture ou de fission

passe par le point prescrit, elle ne présente un comportement normal en 1/v qu’en dessous de l’énergie

« miroir » 0E . Au niveau de cette énergie, la courbe acquiert un comportement en 1/v5 (avant que la

résonance à E1 ne la fasse remonter). Les formules de Breit-Wigner simple niveau (183) et (185)permettent de l’expliquer : le comportement asymptotique à basses et hautes énergies dû à un niveau

lié à E0 < 0 est le même que celui d’un niveau non lié à l’énergie miroir 0E > 0 (voir Figure 15).

Il est facile, toutefois, de rétablir une forme réellement observée en 1/v jusqu’à la première résonancenon liée, sans changer pour autant les sections efficaces correctement calculées au point thermique, enaugmentant tout simplement la largeur radiative (choisie arbitrairement) qui multiplie les autresparamètres de résonance, voir les équations (225), (226) et (230) à (232). Le point calculé de passagede 1/v en 1/v5 peut ainsi être décalé vers des énergies supérieures à E1 où il est sans effet car lacontribution des autres résonances domine.

Page 92: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

92

Figure 15. Section efficace de capture SLBW pour une résonance d’onde s liée et

non liée, telle que décrite dans les équations (183) et (185), avec ( ) ( ) 00 EEEE nn Γ=Γ .

Dans les deux cas, on observe le même comportement à basse et haute énergie

3.5 Élargissement Doppler

Dans les applications pratiques, les sections efficaces sont la plupart du temps demandées sousforme élargie par effet Doppler. Il est parfois affirmé que l’élargissement Doppler peut être négligépour les noyaux légers. Cela peut s’avérer vrai pour les larges niveaux d’onde s mais certainement paspour les niveaux étroits d’ondes p, d, …, qui dans le cas de ce qu’on appelle matériaux de structure(fer, nickel, chrome, cobalt, manganèse, etc.) contribuent de manière significative à l’absorptionrésonnante et à l’activation.

3.5.1 Approximation du gaz libre

L’élargissement Doppler dans les réactions nucléaires est dû à l’agitation thermique des noyauxcibles. Considérons un faisceau parallèle de particules mono-énergétiques, ayant une vitesse v dans lelaboratoire, qui entre en collision avec des noyaux cibles dont les vitesses u sont distribuées de telle

façon que ( ) udp 3u est la fraction des vitesses situées dans une petite région tridimensionnelle ud 3

autour de u dans l’espace des vitesses. Si ρ1 et ρ2 sont respectivement les densités des particules dufaisceau et de la cible, le nombre de réactions intervenant par unité de temps et de volume est

Page 93: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

93

( ) ( ) ( )vvpud σρρ≡−σ−ρρ ∫ 213

21 uvuvu , (237)

où ( )uv −σ est la section efficace non élargie pour une vitesse relative uv − entre les partenaires

de la collision et ( )vσ la section efficace effective, ou élargie par effet Doppler, pour des particulesincidentes de vitesse v. Il est évident, d’après cette définition, que les sections efficaces en 1/v ne sontpas affectées par l’élargissement Doppler. Supposons maintenant que les noyaux cibles aient la mêmedistribution de vitesses que les atomes dans un gaz idéal, c’est-à-dire la distribution deMaxwell-Boltzmann

( )3

3

2

2

23

3 exp1

TT u

ud

u

uudp

π=u

≡ kT

MuT

2

2

, (238)

où M est la masse du noyau cible et kT la température du gaz en unité d’énergie. En intégrant surtoutes les vitesses relatives possibles uvw −≡ et en utilisant les coordonnées polaires avec l’axe

polaire parallèle au faisceau, ϕµ== dddwwwdud 233 avec θ=µ cos , on obtient facilementl’expression exacte pour la section efficace élargie par effet Doppler (Solbrig 1961)

( ) ( )

( ).exp1

expexp1

02

2

02

222

∫∞

σ

−−π

=

σ

+−−

−−π

wv

ww

u

vw

u

dw

wv

w

u

vw

u

vw

u

dwv

TT

TTT

(239)

Cela signifie un élargissement Gaussien de la fonction impaire ( )vvv σ sur une échelle de

vitesse allant de -∞ à +∞, uT étant la largeur correspondant à cet élargissement. En fonction des

énergies dans le laboratoire, 22mvE = , on a

( ) ( )∫∞

σ

∆+−−

∆−−

π∆=σ

0

22

’’

2/

’exp

2/

’exp’

1E

E

EEEEEEEdEE , (240)

mM

EkT4≡∆ (241)

est appelée largeur Doppler. Pour E>>∆, ce qui est généralement vérifié au-delà de quelques eV, onpeut simplifier en ne gardant dans les exponentielles que les deux premiers termes du développement

( ) ...2’’ +−+= EEEEE , en négligeant la seconde exponentielle et en changeant la limite

inférieure de l’intégrale, mise à -∞. Le résultat s’écrit

( ) ( )∫∞

∞−

σ

∆−−

π∆=σ ’’

’exp’

12

EEEE

dEEE , (242)

qui traduit un élargissement Gaussien du taux de réaction sur l’échelle en énergie avec une largeur ∆.

Page 94: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

94

3.5.2 Cristal cubique

Lamb (1939) retrouva l’expression (241) pour la capture radiative de neutrons par des noyauxd’un cristal de Debye, dans le cas le plus important d’un point de vue pratique où DkT4>∆+Γ , oùTD, température de Debye, est la mesure des forces de liaison maintenant les atomes à leur positiondans le cristal, fortes pour des atomes fortement liés et faibles pour des atomes faiblement liés. Laseule différence entre un gaz idéal et un cristal de Debye est que l’on doit calculer la largeur Dopplernon pas avec la température réelle T mais avec une température effective TL donnée par

++=

=

TTD

DL

D

T

TT

xxdx

T

TTT

0 2

23

3

...20

11

2coth

2

3(243)

qui est habituellement-à température ambiante-plus grande de quelques pour-cents par rapport à T.Dans l’approximation de diffusion quasi-libre, on trouve le même résultat pour la diffusion et pourdes cristaux cubiques en général (Fröhner 1970). La correction sous forme de fonction de TD/T estdonnée graphiquement par Lamb (1939). Les problèmes avec la température de Debye pour descristaux contenant à la fois des noyaux légers et lourds-exemple : 238UO2 sont discutés par Lynn(1968).

3.5.3 Élargissement Gaussien avec profils de Voigt

Dans la représentation de Kapur-Peierls, équations (178) à (180), toutes les résonances desections efficaces apparaissent en tant que superpositions linéaires de profils de formes de raiessymétriques et asymétriques (ainsi que d’une section efficace de diffusion potentielle lentementvariable dans le cas de σc et σcc). Puisque les profils de forme contiennent les variation rapides,typiques des résonances alors que tout le reste varie lentement, nous obtenons une bonneapproximation des sections efficaces élargies par effet Doppler en remplaçant simplement les formesde raies non élargies (« naturelles ») des expressions de Kapur Peierls par les profils élargis par uneGausienne introduits par Voigt (1912)

( )

( )∫∞

∞− λλ

λ∆−−λ

+−π∆=ψ

4~

4’

122

2’ 22

GEE

GedE EE , (244)

( ) ( )( )∫

∞− λλ

λλ∆−−λ

+−

−π∆

=χ4

~’

2~

’’

122

’ 22

GEE

GEEedE EE , (245)

où ∆, λE~

et Gλ doivent être pris à E’ = E. Cela signifie que toutes les faibles dépendances

énergétiques sont localement négligées, sur l’intervalle (quelques largeurs Doppler) de la fonction depondération Gaussienne, mais que leur effet à longue portée est totalement pris en compte.L’élargissement Doppler au moyen des profils de Voigt est populaire car il existe dessous-programmes rapides pour leur calcul (voir par exemple Bhat et Lee-Whiting 1967). Dansl’approximation de Adler-Adler, leur utilisation est directe. Dans les autres représentations, on doitd’abord convertir les paramètres de Wigner-Eisenbud en paramètres de Kapur-Peierls. Dans les

approximations SLBW et MLBW, c’est trivial : on a simplement λλλ ∆+= EE~

, 2121ccG λλ Γ= ,

λλ Γ=G (cf. équations 170-171). Dans l’approximation de Reich-Moore, on doit d’abord convertir

par itération ainsi qu’expliquer dans la sous partie 3.3.6. C’est facile à programmer et n’augmente pas

Page 95: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

95

significativement le temps de calcul, en particulier avec un algorithme rapide pour les élargissementGaussiens.

3.5.4 Élargissement Gaussien avec la méthode de Turing

Un algorithme rapide pour calculer des élargissements Gaussiens de fonctions ayant des pôlesdans le plan complexe (fonctions méromorphes) fut proposé par Turing (1943). La fonctionméromorphe la plus simple, avec un seul pôle, est la combinaison χ+ψ i des profils de résonancenaturels que nous avons rencontrés dans les formules de résonance de la partie 3.3. La méthode deTuring est donc largement utilisée pour le calcul des profils de Voigt. Turing introduisit des pôlesartificiels et équidistants le long de l’axe réel et appliqua une intégration de contour (voir par exempleBhat et Lee-Whiting 1967) pour obtenir

( )

( )

( ) ,1

2

2

1

22

2

0

0

220

22

FPe

e

iEE

ieEi

EiEEi

iEE

n

EEn

+−∆

Γπ+

Γ+−Γ

δπ∆

=χ+ψ

δΓ+−π−

∆Γ+−−

∞−

∆−−∑, (246)

où δE est l’espacement (arbitraire) des pôles artificiels, EnEEn δ+= est un point de la grille (pôle

artificiel), et

=1

2/1

0

P pour Eδ∆π

<=>

∆Γ 2

, (247)

( )

( )2

2

2

1222/12

0

1

21

21

2E

E

e

e

E

EEF

δ∆π−

δ∆π−−

δΓ∆π−

Γ−

≥ . (248)

Nous reconnaissons que l’approximation de Turing consiste en (i) une approximation del’intégrale par une simple somme avec une largeur de pas de δE, (ii) un terme impliquant l’énergie

20 Γ+ iE du pôle et un facteur discontinu P et (iii) un terme d’erreur F qui devient petit pour

∆<δE du fait du facteur ( )[ ]2exp Eδ∆π− . Le terme polaire est une correction sur la somme,seulement nécessaire au voisinage de pics étroits (pôles proche de l’axe réel) pour lesquels lalongueur du pas de la somme approchée est trop grossière, mais négligeable ailleurs ainsi que lespécifie le facteur P. En choisissant ∆≈δ 7.0E , on peut complètement négliger le terme d’erreur ettoujours obtenir une précision relative de l’ordre de 10-7 ou mieux (Bhat et Lee-Whiting 1967). Enappliquant la méthode de Turing à chaque terme des expressions de Kapur-Peierls des sectionsefficaces (178) ou (179), on obtient

( ) ( ) ( )( )

( ) ,1

Re E

e 1

2

E-

22

22n

λδ−π−

∆−−

λλλ

−=

∆−

λ

λ

ε

ε

−π+

σδπ∆

≈σ

Pe

eGC

EEEEE

EEi

E

N

Nnnn

E

(249)

Page 96: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

96

où Cλ est le coefficient de λλ χ+ψ i dans l’équation (178) (pour la section efficace totale) ou (179)

(pour les sections efficaces partielles), et les facteurs Pλ sont semblables à P dans l’équation (226).

Le premier terme du membre de droite est à nouveau l’approximation de l’intégrale par unesomme. Dû au poids rapidement décroissant dans les ailes de la Gaussienne, seuls les termes de lasomme tels que 55 ≤≤− n sont nécessaires pour obtenir la précision de 0.1% habituellement requisedans les applications courantes. De plus, la section efficace naturelle (non élargie) ( )nEσ peut être

calculée directement, sans conversion, à partir des paramètres de Wigner-Eisenbud ou de Adler-Adlerdonnés dans les fichiers d’évaluation. Des doubles sommations ne sont pas nécessaires : les sectionsefficaces naturelles MLBW sont directement obtenues à partir de la matrice de collision (190), lessections efficaces de Reich-Moore à partir de la matrice-R réduite (194). Dans les deux cas, seules desimples sommations sur les niveaux sont nécessaires. Le temps de calcul nécessaire pourl’approximation en histogramme (première somme dans l’équation 250) est par conséquentpratiquement le même dans les quatre approximations : SLBW, MLBW, Reich-Moore et Adler-Adler.

D’un autre côté, le terme polaire dans l’équation (249) demande des paramètres deKapur-Peierls, mais uniquement pour des résonances étroites (valeurs de Pλ ne s’annulant pas) et àproximité de leur pic où les faibles dépendances en énergie peuvent être négligées. Les paramètres deAdler-Adler n’ont pas du tout besoin d’être convertis, pour ceux de SLBW et MLBW la conversionest triviale. C’est seulement dans l’approximation de Reich-Moore que l’on doit convertir paritération ainsi qu’expliqué dans la sous-partie 3.3.6, mais simplement à quelques énergies, plusprécisément aux énergies formelles des résonances étroites. Le temps supplémentaire nécessaire pourcette préparation est seulement une petite fraction du temps total requis pour des calculs de vastessections efficaces ponctuelles pour lesquels les gains de temps sont importants.

La méthode de Turing peut bien évidemment s’appliquer non seulement à des élargissementsGaussiens sur l’échelle en énergie, équation (242), mais également à des élargissements Gaussiens surl’échelle des vitesses (ou des quantités de mouvement) avec le modèle du gaz libre, voir équation(239). Dans ce dernier cas, il y a même un avantage supplémentaire : la largeur de la fonction depondération Gaussienne ne dépend plus de l’énergie (ou de la quantité de mouvement) si bien que lapondération Gaussienne nécessaire (c’est-à-dire pour 55 ≤≤− n ) peut être déterminée une fois pourtoutes avant même le début des calculs. Un autre avantage de la méthode de Turing est l’introductiond’une grille naturelle ne dépendant que de la température effective, qui est adaptée pour des calculsrapides de sections efficaces ponctuelles, créant automatiquement moins de points aux hautes énergiesoù les sections efficaces élargies sont moins structurées. Cette méthode est pratique non seulementpour l’ajustement de sections efficaces, comme on le pense parfois, mais de manière assez généraledès que des sections efficaces ponctuelles multi-niveaux élargies sont demandées. Le programmeDOBRO (Fröhner 1980) a été écrit d’après ce qui précède. En employant le modèle du gaz libre exact,il génère des sections efficaces MLBW ou de Reich-Moore élargies par effet Doppler presque aussirapidement que des sections efficaces SLBW à partir de paramètres donnés. L’idée la plus importanten’est pas les profils de Voigt par eux-mêmes, mais plutôt la meilleure méthode pour les calculer – laméthode de Turing – à appliquer directement aux expressions des sections efficaces multi-niveaux.

3.5.5 Elargissement de données ponctuelles tabulées et linéairement interpolables

Une méthode largement utilisée pour générer des sections efficaces dans le domaine desrésonances élargies par effet Doppler est de partir de sections efficaces naturelles σk données etd’énergies Eκ telles que pour chaque énergie intermédiaire E une interpolation est possible,

Page 97: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

97

( ) ( ) ( )kk

kkkk

EE

EEEEE

−σ−+σ−

=σ+

++

1

11 ( )1+≤≤ kk EEE (250)

avec une certaine précision spécifiée. La variation linéaire en énergie se traduit par une variationquadratique en fonction de la vitesse,

( ) 2vbav kk +=σ , (251)

où ak et bk sont des coefficients constants. Les tables de sections efficaces ponctuelles linéairementinterpôlables sont courantes dans les fichiers de données nucléaires évaluées. Par insertion dansl’équation (239), on obtient

( ) ( ) ( )[ ]( )2

02

22222

wbaeev

w

u

dwv kk

k

uvwuvw

T

TT +−=σ ∑∫∞

+−−− . (252)

Chaque terme de la somme correspond à une portion linéaire de la représentation de la sectionefficace. En effectuant le changement de variable ( ) Tuvwx −= , nous trouvons que pour chaqueterme de la somme nous avons besoin des intégrales

( ) ( )1

1 2

2

+− −=

π ∫ +

knkn

x

x

nt xIxItedtk

k

pour 4,3,2,1,0=n (253)

avec

( ) ( )xIn

xetedtxI nnx

x

ntn 2

1

2

11

2 22

−−−∞ − −+

π=

π≡ ∫ . (254)

I0 et I1 sont calculables facilement et ainsi les autres peuvent être obtenues à partir de la dernièrerelation de récursion (résultant d’une intégration partielle) :

( )

( )

( )

( ) ( )

( ) .4

31 erfc

4

3

,11

,1

erfc2

1

,1

, erfc

34

23

2

1

0

2

2

2

+

π+=

=

π+=

π=

=

xxexxI

xexI

xexxI

xI

xxI

x

x

x (255)

C’est l’idée de base du code SIGMA1 (Cullen et Weisbin 1976). Il faut noter qu’en dépit du titrede la publication, la méthode n’est pas exacte puisque l’interpolation linéaire entre les sectionsefficaces tabulées est une approximation qui introduit une erreur. (Dans les fichiers d’évaluationmodernes, des écarts relatifs jusqu’à 0.5% ou dans le meilleur des cas 0.1% sont admis entre chaqueportion linéaire). Il faut également réaliser que les exponentielles et les fonctions d’erreur doivent être

Page 98: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

98

calculées pour chaque portion linéaire de la représentation de la section efficace. Si les sectionsefficaces σk ne sont pas données mais doivent d’abord être calculées, le code SIGMA seradéfinitivement plus lent et dans les cas moins précis que l’approche de Turing, et le choix d’une grilleirrégulière permettant l’interpolation avec une précision voulue, avec un minimum de points de grille,peut être problématique, alors que la méthode de Turing fournit automatiquement une grille adaptée.

3.6 Analyse pratique des sections efficaces expérimentales dans le domaine des résonances

Nous avons mentionné dans la partie 2 que la meilleure détermination des sections efficaces àpartir de données expérimentales s’obtient par l’extraction des paramètres de résonance. En fait,toutes les sections efficaces dans le domaine des résonances résolues qui sont utilisées dans lescalculs de réacteurs et autres applications sont générées à partir des paramètres de résonances. Onpourrait se demander pourquoi ne pas utiliser directement les meilleures sections efficaces mesuréesavec une haute résolution et ainsi éliminer la nécessité d’extraire des paramètres de résonance.

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles la détermination des paramètres de résonance ne peut êtreévitée si les réactions résonnantes doivent être décrites et prédites avec prédiction.

1. permet de représenter la structure souvent incroyablement détaillée des sections efficaces parcomparativement peu de nombres.

Exemple : Le nombre de résonances actuellement analysées du système composé 238U+n estde l’ordre de 1 000. Si la fission sous le seuil est négligée, elles sont décrites par Lesparamètres de résonance suivis de l’utilisation d’une théorie des résonances nous environ4 000 paramètres (E0, Γn, Γγ, JΠ) alors qu’une représentation ponctuelle, ayant une précisionraisonnable, des sections efficaces de diffusion et de capture requerraient 5⋅104 donnéesponctuelles soit 105 nombres. Si l’on considère également les distributions angulaires et lesdifférentes températures, on obtient facilement plusieurs millions de données ponctuelles quiseraient nécessaires pour décrire le comportement de 238U dans un réacteur.

2. L’élargissement Doppler des résonances pour des températures arbitraires ne peut êtrecalculé rigoureusement qu’à partir de paramètres de résonance et non de données ponctuelles.

3. Les paramètres de résonance et le formalisme de la matrice-R garantit l’accord avec descontraintes physiques telles que limites unitaires de la section efficace dans chaque voie de

réaction ( ccc g240 π≤σ≤ ) ou limite de Wick pour la diffusion vers l’avant

( ( ) ( )22 40 cccc dd πσ≤Ωσ ).

4. Un autre accord est plus subtil mais, d’un point de vue pratique, au moins aussi important,particulièrement pour les calculs d’auto-protection. La théorie nous dit qu’il y a une relationstricte entre les formes de raie dans une voie de réaction et la forme de raie correspondant aumême niveau du noyau composé dans les autres voies. Cette relation est vérifiée si lessections efficaces sont générées de façon cohérente à partir des paramètres de résonance,alors que pour des jeux de données expérimentales, une échelle commune en énergie esttoujours problématique.

Page 99: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

99

5. Au moins tout aussi important est le fait que même les meilleures mesures sont affectées parla résolution expérimentale, l’effet Doppler et (exception faite des données de transmission)par l’auto-protection et les diffusions multiples. La seule manière rigoureuse de corriger ceseffets est une paramétrisation sur tout le domaine par ajustement de courbes théoriques surles données. Les quantités ajustées ne devront pas être un genre de données réduitesressemblant aux sections efficaces, telles que valeurs logarithmiques de la transmission, maisles observables elles-mêmes, par exemple les transmissions, les taux de capture, de fission oude diffusion. Les élargissement dus à la résolution expérimentale ou à la température,l’auto-protection, les diffusions multiples, les impuretés dans l’échantillon et les autres effetsdoivent donc être inclus dans le modèle théorique.

6. L’extrapolation dans le domaine des résonances non mesurées ou non résolues par descalculs de section efficace avec le modèle statistique des niveaux (Hauser-Fesbach) requiertdes paramètres statistiques tels que densités de niveaux ou fonctions densité. Ceux-ci doiventêtre estimés à partir des paramètres des résonances résolues.

7. Afin de comprendre la plupart des problèmes pratiques rencontrés lors de l’ajustement,passons en revue, avec quelques détails, les principaux types de données expérimentales dansle domaine des résonances qui doivent être modélisées par des algorithmes d’ajustement. Lesobservables sont des fonctions ou fonctionnelles plus ou moins compliquées des sectionsefficaces, plutôt que les sections efficaces elles-mêmes.

3.6.1 Les observables

Comme nous l’avons déjà mentionné dans la partie 2.1, la mesure la plus simple est celle de lasection efficace totale σ. On mesure la fraction d’un faisceau de particules d’énergie donnée quitraverse sans interaction un échantillon d’une épaisseur n (en noyaux/barn).

σ−= neT . (256)

La section efficace totale est donc proportionnelle au logarithme de l’observable.

Les taux de réaction (n,x) Yx (x = f, γ, n’, p, α, …), c’est-à-dire la fraction des particules dufaisceau induisant une réaction (n,x) dans l’échantillon, est une somme de contributions d’événementsoù la réaction (n,x) est précédée de 0, 1, 2, … diffusions,

...210 +++= xxxx YYYY . (257)

avec

Page 100: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

100

( )

( ) ( )

( ) ( ) ( )

etc.

,111

,11

,1

122

22

1

1n1

n2

11

11

n1

0

σσ

−σσ−

σσ−=

σσ

−σ

σ−=

σσ

−=

xx

xx

xx

TTTY

TTY

TY

. (258)

L’indice numérique indique le nombre de collisions précédentes de sorte que 1-T1, par exemple,est la probabilité qu’après la première collision le neutron diffusé interagisse à nouveau quelque part

dans l’échantillon. Les parenthèses ... ,,21

traduisent des moyennes spatiales et angulaires sur

toutes les premières, deuxièmes, etc. collisions possibles. À chaque collision élastique, l’énergie duprojectile passe de E à

( )2

2

1

12’

++µ+

=A

AAEE c (259)

si la particule cible est initialement au repos. Ici µc est le cosinus de l’angle de diffusion dans le centrede masse et A est le rapport de masse entre le projectile et la cible. Notons que dans le domaine desrésonances, de petites variations d’énergies peuvent entraîner des variations dramatiques de la sectionefficace. Les taux de collisions multiples ... , , 21 xx YY sont donc des fonctions de plus en plus

complexes des sections efficaces σx, σn et σ. Si la diffusion inélastique est autorisée d’un point de vue

énergétique, alors les parenthèses etc.1

comprennent également les moyennes sur les différents

modes possibles de diffusion (réactions résiduelles). L’approximation d’échantillon mince,

xx nY σ= si 1<<σn , (260)

est souvent suffisamment précise pour les taux de fission puisque les échantillons fissiles doivent êtreextrêmement fins afin que les fragments de fission signalant la réaction (n,f) puissent en sortir. Dansl’analyse des données de capture, d’un autre côté, on doit habituellement inclure le facteurd’auto-protection ( ) σ− nT1 et les contributions des diffusions multiples car la faible absorption des

photons signalant des événements (n,γ) permet aux expérimentateurs d’augmenter les taux decomptage en utilisant des échantillons épais.

Les effets de l’épaisseur de l’échantillon, c’est à dire auto-protection et diffusions multiples, sontégalement importants dans les mesures de diffusion. En analogie avec les équations (257) et (258),nous avons

...3n2n1nn +++= dYdYdYdY . (261)

avec

Page 101: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

101

etc.

d

111

d

11

d

1

1233

2

n2

2

2n1

1

1n3n

122

1

n1

1

1n2n

11n

1n

ΩΩσ

σ−

σσ−

σσ−=

ΩΩσ

σ−σ

σ−=

ΩΩσ

σ−=

dTdTTT

dY

dTdTT

dY

dTdT

dY

. (262)

où Ωd est l’élément d’angle solide couvert par le détecteur.

À la suite de notre discussion sur les taux de réactions, il devrait être clair que, à moinsd’échantillons très minces, l’extraction des sections efficaces (n,x) à partir des taux (n,x) faitégalement intervenir la section efficace totale. De manière assez générale, on peut dire que lesdonnées de section efficace totale sont une condition préalable pour une bonne analyse des sectionsefficaces partielles. Un autre type de données, intéressantes en particulier pour des tests de statistiquede niveaux dans le domaine des résonances non résolues, est obtenu par des mesuresd’auto-indication. On place deux échantillons dans le faisceau, un échantillon filtre (épaisseur n1) etun échantillon détecteur (épaisseur n2), tous deux constitués de la même matière. La probabilité qu’unfaisceau de particule induise une réaction (n,x) dans le second échantillon est

( ) ( ) ( )2121 ., nYnTnnS xx = . (263)

De cette façon, on mesure essentiellement la transmission de l’échantillon filtre avec un systèmede détection dont l’efficacité est augmentée au niveau des pics des résonances (au niveau des creux detransmission).

Idéalement, l’analyse des paramètres de résonance se base sur des mesurées avec des échantillonsisotopiquement purs et procède plus ou moins de la manière suivante :

1) Des données de transmission, on détermine fondamentalement

gE , , , n0 ΓΓ pour 0= ,

n0 , ΓgE pour 0≥ .

2) Les résultats de transmission permettent de calculer les corrections d’échantillon épais pour lesdonnées de taux de réaction (n,x) à partir desquelles on obtient fondamentalement

xE Γ ,0 si get nΓ sont connus,

xgE Γ ,0 si seul nΓg est connu.

3) Si les données de transmissions ne sont pas disponibles (les niveaux d’onde p, d, … ne sont pasfacilement visibles dans les mesures de transmission) on obtient uniquement

ΓΓΓ xgE n0 , si seul nΓg n’est pas connu.

Page 102: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

102

Dans les cas moins idéaux, il y a des complications provenant d’impuretés dans les échantillons,le plus souvent d’autres isotopes du même élément dans les matériaux enrichis, la présence d’oxygènedans les oxydes ou due à la corrosion, mais également de l’hydrogène provenant de vapeur d’eauabsorbée. D’autres complications expérimentales inévitables sont brièvement décrites dans lasous-partie suivante.

3.6.2 Complications expérimentales

Les bruits de fond sont une source principale des incertitudes dans l’analyse des résonances.Dans les mesures de temps de vol, il y a toujours deux types de bruit de fond : constant et dépendantdu temps. Les bruits de fond constants peuvent être dus à la radioactivité de l’échantillon et de sonenvironnement ou à des rayons cosmiques. Les bruits de fond dépendant du temps sont induits par lesimpulsions de l’accélérateur ou par des effets provenant de l’échantillon. Un exemple est le bruit defond provoqué par des neutrons diffusés par les résonances dans les mesures de transmission ou decapture neutronique par temps de vol. Dans ce bruit de fond, la structure résonnante de la sectionefficace de diffusion se reflète, et par conséquent il présente des fluctuations violentes en fonction dutemps de vol (ou de l’énergie). Cette influence de l’échantillon rend souvent les déterminations dubruit de fond « sans échantillon » discutables. C’est pourquoi, on utilise des écrans « noirs », deséchantillons spéciaux placés devant l’échantillon étudié. L’écran noir idéal possède un petit nombrede résonances très espacées et est suffisamment épais pour qu’au niveau des creux correspondant(les pics des résonances noires) toutes les particules du faisceau soient éliminées et que seul le bruitde fond soit observé durant l’expérience en cours. Bien sûr, aucune donnée ne peut être mesurée auniveau des résonances noires, aussi utilise-t-on plusieurs écrans complémentaires. Les écrans noirssont une amélioration par rapport à la détermination du bruit de fond sans échantillon, maisn’éliminent pas complètement les problèmes engendrés par la présence de l’échantillon.

L’élargissement par la résolution expérimentale est une autre source de complications. Toutes lesdonnées expérimentales sont élargies par la résolution. Les vraies observables sont

( ) ( ) ( )∫= ETEErdEET ,’’ , (264)

( ) ( ) ( )∫= EYEErdEEY xx ,’’ , (265)

etc., où dE’r(E’,E) est la probabilité qu’un événement observé à l’énergie E (ou au temps de volcorrespondant) soit réellement dû à une particule du faisceau ayant une énergie E’ à dE’ près. Lesprincipales raisons de l’écart E-E’ dans les données de temps de vol sont

• Largeur finie de l’impulsion de l’accélérateur (tb).

• Largeur finie du canal de temps de vol (tc).

• Dérive électronique, « jitter » (td).

• Incertitude sur le point de départ de la base de vol (par exemple dans le modérateur ou le« booster ») et sur le point d’arrivée (par exemple dans l’échantillon ou le scintillateur enverre au lithium) (∆L).

• Résolution angulaire finie (∆θ).

Page 103: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

103

La fonction de résolution r(E’,E) est souvent approximée par une Gaussienne,

( ) 22’1),’( WEEe

WEEr −−

π= (266)

avec, par exemple (Fröhner et Haddad 1965),

( ) EccEtttmL

E

L

LEW dcb 21

21

222

2

2

322 +=

+++

∆= . (267)

En variant légèrement c1 et c2, on peut améliorer l’ajustement mais, généralement, la vraiefonction de résolution possède des queues et les Gaussiennes doivent être remplacées par d’autresfonctions asymétriques telles que fonctions χ2 (Fröhner 1978) ou des Gaussiennes avec des queues.

L’efficacité des détecteurs et le flux sont une troisième source importante d’incertitudes pour lesmesures de sections efficaces partielles où les observables sont des taux de comptages,

( )1 si <<σεσϕ≈εϕ= nnYc xx . (268)

La détermination absolue du flux ϕ et de l’efficacité ε est difficile et est donc évitée dès quepossible. Souvent, on mesure relativement à un échantillon de référence (indice r) dans le même fluxafin d’obtenir

<<σ<<σ

εσεσ

≈εε

= 1 ,1 rrrrr

x

rr

x

r

nnn

n

Y

Y

c

c, (269)

où Yr est connu avec une bonne précision. Cela enlève la nécessité de connaître le flux mais on peuttoujours avoir des problèmes avec n/nr et ε/εr comme le montre l’approximation d’échantillon mince.Si la dépendance en énergie de ε/εr est connue, on peut calibrer en se normalisant sur une valeur desection efficace connue avec précision, par exemple une section efficace au point thermique. Siaucune valeur n’est suffisamment connue, on peut souvent utiliser la technique de la résonancesaturée (« échantillon noir »). On utilise un échantillon spécial qui est suffisamment épais pour qu’unerésonance bien connue ait une transmission très faible. De manière assez générale, on a

( ) TYT xx −<<

σσ

− 11 . (270)

Du fait que εϕ= xYc , on obtient au pic de la résonance, E = E0, où l’échantillon est noir, 0≈T ,

( )( )0

0

E

Ecc

xσσ

<εϕ< . (271)

Si ( ) ( )00 EE xσ≈σ (c’est à dire xΓ≈Γ ) ceci définit, sans autre calcul, une valeur assez précise

de εϕ. La résonance à 4.91 eV de 197Au+n , par exemple, a fréquemment été utilisée de cette manièrepour la normalisation par résonance saturée des données de capture. De sérieux problèmes sontrencontrés si l’efficacité du détecteur varie d’un isotope à l’autre, ou même pire, d’une résonance à

Page 104: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

104

l’autre. Cela a été une source persistante de difficultés pour les mesures de capture. Ici, la réponse dudétecteur dépend du spectre gamma (énergie de liaison, intensité de transition vers les niveaux peuliés, etc.) qui fluctue d’un niveau à l’autre de manière imprévisible, particulièrement dans le cas desnoyaux légers et intermédiaires. Le problème ne peut être surmonté qu’à l’aide d’imposantsscintillateurs liquides ou cristallins qui entourent l’échantillon dans une géométrie 4π et absorbe laplupart des rayons gamma de capture.

L’auto-protection et les diffusions multiples affectent principalement les données de capture etde diffusion neutroniques. Comme le montrent les équations (257)-(258) et (261)-(262), les deuxeffets sont interdépendants et ne peuvent être traités séparément. Ils sont tous deux considérés commedes effets d’épaisseur d’échantillon. Un traitement analytique n’est pas possible dans le domaine desrésonances résolues du fait des brusques variations des sections efficaces de diffusion et de captureainsi que de la nécessité de décrire les données en détail et non pas en terme de moyennes. Le seulmoyen valable est la simulation Monte Carlo de l’histoire des collisions multiples des neutrons baséesur une description détaillée des résonances des sections efficaces, sur les distributions de probabilitéappropriées pour les libres parcours et les angles de diffusion, et sur la géométrie exacte del’échantillon (cf. Fröhner 1989 pour plus de détails). La faisabilité de simulations Monte Carlodirectes des effets d’épaisseur d’échantillon dans l’ajustement des résonances de capture futdémontrée avec le code FANAC (Fröhner 1978).

3.6.3 Attribution de spin et de parité

L’algorithme conventionnel d’ajustement par moindres carrés utilise des dérivées (sensibilités),et donc n’est directement applicable qu’à des distributions de probabilités continues. Par conséquent,la détermination des paramètres de résonance par des ajustements par moindres carrés non linéairesne peut s’effectuer que pour les énergies et largeurs des résonances pour lesquelles existe uncontinuum de valeurs possibles tel que les dérivées pour itérations de Newton-Raphson puissent êtrecalculées. Les spins et les parités ayant des valeurs discrètes ne disposent pas de dérivées. On pourraitimaginer une généralisation combinant la méthode des moindres carrés avec des distributions deprobabilité discrètes, mais dans des analyses de résonances impliquant des dizaines ou mêmes descentaines de niveaux, le nombre possible de combinaisons spin-parité, pour lesquelles les moindrescarrés doivent être entrepris, est rebutant. C’est pourquoi, une première attribution des spins et desparités est d’ordinaire basée sur l’étude des données de transmission. La plupart des résonancesd’onde s sont facilement reconnaissables car les importantes interférences entre les diffusionsrésonnantes et potentielles les rendent relativement asymétriques (voir figure 11), alors que lesrésonances d’ondes p et d tendent à être plus étroites et symétriques du fait de la faible valeur dessections efficaces de diffusion potentielle et des pénétrabilités de la barrière centrifuge aux bassesénergies.

Un premier rangement grossier par catégorie de ces niveaux étroits, dont on ne connaît que gΓn parl’analyse de la transmission, peut se baser sur la valeur moyenne attendue des largeurs neutroniques. Si

les valeurs attendues Jngl

Γ pour les combinaisons possibles ( )J, sont données, on peut calculer les

probabilités correspondantes pour ( )J, au moyen du théorème de Bayes (Bollinger et Thomas 1968).

L’a priori est proportionnel à la densité des niveaux de spin J et parité ( )l−=Π qui peut être

considérée comme indépendante de la parité : JJ ρ=ρl

. Avec l’approximation grossière 12 +∝ρ JJ ,

on obtient, par exemple, des densités de niveaux d’ondes s, p, d dans les proportions 1 :3 :5 si le spin de

Page 105: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

105

la cible est nul (voir la colonne ∑ Jg dans le tableau 2). La fonction de vraisemblance est donnée par

la distribution de Porter et Thomas (voir Chapitre 4, ci dessous)

( ) ( ) ( )J

x

nn x

dxxegdJgp

l

Γ=ΓΓ

ν

ν−

2

2

, , ∞<ΓΓν

≡<Jn

nJJ g

gx

l

l

l 20 , (272)

où ( )2

νΓ est une fonction gamma et Jlν le nombre de spins de voie (1 ou 2) qui peuvent être combinés

avec pour donner J (cf. équations 139-140 et le tableau 2). Puisque dx/x ne dépend pas de ou J,la probabilité a posteriori en résultant est

( ) [ ][ ]∑ ν−

ν−

ρρ

JJ

xJ

Jx

Jn

xe

xegJP

,

2

2

,

l

l

l , ,...,2,1,0= 2121 ++≤≤−− IJI , (273)

où I est le spin de la cible. Les largeurs moyennes font intervenir des produits entre les espacementsde niveaux JJD ρ=1 et les fonctions densités

lS ,

( )EvESDgg JJJJn llll eV 1ν=Γ . (274)

Les estimations des largeurs moyennes peuvent donc être basées sur les espacements moyensobservés et sur les fonctions densités

lS observées ou du modèle optique. Les fonctions 0/ PPv

ll≡

(avec kaP =0 ) sont les pénétrabilités relatives de la barrière centrifuge, égale à 1 pour l’onde s. Pour les

autres ondes partielles, on a ( ) ( )[ ] 22 !!12 −≈ l

lkav si ( )1+<< ka (c’est-à-dire à basse énergie).

Cela signifie que dans le domaine des résonances, seules les ondes partielles avec 2 ,1 ,0= et (au plus)3 doivent être considérées. Les autres sont effectivement supprimées par des barrières centrifugesélevées. Une attribution de spin et parité, fondée purement et simplement sur la comparaison de lalargeur observée par rapport aux largeurs moyennes estimées est, bien entendu, purement probabiliste, àréviser si de nouveaux éléments apparaissent tels que des minima caractéristiques des interférencesd’onde s dans la section efficace totale.

L’information réelle sur le couple spin-parité est fournie par les données de diffusion puisque lesdistributions angulaires diffèrent de façon marquée pour les niveaux s, p et d. Habituellement, oncompare des distributions angulaires calculées par avance pour des résonances isolées avec cellesobservées. En pratique, les résonances sont toutefois rarement isolées et interfèrent avec les autresniveaux de même spin et parité. De plus, les distributions angulaires présentent des interférencesmême entre des ondes partielles différentes, par exemple entre les amplitudes d’onde s et p. Uncertain nombre d’essais et d’erreurs sur les spins et les parités ne peut donc être évité durant la phaseinitiale d’ajustement des résonances, même dans le cas idéal où existent des données doublementdifférentielles de haute résolution. Les effets des interférences deviennent de plus en plus gênantslorsque l’énergie augmente et l’analyse des résonances résolues doit éventuellement être remplacéepar l’analyse de la section efficace moyenne ainsi que nous allons en discuter dans le chapitre suivant.

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107

4. THÉORIE STATISTIQUE DES RÉSONANCES POUR LE DOMAINE NON RÉSOLU

Nous avons déjà commencé à utiliser la statistique des résonances lorsque nous avons estimé lacontribution des niveaux externes (« éloignés ») à la matrice-R dans la sous-partie 3.4.7. Nous allonsmaintenant l’appliquer de manière systématique au domaine des résonances non résolues, ainsi qu’onl’appelle, où la résolution expérimentale limitée ne permet que d’observer des moyennes derésonances, ressemblant à des sections efficaces lisses alors que des résonances existent et se fontsentir au travers de phénomènes tels qu’absorption dépendant de la température et auto-protection.Les sections efficaces moyennes, les carrés des fluctuations moyennes (variances) et autres fonctionsdes sections efficaces, telles qu’atténuation du faisceau ou auto-protection dépendant de latempérature, peuvent être prédites au moins par les probabilités si on connaît la statistique desrésonances non résolues, en particulier les distributions de probabilité de leurs espacements et de leurslargeurs partielles. Le Modèle Statistique des réactions nucléaires (et atomique), avec résonances,apparût dans les années 50 (voir Porter 1965, pour les publications majeures). Il est basé sur la théoriedes probabilités des matrices hamiltoniennes, c’est-à-dire sur les distributions de probabilité conjointe(« ensembles ») de leurs éléments de matrice ayant pour contrainte leurs symétries et autrescaractéristiques globales. Il a été établi que l’Ensemble Gaussien Orthogonal des matrices symétriquesréelles introduit des distributions théoriques de largeurs partielles et d’espacements de niveaux, enaccord avec celles observées. Les expressions analytiques des sections efficaces, en termed’espacements moyens des niveaux et de largeurs partielles moyennes, pourraient être d’aborddéduites pour les sections efficaces totales moyennes tandis que les expressions trouvées pour lessections efficaces partielles sont approximatives, valables uniquement pour des résonances bienséparées, ne se recouvrant que faiblement. Le cas des recouvrements importants entre les niveaux,appelé problème de Hauser-Feshbach, ne fut résolu qu’en 1985.

4.1 Statistique des niveaux

Nous commençons par les bases de la statistique des niveaux, en particulier par les distributions(locales) des paramètres de résonance de la matrice-R, les énergies Eλ des niveaux et les amplitudesde voie γλc.

4.1.1 Hypothèse de Porter et Thomas

Les amplitudes de décroissance γλc de la théorie de la matrice-R sont essentiellement des valeursdes fonctions propres radiales internes pour la voie d’entrée, représentant le recouvrement de laλ−ème fonction propre et de la fonction d’onde externe (« voie ») pour la même valeur du rayonrc = ac (voir Lane et Thomas 1958, Lynn 1968). Pour un système composé ayant A + 1 nucléons, cesont des intégrales à (3A + 2) dimensions sur la surface de la région interne dans l’espace desconfiguations. Les intégrands oscillent rapidement, si bien que les contributions positives et négativestendent à s’annuler. Les intégrales sont donc attendues proches de zéro avec la même probabilitéd’être positives ou négatives, dépendant des particularités inconnues de la λ−ème fonction propre.

Page 108: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

108

Dans ces circonstances, une distribution Gaussienne de moyenne nulle des γλc semble être uneproposition raisonnable. En effet, le principe du maximum d’entropie de la théorie des probabilités(voir partie 1.7) nous dit que, si nous savons seulement que la distribution possède une moyenne nulle

et une variance finie 2cγ , la distribution de probabilité la plus raisonnable et objective pour toutes

les nouvelles inférences est la Gaussienne,

( ) dxedp xccc

212 −

π=γγγ ∞<

γ

γ≡<∞−

22 c

cx . (275)

Avec ccc dd γγ=γ 22 et ( ) ( ) 2222cccccc dpdp γγγ≡γγγ , cela devient la distribution supposée

par Porter et Thomas (1956),

( ) dyy

edp

y

ccc π=γγγ

−222 ∞<

γγ

≡<2

2

20

c

cy , (276)

pour les largeurs partielles 22 ccc P λλ γ=Γ de voie unique (et à une énergie donnée). Des exemples de

largeurs de voie unique sont les largeurs neutroniques pour I = 0 ou 0= (voir Tableau 2) ou leslargeurs radiatives pour une seule transition radiative, non seulement en spectroscopie nucléaire maiségalement atomique et moléculaire. Les distributions de Porter et Thomas d’une seule voie sont enbon accord avec les distributions observées pour les largeurs neutroniques réduites de voie unique etpour les largeurs radiatives de simple transition. Il faut toutefois réaliser que les niveaux les plusfaibles – ceux ayant les largeurs de voie d’entrée les plus petites – tendent à être perdus dans les bruitsde fond expérimentaux. D’après l’hypothèse de Porter et Thomas, ce sont les plus fréquents. Lesdistributions empiriques des largeurs et en particulier les valeurs empiriques des densités de niveauxdoivent donc être invariablement corrigées des niveaux manquants. La figure 16 montre un exempledu bon accord entre les distributions des largeurs observées et théoriques au dessus du seuil dedétection des faibles niveaux. D’un autre côté, on peut voir que plus de 20% des niveaux sontmanquants. (L’échantillon comprenait des résonances de 238U+n comprises dans l’intervalle d’énergie0–3 keV, d’onde s avec une probabilité estimée de 99% ou plus.)

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109

Figure 16. Distribution de Porter et Thomas. Histogramme : nombre de résonances d’onde s de238U+n d’énergie inférieure à 3 keV dont la largeur neutronique réduite est plus grande que lavaleur en abscisse. Courbes continues : distribution cumulative de Porter et Thomas avec sa

bande de confiance, valeur estimée par le maximum de vraisemblance

Beaucoup de largeurs observables sont cependant la somme de largeurs de plusieurs voies, parexemple des largeurs neutroniques avec pour I>0 et 0> (voir tableau 2), des largeurs radiatives

totales ou des largeurs de fission. Si les moyennes 2cγ sont les mêmes pour les ν voies intervenant,

une telle largeur observée suivra la distribution généralisée de Porter et Thomas, c’est-à-dire unedistribution du χ2 à ν degrés de liberté,

( ) ( ) y

dyyedp

y

xxx

2

2222

ν

ν−

Γ=γγγ , ∞<

γγν≡<

2

2

20

x

xy , (277)

où ( )2

νΓ est une fonction Gamma (non une largeur), et

∑∈

γ≡γxc

cx22 , (278) 22

cx γν=γ . (279)

La distribution de Porter et Thomas généralisée s’applique aux largeurs neutroniques à deuxvoies (ν = 2, distribution exponentielle) et, avec un nombre ν effectif (pas nécessairement entier) devoies de fission, aux largeurs de fission (ν petit) et aux largeurs radiatives totales (ν grand,distribution proche d’une fonction delta : les largeurs radiatives ne fluctuent que faiblement d’unniveau à l’autre). De grandes valeurs effectives de ν ne sont pas rares du fait du nombrehabituellement grand des transitions radiatives permises vers les états moins liés du système composé.Que ν soit petit pour les largeurs totales de fission fut par contre une surprise. Les centaines de pairespossibles de fragments de fission, chacun avec de nombreux états excités possibles, semblaient

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110

impliquer également beaucoup de largeurs partielles de fission et une grande valeur correspondantepour ν.

L’énigme fut résolue par A. Bohr (1955). Il montra qu’avant que la fission puisse avoir lieu, lenoyau composé doit passer le point selle de la surface d’énergie potentielle (dans l’espace desparamètres de déformation) au delà duquel la répulsion coulombienne prévaut sur la cohésionnucléaire. Au point selle, la plupart de l’énergie d’excitation est sous forme d’énergie de déformation,et donc seule reste une faible partie pour les autres modes d’excitation dont le spectre ressemble àcelui des états peu liés observés pour les déformations de l’état fondamental. La conservation del’énergie, du moment angulaire et de la parité ne permet d’accéder qu’à peu de ces états de transition,indépendamment de la multitude des fragmentations finales. C’est pourquoi les voies de fission sontcorrélées de telle manière que la largeur de fission peut être considérée approximativement commeune somme sur un petit nombre de termes, un pour chaque état de transition (« voie au point deselle »). Pour la fission, ν est par conséquent le nombre effectif de voies ouvertes au point selle plutôtque le nombre de voies de réaction au sens habituel.

Ceci illustre que les « lois » de statistique des niveaux ne sont pas aussi rigides que le formalismedes résonances discuté au Chapitre 3. Elles s’appliquent principalement pour des états hautementexcités du système composé pour lesquels les modèles à particules indépendantes, collectifs ou autressimplicités ne peuvent être utilisés. Reflétant plus notre ignorance que des phénomènes réellementaléatoires, ces lois ne sont pas réellement applicable là où les états considérés sont simples et biencompris. La connaissance du rôle joué par les états collectifs de transition d’un noyau fissile, parexemple, nous permet de modifier et, en fait, de simplifier la description statistique des résonances defission. Dans le cas d’école des interactions neutroniques avec un puits de potentiel carré complexe,où tout peut se calculer explicitement, rien n’est aléatoire ou non spécifié, et les largeurs neutroniquesréduites (à peu de chose près le carré des amplitudes de décroissance) apparaissent être toutes égalesplutôt que de suivre une distribution de Porter et Thomas (voir Fröhner 1998a).

4.1.2 Loi de Wigner et l’ensemble Gaussien orthogonal

Il s’avéra bien plus difficile de trouver la distribution des espacements de niveaux dans unefamille de niveaux de JΠ donné que de déterminer les distributions des largeurs partielles. Dès ledébut, Wigner (1957) tenta une hypothèse hardie. Il tira une conclusion, avec la distribution dePoisson essayée par d’autres, selon laquelle la probabilité de trouver un espacement de niveauxEλ+1-Eλ dans un intervalle dD autour de D est seulement proportionnel à dD et est indépendant de ladistance du niveau précédent. Il montra que les énergies des niveaux sont des valeurs propres dematrices hamiltoniennes, et que les ensembles de matrices présentent toujours une répulsion desvaleurs propres (la probabilité devient négligeable si l’espacement de niveaux tend vers zéro) si bienqu’au moins pour les faibles espacements, la probabilité devrait être proportionnelle à DdD. Enfaisant l’hypothèse que la proportionnalité est également vérifiée pour les grandes valeurs de D, ilobtint immédiatement ce qui est connu aujourd’hui sous le nom de loi de Wigner,

( ) DdDcecDdDdDDcdDDDp cDD

2

0

2

’’exp −=

−= ∫ , ∞<< D0 , (280)

Page 111: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

111

où la constante de proportionnalité est liée à l’espacement moyen des niveaux D par

( )22 Dc π= .

La théorie des ensembles de matrices hamiltoniennes (soit des distributions de probabilité desmatrices hamiltoniennes) fut développé par la suite par Wigner, Porter, Dyson, Mehta et d’autres (voirPorter 1965, Brody et al. 1981, Mehta 1991). Les matrices hamiltoniennes nucléaires sont, bienentendu, hermitiennes mais également, du fait de l’invariance pratique des interactions nucléaires parinversion du temps, symétriques et donc réelles. Si nous connaissons une distribution de probabilitéde telles matrices, nous pouvons en déduire la distribution de probabilité correspondante des valeurspropres. L’ensemble le plus simple est obtenu si nous ne supposons rien d’autre qu’une dispersionfinie du spectre des valeurs propres, ce qui est très bien réalisé par des distributions de valeurs propressimilaires à des Gaussiennes issues des calculs du modèle en couche (voir Brody et al. 1981). Enmaximisant l’entropie de la distribution avec la condition d’une dispersion finie (voir par exempleFröhner 1990, 1991a), on trouve comme choix le plus objectif

( ) ( ) ( ) ( ) µνν<µ

µνµµµ

µµ ∏∏ λ−λ−∝σ dHHdHHdp 222 2expexpHH , 24

1

σ+=λ N

, (281)

où N est le rang de la matrice H (le nombre de valeurs propres), ( ) ∏ ν≤µ µν= dHd H l’élément de

volume dans l’espace des éléments de matrices indépendants, et σ la dispersion du spectre des valeurspropres (autour de son centre E = 0). Ayant l’entropie maximale (contenu minimal en information)parmi toutes les distributions de matrices réelles symétriques avec un écart-type σ donné, cetensemble joue un rôle similaire pour ces matrices à celui que joue les distributions Gaussiennes pourles distributions scalaires de dispersion donnée. Il est appelé l’Ensemble Gaussien Orthogonal (EGO)car il est invariant par transformation orthogonale et parce que les éléments de matrice ont desdistributions Gaussiennes indépendantes. En réalité, Wigner l’obtint à partir des exigences del’invariance par rotation (toutes les bases orthogonales doivent être équivalentes en mécaniquequantique) et d’éléments de matrice distribués indépendamment, mais la condition d’indépendancerequise fut jugée comme non physique, en conflit avec la caractéristique des forces nucléaires à faireintervenir deux corps de façon prédominante. Dans l’approche du maximum d’entropie,l’indépendance est une conséquence naturelle de l’information limitée à l’entrée. En tous cas, lasuggestion de Wigner que l’EGO fournit un modèle mathématiquement simple de la statistique desniveaux a été parfaitement confirmée. Porter et Rosenzweig (1960) démontrèrent que pour des trèsgrandes matrices (un très grand nombre d’états du système composé), l’EGO aboutit à la distributionde Porter et Thomas des largeurs partielles. La distribution des espacements de niveaux de l’EGOpour des matrices 2 × 2 est exactement la loi de Wigner, tandis que pour des matrices plus grandeselle en est très proche comme le montrèrent Mehta (1960) et Gaudin (1961), voir figure 17.

Page 112: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

112

Figure 17. Distribution des espacements entre les niveaux voisins pour l’Ensemble GaussienOrthogonal des matrices réelles symétriques. Ligne continue : grandes matrices N × N, avec

∞→N (Gaudin 1961). En pointillé : matrices 2×2 (Distribution de Wigner, équation 280)

Les espacement de niveaux sont corrélés de telle façon qu’un espacement relativement importantaura plutôt tendance à être suivi d’un espacement faible, et vice versa. Le coefficient de corrélation enrésultant est

( ) ( )( ) ( )

27.0varvar

,cov,

1

11 −≈≡ρ

+λλ

+λλ+λλ

DD

DDDD (282)

pour de grandes matrices. L’ensemble des valeurs propres est par conséquent remarquablementrégulier (« rigide »), avec des positions de niveaux presque équidistantes, ce qui le différencienotablement d’un ensemble aléatoire avec une distribution de Poisson pour les intervalles. Tout ceciest en excellent accord avec la statistique observée des niveaux nucléaires (ou atomiques), au moinsdans des intervalles d’énergie limités où les lentes variations de l’espacement moyen des niveaux etdes largeurs partielles moyennes peuvent être négligées. Les écarts apparents par rapport auxprédictions de l’EGO disparaissent habituellement si les lentes variations sur un grand intervalle(« variations séculaires ») des paramètres statistiques de niveaux sont correctement prises en compte.

On ne peut s’attendre à ce que l’ensemble Gaussien orthogonal, ayant comme seule conditionune dispersion finie du spectre des valeurs propres, reproduise des caractéristiques nucléaires plusspécifiques telles que densités de niveaux d’un gaz de fermions, effets de couches, résonancesdipolaires géantes ou barrières de fission. En fait, la densité de niveaux semi-circulaire de l’EGOobtenue par Wigner (1957) diffère des densités similaires à des Gaussiennes obtenues dans descalculs du modèle en couche, plus réaliste (voir Brody et al. 1981). Alors que les distributions desénergies et des largeurs partielles des niveaux peuvent localement être prises comme celles de l’EGO,leurs paramètres (densité de niveaux, largeurs moyennes) varient lentement avec l’énergie. Cesvariations séculaires sont décrites par des modèles macroscopiques du noyau, la densité de niveaux,par exemple, l’est par le modèle du gaz de Fermi ou, à plus haute énergie, par le modèle en coucheavec interaction résiduelle ; les fonctions densités des neutrons, protons et particules alpha par le

Page 113: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

113

modèle optique ; les fonctions densités des rayons gamma par le modèle de la résonance dipolairegéante ; les fonctions densité de fission par les modèles de barrière de fission.

4.1.3 Coefficients de transmission

La théorie appropriée pour le domaine des résonances non résolues est la théorie deHauser-Feshbach avec correction des fluctuations des largeurs. Elle est obtenue si on moyenne lesexpressions des sections efficaces de la matrice-R sur l’EGO. Les paramètres essentiels sont lesfonctions densités ou les coefficients de transmission qui leur sont intimement liés. Pour des voies departicules (neutron, proton, particule alpha), ces derniers sont définis par

20

2

1

41

ccc

ccccc

LR

PsUT

π=−≡ . (283)

Le dénominateur, avec

cccc siRR π+≡ ∞ , (284)

rend compte des recouvrements et effets d’interférence dus au niveaux voisins et éloignés, ∞cc Rs et

étant les intensités de pôle et le paramètre des niveaux éloignés déjà rencontré dans le contexte desniveaux externes, voir les équations 209 et 210. Le coefficient de transmission est doncessentiellement 2π fois le rapport entre les largeurs effectives de particule (par exemple neutronique)et l’espacement moyen des niveaux. Pour les voies photons ou fission, on utilise de façon analogue

cDT γ

γ

Γπ= 2 , (285)

c

ff D

π= 2 . (286)

Les coefficients de transmission pour les voies de particule peuvent être obtenus à partir du modèleoptique qui décrit l’interaction entre une particule incidente et le noyau cible par un potentiel complexe,en analogie avec la diffraction et l’absorption de la lumière par la proverbiale boule de cristal opaque. Lepotentiel complexe est ajusté de manière à ce que la section efficace totale moyenne soit bien reproduitesur tout le domaine des résonances non résolues et bien au-delà. Pour des noyaux de dimensionsimilaires, par exemples les actinides tels que 235U, 238U et 239Pu, on s’attend à avoir des barrièrespotentielles semblables et donc des sections efficaces totales moyenne similaires. Et c’est en fait ce quenous observons-voir par exemple les mesures de transmission neutronique et les ajustements avec lemodèle optique effectués par Poenitz et al. (1981) sur toute une série de noyaux lourds. Le modèleoptique a par conséquent un pouvoir prédictif et systématisant considérable.

Il faut toutefois garder en mémoire que c’est essentiellement un modèle à particulesindépendantes ou la diffusion ne définit que la diffusion directe (potentielle), alors que l’absorptionsignifie qu’il y a formation du noyau composé et inclut non seulement des captures radiatives ou desfissions, mais également des diffusions résonnantes, c’est-à-dire la réémission de la particuleincidente (ou d’une particule indiscernable de celle-ci) à partir du noyau composé. De plus, lesdistributions angulaires calculées avec un potentiel complexe qui reproduit correctement la sectionefficace totale ne sont pas exactement égales aux diffusions doublement différentielles moyennesdérivées du formalisme de la matrice-R. Le seul type de section efficace observable directementobtenu avec le modèle optique est donc la section efficace totale (moyenne). Les ajustements sur les

Page 114: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

114

données de diffusion ou d’autres sections efficaces partielles demandent une prise en compteconvenable des diffusions résonnantes excepté loin au-delà du domaine des résonances non résoluesoù les processus par formation du noyau composé sont négligeables.

La principale information obtenue par les études à l’aide du modèle optique sur les réactionsinduites par neutrons est que les fonctions densité et les paramètres des niveaux éloignés ne varientque faiblement sur le domaine relativement étroit des résonances résolues ainsi que d’un noyau àl’autre. De plus, ils peuvent habituellement être considérés comme ne dépendant que du momentorbital angulaire, ainsi que cela fut mentionné dans le contexte de l’équation (213). Les coefficientsde transmission pour les voies inélastiques, par exemple (n,n’) ou (p,p’), peuvent être calculés avecles mêmes expressions que pour les voies élastiques (n,n) ou (p,p) mais avec l’énergie E de laparticule remplacée par E – Ec, où Ec est l’énergie d’excitation transférée au noyau rédiduel.

Le coefficient de transmission total des photons pour les familles JΠ de résonances est dominépar les transitions dipolaires électriques et magnétiques,

[ ]∑Πγ∈

Πγ +=

Jc

Mc

Ec

J TTT,’

1’

1’ , (287)

où les sommes portent sur toutes les voies de sorties accessibles c’, c’est-à-dire toutes les transitionsdipolaires permises d’un état de spin J et parité Π du noyau composé vers un niveau moins lié. Lescontributions dipolaires électriques sont communément considérées comme ayant la formeLorentzienne classique des résonances dipolaires géantes,

( ) ( )2220

2

41

γγ

γ

Γ+−∝

EEE

ET E

c , (288)

où Eγ est l’énergie des photons de la transition, E0 et Γ sont l’énergie et la largeur de la résonancedipolaire géante où tous les protons vibrent contre tous les neutrons. De manière empirique, on trouva

que pour un noyau composé sphérique ayant A nucléons, on a 6/10 /MeV AE ≈ ,

3/1/MeV 33 A≈Γ . Pour des noyaux magiques, Γ est plus petit d’un facteur 0.6, pour un noyaupresque magique avec Z ou N différent d’un nombre magique de 1 ou 2, le facteur est environ de 0.8,et pour des noyaux déformés il vaut environ 1.2 (voir Holmes, Woosley, Fowler et Zimmerman 1976).Les contributions dipolaires magnétiques sont plus petites. Elles sont souvent approchées parl’estimation simple de Weisskopf

31γ∝ ET M

c , (289)

ou sont toutes négligées. La somme (287) sur les niveaux finaux, pour une énergie d’excitation

arbitraire U, peut être calculée comme une intégrale ( )...0∫ γγ −ρU

J EUdE , avec par exemple une

densité de niveau de Gilbert-Cameron Jρ , et normalisée sur la fonction densité gamma ΠγΓπρ J

J2

dans le domaine des résonances résolues (obtenue empiriquement, au moins pour les résonancesd’onde s, à partir de leurs largeurs radiatives et espacements, déduites pour les autres via lesdistributions théoriques de spin discutées ci-dessous).

Les coefficients de transmission de fission sont dus à Hill et Wheeler (1939). Pour des barrièresde fission à simple bosse de forme parabolique identique pour tous les états de transitions, ilss’écrivent

Page 115: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

115

( )[ ]∑Πγ∈

Π

ω−π+=

Jc c

Jf EE

T,’ /2exp1

1

, (290)

où E est l’énergie de la particule incidente, Ec la hauteur de la barrière sur la même échelle d’énergie,ω est proportionnel à l’inverse de la courbure de la parabole, et la somme se fait sur tous les états de

transition (voies au point selle) en accord avec J et Π. Pour des barrières à double bosse, il est souventsuffisant de combiner les coefficients de transmission TA pour la première barrière et TB pour laseconde en additionnant les inverses,

ΠΠΠ +=J

BJ

AJf TTT

111, (291)

en analogie avec les résistances en série. Des expressions plus générales sont données par exemple parVandenbosch et Huizenga (1973). Là encore, la somme (290) doit être calculée comme une intégralesur une densité convable d’états de transition, voir Lynn (1974).

Les espacements moyens de niveaux ou leurs inverses, les densités des niveaux nucléaires,apparaissent devoir jouer le rôle de facteurs d’échelle dans la théorie. Leur dépendance en spin et enénergie a une forte influence sur le comportement des sections efficaces moyennes et va être discutédans la suite.

4.1.4 Densités des niveaux nucléaires

Les niveaux du noyau composé peuvent être observés dans deux domaines d’énergie – àproximité de l’état fondamental jusqu’à quelques MeV (par exemple, à l’aide de spectroscopie derayons gamma de capture neutronique ou d’excitation coulombienne), et au niveau de l’énergie deséparation du neutron d’environ 7 MeV (par l’observation des résonances dans les réactions induitespar neutrons et protons). À ces énergies d’excitation plus élevées, la densité de niveaux se trouve êtresupérieure de plusieurs ordres de grandeur par rapport à l’état fondamental. Une explication d’uneaugmentation si rapide des densités de niveaux en fonction de l’énergie d’excitation doit s’appuyersur les caractéristiques fondamentales du noyau que contient le modèle en couche nucléaire : lesnucléons, obéissant à la statistique de Fermi-Dirac et donc au principe d’exclusion de Pauli, sedéplacent pour la plupart indépendamment dans le puits de potentiel généré par leurs interactionsmutuelles. Notonsεν la ν-ème valeur propres de l’énergie du puits, et niν le nombre d’occupation (0 ou 1 pour desfermions) du ν-ème niveau dans le i-ème état nucléaire. Pour des nucléons indépendants, le nombretotal de nucléons et l’énergie totale du i-ème état nucléaire sont donc

∑ν

ν= ii nN , 1 ,0=νin . (292)

∑ν

νν ε= ii nE , 0>εν . (293)

La densité réelle à deux dimensions des états du noyau composé,

( ) ( ) ( )∑ −δ−δ=ρi

ii EENNEN , , (294)

Page 116: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

116

n’admet que des valeurs discrètes. Une densité continue peut être obtenue si nous imposons desvaleurs arbitraires non négatives de N et E en tant que moyennes pondérées

∑=i

ii NpN , (295) ∑=i

ii EpE . (296)

Le principe du maximum d’entropie nous dit comment choisir les poids pi avec ces deuxconditions. Le choix le plus raisonnable, assurant un minimum d’information factice, est l’ensemblegrand-canonique (introduit pour la première fois par Gibbs en thermodynamique),

ii ENi e

Zp β−α= 1

, (297) ∑ β−α=i

EN iieZ , (298)

avec les multiplicateurs de Lagrange α et β. En remarquant que la fonction de partition Z est latransformée de Laplace de la densité de niveaux ρ, de l’équation (294), nous concluons que la densitéde niveaux doit être reliée à la fonction de partition par une transformation de Laplace inverse,

( ) ( ) ENeN,EdEdNZ β−α∞∞

∫∫ ρ=βα ,00

, (299)

( ) ( )

, 2

1

, 2

1,

Si

i

i

i

ENi

i

i

i

eddi

eZddi

EN

∫∫

∫∫∞

∞−

∞−

β+α−∞

∞−

∞−

βαπ

=

βαβαπ

=ρ(300)

où S est l’information entropie pour les paramètres de Lagrange arbitraires α et β,

∑ β+α−=−=i

ii ENZppS lnln . (301)

L’intégration au point selle, c’est-à-dire le développement de S autour de son maximum pour

α=α ˆ , β=β ˆ et la troncation après les termes quadratiques, donne la relation remarquable entre ladensité de niveaux et l’entropie

( ) ( )S

eEN

S

ˆ2det,

T

ˆ

∇∇π≈ρ , (302)

où nous introduisons l’opérateur de dérivée vectorielle ( )Tˆ ˆ β∂∂α∂∂≡∇ . Les paramètres de

Lagrange α , β pour le maximum sont justement ceux provenant de l’algorithme de l’entropie

maximale, et l’information entropie maximale ( )βα≡ ˆ,ˆˆ SS est l’entropie thermodynamique desphysiciens divisée par la constante de Bolzmann.

Considérons la fonction de partition. Nous remarquons que la somme sur tous les états du noyaucomposé revient à la somme sur toutes les séries possibles des nombres d’occupation des fermions,

Page 117: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

117

( )∏∑ν

βε−αβ−α ν+== eeZi

EN ii 1 . (303)

En développant le dernier produit, on remarque en fait que chaque état est représenté par unterme de somme, chaque terme de somme étant un produit d’exponentielles pour tous les niveauxoccupés avec un facteur unité pour les niveaux vides, ainsi que le demandent les équations (292) et(293). En passant au logarithme et en faisant l’approximation de la somme par une intégrale, onobtient

( ) ( ) ( )βε−α∞

βε−α

ν+εε≈+= ∫∑ ν egdeZ 1ln 1lnln

0

, (304)

où g(ε) est la densité des niveaux à une particule. Dans l’état fondamental, avec l’énergie totale E0,tous les niveaux sont occupés jusqu’à celui qu’on appelle niveau de Fermi εF, de sorte que

( )∫ε

εε=F

gdN0

, (305) ( )∫ε

εεε=F

gdE0

0 . (306)

Le noyau est ainsi décrit comme un gaz condensé (« dégénéré ») de fermions. La condensationdiminue lorsque l’excitation augmente et de plus en plus de niveaux vides sont créés sous le niveau deFermi alors que des niveaux situés au-delà se remplissent. Tant que seul un intervalle relativementfaible autour du niveau de Fermi est affecté, où la variation de g(ε) est négligeable, on peut utiliserl’approximation

( ) ( )

π+βε−α

βε

+β−α≈62

ln22

0FFg

ENZ (307)

(voir par exemple Bohr et Mottelson 1969). La maximisation de l’entropie avec la fonction de

partition donne deux équations couplées pour α et β ,

Fεβ=α ˆˆ , (308) ( )

2

2

0 ˆ6 βεπ=− Fg

EE , (309)

et finalement la formule de la densité de niveau pour un gaz de fermion

( )U

aUEN

48

4exp, ≈ρ , (310)

où 0EEU −≡ est l’énergie d’excitation et ( ) ( )Fga επ≡ 62 , appelé paramètre de densité de

niveaux du gaz de fermions, dépend de N du fait de l’équation (305).

Van Lier et Uhlenbeck mirent en lumière, en suivant un conseil de Goudsmit, que dans le casparticulier de niveaux à particule unique équidistants, soit pour un potentiel décrit par un oscillateurharmonique, la densité de niveaux d’un gaz de fermion peut être calculée de manière exacte (voirEricson 1960). Les énergies d’excitation possibles sont des multiples entiers de l’espacement

gd 1≡ . Pour ,...4 ,3 ,2 ,1=dU on a 1, 2, 3, 5 … états différents (arrangements d’occupation).Comme on peut le voir sur la figure 18 (en haut), le nombre d’états est égal au nombre des différentes

Page 118: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

118

partitions de l’entier U/d, la partition étant ici définie au sens de la théorie des nombres comme unedécomposition en terme de somme d’entiers naturels. Le nombre de partition peut être calculé par uneformule récursive venant d’Euler (1753). L’histogramme de densité de niveaux rigoureuse enrésultant est tracé avec la courbe approximative du gaz de fermions sur la figure 18 (en bas). L’accordest bon sauf aux plus faibles énergies d’excitation. L’augmentation rapide, pratiquementexponentielle, de la densité de niveaux avec l’énergie est évidente.

Figure 18. Fermions occupant des niveaux à particule unique équidistants. En haut : étatfondamental et premiers état excités. En bas : densité exacte des niveaux d’après la théorie desnombres (courbe en escalier) et approximation par la maximisation de l’entropie (courbe lisse)

Page 119: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

119

Jusque ici nous avons négligé la différence entre protons et neutrons et leurs spins. Il convient degénéraliser à des noyaux à des noyaux ayant Z protons, N neutrons et un nombre quantique dedirection de spin M. Le résultat est la fameuse formule de Bethe (1937) pour la densité de niveaux(voir également Gilbert et Cameron 1965)

( )( )[ ]( )[ ] 23222

22

2212

24exp,,,

mgMUmg

mgMUaMENZ

−≈ρ (311)

avec

np ggg +≡ , (312) 222nnpp mgmgmg +≡ , (313)

où gp et gn sont les densités des niveaux à particule unique pour les protons et les neutrons, mp et mn

leurs nombres quantiques d’orientation de spin. (Le puits de potentiel et donc les niveaux à particuleunique des protons diffèrent de ceux des neutrons du fait de l’interaction coulombienne.)

Habituellement ( )22 2 mgM est bien plus petit que U. Cela mène à une factorisation approchée de

( ) ( ) ( )2

2

2,,,

22

πσω≈ω≡ρ

σ−M

M

eUUMENZ (314)

en un produit de la densité d’état totale

( ) ( )( )

aaU

eUU

aU

MM 45

4

43

2π=ω=ω ∑∞

−∞=, (315)

avec une distribution Gaussienne sur tous les nombres quantiques d’orientation de spin M, de variance

a

Umg 22 =σ . (316)

La Gaussienne est correctement normalisée à 1 puisque la formule de somme d’Euler-MacLaurin

donne 222 2 2222

πσ== σ−∞

∞−

−∞=σ− ∫∑ M

M

M edMe pour des valeurs de M entières, mais également

demi-entières. L’écart-type σ est souvent appelé facteur de coupure de spin. Les valeurs typiques sontde σ ~ 3 pour des noyaux intermédiaires tels que les matériaux de structure Fe, Ni, Cr et σ ~ 4.5 pourdes actinides tels que Th, U, Pu.

Il faut toutefois réaliser qu’en l’absence de champs extérieurs, on ne peut distinguer et identifier

comme résonances séparées que les états nucléaires MJ , de moment angulaire total J (spin du

niveau) différent. Les états ayant pour seule différence la direction du spin, M = -J, -J+1, … J, sontdégénérés et donc indiscernables. Cela signifie que nous devons compter qu’une seule de ces

alternatives, par exemple uniquement les états avec M = J, JJ , , si nous voulons la densité ρJ des

niveaux ayant un J donné. Les états contribuant à ωJ et ωJ+1 peuvent alors être rangés en deuxcolonnes de la manière suivante,

Page 120: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

120

... ...

1,2 ,2

1,1 ,1

,

+++

+++

JJJJ

JJJJ

JJ

les états sur la même ligne, par exemple JJ ,1+ et

1,1 ++ JJ , étant dégénérés. Si nous effectuons la différence à ωJ-ωJ+1 , toutes les contributions de

la première colonne sont par conséquent annulées par celles de la seconde, exception faite de la

contributions des états JJ , qui est égale à la densité des niveaux ρJ voulue (Bethe 1937). On a

ainsi, avec l’approximation par factorisation (314),

( )

( ).

2

21exp

2

21sinh

8

1exp

2

2

2

1exp

2exp

2

2

2

222

2

2

2

2

21

σ

+−

σ+

σ−

πσ

ω=

σ+−−

σ

−πσ

ω≈ω−ω=ρ +

JJ

JJJJJ

(317)

C’est la densité de tous les niveaux de spin J, sans considérations sur la parité. La densité deniveaux pour telle ou telle parité (+ ou -) peut normalement être prise simplement comme la moitié(voir Ericson 1960, Gilbert et Cameron 1965). Des approximations largement utilisées consistent àremplacer le sinus hyperbolique par son argument, ou de manière plus drastique, en écrivant

cJ gJ ∝+∝ρ 12 , ce qui n’est toutefois vérifié correctement que si J<<σ, c’est-à-dire pour les deux

ou trois plus faibles valeurs possibles de spin. La figure 19 montre la distribution exacte

[ ] ( )[ ]2222 21exp2exp σ+−−σ−= JJf J pour σ = 3.0 et σ = 4.5, valeurs qui s’appliquent,

grossièrement, dans le domaine des résonances résolues aux matériaux de structure tels que Fe, Ni, Cret aux actinides tels que Th, U, Pu, respectivement. Remarquons que la distribution est normalisée à

un, exactement pour les spins entiers et pratiquement pour les spins demi-entier ( 128/1 ≈σ−e ).

Page 121: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

121

Figure 19. Distribution de fj pour σ = 3 (correspondant grossièrement auxnoyaux intermédiaires tels que Fe, Ni, Cr) et σ = 4.5 (correspondant grossièrementaux actinides tels que Th, U, Pu). Points : spins entiers, croix : spins demi-entiers

Bien que l’approche des densités de niveaux nucléaires par la théorie des nombres apparaisseégalement prometteuse pour les systèmes de niveaux à particule unique réalistes (non équidistants)(Anzaldo 1995), la plupart des théories actuelles de la densité de niveaux qui contiennentexplicitement les niveaux du modèle en couche, les interactions résiduelles, la déformation, lesmouvements collectifs rotationnels et vibrationnels et la superfluidité de la matière nucléaire à basseénergie d’excitation, sont fondées sur l’approche thermodynamique (entropie maximale) de Bethe.

Un exemple est la formule composite largement employée de la densité des niveaux de Gilbert etCameron (1965). Elle explique de manière heuristique les effets d’appariement des nucléons et lecomportement empiriquement observé des densités de niveaux à proximité de l’état fondamental oùles modes collectifs interdisent un traitement purement statistique des états composés. Elle estconstituée de deux parties, une partie constante en fonction de la température valable aux bassesénergies d’excitation à laquelle se rattache en continuité une partie se comportant comme un gaz defermions (Bethe) valable aux grandes énergies, avec une systématique des paramètres déduites d’ungrand ensemble de données sur la structure nucléaire près de l’état fondamental et de données desrésonances au dessus des énergies de séparation des neutrons ou protons. La densité des niveaux despin J et de parité quelconque est décrite par l’équation (317) avec

Page 122: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

122

( )

( )

≥=

πσ

ω

,U Usi exp4

4exp

3

2

,U Usi 4

4exp

3

2

2x3123

x3123

2

T

UU

Ac

a

aU

aUAc

a

aU

aU

x

x

x

(318)

dont la partie à haute énergie est obtenue en appliquant, d’après Jensen et Luttinger (1952),322 cAm = avec A = Z + N et c = 0.146. L’énergie d’excitation effective,

( ) ( )NPZPEBU −−+= , (319)

est prise comme la somme de l’énergie de liaison B et de l’énergie cinétique E du neutron, corrigéedes énergies P(Z) et P(N) nécessaires pour briser les paires si tous les protons ou tous les neutronssont appariés, c’est-à-dire si le nombre Z de protons ou le nombre N de neutrons est pair. En dessousde l’énergie de raccordement, le facteur de coupure de spin est souvent pris comme une fonctionlinéaire de U, s’annulant à l’état fondamental, de sorte que

( ) ( )( ) ( )

≤++

++≥

=σ,U Usi

NPZPU

NPZPU4A

,U Usi ,4A2

xx

32

x32

2

xaUc

aUc(318)

la formule pour le gaz de fermions de Bethe à haute énergie et celle à température constante à basseénergie doivent se rejoindre en continuité à l’énergie de raccordement Ux. La température T (en unitéd’énergie) découlant de la condition de continuité est donnée par

a

U

cAaU

J

aUT x

xx

1

32min

44

31

+−= ,

=impair pour

pair pour 0

2

1 A

AJ (321)

où le troisième terme est habituellement négligeable. Les valeurs typiques dans le domaine desrésonances résolues sont T ~ 1.4 MeV pour les matériaux de structures tels que Fe, Ni, Cr et T ~ 0.4MeV pour les actinides tels que U et Pu. Gilbert et Cameron donnent les paramètres empiriques a, Ux,P(Z) et P(N) pour un nombre important de noyaux composés, ainsi que des formules analytiques pourleur systématique, par exemple

MeV 150

5.2

+=

AU x , (322)

si bien que les densités de niveaux peuvent être estimées même en l’absence de données de structurenucléaire (schémas de niveaux) pour les niveaux inférieurs ou les données de résonances (sectionsefficaces) au-delà de l’énergie de liaison du neutron. C’est particulièrement important, par exemple, siles sections efficaces de fission doivent être calculées, pour lesquelles on a besoin des densités desétats de transition au point selle de déformation. Celles-ci ne sont pas directement observables, maissont attendues similaires aux densités des états pour la déformation au voisinage de l’état fondamentalet, par conséquent, descriptibles, au moins grossièrement, par la partie constante en fonction de latempérature de la formule composite de densité de niveaux. D’autres exemples sont les noyaux dansdes états métastables ou les radionucléides de courte durée de vie, dont les données sont difficiles àmesurer mais sont nécessaires pour les calculs d’incinération et de transmutation en technologienucléaire ou pour les études de nucléosynthèse en astrophysique.

Page 123: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

123

Comme nous l’avons déjà mentionné, l’Ensemble Gaussien Orthogonal a une distribution desvaleurs propres selon la loi du demi-cercle, et des ensembles plus physiques tels que le modèle encouche avec les interactions résiduelles traitées statistiquement ont des spectres de valeurs propresressemblant à des Gaussiennes. Est-ce en conflit avec l’augmentation quasi exponentielle de la densitéde niveaux dans la formule de Bethe ? La réponse est que la formule de Bethe est valable pour desexcitations modestes, où seul un petit nombre de niveaux à particule unique autour du niveau deFermi est affecté, et que ni la profondeur du potentiel des particules indépendantes ni les états non liésdu continuum n’ont ici d’effets. Toutefois, lorsque l’énergie d’excitation augmente, de plus en plus denucléons sont déplacés de niveaux situés sous le niveau de Fermi vers des niveaux situés au-dessus etmême vers des états du continuum qui ne font plus intervenir seulement le noyau composé. La densitéde niveaux d’un noyau composé donné augmente donc jusqu’à un maximum mais décroît ensuite ànouveau, de manière Gaussienne, du fait de l’augmentation de la compétition des états non liésreprésentant la transmutation et la destruction nucléaires. La formule de Bethe apparaît ainsi commeune approximation de la queue à basse énergie d’une fonction de densité pratiquement Gaussienne(voir Grimes 1980), certainement applicable dans le domaine des résonances non résolues mais pas àdes énergies d’excitation de l’ordre du GeV.

4.1.5 Information provenant des résonances résolues

L’information globale sur les fonctions densité ou les coefficients de transmission peut être obtenueà partir des systématiques du modèle optique. Une information a priori plus spécifique pour un systèmecomposé donné provient toutefois des résonances résolues. Le coefficient de transmission pour une voie

d’entrée sJc α= est relié à la largeur partielle moyenne correspondante par ccc DT Γπ= 2 (nous

intégrons le dénominateur de la correction multi-niveaux de l’équation 283 dans la largeur partielle) maisles largeurs neutroniques observables (« globales ») sont des sommes de largeurs partielles pour toutesles voies compatibles avec les caractéristiques J et Π des niveaux. En négligeant la faible dépendancedes coefficients de transmission en fonction du spin des voies prédite par le modèle optique, on obtientpour la largeur neutronique moyenne

( )EESDJJJ llllυν=Γ eV 1n , (323)

où Jlν est le nombre de spins des voies (1 ou 2) qui peut être combiné avec pour donner J. C’est

essentiellement l’équation (274) que nous employons pour trouver la probabilité Bayesienne descaractéristiques J et (ou plus exactement Π) d’une résonance ayant une valeur de gΓn donnée. Onpeut alors introduire la définition usuelle de la largeur neutronique réduite,

( )EEl

l

υΓ

≡ΓeV 1

nn , (324)

remplacer la moyenne sur l’ensemble par la moyenne sur l’échantillon,

( )∑=λ

λΓ≈ΓN

J gN

g1

nn

1 ll , (325)

multiplier les deux membres par JJg ρ et sommer sur tous les J compatibles avec . Avec

12 +=ν∑ lJ JJg et EN

J J ∆≈ρ∑ , on trouve en fin de compte la formule largement utilisée

Page 124: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

124

pour estimer les fonctions densités neutroniques à partir de toutes les valeurs de l

nΓg trouvées dans

un intervalle d’énergie ∆E,

( )( ) E

g

S

N

∆+

Γ≈

∑=λ

λ

121

n

l

l. (326)

Elle présente l’avantage que ni les spins des résonances ni les densité de niveaux ne doivent être

connus. Seuls les produits l

nΓg sont nécessaires, ce qui est souvent tout ce que nous connaissons pourles plus petites résonances. De plus, l’estimateur est passablement insensible aux niveaux manquantspuisque ceux-ci possèdent de faibles largeurs neutroniques réduites et contribuent peu de ce fait à lasomme, et est de façon similaire insensible aux mauvaises attributions de qui, encore une fois,affectent surtout les petits niveaux.

Le problème des niveaux manquant est crucial si la densité de niveaux doit être calculée. Biensouvent, les petites résonances ne sont pas du tout vues dans les mesures de transmission alors qu’aumoins quelques unes d’entre elles apparaissent dans les données de taux de capture ou de fission. Unsimple comptage des niveaux observés dans certains intervalles d’énergie ∆E est donc rarementsuffisant. Un ajustement sur la distribution de Wigner n’est pas beaucoup plus utile car les niveauxmanquants tendent à déformer la distribution des espacements de niveaux observés. Une meilleuresolution pour estimer la fraction de niveaux manquants consiste à regarder la distribution des largeursneutroniques où seule une portion située sous un seuil de détection est affectée. Sans seuil, nous avonsla distribution complète de Porter et Thomas (277) que nous écrivons maintenant, avec les

abréviations l

nΓ≡ gG , l

nΓ≡Θ g , et 2Jnl

ν≡ , comme

( ) ( ) x

dx

n

xedGnGP

nx

Γ=Θ

, , ∞<Θ

≡< Gnx0 . (327)

Avec la fonction de vraisemblance ( )∏ Θj j nGp , pour un échantillon G1, G2, …GN de largeurs

réduites et avec l’a priori de Jeffreys ΘΘd pour le paramètre d’échelle Θ , on obtient l’a posteriori

( ) ( ) y

dy

nN

yednGGP

nNy

n Γ=ΘΘ

,,...,1 , ,0Θ

≡< GnNy . (328)

où ( ) NGGG N++≡ ...1 est la moyenne sur l’échantillon. Avec cette distribution gamma, il est

facile de calculer les valeurs attendues ( )111 −=− nNy et ( )( )[ ]2112 −−=− nNnNy et donc

les estimations par perte quadratique,

GnN

nN

1−=Θ , (329)

2

1

−=

Θ∆Θ

nN, (330)

avec n = 1/2 pour les largeurs neutroniques à une seule voie ( 0= et I = 0) et n = 1 pour les largeursneutroniques à deux voies ( 1> et I>0). Notons à quel point l’incertitude est importante même pourde grands échantillons-10% pour un échantillon de 204 résonances d’onde s, par exemple.

Page 125: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

125

Le cas d’un seuil de détection donné Gc > 0 peut être traité de manière strictement analogue. Ladistribution d’échantillonnage est cette fois une distribution de Porter et Thomas de G tronquée(distribution gamma de x),

( ) ( ) x

dx

xn

xedGGnGP

c

nx

c ,,,

Γ=Θ

, ∞<Θ

≡<Θ

≡ Gnx

Gnx c

c , (331)

normalisée par la fonction gamma incomplète,

( ) ∫∞

−−=Γcx

nxc dxxexn 1, , (332)

que nous reconnaissons comme la probabilité pour un niveau d’être observable. Elle dépend desparamètres estimés, contrairement à la fonction gamma Γ(n) que nous avions précédemment.L’a posteriori pour l’échantillon G1, G2, …GN est alors

( )( ) y

dy

cyn

ye

ZdnGGP

N

nNy

n,

1,,...,1 Γ

=ΘΘ−

, ,0Θ

≡< GnNy . (333)

où ( )GNGc c≡ , et donc cy = xc. La normalisation est donnée par

( )∫∞ −

Γ=

0 , y

dy

cyn

yeZ

N

nNy

. (334)

Les valeurs attendues nécessaires 1−y et 2−y impliquent des intégrales similaires,

( )∫∞ −−

Γ=

0 ,

1

y

dy

cyn

ye

Zy

N

knNyk , k = 1, 2, (335)

et c’est également vrai pour la fraction attendue de niveaux inobservables (manquants), ( )cyn,1 Γ−avec

( )( )∫

Γ=Γ

01,

1,

y

dy

cyn

ye

Zcyn

N

nNy

, (336)

Les fonctions gamma incomplètes particulières requises pour les largeurs neutroniques (etprotoniques) sont

( ) xc xx erfc ,2

1 π=Γ , (337)

( ) ( )cc xx −=Γ exp,1 . (338)

Ceci montre qu’au moins pour n = 1, c’est-à-dire pour deux spins de voie possibles, les intégralespeuvent être calculées analytiquement : la largeur estimée par perte quadratique est

Page 126: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

126

( )cGGN

NyGN +

−==Θ −

11 , (339)

2

1

−=

Θ∆Θ

N, (340)

tandis que la fraction des niveaux observées est attendue comme étant

( ) ( )N

c

c

GGN

Gcy

+=Γ 1,1 . (341)

Pour n = 1/2 on doit intégrer numériquement, ou utiliser l’approximation de Laplace qui donne lamême estimation de Θ que la méthode du maximum de vraisemblance. Pour une discussion plusgénérale des estimateurs de niveaux manquants, comprenant des seuils inconnus, dépendants del’énergie et diffus ainsi que des multiplets non résolus, voir Fröhner (1983).

4.2 Sections efficaces résonnantes moyennes

Le travail habituel dans le domaine des résonances non résolues consiste à calculer des sectionsefficaces moyennes ou des fonctions de sections efficaces telles que la transmission moyenne, lamoyenne s’effectuant sur un intervalle suffisamment large pour contenir plusieurs résonances maissuffisamment étroit pour que les variations séculaires de la statistique des niveaux et les autres faiblesdépendances en énergie puissent être négligées. Nous pouvons donc simplifier nos équations en

choisissant des conditions limites telles que cc iPL =0 , et en incorporant Pc dans les amplitudes de

décroissance γλc. En outre, nous allons noter la matrice-S S plutôt que U, comme le veut la coutumedans la littérature sur les sections efficaces moyennes. La matrice moyenne de collision est alorsà comparer avec les équations (155-160, 209-210, 284)

( ) ( ) ( )[ ]( ) ,2

,

1

γγ+δ=

+−=

∑µλ

λλµλϕ−ϕ−

−ϕ−ϕ−

baabi

abi

ab

Aie

iieS

ba

ba R1R1

(342)

avec

( ) ( ) ∑ µλλµλλµ− γγ−δ−=

ccciEEA 1 . (343)

4.2.1 Section efficace totale moyenne

Afin d’obtenir la moyenne de la section efficace totale, nous devons déterminer la moyenne deséléments Scc de la matrice de collision sur des intervalles d’énergies, des profils de faisceau ou desfonctions de résolution appropriés. Avec une fonction de pondération Lorentzienne, la chose est aisée

( )( )

( )

( ),’’

1

1 ’

2

1

’’

’22

∫∞

∞−

∞−

+−−

−−π=

+−π=

EiIEEiIEE

dEi

EIEE

IdEE

S

SS

(344)

Page 127: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

127

où 2I est la largeur à mi-hauteur de la Lorentzienne. Du fait de la causalité, la matrice de collision n’apas de pôles au dessus de l’axe réel (voir Lane et Thomas, 1958) et donc si nous fermons le contourpar un grand demi-cercle supérieur (dont la contribution est nulle), il ne contient que le pôle à E + iIde la Lorentzienne, d’où le résidu

( ) ( )iIEE += SS (345)

Comme nous pouvons négliger les faibles dépendances en énergie, nous avons seulement besoinde remplacer R(E) par R(E + iI), avec

( )

( ) .’

abaaba

c

baab

siRiIEED

dE

iIEEiIER

δπ+≈−−

γγ=

−−γγ

=+

∞∞

∞−

λ λ

λλ

∑(346)

Dan la dernière approximation, nous exploitons le fait qu’à cause du signe des γλc, la matrice des

moyennes ba γγ est pratiquement diagonale. En outre, nous avons introduit les définitions d’intensité

de pôle et de paramètre des niveaux éloignés, équations (209)-(210), et négligé la variation del’intensité des pôles autour du pic de la Lorentzienne, exactement comme lors du traitement desniveaux externes (sous-partie 3.4.1). Le résultat final est

( )ccccc Sg Re12 2 −π=σ , (347)

( )( )cc

ccicc

siRi

siRieS c

π+−π++

= ∞

∞ϕ−

1

12 . (348)

La section efficace totale moyenne s’exprime ainsi en fonction de l’intensité du pôle et duparamètre des niveaux éloignés, des quantités qui peuvent être obtenues soit par l’analyse statistiquedes résonances résolues, soit à partir des décalages de phase dans le modèle optique (aprèsspécification d’un rayon de voie).

4.2.2 Sections efficaces partielles moyennes : Formules heuristiques

Contrairement à la section efficace totale, les sections efficaces partielles moyennes

22 ababaaab Sg −δπ=σ , (349)

ne sont pas des fonctions linéaires de S mais leur moyenne doit être calculée à partir de termes

quadratiques tels que cdab SS * . Elles ont des pôles aussi bien au dessus qu’en dessous de l’axe réel ce

qui empêche l’intégration de contour avec une fonction de pondération Lorentzienne. Sous lesconditions habituelles d’ergodicité et de constance d’une bonne statistique – grand nombre derésonances et variation négligeable des distributions des paramètres dans l’intervalle où se calcule lamoyenne – on peut remplacer la moyenne sur l’énergie par une moyenne d’ensemble (c’est-à-dire unevaleur attendue) sur l’EGO, donc sur la distribution conjointe des énergies des niveaux et desamplitudes de décroissance. La moyenne d’ensemble est facilement obtenue dans le cas limite de

Page 128: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

128

résonances très espacées (« isolées ») qui se recouvrent si faiblement que les effets multi-niveaux etles corrélations des valeurs propres peuvent être négligés. En supposant que les largeurs partiellessuivent des distributions de Porter et Thomas généralisées (χ2), on obtient dans l’approximationSLBW à niveaux multiples

∫ ∏∞ ν−δ−δ−

ν

+

δ

ν+π+δσ=σ

0

2

2,

21

21

c c

cab

a

baaaabapab

cbcac

xT

Tdx

T

TTg (350)

(Dresner 1957, Lane et Lynn 1957), où σp,a est la section efficace de diffusion potentielle,2

1 ccc ST −≡ est le coefficient de transmission pour la voie c, ∑≡c cTT , et νc le degré de liberté

pour les largeurs partielles 22 cc λλ γ=Γ (gardons en mémoire que Pc est inclus dans 2cλγ ).

L’approximation ccc DT Γπ≈ 2 , valable pour de très faibles recouvrements entre niveaux, a été

utilisée pour écrire le résultat en fonction de Tc. C’est la formule de Hauser-Feshbach avecrenforcement élastique (premières parenthèses) et correction des fluctuations des largeurs(l’intégrale), voir Moldauer (1975). Nous rappelons que νc = 1 pour des voies simples mais que, dansles applications pratiques, on utilise souvent des voies groupées, avec un cν effectif différent de un,

afin de représenter par exemple toutes les voies de fission ou de capture ou toutes les voies departicules ayant le même moment angulaire total et la même parité et qui font ainsi intervenir lesmêmes niveaux du noyau composé. Le nombre de voies photon est d’ordinaire si important (sauf pourles noyaux légers ou magiques) qu’il est possible de considérer

TTx

c c

c exT

Tx

T

Tc

γ

γ

γ

−ν−

γ

γ

∞→νγ∈

ν−

=

ν

+≈

ν

+∏22

21lim

21 , (351)

où ∑ γ∈γ ≡c cTT . Les nombreuses voies photon peuvent ainsi être représentées approximativement

par un facteur exponentiel dans l’intégrale (« facteur de Dresner ») de l’équation (331). Lagénéralisation de la formule de Hauser-Fesbach à des recouvrements quelconques entre les niveauxs’avère être extrêmement difficile. Bien entendu, on pourrait toujours avoir recours à l’échantillonagedes espacements de niveaux et des amplitudes de décroissance par calculs Monte Carlo à partir deleurs distributions de probabilité, avec des calculs de sections efficaces ponctuelles et de moyennesqui suivraient. La section efficace moyenne désirée est ainsi obtenue, bien qu’avec l’incertitudestatistique et avec le manque de transparence analytique typique des méthodes Monte Carlo. À partirde telles études numériques par Monte Carlo, deux formules analytiques importantes d’un point devue pratique furent déduites de manière heuristique, par essai et erreur et avec des hypothèsespertinentes.

La première formule, due à Moldauer (1980), consiste à étendre l’utilisation de la formule deHauser-Feshbach, strictement valable que pour les faibles recouvrements entre niveaux, aux fortsrecouvrements, mais avec σp,a interprétée comme section efficace « directe » ou « de formeélastique »,

22, 1 aaaaap Sg −π=σ , (352)

et avec l’expression exacte pour les coefficients de transmission de voie de particule,

Page 129: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

129

21

4

aa

aa

Ri

sT

π= . (353)

De plus, les νc sont considérés comme dépendant de Tc. La dépendance est choisie de façon àajuster un grand ensemble de résultats par Monte Carlo tout en donnant la limite correcte pour lespetits recouvrements entre niveaux (petits coefficients de transmission). La recommandationheuristique de Moldauer est

( )[ ] cT

cc eT ν−+=ν − 228.0218.1 78.078.1 . (354)

La deuxième prescription importante pratiquement est due à Hofmann, Richert, Tepel etWeidenmüller (1975) qui, en conservant l’esprit du modèle original du noyau composé de Bohr (pasde mémoire de la formation du noyau composé), considérèrent les sections efficaces partiellesfactorisables,

( )[ ]ababa

aaabapab V

VVg δ−ω+π+δσ=σ 112

, , (355)

avec ∑≡c cVV . Les facteurs de renforcement élastique ωc sont attendus comme valant à peu près

3 pour des recouvrements nuls et 2 pour des forts recouvrements entre les niveaux (Satchler 1963).Les auteurs trouvèrent leurs résultats par Monte Carlo reproduits de manière adéquate par

2

5.13.0

12

1

21

−+

++=ω + nT

T

Ta

TTa

aa

, (356)

où n est le nombre de voies ouvertes. Avec ces valeurs heuristiques de ωa, on peut calculer les Va àpartir de

( ) VV

TV

aa

aa 11 −ω+

= . (357)

par itération, en commençant avec Vc = Tc. La dernière équation provient de l’unitarité de S.

Les deux prescriptions mènent à des résultats similaires pour les absorptions intermédiaires etfortes (recouvrements moyens et importants entre les niveaux). La formule de Moldauer est commodepour les voies groupées et, par construction, elle donne la limite correcte pour les recouvrements nulset pour les petits nombres de voies (non photoniques) à basse énergie où l’approximation parfactorisation n’est pas applicable. D’autres expressions analytiques approchées furent obtenus à partirde modèles de haie (par exemple Janeva et al. 1985) et de modèles de haie désordonnés (Müller etHarney 1987).

4.2.3 Sections efficaces partielles moyennes : moyenne exacte sur l’EGO

Des dizaines d’années durant, toutes les tentatives pour résoudre le problème deHauser-Feshbach échouèrent. Dans cette situation, le principe d’entropie maximale de l’informationthéorique semblait offrir la possibilité de contourner tous les détails « microscopiques » desrésonances en les traitant comme un sorte de bruit superposé au comportement moyen

Page 130: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

130

« macroscopique » décrit par le modèle optique. Les distributions de probabilité des éléments dematrice-S et-R furent obtenue par la maximisation de l’entropie avec des contraintes imposées par des

moyennes S et R données (modèle optique) (Mello 1979, Mello et al. 1985, Fröhner 1986) quioffrait en principe la possibilité d’obtenir les expressions moyennes des sections efficaces sur cesdistributions plutôt que sur l’EGO. En pratique, pour de nombreuses voies, cela semblait toujours trèsdifficile.

Seulement quelques mois après que les distributions d’entropie maximale des matrices-S et –Rfurent publiées, Verbaarschot, Weidenmüller et Zirnbauer (1985) présentèrent une solution directe auproblème de Hauser-Feshbach pour trouver une expression analytique des sections efficaces partiellesmoyennes, c’est-à-dire pour calculer analytiquement la moyenne sur les distributions de paramètres derésonance de l’EGO, avec des coefficients de transmission connus. Ces auteurs partirent d’uneexpression faisant intervenir un hamiltonien de l’EGO couplé avec les voies. Avec nos notations celase traduit par

2

,

2 ~~∑µλ

µλµλ γγ+δ= baabab AiS , (358)

( ) ∑ µλµλµλµλµ− γγ−δ−=

cciEH ~~1A , (359)

qui est une généralisation de ce que donnent les équations (158)-(160) pour 2

abS . Le tilde indique

que l’hamiltonien est sous sa forme générale, non diagonale, si bien que λµH et aλγ~ remplacent

λµλ δE et aλγ dans l’équation (160). Avec une formidable démonstration de talent d’analyse, les

auteurs réussirent, à l’aide de nouveaux outils venant des systèmes désordonnés de la théorie à

plusieurs corps, à réduire la moyenne d’ensemble (valeur attendue) de 2

abS sur l’EGO à une

intégrale triple. En utilisant complètement les propriétés symétriques de l’EGO, d’une fonctiongénératrice impliquant à la fois des variables commutables et anti-commutables (grassmannienne), destransformations de Hubbard-Stratonovitch pour simplifier les intégrations, puis en passant au caslimite d’un nombre infini de niveaux ( ∞→n pour le rang de H) par la méthode de la plus grandepente, ils aboutirent sur l’impressionnante expression à trois intégrales

( )( ) ( )( ) ( )

( )

( )

( )( )( )

( )( )( )

( )( )( )

λ−λ−λ−λ+

λ+λ+λ+λ+

λ+λ+λ+λ

δ++

λ−

λ+λ+

λ+λ+

λ−δ

λ+λ+λ−

×

λ+λλ+λλ+λλ+λ

λ−λλ−λλλλ+=

∫∫∫∞∞

ba

babaab

aaaaab

c cc

c

baabab

TT

TTTT

TTTT

TT

T

dddTT

SS

11

12

11

1

11

1

1

1

2

111

11

1

11

1

8

22

22

11

11

2

2

2

1

1

21

1

02

22

12211

21

0

2

0

1

22

(360)

pour le carré de la valeur absolue de l’élément de la matrice de collision qui pose problème avec sespôles situés en dessous et au dessus de l’axe réel dans le plan d’énergie complexe. Le produit des

Page 131: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

131

voies permet un traitement similaire à la formule de Hauser-Feshbach pour les nombreuses voies dephotons faiblement absorbantes :

( ) ∏∏γ∉

λ+λ+λ−

λ+λ+λ−

≈λ+λ+

λ− γ

c cc

cT

c cc

c

TT

Te

TT

T

21

22

21 11

1

11

121 , (361)

avec ∑ γ∈γ ≡c cTT comme dans l’équation (351).

Verbaarshot (1986) vérifia que pour la limite de faibles recouvrements entre niveaux, la tripleintégrale sur l’EGO (360) se ramène à la formule de Hauser-Feshbach (350) avec renforcementélastique et correction des fluctuations des largeurs. Ainsi, la triple intégrale sur l’EGO est la solutionrigoureuse, longtemps recherchée, au problème de Hauser-Feshbach, éliminant toutes les incertitudesassociées au modèle de haie ou aux formules analytiques heuristiques inférées à partir des résultatsobtenus par méthode Monte Carlo. Ces incertitudes ont toujours été gênantes car les corrections desfluctuations des largeurs sont souvent assez importantes (voir par exemple Lynn 1968, Gruppelaar etReffo 1977). Un point important est que, au dessus de quelques eV, les sections efficaces moyennessont pratiquement indépendantes de la température : les moyennes sur l’énergie font essentiellementintervenir les sommes sur les aires des pics, et puisque celles-ci sont invariantes par élargissementDoppler (dans les formalismes de Kapur-Peierls, Adler-Adler, MLBW et SLBW nous avons

∫ λλ Γπ=ψ 2 dE et ∫ =χλ 0 dE , indépendamment de la température, voir annexe B), il en va de

même pour les sections efficaces moyennes. Ainsi, la triple intégrale sur l’EGO, valable pour desrésonances non élargies, donne également des moyennes correctes pour des résonances élargies pareffet Doppler.

4.2.4 Analyse de données moyennes

Les figures 20 à 22 montrent des données de section efficace totale, de capture et de diffusionélastique moyennes pour 238U et des courbes théoriques ajustées simultanément sur toutes cesdonnées. L’ajustement a été réalisé par moindres carrés sur les paramètres de résonance moyens, àsavoir les fonctions densités neutroniques pour les ondes s, p, d et f (qui sont essentiellement lescoefficients de transmission dans le cas des voies neutroniques) et les largeurs radiatives pondéréespar l’espacement moyen (coefficients de transmission pour les voies groupées photoniques) avec lecode FITACS (Fröhner et al. 1982). Les principales dépendances en énergie sont introduites, pour leslargeurs neutroniques, par le facteur de pénétration de la barrière centrifuge Pc et par l’emploi de laformule composite de Gilbert et Cameron (1965) de la densité de niveaux, alors que les fonctionsdensités et les largeurs radiatives ne varient que faiblement dans l’intervalle d’énergie considéré. Lasection efficace totale a été calculée avec les équations (347)-(348), les sections efficaces partiellesavec la formule de Hauser-Feshbach sous la forme proposée par Moldauer (1980), équations(350)-(354), et contrôlée par la triple intégrale sur l’EGO, équations (360) et (361). Des ajustementssimilaires sur bien plus de données de 238U définirent en fin de compte une nouvelle évaluation de238U dans le domaine des résonances non résolues qui fut adoptée dans les librairies de donnéesévaluées JEF-2 et ENDF/B-VI (Fröhner 1989). Les paramètres de résonances moyens ajustés sontparfaitement en accord avec les paramètres des résonances résolues déterminés à basse énergie, etégalement avec les calculs du modèle optique à plus haute énergie, jusqu’à 10 MeV. L’estimation del’erreur venant des ajustements par moindres carrés indique que, après des décennies d’efforts àl’échelle mondiale, les sections efficaces totales et de capture de 238U dans le domaine des résonancesrésolues sont finalement connues avec à peu près la précision requise pour les applications en

Page 132: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

132

technologie nucléaire (1-3%). Pour les diffusions inélastiques, ce but n’est pas encore atteint, lesincertitudes étant encore de l’ordre de 5-15%.

Figure 20. Ajustement simultané de Hauser-Feshbach sur les donnéesneutroniques de 238U dans le domaine des résonances non-résolues :

section efficace totale (pour les références, voir Fröhner 1989)

Figure 21. justement simultané de Hauser-Feshbach sur les données neutroniquesde 238U dans le domaine des résonances non-résolues : section efficace de capture(pour les références, voir Fröhner 1989). La discontinuité (pointe de Wigner) à

45 keV est due au démarrage de la diffusion inélastique à cette énergie. Les seuilsinélastiques sont indiqués par les caractéristiques spin-parité des niveaux résiduels

Page 133: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

133

Figure 22. Ajustement simultané de Hauser-Feshbach sur les données neutroniques de238U dans le domaine des résonances non-résolues : section efficace de diffusioninélastique (pour les références, voir Fröhner 1989). Les seuils inélastiques sont

indiqués par les caractéristiques spin-parité des niveaux résiduels

Avoir des sections efficaces moyennes précises n’est toutefois qu’une partie de l’histoire. L’autrepartie concerne la structure résonnante, c’est-à-dire les fluctuations dues aux résonances autour descourbes de sections efficaces moyennes. Elles sont implicitement données par le modèle statistiquedes niveaux, en particulier par les distributions EGO des espacements de niveaux et des largeurspartielles en même temps que la valeur moyenne paramétrisant ces distributions. La présence destructures résonnantes non résolues se manifeste dans les effets liés à l’épaisseur de l’échantillon etd’auto-protection. Comme exemple le plus simple, considérons la relation entre la transmission

moyenne d’une couche de matière d’épaisseur n (atomes/barn) et la section efficace moyenne σ ,

( )

+−σ+== σ−σ−σ−σ−σ− ...var

21

2neeee nnnn . (362)

Les dernières parenthèses représentent une correction pour les effets des résonances, contenant lavariance de la section efficace (moyenne du carré des fluctuations) et des moments plus élevés de ladistribution de la section efficace qui quantifient la structure résonnante. Pour la section efficacemoyenne, on obtient

+−σ++=σ σ− ...var

21ln

1ln

1 2n

ne

nn . (363)

Souvent, le premier terme du membre de droite est présenté par les expérimentateurs commeétant la section efficace totale, mais la véritable moyenne apparaît être toujours supérieure. Alors quela correction est faible pour les données résolues, elle devient importante pour les données moyennes.

Page 134: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

134

Il est dangereux de calculer la transmission d’un écran à partir des sections efficace moyennes, parexemple les sections efficaces multigroupes pour une dilution infinie, sans la correction pour lesfluctuations de la section efficace. La correction est importante pour des échantillons épais et pour dessections efficaces très fluctuantes comme celles dans le domaine des résonances non résolues. Desmesures de transmission d’échantillons épais peuvent par conséquent fournir une information sur lastructure résonnante. Si nous voulons comparer les expériences avec les calculs, nous devonstoutefois calculer la moyenne de la transmission sur les résonances. À la vue de l’expérience sur lecalcul de la moyenne dans l’EGO des sections efficaces partielles, nous nous attendons à desproblèmes encore plus graves pour la transmission moyenne. La difficulté d’avoir affaire à dessections efficaces élargies par effet Doppler rend la difficulté insurmontable tant qu’une solutionanalytique est envisagée.

Seule la variance de la section efficace peut être calculée théoriquement dans le cas oùl’élargissement Doppler n’est pas trop important (comme pour les noyaux légers et les matériaux destructures tels que le fer ou le nickel). En calculant la moyenne avec une fonction de pondérationLorentzienne et en utilisant la causalité, comme dans la dérivation de l’expression de la section

efficace, on trouve cccc SS =2 et

( )∑ σ−σπ=σc

cccg nonCN22var , (364)

où ( )22CN 1 cccc Sg −π=σ est la section efficace habituelle de formation du noyau composé dans le

modèle optique et ( )22non 1 cccc Sg −π=σ la section efficace moyenne non élastique de la

théorie de Hauser-Feshbach qui doit être calculée à partir des coefficients de transmission du modèleoptique, soit dans l’approximation SLBW à plusieurs niveaux, équation (350), soit plusrigoureusement avec la triple intégrale sur l’EGO, équation (360). La Figure 23 montre lesfluctuations quadratiques moyennes relatives calculées de cette manière pour 56Fe ainsi que lesvaleurs obtenues directement de récentes données de transmission à haute résolution. L’accord estraisonnable si l’on tient compte du fait que l’équation (364) n’est exacte que pour des réactionspurement par noyau composé et pour des élargissements par effet de Doppler ou par résolutionnégligeables, chacun d’eux tendant à réduire les fluctuations dues aux résonances.

Page 135: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

135

Figure 23. Fluctuations quadratiques moyennes relatives de la section efficace totale du fer( σ=σ∆ var ). Ligne continue : calcul avec l’équation (364). Ligne en tirets : calcul avec lesprocessus non élastiques négligés. Cercles vides : valeurs obtenues directement de donnéesprises avec une très haute résolution (Berthold et al. 1994). D’après Fröhner (1994)

Alors que les expressions analytiques générales pour des fonctions de sections efficacesmoyennes ne sont pas disponibles, il est parfaitement possible de les calculer par des méthodes deMonte Carlo. Un exemple est montré sur la figure 24, où des données de transmission d’unéchantillon épais mesurées à température ambiante sont comparées avec les courbes calculées parMonte Carlo. Des « échelles » de résonances furent définies en échantillonnant les espacements entrerésonances à partir des distributions de Wigner et les largeurs partielles à partir des distributions dePorter et Thomas, avec des paramètres de résonance moyens pris dans l’évaluation JEF-2. La sectionefficace totale correspondante a été calculée, élargie par effet Doppler, mise sous forme exponentielleet sa valeur moyenne a été prise. De cette façon 100 000 valeurs de transmission ont étééchantillonnées et leur moyenne a été calculée pour chaque donnée ponctuelle, si bien que l’erreurstatistique des résultats par Monte Carlo est négligeable comparée à l’incertitude sur les données. Lebon accord entre l’expérience et le calcul dans la figure 24 indique que l’évaluation JEF-2 décrit biennon seulement la section efficace totale (voir figure 20) mais également sa structure résonnante, parexemple le rapport des sections efficaces résonnantes (réactions par noyau composé) sur celles dediffusion potentielle (réactions directes), et les « fenêtres ».

Page 136: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

136

Figure 24. Données de transmission d’un échantillon épais de Bokhovko et al.(1988) (points) et courbes générées avec les techniques de Monte Carlo à partirdes paramètres de résonance moyens de JEF-2 (lignes continues). Les courbes

de transmission obtenues sans correction de structure résonnante sontégalement représentées (lignes en tirets). D’après Fröhner (1991)

Plus d’informations sur la structure des sections efficaces sont obtenues des mesuresd’auto-indication. Celles-ci diffèrent des mesures de transmission seulement par le fait que ledétecteur mesurant la fraction transmise des neutrons du faisceau est un échantillon mince(« émetteur »), constitué de la même matière que l’échantillon épais (« filtre ») de transmission, etregardé par des détecteurs de rayonnements gamma. Des expériences « avec filtre » et « sans filtre »,on obtient le taux d’auto-indication

( )

−+

σσσ

−=σ

σ

γ

γσ−

γ

γσ−

...,cov

1 nee

n

n

(365)

qui fait intervenir la covariance entre la structure des sections efficaces totales et de capture,

( ) ( )( ) γγγγγ σσ−σσ=σ−σσ−σ≡σσ,cov . (366)

(Pour une covariance positive, les deux arguments tendent à varier dans le même sens – si l’unaugmente, l’autre va également vraisemblablement augmenter – pour une covariance négative, ilstendent à varier dans des sens opposés). En pratique, les émetteurs ne sont pas idéalement fins, si bienque la section efficace de capture σγ doit être remplacée par le taux de capture yγ qui tient compte del’auto-protection et des captures après collisions multiples. Les deux effets nécessitent des techniquesde Monte Carlo, on doit, en plus de l’échantillonnage d’échelle, simuler maintenant des événementsde collisions multiples dans l’émetteur (pour plus de détails voir Fröhner 1989a). La figure 25 montreque les données mesurées et les résultats par Monte Carlo sont à nouveau en bon accord, indiquantque la structure de la section efficace de capture est également correctement représentée par lesparamètres de résonance moyens de l’évaluation JEF-2.

Page 137: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

137

Figure 25. Rapports d’auto-indication mesurés par Bokhovko et al. (1988)(points) et courbes générées avec les techniques de Monte Carlo à partir desparamètres de résonance moyens de JEF-2 (lignes continues). Les rapports

obtenus sans tenir compte de l’auto-protection des résonances et des diffusionsmultiples sont également représentés (lignes en tirets). D’après Fröhner (1991)

4.3 Constantes de groupes

Nous avons vu que pour une section efficace totale moyenne donnée, la transmission moyenne(dans un intervalle d’énergie fini contenant un grand nombre de résonances) d’un échantillon épais estplus grande si la section efficace fluctue que si elle est lisse (voir équation 362). Cela signifie quel’échantillon devient moins transparent à mesure que la température augmente, dû à l’effet lissant del’élargissement Doppler. (L’expansion thermique de l’échantillon contrecarrant cet effet dans unecertaine mesure). Dans une région du réacteur remplie d’un mélange d’éléments, une augmentation dela température fait que les réactions (n,x), par exemple les réactions (n,γ) dans 238U, deviennent plusprobables car le creusement du flux au niveau des résonances (cf. Figure 9) devient plus faible àmesure que la structure résonnante est lissée. Afin de calculer ces effets complexes, il est plus simpled’utiliser des constantes multigroupes, c’est-à-dire des sections efficaces moyennes judicieusementchoisies. Le taux de réaction (n,x) pour un noyau donné, dont la moyenne est calculée sur la région etsur un intervalle d’énergie fini (de groupe) ∆E, peut être écrit comme

ϕσ=ϕσ xxx f avec ... ... ∫∆ ∆≡

E E

dE(367)

Les bornes des groupes sont généralement prises équidistantes sur une échelle d’énergielogarithmique, c’est à dire une échelle linéaire en léthargie, si bien qu’il y a toujours le même nombrede groupes par décade d’énergie. La section efficace σx est considérée élargie par effet Doppler.

Puisque xσ ne dépend pas de la température (à part les effets de bords aux extrémités des groupes

qui deviennent négligeables si l’intervalle de groupe contient beaucoup de résonances), la principale

Page 138: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

138

dépendance en énergie, pour un flux donné, est contenue dans ce qu’on appelle le facteurd’auto-protection ou de Bondarenko fx.

4.3.1 Facteurs de Bondarenko

Le facteur d’auto-protection dépend non seulement de la température mais aussi des sectionsefficaces de tous les autres noyaux du mélange, ce qu’on appelle la dilution. Les données contenuesdans les jeux de constantes de groupe pour les applications technologiques sont (cf. par exempleBondarenko et al. 1964)

• Les sections efficaces pour une dilution infinie xσ ,

• Les facteurs d’auto-protectionx

xxf

σϕϕσ

= ,

classées pour chaque noyau sur une grille de températures et de sections efficaces de dilution σd, parexemple

T = 300, 900, 1 500, 3 100 K,σd = 0, 1, 10, 100, 1 000, 10 000, 100 000, 1 000 000 b.

La section efficace de groupe auto-protégée

xxx f σ≡σ (368)

est définie afin que la multiplication avec le flux moyen ϕ sur le groupe donne le taux de réactioncorrect. Avec la définition de la covariance, on peut écrire

σσ

ϕϕ+=

x

xxf ,cov1 (369)

Le flux étant faible lorsque la section efficace est grande, les deux grandeurs sont anticorrellées,la covariance est négative, et donc fx<1. D’un autre côté, fx doit être positive car autrement le taux deréaction moyen deviendrait négatif. Il s’ensuit (au moins dans le cas d’un grand nombre de niveauxcompris dans l’intervalle de groupe) qu’on a 0<fx<1. Nous pouvons être plus explicite en invoquantl’approximation de résonance étroite, valable dans le cas important où les résonances sont étroitescomparativement à l’énergie moyenne perdue par les neutrons diffusés. Avec cette approximation, leflux est proportionnel à l’inverse de la section efficace totale macroscopique, ( )dσ+σ∝ϕ 1 , où

∑ σ=σx x est la section efficace totale du noyau considéré. Nous avons donc dans le cadre de

l’approximation de résonance étroite

( )( ) ∫

∫∞ σ−σ−

∞ σ−σ− σσ=

σ+σσσ+σσ

=

0

0

1 nn

xxnn

dx

dxx

eedn

eednf

d

d

, (370)

Page 139: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

139

Puisque σd est une constante dans le modèle de Bondarenko, on remarque que 1→xf si

∞→T (section efficace totale lisse) ou ∞→σd (dilution infinie). C’est pourquoi xσ est

appelée section efficace de groupe en dilution infinie (ou section efficace de groupe non protégée).Pour les groupes contenant de nombreuses résonances, c’est la section efficace moyenne au senshabituel. La dernière expression montre de quelle façon les facteurs d’auto-protection sont reliés auxrapports d’auto-indication, équation (365) et aux transmissions moyennes, équation (362). Si cesdernières quantités peuvent être prédites précisément pour les échantillons épais, le facteurd’auto-protection peut également l’être. Avec les résultats présentés sur les figures 15 et 16, et du faitde la corrélation positive entre le numérateur et le dénominateur dans la dernière équation, on enconclut que les facteurs d’auto-protection pour le domaine des résonances non résolues de 238Upeuvent être calculés avec une précision de 1-2% à partir des paramètres de résonance moyens deJEF-2.

4.3.2 Méthodes analytiques et de Monte Carlo pour la génération de constantes de groupe

La technique de génération des constantes de groupe la plus importante pratiquement est laméthode analytique (Fröhlich 1965, Hwang 1965). Les moyennes dans la dernière expression sontcalculées en se fondant sur la statistiques des niveaux dans l’approximation des résonances étroites.La version la plus simple comprend les approximations supplémentaires suivantes :

• Les sections efficaces sont écrites sous forme de sommes de termes SLBW (approximationde Breit et Wigner à « plusieurs niveaux »).

• L’élargissement Doppler est décrit par les profils de Voigt symétriques et asymétriques ψet χ.

• L’interférence entre les diffusions résonnante et potentielle (termes avec χ) est négligée.

• Les moyennes de la statistique des niveaux sont calculées pour chaque séquence de niveauxavec les autres séquences représentées approximativement par une section efficace lisseincluse dans σd.

Le résultat peut s’écrire sous la forme

( ) ∑∑ ϕΓ

Γ−σ+σ=σ=σ

s ss

sx

s s

sdpxxx D

J

D

Jf

2cos1

1

, (371)

où σp est la section efficace de diffusion potentielle du noyau considéré, s

... réfère à une moyenne

sur toutes les largeurs partielles pour la séquence du s-ème niveau, les sommations se font sur toutesles séquences, et J est l’intégrale

( ) ( )( )∫

κ+βψβψ≡βκ

0 ,

,,

x

xdxJ , (372)

introduite par Dresner (1960). Elle fait intervenir les profils symétriques de Voigt (comparerl’équation 244 et l’annexe B)

Page 140: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

140

( ) ∫∞

∞− +

β−−

πβ=βψ

2

2

1exp

1,

y

dyyxx , (373)

où Γ∆≡β 2 est la largeur Doppler avec comme unité la demi-largeur à mi-hauteur, Γ/2, et

( ) Γ−≡ 02 EEx est la distance par rapport au pic de la résonance à E0 avec la même unité. En

outre,

σ+σ

=κˆ

rd , (374) ϕΓΓ

π=σ 2cos4ˆ 2 ng , (375)

avec r décrivant approximativement la répulsion des valeurs propres. C’est la méthode la plus rapideexistante pour la génération de constante de groupe. Elle est employée dans de nombreux codesd’utilisation répandue, tels que ETOX (Schenter et al. 1969), MIGROS (Broeders et Krieg 1977),NJOY (MacFarlane et al. 1982), et GRUCON (Sinitsa 1983).

La méthode du ralentissement utilise des mailles de résonances échantillonnées par Monte Carlode sorte que le calcul des taux de réaction moyens peut se réduire au cas des résonances résolues. Lecode TIMS (Takano et al.) en est un exemple. Les mailles de résonances échantillonnées par MonteCarlo sont également utilisées dans les méthodes de sous-groupes/multibandes dont Nikolaiev et al.(1970) et Cullen (1974) furent les pionniers (voir également Ribon et Maillard 1986). On classe, pourchacun des quelques (par exemple 4) sous-groupes/bandes, les poids αi et les moyennes sur les bandesσi, σxi représentant de manière grossière la distribution des sections efficaces dans le groupe enénergie. Ils doivent être déterminés en ajustant les moyennes obtenues à partir des sections efficacesdans les groupes de la manière suivante

∑ σα=σi

xiix , (376) ∑ σα=σi

ii , (377)

∑ σ+σσα

=σ+σ

σi di

xii

d

x , (378) ∑ σ+σα

=σ+σ i di

i

d

1. (379)

La méthode des sous-groupes/multibandes est essentiellement une variante grossière maisefficace de la méthode des tables de probabilité (Levitt 1972) où l’on génère, à partir des mailles derésonances échantillonnées, la densité complète de probabilité à plusieurs variables

( ) ( ) ( ) ( )...,,...,, nnn σσσσσσ=σσσ γγ pppp . (380)

La distribution de la section efficace totale, p(σ), est enregistrée avec les probabilités

conditionnelles ( ) ( )nn , , σσσσσ γpp etc. sous une forme discrète judicieuse, de manière à ce que ce

soient les sections efficaces macroscopiques (pondérées par l’abondance isotopique, élargies par effetDoppler), plutôt que les paramètres de résonance, qui puissent être directement échantillonnées.

Page 141: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

141

5. CONCLUSIONS

La première partie de cette vue générale est dédiée aux outils probabilistes des évaluateurs dedonnées, avec l’objectif de faire prendre conscience aux lecteurs à quel point la théorie moderne desprobabilités a fait avancer et simplifier le traitement des incertitudes des données, en particulier parrapport à l’utilisation de la connaissance a priori, à l’attribution de probabilités représentant uneinformation vague ou globale, et au traitement des erreurs systématiques et des corrélations qu’ellesinduisent – des domaines où la stastique conventionnelle n’apporte pas grand-chose. Le principeBayésien, consistant à apprendre à partir des observations, est illustré à l’aide d’applications typiquesde statistiques de comptage, d’évaluation de données et d’ajustement par des modèles. L’estimationde paramètre Bayesienne ne laisse aucune place pour des suppositions à propos des « estimateurs » etde leurs propriétés plus ou moins désirables (absence de biais, suffisance, efficacité, admissibilité,etc.), une fois que l’a priori, le modèle statistique et la fonction de perte sont spécifiés. L’estimationoptimale par perte quadratique consiste en la valeur moyenne et le carré de l’erreur quadratiquemoyenne (a posteriori) (ou pour des problèmes à plusieurs variables, le vecteur de moyenne et lamatrice de covariance) plutôt que les modes ou médianes et les intervalles de confiance fréquencistes.La méthode des moindres carrés apparaît comme une conséquence naturelle du principe du maximumd’entropie de l’information théorique dans les cas pratiques les plus importants, où ce que nous avonsen entrée sont des données avec des erreurs types (erreurs quadratiques moyennes) et, peut être, descorrélations. La généralisation à des modèles non linéaires est directe. Il y a eu également quelquesprogrès par rapport aux données incompatibles mais il est toujours nécessaire d’approfondir ce point.Le format ENDF utilisé mondialement pour les données évaluées de réactions nucléaires n’est pasencore satisfaisant pour l’enregistrement de l’information incertitude. L’enregistrement, plus évidentintuitivement, des erreurs types et des coefficients de corrélation plutôt que des variances etcovariances, difficiles à utiliser et sources d’erreurs, devrait être admise et encouragée.

Le reste de l’ouvrage est dédié spécifiquement à l’évaluation des données dans le domaine desrésonances résolues et non résolues. Les relations intimes entre la théorie de la matrice-R, le modèlestatistique des réactions résonnantes, la théorie de Hauser-Feshbach avec corrections des fluctuationsdes largeurs et le modèle optique sont expliquées. L’élargissement Doppler est traité de manière assezdétaillée pour le cas important des formalismes pratiques des résonances et pour les sections efficacestabulées. Des effets expérimentaux tels qu’élargissement par la résolution expérimentale, auto-protection et diffusions multiples, bruit de fond et impuretés sont également discutées. L’exposéentier est bref par nécessité, mais il est espéré que suffisamment de matière et de références sontprésentées pour offrir aux nouveaux venus et non spécialistes un point de départ adéquat pour desétudes plus poussées et un travail de spécialiste. Il y a un besoin considérable, plus particulièrementdans le domaine des résonances non résolues, de développement de méthodes et de programmes aussibien pour les réacteurs à fission qu’à fusion. L’estimation des niveaux manquants est toujoursessentiellement basée sur l’approximation du maximum de vraisemblance telle que décrite parFröhner (1983). Une approche Bayesienne plus rigoureuse semble faisable et utile, mais doit êtremenée à bien. Ceux qui sont particulièrement intéressés par l’analyse et l’évaluation des résonancesou dans un traitement rigoureux par la matrice-R du modèle optique sphérique trouverons desinformations supplémentaires dans les comptes rendus de l’ITCP 1988 (Fröhner 1989a). Les

Page 142: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

142

méthodes et procédures d’évaluation des données nucléaires ont également été discutées de manièretrès approfondies, en insistant sur l’expérience pratique, par Poenitz (1981) et Bhat (1981).

Remerciements

J’adresse mes plus sincères remerciements à P. Finck (maintenant à l’ANL) qui m’invita àCadarache, à J. Jacqmin (CEA Cadarache) et C. Nordborg (NEADB) qui organisèrent une visite dequatre mois, à P. Bioux (EDF) qui m’empressa d’écrire ce papier, et à O. Bouland et E. Fort ainsiqu’aux autres collègues qui rendirent ma visite à Cadarache scientifiquement utile, gratifiante etgénéralement agréable.

Page 143: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

143

Annexe A

Distributions de probabilités d’importance pratique

Dans cette annexe, nous passons rapidement en revue les distributions de probabilité qui sont lesplus importantes dans l’évaluation et l’analyse des données nucléaires, avec leurs estimations deparamètres par perte quadratique (moyennes et variances). Les notations sont les suivantes :

( )IAP probabilité de A connaissant l’information I

( )dxIxp probabilité infinitésimale de x dans dx sachant I, avec la densité de probabilité

( )Ixp .

Distributions à une seule variable

x moyenne (valeur attendue)

( ) 222var xxxxx −=−≡ variance (carré de l’erreur quadratique moyenne)

xx var≡∆ écart type (erreur quadratique moyenne ou erreur type)

Distributions à plusieurs variables

x vecteur de moyenne

( ) ∏ν ν= dxd x élément de volume dans l’espace des x

( )( )TxxxxC −−≡ matrice de covariance

νµνµµν ∆ρ∆= xxC élément de la matrice de covariance

νµµν ρ=ρ coefficient de corrélation

( 1 ,11 =ρ+≤ρ≤− ννµν )

Page 144: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

144

Le T indique la transposée (conjugaison hermitique des vecteurs et matrices réels). Les valeurs

attendues sont notées par des parenthèses angulaires, x , les moyennes sur l’échantillon par une

barre, x .

A.1 Distributions binomiale et bêta

Applications :

Schéma de Bernouilli avec deux solutions possibles (réussite ou échec, parité positive ounégative, niveau de fermion occupé ou non, …).

Distribution d’échantillonnage (probabilité de succès, en une tentative) :

( ) θ=θ,11P . (A1)

Fonction de vraisemblance pour s succès en n tentatives (distribution binomiale) :

( ) ( ) sns

s

nnsP −θ−θ

=θ 1, 1,...2,1,0 ≥= ns . (A2)

Cas 1 :

Ignorance totale à propos du paramètre θ, admettant même la possibilité qu’il n’y ait qu’uneseule alternative, θ = 0 ou 1.

A priori le moins informatif (théorie des groupes) (règle de Haldane, voir Jaynes 1968) :

( ) ( )θ−θθ∝θθ

1

ddp , 10 ≤θ≤ . (A3)

A posteriori (distribution bêta) :

( ) ( ) ( ) θθ−θ−=θθ −−−− dsnsBdnsp sns 111 1,, 10 ≤θ≤ , (A4)

avec ( ) ( ) ( ) ( )yxyxyxB +ΓΓΓ≡, (fonction bêta) et, pour x = n entier, ( ) ( )!1−=Γ nn (fonctiongamma). Estimations des paramètres par perte quadratique :

n

s=θ , (A5)

+=θ

n

s

n

s

n1

1

1var . (A6)

Tant qu’il n’y a que des succès ou que des échecs, la probabilité reste strictement concentrée àθ = 1 ou θ = 0, avec une variance nulle. Dès qu’il y a au moins un succès (s≥1) et un échec (n - s ≥1),d’autres valeurs attendues sont obtenues et la variance devient finie.

Page 145: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

145

Cas 2 :

S’il n’y a pas de doute a priori, qu’on ait affaire à un pur schéma de Bernouilli à deuxalternatives, l’a priori approprié est égal à ce que donnerait l’équation (A4) après l’observation d’unsuccès et d’un échec (règle de Bayes-Laplace) :

( ) θ=θθ ddp , 10 ≤θ≤ . (A7)

A posteriori (distribution bêta) :

( ) ( )( ) ( ) θθ−θ

−+=θθ − d

ssn

ndnsp sns 1

!!

!1, , 10 ≤θ≤ . (A8)

Estimation par perte quadratique :

2

1

++=θ

n

s, (A9)

++−

++

+=θ

2

11

2

1

3

1var

n

s

n

s

n. (A10)

(A9) est la règle de succession de Laplace.

A.2 Distributions gamma et de Poisson

Applications :

Décroissance radioactive, statistique de comptage, événements rares avec un taux d’occurrencemoyen constant.

Intervalle de temps moyen

τ=t (A11)

Distribution d’entropie maximale avec cette contrainte et paramètre de Lagrange λ :

( ) ,dtedttp tλ=τ λ ∞<< t0 (A12)

(distribution exponentielle d’intervalles) avec

tt ∆=λ=τ= 1 . (A13)

Probabilité pour n événements entre 0 et t, dans des intervalles arbitraires mais ordonnés entemps dt1, dt2,…dtn (distribution de Poisson) :

Page 146: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

146

( )

( ), ,...2,1,0 ,

!

...!

1

...,

0

1

0

1

0

0

1

0

1

0

2

=λ=

λ=

λ=λ

λ−

−λ−

−λ−

∫∫∫

∫∫∫

nn

te

dtdtdtn

e

dtdtdtetnP

nt

tt

n

t

nnt

tt

n

t

nnt

n

(A14)

avec les valeurs attendues

tn λ= , (A15) tn λ=var . (A16)

A priori pour le taux λ (a priori de Jeffreys pour les paramètres d’échelle)

( )λλ=λ∝λλ d

ddp ln , ∞<λ<0 . (A17)

La fonction de vraisemblance de n événements durant un temps d’observation t est la distributionde Poisson (A14).

A posteriori (distribution gamma) :

( ) ( )( ) λ

λΓ

λ=λλλ− d

n

tedntp

nt

, , ∞<λ<0 . (A18)

Estimation par perte quadratique :

t

n=λ=λ var , (A19) n

1=λλ∆

. (A20)

Remarque :

A posteriori et estimation sont identiques si le nombre d’événements n et le temps d’observation tont été accumulés durant plusieurs mesures distinctes (runs).

A.3 Gaussienne à une variable

Applications :

Erreurs inconnues, fluctuations incontrôlables, propagation d’erreur, combinaison de donnéesd’origines diverses, etc., valable si un grand nombre de composantes indépendantes agissent ensemble(théorème de la limite centrale) ou si seuls les moyennes et les écarts-types sont connus (principe dumaximum d’entropie) avec des erreurs ou des écarts possibles compris entre –∞ et +∞.

La distribution d’échantillonnage (probabilité des écarts ou des erreurs x – µ possibles,connaissant la valeur réelle µ et l’écart-type σ) :

Page 147: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

147

( ) dxx

dxp

σµ−−

πσ=λσµ

2

2 2

1exp

2

1, , ∞<<∞− x . (A21)

Fonction de vraisemblance des valeurs x dans dx1, … dxn à x1,…xn :

( ) ( ) ( )

( ) ....’

12

’exp

2

1

...2

1exp

2

1...,,...

1

2

2

2

22

11

2

22211

nn

n

n

jjnnn

dxdxs

xns

dxdxxdxdxxxp

µ−+

σ−

πσ=

µ−

σ−

πσ=σµ ∑

=(A22)

Ceci dépend de l’échantillon uniquement au travers de la moyenne de l’échantillon et de lavariance de l’échantillon,

∑=

≡n

jjx

nx

1

1, (A23) ( ) 22

1

22 1’ xxxx

ns

n

jj −=−≡ ∑

=

. (A24)

Cas 1 :

Paramètre de position µ et paramètre d’échelle σ tous deux inconnus.

A priori le moins informatif (théorie des groupes) :

( )σ

σµ∝σµσµ ddddp , , ∞<µ<∞− , ∞<σ<0 . (A25)

A posteriori

( )( ) ( ) ( ) ( ) ( )

( )( ) ( ) ( )[ ] ( )[ ]

( ) ( )( ) ,u,B

du

v

dvvuvuexpdunupdvn,uvp

v

dvvvexpduv

vuexpdvnvpdun,vup

n,’s,x,p

nnn

n

n

n

22

2

1

2

12

222

2

1

212

1

1 1

+Γ++−==

Γ−−==

π

σµ

∞<−µ≡<∞−’s

xu , ∞<

σ≡<

2

2

2

’0

nsv . (A26)

Les deux factorisations correspondent aux deux formes de la règle fondamentale demultiplication pour les probabilités conjointes.

La distribution marginale de u ( distribution t de Student avec 1−= nut , n – 1 degrés de liberté) :

( ) ( )( ) 222

1

2

1 1,nn uB

dudunup

+=

−, ∞<<∞− u . (A27)

Page 148: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

148

et de v (distribution gamma ou du χ2 avec v22 =χ , n – 1 degrés de liberté) :

( )( )

( ) v

dvvedvnvp

n

v n

2

1

21

Γ=

, ∞<< v0 . (A28)

Estimation de paramètre par perte quadratique : avec les distributions marginales on trouve

facilement vuvu var,var , , et les estimations

x=µ , (A29) 3

’var

2

−=µ

n

s, (A30)

22 ’1 −− −=σ s

n

n, (A31) 4

22 ’

12var −− −=σ s

n

n. (A32)

Les paramètres estimés ne sont pas corrélés, ( ) 0,cov =−= vuuvvu entraînant que

( ) 0,cov 2 =σµ − . (A33)

Cas 2 :

Si σ est connu, l’a priori est simplement

( ) ( ) µ

σ−µ−

πσ=µσµ d

n

x

ndnp

2

2

2 2exp

2

1, , ∞<µ<∞− . (A34)

Estimation par perte quadratique :

x=µ , (A35) n

2

varσ=µ . (A36)

Cas 3 :

Mesures de m répétées, sans corrélations entre elles, dont les résultats sont donnés sous la forme

nnxx σ±σ± ,...11 .

Distribution d’échantillonnage d’entropie maximale :

( ) jj

j

j

jjj dxx

dxxp

σ

µ−−

πσ=σ

2

2 2

1exp

2

1, ∞<<∞− jx . (A37)

Fonction de vraisemblance :

( ) n

n

j j

jnnn dxdx

xdxdxxxp ...

2

1exp...,...,,,... 1

1

2

111

σ

µ−−∝σσµ ∑

=

. (A38)

Page 149: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

149

A posteriori :

( ) ( ) µ

σ−µ−

σπ=µσµ d

n

x

ndxp jj 2

2

2 2exp

2

1, , ∞<µ<∞− , (A39)

où les barres supérieures réfèrent aux moyennes pondérées sur l’échantillon (sur les mesures),

∑∑

σ

σ≡

j j

j jj xx

2

2

, (A40) ∑∑

∑−−

σ=

σ

σσ≡σ

j jj j

j jj n22

22

2 . (A41)

Estimation par perte quadratique :

x=µ , (A42) n

2

varσ=µ . (A43)

A.4 Gaussienne à plusieurs variables

Applications :

Propagation des erreurs corrélées, ajustement par moindres carrés dans les espacesmultidimensionnels des échantillons et des paramètres. Les dérivations suivent étroitement celles dela Gaussienne à une variable, donnant lieu à des expressions vectorielles et matricielles de formessimilaires. Les indices en Roman (j,k) indiquent les essais ou les membres de l’échantillon, les indicesen Grec (ν, κ) indiquent les paramètres (coordonnées cartésiennes dans l’espace des paramètres).

Distribution d’échantillonnage (probabilités des écarts ou erreurs vectoriels possibles x – µ,connaissant le vrai vecteur µ et la matrice de covariance C) :

( ) ( )( )

( ) ( ) ( )xxCxC

xCx ddp

−−−

π= − µµµ 1T

2

1exp

2det

1, , ∞<<∞− νx . (A44)

Vraisemblance des vecteurs x dans d(x1),…d(xn) à x1,…xn :

( ) ( ) ( )

( )( ) ( ) ( ) ( )

( )( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( )nn

nj

n

jjn

nn

ddn

dd

ddp

xxxCxCCC

xxxCxC

xxCxx

...tr2

exp2det

1

...2

1exp

2det

1

...,,...

11T1-

2

11

1

T

2

11

−−+−

π=

−−−

π=

=∑

µµ

µµ

µ

(A45)

Ceci ne dépend de l’échantillon qu’au travers du vecteur de moyenne de l’échantillon et de la matricede covariance de l’échantillon,

∑=

=n

jjn 1

1xx , (A46) ( )( ) TTT

1

1xxxxxxxxC −=−−≡ ∑

=j

n

jjn

. (A47)

Page 150: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

150

Cas 1 :

Paramètres de position µν et éléments de matrice de covariance Cνν’ = σνρνν’σν’ inconnus.

A priori le moins informatif (théorie des groupes) dans l’espace des paramètres à m dimensions(ν = 1, …m) :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )

( ) ( )( ) 21

1

21 detdet, +−

+ =∝mm

ddddddp

CC

CC

CCµµµµ ,

∞<µ<∞− ν , ∞<≡σ< ννν C20 , 11’’

’’ +<≡ρ<−

νννν

νννν

CC

C(A48)

A posteriori : avec les égalités exp(-tr V) = detexp(-V) et det(1 + uuT) = 1 + uTu = 1 + u2, on trouve

( )( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( )( )

( ) ( ) ( ) ( )

( )( )

( ) ( ) ( ) ( ) ( )( ) ( )

( )( )[ ] ( )[ ]

( ) ( )( )

( ) 21

1 2

141

2TT

1 2

1,

2

1

22

21

1 2

41

21

1-

T

det

expdet1

,

det

expdet

det

exp

,

,,,

+

=νν−+−

=ν−

+

=νν−−

∏∏

Γπ++−+=

=

Γπ−

π

−=

=

mm nmm

n

m n

n

mm nmm

n

d

B

d

dnpddnp

dd

dnpdnp

np

VVVuu1Vuu1uu

VuVuuu

VVVV

V

uVuu

VVuVu

CxCµ

(A49)

où, par analogie avec le cas à une variable, nous définissons le vecteur

( )xS’u −≡ − µ1 , ∞<<∞− νu , (A50)

et la matrice réelle symétrique définie positive (valeurs propres réelles positives)

S’CS’V 1

2−≡ n

, ∞<< Vdet0 , (A51)

avec la matrice réelle symétrique définie positive S’ définie par

2S’C = (A52)

(dans le système des axes principaux de C ). Les deux factorisations correspondent aux deux formesde la règle fondamentale de multiplication pour les probabilités conjointes.

La distribution marginale pour u (distribution t à plusieurs variables)

( ) ( ) ( ) ( )( )∏ =ν

−+=m n

n

B

ddnp

1 2

1,

2

1

221 uuuu (A53)

et pour V (distribution gamma à plusieurs variables ou distribution de Wishart)

Page 151: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

151

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )

( )( ) 21

1 2

41

21

det

expdet+

=νν−−

∏ Γπ−=

mm nmm

n ddnp

VVVV

VV . (A54)

Estimation des paramètres par perte quadratique : avec la distribution marginale, on trouve u ,

Tuu , V et finalement

x=µ , (A55) ( )( )2

T

−−=−−

mn

Cxx µµ , (A56)

11 1 −− −= CCn

n. (A57)

Cas 2

Si C est connue, l’a posteriori est simplement

( ) ( )( )

( ) ( ) ( )µµµµµ dn

ndnp

−−−

π= − xCx

CC 1T

2exp

2det

1, , ∞<µ<∞− ν . (A58)

Estimation par perte quadratique :

x=µ , (A59) ( )( )n

C=−− Tµµµµ . (A60)

Cas 3 :

Mesures répétées de µ, sans corrélations entre elles, dont les résultats sont donnés sous la formedes vecteurs xj et des matrices de covariance Cjk (j,k = 1,…n).

Définitions :

nx

x

x

x2

1

, (A61)

nnnn

n

n

CCC

CCC

CCC

C

21

22212

11211

. (A62)

Vraisemblance :

( ) ( ) ( )xxCx dedp Q 2, −∝µ , (A63)

( ) ( ) ( )

( ) ( )( )[ ]( )[ ] ( ) ( ). tr

tr

1T1TT

,

T1

,

1T

xCxCxxxx

xxC

xCx

−−+−=

−−=

−−=

−−

µµ

µµ

µµ

nn

Q

kjjkjk

kjkjkj

(A64)

Page 152: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

152

Les barres supérieures indiquent des moyennes pondérées sur l’échantillon (sur les mesures),

( ) ( ) kkj

jkkj

jk xCCx ∑∑ −

,

1

1

,

1 , (A65)

( ) ( ) T

,

1

1

,

1Tjk

kjjk

kjjk xxCCxx ∑∑ −

≡ , (A66)

( ) ( ) ( ) ( )1

,

1

,

11

1

,

1

−−−

=

≡ ∑∑∑

kjjk

kjjkjkjk

kjjk n CCCCCC (A67)

A posteriori :

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )µµµµµ dn

ndp

−−−

π= − xCx

CCx 1T

2exp

2det

1, , ∞<µ<∞− ν . (A68)

Estimation par perte quadratique :

x=µ , (A69) ( )( )n

C=−− Tµµµµ . (A70)

Page 153: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

153

Annexe B

Propriétés mathématiques des profils de Voigt ψ et χ

Les formes élargies par effet Doppler des résonances isolées peuvent être décrites par les profilsde Voigt ψ(x,β) et χ(x, β). Les arguments

20

Γ−

≡EE

x , (B1) 2Γ

∆≡β (B2)

dépendent de l’énergie de la résonance E0, de la largeur totale Γ, de la largeur Doppler ∆ (voiréquation 110) et de l’énergie incidente E (toutes dans le système du laboratoire).

Définition

( ) ( ) ( )β−ψ=+πβ

=βψ ∫∞

∞−

β−− ,’1

’1,

2’ 22

xx

dxex xx (B3)

( ) ( ) ( )β−χ−=+πβ

=βχ ∫∞

∞−

β−− ,’1

’’1,

2’ 22

xx

dxxex xx (B4)

Cas d’arguments particuliers

À l’énergie de la résonance, E = E0

( )ββ

π=βψ β 1erfc,0

21e , (B5) ( ) 0,0 =βχ (B6)

à la température nulle, T = 0

( )21

1,0

x+=βψ , (B7) ( )

21,0

x

x

+=βχ (B8)

Séries convergentes

( ) ( ) ∑∞

=

β−

β

+−Γ

ββ

=βψ0

2

2

21 1

,2

1

!

11,

22

n

n

x nx

nex (B9)

Page 154: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

154

( ) ( ) ∑∞

=

+β−

β

−−Γ

ββ

=βχ0

2

12

21 1

,2

1

!

11,

22

n

n

x nx

nex (B10)

où Γ(a,t) est la fonction gamma incomplète, avec

( ) ( ) ∫∞

−=+Γ=+Γt

atat tedttetaata ’’,,1 ’ (B11)

tt erfc ,2

1 π=

Γ (B12)

Séries asymptotiques pour les basses températures (β faible)

( ) ( ) ( )[ ]∑∞

=

+

+

+

β−++=βψ

0

21

2

2

arctan12cos1

1

212

!!12,

n

nn

xnxn

nx (B13)

( ) ( ) ( )[ ]∑∞

=

+

+

+

β−++=βχ

0

21

2

2

arctan12sin1

1

212

!!12,

n

nn

xnxn

nx (B14)

d’où

( ) ( ) ( )∑∞

=

+

++

+

β−++=βχ+βψ

0

21

22

2

11

1

212

!!12,,

n

nn

x

ix

xn

nxix (B15)

Relation avec l’intégrale de probabilité complexe

( ) ( )

β+

βπ=βχ+βψ ix

Wxix ,, , (B16)

( ) ∫ ∫∞

∞−

−−

π+=

−π=

ztz

t

dtei

edtzt

e

izW

0

22

2

21

1, (B17)

Dérivées

( )ψ−χβ

=∂ψ∂

xx 2

2, (B18) ( )χ−ψ−

β=

∂χ∂

xx

12

2(B19)

Intégrales

( ) π=βψ∫∞

∞−

dxx, , (B20) ( ) 0, =βχ∫∞

∞−

dxx (B21)

Page 155: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

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Page 162: Évaluation et analyse des données relatives aux résonances

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