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UNIVERSITE PARIS EST CRETEIL FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL ****************** ANNEE 2012 N° 1056 THESE POUR LE DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : OPHTALMOLOGIE Présentée et soutenue publiquement le à PARIS Par M. Sylvain Michée Né le 23/04/1982 à Corbeil-Essonnes TITRE : ANALYSE IN VITRO DES INTERACTIONS ENTRE LES MACROPHAGES ET LES CELLULES EPITHELIALES DE LA CONJONCTIVE SOUS L’INFLUENCE DU CHLORURE DE BENZALKONIUM PRESIDENT DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA M. le Pr. Bahram Bodaghi BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE DIRECTEUR DE THESE : M. le Dr. Antoine Labbé Signature du Cachet de la bibliothèque Président de thèse universitaire

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UNIVERSITE PARIS EST CRETEIL

FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL

******************

ANNEE 2012 N° 1056

THESE

POUR LE DIPLOME D'ETAT

DE

DOCTEUR EN MEDECINE

Discipline :

OPHTALMOLOGIE

Présentée et soutenue publiquement le à

PARIS

Par M. Sylvain Michée

Né le 23/04/1982 à Corbeil-Essonnes

TITRE : ANALYSE IN VITRO DES INTERACTIONS ENTRE LES MACROPHAGES ET LES CELLULES EPITHELIALES DE LA CONJONCTIVE SOUS L’INFLUENCE DU CHLORURE DE BENZALKONIUM

PRESIDENT DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA

M. le Pr. Bahram Bodaghi BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE

DIRECTEUR DE THESE : M. le Dr. Antoine Labbé

Signature du Cachet de la bibliothèque Président de thèse universitaire

2

Remerciements

Au président du jury,

Monsieur le Professeur Bahram Bodaghi,

Pour m’avoir fait l’honneur d’accepter de présider la soutenance de cette thèse, vos qualités

médico-chirurgicales ainsi que votre implication dans la recherche sont un atout en

ophtalmologie.

Vos connaissances, mais aussi vos qualités pédagogiques et votre disponibilité suscitent

l’admiration de vos élèves.

Soyez assuré de ma très sincère gratitude et de mon profond respect.

3

A mon directeur de thèse,

Monsieur le Docteur Antoine Labbé,

Tu as su me soutenir, m’aiguiller dans le chemin de la recherche, me donner de précieux

conseils par ton expérience passée, ta gentillesse et ta sympathie. Tu as pu prendre le temps

nécessaire pour examiner en détail tout ce travail avec une minutie qui te fait honneur.

Ta rigueur et ton sérieux sont un exemple pour moi, ton aide a été incalculable dans la

réalisation de cette thèse.

Sois assuré de toute ma reconnaissance en acceptant ce travail.

4

A mon maître, Monsieur le Professeur Christophe Baudouin,

Vous m’avez accueilli dans votre laboratoire au sein de votre équipe devenue une des plus

performantes du monde dans l’analyse de la surface oculaire pendant une année de recherche

qui restera une expérience forte. C’est aussi au cours de mon cursus d’interne que j’ai pu

apprécier vos qualités médicales et chirurgicales. L’étendue de vos connaissances et du travail

que vous avez accompli me laissent admiratif.

Vous m’avez fait confiance et soutenu dans les décisions que j’ai pu prendre et c’est avec un

réel plaisir et enthousiasme que je vais aborder les futures années à travailler dans votre

service.

Veuillez accepter ce travail comme la preuve de ma gratitude et de mon plus profond respect.

5

Monsieur le Professeur Marc Labetoulle

Vous m’avez fait l’honneur d’accepter d’être l’un des membres du jury.

J’ai été très touché que vous accordiez une part de votre précieux temps à la lecture de mon

travail

Veuillez trouver ici le témoignage de ma profonde reconnaissance et de mon respect.

6

Au Docteur Françoise Baudouin,

Vous avez toujours su trouver les mots et les encouragements nécessaires au quotidien. Par

votre gentillesse et bienveillance, vous m’avez guidé tout au long de ce travail.

Vous m’avez fait l’honneur d’accepter de siéger dans ce jury et d’avoir consacré du temps

pour évaluer ce travail.

Recevez ce travail en témoignage de mon immense reconnaissance et de mon profond respect.

7

Au Professeur Phuc Le Hoang,

Au Professeur Alain José Sahel,

Au Professeur Laurent Laroche,

Au Professeur Vincent Borderie,

Au Professeur Alain Gaudric,

Au Professeur Pascale Massin,

Au Professeur Gilles Chaine,

Au Docteur Catherine Bourreau,

Au Docteur Sylvia Buffet-Nghiem

Au Docteur Franck Fajnkuchen

Au Docteur Ramin Tadayoni,

Au Docteur Yves Lachkar,

Au Docteur Pascal Dureau,

Au Docteur Georges Caputo,

Au Docteur Stanislas Roman,

Au Docteur Djawed Bensmail,

Au Docteur François Auclin,

Au Docteur Alexandre Denoyer,

Au Docteur Bénédicte Dupas,

Au Docteur Cécile Allouch,

Au Docteur Pascale Hamard,

Au Docteur William Rostène,

Votre exemple a été un modèle,

Recevez avec ce travail un témoignage de mon admiration et de mon respect.

8

A Luisa Riancho,

Qui a été ma maman canard au cours de mon stage en laboratoire, ce qui n’est pas rien.

A mes collègues passés et présents et amis

Michelle Nguyen, Nacim Bouheraoua, Pierre Chouraqui, Julien Bullet, Adil Darugar, Julien

Pérol, Chrysanthi Basdekidou, Eric Pérez-Campagne, Feng Liang, Hong Liang, Mohammed

El-Hammdaoui, Rachid Tahiri, Jean-Rémi Fenolland, Sylvia Cayette, Julie Frugier, Aurélie

Brolly, Jonathan Benesty, Déborah Benisty, Charles Van Went, Raphaël De Nicola et ceux

que j’oublie.

Recevez avec ce travail un témoignage de mon amitié et de ma reconnaissance.

Vous côtoyer au quotidien a été un grand plaisir.

9

A ma famille,

Mes grands parents,

Mon père et ma mère,

Mes deux frères,

Mes cousines, oncles et tantes,

Merci pour votre soutien depuis le premier jour.

10

TABLE DES MATIERES

TABLE DES ILLUSTRATIONS .......................................................................................... 13

ABREVIATIONS ................................................................................................................... 15

INTRODUCTION .................................................................................................................. 16

CHAPITRE 1 : PREAMBULE ............................................................................................. 18

1 PHYSIOPATHOLOGIE DE LA CONJONCTIVE .......................................................... 18

1.1 Généralités ................................................................................................................. 18

1.2 Interactions cellulaires épithéliales ............................................................................ 19

1.3 Interactions au sein du stroma ................................................................................... 23

2 GLAUCOME ET CONSERVATEURS ........................................................................... 24

2.1 Généralités sur le glaucome ....................................................................................... 24

2.2 Traitements du glaucome ........................................................................................... 25

2.2.1 Principes ............................................................................................................. 25

2.2.2 Les collyres antiglaucomateux ........................................................................... 26

2.2.3 La chirurgie filtrante et la fibrose conjonctivale ................................................ 27

2.3 Les conservateurs ...................................................................................................... 27

2.3.1 Historique ........................................................................................................... 27

2.3.2 Principaux conservateurs .................................................................................... 28

2.3.3 Le chlorure de benzalkonium (BAK) ................................................................. 29

3 LIGNEES CELLULAIRES .............................................................................................. 31

3.1 Généralités ................................................................................................................. 31

3.2 La lignée THP-1 ........................................................................................................ 32

3.2.1 Historique ........................................................................................................... 32

3.2.2 THP-1 en tant que lignée macrophagique .......................................................... 33

3.3 Les cellules épithéliales Wong Kilbourne dérivées de Chang (WKD) ..................... 34

CHAPITRE 2 : ETUDE IN VITRO DES EFFETS DU CHLORURE DE

BENZALKONIUM SUR LES MACROPHAGES .............................................................. 36

1 INTRODUCTION ............................................................................................................ 36

2 MATERIELS ET METHODES ....................................................................................... 37

2.1 Lignées cellulaires ..................................................................................................... 37

2.1.1 Lignée monocytaire ............................................................................................ 37

2.1.2 Lignée épithéliale conjonctivale ......................................................................... 38

2.2 Stimulations ............................................................................................................... 38

2.3 Expression des marqueurs de surface ........................................................................ 39

2.4 Immunohistochimie ................................................................................................... 39

2.5 Etude de la mort cellulaire en CMF à l’aide du test Annexine V / 7-AAD ............... 40

2.6 Etude de la phagocytose ............................................................................................ 40

2.7 Production de cytokines ............................................................................................. 41

2.8 Etude de la migration ................................................................................................. 41

11

2.9 Analyses statistiques .................................................................................................. 42

3 RESULTATS .................................................................................................................... 42

3.1 Les cellules THP-1 ont été différenciées en macrophages ........................................ 42

3.2 Pour les concentrations utilisées, le BAK et le DNCB entraînaient une modification

de la viabilité cellulaire selon une courbe concentration dépendante.. .................................... 45

3.3 L’exposition au LPS et au TNF-α n’a pas entraîné d’effet cytotoxique aux

concentrations étudiées ............................................................................................................ 46

3.4 L’expression des marqueurs de différenciation des cellules THP-1 différenciées a été

modifiée après exposition au BAK, DNCB, LPS et TNF-α. ................................................... 48

3.5 Les cellules THP-1 exposées au BAK, LPS et TNF-α ont augmenté leur capacité de

phagocytose .............................................................................................................................. 51

3.6 Les cellules THP-1 différenciées (macrophages) ont présenté un accroissement de

leurs capacités de migration sous l’effet du BAK et du TNF-α.. ............................................. 52

3.7 L’expression des cytokines par les cellules THP-1 a été modifiée en fonction de la

différenciation et de l’exposition aux différents facteurs de stimulation ................................. 53

4 DISCUSSION ................................................................................................................... 56

5 CONCLUSION ................................................................................................................. 59

CHAPITRE 3 : ANALYSE IN VITRO DES RELATIONS ENTRE LES

MACROPHAGES ET LES CELLULES EPITHELIALES CONJONCTIVALES ....... 61

1 INTRODUCTION ............................................................................................................ 61

2 MATERIELS ET METHODES ....................................................................................... 61

2.1 Lignées cellulaires ..................................................................................................... 61

2.1.1 Lignée monocytaire ............................................................................................ 61

2.1.2 Lignée épithéliale conjonctivale ......................................................................... 62

2.2 Stimulations ............................................................................................................... 62

2.3 Analyse de l’effet des facteurs stimulants sur les cellules épithéliales conjonctivales

en cytométrie en flux ............................................................................................................... 62

2.4 Production de cytokines ............................................................................................ 63

2.5 Interactions entre les cellules WKD et les cytokines produites par les macrophages 63

2.6 Interactions entre les macrophages et les cytokines produites par les cellules WKD 64

2.7 Analyses statistiques .................................................................................................. 64

3 RESULTATS .................................................................................................................... 65

3.1 Parmi l’expression des marqueurs membranaires des cellules WKD, seul EMMPRIN

a été modifiée après exposition au BAK et au DNCB ............................................................. 65

3.2 L’expression des chimiokines par les cellules WKD a été modifiée par l’exposition

aux facteurs stimulants. ............................................................................................................ 66

3.3 Augmentation de l’expression du CD54 par les cellules conjonctivales WKD

exposées aux surnageants des macrophages exposés au LPS .................................................. 69

3.4 Augmentation de l’expression du CD54 par les macrophages exposés aux

surnageants des cellules conjonctivales exposées au BAK. ..................................................... 70

4 DISCUSSION ................................................................................................................... 71

4.1 Stimulation directe sur les cellules conjonctivales .................................................... 71

4.2 Influence des macrophages sur les conjonctivales. ................................................... 72

12

4.3 Les effets du BAK dans les interactions entre les cellules conjonctivales et les

macrophages ............................................................................................................................. 74

5 CONCLUSION ................................................................................................................. 75

CONCLUSION ET PERSPECTIVES ................................................................................. 76

REFERENCES ....................................................................................................................... 77

RESUME EN ANGLAIS ....................................................................................................... 85

RESUME EN FRANCAIS ..................................................................................................... 86

13

TABLE DES ILLUSTRATIONS

Liste des Figures

Figure 1: Coupe histologique de la conjonctive (page 18).

Figure 2: Image en microscopie confocale de cellules à mucus après immunomarquage (page

21).

Figure 3: Image en microscopie confocale de cellules de Langerhans après immunomarquage

(page 22).

Figure 4: Image en microscopie confocale de cellules à mucus et de Langerhans après double

immunomarquage (page 23).

Figure 5: Formule chimique du chlorure de benzalkonium (page 30).

Figure 6: Image en microscopie optique des cellules THP-1 (page 33).

Figure 7: Image en microscopie optique des cellules WKD (page 35).

Figure 8: Image en microscopie optique des cellules THP-1 non différenciées et différenciées

(page 43).

Figure 9: Expression membranaire par les cellules THP-1 indifférenciées et différenciées du

CD86, CD54, CD11b, CD11c et CD33 (page 44).

Figure 10: Expression membranaire du CD11c à la surface des cellules THP-1

indifférenciées et différenciées en immunofluorescence (page 44).

Figure 11: Analyse de la cytotoxicité du BAK sur les macrophages (page 45).

Figure 12: Analyse de la cytotoxicité du DNCB sur les macrophages (page 46).

Figure 13: Analyse de la cytotoxicité du LPS sur les macrophages (page 47).

Figure 14: Analyse de la cytotoxicité du TNF-α sur les macrophages (page 47).

Figure 15: Expression du CD11b par les cellules THP-1 et les macrophages (page 49).

Figure 16: Expression du CD11c par les cellules THP-1 et les macrophages (page 50).

Figure 17: Expression du CD54 par les cellules THP-1 et les macrophages (page 50).

Figure 18: Expression du CD33 par les cellules THP-1 et les macrophages (page 51).

Figure 19: Image en microscopie à fluorescence des microsphères de carboxylate

phagocytées par les cellules THP-1 et les macrophages (page 52).

Figure 20: Analyse des capacités de phagocytose des cellules THP-1 et des macrophages

(page 52).

Figure 21: Analyse de la migration des cellules THP-1 et des macrophages (page 53).

Figure 22: Dosage des surnageants de culture des cellules THP-1 sur membranes de

nitrocellulose (page 56).

Figure 23: Expression des marqueurs membranaires CD 40, CD 54, CD 63, CD 95, HLA-DR

et EMMPRIN par les cellules épithéliales conjonctivales (page 65).

Figure 24: Dosage des surnageants de culture des cellules WKD sur membranes de

nitrocellulose (page 67).

Figure 25: Expression des marqueurs membranaires CD 40, CD 54, CD 63, CD 95, HLA-DR

et EMMPRIN par les cellules épithéliales conjonctivales après exposition aux surnageants de

culture des macrophages (page 69).

Figure 26: Expression des marqueurs membranaires CD54, CD11b et CD11c par les

macrophages sous l’influence des surnageants de culture des cellules WKD (page 70).

14

Liste des tableaux

Tableau I: Intensité des spots correspondant aux cytokines présentes dans les surnageants de

culture des cellules THP-1 (page 55).

Tableau II: Intensité des spots correspondant aux cytokines présentes dans les surnageants de

culture des cellules WKD (page 68).

15

Principales abréviations utilisées

7-AAD : 7-aminoactinomycin D

ADN : Acide désoxyribonucléique

ARNm : Acide ribonucléique messager

BAK : Chlorure de benzalkonium

C3b : Complément 3 type b

C5a : Complément 5 type a

CCL : Cystéine cystéine ligand

CD : Cluster de différenciation

CFU : Colony-forming unit

CMF : Cytométrie en flux

CXCL : Cystéine X cystéine ligand

DAPI : Di-amidino-phénylindole

DMEM : Milieu Eagle modifié de Dulbecco

DNCB : Di-nitro-chloro-benzène

EDTA : Acide éthylène diamine tétraacétique

EGF : Epidermal growth factor

EMA : European Medicine Agency

EMMPRIN : Extracellular Matrix Metalloproteinase Inducer

Fas : Fragment inducteur d’apoptose

FBS : Sérum de veau foetal

Fc : Fragment constant des immunoglobulines

FITC : Fluorescéine-isothiocyanate

G-CSF : Granulocyte colony-stimulating factor

GM-CSF : Granulocyte macrophage colony-stimulating factor

HA: Humeur aqueuse

HLA: Human leukocyte antigen

HTO: Hypertonie intraoculaire

ICAM : Intercellular adhesion molecule

IF : Immunofluorescence

IFN : Interferon

IL : Interleukine

LPS : Lipopolysaccharide

MCP : Methyl-accepting Chemotaxis Protein

MEC : Matrice extra cellulaire

MIF : Macrophage migration inhibitory factor

NF-κB : Nuclear factor-kappa B

PAI : Plasminogen activator inhibitor

PBS : Phosphate buffer saline

PE : Phycoérythrine

PFA : Paraformaldéhyde

PIO : Pression intra oculaire

PMA : Phorbol myristate acetate

RPMI : Roswell Park Memorial Institute

SDF-1 : Stromal cell derived factor 1

sTREM : Soluble triggering receptor expressed on myeloid cells

TLR : Toll like receptor

TNF-α : Tumor necrosis factor alpha

WKD : Wong-Kilbourne derivated

16

INTRODUCTION

La surface oculaire constitue la partie la plus externe de l’œil, comprenant les

paupières, le film lacrymal et les glandes lacrymales, la conjonctive et la cornée. Elle est

maintenant identifiée comme une entité fonctionnelle intégrée. La surface oculaire est en

contact permanent avec le milieu extérieur, source d’agressions et d’agents pathogènes, tels

que les virus, les bactéries, champignons, amibes, parasites, agents allergiques, polluants ou

encore les collyres. Les maladies de la surface oculaire représentent un ensemble de

pathologies extrêmement fréquentes allant de la simple irritation oculaire à de véritables

maladies cécitantes. Ainsi, la prévalence de la sécheresse oculaire serait de 5 à 35% en

fonction de l’âge dans les pays développés (34), l’allergie oculaire toucherait 7 à 10% de la

population en Europe (34), chaque personne ferait au moins un épisode de conjonctivite

infectieuse durant sa vie et enfin on estime qu’environ 65 millions de patients sont traités par

collyres antiglaucomateux dans le monde (56).

L’inflammation et les cellules inflammatoires sont au cœur des mécanismes

physiopathologiques impliqués au niveau de la surface oculaire (12). Parmi les cellules de

l’immunité, les macrophages et les cellules dendritiques ont un rôle de pivot notamment par

leurs fonctions de présentation des antigènes et la production de cytokines (41). L’utilisation

des collyres antiglaucomateux au long cours entraîne, au-delà des manifestations cliniques

classiques de l’allergie et de la toxicité, de nombreuses modifications des tissus qui

composent la surface oculaire. Ces changements tissulaires ont été démontrés et analysés par

de nombreuses études sur des empreintes conjonctivales, sur des biopsies conjonctivales ou

encore sur des modèles expérimentaux, confirmant la toxicité et l’expression de marqueurs

inflammatoires au niveau de la surface oculaire induites par ces collyres (11, 17, 29). La

réponse cicatricielle excessive de l’œil après chirurgie du glaucome est caractérisée au niveau

de la conjonctive par une inflammation et une prolifération fibroblastique qui conduit à une

production excessive de matrice extracellulaire (MEC) venant bloquer le site de filtration

(18). L’utilisation au long cours de collyres antiglaucomateux et de leurs conservateurs a une

influence directe sur les résultats chirurgicaux (46). Bien que les macrophages aient été

impliqués dans de nombreuses pathologies de la surface oculaire, les mécanismes précis du

recrutement de ces cellules inflammatoires, les interactions avec les cellules épithéliales de la

surface oculaire mais aussi les moyens de réguler l’inflammation pathologique ne sont pas

17

encore totalement expliqués. Néanmoins, les conservateurs associés au principe actif, en

particulier le chlorure de benzalkonium (BAK), semblent jouer un rôle majeur dans ces

changements tissulaires et leurs complications (9).

Largement étudiés sur les cellules épithéliales conjonctivales, les effets du BAK n’ont

été que peu analysés sur les cellules inflammatoires et notamment sur les macrophages.

L’objectif de la première partie de cette thèse a donc été de définir les effets directs in vitro du

BAK sur les macrophages. Les interactions entre les cellules épithéliales conjonctivales et les

macrophages sous l’effet du BAK ont été ensuite analysées dans une deuxième partie.

Ce travail a ainsi permis de préciser les interactions entre deux acteurs cellulaires

majeurs de la surface oculaire, les cellules épithéliales et les macrophages, sous l’effet du

principal conservateur utilisés dans les collyres, le BAK.

18

CHAPITRE 1 : PREAMBULE

1. PHYSIOPATHOLOGIE DE LA CONJONCTIVE

1.1 Généralités

La cornée et la conjonctive sont exposées de manière permanente aux agressions

mécaniques toxiques et microbiennes de l’environnement extérieur. La protection palpébrale

et le lavage lacrymal éliminent la majeure partie des corps étrangers irritants. La conjonctive

est une membrane muqueuse vascularisée qui couvre la surface antérieure du globe et la face

postérieure des paupières supérieures et inférieures. Elle est habituellement séparée en 3

parties, la conjonctive palpébrale (marginale, tarsale et orbitaire), les culs de sacs

conjonctivaux et la conjonctive bulbaire (50). Histologiquement, la conjonctive est constituée

d’un épithélium et d’un chorion sous-jacent ou substantia propria (figure1).

Figure 1: Coupe histologique de la conjonctive en coloration hématéine-éosine. On distingue

l’épithélium et le chorion sous-jacent. Au sein de l’épithélium apparaissent des cellules claires

de plus grande taille, les cellules à mucus (Image du Professeur Christophe Baudouin).

19

La conjonctive est également responsable de la sécrétion du mucus essentiel pour le

film lacrymal par l’intermédiaire de glandes muqueuses, constituées par des ensembles de

cellules caliciformes ou à cellules à mucus, regroupées pour la plupart dans des cryptes de

Henlé.

Très richement vascularisée par les artères palpébrales et ciliaires antérieures, la

conjonctive joue un rôle primordial dans la défense de la surface oculaire grâce à de

nombreuses cellules immunocompétentes capables d’initier une réaction inflammatoire, d’y

participer et de synthétiser des immunoglobulines. Le drainage lymphatique est assuré par un

réseau profond et un réseau superficiel sous-épithélial. Les vaisseaux lymphatiques

conjonctivaux se drainent vers les ganglions pré-tragiens, parotidiens et sous-maxillaires. La

conjonctive est particulièrement impliquée dans les réactions de la surface oculaire aux

traitements médicaux du glaucome, mais aussi dans son traitement chirurgical.

1.2 Interactions cellulaires épithéliales

La conjonctive est constituée de cellules épithéliales pluristratifiées composée de 2 à

8-10 couches de cellules selon la localisation. Associées aux lymphocytes intra-épithéliaux

(essentiellement des lymphocytes T), les cellules épithéliales conjonctivales ne sont

maintenant plus considérées comme une simple barrière inerte, mais elles sont directement

impliquées dans de nombreuses réactions biologiques, particulièrement dans les processus

inflammatoires et apoptotiques. En cas d’inflammation, les cellules épithéliales surexpriment

CD54 ou ICAM-1 (Intercellular adhesion molecule-1), molécule d’adhésion qui en se liant au

LFA-1 des lymphocytes et des cellules phagocytaires permet leur migration à travers

l’épithélium (55). L’interféron γ (IFN-γ) semble induire cette expression d’ICAM-1 en cas

d’inflammation locale (15). Les cellules épithéliales, également sous l’effet de l’interféron

gamma (IFN-γ), expriment les antigènes de classe II, HLA-DR (Human leukocyte antigen-

DR), qui leur confèrent des propriétés d’immunocompétence propre. Les cellules épithéliales

synthétisent également des cytokines, l’IL-1 (Interleukine-1), l’IL-6 et l’IL-8, qui jouent

probablement un rôle d’amplification des réactions inflammatoires locales. Leur synthèse est

20

également augmentée chez les patients glaucomateux traités au long cours (8).

Présentes dans l’épithélium, les cellules caliciformes ou cellules à mucus sont

réparties de façon inégale sur la conjonctive (figure 1 et 2). Ces cellules jouent un rôle

particulièrement important dans les pathologies de la surface oculaire et la perte de ces

cellules est considérée comme un indicateur sensible, quoique non spécifique, d’atteinte de la

surface oculaire (51). Des cellules immunocompétentes, en particulier les cellules

dendritiques et de Langerhans, caractérisées par des expansions cytoplasmiques, sont

également présentes au sein de l’épithélium de toutes les régions conjonctivales (Figure 3). La

densité de celles-ci est estimée à 250 à 300 par mm2 chez l’homme au niveau de la

conjonctive limbique (3). Ces cellules se déplacent entre les cellules épithéliales en fonction

de l’état inflammatoire local. En cas d’inflammation de surface, leur densité augmente

considérablement et une impressionnante migration vers la superficie conjonctivale peut être

observée. Du fait de leurs prolongements les cellules dendritiques sont en contact avec de

nombreuses cellules. Un double immunomarquage des cellules à mucus et des cellules

dendritiques permet d’observer les rapports étroits qu’entretiennent ces cellules, chaque

cellule à mucus (de forme arrondie) étant bordée par des prolongements étroits de cellules

dendritiques (figure 4).

21

Figure 2: Image en microscopie confocale d’une empreinte conjonctivale après

immunomarquage des cellules à mucus. Les cellules à mucus sont mises en évidence par leur

contenu riche en mucines (vert) Le noyau est repoussé en périphérie (rouge). On distingue par

ailleurs de nombreuses cellules épithéliales conjonctivales.

22

Figure 3: Image en microscopie confocale d’une empreinte conjonctivale permettant de

mettre en évidence des cellules dendritiques (vert) au sein de l’épithélium conjonctival

(noyaux des cellules en rouge) après immunomarquage.

23

Figure 4 : Image en microscopie confocale d’une empreinte conjonctivale permettant de

mettre en évidence des cellules dendritiques (en vert, étoilées) et des cellules à mucus (en

vert, arrondies) au sein de l’épithélium conjonctival (noyaux des cellules rouge) après double

immunomarquage.

1.3 Interactions au sein du stroma

Le chorion conjonctival ou substantia propria est situé sous l’épithélium et en est

séparé par la lame basale. Le chorion, constitué de tissu conjonctif, présente une couche

superficielle ou lamina propria et une couche plus profonde fibreuse. Le tissu conjonctival

sous-épithélial est le siège de très nombreuses cellules immunitaires, prédominant au niveau

des culs-de-sacs, où elles s’organisent inconstamment en follicules. Ce tissu contient en

majorité des lymphocytes, des plasmocytes, et des mastocytes, on retrouve en moindre

quantité des polynucléaires et des macrophages (3). Egalement composé de fibroblastes,

responsables de la synthèse de matrice extra cellulaire (MEC), le tissu conjonctif est modifié

par le traitement au long cours du glaucome. Les fibroblastes et les macrophages de la

conjonctive jouent un rôle majeur lors de la cicatrisation conjonctivale, principal facteur de

24

risque des échecs de la chirurgie filtrante du glaucome (18). Le drainage lymphatique

s’effectue vers les ganglions pré-tragiens qui mettent en communication les cellules

immunitaires oculaires avec les autres structures immunologiques de l’organisme. La

conjonctive profonde contient, comme l’épithélium, des cellules dendritiques présentatrices

d’antigènes.

Pourtant peu nombreux dans le stroma dans les conditions physiologiques, les

macrophages se manifestent surtout en cas d’agression de la surface oculaire. Ils agissent ainsi

en tant que cellules présentatrices d’antigène pendant le développement des conjonctivites

allergiques (49). Ils sont également retrouvés en grande quantité dans la conjonctive des

patients qui présentent une kératoconjonctivite vernale, une forme grave d’allergie oculaire

(70). Dans les atteintes infectieuses de la surface oculaire, les macrophages jouent un rôle de

défense en surexprimant le toll like receptor (TLR)-4 qui se lie au lipopolysaccharide (LPS)

constituant des membranes bactériennes (48). Ils ont aussi un rôle dans la cicatrisation

conjonctivale, augmentant la production locale de facteurs de croissance endothéliaux,

fibroblastiques et matriciels dans le trachome (1). Dans la pemphigoïde oculaire cicatricielle,

une accumulation de macrophages est également retrouvée associée à une concentration

locale élevée de leurs facteurs de croissance (72). De même, lors de l’utilisation de collyres

antiglaucomateux et de leurs conservateurs au long cours, une infiltration de cellules

inflammatoires (macrophages, cellules dendritiques et lymphocytes) est observée dans la

conjonctive (17, 63, 80).

2. GLAUCOME ET CONSERVATEURS

2.1 Généralités sur le glaucome

Le glaucome est une des causes majeures de cécité et un problème de santé publique

au niveau mondial. Le glaucome représente en réalité un groupe de neuropathies optiques

caractérisées par une dégénérescence progressive des cellules ganglionnaires par apoptose

(92). L’apoptose des cellules ganglionnaires de la rétine entraîne une excavation

caractéristique de la tête du nerf optique et une atteinte du champ visuel. L’élévation de la

pression intraoculaire (PIO) est le principal facteur de risque de cette neuropathie optique, liée

à une augmentation des résistances à l’élimination de l’humeur aqueuse (HA) de la chambre

25

antérieure de l’œil (60).

En fonction de l’examen clinique ophtalmologique, de l’anatomie de l’angle

iridocornéen, de l’aspect du nerf optique et de l’existence d’une atteinte du champ visuel de

type glaucomateuse, les glaucomes sont classés en (39) :

Glaucomes congénitaux

Glaucomes à angle ouvert :

o Glaucomes primitifs à angle ouvert et l’hypertonie oculaire (HTO),

o Glaucomes secondaires à angle ouvert.

Glaucome par fermeture de l’angle iridocornéen :

o Glaucomes primitifs à angle fermé,

o Glaucomes secondaires à angle fermé.

2.2 Traitements du glaucome

2.2.1 Principes

L’objectif du traitement du glaucome est de ralentir la progression de la neuropathie

optique afin de maintenir la fonction visuelle et la qualité de vie des patients à un coût

raisonnable. Le seul traitement aujourd’hui disponible et cliniquement efficace pour prévenir

le développement d’un glaucome chez un patient présentant une HTO, et pour ralentir

l’évolution du glaucome, consiste à faire baisser la PIO afin d’obtenir une PIO dite « cible »

(39). Cette PIO cible correspond à la PIO moyenne obtenue sous traitement permettant de

ralentir la progression ou de prévenir l’apparition des déficits glaucomateux. Le choix du

traitement du glaucome ou de l’HTO est fait en fonction du patient, de son glaucome et des

bénéfices et risques attendus de la thérapeutique choisie. L’arsenal thérapeutique pour

diminuer la PIO comporte actuellement des traitements médicaux avec des collyres

antiglaucomateux, des traitements laser (trabéculoplastie sélective au laser) et des traitements

chirurgicaux : chirurgie filtrante (sclérectomie profonde non perforante et trabéculectomie) et

la pose de valve. Parmi cet arsenal thérapeutique, les collyres antiglaucomateux et la chirurgie

filtrante ont des conséquences sur la conjonctive et seront donc développés.

26

2.2.2 Les collyres antiglaucomateux

Selon la pharmacopée française, un collyre est une solution ou une suspension stérile,

aqueuse ou huileuse, contenant une ou plusieurs substances médicamenteuses destinées à

l’instillation oculaire. Il existe de très nombreux collyres antiglaucomateux et le choix du

traitement doit tenir compte, au-delà de la baisse de la PIO, de la tolérance, de l’observance et

du coût du traitement. Les molécules utilisées dans le traitement du glaucome ont toutes pour

effet d’abaisser la PIO. Le traitement médical du glaucome ou de l’HTO commence le plus

souvent avec une monothérapie. Il y a actuellement 5 différentes classes de médicaments

hypotonisants oculaires : les antagonistes adrénergiques ou β-bloquants, les agonistes

adrénergiques α-2 sélectifs et non sélectifs, les dérivés de la prostaglandine et les prostamides,

les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique et les parasympathomimétiques (cholinergiques)

(39). Ces traitements diminuent la PIO par diminution de la production d’HA (les β-

bloquants, les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique, les agonistes adrénergiques non sélectifs

et les agonistes α-2 adrénergiques), ou par augmentation de l’évacuation de l’HA par la voie

trabéculaire (parasympathomimétiques) ou par la voie uvéosclérale (les agonistes

adrénergiques non sélectifs, les agonistes adrénergiques α-2 sélectifs, les analogues des

prostaglandines et les prostamides).

Les β-bloquants sont utilisés depuis de nombreuses années en première intention dans le

traitement du glaucome ou de l’HTO car ils sont bien tolérés, efficaces et peu onéreux (76).

Ensuite, les analogues des prostaglandines et les prostamides ont été approuvés comme

traitement de première intention, et sont de plus en plus utilisés comme premier traitement de

l’HTO ou du glaucome. En cas d’efficacité insuffisante, différentes classes thérapeutiques

peuvent être associées et il existe maintenant de nombreuses combinaisons fixes de

traitements. Si plus de deux ou trois molécules sont nécessaires pour contrôler la maladie,

d’autres thérapeutiques comme le laser ou la chirurgie filtrante sont alors discutées.

27

2.2.3 La chirurgie filtrante et la fibrose conjonctivale

La trabéculectomie et la sclérectomie profonde non perforante sont les interventions les

plus fréquentes pratiquées en France. La chirurgie filtrante augmente la conductance de

l’écoulement de l’humeur aqueuse entre le site de production et les voies de drainages

extraoculaires, afin de diminuer durablement la PIO. La principale problématique de la

chirurgie filtrante est la cicatrisation conjonctivale. L’excès de cicatrisation est la principale

cause d’échec du bon contrôle de la PIO (73). Il est ainsi indispensable que la cicatrisation

conjonctivale et sclérale au cours de la période postopératoire soient parfaitement contrôlées.

Des agents antimitotiques, le 5-fluorouracile et la mitomycine C, sont utilisés pour contrôler

l’inflammation, la prolifération fibroblastique et la production excessive de MEC afin

d’améliorer le taux de succès de la chirurgie filtrante (52). Les modifications tissulaires

provoquées par l’utilisation au long cours de collyres antiglaucomateux contenant des

conservateurs et entrainant une stimulation de la fibrose conjonctivale du site de filtration sont

une des principales raisons des échecs de la chirurgie filtrante (18).

2.3 Les conservateurs

2.3.1 Historique

Le rôle des conservateurs est d’éviter et de limiter la contamination bactérienne des

flacons contenant les collyres. Ils peuvent être aussi employés pour stabiliser le principe actif

des flacons multidoses. La contamination peut être multiple, par contact de l’embout du

flacon sur les paupières, les cils, la conjonctive ou les larmes. Sans conservateur, le contenu

d’un flacon multidose utilisé deux fois par jour est habituellement contaminé en 1 à 2

semaines (77). Le risque est multiplié et la transmission bactérienne croisée lors de

l’utilisation d’un même flacon par plusieurs personnes d’une même famille ou en milieu

hospitalier. Dans les années soixante, devant la multiplication de transmissions bactériennes

croisées, l’industrie pharmaceutique a été poussée à développer des préparations en unidose et

de limiter la durée d’utilisation d’un flacon après son ouverture (22). La prépondérance des

28

flacons multidoses engendra le développement des conservateurs dès les années soixantes,

même si les recommandations n’ont exigé l’addition d’un agent antimicrobien que vers le

milieu des années soixante-dix. L’efficacité des conservateurs est basée sur un test

d’efficacité, qui consiste en l’inoculation de 1x106

CFU (colon- forming unit) par ml d’un

mélange de bactéries et de champignons. Il doit être observé une réduction de la concentration

bactérienne de 1 Log en une semaine et de 3 Log en deux semaines, sans prolifération des

survivants entre deux et quatre semaines, ainsi que l’absence de prolifération des

champignons entre zéro et quatre semaines (75). De cette règlementation découle deux

conséquences, la durée d’utilisation des flacons est garantie jusqu’à 1 mois et de par leur

action non spécifique, les conservateurs sont toxiques sur les tissus employés. C’est ainsi que

l’EMA (European Medicines Agency) a publié un rapport afin d’éviter l’utilisation des

conservateurs chez les patients intolérants et ceux traités au long cours, et d’utiliser la

concentration minimale efficace des conservateurs (35).

2.3.2 Principaux conservateurs

Il existe un grand nombre de conservateurs utilisés en association avec un ou plusieurs

principes actifs dans les collyres. On les distingue habituellement par leur mode d’action:

chimique, antioxydant ou complexant afin de renforcer l’action d’autres conservateurs.

Les conservateurs chimiques. Les plus utilisés, ils altèrent les membranes cellulaires et

ainsi provoquent une lyse cellulaire :

Les ammoniums quaternaires: Ce sont des agents surfactants dont les

principaux représentants sont le chlorure de benzalkonium (BAK) et le

polyquaternium. Ce sont des composés bipolaires, très hydrosolubles qui présentent

des propriétés tensioactives. Ils agissent principalement par le biais de leurs propriétés

détergentes en dissolvant les parois bactériennes et les membranes cellulaires,

détruisant la couche cytoplasmique semi-perméable. Leur activité est maximale à

37°C en milieu alcalin. Excellents fongicides, leur spectre d’activité comprend aussi

les bactéries Gram + mais aussi sur les bactéries Gram -, en particulier lorsqu’ils sont

couplés à l’acide éthylène diamine tétraacétique (EDTA). On retrouve le BAK dans

une majorité de collyres à des concentrations comprises entre 0,004% et 0,02%, et le

29

plus couramment à 0,01%. Ils sont aussi employés en tant que spermicide et dans de

nombreuses préparations à visée extraoculaire (savon, cosmétiques, produits

nettoyants et désinfectants). D’autres ammoniums quaternaires sont également utilisés

comme: le bromure de benzododécinium, le bromure de cétrimonium ou encore le

chlorure de cétylpyridinium.

Les dérivés mercuriels doivent leur efficacité aux propriétés thioloprives de

l’ion mercuriel. Le thiomersal est le principal représentant de ces dérivés, mais ce type

de conservateur est de moins en moins utilisé en raison d'une fréquence élevée

d'allergies et surtout des problèmes écologiques liés à l'industrie du mercure.

Les alcools comme le chlorobutanol, le phényléthanol, le phénoxyéthanol.

Les parabens ou esters de l’acide parahydroxybenzoïque comme le

parahydroxybenzoate de méthyle, le méthylparaben et le propylparaben.

Les amidines comme le digluconate de chlorhexidine ou le

polyhexaméthylène biguanide peuvent également être utilisés comme conservateurs

dans certains collyres.

Les conservateurs oxydants. Ils pénètrent dans la cellule et interférent avec les

fonctions cellulaires vitales des microorganismes en modifiant les lipides, les protéines ou

l’ADN. On distingue le perborate de sodium (NaBO3), le chlorite de sodium (NaClO2), le

complexe oxychloropurite stabilisé ou encore le stabilized oxyborate complex.

Les conservateurs antioxydants et autres conservateurs. La présence de conservateurs

antioxydants est utile lorsque la formulation contient des corps gras saturés ou des actifs

éminemment oxydables. L’EDTA est généralement utilisé pour renforcer le pouvoir

conservateur des ammoniums quaternaires ou du thiomersal. On peut également citer le

sorbate (acide sorbique) et le Sodium silver chloride complex (complexe à base de chlorure de

sodium d'argent et de sulfate d'argent).

2.3.3 Le chlorure de benzalkonium (BAK)

Le BAK est le conservateur le plus fréquemment retrouvé dans les collyres utilisés

pour le traitement du glaucome. Il possède trois grandes fonctions, comme biocide, comme

surfactant cationique et comme agent de transfert de phase dans l’industrie chimique.

Mélange de chlorure d’alkylbenzyldimethylammonium, sa formule chimique est la

30

suivante : C6H5CH2N(CH3)2RCl, R représentant les radicaux alkyles allant de C8 à C18. Le

BAK a déjà démontré son importante toxicité sur une variété d’organes et de systèmes, selon

un mode temps et dose-dépendant (31).

Figure 5 : formule chimique du chlorure de benzalkonium

Activité bactéricide et fongicide

In vitro, en comparaison avec les autres conservateurs chimiques (paraben,

chlorobutanol) et antioxydants (chlorure d’argent et oxychloropurite stabilisé) le BAK associé

à l’EDTA a été le seul conservateur répondant aux critères d’efficacité antimicrobienne. Il a

de plus une action d’inhibition de la prolifération du Staphylococcus aureus (20). Par contre,

certaines souches de Pseudomonas aeruginosa ont développé une résistance acquise au BAK,

éliminée par l’adjonction d’EDTA (66).

In vivo, l’efficacité du BAK pourrait être moindre, la contamination des flacons

conservés par le BAK après 15 jours d’utilisation répétée a atteint 34,8% (83). Le taux de

contamination est sans doute lié à la stabilité de la molécule qui décroit avec le temps.

BAK et pénétration oculaire

Les effets du BAK sur les membranes cellulaires ont été un argument expliquant

l’augmentation de la pénétration de la molécule active des collyres contenant ce conservateur.

La pénétration transcornéenne de l’aciclovir et de différents antibiotiques s’est révélée

augmentée en présence de BAK (58). La pénétration de la cyclosporine A a également été

améliorée lors de l’utilisation d’un véhicule contenant du BAK (94). Néanmoins, les études

sont controversées, Pellinen et Lokkila ont ainsi montré l’absence de différence de

concentration du principe actif dans l’humeur aqueuse lors de l’utilisation d’une forme

conservée et non conservée du tafluprost (66).

31

La majeure partie du BAK est absorbée par les couches superficielles mais un

certain pourcentage parvient à pénétrer les couches plus profondes qui ne bénéficient pas d’un

lavage par le film lacrymal. Le BAK pourrait ainsi s’infiltrer dans une moindre mesure dans

des tissus encore plus profond et passer dans la circulation générale par drainage veino-

lymphatique.

BAK et contrôle de la PIO

La possibilité d’un meilleur contrôle de la PIO avec un collyre conservé a été

écartée par de nombreuses études et pour la plupart des collyres. Les études sur les

bêtabloquants, puis avec les analogues des prostaglandines (45) et enfin avec l’association

bêtabloquant-inhibiteur de l’anhydrase carbonique (53) ont toutes montré l’absence de

supériorité entre la forme conservée et non conservée sur la baisse de la PIO. Seule

l’efficacité des prostamides serait influencée par la présence du BAK (40).

3. LIGNEES CELLULAIRES

3.1 Généralités

Les lignées cellulaires sont utilisées depuis plus d’un siècle. En 1907, Ross Harrison a

pour la première fois observé la croissance de neuroblastes en culture à partir d’embryons de

grenouille (62). Développée ensuite avec les cellules cancéreuses, les premières cellules mises

en culture ont été isolées par George Gey. Les cellules provenaient d’un cancer du col utérin

de Henrietta Lacks, qui a donné son nom à la lignée cellulaire, les cellules HeLa, encore

utilisées aujourd’hui (61).

Par définition, une lignée cellulaire est une population homogène de cellules qui ont

une capacité illimitée de division en culture tout en gardant les caractéristiques de leur cellule

d’origine. C’est la capacité théorique de division illimitée des cellules cancéreuses qui a

permis leur culture initiale. Actuellement, les lignées cellulaires peuvent être créées en

modifiant les gènes impliqués dans la régulation du cycle cellulaire ou en intégrant un

oncogène. Elles ont de nombreuses applications en recherche biomédicale pour évaluer les

effets de l’environnement ou d’une molécule sur la lignée employée. Elles peuvent aussi être

32

utilisées dans l’industrie pharmaceutique pour la production de molécules à visée

thérapeutique.

Grâce à la possibilité de stockage quasi-infinie dans l’azote liquide, les lignées

cellulaires sont une source de cellules illimitée. Seulement, l’utilisation de lignées cellulaires

n’est pas dénuée d’inconvénients. Les cellules peuvent posséder des caractéristiques de

cellules cancéreuses, limitant ainsi l’interprétation des résultats. La contamination des lignées

cellulaires, par des agents pathogènes ou d’autres lignées cellulaires n’est pas rare, les

techniques de culture doivent donc être parfaitement maîtrisées. En opposition aux cultures

primaires, nécessitant des moyens lourds et onéreux, leur utilisation est largement étendue et

validée dans le domaine de la recherche. De plus, techniquement, les lignées cellulaires ont

l’avantage d’avoir une origine génétique homogène, limitant les variations de phénotypes

liées aux sources des cellules primaires.

3.2 La lignée THP-1

3.2.1 Historique

Mise au point en 1980 (89), la lignée THP-1 provient de cellules d’une leucémie aigue

monocytaire d’un jeune garçon. Les premières études ont décrit cette lignée ayant des

caractères morphologiques de monocytes. L’aspect microscopique montre des cellules

arrondies indifférenciées (figure 6). La lignée exprime en surface les récepteurs au fragment

constant (Fc) des immunoglobulines et au complément (C3b), son haplotype est composé de

HLA-A2, -A9, -B5, -DRW1 et -DRW2. Le caractère monocytaire de la lignée a été confirmé

par l’activité d’estérase d’alpha-naphthyl butyrate, la production de lysozyme, la phagocytose

de particules de latex et la capacité à restaurer la réponse des lymphocytes à la concanavaline

A.

33

Figure 6 : Image en microscopie optique des cellules THP-1, arrondies, non confluentes et

non adhérentes.

3.2.2 THP-1 en tant que lignée macrophagique

Plus tard, Auwerx a décrit la différenciation de la lignée THP-1 en macrophages sous

l’influence d’esters de phorbol (6). Les cellules différenciées adhèrent à la plaque de culture et

acquièrent un phénotype de macrophages avec des changements morphologiques, une forme

aplatie et possédant des pseudopodes, un appareil de Golgi et un réticulum endoplasmique

bien développés, avec de nombreux ribosomes libres dans le cytoplasme. Une fois

différenciées, les cellules surexpriment le CD11b et le CD14, diminuent leur prolifération et

augmentent leur taux de phagocytose. En comparaison avec les principales lignées myélo-

monocytaires (71), les cellules dérivées de la lignée THP-1 sont les plus proches des

macrophages dérivés de monocytes sanguins. La lignée THP-1 a ainsi été largement utilisée

depuis comme modèle d’étude in vitro des mécanismes impliquant les macrophages. Plus

spécifiquement, les cellules THP-1 adhérentes au fond des plaques de culture ont montré des

caractéristiques de macrophages activés (87). Elles possèdent des propriétés morphologiques

34

et fonctionnelles différentes. Avec une activité de phagocytose augmentée, la surexpression

d’HLA-DR et la stimulation d’activité lymphocytaire, la lignée THP-1 confirme son potentiel

d’étude de la lignée macrophagique.

La lignée THP-1 a fait l’objet d’études afin de valider ses propriétés monocytaires et

macrophagiques avec les techniques actuelles. Les interactions cellulaires entre les cellules

THP-1 et les cellules vasculaires et immunitaires se sont révélées concordantes avec les

interactions des monocytes/macrophages dérivés du sang. De plus, l’étude des modifications

du transcriptome, du profil ARNm et des histones a permis de définir les mécanismes de

régulation des cellules THP-1 en réponse à différents médiateurs inflammatoires (71). Les

mécanismes mis en évidence ont confirmé le parallèle entre les THP-1 et les

monocytes/macrophages dérivés du sang.

3.3 Les cellules épithéliales Wong Kilbourne dérivées de Chang (WKD)

La lignée WKD a fait l’objet de nombreuses études dans le domaine de la surface

oculaire et en particulier en toxicologie. La lignée WKD a montré de nombreuses

caractéristiques communes avec les cellules épithéliales conjonctivales, par exemple la

formation de desmosomes, le développement de microvillosités, la présence de récepteur à

l’EGF (epidermal growth factor), l’expression du fragment inducteur d’apoptose (Fas) ou

CD95 et l’absence d’expression basale d’HLA-DR (28). En microscopie optique, les cellules

sont adhérentes au fond de la plaque, étalées avec une tendance à la confluence (figure 7). Les

cellules WKD sont aussi un modèle validé pour l’étude de la production de cytokines, de

facteurs de croissance et de leurs récepteurs, ainsi que dans l’étude des phénomènes

inflammatoires et allergiques.

35

Figure 7 : Image en microscopie optique des cellules WKD, cellules aplaties,

confluentes adhérentes au fond de la plaque de culture.

L’utilisation des cellules WKD a été mise en cause par la découverte d’une

contamination par les cellules de la lignée HeLa (54). La contamination s’est uniquement

manifestée au niveau du caryotype et aucune démonstration de la ressemblance entre les deux

lignées n’a été rapportée. En comparaison avec une autre lignée conjonctivale immortalisée,

non connue pour être contaminée, la lignée IOBA-NHC, les effets d’ordre toxicologique et en

particulier ceux du BAK se sont révélés similaires (16), validant de ce fait l’utilisation de la

lignée WKD.

A travers l’étude de la morphologie, du cycle cellulaire, de l’expression des mucines,

de la réponse à la stimulation au TNF-α et à l’IFN-γ, de leur potentiel présentateur d’antigène

et de la susceptibilité à l’apoptose, les cellules WKD ont été comparées aux cellules

conjonctivales primaires (28). Les résultats entre les deux types cellulaires ont été variables

sur certains points, les cellules WKD ayant une morphologie plus proche des cellules

mésenchymateuses avec un phénotype plus dédifférencié que les cellules conjonctivales

primaires. Les réactions inflammatoires ont été plus importantes dans la lignée primaire, ce

qui laisserait penser que les réactions de la lignée WKD sont amoindries. Ainsi, il faut tenir

compte du fait que les cellules WKD ne possèdent pas toutes les caractéristiques des cellules

épithéliales conjonctivales primaires dans l’interprétation des résultats. Cependant, cette

lignée reste un bon modèle d’étude en particulier dans les interactions cellulaires avec les

lymphocytes (21).

36

CHAPITRE 2 : ETUDE IN VITRO DES EFFETS DU CHLORURE DE

BENZALKONIUM SUR LES MACROPHAGES.

1. INTRODUCTION

L’inflammation et les cellules inflammatoires sont au centre des mécanismes

physiopathologiques impliqués dans les pathologies de la surface oculaire (33). Les réactions

des cellules inflammatoires sont un paramètre clé dans les nombreuses voies de signalisation

et les mécanismes immunitaires de l’inflammation. Les macrophages sont des cellules

phagocytaires mononuclées, jouant un rôle de pivot dans le maintien de l’homéostasie des

tissus dans les conditions physiologiques. Ils servent de sentinelles en éliminant sans réaction

inflammatoire les cellules mortes ou en apoptose et en facilitant la réparation des tissus

endommagés (41). Les macrophages partagent avec les cellules dendritiques le rôle de

cellules présentatrices d’antigène (41). Les macrophages tissulaires produisent des médiateurs

inflammatoires et présentent une hétérogénéité phénotypique selon leur environnement. Bien

que les macrophages conjonctivaux soient localisés dans la substantia propria, sous-jacente à

l’épithélium conjonctival, ils interagissent étroitement avec les cellules épithéliales

conjonctivales et jouent un rôle important dans les pathologies de la surface oculaire. En cas

de conjonctivite allergique, la conjonctive est infiltrée de façon excessive par les macrophages

(49). Les macrophages jouent aussi un rôle dans le trachome en augmentant la sécrétion locale

de facteurs de croissance endothéliaux, fibroblastiques et matriciels (1, 70). De façon

similaire, dans la pemphigoïde cicatricielle oculaire la substantia propria conjonctivale est

infiltrée de façon significative par les macrophages (85).

A cause de l’inflammation infraclinique provoquée par l’utilisation au long cours des

collyres antiglaucomateux, les patients traités pour un glaucome ou HTO souffrent

fréquemment d’une atteinte de la surface oculaire (9). Les conservateurs associés au

composant actif des collyres ont déjà montré leurs effets toxiques dans des études cliniques et

expérimentales, et pourraient être en partie responsables de ces changements tissulaires

inflammatoires (10). Le chlorure de benzalkonium, un ammonium quaternaire, est le

conservateur le plus communément utilisé dans les traitements antiglaucomateux (10). Le

BAK est directement responsable de la perte des cellules à mucus ainsi que de la métaplasie et

l’apoptose des cellules épithéliales conjonctivales, et d’une rupture de la barrière épithéliale

cornéenne (5). Il possède une cytotoxicité dose-dépendante aboutissant à l’apoptose et la

nécrose des cellules épithéliales conjonctivales

(29). Chez les patients traités pour le

37

glaucome, une association entre la sévérité des pathologies de la surface oculaire et le nombre

de collyres contenant du BAK a été établie (10). De même, Malvitte et al. ont montré que

l’expression de marqueurs fibroblastiques et inflammatoires, et l’intensité des réactions

inflammatoires étaient liées à la durée d’exposition et au nombre de collyres contenant des

conservateurs utilisés (59). De nombreuses cellules inflammatoires et en particulier de

macrophages ont été observées dans la substantia propria de la conjonctive après utilisation

au long cours de collyres antiglaucomateux contenant des conservateurs (17, 63, 80). Ces

modifications tissulaires responsables d’une stimulation de la fibrose conjonctivale du site de

filtration en post-opératoire pourraient être la raison principale d’échec de la chirurgie

filtrante du glaucome (18). En comparaison avec les patients traités avec des collyres sans

conservateur, les biopsies conjonctivales de patients traités avec des collyres conservés sont

infiltrées de façon anormale par des macrophages (11). De même, dans un modèle animal

exposé au timolol contenant du BAK, les biopsies conjonctivales présentaient une densité

augmentée de macrophages en comparaison avec les animaux ayant reçu du timolol sans

conservateur (11).

En considérant le rôle essentiel des macrophages dans les pathologies de la surface

oculaire et en particulier chez les patients traités pour glaucome ou une HTO, l’objectif de ce

premier travail a été de caractériser les effets du BAK sur les macrophages in vitro.

2. MATERIELS ET METHODES

2.1 Lignées cellulaires

2.1.1 Lignée monocytaire

Les cellules THP-1 ont été fournies par l’American Type Culture Collection (ATCC,

Rockville, MD). Cette lignée est issue des cellules d’un patient présentant une leucémie aiguë

monocytaire. Ces cellules sont connues pour se différencier en macrophages sous l’effet du

phorbol myristate acétate (PMA) (6). Les cellules ont été cultivées dans un milieu RPMI 1640

38

(Invitrogen life technologies Grand Island, NE) enrichi avec 10% de sérum de veau fœtal

(FBS; HyClone, Logan, USA), 1% de glutamine (Invitrogen), 50 UI/ml de pénicilline et 50

UI/ml de streptomycine (BioSource International, Camarillo, CA). Les conditions de culture

étaient standard en incubateur à 37°C avec 5% de CO2. Afin d’obtenir des cellules

différenciées, les cellules THP-1 ont été ensemencées en plaque 6 puits à 106 cellules/ml et

stimulées avec du PMA (Sigma-Aldrich St Louis, MO) pendant 72 heures à la concentration

de 100nM (6).

2.1.2 Lignée épithéliale conjonctivale

Les cellules conjonctivales Wong-Kilbourne dérivées d’une conjonctive humaine de

Chang (WKD) (clone 1 à 5c-4l, ATCC) ont été cultivées en conditions standard (atmosphère

humidifiée, 5% de CO2 et 37°C) dans un milieu DMEM (Invitrogen) enrichi avec 10% de

sérum de veau fœtal (HyClone), 1% de glutamine (Invitrogen), 50 UI/ml de pénicilline et 50

UI/ml de streptomycine (BioSource International).

2.2 Stimulations

Les cellules THP-1 ont été exposées pendant 72 heures au PMA (différenciation), puis

après renouvellement du milieu de culture, les cellules ont été exposées pendant 24 heures à

du chlorure de benzalkonium (BAK) (Sigma-Aldrich) pour les phénomènes toxiques et

iatrogéniques, du dinitrochlorobenzène (DNCB) (Sigma-Aldrich) en temps qu’allergène de

contact, du lipopolysaccharide (LPS) (Sigma-Aldrich) pour mimer une stimulation

infectieuse, du TNF-α (tumor necrosis factor) (PeproTech, Rocky Hill, NJ) pour mimer une

réaction inflammatoire ou du tampon phosphate isotonique (PBS) comme témoin. Les

surnageants ont été recueillis et stockés à -20°C. Ils ont été recueillis à l’issue de 24 heures

d’exposition aux différents facteurs de stimulation.

Le BAK a été dilué dans du PBS à quatre concentrations : 5.10-4

%, 10-4

%, 5.10-5

% et

10-5

% (3). Après 24 heures d’exposition, les concentrations plus fortes (10-3

% et au-delà) se

sont révélées extrêmement toxiques, empêchant une analyse convenable (données non

39

présentées). Le DNCB a été dilué dans du PBS à quatre concentrations : 10nM, 25nM, 50nM

et 100nM. Le LPS d’Escherichia Coli de sérotype 0111 a été dilué dans du PBS selon une

gamme de quatre concentrations 10ng/ml, 50ng/ml, 100ng/ml et 250ng/ml. Enfin, le TNF-α a

également été dilué en PBS à quatre concentrations : 1ng/ml, 2ng/ml, 5ng/ml et 10ng/ml.

2.3 Expression des marqueurs de surface

Pour déterminer le phénotype des cellules, l’expression de marqueurs membranaires a

été quantifiée en cytométrie en flux (CMF) (Beckman Coulter, Miami, FL). Les cellules

étaient recueillies au grattoir pour les cellules THP-1 et après une incubation de 10 minutes en

EDTA 0,5mM (Sigma-Aldrich) pour les cellules WKD. Les cellules ont été ensuite lavées

puis fixées dans une solution de paraformaldéhyde (PFA) (Alfa Aesar, Ward Hill, MA) à

0,5% pendant 24 heures à 4°C avant d’être marquées. Les anticorps monoclonaux utilisés ont

été : CD11b couplé au fluorescéine isothyocyanate (FITC), CD11c couplé à la phycoérythrine

(PE), CD86 couplé FITC, CD54 couplé FITC, CD33 couplé PE, (BD Biosciences, San Jose,

CA) ainsi qu’un anticorps isotypique de contrôle (IgG1 de souris) (Pharmingen). Chaque

suspension cellulaire correspondant à une condition a été incubée en présence des anticorps

primaires fluorescents pendant 35 minutes ou à l’aide d’un anticorps secondaire de chèvre

anti-souris conjugué au FITC pendant une autre incubation de 35 minutes. Après chaque

incubation les cellules ont été lavées en PBS puis analysées en CMF. Pour les cellules THP-1,

l’expression des marqueurs en CMF a été quantifiée avant et après la différenciation et après

exposition pendant 24 heures aux différents facteurs stimulants.

2.4 Immunohistochimie

Afin de visualiser l’expression des marqueurs de différenciation, les cellules THP-1

ont été mises en culture sur des lames compartimentées (Lab-TekTM

Chamber Slide, NUNC

A/S, Roskilde, Danemark) à raison de 500ml de suspension cellulaire à 106cellules/ml par

compartiment. Après exposition aux différents facteurs, les lames ont été fixées pendant 15

minutes en PFA à 4%. Les lames ont ensuite été lavées trois fois pendant 5 minutes avec du

40

PBS. Puis pendant 1 heure et à température ambiante, une moitié des compartiments a été

incubée avec le CD11c couplé à la PE (Pharmingen) dilué au 1/100ème

en PBS, l’autre moitié

a été incubée avec une solution contenant le contrôle isotypique IgG1 couplé à la PE. Après

trois lavages en PBS, les compartiments ont été démontés et les lames ont été ensuite

recouvertes de lamelles avec un milieu de montage contenant du di-amidino-phénylindole

(DAPI) (Vectashield-DAPI ; Vector Laboratories, Burlingame, USA). Les lames ont été

photographiées sous microscope (DM 6000, Leica Microsystems GmbH, Wetzlar,

Allemagne).

2.5 Etude de la mort cellulaire en CMF à l’aide du test Annexine V / 7-AAD

Ce test comprend deux marquages : le marquage annexine V et l’analyse du contenu

ADN en 7-AAD (7-aminoactinomycin D). L’appareil est équipé d’un laser Argon émettant à

488nm. L’annexine V se fixe spécifiquement aux phosphatidylsérines qui sont exprimées à la

paroi externe de la membrane plasmique dès les phases précoces de l’apoptose. Le 7-AAD est

une sonde fluorescente qui s’intercale aux acides nucléiques des cellules en nécrose ou en

apoptose tardive (91).

Après différenciation pendant 72 heures et exposition aux facteurs de stimulation

pendant les 24 heures suivantes, les cellules ont été recueillies avec un grattoir. L’analyse a

été effectuée à l’aide du kit ANNEXIN V-FITC / 7-AAD (Beckman Coulter) sans fixation des

cellules et selon les recommandations du fabricant. Un histogramme biparamétrique a été

utilisé pour déterminer les marquages en annexine V et 7-AAD. Quatre populations ont été

identifiées, négatives aux deux marqueurs (cellules viables), positives uniquement à

l’annexine V (apoptose précoce), positives à l’annexine V et au 7-AAD (apoptose tardive) et

positives uniquement au 7-AAD (nécrose).

2.6 Etude de la phagocytose

Pour étudier la fonction de phagocytose, les cellules THP-1 ont été ensemencées sur

lames compartimentées (Lab-Tek) et sur des plaques 6 puits. Elles ont été ensuite incubées

pendant 1 heure avec 100µl d’une solution contenant des billes de latex fluorescentes

41

(Invitrogen) à 50µg/ml préalablement incubées pendant une heure dans une solution de PBS

contenant 10% de sérum de veau fœtal pour entraîner une reconnaissance antigénique. Les

cellules cultivées sur lames compartimentées ont été fixées et montées avec lamelle sans

utilisation d’anticorps. Ces lames ont été analysées au microscope avec détection de la

longueur d’onde des microsphères fluorescentes. Les cellules cultivées sur plaque 6 puits ont

été recueillies et fixées (PFA à 0,5% pendant 24 heures) pour analyse en CMF. Le cytomètre

a été calibré pour la détection de la longueur d’onde des microsphères fluorescentes selon un

histogramme monoparamétrique.

2.7 Production de cytokines

L’analyse des cytokines produites a été effectuée sur les surnageants des cellules THP-

1 dans les six conditions différentes précédemment décrites : non différenciées, différenciées

et exposées aux différents facteurs de stimulation : BAK (10-5

%), DNCB (10nM), LPS

(50ng/ml), TNF-α (5ng/ml) ou PBS (1X). Les surnageants correspondaient à la production

cellulaire sur les dernières 24 heures, le milieu étant changé après les 72 heures d’exposition

au PMA. Les surnageants ont été analysés à l’aide d’un kit permettant d’identifier 38

cytokines différentes (Proteome profiler array, ARY005, R&D Systems, Minneapolis, USA).

Les expérimentations ont été effectuées selon les consignes du fournisseur. Les six conditions

d’évaluation représentaient chacune une membrane de nitrocellulose révélée sur film

radiographique (Amersham : GE Healthcare Limited, Buckinghamshire, UK) avec utilisation

d’un agent électroluminescent (Amersham : GE Healthcare Limited) selon les

recommandations du fournisseur. La densité en pixel des spots a été analysée par logiciel

informatique (Macbiophotonics ImageJ®).

2.8 Etude de la migration

Pour évaluer la migration des macrophages, les cellules THP-1 ont été cultivées sur

des membranes perméables avec des pores de 8,0 µm (inserts) (FALCON, BD Biosciences)

en suspension dans les puits. Les cellules conjonctivales WKD ont été ensemencées dans une

42

autre plaque et les deux lignées ont été exposées aux mêmes stimulants. Les inserts contenant

les macrophages ont été ensuite cultivés pendant 4 heures dans les puits contenant les cellules

WKD. Les membranes ont été recueillies, fixées au PFA 4% et montées entre lames et

lamelles avec du DAPI. Les lames ont été ensuite photographiées en focalisant sur la face

supérieure et la face inférieure de la membrane. La migration des cellules a été mesurée en

comparant le ratio du nombre de noyaux sur la face inférieure par rapport au nombre de

noyaux sur la face supérieure de la membrane pour chaque condition. Le décompte des

noyaux a été effectué à l’aide du logiciel ImageJ® .

2.9 Analyses statistiques

Dans cette étude, toutes les expérimentations ont été réalisées trois fois. Pour les

comparaisons multiples entre les différentes conditions, le test non paramétrique de Kruskall-

Wallis avec comparaisons multiples par paires et correction de Bonferroni a été utilisé. Pour

les comparaisons simples entre deux conditions, un test t de Student non apparié a été réalisé.

Une valeur de p<0,05 a été considérée comme significative.

3. RESULTATS

3.1 Les cellules THP-1 ont été différenciées en macrophages.

Après 72h en PMA, la morphologie des cellules THP-1 était modifiée en microscopie

optique: Au départ rondes et non adhérentes, elles prenaient un aspect dendritiforme et

adhéraient au fond de la plaque (figure 8).

Sur le plan phénotypique, l’expression des marqueurs de différenciation analysée en

CMF a été modifiée après exposition au PMA avec une surexpression du CD11b (p=0,031),

CD11c (p=0,033), CD54 (p=0,002) ainsi qu’une diminution de l’expression du CD33

43

(p=0,049), tant en pourcentage d’expression (données non présentées) qu’en intensité de

fluorescence (figure 9).

En immunohistochimie sur lames, une forte expression membranaire du CD11c a été

observée sur les cellules différenciées en comparaison avec les cellules indifférenciées (figure

10).

Figure 8 : Aspect en microscopie optique (x400) des cellules THP-1 non différenciées (à

gauche) ayant un aspect ovalaire sans adhérence au fond de la plaque) et différenciées (à

droite) avec un aspect dendritique et adhérente au fond de la plaque.

44

Figure 9 : Quantification en ratio d’intensité de fluorescence de l’expression membranaire du

CD86, CD54, CD11b, CD11c et CD33 des THP-1 indifférenciées et différenciées.

Augmentation significative de l’expression du CD54 (p=0,033, *), CD11b (p=0,031, §),

CD11c (p=0,002, #) et diminution significative de l’expression du CD33 (p=0,049, +).

Figure 10 : Marquage direct du CD11c en immunofluorescence sur des cellules THP-1

indifférenciées (à gauche) et différenciées (à droite) ; noyaux colorés au DAPI en bleu ;

marquage du CD11c en rouge. Noter la nette surexpression du CD11c sur la membrane des

cellules THP-1 différenciées.

Rat

io d

e fl

uo

resc

ence

mo

yen

45

3.2 Pour les concentrations utilisées, le BAK et le DNCB entraînaient une modification de

la viabilité cellulaire selon une courbe concentration dépendante.

L’exposition aux faibles concentrations de BAK (de 5.10-5

% à 10-5

%) et de DNCB (de

10nM à 25nM) était comparable au témoin en termes de cytotoxicité (figures 11 et 12). Les

concentrations plus fortes (10-4

% et 5.10-4

% pour le BAK, et 50 et 100nM pour le DNCB) ont

induit une augmentation des pourcentages de cellules en apoptose tardive et en nécrose sans

modifier ceux de l’apoptose précoce. Ceci a permis de déterminer les doses non cytotoxiques :

10-5

% pour le BAK et 10nM pour le DNCB.

Figure 11 : Détermination en CMF des taux d’apoptose et de nécrose des cellules THP-1

différenciées en fonction de la concentration de BAK par marquage annexine V /7-AAD après

24h d’exposition. Le BAK 5.10-4

% induisait une cytotoxicité totale supérieure à 60%.

46

Figure 12 : Détermination en CMF des taux d’apoptose et de nécrose des cellules THP-1

différenciées en fonction de la concentration de DNCB par marquage annexine V /7-AAD

après 24h d’exposition. Les concentrations les plus élevées (50 et 100nM) ont entrainé une

cytotoxicité totale supérieure à 60%.

3.3 L’exposition au LPS et au TNF-α n’a pas entraîné d’effet cytotoxique aux

concentrations étudiées.

Il n’a pas été observé de différence significative en termes de cytotoxicité sur les

cellules THP-1 différenciées après exposition pendant 24h au LPS (10 à 250ng/ml) ou au

TNF-α (1 à 10ng/ml) (figure 13 et 14) par rapport au groupe contrôle.

47

Figure 13 : Détermination en CMF des taux d’apoptose et de nécrose des cellules THP-1

différenciées en fonction de la concentration de LPS par marquage annexine V / 7-AAD après

24h d’exposition. Les concentrations utilisées (10 à 250ng/ml) n’ont pas modifié les

marqueurs de mort cellulaire.

Figure 14 : Détermination en CMF des taux d’apoptose et de nécrose des cellules THP-1

différenciées en fonction de la concentration de TNF-α par marquage annexine V / 7-AAD

48

après 24h d’exposition. Les concentrations utilisées n’ont pas modifié les marqueurs de mort

cellulaire.

3.4 L’expression des marqueurs de différenciation des cellules THP-1 différenciées a été

modifiée après exposition au BAK, DNCB, LPS et TNF-α.

L’expression membranaire du CD11b par les cellules THP-1 différenciées n’a été

augmentée qu’après exposition au BAK à 10-5

et 5.10-5

% (p=0,033 et p=0,032,

respectivement) par rapport au PBS. Le DNCB, le LPS et le TNF-α n’ont pas modifié

l’expression du CD11b (figure 15).

L’expression membranaire du CD11c était augmentée après exposition au LPS (10,

50, 100, et 250ng/ml ; p=0,039, p=0,010, p=0,035 et p=0,032, respectivement) et au TNF-α

(1, 2, 5 et 10ng/ml ; p=0,033, p=0,047, p=0,033 et p= 0,033, respectivement) par rapport au

PBS. L’expression du CD11c n’était augmentée après exposition au BAK ou au DNCB

qu’aux concentrations les plus faibles : 10-5

% pour le BAK (p=0,005) et 10nM pour le DNCB

(p=0,004) (figure 16).

L’expression membranaire du CD54 était augmentée avec le LPS à 50, 100 et

250ng/ml (p=0,001, p=0,007 et p=0,008, respectivement). L’exposition au TNF-α n’a pas

entraîné de modification de l’expression du CD54. Seules les fortes concentrations de BAK

(5.10-4

%) (p=0,009) et de DNCB (50 et 100nM, p=0,012 et p=0,03, respectivement) ont

entraîné une diminution de l’expression du CD54 (figure 17).

L’expression du CD33 n’était pas diminuée après exposition au LPS et au TNF-α aux

concentrations utilisées. Dans le groupe exposé au BAK, l’expression du CD33 était corrélée

à la concentration de BAK, l’expression de CD33 était diminuée aux concentrations faibles de

BAK (10-5

% et 5.10-5

%, p=0,003 et p=0,007, respectivement). Dans le groupe exposé au

DNCB, l’expression était diminuée aux fortes concentrations de DNCB (50 et 100nM)

(p=0,031) (figure 18).

49

Figure 15 : Expression en CMF du CD11b par les THP-1 indifférenciées (1ère

colonne de

chaque groupe) et différenciées (2ème

colonne de chaque groupe) puis stimulées avec les

différents facteurs à doses croissantes. L’expression du CD11b a été augmentée avec le BAK

5.10-5

et 10-5

% (p=0,033, * et p=0,032, §, respectivement).

Rat

io d

e fl

uo

resc

ence

mo

yen

10-5

5.10-5

10-4

5.10-4

10 25 50 100 10 50 100 250 1 2 5 10

50

Figure 16 : Expression en CMF du CD11c par les THP-1 indifférenciées (1ère

colonne de

chaque groupe) et différenciées (2ème

colonne de chaque groupe) puis stimulées avec les

différents facteurs à doses croissantes. L’expression a été augmentée pour les faibles doses de

BAK (10-5

%, p=0,005, *) et DNCB (10nM, p=0,004, §) et pour toutes les doses de LPS (10,

50, 100 et 250ng/ml, p=0,039, #; p=0,010, ##; p=0,035, ### et p=0,032, ####,

respectivement) et TNF-α (1, 2, 5 et 10ng/ml, p=0,033, +; p=0,047, ++; p=0,033, +++ et

p=0,033, ++++ respectivement).

Figure 17 : Expression en CMF du CD54 par les THP-1 indifférenciées (1ère

colonne de

chaque groupe) et différenciées (2ème

colonne de chaque groupe) puis stimulées avec les

différents facteurs à doses croissantes. L’expression du CD54 n’a été augmentée que sous

l’effet du LPS à 50, 100 et 250ng/ml (p=0,001, +, p=0,007, ++ et p=0,008, +++) et a été

Rat

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oye

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10-5

5.10-5

10-4

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Rat

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5.10-5

10-4

5.10-4

10 25 50 100 10 50 100 250 1 2 5 10

51

diminuée aux fortes concentrations de BAK (5.10-4

%, p=0,009, *) et de DNCB (50 et 100nM,

p=0,012, # et p=0,03, §).

Figure 18 : Expression en CMF du CD33 par les THP-1 indifférenciées (1ère

colonne de

chaque groupe) et différenciées (2ème

colonne de chaque groupe) puis stimulées avec les

différents facteurs à doses croissantes. Après une forte diminution sous l’effet de la

différenciation, l’expression du CD33 ne variait plus par rapport aux cellules différenciées

sous DNCB, LPS et TNF-α, par contre dans le groupe BAK, l’expression était d’autant plus

diminuée que les doses employées étaient faibles (10-5

% et 5.10-5

%, p=0,003, * et p=0,007, #,

respectivement).

3.5 Les cellules THP-1 exposées au BAK, LPS et TNF-α ont augmenté leur capacité de

phagocytose.

En microscopie optique à fluorescence (figure 19), l’observation de particules

fluorescentes a été plus importante dans les cellules différenciées confirmant un

accroissement des capacités de phagocytose liée à la différenciation.

En CMF, le pourcentage de cellules contenant des microsphères de carboxylate

fluorescent était augmenté dans le groupe de cellules différenciées (48,3 ± 3%) par rapport

aux cellules indifférenciées (5,1 ± 0,6%, p=0,005). De plus, une augmentation significative de

la phagocytose a été observée sous l’effet du BAK (61,4 ± 4,7%, p=0,015), du LPS (72,4 ±

Rat

io d

e fl

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10-5

5.10-5

10-4

5.10-4

10 25 50 100 10 50 100 250 1 2 5 10

52

7,6%, p<0,0001) et du TNF-α (60,2 ± 9,3%, p=0,03) par rapport aux cellules différenciées

exposées au PBS (figure 20).

Figure 19 : Visualisation en microscopie à fluorescence des microsphères de carboxylate

fluorescentes en rouge dans les cellules THP-1 indifférenciées à gauche et les cellules THP-1

différenciées à droite (contremarquage des noyaux au DAPI en bleu, x400).

Figure 20 : Pourcentage de cellules THP-1 contenant des microsphères de carboxylate évalué

en CMF. Les cellules différenciées ont présenté un taux de phagocytose plus élevé que les

cellules indifférenciées; une augmentation du taux de phagocytose a été observé après 24h en

BAK à 10-5

% (p=0,015, *), en LPS (50ng/ml) (p<0,0001, #) et en TNF-α (p=0,03, §) par

rapport aux cellules différenciées.

3.6 Les cellules THP-1 différenciées (macrophages) ont présenté un accroissement de

leurs capacités de migration sous l’effet du BAK et du TNF-α.

Po

urc

enta

ge m

oye

n d’exp

ression

des

mic

rosp

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53

Po

urc

enta

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s ay

ant

mig

Les cellules non différenciées n’avaient pas de migration active (2,1 ± 0,7%). Les

cellules macrophages différenciés des THP-1 avaient un taux de migration de 9,2 ± 1,5 %,

significativement plus élevé (p=0,004). Le taux de migration était plus élevé lorsque les

macrophages étaient exposés au BAK (16,2 ± 2,1%, p=0,001) et au TNF-α (29,9 ± 4,7%,

p<0,0001) par rapport aux macrophages exposés au PBS. Il n’a pas été observé de différence

significative avec le DNCB et le LPS (figure 21).

Figure 21 : Evaluation des pourcentages de migration à travers une membrane perméable des

cellules THP-1 indifférenciées, différenciées puis exposées au BAK (10-5

%), DNCB (10nM),

LPS (50ng/ml) et TNF-α (5ng/ml). Le taux de migration a été plus élevé lorsque les cellules

différenciées ont été exposées au BAK (16%, p=0,001, *) et au TNF-α (30%, p<0,0001, #)

par rapport aux cellules différenciées. Il n’a pas été trouvé de différence significative avec le

DNCB et le LPS.

3.7 L’expression des cytokines par les cellules THP-1 a été modifiée en fonction de la

différenciation et de l’exposition aux différents facteurs de stimulation (tableau I).

L’analyse des surnageants de culture des cellules indifférenciées a révélé la présence

de MCP-1 et de MIF (à un taux de plus de 50% par rapport au contrôle) ainsi que de faibles

quantités d’IL1ra, IL-8, PAI-1 et CCL5 (environ 10% par rapport au contrôle) (figure 22).

Les surnageants des cellules THP-1 différenciées (macrophages) contenaient plus de

cytokines. En plus de celles trouvées précédemment avec les cellules THP-1 indifférenciées,

d’autres cytokines ont été produites : C5a, CXCL10, IL1ra, CCL3, CCL5, MIF à doses

54

élevées (plus de 65% par rapport au contrôle) et CCL1, GM-CSF et TNF-α à doses plus

faibles (entre 15 et 35% par rapport au contrôle).

Après exposition aux facteurs de stimulation, les surnageants des macrophages

(cellules THP-1 différenciées) contenaient les cytokines précédemment observées sur les

cellules non stimulées mais aussi d’autres cytokines : CCL1, CD54 soluble, IL-1β, CCL4,

TNF-α à doses élevées (plus de 65% par rapport au contrôle) et CXCL11 à dose faible (moins

de 20% par rapport au contrôle). A noter la présence de CXCL1 et d’IL-16 (plus de 60% par

rapport au contrôle) dans les groupes DNCB et LPS. De plus, le surnageant des cellules

exposées au LPS (50ng/ml) contenait d’autres cytokines : G-CSF, IL-1α, IL-6 et IL-10 à

doses élevées (entre 40 et 90% par rapport au contrôle) et IFN-γ, IL-23, CXCL12 et sTREM-1

à doses faibles (environ 20% par rapport au contrôle). Il n’y avait pas de différence

d’expression des cytokines testées dans les surnageants des cellules exposées au TNF-α et au

BAK.

55

THP-1

Non

différenciées

Différenciées

+ PBS

Différenciées

+ BAK

Différenciées

+ DNCB

Différenciées

+ LPS

Différenciées

+ TNF-α

C5a 0 81±9 74±3 91±1 89±4 64±11

CD40L 0 1±2 0 18±11 13±8 0

G CSF 0 0 0 8±3 63±13 0

GM CSF 0 19±6 17±3 19±7 87±12 9±4

CXCL1 0 8±2 13±2 68±3 87±8 9±2

CCL1 0 31±9 73±10 94±8 90±8 74±7

sCD54 0 23±4 72±9 93±5 93±4 69±6

IFN-y 0 0 0 12±8 12±7 0

IL-1 α 0 0 0 13±9 84±5 0

IL-1 β 0 5±1 74±6 89±5 86±4 71±5

IL-1ra 5±1 90±12 74±7 88±2 86±2 75±5

IL-2 0 0 0 11±7 7±2 0

IL-4 0 0 0 3±1 3±1 0

IL-5 0 0 0 3±1 3±1 0

IL-6 0 8±2 1 8±6 93±7 7±3

IL-8 8±2 84±11 72±4 89±4 82±5 60±4

IL-10 0 0 0 17±6 43±13 0

IL-12 p70 0 0 0 13±2 19±5 0

IL-13 0 0 0 15±4 11±1 0

IL-16 0 2 9±2 60±2 65±5 3±1

IL-17 0 0 0 4±1 4±1 0

IL-25 0 0 0 7±2 4±1 0

IL-23 0 0 0 8±1 15±4 0

IL-27 0 0 0 5±1 6±1 0

IL-32α 0 0 0 4±1 5±2 0

CXCL10 0 49±4 75±6 91±5 86±2 76±3

CXCL11 0 0 19±7 14±1 21±3 17±2

MCP-1 88±6 84±11 74±5 91±6 87±5 70±5

MIF 51±10 76±7 75±4 85±6 90±5 74±6

CCL3 0 76±13 75±6 89±7 89±5 74±7

CCL4 0 8±4 75±13 90±4 86±4 74±6

PAI-1 11±2 79±9 74±9 85±6 81±7 73±8

CCL5 6±1 94±6 75±7 86±5 78±1 76±4

CXCL12 0 0 0 18±4 18±5 0

TNF-α 0 15±3 70±7 88±8 81±5 84±4

sTREM-1 0 0 0 25±5 25±5 0

Tableau I : Intensité des spots révélés sur les films radiographiques correspondant à la

quantité de cytokines présente dans les surnageants de culture des cellules THP-1

indifférenciées, différenciées et exposées 24h au BAK (10-5

%), DNCB (10nM), LPS

(50ng/ml) et TNF-α (5ng/ml). Les valeurs sont exprimées en pourcentage d’expression, les

chiffres en gras correspondent à une valeur différente statistiquement par rapport aux cellules

THP-1 différenciées exposées au PBS. Les déviations standard inférieures à 1 n’ont pas été

représentées.

56

Expression des cytokines par les cellules THP1

Indifférenciée

s

Différenciées BAK DNCB LPS TNF-α

Figure 22 : Films radiographiques correspondant aux membranes de nitrocellulose sur

lesquelles ont été dosés les surnageants des cellules THP-1 indifférenciées et différenciées

puis exposées au BAK (10-5

%), DNCB (10nM), LPS (50ng/ml) ou au TNF-α (5ng/ml).

Chaque couple de point représente la mesure d’une molécule, les résultats ont été regroupés

dans le tableau I.

4. DISCUSSION

Dans cette étude in vitro nous avons procédé à la différenciation des cellules THP-1 en

macrophages, selon une procédure largement validée (6). Les cellules THP-1 sont devenues

une des lignées cellulaires les plus employées pour étudier la fonction et la régulation des

macrophages in vitro (71). La lignée cellulaire est issue de cellules d’une leucémie aigue

monocytaire qui ne possède pas toutes les caractéristiques des cellules dérivées du sang (27).

Néanmoins, au vu de l’association de la morphologie et des marqueurs fonctionnels présentés

par les cellules THP-1 différenciées, ces cellules sont communément utilisées en tant que

cellules présentatrices d’antigène in vitro (38). Dans cette étude, nous avons sélectionné les

cellules THP-1 différenciées adhérentes au fond des puits de culture comme précédemment

décrit (89). Ces cellules avaient un aspect dendritiforme et des capacités d’adhésion, capacités

partagées par les cellules dendritiques et les macrophages (41). Ces changements

morphologiques étaient aussi associés à l’expression de CD11b, un marqueur de macrophages

conjonctivaux (41), et de CD11c, un marqueur de cellules dendritiques conjonctivales (41).

57

De plus, une diminution de l’expression de CD33, un marqueur des cellules myéloïdes qui

diminue avec la différenciation des cellules (43), a confirmé le phénotype différencié de ces

cellules. Les cellules THP-1 différenciées ont aussi démontré des capacités de migration et de

phagocytose communes aux cellules présentatrices d’antigène in vitro.

Le BAK est largement utilisé dans les collyres comme conservateur. Sa toxicité et ses

effets pro inflammatoires sur les cellules épithéliales de la surface oculaire sont connus (9, 29,

63). Exposées à une concentration de BAK à 0.0001%, la croissance des cellules épithéliales

conjonctivales et cornéennes est réduite, et les cellules deviennent apoptotiques à des

concentrations plus élevées

(29). Le BAK est aussi responsable de la production de

médiateurs de l’inflammation et de cytokines proinflammatoires par les cellules

inflammatoires cutanées selon une relation directe entre l’intensité des signes cliniques

d’irritation et la libération in vitro de médiateurs proinflammatoires (90). Dans notre étude,

une faible concentration de BAK (10-5

%) a été utilisée dans le but d’être en dessous des effets

cytotoxiques directs sur les macrophages et de mieux reproduire les effets du BAK observés

in vivo sur les tissus de la surface oculaire. Ainsi, nous avons montré que de faibles

concentrations de BAK stimulaient les macrophages sur le plan de la migration, de la

production de chimiokines, de la phagocytose et de l’expression de marqueurs cellulaires.

En utilisant la même lignée cellulaire THP-1, Hirota et al. ont observé que le BAK à 10-

4%

n’induisait pas de production de CCL4 ou MIP-1β et de CD86 in vitro (47). De façon plus

intéressante, pour Lim et al., la concentration d’inhibition de la prolifération cellulaire des

THP-1 à 50% était de 3.2x10-4

% pour le BAK. Cette concentration de BAK entrainait une

diminution de la production de CCL4 par les cellules THP-1, tandis que des concentrations

plus faibles (3.2x10-5

% and 3.2x10-6

%) n’avaient aucun effet sur la production de CCL4 (57).

Nous avons observé de façon similaire qu’une faible concentration de BAK n’induisait pas de

production de CCL4 par les cellules THP-1, toutefois, cette concentration (10-5

%) augmentait

la production de CCL4 par les macrophages (cellules THP-1 différenciées), ce qui n’avait pas

été évalué dans les deux précédentes études. Les cellules THP-1 doivent ainsi être

différenciées en macrophages pour être stimulées par de faibles concentrations de BAK. Il a

été démontré auparavant que le BAK induisait la libération de cytokines inflammatoires (IL-

1β, IL-8, CXCL1, CCL3, CCL5 and MCP-1) par le parenchyme vaginal (4, 24). Sur la peau

de l’oreille, l’application de BAK libère des chimiokines inflammatoires comme TNF-α, IL-

1β et MIP-1α et MIP-1β (74).

Sur les cellules de la surface oculaire, le BAK induit la

production d’IL-1 et de TNF-α par les cellules conjonctivales et cornéennes (37). Dans l’étude

présentée ici, les surnageants de macrophages stimulés par le BAK ont montré l’expression

58

d’ICAM-1, IL-8, CCL4, IL-1β et TNF-α. De façon intéressante, ICAM-1 et IL-8 ont aussi été

retrouvés sur les empreintes conjonctivales de patients traités avec des collyres

antiglaucomateux contenant du BAK (10). Le BAK a induit in vitro la production par les

macrophages de chimiokines similaires à celles retrouvées in vivo dans les tissus exposés au

BAK (4, 24, 74). Ces résultats soulignent les effets stimulant des macrophages in vivo.

Afin de mieux évaluer les effets du BAK sur les macrophages, d’autres facteurs

reproduisant des pathologies de la surface oculaire ont été utilisés : le DNCB, le TNF-α et le

LPS. Le DNCB est un allergène dérivé du benzène qui est responsable de dermite de contact

(97). Il possède un rôle stimulant pour les cellules présentatrices d’antigène, en augmentant

l’expression des marqueurs cellulaires (HLA-DR, CD86, CD40 et CD54), la prolifération des

lymphocytes T et la production de TNF-α, ainsi que l’expression du récepteur aux

chimiokines Cys-Cys 7 (CCR7) (13). Le DNCB est considéré comme un allergène in vivo, au

regard de son action proinflammatoire sur les macrophages (13, 97). Sur les macrophages

issus des cellules THP-1, nous avons observé que le DNCB induisait une surexpression de

CD11c et la libération de chimiokines proinflammatoires (CXCL1, IL-16, CCL1, CD54

soluble, IL-1β, CCL4 et TNF-α) mais le DNCB n’avait pas d’effet sur la migration et la

phagocytose. Le LPS et le TNF-α sont tous deux des facteurs stimulants connus pour les

fonctions de migration, de phagocytose et la production de chimiokines par les macrophages,

le LPS est exprimé sur la membrane externe des bactéries Gram -, ces effets pro

inflammatoires sur les cellules conjonctivales et les cellules présentatrices d’antigène ont été

largement démontrés (23, 78). Le TNF-α est un médiateur de l’inflammation produit par

différents types cellulaires qui agit en induisant la production de chimiokines, de molécules

d’adhésion et de co-stimulation par les cellules inflammatoires (32). Dans l’étude présentée

ici, l’expression du CD11b et du CD11c par les macrophages induite par le BAK, le LPS et le

TNF-α étaient comparables. De même, sur le plan de la phagocytose, aucune différence n’a

été observée entre les effets stimulants du BAK, du LPS et du TNF-α. Le LPS était le facteur

stimulant le plus actif sur le plan de la production de chimiokines par les macrophages. Le

TNF augmentait l’expression de CD54 par les macrophages, expression qui n’était pas

modifiée par les autres facteurs (BAK, TNF-α et DNCB). Pour la migration des macrophages,

le TNF-α a eu l’effet le plus important, en comparaison avec les effets observés par le LPS et

le BAK. Malgré quelques variations en fonction des propriétés stimulées, une faible

concentration de BAK pourrait agir comme un facteur stimulant comparable au TNF-α et au

LPS au niveau de la surface oculaire.

59

Le BAK est considéré comme un agent cytotoxique au regard de ces effets sur les cellules

épithéliales conjonctivales (29, 31), mais peu considéré comme un facteur stimulant direct sur

les cellules inflammatoires (9). De faibles concentrations de BAK, telles qu’observées chez

les patients traités au long cours avec des collyres hypotonisants contenant des conservateurs

pourraient être directement responsables du recrutement des macrophages et de

l’augmentation de leurs capacités migratoires. De façon intéressante, dans notre étude, les

macrophages exposés au BAK ont davantage migré en présence de cellules épithéliales

conjonctivales. Il a été précédemment démontré que le TNF-α induisait un effet pro-

migratoire sur les cellules dendritiques de la cornée (30). Cet effet similaire sur la migration

provoqué par le BAK pourrait être lié à une production de TNF-α induite par le BAK et

démontrée dans notre étude. Peu d’études ont analysé les effets du BAK sur les fonctions de

phagocytose des macrophages. Les cellules épithéliales conjonctivales exposées au BAK

contiennent des phagosomes et des autolysosomes (19), conduisant à leur phagocytose par les

autres cellules. In vitro, nous avons observé que la fonction de phagocytose des macrophages

était augmentée par l’exposition au BAK. La surexpression du CD11b et du CD11c facilitant

la phagocytose de particules recouvertes de complément (81) pourrait expliquer cet effet du

BAK sur les macrophages. Ainsi, dans les tissus de la surface oculaire, le BAK pourrait

activer la phagocytose en induisant l’apoptose et l’autophagie des cellules épithéliales

conjonctivales et en stimulant directement les macrophages.

5. CONCLUSION

Ces résultats suggèrent que les macrophages sont en partie responsables des réactions

inflammatoires observées lorsque les tissus de la surface oculaire sont exposés au BAK. Des

concentrations infra toxiques de BAK se sont révélées stimulantes pour certaines fonctions

macrophagiques. Il a été montré dans la littérature que le BAK était responsable d’une

infiltration de macrophages dans la conjonctive et de l’expression de marqueurs

inflammatoires et de fibrose chez les patients traités pour glaucome ou HTO (11, 17, 63, 80).

Dans cette étude in vitro, nous avons utilisé une concentration plus faible de BAK (10-5

%)

que celles utilisées dans les collyres antiglaucomateux (0,025 à 0,004%). Cependant, chez les

patients recevant des collyres hypotonisants contenant des conservateurs, les macrophages et

les cellules dendritiques de la surface oculaire devraient être exposés à des concentrations plus

60

faibles de BAK à cause de la dilution dans le film lacrymal et la localisation profonde des

macrophages en comparaison avec la localisation superficielle des cellules épithéliales

conjonctivales. Les effets proinflammatoires induits par les collyres conservés et le BAK en

particulier, sont responsables de symptômes d’irritation de la surface oculaire constituant un

véritable obstacle à l’observance des traitements du glaucome. De plus, l’infiltration de

macrophages dans la conjonctive a été mise en cause, au moins en partie, dans les processus

de cicatrisation pathologiques observés après chirurgie filtrante (18, 46). Nos résultats mettent

une fois de plus en avant le rôle du BAK dans ces changements tissulaires conjonctivaux. En

considérant le pouvoir stimulant du BAK sur les macrophages, le BAK devrait être évité

avant chirurgie filtrante au moins pendant la période pré-opératoire immédiate.

61

CHAPITRE 3 : ANALYSE IN VITRO DES RELATIONS ENTRE LES

MACROPHAGES ET LES CELLULES EPITHELIALES

CONJONCTIVALES

1. INTRODUCTION

Les cellules épithéliales conjonctivales, par l’intermédiaire des marqueurs

proinflammatoires qu’elles expriment lorsqu’elles sont soumises à des substances irritantes,

posséderaient un rôle immunomodulateur sur la surface oculaire (96). Dans la première partie

de ce travail, nous avons démontré que de faibles concentrations de BAK avaient un effet

stimulant sur les macrophages in vitro. Il existe probablement des mécanismes de recrutement

des macrophages induits par le BAK, directement liés à l’effet du BAK sur les macrophages

comme démontré précédemment mais aussi par l’intermédiaire de l’effet du BAK sur les

cellules épithéliales conjonctivales. L’objectif de cette deuxième partie a donc été d’analyser

les interactions entre les cellules épithéliales conjonctivales et les macrophages lors d’une

stimulation par le BAK.

2. MATERIELS ET METHODES

2.1 Lignées cellulaires

2.1.1 Lignée monocytaire

Les cellules de la lignée THP-1 ont été utilisées après différenciation en macrophages

selon la méthode employée en première partie.

62

2.1.2 Lignée épithéliale conjonctivale

Les cellules conjonctivales Wong-Kilbourne dérivées d’une conjonctive humaine de

Chang (WKD) (clone 1 à 5c-4l, ATCC) ont été cultivées en conditions standard (atmosphère

humidifiée, 5% de CO2 et 37°C) dans un milieu DMEM (Invitrogen) enrichi avec 10% de

sérum de veau fœtal (HyClone), 1% de glutamine (Invitrogen), 50 UI/ml de pénicilline et 50

UI/ml de streptomycine (BioSource International).

2.2 Stimulations

Les cellules WKD ont été ensemencées dans des plaques 6 puits à la concentration de

80 000 cellules/ml à raison de 2 ml par puits. Après 48 heures de culture et renouvellement du

milieu, les cellules ont été exposées pendant 24 heures au BAK à 10-5

%, au DNCB à 10nM,

au LPS à 50ng/ml ou au TNF-α à 5ng/ml. Comme précédemment décrit, les cellules THP-1

ont été exposées pendant 72 heures au PMA (différenciation), puis après renouvellement du

milieu de culture, les cellules ont été exposées pendant 24 heures à du BAK, du DNCB, du

LPS, du TNF-α ou PBS. Seules les concentrations infra toxiques déterminées dans la première

partie de ce travail ont été utilisées, soit le BAK 10-5

%, le DNCB 10nM, le LPS 50ng/ml et le

TNF-α 5ng/ml. Les surnageants ont été recueillis et stockés à -20°C. Ils ont été recueillis suite

à 24 heures d’exposition aux différents facteurs de stimulation.

2.3 Analyse de l’effet des facteurs stimulants sur les cellules épithéliales conjonctivales en

cytométrie en flux.

L’analyse en CMF a été réalisée après 24 heures d’exposition aux différents facteurs

de stimulation. Les cellules WKD ont été recueillies après une incubation de 10 minutes en

EDTA 0,5mM (Sigma-Aldrich) pour favoriser le décollement des cellules de la plaque. Les

cellules ont été ensuite lavées puis fixées dans une solution de PFA (Alfa Aesar, Ward Hill,

USA) à 0,5% pendant 24 heures à 4°C avant d’être marquées. Les anticorps monoclonaux

63

utilisés étaient : CD54 (FITC), CD40 (FITC), CD63 (FITC), CD95 (FITC) (Pharmingen, San

Diego, USA), CD33 (PE), (BD Biosciences, San Jose, USA), EMMPRIN (Extracellular

Matrix Metalloproteinase Inducer) (Santa Cruz Biotechnology, Santa Cruz, USA) ainsi qu’un

anticorps isotypique de contrôle (IgG1 de souris) (Pharmingen). Chaque suspension cellulaire

correspondant à une condition a été incubée en présence des anticorps primaires directement

fluorescents pendant 35 minutes ou contremarquée à l’aide d’un anticorps secondaire de

chèvre anti-souris conjugué au FITC pendant une autre incubation de 35 minutes. Après

chaque incubation les cellules ont été lavées en PBS puis finalement analysées en CMF.

2.4 Production de cytokines

Les surnageants des cellules conjonctivales ont été analysés à l’aide d’un kit

permettant d’identifier 38 cytokines différentes (R&D Systems) selon une méthode décrite

précédemment dans ce travail. Les six conditions d’évaluation représentaient chacune une

membrane de nitrocellulose révélée sur film radiographique (GE Healthcare Limited) avec

utilisation d’un agent électroluminescent (GE Healthcare Limited) selon les recommandations

du fournisseur. La densité en pixel des spots a été analysée par logiciel informatique (ImageJ).

L’intensité de production de cytokine est exprimé en pourcentage, ce pourcentage est calculé

en rapportant la mesure à l’intensité du contrôle négatif, 100% correspondant à l’intensité du

contrôle positif.

2.5 Interactions entre les cellules WKD et les cytokines produites par les macrophages

Les cellules WKD ont été cultivées avec les surnageants des cellules THP-1 selon les

conditions présentées précédemment. Les milieux de culture des THP-1 et des cellules WKD

étant différents, les surnageants ont été filtrés avec une centrifugeuse (AvantiR J-E, Beckman

Coulter) à haute vélocité à 4000G, à 4°C pendant 10 minutes dans des tubes de filtration

(Merck Milipore). L’ultrafiltrat de surnageant contenant les cytokines (200µL à partir d’une

base de 2 mL) a été ensuite complété par du milieu DMEM et utilisé comme milieu de culture

pour les cellules WKD. Les six conditions précédemment décrites ont été évaluées. Après 24

64

heures d’exposition, les cellules WKD ont été recueillies après décollement de la plaque par

de l’EDTA (Sigma-Aldrich) et fixées en PFA 0,5% pendant 24 heures à 4°C avant analyse en

CMF. Les marqueurs utilisés étaient le CD40 (FITC), CD63 (FITC), CD95 (FITC) HLA-DR

(FITC) (Pharmingen) et EMMPRIN (Santa Cruz Biotechnology).

2.6 Interactions entre les macrophages et les cytokines produites par les cellules WKD

Les macrophages issus de la lignée THP-1 ont été cultivés avec les surnageants des

cellules WKD soumises aux différentes conditions de stimulation précédemment décrites. Les

surnageants des WKD ont été filtrés selon les mêmes conditions. L’ultrafiltrat de surnageant

contenant les cytokines (200µL à partir d’une base de 2 mL) a été ensuite complété par du

milieu RPMI et utilisé comme milieu de culture pour les macrophages. Les six conditions

précédemment décrites ont été évaluées. Après 24 heures d’exposition, les cellules THP-1 ont

été recueillies et fixées en PFA 0,5% pendant 24 heures à 4°C avant analyse en CMF. Les

marqueurs utilisés étaient le CD11b couplé au FITC, CD11c couplé à la PE, et le CD54

couplé FITC (Pharmingen).

2.7 Analyses statistiques

Dans cette étude, toutes les expérimentations ont été réalisées trois fois sauf pour le

dosage des cytokines sur membranes de nitrocellulose qui n’a été réalisé qu’une fois. Pour les

comparaisons multiples entre les différentes conditions, le test non paramétrique de Kruskall-

Wallis avec comparaisons multiples par paires et correction de Bonferroni a été utilisé. Pour

les comparaisons simples entre deux conditions, un test t de Student non apparié a été réalisé.

Une valeur de p<0,05 a été considérée comme significative.

65

3. RESULTATS

3.1 Parmi les marqueurs membranaires des cellules épithéliales conjonctivales testés, seul

EMMPRIN a été modifié après exposition au BAK et au DNCB.

L’expression membranaire d’EMMPRIN par les cellules conjonctivales augmentait de

manière significative après exposition au BAK à 10-5

% (p=0,01) au DNCB à 10nM

(p<0,0001) pendant 24 heures. Par contre l’expression par les cellules conjonctivales des

autres marqueurs étudiés (CD95, CD40, CD63, CD54 et HLA-DR) n’a pas été modifiée de

manière significative (figure 23).

Figure 23 : Expression des marqueurs membranaires CD 40, CD 54, CD 63, CD 95, HLA-

DR et EMMPRIN par les cellules conjonctivales après exposition pendant 24 heures au BAK,

DNCB, LPS et TNF-α. L’expression d’EMMPRIN était augmentée de manière significative

par l’exposition au BAK (10-5

%, p=0,01, *) et au DNCB (10nM, p<0,0001, #).

Rat

io d

e fl

uo

resc

ence

mo

yen

66

3.2 L’expression des chimiokines par les cellules épithéliales conjonctivales a été modifiée

par l’exposition aux facteurs stimulants. (figure 24 et tableau II).

Sans stimulation, les surnageants des cellules WKD contenaient une concentration

élevée de MIF et de PAI-1 (77 et 72% par rapport au contrôle) et une concentration faible

d’IL-6 (12% par rapport au contrôle). Les autres chimiokines testées étaient à l’état de traces.

Après stimulation par le BAK, l’expression de PAI-1 n’était pas modifiée mais la

concentration de MIF était augmentée (91% par rapport au groupe contrôle). La présence

d’IL-6 et d’IL-8 a également été retrouvée à des concentrations faibles après stimulation par

le BAK (21% et 11% par rapport au contrôle).

L’action du DNCB sur la présence de chimiokines dans les surnageants de culture des

cellules WKD était modérée, des concentrations modérées de MIF et PAI-1 (57 et 33% par

rapport au contrôle) ont été mises en évidence.

L’exposition des cellules WKD au LPS a mis en évidence une concentration élevée de

MIF (83% par rapport au contrôle) restant inférieure aux surnageants des cellules exposées au

BAK, une concentration équivalente de PAI-1 (74% par rapport au contrôle) et des

concentrations modérées d’IL-6 et d’IL-8 (20 et 10% par rapport au contrôle) dans leurs

surnageants.

Les surnageants des cellules WKD exposées au TNF-α ont révélé la présence de plus

de chimiokines qu’avec les autres stimulants. Des concentrations élevées de MIF, PAI-1 IL-6,

IL-8 et de TNF-α ont été retrouvées (respectivement 65, 55, 75, 77 et 93% par rapport au

contrôle). Le CCL-1 a été mis en évidence en quantité modérée (15% par rapport au contrôle).

Le MIF et le PAI-1 étaient retrouvés également, mais plus faiblement qu’après exposition au

BAK.

67

Expression des cytokines par les cellules WKD

PBS BAK DNCB LPS TNF-α

Figure 24 : Films radiographiques correspondant aux membranes de nitrocellulose sur

lesquelles ont été dosés les surnageants des cellules WKD exposées et au BAK (10-5

%),

DNCB (10nM), LPS (50ng/ml) ou au TNF-α (5ng/ml). Chaque couple de point représente la

mesure d’une molécule, les résultats ont été regroupés dans le tableau II.

68

WKD PBS BAK DNCB LPS TNF-α

C5a 0 0 0 0 0

CD40L 3 5 4 5 0

G CSF 1 2 0 0 0

GM CSF 3 1 0 0 0

CXCL1 3 0 0 0 0

CCL1 3 0 0 0 15

CD54 3 0 0 0 0

IFN-y 3 0 0 0 0

IL-1 α 2 0 0 0 0

IL-1 β 2 0 0 0 0

IL-1ra 2 0 0 0 0

IL-2 2 0 0 0 0

IL-4 2 0 0 0 0

IL-5 2 0 0 0 0

IL-6 12 21 5 20 75

IL-8 2 11 0 10 77

IL-10 0 0 0 0 0

IL-12 p70 0 0 0 0 0

IL-13 0 0 0 0 0

IL-16 2 0 0 0 3

IL-17 0 0 2 0 0

IL-17E 0 0 2 0 0

IL-23 0 0 2 4 0

IL-27 0 0 2 0 0

IL-32α 0 0 2 8 0

CXCL10 0 0 2 0 0

CXCL11 0 0 2 0 0

MCP-1 0 0 2 0 0

MIF 77 91 57 83 65

CCL3 0 0 2 0 0

CCL4 0 0 2 0 0

PAI-1 72 68 33 74 55

CCL5 5 8 7 4 7

CXCL12 0 0 2 0 0

TNF-α 0 0 2 0 93

sTREM-1 0 0 0 0 0

Tableau II : Intensité des spots en pourcentage d’expression par rapport au témoin négatif

révélés sur les films radiographiques (figure 24) correspondant à la quantité de cytokines

présente dans les surnageants de culture des cellules WKD exposées 24h au BAK (10-5

%),

DNCB (10nM), LPS (50ng/ml) ou au TNF-α (5ng/ml) avec comme témoin du PBS (1x).

69

3.3 Augmentation de l’expression du CD54 par les cellules épithéliales conjonctivales

WKD exposées aux surnageants des macrophages exposés au LPS.

Sur les six marqueurs membranaires utilisés (CD40, CD63, CD95, HLA-DR et

EMMPRIN), seule l’expression du CD54 par les cellules épithéliales conjonctivales a

augmenté après exposition au surnageant des cellules THP-1 différenciées exposées au LPS

(p=0,031) (figure 25). Les autres surnageants n’ont pas eu d’effet significatif.

Figure 25 : Expression par les cellules conjonctivales WKD des marqueurs membranaires

après exposition aux surnageants des cellules THP-1 indifférenciées, différenciées puis

exposées à du PBS (1X), BAK (10-5

%), DNCB (10nM), LPS (50ng/ml) ou TNF-α (5ng/ml).

L’expression du CD54 par les cellules épithéliales conjonctivales était augmentée avec le

surnageant des cellules THP-1 exposées au LPS (p=0,031 *) par rapport au surnageant des

cellules THP-1 exposées au PBS.

Rat

io d

e fl

uo

resc

ence

mo

yen

70

3.4 Augmentation de l’expression du CD54 par les macrophages exposés aux surnageants

des cellules épithéliales conjonctivales exposées au BAK. (figure 26)

Parmi les marqueurs membranaires sélectionnés selon les résultats de la première

partie de ce travail (CD11b CD11c et CD54), les surnageants des cellules épithéliales

conjonctivales exposées au BAK ont amplifié l’expression du CD54 par les macrophages de

façon significative par rapport au PBS (p=0,037). Les surnageants issus des cellules

épithéliales conjonctivales exposées aux autres facteurs n’ont pas modifié de façon

significative l’expression du CD54. De plus l’expression des marqueurs CD11b et CD11c par

les macrophages n’a pas été modifié par l’exposition aux surnageants des cellules épithéliales.

Figure 26: Expression par les macrophages des marqueurs membranaires CD54, CD11b et

CD11c sous l’influence des surnageants des cellules épithéliales conjonctivales exposées à

différents stimulants BAK (10-5

%), DNCB (10nM), LPS (50ng/ml), TNF-α (5ng/ml) ou PBS.

L’expression du CD54 par les macrophages était augmentée avec le surnageant des cellules

conjonctivales exposées au BAK (p=0,037 *) par rapport au surnageant des cellules

différenciées exposées au PBS.

Rat

io d

e fl

uo

resc

ence

mo

yen

71

4. DISCUSSION

4.1 Stimulation directe des cellules épithéliales conjonctivales

Pour valider le modèle et afin de croiser les effets directs et indirects du BAK sur les

cellules épithéliales conjonctivales et les macrophages, les cellules épithéliales ont été

exposées de façon isolée aux différents stimulants utilisés en première partie (BAK, DNCB,

LPS et TNF-α) à des concentrations infra toxiques. Par l’intermédiaire de l’expression

d’EMMPRIN, le BAK et le DNCB avaient une action directe sur les cellules épithéliales

conjonctivales. EMMPRIN (CD147), en plus d’être un inducteur des métallo-protéinases

(MMPs), possède aussi des capacités de régulation de la réponse lymphocytaire (95), ce qui

en fait un modulateur et témoin d’une activité inflammatoire. Ces fonctions sont expliquées

en partie par le rôle d’adressage du transporteur monocarboxylate (MCT 1 et 3) à la

membrane plasmique (68). L’activation d’EMMPRIN est impliquée dans les interactions

entre les cellules épithéliales et le stroma sous jacent notamment dans le remodelage

pathologique mais aussi physiologique de la matrice extra cellulaire (42). Les cellules

épithéliales conjonctivales exposées au BAK et au DNCB pourraient ainsi stimuler la

dégradation de la MEC même à des concentrations infra toxiques. Sur le plan des cytokines

produites par les cellules épithéliales, le DNCB n’a pas modifié le profil étudié, par contre le

BAK induisait la production d’IL-6 et d’IL-8. Epstein et al. ont montré que sous l’influence

du BAK, les cellules épithéliales conjonctivales produisaient du TNF-α et de l’IL-1 (37). En

comparaison avec notre étude, les concentrations de BAK utilisées par ces auteurs étaient bien

plus importantes. De plus, Baudouin et al. ont observé une quantité d’IL-8 significativement

plus importante dans les empreintes conjonctivales de patients traités par collyres

hypotonisants avec conservateur par rapport aux patients traités avec des collyres sans

conservateur (8). Ces résultats confirmerait in vitro le rôle pro-inflammatoire du BAK à des

concentrations non toxiques sur les cellules épithéliales conjonctivales à travers la production

de cytokines et l’expression d’EMMPRIN.

Le LPS est exprimé dans la paroi des bactéries Gram -, c’est une des principales voies de

reconnaissance de ces bactéries par les membranes cellulaires, par l’intermédiaire du TLR-4.

Ces effets proinflammatoires sur les cellules épithéliales conjonctivales et les cellules

présentatrices d’antigènes sont connus (23). Par ces effets stimulants sur les deux lignées

72

cellulaires il a ainsi joué le rôle de témoin positif. Le LPS est un moyen simple de mimer une

partie de l’action de certaines bactéries. In vivo, il produit une inflammation conjonctivale liée

à une infiltration de monocytes avec production d’IL1-α (79). Dans notre étude, malgré

l’absence de modification d’expression des marqueurs membranaires testés (CD40, 54, 63,

95, HLA-DR et EMMPRIN), les cellules conjonctivales ont produit de l’IL-6 et de l’IL-8 sous

l’influence directe du LPS. Même si cela n’a pas été mis en évidence dans notre étude,

l’exposition des cellules conjonctivales au LPS pourrait aussi induire une production d’IL-1

(37, 79), confirmant son rôle activateur des cellules épithéliales conjonctivales.

Le TNF-α est un médiateur de l’inflammation produit par de nombreux types cellulaires

différents. Son rôle dans les maladies inflammatoires auto-immunes est reconnu (32). Il agit

en induisant l’expression de cytokines, de molécules d’adhésion et de co-stimulation, en

activant la voie neutrophile, par l’intermédiaire de la voie NF-κB (nuclear factor-kappa B).

Plus spécifiquement, il a aussi une action favorisant la migration des cellules dendritiques

cornéennes (30). Dans la première partie de ce travail, il s’est révélé comme stimulant de

façon directe les macrophages. Bien qu’il n’ait pas modifié l’expression membranaire du

CD40, 54, 63, 95, HLA-DR et EMMPRIN, l’exposition des cellules conjonctivales au TNF-α

a induisait une forte production d’IL-6 et d’IL-8, et une production plus modérée de CCL-1.

Enriquez-de-Salamanca et al. ,ont montré que la stimulation par du TNF-α des cellules

épithéliales conjonctivales in vitro induisait la production de IL-12p40, GM-CSF, MCP-1, IL-

7, RANTES, IFN-γ, IL-1α, IL-1β, IL-3 et CXCL-10 (36). Bien que le panel de cytokines

testées, tout comme le kit de détection ou encore la lignée cellulaire étaient différentes entre

nos deux études, la production d’IL-6 et d’IL-8 a été retrouvée stimulée dans les deux cas.

4.2 Influence des macrophages sur les cellules conjonctivales

Les surnageants provenant de la culture des macrophages exposés au BAK et au

DNCB n’ont pas modifié l’expression des marqueurs étudiés sur les cellules épithéliales

conjonctivales. Ceci est surprenant car l’expression d’EMMPRIN par les cellules épithéliales

était augmentée sous l’influence directe du BAK et du DNCB. Nous pouvons en déduire que

le BAK et le DNCB n’avaient un effet sur l’expression d’EMMPRIN par les cellules

épithéliales conjonctivales qu’en cas d’exposition directe. Ceci pourrait confirmer ce que l’on

73

observe in vivo, où les cellules les plus exposées sont les cellules épithéliales, avec des

conséquences connues (29, 31, 37).

Bien que stimulant actif direct des cellules conjonctivales des macrophages, la

stimulation des macrophages par le TNF-α n’a pas produit d’effet sur les cellules épithéliales.

Les surnageants des macrophages exposés au LPS ont augmenté l’expression du CD54

par les cellules conjonctivales, alors que l’exposition directe au LPS n’avait pas eu d’effet sur

les cellules conjonctivales. Bien que le CD54 soit exprimé en majorité par les leucocytes et

les cellules endothéliales, il est aussi exprimé par les cellules épithéliales conjonctivales. Son

expression est augmentée en cas d’inflammation et d’allergie. Il a été montré que son

expression est endogène et ne provient pas d’un captage de CD54 soluble (7). Dans la

première partie de ce travail, nous avions montré que les macrophages exposés au LPS

produisaient du CD54 soluble, ce n’est donc pas du CD54 soluble qui s’est fixé sur les

cellules conjonctivales mais bien l’influence des cytokines produites par les macrophages

exposés au LPS qui a entrainé une production endogène de CD54 membranaire par les

cellules conjonctivales. Le CD54 joue un rôle important dans l’immunité innée et adaptative.

Son expression est augmentée par les cytokines pro inflammatoires (55). Il a été montré que

l’interaction entre les cellules cornéennes et les CPA liée au LPS entrainait une production de

TNF-α et d’IL-6 liée aux TLR 2 et 4 (23). La surexpression du CD54 par les cellules

conjonctivales lorsqu’elles étaient cultivées en présence des surnageants de macrophages

exposés au LPS suggérait que les macrophages aient un effet d’activation sur les cellules

conjonctivales en cas d’infection par les bactéries produisant du LPS. Il a été montré que les

macrophages activés par le LPS permettent le déclenchement de la voie des MAP kinases en

l’absence de corécepteur au LPS (86). Il a été aussi montré que l’IFN-γ était nécessaire afin

d’obtenir une réaction conjonctivale en cas d’exposition au LPS (82). De l’IFN-γ a été

retrouvé en faible quantité dans les surnageants des macrophages exposés au LPS. Dans notre

modèle in vitro, les macrophages posséderaient donc un rôle indispensable dans la réponse

aux infections liées au LPS. Les cellules épithéliales conjonctivales ne réagiraient au LPS

qu’en présence d’un cofacteur, elles n’activeraient donc pas les macrophages en cas

d’exposition non agressive au LPS. Par contre, en cas d’exposition invasive au LPS,

atteignant les couches plus profondes contenant des macrophages, le LPS aurait un effet

stimulant sur toute la surface oculaire, par l’intermédiaire de l’expression du CD54, entrainant

une cascade inflammatoire.

74

4.3 Les effets du BAK dans les interactions entre les cellules conjonctivales et les

macrophages

Précédemment nous avions observé que le BAK avait un effet stimulant direct sur les

macrophages à des concentrations infra toxiques.

Par l’intermédiaire des cellules conjonctivales (les plus exposées au BAK), les

macrophages subissent l’influence indirecte du BAK. Présents de façon assez rare dans la

conjonctive en conditions physiologiques, la conjonctive des patients exposés au BAK

contient un plus grand nombre de macrophages. Cette infiltration de macrophages présente

chez les patients exposés au BAK peut être expliquée de deux manières. La première est un

recrutement direct des cellules inflammatoires par le BAK comme cela a été démontré dans la

première partie de ce travail. La deuxième est un recrutement des cellules inflammatoires en

réponse à une stimulation par la première ligne de cellules exposées au BAK, les cellules

épithéliales. Si les surnageants des macrophages exposés au BAK n’ont pas eu d’effet sur

l’expression des marqueurs de surface des cellules épithéliales, les surnageants des cellules

conjonctivales exposées au BAK ont amplifié l’expression du CD54 par les macrophages.

Ceci est d’autant plus intéressant que le BAK n’a pas eu d’effet direct sur l’expression du

CD54 par les macrophages aussi bien dans notre étude (première partie) que dans la littérature

(47, 57). C’est donc bien par l’intermédiaire d’un facteur produit par les cellules épithéliales

que l’expression du CD54 a été augmentée sur les macrophages. Le CD54 joue un rôle

important dans la diapédèse des leucocytes et leur transmigration (2). D’autres fonctions lui

ont été attribuées, en particulier l’activation de cascades inflammatoires qui propagent la

réaction inflammatoire (55). Dans la première partie de ce travail, l’exposition au BAK des

macrophages avait entraîné une sécrétion de CD54 soluble dans les surnageants de ces

cellules. Il semblerait donc que l’exposition au BAK induise une production de CD54 soluble

par les macrophages et parallèlement que les cellules conjonctivales exposées au BAK

induisent l’expression membranaire de CD54 par les macrophages. Les macrophages de la

conjonctive seraient ainsi doublement activés.

75

5. CONCLUSION

Les cellules épithéliales conjonctivales et les macrophages ont montré des interactions par

l’intermédiaire de leurs surnageants en cas d’exposition croisée à des facteurs toxiques,

allergiques, inflammatoires et infectieux. Avec des capacités de réaction directe face aux

stimulations pro inflammatoires, en produisant des cytokines, en augmentant l’expression de

marqueurs membranaires, mais aussi par des capacités d’activation des macrophages, le rôle

immunomodulateur des cellules épithéliales conjonctivales est confirmé. Les macrophages

exposés au LPS ont augmenté l’expression du CD54 par les cellules épithéliales

conjonctivales tout comme les cellules épithéliales conjonctivales exposées au BAK ont

augmenté l’expression du CD54 par les macrophages. Le BAK pourrai avoir ainsi un

potentiel de recrutement de cellules inflammatoires au même titre que le LPS.

76

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Il a été intéressant d’observer que les facteurs utilisés, BAK, DNCB, LPS et TNF-α, ont

eu un effet sur les macrophages mais aussi sur les cellules épithéliales conjonctivales in vitro.

Ceci est d’autant plus remarquable que la concentration des stimulants utilisés était en dessous

des seuils de cytoxicité. En particulier pour le BAK, qui s’est révélé un stimulant pro-

inflammatoire direct et indirect des macrophages comparable aux facteurs pro-inflammatoires

classiques comme le LPS. Les macrophages sont moins exposés que les cellules épithéliales

conjonctivales aux agressions environnementales, leur recrutement s’explique donc aussi par

un recrutement indirect. C’est ce recrutement indirect par l’intermédiaire des cellules

épithéliales conjonctivales qui pourrait expliquer en partie l’infiltration conjonctivale

retrouvée chez les patients traités au long cours par des collyres contenant des conservateurs.

Le BAK dans les préparations ophtalmologiques ne devrait pas être considéré seulement

comme un élément toxique mais aussi comme un facteur pro-inflammatoire direct.

Il existe néanmoins de très nombreuses limites à ces deux travaux réalisés in vitro.

L’ensemble des acteurs cellulaires et leurs interactions au sein de la surface oculaire n’ont pas

été pris en compte notamment les autres cellules immunitaires (lymphocytes et cellules

dendritiques), les cellules à mucus et les fibroblastes mais aussi les constituants extra-

cellulaires ou encore le film lacrymal. Actuellement, des modèles animaux des pathologies

iatrogènes de la surface oculaire (rat, souris et lapin essentiellement) permettent de prendre en

compte l’ensemble des acteurs de la surface oculaire, mais la multiplication des éléments qui

composent la surface oculaire multiplie aussi les différences phénotypiques entre les modèle

animaux et l’homme. Parallèlement, des modèles in vitro humains d’étude de la surface

oculaire ont été développés (modèle 3D-HCE : Laboratoires SkinEthic®, Nice, France),

offrant une large possibilité d’expérimentations toxicologiques (65). Cependant, ces modèles

in vitro ne considèrent actuellement qu’un seul type cellulaire ou des interactions simples

entre deux types cellulaires (21). La caractérisation et l’obtention progressive des différents

constituants cellulaires de la surface oculaire comme les macrophages permettront sans doute

dans le futur de voir se développer un modèle d’étude in vitro mimant les réactions

impliquées chez l’homme.

77

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YEAR : 2012

AUTHOR’S NAME AND SURNAME : MICHEE SYLVAIN

MEMOIRE’S PRESIDENT: Pr BAHRAM BODAGHI

MEMOIRE’S DIRECTOR : Dr ANTOINE LABBE

TITLE : IN VITRO ANALYSIS OF INTERACTIONS BETWEEN MACROPHAGES AND CONJUNCTIVAL EPITHELIAL CELLS INFLUENCED BY

BENZALKONIUM CHLORIDE.

The purpose of the study was to establish an experimental model of interactions

between conjunctival epithelial cells and macrophages. Two cell lines were

studied, a monocytic line, THP-1 cells, differentiated in macrophages, and a

conjunctival cell line, Wong Kilbourne derivative of conjunctival Chang cells. Both

cell lines were exposed to stimulating factors mimicking pathophysiological

conditions implied in the ocular surface : benzalkonium chloride (BAK),

dinitrochlorobenzen (DNCB), lipopolysaccharide (LPS) and TNF-alpha (tumor

necrosis factor).

The direct effects of these factors on conjunctival cells and macrophages, also

their interactions with their surfactants, were studied through the expression of

cell markers, cell death, migration and phagocytosis behavior and cytokine

production. In this study, the stimulating factors reproducing ocular surface

pathologies activated phagocytosis, migration and cytokine production by this

cells. Compared with well known stimulating factors such as TNF-alpha or LPS,

the exposure to an infra toxic concentration of BAK had also stimulated

macrophages. In order to integrate macrophages in an ocular surface model,

conjunctival epithelial cells were associated to the study of macrophages. The

interactions between both cell lines showed that BAK activated macrophages as

well through the surfactants from conjunctival cells. This study showed that BAK

stimulated an inflammatory response and this effect was produced not only by a

direct effect on macrophages but also mediated by conjunctival epithelial cells.

KEY WORDS : INFLAMMATION, MACROPHAGES, CONJONCTIVA, PHARMACEUTICAL PRESERVATIVES, GLAUCOMA.

ADRESSE DE L’U.F.R. : 8, Rue du Général Sarrail 94010 CRETEIL

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ANNEE : 2012

NOM ET PRENOM DE L’AUTEUR : MICHEE SYLVAIN

PRESIDENT DE THESE : Pr BAHRAM BODAGHI

DIRECTEUR DE THESE : Dr ANTOINE LABBE

TITRE DE LA THESE : ANALYSE IN VITRO DES INTERACTIONS ENTRE LES MACROPHAGES ET LES CELLULES EPITHELIALES DE LA CONJONCTIVE

SOUS L’INFLUENCE DU CHLORURE DE BENZALKONIUM

L’objectif de ce travail était de mettre au point un modèle d’étude des

interactions entre les cellules épithéliales de la conjonctive et les macrophages

sous l’effet du chlorure de benzalkonium. Deux lignées cellulaires humaines ont

été étudiées, une lignée monocytaire, les cellules THP-1, différenciée en

macrophages, et une lignée de cellules conjonctivales, les cellules de Wong

Kilbourne dérivées de la conjonctive de Chang. Les cellules ont été exposées à

différents stimulants reproduisant des conditions physiopathologiques impliquées

au niveau de la surface oculaire : le chlorure de benzalkonium (BAK), le

dinitrochlorobenzene (DNCB), le lipopolysaccharide (LPS) et le TNF-αlpha (tumor

necrosis factor).

Les effets directs des stimulants sur les cellules conjonctivales et les

macrophages ainsi que leurs interactions au travers de leurs surnageants, ont

été étudiés à travers l’expression de marqueurs membranaires, la mortalité

cellulaire, les capacités de migration et de phagocytose et la production de

cytokines. Dans cette étude, les facteurs de stimulation mimant des pathologies

de la surface oculaire ont activé la phagocytose, la migration et la production de

cytokines par ces cellules. En comparaison avec les effets stimulants de facteurs

biens connus comme le TNF-αlpha ou le LPS, une exposition à une concentration

infra toxique de BAK a également eu un effet stimulant sur les macrophages. Afin

d’intégrer les macrophages dans un modèle de surface oculaire, des cellules

épithéliales conjonctivales ont été associées à l’étude des macrophages. Les

interactions entre ces deux populations cellulaires ont montré que le BAK activait

également les macrophages par l’intermédiaire des surnageants des cellules

épithéliales. Cette étude montrait que le BAK stimule la réponse inflammatoire

non seulement par un effet direct sur les macrophages mais aussi par

l’intermédiaire des cellules épithéliales conjonctivales.

MOTS-CLES :

INFLAMMATION, MACROPHAGES, CONJONCTIVE, CONSERVATEURS PHARMACEUTIQUES,

GLAUCOME.

ADRESSE DE L’U.F.R. : 8, Rue du Général Sarrail 94010 CRETEIL