d) la thérapie génique - unifr.ch · s'ensuit l'accumulation d'un épais mucus...

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Cottier & /Guerry 2000, Génie Génétique et Clonage 98 www.unifr.ch/nfp37 Thérapie Génique Source d'images: Une partie des images utilisée pour ce dossier à été reprise des sites internet liés au regroupement 'Industries Canada' (www.ic.gc.ca) 98 D) La thérapie génique 1) Qu'est-ce que la thérapie génique? Certaines maladies sont provoquées par des gènes défectueux qui produisent des protéines défectueuses. Les symptômes des maladies héréditaires apparaissent souvent par suite de l'interruption de processus cellulaires vitaux subséquents causée par l'absence ou le mauvais fonctionnement de protéines. Dans la section sur les composantes biologiques, nous décrivons la synthèse des protéines comme étant le processus par lequel les gènes finissent par produire des protéines qui sont responsables d'importants processus cellulaires. Si un gène particulier est défectueux, il risque de ne pas fabriquer de produit protéique ou encore d'en fabriquer un qui fonctionne mal ou se comporte de manière trop agressive. Par exemple, la mucoviscidose (ou fibrose kystique) est provoquée par l'absence ou la mutation d'un gène qui donne lieu à une protéine de transport membranaire défectueuse. S'ensuit l'accumulation d'un épais mucus dans les poumons et dans les voies aériennes du corps. 1 Mentionnons également comme exemple les cancers, provoqués par la division et la prolifération incontrôlable de cellules. 2 Des gènes particuliers peuvent provoquer une telle croissance cellulaire s'ils sont défectueux. On appelle ces gènes défectueux oncongènes. D’autres servent de régulateurs négatifs de la division cellulaire, ce sont les gènes suppresseurs de tumeurs. Lorsque ceux-ci sont également défectueux, on n’a plus de régulation et contrôle de la quantité de division cellulaire qui se fait, et très souvent cancer. Traitons-nous les symptômes ou bien la cause? Par le passé, on traitait les troubles génétiques en s'attaquant aux événements biologiques qui résultent de la mutation génétique, et non en réparant un gène (ou des gènes) défectueux -- la cause fondamentale du problème. 3 Ainsi, pour traiter le diabète, on administre de l'insuline (une protéine) au lieu de réparer les gènes défectueux dans les cellules pancréatiques qui les empêchent en fait de produire seules une quantité adéquate d'insuline. La thérapie génique constitue un autre mode de traitement d'un trouble génétique par lequel on insère ou intègre de nouveaux gènes dans les cellules humaines. De nombreux essais en thérapie génique visent à ajouter dans un certain type de cellule un gène utile qui compensera la version manquante ou défectueuse. D'autres efforts visent à doter la cellule cible de nouvelles propriétés. Cette dernière méthode est souvent employée dans le traitement du cancer, où l'on ajoute des gènes toxiques aux cellules cancéreuses en vue de les éliminer. 4 Pour avoir un aperçu de la façon de localiser et d'isoler un gène particulier de sa source (de sorte à pouvoir l'introduire dans le patient), reportez-vous à la section sur le génie génétique.

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D) La thérapie génique

1) Qu'est-ce que la thérapie génique?Certaines maladies sont provoquées par des gènes défectueux quiproduisent des protéines défectueuses. Les symptômes des maladieshéréditaires apparaissent souvent par suite de l'interruption deprocessus cellulaires vitaux subséquents causée par l'absence ou lemauvais fonctionnement de protéines. Dans la section sur lescomposantes biologiques, nous décrivons la synthèse des protéinescomme étant le processus par lequel les gènes finissent par produiredes protéines qui sont responsables d'importants processus cellulaires.Si un gène particulier est défectueux, il risque de ne pas fabriquer deproduit protéique ou encore d'en fabriquer un qui fonctionne mal ou secomporte de manière trop agressive.

Par exemple, la mucoviscidose (ou fibrose kystique) est provoquéepar l'absence ou la mutation d'un gène qui donne lieu à une protéinede transport membranaire défectueuse. S'ensuit l'accumulation d'unépais mucus dans les poumons et dans les voies aériennes du corps.1

Mentionnons également comme exemple les cancers, provoqués par ladivision et la prolifération incontrôlable de cellules.2 Des gènesparticuliers peuvent provoquer une telle croissance cellulaire s'ils sontdéfectueux. On appelle ces gènes défectueux oncongènes. D’autresservent de régulateurs négatifs de la division cellulaire, ce sont lesgènes suppresseurs de tumeurs. Lorsque ceux-ci sont égalementdéfectueux, on n’a plus de régulation et contrôle de la quantité dedivision cellulaire qui se fait, et très souvent cancer.

Traitons-nous les symptômes ou bien la cause? Par le passé, on traitait les troubles génétiquesen s'attaquant aux événements biologiques qui résultent de la mutation génétique, et non enréparant un gène (ou des gènes) défectueux -- la cause fondamentale du problème.3 Ainsi,pour traiter le diabète, on administre de l'insuline (une protéine) au lieu de réparer les gènesdéfectueux dans les cellules pancréatiques qui les empêchent en fait de produire seules unequantité adéquate d'insuline.

La thérapie génique constitue un autre mode de traitement d'un trouble génétique parlequel on insère ou intègre de nouveaux gènes dans les cellules humaines. De nombreuxessais en thérapie génique visent à ajouter dans un certain type de cellule un gène utile quicompensera la version manquante ou défectueuse. D'autres efforts visent à doter la cellulecible de nouvelles propriétés. Cette dernière méthode est souvent employée dans le traitementdu cancer, où l'on ajoute des gènes toxiques aux cellules cancéreuses en vue de les éliminer.4

Pour avoir un aperçu de la façon de localiser et d'isoler un gène particulier de sa source (desorte à pouvoir l'introduire dans le patient), reportez-vous à la section sur le génie génétique.

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Il convient de noter que même les techniques de thérapie des cellules somatiques les plusavancées n'en sont encore qu'au stade des essais cliniques et que leur application généralen'a pas encore été approuvée. Il importe de mener des recherches plus approfondies afin demettre au point des techniques de thérapie génique sûres et fiables.

Selon les types de cellule affectés, on peut classer la thérapie génique en deux grandescatégories : la thérapie de la lignée germinale et la thérapie de la lignée somatique. Lathérapie de la lignée germinale consiste à modifier les cellules germinales (cellulesreproductrices), ce qui signifie que les modifications génétiques subséquentes seronttransmises à la descendance du patient. Par ailleurs, la thérapie de la lignée somatiqueimplique l'altération de cellules somatiques (cellules non reproductrices du corps, comme lescellules de la peau, du cerveau ou des muscles). Cette manipulation génétique n'affectera quel'individu chez lequel on a effectué ces changements. La thérapie de la lignée somatique estle seul type actuellement envisagé pour les êtres humains.

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2) COMMENT LES GÈNES SONT-ILS INSÉRÉS DANS LES CELLULESCIBLES?

Imaginons qu'un patient est atteint d'un trouble génétique qui ne touche que certaines cellulesde son cerveau. Comment le traiter à l'aide de la thérapie génique de sorte que le gènethérapeutique ne cible que les cellules affectées? On pourrait par exemple avoir recours à unvecteur. Un vecteur est simplement un « transporteur » du matériel génétique qui lui permetde pénétrer dans la cellule cible et, selon le type de vecteur, peut entraîner l'intégration denouveaux gènes dans le génome de la cellule hôte. Les vecteurs doivent être administrés à destypes de cellules cibles particulières.

Il existe trois grands moyens d'administrer les vecteurs pourqu'ils transportent de nouveaux gènes dans les cellules cibles.

Le premier, c'est la thérapie de la lignée somatique ex vivo,par laquelle les cellules cibles sont enlevées du corps,cultivées en laboratoire avec un vecteur, puis réinséréesdans le corps. En général, ce processus est réalisé à l'aide decellules sanguines, car ce sont les plus faciles à enlever et àréintroduire.

La deuxième solution, la thérapie de la lignée somatique in situ,consiste à placer le vecteur directement dans le tissu touché.Ce processus est employé pour traiter la mucoviscidose (fibrosekystique) (par infusion directe du vecteur dans les bronches despoumons), détruire les tumeurs (p. ex., cancer du cerveau) ettraiter la dystrophie musculaire.

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La troisième option est la thérapie de la lignée somatique in vivo,par laquelle le vecteur est injecté dans le courant sanguin et peuttrouver et insérer de nouveaux gènes uniquement dans les cellulespour lesquelles il a été spécialement conçu. Bien qu'il n'existeactuellement aucun traitement in vivo disponible, une percée dans cedomaine rendra la thérapie génique fort attrayante.5 Dans ce cas, levecteur conçu pour traiter notre patient imaginaire pourrait êtreinjecté dans un vaisseau sanguin de son bras et se rendrait jusqu'auxcellules du cerveau affectées!Les vecteurs utilisés en thérapie génique peuvent être répartis endeux catégories : les vecteurs viraux et les vecteurs non viraux.

Vecteurs virauxOn met au point des virus à ADN et à ARN qui servent de vecteurs en thérapie génique. Lesvirus constituent d'excellents vecteurs, car au terme de longues périodes d'évolution, ils ontacquis la capacité d'éviter d'être détruits par le système immunitaire humain (système dedéfense du corps humain contre les attaques extérieures) et d'insérer leur propre matérielgénétique dans des cellules humaines. Comme nous l'avons vu dans la section portant sur lescomposantes biologiques, les virus sont composés de matériel génétique (ADN ou ARN)entouré d'une couche protectrice formée de protéines et, parfois, d'autres types de moléculeségalement.

Normalement, un virus infecte une cellule lorsque son matériel génétique s'y introduit. Unefois que le matériel génétique viral se trouve à l'intérieur, il « prend les commandes » de lamachine à fabriquer les protéines et l'ADN de la cellule, la faisant produire de nouveauxvirus. Certains virus sont même capables d'intégrer leur propre matériel génétique dans legénome de la cellule hôte.

C'est la couche virale protectrice extérieure qui permet au matériel génétique interne depénétrer dans la cellule. Cette couche extérieure détermine également le type de cellules qu'unvirus donné infectera. Une fois à l'intérieur, ce sont les gènes viraux délétères qui prennent lescommandes de la cellule et, en fin de compte, entraînent sa mort.

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Pour piéger le virus, les scientifiques gardent la couche virale extérieure, mais modifient lematériel génétique interne. Ils enlèvent les gènes délétères et les remplacent par des gènesthérapeutiques. Maintenant, le virus n'est plus pathogène (il ne peut plus nuire à la cellulequ'il infecte) et est incapable de se reproduire. Toutefois, il demeure capable de transférer sonmatériel génétique aux cellules pour lesquelles sa couche extérieure a été conçue. Le transfertde matériel génétique au moyen d'un vecteur viral s'appelle transduction.6

Vecteurs rétroviraux

La structure et le mode d'infection des rétrovirus sont abordés dans la section sur lescomposantes biologiques. En bref, les rétrovirus ont pour matériel génétique de l'ARN. Cesvirus comportent également un enzyme spécial qui, une fois dans la cellule, fabrique del'ADN bicaténaire en utilisant comme matrice l'ARN du virus. Le nouvel ADN s'intègre augénome de la cellule hôte. Lorsque les « nouveaux » gènes chromosomiques sont transcrits,de nouvelles particules de virus sont fabriquées, lesquelles quitteront la cellule pour eninfecter d'autres.

La plupart des types de rétrovirus ne sont pas nocifs pour la cellule. Même si tous les virus àutiliser comme vecteurs sont « désactivés », c'est-à-dire qu'on enlève leurs gènesdélétères, le fait que les types de rétrovirus actuellement utilisés comme vecteurs ne soientpas très nocifs sous leur forme naturelle signifie que leur utilisation présente moins de risqueque celle de certains autres virus. Même si quelque chose va mal et que certaines particules du

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rétrovirus d'origine sont administrées au patient, elles ne provoqueront pas de problèmesgraves.

Le virus de la leucémie murine (de souris) constitue l'un des rétrovirus les plus courammentemployés comme vecteur rétroviral. Les gènes de reproduction du rétrovirus sont remplacéspar le gène thérapeutique. Lorsque le virus infecte la cellule, le gène thérapeutique s'intègreaux chromosomes de la cellule. Le nouveau gène entraîne la production d'une protéine qui,on l'espère, aura certains effets thérapeutiques bénéfiques, soit en produisant la protéinejusqu'alors manquante ou en détruisant les cellules nocives.

Pour assurer un traitement in vivo efficace de maladies à l'aide de vecteurs rétroviraux, lesscientifiques doivent venir à bout de plusieurs difficultés. Par exemple, les virus doivent êtrecapables de cibler uniquement les cellules affectées par le trouble. Si tel était le cas, ilspourraient être injectés directement dans le courant sanguin (thérapie génique in vivo) où ilsse disperseraient dans tout le corps, mais ne transduiraient que les cellules pour lesquels ilsont été conçus. Actuellement, les vecteurs rétroviraux ne sont pas particulièrementspécifiques, ce qui signifie que de nombreuses cellules non visées par le transfert du gène sonttransduites par le virus, ce qui réduit le transfert à la population de cellules visées.

Pour comprendre comment on peut rendre les virusplus spécifiques, il faut examiner comment les virus« choisissent » les cellules qu'ils infectent. Un virusdoit se lier à certaines molécules réceptrices ensurface pour pénétrer dans la cellule. À cette fin, lesrétrovirus possèdent des protéines sur l'enveloppeextérieure qui s'adaptent parfaitement à certainsrécepteurs sur certaines cellules. Le virus de laleucémie murine se lie aux cellules contenant unrécepteur appelé récepteur amphotropique. Leproblème, c'est qu'une large gamme de types decellules possèdent le récepteur amphotropique. Ainsi,le virus de la leucémie murine, dans sa formenaturelle, peut infecter tous ces types de cellules, dontla plupart ne sont probablement pas visées par lathérapie!!

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Pour rendre les vecteurs rétroviraux plus spécifiquesconcernant les cellules qu'ils envahissent, lesscientifiques expérimentent des façons de remplacerou de modifier les protéines virales extérieures, desorte qu'elles s'insèrent dans des récepteurs plus raresqui n'apparaissent que sur les types de cellulesparticulières ciblées par la thérapie. Ils ont égalementeu recours à une autre stratégie, qui consiste à ajouterde nouvelles protéines sur l'enveloppe viraleextérieure qui reconnaît mieux la cellule cible ou larégion du corps où se trouvent les cellules cibles.

Une autre difficulté consiste à créer des vecteurs rétroviraux qui transduisent des cellulesqui ne sont pas en voie de division. La plupart des rétrovirus visent les cellules en voie dedivision active, ce qui fait qu'ils constituent une forme de traitement idéal pour les cellulestumorales se divisant rapidement, mais ne sont guère indiqués lorsqu'un gène thérapeutiquedoit être introduit dans une cellule qui n'est pas en voie de division, comme c'est le cas dans letraitement de la fibrose kystique dont il est question plus haut. Les quelques rétroviruscapables d'infecter des cellules qui ne sont pas en voie de division sont nocifs (par exemple leVIH, virus du sida). Le VIH (lorsqu'on enlève les gènes délétères) ne peut être utilisé commevecteur, car même une fois ces gènes enlevés, il demeure possible que le virus redeviennenocif au terme d'un processus appelé recombinaison. Pour pratiquement éliminer la possibilitéque des virus nocifs ne soient ainsi produits tout en préservant la capacité du VIH detransduire des cellules qui ne sont pas en voie de division, les scientifiques expérimentent lamise au point de vecteurs hybrides, composés principalement d'autres rétrovirus et contenantde minuscules parties inoffensives du VIH.

En avril 1998, seule une technique thérapeutique vectorielle en était au stade final desessais cliniques (appelés phase III). Cette technique emploie un vecteur rétroviral appeléGITkSvNa pour le traitement du glioblastome multiforme, une tumeur cérébrale maligne. Letraitement consiste en une technique thérapeutique in situ, où l'on injecte dans la tumeur descellules de souris capables de produire et de sécréter le vecteur. Les vecteurs sécrétésinfectent uniquement les cellules qui se divisent rapidement, ce qui signifie que seules lescellules tumorales et les vaisseaux qui apportent le sang à la tumeur sont transduites. Le gènetransduit dans les cellules tumorales produit une protéine (appelée thymidine kinase del'herpès simplex). Quatorze jours plus tard, on injecte au patient un médicament appeléganciclovir, qui est toxique pour toute cellule qui l'incorpore dans son ADN. Seules lescellules contenant la protéine susmentionnée (les cellules tumorales) sont capables

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d'incorporer le ganciclovir dans leur ADN, et elles sont par la suite éliminées de manièresélective.5

Voir en fin de chapitre une représentation schématique étape par étape de cette techniquethérapeutique novatrice!

Vecteurs adénoviraux

Les adénovirus sont des virus d'ADN capables de transduire un grand nombre de types decellules, y compris les cellules qui ne sont pas en voie de division. Les adénovirus sontégalement capables de transporter de longs segments d'information génétique ajoutée. Parailleurs, il est assez facile de produire de grandes quantités d'adénovirus en culture. Lesadénovirus, dans leur forme naturelle, ne sont pas très nocifs, ne provoquant généralementrien de plus qu'un rhume de poitrine chez les personnes en bonne santé. Leur utilisation entant que vecteur est donc relativement sûre. C'est pourquoi les adénovirus sont actuellementles vecteurs d'ADN les plus utilisés pour des expériences en thérapie génique in situ.7

On mène actuellement des recherches à l'aide de vecteurs adénoviraux pour letraitement de plusieurs cancers et de la fibrose kystique.8

La grandeur de la capside des adénovirus est juste suffisante pour que l'ADN viral originalpuisse y pénétrer. Par conséquent, pour chaque nouveau gène thérapeutique à insérer dans legénome viral, il faut enlever un segment correspondant de l'ancien ADN viral. Pour faire dela place pour le nouvel ADN thérapeutique, une région de l'ancien ADN viral appelée E3est parfois enlevée. Toutefois, l'enlèvement de la région E3 présente des inconvénients, carcelle-ci code pour une protéine qui supprime la réaction immunitaire de l'homme contre levecteur. Sans la région E3, le virus est plus vulnérable au système immunitaire et risquedavantage d'être détruit avant d'avoir atteint son objectif.5

Les vecteurs adénoviraux envoient leur ADN au noyau, mais l'ADN ne s'intègre pas dansles chromosomes des cellules hôtes. C'est pourquoi l'ADN viral a une durée de vie limitéedans la cellule avant sa dégradation, ce qui signifie que les gènes ajoutés ne sont efficaces quetemporairement. Le traitement de maladies chroniques comme la fibrose kystique devraitdonc être répété régulièrement, peut-être mensuellement ou annuellement. En revanche, la

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nature éphémère de l'expression du gène thérapeutique est utile lorsque les gènes ajoutés sontrequis temporairement pour induire une réaction immunitaire à un cancer ou à un agentpathogène.9

Autres vecteurs viraux

Parmi les autres types de virus étudiés comme vecteurs, mentionnons le virus ayant lescaractéristiques d'un adénovirus et le virus de l'herpès simplex (VHS), qui tous deux sontdes virus à ADN. Le premier intègre son matériel génétique dans un chromosome hôte sansprovoquer de maladie chez les humains. Toutefois, comme ils sont petits, ils ne peuventaccueillir de grands gènes. Les vecteurs VHS n'intègrent pas leurs gènes dans le génome hôte.Ils ont tendance à cibler les neurones et pourraient donc être employés dans le traitement destroubles neurologiques.9

Vecteurs non viraux

L'utilisation de vecteurs non viraux peut nécessiter une injection directe d'ADN plasmidiqueou le mélange d'ADN plasmidique avec des composés qui lui permettent de traverser lamembrane cellulaire et d'empêcher l'ADN de se dégrader. Ces méthodes sont actuellementmoins efficaces que l'utilisation de vecteurs viraux. Toutefois, contrairement aux virusdésactivés qui peuvent changer spontanément et provoquer une maladie, les vecteurs nonviraux ne possèdent aucun gène viral et ne peuvent donc provoquer aucune maladie.

Utilisation de liposomes

Les liposomes sont de petites vésicules creuses de molécules lipidiques (de graisses) capablesde véhiculer de l'ADN en elles. Un liposome peut fusionner avec la membrane cellulaire,libérant son contenu dans la cellule.

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L'ADN plasmidique contenant le gène thérapeutique est incubé avec les liposomes vides danscertaines conditions. L'ADN chargé négativement se lie aux liposomes chargés positivement(appelés cationiques) et les plasmides sont absorbés. Les liposomes contenant l'ADNplasmidique s'appellent lipoplexes.9 Les lipoplexes peuvent ensuite pénétrer dans les cellulesciblées et y introduire l'ADN thérapeutique.10

Dans le cadre d'expériences, des lipoplexes ont été injectés dans des tumeurs. Ils contenaientun gène produisant une protéine reconnue par le système immunitaire humain. En théorie, cesgènes devraient permettre aux cellules tumorales d'exprimer de leur surface la protéinereconnaissable, marquant ainsi les cellules que doit détruire le système immunitairehumain.

L'utilisation de lipoplexes pour le traitement de la fibrose kystique est actuellement à l'étudeégalement. La maladie est causée par un gène défectueux qui entraîne le mauvaisfonctionnement d'une protéine particulière dans les cellules pulmonaires du patient. Leslipoplexes qui sont administrés à l'aide d'un aérosol dans les poumons du patient contiennentle gène pour une version fonctionnelle de la protéine.8. 11

Les lipoplexes ne sont pas aussi efficaces que les vecteurs viraux pour introduire des gènesdans des cellules. Pour améliorer leur efficacité, les scientifiques tentent d'intégrer certainesprotéines virales dans les surfaces extérieures des lipoplexes, en particulier, les protéinesvirales qui reconnaissent certaines molécules à la surface de la cellule hôte et s'y lient.11

Injection d’ADN plasmidique

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Les cellules musculaires se sont révélées capables d'absorber et d'exprimer l'ADNplasmidique, ce qui laisse entrevoir la possibilité que l'ADN plasmidique injecté dans lesmuscles puisse stimuler la production d'une protéine thérapeutique par les cellulesmusculaires. Cette protéine pourrait ensuite être sécrétée dans le courant sanguin et le restedu corps. Par exemple, le gène codant pour l'érythropoïétine (protéine qui aide à stimuler laproduction de globules rouges) a été injecté à titre expérimental dans les muscles d'animauxavec un certain succès. Un tel traitement serait utile aux patients après une chimiothérapie ouune radiothérapie.11

Par ailleurs, l'utilisation d'ADN plasmidique dans les vaccins semble prometteur; en effet,l'ADN plasmidique stimule les réactions immunitaires de protection contre des maladiescomme l'herpès, le sida ou la malaria. Lorsque l'ADN plasmidique est injecté dans lesmuscles, il pénètre dans les cellules musculaires, puis fait produire aux cellules les protéinesqui correspondent aux gènes que contient le plasmide. Le système immunitaire apprendraensuite à reconnaître les nouvelles protéines et les détruira s'il les rencontre à l'avenir. Onmène actuellement des expériences où les plasmides contenant des gènes pour les protéinesd'enveloppe virales sont injectées, en vue de permettre au système de reconnaître ces virus, desorte qu'il les attaque et les détruise si jamais il les rencontre.11

3) TECHNOLOGIE ANTI-SENSComme nous l'avons mentionné dans la section sur les composantes biologiques, les virusprennent les commandes de la machine à fabriquer des cellules pour produire leurs propresprotéines et répliquer leur matériel génétique, ce qui donne lieu à la production de nouveauxvirus. L'une des applications possibles de la technologie anti-sens consiste à empêcher lesvirus qui infectent une cellule hôte de produire leurs propres protéines, ce qui, à son tour,préviendrait leur reproduction.

Souvenons-nous que les protéines sont fabriquées dans le cadre d'un processus en deuxétapes. Au cours de la première étape, l'ADN est transcrit pour produire de l'ARNmessager (ARNm) [voir :composantes biologiques; ARN], alors que pendant la deuxième, onassiste à la traduction de l'ARN messager en une protéine. Les médicaments anti-sensinteragissent avec l'ARN messager, l'empêchant d'être traduit en la protéine correspondante.

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Une molécule d'ARN messager est une chaîne de nucléotides, qui est « lue » par un ribosomependant la synthèse d'une protéine. Un médicament anti-sens est un oligonucléotide (unechaîne monocaténaire relativement petite de nucléotides) complémentaire à un petit segmentde la molécule cible d'ARN messager. Lorsque le médicament entre en contact avec son ARNmessager complémentaire, il se lie à l'ARN messager comme se lient les deux brins d'unemolécule d'ADN. Ceci rend l'ARN messager illisible pour le ribosome, et aucune protéinen'est produite.

Comme un médicament anti-sens est censé être complémentaire d'une séquence particulièred'ARN messager propre à l'ARN messager d'un virus particulier, il n'interférera pas avecl'ARN messager produit naturellement par la cellule hôte, ce qui signifie que les effetssecondaires du médicament sont minimes.

À la fin du mois d'août 1998, la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis aapprouvé un médicament appelé formivirsen pour le traitement de la rétinite àcytomégalovirus chez les personnes atteintes du sida. 12 Il s'agit du premier médicament anti-sens sur le marché. Le formivirsen empêche la reproduction du cytomégalovirus qui provoquela rétinite, infection oculaire entraînant la cécité et touchant principalement les personnesatteintes du sida. Le médicament est injecté régulièrement dans l'oeil du patient et n'aapparemment que de légers effets secondaires comparativement à d'autres médicamentsantiviraux.

4) DIFFÉRENTES APPLICATIONS DE THERAPIE GENIQUE

Dans les années quatre-vingt, on croyait que la thérapie génique ne servirait qu'à guérir desmaladies héréditaires. Toutefois, on s'aperçoit qu'elle peut être utilisée dans plusieurs autresdomaines:

La thérapie génique d’une maladie héréditaire, l’ADA

C’est en septembre 1990 qu’a été pratiquée la première thérapie génique dans le monde. Cetessai mené aux National lnstitute of Health américains (NIH), par les médecins Anderson etBlaese, concernait une petite fille de trois ans atteinte d’un syndrome génétique rare et grave,le déficit en adénosine déaminase (ADA).Les enfants souffrant de cette maladie n’ont plus de

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défenses contre les agents pathogènes et sont condamnés à vivre dans une « bulle » stérile,privés de tout contact physique avec d’autres êtres humains. Les chercheurs ont prélevé chezla fillette un certain nombre de cellules de la moelle osseuse et y ont introduit un gène sain del’ADA puis ont réinjecté ces cellules chez la fillette. Les cellules immunitaires ainsi« renforcées » ont exercé une influence positive sur l’évolution positive sur l’évolution de lamaladie. La correction de cette maladie n'a malheureusement été que transitoire mais ce demi-succès suscite toujours énormément d'espoir. Plus récemment, en 1999, l'équipe duProfesseur Fisher à l'hôpital Necker-Enfants Malades de Paris a pu corriger une autre formede déficit immunitaire grave chez quatre nourrissons, en remplaçant le fragment défectueuxdu code génétique par le fragment normal. Les enfants ont ainsi récupéré des fonctionsimmunitaires normales ou quasi-normales, leur évitant une greffe de moelle classique. Il estencore trop tôt pour crier victoire, mais les spécialistes de ce domaine s'accordent à penserque cette tentative sera couronnée de succès à long terme.

A l’heure actuelle, ce sont 400 essais cliniques de thérapie génique qui sont menés à travers lemonde, dont la plus grande partie, environ 300, se déroulent aux USA. La plupart de cesessais sont dits de phase I ou Il, c’est-à-dire qu’ils sont destinés uniquement à vérifier lafaisabilité de la technique. On estime à 3300 le nombre de patients qui ont participé à unprotocole de thérapie génique, les pathologies concernées étant très variées les maladiesmonogéniques (un gène est déféctueux) concernent 50 essais environ, alors que les cancersreprésentent environ 250 essais. Puis viennent les maladies infectieuses (30 essais environ), etenfin, d’autres pathologies comme la sclérose latérale amyotrophique ou la polyarthriterhumatoïde. Mais jamais un essai n’a donné des résultats aussi positifs que dans le cas des"enfants-bulles" de l'hôpital Necker.

Cancers

Le cancer représente la maladie la plus concernée par les essais cliniques en thérapie génique(voir la section sur les essais cliniques). Cette dominance de la cancérologie s’explique par lefait que, dans ce domaine, les besoins sont grands et les patients pouvant participer aux essaissont également nombreux. Certains essais cliniques en oncologie concernent notamment laleucémie.

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Mucoviscidose

Qu’est-ce que la mucoviscidose ?

La mucoviscidose ou fibrose kystique est une maladie génétiquehéréditaire rare caractérisée par une viscosité anormale du mucusque sécrètent les glandes intestinales, pancréatiques et bronchiques. Cette maladie toucheenviron 1 enfant sur 1800. Dans les familles porteuses du gène qui est responsables de lamaladie, elle touche 1 enfant sur 4. Une personne sur 25 est porteuse du gène. Toutes lessécrétions d’un fibro-kystique (personne atteint de fibrose kystique) sont anormalementépaisses entraînant ainsi des infections à répétition, donc une insuffisance respiratoire grave,puis la mort. Aujourd’hui, l’espérance de vie de ces personnes est d’environ 30 ans. Bien quecela paraisse peu élevé, la situation pour les fibro-kystique s’est beaucoup améliorée depuisquelques années, notamment par les travaux très prometteurs sur la thérapie génique.

Pourquoi la thérapie génique?

Dans la mucoviscidose, un gène « défectueux » commande une synthèse désordonnée d’uneprotéine appelée CFTR (cystic fibrosis transmembrane regulator). C’est cette défectuosité dece gène qui cause la maladie. En 1989, une équipe canadienne de Toronto, sous la directiondu Dr Lap-Chee Tsun, a découvert ce gène. Cette découverte à permis de concentrer larecherche sur la thérapie génique. En insérant un gène sain qui commanderait une synthèseadéquate de la protéine CFTR dans le corps du patient, le problème serait réglé. C’est ce quenous avons fait, mais il faut se rappeler que la thérapie génique n’est pas encore totalement aupoint. C’est ainsi qu’il y a actuellement, à travers le monde, 15 groupes qui étudientactivement la thérapie génique. L’atteinte de leurs objectifs (voir la section sur les vecteurs)permettra aux fibro-kystiques d’espérer une meilleure qualité de vie, voire même uneaugmentation de leur espérance de vie.

Les essais cliniques

En 1995, plus de 70 fibro-kystiques avaient reçu des traitements de thérapie génique. Dansces traitements, on utilise surtout des adénovirus avec la méthode in vivo pour transférer legène CFTR-DNA à l'épithélium respiratoire humain. La majorité des études ont démontré unecorrection partielle des anomalies électro-physiologiques et biologiques. Les études sur lamuqueuse nasale ont démontré que la correction est temporaire (elle dure environ unesemaine). Heureusement, on a noté qu’aucune réaction adverse n'a été mise en évidenceconcernant l'administration répétitive d'adénovirus dans les voies aériennes. Des études pluslarges seront nécessaires pour déterminer les avantages cliniques de cette forme de traitement.Est-ce que la correction de l'anomalie au niveau cellulaire aura comme effet de retarder lesdommages pulmonaires de la maladie? Les recherches devront se poursuivre.

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Pour en savoir plus sur la mucoviscidose: Comité provincial des adultes fibro-kystiques(CPAFK) http://pages.infinit.net/cpafk/index.html

Sida

La thérapie génique contre le SIDA

Une étude clinique qui vient d'être lancée en Australie testera les performances d'une nouvelletechnique de thérapie génique contre le sida (le syndrome immunodéficitaire acquis) maladiequi est caractérisée par l’effondrement ou la disparition des réactions immunitaires del’organisme.

Cette technique est basée sur l'action d'une enzyme, le ribozyme, capable de « cisailler »l'ARN de la cellule. L'enzyme a été modifiée par les scientifiques afin de s'attaquerspécifiquement au virus du VIH au moment où il pénètre dans la cellule. Six paires dejumeaux identiques vont participer à l'étude. Chaque paire de jumeaux comprendra unindividu sain et un autre atteint du sida. Des lymphocytes CD4+, qui jouent un rôle de premierplan dans l'immunité, ont été prélevées sur l'individu sain. Le ribozyme a ensuite été introduitdans ces cellules. Puis, ces dernières ont été multipliées en laboratoire puis administrées partransfusion sanguine au patient atteint. Après la transfusion, le patient atteint peut compter surun stock de lymphocytes CD4+ devenus invulnérables au virus du sida. Progressivement,elles remplaceront les CD4+ détruites par le sida, c'est cette perte de lymphocytes qui produitce fameux déficit immunitaire.

Même si les résultats de cette étude se montrent concluants, cette technique ne sera pasdisponible de sitôt pour les millions de personnes présentement atteintes.

Pour en savoir plus sur le SIDA : http://pages.infinit.net/cocqsida/index.htm

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Maladie coronariennes

Les maladies coronariennes sont, nous le savons bien, un fléau incontournable du XXe siècle.Il serait donc souhaitable, pour le XXIe siècle, de trouver des traitements encore plusefficaces contre cette pathologie. La thérapie génique contribue à l’avancement des nouveauxtraitements dans ce domaine. En voici quelques exemples.

L’hypercholestérolémie familialeUne étude américaine a montré qu’il était possible de faire diminuer le taux de cholestérolchez les gens qui souffraient d’hypercholestérolémie familiale. En effet, après avoir transféréle gène du récepteur LDL dans les hépatocytes d’une patiente atteinte d’hypercholestérolémie,ils ont remarqué une diminution durable du taux de cholestérol dans son sang. Le LDL est uneabréviation qui signifie « low density lipoprotein ». Ce sont les lipoprotéines qui transportentle cholestérol dans le plasma sanguin. L’association LDL-cholestérol est souvent appelée le «mauvais » cholestérol.

Maladies cardiovasculairesEn 1997, à l'Université de Californie, à San Diego, les chercheurs ont mis au point une toutenouvelle thérapie génique pour le traitement des maladies cardiovasculaires. Ils ont identifiéun gène, appelé VEGF (pour Vascular Endothelial Growth Factor), qui favorise la croissanceet la multiplication des vaisseaux sanguins. Durant plusieurs semaines, ils ont injecté ce gèneà un porcelet dont l'on avait intentionnellement bloqué l'une des artères alimentant le cœur. Lerésultat a été très concluant : il y a eu une augmentation spectaculaire du nombre de nouveauxvaisseaux sanguins. Le blocage a été complètement contourné et la circulation, rétablie.

Quelques dizaines de patients ont déjà reçu ce traitement à titre expérimental, avec desrésultats très prometteurs. À doses modérées, l'emploi de ce gène semble sans danger. Lestests se poursuivent et on espère que, d'ici 4 à 5 ans, ce type de thérapie génique pourraremplacer les techniques de chirurgie traditionnelles, comme le pontage coronarien.

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5) LES ESSAIS CLINIQUES

Il y a quelques années, on croyait que la thérapie génique servirait uniquement à remplacer ungène défectueux et à corriger des maladies héréditaires. Toutefois, pour l’instant la majoritédes essais cliniques de nos jours se fait sur des patients atteints de maladies acquises. (Voir letableau ci-dessous) Aujourd’hui, c’est en cancérologie que se déroule le plus grand nombresd’essais cliniques de thérapie génique. Il y a 2 ans, en 1998, on recensait dans le mondeenviron 350 protocoles cliniques incluant environ 2 700 patients, la majorité de ces essais(75%) étant réalisés aux États-Unis. Pourquoi observe-t-on une dominance des essais encancérologie? Cela s’explique par le fait que les besoins dans ce domaine sont grands et queles patients pouvant participer aux essais sont nombreux.

Les principaux vecteurs utilisés sont les rétrovirus notamment dans la stratégie ex vivo. Deplus, les adénovirus sont également utiles pour les transferts in vivo ou in situ : par exemple,par injection dans une masse tumorale ou par aérosol au niveau de l’épithélium respiratoirepour la mucoviscidose.

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6) LA RECHERCHE

Au début des années 1990, nous avons assisté à une période euphorique dans laquelleplusieurs compagnies pharmaceutiques voyaient la thérapie génique comme une technologiequi remplacerait les médicaments au XXIe siècle. Ainsi, la majorité des sociétés du secteurdes biotechnologies ont fait leur entrée en bourse à cette époque : entre 1993 et 1995. De plus,ces compagnies pharmaceutiques ont alors mis sur pied des programmes de recherchesconsacrés à la thérapie génique :

• L'américain Pfizer a mis en place une structure baptisée "Pfizergen" dont la vocationest de coordonner l'ensemble des travaux concernant non seulement la thérapiegénique mais également la compréhension des composantes génétiques des maladies.

• Genetic Therapy (GTI) (Etats-Unis) mène des recherches consacrées au sida, aucancer et à la mucoviscidose (35 millions de dollars)

• Somatix (Etats-Unis) s'intéresse au cancer et au sida (25 millions de dollars)

• Transgène ( France) travaille sur le sida, le cancer, la mucoviscidose et les myopathies(25 millions de dollars)

• Viagene (Etats-Unis) mène des travaux sur le sida et le cancer (20 millions de dollars)

• Targeted Genetics (Etats-Unis) travaille sur le sida, le cancer et la mucoviscidose (15millions de dollars)

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• Gencell (France) privilégie trois axes thérapeutiques : système nerveux central,système cardio-vasculaire, cancer. Trois programmes sont actuellement en cours dedéveloppement, deux avec l'américain Introgene et un avec le français Genopoïeticconcernant la cancérologie. En outre, plusieurs projets font l'objet de travaux, enparticulier avec l'américain Darwin Molecular sur le système nerveux central, etl'Institut Pasteur de Lille sur le système cardio-vasculaire.

Pour en avoir plus sur l'aspect économique rattaché à la thérapie génique:http://www.larecherche.fr/

Thérapie géniqueTraitement d'une tumeur cérébrale à l'aide de la thérapie génique

Les virions contenus dans un gène nouveausont incubés avec les cellules d'une souris.

Les virions infectent les cellules de la souris,lesquelles deviennent des cellulesproductrices de virus.

Les cellules productrices sont injectéesdirectement dans la tumeur.

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Les virus relâchés par les cellulesproductrices envahissent les cellulestumorales, qui se divisent rapidement, maisignorent les cellules cérébrales voisines.

Les virions amènent les cellulesproductrices et les cellules tumoralesinfectées à produire une protéine qui lesrend vulnérables à la destruction.

Un médicament, le ganciclovir, est injecté14 jours plus tard et pénètre uniquementdans les cellules contenant la protéine.

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Les cellules tumorales et productrices sontdétruites par le ganciclovir

Liste des ouvrages de référence1. « Gene Therapy for Cystic Fibrosis » sur le site Web de la Targeted Genetics

Corporation [Cité le 29 juillet 1998] http://www.targen.com/G_the_CF.htm

2. « Cancer: Definition, » dans Biotech Life Science Dictionary [Cité le 12 août 1998]http://biotech.chem.indiana.edu/pages/dictionary.html

3. T. Friedmann, « Overcoming the Obstacles to Gene Therapy » dans ScientificAmerican, juin 1997, p. 97-100

4. « Gene Therapy - An Overview » dans Access Excellence Genentech [Cité le 30juillet 1998] http://www.gene.com/ae/AB/BA/Gene_Therapy_Overview.html

5. W.F. Anderson, « Human Gene Therapy » dans Nature, no 392 (suppl.), 30 avril 1998,p. 25-26

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6. « Transduction: Definition, » dans BioTech Life Science Dictionary [Cité le 13 août1998] http://biotech.chem.indiana.edu/pages/dictionary.html

7. « Gene Delivery Systems » à la page d'accueil de Cell Genesys [Cité le 30 juillet1998] http://www.cellgenesys.com/text/research/GeneDelivery

8. « Gene Therapy » sur le site Web de Genzyme [Cité le 29 juillet 1998]http://www.genzyme.com/company/lines/rdgt/welcomf.htm

9. T. Friedmann, « Overcoming the Obstacles to Gene Therapy » dans ScientificAmerican, juin 1997, p. 100

10. R. Langer, « Drug Delivery and Targeting » dans Nature, no392 (suppl.), 1998, p. 7.

11. P.L. Felgner, « Nonviral Strategies for Gene Therapy» dans Scientific American, juin1997, p. 105-106

12. « Antisense Technology » dans Isis Pharmaceuticals, Inc. [Cité le 16 août 1998]http://www.isip.com/antisens.htm

Webographie Voici plusieurs liens menant vers des sites portant sur la thérapie génique:

Somatic Gene Therapy , NFP37 http://www.unifr.ch/nfp37

European Society of Gene Therapy http://www.cbt.ki.se/ewgt/

The American Society of Gene Therapy http://www.asgt.org/index.html

Questions de bioéthique http://www.unesco.org/ibc/fr/themes/therapie.html

La Recherche http://www.larecherche.fr/arch/98/12

Les technologies clés-Thérapie génique http://www.evariste.anvar.fr/100tc/1996/f021.html#1

La thérapie génique http://telethon.citeweb.net/science/enjeu/sommaire.htm

La thérapie génique et la fibrose kystiquehttp://ourworld.compuserve.com/homepages/JCh_FAVRE/frgene.htm

Compléments :

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Source:http://www.larecherche.fr

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7) Texte récents sur la thérapie génique

Premier succès pour la thérapie génique

Grave déficit immunitaire soigné chez des "bébés bulles"

Paris. La thérapie génique a connu son premier succès. Grâce à ce nouveau mode detraitement, des médecins parisiens ont pu soigner un grave déficit immunitaire chez desnourrissons. Cette infection oblige les bébés à vivre dans une bulle stérile pour éviter lesmicrobes. Les deux premiers "bébés bulles", traités à 8 mois et 11 mois, ont pu rentrer chezeux sans aucun traitement. Ils jouissent depuis plus d'une année "d'un système immunitairenormal, sans effets secondaires indésirables", explique Alain Fischer, co-auteur de l'étude,dans la revue américaine "Science" de vendredi.

Première preuve tangible

Cette restauration du système immunitaire a été confirmée par les vaccinations contre ladiphtérie, la poliomyélite et le tétanos: les nourrissons ont réagi normalement en produisantdes anticorps contre ces maladies. L'équipe prévoit de traiter six autres bébés cette année ets'intéresse à des maladies similaires.

Ce succès apporte la première preuve tangible de l'efficacité de la thérapie génique. Au total,cinq bébés ont bénéficié du traitement, dans quatre cas avec succès. Pour le dernier cas, leschercheurs sont dans l'attente et refusent pour l'heure de se prononcer.

"Jamais jusque là une correction complète des anomalies de la maladie n'avait été obtenuepour d'autres maladies", ajoute le professeur Fischer. Les enfants "devront être surveillés touteleur vie pour s'assurer de leur bonne santé et contrôler le succès à long terme du traitement",relève-t-il toutefois.

Maladie rare

L'immunodéficience combinée sévère est une maladie rare, caractérisée par l'absence totale decellules de défense. Elle laisse le malade à la merci de la moindre infection, provoquant samort en l'absence de greffe de moelle osseuse ou de l'abri en chambre stérile.

Le traitement consistait à introduire un gène "sain" dans des cellules sanguines, afin decorriger le défaut génétique. Les cellules modifiées ont proliféré rapidement, ce qui a permisde reconstituer le stock de globules blancs, de lymphocytes T et d'autres cellules de défensede l'organisme.

(SDA - ro/fd/4/c4fra sozm for/000427 1722)

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Premier succès d’une thérapie génique

Deux enfants nés sans défenses contre les maladies et obligés de vivre dans des bulles stérilesont été guéris grâce à une thérapie génique. Un premier succès pour ces traitements jusqu’icipeu concluants.

France 28/04/2000 - Deux enfants forcés de vivre dans des bulles stériles à l’hôpital parcequ’ils étaient nés sans défenses immunitaires ont été rendus à la vie normale grâce à unethérapie génique. En introduisant une copie en bon état du gène défectueux dans l’organismede deux bébés de 8 et 11 mois, en effet, des chercheurs français sont parvenus à guérirl’immunodéficience combinée sévère (DICS X1, en jargon médical) dont ils étaient atteints. Ils’agit là d’un premier succès pour les thérapies géniques, une approche qui a jusqu’ici connu

plus de déboires que de résultats encourageants.

Les enfants atteints de DICS X1 sont privés d’un gène quipermet à certaines cellules clés de leur système immunitairede se reproduire et d’attaquer les corps étrangers. Résultat :leur immunité étant inexistante, ils sont incapables de sedéfendre contre la moindre maladie et doivent vivre dans desenvironnements stériles tant qu’ils n’ont pas subi une greffede moelle osseuse, une opération qui demeure difficile etrisquée.

Les chercheurs français, dirigés par Alain Fischer, del’Hôpital Necker, à Paris, ont introduit une copie en bon étatdu gène défectueux chez ces enfants dans un rétrovirus. Ils enont ensuite infecté les bébés à plusieurs reprises, sur unepériode de trois jours. Deux semaines plus tard, on détectaitdéjà de nouvelles cellules porteuses du gène corrigé et unnombre croissant de cellules immunitaires fonctionnelles.Aujourd’hui, après plus de 11 mois, les deux enfants vivent à

la maison et ont des défenses immunitaires comparables à celles d’enfants de leur âge. Diversvaccins ont aussi administrés avec succès.

Un des problèmes des thérapies géniques en général consiste à faire en sorte que les gènescorrigés se substituent au gènes fautifs dans toutes les cellules du corps. Dans le cas de DICSX1, la maladie elle-même semble contribuer au succès de la thérapie. Comme les cellulesdéfectueuses ne se reproduisent guère, celles qui sont porteuses du gène corrigé n’ont aucunmal à se multiplier, supplantant éventuellement les autres. Le traitement de la maladie a donc

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été efficace bien qu’une poignée seulement de cellules porteuses du gènes correct aient puêtre introduites dans l’organisme. Philippe Gauthier

Non aux humains génétiquement modifiésLes chercheurs eux-mêmes s’effraient des expériences génétiques. Un comité d’expertsconsidère que la technologie n’est pas au point et que, le serait-elle, la société n’aurait pas lasagesse nécessaire à son usage.

États-Unis

19/09/2000 - Il serait dangereux et irresponsable de laisser les chercheurs effectuer desmanipulations génétiques capables de se transmettre d’une génération à l’autre et ce, même sile but visé consiste à prévenir des maladies héréditaires. C’est du moins ce que conclut uncomité de la prestigieuse Association américaine pour l’avancement des sciences, qui compte146 000 chercheurs dans ses rangs. Les experts rappellent que la technologie n’est ni sûre, niefficace et que même si elle l’était, il n’est pas certain qu’elle serait utilisée de manière

équitable. Mieux vaut donc s’abstenir pour l’instant.

Jusqu’ici, la recherche sur les thérapies géniques s’est surtoutorientée vers la réparation des gènes somatiques. Ces réparationsne sont pas transmissibles d’une génération à l’autre. Mais diverslaboratoires travaillent maintenant sur des modificationsgénétiques transmissibles, qui permettraient en théorie de retirerles gènes de certaines maladies héréditaires qui affectent plusieursfamilles. Cette technique pourrait aussi ouvrir la porte à lacréation de bébés plus beaux, plus intelligents ou plus athlétiques.

La tentation est donc forte. Mais le rapport souligne que lesmédias ont tendance à ne rapporter que les succès desmanipulations génétiques et du clonage. Or, derrière chaqueréussite, il y a des bataillons d’animaux difformes, avortés ou nésavec des anomalies génétiques fatales. Les laboratoires se gardentbien d’attirer l’attention sur ces échecs. « Cette technologie esthautement inefficace et sa sûreté n’est pas démontrée, soulignentles experts. Ce sont là des barrières techniques majeures à sonapplication sur les humains. »

Et même si la technologie était au point, un sérieux problème moral se poserait : qui auraitaccès à cette technologie, et à quel prix? Et qui aura le pouvoir de décider? Si seuls les riches

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peuvent se permettre des bébés génétiquement améliorés, on risque de créer un gouffre sansprécédent entre les classes aisées et le reste de la population, avec des conséquences socialespotentiellement explosives. Les experts croient que nos sociétés ne sont tout simplement pasencore capables d’utiliser cette technologie « de manière équitable, juste et respectueuse de ladignité humaine » et suggèrent que l’on s’en abstienne pour l’instant.

Philippe [email protected]

Dernière modification : 19/09/2000

Semaine du 24 janvier 2000

Flash ScienceHalte à la thérapie génique

Les autorités américaines ont rendu leur verdict : la thérapie génique doit cesser pourun temps. Cette conclusion, prévisible, survient au terme de l'enquête sur le décès d'unpatient, en septembre. Un nombre désolant d'erreurs, d'anomalies et de coins tournés unpeu ronds était ressorti des trois journées d'audiences du comité chargé d'enquêter surle programme de thérapie génique de l'Université de Pennsylvanie.

Cette décision de la Food and Drug Administration (FDA) n'en est pas moins inhabituelle :c'est l'ensemble d'un programme -huit expériences, dont cinq sur des patients, actuellement encours- qui est mis sous scellés et ce, pour une période indéterminée. La suspension ne seralevée, explique la FDA dans une lettre laconique de deux pages, que lorsque l'Institut dethérapie génique de l'Université de Pennsylvanie aura apporté des preuves convaincantes qu'ila modifié ses pratiques.

Comme son nom l'indique, la thérapie génique s'attaque aux gènes, plus précisément auxgènes défectueux, qu'elle essaie d'éliminer, de stimuler ou de ralentir, suivant la maladie. Letraitement demeure, même après neuf années, encore hautement expérimental, et sonefficacité reste à démontrer.

Jesse Gelsinger, 18 ans, atteint d'une maladie héréditaire du foie, est décédé le 17 septembred'une réaction brutale de son système immunitaire à un de ces traitements. Il est la premièrepersonne à mourir d'une thérapie génique -ce qui n'a pas empêché les parents des autrespatients de démontrer une foi sans failles lors des audiences du comité. Y compris le père deJesse Gelsinger.

Ces audiences avaient parfois viré en histoire d'horreur : Jesse Gelsinger avait été souffrant aucours des jours précédents, ce qui l'aurait théoriquement rendu inapte à subir le traitement, cequi n'a pas empêché celui-ci de se poursuivre; d'autres patients ayant subi de graves effets

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Cottier & /Guerry 2000, Génie Génétique et Clonage 125www.unifr.ch/nfp37 Thérapie Génique

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secondaires au cours des mois précédents n'avaient pas été signalé à la FDA, comme c'est larègle pour tout traitement expérimental; les décès de singes des suites d'une thérapie géniquen'avaient pas fait l'objet d'études poussées; et ainsi de suite...

Source: Agence Science-Presse