une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

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Math. Z. 159, 133-142 (1978) Mathematische Zeitschrift by Springer-Verlag 1978 Une alg6bre gradu6e universelle pour les connexions sans torsion Claude Albert ~ et Daniel Lehmann 2 Institut de Math6matiques, Universit6 des Sciences et Techniques du Languedoc, F-34060 Montpellier Cedex, France 2 U.E.R. de Math6matiques, Universit6 des Sciences et Techniques de Lille, F-59650 Villeneuve cI'Ascq, France I. Introduction Notant G un groupe de Lie et M un G-module r6el de dimension finie, soit E = M x P --. Vle fibr6 vectoriel de fibre M associ6 fi un G-fibr6 principal P ---, V (de G classe C~176 A toute connexion co sur P, correspond une d6rivation covariante V sur E. Donnons-nous e: TV-~E une 1-forme sur V /t coefficients dans le fibr6 vectoriel E. On appellera torsion de co (ou de V) relativement d c~ la 2-forme T sur V,/t coefficients dans E, definie par: z(X, Y)= Vx(~ Y )- Vy(~X)-~[Y,X]. Le couple (E, cz) sera dit sans torsion s'il existe une connexion co sur P, /~ torsion nulle relativement fi c~. On se propose de d6finir un ~<homomorphisme de Chern-Weil>> pour les couples (E, ~) sans torsion, c'est-fi-dire plus pr6cisdment de construire une alg+bre gradu6e B~(G;M) munie d'une injection Bt: I(G)~BW(G;M) telle que tout couple (E,c0 sans torsion de base V ddfinisse un homomorphisme d'alg6bres gradudes )~,~ rendant commutatif le diagramme: I(G) z~ , HDR(V) B,] B~V(G ; M) (Z~ d6signant l'homomorphisme caract6ristique de E). L'int6r6t de cet homomorphisme Ze,~ est double: - d'une part, il fournit de nouveaux invariants cohomologiques de (E,~) permettant de prouver ais6ment dans certains cas la non existence d'isomor- phisme entre deux couples sans torsion (E~, ~) et (E2, ~2) sur une m5me vari6t6 V; il pourra arriver, en particulier, que )~=0 et ZE,~=t=0 (cf. exemples du w5); - d'autre part la non nullit6 de certains classes ZE,~(~) s'interpr6te parfois comme une obstruction fi ce que tel ou tel ph6nombne g6om6trique sit lieu (cf. w 0025-5874/78/0159/0133/$02.00

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Page 1: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

Math. Z. 159, 133-142 (1978) Mathematische Zeitschrift

�9 by Springer-Verlag 1978

Une alg6bre gradu6e universelle pour les connexions sans torsion

Claude Albert ~ et Daniel Lehmann 2

Institut de Math6matiques, Universit6 des Sciences et Techniques du Languedoc, F-34060 Montpellier Cedex, France 2 U.E.R. de Math6matiques, Universit6 des Sciences et Techniques de Lille, F-59650 Villeneuve cI'Ascq, France

I . I n t r o d u c t i o n

Notan t G un groupe de Lie et M un G-module r6el de dimension finie, soit E = M x P --. Vle fibr6 vectoriel de fibre M associ6 fi un G-fibr6 principal P ---, V (de

G classe C~176 A toute connexion co sur P, correspond une d6rivation covariante V sur E.

Donnons -nous e: TV-~E une 1-forme sur V /t coefficients dans le fibr6 vectoriel E. On appellera torsion de co (ou de V) relativement d c~ la 2-forme T sur V,/t coefficients dans E, definie par :

z(X, Y)= Vx(~ Y ) - Vy(~X)-~[Y,X].

Le couple (E, cz) sera dit sans torsion s'il existe une connexion co sur P, /~ torsion nulle relativement fi c~. On se propose de d6finir un ~<homomorphisme de Chern-Weil>> pour les couples (E, ~) sans torsion, c'est-fi-dire plus pr6cisdment de construire une alg+bre gradu6e B~(G;M) munie d 'une injection Bt : I (G)~BW(G;M) telle que tout couple (E,c 0 sans torsion de base V ddfinisse un h o m o m o r p h i s m e d'alg6bres gradudes )~,~ rendant commuta t i f le d iagramme:

I(G) z~ , HDR(V)

B,] B~V(G ; M)

(Z~ d6signant l ' homomorph i sme caract6ristique de E). L'int6r6t de cet h o m o m o r p h i s m e Ze,~ est double:

- d'une part, il fournit de nouveaux invariants cohomologiques de (E,~) permettant de prouver ais6ment dans certains cas la non existence d ' isomor- phisme entre deux couples sans torsion (E~, ~ ) et (E2, ~2) sur une m5me vari6t6 V; il pourra arriver, en particulier, que ) ~ = 0 et ZE,~=t=0 (cf. exemples du w 5); - d'autre par t la non nullit6 de certains classes ZE,~(~) s'interpr6te parfois comme une obstruct ion fi ce que tel ou tel ph6nombne g6om6trique sit lieu (cf. w

0025-5874/78/0159/0133/$02.00

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134 C. Alber t et D. L e h m a n n

Exemples. 1) Dans le cas E = TV, c~=Jl~-v, P e s t une G-structure sur Vet le couple (E, ~) est sans torsion si le premier tenseur de structure de P est nul.

2) Si E d6signe le fibr6 transverse ~t un feuilletage de codimension q sur V et c~: TV-- ,E la projection canonique, le couple (E, ct) est toujours sans torsion (avec G=GL(q, IR)) et une connexion sans torsion est en particulier une connexion de Bott.

3) Soit f : V ~ I R "+k une immersion de V (varidt6 de dimension n) dans l'espace euclidien. Le fibr6 trivial f*(T1R "+k) se d6compose sous la forme T V | off N V d6signe le fibr6 normal ~t l 'immersion. La seconde forme quadratique fondamentale

T V x TV ~ N V

peut s'interpr@er comme une 1-forme e sur V/~ coefficients dans E = Hom(TV, NV) et (E, ~) est alors sans torsion (comme permet de l'affirmer l'une des 6quations de Gauss-Codazzi).

4) On peut prendre pour E le fibr+ vectoriel trivial de dimension 0. 5) Soit K--* K/G un espace homog6ne sym6trique (notons P0 ce G-fibr6). Si

et 15 sont les alg6bres de Lie de K et G et M un suppl6mentaire de 15 dans invariant par ad Get tel que [ M , M ] c15, il existe un isomorphisme naturel:

c%: T(K/G) ~ , E 0 = M x P o, G

et le couple (E, ~) est sans torsion (car particulier de l 'exemple 1). Tout couple (E,c 0 d6fini comme image rdciproque de (Eo,c%) par une application diff6rentiable ~0: V - ~ K / G est encore sans torsion. L'exemple 3 est un cas particulier de cette situation, avec K = O(n + k), G = O(n) x O(k) et (p l 'application de Gauss associ6e/t l 'immersion.

II. Rappels et Notat ions

Si G est un groupe de Lie, appelons G-a.d.g. une /R-algbbre diff6rentielle N- gradu6e, commutative (au sens gradu6)

A = @ A v p>_O

munie, pour tout 616ment Xe15 d'op6rateurs i x et L x v6rifiant les relations habituelles de Cartan [1]. On suppose en outre que G op6re sur l'alg6bre diff6rentielle gradu6e A et que la reprbsentation X~--~L x de 15 dans A est Faction infinit6simale associ6e/~ cette action.

Soit M un G-module de dimension finie, p: G--+ GL(M) Faction correspon- dante de G, et fi: 15~g[(M) Faction infinit6simale associ6e.

Pour route G-a.d.g. A, on notera encore

ix: A V @ M ~ A V - I @ M

Page 3: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

Une alg6bre gradu6e universelle pour les connexions sans torsion 135

l 'application ix| i qui envoie u| sur ixu| et

d: A P | 1 7 4

l 'application d | u |174 On notera d'autre part:

L~: AV|174

la reprdsentation L | de (5 dans AV@M:

L~(u | Lxu| + u| (~(X), m).

Si M | <" >,M" est un homomorphisme de G-modules, on d6finit un produit ext~rieur (relatif ~t ( , ))

(AP | M) x (Aq | M')-. AP+q | M"

en posant

(u| A (v|174 (m,m').

Les produits extdrieurs consid6r6s ci-dessous seront, sauf mention contraire, relatifs aux applications:

1R | M ~ M (multiplication par les scalaires),

(5 | M --, M (action p de (5 sur M),

(5 | (5 ~ (5 (crochet de (5),

(G op@ant trivialement sur/R, et par la repr6sentation adjointe sur (5). Un 616ment ~EAP@M est dit invariant, s'il est invariant pour la structure de

G-module produit tensoriel (cela implique en particulier L ~ = 0 pour tout Xe(5, et la rdciproque est vraie si G est connexe).

est dit semi-basique si ix~.=O pour tout X~(5, et basique s'il est ~t la lois invariant et semi-basique.

On notera respectivement

I (A @ M), SB(A @ M), B(A @ M)

l 'espace des 616ments invariants, semi-basiques et basiques de A @ M. Pour tout G-module M, on notera M G l'espace vectoriel des 616ments de M

invariants par G.

III. Construction de BIYV(G; M)

On va s'int6resser aux triples (A, M, 0) off A est une G-a.d.g.,

M est un G-module, OeBI(A@M).

[Cas particulier: A =A(P), alg6bre des formes ext6rieures sur un G-fibr6 princi- pal diff6rentiable P -~ V. M d6finit alors le fibr6 vectoriel associ6 E = M • P et 0 une 1-forme c~: TV~E.]

Page 4: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

136 C. Albert et D. Lehmann

Soit co une connexion sur A, c'est-/~-dire un 616ment de I I (A| vhrifiant ixco=X pour tout XE(5. On appellera torsion de co (relativement ~t 0) l'616ment XeB2(A | M) donn6 par

Z=dO+co /\ O.

On dira que le triple (A, M, 0) est sans torsion s'il existe une connexion sur A de torsion nulle relativement ~t 0.

Notons G le produit semi-direct G x M (extension affine de G d6finie par la p

reprdsentation p). Son alg6bre de Lie ~ est 6gale/~ (5 | M avec [A,B] dans (5=[A,B] dans t5 si A, Be(5, [A,m] ={~(A),m) si Ae(5 et meM,

[m,m']--0 si meM et m'~M. L'alg6bre de Well W(G) de G est une G-a.d.g. Par restriction ~ G de l'action

de G e t ~ (5 des op6rateurs i x et L x o0, X e ~ , on obtient une G-a.d.g. W(G;M), ayant m6me alg~bre diff6rentielle graduhe sous-jacente que W(G), c'est-Gdire

/~ ((5") | S((5") | (M*)|

off les 616ments de (5* et de M* sont de degr6 1 dans /~ ((5*) et /~ (M*), et de degr6 2 dans S(15") et S(M*).

Notons coo l'identit6 11~ considdr6 comme 61~ment de /~1 ((5.) | (5, ~2 o l'identit6 ~ consid6r6 comme 616ment de $1((5 *) | 0 o l'identit4 11M consid6r6 comme 616ment de /\*(M*)| X o l'identit6 11M consid4r6 comme 616ment de SI(M*)|

COoeIl(W(G;M)| c'est la connexion sur W(G;M) correspondant ~t l'inclu- sion naturelle i: W(G)--+ W(G; M)--+ (W(G) d6signant l'alg4bre de Well de G),

fJoeB2(W(G;M)| est la courbure de COo, Oo eB~(W(G;M)| roeB2(W(G; M)| est la torsion de coo relativement/t 0 o. On notera que la diff6rentielle d de W(G;M) est caract6ris~e par les

relations:

dcoo + �89 coo a co o = Qo,

df2o +coo A f2 o =0,

dOo +coo A Oo= Zo, d~ o + coo/x Z o = f2 o/x 0o,

que l'antid4rivation i x de relations:

W(G;M) est caract6ris6e, pour tout X~15 par les

ix COO = X ,

i x 0o=0,

ixf2o=0,

i x X o = O,

Page 5: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

Une alg6bre gradu6e universelle pour les connexions sans torsion 137

et que la ddrivation L x de W ( G ; M ) est caractdris6e, pour tout X~ffi, par les relations:

L~xcoo =0,

L~,.Qo = O,

L~ 0o=0,

L~Zo =0.

On obtient alors, de fagon 6vidente:

Proposition 1. Etant donn~s une G-a.d.g. A et un G-module M, il revient au m~me de se donner un couple (co, O) off co est une connexion sur A et O~BI(A | M), ou un homomorphisme de G-a.d.g.

Cpo,o: W(G; M ) - ~ A .

Supposons rnaintenant que le triple (A, M, 0) soit sans torsion. Prenant alors pour co une connexion de torsion nulle relativement ~ 0, on obtient un morphisme ~00~ o qui s'annule sur l'id6al homogbne J de W(G; M) engendr6 par les relations:

S o = 0

Y2 o f 0 o = 0

(c'est-~-dire: J est engendr6 par les composantes de Z o et de O o A 0 o relative- ment /t n ' importe quelle base de M).

Or cet idOal J e s t stable par d, par l 'action de G, et par les antidOrivations i x (X~ffi). On a donc sur le quotient

V~(G; M) = W(G; M)/J

une structure naturelle de G-a.d.g., et

Proposition 2. Soit (A, M, O) un triple sans torsion. II revient au m~me de se donner une connexion o9 d torsion nulle relativement f O, ou un morphisme de G-a.d.g.:

~o~: I?V(G;M)~A.

Remarque. Si G est connexe et r6ductif, on sait que W(G; M) a m6me cohomolo- gie que le produit tensoriel gradu6.

BIYV(G; M ) | AP~

(off P~ d6signe l'espace vectoriel gradu6 des 616ments primitifs de (5), muni de la diff6rentielle

d ( u | 1 7 4 1,

d(1 | ~)--~(~) | 1

off z: P ~ Z r + I B I ~ V ( G ; M) est une transgression (cf. [2]).

Page 6: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

138 C. Albert et D. Lehmann

Les classes de cohomologie essentiellement ~nouvelles)~ sont donc dans BW(G; M) et, bien que I~(G; M) ne soit pas acyclique (contrairement/~ WG ou W(G; M)), nous limiterons l'6tude h la cohomologie basique et 5. l 'homomor- phisme basique:

B~): BITff(G,M)~BA.

Th~or~me. Soient deux connexions o)o et o)1 d torsion nulle sur le triple (A, M, 0). Les homomorphismes incluits en cohomologie basique

HB(p~o : HBI/V(G; M ) ~ H B A

(i=0, 1), co'incident alors.

D~monstration. Soit R l'alg6bre diff6rentielle gradude A*(1R) des formes ext6rieures sur IR. On en fait une G-a.d.g. en y faisant agir G de fagon triviale et en y posant ix=O pour XOS. S i t d6signe la fonction coordonn6e sur 1R

05=O)o@(1- t )+o ) l@t

est une connexion sur la G-a.d.g. produit tensoriel A | R, et 05 est h torsion nulle dans (A| M, 0| Pour s~R, notons:

#s: A|

l 'application #s(~ | f + t/ | dg) = f ( s ) �9 ~ (4, tl~A, f, g~A~ Le diagramme

I~(G; M) e ~ A |

A

commute pour s~{0, 1}. Comme l'op6rateur ~: A | d6fini par

1

2(4 @ f + t/ | dg) = ( - 1)d~ dg. t 1 0

v6rifie # ~ - # 0 = d 2 + 2 d , on en ddduit

(~o~-q3o~o=dh+hd avec h = 2 . ~

et le rdsultat vient du fait que toutes ces applications respectent les 616ments basiques.

Si (A,M, 0) est un triple sans torsion, on appellera donc homomorphisme de Chern-Weil de (A, N, 0) le morphisme

Z(A,~t,o) =HBq3~: HBITg(G ; M)~ HBA

d6fini fi partir de n'importe quelle connexion co/~ torsion nulle sur (A, M, 0).

Page 7: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

Une alg6bre gradu6e universelle pour les connexions sans torsion 139

IV. Cohomologie de B#(G,M)

Proposition 3 (description de HBI?V(G,M)). La diff~rentieIle de BVV(G,M) est nulle, de sorte que

HB IY(G, M) = B W(G, M) = [A M* | S (5"] G L <ao 0o J

o~ ( faoA0o) d&igne l'id&l de / \ M * @ S ( 5 * engendr~ par les composantes de ~2 o A 0 o relativement d n'importe quelle base de M.

Autrement dit, si (X 1 . . . . . Xp) d6signe une base de (5 et (e 1 . . . . . %) une base de M, si (01 . . . . . 0 m) et (f21 .. . . ,f2 p) d~signent les bases duales de M* et (5* de sorte que

0 o = ~ 0 ~| et

si l 'on pose enfin

(f i(Xi) ,e=)- /,vi= e

P

f2o= ~ f f N X , i = 1

[k (0' . . . . . 0 m) | s(a',..., or)] [ 7@0 p 772 J.

i,Cr

On no te ra SB 17r - / ~ M* | ~_ * U(G, M) l'alg~bre M) (;ao A 0o) "]

D~monstration. BVV(G; M) est formde des ~16ments basiques de l'alg6bre

A ( M * ) | U = (A (M*) | S(M*) | S((5*))/J -

( ~ o / ' 0o)

et comme / \ (M*)@S(M*) | il suffit de consid6rer les 616ments invariants.

D'autre part, soit (col . . . . ,co p) un autre exemplaire de la base duale de 6 * dont les 616ments sont de degr6 1. Les relations

dOo= -cooAOo+Zo LM Oo =0 ,

dQo = - coo A Qo Lx ~o = 0

montrent que sur U, les antid6rivations d et ~ ~ - ~ col. Lx ~ ~ coincident, et donc que d est nulle sur BVV(G;M). i

Remarque. Soit I(G) la sous-alg~bre des 616ments invariants de S((5"). Pour tout triple (A, M, 0) sans torsion, le diagramme ci-dessous commute:

Page 8: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

140 C. Albe r t et D. L e h m a n n

I(G)

B~ ~ H B A

/ Z(A, M, O)

BW(G; M)

(off Bz est l'injection induite par l'injection naturelle t: W(G)~IfV(G;M) et ZA l 'homomorphisme de Chern-Weil ordinaire).

Si M = I R met G=GL(m, 1R), l'application B1 est un isomorphisme (et donc la construction pr6c6dente est sans int~r~t). Plus g6nSralement:

Proposition 4. Si M = I R ~ et si G est un sous-groupe de Lie de GL(m,R) tel que llama(b, B l e s t un isomorphisme. On n'obtient donc aucune classe caractSristique nouvelle (11~ dgsigne I'identitd de lRm).

DSmonstration. Soit Y = ~ l ~ ( 5 . Si ~'~ B~(ITf(G; M), ~'se relSve dans W(G; M) en un ~eS((5*)@ A(M*) tel que L r ~eJ. Ecrivons

r l

~ = ~ 0 + ~ + + ~ - ~ off ~teAt(M*)|

Alors L y e = - ~ 1 - 2 ~ 2 . . . . . m. ~,,. Comme L r ~ = ~ p~irlif2~Oi avec t/;e/~ (M*)| on en d6duit, p o u r / > 0 :

ct, t , j

1 T Z u;a o'

la sommation portant sur les ~/;~/V I(M*)| et donc ~ - ~ o S J . Or ~o~IR(G), et donc Bz(~o)=~, ce qui montre que B~ est surjective. Puisque S15" c~ J = {0}, l'injectivit6 de B z est 6vidente.

V. Exemples et applications

a) Consid@ons le cas off G = {1} est r6duit it l'identit& Alors

BV~(G ; M) = A (M*).

Par exemple, soit fl une 1-forme ferm6e partout non nulle sur une vari6t6 V. Alors kerfi = Y est un feuilletage de codimension 1 sur V dont le fibr6 transverse E est trivial.

Par le choix d'une trivialisation de E, on identifie la projection canonique a: T V ~ E it la forme fi, de sorte que le couple (E,~) avec G={1} est sans torsion. L'image de

7~(e,~): Bl~(1 ; IR) -->HDR(V )

est alors engendr6 par la classe [fi]~H~R(V ) (alors que les classes caract6ristiques ordinaires de E sont 6videmment nulles).

Page 9: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

Une alg6bre gradu6e universeIle pour les connexions sans torsion 141

On notera que choisir une autre trivialisation du fibr6 transverse revient /~ remplacer fl p a r f f l o6 f~A~ n'est jamais nulle et v6rifie dfA ~=0; de sorte que X(E,~) est bien d6fini (en particulier [/3] = 0 ~ [ffl] = 0).

b) Prenons G=SO(3) et M = I R s avec sa structure naturelle de G-module. On rapporte IR 3 /~ sa base canonique, et SO(3) ~t la base (X~,Xz,X3) d6finie

par

(!o i) (~176 i) (i -l i) X 1 = 0 -- ; X 2 = 0 0 ; X 3 ~- 0 . 1 - 1 0 0

On posera O~=u, 02=v, OS=w, ~I=A, (22=B, (23--=C. U(SO(3);IR 3) est l'alg6bre /~ (u, v, w)| B, C) modulo l'id6al homog~ne engendr6 par uB-vA , u C-WA, v C-wB. U(SO(3); 1113) est donc form6 des combinaisons lin6aires des 616ments du type

A I B j C k i,j, keN, uAIBJC l~ i,j, k e N , v B i C j i , j eN , w C ieN, bit), bIW~ 13W,

btV C,

blUW.

La d6termination des invariants donne pour l'alg6bre BIY/(SO(3); IR s) 4 types de g6n6rateurs:

1) Le g6ndrateur p~ de I(S0(3)):

/71 = A 2 + B 2 + C 2 e B r ffV(SO(3); IR3);

2) Pour tout entier k>O, i'dlkment ~keB 4k+3 IYV(SO(3);IR s) d6fini par

~k = Z aili2i3 u A i l l B i a C i 3 i1>0

at- 2 aoi2i3 v B i 2 - 1 Cis d- w C 2k + 1 i2>0

off les coefficients aili2i3 sont d6finis par l'identit6

(X 2 _~y2 -Jr- Z2) k+l = Z aili2i3 x i l y i2 Zis

(de sorte que l'antid&ivation h de 147(SO(3); ]R 3) d~finie par h(0i) =f2 i et h(f2 i) =0 v~rifie h (~ )= (p0 k+ 1);

3) t] = u v C e B 4 [7V(SO(3); JR.3);

4) ( = u v w e B 3 I~(SO(3); 1R3). En particulier, pour l'espace homog6ne sym6trique S0(4)--+S0(4)/S0(3)= ~3,

avec la d6composition standard so(4)=IRB@so(3) (cf. Exemple 5), consid6- tons l 'homomorphisme de Chern-Weil

X(eo,~o) : BI4/(SO(3);/R 3) -~ HvR (~; s)

)~(~) =Z(u .v. w)eHS(S~ s) est la classe de la forme volume standard de S~ 3.

Page 10: Une algèbre graduée universelle pour les connexions sans torsion

142 C. Albert et D. Lehmann

La classe Z(~o) =Z( uA + vB + w C)~H3($ 3) est, elle aussi, non nulle (cf. [3] pour une autre pr6sentation de Z(~o) ).

c) Interpr6tation de certaines classes comme obstruction: notons {I(G)} l'id6al de B IYf(G;M) engendr6 par I(G).

Si (E,~) est un couple sans torsion, une condition n~cessaire pour qu'il existe sur (E, ~) une connexion sans courbure ni ~-torsion est que pour tout ~{I(G)} , on air

z ~ , ~ ( 4 ) = O.

En particulier, les 6laments de Z(~,~)({I(G)}) peuvent 8tre interpr6t6s comme obstruction: - pour une G-structure dont le premier tenseur de structure est nul, ~ l'existen- ce sur V d'un parall61isme int6grable subordonn6 (int6grabilit6 globale); - pour un feuilletage admettant une G-r6duction sans torsion du fibr6 des repSres transverses, ~t l'existence d'un parall61isme transverse int6grable subordonn6;

- pour une immersion f de V dans IR "+~k,/t l'existence d'une isotopie entre f et une immersion f0 induisant une courbure Riemannienne nulle sur V.

Remarques. 1) La proposition 1 pourrait laisser esp6rer pour un couple (E, c~) non n6cessairement sans torsion un morphisme H B W ( G ; M ) - . H D R ( V ).

Ce morphisme est effectivement bien d6fini, mais il est sans int6rSt en tant que tel, car il se r6duit ~t l 'homomorphisme de Chern-Weil << ordinaire >> du fibr6 E: l'injection W(G) ~ , W ( G ; M ) entre algSbres acycliques induit en effet un isomorphisme au niveau des cohomologies basiques.

2) La construction ci-dessus se g6n6ralise imm6diatement si on remplace l'id6al J par un id6al J1 homog6ne et stable par d, par l'action de G par les i x. On obtient ainsi des <<classes caract6ristiques>> pour tout couple (E, c~) admettant une connexion co telle que ~0~ soit nul sur J1; et ces classes sont bien d6finies si, avec la terminologie de [4], l'ensemble des J l-connexions sur (E,e) est J~- connexe. On peut 6galement proc6der avec une extension de W(G) autre que W ( G ; M ) en se donnant d'autres tenseurs que f2, 0, Z et quotienter par l'id6al obtenu en supposant nuls certains d'entre eux. [Les classes exotiques classiques sont de ce type avec f2"= 0.]

R e f e r e n c e s

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2. Greub, W., Halperin, S., van Stone, R.: Connections, Curvature, and Cohomology. New York-San Francisco-London: Academic Press 1976

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Regu le 14 juin 1977