algèbre corporelle

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Un cours sur l'algèbre corporelle d'Antoine Chambert-Loir, enseignant à l'université de Rennes 1

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Antoine Chambert-LoirALGBRE CORPORELLEAntoine Chambert-LoirE-mail : [email protected], Universit de Rennes 1, Campus de Beaulieu, 35042 Rennes Cedex.Centre de Mathmatiques, cole polytechnique, 91128 Palaiseau Cedex.Version du 22 mars 2004, 13h35Une version jour est disponible sur le Web ladresse http://www.math.polytechnique.fr/~chambert/teach/algebre.pdf Il conviendrait donc, Glaucon, de prescrire cette tude par une loi,et de persuader ceux qui doivent remplir les plus hautes fonctionspubliques de se livrer la science du calcul, non pas superciellement,mais jusqu ce quils arrivent, par la pure intelligence, connatre lanature des nombres ; et de cultiver cette science non pas pour la faireservir aux marchands, mais pour lappliquer la guerre, et pour faci-liter la conversion de lme du monde de la gnration vers la vrit etlessence. Trs bien dit. Platon, La rpublique, Livre VIIJai fait en analyse plusieurs choses nouvelles.variste Galois, Lettre A. Chevalier (29 mai 1832)Table des matiresPrsentation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii1. Extensions de corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1Constructions la rgle et au compas, 1 ; Corps, 3 ; Extensions de corps, 8 ;Quelques impossibilits classiques, 14 ; Fonctions symtriques des racines, 18 ;Appendice : transcendance de e et, 20 ; Exercices, 24.2. Mais o sont mes racines ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29Anneau des restes, 29 ; Extensions de dcomposition, 32 ;Corps algbriquement clos ; clture algbrique, 33 ; Appendice : structuredes anneaux de polynmes, 37 ; Appendice : anneaux quotients, 40 ;Appendice : thorme de Puiseux, 42 ; Exercices, 46.3. Thorie de Galois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51Homomorphismes dune extension dans une clture algbrique, 51 ;Groupe dautomorphismes dune extension, 54 ; Le groupe de Galois commegroupe de permutations des racines, 59 ; Discriminant, rsolvantes, 63 ;Corps nis, 66 ; Exercices, 68.4. Un peu de thorie des groupes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75Groupes (rappels de dnitions), 75 ; Sous-groupes, 76 ; Opration dun groupesur un ensemble, 78 ; Sous-groupes distingus, groupes quotients, 79 ;Groupes rsolubles, nilpotents, 82 ; Groupe symtrique, altern, 85 ;Groupes de matrices, 89 ; Exercices, 92.5. Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97Constructibilit la rgle et au compas, 97 ; Cyclotomie, 98 ;Extensions composes, 103 ; Extensions cycliques, 106 ; Les quations de degrsinfrieur 4, 108 ; Rsolubilit par radicaux, 113 ; Comment (ne pas) calculerdes groupes de Galois, 117 ; Spcialisation des groupes de Galois, 120 ;Lquation gnrique et le thorme dirrductibilit de Hilbert, 127 ;Exercices, 133.vi TABLE DES MATIRES6. quations diffrentielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .139Corps diffrentiels, 139 ; Extensions diffrentielles. Construction dedrivations, 142 ; quations diffrentielles, 146 ; Extensions de Picard-Vessiot, 148 ; Le groupe de Galois diffrentiel. Exemples, 151 ;La correspondance de Galois diffrentielle, 156 ; Extensions lmentaires, 157 ;Appendice : thorme des zros de Hilbert, 163 ; Exercices, 165.Problmes dexamen. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .167Problme de rvision (2002), 167 ; Contrle classant (2002), 168 ;Session de rattrapage (2002), 171 ; Contrle classant (2003), 171.Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .177PrsentationVoici un petit cours dalgbre dans lequel laccent est mis sur la structure de corps,do son titre.Il y est question dquations, polynomiales ou diffrentielles, et de la structure al-gbrique de leurs solutions. On sait par exemple rsoudre explicitement les quationspolynomiales de degr 2, 3 ou 4 (Cardan, Ferrari, etc.) laide de formules algbriqueset dextractions de racines n-imes, mais le cas du degr 5 a rsist longtemps, jusquce quAbel montre en 1826 quune quation de degr5gnrale ne peut tre rsoluede la sorte.Peu aprs, Galois a dni le groupe dune quation polynomiale comme le groupedes permutations de ses racines (disons complexes) qui prservent toutes les identitsalgbriques coefcients rationnels que ces racines vrient. Par exemple, on sait bienque les fonctions symtriques lmentaires des racines sont (au signe prs) les coef-cients du polynme. En gnral, il ny en a pas dautre, mais parfois si et le groupe delquation en est dautant plus petit.Et Galois a compris comment ce groupe de symtrie conditionne la rsolubilit delquation. Il a dni loccasion la notion de groupe rsoluble et tabli que si le groupede lquation est rsoluble, on peut exprimer ses racines par radicaux, et sinon non.Expliquer tout ceci nous mnera sur dintressants chemins. Vous apprendrez parexemple pourquoi dantiques problmes de constructions la rgle et au compas nonteffectivement pas de solution, mais inversement vous saurez pourquoi (et dcouvrirezpeut-tre comment) lon peut construire certains polygones rguliers.Il y a une thorie analogue pour les quations diffrentielles linaires homogneset nous introduirons un groupe analogue. Ce sera alors un groupe de matrices. Vousapprendrez aussi pourquoi certains calculs explicites deprimitives, tels celui de_exp(x2), sont sans espoir.Au menu gurent galement quelques thormes danalyse : la transcendance dunombre, le fait que le corps des nombres complexes est algbriquement clos, ainsique le thorme de Puiseux qui montre comment paramtrer les racines dune qua-tion polynomiale dont les coefcients peuvent varier.viii PRSENTATIONDans chaque chapitre, je propose quelques exercices. Vous en ferez vraisemblable-ment certains en petites classes. Je vous encourage passer un peu de temps les cher-cher. Cest en effet un excellent moyen dassimiler les nouvelles notions introduitesdans ce cours. Ne vous inquitez pas, certains sont mme faciles !Quelques illustrations, tires duWeb, ont pour vocationdgayer celivre. Jaitrouv les reproductions de timbres ladresse http://jeff560.tripod.com/ ceux que cela intresse seront ravis de feuilleter le livre [13] tandis que lesphotos proviennent de larchive MacTutor History of Mathematics ladressehttp://www-groups.dcs.st-andrews.ac.uk/~history/. Jencourage ceux dentre vous quisont intresss par lhistoire des mathmatiques la frquenter. La lecture du petitlivre [4] dA. Dahan et J. Peiffer est aussi vivement recommande.Et maintenant, commenons. . .1Extensions de corpsNous partons duproblmegomtriquedes constructions largleetaucompas. Nousintroduisonsensuitelesnotionsdecorpsetdextensionsdecorps, etenncelledextensionalgbrique. Celafournitrapidementdesrsultatsdimpossibilitpourquelquesproblmesclassiques. NousverronsplustardquelathoriedeGaloisfournituncritrednitifpermettantdedcider si une construction est ou nest pas ralisable la rgle et au compas.1.1. Constructions la rgle et au compasPour les Grecs de lantiquit, nombres et mesures de longueurs taient deuxconcepts intimement lis. Cest ainsi quils se sont poss le problme de constructionsgomtriques denombresremarquables. Lesoutilsquilssedonnaient taient engnral une rgle et un compas, mais, notamment quand ils ny arrivaient pas, il leurarriva dadmettre des mcanismes qui tracent des courbes plus gnrales (cf. [4] ainsique les notes de [9]).Formalisons le problme du point de vue mathmatique.DFINITION 1.1.1. Soit un ensemblede points du planR2. On dit quun pointPestconstructible la rgle et au compas partir desil existe un entiernet unesuite de points(P1, . . . , Pn) tels quePnPet tels que pour tout i {1; . . . ; n}, notanti {P1; . . . ; Pi 1}, lune des propositions suivantes soit vrie :il existe 4 pointsA,B, AtetBt itels quePisoit lintersection des deux droitesnon parallles (AB) et (AtBt) ;il existe quatre points A, B, C , etD itels quePisoit lun des (au plus) deuxpoints dintersection de la droite (AB) et du cercle de centre Cet de rayon [CD] ;il existe quatre points O,M, OtetMt itels quePisoit lun des (au plus) deuxpoints dintersection des cercles distincts respectivement de centre Oet de rayon[OM],et de centre Otet de rayon [OtMt].2 CHAPITRE 1. EXTENSIONS DE CORPSDFINITION 1.1.2. Considrons une partie de R. Un rel xest dit constructible la rgle et au compas partir de si cest labscisse dun point du plan qui est construc-tible la rgle et au compas partir des points (, 0) pour . Un nombre complexeest dit constructible partir de si sa partie relle et sa partie imaginaire le sont.THORME 1.1.3. Soit unepartiede Rcontenant 0et 1. Lensemble Cdesnombres rels constructibles partir de vrie les proprits suivantes :a) si xetysont dans C, x +y , x y , xysont dans C ;b) si xetysont dans C,y /0, alors x/yest dans C ;c) si x >0 est dans C, _xaussi.Dmonstration. Elle repose sur des arguments de gomtrie lmentaire (du lyce)et peut se rsumer en une srie de gures. Laddition et la soustraction sont assez vi-dentes. La stabilit par multiplication et racine carre est consquence des gures 1(a)et 1(b). La stabilit par divisionse voir aussi sur la gure 1(a) car si x et xysont connus,la gure permet den dduirey .0x xyy1(a) Construction du produitouduquotient de deuxnombres (thorme deThals)HAB Ch =xx1(b) Constructiondelaracinecarre dun nombre (tho-rme de Pythagore)Exercice 1.1.4. Ces gures supposent tout de mme que lon puisse construire despoints hors de laxe des abscisses. Le vrier. Vriez aussi que vous savez construireles droites parallle ou perpendiculaire une droite donne passant par un point x.Dans la dnition 1.1.1 de point constructible, les cercles sont de centre un pointconstruit et passent par un autre point construit : on ne reporte pas les longueurs. Ex-pliquer cependant comment construire le cercle de centre un point donn et de rayonla distance entre deux autres points.Remarque 1.1.5. Montrer que toute construction la rgle et au compas pourrait nese faire quau compas seul (thorme de Mohr-Mascheroni). Cest un rsultat de puregomtrie, voir par exemple [5] pour une solution.1.2. CORPS 31.2. CorpsDFINITION 1.2.1. Un corps (commutatif ) est un ensemble Kmuni de deux lois in-ternes + et et de deux lments 0 et 1 distincts vriant les proprits suivantes :a) (K, +, 0) est un groupe commutatif (1);b) (K \{0}, , 1) est un groupe commutatif ;c) laloi estdistributiveparrapportlaloi +: pourtous a, bet c dans K ,a (b +c) a b +a c .On note souvent able produit a b. On note aussi Klensemble K \{0}.Exemples 1.2.2. a) les nombres rationnelsQ, les nombres relsRou les nombrescomplexes C forment un corps ;b) lensemble des nombres (rels ou complexes) constructibles partir de {0; 1} estun corps qui contient le corps des nombres rationnels Q.c) Si p est un nombre premier, lensemble Z/pZ des entiers modulo pest un corps ;il est ni de cardinal p.d) Si Kest un corps, lensemble K(X) des fractions rationnelles coefcients dansK , muni des lois usuelles, est encore un corps.e) Si est un ouvert connexe de C, lensemble des fonctions mromorphes dansest un corps.Un sous-corps dun corps Fest une partie de Fcontenant 0, 1, stable par + et desorte que ces lois la munissent dune structure de corps.On considre parfois des corps non-commutatifs : cela signie quon ne demandepas la loi dtre commutative. Bien entendu, laloi + ne cesse pas de ltre.Exemple 1.2.3. Lespacevectoriel H R4dontlabasecanoniqueestnote1, i , j , kadmetuneuniquestructuredecorps non-commutatif pourlaquellelaloi +estladditionusuelleetlaloi vrie les relations :i2 j2 k2 1, ijk. Cestle corps des quaternions, dcouvert par Hamilton.DFINITION 1.2.4. SoitKun corps etSune partie deK . Le corps engendr parSdans Kest le plus petit sous-corps de Kcontenant S.Cest lensemble des lments de Kde la formeP(s1, . . . , sn)Q(s1, . . . , sn),(1)Voir le dbut du chapitre 4 pour des rappels de thorie des groupes.4 CHAPITRE 1. EXTENSIONS DE CORPSo P,Q Z[X1, . . . , Xn] sont des polynmes coefcients entiers, s1, . . . , sndes lmentsde Stels que Q(s1, . . . , sn) /0. Soit Fun sous-corps de Ket soit x1, . . . , xndes lmentsde K; on note F(x1, . . . , xn) le sous-corps de Kengendr par Fet les xj .Exercice 1.2.5. Lensemble des nombres complexes de la forme x +iyavec x ,y Qest le sous-corps de C engendr par i .Une structure plus faible que celle de corps, mais nanmoins trs importante, estcelle danneau.DFINITION 1.2.6. Un anneau (commutatif ) est un ensembleAmuni de deux lois+ et et de deux lments 0 et 1 tels que (A, +, 0) est un groupe commutatif ;la loi est commutative et associative ;pour tout a A, a 1 1a a ;la loi est distributive par rapport la loi + : pour tousa,b,c A,a (b +c) a b +a c .Un sous-anneau dun anneauAest une partie deAcontenant 0 et 1, que les lois +et laissent stables et munissent dune structure danneau.Un lmentadun anneauAest ditinversible sil existeb Atel queab1. Silexiste, un tel lment est ncessairement unique et est appel inverse de a.Exemples 1.2.7. a) Un corps est un anneau. Plus prcisment, un corps est unanneau dont tout lement non nul est inversible.b) LensembleZdesentiers, Z/nZdesentiersmodulounentier nsontdesan-neaux. Lanneau Z est un sous-anneau du corps des rationnels.c) SiA est un anneau dans lequel 0 1, alorsA {0} (anneau nul, dintrt limit).d) SiA est un anneau, lensembleA[X] des polynmes coefcients dansA est unanneau. LanneauA en est un sous-anneau.e) SiI est un intervalle deR, lensemble des fonctions continues surI est un an-neau. De mme pour les fonctions drivables, de classe Ck, C, analytiques, etc.f ) Lensemble des lments de Cde la formex +i yavecxetydans Z, muni deslois de C, est un anneau (anneau des entiers de Gau).g) Lensemble des lments de Hde la formex1+yi +z j +t kavecx , y , z , t Zest aussi un anneau, mais dont la multiplication nest pas commutative.DFINITION 1.2.8. Si AetBsont deux anneaux, un homomorphisme danneauxest une applicationf:A Bvriant les proprits suivantes :a) pour tous aet b A, f (a +b)f (a) + f (b) ;b) pour tous aet b A, f (ab)f (a) f (b) ;c) f (0) 0 etf (1) 1.1.2. CORPS 5Un homomorphisme de corps est un homomorphisme danneaux dun corps dansun autre. Un isomorphisme est un homomorphisme bijectif. Limage dun morphismedanneauxA Best un sous-anneau de B ; limage dun morphisme de corps K Lest un sous-corps de L.LEMME 1.2.9. Soit f: A Bun homomorphisme danneaux. SoitIf 1(0)len-semble des a A tels quef (a) 0. Alors, Ivrie les proprits suivantes : 0 I ;si aet b I , a +b I ;si a A et b I , ab I .De plus, f est injective si et seulement si I {0}.DFINITION 1.2.10. Une partieI dun anneauAvriant les proprits du lemmeprcdent est appeleidal. Si f: A Best unhomomorphismedanneau, lidalf 1(0) est appel noyau def et not Ker f.Je renvoie au paragraphe 2.4 pour plus de dtails sur la structure algbrique des an-neaux de polynmes.DFINITION 1.2.11. Unanneaunonnul A est dit intgre si pour tous a et b A\{0},ab /0.Exercice 1.2.12. a) Les corps, lanneauZdes entiers relatifs sont des anneaux in-tgres.b) Un sous-anneau dun anneau intgre est un anneau intgre.c) Soit n unentier 2. Lanneau Z/nZ est intgre si et seulement si n est unnombrepremier.Pour tout anneau intgreA, on peut construire un corps contenant (un anneau iso-morphe )Atel que tout lment de Ksoit le quotient de deux lments deA: cestle corps des fractions deA. Le principe est le mme que celui qui permet dobtenir lecorps des nombres rationnels partir de lanneau des entiers relatifs. On dnit un en-semble Kcomme lensemble des classes dquivalences de lensemble FA(A\{0})pour la relation dquivalence(a, b) (c, d) ad bc.(Exercice : montrer que cest effectivement une relation dquivalence.) On notea/bla classe du couple(a, b). On dnit une addition et une multiplication surKpar lecalcul des fractions habituel, en posantab + cd ad +bcbdetabcd acbd.(Exercice : vrier quelles sont bien dnies, cest--dire que(ad +bc)/bdetab/cdne dpendent pas des choix des reprsentants des fractionsa/betc/d.) Muni de ces6 CHAPITRE 1. EXTENSIONS DE CORPSdeux lois,Kest un corps commutatif, son zro est llment0/1tandis que son l-ment unit est1/1 ; lapplicationA Kqui associe allmenti (a)a/1est unhomomorphisme danneaux. (Exercice : vrier ces assertions.) Lhomomorphismeiest injectif : par dnition de la relation dquivalence, sii (a)a/10/1, on en d-duit 1a 01, do a 0. Alors, on remarque que pour tous (a, b) F,ab a11b i (a)i (b)1.Autrement dit, tout lment de Kest le quotient de deux lments deA. Le fait queisoit injectif permet didentier un lment a A et son image i (a) K .Exemples 1.2.13. Le corps des fractions de lanneau Z est le corps des nombres ra-tionnels. Celui de lanneau K[X] des polynmes coefcients dans un corps Kest lecorps K(X) des fractions rationnelles.Si est un ouvert connexe de C, lanneau des fonctions holomorphes sur est in-tgre (cela rsulte du principe des zros isols) et son corps des fractions est le corpsdes fonctions mromorphes sur cet ouvert. Cest un thorme danalyse assez dli-cat qui repose sur la possibilit de construire explicitement une fonction holomorpheayant un ensemble de zros prescrit (produits de Weierstra, voir par exemple [11],thorme 15.12).Le corps des fractions possde une proprit importante.PROPOSITION 1.2.14. Soit Aun anneau intgre, Kson corps des fractions. SoitEun corps. Pour tout homomorphisme injectif f: A E , il existe un unique homomor-phismef: K Etel quef (a)f (a) pour a A.Remarquonsquesi a/b c/d, alors ad bc , donc f (a) f (d) f (b) f (c), puisf (a)/f (b) f (c)/f (d). Ainsi, onpeut poser, si x a/b est unlment de K ,f (x) f (a)/f (b). Onmontrealorsque f est unhomomorphismedecorps. Lesdtails de la dmonstration sont aussi fastidieux que ceux de la construction du corpsdes fractions. (Exercice. . .)On peut reprsenter la proposition par un diagrammeA of

????????

//Kf

Eo la che pointillef: K Eest celle dont lexistence est afrme par la proposi-tion. Une terminologie courante, un peu pompeuse, pour ce genre dnoncs est pro-prit universelle .PROPOSITION-DFINITION 1.2.15. SoitA un un anneau. Il existe un unique homo-morphisme danneauxf: Z A.1.2. CORPS 7Supposons quef nest pas injectif. Si Aest intgre, le plus petit lment strictementpositif de Ker f est un nombre premier dont Ker f est lensemble des multiples. SiAestun corps, ce nombre premier est appel caractristique deA.Si f est injectif et si Aest un corps, on dit quil est de caractristique nulle. Dans cecas, f stend en un homomorphisme de corps g : QA.Dmonstration. Commenons par dnirf. On pose dabordf (0) 0 etf (1) 1.Si n 2, on dnit par rcurrencef (n)f (n1)+1. Enn, si n 1, on posef (n) f (n). Comme ces relations sont vries si f est un homomorphisme danneaux,cela prouve lunicit dun tel homomorphisme Z A.Montrons alors quef est un homomorphisme danneaux cest--dire que sont vri-es les relationsf (m+n)f (m)+f (n) etf (mn)f (m) f (n). Elles sont enfait vraiespour exactement la mme raison que celle qui fait que les entiers relatifs forment unanneau et se dmontrent par rcurrence.tablissons pour met n 0 la relationf (m+n)f (m)+f (n) . Elle est vraie si n 0. Si elle est vraiepour n, alorsf (m+(n +1))f ((m+n) +1)f (m+n) +1 f (m) + f (n) +1f (m) + f (n +1)donc elle est vraie pour n +1. Cela la prouve par rcurrence. Si m0 et n 0 tel quef (n) 0. Si nnest pas premier, on peut crire naboaet bsont deux entiers vriant 1 a < net 1 b < n. Par suite, 0f (n)f (ab) f (a) f (b). Comme lanneauA est suppos intgre, on a doncf (a) 0 ouf (b) 0, cequi contredit la minimalit de lentier n.Limage de tout multiple denest0. Considrons rciproquement un entiermtelquef (m)0. La division euclidienne demparnscritmqn +ravec 0 r < n.Onaf (r)f (mqn)f (m)q f (n) 0. Par minimalit de n, r 0 et m est multiplede n.Si f estinjectiveetsi Aestuncorps, f stenddaprslaproprituniverselle(prop. 1.2.14) en un homomorphisme de Q dansA.8 CHAPITRE 1. EXTENSIONS DE CORPSRemarque 1.2.16. SoitKun corps de caractristiquepet f: Z Klhomomor-phisme tudi ci-dessus. Si met nsont deux entiers congrus modulop, mnestmultiple de p, si bien quef (mn) 0, dof (m)f (n). Lhomomorphisme Z Kinduit une application naturelle Z/pZ Kqui est un homomorphisme de corps.Ainsi, tout corps reoit un(et unseul) des corps Z/pZ (pour p premier) et Q, dontlimage est appele sous-corps premierdenesous-corps !premier.PROPOSITION 1.2.17. Soit pun nombre premier et soitA un anneau tel que p1A

0A(par exemple un corps de caractristique p). Alors, pour tous aet bdansA, on a(a +b)pap+bp.Par suite, lapplication :A A dnie par (a) apest un homomorphisme dan-neaux.Dmonstration. Daprs la formule du binme de Newton, on a(a +b)pap+bp+p1

n1_pn_anbpn.Or, lorsque1np 1, _pn_ p!/n!(p n)! est une fraction dont le numrateurp!est multiple du nombre premier mais, et cest l quon utilise quepest un nombrepremier, dont le dnominateur nest pas multiple de p. Comme _pn_ est un entier, cestun multiple de pet lon a _pn_1A0, do (a +b)pap+bp.DFINITION 1.2.18. Si K est uncorps de caractristique p, lhomomorphisme: K K , x xpest appel homomorphisme de Frobenius.1.3. Extensions de corpsDFINITION 1.3.1. La donne dun homomorphisme de corps j : E Fest appeleextension de corps.Remarquons quun tel j est toujours injectif : si en effet x /0, on aj (x) j (1/x)j (1) 1 /0,doncj (x) / 0. La plupart du temps, j est parfaitement dtermin par le contexte etpeut tre sous-entendu. On dit alors plus simplement queFest une extension deE .Cest notamment le cas quand E Fet j est linclusion. On dit alors soit E Funeextension de corps . Quitte remplacerEpar son image (bijective) dansFpar lho-momorphismej , cest essentiellement le cas gnral.Si j :E F estuneextensiondecorps, F estnaturellementmunidunestruc-ture de E -espace vectoriel : la loi daddition est celle de Fet la multiplication externeE F Fest dnie par e fj (e) f.1.3. EXTENSIONS DE CORPS 9DFINITION 1.3.2. Si j : E Fest une extension, son degr est la dimension deFcomme E -espace vectoriel. On le note [F : E].Lextensionj : E Fest dite nie si [F : E] /+.Remarque 1.3.3. Cette notation [F : E] est abusive : elle ne fait pas intervenirjalorsquelle en dpend! Par exemple, siEC(X),FC(Y ), lextensionj1: E FdnieparP(X) P(Y )est de degr1(cest un isomorphisme) alors quej2: E Fdniepar P(X) P(Y2) est de degr 2. Lorsque Eest un sous-corps de F , ce qui est un casassez frquent, il ny a pas de risque de confusion.Exemples 1.3.4. a) Linclusion de corps R C est une extension nie : C est un R-espace vectoriel de dimension 2 (la famille {1, i } en est une base) et [C: R] 2.b) Si Kest un corps, lextension K K(X) nest pas nie. En effet, K(X) contient lafamille libre innie des Xn(pour n N).Remarque 1.3.5. Linclusion de corps QR nest pas non plus nie. En effet, le pro-duit de deux ensembles dnombrable est dnombrable. Comme Qest dnombrable,il suit par rcurrence que tout Q-espace vectoriel de dimension nie est dnombrable.Cependant, le corps des nombres rels ne lest pas, si bien que [R: Q] +. (Le mmeargument permet de montrer que R n pas de base dnombrable sur Q.)Il est aussi possible dexhiber des familles innies de nombres rels qui soient linai-rement indpendantes sur Q. Par exemple, si est un nombre transcendant, la famille{1, , 2, . . .} est libre sur Q. Voir aussi lexercice 1.6 pour un exemple plus explicite.THORME 1.3.6. Soit j : E F et k : F Gdeuxextensions decorps. Alors,(k j ) : E Gest une extension nie si et seulement si j : E Fet k : F Gsont nieset lon a alors la relation[F : E] [G : F] [G : E].Dmonstration. Soit x1, . . . , xmune base de F comme E -espace vectoriel etsoit y1, . . . , ynunebasede G comme F -espacevectoriel. Unlment de z Gscrit z n

i 1aiyiaveca1, . . . , an F . Ainsi, chaqueaise dcompose sous la formeai m

j 1ai , jxj , si bien quey n

i 1m

j 1ai , jxiyjet la famille des (xiyj)1i m1j nengendre Gcomme E -espace vectoriel.Montrons quen fait, cen est une base. Soient donc des lmentsai , jde Etels que

i , jai , jxiyj0. Comme la famille(yj)est une base de GcommeF -espace vectoriel,10 CHAPITRE 1. EXTENSIONS DE CORPSles lments de F ,m

i 1ai , jxi , sont tous nuls. Comme la famille des (xi) forme une basede Fcomme E -espace vectoriel, les ai , jsont tous nuls, cqfd.Finalement, la dimension deGcommeE -espace vectoriel est gale mn, cest--direauproduitdeladimensiondeGcommeF -espacevectorielparcelledeFcomme E -espace vectoriel, ce qui dmontre le thorme.DFINITION 1.3.7. Soit j : E Fune extension de corps. Un lmentx Fest ditalgbrique sur Esil existe un polynme non nul P E[X] tel que P(x) 0.Il est dit transcendant sinon.Une telle extension est dite algbrique si tout lment de Fest algbrique sur E .Un nombre complexe est dit algbrique ou transcendant sil lest sur le corps desnombres rationnels.Exemples 1.3.8. a) Considrons lextension de corps R C. Un lmentzx +i yde C, avec x et ydans R, vrie lquation (zx)2+y20, si bienque z est algbriquesur R.b) Le rel _2 est algbrique sur Q, ainsi que le nombre complexe _2+i3_3+5_5.c) Le rel

n010n!est transcendant (Liouville, 1844) ; voir lexercice 1.2.d) Lensemble des polynmes coefcients rationnels est dnombrable, si bien quelensemble des nombres complexes algbriques est dnombrable. Il existe en particu-lier des nombres transcendants (Cantor, 1874).e) Les rels e 2,718. . . , 3,14159 sont transcendants sur Q (thormes de Her-mite, 1873, et de Lindemann, 1882).f ) On ne sait pas si est algbrique sur le sous-corps deRengendr pare(formdes P(e) pour Pdcrivant Q(X)).Soit j : E F uneextensiondecorpsetsoit x unlmentdeF . Lapplicationx: E[X] Fqui un polynme P a0+ +anXnassocie llment( j (P)(x))j (a0) + j (a1)x + + j (an)xnest la fois un homomorphisme de E -espaces vectoriels et un homomorphisme dan-neaux. Sonimage est ainsi nonseulement unsous-espace vectoriel de F , mais aussi unsous-anneau de F , sous-anneau quon note E[x]. Cest le sous-anneau de Fengendrparxsur E . (Lorsquil ny a pas de confusion possible, on note P(x) ce quon devraitnoter j (P)(x).) On va voir tout de suite (proposition 1.3.9) que sixest algbrique surE , le sous-anneauE[x]deFest en fait un corps, donc sidentie au sous-corpsE(x)engendr par xsur E .Plusgnralement, si x1, . . . , xnsontdeslmentsdeF , onnoteE[x1, . . . , xn] lesous-anneaudeF engendrparles xisurE .CestlensembledesP(x1, . . . , xn) F1.3. EXTENSIONS DE CORPS 11pourPparcourantE[X1, . . . , Xn]. Le sous-corps deFengendr par lesxisurE , notE(x1, . . . , xn), en est donc le corps des fractions.La proposition suivante fournit une caractrisation extrmement pratique des l-ments algbriques en termes de lanneau E[x].PROPOSITION 1.3.9. Soitj : E Fune extension et soit xun lment de Fa) Sixest transcendant sur E ,xest un isomorphisme et E[x] est un E -espace vec-toriel de dimension innie.b) sixest algbrique sur E , il existe un unique polynme unitaire de degr minimalP E[X]tel queP(x)0. Alors,Pest irrductible etdimE E[x]degP. De plus, toutpolynme Q E[X] tel que Q(x) 0 est multiple de P.Rappelons quondit quunpolynme nonconstant P E[X] est irrductible sil nestpas le produit de deux polynmes non constants coefcients dans E .DFINITION 1.3.10. Cepolynmeestappelpolynmeminimal de x sur E . Sesautres racines sont les conjugus de x . Son degr est appel degr de xsur E .Dmonstration. a) Sixest transcendant,xest injective par dnition, surjectivepar construction, donc un isomorphisme. En particulier, dimE E[x] +.b) Soit P E[X] un polynme unitaire de degr minimal tel que P(x) 0. SoitA unpolynme de E[X] tel que A(x) 0. Notons A PQ+R la divisioneuclidienne de A parP, de sorte que degR 0, deg A >degP.Sid degP, largument que nous venons de faire montre quexinduit un homo-morphisme injectif x,ddeE[X]0. Ainsi, V+est ferm dans V .Puisque Vest connexe et que V+en est un ouvert ferm non vide, V+ V . Autre-ment dit,(z) >0 pour tout z V .Si z / V ,ilexistepardnitionu telqueP(u)0et (z) > 0.Finalement,(z) >0 pour tout z C.partir duncorps algbriquement clos, onfabrique facilement la clture algbriquede nimporte lequel de ses sous-corps.PROPOSITION 2.3.5. Soit un corps algbriquement clos et soit Kun sous-corps de. Soit Klensemble des lments de qui sont algbriques sur K . Alors, K Kest uneclture algbrique de K .36 CHAPITRE 2. MAIS O SONT MES RACINES? Par exemple, lensemble des nombres algbriques dans C est une clture algbriquede Q.Dmonstration. a) Par construction, tout lment de Kest algbrique sur K . Lex-tension K Kest donc algbrique.b) SoitP K[X]un polynme non constant. Montrons quil a une racine dansK .Comme K et comme est algbriquement clos, Pa une racinexdans. Ll-mentxest algbrique surKet puisqueKest algbrique surK , xest algbrique surK(thorme 1.3.16). Ainsi, x KetPa une racine dansK , ainsi quil fallait dmon-trer. La dmonstration du thorme de Steinitz nest absolument pas clairante et reposesur un argument de rcurrence transnie (donc ncessite laxiome du choix ds quele corps nest pas dnombrable !) Ona vu comment rajouter les racines dun polynme.Il faut maintenant faire cela avec chacun, ce qui ncessite un peu dordre.Dmonstration du thorme de Steinitz. Soit K le corps dont on veut construire une clturealgbrique. Nousallonsconstruireuneextensionalgbrique Kde K danslaquellechaquepolynme deK[X] est scind. Alors, est une clture algbrique deK . Soit en effet un polynmePXn+an1Xn1+ +a0 coefcients dans, quon peut supposer irrductible. Chacun desaitant algbrique surK , le sous-corpsLK[a0, . . . , an1] quils engendrent dnit une extensionniede K . Ncessairement, P est irrductibledans L[X] . Soit ainsi L L[X]/(P) uneextensionalgbrique nie dans laquelle le polynmePa une racine, de polynme minimalP . CommeLestalgbrique sur K , est algbrique sur K . Il a ainsi un polynme minimal Q K[X] . Comme Q() 0,Qest multiple de Pdans L[X] . Mais par construction, Qest scind dans. Par suite, Paussi. Ainsi,est bien une extension algbriquement close de K .La mthode pour construire, consiste rajouter patiemment les racines de chaque polynmeirrductibledeK[X] . Pourlefaire, munissonslensemble Edespolynmesirrductiblesdunbonordre , cest--dire dun ordre total tel que toute partie non vide admette un plus petit lment. Lordrestandardsur Nestunbonordre. Lexistenceduntel ordresurtoutensemblequivautlaxiomeduchoix, ouaulemmedeZorn. Si K est dnombrable, lensembledespolynmesirrductiblesestdnombrableetlesnumrerfournitunbonordre. Unefoischoisiuntel ordre, leprincipedercurrence snonce et se dmontre (quasiment) de la mme faon que pour les rcurrences sur n N :Soit (X, ) un ensemble muni dun bonne ordre et Pune proprit des lments deX . Supposonsque soit vrie lassertion : soit x X , si pour tout y X , y x , P(y) est vrie, alorsP(x) estvrie , alorsP(x)est satisfaite pour tout x X . (Dmonstration : sinon, lensemble desx XtelsqueP(x)nest pas vrie admet un plus petit lmentx0. Par dnition, pour tout y x0, P(y)estvraie. Daprs lassertion entre guillemets,P(x0) est vraie, ce qui est une contradiction.)On montre maintenant lexistence dune famille dextensions algbriques jP : K P , pourP E,dans laquelle Pest scind, et dhomomorphismesjQP:QPsi P,Qsont deux polynmes de E avecQ Pde sorte que lon ait jPjQP jQ. (Cela veut en fait dire quePest une extension non seulementde Kmais de tous lesQqui prcdent.)Pour tablir ceci par rcurrence, il faut faire deux constructions si P E : la premire, que je ne veux pas dnir formellement, est la limite inductivePde toutes les ex-tensionsQavecQ P . Cest essentiellement la runion de ces corps : pour calculer dansP , onchoisit unQo tout est dni et on fait les calculs l. En utilisant les homomorphismes jQQt , on voit2.4. APPENDICE : STRUCTURE DES ANNEAUX DE POLYNMES 37que le rsultat des calculs est essentiellement indpendant de lendroit o on les a faits. On dispose alorsdhomomorphismesjQP :QP . la seconde consiste rajouter au corpsPtoutes les racines deP: on dnit Pcomme uneextensiondedcompositiondupolynmePsurlecorps P , dounhomomorphismedecorpsjPP:P Pqui compos avec lesjQPfournit les homomorphismesjQP:QPcherchs.Une fois lexistence de ces(P, jQP )obtenue, on peut alors dnircomme la limite inductive desP .Pour dmontrer que deux cltures algbriques sont isomorphes, nous utiliserons un thorme duchapitre suivant. SoitK tune clture algbrique deK . Nous voulons montrer quil existe unK -homomorphisme de la clture algbriqueque nous venons de construire danst. On montre parrcurrence quil existe pour tout P E un K -homomorphismeP :P ttel queP jQP QpourQ P . Cest vrai pour P minE puisqualorsP K . Fixons maintenant P E. En combinant tous leshomomorphismes Q:Qt, pour Q Pet Q /P , onddnit un K -homomorphisme P :P t. Comme le corps Pest une extension de dcomposition du polynme Psur le corps P , il rsultedu thorme 3.1.6 que lhomomorphismePstend en un K -homomorphismeP :P t.Mis bout bout, les Pdnissent unK -homomorphisme: t. Comme tout homomor-phisme de corps, est injectif. Montrons quil est surjectif. Soitxun lment det. Par dnition, xest algbrique surK . SoitPson polynme minimal dansK[X] . Commeest une clture algbriquede K , Pest scind dans. crivons ainsi P n

i 1(X xi) dans[X] . Alors,0 P(x) n

i 1(x (xi))si bien que xest lun des(xi) et est surjectif. Cest un isomorphisme, ce quil fallait dmontrer.2.4. Appendice : structure des anneaux de polynmesRappelons quun idal dun anneauAest un sous-groupe ablienI Atel que sia Aetb I , ab I . Siaest un lment deA, lidal principal engendr paraestlensemble des abpour bdcrivantA. On le note aA ou (a). On dit inversement queaest un gnrateur de lidal (a).THORME 2.4.1. Si I est un idal de K[X], il existe un polynme P K[X] tel queI (P).Un anneau intgre dans lequel tout idal est principal est en gnral appel anneauprincipal.Dmonstration. On refait essentiellement largument de la proposition 1.3.9 (quien est un cas particulier : prendre pour Ilensemble des P K[X] tel que P(x) 0). SiI{0}, on poseP0. Sinon, soitd 0le plus petit degr dun lment non nul deI et soitP I un polynme de degrd. CommeI est un idal, pour tout Q K[X],on aPQ I , donc(P) I . Rciproquement, soit Aun lment deI et introduisonsla division euclidienneAPQ+RdeAparP. On aPQ I , si bien queRAPQ38 CHAPITRE 2. MAIS O SONT MES RACINES? appartient I . Par dnition,degR < degP. Le choix dePimpliqueR0, doA PQ (P).Remarquez quun idal non nul de K[X] a plusieurs gnrateurs. Cependant, si PetQ sont deux polynmes non nuls qui engendrent le mme idal, il existe K tel queQ P. En particulier, un idal non nul possde un unique gnrateur unitaire.COROLLAIRE 2.4.2. Soit AetBdeux polynmes. LensembleI des polynmes de laformeAP +BQ, avec Pet Qdans K[X], est un idal de K[X]. Si Dest un gnrateur decet idal, alorsa) il existe Uet Vtels que DAU+BV;b) DdiviseA et B ;c) tout polynme Cdivisant la foisA et Bdivise D.Ainsi, D est un plus grand diviseur commun de A et B. Il est bien dni un scalaireprs, si bien quon conviendra dappeler pgcd deAet Blunique gnrateur de Iquiest unitaire. Rappelons quon dit que deux polynmesAet Bsont premiers entre euxsi leurs seuls diviseurs communs sont les polynmes constants. Daprs ce rsultat,cela revient dire quil existe deux polynmes UetVtels queAU +BV1: cest le thorme de Bzout .Dmonstration. CommeI est lensemble desAP +BQpourP, QdcrivantK[X]et comme D I , il existe Uet Vdans K[X] tels que DAU+BV , do a).CommeAA 1+B 0,A Iet il existe P K[X] tel queA PD. De mme, il existeQ K[X] tel que B QD. Ainsi,A et Bsont tous deux multiples de D, do b).Enn, si CdiviseA et B, crivonsA CPet B CQpour deux polynmes Pet Q.La relation DAU+BVentrane D CPU+CQV C(PU+QV), si bien que CdiviseD.De cela, on dduit que le pgcd de deux polynmes ne dpend pas du corps danslequel on le calcule :PROPOSITION 2.4.3. SoitK Lune extension de corps, AetBdeux polynmes deK[X]. Alors, le pgcd deA et Bdans L[X] est gal au pgcd dans L[X].Dmonstration. SoitDle pgcd deAetBdansK[X]etEle pgcd deAetBdansL[X]. CommeDdivise tout autant Aet BdansL[X] quil les divise dansK[X], Ddivise E . Pour montrer lautre divisibilit, considrons Uet Vdans K[X] tels que D AU +BV . CommeEdiviseAetB, il divise ncessairementD ! Puisquon a pris soinde choisir Det Eunitaires, ils sont gaux.Ondduit aussi de la relationde Bzout le lemme de Gauss , qui est le point crucialdans la dmonstration de la factorialit des anneaux de polynmes.2.4. APPENDICE : STRUCTURE DES ANNEAUX DE POLYNMES 39LEMME 2.4.4 (Lemme de Gauss). SoitPun polynme irrductible deK[X]. SoitAet Bdeux polynmes de K[X] tels que PdiviseAB. Alors, PdiviseA ou Pdivise B.Dmonstration. Supposons que P ne divisepas A. CommeP estirrductible, sesseulsdivi-seurssontlespolynmesconstants KetlesmultiplesPpour K. Parmi ceux-ci seuls lespolynmes constants divisentA, si bien queA et Psont premiers entre eux. Par suite, il existe UetVtels queAU+PV 1. Multiplions cette relation parB ; onobtient ABU +PBV B. CommePdiviseAB, on peut crireAB PQ. Alors, B P(QU+BV)est multiple de P, cqfd.THORME 2.4.5. Tout polynme non nul AdeK[X] admet une dcomposition en facteurs irrduc-tibles : A am

i 1Pniio a K, m0 et o, pour tout i , Piest unpolynme irrductibleunitaire et niun entier 1.De plus, siA atmt

j 1Qntjjest une autre dcomposition, on a a at, mmtet il existeune permutation de {1; . . . ; m} telle que pour tout i , Pi Q(i )et ni nt(i ).On dit que lanneau K[X] est un anneau factoriel.Dmonstration. Lexistence dune telle dcomposition se fait par rcurrence sur ledegr deA. Si Aest irrductible, on critAaPavecPirrductible unitaire etalecoefcient dominant deA. Sinon, on peut crireAA1A2pour deux polynmesA1etA2de degrs strictement infrieurs deg A, et on conclut par rcurrence.Lunicit est le point important. On peut encore raisonner par rcurrence. En consi-drant les coefcients dominants, on obtientaat. Ensuite, commeP1est irrduc-tible et diviseA, il divise lun des Qj , notons le Q(1). Puisque Q(1)est irrductible,ncessairement P1et Q(1)sont multiples lun de lautre ; comme ils sont unitaires, ilssont gaux. On applique lhypothse de rcurrence A/P1ce qui permet de conclure.Donnons maintenant la dnition gnrale dun anneau factoriel.DFINITION 2.4.6. Soit Aun anneau intgre. On dit quun lment adans Aestirrductible si a) a nest pas inversible ; b) pour tous xet ydans A tels que a xy , xouyest inversible dansA.On dit que lanneauA est factoriel si40 CHAPITRE 2. MAIS O SONT MES RACINES? a) pour tout lment non nul a A, il existe un entierr 0, des lments irrduc-tiblesp1, . . . , pret un lment inversibleutels queaup1. . . pr(existence dune d-composition en facteurs irrductibles) ;b) si a up1. . . pret a vq1. . . qs sont deux dcompositions enfacteurs irrductibles,alorsrs , il existe une permutationde{1; . . . ; r}, des lments inversiblesuj(1 jr ) tels que pour tout j , qjujp( j )( unicit de la dcomposition en facteursirrductibles).THORME 2.4.7 (Gauss). SiA est un anneau factoriel,A[X] aussi.La dmonstration commence par dcrire les lments irrductibles deA[X] : outreles lments irrductibles deA, ce sont les polynmes deA[X]dont les coefcientssont premiers entre eux et qui sont irrductibles en tant que polynmes coefcientsdans le corps des fractions deA. Elle utilise ensuite une variante du lemme de Gauss(lemme 2.4.4). Pour lnoncer, appelons contenu deA[X]le pgcd de ses coefcients.Alors, si Pet Qsont deux polynmes deA[X], le contenu de leur produit PQest gal auproduit des contenus de Pet Q.COROLLAIRE 2.4.8. LesanneauxZ[X1, . . . , Xn] et,si Kestuncorps, K[X1, . . . , Xn],sont factoriels.2.5. Appendice : anneaux quotientsDans ce paragraphe, jexplique comment gnraliser la constructionde lanneaudesrestes faite au paragraphe 2.1.La situation est la suivante. On se donne un anneauA et un idal IdeA ; le but estde construire un anneau quotient qui sera notA/Iet un homomorphisme danneausurjectif :A A/Ide noyau I . Ainsi, deux lments a et b auront mme image dansA/Isi et seulement si leur diffrence a bappartient I: on dit alors que aet bsontdans la mme classe modulo I . (Exercice : vrier que cela fait bien une relation dqui-valence.) Au 2.1, nous avons trait le cas oAK[X]etI(P)est lidal engendrpar un polynmeP K[X]. Dans ce cas, la division euclidienne fournit un reprsen-tant privilgi de chaque classe moduloI . LorsqueAZetI(n), on a encore unreprsentant privilgi, par exemple les entiers de {0; . . . ; n1}. Ce sera le cas dans toutanneau euclidien, mais pas en gnral. On ne se laisse pas arrter par cette difcult :le choix du reprsentant na strictement aucune importance et on peut choisir un re-prsentant de chaque classe, x une fois pour toute. Une manire plus lgante ( ?)consiste dnirA/Icomme lensemble des classes dquivalences modulo I . Si a A,2.5. APPENDICE : ANNEAUX QUOTIENTS 41notonsala classe deadansA/I . Lapplication:A A/Iest tout simplement d-nie par (a) a. Paradoxalement, plutt que de choisir un reprsentant par classe, onmanipule ainsi toute la classe.Dire que est unhomomorphisme danneaux revient dire que ladditionet la mul-tiplication sur A/I sont dnies de sorte tre compatibles avec celles deA. Il fautainsi vrier que si a bet c d, alors a +c b +det ac bd. Or, (b +d) (a +c) (b a) +(c d) etbd ac (b a)d +a(d c) sont la somme de deux lments de Idonc appartiennent I . Les autres axiomes se vrient de la mme faon.SiI est un idal deA, il est alors intressant de traduire en termes de lidal I lesproprits algbriques que peuvent avoir lanneau quotientA/I .PROPOSITION 2.5.1. a) LanneauA/Iest nul si et seulement siA I ;b) lanneauA/I est intgre si et seulement siI / Aet si pour tousxetydansA\ I ,xy / I ;c) lanneauA/Iest un corps si et seulement si I / Aet si les seuls idaux deAconte-nant Isont IetA.Dans le cas b), on dit queI est un idal premier ; dans le cas c), que cest un idalmaximal.PROPOSITION 2.5.2. SoitAun anneau principal qui nest pas un corps. Ses idauxpremiers sont a) lidal nul (0) ; b) les idaux (p) engendrs par un lment irrductible.Parmi ceux-ci, seul lidal nul nest pas maximal. Concernant lexistence didaux maximaux dans un anneau gnral, on a les tho-rmes suivants.THORME 2.5.3 (Krull). Soit A unanneau. Tout idal de A distinct de A estcontenu dans un idal maximal.Dmonstration. Soit I unidal de A, I / A. Soit F lensemble des idaux J de A telsque I JetJ / A. MunissonsFdun bon ordre dont I soit llment minimal. Ondnit alors par rcurrence une famille croissante didaux deFde la faon suivante.Si a I min(F), on pose IaI . Soit maintenant a F et supposons dni lidal IaJ .Soitbs(a) le successeur dea dans (F, ). Si Iab, on dnit Ibb. Sinon, on poseIbIa. Par rcurrence, tous ces idaux sont distincts deA et contiennent I .La runion des idaux Ia est alors un idal Jde A. Montrons que cest un idal maxi-mal qui contient I . Tout dabord, J / A. Sinon, on aurait 1 J _Ia et il existerait a Ftel que1 Ia, ce qui est absurde. Ensuite, sib / Aest un idal deAqui contientJ , ilcontient I , donc est dansF. CommeJ _Iaest contenu dansb, chacun des Ialestet en particulier Ib b. Par construction, on a alors Ib b etJb. Cela prouve queJest maximal.42 CHAPITRE 2. MAIS O SONT MES RACINES? COROLLAIRE 2.5.4. Soit A un anneau. Un lment de A est inversible si et seulementsi il nappartient aucun idal maximal deA.Dmonstration. Soit I(a) lidal engendr par un lmenta A. Siaest inver-sible, il existeb Atel queab1, do 1 I . Alors, pour toutx A,x1x I doncIA. Ainsi,I nest contenu dans aucun idal maximal, doncanappartient aucunidal maximal. Rciproquement, si anest pas inversible, I /A. Il existe daprs lethorme 2.5.3 un idal maximal qui contient I . Cet idal maximal contient a.2.6. Appendice : thorme de PuiseuxLe thorme de Puiseux auquel cet appendice est consacr peut tre apprhend dedeux manires diffrentes :dupoint devueanalytique, il montrequelessolutionsdunequationpoly-nmialedontlescoefcientssontdesfonctionsholomorphes(dessriesentires)peuvent tre paramtres et fournissent des fonctions holomorphes en un paramtret1/n;du point de vue algbrique, il dcrit explicitement la clture algbrique du corpsdes fonctions mromorphes dans un voisinage de 0.Sir > 0, soitA(r) lensemble des fonctions continues sur le disque ferm D(0, r) Cdont la restriction au disque ouvert D(0, r)est holomorphe. Cest un anneau; envertu du principe des zros isols, il est intgre. Si f A(r), posons__f__ sup[z[rf (z).Cest une norme surA(r)qui dnit la topologie de la convergence uniforme. Unelimite uniforme de fonctions continues est continue, une limite uniforme de fonctionsholomorphes est holomorphe. Par suite, cette norme fait de A(r) unespace de Banach,et mme une algbre de Banach car on a lingalit__f g__

__f____g__.Une fonctionf dans A(r) a un dveloppement en srie entiref (z)

n0anzn,qui converge pour [z[ < r , comme on peut le voir, par exemple, laide des estimesde Cauchy des drives des fonctions analytiques. Deux fonctions distinctes ont desdveloppements distincts, ce qui nous permet didentier les lments deA(r) leursrie entire. Un mot concernant la notation : nous allons manipuler des polynmes coefcients dansA(r), cest--dire des polynmes dont les coefcients sont des fonc-tions. NousnoteronsX lindterminepolynomiale,et z largumentdesfonctionsdans A(r). Par exemple, dans le thorme ci-dessous, lexpression P(ze, X) est le poly-nme de C[X] obtenu en valuant en zechaque coefcient du polynme P A(r)[X].2.6. APPENDICE : THORME DE PUISEUX 43THORME 2.6.1 (Puiseux). SoitPun polynme unitaire de degrn coefcientsdansA(r). Il existe un entiere1, un rel ]0; r1/e], un entiere1et des sriesx1, . . . , xn A() telles queP(ze, X) n

i 1(X xi(z)).Enparticulier, les n racines dupolynme P(t ) sont paramtres sous la forme de s-ries xi(z1/e) enune puissance fractionnaire de z . Donnons quelques exemples simplesqui montrent la fois la ncessit dintroduire une telle puissance fractionnaire et aussique le rayon de convergence des solutions peut tre infrieur celui des coefcientsde lquation :a) les racines de P X22zX 1 sontx1(z) z +_1+z21+z +

n1_1/2n_z2netx2(z) z _1+z21+z +

n1_1/2n_(1)nz2n,deux sries entires qui convergent pour [z[ 0et > 0tels que chaque fois queu0< < umsont deslments de Savec u0>B1, on ait(5.9.2) umu0+bu0.Posons maintenant 1/(1+) et dcoupons lintervalle [B0, B] en [B0, B][B, B].Lintervalle [B0, B] contient au plus Blments de S. Pour B assez grand,BB1et la minoration (5.9.2) implique que lintervalle [B, B] contientauplus (m/b)B1(m/b)Blments de S. Endnitive, pour BB1/1,N(B) (1+m/b)B, ainsi quil fallait dmontrer.LEMME 5.9.3. Soit I unintervalledeR, f: I Runefonctiondeclasse Cnetx0, . . . , xndes lments de I . Alors, il existe Itel que1 . . . 1x0. . . xn......xn10. . . xn1nf (x0) . . . f (xn)

f(n)()n!

i >j(xixj).5.9. LQUATION GNRIQUE ET LE THORME DIRRDUCTIBILIT DE HILBERT 129Dmonstration. Il suft de traiter le cas o lesxisont tous distincts. Considronsx0commeunparamtreetnotons D(x0) ledterminantci-dessus. Si A R, soitFA: I R la fonction dnie par FA(x) D(x) An

i 1(x xi). La fonction FAsannuleen x1, . . . , xn ; choisissonsA pour quelle sannule aussi en x0.Daprs le lemme de Rolle, sa drive sannule alorsnfois surI , puis sa driveseconden 1fois, etc. Enn, il existe au moins un rel I tel queF(n)A()0. Deplus,F(n)A() D(n)() An! 0 1 . . . 1x0. . . xn.........0 xn11. . . xn1nf(n)() f (x1) . . . f (xn)An!(1)nf(n)()1 . . . 1x0. . . xn......xn11. . . xn1nAn!,doA (1)n f(n)()n!

i >j 1(xixj) etD(x0)An

i 1(x0xi) f(n)()n!

i >j(xixj).Le lemme est donc dmontr.THORME 5.9.4. SoitPun polynme unitaire deQ(T)[X]. SoitN(B)le cardinalde lensemble des entierst [0, B]tel queP(t , X)a une racine dansQ. SiPna pas deracine dans Q(T), il existe