trois couleurs #55 – septembre 2007

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CINÉMA I CULTURE I TECHNOLOGIE NUMÉRO 55 I SEPTEMBRE 07 PLEIN ÉCRAN CONTROL LA VENGEANCE DANS LA PEAU MON FRÈRE EST FILS UNIQUE MUSIQUE LES FLUOKIDS : YELLE, TEKI LATEX, MIKA RÉSEAUX FACEBOOK, ALLIÉ DES RG ? LIVRES RENCONTRE AVEC ÉRIC REINHARDT MELVIL POUPAUD À L’AFFICHE D’« UN HOMME PERDU »

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PHOTOGRAPHIE COUVERTURE : Richard DUMAS au Baron / RÉDACTEUR EN CHEF : Elisha KARMITZ

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CINÉMA I CULTURE I TECHNOLOGIE NUMÉRO 55 I SEPTEMBRE 07

PLEIN ÉCRANCONTROL

LA VENGEANCE DANS LA PEAUMON FRÈRE EST FILS UNIQUE

MUSIQUELES FLUOKIDS :

YELLE, TEKI LATEX,MIKA

RÉSEAUXFACEBOOK, ALLIÉ DES RG?

LIVRESRENCONTRE

AVEC ÉRIC REINHARDT

MELVIL POUPAUD

À L’AFFICHE D’«UN HOMME PERDU»

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ÉDITEURMK2 MULTIMÉDIA / 55 RUE TRAVERSIÈRE_75012 PARIS / 01 44 67 30 00DIRECTEUR DE LA PUBLICATION > Elisha KARMITZ I RÉDACTEUR EN CHEF > Elisha KARMITZ [email protected] I DIRECTEUR DE LA RÉDACTION > Auréliano TONET [email protected] / [email protected] ILE GUIDE > Bertrand ROGER [email protected] I SECRÉTAIRE DE RÉDACTION « LE GUIDE » > Caroline LESEUR [email protected] I ÉVÉNEMENT >Maud BAYOT [email protected] I CINÉMA / DVD >Sandrine MARQUES [email protected] I LIVRES > Pascale DULON [email protected] I MUSIQUE > Auréliano TONET I INTERNET/JEUX VIDÉO / HIGH-TECH > Etienne ROUILLON [email protected] IART / SHOPPING > Florence VALENCOURT [email protected] I STAGIAIRE > Pihla HINTIKKA [email protected] I Ont participé à ce numéro : François BÉGAUDEAU, Yann BERTIN, Thomas CROISY,Antonin DELIMAL, Baptiste DUROSIER, Maïa GABILY, Erwan HIGUINEN, Florian JARNAC, Roland JHEAN, Rémy KOLPA KOPOUL, Gérard LEFORT, Raphaëlle LEYRIS, Anna LHUNE, Oscar PARENGO, Sundy TASKER,Antoine THIRION, Anne-Lou VICENTE I ILLUSTRATIONS > Laurent BLACHIER, Thomas DAPONT, DUPUY-BERBERIAN, Fabrice GUENIER, Arnaud PAGÈS DIRECTRICE ARTISTIQUE > Marion DOREL [email protected] IMPRESSION / PHOTOGRAVURE > ACTIS I PHOTOGRAPHIES > Agence VU’, DR I PHOTOGRAPHIE COUVERTURE > Richard DUMAS au Baron I REMERCIEMENTS > Lionel, Le BaronDIRECTEUR DE LA PUBLICITÉ > Marc LUSTIGMAN / 01 44 67 68 00 [email protected] I RESPONSABLE CLIENTÈLE CINÉMA > Vincent OLIVE / 01 44 67 30 13 [email protected] I CHEF DE PUBLICITÉ >Solal MICENMACHER / 01 44 67 32 60 [email protected]© 2007 TROIS COULEURS // issn 1633-2083 / dépôt légal dès parution. Toute reproduction, même partielle, de textes, photos et illustrations publiés par MK2 est interdite sans l’accord de l’auteur et de l’éditeur. Tirage : 160 000 exemplaires // Magazine gratuit // Ne pas jeter sur la voie publique.

SOMMAIRE #55 ÉDITO

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CINÉMA06_ Tendances, Ciné fils,

Regards Croisés, Scène culte14_ ON VOUS AIME :

Melvil PoupaudPLEIN ÉCRAN :

18_ Control d’Anton Corbijn 20_ Mon Frère est fils unique de Daniele Luchetti22_ La Vengeance dans la peau de Paul Greengrass25_ LE GUIDE des sorties en salles

CULTURE44_ DVD : Les films de photographes46_ LIVRES : Rencontre avec Éric Reinhardt48_ MUSIQUE : Le revival fluo-disco50_ LES BONS PLANS DE52_ ART : Portrait du photographe JR54_ PAR Laurence Leblanc

TECHNOLOGIE56_ TRIBUNE LIBRE : L’éducation à l’image en question58_ RÉSEAUX : Le web communautaire, allié des R.G.?60_ JEUX VIDÉO : La musique mène le jeu62_ VIDÉO À LA DEMANDE : Snow Cake de Marc Evans64_ SHOPPING : Sélection d’objets rugbyphiles66_ SCIENCE-FICTION : La pelouse du futur

UN FAUTEUIL POUR DEUXVous aimez les films d’auteurs, les films français, et lecinéma étranger. Vous aimez aussi l’intimité des sallesdu Quartier Latin, l’atmosphère chaleureuse du MK2Quai de Seine / Quai de Loire et les boutiques du MK2Bibliothèque. Alors la nouvelle offre illimitée de MK2 vavous satisfaire. En s’associant au réseau UGC, nousvous proposons désormais d’accéder, seul ou à deux, àla meilleure offre de cinéma à Paris. Au menu, plus de 600films par an en VO et en VF, comme autant d’occasionsde découvrir les regards singuliers de réalisateurs venusdu monde entier.

Et parce que la curiosité est la vertu principale d’unspectateur, embarquez-vous immédiatement pour le Libanavec Un Homme perdu, dernier film de la réalisatriceDanielle Arbid. En tête d’affiche, Melvil Poupaud. Il nousparle du tournage et de sa rencontre avec Antoine d’Agata,un homme qui aime les femmes, mais surtout un photographeaux aventures fascinantes, qui a inspiré son personnage.

Alors, pour rentrer sans regret et continuer à voyager,rendez-vous dans le creux d’un fauteuil pour deux.

_Elisha KARMITZ

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Stances à Constance

TENDANCES

À 17 ans, Constance Rousseau illumine Tout estpardonné de Mia Hansen-Løve, son premier film.Ça s’est si bien passé qu’elle y a incrusté ses deuxsœurs. Rencontre.

06 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

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Mia(m), mia(m) : les Mia sont le miel dela rentrée. On aime beaucoup le grimeépicé de la rappeuse d’origine srilankaiseM.I.A ; on aime mieux encore Tout estpardonné, premier film très émouvantdeMia Hansen-Løve.

Se méfier des miaulements de l’amieAmy Winehouse, «saoule sister» mi-ange mi-démon. La diva a annulé sonshow à Rock en Seine pour overdosed’alcool, cocaïne, héroïne, ecstasy etkétamine. Pas très mimi.

L’OM ne gagne plus, leur dernier album,Saison 5, sonne comme la saison 1de Plus belle la vie... Il y a 10 ans, ilsdansaient le Mia. Mais aujourd’hui,miasmes et marasme s’abattent surles rappeurs d’IAM.

Mia Amy IAM

CALÉ RECALÉDÉCALÉ

Contrairement à ce qu’en dit la rumeur, le latin, ça peut servir. Alors enpremière, Constance se rend à un cours d’antiquités lorsqu’une damel’aborde pour un casting. La réalisatrice, Mia Hansen-Løve, l’engageaussitôt. La complicité entre les deux femmes grandit au point queConstance coopte ses deux sœurs, 7 et 10 ans, pour tourner dans le film.Il faut dire que la famille joue un grand rôle chez les Rousseau : «Mesparents étaient ravis que je joue, ils pensaient que cela m’aiderait àvaincre ma timidité.» Le papa, ingénieur, a transmis à sa fille l’amourdu cinéma (« les westerns, la Nouvelle Vague, Doillon ») ainsi qu’un«nystagmus congénital » – un mouvement latéral des yeux, incessantet hypnotique, qui rehausse sa beauté florentine d’un zeste de candeur.Bac L mention assez bien, fac de droit dès la rentrée, des projets deréalisation ou de journalisme (« c’est flou »), même si « comédienne,(elle) adore ça. » D’ailleurs, elle «adore » des tas de choses – LouisGarrel, Balzac, Anne Wiazemsky et son livre Jeune Fille… Dans soncas, le verbe « adorer » se conjugue aussi au passif : certains profs luifont signer des autographes, nous révèle-t-elle, mi-honteuse, mi-ravie.Ce n’est qu’un début.

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08 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

Le cinéma use régulièrement ses fonds de culottesur les bancs de l’institution scolaire. Du tableauà l’écran, passage en revue de films où la salle declasse accueille des élèves et des professeurs, àl’école de la vie. La cloche du «7ème Art» a sonné qui rallie son cortège de têtes blondes,en situation d’apprentissage. Heures creuses pour Antoine Doinel quis’ennuie en cours, comme la Mouchette de Bresson ou les lycéens deKids Return de Kitano. Le voici faisant Les 400 coups pour FrançoisTruffaut qui, dans L’Argent de poche, évoque les premiers émoisamoureux d’élèves d’une même classe. Chez Diane Kurys, la rentrée ale goût d’un Diabolo menthe que sirotent des adolescentes en quêted’émancipation, comme les héroïnes de Virgin Suicides.Face à l’autorité professorale, la solidarité s’exprime. Un enfant accomplitun véritable voyage initiatique dans Où est la maison de mon ami ?d’Abbas Kiarostami, muni du cahier que son camarade a oublié.Dans Au revoir les enfants de Louis Malle, une amitié naissante tournecourt à cause de la Gestapo. Quant aux rebelles de Breakfast Club,ils apprennent à se connaître, le temps d’une colle générale. Décorrécurrent du teen movie, le lycée abrite parfois un génie (Will Hunting)que révèle Robin Williams, qui campait déjà un professeur charismatiquedans Le Cercle des poètes disparus. Mais l’enseignant ne se comporte pas toujours de manière trèsacadémique quand une belle étudiante (Dr Jerry et Mister Love,Noce blanche) ou une chanteuse de cabaret vénale (L’Ange bleu) lerenvoient à ses chères études. Il peut même devenir inquiétant (LesDisparus de Saint Agil), se transformer en zombie (The Faculty) ouenseigner à une progéniture maléfique (Le Village des damnés). Maisavant tout passeur, comme le maître de Être et avoir, il fait considéreravec nostalgie les années lycée (Le Péril jeune), où le quotidienn’était qu’une grande récréation.

Master classe

CINÉ FILS

NAISSANCE DES PIEUVRESLA VIE D’ARTISTE (Institubes /Naïve) // (Too pure /Beggars)

Petit à petit, le cinéma français se laissegagner par la tendance anglo-saxonne deconfier ses B.O. à des musiciens de formationnon pas classique, mais pop. Naissancedes Pieuvres de Céline Sciamma est portépar les nappes électro de Para One, principalinstrumentiste du combo rap TTC. Vaguelettesplacides, abysses bleutées ou lyrismetourbillonnant, l’intelligence de son scoreest à rapprocher de celui de La Vie d’artistede Marc Fitoussi, composé par Sean O’Haganet Tim Gane, aux mélodies plus guilleretteset chamarrées.

La bande originale

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Après le remarquable Cinéma de FrançoisAvril paru au printemps dernier, qui redessinaità sa manière les affiches de ses films favoris,la collection Les Petits Carnets s’enrichit d’unsecond volume consacré au 7ème art. D’untrait simple mais touchant, l’illustrateurFrançois Ayrolles rend hommage à Jean-Pierre Leaud, comédien d’exception. Àtravers une vingtaine de saynètes plus oumoins cultes, les titres des films de Truffautse culbutent en une floraison graphique àla fois cocasse et ravissante.

Le ciné livre

FRANÇOISAYROLLES «Jean-Pierre Léaud» Alain Beaulet éditeur

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TRAIT LIBREPremier volet d'une série de sixcaricatures, TROISCOULEURSa demandé à l'illustrateur LaurentBLACHIER de croquer l'acteur RomainDuris, à l'affiche de L'Âge d'homme...maintenant ou jamais! de Raphaël Fejtö,dans les salles le 12 septembre.www.laurentblachier.com

Graphistes, illustrateurs, artistes, si vous souhaitez participer à la rubrique Trait Libre, envoyez nous vos créations à l’adresse suivante : [email protected] 09 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

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Elle était l'anarchie vivante du cœur (…) aussi impolie que la vie et la mort », disait d’elle le poète PhelpsPutman. Grande et anguleuse, Katharine Hepburn n’en était pas moins élégante et racée. «Garce» auto-déclarée, la plupart de ses rôles tenaient de la revendication féministe, épuisant la force masculine de sespartenaires. Que ce soit chez Cukor, son réalisateur fétiche (Indiscrétions, Sylvia Scarlett) ou chez Hawks(L’Impossible Monsieur Bébé), sa présence à l’écran consacrait une véritable guerre des sexes, comme

dans Mr and Mrs Smith où on la retrouve en espionne sexy.Si Katharine Hepburn mena les hommes à la baguette, Angelina Jolie les a d’abord tenus, elle, par le joystick. La fille de JonVoight – qui déclara sans doute « mission impossible » d’élever l’adolescente punk – a vu sa carrière décoller avec Lara Croft,Tomb Raider, l’adaptation au cinéma du célèbre jeu vidéo. Femme effigie, sa plastique opulente est venue radicaliser lesfantasmes de toute une génération pré-pubère. Bouche pulpeuse, crinière ad hoc, la bien-nommée Jolie répond aux canonsde beauté hollywoodiens, aux antipodes du glamour très personnel de Hepburn, en qui les studios voyaient une concurrenteà Garbo. Obtenant un Oscar mérité du meilleur second rôle féminin pour Une Vie volée de James Mangold, Jolie devaitjusqu’à présent sa réputation sulfureuse à ses frasques et à ses déclarations dans les tabloïds. Mais Raisons d’État etUn Cœur invaincu, où elle incarne la veuve de Daniel Pearl, commencent à l’installer comme une actrice sur qui compter.Certes, comparaison n’est pas raison, mais gageons que la personnalité volcanique de la troublante Angelina Jolie sauranourrir, à l’instar de sa prestigieuse aînée, ses rôles au cinéma.

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Hepburn vs Jolie

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Eternelle enfant terrible du cinéma, la multi oscarisée Katharine Hepburn portait la culotteà Hollywood. Un caractère impétueux que n’a pas à lui envier la fantasque Angelina Jolie,à l’affiche ce mois-ci d’Un Cœur invaincu. Rencontre entre deux forts tempéraments.

REGARDS CROISÉS

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Du jamais vu

[Tandis qu’elle se promène dans un parc, Jane se rendcompte qu’un homme la photographie à son insu.]

JANE : Que faites-vous? Arrêtez-ça, arrêtez ça! Vous n’avezpas le droit de faire ça !

THOMAS : Comment ça, pas le droit ? C’est mon boulot. Il ya des toréadors, des politiciens… Moi, je suis photographe.

JANE : C’est un lieu public, les gens veulent y avoir la paix.

THOMAS : Je n’y suis pour rien si la paix n’existe pas.D’habitude, les filles me paient pour être photographiées.

JANE : Je vous paierai.

THOMAS : Je suis trop cher. J’ai d’autres clichés sur cerouleau.

JANE : On fait quoi alors ?

THOMAS : Je vous enverrai les photos.

JANE : Non, je les veux maintenant. [Elle tente de lui arracher l’appareil photo en lui mordantla main.]

THOMAS : Non ! Vous êtes bien pressée ! [Jane, à terre, est décomposée.] Ne gâchons pas tout, on se connaît à peine.

JANE [se relevant] : Non, on ne se connaît pas. Vous nem’avez jamais vue.

LE PITCH : Samedi matin dans un parc londonien. Thomas(David Hemmings), un photographe de mode désabusé,prend des clichés d’un couple d’amoureux. Mais la femme(Vanessa Redgrave) s'en aperçoit et tente de récupérerla pellicule à tout prix. Intrigué par son comportement,Thomas développe les photos. En agrandissant celles-ci,il découvre ce qui semble être un cadavre. Dans la nuit,les photographies sont volées dans son atelier...

LA PETITE HISTOIRE : Film fondateur sur les rapports entre le réel et le simulacre, avec pour toile de fond le swinging London,The Yardbirds et une Jane Birkin scandaleusement nue, Blow Up de Michelangelo Antonioni décrypte les mécanismes d’unesociété de plus en plus régie par l’image. Le film, Palme d’Or en 1967, a inspiré de nombreux cinéastes. Dans Conversationsecrète de Francis Ford Coppola et Blow Out de Brian de Palma, la mort se cache dans une bande magnétique. PeterGreenaway dans Meurtre dans un jardin anglais démontre que « la réalité d'un paysage peut être beaucoup plus profondeque sa transformation pour une œuvre d'art. ». Réalité, illusion : ne vous fiez pas aux apparences.

Blow Up de Michelangelo Antonioni, 1967 (DVD disponible chez Warner Home Vidéo)

Pages 06 à 12 réalisées par S.M. et Au.To.

SCÈNE CULTE Blow Up

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ON VOUS AIME...

Photo_

© Richard Dum

as / agence VU

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n se souvient du Gaspard indécis de Conte d'été d'Éric Rohmer, il y a douzeans. Voici Thomas Koré, un des hommes perdus du nouveau film de DanielleArbid. Entre temps, près de trente films ont passé. Un Homme perdu estl'occasion parfaite pour une rencontre avec Melvil Poupaud. Inspiré duphotographe Antoine d’Agata, Koré, ivre de voyages et consentant à sa perte,dessine l’avenir de l’acteur.O

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Comment as-tu rencontré la réalisatrice Danielle Arbid ?MELVIL POUPAUD_Danielle et moi avions des amis en commun. À l’époque de notre rencontre, je ne collais pas aupersonnage qu’elle avait en tête. Elle est revenue vers moi peu avant le tournage. Il lui fallait un acteur qui aime voyageret ne réclame pas trop de confort. Quant à moi, j’aimais beaucoup son idée de prendre le personnage en cours de route ;qu’on ne sache pas tout de suite qui il est, qu’on puisse au départ le prendre pour un simple routard, avant de découvrirqu’il est lui aussi l’« homme perdu ».

Le scénario était-il d'emblée inspiré d'Antoine d'Agata ?M. P._Dans la première mouture, Thomas Koré n'était pas photographe mais écrivain. C'est lorsque Danielle a rencontréd'Agata qu'elle s'est aperçue qu'ilressemblait à son idée. D’Agataest devenu pour moi une sorte demodèle, même si le scénario nes’identifie pas précisément à lui. Ensuite, il s'est un peu investi dans le film. J'avais besoin de savoir quel genre d'appareil, quelgenre d’éclairage il utilisait ; je ne connais rien à la photo et il fallait être précis. Sentir qu'il cautionnait le personnage m'a misen confiance et j'ai pu l'observer davantage. La manière dont il approche les gens est très belle à regarder.

Correspondait-il à l'image que tu t'en faisais ?M.P._D'Agata ne correspondait pas seulement à l'idée que j'avais du personnage en lisant le scénario mais aussi à l'idéeque j'avais depuis petit de ce qu’est un artiste. Un voyageur, qui n'a pas peur d'aller chercher là où personne n'a cherché,les bas-fonds, la prostitution, la drogue, la perte de soi. Qui peut disparaître pendant six mois et réapparaître sansprévenir. Cette dimension-là, romantique, très XIXème siècle, d'Agata en a quasiment le visage.

D'AGATA EST UN MYTHE CONTEMPORAIN. PERSONNEN'A DE PRISE SUR LUI. IL SE FOUT DU CINÉMA, IL EST DANSUNE ESPÈCE DE QUÊTE. MELVIL POUPAUD“ “

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Y-a-t-il un type de films que tu privilégies ?M. P._Un film comme Un Homme perdu dure trois mois. Jene voyais pas la différence entre chacune des prises. Il a fallus'immerger dans un autre monde. À la fin, je ne voulais plusquitter Thomas Koré – son nom me plaît beaucoup, le fait qu’ilsoit photographe, qu’il aille au Liban, qu’il photographie desfilles, l’alcool… On rentrait dans les bars et je me soûlaisdevant la caméra : Danielle me poussait en sachant trèsbien qu’une fois ivre, on est capable de jouer tout en restantsoi-même. Il y a quelque chose de très enfantin, tu finis pardevenir le jeu. Alexander Siddig est complètement différent :très anglais, précis, davantage dans la composition. Lui

mimait vraiment très bien l’ivresse. D’autres cinéastes travaillent différement, prise

par prise, par corrections. Rohmer ou PascalThomas, avec qui j'ai fait une adaptationd'Agatha Christie (L’Heure zéro, en sallesle 31 octobre, ndlr). La fameuse globalisation, je la ressensen tant que comédien. Cette année, enun an, j'ai fait un film indépendant à NewYork, le Pascal Thomas, le film de Danielleau Liban, un film avec Desplechin, quelques

jours sur un film hollywoodien, un film d'horreuranglais avec Sean Ellis, une adaptation d'Edgar

Poe. En tant qu'acteur, tu ne peux plus faire l'économiede cette globalisation.

_Propos recueillis à Paris en août 2007 par Antoine THIRION

Un Homme perduUn film de Danielle ARBIDAvec Melvil Poupaud, Alexander Siddig, Darina Al Joundi…Distribution : MK2 // France, 2006, 1h37 // Sortie le 19 septembre

Connaissais-tu son travail avant d'entreprendre le film ?M. P._Danielle m'avait montré ses livres. Mais c’est Aka Ana,le film d’Antoine montré à la Cinémathèque (dans l'expositionL'Image d'après, ndlr), qui m'a vraiment ébloui. La façon dontla fiction surgit est vraiment brillante, un peu comme chezPedro Costa, qui tourne jusqu'à ce qu'une sorte de mise enscène advienne malgré lui et malgré ses acteurs. Le dispositifcrée le cinéma. Il y a de ça dans Aka Ana : d'Agata préférevivre l'histoire qu’il a écrite, jusqu'à ce que le scénario seretrouve dans le réel. Ça ressemble un petit peu à Melvil, lefilm que j'ai fait et présenté l'année dernière à la Quinzainedes Réalisateurs à Cannes. Avoir simplement une caméra, etque la caméra même fasse le cinéma, c'est ce quim'intéresse.

Est-ce que tu continues à filmer ?M. P._Moins, parce que je ne peuxplus continuer à me filmer. La pratiquem'intéresse moins que le parcours desgens, les mythologies qu'ils peuventcréer ou que les autres peuvent créerautour d'eux. J’adore Bob Dylan pour ça.D'Agata aussi est un mythe contemporain.Personne n'a de prise sur lui. Il se fout ducinéma, il est dans une espèce de quête.

Tu reviens donc vers ton métier d'acteur ?M. P._Avec l'expérience, j'arrive à mieux le comprendre.À savoir où trouver du plaisir. Le travail en lui-même est trèsfragile, il faut gérer le rythme, ses émotions. Ça se joue àquelques secondes dans une prise. Être acteur, c’est unebonne place pour observer les gens au travail. La capacitéd’adaptation de Danielle m’a frappé : le scénario n’était pasgravé dans le marbre, elle a été capable de repenser lesséquences selon les aléas du tournage. Pour un deuxièmefilm, c’est très impressionnant.

LA FAMEUSEGLOBALISATION, JE LA RESSENS EN

TANT QUECOMÉDIEN.

Photo_© Richard Dum

as / agence VU

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PLEIN ÉCRAN Control_Anton CORBIJN

rôle d’époque où les quidams deviennentstars et les stars quidams. Sur les écransfrançais, Johnny Hallyday est à nouveauJean-Philippe, quand Depardieus’improvise chanteur de supérette(Quand j’étais chanteur). Sur les écransanglo-saxons, Kurt Cobain est fait

homme des bois par Gus Van Sant, et Ian Curtis, dansControl, un père de famille mal dans ses pompes. Lesnon-avertis qui imaginaient une vie destroy au leaderépileptique de Joy Division seront surpris du portraitqu’en peint Anton Corbijn. Curtis est littéralement engluédans la campagne ouvrière de Manchester où il est néet mort, à seulement 23 années d’écart.Ce n’est pas qu’un détail : le scénario s’insipire desmémoires de Deborah Curtis. Tout est raconté en fonctionde son mariage, menacé par la musique au point que Ianfinisse par prendre une journaliste belge pour amante ; aupoint aussi qu’à l’exception de deux ou trois admirablesscènes de concert, la musique elle-même soit ignorée.La venue de membres du groupe à Cannes, où Control étaitprésenté à la Quinzaine des réalisateurs, était presqueétonnante, vu le manque total d’intérêt que le film porte àceux qui créèrent ensuite New Order. Car c’est bien à domicile, dans la cuisine de sa maisonen brique, que Ian Curtis revient se pendre. La sombrefumée crématoire qui se confond au plan de fin avec leciel gris et parsemé de cheminées de Macclesfieldn’est pas anodine : tout émane du paysage. Control estun film de photographe, très sobrement réalisé, dans unnoir et blanc qui confère une aura glamour au prolétariatanglais. Le meilleur vient de l’incarnation 100 % authentiquede Ian Curtis par Sam Riley, chanteur d’un groupe obscurde Leeds et acteur occasionnel. Gageons que cet inconnu-là ne le restera guère.

_Antoine THIRION

DVie et mort du leader du groupe de rockJoy Division, suicidé en 1980 à l’âge de 23ans, d’après les mémoires de sa femme.Un biopic réussi, réalisé par le célèbrephotographe et clippeur Anton Corbijn.

Partir en fumée

ANTON CORBIJNClip de Personal Jesus de Depeche Mode (1989)Clip de Heart-Shaped Box de Nirvana (1993)Control est présenté à la Quinzaine des Réalisateurs (17 mai 2007).

EN 3FILMS

Un film d’Anton CORBIJNAvec Sam Riley, Samantha Morton, Craig Parkinson…Distribution : La Fabrique de Films // États-Unis, 2006, 1h59

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19 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

SORTIE LE 26 SEPTEMBRE

IAN CURTIS 1956_Naissance le 15 juillet à Manchester.1976_Assiste à un concert des Sex Pistols et décide d’être chanteur.1980_Suicide à Macclesfield, le 18 mai.

EN 3DATES

01

02

03

Pour Anton Corbijn, dont Controlle premier film.

Pour Ian Curtis, dont Controlest le premier biopic.

3RAISONSD’ALLER VOIR CE FILM

Vous faites partie d’un groupe de rock(10 000 Things) mais quel était votrerapport au cinéma ? J’ai toujours aimé le cinéma. Mon père sepassionnait pour les films des années 1960et 1970. Il m’a montré la voie et transmis

son goût pour cette cinématographie. Quand j’étaisenfant, les fictions m’impressionnaient au point quej’imitais les personnages deux semaines durant, avant detomber sur d’autres films. J’ai passé le plus clair de monenfance habillé en Lawrence d’Arabie, ce qui a eu poureffet d’amuser mes parents autant que de les inquiéter!

Connaissiez-vous la musique de Joy Division ?Je connaissais certaines chansons mais je n’étais pas ungrand fan. Ce n’était pas le genre de musique que j’auraisécouté spontanément en rentrant chez moi. Mais le côtépunk de titres comme Transmissionme plait. Certes, cegroupe n’était pas ma tasse de thé initialement, mais j’ensuis progressivement tombé amoureux.

Comme Ian Curtis que vous incarnez, avez-vous unrapport problématique au succès ?Je veux connaître le succès, sans pour autant que mavie change de manière drastique. J’aime être anonymeet je pense que je vais le rester. Position paradoxale s’ilen est car être acteur revient à s’exposer aux critiquesou à l’admiration. Je fais toujours de la musique avecmon frère et ces dernières années nous avons enregistrépas mal de titres. Mais après avoir consacré les vingtpremières années de ma vie à la musique, je ne suis pascertain de vouloir reprendre la route avec mon groupe,pour nous produire dans les villes les plus ennuyeusesd’Angleterre. C’est vraiment dur de vivre de la musique.Cependant, je vais continuer à composer, en vue d’unediffusion sur Internet. Une fois qu’on commence lamusique, on ne peut pas s’arrêter. C’est à la fois un plaisiret une thérapie.

Propos recueillis par S.M.

Pour Sam Riley, dont Controlest le premier premier rôle.

3 QUESTIONS À SAM RILEY

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20 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

PLEIN ÉCRAN Mon Frère est fils unique_Daniele LUCHETTI

moins d’avoir grandi en Italie, difficilede saisir immédiatement le sens dutitre du dernier film de Daniele Luchetti,Mon Frère est fils unique. Car, souscet intitulé pour le moins intrigantse cache en fait une référence à lachanson de Rino Gaetano, très

populaire dans les années 1970. Ce qui pourrait resterde l’ordre de l’hommage FM devient signifiant quand onapprend que le film est une adaptation du livre d’AntonioPennacchi, Il fasciocomunista (le «facho-communiste»).Le glissement d’un titre à l’autre éclaire tout le film. Car,par ce clin d’œil musical, Daniele Luchetti a voulu imprimerde la légèreté à son propos et montrer que l’engagementpolitique est aussi voire d’abord un engagement émotif. Si la comparaison avec les récents Romanzo Criminaleet Nos Meilleures Années est inévitable, Luchetti n’apas à en rougir. Il pourrait même en rire car on lui avaitproposé les deux projets ! Et s’il a les mêmes scénaristes(avec lesquels il travaille depuis quinze ans) et abordela même époque, la similitude s’arrête là. Privilégiantl’intime, sa mise en scène, tour à tour âpre et enlevée,montre comment la famille politique doit composeravec la famille de chair et de sang. Leader communistecharismatique, le jeune et bel ouvrier Manrico (RiccardoScarmarcio) se heurte au néo-fascisme obtus et belliqueuxde son frère, la «teigne» (Accio), qu’interprète subtilementElio Germano. Le rapprochement de l’un vers l’autre, paramour de la même femme, se mêle à la radicalisationprogressive des discours et des actions militantes, pours’achever en un final explosif et la mue de la « teigne»en adulte. Longtemps dans l’ombre de son ami NanniMoretti, Luchetti mérite aujourd’hui les mêmes élogesque son aîné.

_Florence VALENCOURT

ADeux frères s’affrontent sans cesse, paramour et pour leurs idées. Comme on esten Italie, tout cela n’est finalement qu’unevaste histoire de famille, la leur et celle detout le pays, des années 1960 à 1970. Saga.

Une jeunesse ital i

DANIELE LUCHETTI1960_Naissance à Rome, pendant les JO, en pleine éclipse solaire.1969_Premières vacances en voiture, en Grèce.2000_Naissance de son fils, Frederico.

EN 3DATES

Un film de Daniele LUCHETTIAvec Riccardo Scamarcio, Elio Germano, Angela Finocchiaro…Distribution : StudioCanal // Italie-France, 1h40, 2007

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ienne

SORTIE LE 12 SEPTEMBRE

DANIELE LUCHETTIHuit et demi, de Federico Fellini, 1963.Baisers volés, de François Truffaut, 1968.Rosemary’s baby, de Roman Polanski, 1968.

EN 3FILMS DECHEVET

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Parce que Luchetti a réussi à faire, avec humour et psychologie, un débutd’inventaire du néofascisme.

Pour Elio Germano, qui parvient à faire aimer son personnage polémique.

3RAISONSD’ALLER VOIR CE FILM

Pourquoi avoir choisi la ville de Latinapour décor au film ?Latina a été fondée sous le fascisme, en1932. C’est la première ville au XXème siècleà avoir été construite sur un terrain oùle paludisme faisait rage. Aujourd’hui,des Italiens en conçoivent encore de la

reconnaissance envers le régime. Situer l’intrigue là-baspermettait donc de donner au moins une raison positiveau ralliement d’Accio au parti fasciste. Et puis, choisir uneville de province, c’est mettre les évènements extérieurslittéralement à distance. Ils arrivent à Latina comme unécho : par exemple, Accio ne vit mai 68 qu’à travers sonposte de télé.

Avez-vous eu des difficultés à aborder le thème dunéo-fascisme ?Dans les années 1970, l’extrême-gauche et même lagauche disaient « tuer un fasciste n’est pas un crime » !C’est un slogan avec lequel j’ai grandi ; et le peu de filmsqui évoquaient le sujet étaient empreints de cette idée-là. Faire mon film à l’époque aurait été tout simplementimpossible. Mais, avec le recul, et parce que le livres’arrête avant le terrorisme, je pouvais être drôle, tendreet critique à la fois. Aborder les choses de manièrenouvelle, plus psychologique qu’idéologique, en somme.

En 1991, vous réalisiez Le porteur de serviette, sur le milieupolitique corrompu des années 1980. Auriez-vous envie devous attaquer aujourd’hui aux années Berlusconi commeNanni Moretti l’a fait dans Le Caïman ?J’ai essayé, mais je n’ai pas trouvé d’idée originale pourl’instant. Cette époque est encore trop proche. On a tropparlé de lui. Je pense donc qu’il faut attendre un peu,digérer les choses. Mais dans l’esprit, j’ai bien sûr trèsenvie de faire un film sur le sujet !

_Propos recueillis par F.V.

3 QUESTIONSÀ DANIELE LUCHETTI

Pour le sourire de Diane Fleri, une révélationpour les deux frères, comme pour le spectateur

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PLEIN ÉCRAN La Vengeance dans la peau_ Paul GREENGRASS

gent pour le compte de la CIA, JasonBourne a été dépossédé de son identitéle jour où il a intégré le programme quil’a transformé en redoutable machinede mort. En guerre contre sa hiérarchiequi a assassiné sa petite amie, il exécuteméthodiquement sa vengeance. Une

des premières idées du film consiste à effectuer à reboursle parcours de son héros. En quelques plans très ramassés,la caméra revient sur les lieux des intrigues passées,mouvement qui épouse le retour vers les origines. Greengrassréussit à combiner à l’action la plus trépidante l’intensitéd’une démarche intime, portée par un Matt Damon ausommet de sa carrière. De sorte que les scènes de combats ou de poursuites,loin de constituer des morceaux de bravoure isolés,s’inscrivent au contraire dans un flux captivant. L’ouverturedu film, chorégraphiée à la seconde près, est emblématiqued’une mise en scène qui impressionne par son efficacité.Bourne donne rendez-vous à un journaliste pour luirévéler les exactions de ses supérieurs. Par portablesinterposés, il dirige son contact que ses ennemis ontpris en filature. Cette maîtrise de l’espace et de sescontingences caractérise le héros du film d’action.Greengrass ne l’a pas oublié. L’action ne verse jamaisdans la surenchère d’effets, tandis que le scénariodéveloppe la psychologie de personnages ambivalents.Parmi ceux-là, une femme agent, croisée dans les opusprécédents, et qui pourrait bien détenir la clé du passéopaque de Bourne. Réinvesti, au terme d’une trajectoirechaotique, de sa véritable identité, Bourne l’insaisissables’évanouit dans la nature. Et emporte avec lui le mystèred’un héros rebelle, qui colle à la peau.

_S.M.

A

Dernier volet d’une trilogie inégale, LaVengeance dans la peau (Bourne Ultimatum)relate, sur fond d’espionnage, les ultimessoubresauts d’un électron libre en quêted’identité. Un film magistral et nerveux,signé Paul Greengrass.

À fleur de peau

MATT DAMONGerry : il porte un t-shirt en turban sur la tête pour traverser un désert.Ocean’s Thirteen : il porte un faux nez pour jouer les séducteurs. Raisons d’État : il porte une épaisse monture de lunettes pour incarner un agent de la CIA.

EN 3FILMS

Un film de Paul GREENGRASSAvec Matt Damon, Julia Stiles, David Strathaim…Distribution : Paramount // Etats-Unis, 2007, 1h56Sortie le 12 septembre

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Pour Matt Damon, parfait en héros de filmd’action qui traverse les cloisons sans se faire mal.

Pour connaître enfin le vrai nom de Jason Bourne et le secret de son passé.

Pour un film qui allie à l’intime lespectaculaire de ses scènes d’action.

3RAISONSD’ALLER VOIR CE FILM

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SOMMAIRESORTIES DU 12 SEPTEMBRE26_ Charly d’Isild Le Besco // La Vérité ou presque de Sam Karmann // L’Âge d’homme… maintenant ou jamais ! de Raphaël Fejtö28_King Of California de Michael Cahill // La Question humaine de Nicolas Klotz

SORTIE DU 19 SEPTEMBRE30_Un Cœur invaincu de Michael Winterbottom // La Face cachée de Bernard Campan //Le Mariage de Tuya de Wang Quan’an // Nuage de Sébastien Betbeder

SORTIES DU 26 SEPTEMBRE31_Alexandra d'Alexandre Sokourov // Tout est pardonné de Mia Hansen-Løve // Regarde moi d’Audrey Estrougo32_99 francs de Jan Kounen // L’Âge des ténèbres de Denys Arcand // À Vif de Neil Jordan // 7h58, ce samedi-là de Sidney Lumet

SORTIES DU 3 OCTOBRE36_L’Ennemi intime de Florent-Emilio Siri // Le Dernier Voyage du juge Feng de Liu Jie37_Retour en Normandie de Nicolas Philibert // Un Secret de Claude Miller // Désir(s) de Valeska Grisebach

SORTIES DU 10 OCTOBRE38_Sa Majesté Minor de Jean-Jacques Annaud // L’Assassinat de Jesse James d’Andrew Dominik // Sans moi d’Olivier Panchot

LES ÉVÈNEMENTS MK2_40>42

LE GUIDEDUMERCREDI 12 SEPTEMBRE AUMARDI 16 OCTOBRE

DES SALLES

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Un Cœur invaincu - un film de Michael Winterbottom

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LE GUIDE_SORTIES DU 12 SEPTEMBRE

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LA VÉRITÉ OU PRESQUEUn film de Sam KARMANNAvec Karin Viard, André Dussollier, François Cluzet…Distribution : Rezo Films // France, 2006, 1h35

Avec pas mal de second degré, Raphaël Fejtö ne craint pasla référence à Michel Leiris en donnant – en partie – pourtitre L’Âge d’homme à son deuxième film. Mais si son hérosest trentenaire, comme l’auteur à l’époque, et tente égalementde se découvrir par l’écriture, la comparaison s’arrêteheureusement là. Romain Duris n’est pas Michel Leiris et leréalisateur se limite lui au sujet un peu cliché de l’engagementamoureux du jeune Parisien branché. Pourtant, si à l’instar deSamuel / Romain, le film peut parfois être un peu maladroit,l’authenticité du traitement et la complicité évidente entreles acteurs (Aïssa Maïga fait une entrée remarquée dansla bande) font du film un drôle d’objet émouvant, qui sonnesouvent juste.

_F. V.

Après Kennedy et moi en 1999 et À la petite semaine en2003, La Vérité ou presque est le troisième film du comédienet cinéaste Sam Karmann.Inspiré du roman True Enough de Stephen McCauley,La Vérité ou presque est une valse sentimentale réjouissante.Parmi les protagonistes, Anne est l’épouse de Thomas,mais celui-ci se découvre progressivement une attirancepour Caroline. Hélas, cette dernière est déjà mariée à Marc,séducteur impénitent. Parallèlement, Vincent, un écrivainhomosexuel, observe les chassés-croisés amoureux…Pour interpréter l’un des rôles-clé de son film, le réalisateur afait appel à sa compagne à la ville, l’actrice Catherine Olson.

_Thomas CROISY

L’ÂGE D’HOMME… MAINTENANT OU JAMAIS!Un film de Raphaël FEJTÖAvec Romain Duris, Aïssa Maïga, Clément Sibony…Distribution : UGC // France, 2006, 1h28

CHARLYUn film d’Isild LE BESCOAvec Julie-Marie Parmentier, Kolia Litscher, Jeanne Mauborgne…Distribution : Tamasa Distribution // France, 2007, 1h35

Deuxième long-métrage en tant que réalisatrice d’Isild Le Besco après Demi-tarif en 2004, Charly est l’occasion pourl’héroïne de L’Intouchable de mettre en scène son jeune frère, le comédien Kolia Litscher. À quatorze ans, Nicolas est un orphelin qui vit dans une famille d’accueil, un couple de retraités. Peu en phase avec sonenvironnement culturel et les impératifs de sa scolarité, il décide un jour de quitter sa petite ville de province pour partir àl’aventure en auto-stop. Son objectif : rejoindre Belle-île-en-Mer, un lieu de fascination qu’il a découvert sur une carte postale.Sur sa route, le long des chemins de Bretagne, il rencontre Charly, une jeune femme au fort caractère qui vit dans unecaravane. Celle-ci va définitivement bouleverser son existence… Avec réalisme, Charly décrit les transformations intérieures d’un jeune homme qui passe progressivement de l’adolescenceà l’âge adulte. Pour le rôle-titre de son film, la réalisatrice Isild Le Besco a fait appel à la comédienne Julie-Marie Parmentier,qui s’est notamment illustrée en 2002 dans Marie-Jo et ses deux amours du cinéaste Robert Guédiguian, aux côtés d’ArianeAscaride et de Jean-Pierre Darroussin. _Oscar PARENGO

Après Demi-tarif en 2004, Isild Le Besco sera présente pour la projection de son second long-métrageCharly au MK2 Beaubourg, le jeudi 13 septembre à 20h.

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LE GUIDE_SORTIES DU 12 SEPTEMBRE

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KING OF CALIFORNIAUn film de Mike CAHILLAvec Michael Douglas, Evan Rachel Wood, Willis Burks II…Distribution : Metropolitan FilmExport // États-Unis, 2006, 1h35

Un an après sa performance dans The Sentinel aux côtés de Kiefer Sutherland, Kim Basinger et Eva Longoria, MichaelDouglas est aujourd’hui à l’affiche d’une comédie populaire.Après plusieurs années passées dans un hôpital psychiatrique, Charlie rentre chez lui où vit Miranda, sa fille de seizeans. Découvrant que Miranda travaille le soir dans un fast-food pour subvenir à ses besoins, il décide de tout mettre enœuvre pour lui offrir une nouvelle vie. Le voilà donc parti à la recherche d’un inestimable trésor, enfoui depuis des sièclesdans le sous-sol californien…Auteur de l’ouvrage A Nixon Man, récompensé du Pirate’s Alley Faulkner Award du Meilleur Nouveau Roman en 1999, MikeCahill fait ici ses débuts derrière la caméra. Pour son casting, le réalisateur a fait appel à une jeune comédienne prometteuse.Remarquée pour son interprétation dans Les Bienfaits de la colère où elle donnait la réplique à l’acteur Kevin Costner, EvanRachel Wood s’illustre dans King of California à travers un personnage complexe, constamment tiraillé entre enthousiasmeet scepticisme. Souvent désopilant, King of California était présenté en Ouverture du dernier Festival du Cinéma Américainde Deauville. _Florian JARNAC

LA QUESTION HUMAINEUn film de Nicolas KLOTZAvec Mathieu Amalric, Michael Lonsdale, Jean-Pierre Kalfon…Distribution : Sophie Dulac Distribution // France, 2007, 2h24

Adaptation par Élisabeth Perceval de l’ouvrage éponyme de François Emmanuel paru en 2000, La Question humaineest le cinquième long-métrage de fiction de Nicolas Klotz.À Paris, Simon, quarante ans, travaille comme psychologue au département des ressources humaines d’un complexepétrochimique, filiale d’une multinationale allemande. Un jour, le co-directeur de l’entreprise le charge d’enquêterconfidentiellement sur l’état mental du directeur général qu’il soupçonne de déficience. Dès lors, Simon va pénétrer ununivers déshumanisé qui modifiera profondément sa perception du monde et des autres…Réflexion sur les fondements historiques de l’Europe économique, La Question humaine puise son inspiration dans desouvrages importants du XXème siècle, tels que Spectres de Marx de Jacques Derrida. Réalisé trois ans après La Blessure,le film de Nicolas Klotz offre à l’acteur Mathieu Amalric le rôle complexe d’un homme confronté aux démons de l’industrialisationmoderne. Michael Lonsdale, qui partageait avec l’acteur l’affiche de Munich de Steven Spielberg en 2006, propose à sescôtés une interprétation saisissante, quelques mois après sa prestation dans Une Vieille Maîtresse de Catherine Breillat.

_T.C.

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LE GUIDE_SORTIES DU 19 SEPTEMBRE

UN CŒUR INVAINCUUn film deMichael WINTERBOTTOMAvec Angelina Jolie, Dan Futterman, Archie Panjabi…Distribution : Paramount Pictures France // États-Unis, 2006, 1h48

Déjà co-auteur avec Didier Bourdon des films Les Troisfrères, Le Pari et Les Rois mages, Bernard Campan signe icison premier film en qualité de scénariste et réalisateur.François et Isa vivent ensemble depuis des années. Alorsqu’il confie à son ami Xavier les nombreuses inquiétudesexistentielles qui le taraudent, François réalise progressivementque son couple bat de l’aile. Petit à petit, François et Isa vontapprendre à se redécouvrir, jusqu’à connaître enfin la partde l’autre qui leur était inconnue…Parfaitement écrit et maîtrisé, La Face cachée offre àBernard Campan l’occasion de révéler de réelles qualitésde metteur en scène.

_Antonin DELIMAL

Adaptation de l’ouvrage écrit par Mariane Pearl, épousedu journaliste Daniel Pearl assassiné au Pakistan en 2002,Un Cœur invaincu était en Sélection Officielle au dernierFestival de Cannes. À Karachi, alors qu’il enquête sur leterroriste Richard Reid pour leWall Street Journal, DanielPearl est assassiné, et laisse derrière lui sa femme Mariane,enceinte de six mois. Pour son fils qui ne connaîtra jamaisson père, Mariane décide alors de mener l’enquête et derelater les faits… Un an après The Road to Guantanamo et Tournage dans unjardin anglais, le réalisateur Michael Winterbottom abordele sujet sensible des reporters internationaux victimes duterrorisme. _F.J.

LA FACE CACHÉEUn film de Bernard CAMPANAvec Karin Viard, Bernard Campan, Jean-Hugues Anglade…Distribution : Wild Bunch Distribution // France, 2007, 1h33

LE MARIAGE DE TUYAUn film deWANG Quan AnAvec Yu Nan, Bater, Senge…Distribution : Pretty Pictures // Chine, 2007, 1h32

En Sélection Officielle au 60ème Festival du Film de Locarno,Nuage met en scène la rencontre insolite et bucolique dedeux personnages.Dans une maison au milieu des champs, Clara et son pèreattendent le retour de Marianne, leur mère et épouse,mystérieusement disparue. Au même moment, Simon, unjeune garçon atteint de troubles de la mémoire, envisagede rompre avec son quotidien. Bientôt, un accident de voitureva sceller le destin de nos protagonistes…Après les courts-métrages Nu devant un fantôme et LesMains d’Andréa, Nuage est la troisième collaborationdu cinéaste Sébastien Betbeder avec l’actrice NathalieBoutefeu.

_O.P.

Ours d’Or au Festival de Berlin, Le Mariage de Tuya estle troisième film du réalisateur Wang Quan An, diplôméde l’Académie du Film de Pékin. Alors qu’elle vit avec soncompagnon blessé à la suite d’un accident, Tuya se bat poursubsister avec ses enfants au cœur de la Mongolie chinoise.Afin d’améliorer son quotidien précaire, elle décide un jour dese trouver un nouveau mari, plus susceptible de répondre auxbesoins de sa petite famille. Mais ce dernier devra égalementaccepter d’accueillir son premier époux… Portrait de femme dans la Chine d’aujourd’hui, Le Mariagede Tuya était sélectionné au Festival du Film Asiatique deDeauville en 2007.NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution. _O.P.

Primé de l’Ours d’or au dernier festival de Berlin, Le Mariage de Tuya seraprésenté en avant-première au MK2 Beaubourg, lundi 17 septembre à 20h30.Le réalisateur Wang Quan’an et l’actrice principale Yu Nan seront présentspour un débat à l’issue de la séance.

NUAGEUn film de Sébastien BETBEDERAvec Adrien Michaux, Nathalie Boutefeu, Aurore Clément…Distribution : Bodega Films // France, 2007, 1h21

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ALEXANDRAUn film d’Alexandre SOKOUROVAvec Galina Vishnevskaya, Vasili Shevtsov, Raisa Gichaeva…Distribution : Rezo Films // Russie, 2007, 1h32

En Sélection Officielle au 60ème Festival International du Film de Cannes, Alexandra est la première collaborationcinématographique du réalisateur Alexandre Sokourov avec la célèbre cantatrice d’Opéra russe Galina Vishnevskaya.Au cœur de la République tchétchène, de nos jours, une grand-mère rend visite à son petit-fils, un capitaine de vingt-sept ansqui officie dans un campement de régiments russes. Durant les trois jours qu’elle passe à Grozny, Alexandra découvre ununivers exclusivement masculin, dépourvu de confort, où la misère règne en maîtresse. Pourtant, malgré la précarité desconditions de vie et la mort qui menace, les soldats en fonction n’en sont pas moins restés des êtres humains…Tourné intégralement en décor naturel entre les villes de Grozny et de Khankala, où les garnisons russes sont toujourscantonnées, le film d’Alexandre Sokourov échappe aux poncifs traditionnels du film de guerre. Par souci de réalisme, lecinéaste a privilégié la brièveté des dialogues dans son scénario, et invité ses interprètes à l’improvisation spontanée. Enévitant la mise en scène d’opérations militaires, Alexandra concentre son propos sur les rapports singuliers qui lient sesprotagonistes.

_O.P.

TOUT EST PARDONNÉUn film deMia HANSEN-LOVEAvec Paul Blain, Marie-Christine Friedrich, Constance Rousseau…Distribution : Pyramide Distribution // France, 2007, 1h45

Prix Junior du Meilleur Scénario en 2006, Regarde moi estle premier long-métrage de la jeune réalisatrice AudreyEstrougo.Dans la banlieue parisienne, plusieurs personnages ausortir de l’adolescence recherchent un équilibre dans leurquotidien. Parmi eux, Mouss aimerait concrétiser sarelation avec Daphné. Yannick veut reconquérir la belleMelissa. Quant à Fatimata et Julie, elles se disputent lescharmes de Jo, un joueur en formation au football clubd’Arsenal…Après ses courts-métrages Et que ça saute! et Une Histoire,Audrey Estrougo confirme sa singularité. Pertinent, Regardemoi a remporté le Prix Talents des Cités 2005.

_T.C.

En Sélection à la Quinzaine des Réalisateurs au Festivalde Cannes, Tout est pardonné étudie la relation complexed’un homme et d’une femme aux caractères radicalementopposés. Victor habite Vienne avec Annette et leur petitefille Pamela. Alors que son compagnon la néglige en passantl’essentiel de ses nuits dehors, Annette lui propose deretourner en France afin de donner un nouvel élan à leurunion. Mais de retour à Paris, Victor reprend ses mauvaiseshabitudes. Très vite, il entame une liaison avec une autrefemme…Actrice devant la caméra d’Olivier Assayas, notammentdans Les Destinées sentimentales, Mia Hansen-Love réaliseici un premier film extrêmement touchant.

_F.J.

REGARDE MOIUn film d’Audrey ESTROUGOAvec Émilie de Preissac, Eye Haidara, Terry Nimajimbe…Distribution : Gaumont // France, 2006, 1h33

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LE GUIDE_SORTIES DU 26 SEPTEMBRE

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99 FRANCSUn film de Jan KounenAvec Jean Dujardin, Jocelyn Quivrin, Patrick Mille, Vahina Giocante…Distribution : Pathé Distribution // France, 2006, 1h40

Pour surmonter la médiocrité de son quotidien, Jean-Marc, un père de famille peu en phase avec le monde quil’environne, se berce de fantasmes récurrents. Se rêvanttour à tour en vedette de cinéma, président de région, lauréatde prix littéraires et adulé par de jeunes femmes sensuelles,il n’en est pas moins un quidam parmi les hommes. Jusqu’aujour où, suite à sa rencontre avec Béatrice de Savoie, il décidede faire face à ses démons…Après le succès des Invasions barbares, Denys Arcand réaliseune comédie dramatique enlevée, en Sélection Officielle HorsCompétition au dernier Festival de Cannes.

_A.D.

Pensée comme une campagne de pub, l’adaptation du romande Beigbeder ne devrait pas être déceptive.En conservant 99Francs comme titre, le film capitalise intelligemment sur lesparts de marché déjà conquises par le best-seller. Le choixdu réalisateur est également judicieux car, si Jan Kounenn’a pas la poésie d’un Michel Gondry, il connaît son sujet etsait réaliser des plans cut efficaces. Jean Dujardin, l’acteurprincipal, est quant à lui parfait car non-segmentant. Le filmdevrait donc, en toute logique, pouvoir compter sur un publiccaptif assez important, voire recruter plus largement, fonctiondu plan media mis en place. Un bon indice de succès : cela faitdéjà longtemps que le buzz a commencé.

_F.V.

L’ÂGE DES TÉNÈBRESUn film de Denys ARCANDAvec Marc Labrèche, Diane Kruger, Emma de Caunes…Distribution : Studio Canal // Canada, 2007, 1h48

À VIFUn film de Neil JORDANAvec Jodie Foster, Terrence Howard, Naveen Andrews…Distribution : Warner Bros. France // États-Unis, 2007, 2h02

Sélectionné au Festival du Cinéma Américain de Deauville,7h58 ce samedi-là est le nouveau long métrage de SidneyLumet – réalisateur de plus de quarante films depuis Douzehommes en colère en 1957.Dans la banlieue de New York, Hank Hanson peine à s’acquitterdes nombreuses dettes qu’il a contractées depuis son divorce.Entraîné par son frère Andy à envisager une solution illégale,il se décide bientôt à cambrioler la bijouterie familiale…Entre mélodrame et thriller, 7h58, ce samedi-là offre à SidneyLumet l’occasion de renouer avec un registre qu’il apprécieparticulièrement depuisUn Après-midi de chien, qui mettaiten scène Al Pacino en 1975. _A.D.

Victime d’une violente agression à New York, une femmetente de se remettre tant bien que mal de ses traumatismes.Peu à peu, germe en elle l’idée de vengeance…Dix-neuf ans après Les Accusés de Jonathan Kaplan, danslequel elle campait une jeune femme victime d’un viol quis’en remet à la justice pour punir les coupables, l’actriceaméricaine Jodie Foster s’illustre dans un thriller urbain.Lauréat de l’Oscar® du Meilleur Scénario Original en 1992pour son film The Crying Game qui réunissait les acteursForest Whitaker et Miranda Richardson, le réalisateur NeilJordan interroge ici les mécanismes de la loi du Talion.NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution. _T.C.

7H58, CE SAMEDI LÀUn film de Sidney LUMETAvec Philip Seymour Hoffman, Ethan Hawke, Marisa Tomei…Distribution : UGC Ph // États-Unis, 2007, 1h55

LE GUIDE_SORTIES DU 26 SEPTEMBRE

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L’ENNEMI INTIMEUn film de Florent-Émilio SIRIAvec Benoît Magimel, Albert Dupontel, Aurélien Recoing…Distribution : SND // France – Maroc, 2006, 1h48

LE GUIDE_SORTIES DU 03 OCTOBRE

Après Une Minute de silence et Nid de guêpes, L’Ennemi intime est l’occasion pour le cinéaste Florent-Émilio Siri demettre une nouvelle fois en valeur l’acteur Benoît Magimel.En 1959, au cœur de l’Algérie, les opérations militaires s’intensifient. Dans les hautes montagnes kabyles, Terrien, unlieutenant idéaliste, prend le commandement d’une section de l’armée française. Amené à faire la connaissance duSergent Doulac, un militaire désabusé, le jeune homme ne tarde pas à se confronter à la dure réalité du conflit…Sur un scénario du documentariste Patrick Rotman, auteur de Jorge Semprun – L’Ecriture ou la vie ou FrançoisMitterrand – Le Roman du pouvoir, L’Ennemi Intime se veut, selon les termes précis de son réalisateur, à la fois «épiqueet intimiste». Deux ans après Otage qui plongeait le comédien Bruce Willis dans le milieu du banditisme de Los Angeles,Florent-Émilio Siri change de registre pour réaliser une fresque réaliste et documentée. Maîtrisé, L’Ennemi intime renoueavec la veine de films tels que La 317ème section tourné en 1964 par Pierre Schoendoerffer, Apocalypse Now de FrancisFord Coppola ou encore Voyage au bout de l’enfer réalisé par Michael Cimino en 1979.

_A.D.

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LE DERNIER VOYAGE DU JUGE FENGUn film de LIU JieAvec Li Baotian, Yang Yaning, Lu Yulai…Distribution : Pierre Grise Distribution // Chine, 2006, 1h41

En Compétition Officielle à la Mostra de Venise en 2006, Le Dernier Voyage du juge Feng y a reçu le Prix Horizons.À travers les routes montagneuses du sud ouest de la Chine, un tribunal ambulant suit sa tournée annuelle. Accompagnésd’un unique cheval pour supporter toutes leurs affaires, le vieux juge Feng, sa greffière Yang et le jeune apprenti Ah-Luoaccomplissent un voyage peu ordinaire à travers les paysages de la Chine rurale. Entre les lois ancestrales des minoritésethniques, la justice d’État et la sagesse paysanne, la petite troupe doit faire face à de nombreux conflits. Hélas, le jugeFeng commence à devenir trop vieux pour sa charge… Illustration d’un aspect méconnu du système judiciaire en activité en Chine, où près d’un millier de cours ambulantessillonnent le territoire en permanence, Le Dernier Voyage du juge Feng s’inspire d’une histoire réelle s’étant déroulée il ya quelques années dans le canton de Ninglang. Ancien directeur de la photographie du cinéaste Wang Xiaoshuai, ayantnotamment collaboré avec ce dernier sur le tournage de Beijing Bicycle en 2000, le réalisateur Liu Jie signe avecLe Dernier Voyage du juge Feng un premier long-métrage étonnant.

_T.C.

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37 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

DÉSIR(S)Un film de Valeska GRISEBACHAvec Andreas Müller, Ilka Welz, Anett Dornbusch...Distribution : Bodega Films // Allemagne, 2006, 1h28

En Sélection Officielle au Festival Paris Cinéma en 2006, Désir(s) était également présenté en Compétition lors de la56ème Berlinale. À Berlin, Markus est un serrurier-mécanicien engagé de temps à autres parmi les pompiers volontaires de son quartier. Mariéà Ella, une jeune femme investie dans la chorale locale, il file le parfait amour. Le jour où, envoyé en stage de formation dans uneville voisine, il fait la connaissance de Rose, une séduisante serveuse, son équilibre vacille. Tiraillé par la culpabilité et son amourinchangé pour sa compagne, il est bientôt rongé par le désespoir. Mais peut-on se soustraire aux pièges de la passion ?Pur produit de l’Ecole de Berlin qui incarne depuis quelques années le renouveau du cinéma allemand, Désir(s)met en scènedes acteurs non-professionnels, recrutés au hasard des pérégrinations de la réalisatrice dans les fêtes de villages desenvirons de la capitale germanique. Portrait d’un héros ordinaire et romantique en proie à des pulsions contradictoires, lefilm de Valeska Grisebach démontre, après le succès de La Vie des autres du cinéaste Florian Henckel von Donnersmarck,la qualité du cinéma contemporain d’outre-Rhin.

_O.P.

UN SECRETUn film de Claude MILLERAvec Cécile de France, Patrick Bruel, Ludivine Sagnier…Distribution : UGC Distribution // France, 2006, 1h40

Nouveau documentaire de Nicolas Philibert après Être etavoir, Retour en Normandie était en Sélection au dernierFestival de Cannes.En 1975, Nicolas Philibert est un jeune assistant réalisateursur le tournage du film de René Allio Moi, Pierre Rivière,ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère…, récit d’unfait divers authentique survenu en Normandie au XIXème

siècle. Alors qu’il se remémore la tragédie ayant inspiré unsiècle plus tard des philosophes de renom tels que MichelFoucault, le cinéaste décide de retourner dans la région,à la recherche des acteurs éphémères ayant pris part àcette production, plus de trente ans auparavant…

_T.C.

Adaptation du roman de Philippe Grimbert, Un Secretévoque le parcours intérieur de son protagoniste, quidécouvre un jour un lourd secret de famille.Enfant solitaire dans les années 1950, François s’inventeun frère imaginaire. Peu en adéquation avec les attentesde son père qui l’aurait souhaité plus sportif, le jeunegarçon s’imagine le passé mystérieux de ses parents, pourtenter de mieux les comprendre. Jusqu’au jour où, à l’occasionde ses quinze ans, une amie de la famille se décide finalementà lui confier la vérité…Quatre ans après La Petite Lili, Claude Miller met unenouvelle fois en scène l’actrice Ludivine Sagnier.

_F.J.

RETOUR EN NORMANDIEUn film de Nicolas PHILIBERTDocumentaireDistribution : Les Films du Losange // France, 2006, 1h53

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38 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

L’ASSASSINAT DE JESSE JAMESUn film d’Andrew DOMINIKAvec Brad Pitt, Casey Affleck, Sam Shepard…Distribution : Warner Bros France // États-Unis, 2007, 2h39

Librement adapté du roman homonyme de Marie Desplechinparu en 1999, Sans moi est le premier long métrage de fictiond’Olivier Panchot, après son documentaire Secret de familleréalisé en 2003. Afin de l’aider à s’occuper de ses deux enfants, Anna, unejeune mère divorcée, engage Lise, une baby-sitter. Rapidementintroduite dans l’univers d’Anna, Lise ne tarde pas à devenirindispensable au petit cercle familial. Mais bientôt, Annadécouvre que son hôte est la proie de dangereuses passions...Saisissant et maîtrisé, Sans moi révèle l’actrice ClémencePoésy, qui s’est illustrée l’année dernière dans Le GrandMeaulnes de Jean-Daniel Verhaeghe.

_F. J.

Déjà partenaires dans Ocean’s 13 de Steven Soderbergh,les acteurs Brad Pitt et Casey Affleck partagent ici l’affiched’un western historique.Alors que sa tête est mise à prix et qu’il prépare son prochainhold-up, Jesse James se promet de mener la vie dure àquiconque tenterait de l’éliminer pour s’enrichir. Banditredouté dans tout le pays, le charismatique hors-la-loi saitque la menace pourrait venir de son entourage. Autour de lui,l’admiration se teinte souvent de jalousie…Hasard ou coïncidence, la sortie de L’Assassinat de JesseJames est synchrone avec le 160ème anniversaire de lanaissance du brigand mythique : le 5 septembre 1847.NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution. _F.J.

SANS MOIUn film d’Olivier PANCHOTAvec Yaël Abecassis, Clémence Poésy, Éric Ruf…Distribution : Haut et Court // France, 2006, 1h30

SA MAJESTÉ MINORUn film de Jean-Jacques ANNAUDAvec José Garcia, Vincent Cassel, Sergio Peris-Mencheta…Distribution : StudioCanal // France, 2006, 1h41

Nouveau film du cinéaste Jean-Jacques Annaud, Sa Majesté Minor est un récit imaginaire d’inspiration mythologique.Dans l’antiquité lointaine, sur une île perdue au large de la mer Égée, Minor, mi-homme, mi-cochon, orphelin et muet,vit paisiblement dans la douce tiédeur de sa porcherie. Un jour, lors d’une escapade au cœur de la forêt, il passe de vieà trépas à la suite d’un accident. Mais alors qu’on le tient pour mort, Minor revient brutalement à la vie. Désormais douéd’un incroyable sens de l’éloquence, il est sacré roi par les villageois…Un an après sa performance saisissante dans Pars vite et reviens tard de Régis Wargnier où il donnait la réplique auxacteurs Lucas Belvaux et Marie Gillain, José Garcia signe sa première collaboration avec le réalisateur de Stalingrad.À ses côtés, Vincent Cassel – qui s’illustrera prochainement dans L’Ennemi public numéro un de Jean-François Richet –retrouve le comédien Sergio Peris-Mencheta, trois ans après avoir partagé avec lui l’affiche d’Agents Secrets deFrédéric Schoendoerffer. Quant à Claude Brasseur, il confirme l’étendue de son registre, quelques mois après le succèsde Camping de Fabien Onteniente.NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution. _O.P.

LE GUIDE_SORTIES DU 10 OCTOBRE

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ÉVÉNEMENTS DES SALLES MK2

TOUS LES SAVOIRS

Le Festival Européen des 4 Écrans est le premier festivalexclusivement consacré aux productions européennesd’images axées sur les faits réels de société contemporains.Découvrez ce que l’Europe produit de mieux commedocumentaires, reportages, docu-drama et fictions duréel : 45 programmes européens de la télévision inéditsen France seront projetés dont 16 sont en compétitionpour décrocher l’Écran d’or. Et participez aux débats de l’Université de l’image : troisjours pour décrypter les images, leur pouvoir et leurévolution. MK2 BIBLIOTHÈQUE _Jeudi 27 et vendredi 28 de 11h à minuit et samedi29 septembre de 10 h à minuit _ 5 € (1 séance) / 15 € (6 séances).Bibliothèque Nationale de France, 13 Quai François Mauriac 75013 Paris.www.festival-4ecrans.eu / www.mk2.com

LE FESTIVAL EUROPEEN DES 4 ÉCRANSCiné, Télé, Net, Mobile : les images du réel s’affrontent.

FOCUS

Il était une fois trois fables dont les oiseauxsont les héros... réalisées par Morteza AhadiSarkani, Mohammad Ali Soleymanzadehet Abdollah Alimorad, venez découvrir enavant-première Le Corbeau et un drôle

de moineau.MK2 NATION_Dimanche 30 septembre à 11h_3 €_à partir de 3 ans.

AVANT-PREMIÈRELE CORBEAU ET UN DRÔLE DE MOINEAU

Pour cette nouvelle programmation, venezvoir ou revoir Little Miss Sunshine deJonathan Dayton et Valerie Faris, Zaziedans le métro de Louis Malle, Ü deGrégoire Solotareff, La Belle et la Bête de

Jean Cocteau, Manue Bolonaise de Sophie Letourneur, LeCheval de Saint-Nicolas de Mischa Kamp, La Reine Soleilde Philippe Leclerc. Les enfants vont enfin emmener leursparents au cinéma! Jusqu’au 25 septembre 2007 dans sept salles MK2. A partir du 26 septembre, venez découvrir la nouvelle programmation,Vole, mon ange, dans sept salles MK2.

MK2 JUNIOR « OH LES FILLES, OH LES FILLES ! »

Représentation du Théâtre Guignol desChamps Elysées par José Gonzalez, à lalibrairie du MK2 Quai de Loire. Chaquereprésentation sera suivie d'une rencontre-dédicace avec José Gonzalez autour de

ses livres pour la jeunesse : La Promenade mouvementée etLe Voleur volé (éditions du Seuil) et du DVD Le Guignolistedes Champs-Elysées, réalisé par Olivier Taïeb.À la librairie MK2 QUAI DE LOIRE_Mercredi 19 septembre à 16h et 17h30.

L'APRÈS-MIDI AVEC GUIGNOL

POUR LES ENFANTS

40 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

MK2 QUAI DE SEINE_Mardi 2 octobre à 20h30 - 6,90 € ou 5,60 €sur présentation du dernier numéro de Courrier international.

Tous les mois, l’hebdomadaire Courrierinternational vous donne rendez-vousavec les journalistes de sa rédaction,pour traiter un sujet d’actualité autourd’un documentaire étranger. • Goal Dreams, des cinéastes Maya

Sanbar (Palestine) et Jeffrey Saunders (États-Unis). Le documentaire sera diffusé en présence de la réalisatrice etd’Olivier Bras, responsable Internet de Courrier international.

LES MARDIS DE COURRIER INTERNATIONAL

VALERIAN ET LAURELINEpar Pierre Christin et Jean-Claude Mézières

CINÉ BD

Un samedi matin par mois, en partenariatavec les éditions Dargaud, des auteurs debande dessinée présentent un film de leurchoix en salle, puis dédicacent leur ouvrageà la librairie. À l'occasion du lancement dudessin animé inspiré par cette série mythique,les trois premières aventures de nos deux

agents spatio-temporels sont regroupées dans cette superbeintégrale, accompagnées d'un cahier inédit rédigé par lespécialiste incontesté de la science-fiction, Stan Barets.

Au cinéma puis à la librairie du MK2 QUAI DE LOIRE

• Projection du filmWelcome to Gattaca d'Andrew Niccol,choisi et présenté par les auteurs.

LE RENDEZ-VOUS DES DOCSTous les derniers lundis du mois, enpartenariat avec l’association Documentairesur Grand Écran, un auteur ou un écrivainde cinéma vient présenter un film de sonchoix, et débat à l’issue de la projectionsur les enjeux esthétiques et politiquesdu documentaire.

• Douleurs, de Stephen Dwoskin . La séance sera suivied’un débat avec Christa Blümlinger, enseignante etchercheuse en cinéma à l’université Paris III.MK2 QUAI DE LOIRE_Lundi 24 septembre à 20h30 - 6,90 € et 5,60 €pour les adhérents de l’association Documentaire sur Grand Écran. Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.

LES YEUX DE L’OUÏE L’atelier vidéo de la prison de la Santéet l’association Les yeux de l’ouïe vousprésentent The World de Jia Zhang-Kesuivi d’une analyse du film par les détenusde l’atelier vidéo de la prison de la Santé.

Ces projections seront complétées par un débat.MK2 BEAUBOURG_Jeudi 27 septembre à 20 _6,80 €.

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RETROUVEZ TOUS LES ÉVÉNEMENTS SUR

RENCONTRES - LIBRAIRIES

CYCLES EN MATINÉES

41 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

• Nostalghia (1983) • Stalker (1979)• Le Miroir (1974) • Solaris (1972) • L’Enfance d’Ivan (1962).

MK2 BEAUBOURG_ depuis le 1er septembre.

ANDREÏ TARKOVSKI

Nosferatude Friedrich Wilhelm Murnau(1922), Vampyr de Carl Theodor Dreyer(1932), Le Cauchemar de Dracula deTerence Fisher (1958), Le Bal desvampires de Roman Polanski (1968),

Dracula de Francis Ford Coppola (1992). MK2 QUAI DE SEINE_à partir du 13 octobre.

VAMPIRES

Syndromes and a Century d’Apitchapong WeerasethakulMK2 HAUTEFEUILLE_à partir du 5 octobre.

CARTE BLANCHE À CLAUDE REGY

Demonlover d’Olivier Assayas , Exilé de Johnnie To, IrmaVep d’Olivier Assayas (sous réserve).MK2 HAUTEFEUILLE_depuis le 5 septembre.

LES HUMEURS DIGITALES

COURT-MÉTRAGE

Sur place de Justine Triet, En service de Cyril Brody,2006 et Company of Mushrooms de Tan Chui Mui. MK2 BIBLIOTHÈQUE_Mardi 25 septembre à 20h30.

SAISONS NUMÉRIQUES N°16DÉCADRAGES DOCUMENTAIRES

MK2 Livres et les éditions Albin Michel vous invitentà rencontrer Amélie Nothomb à l’occasion de laparution de son nouveau livreNi d’Ève ni d’Adam.À la librairie MK2 LIVRES_Samedi 13 octobre de 16h00 à 18h00. 128-162, avenue de France 75013 Paris.

AMÉLIE NOTHOMB

Rencontre-dédicace avec Philippe Adam autourde son livre France audioguide, aux éditionsInventaire / Invention. La rencontre sera suiviede la projection de Bande à part de Jean-LucGodard à 20h30.

À la librairie et au cinéma MK2 QUAI DE LOIRE_Jeudi 27 sept. à partir de 19h.

PHILIPPE ADAM

MK2 Livres et les éditions P.O.L vous invitent à rencontrerLouise Desbrusses à l’occasion de la parution de son nouveaulivre Couronnes boucliers .À la librairie MK2 LIVRES _Samedi 6 octobre à 17h00.

LOUISE BESBRUSSES

MK2 Livres et Isthme éditions vous proposent une rencontreautour du livre de Pascale Cassagnau Future Amnesia, enquêtessur un troisième cinéma. Cette rencontre sera précédée deMarfa Mystery Lights, a Concert for the UFO’s en présencedu réalisateur Charles de Meaux. À la librairie MK2 LIVRES_Jeudi 27 sept. Projection à 19h, débat à la librairie à 20h30.

PASCALE CASSAGNAU

Carte blanche à l'écrivain Karim Madani àl'occasion de la parution de Hip-Hop Connexion(collection Exprim', pour 15 / 25 ans, éditionsSarbacane). •11h_projection de The King of New York, d'Abel

Ferrara suivie d'une lecture de Hip-Hop Connexion et d'undébat avec l'auteur. • 15h_rencontre-dédicace à la librairie du MK2 Quai de LoireMK2 QUAI DE LOIRE_Samedi 15 sept. à partir de 11h.

KARIM MADANI

Pour leur 17ème édition, les Puces du Designs’associent aux cinémas MK2 pour rendrehommage à la vision du design de Jacques Tatidans son film de 1958 Mon Oncle. • Projection de Mon Oncle de Jacques Tati

suivie d'une rencontre avec Stéphane Goudet auteur deJacques Tati ; de François le facteur à monsieur Hulot (auxCahiers du cinéma) et co-auteur avec Macha Makeieff dePlaytime, et de l'illustrateur pour la jeunesse David Merveillepour son livre Le Jacquot de Monsieur Hulot aux éditionsdu Rouergue.La rencontre sera suivie d'une dédicace avec les troisauteurs à la librairie à 14h.MK2 QUAI DE LOIRE_Samedi 13 octobre à 11h_5,90 €Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées. Puces du Design : les 12, 13 et 14 octobre 2007, sur les Quais de Loire.

JACQUES TATI ET LE DESIGN

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MK2 BASTILLE 4 boulevard Beaumarchais 75011 Paris (métro Bastille), MK2 BEAUBOURG 50 rue Rambuteau 75003 Paris (métro Rambuteau / Les Halles), MK2BEAUGRENELLE 16 rue Linois 75015 Paris (métro Charles-Michel), MK2 HAUTEFEUILLE 7, rue Hautefeuille 75006 Paris (métro Saint-Michel), MK2 ODÉON 113, Bd StGermain 75006 Paris (métro Odéon), MK2 PARNASSE 11 rue Jules Chaplain 75006 Paris (métro Vavin), MK2 GAMBETTA 6 rue Belgrand 75020 Paris (métro Gambetta),MK2 NATION 133 boulevard Diderot 75012 Paris (métro Nation), MK2 QUAI DE LOIRE 7 quai de la Loire 75019 Paris (métro Jaurès), MK2 QUAI DE SEINE 14 Quai de laSeine 75019 Paris (métro Stalingrad), MK2 BIBLIOTHÈQUE 128-162 avenue de France 75013 Paris (métro Bibliothèque ou Quai de la Gare)

ÉVÉNEMENTS DES SALLES MK2

OÙ TROUVER TROISCOULEURS?LIEUX DE DISTRIBUTION

MODE

CULTURE

RESTAURANTS, BARS, CLUBS

ÉCOLES

COMMUNICATION

PRÉSENTOIR

CINÉMAS MK2

Vous souhaitez distribuer TROISCOULEURS, envoyez un mail à : [email protected]

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PARTENARIAT

CARTE BLANCHE À CLAUDE RÉGYÀ l’occasion d’Homme sans but d’Arne Lygre, mis en scènepar Claude Régy du 27 septembre au 10 novembre 2007 auxAteliers Berthier, projection de Gerry de Gus Van Sant enprésence de Claude Régy. MK2 HAUTEFEUILLE_Lundi 08 octobre à 20h30_6.80?Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.

L’ODÉON THÉÂTRE DE L’EUROPE

À l’occasion des représentations de La Passion selon Jeand’Antonio Tarantino dans une mise en scène de SophieLoucachevsky au théâtre de la Colline (du 22 sept. au 21 oct. 07),projection exceptionnelle du film La Peurde Roberto Rossellini,en présence de l’équipe artistique du spectacle. MK2 QUAI DE LOIRE_Lundi 8 octobre à 20h30_ 6,90 €, Cartes ILLIMITé et LePass acceptées. 5€ pour les abonnés du théâtre de la Colline (les détenteursd’une carte MK2 auront de leur côté droit à une place à 19 € au lieu de 27 €pour la pièce, dans la limite des places disponibles).

LE THÉÂTRE DE LA COLLINE

AUTOUR DU CINÉMA

Après les trois premières éditions,c’est de nouveau La Rentrée duCinéma dans toutes les salles MK2du 16 au 23 septembre 2007. Pourprofiter pleinement du cinéma,pour toute place achetée, la secondeest à 1 € pour la personne vousaccompagnant pour le même filmet la même séance. La rentrée atout à coup un air de fête.

Du dimanche 16 au dimanche 23 sept. 2007 dans toutes les salles MK2.

LA RENTRÉE DU CINÉMA

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Voir double

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DVD Quand le cinéma rencontre la photographie

La sortie en DVDd’un coffret de courts-métragesd’Agnès Varda, réalisatrice et photographede haut vol, est l’occasion de revenir sur lescroisements entre le cinéma et la photographie.D’un objectif à l’autre, les regards convergentplus souvent qu’il n’y paraît.

ou dans celle du cinéaste, voire l’un et l’autre. On noteracependant que tous ces photographes convertis au cinémasont souvent au meilleur d’eux-mêmes quand ils ne s’éloignentpas trop de leur passion d’origine. Dans le merveilleux PollyMaggoo de William Klein, le personnage principal est unmannequin harcelé par des photographes de mode. DansSan Clemente, un des plus beaux documentaires de Depardon,les photos de «fous» sont comme des portraits.On remarquera aussi que du cinéma à la photo (et retour),c’est la graphie qui fait le lien. De l’un à l’autre, le geste decadrer est le même, qui consiste à découper le réel, lesélectionner, trancher et retrancher de l’image tout ce qui nedoit pas y figurer. Ciné, photo, entre les deux le cœur doit-ilbalancer? C’est «l’infernale» Varda qui une fois de plus brouillebénéfiquement le rapport. En 1983 pour la chaîne de télé

e cinéma et la photographie seraient-ils comme lescélèbres Pince-mi et Pince-moi ? Dans le mêmebateau mais avec la conclusion fatale que l’un desdeux, un jour ou l’autre, tombera à l’eau. Sans oublier

que le triomphe du rescapé est provisoire puisque Pince-moi, ça peut faire très mal. Il est vrai que longtemps photoet ciné se regardèrent en chien de faïence. Cela vient peut-être qu’en France – qui, au XIXème siècle, a vu naître les deuxen quelques décennies – le cinéma est masculin et laphotographie féminine, comme pour dire que le premieraurait été engendré par le second. Il est simple en effetd’imaginer que le cinéma est venu d’une envie que ça bouge,que se mettent en marche tous les petits bonhommes que lesplaques photographiques venaient à peine de fixer, que l’onvoit le vent remuer les feuilles des arbres, que l’on entendentbientôt le chant des oiseaux et qu’un jour prochain, enfin, selève le bel aurore de la couleur. Les frères Lumière le savaient

bien qui furent autant des industriels de la photographieque les réalisateurs du premier film de cinéma.Mais la chronologie n’est pas forcément bonne conseillère.Et le rapport de cause à effet entre photographie et cinéman’est sûrement pas aussi net. Il suffit de lire Agnès Varda,cas typique de cinéaste-photographe. Dans son livreautobiographique, Varda par Agnès (éditions Cahiers ducinéma), elle donne cette définition : «La photographie, c’estle moment arrêté, ou le moment intérieur inachevé. Le cinéma,lui, propose une série de photographies successives dans unedurée qui les anime.» Meli-mélo dirait-on. Et ça se compliquedélicieusement quand la photographie est le ressort de filmsfameux : Le Voyeur de Michael Powell où l’appareil photoest l’arme du crime, ou encore le Blow Up d’Antonionidont le héros est un photographe et le ressort, une sombreaffaire d’agrandissement (« blow-up » en anglais). Maisbien évidemment l’épreuve du «choisi ton camp camarade»devrait plus directement concerner les photographes parfoiscélèbres devenus des cinéastes non moins virtuoses. Laliste n’est pas exhaustive mais prestigieuse : outre Varda,Raymond Depardon, Henri Cartier-Bresson, Larry Clark,William Klein, David Hamilton... Chacun jugera à sa fenêtres’il préfère tous ces artistes dans la position du photographe

L

DU CINÉMA À LA PHOTO, LE GESTEDE CADRER EST LE MÊME, QUI CONSISTEÀ DÉCOUPER ET TRANCHER LE RÉEL. “ “

Extraits de courts-métrages et de l’émission Une Minute pour une image d’Agnès Va

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ACTUALITÉ ZONE 1D'ores et déjà, 2007 est l'année William Friedkin. Aprèsun come-back remarqué avec l'excellent Bug, son filmculte Cruising est enfin édité chez Warner et fait figured'événement. Dans ce polar malsain, Al Pacino incarne unflic à la recherche d'un serial killer dans le milieu interlopedes bars gays. Le film fait le lien avec d’autres œuvresmarquantes du cinéaste, comme French Connection, pourle côté urbain proche du documentaire, ou L'Exorciste,pour cette manière de représenter le mal absolu avec un brioinégalé. À noter également la réédition d’un autre chefd’œuvre des années 1970, Delivrance de John Boorman,en copie remasterisée.

_Roland JHEAN

45 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

LA SÉLECTIONLETTRES D’IWO JIMA DE CLINT EASTWOOD Warner Bros

Inscrit dans un diptyque, Lettres d’Iwo Jimarelate un désastre guerrier, abordé du pointde vue de Japonais en sursis. Une plongéesaisissante dans une culture de la mort.

THE HOST DE BONG JOON-HO TF1 VidéoUn monstre colonise les fonds marins etoblige une famille à se solidariser. Sous lacomédie point un redoutable brûlot politique.L’un des plus gros succès du cinéma coréen.

INLAND EMPIREDE DAVID LYNCH StudioCanal

Des comédiens, un film maudit, quelqueslapins et David Lynch aux commandes d’unnouveau cauchemar éveillé, entièrementtourné en vidéo. Un film-laboratoire radical.

BLACK BOOKDE PAUL VERHOEVEN Pathé VidéoPortrait d’une femme en résistance dansles turbulences de la guerre, pour quisurvivre devient non plus une expérienceindividuelle mais collective. Chef d’œuvre.

MINNIE ET MOSKOWITZDE JOHN CASSAVETESMK2 Éditions

Transcendé par de grands acteurs (SeymourCassel, Gena Rowlands) et par la tendresse dela caméra de Cassavetes, Minnie et Moskowitz,comme ses personnages, se laisse aimer,presque malgré lui. Troublant et attachant.

FR3, elle inventait Une Minute pour une image, albumimaginaire où pendant la minute impartie, une voix, célèbreou inconnue (Marie Piednoir, boulangère, MargueriteDuras, écrivain) commentait une photographie. Maisl’intérêt supplémentaire du dispositif manigancé parVarda, c’est qu’il mélangeait les deux visions : filmerdes images fixes, c’est-à-dire, dixit Varda, «ajouter àl’image fixe la proposition de la regarder selon unedurée déterminée ». Enfin, comme le gant n’en finitpas de se retourner, il est patent qu’aujourd’hui, de laphotographie au cinéma, le pont est franchi dans l’autresens. Le meilleur de la photo contemporaine, sa part laplus artiste, vient le plus souvent du désir curatif quecesse un instant la gesticulation des images, pour quel’arrêt sur image redevienne littéralement une extase.

_Gérard LEFORT

rda, inclus dans le coffret DVD Varda Tous Courts (Ciné-Tamaris).

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LIVRES Rencontre avec Éric Reinhardt

De l’avis général, Cendrillon d’Éric Reinhardt est le roman-clé de la rentrée littéraire.Un livre fleuve, où l’auteur se met littéralement en quatre, se scinde en quatre doublesà la fois drôles et inquiétants. Nous avons rencontré l’un d’entre eux.

Tout conte fait

46 I TROIS COULEURS_SEPTEMBRE 07

’est un planqué. Un insoupçonnable. Si sa photone servait de bandeau à son livre, si ses yeuxclairs, son nez aquilin et sa barbe de trois joursne s’affichaient un peu partout à l’occasion de

cette rentrée littéraire, on aurait beaucoup de mal à fairecoïncider l’Éric Reinhardt gentil et un peu timide qui setient là, dans la chambre de bonne qui lui sert de bureau,avec l’Éric Reinhardt écrivain. La dureté, le goût dusarcasme et de l’« hénaurme » qu’il déploie... Ça colledifficilement. Son ancienne voisine du quatrième – il adéménagé entre temps – serait surprise si elle venait àouvrir Cendrillon, son quatrième roman, et à découvrir ledrôle de rôle qu’il lui a offert. Imaginer la scène amused’ailleurs beaucoup l’auteur. Ce que l’on a du mal à imaginer, c’est que cet hommeapparemment si doux ait pu se projeter dans les trois« avatars synthético-littéraires » qu’il s’invente dansCendrillon. Ce sont trois destins qui auraient, dit-il, pul’attendre à la sortie de son enfance et de son adolescences’il n’avait rencontré la femme de sa vie, il y a dix-sept ans.Laurent Dahl est le financier de haut vol qu’aurait pu devenircet ex-étudiant en école de commerce ; Thierry Trockel, legéologue qui s’évade par la pornographie sur Internet ; etpuis il y a Patrick Neftel, « le paria solitaire,le perdant radical ». Une sorte de frère deRichard Durn, traumatisé par le suicide deson père, qui passe ses journées à boiredes bières et à se branler devant la télé,avant de se décider à passer à l’acte, devant des caméras.En revanche, on superpose facilement sa voix posée etson regard clair à l’Éric Reinhardt personnage de roman –quatrième figure de Cendrillon, le traqueur d’«épiphanies »,le fan de l’automne et du Palais Royal, le passionné deMallarmé et de Breton (Un Coup de dés jamais n’abolira lehasard et Nadja trônent en bonne place près de son bureau),l’ami et admirateur du chorégraphe Angelin Preljocaj (unephoto de ballet est affichée sur le mur), le fétichiste deschaussures Christian Louboutin (trois sublimes exemplairesornent le rebord de la cheminée) et, surtout, le compagnonéperdument amoureux de Margot, sa «reine» et la mère deses deux enfants.En fait, avec Cendrillon, tout se passe comme si ÉricReinhardt, 42 ans, avait réussi à faire coïncider toutes sesidentités, toutes ses aspirations. À réconcilier sa douceuret sa cruauté, ses obsessions les plus dures et ses rêvesles plus merveilleux. De même que tout bon conte associele drame (pour l’originel Cendrillon : le fait d’être orpheline,

réduite en simili-esclavage par sa marâtre) à la féerie.Cendrillon – le sien – est né, raconte-t-il, d’une « trèsbanale crise de la quarantaine », qu’il « avait toujours rêvéd’éviter ». «J’ai eu 40 ans, et j’ai eu envie de faire le point,dit-il. De récapituler tout ce que j’avais fait jusqu’à présent.J’ai eu envie de faire un livre sur moi, un livre qui diraitqui je suis et constituerait en même temps une sorte d’artpoétique, expliquant pourquoi mes livres sont écrit commeils le sont. Cependant, le territoire d’un tel projet meparaissait étroit. J’avais aussi envie de parler du monde etdes thèmes qui me violentent, me font réfléchir. Et, en mêmetemps, l’idée de Cendrillon, c’était aussi de me défaire dela pente que je prenais avec mes précédents romans, trèssarcastiques. J’ai eu envie de douceur, de consolation. »D’où ce roman-monde, qui réussit à tout concilier avec unevirtuosité et une intelligence bluffantes : Éric Reinhardt etses avatars, l’auto-fiction et le roman «social», l’apologiede l’amour conjugal et l’exploration du capitalismesauvage, l’ironie grinçante et ce qu’il appelle le « lâcherprise», la «dureté d’un monde fait d’incertitudes et de peur,où l’on peut se sentir asservi», et le rêve d’accéder « à unespace de clarté, de plénitude, où nous serions enfinreconnus pour ce que nous sommes ».

En réussissant ce pari ambitieux, Cendrillon accomplit unesorte de petit miracle. Dans ce roman, Éric Reinhardt règleses comptes avec une « bourgeoisie intellectuelle degauche», peu désireuse de laisser émerger des gens commelui, « impurs» issus des classes moyennes. Éric Reinhardtfait cela avec beaucoup d’humour et de malice, sur le tonde la farce, mais l’attaque est inratable, au cœur du livre,importante pas seulement pour son petit cas particulier,mais aussi pour ce qu’elle dit de la France, et dont il voitl’écho dans le mea culpa fait par le PS depuis la présidentielleautour de l’insuffisante représentation de tout ce qui neserait pas homme blanc de 50 ans. Le miracle, c’est queça n’a pas empêché ce «milieu », avec lequel il se senten perpétuel « décalage », d’acclamer Cendrillon dès sa sortie.D’en faire unanimement, et à raison, l’un des évènementsphares de la rentrée littéraire. « Cet accueil ne me poseaucun problème, dit-il dans un sourire. Mais le milieu n’apas forcément dit son dernier mot… »

_Raphaëlle LEYRIS

C

J’AI EU ENVIE DE FAIRE UN LIVRE SUR MOI,MAIS AUSSI DE PARLER DU MONDE ET DES THÈMESQUI ME VIOLENTENT. E. REINHARDT “ “

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LE SITE

C’est un dandy fameux, haut-de-forme et monocle élégant, quiaccueille le lecteur sur le site Internet du très respectable NewYorker. Fondé en 1925, en ligne depuis 2001, l’hebdomadairepropose des articles longs en bouche et souvent drôles surdes sujets éclectiques (les bonobos, la Divine Comédie,Nicolas Sarkozy), des chroniques culturelles, mais aussi despoèmes et des nouvelles. Sans oublier les prestigieux «cartoons»dont les «punch lines» sont proposées par les lecteurs eux-mêmes. En bonus de l’ère numérique, interviews filmées,cartoons animés et catalogue des archives où l’on pourrafréquenter quelques plumes prestigieuses : Woody Allen,Truman Capote, Hannah Arendt ou Robert Crumb.

www.newyorker.com

À L’ABRI DE RIENOLIVIER ADAM roman, L’Olivier, 2007La dérive de Marie, mère au foyer, pour quil’amour des siens ne suffit plus et qui épouse,non sans risques, la cause humanitaire. Leportrait bouleversant d’une femme au borddu gouffre, servi par une écriture sobre etémouvante.

PARANOÏD PARK BLAKE NELSONroman traduit de l’américain par Daniel Bismuth,Hachette littérature, 2007Un jeune skateur tue un homme et, rongépar la culpabilité, prend soudainementconscience de la vacuité du monde quil’entoure. Formidable thriller psychologique,adapté au cinéma par Gus Van Sant.

LA FIN DE L’HISTOIREFRANÇOIS BÉGAUDEAUroman, Verticales / phase deux, 2007Poursuivant sa dissection de l’oralité, cettefois avec la conférence de presse de retourd’Irak de Florence Aubenas, FrançoisBégaudeau nous livre son analyse, trèspersonnelle, de la fin de l’Histoire.

COURONNES, BOUCLIERS,ARMURES LOUISE DESBRUSSES roman, P.O.L, 2007Une journée particulière dans la vie detrois femmes, une mère et ses deux filles.Roman très original, à l’écriture incisive,qui démonte la mécanique des rapportshumains, profond et grinçant.

L’AGENT DE LIAISONHÉLÈNE FRAPPAT roman, Allia, 2007Intrigant chassé-croisé de destins defemmes, des filles, des mères, des grand-mères. Orchestré avec brio par une narratricequi brouille les pistes et cultive l’art dumensonge et de la trahison, ce roman estune tentative d’épuisement des mots.

LA SÉLECTION

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Photo_© Francesca M

ontovani

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FluorescencesDe Mika aux Klaxons, en passant parla Bretonne Yelle, qui sort ce mois-ci sonpremier album, le rock et la pop prennentdes couleurs. Le disco revient en grâce, lessynthés en plastique aussi. Panorama d’unegénération « fluo », légère et hédoniste.

il y a deux ans du tournant discoïde de Philippe Katerine.Preuve que, s’il s’est accéléré ces derniers mois, le revivalfluo remonte à plus loin qu’il n’y parait. Cela fait plusieurssaisons en effet que des groupes comme Zoot Womanou les Scissor Sisters réhabilitent boîtes à rythmes Casio,gazouillis suraigus et paillettes queer. Un défrichage qui apréparé le terrain au succès d’un Mika, dont la bubble-pop doitautant à l’excentrisme d’Elton John qu’aux déhanchementsde John Travolta.1977-2007 : 30 ans que le samedi soir a la fièvre, ce qui valaitbien une récente réédition par Warner du disque gold desBee Gees. Mais l’actuelle ferveur hédoniste ne se contentepas d’éblouir les strates les plus dorées du mainstream.La star en devenir Calvin Harris a beau clamer I Created Disco,toute une floraison de compilations obscures et éruditesprouve le contraire, réhabilitant qui l’italo-disco (After Dark

t si l’histoire du rock n’était qu’une suite dequestions / réponses entre couleurs et noir etblanc? Des fifties aux sixties, les blousons noirsdes premiers rockeurs sont détrônés par l’arc-en-

ciel psychédélique, puis par les scintillements du glam-rock.Décennie suivante, au nihilisme grisâtre du punk répondle chatoiement disco. Puis aux sinistres corbeaux new waveréplique la pop fluo-synthétique des années 1980. Quant auxmonochromes grunges, ils sont repeints, au milieu des années1990, par les synthés multicolores de la french touch.Aujourd’hui, c’est au tour du « retour du rock», né avec lesStrokes dans les décombres du World Trade Center, de sefaire renvoyer au vestiaire par une nouvelle générationeffrontément bigarrée. Adieu jeans slim, cuirs sombres etposes blasées, place aux leggings flashy et aux T-shirtscriards. Un revival en chasse un autre, et certains groupesportent les stigmates de ce changement brutal de mode :moitié rockeurs, moitié clubbeurs, les Klaxons hésitent encoreentre teintes noirâtres et touches chamarrées, de même queJustice, dont le disco se mêle de saturations gothiques.

D’autres n’ont pas ces scrupules. Prenons Yelle par exemple,jeune Bretonne fluo de la tête au pied. Son premier album,Pop-up, est bourré de synthés plastifiés, de réminiscenceseighties, de paroles à la fois légères et affranchies : «J’aimeles années 1980 pour leurs couleurs, leurs formes, leurssonorités fraîches et fantaisistes, avoue Yelle, un énormecollier rose fuchsia autour du cou. J’ai essayé de faire ensorte que mon album s’inspire de cette liberté d’esprit, qu’ilne soit jamais prise de tête.»C’est pourtant pour sa prise de tronche avec les rappeursde TTC, par chanson interposée, que Yelle s’est fait connaîtresur MySpace, il y a un an à peine. À l’origine de ce buzz, lemorceau Je veux te voir brocarde les travers macho deCuizinier et de son cousin Teki Latex, deux des leaders duposse francilien. Une guerre des sexes qui masque mal,pourtant, un même amour pour la variété 80’s : sur sonpremier album solo, le récent Party de plaisir, Teki Latexpousse la chansonnette avec Lio, l’un des modèles avouésde Yelle. Quant à la production de son disque, elle estassurée par le duo Renaud Letang / Gonzales, responsable

E

J’AIME LES ANNÉES 1980 POURLEURS COULEURS, LEURS SONORITÉSFRAÎCHES ET FANTAISISTES. YELLE“ “

MUSIQUE Les « fluo kids » prennent le pouvoir

Teki Latex (en haut), Yelle (au milieu), Lio (à droite).

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LA SÉLECTION

LE SITE

ANIMAL COLLECTIVE« Strawberry Jam» (PIAS)Il n’y a ici plus de structures, de formats,ou si peu. Juste le cri d’une tribujouissant de son inventivité grésillante :harmonies en rafale, confiture de larsens,renversements spectaculaires.

JENS LEKMAN «Night Falls Over Kortedala»(Differ-Ant)Le plus digne héritier de Morrissey estsuédois. Pastels contrariés, ses popsongsdérivent vers des continents de plusen plus fauves. Après The Embassy cetété, le réchauffement climatique continuede gagner la Scandinavie.

M.I.A «Kala» (Beggars)On pourrait parler d’épices orientales oude rap tiers-mondiste à propos de M.I.A,Sri Lankaise surdouée. On se contenterad’insister sur l’extrême qualité du disque,furieusement maîtrisé.

JEAN-LOUIS MURAT«Charles et Léo / Les Fleurs du mal» (V2)Textes : Charles Baudelaire. Mélodies(inédites) : Léo Ferré. Chant : Jean-Louis Murat. Le disque est à la hauteurdu casting – lyrisme malade, rentré,fléchissant.

THE CORAL « Roots and echoes»(Jive Epic) Alors, oui, il y a des choeurs encascade chez The Coral ; et oui, on sentà leurs mélodies et leurs arpèges queces gamins viennent de Liverpool. Maiscertains détails, malins, les distinguent dela masse des adorateurs de groupes en B.

Mjo, c’est Marie-Jo Long, from Marseille. Ses morceaux sontplutôt courts, mais on les aime longtemps, voire toujours. Ellea une voix pure, qui ne ricoche jamais, ce qui ne l’empêchepas de troubler. Une voix qui puise dans les mêmes eaux,limpides mais profondes, que Nara Leão ou Gal Costa, pourceux que le Brésil intéresse, eaux que l’on dirait baptismalessi elles n’étaient si retorses. Derrière, on trouve guimbardes,bandonéons et autres exotismes discrets. Flóp, sur lequel ilfaudra revenir un jour, compose l’essentiel de ces douceurs.En bonus, il y a des clips autoréalisés avec fleurs et enfants,et ça coule comme le cinéma des origines, merveilleux.

chez Italians Do It Better), qui le cosmic-disco (DirtySpace Disco chez Tigersushi). Quand ce ne sont pasles Justice qui, dans leurs mix, rendent grâce aux DJscultes Daniele Baldelli et Larry Levan, entre deux clinsd’œil aux Jackson 5.Conséquence de l’impressionnante remise à plat propreà la génération MP3, les hiérarchies historiques sontbrouillées, dans un esprit de curiosité tous azimuts. Le blogemblématique Fluo Kids peut ainsi se permettre un «big-up» vintage à Boney M comme un coup de projecteur surl’electro expérimentale et terriblement contemporaine duNorvégien Lindstrøm. Un grand écart caractéristique decette jeunesse née entre 1977 et 1987, désireuse deredécouvrir la musique sur laquelle elle a été conçue,d’en continuer et d’en réinventer, nuits après nuits, lessecousses fluorescentes. _Auréliano TONET

www.myspace.com/123mjo

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LES BONS PLANS Kompilé par Rémy Kolpa Kopoul

Une rentrée musicale parisienne multi-formes, avec pèle-mêle le rugby, le ramadan, du hiphop ol' school, du Brésil intimiste, du flamenco ardent, du dancefloor frénétique, du jazzglamour, de l'afrobeat lancinant, du groove végétal et du cubain acoustique. Un grand mixsonore, donc...

LAS ONDAS MARTELES > 22/09 > LA BOULE NOIRE

Sons d’automneb

L’appétissante aventure des frères Sébastien etNicolas Martel, musiciens tous terrains de la scèneparisienne : ils s’échappent de leur creuset groovypour une passionnante et iconoclaste escapade

cubaine autour de l'œuvre de Miguel Angel Ruiz, poèteprématurément disparu. // www.laboule-noire.fr

GUS GUS > 26/09 > LA MAROQUINERIE Il n'y a pas que Björk en Islande. Depuis 1995, GusGus agite les scènes et chauffe les dancefloorsavec un electro pop à la fois glacé et incandescent.Forever, leur 5ème album, paru cette année, confirme

le statut de Gus Gus comme groupe phare de cette galaxied'Europe du Nord. // www.lamaroquinerie.fr

HADOUK TRIO AU TRITON > 26 AU 29/09 > LES LILASAmbiances jazzy animales dans un environnementvégétal et électrique : Didier Malherbe souffle(sax, doudouk), Loy Ehrlich gratte (gumbri, kora) etSteve Sheehan frappe (sur d'innombrables peaux).

Voyage initiatique dans un monde « world»... et au-delà. Unconcert pour les oreilles intrépides. // www.letriton.com

RACHID TAHA AU FESTIVAL OVALIE > 28/09 > ST DENISDans son dernier albumDiwan 2 (Barclay), produitcomme d'habitude par l'Anglais Steve Hillage,Rachid poursuit son ratissage du patrimoine. Sonactuel groupe à la cylindrée gonflée lui donne une

assise à la fois urbaine et roots où darbouka et mandole font bonménage avec guitare, basse et claviers. // www.ville-saint-denis.fr

MOS DEF & RAKIM > 28/09 > L'ELYSÉE MONTMARTREMon premier n'a pas toujours été au rendez-vous(prestation annulée), mon second n'est pas venudepuis un bail voire des lustres. Mon tout est unplateau hip hop royal, avec deux gros poissons

de la 2ème génération old school. Rakim, dont on attend unnouvel album depuis... 1999, est en outre un caïd de la prod'.www.elyseemontmartre.com

VINICIUS CANTUARIA > 06/10 > NEW MORNINGVinicius est porteur d'une musique sereine,enveloppante, mixant en toute harmonie la bossade ses jeunes années à Rio avec l'universcosmopolite new yorkais qu'il a intégré depuis20 ans. Sorte de jazz coloré Brésil avec des

mélodies qui s'emparent des oreilles, voir son nouvel album,Cymbals (Naïve). // www.newmorning.com

DE LA SOUL > 07/10 > L’ELYSÉE-MONTMARTREL’album qui les a propulsé, en 1991, s’appelait...De La Soul Is Not Dead. Démentir sa mort commeacte de naissance, ça commençait bien !Le groupe phare du hip hop des 90’s, un momenten sommeil, revient en peine forme. 16 ans et

9 disques plus tard, voici Grind Date, produit par Jay Dee etMadlib. // www.elyseemontmartre.com

CAETANO VELOSO > 09/10 > ZÉNITHSon 45ème et dernier album, Cê, est une jubilatoiredigression dans les eaux du rock. Le poètechanteur brésilien reste à 65 ans, le plus tonique,le plus sexy, le plus impertinent (et le pluspertinent !), le plus glamour, le plus visionnaire,

le plus... S’il n’en reste qu’un.www.lezenith.com/paris

CINEMATIC ORCHESTRA + TUXEDOMOON > 10/10 > LA CIGALEUnité phare du label anglais Ninja Tune,The Cinematic Orchestra, d'influence jazz etdown-tempo, reste associé au 7ème art. JasonSwinscoe est le pilote inspiré du voyage sonore.Tuxedomoon, trio phare de la scène underground

rock 80's californienne, est insubmersible. Retour en surface,éternellement avant-garde.(Festival Factory) www.fidh.fr

RABIH ABOU KHALIL > 13/10 > BAGNOLETEblouissant et méticuleux, le joueur d'oudlibanais Rabih Abou Khalil enfile tel des perlesdes albums soignés (pochettes sublimesd'arabesques-enluminures, livrets pointus)depuis deux décennies. Personnel constamment

renouvelé, finement sélectionné et riches entrelacs de climats.

EL GUSTO, FESTIVAL CHAABI > 29/09 > BERCYUn Buena Vista à la mode d'Alger avec les cadorsdu chaabi, ce genre musical populaire du Bal ElOued d'avant l'indépendance, avec les rescapés dela chanson judéo-arabe. Premières retrouvailles

depuis... 45 ans, 45 artistes sur scène. Tout ça sous le parrainagede l'agitateur pop anglais Damon Albarn, à Bercy, pourle Ramadan, à l'invitation de la Mairie de Paris. Invitationsà retirer à Radio Nova. // www.novaplanet.com

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y Radio NovaLAURENT GARNIER + SCRATCH MASSIVE > 13/10 > LA CIGALE (FESTIVAL FACTORY) www.fidh.frLaurent Garnier, en pleine bourre, joue en formation mixte (DJ et musiciens), dans la veine de l’album live de ses prestationsavec le pianiste Bugge Wesseltoft, en attendant un album d'inédits. Puis Scratch Massive, le duo electro de Maud etSeb, qui troque les antres des clubbers pour la scène d'un festival.GORAN BREGOVIC > 17/10 > ZÉNITH www.le-zenith.com/parisAvec son truculent et rutilant Orchestre des Mariages et des Enterrements, le Bosniaque court le monde. Cette fois,l’auteur des BO des films de Kusturiça a relooké Carmen en version tzigane... mais avec happy end. Notre toreador desBalkans ne manque pas de piquant !STACEY KENT > 17/10 > L’OLYMPIA (JVC FESTIVAL) www.loopproductions.comLa New-Yorkaise a dû s'expatrier en Angleterre pour faire reconnaître son talent de chanteuse de jazz. Sa relecture desstandards a mis Londres puis l'Europe à ses pieds. Elle s'est imposée comme une voix savoureuse, satinée. Voici venirson dernier opus Breakfast on a Morning Tram sur Blue Note.

ET AUSSI...20/09 Block Party avec DJ Muggs de Cypress Hill et Jazz Liberatorz au Bus Paladium. 21/09 Soirée Excuse My Frenchavec DJ Gero + J.E. Moustic x J.D. Beauvallet en DJ au Batofar. 22/09Nuits Noires avec Tony Allen live + DJs Aline (Nova)et Da Vince au Bus Palladium. 02/10 Buika au New Morning. 06/10 Sergent Garcia au festival Ovalie – Saint Denis. 07+ 08/10 Habib Koité à l’Européen. 09/10 Le Peuple de l’Herbe au Bataclan. 13/10 Headhunters au New Morning (JVCFestival). 18/10 Seun Kuti à la Cigale (JVC Festival). 18 au 20/10Marcio Faraco au Sunside.

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ART Rencontre avec le photographe JR

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Jeune photographe globe-trotter, JR dynamite le circuittraditionnel de l’art contemporain et expose ses travauxà même les murs des villes, de Montfermeil à Jerusalem.Portrait d’un vagabond.

www.jr-art.net

Les murs ont des hapeau blanc, lunettes noires, JR mène depuis sept ans unecarrière clandestine et fulgurante. La nuit, il squatte les mursdes villes, affichant ses photos en 10 mètres par 15. Il n’y a passi longtemps les mairies lui collaient des procès. Aujourd’hui,

elles lui prêtent leurs plus belles façades et il vient de plaquer 1,5kilomètres de clichés sur les Rencontres d’Arles.Face 2 Face, son dernier projet, s’affiche à dessein «dans un des endroitsles plus photographiés par les journalistes» : le mur de séparation entreIsraël et la Cisjordanie. Fin 2006, il part sans aucune autorisation. Il choisitvingt corps de métiers, coiffeurs, restaurateurs, acteurs, sportifs… UnPalestinien et un Israélien, photographiés au 28 millimètres, grimaçant côteà côte comme pour renvoyer les uns autres. «Devant, les gens étaientsouvent incapables de dire qui était quoi.» Victoire donc d’une mission quetout le monde disait impossible. JR passe 80 % de son temps à l’étranger, et le reste à travailler dans sonatelier ou sur les toits de Paris. Cet enfant d’une imprécise banlieue ouestest discret sur sa biographie. Pas facile de lui tirer le portrait. On sauraqu’il était mauvais en classe et a sauvé son bac ES grâce à la photo. Unvieil appareil trouvé dans le métro et dépoussiéré pour ce cas de forcemajeure. À 18 ans, JR taggue les toits et les tunnels. Il devient bientôt

«photograffeur», mitraillant ses amis en action. Il en a gardé la culturestreet et le goût de l’art à l’air libre. Proche du collectif Koutrajmé (Sheitan),il coréalise un reportage photo sur la vie quotidienne à Monfermeil. Premieraffichage sauvage, première plainte. La presse en parle. C’était en 2004.Un an après, au même endroit, les banlieues s’embrasent. Ses photos fontla une des quotidiens étrangers. Il y retourne et réalise le premier voletdes portraits au 28 millimètres. JR est côté sur le marché de l’art contemporain, sans avoir jamais mis lespieds dans une galerie, au point qu’aujourd’hui il se demande à quoi ça luiservirait. Ses œuvres se vendent autour de 7000 euros, soit dix fois plus qu’ily a trois ans. «Je suis entré en biaisant tout le monde, sans rien connaîtrede la photo ni du milieu.» Autodidacte, il veut rester autonome. Il financeses projets au fur et à mesure des ventes. Son succès ne l’institutionnalisepas parce qu’on lui donne des espaces vierges à sa mesure, commerécemment, la façade du Musée de la photographie à Amsterdam. JR neconçoit plus son art sans colle, ni échafaudages. D’abord parce qu’iléprouve une sorte de jouissance, les mains au contact des murs. Et puisparce que si la photo habille le mur, le mur, lui, donne la matière. Il aimeaussi voir la photo lui échapper. «On peut pisser dessus, ça ne me dérangepas.» De retour du Maroc, il va bientôt reprendre le large pour des projetsau grand angle, Colombie, Tchétchénie, Afrique Noire, Brésil. Au fait JR,ça n’est pas junior, ni Dallas, juste des initiales – majuscules de rigueur.

_Anna LHUNE

C

Mars 2007, Les bonnes sœurs en actions coté palestinien

ON PEUT PISSER SUR MES PHOTOS, ÇA NEME DÉRANGE PAS. JR “ “

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EXPOSITIONS

LE SITE

À travers dessins et illustrations, Marie Caudry, installée àBordeaux, décline un univers empreint d’onirisme etd’étrangeté, puisant dans la mythologie et les contes.Hommes-animaux, femmes à barbes et chevaliers y côtoient« les inventions du Professeur Patate», du «pull marrant»à la «baguette flûte à bec», en passant par le «monocycleà roulettes»… Dans des compositions en couleurs ou ennoir et blanc, le trait, telle une maille, génère une série deformes récurrentes à géométrie variable évoquant cheveux,feu, eau et autres flux divers.

mariecaudry.laitboxe.com/index.htm

LA MÊLÉE DES CULTURES 1ER SEPT. - 20 OCT.Coupe du monde de rugby oblige, lemusée invite à découvrir les différentescultures des nations de l’Ovalie. Outreun accent particulier mis sur le travail del’artiste Greg Semu (Samoa), différents

ateliers, conférences scientifiques et même retransmissionsde matches sont prévus.Musée du quai Branly - 37, quai Branly, 75007 Paris.

J. DE GRUYTER, H. THYS… 13 SEPT. - 18 NOV.

THE THIRD MIND 27 SEPT. - 3 JANV.Cé l è b r e p o u r s e s s y s t ème s d ecorrespondance, l’artiste Ugo Rondinonemet ici en regard ses œuvres et celles de31 artistes, sur le principe du cut-up réalisépar William S. Burroughs et Brion Gysin

dans l’inédit The Third Mind. Une troisième voie passionnante.Le Palais de Tokyo - 13, avenue du Président Wilson, 75116 Paris.

LA PEAU / QU’EST-CE QUE TU FABRIQUES ?Pour l’inauguration de l’intégralité de laCité, deux expositions sont proposées. Lapremière sur la peau ou les enjeux del’enveloppe d’un bâtiment. La seconde,plus ludique, sur la tour, que les visiteurs

peuvent redécouvrir par le biais de jeux de construction.La Peau, du 15 septembre 2007 au 31 décembre 2008Qu’est-ce que tu fabriques? Du 15 septembre 2007 au 3 janvier 2008Cité de l’Architecture et du Patrimoine1, place du Trocadéro et du 11 novembre, 75116 Paris.

yeux

Après la projection de La Ricarda del’artiste Michel François au MK2 Quai deLoire, le Plateau propose une expositionrassemblant trois des dix artistes ayantparticipé au film. Leurs pièces, surtout

vidéo, rassemblent une galerie de personnages pris dansdes situations allant du burlesque à l’absurde.Le Plateau - Place Hannah Arendt, 75019 Paris.

© JR-AR

T.NET

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LAURENCE LEBLANC

GALERIE VU : 2, rue Jules Cousin - 75004 Paris - Tél : 01 53 01 85 81

LAURENCE LEBLANC - «TO LIVE TILL DEATH IS NOT EASY»du 14 septembre au 3 novembre 2007Entrée libre - du mercredi au samedi - de 14h00 à 19h00 & sur rendez-vous.

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LAURENCE LEBLANC - TO LIVE TILL DEATH IS NOT EASYLaurence est une photographe extrêmement sensibledans sa faculté à capter une réalité multiple, aussi bellequ’insoutenable, aussi prégnante que fuyante, aussi exaltantequ’insupportablement triste et qui ancre son travail aucoeur des mots de Pessoa : « Le monde extérieur est uneréalité intérieure ».

_Gilou LE GRUIEC

République Démocratique du Congo, Kinshasa, mai 2005

Série : Les nonnes / Cambodge, 2003-2004

Brésil, avril 2007

Sierra Leone, Freetown, mai 2005

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TRIBUNE LIBRE Quels films montrer aux collégiens et aux lycéens ?

Cet été, on a beaucoup parlé du Prix 2007 de l’Éducation Nationale, attribué lors du dernierfestival de Cannes à 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Le ministre Xavier Darcos s’est inquiété de la«violence» de ce film roumain et s’est un temps opposé à sa diffusion dans les collèges et leslycées, avant de se rétracter. Si le film sera donc bien montré dès la rentrée dans les classes,la question de l’éducation à l’image reste, elle, d’actualité : à travers quels films affiner le regarddes élèves? TROISCOULEURS donne la parole à François Bégaudeau, professeur agrégé defrançais, écrivain et critique de cinéma.

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e nous épuisons pas à déplorer que le Ministèrede l’Éducation ait semblé embarrassé par son Prixattribué à 4 mois, 3 semaines, 2 jours, la Palmed’Or 2007. Il est souvent arrivé, il arrive, il arrivera

encore que les institutions s’interposent héroïquement entredes films jugés nocifs et une jeunesse forcément incapable deles appréhender avec distance. Venons-en plutôt aux deuxquestions élémentaires posées par l’introduction du cinéma àl’école : quels films montrer et quoi montrer dans ces films ?Neuve, la problématique recoupe cependant des débats vieuxcomme l’enseignement de la littérature, et toujours vifs.Le cours de français a-t-il pour objectif la transmission d’unpatrimoine culturel, ou d’initier à la lecture et à l’écriture quitteà se donner des supports de moindre qualité ? En d’autrestermes : puis-je faire l’impasse sur Racine si je constateque l’étude en est très difficile à des élèves peu familiersde la chose écrite ? En d’autres termesencore : le texte est-il une fin en soi ou leprétexte à une réflexion collégiale sur lalangue, le récit, les idées, etc. Prof dansdes quartiers difficiles pendant dix ans,j’ai tranché dès que je me suis rendu compte que la moitié dema première classe de seconde ne captait rien à L’École desfemmes. D’autres profs tranchent à l’inverse et persistent àremonter le fleuve de l’histoire littéraire en ramant commedes galériens à contre-courant. Libre à eux.En cinéma, même combat. Si le but est de faire découvrirMurnau et Antonioni, alors passons L’Aurore et L’Avventurade 14 à 16 le vendredi en salle 203. Mais qu’on se représentebien le risque de dégoûter dans l’œuf des jeunes gens à quiun film de 1995 semble désuet, et qui n’ont quasi rien vu dece qui s’est tourné avant leur naissance. On pourrait doncenvisager des supports légèrement moins préhistoriques.Trouver des compromis. Et même profiter d’une aubaine quel’enseignement de la littérature n’offre pas : les adolescentsont une pratique de l’objet auquel nous sommes censés lesinitier. Ils voient des films, quoi. Davantage qu’ils ne lisent.Partir donc de cette pratique spontanée et l’enrichir del’intérieur. On objectera que l’école sert à extirper les élèvesde leur univers culturel, qu’elle représente pour certains

une chance unique de découvrir des films dont ils n’ontpas idée de l’existence. Je réponds qu’ils viendront d’eux-mêmes aux chefs-d’œuvre pour peu qu’on ait réussi à lesattirer dans la nasse du cinéma, et que dans cette optique,la priorité est d’appréhender le cinéma moins comme un artque comme un artisanat. Non pas : que raconte AnthonyMann, quel imaginaire singulier fait de lui un auteur au mêmetitre que Flaubert ; mais plutôt : comment ça se fabriqueun film? comment ça marche le cinématographe?Rien de tel, alors, que la pratique, et il faut de toute urgencedébloquer des fonds afin d’équiper dûment les établissementsscolaires. Mais les projections demeurent pertinentes si onprend le temps de décomposer des scènes, d’en examiner lescoutures. Souvenir d’une classe de première, en 2001 : je leurpasse Sixième Sens, de Shyamalan, puis je le ramène au plussimple. Voyez, ça c’est le champ, ça c’est le contre-champ, et

vous savez quoi ? ils n’ont pas été tournés au même moment,peut-être même pas le même jour, et ce n’était peut-être pasBruce Willis qui donnait la réplique à l’enfant-héros, peut-êtrequ’il se reposait dans sa caravane à ce moment. Bouchesbées des élèves, splendeur pédagogique, triomphe de moi.Les profs de français, à qui est encore majoritairement confiéel’initiation au cinéma en attendant la création d’un Capes adhoc, paniquent devant la tâche, et paniqueront d’autant plusqu’on les privera de la béquille littéraire (analyser un film avecfinalement les mêmes recettes sémiologiques qu’un livre). Onne sait pas faire, diront-ils. Mais justement, dirai-je : qu’ilsacceptent d’être ce que Jacques Rancière appelle un maîtreignorant, partant du même point zéro que les élèves et s’initianten même temps qu’eux, en ajustant leur cours à leurs propresquestions. Discipline neuve au sein de l’école, le cinémafournit une occasion inespérée d’y injecter une pédagogieégalitaire et efficace, égalitaire parce qu’efficace, efficaceparce qu’égalitaire.

_François BÉGAUDEAU

Oublier Murnau

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QU'ON SE REPRÉSENTE BIEN LE RISQUE DEDÉGOÛTER DANS L'ŒUF DES JEUNES GENS À QUIUN FILM DE 1995 SEMBLE DÉSUET.“ “

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Arnaud Pa

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RÉSEAUX Le web communautaire, allié des R.G. ?

Donner ses donnLe lancement de Spock, un moteur de recherche «biographique», et le succès de Facebook,réseau social très intrusif, alimentent la crainte d’un Big Brother généralisé sur le web.L’anonymat existe-il encore sur le réseau ?

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u cœur de l’été, le webzine Slate a sorti une petite bombe qui a fait ricaner toute l’Amérique politique : la fillede Rudolph Giuliani, candidat à l’investiture républicaine, soutient Barack Obama, en lice pour être investipar les démocrates ! Comment ont-ils dégoté un tel scoop ? Le plus simplement du monde, en visitant le profilde la fille Giuliani sur le site communautaire Facebook. Comme toutes les étudiantes de son âge, elle y

affichait benoîtement, entre autres informations, ses préférences politiques. Facebook, site américain qui revendiqueplus de 30 millions d’inscrits, repousseles limites de l’exhibitionnisme surle web. L’internaute est sans cessequestionné sur sa vie privée et livresans s’en rendre vraiment compte desdonnées très personnelles : sa situation sentimentale, ses choix politiques, son numéro de portable ou même le tempspassé en couple avec ses ex-petit(e)s ami(e)s…Les réseaux sociaux s’immiscent de plus en plus loin dans notre intimité. Ils quadrillent nos vies : le parcours scolaire estarchivé sur Copains d’avant, le C.V. est disponible sur Linked In, les photos de beuverie sont sur MySpace, les petits secretsécument les blogs… Mais jusqu’à présent, il était difficile de regrouper toutes ces informations éparses. Le lancement dusite spock.com le 8 août a mis fin à ce flou biographique. Spock est un outil redoutable, un moteur de recherchespécialement conçu pour aspirer toute l’information liée à un nom de personne. «S’il est écrit quelque part sur le web

AS’IL EST ÉCRIT QUELQUE PART SUR LE WEB QU’ON

A EU UN ACCIDENT DE VOITURE, ON SERA CLASSÉ PARSPOCK COMME MAUVAIS CONDUCTEUR. “ “

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MOT@MOT

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(2004, jeu de mot formé à partir de l’anglais copyright, « droit d’auteur » et du mot left, « gauche » ou « laissé »)1°. Autorisation donnée par l'auteur d'un logiciel à l'utilisateur d'user, modifier et distribuer gratuitement ledit logiciel.Ubuntu est un copyleft remplaçant avantageusement Windows.2°. Désigne, dans les soirées mondaines organisées par des héritiers de 1969 reconvertis dans l’informatique, uncouple aux moeurs libres, porté sur les échanges. Très mignonne ta copine Marcel, elle est copyleft ?

COPYLEFT [kopilÂft] n.m. et adj.

IN THE MOOD FOR ? Musicovery l’a bien compris : la musique,c’est avant tout un feeling. Cette radioultra-moderne s’écoute en laissantglisser un curseur qui étalonne notrehumeur du moment.http://www.musicovery.com

LIBÉRÉELes anciens de Libération aiment créerdes médias 2.0. Après le succès deRue 89, c’est au tour d’Annick Rivoirede lancer son webzine. De la hauteculture dans un écrin geek. http://www.poptronics.fr

LE JUSTE PRIXDeux artistes new-yorkais peignentles objets de leur désir et vendent leurstravaux au prix... des objets. Un tableaud’iPhone est estimé à 649,17 $, une naturemorte à la choppe de bière se négocieà 7 $. http://www.wantsforsale.com

SMILY NASTY DANCING Le site de la nouvelle génération duclubbing, tout en fluo et en regardsfatigués. En direct de Londres, lephotographe Alistair Allan explore lesbas-fonds de la scène electro. http://www.dirtydirtydancing.com

RUGISSEMENTS « Curieux journal curieux », Le Tigre estun mensuel alternatif au sein même dela sphère alternative. La version webaffiche la même radicalité décalée :pas de pub et articles en PDF !http://www.le-tigre.net

qu’on a eu un accident de voiture, on sera classé par Spockcomme mauvais conducteur », explique Roland Piquepaille,bloggeur sur le site américain zd.net. Les fiches nominativessont ensuite modifiables par les internautes, sur le modèlede Wikipédia. Pour l’instant, 100 millions de personnes sontindexées sur le site, principalement des Américains, mais lavocation de Spock est hégémonique, alimentant les craintesde voir naître un incontrôlable Big Brother. Seule garantie :toute personne qui en fait la demande peut être retirée del’index Spock.L’utopie du web 2.0 pourrait virer à l’aigre. À renseigner sanscesse ses profils sur les sites communautaires, l’internautea fini par se constituer lui-même sa fiche des R.G. Maisqu’est ce qui nous pousse à divulguer à la terre entièredes renseignements pourtant strictement personnels ?Le sociologue Henry-Pierre Jeudy donnait un début deréponse dans une tribune pour Libération le 30 juillet :«La croyance en une semblable communauté d’intimités faitoublier l’impression même d’exhibitionnisme. […] La pudeurn’est plus une raison de se donner des limites, les secretsvolontairement dévoilés le sont par tous de la même façon.»Les chasseurs de tête sont ravis. Le web est devenu unterritoire rêvé pour dresser le profil d’un candidat et repérerd’éventuelles failles. «À partir du moment où on est surInternet, l’anonymat n’existe plus », reconnaît, un peu désolé,Jacques Froissant, directeur du cabinet de recrutementAltaïde. Avant la mise au point de robots «nettoyeurs» dedonnées, encore au stade embryonnaire, pour l’heure laseule solution est donc «d’avoir deux identités sur le web :une professionnelle et une plus personnelle ». Avec desmoteurs de recherche comme Spock, il devient en effetdangereux d’inscrire son vrai nom lors de l’inscription à unsite de réseau social. Si MySpace n’affiche pas de donnéesnominatives sur son site, les robots avaleurs de pagespersos ont les moyens de les retrouver. Le piège du webcommunautaire, qui a besoin d’être omniscient pour vendreses publicités ciblées, s’est refermé.

_Baptiste DUROSIER

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JEUX VIDÉO Quand la musique mène le jeu

Home studio

a télécommande de la Wii n’est pas forcément la manette de jeu la plus tendance du moment. Car, franchement, peut-elle soutenir la comparaison avec une majestueuse guitare, fidèle réplique (en plastique, certes, mais quand même)de la légendaire Gibson SG? Malgré son prix bien supérieur à la moyenne – accessoire oblige –, Guitar Hero n’acessé de gagner en popularité, chez les ados (re)découvrant le rock comme chez les fans grisonnants de Keith

Richards. Depuis, le jeu a reçu une suite et, tout récemment, un récent volet eighties (Guitar Hero Encore : Rock the 80’s)en attendant, à la fin de l’année,Guitar Hero III sur PS2, PS3, Wiiet Xbox 360. Pendant ce temps, lestudio Harmonix, créateur des deuxpremiers Guitar Hero, s’apprête àaller encore plus loin avec Rock Band, qui invitera les joueurs à former des groupes devant leurs consoles grâce auxguitares, percussions et micro livrés avec le jeu…Non seulement le jeu musical s’est extrait du marché de niche dans lequel il vivotait, mais il a su gagner une place centrale.Une tendance inséparable de la volonté des éditeurs d’attirer un public différent, parfois plus âgé, souvent plus féminin,dont le meilleur exemple est la série Singstar, sur PS2 et, désormais, PS3. Oubliées les manettes pleines de boutonsintimidants. Tout le monde sait tenir un micro. Tout le monde aime le karaoké, non?L’histoire commence en fait en 1996, lorsque le musicien japonais Masaya Matsuura s’associe au dessinateur américain

Faire sonner sa Gibson comme du Hendrix ? Un jeu d’enfants, petits ou grands. Tendancelourde de la rentrée avec notamment un nouveau volet de Guitar Hero, les jeux musicauxréconcilient les publics, jusqu’à synthétiser l’essence même du jeu vidéo.

LTOUS LES SPÉCIALISTES EN TÉMOIGNERONT : POUR

AMÉLIORER SON SCORE, CE SONT D’ABORD L’OREILLE ETLE SENS DU RYTHME QU’IL FAUT TRAVAILLER. “ “

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Rodney Greenblat pour donner naissance à PaRappa theRapper, pionnier très juvénile (son héros fut aussi celui d’undessin animé pour enfants) et néanmoins ardu du jeu musicalqui vient de ressortir sur PSP. Le principe y est simple, quereprendront nombre de ses successeurs, de Dance DanceRevolution (gros succès dans les salles d’arcade avec sontapis de danse) à Guitar Hero, en passant par le très culteElite Beat Agents paru en juillet sur DS. Des indications –icônes, flèches, chiffres, couleurs... – s’affichent à l’écran,auxquelles le joueur répond par une action appropriée,généralement en pressant au moment requis la bonnetouche de la manette. Rien de plus simple et ennuyeux ? Bienau contraire : ladite manette ou l’objet qui s’y substitue(des bongos, des maracas, une Gibson SG...) se change eninstrument, même primitif, dont il s’agit de jouer correctement,l’œil rivé sur l’écran-partition. Et tous les spécialistes entémoigneront : pour améliorer son score, ce sont d’abordl’oreille et le sens du rythme qu’il faut travailler. Sans oublierde soigner ses attitudes, histoire d’impressionner encoredavantage les éventuels spectateurs...Ainsi s’opère un glissement progressif d’un sens à un autredu verbe « jouer », du gamer au musicien, alors que le genrese développe aux deux extrêmes du spectre vidéoludique,des productions les plus commerciales aux plus scintillantesembardées expérimentales – voirRez ou Lumines de TetsuyaMizuguchi. La musique est ce qui fait le lien, sur DS, entrel’ahurissant Electroplankton de l’artiste Toshio Iwai et le trèsgrand public Jam Sessions : ma guitare de poche, à paraîtrecet automne. Sans doute parce que le genre figure unesorte de modèle théorique idéal du jeu vidéo. Car il tiresa dynamique d’une interrogation sur les fondements del’interaction et sur le rôle même du joueur, entre singe savant,sportif performant, rouage d’un système cybernétique etinterprète singulier. Qui se retrouve alors libre d’accomplirce qui n’était qu’en germe dans le programme informatique.À sa manière, peut-être unique. _Erwan HIGUINEN

HEAVENLY SWORDFlamboyant « beat them all », HeavenlySword est un candidat sérieux au titre dejeu le plus abouti techniquement du monde.Et le plus furieux.

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LE SITE www.henryjenkins.orgS’il traite aussi de télévision, de cinéma ou de bande dessinée, le blog de l’universitaireaméricain Henry Jenkins n’en est pas moins une adresse essentielle pour qui recherche uneréflexion à la fois savante et très informée sur le jeu vidéo, dont il est un grand défenseurautant qu’un éminent critique. L’auteur (entre autres) de From Barbie to Mortal Kombat :Gender and Computer Games et professeur au MIT a par ailleurs eu la riche idée d’y entrecouperses longs et passionnants billets d’interviews et, récemment, d’extraits de thèses de sesétudiants.

Disponible : 12 septembreÉditeur : Sony // Plateforme : PS3

SUPER PAPER MARIOAprès deux Paper Mario orientés jeu derôle, la plateforme reprend ses droits dansce volet toujours aussi délirant et qui oseun étonnant mélange 2D-3D.

Disponible : 14 septembreÉditeur : Nintendo // Plateforme : Wii

HALO 3Attendue comme le messie par les possesseursde Xbox 360, la suite du fameux jeu de tirfuturiste est à l’approche. Et s’annonceépoustouflante.

Disponible : 26 septembreÉditeur : Microsoft // Plateforme : Xbox 360

SEGA RALLYLe rallye made in Sega revient aux sourcesde la saga née en 1995 : tout pour le plaisirde la course et au diable le réalisme !

Disponible : 28 septembre Éditeur : Sega // Plateformes : Xbox 360, PS3, PSP, PC.

MY SIMSLes célébrissimes Sims renaissent sousl’influence d’Animal Crossing dans un jeuplus cartoon que sitcom et résolument grandpublic.

Disponible : 20 septembreÉditeur : Electronic Arts // Plateformes : DS et Wii

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VIDÉO À LA DEMANDE www.mk2vod.com

ucun flocon de neige ne ressemble à un autre. Linda aussi ne ressemble à personne. Autiste, elle voue unepassion aux boules lumineuses et n’aime rien tant que de se rouler dans la neige, quand elle n’invente pasdes mots au scrabble. Mais sa fille meurt dans une collision sur la route. L’adolescente avait été prise en stoppar un homme taciturne, sorti indemne de l’accident. Rongé par la culpabilité, il se rend chez Linda. Au contact

de cette femme atypique, que le décès de sa fille ne semble pas affecter, il se reconstruit le temps d’un court séjour.Pudique,Snow Cake séduit par sa poésie, empreinte d’humour. Les paysages de lacs gelés se font l’écho du monde intérieurde personnages dévastés. Cœurs en hiver, les héros de ce film délicat se réchauffent à l’aura d’une femme fantasque,qu’interprète avec beaucoup de finesse Sigourney Weaver. Jamais caricatural, le film de Marc Evans rappelle que sous laglace brûle le feu d’existences brisées, que sauve parfois la grâce d’une simple rencontre.

_S.M.

Sur fond de deuil et de neige, Marc Evans réalise un drame intimiste lumineux. À voir ce mois-ci sur MK2vod.

A

LE CINÉMA ESPAGNOL Après l’Italie début juillet, c’est au tour de l’Espagne d’êtreà l’honneur sur MK2vod. Sous l’impulsion d’auteurs de latrempe d’Alejandro Amenabar, Julio Medem ou JaumeBalaguero, le jeune cinéma espagnol revient en force depuisquelques années, après quelques décennies de disetteartistique. De quoi faire revivre le souvenir de l’inégalableLuis Buñuel, dont sept films sont présentés sur notreplateforme. Viva España !

CYCLE DÉCOUVERTELa sortie enDVD et en VODdes films Itchkéri Kentiet RequiemFor Billy the Kid est l’occasion de remettre un coup deprojecteur sur la « collection cinéma découverte » éditéeen DVD par MK2. Parce que des films superbes et originaux,défiant les formats établis, existent encore de par le monde,de la Belgique de L’Iceberg à l’Iran de Gabbeh , en passantpar le Bangladesh de L’Oiseau d’argile.

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SNOW CAKEMarc Evans

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SHOPPING Sélection d’objets rugbyphiles

DE LA BALLEPour s’inscrire au-dessus de la mêlée et plaquer laconcurrence, mieux vaut se procurer le ballon qui fera ladifférence. Chanel a eu l’idée de créer, spécialement pour laCoupe du monde, une merveille graphique chic et choc. Deuxoptions : caoutchouc noir et blanc, frappé du célèbre logo dela marque ou un modèle collector en cuir. Dans les deux cas,passe fashion gagnante assurée !

Ballon caoutchouc Chanel 130 € / ballon cuir sur demande.

ECRAN PLAT POUR ACTION EN RELIEFLe plus important : un poste de télévision époustouflant quipermette de ne pas perdre une seule action. Avec sonécran plasma de 50 pouces et son système de correctionde la lumière Vision Clear, ce modèle luxueux proposé parBang & Olufsen est peut-être le plus beau du marché.Quant à son disque dur de 250 Go, il permet d’enregistreren direct, de suspendre et de reprendre le cours du match.Pratique pour les pauses snacking…

Téléviseur BeoVision 9, Bang & Olufsen. À partir de 20 140 €.

ESPRIT D’ÉQUIPELa collection Globos, imaginée par le créateur italien StefanoBigi pour l’éditeur Cividina, colle exactement à l’esprit rugby.D’abord un design ovale très pop, très gai. Ensuite unemodularité exemplaire : les poufs intégrés dans les structuresdes fauteuils et des bancs permettent en effet de doublerle nombre d’assises en un clin d’œil. Parfait pour recevoirà l’improviste toute une équipe de copains à la maison !

Collection Globos by Stefano Bigi : un fauteuil et un banc 4 places,en fibre de verre renforcée plastifiée et revêtue de polyuréthane expanséindéformable et fibres de polyester. Revêtement général cuir et tissu.

Renseignements : www.lacividina.com + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + +

Salon ovaleLe coup d’envoi de la Coupe du monde vient juste d’être donné. Tout un mois de foliepour vibrer au rythme du rugby… Alors, pas question de regarder les matches dans demauvaises conditions ! Six objets rugbyphiles à l’essai, pour mieux transformer sonsalon pour l’occasion.

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LE BON COUP DE POMPEÉlément essentiel à tout match de rugby qui se respecte,et argument décisif qui fera préférer le confort du salon àl’ambiance pas toujours très chic du pub du coin : lapompe à bière ! Imaginée par la marque Heineken pourla maison, elle vous permet de savourer de 18 à 20 demisfrais par fût. Après, tout est une question de rythme…

Le BeerTender de Heineken est disponible en deux modèles :un premier modèle Seb à 179,99 € / une version design Krups à 249,99 €.

Renseignements et achat en ligne :www.heineken.com (réservé aux plus de 18 ans).

POINTS VERTS Pour comptabiliser les points et suivre les scores de sonéquipe préférée, n’importe quel stylo ne fait pas l’affaire.Le Greenball de Pilot est le meilleur allié possible. Car sonnom est un clin d’œil au tournoi, et surtout, c’est le premierstylo-bille fabriqué à base de plastique recyclé (68%). Unebonne idée pour transformer l’essai écolo.Greenball de Pilot : stylo à encre liquide, pointe conique 0,7 mm. Rechargeable.

En vente dans les magasins spécialisés. 2.50 € l’unité prix conseillé.

EN ROUTE POUR LA GLOIRESi, après le match, vous voulez aller retrouver des amispour une troisième mi-temps d’anthologie, choisissez bienvotre monture. La série limitée Peugeot 207 RWC 2007 sembletoute qualifiée ! Appuis-tête avant ballons de rugby, surtapismonogrammés RWC et badge portière RWC. La victoire estpeut-être au bout du moteur...

Série limitée Peugot 207 RWC : 1,4 ou 1,6 L. Plusieurs choix de finitions / options possibles.

Renseignements : www.tousaucoeurdelamelee.com ou revendeurs agréés.

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SCIENCE-FICTION La chronique des objets de demain... La pelouse du futur

LA PELOUSE SYNTHÉTIQUE EN SYNTHÈSE Les chercheurs de l’Université du Tennessee n’ont pas encore réfléchi à une éventuelle commercialisation de leur« amarante réflechie », et on les comprend. En attendant, d’autres solutions existent.« Pelouse synthétique plus vraie que nature » dit ainsi le slogan de ma-pelouse.com, qui propose toute une gammede gazons artificiels novateurs. Mélange de trois couleurs, texture douce et brins « concaves », on jurerait qu’ilssentent la terre. Il est toutefois inapproprié de se soulager dedans.55€C’est le prix du mètre carré de pelouse synthétique, soit le tribut à payer si vous kidnappez un Vélib’ pendant 14 heures.

Gazon mauditL’Université du Tennessee a récemment découvert une herbe résistant aux désherbantsles moins affables. Petite pousse mais patrimoine génétique costaud, «l’amarante réfléchie»est le caïd des pelouses du futur. De quoi rendre verts les organisateurs de la Coupe dumonde de rugby 2057.

Triiiiiiiit ! » Coup d’envoi du match opposant le XVde France à lui-même. Si le lecteur n’entrave tintinà mon débit, c’est qu’après l’invasion junglesque

des pelouses de l’Hexagone par l’« amarante réfléchie »,les règles du jeu de William Webb Ellis ont quelque peuchangé. Chaque membre du XV joue contre les membresde son équipe nationale, sous les yeux du ministre titulairedes sports, Bernard Laporte Jr, démissionnaire. Le but dujeu étant de poser son œuf d’autruche à l’orée de la forêtdu Stade de France sans faire d’omelette, dans un dédaled’obstacles qui fait passer Jumanji pour un safari-photoéquitable. En cas de victoire, le joueur remporte le portefeuilleministériel.

Ailier gauche, j’évite aisément les plaquages à droite par unetribu de pygmées armés de Tasers rudimentaires. « Dosemumixam ! » bafouille dans un dialecte élyséen leur chefKhâ le Chër. La végétation étouffante s’efface et j’avanceprudemment dans une steppe bessonienne, où des Minimoysen survet’ draguent une Schtroumpfette déchirée aux champis.Soudain, pris de panique, ils s’engouffrent dans leur cité desmorilles. « Di-ding ! di-ding ! » Un tintement menaçant grossitau loin : je suis en plein dans le chemin de transhumanced’une horde de Vélib’ sauvages. La pédale dure et les pignonsdéchaînés, ils se ruent sur moi. Mon œuf d’autruche sous lebras, j’exhibe à temps mon Pass Navigo et les Vélib’ docilesse proposent de me prendre en selle.

La lisière du bois est à portée de vue, mais un All Black surgitdes marais Pukaki pour me mettre des bâtons dans les roues.Ma monture se cabre et me voilà poursuivi par un bataillonde géants vociférant un Hakka des plus effrayants. Pour merassurer, je pense à Booba, cette diva du début de siècle :«Je suis un pitbull, je suis un pitbull, je suis…» Capturé ettenu en laisse comme un caniche nain, je vais finir enmouillettes pour mon œuf d’autruche. Le salut des rugbymenpassera par le gazon synthétique.

_Etienne ROUILLON

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Thomas Dapont

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