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PRÉSIDENTIELLE 2018 Esso affaibli par la défaite de Biya dans le Littoral « Le travail avec Paul Biya c’est du sport permanent » Lire l’interview de Philippe Danga, ancien garde du corps de Ahmadou Ahidjo et Paul Biya. Pp. 8, 9 400 FCFA Tri-hebdomadaire régional d’informations du Nord-Cameroun N°1140 du lundi 29 octobre 2018 Directeur de la Publication : Guibaï Gatama AMCHIDE Deux personnes tuées par Boko Haram Grand-Nord Le gouvernement veut lancer le projet des 3000 forages en 2019 P. 5 P. 3 P. 3

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Page 1: Tri-hebdomadaire régional d’informations du Nord-Cameroun …...à Paul Biya dans le Littoral, où trône pourtant Laurent Esso. En effet, les scores de cette Région donnent à

PRÉSIDENTIELLE 2018

Esso affaibli par la défaite de Biyadans le Littoral

« Le travail avec Paul Biyac’est du sport permanent »Lire l’interview de Philippe Danga,ancien garde du corps de AhmadouAhidjo et Paul Biya. Pp. 8, 9

400 FCFA

Tri-hebdomadaire régional d’informations du Nord-Cameroun N°1140 du lundi 29 octobre 2018

Directeur de la Publication : Guibaï Gatama

AMCHIDEDeux personnes tuéespar Boko Haram

Grand-NordLe gouvernement veutlancer le projet des3000 forages en 2019 P. 5

P. 3

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A c t u a l i t é L’OE I L DU SAHEL N°1140 du lundi 29 octobre 20182

Par Jean Areguema

Le colonel Jackson Kamgaing,directeur du génie militaire a pro-cédé au démarrage effectif des tra-vaux de reconstruction de la routeMora-Dabanga-Kousseri, lesamedi 27 octobre 2018. L’activitéa eu lieu à Mora en présence detous les acteurs impliqués dans leprojet, et a été marquée par la réa-lisation de la planche d’essai auniveau du PK0 du chantier. Sur cesite, des engins et autres matérielset ainsi que le personnel ont étémobilisés. Selon le colonel JacksonKamgaing, le déploiement desmoyens logistiques et humains parle génie militaire vise à entamerles travaux à grande vitesse. Legénie militaire a ainsi lancé lacourse contre la montre. Aprèsavoir consommé huit mois pour lesétudes techniques, il a désormaisun délai de 21 mois pour acheverles travaux de reconstruction de laroute Mora-Dabanga-Kousseri. Ledélai est susceptible de prolonge-ment à en croire le colonel JacksonKamgaing. «S’agissant des délais

des travaux, ils ont été précisés audépart suivant les préinscriptionstechniques des routes initiales. Caril avait été prévu initialement quela route devrait être refaite entiè-rement entre Mora et Waza. Quantau tronçon Waza-Dabanga ildevrait s’agir de l’entretien avec lebéton bitumineux. Mais mainte-nant, au vu de la dégradation de laroute entre Waza et Dabanga, ilest question de refaire complète-ment la chaussée sur cette voie»,justifie-t-il.

Le démarrage effectif des tra-vaux par le génie militaire est sur-venu huit mois après le lancementofficiel des travaux RAR-MDK àKousseri le 1er mars 2018 par leministre des Travaux publics,Emmanuel Nganou Djoumessi.Depuis cette date, l’organe d’exé-cution du projet s’est investi priori-tairement dans la réalisation desétudes techniques et les travauxd’installation de ses bases à Mora,Waza, Dabanga et Kousseri. Maisla saison des pluies a ralenti l’évo-lution des travaux. Pendant cettepériode, les travaux ont été sus-

pendus. Maintenant que cettepériode est terminée, le chef demission de contrôle met la pressionsur tous les acteurs du projet à tra-vailler activement afin de remplirleurs cahiers de charge dans lesdélais. Selon nos informations, ilest également prévu dans le cadrede ce projet, la construction lelong du tronçon Mora-Dabanga-Kousseri, des infrastructuressociales telles que les forages, lessalles de classe, les tables-bancsou des dalles de séchage. Maisaussi la construction de deux sta-tions de pesage, dont l’une sur lasection de route Mora-Waza etl’autre sur la section Dabanga-Maltam-Kousseri.

En procédant au démarrage destravaux, le directeur du génie mili-taire a rappelé le caractère sousrégional de la route nationale N° 1.Pour le colonel Jackson Kamgaing,la réalisation de ce projet est suiviepar la plus haute autorité duCameroun en l’occurrence PaulBiya. L’attention particulière duprésident de la République pour ceprojet ne donne pas le sommeil aux

acteurs impliqués dans sa réalisa-tion.

La reconstruction de la routeMora-Dabanga-Kousseri avec lecontournement de Kousse se faiten régie axée sur les résultats.Coût des travaux : 69 747 mil-liards de Fcfa TTC. Soit 46 597milliards de Fcfa HTVA débloquéspar la Banque mondiale et 23 147milliards de Fcfa TTC par le gou-vernement camerounais. Les tra-vaux sont constitués en trois sec-tions : Kousseri-Maltam-Dabanga(72,5 km), Dabanga-Ndiguina-

Waza (70,5 km) et Waza-Mora(62 km).

En rappel, c’est suite à l’enlè-vement de dix ingénieurs chinoisdans la nuit du 16 au 17 mai 2014à Waza que les travaux de lareconstruction de la route natio-nale n° 1, tronçon Mora-Dabanga-Kousseri avaient été arrêtés. Lestravaux étaient exécutés par lesentreprises Synohydro et Jiangsu.La première avait en charge letronçon Mora-Dabanga et laseconde, la section Dabanga-Kousseri.

ROUTE MORA-DABANGA-KOUSSERI. Le génie militaire a 21 mois pour livrer l’ouvrage.

Démarrage effectif des travaux

Démarrage des travaux du génie militaire.

En termes d’équipements, nousavons la centrale de concassage quiest opérationnelle au niveau deWaza. Nous y avons déjà effectué unpremier tir il y a de cela environdeux semaines. Nous sommes à pré-sent en train de mobiliser tous leséquipements pour les premières uni-tés de terrassement. Aujourd’huinous lançons avec les planches d’es-sai qui nous permettent de pouvoirlancer les terrassements proprementdits. Les sites d’emprunt sont identi-fiés le long des différents axes. Nousallons commencer par Mora avec

une unité de terrassement et nouslancerons une deuxième unité de ter-rassement au niveau de Waza quireviendra du côté de Mora et nousserons ainsi de proche en prochepour atteindre Kousseri. Nous avonsrelancé une mobilisation complète.Mais maintenant, au vu de la dégra-dation de la route entre Waza etDabanga, il est question de refairecomplètement la chaussée sur cettevoie. Certainement les délaisdevront être prolongés et seront pré-cisés au moment opportun par qui dedroit.

Colonel Jackson Kamgaing, directeur du génie militaire.

«Il est question de refaire complètement la chaussée»

Nous avons repris les travauxaprès la période de suspensionsdue à la saison des pluies. Nousavons profité de cette périodepour capitaliser les études. À cejour, les études techniques sontpratiquement achevées. La saisonde pluies étant terminée, nousallons reprendre les travaux. Lareprise va consister en l’exécution

des travaux prévus dans le cahierde charge du génie militaire quiopère ici en tant qu’organe d’exé-cution. Les tâches de démarragevont consister en la reprise destravaux d’installation du chantier,à la reprise des travaux d’aména-gement de la plateforme et aussi àl’amélioration du trafic sur laroute Mora-Dabanga-Kousseri.

Oumarou Sanda, Chef de l’unité de suivi des travaux .

«Les études techniques sont achevées»

D’habitude la missionde contrôle est là pourcontrôler les travaux,mais sur ce projet, nousavons une double mis-sion. Puisqu’ici noussommes en face d’uneentreprise un peu excep-tionnelle vu les circons-tances de la région. C’estl’armée qui réalise ceprojet. Je profite de cetteoccasion pour saluer tousles militaires qui s’inves-tissent sur ce projet. Ilssont dévoués et ont vrai-ment la volonté de faire cetteroute. J’espère que d’ici dans18 mois, on va se voir àDabanga pour inaugurer lamise en service de la route.Je voudrais envoyer un mes-sage rassurant à toutes lespopulations camerounaisespour leur dire que noussommes là pour garantir laqualité des travaux afin qu’ilsse fassent dans les règles de

l’art et qu’il n’y ait pas dedérapage. À part notre mis-sion de contrôle, noussommes également en mis-sion d’assistance techniquedes militaires qui sont là etj’espère que d’ici la fin destravaux, nos amis militairesvont acquérir une grandeexpérience et je crois qu’ilsseront sollicités ailleurs pourd’autres opérations.

Ben Salha Abdelha,Chef de mission de contrôle des travaux .

« Nous sommes là pour garantirla qualité des travaux »

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Par Yanick Yemga

Même dans son Ouest natal,Maurice Kamto n’a pas réussil’exploit réalisé dans la région duLittoral au cours de la présiden-tielle d’octobre 2018. Les résul-tats dans cette Région des mon-tagnes donnent Paul Biya vain-queur avec une majorité relativede 48,19 %, mais devant le leaderdu Mouvement pour la renais-sance du Cameroun (MRC), qui arécolté 30,56 % des suffragesvalablement exprimés. En regar-dant plus près les scores, on serend compte que dans les Hauts-Plateaux dont est originaireMaurice Kamto, le candidat Biyal’a dominé avec 53,51 % des suf-frages exprimés en sa faveur,contre seulement 39,03 %. Battudonc où il avait le plus de pronos-tics favorables, le candidat Kamtoest allé faire mordre la poussièreà Paul Biya dans le Littoral, oùtrône pourtant Laurent Esso.

En effet, les scores de cetteRégion donnent à Maurice Kamtoune majorité relative de 38,60 %des voix contre 35,75 % pourPaul Biya. Dans le détail, le vain-queur de la présidentielle a gagnédans trois des quatre départe-ments du Littoral, notammentdans le Nkam (77,31 %), dans laSanaga-Maritime (49,03 %),

talonné par Cabral Libii et dans leMoungo (45,94 %), suivi parMaurice Kamto. C’est dans leWouri natal de Laurent Esso quele vote a basculé en faveur deMaurice Kamto, qui y inflige unesévère gifle à Paul Biya avec unscore de 46,21 % contre seule-ment 28,96 %. Le président de laRépublique n’a ainsi pu recueillirqu’un quart de l’électorat de laville la plus peuplée du Cameroun.

Ce revers est attribué à celuiqui se présente depuis quelques

années comme le patron politiquedu Littoral. Coordonnateur régio-nal des activités du RDPC dans laRégion et désigné président de lacommission régionale de coordi-nation de la campagne du candi-dat Paul Biya dans le Littoral,Laurent Esso s’est investi avecentrain et fougue pour la réélec-tion du président sortant. Il étaiten première ligne dès le 22 sep-tembre 2018, jour d’ouverture dela campagne électorale, avec lesleaders des partis alliés pour un

banquet politique où assuranceavait été donnée que Paul Biyas’en sortirait vainqueur haut lamain dans le Littoral. Il avaitmême bénéficié du ralliement deJean-Jacques Ekindi, qu’il com-mentera avec ces mots : «Le‘chasseur du lion’, pour la causela plus élevée de notre pays, n’apas hésité à entrer dans la mêmecage que le lion.»

Au vu du résultat, cela peutapparaître aujourd’hui comme unjeu de scène, avec l’objectif évi-dent de montrer un homme puis-sant dans « sa » région, à la têted’une équipe orientée vers la vic-toire de Paul Biya. Le fait est queLaurent Esso a subi un échec cui-sant dans une ville où il estdevenu, au fil du temps, le maitreincontesté. Ce qui remet en causeses ambitions non officielles pourle secrétariat du comité central duRDPC. Même s’il ne s’est pas lui-même attaqué à Jean Nkuete, letitulaire actuel du poste, celui-ci asubi les foudres des partisans duministre de la Justice, l’accusantde manœuvrer pour l’opposition,pour Maurice Kamto au nom de laproximité ethnique. Jean Nkuete,avec la victoire de Paul Biya àl’Ouest et la défaite de Paul Biyadans le Littoral, peut retournerleurs munitions à ses adversaires.

Le secrétariat général du

comité central du RDPC repré-sente pour Laurent Esso un stra-pontin arraché à ses aînés sawaset qui devrait logiquement leurrevenir, lui revenir puisqu’il en estaujourd’hui le leader. En effet, lepremier à occuper ce poste -secrétaire politique à l’époque -était François Sengat Kuo,jusqu’à 1990, date de sa démis-sion. Pour prendre sa place, PaulBiya choisit un autre côtier,Ebenzer Njoh Mouelle, fils duNkam et tout autant Sawa. Ilquitte le secrétariat du comitécentral du RDPC deux ans plustard à la suite d’une défaite auxlégislatives dans son Nkam natal.C’est alors que ce poste a quittéles berges du Wouri, au grandregret de Laurent Esso. Pour unepersonnalité à qui on prête desambitions présidentielles, la fonc-tion de SG du parti est plus questratégique dans la perspective dela succession.

Autrefois jugé distant et froid,Laurent Esso a travaillé son côtéhomme du peuple en s’impliquantdavantage dans les opérationspolitiques de terrain de son partiet en construisant un pelotonmédiatique qui sert à polir sonimage.

S’il a réussi à soumettre l’élitepolitique locale, il est loin de laséduction intégrale malgré sabarbe plus sel que poivre et sonexcellente tenue physique qui netrahit pas ses 76 ans. Avec ladéfaite de Paul Biya dans leLittoral, Laurent Esso a manquéde marquer des points pour lareconquête du secrétariat ducomité central du parti au pou-voir. Il ressort affaibli et, pour lapremière fois depuis bien long-temps, vulnérable dans la pers-pective du gouvernement post-présidentielle. Sans doute en a-t-ilconscience, lui qui est redevenusilencieux depuis la fin des élec-tions.

P o l i t i q u eL’OE I L DU SAHELN°1140 du lundi 29 octobre 2018 3PRÉSIDENTIELLE 2018. Le patron RDPC dans cette région n’a pu y empêcher la défaite du Rdpc et l’unique victoire régionale de Kamto.

Esso affaibli par la défaite de Biya dans le Littoral

Laurent Esso.

Par D. O.

Ali Goni et Youssoufou depassage dans la localitéd’Amchidé dans la nuit du 25 au26 octobre dernier ont été froi-dement abattus par des combat-tants de Boko Haram. Ils ont étésurpris par leurs bourreaux dansune concession abandonnée oùils avaient trouvé refuge ce soir-là. Ces derniers lourdementarmés les ont assiégés et les ontdépouillés de tous leurs biens.«Ils étaient six au total à avoirtrouvé refuge dans cette maison.Ils venaient tous de Lagos auNigeria. Ils étaient en route pourleurs villages qui sont des locali-tés camerounaises. Et comme ilfaisait nuit, ils s’étaient présen-tés au chef du quartier, BlamaAbagana et lui ont signifié leurintention de passer la nuit dans

le village. Le chef leur a montréune concession abandonnée oùils pouvaient passer la nuit. Ilss’y sont retranchés pour la nuit.Contre toute attente, ils ont dûsubir les assauts des combat-tants de Boko Haram qui les ontassiégés et les ont dépouillés detous leurs biens. Il était exacte-ment 22 heures et 45 minutesquand des crépitements de coupsde feu se sont fait entendre. Ilsont tué deux des six. À en croireles témoignages des quatre sur-vivants, ces derniers ont refuséd’obtempérer aux ordres queleur donnaient ces hors-la-loi. Ilsnous ont demandé de leur donnertout notre argent. Ce que nousautres avons fait. Mais eux, ils yavaient opposé un non catégo-rique à leur demande. C’est donccomme ça qu’ils les ont tués etdépouillés de tout ce qu’ils

avaient», déclare Modo Goni,membre du comité de vigilanced’Amchidé.

C’est aux environs de 18heures que les six compagnonsont franchi la frontière et sontentrés dans la ville d’Amchidé.Ils étaient à moto et transpor-taient tous des bagages. Ne pou-vant poursuivre le voyage, ilsont décidé de passer la nuit àAmchidé. Compte tenu ducontexte d’insécurité queconnait le village, ils se sontprésentés au chef de Yabogo I etlui ont fait part de leur inten-tion. Ne les connaissant pas etse voulant méfiant, le chef lesdirige vers une concession aban-donnée au cœur mêmed’Amchidé. Ceux-ci s’y instal-lent pour la nuit. Mais comblede malheur, ils sont attaquésaux environs de vingt-troisheures. Des combattants deBoko Haram constitués en plu-sieurs groupes assiègent tout lequartier dont la concessionabandonnée où se trouvaient cesderniers. Les habitants des dif-férentes concessions sont tenusen respect. « Ils ont formé plu-sieurs groupes et investi plu-sieurs concessions à la fois.Ceux d’Amchidé connaissentleur mode opératoire et se sontpliés à leur volonté cette nuit-là.C’est comme ça que tous ontéchappé à la mort ce soir-là.Cela n’a pas été le cas pour lesdeux qui ont tenté de leur résis-ter. C’est ce qui leur a valu lamort », poursuit Mal Goni,membre du comité de vigilance

d’Amchidé. Malgré l’intervention instan-

tanée des forces armées sur leslieux du crime, ces derniers ontréussi à replier au Nigeriaemportant avec eux une moto ettous les bagages de leurs vic-times.

AMCHIDE. Les terroristes lourdement armés ont par ailleurs dépouillé leur victime de leurs biens.

Deux personnes tuées par Boko Haram

Une vue de Amchidé.

Directeur de la PublicationGUIBAÏ GATAMA, Tél. : 699 92 32 70

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ChroniqueursMOHAMADOU TALBABANA BARKA

InfographieDamien KIDAHJuste Martial ZAMEDJO

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E c o n o m i eL’OE I L DU SAHELN°1140 du lundi 29 octobre 2018 5

Par Brice R. Mbodiam

«Toujours à la faveur dumême Plan (d’urgence Triennal,Ndlr), vous avez instruit laconstruction de 3000 foragesdans les trois régions septentrio-nales, dont les dossiers sont encours de structuration». En pro-nonçant cette phrase le 29 sep-tembre 2018 à Maroua, lors deson allocution devant le chef del’Etat venu dans la capitalerégionale de l’Extrême-Nord,dans le cadre de la campagnepour la présidentielle du 7 octo-

bre 2018, Cavaye YéguiéDjibril, le président del’Assemblée nationale (PAN), a-t-il subtilement mis la pressionsur le gouvernement, au sujet dece projet de construction deforages promis aux populationsdu Septentrion par Paul Biyadepuis 2011 ?

Même s’il est difficile derépondre à cette interrogation,l’on peut tout de même observerqu’onze jours après cette sortiedu PAN, le dossier des 3000forages a connu une nouvelleévolution. En effet, une corres-

pondance datée du 10 octobre2018 révèle que le ministre del’Eau et de l’Energie (Minee),Gaston Eloundou Essomba, atransmis au ministre del’Economie (Minepat), AlamineOusmane Mey, «le document deprojet réactualisé», tout en réi-térant à son collègue duMinepat son «besoin particulierde faire inscrire ce projet sur laliste des projets prioritairespour l’année budgétaire 2019».Dans cette optique, le Mineerequiert de la part d’AlamineOusmane Mey, la délivrance duvisa de maturité, qui ouvriradéfinitivement la voie à l’implé-mentation de ce projet devenu«l’une des premières priorités»du Minee, précise-t-il, «auregard du caractère importantde cette ressource (l’eau pota-ble, Ndlr) pour les populationsde cette partie du pays, en proieaux maladies hydriques».

Cette évolution notableobservée dans le dossier des3000 forages promis aux popu-lations du Septentrion lors dulancement de la campagne pourl’élection présidentielle de2011, est elle-même consécutiveà un atelier qui s’est discrète-ment tenu le 4 juillet 2018 àYaoundé, à l’effet de procéder àune relecture de l’ensemble de ladocumentation du projet. Selon

nos sources, cette séance derelecture avait révélé des imper-fections dans le montage du pro-jet, à l’instar de l’absence d’in-formations sur l’étude d’impactenvironnemental et social, ducoût unitaire très élevé retenudans la structuration du projet(13 millions le forage contre 8millions FCFA pour les projetssimilaires exécutés dans lecadre du BIP), et l’inadéquationentre le type de projet et l’offrede financement proposée par lesbailleurs de fonds.

MALADIES HYDRIQUESA l’issue de cet atelier, selon

nos sources, le ministre del’Economie avait alors concomi-tamment saisi le directeur géné-ral de la Caisse autonomed’amortissement (CAA), afin derequérir son avis et potentielle-ment des ajustements sur lesmodalités de financement de ceprojet, jugés problématiquesselon les conclusions de l’atelierdu 4 juillet 2018 ; puis le minis-tre de l’Eau et de l’Energie, afinque ce dernier et ses équipesactualisent la documentation dece projet annoncé depuis 2011,mais qui n’est véritablementdans le pipe du gouvernementque depuis 2016.

En effet, 5 ans après la pro-messe de Maroua en 2011, et au

bout d’une longue attente, l’es-poir des populations des régionsseptentrionales de voir enfin sematérialiser le projet deconstruction de 3000 forages àmotricité humaine dans leSeptentrion, sera ravivé à l’oc-casion du Forum «Investir auCameroun, terre d’attractivi-tés», organisé à Yaoundé en2016. Ce d’autant qu’à l’occa-sion de cette grand’messe del’investissement au Cameroun,le gouvernement a pu signer unMémorandum d’entente relatif àce projet, avec un consortiumd’entreprises formé par lasociété française VergnetHydro, deux sociétés chinoiseset une PME locale. Cette avan-cée dans l’exécution du projetavait été confirmée en 2017,avec l’arrivée sur la table dugouvernement camerounais,d’une offre de financement deBPI France et de la StandardChartered Bank.

Mais depuis lors, le dossiern’était plus ressorti des tiroirsdu gouvernement. Alors que lesmaladies hydriques demeurentparmi les affections les plusrécurrentes dans les régions sep-tentrionales du Cameroun, où iln’est pas rare de voir les popula-tions partager des points d’eauavec des animaux, du fait de larareté de ce liquide vital.

GRAND-NORD. La promesse faite par Paul Biya depuis 2011 est classée parmi les priorités du prochain exercice budgétaire.

Le gouvernement veut lancer le projet des 3000 forages en 2019

Un forage. Pourvoyeur d’eau potable.

Par Yanick Yemga

Le gouvernement camerou-nais est la recherche de 150 mil-liards de FCfa pour financer laréalisation de plusieurs projetsd’investissements. Dans l’op-tique de mobiliser lesdits fonds,l’État a lancé un emprunt obli-gataire correspondant à cetteenveloppe. La cérémonie offi-cielle de lancement et de présen-tation de cet appel public àl’épargne a eu lieu le 25 octobredernier à Yaoundé, en présencedu ministre des Finances, LouisPaul Paul Motaze, et à Doualale 26 octobre dernier.

Baptisé « ECMR 5,6 % net2018-2023», ce 5e empruntobligataire (depuis 2010) ad’ores et déjà suscité l’intérêt deneuf établissements bancaires etinstitutions financières locales,qui ont fait des prises fermes de121,5 milliards de francs Cfa.Dans le détail, il s’agit deSociété générale Cameroun,Afriland First Bank, EDCInvestment, et du syndicat deplacement constitué de laBICEC, CBC, UBA, BGFI, SCBCameroun et Financia Capital.Avec ces prises fermes, la quo-tité qui reste à mobiliser est de28,5 milliards de FCfa.

Cet emprunt obligataire estassorti d’un taux d’intérêt de5,6 % pour la durée de sa vali-dité (2O18-2023), et la sous-cription est ouverte du 29 octo-

bre au 09 novembre 2018.Selon la fiche de présentation decette opération de levée de fondspublics, l’obligation coûte 10000 francs Cfa, et le minimum àsouscrire est de 300 000 francsCfa, soit 30 obligations.

Au total, 39 projets d’enver-gure en cours dans les 10régions du pays seront financésavec l’argent mobilisé dans lecadre de cet appel public àl’épargne. À titre d’illustration,on peut citer le projet deconstruction du complexe spor-tif d’Olembé et ses voies d’accès,qui bénéficiera d’une enveloppede 30 milliards de FCfa, ouencore le barrage deMemvele’ele, qui recevra unedotation de 9 milliards de FCfa.

Le Grand-Nord héritera de 26,7milliards de FCfa, soit un peuplus de 15 % de l’enveloppe glo-bale de cet emprunt obligataire.

La région du Nord vaengloutir, à elle seule, 20,5 mil-liards de francs Cfa, dont 500millions de francs au titre d’ap-pui à la rénovation des équipe-ments de la Société de dévelop-pement du coton (Sodecoton).Le reste de l’enveloppe, soit 20milliards de francs Cfa, seraaffecté au financement des tra-vaux de finition de certainesinfrastructures de la Couped’Afrique des Nations de foot-ball, que le Cameroun accueil-lera entre juin et juillet 2019, etdont l’une des poules sera baséeà Garoua. L’on sait qu’une enve-

loppe de 8 milliards de francsCfa sera affectée à la réhabilita-tion du stade de Roumde-Adja etses voies d’accès, contre 12 mil-liards de francs Cfa pour laréhabilitation de quatre stadesd’entraînement. Soit 3 milliardsde francs Cfa pour chacun desstades annexes de Roumdé-Adja, Cenajes, centre d’entraî-nement de Coton Sports etPoumpoumré.

Dans la région de l’Extrême-Nord, les projets routiers encours, la Semry et l’ENS deMaroua, seront les grands béné-ficiaires du nouvel emprunt obli-gataire de l’État. Au total, 5,7milliards de francs Cfa serontaffectés à cette région.Concrètement, 2 milliards de

francs Cfa iront au financementdes travaux de réhabilitation desroutes Mora-Dabanga-Kousseriet Maroua-Mora, à raison d’unmilliard pour chacun des pro-jets. Une enveloppe de 2,7 mil-liards de francs Cfa sera affec-tée à la finalisation des travauxde construction de l’ENS deMaroua, tandis que la Semrys’en tirera avec un milliard defrancs Cfa, pour la rénovationde ses équipements de produc-tion. La région de l’Adamaouase contentera d’un petit milliardde francs Cfa. Il servira à finan-cer les travaux de constructiondu barrage de Bini à Warak,d’une capacité de production de75 MW d’énergie électrique.

FINANCEMENTS. Cette mobilisation de fonds vise à financer la réalisation de projets, notamment dans le Grand-Nord.

L’emprunt obligataire de 150 milliards FCfa officiellement lancé

Présentation de l’emprunt aux investisseurs.

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E d u c a t i o n L’OE I L DU SAHEL N°1140 du lundi 29 octobre 20186

Par Vladimir Martin

Mercredi 23 octobre 2018 àMaroua. Un petit groupe d’étu-diants de l’université de Marouaest en rogne. Il prend la direc-tion des services du gouverneurde la région de l’Extrême-Nordpour exprimer leur mécontente-ment. Mécontentement qui faitsuite aux multiples difficultésd’obtention de la prime de l’ex-cellence. Communément appeléePrimex par les étudiants, celle-ci est accordée aux étudiantsméritants, par le chef de l’État.Très vite, ils sont stoppés par lePr Benoit Loura, vice-recteurchargé du contrôle interne et del’évaluation, qu’accompagneRigobert Hinmasia, président del’association des étudiants del’université de Maroua.

Les étudiants s’arrêtent enexpliquant le motif de leurmécontentement. «Nousn’avons pas droit à nos 50.000FCfa représentant la prime.Pour la percevoir, il faut tou-

jours passer par un circuit où oncoupe 5.000 ou 10.000 pouravoir son dû. Et ce sont noscamarades qui ont des liaisonsmafieuses avec le personnel dela Daaf qui s’organisent en com-plicité avec certains responsa-bles de l’université pour nous

escroquer. Nous sommes fati-gués», se plaignent-ils. Uneaccusation qui est rejetée enbloc par les mis en cause quidisent ne rien savoir. Halirou,l’un des leaders d’étudiants dontle nom revient dans cetteaffaire, indique qu’il « s’agit

d’une manœuvre malsaine desétudiants qui cherchent à toutprix un responsable à accuser. »

Pourtant, quelques joursauparavant, des leaders d’étu-diants au rang desquelsBachirou Abassi ancien déléguégénéral des étudiants, HamadouFaissal actuel président de lamutuelle de solidarité des étu-diants de l’université deMaroua, Hinmasia Rigobertactuel président de l’associationdes étudiants, Khalimat etAïssatou tous deux en services àla Daaf de l’université deMaroua ont, précisent les étu-diants grévistes, mit sur pies unréseau qui viserait : « à aider desétudiants qui sont dans leGrand-Sud à récupérer leurargent contre une petite com-mission au détriment des étu-diants présents.»

D’après nos informations, leréseau est conçu de telle sorteque les étudiants se chargent decollecter les reçus et les copiesdes CNI ou des cartes d’étu-

diants dans les quartiers,ensuite, se rendent auprès deleurs contacts où ils passent à lacaisse soit au campus du collègede l’espoir soit dans l’un desbureaux de la Daaf à Kongola.Les rétro commissions viennentplus tard. Les caissières quifacilitent le payement perçoi-vent entre 5 000 et 10 000 FCfaselon la complexité du cas. Dansle meilleur des cas, le véritableprioritaire se retrouve avec 40000, dans le pire, il reçoit 30000 FCfa. Prise sur le fait,l’une des caissières a dénoncéles autres maillons de la chaine.Étudiants et enseignants sontconcernés dans l’arnaque. Et laplupart des étudiants concernésseraient de l’École nationalesupérieure polytechnique deMaroua. Informé, le Pr IdrissouAlioum, le recteur de l’UMA,dans un communiqué a appelé àplus de vigilance et a demandéaux étudiants à se référer à sesservices compétents.

UNIVERSITÉ DE MAROUA. Le sujet est sur les lèvres des étudiants et enseignants.

La prime de l’excellence fait des gorges chaudes

Interview réalisée par V.M

Sur quoi portaient lesrevendications des étudiantsgrévistes du 24 octobre der-nier ?

Comme préalable, je ne parle-rai pas de « manifestation », maisd’« impatience » encore qu’ellen’avait aucun fondement tant lecommuniqué n° 0018/346 du 17octobre 2018 publié par le rec-teur était clair en rapport avec lareprise du paiement de cetteprime à la date indiquée c’est-à-dire le mercredi 24 septembre2018 à 15 h : ce qui fut fait. Trèsrapidement, il faudrait savoir quedepuis plus de deux mois, lesordres de virement et de retrait àhauteur de 238 200 000 FCFAavaient été déposés à la trésore-rie générale de Maroua en rap-port avec cette prime, mais sanssuite. Il a fallu une relance de nosservices compétents en fin sep-tembre 2018 pour que des enga-gements nous soient donnés pourun virement diligent de cetteprime dans les comptes del’UMa. Par anticipation, l’UMa aconsenti de payer, dès le vendredi28 septembre 2018, sur ses pro-pres fonds, les premiers étudiantsbénéficiaires, en étant certainque la situation se régulariseraitaussitôt non sans informer cesderniers que l’UMa était toujoursdans l’attente des fonds relatifs àla prime d’excellence acadé-mique. Mais entre-temps, il y aeu des changements au niveaudes services et des personnels duMINFI en charge de cette acti-vité, ce qui a eu pour conséquenceun retard dans le virement desfonds. Mais la situation est ren-trée dans l’ordre avec le virementeffectif, le mercredi 24 octobre2018, dans les comptes de l’UMade la prime d’excellence acadé-mique et de la reprise de leur

paiement le même jour selon lecalendrier consacré. Et à date,nous avons déjà payé pour plus de140 000 000 FCFA soit près des2/3 des bénéficiaires et l’opéra-tion, sans doute, pour sa partierégulière, pourrait s’achever lasemaine prochaine, en attendantla phase contentieuse notammentles doublons, les oublis et autres.Il faudrait aussi dire que cettesuspension temporaire était due àdes dysfonctionnements observésdans la chaine de paiement decette prime notamment l’irrup-tion d’intermédiaires de tousgenres : ce qui a motivé les auto-rités universitaires à arrêterladite opération et procéder à sonassainissement. Fidèle à sa philo-sophie de transparence, l’UMa acommuniqué à chaque fois quecela a été nécessaire sur toutesses activités, surtout celles rela-tives à la gouvernance sociale,car pour nous, l’étudiant est aucentre de nos préoccupations.

Un réseau mafieux auraitété démantelé autour de ladistribution de cette primed’excellence académique,lequel réseau impliquerait desétudiants, des responsablesdes services financiers encharge du traitement et desresponsables du rectorat.Qu’en est-il exactement ?

Il a été porté à notre atten-tion des dysfonctionnements etimmédiatement, nous avonspublié un communiqué le 17octobre 2018 annonçant la sus-pension provisoire du paiementde la prime d’excellence et de sareprise le 24 octobre 2018, letemps d’y voir clair.Effectivement, à la lumière desdocuments consultés, des étu-diants, des responsables d’asso-ciation des étudiants, des person-nels d’appui et d’autres responsa-

bles de l’UMa sont impliquésdans ces dysfonctionnements.Pour l’instant, des investigationssont en cours sous la coordinationdu Vice-recteur en charge duContrôle interne et del’Évaluation en vue de déterminerla nature et les acteurs de cesdysfonctionnements. Il est évi-dent que des sanctions seraientprises à la fin des investigations,car chaque acteur impliquérépondra sur procès-verbal desfaits qui lui sont reprochés. Pourl’instant, il a été procédé à laréorganisation de cette chaine depaiement de la prime d’excel-lence académique ainsi que d’au-tres mesures conservatoires.Ajoutons que dans la majoritésinon dans tous les cas de figuresrépertoriés, ces intermédiairesont agi avec le consentement desbénéficiaires.

Combien d’étudiants sontconcernés par cette prime etquels sont finalement les cri-tères d’éligibilité ?

Partant du montant alloué,c’est-à-dire 238 200 000 FCFApour l’année académique

2016/2017, le calcul est vite faiten sachant que chaque étudiantdevrait bénéficier de 50 000 FCfa: ainsi le nombre d’étudiantsbénéficiaires est de 4764. Sontéligibles, les étudiants régulière-ment inscrits en Doctorat/PhD,Master, DEA et Maîtrise, 4e ou5e année d’une grande école (en2017/2018) ; étudiants du niveauII (inscrits en 2e année en2016/2017) et admis au niveauIII en 2017/2018) avec uneassez bonne moyenne obtenue àla session normale ; étudiants duniveau III (inscrits en 3e annéeen 2016/2017) et admis audiplôme de Licence avec uneassez bonne moyenne obtenue àla session normale : étudiantshandicapés à raison de 10 parétablissement. Sont exclus decette prime : les étudiants duniveau I régulièrement inscrits àl’Université en 1ère année en2016/2017) ; les étudiants redou-blants ; les étudiants en session derattrapage ; les ATER et les sala-riés de tous les secteurs.

Des étudiants étrangersbénéficieraient de cette prime

au détriment des étudiantscamerounais. Qu’en est-ilexactement ?

Au regard des critères d’éligi-bilité déjà énoncés, la réponse àvotre question est évidente : laprime d’excellence académiqueest octroyée aux étudiants denationalité camerounaise à l’ins-tar d’ailleurs du don de 500 000ordinateurs PBHeV du chef del’État.

Comment allez-vous garan-tir la transparence pour lasuite du payement ?

Pour garantir la sérénité et latransparence dans le paiement decette prime, des listes sont affi-chées, les guichets de paiements’exécutent par ordre alphabé-tique, l’interdiction absolue d’ad-mettre un intermédiaire, descontrôles inopinés des structuresde contrôle de l’UMA sont réali-sés. Sur un autre plan, desrequêtes des étudiants sont enre-gistrées et elles connaîtront untraitement diligent comme à l’ac-coutumée. Je profite de votre tri-bune pour une fois de plus réité-rer notre ferme volonté de com-battre sous toutes ses formes, lesactes de corruption et leurscorollaires, car à notre sens,l’éthique, la responsabilité et levivre ensemble ne sauraient s’ac-commoder de telles pratiques sur-tout à l’UMA qui ambitionned’instaurer une gouvernance uni-versitaire exemplaire. En outre,j’invite les étudiants bénéficiairesde la prime d’excellence acadé-mique à rester vigilants et surtoutà reporter à nos services, toutacte de nature à troubler la séré-nité de cette opération. Et pourfinir, l’UMA semble être la seuleUniversité d’État, à date, à avoirprocédé au paiement de la primed’excellence académique2016/2017.

Pr Idrissosu Aliou, recteur de l’université de Maroua.

«Des sanctions seront prises à la fin des investigations»

Des étudiants grévistes.

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Par Bertrand Ayissi

Un enseignant en servicedans un établissement deNgaoundéré, ne s’est toujourspas remis du traumatisme d’unsoir de novembre 2017.Revenant d’une virée nocturne,il surprend une de ses élèves auquartier Baladji 1. Celle-ci seprostitue. Bouleversé, maisadoptant une approche pédago-gique, le dialogue avec son élèvelui révèle qu’elle est « obligée »de chercher de l’argent pourpayer sa chambre, se nourrir,payer ses frais de scolarité etsurtout, envoyer de l’argentpour son enfant resté avec samère dans un village de larégion de l’Est. Le « secret» quilie depuis lors l’enseignant à sonélève demeure. Celle-ci a, aumoins, la volonté de poursuivreses études. Dans l’Adamaoua,nombreuses sont ces filles à êtreprécocement mères, et à n’avoirjamais connu le chemin del’école ou à avoir jeté l’éponge.Généralement abandonnées parles géniteurs de leurs enfants etplus souvent démunies, certainesont recours au centre social deNgaoundéré pour obtenir unepension alimentaire. Ici, dans leregistre des conflits conjugauxoù d’unions libres, plus de 200filles-mères se plaignent par an.« Les filles sont envoyées enmariage très tôt. La consé-quence, quand elles deviennentmatures, c’est qu’il y a trop dedivorces, ce d’autant qu’il nes’agit le plus souvent que dumariage coutumier ou religieux.C’est donc facile de s’en défaire,contrairement au mariage légal.Il est de plus en plus difficile devoir des mariages de 30 ou 40ans, car la femme a envie derefaire sa vie ailleurs, pareille-ment pour l’homme et ce sontles enfants qui en paient les frais», expliquait en 2017, SanamFatoumaka Keita, ancien chefdu centre social de Ngaoundéré.

La plupart du temps, seloncette responsable, ce sont cesfilles-mères qu’on retrouve enpremière loge dans les milieuxde la prostitution dans

l’Adamaoua en général, et ellessont impliquées dans bien d’au-tres tares sociales. L’instinct desurvie les y contraint, à encroire certaines avec qui nousavons échangé. D’autres ontpourtant choisi de prendre leurdestin en main, en allant àl’école, même en se compromet-tant.

CONTRAINTES Mais, l’école a ses exigences.

Et dans l’Adamaoua, on faitd’emblée fi du statut d’élève,fille-mère. « L’école ne discri-mine pas, mais prend l’enfantdans son entièreté. C’est pourcela que la tenue est imposée.La situation des filles-mères,étant dans une zone d’éducationprioritaire, quel que soit le cas,c’est simplement l’élève quenous recevons. Nous ne nousintéressons pas à la vie privée dechaque enfant en dehors del’école », confie MathiasAssana, délégué régional desEnseignements secondaires del’Adamaoua. Les filles-mèresdans les établissements de larégion sont bel et bien présentes.Il y en a qui acquièrent ce statutpendant leur scolarité, et lestextes sont clairs. « Il y a untemps pour toute chose. Le

temps de l’école doit êtreréservé exclusivement à l’écoleet à la formation. Mais, empor-tées par le désir, séduites par desbelles paroles, certaines de nosélèves sont appâtées et se lais-sent aller. La conséquence, c’estque de manière inattendue, sansêtre préparées, elles attrapentune grossesse. Lorsque le cas estdécouvert à l’école, les textesministériels prévoient que sil’auteur de la grossesse est unélève, les deux, garçon et fille,doivent aller en congé, jusqu’àce que la fille accouche. Et si lafille a l’âge pour reprendre sesétudes, elle le fait. Évidemment,quand elle reprend ses études, ily a problème parce qu’elle n’estplus seule. Il faut prendre soinde l’enfant, apprendre sesleçons, logiquement, la vie de lajeune fille est déjà bousculée.Cette fille doit donc avoir uneforce psychologique pour pou-voir réussir dans la vie», déclarele délégué régional desEnseignements secondaires del’Adamaoua.

Mais déjà dans l’Adamaoua,les filles-mères en général, etélèves en particulier, se doiventd’affronter la prise de positiondéfavorable des parents en casde grossesse. Il faut tenir face

au rejet. « Nous nous occuponsdes filles-mères élèves. Il fautpréciser qu’il y a des filles-mères au foyer, il y en a qui,depuis l’âge de 14 ans, sontmariées coutumièrement. Il y ena qui ont été répudiées. Il y en aqui sont devenues filles-mères àcause du viol ou de la fornica-tion. Ce domaine est très vaste.Pour ce qui est des élèves, filles-mères, elles sont généralementdans la tranche d’âge de 13 à 20ans. Évidemment, ces nombreuxcas issus des viols, répudiations,mariages précoces et même descas où la fille accomplit volon-tairement l’acte sexuel, ne sontpas faciles ; c’est compliqué. Laplupart est chassée de la maisonaprès une grossesse. Et c’estcompliqué qu’une enfant prennesoin d’un autre. Mais avec letemps, elles s’intègrent »,explique Aïssatou Alim, prési-

dente de l’Association pour laPromotion et la Protection desDroits humains etl’Accompagnement des Filles-Mères (Aprodhafim) basée àNgaoundéré.

TÉMÉRITÉ L’Aprodhafim ne compte pas

baisser les bras face au phéno-mène. « Notre association n’apas des moyens pour les prendreen charge, mais nous lesconfions aux affaires sociales ouà la promotion de la Femme etde la Famille. Nous faisons par-fois la médiation pour les rame-ner en famille. Nous convenonssouvent avec cette famille quel’auteur de la grossesse prend encharge l’enfant et la mère »,indique Aïssatou Alim.

En tout cas, c’est à brasouverts que la communauté édu-cative de l’Adamaoua accueilleces adolescentes « égarées » àmoment de leur vie. La mater-nité n’est pas un crime, maisc’est bien le temps où elle sur-vient qui pose problème, s’éver-tuent à faire comprendre lesenseignants aux élèves filles-mères. Cas pratique au lycéetechnique de NgaoundéréMardock, où quatre cas ont étérecensés durant l’année scolaire2017-2018. Les deux élèves en4e année Couture sur mesureont, en plus d’avoir enfanté,réussi l’examen du CAP et pour-suivent leurs études actuellementen classe de Seconde optionIndustrie d’Habillement. Celleen Première option Comptabilitéet Gestion a pu avoir son proba-toire et est inscrite en Terminalecette année. Comme quoi, êtrefille-mère n’est absolument unobstacle pour réaliser ses rêvesen s’éduquant.

ADAMAOUA. Généralement issues de familles pauvres, rejetées après une grossesse, certaines misent sur l’école pour réussir.

Le casse-tête des élèves mères dans les établissements

Mes sœurs. Réfléchissez avant d’agir.

Par Nadine Ndjomo

Elles sont mères, parfoisépouses et encore adolescentes.Dans les établissements sco-laires du Septentrion et passeulement, on retrouve cesjeunes «adultes» qui découvrentla vie, apprennent tant bien quemal ce qu’elle est, et font faceaux difficultés d’adultes. Neuffilles-mères sur 10 interrogéesdans les trois régions septen-trionales (Adamaoua, Nord etExtrême-Nord) du Cameroun,avouent leur défaillance quantà la capacité de pouvoir conci-lier aisément leur vie d’adoles-centes, d’élèves et surtout demères ou d’épouses. Entre sui-vre et respecter le programme

d’études et l’emploi du tempsimposé à l’école, la dose derigueur que nécessitent lesétudes, les caprices et les dés-agréments des neuf mois de lagestation, le courage, la res-ponsabilité et le sacrifice néces-saire à l’éducation d’un enfant,ces filles-mères ont de la peineà dissimuler leur comportementbenêt, très souvent puéril. Car àla réalité, ces « jeunes adultes »,victimes de grossesses pré-coces, sont encore des adoles-centes.

D’après l’institut de statis-tique de l’Organisation desNations unies pour l’éducation,la science et la culture(Unesco), ces filles-mères dansle Grand-Nord sont âgées de 10

à 18 ans. L’organisation onu-sienne estime d’ailleurs à 70 %le nombre de jeunes filles anal-phabètes dans le Septentrion.Et parmi elles, 23,4 % sontfreinées dans leurs études àcause des grossesses précoceset 12% de mariages précoces.C’est une situation déplorable,que combattent les différentesassociations de lutte contre lesviolences faites aux femmes etaux jeunes filles, les organisa-tions non gouvernementales(ONG) œuvrant dans ce sens,l’Etat à travers ses différentsministères en charge de la pro-motion de la femme, desaffaires sociales et surtout del’éducation de Base et desEnseignements secondaires.

La difficile conciliation école-maternité

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Philippe Danga, ancien garde du corps d’Ahmadou Ahidjo et Paul Biya.

«Paul Biya n’a jamais soulevé la tête devant son patron Ahidjo»Entretien mené par

Bertrand Ayissi

Qui est Philippe Danga ?Je suis un maréchal de logis-

chef à la retraite depuis 1996.Mais je précise que je suis né le27 février 1942 à Ngaoundéré,quand le clairon colonial son-nait. La nature m’a privilégié,car je suis fils d’un ancien sol-dat allemand, ancien caporal del’armée française ; engagé en1912 dans l’armée allemande,il est refoulé en 1918 et rappelédans l’armée française en 1920et y prend sa retraite en 1935.Mon père, le caporal Garga, aété rappelé pendant laDeuxième Guerre mondialepour être régisseur de la prisonde Ngaoundéré. Je suis unMboum de Ngaoundéré. J’aiabandonné l’école en 1959 auCours moyen 1, mais j’étais trèsbrillant. Mes camarades m’ap-pellent « 12 métiers avecquelques connaissances acces-soires ». Ce, parce que je suis unancien vendeur de kolas au mar-ché central de Ngaoundéréentre 1949 et 1950, ancientaxi-vélo de 1950 à 1953,ancien collecteur de l’or et dia-mant à Batouri en 1959, ven-deur au marché central deYaoundé en 1960, blanchisseurde 1962 à 1964, boucher,éboueur, etc.

Pouvez-vous nous racon-ter quelques moments pharesde votre carrière dans la gen-darmerie nationale ?

Je suis entré dans l’armée deterre en 1966. Je passe deuxans huit mois dans l’armée etj’ai changé de corps par voie deconcours en 1968. De fait, desmercenaires sont venus, ontattaqué et tué des élèves gen-darmes. Le commandant BoubaKaélé à l’époque, commandantdu bataillon de service et decommandement à Yaoundé, estparti avec ses troupes et a tuéces mercenaires qui détenaientdes armes lourdes. Bouba Kaéléa donc appelé le présidentAhidjo qui est venu voir, pourconstater que les soldats came-rounais avaient des petitesarmes et que ces mercenairesavaient des armes modernes.Séance tenante, le présidentAhidjo a téléphoné en France,pour commander des armes. LaFrance a dit qu’elle envoie dessemi-automatiques. Le prési-dent Ahidjo en a demandé lasignification et les technicienslui ont dit qu’il s’agit d’armesqui prennent seulement dix car-touches. Mais les mercenairesavaient des Fal» de 20 à 50cartouches. Le président Ahidjon’a pas demandé l’avis de laFrance, et a envoyé le généralNganso qui était commandant àl’époque, pour aller chercherdes armes en Belgique. Ce sontces armes que nous utilisons

jusqu’à présent. Le présidentAhidjo a aussi décidé qu’à par-tir de cet instant, le centred’instruction des policiers, gen-darmes et militaires, c’était àNgaoundéré. Il a ainsi décidéqu’on choisisse 75 meilleurs sol-dats pour renforcer la gendar-merie par voie de concours.J’étais parmi les 1800 per-sonnes à avoir compéti, mais onn’a pris que 39. Car l’époque,entre 1968 et 1969, leCameroun comptait 39 départe-ments. Donc, je représentais,moi seul, l’immense départe-ment de l’Adamaoua del’époque qui s’étendait de Mbé àBankim. À l’issue de ceconcours, tous les nordistesavaient été reversés à la prési-dence pour la sécurité. Les lau-réats anglophones sont partis àl’école de gendarmerie et lesautres déployés ailleurs.

C’est après le concoursque vous vous retrouvez doncauprès du président Ahidjo ?

Oui, effectivement. Je faispartie de la garde rapprochéedu président Ahidjo de 1968 à1975. Avec les autres cama-rades, nous assurions la protec-tion du chef de l’État dans tousles palais, y compris sa familleet les biens. Il y a des gardes quivoyageaient avec lui à l’inté-rieur comme à l’extérieur dupays, les autres restaient surplace. Il faut préciser que lagarde et les mouvements du pré-

sident étaient rotatifspour mes camaradeset moi. Moi j’ai parti-culièrement fait tousles déplacements duchef de l’État à l’inté-rieur du pays pendantsept ans.

Alors, qui est leprésident AhmadouAhidjo que vouscôtoyez pendantsept ans ?

Le présidentAhidjo est un com-mandeur de laRépublique. C’était unhomme très discret.Même au palais, on levoyait de temps entemps. Il m’est arrivéune fois, en 1969,tout jeune gendarme,de le rencontrer dansson salon le matin à 7 h, en par-tant hisser le drapeau à l’ancienpalais où se trouve actuellementle musée national et le ministèredes Arts et de la Culture àYaoundé. En effet, j’avais ledrapeau entre les mains et lesportes se ressemblaient ; nesachant quelle porte ouvrir, jeme retrouve directement ausalon où je tombe sur le prési-dent Ahidjo en train de boireson café. Apeuré, j’ai serré letalon, donnant mon adresse : «Gendarme Danga Philippe, enservice à la présidence, sécuritérapprochée du chef de l’État,

légion garde weekend, escadronhonneur numéro 1, peloton hon-neur numéro 2, secrétaire, à vosordres, Excellence monsieur lePrésident ». Il m’a demandé demanière très affable : « Quepuis-je pour vous, monsieur legendarme ? » Je lui ai répondu :« Je me suis trompé de porte,Excellence ». Il a tellement ri,s’est marré, et m’a demandé sije pouvais me retrouver. J’airépondu par l’affirmative. J’aivraiment été marqué parce leprésident n’a fait que m’appeler: « Monsieur le gendarme ». Jesuis sorti, j’ai attaché le dra-peau avec difficulté parce que je

pesais 54 kilogrammes ; maismes camarades Toupouri, trèsforts qu’ils étaient, l’attachaienttoujours avec toute leur énergie.Donc, pour détacher, c’était unproblème, mais j’ai réussi àdétacher et attacher le drapeau.Et quand je descends, je revoisle président Ahidjo et je vaisencore, tout paniqué, me pré-senter. Il m’a dit : « Je connaisdéjà ton adresse ». Il a sorti uneenveloppe qui contenait 100000 FCfa, et me l’a glissée.J’étais aux anges ce jour-là.

Au-delà de cette rencon-tre fortuite avec le présidentAhidjo, y a-t-il un autre faitqui vous a marqué durant lessept années où vous avezservi dans sa garde rappro-chée ?

Je vais sincèrement vousdire que président Ahidjo étaitcraint. Nous avions tous peur delui. C’était un homme imposant,mais une personne très géné-reuse et très expéditive. Je vousconte une autre anecdote. Aprèsla réception du 20 mai 1973 aupalais, nous les hommes degarde avions le buffet à notreportée. Étant handicapé detaille, j’ai pris un gros verre,dose adulte, et je l’ai remplid’un cocktail de jus, cham-pagne, whisky, vins… J’ai com-mencé à chanter la louange del’alcool, sans savoir que le pré-sident Ahidjo était au-dessus denous, en train d’écouter. Jedisais : « Oh, toi alcool ! Toi quiragaillardis les jeunes et forti-fies les vieillards, toi que musul-mans et protestants ont refuséet nous t’avons accepté avec boncœur, vas, nous te trouvonscomme cercueil notre gorge etcomme tombeau, notre ventre.Repose en paix ! » Aussitôt quej’avais fini mon ode à l’alcool,voulant boire, le présidentAhidjo a éclaté de rires, et pournous les gardes, c’était ladébandade. Nous avons fui.C’est comme ça qu’il a envoyél’aide de camp, le capitaineGoura Beladji pour me deman-der de réciter encore monpoème. Le capitaine m’a dit quej’avais fait rire le président et ilétait venu avec un calepin pourécrire mon poème. J’avais peurd’être puni, mais il m’a rassuréque le président avait plutôtadmiré le poème et la manièrede le réciter. Le présidentAhidjo a passé 72 heures avecce poème, le partageant au télé-phone avec ses amis prochesHouphouët Boigny et LéopoldSédar Senghor, leur signifiantque c’est son gendarme qui enest l’auteur.

Connaissiez-vous PaulBiya, l’actuel président de laRépublique du Cameroun,pendant que vous gardiez leprésident Ahmadou Ahidjo ?

Permettez-moi d’abord de

Né le 27 février 1942 àNgaoundéré, il se présentecomme « soldat habillé en gen-darme ». Philippe Danga, Mboumde Ngaoundéré qui vit paisible-ment sa retraite dans sa villenatale depuis 1996, a le privilèged’avoir servi le premier présidentdu Cameroun, Ahmadou Ahidjo,et l’actuel président Paul Biyadont il a assuré la garde pendantun mois, du temps où il étaitalors secrétaire général à la pré-sidence de la République. Cethomme très cultivé, véritablerhéteur, se remémore quelquesmoments de son service auprèsdes deux hommes d’État, nonsans se prononcer sur l’actualitéaprès l’élection du 07 octobredernier.

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E n a p a r t éL’OE I L DU SAHELN°1140 du lundi 29 octobre 2018 9dire que le Cameroun a lachance d’avoir eu, jusqu’ici,deux hommes d’État, dont leprésident Paul Biya, qui ontleurs bonnes qualités et leursdéfauts. Je connais justement leprésident Biya pendant que j’of-ficiais dans la garde rapprochéedu président Ahidjo. Je vaisd’ailleurs vous dire que le prési-dent Biya a été mon patrondirect. Je l’ai gardé pendant unmois quand il était secrétairegénéral à la présidence. Eneffet, son garde du corps per-sonnel était parti en congés. Onavait demandé qui devait allergarder le secrétaire général,précisant qu’avec lui, c’est lesport permanent. On m’a dési-gné et ça me convenait parcequ’auparavant, j’avais fait dutaxi-vélo à Ngaoundéré. La pre-mière question qu’il m’a posée,c’était si je connaissais monterà vélo. Je lui ai dit : « C’est maspécialité, Excellence monsieurle ministre d’État ». Nous avonspassé un mois de travail joyeux.Il voulait même me garder.Nous faisions du vélo tous lesjours, principalement sur laroute de Mbalmayo et de tempsen temps, il partait au cinémaAbbia pour regarder des films.En un mois, je découvre unhomme très calme, très assiduet ponctuel. Pour le ministrePaul Biya de l’époque, l’heurec’est l’heure. Je travaille avecun homme très respectueux, quin’a jamais soulevé la têtedevant son patron Ahidjo. Il luiavait toujours fait allégeance.Au bout d’un mois, on s’est

séparé et de temps en temps, jepartais le saluer au bureau ou àdomicile. Nous avons coupé lesponts quand il est devenu prési-dent de la République. Ce d’au-tant que je me suis retrouvédans les unités territoriales dela gendarmerie et j’avais beau-coup de travail.

Qu’advient-il lorsque vousquittez la présidence de laRépublique en 1975 ?

Ayant servi de 1968 à 1975à la garde rapprochée du prési-dent Ahidjo, je suis redéployé àla brigade territoriale deNgaoundéré comme gendarme.J’ai par la suite passé leconcours Ciat 2 gendarmerie en1982 et je deviens maréchal delogis en 1985. J’ai été affecté àla brigade territoriale de Tibati,ensuite à Bafoussam où j’aipassé quatre ans à commandercette brigade. Il faut noter qu’àl’époque, de 1960 à 1985, lescommandants de brigadeétaient des maréchaux de logiset maréchaux de logis-chefs.Donc, j’ai commandé 28 gen-darmes à la brigade ter-ritoriale de Bafoussamétant maréchal de logis-chef, et celles deBandjoun, Bamendjou.C’est après que j’ai étéramené à l’état-major àNgaoundéré commechef de service généraladjoint de 1992 à 1996quand j’ai pris maretraite.

Quel regard por-

tez-vous aujourd’hui sur lagendarmerie et l’armée engénéral où certaines dérivessont de plus en plus relevées?

Les choses ont changé parceque maintenant, les gens met-tent l’argent devant. Chacunveut être riche par tous lesmoyens, ce n’était pas commeça à notre époque. Nous travail-lions d’abord pour mériter notresalaire. Je me rappelle quandj’étais à la brigade territorialede Bafoussam, j’ai procédé àl’arrestation d’une élite qui m’aprésenté trois millions FCfa ? Jelui ai demandé de payer l’avocatqui devait le défendre. Il s’estmis à pleurer, disant qu’iln’avait jamais fait la cellule. Ilavait quatre chefs d’accusation :détournement d’un camion de65 millions FCfa, émission d’unchèque sans provision de 42millions, escroquerie foncière etmenaces à main armée. J’aibouclé mon enquête, il a faittrois mois de prison et quand ilest sorti, il m’a cherché pour meremercier.

Que vous inspire la réélec-tion de Paul Biya à la prési-dence de la République, dansun contexte où des contesta-tions postélectorales fusent ?

Je vais vous paraphraser unproverbe haoussa qui dit que lepet après le caca ne sent plus.C’est juste une manière de direà ceux qui s’agitent que Biya estlà parce que Dieu en a décidé.Lui-même a dit que ne dure paspouvoir qui veut, mais qui peut.C’est Dieu seulement qui val’enlever. Tous ceux qui aspirentà la fonction présidentielle auCameroun, pour le moment,doivent attendre. Je me rappellede Mitterrand qui a d’abord eu10 ou 7 % à sa première candi-dature. Finalement, il estdevenu président. Ne soyonsdonc pas pressés, ne bousculonspas les choses. Paul Biya abattu très lamentablement sesadversaires et ils doivent lecomprendre. Donc, toutes lesmenaces qui se font sont et res-teront sans effet. Et puis, n’ou-blions pas que les Camerounais

sont très matures. On avu certains qui ontrépondu à ces contesta-taires de faire d’abordvenir leurs enfants del’étranger pour qu’il yait des marches de pro-testation.

Quels conseils pou-vez-vous donner auxCamerounais ?

Aujourd’hui, j’ai 76ans et huit mois. Et

quand vous voyez une personnevieille et heureuse, ce n’est pasle fait du hasard. Il y a desrègles de vie qu’il faut suivrepermanemment. En tant quedocteur en conseils moraux, jepeux donner trois règles auxCamerounais. Premièrement, ilfaut agir en homme civilisé. Etpour être un homme civilisé, ilfaut maîtriser sept choses : lacrainte de Dieu quelle que soitla religion, la vérité doit être lanourriture de chacun, lapatience doit être le souffle del’Homme, il ne faut pas insul-ter, il ne faut pas dénigrer, il nefaut pas envier quelqu’un et ilne faut pas prendre la chose dequelqu’un. La deuxième règle,c’est qu’il faut aimer troischoses, détester trois choses etcontrôler trois choses. Il fautaimer Dieu, ta famille au sensle plus large qui intègre sim-plement l’être humain, et pro-téger son honneur. Il fautdétester le mensonge, laméchanceté et la naïveté. Ilfaut contrôler ta langue, taconduire et ton caractère.Troisièmement, pour terminer,il faut savoir banaliser les 10conflits que gère un êtrehumain. Nous gérons le conflitde races, le conflit de tribus, leconflit de familles, le conflit degénérations, le conflit intellec-tuel, le conflit religieux, leconflit de solidarité, le conflitd’intérêts, le conflit d’égalité etle conflit des hommes. Ce sontmes imaginations, je n’aiappris tout cela de personne.

Je vais vous paraphraser un pro-verbe haoussa qui dit que le petaprès le caca ne sent plus. C’estjuste une manière de dire à ceuxqui s’agitent que Biya est là parceque Dieu en a décidé. Lui-même adit que ne dure pas pouvoir qui

veut, mais qui peut.

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Par Marie Lucie Ayaka

Le « tchatcha merengué » estl’un des titres phares du chanteurAli Baba de regrettée mémoirequi a ému de nombreux mélo-manes à l’échelle nationale etmême internationale. Ahmadoude son vrai nom est née en 1955 àYaoundé. Son père était d’originesénégalaise et sa mère uneCamerounaise originaire duMbam et inoubou dans la régiondu Centre. Son papa qui s’appe-lait Ali Baba, nom qui sera utiliséplus tard par Ahmadou commeson nom de star a été affecté à la

mairie de Garoua. Très tôt, ils sesont approprié la culture duGrand-Nord. Auteur de troisalbums de plusieurs titres tels que«wayo» sorti en 1985 et produitpar… en France qui est une chan-son de réjouissance, «tchatchameringue» sortie en 1986 et pro-duite par Moussa Haissam,«mbéré kaki» paru en 1887, sonstyle particulier et séducteur fai-sait rêver plus d’une femme.

Le père du « tchatchameringue et plusieurs autresartistes de renom tel que ManuDibango avait commis un titre àl’honneur de l’inauguration du

palais des congrès en 1982.Auteur, compositeur, guitariste,percussionniste, peintre et acro-bate, Amadou débute en 1980dans le Ballet national duCameroun, une troupe qui lui apermis de maîtriser les œuvres dupatrimoine musical du pays. Ilréussit à promouvoir la danseNyama nyama et des musiquessahéliennes du Nord du Camerounet créer son propre style, leGoumba Soul Gandjal. Il décèdeen 2004 de suites d’une insuffi-sance rénale et laisse huit enfantsorphelins.

C u l t u r e L’OE I L DU SAHEL N°1140 du lundi 29 octobre 201810

Certaines sont connues, d’autres moins. Il y en a qui se sont éteintes,mais qui restent gravées dans la mémoire collective nationale.Ressortissants du Grand-Nord, ces artistes ont en commun de repré-senter dignement le riche patrimoine culturel de cette partie du pays.

Dans l’optique de leur rendre hommage, votre journal présentequelques-unes de ces voix emblématiques du Septentrion.

Un dossier de la rédaction

ALI BABA

Le père du « tchatcha merengué

Par Bertrand Ayissi

Lorsque Amina Poulloh voit lejour le 21 février 1969 à Tibati,elle ne se doute pas qu’un jour ellefera des émules avec sa voix. Néed’un père fonctionnaire ressortis-sant de Mokolo dans le départe-ment du Mayo-Tsanaga et d’unemère native de Bogo dans leDiamaré, la jeune Amina est édu-quée dans la pure tradition musul-mane. « Je suis entrée dans lamusique parce que naturellement,j’aime la danse. Mais je ne mevoyais pas devenir artiste musi-cienne en tant fille peulhe musul-mane. Et quand la télévision estarrivée au Cameroun, j’aiconstaté que les filles de toutes lesrégions chantaient, mais il n’enétait rien dans le Grand-Nord. Jeme suis donc : pourquoi ne pasessayer ? Il faut pourtant avouerque le véritable déclic avec lamusique, c’est à la suite de mondivorce. Car je me sentais seule,ne pouvant quitter le mariageavec mes trois enfants parce quela tradition musulmane l’impose,j’ai commencé à aller m’amuserdans les cabarets pour calmer mesdouleurs. C’est ainsi que le chefd’orchestre du cabaret Mizao àMaroua, le défunt SamsonTchatchoua qui était un pianiste, adétecté en moi un talent et m’abeaucoup encouragée à faire car-rière dans la musique », se remé-more-t-elle. Passer outre la tradi-tion et culture musulmane, n’estpourtant pas de toute aise pour lajeune artiste en herbe. La craintede la réaction des parents estmême une hantise. Mais lespetites voix de la muse qui som-meillent en Amina Poulloh, fini-ront par s’extérioriser. Elle sortun premier single avec l’aide dupiano de Samson Tchatchoua. Etles hommes de média s’intéressentà elle, Amina Poulloh prend goûtà la musique.

« L’État m’a beaucoup aidée,

ce qui n’a pas été le cas des élitesdu Septentrion et de mes parents.C’est quand j’ai été nominée auCanal d’or en 2011 que le Grand-Nord a compris que je valorise laculture du Sahel et des gens ontcommencé à m’apporter du sou-tien. C’est le cas d’Alhadji KadriYaya qui m’a aidée parce qu’il estfan de la musique sahélienne.Aujourd’hui, celle qui me soutientle plus, c’est Aminatou Ahidjo. Leministère de la Culture actuel m’aaussi aidée pour mon nouveau sin-gle qui va sortir incessamment,intitulé la beauté africaine. Parcontre, j’ai beaucoup plus été sou-tenue par des “Gadamayo”, c’estpour cela que je me sens à l’aise àYaoundé», affirme l’artiste. Ausommet de sa renommée, AminaPoulloh n’est pourtant pas à l’abrides critiques. De fait, certainsmusulmans qualifient toujours seschansons comme osées. Mais l’ar-tiste a appris à être au-dessus detelles considérations. «Être latoute première fille musulmane à

devenir chanteuse à l’époque,était déjà très grave pour cer-tains. Mais je ne fais que dire lavérité dans mes chansons, car unartiste est un messager et conseil-ler. Si en chantant l’amour, lesgens analysent autrement, libre àeux. De fait, j’ai remarqué quedans le Grand-Nord, les femmessont lésées ; l’homme ne donneque de l’argent à la femme, toutce dont elle a besoin, mais iloublie le détail qui lie vraiment unhomme et une femme. Il y en a quiabandonnent leurs femmes pen-dant six mois, celle-ci ne rase queles murs. Donc, je passe le mes-sage aux hommes, pour leur direque nous, les femmes musul-manes, n’avons pas seulementbesoin d’argent, de bijoux, devêtements ; mais nous avonsbesoin de la présence de nosmaris. Au-delà de tout, il ne fautpas fier à ces critiques, ceshommes aiment ma chanson etl’ont jalousement dans leurs télé-phones.

Par Nadine Ndjomo

On a beau la critiquer, maisSélangai est l’une des artistes lesplus en vue de l’Adamaoua.Quand on parle de musique danscette région, on ne peut ne pas laciter. Parfois, c’est à se demandersi elle est la seule artiste chan-teuse de la région Château d’eau.Que Nenni ! Evoluant dans unmilieu jadis misogyne, cette fillede Meiganga dans le départementdu Mbéré, région de l’Adamaoua,a su se faire une place. Une placesombre pour certains, parce quetrès souvent comparée à “lafemme du peuple” à cause de sonhabillement et sa lascivité. Maisdes qu’en-dira-t-on, Marie Adizade son vrai nom, n’en a cure. Ellearbore tête haute, sourire éternelsur son visage de poupon, tous lesattributs qu’on lui donne à tort ouà raison. Dans “Bizannou” ou“les hommes du monde”, son der-nier album (2017) elle revient surces infamies qu’elle reçoit. EnGbaya ; sa langue locale, elleaborde aussi des thèmes dont lahaine, le triste sort réservé auxfemmes stériles, par la sociétéafricaine, mais davantage par labelle-famille. Sélangai condamne

l’inceste, en faisant des remon-trances aux parents, qu’elleaccuse d’être les auteurs de cetacte ignoble. Célibataire et mèrede deux enfants, la chanteusevomit les hommes qui abandon-nent femmes et enfants, une foisque leurs conditions de vie s’amé-liorent. Alors que ceux-ci étaientlà alors qu’il était au plus bas.Dans les bacs depuis un an,Bizannou est en promotion. C’estd’ailleurs le deuxième album solode cette actrice. Le premier, “beoly” ou “orphelin” en langueGbayas, est sorti en 2010. Un anplus tard, la jeune artiste, âgée de25 ans à l’époque, sort avec le“Gnassara” ou le “grand appel”groupe qu’elle a créé, le deuxièmealbum. Né le 23 mai 1986 àYaoundé, le patronyme deSélangai n’est pas seulement colléà la musique. Élève de l’alliancefranco-camerounaise deNgaoundéré, c’est dans cetteécole de l’art pluriel que MarieAdiza découvre, apprend, se pas-sionne et démarre une carrièredans le 7e art. Aujourd’hui, elleest à plus d’une dizaine de colla-borations avec des réalisateurstels que Harisiapi, Hans Bello,Thierry Ntamack…

SÉLANGAI

La sirène du château d’eau

MUSIQUE

Ces voix qui font honneur au Grand-Nord

AMINA POULLOH

La reine du Sahel

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C u l t u r eL’OE I L DU SAHELN°1140 du lundi 29 octobre 2018 11

Par Vladimir Martin

«Lorsque j’élève ma voix àtravers l’univers c’est pourchanter les souffrances de laterre, je chante pour lesenfants qui n’ont plus demère...» Ce sont ces paroles deson titre l’orphelin qui ont faitd’Abdoul Benito l’un desartistes sahéliens les plus célè-bres de sa génération. Né àGaroua dans la région du Norden 1953, Abdoul Benito estofficiellement enregistré aucentre d’État civil sous le nomde Marcus Wotema Baouro.Issu d’une famille donc le pèreserait originaire de l’EstCameroun, il se montre trèsvite intéressé par les sonoritéssahéliennes. Jeune, écouter lamusique tout en mimant sem-ble être l’un de ses passe-temps favoris. Pourtant, c’estL’enseignement qui sera finale-ment le métier de sa vie.«Nous avons été étonnés de levoir entrer à l’École normaledes instituteurs d’enseigne-ment général de Garoua plus

connu sous le nom d’Enieg», sesouvient l’un de ses camaradesd’école. Enseignant, AbdoulBenito se montre assez sérieuxà la tâche au point d’être unpeu détesté de ses élèves quin’aimaient pas trop l’école.«Je me souviens qu’un jour ilétait venu chercher mon feugrand frère en le tenant parl’oreille de la maison jusqu’àl’école qui était environ à 100mètres de chez nous», se sou-vient Djonmaila, un de sesanciens élèves.

Pourtant, mieux que l’en-seignement, ce natif de Garouaà la musique qui coule dans sesveines. S’il est tant féru demusique, c’est bien parce queson père l’y entraine innocem-ment. «Son père était un mélo-mane qui se plaisait à séduireles foules avec sa musique», sesouvient un de ses anciens voi-sins d’enfance. S’il ne fait pasles rues pour chanter, il nereste pas assidu à sa jeune car-rière qui a failli tourner auvinaigre. «Avant 1990, il com-pose une chanson qui avait été

attribuée à tort à OttouMarcellin qui était de loin sonaîné dans la musique. C’était‘L’orphelin’, une très bellemélodie qui avait d’ailleursservi pour un film à la CRTV.Mais le temps lui donnera rai-son parce que lorsqu’il réussità attraper un vrai producteur,cette chanson fera le tour dumonde et le sortira de l’om-bre», se souvient Aladji un de

ses proches. Très vite, il monterapidement les marches de la

célébrité au point d’être l’in-vité de toutes les grandes céré-monies de Yaoundé. Fort decaractère, parfois impulsif,mais très attaché à ses amisdonc il traînait toujoursquelqu’un lorsqu’il devait seproduire, Abdoul Benito étaitjusqu’à sa mort père de huitenfants à qui il inculque de sonvivant un rythme de travailsans complaisance. Mort desuite d’insuffisance rénale etde pneumonie le 26 janvier2012 à l’hôpital régional deGaroua, Abdou Benito estinhumé le même jour au cime-tière musulman de Garouacomme l’exige la traditionmusulmane.

ABDOU BENITO

Le père des orphelins

Par Marie Lucie Ayaka

Isnebo est l’un des pion-niers du célèbre groupeFaadah Kawtal créé en 1992.Lequel a fait chavirer lescœurs de nombreux mélo-manes des régions septentrio-nales et du Cameroun. De sonvrai nom, Daniel Haman, lepère du goumba balewa, cerythme assez original a écritses premiers textes en 1985.Deux ans plus tard, il a com-mencé à prester au sein de plu-sieurs groupes comme le roca-fiesta. Il est originaire de larégion du Nord, plus particu-lièrement du village Biou dansle département du Mayo-Louti. Plusieurs opportunitésse sont présentées à lui àsavoir la réalisation de labande originale d’un film dePatrick Grandperre, réalisa-teur français qui lui a permisde se révéler au monde entier.Cet homme de 52 ans a beau-coup appris en travaillant avecAli Baba, Sanda Oumarou,Abdoul Benito et bien d’autresartistes.

Ce fin poète peint la sociétételle qu’elle est en dénonçantles fléaux auxquels elle faitface à travers ses textes. C’estle cas de “Kilanta”, qui fustigela femme africaine modernequi ne parvient pas à faire sondevoir dans le foyer. Jadis, laseule présence d’une femme àla maison garantissait le faitque la maison soit bien chauf-fée et bien rangée... Par contreson absence se fait ressentirtout de suite, par ce que

l’hommeétant occupé à chercher lesmoyens pour la survie du foyer.Suite au problème d’insécuritéqui sévit dans le Grand-Nord,sous sa houlette, un collectifd’artistes musiciens appelé“Ngondal” à vue le jour. Ceux-ci ont commis le titre“Déhédé” pour sensibiliser legrand public à vivre dans apaix.

L’artiste a également uneprédilection pour l’amour, entémoignent les nombreux titresde ses albums comme “Béléréberdé am”, “Mariam” les-quels sont fredonnés lors desmariages à la sahélienne.D’autres thèmes comme le

vivreensemble, l’immigration desjeunes sont évoqués par le filsdu Mayo-Louti. C’est le cas de“Derkédjo” issu de son toutpremier album, dans lequel ilparle de ces jeunes qui aspirentà s’expatrier sans s’être prépa-rée. Alors ils vont faire l’objetde toutes les souffrances là-bas. A travers sa musique, ilessaie de les dissuader en lesconscientisant sur le fait quenotre pays aussi regorge debeaucoup d’opportunités. Ilsuffit de se retrousser lesmanches pour pouvoir prospé-rer. L’artiste se prépare à com-mettre un nouvel opus pour laCAN total 2019.

Par M.L.A

Originaire du Mayo-Tsanaga,Bienvenu Tsamaha qui est né le9 septembre 1986 à Mokolo acommencé la musique à l’âge de12 ans à l’école du dimanche.Et à partir de là qu’il intègre lachorale nouvelle génération deMendeze à l’âge de 15 ans. En1999 il sort son premier album,avec pour titre «Allons y donc àla rencontre de notre SeigneurJésus-Christ ‘Ngatoukouna’.Depuis, le jeune artiste a com-mis sept albums de sept titreschacun. Dont les messages sesituent autour de la paix, del’exode rural, de l’amour.Bienvenu Tsamaha a choisi devulgariser la culture du peupleMafa à travers ces chants ‘j’aiosé chanter pour mon peupleparce que j’évite que dans letemps la culture mafa soit aban-donnée à elle-même. C’est je

suis sortie du registre religieuxpour d’autres rythmes comme lehoudok qui est la danse au clairde la lune, le dalinga, le mara»L’artiste ne fait pas que chanter.Il consacre également sa vie àses études. Après l’obtention deson baccalauréat d’enseigne-ment général au lycée classiquede Mokolo à l’Extrême-Nord en2005, il s’inscrit à la faculté dedroit de l’Université deNgaoundéré. Et obtiens plustard une bourse pour le Mali,ensuite il a reçu une bourse endéclarant en douane transit àDouala à l’Université de l’eau.Toutefois la star rencontre desdifficultés qui ne lui permettentpas de faire valoir sa musiqueau-delà des frontières. Par ail-leurs il recherche un manager,un producteur et souhaite que lasituation des artistes musiciensdu Septentrion et du Camerountout entier s’améliore.

BIENVENU TSAMAHA

La star du Mayo-Tsanaga

ISNEBO

La voix majeure de Faadah Kawtal

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Par Bertrand Ayissi

Hawaou Moussa, une jeunefemme de 22 ans, médite actuel-lement sur son sort à la prisonde Banyo. De fait, dans la nuitdu 15 octobre dernier, vers 23 h30, elle a ôté la vie à OumarouHaboubakari, 38 ans, sonamant qui résidait à Sambo-Labo, localité située à 55 km deBanyo. « Quand j’ai été saisi,nous avons trouvé le monsieuraffalé dans une cour, déjàdécédé. J’ai pris les deux gen-darmes qui étaient en postecette nuit, nous sommes allés àson domicile. La femme étaitdans la chambre, la porte n’étaitpas fermée. C’est elle-même quim’a dit en langue locale : “com-mandant, j’ai tué quelqu’un”. Jelui ai demandé de se lever, elle atenu ma main et a dit que nouspartions à la brigade. Les gen-darmes m’ont dit qu’elle a lecouteau. Quand nous sommes

arrivés, je lui ai demandé si elleconnait le type qui est couché,elle m’a dit oui, c’est son mari.Elle m’a dit ne pas savoir s’il vitencore. Je lui ai demandé devoir la profondeur de la blessurequ’elle a administrée à sonmari. En effet, elle lui a piqué lepoignard de telle sorte que lecœur a été déchiré. L’infirmierest arrivé et a jaugé la profon-deur de la blessure au niveau ducœur. Finalement, elle areconnu les faits, mais a dit quece n’était pas avec le couteau,avec la fourchette plutôt. Nousavons fouillé le lendemain etavons retrouvé le couteau. Lesmotifs qu’elle a déclarés pourjustifier son crime, c’est qu’elleétait copieusement battue parson mari. Or, si vous vérifiezbien comment elle a eu le cou-teau de son mari, on se rendcompte qu’ils ont d’abord bienbagarré avant le crime. Par lasuite, on a aussi découvert

qu’elle prenait un comprimé,une forme de drogue», confie lecommandant de brigade deSambo-Labo.

Selon les premières conclu-sions de l’enquête, Hawaoua

Moussa, le présumé assassin,vivait dans la petite localité deZiem toujours dans le Mayo-Banyo. Chassée, car réputéedangereuse du fait de laconsommation régulière d’une

drogue du nom de«Phénobarbital», elle se réfugieà Sambo-Labo. Mais le chef decette dernière localité alerté vaaussi prendre des dispositionspour expulser la jeune dame deson territoire. Celle-ci va doncse fixer à Mayo-Darlé. Mais sondéfunt amant, OumarouHaboubakari, la ramène encatimini à Sambo-Labo, quatrejours avant la scène du crime.Selon les témoignages des voi-sins, entre le 11 et le 15 octo-bre, les retrouvailles du couplesont animées par d’intermina-bles bagarres. D’ailleurs, l’ul-time rixe qui a conduit au décèsd’Oumarou Haboubakari, nesuscitera pas l’intérêt des voi-sins en cette nuit du 15 octobre.Ce sont finalement les cris dedétresse de l’infortuné poi-gnardé qui déterminent les voi-sins à sortir et tenter de lui por-ter secours.Malheureusement…

S o c i é t é L’OE I L DU SAHEL N°1140 du lundi 29 octobre 201812

SAMBO-LABO. Hawaou Moussa est détenue à Banyo.

Une femme de 22 ans tue son amant de 38 ans

La présumée meurtrière.

Par Francis Eboa

La région de l’Adamaoua estun grand carrefour entre leGrand Nord et le Grand Sud duCameroun, d’une part, entre leNigeria et la RépubliqueCentrafricaine, d’autre part.Cette position stratégique attirede nombreuses populationsparmi lesquelles les jeunes.Aussi, la commune deNgaoundéré 2e est le plus grandd’arrondissement du départe-ment de la Vina. Elle abrite lesplus grandes structures tellesque la gare ferroviaire, le grandmarché et le petit marché pourne citer que celles-là, qui sontautant d’atouts d’occupationpour les jeunes désœuvrés à larecherche de l’emploi et du bien-être. C’est donc pour encadrerutilement cette couche socialeque le Programme d’Appui à laRésilience socio-économique(Parse) des jeunes vulnérablesdans les régions septentrionalesdu pays a décidé de faire d’ellesa cible, à travers la formation

et l’insertion. Ainsi, 305 jeunes,soient 168 filles et 137 garçonsont bénéficié de cette offre.Chacune de 13 filières a connuun effectif précis, 47 jeunes sesont intéressés à l’agriculture,106 à la couture, 05 à la coif-fure dame, 16 à l’électricité, 41à l’élevage, 31 à l’informatique,01 à la pneumatique, 09 à lamenuiserie bois, 11 à la menui-serie métallique, 04 à la brode-rie, 04 à la maçonnerie, 19 à larestauration et 11 à la plombe-rie. « Il était question de sélec-tionner les jeunes les plus vulné-rables qui étaient dans le besoin,pour les amener à la fois dansles travaux à Haute Intensité deMain d’Œuvre (Himo), afin deles réinsérer dans la vie active.Ce projet entièrement financépar la GIZ et mis en œuvre parl’Association pour le développe-ment économique, environne-mental et social (Adees), avaiten réalité trois phases. Il y avaitla phase des travaux Himo, cellede la formation et celle de l’in-sertion », explique Joseph

Yamthe, coordonnateur del’Adees.

En réalité, les délais d’exé-cution des différentes phases enoccurrence les deux premières,sont jusqu’ici respectés. Laphase des travaux IMO couraitdu 02 janvier 2018 au 28février 2018 soit deux mois,celle de la formation qui était detrois mois allait du 11 juin au11 septembre 2018. Ilreste alors à gagner le der-nier pari celui de l’inser-tion qui est de quatre moisà partir du mois d’octobre2018. « Il est question deleur ouvrir des ateliers,leur donner des équipe-ments de travail et de sui-vre leurs activités. Nousallons veiller à ce que toutse passe bien. Ces jeunesdoivent mettre en pratiquetout ce qu’ils ont apprispendant les trois mois deformation. Ils doivent ren-tabiliser cela afin d’êtredes citoyens complets »,rassure Joseph Yamthe. Le15 octobre dernier lors dela cérémonie de remise deparchemins à ces 305jeunes formés, la joie étaitau comble. « J’ai été for-mée en agriculture.Actuellement j’attends lefinancement afin d’êtreautonome. Je compte pro-duire des denrées alimen-taires de bonne qualitépour me faire beaucoupd’argent. Mais avant cela,permettez-moi de remer-cier la GIZ, l’Adees et lamairie de Ngaoundéré 2e,car c’est grâce à tout cetensemble que nous avonsbénéficié de cette forma-tion », indique la jeuneYasmine, une des récipien-

daires. Le magistrat municipalde la commune d’arrondisse-ment de Ngaoundéré 2e n’a pascaché sa satisfaction. «Aujourd’hui nous sommes trèscontents d’avoir appris à cesjeunes à pêcher que de leur don-ner du poisson tout le temps. Ilsvont créer à partir d’aujourd’huides activités génératrices derevenus qui vont leur permettre

d’aider leur famille. Noussommes vraiment contents, carcela va réduire considérable-ment le chômage à Ngaoundéré2e», se réjouit Idrissou Abana,maire de la commune deNgaoundéré 2e. Il faut soulignerici que, pour être éligible à cetteformation, il fallait juste êtreâgé entre 18 et 35 ans.

NGAOUNDÉRÉ 2 E. C’est pour combattre efficacement le chômage et la pauvreté.

305 jeunes formés par le Parse

Les jeunes formés par le Parse.