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Ton ange Le Récit d’Heaven Aurélie Fructuoso

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Ton

ange

Ton angeLe Récit d’Heaven

Aurélie Fructuoso

18.66 617549

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 238 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 18.66 ----------------------------------------------------------------------------

Ton ange Le Récit d’Heaven

Aurélie Fructuoso

Aur

élie

Fru

ctuo

so

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Ce livre est pour tous ceux qui ce sont

senti un jour différent. A ma famille, mes amis, et à toutes ces épreuves

qui m’ont permis d’écrire avec passion. Je vous aime et ce livre est pour vous, pour que

vous sachiez que vous n’êtes pas seul.

L’écrivain est comme le pianiste, il compose et fait glisser ses doigts sur des touches afin de produire une

œuvre qui résonnera dans l’esprit de chacun.

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La différence

Il y a deux types de différences, celle que l’on cultive et celle que l’on subit. Celle que l’on cultive est la plus facile, c’est par exemple l’art d’avoir un style, une façon de penser outre les codes. Mais celle que l’on subit est un vrai calvaire ; c’est une contrainte à outrance, une différence physique ou bien mentale, une maladie qui fait de vous un être à part. Ma différence est une contrainte, une défaillance de mon organisme, une abomination, mais un jour on m’a dit que je pourrais faire de cette horreur une chose fantastique, car elle n’était pas une abomination mais un don, un cadeau du destin, un joyau envoyé par dieu. C’est à ce moment que je me suis dit que Dieu était sadique. Lui qui devait terriblement s’ennuyer sur ses petits nuages, s’amusait tranquillement avec nos tristes vies, il jouait avec notre sort. Cela devait être un passe-temps incroyablement jouissif de voir les gens souffrir et les laisser ainsi, seuls avec leur misère. On me dit encore « si Dieu te les a données,

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c’est qu’il y a une raison ». Oui, son profond ennui. Je ne vois aucun autre justificatif à flanquer une paire d’ailes à la jeune fille sage et calme que j’étais. Et puis comme si cela ne suffisait pas, il s’est amusé à dorer finement le bout de mes petites plumes blanches. Et puis pourquoi ne pas leurs données une taille énorme afin qu’elle ne puisse pas les cacher ? Mes ailes mesurent, chacune, deux mètres d’envergure. Et avant d’atteindre ce résultat, je ne parle même pas de la douleur fulgurante qui vous perce le dos quand le cartilage des ailes sort, je ne vous parle pas non plus de cette sensation de lourdeur qui m’a prit quand ces milliers de plumes couvertes d’or sont apparues, mais le pire de tout ce sont les regards. J’ai vu le regard de ma famille se transformer en crainte, j’ai vu mes rares amis me hurler des infamies, j’ai vu la convoitise, j’ai vu l’horreur, j’ai vu la peur, j’ai vu bien trop de choses.

Après ma transformation, je me suis enfuie de chez moi, car je n’y étais plus aimée. Je me suis réveillée dans un laboratoire, j’étais branchée de partout, on filtrait mon sang pour en découvrir sa composition, on m’arrachait des plumes pour savoir si l’or était vrai, on m’en arrachait d’autres pour savoir si elles repoussaient. Malheureusement elles repoussaient et lorsqu’une plume vous transperce la peau la douleur est plus qu’atroce, elle devient quasiment insoutenable. Mais il n’avait que faire de la douleur, il ne voyait en moi qu’un moyen de richesse capable de se renouveler à l’infini. Les forces m’ont

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quittées, je fermais les yeux petit à petit, mais un jour je me suis ressaisie, et de toute la force qui me restait, j’ai brisé mes chaînes, les fils qui me suçait la vie et j’ai fait voler les murs en éclat.

J’ai volé tellement vite, tellement haut ! Ma vie en dépendait mais je m’étais surestimée et je suis encore tombée. Cette fois, j’ai eu le temps d’apercevoir où j’étais, j’avais atterrit sur un gazon fraîchement tondu. J’ai vu un jeune homme sortir avec un fusil à la main, alors j’ai su que je ne rouvrirais pas les yeux, je les ai fermés pour la dernière fois. À mon grand étonnement, je me suis réveillée, j’étais couchée sur un matelas moelleux, entourée de draps soyeux. Une femme est entrée, elle avait des rides qui lui couvrait le visage, elle m’a dit que c’était son fils qui m’avait retrouvée. Elle m’a dit qu’il trouvait mon cas très intéressant. Je me suis alors redressée en déployant mes ailes de tout leur long. Mais j’ai vu dans les yeux de cette femme de l’amour, elle me faisait tellement penser à ma mère avant. J’ai eu confiance, et j’ai découvert son fils.

J’ai eu bien des noms, ma mère m’appelait Heaven, les gens « monstre », les scientifiques « mutation », mais tu as toujours été le seul à m’appeler ton Ange.

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Partie 1

Passé

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Chapitre 1 Passé juvénile

Les jours s’ensuivent avec cette même monotonie depuis des années. Il est six heures, je me lève, je passe une heure dans la salle de bain. Après une bonne douche je descends déjeuner, la cuisine est vide, ma mère se lèvera dans quelques minutes. Je me sers un bol de céréales, toujours les mêmes depuis que je peux en manger. Je verse un peu de lait, et le remets à sa fidèle place dans le frigidaire. J’entends les vieilles marches de l’escalier craquer. Ma mère se réveille enfin. Elle rentre dans la cuisine avec cette même expression sur le visage. Chaque matin je vois bien la fatigue s’accumuler et peser un peu plus sur ses rides. Elle m’embrasse le front, comme une plume légère qui se poserait sur moi. Elle se fait chauffer un café, avant elle en préparait un pour mon père, mais cela fait des années qu’elle n’a plus rempli qu’une seule tasse. Il nous a quitté un matin, je n’ai jamais

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soupçonné que se serait si rapide, une balle dans la poitrine. Depuis je n’adresse la parole à personne, cela fait quatre ans que ma voix n’a plus franchie la barrière de mes lèvres.

Je fais un signe de tête à ma mère, je quitte la table, la pièce puis la maison. Je rejoins l’arrêt du bus, il arrive quelques minutes plus tard. Je m’installe, mets mes écouteurs et patiente pendant la demie-heure de trajet, personne ne s’assoie à mes cotés. Je franchis enfin le portail du lycée : le calvaire recommence. De toute façon il ne s’est jamais vraiment arrêté ! Les humiliations et l’intimidation font parties de mon quotidien. Des gens passent devant moi, je cours me réfugier dans les couloirs, attendant mon heure de cours. La matinée passe, il est l’heure d’aller au self, mais comme chaque jours je n’y vais pas. Je n’y ai été qu’une fois, on m’a jeté tout types de résidus alimentaires. Je me suis enfuie avec de la sauce tomate et des larmes sur les joues. Tout le monde minimise ce que c’est de se retrouver sous les rires des plusieurs centaines de lycéens dans une position si humiliante.

Depuis ce jour, je ne mange plus le midi. On me traite d’anorexique, mais je préfère les insultes à l’humiliation. Je me réfugie donc dans la bibliothèque. Là, je sais que je peux être tranquille. En plus, j’y ai rencontré un ami, on ne peut pas se voir autre part car il fait partie de l’équipe de foot du lycée. Il m’a expliqué que sa popularité faisait de lui une personne

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respectée. Je le comprends, traîner avec moi relèverait du suicide social. Alors nous nous parlons pendant le déjeuner. Il m’a déjà dit que j’étais une personne intéressante. A-t-il déjà connu des personnes intéressantes ? J’en doute quand je vois ses connaissances. Leur maturité est celle d’un cachalot écrasé. Et puis, je ne vois vraiment pas en quoi je suis intéressante. Je ne lui ai jamais adressé la parole. Pas un seul mot, mais je crois qu’il apprécie la façon dont je l’écoute avec attention. Ou peut être est ce le fait qu’il croit que je ne peux rien répéter ?

Tout le monde – ma famille mis à part – croit que je suis muette, et non que je souffre d’un mutisme dû au choc de la perte de mon père. Je me suis promis de devenir une personne forte et de crier un jour à toutes ces affreuses personnes que je suis « normale » ! Mais qu’est ce que la normalité ? Être comme tout le monde n’est pas une preuve de normalité, c’est simplement avoir une personnalité médiocre. Pourquoi aimerais-je alors être comme eux ? Je crois que je voudrais surtout être acceptée, peut être même pour celle que je ne suis pas. Mais alors, à quoi cela servirait-il de se faire accepter ? Mon cerveau est une fourmilière dont je ne trouve pas la sortie.

Il me parle et sa voix me ramène à la réalité, il me demande mon prénom. Je prends alors un bout de papier, et sors un stylo. Sur le papier blanc je note en lettres cursives noires : Heaven. Il lit à mi-voix, je trouve cela vraiment craquant. À la manière d’un

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enfant, il décrypte mon prénom. En plus sa voix est atrocement sexy. J’ai une envie irrésistible de poser mes lèvres sur les siennes qui murmure mon nom avec tant de sensualité. Et puis pourquoi me priver, autant le faire ! Je m’approche et plaque ma bouche sur la sienne. Il n’oppose aucune résistance.

C’est enfin au bout de quelques secondes qu’il met fin au baiser. Il se recule me regarde et ajoute avec une pointe d’ironie.

« – Je ne veux pas que tu penses qu’on peut avoir ce genre de relation. »

Que je suis idiote, bien sûr que non, il ne veut pas de ce genre de relation. Il doit déjà se cacher pour me parler, alors sortir avec moi deviendrait honteux face à ses amis. C’est à ce moment précis que je me rends enfin compte de la persécution que j’ai endurée, des humiliations qui m’ont rongées, de toute cette souffrance que j’ai refoulé en mon être. Là je regarde alors intensément ce jeune homme, qui s’est radicalement foutu de ma gueule, lui qui se servait de moi comme un journal intime interactif, et tout doucement j’ouvre la bouche, et lâche devant ses yeux ébahis une phrase faite de mots et de syllabes :

« – Je ne le dirais à personne, comme d’habitude ! »

Je quitte la bibliothèque sur cette phrase. Qui aurait pu croire que Dieu se vengerait de cet affront de façon si perverse à peine six heures plus tard ?

Je descendis les escaliers et me rendis à mon cours

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de mathématiques. La professeure cita les noms dans l’ordre alphabétique :

« – Heaven Sheldon ? » J’ai redressé la tête, ce moment changerait à

jamais la phase du monde, car je lui hurlais dans un soubresaut de haine et de rage, « Présente ! » Oui, j’étais là, moi qui n’avais jamais existé, et la classe se retourna pour contempler la nouvelle élève qui se trouvait au fond, seule, se défendant corps et âme pour être et non pour paraître. On ne m’adressa pas la parole pour autant, ce n’est pas parce que vous changez le monde que les gens changent. Mais pour une fois je me sentais entière, et lorsque je passais l’encadrement de cette porte j’étais fière. Je n’aurais pas du crier victoire si vite car une fois rentrée chez moi, mon goûter englouti et mon corps affalé dans le sofa, une douleur stridente me déchira le dos. Et tel un fer chauffé à blanc que l’on applique par pure méchanceté et sadisme, la douleur empoigna tout mon être, elle arracha l’air de mes poumons pour le muer en cris, elle contracta mes muscles pour les changer en crampes, et elle prit possession de mon esprit et me fit sombrer dans un paradis blanc stérilisé.

Lorsque je me réveillais la douleur s’était légèrement atténuée, je respirais lourdement et ma tête me faisait atrocement mal. J’en déduis que l’on m’avait administré de la morphine. Ma mère dormait dans le fauteuil à coté de mon lit, elle avait du me porter

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jusque là avant d’appeler notre médecin de famille. Je toussotais, elle se réveilla, me caressa le front dans un geste protecteur mais aussi pour contrôler ma fièvre. J’eus très vite la réponse en voyant les rides de son front se creusées encore un peu plus. Je lui pris la main afin qu’elle se rassure un peu, mais cela ne donna rien, je ne pouvais retirer ce regard inquiet. On sonna, je regardais mon réveil, il était déjà dix heures du matin, j’avais dormi pendant pas mal de temps. Ma mère me laissa alors quelques instants, j’en profitais pour m’asseoir, c’est alors que quand je me posais contre l’oreiller je sentis quelques choses d’étrange dans mon dos comme deux bosses au niveaux des épaules. Ma mère revint accompagnée de mon médecin, avec eux une étrange machine, sinistre. Le médecin m’expliqua qu’il s’agissait d’un rayon X portatif. Il me demanda de me mettre sur le ventre et il m’examina. Après de longues minutes, il nous annonça que d’étranges cartilages s’étaient formés. Ils formaient comme des V inversés. Je réfléchi alors à toute vitesse, que cela pouvait-il être ? Je n’aurais pu guère imaginer à un seul instant ce qui m’était réservé. Il expliqua alors enfin ses supposition : pour lui, une paire d’ailes me poussait dans le dos. Je me suis esclaffée comme jamais auparavant ! Le rire a jailli, authentique. La situation était tellement comique : « des ailes » ! Il avait sûrement pété un câble !

« – Vous avez eût votre diplôme dans une pochette surprise ! »

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A ce moment là, la stupéfaction se lisait sur le visage des deux personnes qui se trouvaient dans la chambre. Ma mère n’en revenait pas que j’ai pu émettre une phrase, cela faisait des années que je n’en avais pas placé une. Quant à lui, il ne supportait pas qu’une gamine de seize ans le remette ainsi à sa place.

A présent c’est eux deux qui faisaient preuve d’un mutisme parfait, et qui en plus arboraient une grimace de surprise, qui persistait et s’accrochait avec ardeur sur leurs visages se voulant autrefois rassurant.

Le médecin partit après cette petite altercation. Qui aurait pu croire qu’il avait totalement raison sur mon cas ? En effet, quatre petites heures plus tard le cartilage trancha ma chair avec un déchirement fulgurant. Jamais je n’avais ressenti cela, pour me rassurer je me dis que je ne le ressentirais sûrement plus jamais, j’avais encore tort. J’ai hurlé, hurlé à m’en arracher les cordes vocales, mes tympans sifflaient et le souffle me manquait, j’ai encore perdu la raison et j’ai plongé dans les méandres de mon esprit. J’ai rêvé, de Dieu, c’était étrange, mais maintenant je sais que ce n’était pas un hasard. Je l’ai toujours tenu responsable, il n’y avait que lui pour faire cela. Je crois que ce jour je lui ai imploré son pardon et ai demandé halte à la souffrance, ce qui n’a pas fonctionné évidemment. J’aurais dû lui dire qu’il était un crétin, un sadique, un dégénéré qui s’amusait avec ma vie mais je pense qu’il n’en aurait eu que faire.

Je me suis réveillée, la douleur était moins féroce

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mais toujours bien présente, mais j’ai paniqué. Quelque chose de plumeux me cachait la vue, comme si un gros oiseau digne d’une autruche ou d’un poulet génétiquement modifié s’était posé pour une petite sieste improvisée sur ma tête. J’ai écarté rapidement les ailes pour découvrir avec stupeur que c’était moi l’autruche – ou le poulet –. J’ai encore hurlé, je me demande d’ailleurs comment mes cordes vocales ont pu résister à autant de cris. Ma mère a accouru, et lorsqu’elle m’a vue, son visage s’est décomposé, elle a reculé. A cet instant précis mon cœur s’est fendu. J’avais plus que besoin de ma mère et elle s’enfuyait de peur face à moi. J’étais devenue un monstre à ses yeux. Elle est sortie en courant de ma chambre, elle a courue dans les escaliers et la surface restante qui la séparait de son téléphone, et je l’ai entendue, à mon plus grand étonnement vu la distance qui nous séparait, appeler son médecin. Elle n’est pas remontée à l’étage, et après quelques minutes, quelqu’un sonna. Ce n’était pas le médecin, il avait parlé de mon cas à l’un de ses anciens amis de la faculté de médecine me raconta-t-il. Mais à son regard possessif, je voyais bien qu’il s’en fichait de ma santé, ce qui l’intéressait, c’était les plumes blanches et légèrement dorées qui avaient pousser à mon insu dans mon dos. Il m’a donné son nom, le Dr Phel, moi je préfère Dr Massacre-en-tout-genre, cela lui correspond mieux, car au moment où il m’a dit qu’il fallait quitter ma maison pour ma sécurité ça aurait dû m’alerter. Le

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regard de ma mère m’a convaincue, je ne voulais pas rester avec quelqu’un qui m’avait aimée pendant seize années et qui maintenant était terrorisée par celle que j’étais. Je suis partie, et jamais je ne suis revenue, car la fillette que j’étais avant avait disparue. Une fois qu’elle avait passé le portillon, sa vie s’était transformée en un cauchemar qui avait fait d’elle une femme différente.

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