repÈres prise en charge orthopédique et maladies ... ; celle des muscles masti-cateurs nous permet...

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SEPTEMBRE 2011 SAVOIR ET COMPRENDRE © AFM / L. Audinet © AFM / C. Hargoues REPÈRES Dans les maladies neuromusculaires, l’atteinte du muscle strié squelettique retentit sur l’appareil locomoteur. Le manque et/ou le déséquilibre de force entre les muscles ainsi que leur capacité et celle des tendons à se rétracter favorisent l’apparition de déformations articulaires. La prise en charge orthopédique, qui s’applique à l’enfant et à l’adulte, permet par différentes méthodes, de limiter ou de compenser les conséquences du déficit musculaire. Précoce, personnalisée et régulière, elle contribue de façon importante au confort de vie. La kinésithérapie et l’appareillage ont pour but de prévenir l’apparition et de ralentir l’évolution des rétractions des muscles et des tendons. La chirurgie peut être nécessaire pour corriger une déformation articulaire et obtenir un meilleur équilibre articulaire. Les aides techniques, quant à elles, contribuent à redonner de l’autonomie tant pour les gestes de la vie quotidienne et les déplacements que pour les interactions sociales. Prise en charge orthopédique et maladies neuromusculaires

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SEPTEMBRE 2011

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REPÈRES

Dans les maladies neuromusculaires, l’atteinte du muscle strié squelettique

retentit sur l’appareil locomoteur. Le manque et/ou le déséquilibre de force

entre les muscles ainsi que leur capacité et celle des tendons à se rétracter

favorisent l’apparition de déformations articulaires.

La prise en charge orthopédique, qui s’applique à l’enfant et à l’adulte,

permet par différentes méthodes, de limiter ou de compenser les

conséquences du défi cit musculaire. Précoce, personnalisée et régulière,

elle contribue de façon importante au confort de vie.

La kinésithérapie et l’appareillage ont pour but de prévenir l’apparition et de

ralentir l’évolution des rétractions des muscles et des tendons. La chirurgie

peut être nécessaire pour corriger une déformation articulaire et obtenir un

meilleur équilibre articulaire. Les aides techniques, quant à elles, contribuent

à redonner de l’autonomie tant pour les gestes de la vie quotidienne et les

déplacements que pour les interactions sociales.

Prise en charge orthopédiqueet maladies neuromusculaires

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fl exion, d’extension, d’écartement... D’autres, comme celles qui relient les côtes ou les os du crâne, le sont beaucoup moins. Les articulations sont stabilisées par des ligaments plus ou moins nombreux. Les articulations des membres sont entourées par une capsule articu-laire fi breuse remplie d’un liquide - le liquide synovial - qui facilite le glisse-ment des deux surfaces osseuses (recouvertes de cartilage) en contact et permet une grande liberté de mouvement.

... mobilisés par des muscles striés squelettiques

Notre corps contient 640 muscles striés squelettiques qui représen-tent presque 1/3 de notre poids. Ces muscles s’attachent sur les os en différents points, grâce aux tendons qui enjambent ou croisent les articu-lations et les stabilisent. Ces tendons

Plus de 200 os...Notre squelette est constitué de 206 os qui forment une structure servant à la fois de charpente à notre corps, d’ancrage à tous les organes mous et de protection à certains d’entre eux (organes vitaux du thorax, cerveau…).

... reliés par des articulations

Les os sont réunis par les arti-culations, qui jouent le rôle de charnière. Les articulations des membres (la majorité d’entre elles) sont très mobiles et permettent des mouvements de rotation, de

sont maintenus sous tension par le tonus des muscles.En se contractant, les muscles sque-lettiques tirent sur les os auxquels ils sont accrochés par les tendons et les mettent en mouvement.

Bouger, manipuler, sentir, voir, respirer...

La plupart des mouvements de notre corps sont produits grâce à la contraction des muscles squelet-tiques. En déplaçant les segments articulés des membres supérieurs (bras, avant-bras, mains, phalanges) et des membres inférieurs (cuisses, jambes, pieds, phalanges), on peut attraper et manipuler des objets, taper sur un clavier, marcher, courir, sauter… Les mouvements plus f ins dépendent aussi des muscles sque-lettiques : les muscles oculomoteurs bougent les globes oculaires, les

SommaireL’appareil locomoteur ......... 2

L’atteinte orthopédique dans les maladies neuromusculaires ............... 3

Évaluer l’atteinte orthopédique ....................... 5

Principes de la prise en charge orthopédique ..... 7

Kinésithérapie ..................... 8

Appareillage ...................... 11

Chirurgie orthopédique .... 13

Les aides techniques ........ 15

Qu’il s’agisse de marcher, de saisir un objet, de mastiquer des aliments, de respirer…, ces mouvements ne sont possibles que grâce à l’action des muscles squelettiques (appareil musculo-tendineux) sur les os et grâce aux articulations qui composent le squelette.

L’appareil locomoteur Rappels anatomiques

• Les membres supérieurs regroupent les bras, coudes, avant-bras, poignets, mains, doigts.

• La ceinture scapulaire comprend les omoplates et les clavicules. Elle relie les membres supérieurs au tronc en s’articulant avec l’humérus (l’os du bras), par l’articulation de l’épaule.

• Les membres inférieurs comprennent les cuisses, genoux, jambes, chevilles, pieds, orteils.

• La ceinture pelvienne est composée du bassin (les deux os iliaques réunis), du sacrum et du coccyx (extrémité de la colonne vertébrale, ou rachis). Elle relie les membres inférieurs au tronc en s’articulant avec le fémur (l’os de la cuisse), par l’articulation de la hanche.

• Les muscles proximaux sont ceux proches de l’axe du corps (muscles des épaules, des cuisses…). Les muscles distaux sont ceux situés loin de l’axe du corps (muscles des avant-bras et des doigts, des pieds…). Les muscles axiaux sont ceux du tronc.Dans les maladies neuromusculaires, la topographie de l’atteinte musculaire est décrite en utilisant ces dénominations. Lorsqu’elle touche les muscles du tronc, du bassin et des épaules comme dans l’amyotrophie spinale, elle est dite proximale. Elle peut, comme dans les myo-pathies des ceintures, concerner d’abord les muscles proximaux (ceintures pelvienne et sca-pulaire) puis s’étendre à l’extrémité des membres (région distale). Dans d’autres myopathies (myopathies de Myoshi ou de Nonaka…) ou certaines formes de la maladie de Charcot-Marie-Tooth, l’atteinte est dite distale d’emblée.

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

Une faiblesse musculaire progressive

La diminution de la force muscu-laire est, le plus souvent, la pre-mière manifestation des maladies neuromusculaires.

L’orthopédie est une branche de la médecine qui étudie et traite les affections du squelette, des muscles striés squelettiques et des tendons. Dans les maladies neuromusculaires, l’atteinte orthopédique associe une faiblesse des muscles et une tendance à la rétraction. Elle entraîne des diffi cultés motrices (perte de mobilité…), des déformations articulaires, des douleurs…

L’atteinte orthopédique dans les maladies neuromusculaires

muscles du cou en mobilisant la tête orientent les yeux, les oreilles ou le nez… La contraction des muscles du visage nous permet d’exprimer des sentiments au travers de la mimique ; celle des muscles masti-cateurs nous permet de mâcher les aliments...Les mouvements respiratoires d’inspiration et d’expiration de l’air dépendent aussi des muscles sque-lettiques. Le diaphragme, qui sépare

l’abdomen du thorax, se contracte à l’inspiration et se relâche à l’expi-ration. Les muscles abdominaux, intercostaux, lombaires (bas du dos)… sont aussi impliqués dans la respiration et sont indispensables pour tousser.

Maintenir la posture

Même si nous en avons peu conscience, le fonctionnement des

muscles squelettiques détermine notre posture. Par exemple, les muscles situés le long des vertèbres soutiennent la colonne vertébrale et réajustent en permanence notre posture par un jeu fi n de contraction et de relâchement. Cela nous per-met de nous tenir assis ou debout, de tenir notre tête… Sans eux, notre dos s’effondrerait.

Dans les dystrophies progres-sives (dystrophie musculaire de Duchenne, myopathies des ceintures, myopathie facio-scapulo-humérale…), la fonte musculaire est due à la dégénérescence des cellules musculaires composant

les muscles. Le tissu musculaire est progressivement remplacé par du tissu graisseux et fi breux, moins élastique. Dans d’autres maladies neuromusculaires comme l’amyo-trophie spinale proximale (dans ses différentes formes), la faiblesse

Mouvements et souplesse musculaire et articulaire

Les articulations sont mobilisées par des muscles d’action opposée, dits muscles antagonistes : lorsqu’un muscle se contracte, au même moment, le muscle (ou groupe de muscles) opposé s’étire. Par exemple, pour rame-ner le poing vers l’épaule en pliant le coude, le biceps (situé sur la face antérieure du bras) se contracte tandis que le triceps (situé sur sa face postérieure) s’étire. Pour tendre le bras, c’est l’inverse. Nos mouvements quotidiens permettent d’étirer et de contracter régu-lièrement nos muscles et leurs tendons, ce qui entretient leur souplesse et leur longueur. Ces mouvements entretiennent aussi les charnières que sont les articu-lations : la capsule articulaire reste souple et les ligaments toniques, tout en étant élastiques. Faire bouger ses muscles et ses articulations permet de les maintenir en bonne santé. Chez toute personne, des muscles qui ne bougent pas ou peu, perdent de leur souplesse, de leur volume et de leur force même s’ils ne sont pas malades ; une articulation peu mobilisée a tendance à se gripper et à perdre de l’amplitude : elle s’enraidit.

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O Biceps (agoniste)

Triceps (antagoniste)

Flexion de l'avant-bras sur le brasBiceps contracté (agoniste)Triceps relâché (antagoniste)

Extension de l'avant-brasBiceps relâché (antagoniste)Triceps contracté (agoniste)

Biceps (antagoniste)

Triceps (agoniste)

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• Déformations articulairesLes articulations moins mobilisées par les muscles, s’enraidissent. Les rétractions existantes et/ou des changements posturaux peu fréquents fixent les articulations dans une mauvaise position, ce qui entraîne leur déformation. Par exemple, en position assise, les hanches et les genoux sont fl échis ; tendre les jambes régulièrement (en se mettant debout ou grâce à la kinésithérapie et aux appareillages), entretient la souplesse des muscles qui mobilisent ces deux articulations. Dans le cas contraire, ces muscles peuvent se rétracter, fi xant les arti-culations en position fl échie (fl exum de hanche, de genou…). Ces rétrac-tions installées sont plus diffi ciles à combattre. Chez l’enfant en pleine croissance, les déséquilibres et les malpositions du squelette peuvent s’accentuer, entraînant des déformations impor-tantes, comme celles qui touchent la colonne vertébrale à la puberté (scoliose…). À l’âge adulte, les déformations de la colonne vertébrale peuvent conti-nuer à évoluer faute d’un soutien musculaire de la colonne suffi sant.

musculaire est due à un défaut de la commande du muscle. Dans des maladies comme la dys-trophie musculaire d’Emery-Drei-fuss, la faiblesse musculaire suit les rétractions musculaires précoces.

Des déformations orthopédiques

Les diffi cultés motrices modifi ent la mécanique articulaire.

• Rétractions des muscles et des tendonsÀ mesure que le tissu musculaire s’atrophie, il perd en force et en élasticité. Les muscles ne s’affai-blissent pas tous de la même façon, ce qui provoque un déséquilibre de force entre les muscles opposés mobilisant une même articulation : les tensions qui s’y appliquent favorisent peu à peu la rétraction de l’un et l’affaiblissement de l’autre. Le raccourcissement des muscles et de leurs tendons se fait progressive-ment : on parle de rétractions mus-culo-tendineuses. Un des objectifs de la prise en charge orthopédique précoce est de limiter l’apparition de ces rétractions.

Les rétractions des muscles et des tendons entraînent des déformations comme celles des pieds (pieds équins).

Une atteinte musculaire différente d’une maladie à l’autre

Selon les maladies, certains muscles sont touchés et pas d’autres. Pour une même maladie, les manifesta-tions et l’évolution peuvent varier légèrement.

Dans la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD), la faiblesse mus-culaire touche les muscles du bassin et des membres inférieurs (cuisses) avant d’atteindre ceux des membres supérieurs. Les myopathies des ceintures s’expriment d’abord par une faiblesse des muscles du bassin et des épaules (ceintures pelvienne et scapulaire) puis des muscles des cuisses.

Dans la myopathie facio-scapulo-humérale (FSH), l’atteinte touche le visage, les épaules et les bras, par-fois les membres inférieurs. Elle peut être asymétrique et plus ou moins sévère selon les personnes.

D’autres myopathies, comme les dystrophies musculaires congéni-tales (DMC), se manifestent par une faiblesse musculaire et une forte tendance du muscle à se rétracter. L’atteinte peut concerner aussi les muscles des mains et des pieds comme dans certaines formes de la maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT).

Dans l’amyotrophie spinale (SMA), la perte de force concerne les muscles du tronc, du bassin et des épaules.

Enfin, dans la myotonie de Steinert la faiblesse musculaire est variableselon les personnes ; elle peut tou-cher l’extrémité des membres infé-rieurs (jambes, pieds), ainsi que les muscles du visage. Dans cette mala-die, les déformations orthopédiques sont rares, sauf dans la forme très précoce (congénitale).

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

kinésithérapeute de la consultation en ont généralement la charge.

Bilan fonctionnel global

Le bilan global évalue la fatiga-bilité et le retentissement de la maladie sur les gestes de tous les

Une évaluation régulière

L’état orthopédique est évalué une à deux fois par an en consulta-tion pluridisciplinaire, voire tous les 2 ans pour les maladies moins évo-lutives. Le médecin de médecine physique et de réadaptation et le

L’état orthopédique est évalué régulièrement en consultation neuromusculaire. Un bilan fonctionnel global évalue l’impact de la maladie sur la mobilité et les gestes quotidiens. Un bilan ostéo-articulaire et un bilan musculaire permettent d’évaluer l’atteinte articulaire et musculaire. Des moyens de rééducation (kinésithé-rapie, appareillage,…) peuvent alors être mis en œuvre.

Évaluer l’atteinte orthopédique

Un suivi régulier en consultation pluridisciplinaire est indispensable pour évaluer l’état orthopédique, qu’il s’agisse de l’enfant ou de l’adulte.

Douleurs et fragilité osseuse

Des os mobilisés par les mouve-ments se portent mieux ; l’immobi-lité contribue à leur déminéralisation (ostéoporose). L’os est plus fragile (le risque de fracture augmente) et plus douloureux. Le manque de mouvement entraîne aussi des douleurs articulaires et musculaires (crampes).

Les facteurs aggravants

Les douleurs liées à la maladie, à la fatigue, aux rétractions, à l’in-confort… constituent des facteurs aggravants. Lorsqu’un muscle est immobilisé, quelle qu’en soit la cause, un tissu fi breux se forme rapidement, modifiant les carac-téristiques musculaires : le muscle devient moins résistant à l’étirement,

ce qui limite les amplitudes articu-laires. Parallèlement, certaines mau-vaises positions peuvent aggraver les rétractions et la fi brose des cap-sules articulaires et des ligaments. Enfi n, la position assise prolongée et la bascule du bassin peuvent favo-riser une déviation de la colonne vertébrale. D’où l’importance d’un positionnement au fauteuil précis, aménagé et confortable.

jours. Pour apprécier les capacités motrices d’une personne atteinte d’une maladie neuromusculaire, le médecin ou le kinésithérapeute l’interroge sur ses activités quo-tidiennes. Comment marche-t-elle ? Peut-elle se relever d’un siège ? De la position accroupie ? Monter les marches d’un escalier ? Est-elle gênée pour s’habiller, se laver, se coiffer ? Peut-elle porter un verre d’eau à la bouche ? Écrire à la main ? À l’ordinateur ?… Ce bilan s’accompagne de tests fonctionnels : lors du test de marche de 6 minutes, la personne doit parcourir la plus grande distance possible en marchant pendant 6 minutes, à son rythme. On peut aussi lui demander de se relever d’un siège, de monter des marches.

Bilan ostéo-articulaire

Il sert à évaluer l’amplitude des mouvements (fl exion, extension...) pour chaque articulation du tronc et des membres : épaules, coudes,

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poignets pour le membre supérieur, hanches, genoux, pieds pour le membre inférieur. Pour cela, le médecin ou le kinési-thérapeute déplace des segments du corps de la personne (qui elle ne fait rien) : il plie ses coudes, ses poignets, bouge ses épaules d’avant en arrière... Il identifi e ainsi les articu-lations plus ou moins raides, rétrac-tées ou déformées. Une analyse de l’état de la colonne vertébrale est faite après un examen clinique en position debout et assise, de face, de dos, de profi l, couché sur le dos. Les différents angles de courbure de la colonne sont mesu-rés pour détecter, par exemple, un début de scoliose. L’examen porte aussi sur la cage thoracique

pour s’assurer de sa souplesse. L’horizontalité du bassin est aussi vérifi ée.

Bilan musculaire

Le bilan musculaire est complé-mentaire du bilan ostéo-articulaire. Il évalue la force musculaire et les possibilités fonctionnelles ; il per-met de localiser les muscles atteints et d’apprécier le déséquilibre des forces musculaires à l’origine de déformations des membres. Pour cela, le kinésithérapeute demande à la personne de réaliser elle-même des mouvements. Pour tester la force musculaire, muscle par muscle (ou par groupes de muscles), on utilise le testing musculaire manuel : la personne effectue un mouvement précis, qui sollicite le muscle à évaluer, contre résistance. Par exemple, le kinési-thérapeute lui demande de pousser le dos de sa main contre la sienne. La mesure est exprimée sur une échelle graduée de 0 (pas de force) à 5 (force musculaire normale). On peut aussi mesurer la force muscu-laire à l’aide d’appareils tels que les différents types de dynamomètres.

Bilan des douleurs et des troubles trophiques

Les causes de la douleur sont multiples : elles peuvent venir des rétractions, de contractures muscu-laires, de l’ostéoporose, des points d’appui, des suites d’une interven-tion chirurgicale…Les troubles trophiques peuvent se manifester par des lésions de la peau, les mains et/ou les pieds froids... Ils sont dus à une mau-vaise irrigation sanguine de la peau. Celle-ci résulte d’une diminution de l’activité musculaire, de frotte-ments ou de pressions continus (appareillage, points d’appui…) ou encore d’anomalies de la motricité des vaisseaux sanguins (troubles vasomoteurs) propres à certaines maladies neuromusculaires. Une analyse précise des douleurs présentes (localisation, intensité, type, durée, fréquence, condi-tions d’apparition) et des troubles trophiques permettent d’adapter la prise en charge, l’appareillage, et de proposer des solutions antalgiques.

Évaluer la fonction motrice : des échelles spécifiques

Des échelles validées, spécifiques aux patients atteints de maladies neuro-musculaires permettent d’évaluer précisément leurs capacités fonction-nelles. Le score obtenu est comparé d’une fois sur l’autre, pour une même personne. La Mesure de la Fonction Motrice (MFM) repose sur la réalisation de certains gestes. Elle comprend 20 consignes pour les enfants de moins de 7 ans et 32 consignes pour les autres personnes. Chaque consigne correspond à un mouvement à réaliser dans une posi-tion donnée : par exemple, relever la tête en étant couché sur le dos, se mettre debout en étant assis sur un tapis, poser les mains sur la table en étant assis, déchirer une feuille de papier en étant assis... D’autres échelles validées peuvent être utilisées : l’échelle de Brooke, d’Hammersmith,…

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Lors du bilan orthopédique, le médecin repère les articulations enraidies et les éventuelles déformations articulaires.

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

Principes de la prise en charge orthopédiqueLa prise en charge orthopédique est essentielle pour prévenir et corriger les déformations orthopédiques, entretenir la souplesse et l’équilibre articulaire. Elle doit être mise en place le plus tôt possible et être régulière. Elle est indissociable de la prise en charge globale (respiratoire, cardiaque, nutritionnelle, psychologique...).

Prévention, correction et compensation

La prise en charge prévient ou limite les rétractions en entretenant la souplesse musculaire et articulaire par des mobilisations régulières des différentes parties du corps. Elle permet aussi de corriger les défor-mations et de maintenir un bon ali-gnement orthopédique. Son but est de préserver la fonction le plus longtemps possible : pou-voir se servir de ses jambes, de ses bras et de ses mains, se tenir assis ou debout... dans des conditions confortables et fonctionnelles.

Un bénéfice avéré

L’expérience de la prise en charge des personnes atteintes de mala-dies neuromusculaires montre un

orthopédique et thoraco-pulmonaire harmonieuse ainsi qu’un bon déve-loppement psychomoteur.Pendant l’enfance et l’adolescence, elle vise la préservation des acquis, la lutte contre les déformations, en tenant compte de la croissance (notamment de la colonne verté-brale) et l’entretien de la souplesse et de l’élasticité des poumons et de la cage thoracique. À l’âge adulte, les objectifs sont l’entretien articulaire, musculaire et fonctionnel et l’obten-tion du meilleur confort possible.

Une prise en charge adaptée à chacun

Toutes les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire n’ont pas besoin de la même prise en charge. Le type de maladie et les bilans évaluant la fonction orthopédique défi nissent les axes de la prise en charge individuelle, ses modalités (techniques utilisées, périodicité…), son intensité. Elle doit commencer le plus tôt possible, dès le diagnostic envisagé, et se dérouler en parallèle de la prise en charge des fonctions vitales (prises en charge respiratoire, cardiaque et nutritionnelle).

Des contraintes à intégrer au quotidien

La prise en charge orthopédique dans l’enfance et l’adolescence et parfois aussi chez l’adulte occupe souvent beaucoup de temps.

réel bénéfi ce pour le système mus-culo-ostéo-articulaire : l’apparition et l’évolution des déformations articulaires sont mieux maîtrisées, certaines fonctions sont préservées plus longtemps. Au delà de l’aspect préventif, on ressent un mieux-être musculaire et articulaire : mobiliser son corps par des exercices de kinésithérapie fait du bien, au même titre qu’une acti-vité physique (comme la gymnas-tique) pratiquée régulièrement.

De l’enfance à l’âge adulte

Pendant la période néonatale et les premières années de la vie, la prise en charge orthopédique dans les maladies précoces (amyotrophies spinales, myopathies congénitales, dystrophies musculaires congé-nitales...) favorise une croissance

Des techniques de prise en charge complémentaires

La kinésithérapie est la base de la prise en charge orthopédique. Massages, mobilisa-tions de certaines parties du corps, étirements musculaires, postures... : les techniques de rééducation utilisées assouplissent les muscles et les articulations et favorisent le bon positionnement du squelette.L’appareillage (orthèses, corset…) sert à maintenir, au cours de la journée et/ou de la nuit, les segments articulaires en bonne position les uns par rapport aux autres (maintien de pos-tures). Ceci afin de limiter l’apparition des rétractions, de ralentir l’évolution des déformations articulaires pour conserver ou améliorer les capacités fonctionnelles. La chirurgie intervient en complément et/ou en relais de la kinésithérapie et de l’appareillage dans le traitement des déformations et des rétractions. Elle nécessite la prise en compte des risques cardiaques et respiratoires et une rééducation fonctionnelle post-opératoire particulièrement attentive.Les aides techniques, quant à elles, permettent de compenser les incapacités et de redonner une certaine autonomie.

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D’où l’importance de réfl échir à une organisation la moins contraignante possible, tout en respectant les objectifs individuels. La répétition des séances et le cumul des soins peuvent être source de lassitude… Cela peut conduire à un rejet de la prise en charge orthopédique, plus particulièrement à certaines périodes de la vie, comme l’adoles-cence. Pour que ces diffi cultés (ou toutes autres comme les douleurs ou l’inconfort pendant ou après les séances…) n’aboutissent pas à un abandon prolongé de la prise en charge, il est important d’en par-ler avec le kinésithérapeute qui en a la charge. Modifi er l’organisation des séances dans la semaine, avoir recours à plusieurs professionnels en alternance…, peuvent être des solutions.

Massages

Les massages sont un temps pré-paratoire indispensable à la séance de kinésithérapie, comparable à un échauffement avant un effort phy-sique. Ils peuvent aussi être utilisés en dehors de toute autre technique. Les massages concernent tous les muscles, y compris ceux du visage. Ils sont pratiqués quels que soient l’âge et la maladie, le plus souvent

sous forme d’effl eurages, de pres-sions glissées et de frictions douces. Ils ont un effet décontracturant et relaxant. Ils soulagent les douleurs et améliorent la circulation sanguine dans le muscle. Les massages contribuent au bien-être.

Balnéothérapie chaude

L’immersion dans l’eau chaude (30 à 35 °C) en piscine ou en bassin, la

balnéothérapie, peut être utilisée en préparation aux séances de réédu-cation ou en tant que telle. La chaleur de l’eau a un effet décontracturant et assouplissant ; elle favorise la cir-culation sanguine. L’effet d’apesan-teur facilite certains mouvements : se mettre debout ou en situa-tion de marche... La mobilisation active des membres peut se faire avec une plus grande amplitude : cela entretient le schéma corporel (perception que l’on a de son corps) et lutte contre le déconditionnement musculaire (perte d’habitude de fonctionner d’un muscle pas assez stimulé). La durée et la fréquence des séances varient selon les capa-cités de chacun (fatigabilité, état cardio-vasculaire, adaptation à la chaleur…).

KinésithérapieLa kinésithérapie entretient la souplesse des muscles et des arti-culations, prévient les rétractions musculo-tendineuses et com-bat la perte de force musculaire. Le kinésithérapeute emploie différentes techniques lors des séances de rééducation : mobi-lisations passives et actives adaptées à la maladie, étirements, postures… préparées par des massages décontracturants.

La prise en charge orthopédique est une hygiène de vie

“Médecin de médecine physique et de réadaptation, j’effectue le suivi médical de personnes adultes atteintes de maladies neuromusculaires, dans une consultation neuromusculaire pluridisciplinaire et dans un centre de rééducation. Pour les patients qui viennent en consul-tation (une fois par an en général), je rédige, selon leur bilan, une prescription détaillée de ce que doit comprendre leur rééducation au quotidien. Le kinésithérapeute s’appuie sur cette prescription pour mener les séances. Celles-ci doivent durer au moins 30 minutes et rien ne doit être oublié. Pour lutter contre les effets de l’immobilité, il faut mobiliser toutes les parties du corps : les membres jusqu’au bout des doigts et des orteils, le dos, le cou, la mâchoire… Ces mobilisations entretiennent le système musculo-tendineux en limitant l’aggravation des rétractions ; elles ont un effet antalgique important et sont fondamentales pour le bien-être. Certains patients font l’impasse sur la kinésithérapie, par lassitude, par manque de kiné-sithérapeute libéral motivé, ou parce que la prise en charge respiratoire paraît prioritaire. J’attire leur attention sur son utilité pour qu’ils soient plus assidus.Dans certaines situations, je leur propose d’effectuer un séjour en centre de rééducation, en hospitalisation. Ces séjours peuvent durer un mois, voire plus. Ils permettent au patient de bénéficier d’un programme de rééducation quotidien complet (et d’une prise en charge mul-tidisciplinaire) sans les contraintes de la vie quotidienne au domicile. Ces séjours permettent de se rendre compte de l’importance de la prise en charge orthopédique et de ses bienfaits incontestables. D’ailleurs certains patients renouvellent le séjour tous les ans”.

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

Balnéothérapie. Elle procure détente et bien-être et permet d’effectuer plus facilement les mobilisations actives.

Une rééducation basée essentiellement sur des massages

“Atteinte d’une myasthénie dia-gnostiquée en 1988, je bénéficie de séances de kinésithérapie depuis plus de 20 ans. D’une durée de 30 à 40 minutes, elles ont lieu 3 fois par semaine. Je ne pourrais pas m’en passer : 15 jours sans kinésithérapie me conduit à la catastrophe en terme de mobilité. Ces séances soulagent les crampes et les douleurs dont je souffre régulièrement, des douleurs très profondes que seuls les massages parviennent à calmer. Le kinésithé-rapeute masse les muscles des bras, des jambes et ceux du dos si néces-saire. Il effectue aussi des étirements en présence de crampes, fréquentes au niveau des mollets, des pieds et des orteils. Les massages doivent être suffisamment doux pour ne pas déclencher de poussée de la mala-die (blocage des muscles) et assez toniques pour soulager la douleur. C’est un “juste milieu” que le kiné-sithérapeute qui me suit depuis 20 ans sait parfaitement trouver”.

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E Physiothérapie

• InfrarougesLes infrarouges associés aux mas-sages et aux enveloppements chauds ont un effet antalgique. Ils poursuivent l’action vasodilatatrice de la balnéothérapie. Ils peuvent être utilisés si la balnéothérapie est contre-indiquée.• ÉlectrostimulationElle consiste à favoriser la contrac-tion musculaire par de petites stimu-lations électriques de faible intensité (et indolores). En provoquant des contractions musculaires, l’électros-timulation permet de lutter contre

le déconditionnement musculaire (tout muscle qui n’est pas utilisé se désadapte à l’effort et perd de sa force). Le but n’est pas d’augmen-ter la force musculaire mais plutôt d’entretenir un potentiel musculaire existant.

Mobilisations passives, étirements et postures

Ce sont des mouvements passifs que le kinésithérapeute applique aux différents segments du corps de la personne pour mobiliser ses muscles, ses os et ses articulations.Il les déplace les uns par rapport aux autres, étire doucement les mus-cles en prolongeant le mouvement. En complément, les postures consistent à maintenir une articu-lation quelques minutes dans une position donnée : par exemple, le kinésithérapeute maintient la main de la personne en position d’étire-ment des muscles pour conserver toute l’amplitude du mouvement du poignet... Mobilisations passives, étirements et postures ont pour but de préserver le plus longtemps possible la fonc-tion : par exemple, marcher, se tenir assis, prendre des objets, porter les aliments à la bouche, bouger le cou,

Mobilisations et étirements. Les muscles et les tendons sont étirés doucement lors des mouvements effectués par le kinésithérapeute. Cela entretient la souplesse musculaire et articulaire.

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Mobilisations actives. Ces mouvements réalisés par la personne permettent d’entretenir les articulations et la force musculaire.

Conserver une mâchoire fonctionnelleDans certaines maladies, l’atteinte des muscles de la face a un reten-tissement sur la croissance des maxillaires et modifie l’occlusion des mâchoires. Cela se manifeste par des troubles de l’articulé den-taire (les dents du haut ne sont pas bien en face des dents du bas), une limitation de l’ouverture de la bouche, voire une béance buccale. Le port d’une mentonnière peut également perturber la croissance de la mâchoire. Des difficultés pour s’alimenter plus ou moins grandes peuvent alors survenir. Une prise en charge précoce (mobi-lisations de la mâchoire, ortho-dontie…) et préventive favorise la souplesse et la croissance harmo-nieuse de la mâchoire afin de pré-server la mastication et d’entretenir l’ouverture buccale. Elle fait partie intégrante de la prise en charge orthopédique.

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Rythme et durée des séances

• Les séances de kinésithérapie doivent être régulières et suffisamment longues (pas moins de 30 minutes) pour être bénéfiques. Le rythme dépend de l’évolution de la maladie, de la période (intervention chirurgicale…), du mode de vie… Les recommandations issues de la conférence de consensus “Modalités, indications, limites de la rééducation dans les pathologies neuromusculaires non acquises” de 2001, préconisent les rythmes suivants : 3 séances par semaine, séparées par 1 jour de repos pour les mobilisations actives, et de 2 à 5 séances par semaine pour les mobilisations passives, étirements et postures en fonction de l’âge et du caractère évolutif des troubles orthopédiques. Après une intervention chirurgicale, elles doivent être réalisées tous les jours et de façon précoce.• Le kinésithérapeute est le professionnel de la prise en charge orthopédique. Il exerce en cabinet libéral ou en centre de rééducation. Proche des familles par ses interventions régulières, il peut leur enseigner certaines techniques : massages, postures réalisables à domicile... Il surveille l’appareillage et peut repérer les points de frottement. Pour que les séances de kinésithérapie se passent bien, il est important de signaler les difficultés ren-contrées (douleur, lassitude, problèmes d’organisation...) afin d’y remédier.• Les séances de rééducation sont prescrites par le médecin et remboursées par l’assu-rance maladie.Il est possible de recourir à deux kinésithérapeutes différents qui interviennent à tour de rôle pour répartir les objectifs thérapeutiques, maintenir la motivation et éviter la lassitude.

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Edéployer le thorax, plier la colonne vertébrale... Chez l’enfant, elles aident au développement pulmo-naire et thoracique.

Mobilisations actives

Ce sont des mouvements que le kinésithérapeute demande à la personne d’effectuer elle-même. Elle mobilise ainsi les muscles et les articulations impliquées dans le mouvement demandé. Le travail actif (éventuellement aidé par le kinésithérapeute, un appareil ou en balnéothérapie) participe à l’entre-tien articulaire et au maintien de la force musculaire. Les mobilisations actives sont parfois prescrites si le défi cit moteur et les rétractions sont stabilisés ou peu évolutifs.

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

AppareillageLes orthèses ou attelles constituent ce que l’on appelle l’appareillage. Leur utilisation complète la kinési-thérapie avec les mêmes objectifs : maintenir une bonne position, prévenir ou corriger les déformations des membres et de la colonne vertébrale, préserver, faciliter ou suppléer une fonction telle que la marche et procurer un meilleur confort.

Prévention, correction ou suppléance

Le port d’orthèses contribue à limiter l’apparition et l’évolution des rétrac-tions et des déformations articulaires qui en résultent. En prévention, elles sont surtout utilisées chez l’enfant pour favoriser une croissance har-monieuse et maintenir les membres

en position de fonction. Elles sont prescrites très tôt après le dia-gnostic et avant l’apparition des déformations, pour optimiser la pré-vention et le confort. Leur utilisation pour corriger les déformations déjà installées est plus diffi cile et doulou-reuse. D’autres orthèses facilitent les mouvements en maintenant les articulations en position de fonction.

Une utilisation de nuit et/ou de jour

Les orthèses sont portées de jour et/ou de nuit selon la déformation, l’âge et la maladie. Le port de nuit permet de profi ter du sommeil et de l’état de relaxation pour mainte-nir l’articulation concernée dans sa position de fonction optimale. Les orthèses de jour visent à améliorer

une fonction ou à assurer un main-tien (orthèses de fonction). Le port d’orthèses le jour complète l’action des mobilisations passives, des pos-tures et de l’appareillage nocturne.

Orthèses des membres

• Orthèses de membres supérieurs. Les orthèses de la main (petits gants) maintiennent les poignets et les doigts en position fonctionnelle. Elles sont préconisées la nuit dans les amyotrophies spinales et les myopathies congénitales ; elles peuvent l’être aussi en cas de déficit musculaire des extrémités des bras comme dans la dystro-phie musculaire de Duchenne, certaines formes de la maladie de Charcot-Marie-Tooth...

Des orthèses sur mesure

Les orthèses sont prescrites par le médecin qui réalise le suivi ortho-pédique. Leurs caractéristiques dépendent de l’atteinte orthopédique et des objectifs à atteindre : préven-tion ou correction de déformation, suppléance d’une fonction. Un orthoprothésiste les fabrique sur mesure à partir d’un moulage de la région concernée, et dans un matériau plastique souvent ther-moformable. Ce matériau permet de réajuster facilement la forme de l’orthèse afin qu’elle soit bien adap-tée. L’orthèse est ensuite tapissée d’un revêtement en mousse.Des essais de l’appareillage vérifient son adaptation. Il ne doit pas faire mal, toujours rester confortable et bien adapté. Les orthèses doivent être modifiées, voire refaites, pour suivre les modifications anatomiques de l’enfant : croissance rapide, prise de poids, nouvelles rétractions… Tout appareillage impose une sur-veillance attentive : rougeurs, douleurs d’appui... Toutes deux, doivent êtresignalées au médecin : elles sont signe que l’orthèse n’est pas bien adaptée.

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Attelles ou orthèses. Elles permettent de maintenir un bon alignement articulaire.

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social (tout le monde porte des chaussures), elles protègent les pieds et les maintiennent pendant la journée dans une position articulaire normale et indolore. Les orthèses de marche actuelles peuvent être portées avec des chaussures classiques.

Orthèses de rachis ou corset

Le corset a pour but de prévenir les déformations et l’effondrement de la colonne vertébrale (scoliose, cyphose, lordose) pendant la crois-sance. Dans certaines maladies comme l’amyotrophie spinale (de type II), il est indispensable pour éviter l’affaissement du dos, qui à terme, nuirait à la fonction respira-toire. Grâce au corset, la stabilité du tronc et l’alignement de la colonne vertébrale en position assise et lors de la verticalisation sont préservés.Le corset comporte une têtière

Les orthèses au quotidien

Qu’il s’agisse des attelles ou du corset, le port d’orthèses nécessite la coopération de l’enfant ainsi que l’adhésion des parents au projet de prévention mis en place, ce qui peut demander un peu de temps. Au-delà de l’intérêt orthopédique, l’impact psychologique n’est, en effet, pas négligeable. Les orthèses représentent une contrainte quo-tidienne (mettre les attelles, les enlever…), rappellent la maladie, donnent une autre image de l’enfant, un corps plus rigide… Elles mettent aussi une distance lors des contacts charnels avec l’enfant… Exprimer ses difficultés et ses questions aux professionnels de l’équipe pluridis-ciplinaire, en particulier au psycho-logue, peut faciliter l’acceptation de l’appareillage.

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E• Orthèses de membres inférieurs. Elles permettent de maintenir l’ali-gnement des membres inférieurs et d’éviter le fl exum de genou (défor-mation articulaire qui le maintient fl échi) et les pieds “tombants”. Les attelles cruropédieuses maintiennent la cuisse et la jambe jusqu’au pied, mettant les pieds, genoux et hanches en bonne position ; d’autres attelles maintiennent la jambe et le pied alignés pour éviter que celui-ci ne se déforme… Elles facilitent le maintien de la marche et la position debout (verticalisation), en particulier chez l’enfant, comme dans la dys-trophie musculaire de Duchenne, l’amyotrophie spinale, les dystro-phies musculaires congénitales… Le port de chaussures est indispen-sable, même si l’enfant ne marche pas. Outre le côté esthétique et

Changer de position et être debout

L’alternance posturale. Passer de la position debout à la position assise ou allongée, sur le dos ou sur le ventre constitue ce que les médecins appellent l’alternance posturale. Le changement de position permet de soulager régulièrement les points d’appui, de prévenir la survenue des douleurs et de lésions cutanées…C’est un besoin que l’on satisfait sans s’en rendre compte, si on peut bouger seul. Dans le cas contraire, l’alternance posturale doit être aidée (par un tiers, par l’appareillage...), systématique et régulière.

La verticalisation. La position debout contribue au maintien d’un bon état orthopédique et à l’alternance posturale. Elle prévient l’apparition des déformations de l’articulation de la hanche et du genou. Outre ces effets, la verticalisation bénéficie aux fonctions digestive (transit intestinal), urinaire, cardiovasculaire… Etre debout permet d’appréhender l’espace différemment et d’être à hauteur des autres pendant les activités de la journée ce qui est essentiel pour se sentir comme tout le monde. Les recommandations issues de la confé-rence de consensus “Modalités, indications, limites de la rééducation dans les pathologies neuromusculaires non acquises” de 2001, préconisent 3 heures de verticalisation par jour chez le jeune enfant et 1 heure par jour pour les plus âgés et les adultes.

Les dispositifs de verticalisation. Le choix du système de verticalisation se fait parmi plusieurs dispositifs possibles et avec l’équipe médicale de la consultation pluridisciplinaire (médecin de rééducation, kinésithérapeute et/ou ergothérapeute). La verticalisation statique permet de maintenir la station debout en toute sécurité. On utilise des tables de verticali-sation, munies éventuellement d’une tablette amovible, ou des orthèses de verticalisation fixées sur un support. La verticalisation dynamique se fait grâce aux fauteuils roulants verticalisateurs.

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La verticalisation contribue au maintien d’un bon état orthopédique et physiologique.

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dotée d’une mentonnière, si les muscles du cou sont trop faibles pour tenir la tête ou quand la sco-liose est très évolutive. Le corset garchois. Ce corset majoritairement utilisé dans les mala-dies neuromusculaires est adapté aux scolioses qui se développent dans ces maladies. Il corrige les déformations et empêche l’effon-drement de la colonne vertébrale. Il est fabriqué sur mesure, soit à partir d’un moulage plâtré, soit à partir de mesures directes du buste à l’aide d’un capteur optique au laser. Grâce à ses points d’appuis évitant le tho-rax, il ne gêne pas la respiration. Ajustable et réglable, il peut “grandir“ avec l’enfant. Il est réajusté progres-sivement, et refait régulièrement au cours de la croissance.

La rééducation me semble bénéfique pour ma fille

“Ma fille de 16 ans, atteinte d’une dystrophie musculaire congénitale, a bénéficié d’une prise en charge orthopédique stricte dès que le diagnostic a été posé, vers l’âge de 3 ans et demi. Aujourd’hui, en partie grâce à cela, elle marche encore sans aide, peut réaliser de nombreux mouvements fins des mains... Les séances de kinésithérapie d’une durée d’une heure environ, ont lieu 2 fois par semaine, au cabinet du kinésithérapeute. Elles débutent toujours par des massages et se poursuivent par des étirements des membres, des pieds, des chevilles, des poignets…, ainsi que des postures, pour éviter les rétractions. Parallèlement à ces séances, ma fille porte des attelles la nuit pour éviter les déformations des pieds et continuer à marcher. En forme de bottes, elles ont été fabriquées sur mesure. J’ai le sentiment que la rééducation est très bénéfique pour la marche ; de même que les attelles, même si aujourd’hui, ma fille a plus de mal à accepter de les porter comme auparavant. Récemment, le médecin qui réalise le suivi médical nous a parlé de l’éventualité d’une arthrodèse ; elle pourrait avoir lieu au printemps prochain. Il nous a expliqué son intérêt pour redresser la colonne et faciliter la respiration. Il a également été très clair sur les aspects techniques de cette intervention chirurgicale. En revanche, il ne peut pas garantir que notre fille pourra continuer à marcher après l’intervention… Il ne sera pas facile de prendre cette décision, d’autant que notre fille marche encore et craint de ne plus pouvoir le faire après. C’est donc une décision délicate. Nous devons prendre le temps de la mûrir”.

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Corriger ou stabiliser des déformations

Une intervention chirurgicale peut être envisagée lorsque les défor-mations ne peuvent plus être mai-trisées par les autres techniques de prise en charge. Cela ne signifi e pas pour autant qu’elles ont échoué ; au contraire, elles ont permis d’amener le corps dans le meilleur état ortho-pédique possible.La chirurgie permet soit de fi xer une articulation pour l’empêcher de se déformer davantage, soit de libérer une articulation en sectionnant ou rallongeant le tendon trop rétracté d’un muscle (ténotomie) pour cor-riger une déformation et préserver une fonction.

Une chirurgie au cas par cas

La nature de l’intervention dépend de la maladie (la chirurgie n’y est pas toujours nécessaire), de la déforma-tion et de son évolutivité, de l’âge... La chirurgie de la colonne verté-brale (rachis) appelée arthrodèse rachidienne est fréquente dans la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD), l’amyotrophie spinale (SMA), les dystrophies musculaires congé-nitales (DMC). L’intervention sur les tendons est moins fréquente mais peut être proposée également dans ces maladies. Dans d’autres mala-dies, elle reste ponctuelle : fi xation de l’omoplate dans la myopathie facio-scapulo-humérale, chirurgie du pied dans certaines formes de la

maladie de Charcot-Marie-Tooth…La technique utilisée par le chirurgien tient compte du bilan orthopédique. L’intervention prend en compte les risques cardiaques et respiratoires. Elle nécessite une rééducation fonc-tionnelle post-opératoire rigoureuse.

Un bon état général préalable

Une intervention chirurgicale est mieux supportée si l’état général est bon. Un bilan anesthésique évalue ce dernier, au point de vue cardio-logique, respiratoire, nutritionnel. En fonction de la maladie, l’anesthésiste prend les précautions adéquates. Une prise en charge respiratoire et orthopédique peut s’avérer néces-saire avant l’intervention, tout

Chirurgie orthopédiqueLa chirurgie concerne les membres inférieurs et la colonne vertébrale, plus rarement les membres supérieurs. Elle intervient en complément ou en relais de la kinésithérapie et de l’appareillage dans le traitement des déformations et des rétractions.

SAVOIR ET COMPRENDRE REPÈRES

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comme une prise en charge nutri-tionnelle si l’état nutritionnel est défavorable.

Chirurgie des membres inférieurs

Elle est surtout proposée dans la dystrophie musculaire de Duchenne, l’amyotrophie spinale, certaines dys-trophies musculaires congénitales et certaines CMT. Les interventions peuvent concerner les articulations de la hanche, du genou et du pied : sectionner ou rallonger un tendon (ténotomie) ; intervenir sur le sque-lette (ostéotomie). La prise en charge post-opératoire est très rigoureuse : gestion de la douleur (prescrip-tion d’antalgiques), kinésithérapie (mobilisations passives, postures quotidiennes) , appareillage.Ces interventions améliorent le confort de vie (confort assis, debout…) en atténuant les douleurs d’installation. Elles peuvent contri-buer à prolonger la marche, avec ou sans l’aide d’appareillages, faciliter la verticalisation, la position assise et/ou l’installation au fauteuil.

Chirurgie de la colonne vertébrale

Ar throdèse rach id ienne .L’affaiblissement des muscles qui maintiennent la colonne vertébrale favorise son effondrement (cyphose) et/ou sa déviation (scoliose), à l’ori-gine de douleurs de positionnement et d’une aggravation des diffi cultés respiratoires. L’arthrodèse rachi-dienne est une chirurgie de la colonne vertébrale qui empêche l’effondrement du tronc, corrige la scoliose et stabilise durablement l’alignement de la colonne.Elle est surtout réalisée à l’adoles-cence, dans la dystrophie musculaire

de Duchenne, l’amyotrophie spinale et certaines dystrophies musculaires congénitales. La décision d’intervention est prise en fonction de l’évolution de la déformation, l’état cardiaque, nutri-tionnel, l’âge… Elle nécessite aussi une discussion approfondie entre la personne, sa famille et l’équipe médicale pour bien en comprendre tous les aspects. Fixer les vertèbres entre elles. L’intervention consiste à faire fusion-ner les vertèbres entre elles (les os se soudent comme après une frac-ture), du haut du dos jusqu’en bas, en fi xant ou non le bassin selon la situation. La mise en place de tiges métalliques permet de redresser la colonne, si besoin, et de la main-tenir droite le temps que la fusion des vertèbres cicatrise. La tige peut ensuite être laissée en place ou par-fois retirée.

Une prise en charge étroite avant, pendant, après. Pratiquée en centre spécialisé, l’intervention est assez lourde. Elle nécessite une prise en charge médicale importante avant l’intervention, pour parvenir à un bon état général (respiratoire, nutritionnel…) et après celle-ci. Après l’intervention et durant les premiers jours, des traitements antalgiques permettent de contrôler la douleur. Une rééducation respira-toire intensive est mise en route très rapidement : séances d’hyperinsuf-fl ation (ventilation en pression posi-tive) et drainage bronchique.Le retour à la station assise peut habituellement se faire au bout de quelques jours, en fonction de cha-cun. La verticalisation n’est envisa-gée que lorsque la station assise est bien supportée.Des repères à retrouver. Le redressement et la rigidification du dos ainsi obtenus modifi ent les possibilités gestuelles : une période d’adaptation de la gestuelle à la nou-velle posture est nécessaire. Il peut être utile d’adapter l’environnementimmédiat (plan de travail…). Dans les premiers mois qui suivent l’opé-ration, il faut être attentif aux dou-leurs et ne pas tordre le dos lors des transferts. Une fois la fusion des vertè-bres acquise, l’arthrodèse ne néces-site pas de précautions particulières par la suite : la jonction entre les os vertébraux est solide (comme deux os soudés après une fracture).

Chirurgie des membres supérieurs

Les indications sont plutôt rares. Pour la myopathie facio-scapulo-humérale, la chirurgie de l’épaule est parfois pratiquée. La chirurgie de la main peut concerner par exemple la maladie de Charcot-Marie-Tooth.

La chirurgie est prescrite au cas par cas ; elle n’est pas nécessaire dans toutes les maladies neuromusculaires.

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Prise en charge orthopédique et maladies neuromuscula ires

Des aides techniques multiples

• La marche peut être compensée par un scooter électrique qui permet de se déplacer au même rythme que les autres, tout en s’épargnant et en pouvant marcher sur de courtes distances. Le fauteuil roulant élec-trique peut aussi être proposé quand la marche est trop diffi cile. Certains sont “multipositions” ce qui permet de s’adapter aux nécessités sociales (comme se mettre à hauteur d’une personne debout pour lui parler…) et de changer de position réguliè-rement (déplier un peu les genoux, s’allonger ou se mettre debout…).

• Certaines aides techniques facilitent le transfert d’une assise à une autre : planche de glissement, disque de transfert, lève-personne…

• Les fonctions des membres supé-rieurs peuvent être compensées, selon les besoins, par des sup-ports de bras, pinces de pré-hension, enfile-chaussette, bras télémanipulateur…

• Les outils de communication offrent aujourd’hui de grandes pos-sibilités : ordinateur accessible (logi-ciels et périphériques de pilotage…), téléphonie adaptée, contrôle d’environnement…

• L’aménagement de la maison peut aussi améliorer considérablement l’autonomie.

Faire son choix

Le choix de l’aide technique dépend des incapacités de la personne, de son environnement, de son mode de vie, de ses projets... Il est le résultat d’une évaluation précise des besoins par un ergothé-rapeute, qui s’effectue en collabora-tion avec le médecin chargé du suivi médical, le technicien d’insertion de l’AFM, les professionnels de l’aide technique (revendeurs…). Le coût des aides techniques est pris en charge par la prestation de compensation (PCH), en partie ou complètement, selon les cas. La demande de dossier doit être effectuée auprès de la MDPH (Maison départementale des per-sonnes handicapées) de son département.

Les aides techniquesEn compensant les incapacités de certaines fonctions, les aides tech-niques redonnent de l’autonomie, tant pour les gestes de la vie cou-rante que les déplacements et les interactions sociales. Scooter, fauteuil électrique, aides techniques aux transferts, lèves-bras, ordinateur adapté, couverts adaptés…, les aides techniques sont nombreuses. Leur choix s’effectue en fonction des besoins de la personne.

Acquérir une aide techniqueLe recours à une aide technique peut susciter une certaine résistance et demander de la maturation. Si les aides techniques redonnent une grande autonomie à l’enfant ou l’adulte qui a restreint ses activités, elles matérialisent aussi l’évolution de la maladie. Les étapes d’acquisition de l’aide technique accompagnent cette maturation : évaluation des besoins avec l’ergothérapeute, proposition de matériels, essai de ces derniers chez les revendeurs ou dans un Centre d’information et de conseils sur les aides techniques (CICAT)… Au sein de l’AFM, les professionnels des Services régionaux peuvent vous mettre en contact avec un ergothérapeute, vous aider à cerner vos besoins, vous accompagner dans les démarches de choix et de financement de l’aide technique. Leur coordonnées sont disponibles sur le site internet de l’AFM (www.afm-telethon.fr) ou en appelant l’Accueil familles AFM au n° Azur 0 810 811 088.Pour se renseigner : Fédération nationale des CICAT (www.fencicat.fr) ; bases de données sur les aides techniques telles que Handicat (www.handicat.com) ; salons grand public (www.autonomic-expo.com et www.handica.com).

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Un positionnement en fauteuil roulant adéquat

Être bien positionné dans son fau-teuil roulant permet de se sentir confortable. Cela participe aussi à la prévention et au traitement des troubles orthopédiques. Une bonne installation posturale permet de ralentir ou de maîtriser l’apparition de déformations orthopédiques ; elle prévient les douleurs. Y être vigilant est donc essentiel. Tout inconfort persistant doit être signalé à l’équipe médicale.Un temps clinique consacré au positionnement en fauteuil est en développement au sein de certaines consultations pluridisciplinaires neu-romusculaires. Il se déroule sous la responsabilité de professionnels de la prise en charge orthopédique : médecin de médecine physique et de réadaptation, ergothérapeute, kinésithérapeute, orthoprothésiste. Il aboutit à la meilleure proposition technique pour la personne en fau-teuil, compte tenu de ses spécifi-cités orthopédiques et posturales, de ses habitudes de vie, de son environnement…

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http://www.afm-telethon.fr

Repères Savoir & Comprendre, AFM :

• Prévention et maladies neuromusculaires, 2003

• Ordinateur et maladies neuromusculaires, 2007

• Lève-personne et maladies neuromusculaires, 2008

• Bien s’équiper pour bien dormir, 2009

• Salle de bain et maladies neuromusculaires,2009

• Soutien psychologique et maladies neuromusculaires, 2009

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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à l’élaboration de cedocument et apporté leur témoignage ou leur

contribution photographique.