pour le communisme, la lutte auto-organisée ......donc les timides et les critiques, c’est...

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N ° 23 S EPTEMBRE 2014 pour le Communisme, la Lutte Auto-organisée, Internationaliste et RévolutionnairE Bulletin de la Tendance CLAIRE du NPA 1 2 SOUTIEN Les prochaines réformes pro-capitalistes Lip, les patrons de gauche et l’autogestion Sur le réformisme antilibéral « de gauche » Contributions pour le congrès du NPA Valls II le MEDEF applaudit ! Films, littérature

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Page 1: pour le Communisme, la Lutte Auto-organisée ......donc les timides et les critiques, c’est l’heure d’un gouvernement de combat, chargé d’imposer l’agenda de la bourgeoisie

N°23

SEPTEMBRE 2014

pour le Communisme, la Lutte Auto-organisée, Internationaliste et RévolutionnairE

Bulletin de la Tendance CLAIRE du NPA

1 €

2 € SOUTIEN

Les prochaines réformes pro-capitalistes

Lip, les patrons de gauche et l’autogestion

Sur le réformisme antilibéral « de gauche »

Contributions pour le congrès du NPA

Valls II

le MEDEF applaudit !

Films, littérature

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ÉDITO

Une crise politique qui s’approfondit

Crise dans l’exécutif

En France, il aura su� queMontebourg et Hamon fassent detimides critiques sur le fond dela politique économique pour queManuel Valls fasse une crise d’au-torité, exigeant la tête de ces mi-nistres et obtenant un remanie-ment. Saluons la performance, horscas de gouvernements intérimaireschargés d’expédier les a�aires cou-rantes entre deux élections, c’estle plus court de l’histoire de la Verépublique. De nouveaux fusiblesde ce système à bout de sou�eviennent ainsi de cramer. Adieudonc les timides et les critiques,c’est l’heure d’un gouvernement decombat, chargé d’imposer l’agendade la bourgeoisie au pas de charge.En ce sens, la nomination d’Em-manuel Macron à l’Economie età l’Industrie est un signal asseznet de la politique qui sera suivie.

Banquier d’a�aires, devenu multimillionnaire en pilotant le rachatd’une �liale de P�zer par Nestlé ;dernier soutien de Cahuzac au ca-binet de François Hollande, il est unpur produit du capitalisme pourris-sant.

Ce n’est donc pas surprenantqu’il vienne de créer la polémiqueen voulant en �nir avec ce qu’ilreste des les 35 heures, poussantManuel Valls, acclamé à l’Univer-sité d’Eté du Medef à éteindre pré-cipitamment l’incendie. On ne peutque voir davantage s’accroître lestensions au sein du Parti Socialiste,entre « frondeurs » et « loyalistes ».Il y a bien entendu les critiquesvenant de la gauche du parti, no-tamment de Gérard Filoche. . . Maiségalement ces propos assez clairsde Cambadélis, le premier secré-taire du PS : s’il condamne l’ailegauche qui voudrait « renverserle gouvernement », il a également

ces jugements très lapidaires « lesocial-libéralisme ne fait pas partiede notre vocabulaire » et « Je mesuis opposé fermement à certainesdérives à la gauche du Parti socia-liste. Je pourrais le faire vis-à-visd’autres tentations ». Ce qui n’em-pêche pas une première fédérationdu MJS d’appeler à combattre legouvernement.

Les réponses à apporter :

Dans ces circonstances, quedevons-nous faire, quelle ligne de-vons nous mettre en avant ? Ilnous apparaît faux de faire del’agitation autour d’une « 6e Ré-publique », plus parlementaire, ca-pable de répondre aux revendica-tions des couches populaires. C’estsemer des illusions comme quoi,en ripolinant un peu les insti-tutions, l’on pourrait changer lavie pour peu qu’on élirait Mélen-chon. . . L’autre mauvaise réponse

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Édito 3

serait de se replier sur son Aventin,se cantonnant à des discours incan-tatoires à coté des manifs.

En s’appuyant sur les expé-riences et les enseignements desluttes de cette dernière année cellesde l’agro-alimentaire breton, descheminots, des intermittents, despostiers du 92 et de toutes ces lutteséparpillées, isolées ; et en nousappuyant sur celles qui peuvent(re)naître cet automne dans la santé(avec une échéance importante le23 septembre), comme à la SNCMoù rien n’est réglé, dans l’édu-cation nationale voire dans lesfacs (entre les universités en quasifaillite, la réforme �asco des ESPE,la LMDE en di�culté �nancière 1)où Valls en virant Hamon se coupede ses relais à la tête de l’Unef ;il s’agit d’arriver à construire letous ensemble, la convergence desluttes. . .

Pour cela, il est avant tout né-cessaire de faire sauter le verroudu « dialogue social », des concer-tations au sommet qui endormentet enterrent les luttes comme nousl’avons vu il y a encore peu àla SNCF. Pour cela, il faut nous

battre au sein de nos organisa-tions syndicales pour que les direc-tions quittent la table des négocia-tions et engagent la bataille pourmettre en échec Hollande-Valls. Ledépart de la CGT et de la FSUde la conférence sociale en juillet,sous la pression de leurs bases, estdéjà une première victoire, qu’ils’agit de transformer. Pour cela,il nous faut rassembler toutes leséquipes syndicales les plus comba-tives, les plus radicalisées, les mi-litants syndicaux les plus bagar-reurs au sein d’un grand courantintersyndical, lutte de classes, an-tibureaucratique, qui s’appuie surl’auto organisation. Un tel rassem-blement ne se constituera pas spon-tanément. Notre parti devrait dèsaujourd’hui prendre des initiativespour aider à l’émergence d’un telcourant, tout en s’opposant publi-quement et fortement aux bureau-crates qui collaborent avec le patro-nat et le gouvernement.

La construction d’un mouve-ment d’ensemble implique avanttout la construction du FrontUnique Ouvrier. Il y a aujourd’huinécessité de mobiliser le plus lar-

gement possible les travailleurs surla base de mots d’ordre précis etconcrets, et pour cela, que notreparti s’adresse grand angle auxdi�érentes organisations du mou-vement ouvrier. Ces mots d’ordre,permettant la mise en mouvementdes salariés, pourraient être à mi-nima le combat contre le nouveaubudget, contre le pacte de respon-sabilité et la casse de la sécurité so-ciale, pour l’interdiction des licen-ciements et l’abrogation de l’ANI,contre les cadeaux aux patrons,pour l’augmentation des salaires,des minimas sociaux et des petitespensions, pour la défense du ser-vice public...

Du coté du NPA, il s’agirad’avancer en plus nos propres motsd’ordre et de les articuler avec laquestion du pouvoir. Qui pourra lesmettre en place ? Un gouvernementdes travailleurs, rompant avec leslogiques capitalistes, avec les insti-tutions nationales et européennes,expropriant les capitalistes et pla-ni�ant démocratiquement l’écono-mie.

Juno Smith,le 03 septembre 2014

1. h�p://www.franceinfo.fr/actu/societe/article/la-lmde-palcee-sous-administration-provisoire-528855

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France 4

FRANCE

Valls II : après les cadeaux aux patrons, les «réformes structurelles »

Dès le lendemain de l’élec-tion de Hollande, nous écrivions :« Pour autant, il n’y a rien à at-tendre de Hollande, qui va pour-suivre et aggraver la politiqued’austérité et de « réformes struc-turelles » car la crise du capita-lisme l’exige impérativement » 1.Les vagues promesses de Hollandepour se faire élire ne pesaient paslourd face aux exigences du sys-tème : en temps de crise, les margesde manœuvre se rétrécissent, etl’austérité s’impose comme la seulesolution des gouvernements de« gauche » ou de « droite ». Hol-lande devait taper d’autant plusfort que la France était en retardpar rapport aux autres pays euro-péens : les marges des entreprisess’e�ondraient, le dé�cit commer-cial s’accroissait, tous les signauxétaient au rouge et devaient néces-sairement conduire Hollande à êtrepire que Sarkozy.

Les deux premières annéesdu mandat de Hollande ont étéavant tout marquées par les(gros) cadeaux aux patronat :d’abord le CICE (20 milliards), puisle pacte de responsabilité (40 mil-liards). Cette in�ation des cadeauxau patronat a été �nancée par deshausses d’impôts sur les ménageset des coupes drastiques dans lesdépenses sociales et les servicespublics. Le transfert d’une classeà une autre est limpide et a dé-�nitivement coupé Hollande descouches populaires, propulsant leFN autour de 25%.

Mais il y a eu au �nal as-sez peu de réformes structu-relles au cours de ces deux an-nées. La principale a été la loi dejuin 2013 sur la « sécurisation del’emploi », transcription de l’accordnational interprofessionnel (ANI)signé entre les « partenaires so-ciaux ». Cette loi donne notamment

carte blanche au patronat d’aug-menter le temps de travail et dediminuer les salaires en cas de« grande di�culté » pendant 2 ans,à condition de signer un accordmajoritaire de « maintien de l’em-ploi » avec des syndicats collabos,espèces malheureusement très ré-pandues.

Malgré ces attaques, la ren-tabilité du capital peine à seredresser. Après avoir chuté de4 points depuis 2007, le taux demarge commence à se redresser pé-niblement, avec une hausse de 0,6points au 1er trimestre 2014. LaFrance est toujours « en retard »par rapport à l’Allemagne qui a vuson taux de marge grimper grâceà Schröder, et désormais par rap-port à l’Europe du Sud où des thé-rapies de choc s’abattent sur les tra-vailleurs depuis 2009.

C’est pourquoi Hollande etValls ont décidé d’un saut quali-

1. h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=367

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France 5

tatif dans les attaques. En juillet,pour rassurer le patronat avant laconférence sociale, Valls annonçaitune simpli�cation du code du tra-vail a�n « de rendre le fonction-nement de l’économie plus souple,plus e�cace ». Après avoir éliminétoute voix dissonante du gouver-nement, Valls a communié avec leMedef le 27 août en centrant sondiscours autour de l’allégèment ducode du travail, de la remise encause des seuils sociaux, et de l’ex-tension du travail le dimanche. Lemessage est limpide : l’heure estaux réformes structurelles pour le-ver tous les verroux qui limitent laliberté des patrons d’exploiter aumaximum les travailleurs. Pas dequoi e�rayer le camarade Berger(dirigeant de la CFDT) qui a dittranquillement « ne pas être cho-qué » par le discours de Valls ! 2 EtValls a maintenu le cap à l’univer-sité d’été du PS le 31 août. Agré-mentant son discours de quelquesréférences qui font plaisir aux mili-tants, il a même réussi à faire leverles militants pour applaudir sa po-litique d’aides massives au patro-nat. Symboliquement, l’image estforte : Valls transforme ainsi les mi-litants du PS en bons petits soldatsdu capital. Alors que Cahuzac niaitl’existence de la lutte des classes 3,Valls va encore plus loin en identi-�ant purement et simplement l’in-térêt du patronat et l’intérêt géné-ral : « il est absurde de parler de ca-deaux faits aux patrons, ce langagen’a aucun sens. Une mesure favo-rable aux entreprises est favorableau pays tout entier ». Les patronsne sont d’ailleurs plus nommés : ilssont l’incarnation même de l’inté-rêt général 4.

Assouplir encore davantageles 35 heures ?

Dans une interview donné auPoint juste avant sa nominationcomme ministre de l’économie,Emmanuel Macron a déclaré :« nous pourrions autoriser les en-treprises et les branches, dans lecadre d’accords majoritaires, à dé-roger aux règles de temps de tra-vail et de rémunérations. C’est déjàpossible depuis la loi de juillet 2013,mais sur un mode défensif, pour lesentreprises en di�culté. Pourquoi nepas étendre cedispositif à toutes lesentreprises, à la condition explicitequ’il y ait un accordmajoritaire avecles salariés ? » 5

Comme l’indique Macro, les35h ont été largement déticrotéespar la droite mais aussi par lagauche. Dès le départ, la contrepar-tie des 35h a été plus de �exibilitépour les employeurs, et des condi-tions de travail dégradées, notam-ment pour les ouvriers et les em-ployés.

Début 2002, Aubry a autoriséles entreprises de moins de 20 sa-lariés à ne majorer que de 10% (aulieu de 25%) les heures supplémen-taires. Cela a ensuite été prolongépar Fillon avant que Bertrand per-mette en 2008 à l’ensemble des en-treprises de ne payer les heuressupplémentaires que 10% de plusen cas d’accord collectif.

Après l’élection de Chirac en2002, le nombre d’heures supplé-mentaires ne donnant pas droitau salarié à un repos compensa-teur passe de 130 à 180 heures paran, puis à 220 heures en 2004. Laloi d’août 2008, qui a maintenula durée légale des 35 heures, aaussi donné quasiment toute lati-

tude aux entreprises pour �xer leurpropre contingent d’heures supplé-mentaires ou étendre le recours auxforfaits jours, sous réserve d’accordavec les syndicats ou représentantsdu personnel.

En�n, la loi sur la sécurisationde l’emploi de juin 2013 permet auxentreprises, en cas de « graves dif-�cultés », d’ « aménager » tempsde travail et salaires pendant 2 ansmaximum.

Ainsi, les 35h ne correspondentpas au temps de travail e�ec-tif : celui-ci était en 2012 de 39,4heures en moyenne pour un sa-larié à temps complet, contre unemoyenne de 40,4 heures dans l’UE.Les 35h n’empêchent absolumentpas les patrons de faire bosserbien davantage leurs salariés, jus-qu’à 48h, qui est la durée maxi-male théorique autorisée. Les 35hmarquent le seuil au-delà duquelle travail est payé en heures sup-plémentaires 6. C’est le dernier ac-quis des 35h, et c’est celui que lespatrons voudraient faire sauter...tout en gardant tous les avantagesliés au passage des 35h (allégementde cotisations, �exibilité, annuali-sation, etc.).

Macron a depuis été « recadré »par Valls : pas question de toucherau symbole des 35h comme duréelégale du temps de travail. Maistout le reste est envisageable : or,si on permet aux patrons de fairetravailler leurs salariés 40h ou 45hen payant des heures supplémen-taires comme des heures normales,que resterait-il des 35h ? Rien, justele symbole...

Vers une remise en cause desseuils sociaux

L’aile droite du PS avait pré-

2. h�p://www.lepoint.fr/societe/berger-cfdt-pas-choque-par-le-discours-pro-entreprises-de-valls-28-08-2014-1857244_23.php

3. h�p://blogs.mediapart.fr/blog/pierre-mascomere/090113/jerome-cahuzac-et-la-lu�e-des-classes4. h�p://www.francetvinfo.fr/politique/gouvernement-valls-2/valls-aux-patrons-j-aime-l-entreprise_679127.html5. h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/contenu/autre/Macron%20le%20point.pdf6. Voir l’explication très claire de Gérard Filoche : h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/breve.php?id=9565

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France 6

paré le terrain dès février dernier.Dans une tribune, 10 parlemen-taires socialistes proches de Vallsdéclaraient : « Pour l’emploi, il fau-dra que François Hollande s’attaqueà un ultime et redoutable tabou na-tional : celui des rigidités d’un codedu travail qui, de protecteur du sa-larié, est devenu un puissant répulsifde l’emploi » 7

Ces « rigidités » sont désor-mais o�ciellement dans le colli-mateur du gouvernement. Fin mai,le ministre du travail, Rebsamen,s’était dit favorable à suspendrependant trois ans les seuils légauxcréant des obligations sociales auxentreprises, comme par exemplela création d’un comité d’entre-prise ou d’un comité d’hygiène àpartir de 50 salariés. Hollande etValls pressent désormais les « par-tenaires sociaux » de négocier etde conclure avant la �n de l’année.Si daventure les syndicats collabosmanquaient, Valls pourrait de toutefaçon prendre ses responsabilités,en assouplissant ou en supprimantces seuils. D’ores et déjà, Rebsa-men se fait l’avocat des patrons enpleurnichant sur le fait que sur leplan �scal, passer le seuil des 50 sa-lariés « représente une charge nou-velle pour l’entreprise », qui peutaller « jusqu’à 4% d’augmentationdes charges ». Et oui, la protectiondes salariés a un coût, c’est en ef-fet un véritable scandale. Au lieud’étendre ces protections aux sala-riés des petites entreprises, il esturgent de les supprimer pour les sa-lariés des grandes entreprises. C’estla conception de la « justice so-ciale » du PS.

Les principales obligationsactuelles qui sont dans le

collimateur du gouvernement

Les entreprises passant le seuildes 10 salariés doivent organiserl’élection de délégués du personnel(DP). Mais, dans les faits, la grandemajorité des entreprises de 10 à 20salariés n’ont pas de DP, faute devolonté du dirigeant ou de candi-dat.

Le passage du seuil de 50 sa-lariés, le plus décrié par le pa-tronat, impose la mise en placed’un comité d’entreprise et d’unCHSCT (hygiène et sécurité). LesPME de moins de 200 salariéspeuvent mettre en place une délé-gation unique du personnel, dontles membres remplissent ces deuxrôles. En outre, d’autres mesuresd’ordre social s’imposent passé 50salariés, comme l’instauration departicipation et la mise en placed’un plan de sauvegarde de l’em-ploi (PSE) en cas de licenciement deplus de 10 salariés.

L’extension du travail ledimanche

Autre rigidité dans le collima-teur du gouvernement : les restric-tions au travail dominical. Le gou-vernement veut désormais agir viteet fort. Le projet de loi sur la crois-sance (qui concernerait le travail dudimanche et les professions régle-mentées), préparé par Montebourg,et porté désormais par Macron, de-vrait prendre la forme d’une « loid’habilitation à procéder par or-donnances », qui serait présentéeen Conseil des ministres début oc-tobre.

Ce serait un reniement com-plet pour Hollande qui s’était portégarant du repos dominical : « Lecombat de 2012, c’est de préserver leprincipe du repos dominical, c’est-à-dire de permettre aux travailleurs deconsacrer un jour de leur semaine àleur famille, au sport, à la culture, àla liberté. Et j’y veillerai ! » 8.

Comme chacun sait, la parolede cet individu ne vaut pas un clou.Depuis près d’un an, Hollande pré-pare le terrain et s’abrite désormaisderrière le rapport Bailly publié en2013 9, qui bien sur préconise ceque veut son commanditaire.

Il semble d’ores et déjà acquisque le total de cinq dimanchesd’ouverture exceptionnelle par anaccordés par les maires sera re-levé, probablement autour d’unedizaine. Comme le préconise lerapport Bailly, certains de ces di-manches devraient être du res-sort direct des magasins et non dumaire, sur le principe d’un droit detirage. Autant laisser faire directe-ment les patrons, qui jugeront pareux-mêmes ce qui est le plus ren-table pour leurs a�aires...

La dérèglementation desprofessions réglementées : àgenoux devant le totem de laconcurrence libre et non

faussée

Lors de l’université du Medef,Valls a déclaré : « Nous allons ac-croître le concurrence, assouplir cer-taines règles, je pense au travail dudimanche ou à l’urbanisme com-mercial. C’est un fait, le droit ac-tuel maintient les prix arti�cielle-ment élevés, freine les initiatives.» 10

La réforme programmée des

7. h�p://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20140220.AFP0561/pacte-dix-parlementaires-ps-saluent-le-pari-audacieux-de-hollande.html

8. h�p://www.filoche.net/2014/08/21/f-hollande-et-les-ouvertures-du-dimanche/9. h�p://www.youscribe.com/catalogue/tous/actualite-et-debat-de-societe/debats-et-polemiques/

rapport-sur-la-question-des-exceptions-au-repos-dominical-dans-les-235468710. h�p://www.francetvinfo.fr/politique/gouvernement-valls-2/valls-aux-patrons-j-aime-l-entreprise_679127.html11. h�p://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/0203640930083-professions-reglementees-le-rapport-choc-de-bercy-1024610.

php

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France 7

professions régèlementées (huis-siers, pharmaciens, taxis, etc.) s’ap-puie sur les conclusions d’un rap-port de l’Inspection générale des�nances (IGF) commandé à l’au-tomne 2012 par Pierre Moscovici(et gardé secret jusqu’à cet été) 11.Selon ce texte, des réformes ci-blées sur certaines professions (�nde monopole, libre installation ouencore modi�cation de la �xationdes tarifs) pourraient entraîner desbaisses de leurs tarifs de 10 à 20%.Cela permettrait donc de donnerdu « pouvoir d’achat » avec un ef-fet béné�que sur la croissance. Cetype de réformes a été déjà étémis en œuvre ces dernières annéesdans les pays d’Europe du Sud oùexistent un grand nombre de pe-tits bourgeois, ni travailleuirs sa-lariés, ni capitalistes. Il s’agit d’en�nir avec le scandale des rémuné-rations garanties. De la même fa-çon que les salariés doivent sen-tir la pression constante du marchédu travail (avec le licenciement oule déclassement en guise de sanc-tions), les petits bourgeois doiventse soumettre à la loi du marché.Ils doivent donc se soumettre auxsacro-saintes règles du marché, etaccepter une baisse de rémunéra-tion pour rester dans la course. Entemps de crise, la grande bourgeoi-sie n’a plus les moyens d’entrete-nir une couche de petits bourgeois« privilégiés » : ceux-ci doivent dis-paraître ou aligner leurs conditionsde vie sur celles des prolétaires. Etbien sur, cela se fait au nom de ladéfense du « pouvoir d’achat » destravailleurs. C’est le triomphe del’égalité, l’égalité devant les lois dumarché...

Fusion du RSA et de la PPE :quand les travailleurs richespaient une partie du salairedes travailleurs pauvres à la

place des patrons...

Le Conseil constitutionnel acensuré la baisse des cotisations sa-lariales de 2,5 milliards qui étaitprésentée comme le volet « so-cial » du pacte de responsabilité.C’était bien entendu une escroque-rie, puisque si cette baisse aug-mente le salaire net, elle diminuela partie socialisée du salaire, etdonc le niveau des prestatations so-ciales. Pour compenser cette cen-sure, Hollande a annoncé une fu-sion du RSA (revenu social d’acti-vité) et de la PPE (prime pour l’em-ploi) 12. Ce qui sous-tend ce dis-positif est l’idée suivante : à par-tir du moment où le « coût du tra-vail » doit baisser pour que les en-treprises gagnent en compétitivité,l’Etat doit compléter le salaire destravailleurs pauvres pour leur per-mettre de survivre. Et comme cesont principalement les travailleursqui paient les impôts, ce disposi-tif revient à faire payer une partiedu salaire des travailleurs pauvrespar les travailleurs « riches ». Drôlede conception de la justice socialequi permet aux patrons de se gavertout en prétendant maintenir, voireaméliorer les dispositifs de solida-rité...

Une politique du logementau service des plus riches

Les médias cherchent aujour-d’hui à opposer la gauchiste Du-�ot à Valls. Pourtant, Du�ot a ététrès gentille avec les gros proprié-taires. En prolongement du dis-positif « Scellier », elle a lancé le

dispositif « locatif express », per-mettant aux bailleurs d’obtenir uneconséquente réduction d’impôt encontrepartie d’un engagement delocation à titre de résidence prin-cipale d’au moins 9 ans. Cette ré-duction d’impôt de 18 % du prix dulogement, dans la limite de 300 000€, pouvait donc aller jusqu’à 54 000€. Lissée sur neuf années, cela faitun joli cadeau �scal de 6 000 € paran. Sympa la camarade Du�ot ! Ilfaut en e�et aider les riches à in-vestir dans la pierre pour louer auxpauvres.

Mais Du�ot est aussi très �èrede son « encadrement des loyers ».Le seul « hic » est que cet encadre-ment était �ctif. Il ne s’agissait pasde limiter la hausse moyenne desloyers, mais d’empêcher que despropriétaires les augmentent beau-coup plus que la moyenne 13. L’en-cadrement des loyers est donc unmécanisme visant à faire convergerles loyers, processus déjà bien en-gagé avant la loi Du�ot 14. Le jour-nal Le Monde, peu suspect de gau-chisme, a d’ailleurs expliqué quecet encadrement des loyers étaitplus symbolique qu’autre chose 15.Pas de quoi faire trembler les grosbailleurs...

Mais Valls a voulu se payer Du-�ot et a donc liquider l’encadre-ment des loyers de Du�ot. Plus qu’àune mesure réelle, il s’agissait deliquider un symbole et d’assumerune politique de soutien décom-plexée aux plus riches.

Ainsi, Valls a annoncé les me-sures suivantes :

— une extension dispositif « loca-tif express » : la contrepartied’engagement de temps de lo-cation passe à 6 ans (au lieu de9), avec une réduction d’impôt

12. h�p://www.lemonde.fr/politique/article/2014/08/20/annonces-de-francois-hollande-la-fusion-du-rsa-et-de-la-prime-pour-l-emploi-retient-l-a�ention_4473784_823448.html

13. h�p://www.liberation.fr/societe/2014/04/24/l-encadrement-des-loyers-en-questions_100354614. h�p://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000592/0000.pdf15. h�p://www.lemonde.fr/societe/article/2012/09/05/loyers-un-encadrement-plus-symbolique-qu-e�icace_1755733_

3224.html

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France 8

certes moindre (12%) mais signi-�cative ;

— l’autorisation de louer à ses as-cendants ou descendants : per-mettre aux bourgeois de lo-ger leur marmaille aux frais ducontribuable, voilà un nouveauvolant de la polique famiale dugouvernement ;

— un abattement exceptionnel de

30% sur les plus-values de ces-sion des terrains à bâtir ;

— les terrains à bâtir seront exo-nérés d’impôt sur le revenu aubout de 22 ans, contre 30 actuel-lement ;

— un abattement exceptionnel de100 000 € pour les donations auxenfants et petits-enfants de nou-veaux logements neufs.

Inutile de décrypter : les béné�-ciaires de la politique du logementsont avant tout les bourgeois. Avectoujours le même raisonnement : ilfaut inciter les riches à faire le bienautour d’eux en les abbreuvant desubventions et de réductions d’im-pôts.

Gaston Lefranc,le 02 septembre 2014

FRANCE

Agriculteurs : les revenus s’e�ondrent

Après trois années de hausse, lerevenu des agriculteurs a plongé en2013, de 35% selon l’INSEE, de 22%selon le ministère de l’agriculture(qui exclut de ses chi�res les pluspetites exploitations). Hormis 2009,c’est le niveau de revenu le plus basdepuis 1993.

Les agriculteurs subissent lahausse du prix de leurs intrants(notamment les engrais et l’ali-mentation animale) alors que leursprix de production baissent globa-lement. Même si les revenus desgros céréaliers baissent fortementcette année, les inégalités sont très

importantes entre agriculteurs. Sile revenu moyen s’approche de 2500 €, environ un quart des agricul-teurs gagne moins que le SMIC. Lessubventions perçues par les agri-culteurs baissent à nouveau cetteannée, alors qu’elles devraient lo-giquement compenser leur manqueà gagner. Et il y a un vrai risqueque le jeu de la concurrence « libreet non faussée » élimine les agri-culteurs les plus fragiles et dé-truise l’agriculture familiale (pro-mue longtemps pour des raisonsélectorales) au pro�t des grandesexploitations.

Endettement et suicide

Depuis une dizaine d’années,les agriculteurs subissent des �uc-tutations importantes de leur re-venu d’une année sur l’autre. Ilsvivent dans la peur, le stress, d’au-tant plus que leur endettement (etnotamment celui des plus jeunes)augmente. Un agriculteur se sui-cide tous les deux jours.

Les intérêts de la grande ma-jorité des agriculteurs, les paysans,divergent radicalement des grosexploitants défendus par la FNSEA.

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France 9

Ce syndicat réactionnaire mobiliseen outre actuellement contre la li-mitation de l’utilisation de pesti-cides (à proximité des écoles), aumépris de la santé publique. Unefracture de classe oppose ceux quivivent uniquement de leur travailet ceux qui surexploitent des tra-vailleurs agricoles.

Il faut exproprier ces agricul-teurs capitalistes et garantir un re-venu minimal de 1 700 € par moispour tous (avec des prix adminis-trés stables et une redistributionradicale des aides). Il faut égale-ment encourager les paysans à seregrouper (mutualisation des ou-tils, exploitations collectives, etc.)

et à faire de la qualité avec desméthodes qui préservent l’environ-nement. Pour satisfaire les besoinsde la population, nous avons be-soin d’une agriculture socialiste,non productiviste, et avec plus depaysans.

Gaston Lefranc,le 12 juillet 2014

FRANCE

Combattre la réforme territoriale !

Hollande vient d’annoncer aupays l’application d’une « réformeterritoriale », dont il a d’ailleurs ac-céléré le calendrier par rapport auxéchéances avancées par Valls dansson discours de politique généraleà l’Assemblée. Deux projets de loiseront en e�et présentés en conseildes ministres mardi 3 juin : l’unsur les compétences des collecti-vités, l’autre sur la nouvelle carteadministrative. Si les régions sontles premières concernées par cesprojets, en fait ils font partie d’undispositif d’ensemble. Le gouver-nement présente la réforme terri-toriale comme un élément majeurdes nouvelles « réformes » : autre-

ment dit, elle constitue un pilierdans le dispositif d’accélération desattaques contre les travailleuses etles travailleurs, pour répondre auxinjonctions du système capitaliste.

Or, s’il est évident que la rup-ture avec le système capitalisteimpliquera la destruction de l’Étatbourgeois et la mise en place d’ins-titutions totalement nouvelles,nous ne devons pas pour autantnous désintéresser des questionsinstitutionnelles dans la société ac-tuelle. . . surtout quand elles consti-tuent de l’aveu même du gouver-nement un aspect important de sapolitique.

La réforme territoriale : unerégression démocratique et

sociale. . .

Ce n’est pas un hasard si cettecontre-réforme survient mainte-nant : elle constitue un des as-pects de l’application du « pactede responsabilité », qui prévoit deréduire massivement les dépensespubliques : 50 milliards, dont 11milliards pour les collectivités ter-ritoriales. Les collectivités territo-riales seront inévitablement tou-chées, dans la mesure où ellesemploient presque 2 millions detravailleur-e-s et réalisent environ

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France 10

70Mais la réforme territoriale ne

se résume pas à une austérité bud-gétaire renforcée, elle comported’autres aspects. Elle reposerait sur4 dispositions :

— la réduction du nombre derégions en les fusionnant, bienentendu pour supprimer desemplois ; cela aura des consé-quences directes pour le ser-vice public d’éducation (l’essen-tiel des personnels employé-e-spar les régions sont des person-nels TOS des lycées)

— la suppression de la « clausede compétence générale »pour les départements (mesuredéjà tentée par Sarkozy) : la« clause de compétence géné-rale » permet à une collectivitéde ne pas se cantonner à sescompétences réservées, maisde s’occuper de problèmes plusgénéraux concernant la popu-lation. Par exemple un conseilrégional peut très bien, légale-ment, mettre en place des me-sures visant à la gratuité desTER ! La �n de la « clause decompétence générale » signi�eaussi des entraves aux collec-tivités qui voudraient soutenirles luttes des travailleur-e-s :une collectivité qui aiderait àla reprise d’une entreprise engestion ouvrière, qui soutien-drait des sections syndicales engrève, etc. pourrait très bien sevoir priver de ces moyens d’ac-tion. Priver les communes et lesdépartements de leurs moyensd’action est un des buts du pro-jet gouvernemental. Il s’agit au�nal de faire des départementsles relais purs et simples de l’ap-plication de la politique gouver-nementale, leur enlever toutepossibilité de s’opposer mêmetimidement à la politique dugouvernement.

— la suppression non pas des

départements, mais desconseils généraux existantdans chaque département.Leur pouvoir resterait, mais se-rait transféré aux préfets. Lesens en est clair : il s’agit de ren-forcer le pouvoir des représen-tants directs de l’État central,logique bonapartiste et autori-taire qui est le corollaire d’uneaustérité renforcée qui impliquede se confronter plus durementencore aux travailleur-e-s et àleurs organisations dans les col-lectivités territoriales. Et bienentendu de s’assurer que cescollectivités seront les relais lo-caux directs de la politique dupouvoir. Rappelons que l’élec-tion pour diriger le départementest un héritage de la révolu-tion démocratique bourgeoisede 1789, et seuls deux gouver-nements avaient supprimé cedispositif : celui de NapoléonBonaparte, celui de Vichy ! PourValls, y compris certains acquisdes révolutionnaires bourgeoisde 1789 sont encore de trop !

— la montée en puissance desintercommunalités, notam-ment les « métropoles ». Lesmétropoles sont parfois pré-sentées comme permettant decontrebalancer le poids énormede la capitale à l’échelle na-tionale, mais dans la réalitéc’est une toute autre logiquequi s’applique à l’échelle locale,elles récupèrent et concentrentpouvoirs et �nancements audétriment des communes etdépartements. Concernant lesautres intercommunalités, onpourrait légitimement penserque la coopération des com-munes et la mutualisation deleurs investissements permet-traient d’améliorer les servicespublics. En réalité, les inter-communalités diverses (com-munautés urbaines, d’agglo-mération. . . ) sont souvent im-

posées, et concentrent encoreplus le pouvoir aux mains deceux qui sont déjà majoritaires.Elles associent fréquemmentUMP et PS qui se répartissentles postes exécutifs, et y com-pris parfois EELV et le Front degauche, qui en font des relaisde la politique dominante. Dansces conditions, les communesles moins avantagées et les pluscombatives disposent d’encoremoins de marges de manœuvrepour résister contre les coupesbudgétaires et les suppressionsd’emplois.

. . .qui s’articule aux autres

La réforme territoriale de Hol-lande, conduirait à une rupture ins-titutionnelle importante mais aussià une continuité, tant elle s’articuleavec :

— la montée en puissance desmétropoles (premier volet desmesures récentes de décentra-lisation) : l’espace de vie doitêtre totalement plié aux besoinsdu capitalisme, autrement ditil s’agit de concentrer les ri-chesses et investissements danscertains zones du territoire. . . etd’abandonner le reste du terri-toire. Le maillage communal etdépartemental, dans lequel lestravailleur-e-s avaient imposé laprésence de services publics deproximité (poste, école, hôpi-taux. . . ), est un obstacle à dé-truire dans cette optique.

— les politiques de l’Union eu-ropéenne, avec notammentl’"Europe des régions" : les re-présentants du capitalisme necessent de le répéter, il fautconstituer de grands ensemblesrégionaux. Dont la priorité se-rait non pas l’administrationde services publics et de ré-pondre à certains besoins de lapopulation, mais d’organiser la

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concurrence entre travailleur-e-s la plus importante possible auniveau européen face à d’autresrégions.Le projet d’aéroport de Notre-

Dame-des-Landes est un exemplede déclinaison de cette politique :des centaines de millions d’eurosdans un partenariat public-privépour en faire une zone concurren-tielle à l’échelle européenne tan-dis. . . que dans tout le départementles travailleur-e-s sont licencié-e-set les services publics fermés.

Combattre la réformeterritoriale. . . et l’ensemble

de cette politique !

Dans cette situation, quellesdoivent être les perspectives pourles anticapitalistes ? Se désintéres-ser des questions institutionnellessous prétexte qu’il s’agit d’institu-tions capitalistes serait une erreurfondamentale, et �nalement un re-fus de combattre la politique gou-vernementale. Bien entendu il fauttout d’abord :

porter la perspective de la luttepour le retrait de la réforme commepartie intégrante de celle pour le re-trait du pacte de responsabilité.

porter la perspective de la rup-ture avec l’ensemble des transfor-mations institutionnelles qui ren-forcent la domination capitalisteet a�aiblissent encore plus lesdroits démocratiques. . . et notam-ment rompre avec l’Union euro-péenne qui est une pièce majeurede ce dispositif réactionnaire.

Même si cela est nécessaire, cen’est pas su�sant : d’abord, tout lemonde peut constater que dans lescollectivités territoriales les élu-e-slocaux/ales peuvent très bien appli-quer les pires politiques réaction-naires, et administrer de manièreparfaitement autoritaire et auto-cratique.

C’est pourquoi il est aussinécessaire de construire la luttedes travailleur-e-s des collectivitéspour le retrait de la réforme, en lienavec la population et les élu-e-s lo-caux/ales progressistes. Les collec-

tivités locales peuvent en e�et êtredes points d’appui pour les luttes.Elles peuvent l’être en e�et de mul-tiples façons : soutien y comprismatériel, aux luttes des travailleur-e-s ; opposition à la mise en placede réformes régressives ; politiqueen faveur des services publics etdes droits de travailleurs (gratuitédes transports, municipalisation del’eau. . . ).

Mais il ne saurait être questionde croire qu’on peut renverser lecapitalisme en s’intégrant dans lesinstitutions même les plus démo-cratiques possibles dans la sociétéactuelle : il faut donc montrer quede nouvelles institutions, démocra-tiques et sous le contrôle du peupletravailleur (un gouvernement destravailleurs, appuyé sur le principedu contrôle et de la révocabilité desélu-e-s par la population), sont unenécessité.

Octarine,le 2 juin 2014

FRANCE

Délabrement du réseau SNCF et mépris desusagers : L’exemple du RER C

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La galère des usagers duRER C traités comme du

bétail

La période des vacances com-mence bien mal pour les voya-geurs du RER C. Depuis presquevingt ans, les « travaux Castor » en-traînent une fermeture de la ligneentre Paris Austerlitz et Invalides(au plein cœur de Paris). Jusqu’ici,rien à redire : ces travaux sontnécessaires pour rénover les tun-nels parisiens. Mais les trajets s’ap-parentent de plus en plus à uneénorme galère pour les usagers dela ligne :

— la SNCF pro�te de l’été pourréduire considérablement lenombre de trains ; elle en pro�teégalement pour transformer lestrains direct en omnibus, rallon-geant le temps de transport desusagers.

— Mercredi 15 juillet, alors que lestempératures maximales étaientinférieures à 30 degrés, le tra-�c était considérablement per-turbé, en raison des « fortes cha-leurs ». De qui se moque-t-on ?La véritable raison réside dansle « délabrement » généralisé duréseau (selon les experts judi-ciaires qui ont rendu leur rap-port suite à la catastrophe deBrétigny) qui fait qu’au moindrecoup de chaud (tout à fait nor-mal en juillet), les trains doiventralentir pour éviter de nouveauxaccidents.

— La priorité, pour la direction dela SNCF, semble être de fairecirculer les trains grande ligneet même les trains de marchan-dises ! Les travailleurs peuventgriller au soleil, mais pas ques-tion de retarder la livraison demarchandises aux clients capi-talistes !

— Très peu de trains sont réfrigé-rés. La dernière commande de

trains réfrigérés (avec 4 siègespar rangée au lieu de 5, d’où uncertain confort) remonte à 1998.Depuis, nada. Les vieux trainssont « rénovés », mais plus au-cun achat de train réfrigéré. Etles rares trains réfrigérés sont simal entretenus que le systèmede réfrigération est très souventen panne...Résultat inéluctable de cette

politique désastreuse : des trainssurchargés accumulent les retards,les voyageurs sont entassés, la tem-pérature dans les wagons atteintdes sommets, des voyageurs de-bout font des malaises, ce qui pro-voquent des retards supplémen-taires. Un cercle vicieux auquella direction de la SNCF n’apportequ’un seul type de réponse : dela mauvaise communication et desemployés déquali�és envoyés surles quais pour calmer des voya-geurs à bout. On en est là. Alorsqu’il faudrait plus de trains, plus deconducteurs, plus d’agents d’entre-tien du réseau, c’est-à-dire de vé-ritables emplois pour satisfaire devéritables besoins.

Et la situation, malheureuse-ment, ne fera que s’aggraver dansles années à venir si rien ne change.Le nombre d’habitants à proximitéde la ligne C (par exemple à Bré-tigny) augmente fortement alorsque les infrastructures se délabrent.Des arrêts supplémentaires sontsans cesse créés ce qui augmentele temps de transport quand toutfonctionne normalement (ce qui estde plus en plus rare). La SNCFest de moins en moins un ser-vice public, et la logique de ren-tabilité s’impose. Pour la SNCF,les travailleurs franciliens sont desclients « captifs » : ils n’ont pourla plupart pas le choix, et donc onpeut les traiter comme de la merde,ils continueront à payer leur abon-nement faute d’alternative.

Cheminots et usagers :mêmes intérêts, même

combat, contre legouvernement et ladirection de la SNCF !

La direction de la SNCF, et der-rière elle l’Etat, sont répugnants.Non seulement ils saccagent leservice public, mais en plus ilscherchent à opposer les chemi-nots aux usagers. Nous l’avonsvu lors de la grève contre la ré-forme ferroviaire, qui découpe laSNCF pour préparer la libéralisa-tion européenne du rail. Pendantcette grève, la direction s’est mon-trée hypocritement « solidaire »des usagers, a mobilisé ses cadrespour remplacer les conducteursgrévistes (au mépris de toutes lesconsignes de sécurité), a multipliéles plans com’ pour s’ériger en amisdes usagers face aux méchants gré-vistes.

Pourtant, la véritable commu-nauté d’intérêt est entre les chemi-nots et les usagers de la SNCF, pourl’immense majorité des travailleursse rendant à leur travail. Des inté-rêts de classe identique, et un in-térêt commun à avoir un servicepublic du rail déconnecté de la lo-gique du pro�t, qui transporte lesusagers dans les meilleures condi-tions. Cet intérêt s’oppose à l’in-térêt du patronat et du gouverne-ment qui veulent libéraliser le sec-teur, ouvrir les marchés les plus lu-cratifs aux capitalistes, et mainte-nir un service public résiduel tota-lement délabré parce que non ren-table.

Il faut tirer toutes les leçons del’échec de la récente grève des che-minots :— poussées par la base, les di-

rections syndicales de la CGTet de SUD cheminots ont ap-pelé à la grève, mais elles n’ontpas revendiqué le retrait de laréforme ferroviaire. Elles n’ontrien fait pour permettre à lagrève de gagner : constitutiond’une caisse de grève, dévelop-pement de l’auto-organisation

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pour que la grève vive et puisses’étendre, actions de blocage desvoies, etc.

— les directions syndicales confé-dérales n’ont pas cherché àétendre la grève des cheminotsà d’autres secteurs et à favoriserla convergence avec les autressecteurs en lutte (intermittents,postiers du 92, etc.), ni mêmeà constituer des comités d’usa-gers solidaires. Elles ont laisséles cheminots seuls face au gou-vernement, à l’UMP, au patro-nat, et au torrent de boue média-tiqueLes cheminots NPA ont fait leur

maximum pour contrecarrer le sa-botage des directions syndicales.

Mais cela n’a pas été su�sant. Ilfaut aujourd’hui que des initiativessoient prises par le NPA pour sedonner les moyens de faire mieuxla prochaine fois, c’est-à-dire defaire plier le gouvernement et la di-rection de la SNCF. Le NPA doitse positionner en opposant des bu-reaucraties syndicales et lancer unappel à tous les syndicalistes delutte pour discuter de la constitu-tion d’un courant intersyndical an-tibureaucratique. Alors que les bu-reaucrates sont organisés, il fautque nous nous organisions face àeux, pour nous donner les moyensde faire gagner les grèves.

Les actions de protestation in-dividuelle (refus de présenter son

titre de transport aux contrôleurs,etc.) peuvent soulager et faire dubien. Mais elles ne permettront pasde changer le cours des choses.C’est par la solidarité concrèteentre les travailleurs usagers et lescheminots, que la direction de laSNCF cherche à tout prix à éviter,que nous pourrons gagner. Pour yarriver, pas de méthode miracle oude raccourci : il faut renforcer leNPA pour lui donner la force d’in-tervenir de façon audacieuse face àla passivité et à la collaboration desdirections syndicales avec le gou-vernement.

Gaston Lefranc, usager quotidien duRER C,

le 21 juillet 2014

FRANCE

La Cour des comptes : un « arbitre » juge etpartie au service des exploiteurs

La Cour des comptes, prési-dée par le « socialiste » Migaud,est inquiète : le gouvernement aprogrammé 50 milliards de coupesdans les dépenses publiques entre2015 et 2017, mais les économiesà réaliser sont « encore peu docu-mentées », voire « incertaines ». . .

C’est pourquoi la Cour se croîtautorisée à sortir de son rôle tra-ditionnel (celui de contrôler la ré-gularité des comptes publics) pourfaire ses recommandations dans unrapport publié le 17 juin. Et le mes-sage est clair : terminées les pe-tites économies, il va falloir frapperfort !

La Cour rappelle per�dementque le gouvernement n’a pas at-teint sa cible de dé�cit publicen 2013 (4,3% du PIB contre 3%prévu en décembre 2012) et qu’iléchouera probablement encore en2014 avec un dé�cit d’au moins4% du PIB : « L’objectif de dé�citpour 2014, déjà révisé à la hausseen mai, risque d’être dépassé ». Pouratteindre les objectifs 2015-2017, laCour préconise d’agir principale-ment sur la masse salariale et lesprestations sociales :

— les fonctionnaires devront tra-vailler plus (« hausse de la du-rée e�ective du travail ») pourgagner moins : le gel de l’indicene su�ra pas, il faudra égale-ment baisser les primes, revoirles règles d’avancement, etc. ;

— les e�ectifs de la fonction pu-blique devront être réduits (de30 000 postes par an) contrai-

rement à l’engagement de Hol-lande : « gel des e�ectifs desministères jugés prioritaires etpoursuite de la baisse dans lesautres » ;

— les malades seront moins biensoignés ou moins bien rembour-sés : développement de la chi-rurgie ambulatoire, frein misaux analyses médicales, ration-nement des transports de pa-tients, réduction des indemnitésde congé maladie, etc.

Ils préparent la conférencesociale

Mais la Cour oublie de ré-pondre à la question suivante :pourquoi dépenser des sommesfolles (plus de 200 millions de bud-get de fonctionnement, sans comp-ter les très hauts salaires des ma-gistrats) pour entretenir un orga-

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Lutte de classes 14

nisme qui débite chaque année lecatéchisme patronal ?

La Cour des comptes met doncla pression sur le gouvernementà la veille de l’ouverture de laconférence sociale (7-8 juillet), quidoit discuter de la mise en œuvredu « pacte de responsabilité ». Sile gouvernement persiste à vou-loir o�rir 40 milliards d’allègementd’impôts et de cotisations au patro-

nat d’ici 2017, il devra suivre lesbons conseils de la bande à Migaud.

Alors qu’il est plus a�aibli quejamais, miné par les divisions, me-nacé par le développement desluttes, le seul atout du gouver-nement sera la politique des di-rections syndicales qui, à des de-grés divers, risquent fort d’accom-pagner la mise en place de ce pactede classe. Elles annoncent toutes

leur participation à la conférencesociale. Aux anticapitalistes d’anti-ciper cette nouvelle régression enagissant dans tous les milieux mi-litants pour la rupture du dialoguesocial et pour un plan de bataillepour a�ronter le gouvernement.

Gaston Lefranc,le 27 juin 2014

LUTTE DE CLASSES

Lutte des intermittent-e-s et précaires, cequ’il faut retenir. Un accordantidémocratique qui touche tous lestravailleurs/ses

Photo : Devant le jardin du Campo Santo à Orléans, le 25 Juin, lors de l’annulation de la soirée d’ouverture du festival Orléans’ Jazz(Ibrahim Malouf et Gregory Porter) par la mairie du à la grève des techniciens et au blocage voté par la CIP 45.

Cela fait plus d’un mois quele mouvement des intermittent-e-s et précaires est entré dans saphase la plus radicale. En e�et, de-puis la grève totale des artistes ettechniciens du printemps des comé-diens à Montpellier (engagée le 3

juin dernier), les grèves, blocages,actions fortes et médiatiques, sesont multipliés dans toute la France.Les intermittent-e-s, qui tentent en-core de rallier à eux la cause detous les précaires (intérimaires, chô-meurs, béné�ciaires du RSA, etc...) se

battent contre l’accord du 22 mars,signé par le patronat, FO et la CFDT,et entériné par le gouvernement le26 juin dernier. Ce nouveau proto-cole sur l’assurance chômage, rentréen vigueur le 1er Juillet dernier, fra-gilise encore plus des travailleurs/ses

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Lutte de classes 15

déjà très précaires et s’aligne com-plètement sur l’idéologie du patro-nat : détruire la solidarité interpro-fessionnelle du CNR de 1945.

La lutte est déterminée maisles obstacles sont multiples. Retoursur un mouvement de grande am-pleur, qui dépasse le seul intérêt desintermittent-e-s et pose la questionde la lutte de classe à travers la pro-tection sociale.

Un accord antidémocratiquequi touche tous les

travailleur/ses

Le 22 mars dernier, le protocoled’accord pour la nouvelle conven-tion UNEDIC a été conclu dansune véritable violation de la dé-mocratie. Le MEDEF a en e�et de-mandé une levée de séance durant10h et la négociation s’est �nale-ment déroulée dans les couloirs. LaCGT, seul syndicat étant resté à latable o�cielle des négociations, n’adonc pu négocier avec les autres« partenaires sociaux » seulementun quart d’heure en �n de séance,tout ayant déjà été préalablementbouclé entre patronat, FO et CFDT.

De plus il faut rappeler quedepuis 2003 et la dernière luttesur l’assurance chômage, un co-mité de suivi s’est constitué, re-groupant des parlementaires, desreprésentants syndicaux, des ex-perts (sociologues, économistes ettravailleurs/ses du spectacle). Cecomité a planché pendant des an-nées sur un nouveau modèle qui of-frirait une protection sociale cou-vrant plus de personnes, revenantà un système mutualiste, plus éga-litaire (pour un même coût) quele système assuranciel, favorableaux intermittents les plus riches.Ces propositions n’ont jamais étéétudiées lors des négociations del’UNEDIC. Et François Rebsmanen,ministre du travail, qui avait pour-tant validé (comme la plupart desparlementaires PS) les revendica-tions du comité de suivi le 9 mars

dernier (lorsqu’il n’était pas encoreministre), s’est ainsi désavoué enagréant l’accord proposé par le pa-tronat qui va à l’encontre de cha-cune d’elles. Le molière de la trahi-son lui a donc été décerné par desintermittent-e-s en lutte lors de ladernière cérémonie des césars.

Pour rappel, voici les princi-paux points de l’accord patronat /syndicats jaunes du 22 mars :

— Pour le régime général : la miseen place de droits rechargeablesqui ouvrent la voie au chô-mage par capitalisation, avecle maintien d’une allocation laplus basse jusqu’à épuisementdu reliquat, même quand on atravaillé entre-temps avec unmeilleur salaire.

— Pour les intérimaires (annexe4) : une baisse de l’allocationmensuelle de 50 à 300 € pour60% d’entre eux.

— Pour les artistes et techniciens(annexes 8 et 10) : une haussedes cotisations salariés du spec-tacle provoquant une baissedu salaire net. Du fait desdroits rechargeables, lorsque lesintermittent-e-s sortiront desannexes 8 ou 10 pour X raisons(pas assez d’heure dans la pé-riode, retour au régime géné-ral pendant une période, etc...) illeur sera quasiment impossiblede revenir aux annexes 8 et 10.En�n, le di�éré d’indemnisation(délai entre le début du chômageet le début de l’indemnisation)entraînera une rupture de droitsjusqu’à 2 mois. A noter que cedi�éré sera pris en charge parl’État jusqu’à décembre 2014. Ene�et Valls l’a annoncé au moisde juin pour tenter d’éteindrela colère des travailleurs/ses duspectacle. Sauf qu’il a jeté del’huile sur le feu, car le faitque l’Etat vienne « sauver » lesintermittent-e-s en prenant encharge une part de la solida-

rité interprofessionnelle, c’estaller complètement dans le sensdu MEDEF, c’est-à-dire détruirela protection sociale solidaire,unique et commune à toutes ettous en sectorisant une partiede la population. De plus il ren-force l’idée que les intermittent-e-s sont des privilégiés de lasociété car eux seraient « sau-vés » et pas les autres. En�n ildonne raison au MEDEF qui di-sait en amont des négociationsque ce n’est pas au patronatde subventionner la culture parses cotisations, et que si le gou-vernement voulait préserver lesintermittent-e-s, il fallait qu’ilprenne en charge une partie deleur indemnisation... Le MEDEFl’a rêvé, le PS l’a fait.

Toutes les mesures de préca-risation que prévoit cet accordentrent donc dans le cadre géné-ral de la destruction de la pro-tection sociale. Tout le monde estdonc concerné. En ce sens, le slo-gan qui est de plus en plus porté parles intermittent-e-s et précaires au-jourd’hui est : « Ce que nous défen-dons, nous le défendons pour tous ».

Plusieurs ennemis àcombattre en même temps

La lutte qui s’est enclenchéedepuis le début de l’année s’estconstruite principalement autourde la « CIP » (coordination desintermitent-e-s et précaires), struc-turée le plus souvent au niveau dé-partemental. Les composantes descollectifs d’intermittents sont mul-tiples. On y trouve des syndicatsde salarié-e-s, comme la CGT spec-tacle et Sud culture, mais aussi dessyndicats de compagnies (SYNAVI)ou de structures institutionnellesplus importantes (SYNDEAC) etégalement beaucoup de non syndi-qués. Mais le poids principal et levecteur de la lutte reste la CIP d’Îlede France qui a toujours existé de-puis 2003 (proche de Négri et des

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Lutte de classes 16

libertaires) et la CGT spectacle quia lancé le préavis à la grève natio-nale reconductible début juin.

La première di�culté de cettelutte a été la signature de FO sur leprotocole du 22 mars. Après avoirénormément combattu la CFDT en2003 (occupations des locaux, in-terpellations du syndicat etc...), lesintermittent-e-s en lutte se sontpris un nouveau coup de poignarddans le dos avec cette nouvelle tra-hison syndicale. En e�et, même siFO ne pèse que très peu dans lechamp des intermittent-e-s, ils ontun poids important à l’UNEDIC.Même s’ils ont tenté d’expliquerleur signature en annonçant qu’ilsavaient « sauvé le régime des in-termittents », on ne peut s’empê-cher de penser qu’ils ont fait celasurtout pour rester dans certainescommissions paritaires avec le pa-tronat, pour garder leurs postes bu-reaucratiques.

Face à celà les intermittent-e-sont tenté, par plusieurs communi-qués, lettres, interventions dans leslocaux syndicaux, de convaincreles militants FO de faire revenirleur direction en arrière, en vain...

Le mouvement s’est malgrétout orienté très vite sur le ME-DEF, avec plusieurs occupationsdans les grandes villes de France etquelques saccages de locaux. Maisla plupart du temps les collectifsvoulaient, par leurs actions, ren-contrer les délégués locaux du pa-tronat et leur faire prendre posi-tion contre le nouvel accord. A no-

ter l’intervention du MEDEF locald’Avignon, qui, en mai, a écrit unelettre publique à la présidence duMEDEF pour demander la renégo-ciation du protocole d’accord. Cettedemande légitime n’a eu lieu queparce que les commerçants d’Avi-gnon étaient évidemment menacéspar la grève imminente du mois dejuillet.

Dans le même temps, les col-lectifs luttaient auprès des élus PSpour leur demander de faire re-monter les deux exigences princi-pales des salarié-e-s en lutte, c’est-à-dire soit le non agrément du pro-tocole d’accord du 22 mars et l’ou-verture de renégociations sur lesbases de la plate-forme du comitéde suivi. Des centaines de courriersd’élus demandant le non-agrémentau ministre du Travail (en copie àValls et à Hollande) ont ainsi étéobtenus par les collectifs. Le plussouvent ces signatures d’élus (dé-putés, sénateurs, maires. . . ) ont étégagnées par de simples rencontresen délégation, mais quelques foisaussi grâce à des occupations mus-clées. Comme par exemple à Or-léans où les intermittent-e-s ontenvahi le conseil régional du centrelors d’une séance jeudi 19 juin etsont restés dans l’Agora, faisantinterrompre la séance, jusqu’à ceque le président de la région, M.Bonneau, fasse un courrier au mi-nistre du travail dans les heures quisuivent, en copie à la ministre de laculture, expliquant

« [. . . ]il me semble imperatif que lasituation speci�que des

intermittents du spectacle commedes salaries les plus precaires soit,sans delai, remise a la discussiona�n qu’une solution puisse etretrouvee. C’est un imperatif qu’il

convient de traiter de toute urgence,en prealable de la signature de

l’agrément de l’accord du 22 marsqui est annoncé dans les tout

prochains jours. A cet egard, lespistes formulees par le comite de

suivi mis en place devront etreimperativement prises en compte.

[. . . ] ».

Quelques semaines aupara-vant, ce meme président de régionavait été sollicité par une déléga-tion o�cielle pour faire ce typede courrier, il n’avait alors rienfait. . . Preuve en est que la lutte,la radicalité et la persévérancepaient...

La grève, la radicalité,malgré certaines limites

Malgré des manifestationscontre l’accord dans plusieursvilles depuis janvier, malgré denombreuses interpellations d’éluset quelques occupations commel’Opéra de Paris le 21 mars, c’està partir du 4 juin et du préavisde grève nationale reconductiblelancé par la CGT que la lutte s’estconsidérablement ampli�ée et ra-dicalisée. En e�et, le gouverne-ment restant sourd aux attentesdes intermittent-e-s, et la CGTspectacle étant massivement en-gagée dans les collectifs en lutte,le préavis de grève a fait l’e�etd’une bombe en provoquant un ar-rêt de travail immédiat des artisteset techniciens du festival « Le prin-temps des comédiens » à Montpel-lier. Très vite de nombreuses grèvesont suivi comme chez les techni-ciens de « Plus belle la vie » à Mar-seille, puis dans les théâtres natio-naux à Toulouse, Nancy, Thionvillemais aussi dans l’audiovisuel chezArte, Canal +, et France Télévi-sion... A chaque fois des AG de plusen plus grandes comprenant ar-tistes et techniciens votaient pourla grève dans la plupart des festi-vals. Les blocages, manifestations,occupations de pôle emploi, de Di-reccte (délégations régionales duministère du travail), Drac, Medef,etc... ont continué durant tout lemois de juin avec un pic le 26 juin,

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Lutte de classes 17

jour de l’agrément de la conven-tion par le ministre du travail Reb-samen. La veille, les salarié-e-s del’opéra de Bordeaux s’étaient misen grève à une large majorité (184contre 31).

Après la pédagogie inlassabledes intermittent-e-s pour expliquerleur colère (vidéos sur internet,tracts, pétitions, prise de parolesavant les spectacles, actions spec-taculaires, etc...), la grève s’impo-sait comme le seul moyen de s’ex-primer, de se faire entendre par lesmédias et le gouvernement, car ellemenaçait de bloquer directementl’économie. Rappelons que les acti-vités culturelles contribuent (selonl’INSEE) directement pour 57 mil-liards au PIB français...

Grâce à cette grève le gou-vernement a été obligé de bougerquelque peu, un « médiateur » aété nommé pour tenter de calmerles ardeurs des grévistes et Valls afait une intervention jeudi 19 mars,tentant de calmer la révolte parquelques « mesurettes » facilementquali�ables d’enfumage :

— Pas de baisse du budget du spec-tacle vivant ces prochaines an-nées : sauf que le candidat Hol-lande avait déjà promis de sanc-tuariser tout le budget de laculture une fois élu, et il ne l’apas fait.

— Prise en charge par l’Etat du dif-féré d’indemnisation sous formede compensation : on l’a vu plushaut, déjà ce n’est que provi-soire car jusqu’à �n 2014, et deplus d’où viendront ces 20 mil-lions pour �nancer cette com-pensation ?

— Ouverture d’une table ronde au-tour de trois « sages », trois« experts » du dossier, qui plan-cheront sur de possibles évolu-

tions du régime de l’intermit-tence : sauf que dans ces trois« experts » il n’y a aucun re-présentant des collectifs, qu’ilssont nommés seulement pourrépondre à la question de l’in-termittence, en évitant évidem-ment d’aborder celle de tous lesautres salarie-e-s précaires (in-térimaires, chômeurs etc...) tou-chés par l’accord, et surtoutqu’il n’y a aucune obligationde rendre des comptes puisquec’est l’accord du 22 mars qui faitloi dorénavant.Mais les intermittent-e-s en

lutte ont surtout entendu queValls ne revenait pas sur le non-agrément toujours demandé partoutes les AG de France. Il a mêmea�rmé le contraire : « L’accordsera agrée ». Une provocation deplus qui a amené la CGT à appelerà une journée nationale d’actions,de manifestations et de grève le4 Juillet 2014, jour de l’ouverturedu festival d’Avignon, avec commemot d’ordre cette fois-ci, abroga-tion du protocole d’accord !

Cette journée du 4 juillet a étéextrêmement suivie avec des tauxde grévistes avoisinant les 100%dans certains festivals comme àBar-le-Duc ou à Tours. L’ouverturedu In d’Avignon n’a pas eu lieu etde nombreux CDN (Centre Drama-tique National) ont répondu à l’ap-pel.

Malheureusement, le lende-main, la reconduction a été beau-coup plus minoritaire et de nom-breuses compagnies artistiques ontrepris le travail. On peut expliquercela par une certaine ambiguïtéqui est fatale pour la grève au seindes compagnies. En e�et beaucoupd’artistes par exemple sont leurpropres employeurs dans une com-pagnie. De plus un artiste qui veutfaire grève dans sa compagnie mais

qui est minoritaire, s’il reste sur sadécision, va engendrer l’annulationdu spectacle à lui tout seul, et quidit annulation dit moins de visibi-lité pour les années futures, ce quiengendre un risque certain pourl’avenir d’un spectacle ou mêmed’une structure... Or les artistesne peuvent plus vivre sans leurscompagnies. Un exemple marquantétant la grève votée à Bar-le-Ducle 4 Juillet au soir pour le lende-main. En AG, un vote de tous lessalarié-e-s présents sur le festival aété demandé, il y a eu 60 voix pourla grève sur 120 votants, soit 50%de grévistes, mais le lendemain �-nalement, 80% des compagnies ontjoué. Pourquoi ? Car en dernièreinstance c’est la compagnie qui dé-cide dans son ensemble de faire oude ne pas faire grève.

Les autres limites de cettelutte sont l’absence de certainstravailleurs/ses de la cultureintermittent-e-s que sont parexemple les salarié-e-s de l’au-diovisuel. Et ils ont un poids trèsimportant dans le pays car ils maî-trisent les médias radios et télévi-suels. Or très peu se sont mis engrève sur cette lutte. D’autre partles grands opéras (Paris, Lyon...)qui emploient plusieurs centainesde personnes ne sont pas non plusvraiment partis dans la lutte (sice n’est sur des grèves très ponc-tuelles) ce qui a empêché de donnerun symbole fort aux autres salarié-e-s du champ culturel.

Néanmoins, lundi 7 Juillet 2014,plus d’une centaine de compagnies(sur plus de 1 000) se sont misesen grève à Avignon, et le collectif abloqué l’entrée de la FNAC qui em-bauche de nombreux précaires, eta occupé le siège local de FO et dela CFDT. La résignation n’est doncpas à l’ordre du jour, et c’est heu-reux.

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Lutte de classes 18

Vers la convergence desluttes

Malgré tout il y a un réelrisque d’essou�ement de la luttedes intermittent-e-s à cause du seulrelais du spectacle vivant qui soitencore en activité en France (fes-tivals d’été). Les théâtres, scènesnationales, opéras, etc... vont êtredans la trêve annuelle, et on nepourra donc plus compter sur eux.Mais une des particularité de lalutte ces derniers temps est qu’elles’oriente de plus en plus vers laconvergence des luttes. En e�et,très tôt déjà, les intermittent-e-s nevoulaient pas qu’on assimile leurlutte à quelques choses de corpora-tiste, ils soulignaient et argumen-taient bien que ce qu’ils défen-daient ils le défendaient pour tous,pour tous les précaires, les intéri-maires, les sans voix...

Aujourd’hui 6 chômeurs sur 10ne sont pas indemnisés, l’intermit-tence de l’emploi n’est pas une ex-ception mais se généralise dans denombreux secteurs (86% des em-bauches de font en CDD). Mais defait ce sont les intermittent-e-s lesplus mobilisés, les mieux organisés.Les chômeurs et intérimaires quant

à eux sont invisibles car non orga-nisés. Et il a été très di�cile des lesrallier à la lutte même si quelquesfois la convergence avec eux a puse faire, notamment dans les ac-tions qui ont visé pôle emplois oules boites d’intérim’.

Mais dans les AG l’idée de laconvergence même avec d’autressecteurs a fait son chemin. Notam-ment avec les cheminots ou les pos-tiers en lutte (notamment dans le92 où ceux-ci mènent une grève hé-roïque depuis plus de 5 mois, mal-gré une répression implacable). Denombreux collectifs se sont jointsaux AG d’intermittents ou ont ma-nifesté avec eux. A Orléans, lors dela grève et de l’annulation de la soi-rée d’ouverture du festival de Jazz,une AG a eu lieu sur place et unedélégation de cheminots s’est ex-primée expliquant que la lutte desintermittent-e-s et précaires étaitla même que celle des cheminotscar elle avait pour but de refuserles politiques d’austérité en coursdans toute l’Europe. La FSU est ve-nue également apportée son sou-tien par un communiqué, un uni-versitaire s’est exprimé pour racon-ter la lutte de 2009 dans les facs etles similitudes avec celle d’aujour-

d’hui... Bref, la convergence desluttes a été expérimentée, elle n’apas abouti aujourd’hui mais elle apermis de semer quelques grainespour la rentrée.

Le combat des intermittent-e-s et précaires n’est donc pas ter-miné, aujourd’hui encore des fes-tivals sont perturbés ou annulés.Mais les intermittent-e-s seuls nepourront pas obtenir l’abrogationde l’accord, ils ne pourront pasnon plus protéger seuls l’assurancechômage et la protection sociale engénérale. Mais ils le savent, dans lesAG aujourd’hui tout le monde estconscient que pour gagner il fau-dra une grève générale du secteurculturel et au-delà.

Il est donc indispensable queles collectifs, les CIP, élargissentleurs revendications et leurs ac-tions à d’autres secteurs d’acti-vité, pour permettre de peser en-core plus, pour refuser l’austéritéque nous impose le capitalisme encrise. C’est en ce sens que les mi-litants anticapitalistes et révolu-tionnaires doivent intervenir dansles AG pour construire la conver-gence des luttes, seul moyen d’allervers la grève générale et remettreainsi en cause le pouvoir actuel PS-

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Lutte de classes 19

MEDEF.Pour terminer, il faut souligner

la responsabilité écrasante des di-rections des confédérations syndi-cales qui ne font strictement rienpour favoriser la convergence desluttes, pour préparer la grève gé-nérale pour mettre en échec legouvernement et le patronat. Dès

qu’un secteur est en lutte, elles de-vraient les aider directement enorganisant des caisses nationalesde grève et elles devraient appe-ler les travailleurs des autres sec-teurs à les rejoindre dans le com-bat. Aujourd’hui plus que jamais,nous avons besoin d’un courant in-tersyndical lutte de classe pour que

tous ceux qui veulent construirela grève générale s’organisent faceaux bureaucraties syndicales. LeNPA devrait prendre des initiativespour œuvrer à un tel rassemble-ment.

Lászio Merville,le 16 juillet 2014

LUTTE DE CLASSES

Cheminot-e-s et intermittent-e-s montrentla voie !

L’organe quasi o�ciel desfranges les plus réactionnaires dela bourgeoisie, Le Figaro, annonceclairement la couleur dans un deses articles : « Réforme ferroviairedonc, mais aussi réforme territoriale,pacte de compétitivité... Le présidentde la République, qui assume dé-sormais pleinement sa ligne réfor-miste, juge capital de montrer quel’on peut collectivement réformer lepays, avancer ».

Pour une fois, on peut y sous-crire : si Hollande et son gouver-nement subissent une défaite dela part des cheminot-e-s et desintermittent-e-s, c’est l’ensemblede leur politique qui sera mise endi�culté. Pour la bonne et simpleraison qu’une victoire pour lestravailleur-e-s de ce secteur repré-senterait un formidable encourage-ment pour les luttes de tous lesautres secteurs. . . en montrant queoui, par la lutte et par la grève, parl’a�rontement central avec ce gou-vernement, il est possible de ga-

gner !Ces batailles constituent donc

des enjeux majeurs pour tout lesalariat. La première tâche desmilitant-e-s du mouvement ouvrierest donc d’organiser la solidaritéconcrète avec ces deux luttes :en agissant pour que les organisa-tions syndicales à tous les niveauxprennent publiquement positionen soutien à ces mobilisations,a�n de déjouer les manœuvresgouvernementales et notammentcelles voulant a�oler la populationconcernant le déroulement du bac(alors que c’est ce même gouver-nement qui attaque les diplômesnationaux, et notamment le bac !).Qui dit "solidarité concrète" ditaussi solidarité politique et �nan-cière : soutien �nancier aux gré-vistes et/ou participation à d’éven-tuelles caisses de grève, déléga-tions d’organisations syndicales oud’AG de travailleur-e-s en direc-tion des AG de cheminot-e-s etintermittent-e-s. . .

Ces derniers jours l’attentions’est focalisée sur la grève chemi-note. Et à juste titre : pour le gou-vernement qui entend faire passersa « réforme ferroviaire » (autre-ment dit l’ouverture à la concur-rence dans le cadre de l’Union Eu-ropéenne, la casse du statut descheminot-e-s et l’accélération des

suppressions de postes) par un votede l’Assemblée à partir du 17 juin,cette grève constitue une menacemortelle.

La grève cheminote, survenueaprès deux journées d’action, s’ins-crit dans les meilleures traditionsde la lutte de classe :

— par sa puissance – inattenduemême par certaines directionssyndicales – et sa capacité à « te-nir » dans le cadre d’une re-conduction du mouvement, ellemontre une volonté de lutte dessalarié-e-s qui s’impose mêmeaux directions syndicales ;

— par son auto-organisation :chaque jour, la grève est recon-duite par des AG massives ;

— par la clarté de ses revendica-tions : retrait de la « réformeferroviaire » , réuni�cation dela SNCF en un seul service pu-blic et refus de l’ouverture à laconcurrence qui mènerait à descatastrophes sociales et écolo-giques. . . et imposer des négo-ciations sur la base des revendi-cations des travailleurs.

En même temps, elle se heurteà des obstacles, tous ceux que ren-contrent les travailleur-e-s en lutte.Car outre le gouvernement et le

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système médiatique à ses ordres, lerôle réel des directions syndicalesbureaucratiques apparaît crûmentquand la situation sociale se tend.

Ainsi, le rôle d’auxiliaire di-rect de la politique gouvernemen-tale est immédiatement visible ence qui concerne la direction de laCFDT et celle de l’UNSA.

Mais alors même que les mi-litantEs de base de la CGT sebattent tous les jours pour animeret étendre la grève, pour battre laréforme gouvernementale, le secré-taire général de la CGT ThierryLe Paon déclare dans Le Parisiendu 14 juin : « La CGT n’a jamaisdemandé le report ni le retrait duprojet de loi ». N’est-ce pas de lapart de la part de ce bureaucrateun coup de poignard dans le dosaux travailleur-e-s en grève, et uneo�re de service au gouvernementen abandonnant la principale re-vendication des grévistes ?

De même, le dirigeant de lafédération des transports CGTn’avait-il pas trouvé des points po-sitifs aux nouvelles propositionsgouvernementales après la pre-mière journée de grève. . . avantque les AG ne lui imposent de re-venir à une position plus correcteet de les rejeter ?

Ces quelques exemples su�-raient à eux seuls à démontrer qu’ilest nécessaire pour les militants ré-volutionnaires :— de veiller au développement de

l’auto-organisation, et au res-pect des décisions des AG sou-veraines par les directions syn-dicales (y compris par la mise enplace de coordinations des AG àtous les niveaux avec délégué-e-s mandaté-e-s, où les tra-vailleurs décident des revendi-cations et formes d’action, maisaussi contrôlent ceux et cellesqui s’expriment et négocient enleur nom) ;

— d’agir pour empêcher l’isole-

ment de la grève des travailleur-e-s de la SNCF par le gouver-nement mais aussi par les di-rections syndicales bureaucra-tiques : en organisant la so-lidarité matérielle et politique,mais aussi en portant la pers-pective d’une mobilisation d’en-semble des organisations syndi-cales aux côtés des travailleur-e-s en grève ;

— d’aider les travailleur-e-s à seréapproprier leurs syndicatspour en faire des outils au ser-vice des luttes ; un premier pasen ce sens pourrait être la par-ticipation à la mise en place detendances lutte de classe et an-tibureaucratiques.Mais au-delà de ces urgences

– dont la réalisation constitueraitun grand pas – se pose la ques-tion de la perspective politique. Caroui, il est possible de battre le gou-vernement par l’action directe desmasses, et oui il est donc possibled’en �nir avec lui. . . mais pour fairequoi ?

Les réponses politiques four-nies par le PS au pouvoir ; sont dis-crédités auprès des travailleur-e-s.Les réponses réformistes o�ertespar le Front de Gauche ont mon-tré leur impasse : la « révolution ci-toyenne » est un leurre.

Mais il ne su�t pas que cesforces soient incapables de four-nir une perspective politique pourles salarié-e-s, pour que celles-ci et ceux-ci se tournent mécani-quement vers les anticapitalistesen général et le NPA en particu-lier. Encore faut-il leur o�rir unevraie perspective justement. Sinon,d’autres s’y emploieront. C’est parexemple ce que fait le FN dansun de ses communiqués : ne réus-sissant quand même pas à dis-simuler complètement sa natureréelle du fait de ses remarques anti-syndicale. . . il développe une ar-gumentation politique claire qui

peut toucher les travailleur-e-s,axée sur la critique d’une poli-tique de démantèlement des ser-vices publics appliquant les direc-tives de l’Union Européenne (« Lesconséquences d’une telle libéralisa-tion sont connues d’avance : aug-mentation des tarifs, baisse de la sé-curité et surtout suppression des axeslesmoins rentables (province et rura-lité principalement). En cas d’appli-cation stricte des règles européennes,cette issue est inévitable. Pire, ap-pelée à être concurrencée exclusive-ment sur ses axes les plus rentables,la situation �nancière de la SNCF nepourra que se dégrader »).

C’est pourquoi il est urgentpour les militant-e-s révolution-naires de ne pas se limiter à desrevendications syndicales mêmesjustes et même si elles constituentune première étape vitale, maisaussi d’avancer leurs propres motsd’ordre :

— retrait immédiat du projet gou-vernemental, réuni�cation de laSNCF en un seul service public ;retrait de la convention UNE-DIC concernant les chômeur-e-set intermittent-e-s ;

— pour la grève générale,Tous/toutes ensemble en mêmetemps, contre ce gouvernementet sa politique ;

— pour un gouvernement destravailleur-e-s, appuyé sur lalutte des classes, qui satisfassees revendications immédiatesdes travailleur-e-s (abrogationde toutes les contre-réformesréactionnaires, rupture avecl’Union Européenne et ses di-rectives de libéralisation, etc.) etengage la rupture avec le capi-talisme.

Octarine,le 16 juin 2014

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Lutte de classes 21

LUTTE DE CLASSES

Chasseur de prime

Le vendeur est le derniermaillon de la chaîne, il est là pourpromouvoir, provoquer le désir,l’envie d’acheter, il est là pour faireen sorte que le client achète ceproduit. Sans lui, le produit n’estqu’un objet posé dans un rayonquelconque qui sera soldé quelquesannées plus tard pour ceux quin’avaient pas les moyens 3 ans au-paravant. Pourtant, le vendeur estcelui qui est le plus perdant lorsd’un acte de vente.

Un produit, et non pas un objet,est quelque chose de banal. Dansla grande distribution, le packaging(l’emballage, pour schématiser) estl’acteur principal d’une vente. End’autres termes, c’est cet emballagequi vous fera prendre la décisionde prendre un produit plutôt qu’unautre. Le terme exact de cette tech-nique de vente est le « libre ser-vice » Ici, je parle de la grandedistribution alimentaire. Dans lesmagasins spécialisés, les produitsse vendent avec l’accompagnementd’un vendeur, on appelle ça de la

vente en libre service (ou non) as-sistée.

Je fais partie des centaines demilliers de vendeurs qui sont làpour vous conseiller et faire ensorte de vous vendre CE produitplutôt qu’un autre.

Je ne suis pas ici pour vousexpliquer le système de la grandedistribution puisque des tonnes dereportages bidon essaient de vousl’expliquer par le biais de journa-listes tous aussi mauvais les unsque les autres. Non. Je suis là pourvous expliquer le système de ré-munération d’un vendeur dans cegenre de point de vente et vousfaire comprendre qu’il est inutilede croire que l’on prend du plai-sir à vous vendre CE produit plutôtqu’un autre accompagné de diversservices tous aussi inutiles les unsque les autres.

En commerce, on vous apprendles di�érents « canaux de distribu-tion ». Inutile de vous détailler cela,comprenez simplement qu’il s’agitde la vie d’un produit. Un produit

est fabriqué par un « producteur »,qui ensuite est revendu au clientdirectement, ou alors qui passede « mains en mains » (fournis-seur, grossiste, centrale d’achat...)pour ensuite arriver dans un ma-gasin pour arriver dans les mainsdu client. Dans la grande distri-bution spécialisée, le produit passepar un certain nombre d’interlo-cuteurs. Ce qu’il faut comprendrec’est qu’à partir du moment où leproduit est fabriqué, sa variationde prix va être colossale, peu im-porte sa consistance, sa taille, samatière. . . Le fabriquant vend sonproduit à un grossiste (négociationde prix), qui va le vendre à un four-nisseur (négociation de prix), quiva le vendre à une centrale d’achatdédiée à un magasin (négociationde prix), qui sera par la suite distri-bué dans un de ces magasins pouren�n arriver à hauteur des yeuxdu client (négociation de prix). Sonprix global est négocié mais aussi,et surtout, sa marge.

Vous aurez donc compris que

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nous, vendeurs, sommes ce fameuxdernier maillon de la chaîne, et c’estdonc qui nous qui récupérons lesmiettes de cette marge. En�n non,j’exagère puisque nous récupéronsun pourcentage extrêmement mi-nime de cette marge. Et que repré-sente ce pourcentage à votre avis ?Oui, c’est ce que l’on appelle pluscommunément les « primes ».

En règle générale, un vendeura ce qu’on appelle un « �xe » : unsalaire �xe dérisoire et ces primesse rajoutent donc à son salaire a�nd’obtenir le plus de zéros à la �ndu mois. Je vous rassure, dans lagrande distribution, un vendeur nedépasse jamais les trois zéros, aprèsle chi�re 1. . .

En ce qui me concerne, le sa-laire est un peu di�érent puisqueje suis en contrat de profession-nalisation. Je suis dans une écolede commerce pour préparer monBTS en alternance (2 jours de courset 3 jours de travail par semaine).L’école étant privée, il faut la payer.N’ayant pas les moyens de rému-nérer l’école, ce contrat met enplace un système un peu particu-lier. . . Toutes les primes que je réa-lise sont « versées » à l’école à hau-teur de 450€/mois. Si j’arrive à dé-passer ces 450€, le « surplus » m’estalors distribué à la �n de ce mois.Sauf que, vous le verrez avec les di-vers exemples plus bas, il est trèsdi�cile d’atteindre ces 450€/moissurtout en prenant en compte le faitque je ne travaille que 3 jours parsemaine.

Prenons un exemple en sché-matisant : le �xe d’un vendeur estd’environ 700€ et, aujourd’hui, leSMIC s’élève à, environ, 1100€ net.La marge est importante n’est-cepas ? Ce qui veut donc dire qu’unvendeur doit faire entre 400 et 500€de primes pour arriver à hauteurdu SMIC. Pour pouvoir le dépas-ser, il faut donc qu’il arrive à dé-passer ces 500€. Vous me direz,vendre un téléviseur à 1000€ rap-

porte, donc les 500€ sont en fait loind’être di�cile à atteindre. Sauf que,souvenez vous de la marge dont ilétait question tout à l’heure ainsique du pourcentage dont je par-lais. . . Oui, un téléviseur à 1000€rapporte, en moyenne, entre 7 et 12€ de prime. E�ectivement, les 500€sont di�cile à atteindre. « Mais,dans la grande distribution, lesclients sont nombreux et les télé-viseurs à plus de 1000€ sont desproduits quotidiens aujourd’hui ! ».Les clients sont là, mais pas ensi grand nombre, et lorsqu’ils sontprésents leur pouvoir d’achat estbien moins élevé que l’on croit. Lestéléviseurs à 1000€ se transformentrapidement en écran à 400€ et rap-portent donc entre 0,50 et 3€ auvendeur.

Je vois que les exemples vousparlent. . . Restons dans le domainede l’image alors. Récemment j’aivendu un téléviseur à 3199€. Unclient qui est prêt à mettre ce prixlà dans un téléviseur attend, en re-tour, une sorte de satisfaction et dereconnaissance de la part du ven-deur, non ? Pensez vous qu’un ven-deur qui encaisse 3199€ (pour unécran) peut réellement être satisfaitde lui lorsqu’il voit que ce dernierlui rapporte 28€ ? Vous imaginez lenombre de négociation de prix quece produit à pu recevoir avant d’ar-river en face de vos yeux ? Et c’estla personne qui arrive à vous faireacheter ce produit qui gagne 28€. . .

Dans la grande distribution ali-mentaire, le produit n’est qu’un ac-teur, comme nous, qui vous for-cera à acheter son complément.Vous achetez des pâtes ? Pour-quoi, d’après vous, la sauce tomaten’est pas loin ? J’imagine que celavous l’aviez compris depuis long-temps. Dans ce cas vous avez sansdoute compris pourquoi un ven-deur, dans la grande distributionspécialisée, va vous parler d’unecertaine extension de garantie ?Oui. Alors vous avez aussi com-

pris pourquoi on vous parle d’ac-cessoires, d’abonnement à un four-nisseur d’accès Internet, d’abonne-ment à un forfait mobile, d’abon-nement à un forfait d’électricité,d’abonnement à un pack vous ga-rantissant la sécurité sur vos ap-pareils informatiques, d’assurancecontre la casse de votre maté-riel. . . ?

Ces vendeurs vous rabâchentsans cesse le même discoursconcernant ces divers services,mais ne vous en prenez pas à eux,ils ne sont que le dernier maillonde la chaine, ils sont là pour vendrele produit mais, surtout, tous lesservices associables à celui-ci, et cedans un seul but : accumuler le plusde primes possible. Tout à fait, lesservices ont une prime plus élevéepuisqu’ils appartiennent au maga-sin ou, dans d’autres cas, sont né-gociés correctement et ne passentpas par plusieurs interlocuteurs(circuit de distribution). J’en ra-joute encore puisque, restons dansl’exemple, un abonnement à unfournisseur d’accès internet rap-porte en moyenne 10€ au vendeur.Alors que cette abonnement voussera facturé 25€/mois pendant 12mois et 35€ l’année suivante. Calcultrès rapide d’un cas rare : le clientprend un abonnement et déciderade l’arrêter au bout de la premièreannée = 25 x 12 = 300€. Faite lerapport entre ces 300€ et les 10€ deprime. . .

Les exemples sont nombreuxet je pourrais en parler pendantde longues heures. Si vous avezcompris un d’entre eux, vous avezcompris le fonctionnement. Je mepermets de rajouter que, parfois(trop souvent), des produits a�-chés entre 200 et 400€ peuvent rap-porter au vendeur 0,10€.

J’oubliais, toutes les primes etsalaires cités plus haut sont en brut,ils sont recalculés lors du jour de« paye ».

Par ailleurs, des centaines de

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NPA 23

petites boutiques ferment parcequ’elles ne peuvent tenir face auxbas prix de leur concurrents, ce quifait disparaître à la fois des emploiset des spécialistes souvent de bonconseil pour les clients, remplacéspar des vendeurs sous-payés, pres-

surés, et poussés à forcer l’achat.Nos revendications :

— Hausse immédiate des salairespour tous-te-s ;

— Pour un vrai salaire « �xe », stopà la part variable qui stresse etqui pousse au consumérisme ;

— Pour l’expropriation des capita-listes de la grande distribution,et sa gestion par les travailleur-se-s et la société.

Un jeune vendeur,le 25 août 2014

NPA

Pour sortir le parti de la crise, il faut porterun projet révolutionnaire

La nécessité de refonder leNPA

Notre parti est en crise. Un peuplus de cinq ans après sa fondation,nos e�ectifs ont été divisés par 4et notre audience a fondu commeneige au soleil. Le bilan est donccalamiteux. Pourtant, le noyau durde la direction estime que notreorientation est la bonne, et qu’il n’ya rien de fondamental à changer.Notre re�ux serait en premier lieule re�et d’une situation objectivedi�cile sur laquelle nous n’aurionsguère de prise. La crise favoriseraitmécaniquement le FN et, en atten-dant des jours meilleurs, l’heure se-rait encore et toujours à interpel-ler nos partenaires potentiels pourla construction d’une opposition degauche. Nous pensons au contraireque c’est cette politique de la direc-tion qui explique en grande partiel’échec du NPA.

Il était positif de vouloir élar-gir la LCR au moment où elle avaitun certain écho. Cela avait permisde rassembler un nombre signi�ca-tif de primo-militants et de groupespolitiques aux origines di�érentes.Mais il fallait engager vraiment lesdiscussions stratégiques, qui s’im-posaient d’autant plus dès les pre-mières élections, dès la confronta-tion avec le Front de Gauche, dès

le grand mouvement de grève de2010. . . Au lieu de cela, la direc-tion a fait par en haut une syn-thèse �oue (principes fondateurs),ce qui n’a pas permis de dégagerun programme et une interventionpratique commune. Les débats defond entre les principaux courantssont restés largement dans le non-dit, entraînant de plus en plus detensions personnelles et d’écœure-ment de militants.

Notre ligne n’est pas appa-rue vraiment distincte de celle duFDG, et notre attitude bancale vis-à-vis de l’unité électorale est restéeincompréhensible. Non seulementnous n’avons pas pu avoir d’in-�uence sur la lutte de classe, mais lecentre de gravité s’est déplacé versles mirages réformistes. Dans cesconditions nous avons perdu beau-coup de militants que nous aurionspu convaincre, partis souvent sur lapointe des pieds.

Néanmoins, le NPA n’est pasmort. Mais il est en sursis. Beau-coup de militants sont découragéset démotivés par l’ampleur de latâche à accomplir avec des moyensde plus en plus réduits ce quicompromet gravement sa capacitéd’action sur le terrain. Pour sus-citer l’envie de militer, et doncdonner envie à nos contacts denous rejoindre, il faut être portépar un projet ambitieux, radical et

concret. L’anticapitalisme est uneposture de refus. Il faut désormaisaller plus loin et donner une iden-tité positive à notre parti, et nons’arc-bouter au projet originel duNPA, qu’il faut aujourd’hui dépas-ser. La nécessité d’un tel dépasse-ment découle d’ailleurs de la dé�ni-tion même du NPA comme « partiprocessus ». Plus de cinq annéesd’expérience commune doivent ànotre avis nous amener à sortir dustatu quo et à transformer le NPAen parti révolutionnaire des tra-vailleurs.

Un pro�l « anti-système » etun projet politique

communiste révolutionnaire

Depuis déjà 20 ans, il y a unetendance au rejet des deux princi-paux partis capitalistes (PS et UMP)qui prêchent la soumission à ce sys-tème en crise. Qui va en pro�ter,ce n’est pas écrit d’avance. Aprèsdes succès de l’extrême gauche (LOpuis LCR), c’est le FN qui progressele plus parmi les travailleur-se-s etles jeunes. Il s’appuie à la fois surson image anti-système, et sur unprogramme qu’il élabore et qu’ilmartèle. En face, nous n’avons vé-ritablement ni l’un ni l’autre.

Le FDG capte une petite par-tie de cette radicalisation (surtoutparmi les couches moyennes etsupérieures du salariat), mais il

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est en même temps un obstacle àun vrai regain de conscience declasse, avec son ancrage très fortdans les institutions et ses mesu-rettes. Il est donc urgent de fairela démonstration que nous avonsun projet substantiellement di�é-rent du sien. Dans nos interven-tions médiatiques notamment, nemettons plus sur le même planLO et le FDG, et arrêtons de ci-ter avant tout comme désaccordnotre rapport au PS. Non seule-ment cela masque les désaccordsessentiels, mais cela ne convaincraquasiment personne. En e�et, si lestravailleurs auxquels on s’adresseont l’impression qu’on défend surle fond grosso modo la même choseque le FDG, alors ils se tournerontvers la force la plus importante, leFDG, même s’il est moins clair quenous sur ses rapports au PS.

Laissons l’« Opposition degauche » et le « gouvernement

anti-austérité » au FDG

Le FDG veut rompre avec l’aus-térité sans rompre avec le capi-talisme, en menant une politiqueéconomique antilibérale fondée surla redistribution, les dépenses pu-bliques, et la création monétaire.Nous savons par expérience (échecde la relance de 1981, etc.) quec’est impossible et nous devonsêtre capables de le démontrer. Ilnous faut expliquer que la seule al-ternative aux politiques d’austéritéexige d’en �nir avec le capitalisme,c’est-à-dire d’exproprier les grandsgroupes capitalistes et de concen-trer entre les mains des travailleursle pouvoir politique et économique.Nous prônons l’auto-organisationdes travailleur-se-s, en incompati-bilité totale avec les illusions quevéhicule le tribun Mélenchon surl’État capitaliste.

En mettant en avant « l’opposi-tion de gauche » ou le « gouverne-ment anti-austérité », on fait volon-tairement l’impasse sur la question

des moyens à mettre en œuvre pouren �nir avec l’austérité et l’exploi-tation. La direction, obsédée par lerisque de marginalisation, met enavant une formulation des orienta-tions sciemment FDG-compatibleet renonce ainsi au combat poli-tique contre les fausses solutionsréformistes. Avec l’idée confortablemais fausse que les gens n’ontpas envie d’entendre parler de ceschoses complexes et qu’il est plushabile de ne pas en dire trop surnotre projet pour élargir notre au-dience. La crise du mouvementouvrier est telle qu’on ne pour-rait pas se permettre de mettre enavant un projet politique trop am-bitieux. Nous pensons exactementle contraire : non seulement il nefaut pas leur mentir mais il fautaussi les encourager à lutter. Lesgens, comme ils disent, sont enquête de réponses politiques cré-dibles. Ils en ont marre des postureset des slogans. C’est en défendantun projet politique cohérent et am-bitieux que nous ferons venir desgens à nous, que nous susciteronsun désir de militer au sens pleindu terme, conciliant ré�exion et ac-tion.

Nous ne sommes pas à lagauche de la gauche, mais

contre le système

Pour la grande majoritédes travailleur-se-s, le clivagegauche/droite n’a plus aucun sens,et il ne devrait plus en avoir pournous non plus. Ce clivage parle-mentaire et institutionnel sur unescène politique en décompositionne recoupe plus des di�érencesde contenu. Gauche et droite sontles deux faces de la bourgeoisie,et de ses politiques d’austérité quis’accroissent avec l’approfondisse-ment de la crise. Nous devons êtreles porte-voix de celles et ceux quirejettent profondément ce systèmeet ce spectacle répugnant d’acteurs

qui font mine de s’opposer alorsqu’ils sont d’accord sur l’essentiel :exploiter à fond les travailleur-se-s pour leur plus grand pro�t.Nous devons aussi savoir dénon-cer clairement les directions ré-formistes du mouvement ouvrier(PC, PG et directions syndicales).Même si on ne peut pas les assimi-ler aux partis bourgeois (PS, UMP,FN. . . ) en raison de leur naturecontradictoire – elles prétendentreprésenter et agir en faveur destravailleurs, mais à l’intérieur ducadre capitaliste – elles sont ainsides rouages fondamentaux du sys-tème qui cherchent à neutraliserla colère des travailleurs dans desvoies sans issue.

Nous devons être le parti desexploités, des opprimés, qui n’ontque faire des codes de bonneconduite de la bourgeoisie préda-trice et de ses laquais. C’est enayant ce pro�l « anti-système »que nous pourrons espérer avoirl’écoute des travailleurs, en arti-culant ce rejet du système (danstoutes ses composantes) avec la dé-fense d’un projet communiste ré-volutionnaire.

Programme d’urgence ouprogramme de transition ?

Notre programme politique nedoit pas se résumer à un cataloguede mots d’ordre (programme d’ur-gence), qui ne peuvent qu’appa-raître abstraits et donc non cré-dibles si nous n’expliquons pasles moyens qu’il faudra mettreen œuvre pour les réaliser. Il fautrenouer avec une logique tran-sitoire, c’est-à-dire articuler lesmots d’ordre à la nécessité d’ungouvernement des travailleurseux-mêmes, qui exproprierait lesgrands groupes capitalistes, pourles imposer. Ce n’est pas en alimen-tant les illusions sur les possibilitésd’obtenir une loi pour interdireles licenciements que nous paraî-trons plus réalistes. Si des luttes

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dans le cadre du système peuventpermettre d’obtenir des avancées,celles-ci sont d’autant plus fragileset di�ciles à arracher que le capi-talisme est englué dans une criseprofonde. Les capitalistes ont trèspeu de marges de manœuvres pourcéder quoi que ce soit. De véritablesavancées pour les travailleurs né-cessitent donc d’en �nir avec lecapitalisme, et donc de faire larévolution. Il n’y a pas de phaseintermédiaire possible, celle d’unhypothétique gouvernement anti-austérité, qui préparait une étapeultérieure spéci�quement anticapi-taliste et socialiste.

Osons promouvoir notre idéalcommuniste !

Le programme révolutionnaireest centré sur la question de latransition entre la société actuelleet la société que nous voulonsconstruire. La défense d’un pro-gramme révolutionnaire va doncde pair avec la mise en discussionde l’idéal que nous cherchons à at-teindre. Il faut réhabiliter de jolinom de « communisme » qui ex-prime à la fois le « mouvement réelqui abolit l’état actuel des choses »et la �nalité d’une société sansclasse qui vise l’émancipation in-tégrale des individus. Notre pro-jet ne vise pas « simplement » àrépartir les richesses autrement, ilvise à transformer en profondeurles rapports de production et l’en-semble des rapports sociaux pourpermettre d’en �nir avec l’exploita-tion et toutes les aliénations (alié-nation au travail, aliénation consu-mériste, etc.).

Osons donc, pas seulement encénacle, mais dans notre expres-sion publique, parler de la nou-velle société dont nous rêvons enla plaçant en perspective et au delàde nos revendications immédiates.Non pas en la détaillant de manièrearbitraire, mais en en dessinant les

contours : osons parler d’autoges-tion, conseils de quartiers, d’usines,de villages, osons évoquer le rem-placement des dirigeants par desdélégués, osons ! Nous avons tout ày gagner

Tactique de front unique oufront social et politique avec les

réformistes ?

L’unité n’est pas un principe,mais une tactique reposant surla nécessité de mobiliser le pluslargement possible les travailleurssur la base de mots d’ordre pré-cis et concrets. Il est donc juste des’adresser à l’ensemble des organi-sations du mouvement ouvrier, etdonc prétendant défendre les inté-rêts des travailleurs, pour agir en-semble sur des objectifs communs.Mais le front unique n’est pas :

— un front programmatique : nousne pouvons pas signer un textecommun qui inclut des po-sitions contraires aux nôtres.L’accord sur une revendicationcommune ne doit pas nous fairechanger de discours ! L’unitédoit se faire sur ce qui fait ac-cord, en laissant de côté toutqui fait désaccord. Par exemplenous devons mobiliser ensemblecontre les mesures d’austérité,mais sans en appeler à la « re-lance » pour sortir de la criseou à une « vraie politique degauche » ;

— un front sans contenu : les ap-pels vides et creux ne servent àrien, sauf à entretenir la confu-sion, à désarmer les travailleurs,et à apporter notre cautionà la politique des réformistes.Quand un appel commun ne seprononce pas (ou est volontai-rement �ou) sur les questionsclé d’une mobilisation, nous nedevons pas le signer, car il estfacteur de démobilisation et faitle jeu des bureaucraties réfor-mistes ;

— un front permanent avec les ré-formistes : notre stratégie révo-lutionnaire rend impossible toutaccord durable avec les réfor-mistes. Si des accords ponctuelssont possibles, un front perma-nent ne pourrait se faire qu’auprix d’un abandon de nos posi-tions politiques fondamentales ;

— un front paci�é : ne devons pasnous abstenir de critiquer nospartenaires sous prétexte quenous agissons ensemble. Nousdevons au contraire pointer dudoigt leurs manquements, leursambigüités, leurs trahisons, encombinant interpellation et dé-nonciation en fonction des ex-périences qui sont vécues parcelles et ceux qui luttent ;

— un front électoral : les électionsn’étant pour nous qu’une tri-bune permettant d’utiliser lesrouages bourgeois pour popula-riser les idées révolutionnaires,hors de question de diluer cesidées et de gâcher ainsi l’occa-sion de nous faire connaître etde rendre notre parti attractif.

Promouvoir un marxismevivant et s’emparer de toutes

les questions

Une partie de la direction sor-tante aimerait réduire son oppo-sition interne à la juxtapositionde groupes dogmatiques, sectaires,ouvriéristes, gauchistes, récitant lecatéchisme trotsko-trotskyste, dé-fendant un marxisme rabougri in-capable de saisir la complexité etla nouveauté de la situation. Cettefaçon de poser le débat, opposant« ouverts » et « sectaires », est unestigmatisation appauvrissante etdépolitisante. Faute d’être capabled’une discussion sérieuse, elle es-quive les débats de fond et nour-rit les tensions inter-individuelles.Ainsi, elle dépolitise complètementles militants qui ont pourtant be-soin d’être armés pour l’action. Or,

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loin de vouloir nous replier sur unecitadelle trotskyste, nous nourris-sons le projet d’un parti qui n’éva-cue aucune problématique, et quidiscute sans tabou. Et donc en po-sition d’héritiers (et non de ren-tiers) d’une tradition marxiste ré-volutionnaire, qu’il nous faut criti-quer et actualiser en permanence.Mais nous refusons aussi l’éclec-tisme à la mode et nous pensonsque pour transformer le monde ilfaut se �xer démocratiquement desorientations communes, les appli-quer ensemble, et en tirer des bi-lans.

Reprendre le meilleur destraditions du mouvement

ouvrier

« Notre logique politique, c’estde prendre le meilleur des tra-ditions du mouvement ouvrier »disait Olivier Besancenot lorsdu congrès de fondation. Noussommes d’accord, à condition demener la discussion sur ce qu’estle « meilleur » de ces traditions, cequi n’a jamais été fait dans le parti,faute de quoi cette formule est res-tée un e�et d’annonce. Pour nous,le « meilleur », ce n’est pas seule-ment la tradition trotskyste, dontil faut faire un bilan critique, maisaussi beaucoup d’aspects d’autrestraditions révolutionnaires.

Par exemple, il y a beaucoupde leçons à tirer des positions dela première opposition de gauche,au printemps 1918, dans le partibolchevik (cf. l’ouvrage en françaissur les numéros de la revue Kom-munist : h�p://www.collectif-smolny.org/article.php3?id_article=1483) :critique du taylorisme, du bureau-cratisme naissant dans le parti, dela coupure entre parti et soviets,etc. D’un autre côté, il nous sembleaussi utile de discuter et de faireune critique radicale de toutes lesidéologies réformistes qui visentà enfermer le prolétariat dans unelogique institutionnelle.

Déconstruire le discoursantilibéral et promouvoir uneanalyse marxiste de la crise

Notre dernier congrès avait dis-cuté et voté une analyse marxistede la crise : « la crise n’est pas dueà des politiques économiques ’ab-surdes’, mais à la baisse des tauxde pro�t » ; « la ’solution’ capita-liste à la crise passe donc par leredressement des taux de pro�t,combinant destruction de capital etaugmentation du taux d’exploita-tion » ; « L’augmentation des sa-laires, de la protection sociale, desdépenses publiques pour renforceret développer les services publicsne sont donc pas une ’solution’ à lacrise capitaliste ».

Force est de constater que la di-rection du parti refuse obstinémentde porter cette analyse et défendau contraire une analyse keyné-sienne ou sous-consommationnistede la crise. Partout, elle expliqueque les politiques d’austérité com-priment le pouvoir d’achat des tra-vailleurs, ce qui réduit la demandeet provoque une crise de surpro-duction. Cette analyse est celle duFront de gauche, et elle est le fon-dement théorique de ses solutionsantilibérales : il faudrait augmen-ter les salaires et les dépenses pu-bliques pour augmenter le niveaude la demande et sortir de la crisede surproduction.

Il sera nécessaire au congrèsd’avoir à nouveau la discussion enprofondeur a�n que chacun s’ap-proprie les enjeux et que les ré-solutions de l’instance souverainedu parti soient respectées. Cettediscussion est fondamentale, caril s’agit de se doter d’une ana-lyse économique marxiste qui dé-montre la nécessite de sortir du ca-pitalisme pour sortir de l’austérité.Il ne s’agit pas d’un supplémentd’âme ou d’un débat entre « ex-perts », mais d’un enjeu central denotre combat politique.

Lever les tabous de la gaucheanticapitaliste : repenser notre

rapport à l’UE et aulibre-échange

Lors de la campagne des eu-ropéennes, notre parti a adoptéune orientation qui fait l’impassesur la nécessité de rompre avecl’Union européenne. Pire, il asso-cie l’idée de la sortie de l’UE oude l’euro au Front national. C’estune grave erreur d’orientation quilaisse au FN le monopole d’uneposture anti-UE. Derrière cette er-reur, il y a le présupposé que toutdépassement des frontières natio-nales serait progressiste, permet-tant de développer les forces pro-ductives, et que notre rôle seraitde parachever l’œuvre commen-cée par les bourgeoisies d’Europe.C’est une façon de penser, héri-tière d’un marxisme mécanique,aveugle aux reculs immédiats quisont imposés aux travailleur-se-s d’Europe. Il est nécessaire derompre avec cette culpabilisationpermanente qui vise à faire passertous les opposants à l’UE pour desa�reux réactionnaires, ce qui fait lejeu du FN. Il faut assumer claire-ment la nécessité de rompre claire-ment avec l’UE, ses traités, sa mon-naie si on veut rompre concrète-ment avec le capitalisme et s’en-gager dans une construction socia-liste.

Nous devons également êtredes opposants déterminés au libre-échange (des marchandises et descapitaux) qui vise à lever toutes lesentraves au pouvoir du capital et àexacerber la concurrence entre lestravailleurs pour détruire les acquissociaux. LO nous montre ce qu’il nefaut surtout pas faire en nous ex-pliquant que l’UE, le TAFTA (traitétransatlantique) ne sont que desépiphénomènes contre lesquels ilne faut surtout pas lutter parce quecela nous détournerait de la « luttecontre le capitalisme ». Comme sile capitalisme ne s’incarnait pas

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dans des institutions qu’il faut ab-solument combattre sauf à menerun combat purement rhétorique etabstrait contre le capitalisme. Nousne devons pas être indi�érents auxarmes dont se dotent la bourgeoi-sie pour nous combattre. Cela n’im-plique absolument pas que nousdéfendions une solution « natio-nale » ou « protectionniste » dansle cadre du capitalisme.

Intégrer les lu�es spéci�ques ànotre combat communiste

Même si nous ouvrons ce dé-bat sur les points qui recouvrent lesdésaccords stratégiques identi�és,ce texte ne constitue bien sûr pasun programme exhaustif. D’autrespoints méritent d’être développés :la lutte contre l’impérialisme fran-çais et ses guerres de redéploie-ment, le racisme anti-Roms, l’isla-mophobie, l’oppression des LGBTI,notre intervention dans les luttesféministes, ou encore les luttes éco-logistes.

En tant que militants en fa-veur d’une société permettantl’émancipation la plus complète,ces questions doivent être com-prises comme parties intégrantesde notre combat révolutionnaire.Cette intégration ne doit pas êtrefaite de façon arti�cielle et dog-matique, mais par de vraies ex-périences et élaborations, qui surbeaucoup de sujets restent à faireou sont insu�samment prises encharge.

Dans l’extrême gauche enFrance, le NPA est le parti qui in-tervient le plus sur les questionsautres que purement économiques,et c’est un acquis très positif. Maisnous pensons que pour dépasserla simple juxtaposition de préfé-rences d’intervention, et véritable-ment « faire parti », l’élaborationd’un programme révolutionnaireglobal et cohérent est nécessaire.

Prioriser l’intervention surles lieux de travail et

prendre des initiatives pourconstituer un courant

intersyndical lutte de classeface aux directions

syndicales

Il n’est bien entendu pas ques-tion de négliger tous les autres sec-teurs d’intervention. Mais nous de-vons nous construire davantage surles lieux de travail. En intervenantauprès de nos collègues de travail,autant que possible en tant que mi-litants politiques, partout où nousen avons la force. Nous devons fairele maximum pour avoir une inter-vention politique en direction denos collègues de travail. La grève,c’est-à-dire le blocage de l’activitééconomique, reste le moyen déci-sif dont disposent les travailleurspour s’opposer au patronat et augouvernement. Le parti doit donccoordonner l’activité des militantssur les lieux de travail, en premierlieu à l’intérieur des syndicats. Larécente grève de la SNCF a montrél’utilité pour les militants d’un sec-teur de se coordonner, et les pré-cieux point d’appui que sont lespositions des révolutionnaires dansles syndicats.

Les bureaucraties syndicalessont vautrées dans le « dialoguesocial » et le confort qui va avec.Certaines promeuvent directementles pires contre-réformes (commela CFDT qui appuie le pacte de res-ponsabilité) pendant que les plus« radicales » passent leur tempsdans les salons ministériels ou pa-tronaux, et s’acharnent à empêcherl’émergence de grèves puissantes.Quand celles-ci apparaissent mal-gré tout, elles n’ont de cesse dechercher à les isoler, à les saucis-sonner, et donc à les neutraliser,pour que tout rentre dans l’ordre.

Chacun ressent donc la néces-sité de s’organiser, à l’intérieur dessyndicats, face aux bureaucraties

syndicales. Pourtant, aucune ini-tiative concrète n’a été prise par ladirection du parti en 5 ans d’exis-tence. Pire, elle a même donné desgages de « bonne conduite » auxbureaucraties syndicales pour nepas trop se fâcher avec elle : à laveille du mouvement des retraitesde 2010, le NPA est allé jusqu’à direà la CGT : « le NPA a tenu à dire à laCGT que sa crainte de constructiond’ un courant NPA dans la CGT,était sans fondement » (h�p://www.npa2009.org/content/communiqu%C3%A9-du-npa-rencontre-npa-cgt).Ce souci de ménager nos bonnesrelations avec l’ensemble des mili-tants (et de ne pas entrer en con�itavec les bureaucrates) l’a donc em-porté sur la nécessité de constitueren�n un courant organisé dansles syndicats avec les militants lesplus radicaux. C’est à notre sensune erreur profonde. Un tel cou-rant devrait être capable d’agré-ger les militants et équipes quiagissent avec une orientation delutte de classe, incluant le combatcontre l’orientation des bureau-crates, pour la réappropriation dessyndicats par les travailleurs. Un telcourant devrait regrouper les mili-tants et équipes de lutte de classeau-delà des di�érentes sensibilitéspolitiques. Le NPA n’a certes pas lepouvoir d’en décréter l’existence,mais nous avons les moyens deprendre des initiatives publiquesconcrètes pour avancer dans cesens.

Sortir des réponsesambiguës ou partiales, des

logiques de tendancebloquées, des appels creux àl’unité : seul un véritabledébat peut nous faireavancer ensemble

Des premiers textes et des pre-miers échanges ont eu lieu lors dela commission de congrès du 28juin. Au sein de la majorité, desdoutes apparaissent sur la ligne po-

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litique du NPA. Yvan, par exemple,écrit : « L’opposition de gaucheexiste, son contenu ne répond pasà ce pourquoi nous nous sommesbattus et il devient nécessaire deré�échir collectivement à une re-formulation de notre démarche »,avant d’ajouter aussitôt « Il nes’agit pas de rompre avec ellemais bien d’en préciser le contenupolitique ». Yvan perçoit bien leproblème de l’utilisation de l’ex-pression « opposition de gauche »,mais il n’en tire pas de consé-quence claire. Alors qu’il disait,avec Cathy, qu’il fallait « mettre aucœur de notre travail le réarme-ment programmatique et politiquedu NPA », nous attendons toujoursles pistes qu’ils proposent. Yvans’appuie en outre sur le rapport deforces dégradé pour nous mettre engarde contre tout « radicalisme in-cantatoire ». Or, si notre projet po-

litique apparaît aujourd’hui commeincantatoire, ce n’est pas en raisond’une trop grande radicalité, maisparce que des réponses éparses, desmots d’ordre, ne constituent pas unprogramme global et cohérent.

Nous partageons un grandnombre de positions communesavec les camarades du courant« Anticapitalisme et Révolution »(A&R) et du CCR : sur notre rapportau Front de gauche ou pour prio-riser l’intervention sur les lieux detravail. Nous pensons cependantque tourner le parti vers les lutteset la classe ouvrière, est une condi-tion nécessaire mais pas su�santepour nous construire parmi les tra-vailleurs. L’exemple de Lutte ou-vrière le démontre. Il est essentiel,d’une part de porter publiquementun projet politique révolutionnaireconvaincant, radicalement di�é-rent de celui du FDG, et d’autre

part, de prendre des initiativespour structurer une oppositionsyndicale contre les bureaucrates.La discussion doit se poursuivre,mais nous pensons que focaliser ladiscussion sur les champs d’inter-ventions est trop limitatif et nousexpose à un risque de dépoliti-sation et de parasyndicalisme. Lecontenu des tracts, les positionspolitiques que nous prenons et enparticulier que nos porte parole dé-fendent, tout cela a aussi un impactsur notre construction. Par ailleurs,la conviction qu’il faut prioriserl’intervention sur les lieux de tra-vail n’est pas un dogme, elle doitdécouler de la conviction que leprolétariat peut s’auto-organiser etrenverser le capitalisme.

Tendance CLAIRE,le 17 juillet 2014

NPA

Pour une écologie révolutionnaire

L’écologie ne doit en aucuncas constituer un simple supplé-ment d’âme par rapport au pro-gramme révolutionnaire de notreparti. C’est encore trop souvent lecas dans notre expression alors quesur le terrain, les militants du NPAsont connus et reconnus dans biendes combats et font feu de tout boisaux côtés des militants écologistesles plus radicaux ou a�n d’aider àla convergence des luttes. Il ne fautpas plaquer arti�ciellement l’écolo-gie, tel un appendice peu naturel

de la lutte de classe, sur l’idéologieou sur l’activité de notre parti pourtrois raisons essentielles :

1) Il serait irresponsablecomme le défend par exempleLO, de faire � de l’urgence éco-logique en a�rmant qu’il suf-�t de renverser le capitalismepour que tout s’arrange. En casde catastrophe climatique ou nu-cléaire, ce sont des pans entiers del’humanité et de la planète qui sontmenacés. Ce combat pour la sau-vegarde de la vie doit évidemmentse mener de front et en lien avec lecombat contre l’exploitation capi-taliste.

Certaines techniques comme la�ssion nucléaire ou l’extraction dugaz de schiste sont à rejeter enelles-mêmes. Le capitalisme nousfait aussi courir des risques incon-nus avec les OGM, les nanotechno-

logies. . .Sous le communisme, on pour-

rait envisager des recherches surces techniques. Mais sous le ca-pitalisme, il est impensable de re-noncer à combattre dès maintenantl’utilisation de ces techniques et lapseudo recherche en la matière, quinous met toujours devant le fait ac-compli.

En plus de l’exploitation etde l’aliénation capitalistes, les tra-vailleurs subissent aujourd’hui lamenace de mort et de destructionque l’irresponsabilité de ce systèmefait planer sur eux. Le NPA ne peutdécemment hiérarchiser ces com-bats, ni implicitement ni explicite-ment, ni d’un point de vue tempo-rel.

Chacun dans notre parti en abien conscience, mais c’est pour-tant hélas l’impression inverse qui

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émane de notre expression quo-tidienne essentiellement centréesur les revendications ouvrières denotre classe.

Ce souci d’une meilleure com-munication doit être constant danstoutes les commissions de notreparti et au CE, pas seulement ausein de la commission écologie. Untravail en lien des di�érentes com-mission devrait donc être généra-lisé et non se limiter à des ren-contres ponctuelles.

2) L’écologie constitue au-jourd’hui un formidable vec-teur de mobilisation : l’aberra-tion du système capitaliste, ses ex-cès, son caractère profondémentanti-démocratique, apparaissent aumoins aussi clairement avec les dé-sastres écologiques qu’avec les dé-sastres sociaux. De nombreux mi-litants peuvent venir aux idées ré-volutionnaires grâce à des combatsciblés au départ sur une problé-matique environnementale, qu’ellesoit locale ou générale. A nous,grâce à notre expression, à notredénonciation constante et perma-nente du système en lien avec lescombats écologistes, à nos pro-positions de société nouvelle, ded’orienter cette révolte vers un pro-jet anticapitaliste conséquent.

C’est pourquoi notre écologiedoit être révolutionnaire et ne doitpas se contenter d’un simple ac-compagnement des luttes.

Le NPA peut et doit appor-ter une dimension politique auxluttes et expliquer inlassablementque le capitalisme est aveugle, ir-responsable, que si des victoiresponctuelles sont possibles en nousmobilisant, nous serons toujoursconfrontés à cette irresponsabilitéde la loi de la concurrence et dupro�t, que réformer le capitalismen’est pas possible à ce titre.

Le NPA doit expliquer que dansla société future et démocratiqueque nous voulons construire, nousne serons certes pas à l’abri d’er-reurs ou de désastres écologiquesmais que débarrassé de la dictaturedu capital, nous aurons bien davan-tage les moyens d’éviter le pire.

3) Trop souvent, les mili-tants écolos et les militants ou-vriers mènent leurs combatsséparément, voire s’opposent(exemple de Fessenheim). LeNPA doit travailler concrètementà créer des ponts entre ces luttesqui doivent s’irriguer l’une l’autre,s’enrichir, se compléter a�n de don-ner une cohérence aux di�érentscombats militants et de permettreune vision structurée de la sociétéque nous voulons.

Notre parti a su le faire avecle nucléaire où, à l’inverse de stig-matiser les travailleurs de la �lière,nous proposons, à titre de revendi-cation transitoire, la reconversiondes travailleurs dans le démantèle-ment ou dans les énergies renouve-lables ainsi que la création de cen-taines de milliers d’emplois.

Mais pour envisager cette re-conversion, il faut évidemment queles travailleurs soient aux manettesde l’ensemble de la �lière énergé-tique et donc. . . exproprier tous lesgrands groupes et s’extraire du ca-pitalisme. Notre position est géné-ralement bien comprise et acceptéepar les militants antinucléaires, etmême par certains travailleurs de la�lière.

Ce que nous avons ébauchéavec le nucléaire, nous pouvonsl’étendre à bien des secteurs de laproduction capitaliste

En�n, notre écologie doit ré�é-chir aujourd’hui à intégrer pourpartie les notions de décrois-sance et d’anticonsumérisme, qui

peuvent être d’un apport non né-gligeable à notre ré�exion antica-pitaliste.

Là encore, le dégoût croissantet justi�é de la société de consom-mation motive une frange grandis-sante de la population à chercherdes réponses originales et nova-trices, mais qui se contentent tropsouvent du « que faire ici et mainte-nant ? » et du repli sur soi dans desexpériences locales certes intéres-santes et nécessaires, mais insu�-santes.

Il existe, au sein de la mou-vance décroissante, protéiforme etdi�use, des alliés naturels du NPA,au delà des di�érences de vocabu-laire et des parcours militants dechacun. Sachons reconnaître leurapport et saisir les possibilités detravailler ensemble à l’élaborationd’une vision commune de l’avenirde la planète.

Pour toutes les raisons évo-quées ci-dessus, notre écologie doitêtre révolutionnaire, et se démar-quer à tout prix de celle du Frontde gauche, qui con�sque de plus enplus à son pro�t le terme « écoso-cialisme » alors qu’il est aisé de dé-montrer que les propositions du PGsont juste teintées d’un réformismemollasson.

L’écologie en général, le nu-cléaire (Le PC est pour, le PGpropose une sortie irresponsableen 20-25 ans), constituent autantde solides motivations supplémen-taires de refuser toute alliance po-litique avec le FDG

Ces di�érences, sachons les ex-pliquer publiquement, elles consti-tuent une partie de notre identité etjusti�ent d’autant plus l’existenced’un parti tel que le nôtre.

Tendance CLAIRE,le 17 juillet 2014

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NPA

Bilan du CPN de juillet : relancer le NPA enreconnaissant les désaccords. . . et lesaccords

Le BI de préparation du der-nier CPN présentait plusieurs pro-jets de résolution politique di�é-rents. Malgré ce foisonnement issude divergences d’orientation bienréelles, il nous semblait possible dedégager quelques points d’accordà la lecture des di�érentes contri-butions. Ainsi, avant le CPN, nousavons proposé à des camarades dedi�érentes sensibilités de travaillerensemble pour essayer d’arriver àdes positions et donc une interven-tion communes, malgré les autresdésaccords, autour d’axes essen-tiels :

— le remplacement du clivagegauche/droite qui ne renvoieplus, pour une large partie de lapopulation, à un clivage sur lecontenu des politiques, par unclivage de classe. Ceci impliqueune reformulation de notre dé-marche programmatique qui nepeut pas consister en une « op-position de gauche » ;

— le réarmement politique duNPA, a�n d’incarner une alter-native globale crédible, dé�nieen positif, clairement délimi-tée de celle du Front de gauche.Pour cela, nous devons élaborerun programme de transition ar-ticulant nos revendications aux

moyens de les traduire concrè-tement, c’est-à-dire un gouver-nement des travailleurs poursortir du capitalisme ;

— la priorité donnée à l’implan-tation et à l’intervention dansles luttes, en menant la bataillepour l’auto-organisation et ense donnant les moyens organi-sationnels, à l’intérieur des syn-dicats, pour structurer les mili-tants combatifs face aux direc-tions bureaucratiques.

Avec cette démarche, nous vou-lions nous donner des chancesd’aboutir à une motion courte à vo-cation majoritaire, pour tirer les le-çons de la dernière période et ten-ter de relancer le parti. Elle répon-dait aussi à un souci de « lisibilité »des débats et à la nécessité de dé-passer la répétition à chaque CPNde résolutions longues de chaquesensibilité.

Cependant, suite à l’absence dedéléguéEs pour cause de grève descheminotEs, le CPN s’est tenu sur1 journée et aucun vote de réso-lution politique n’a eu lieu. Mêmesi une partie des débats ont portésur les axes que nous mettions enavant dans notre proposition, elleest malheureusement restée sansréponse de la part des autres délé-guéEs

Pourtant, au regard des ten-sions et logiques fractionnelles quicisaillent le NPA à tous les niveaux,il est nécessaire que le CPN entant que direction cherche à éla-borer une résolution politique untant soit peu partagée, une fois queles di�érentes orientations ont été

exprimées. Il ne s’agit évidemmentpas d’étou�er les désaccords, maisde s’e�orcer d’avancer vers uneintervention commune quand lesconvergences sont possibles, et cla-ri�er les véritables divergences si-non pour favoriser leur discussion.

Cette préoccupation est d’au-tant plus capitale que la remon-tée des mobilisations (cheminotEs,intermittentEs, postièrEs, hôpi-taux. . . ) nous interpelle sur l’ur-gence à rendre notre parti réelle-ment utile pour peser dans la luttedes classes. Au milieu de cette ac-tualité brûlante, ébranlée par lagrève centrale des cheminotEs, ilest problématique que la majoritéde la direction n’ait pas tenté detravailler sur une résolution spé-ci�que pour organiser notre inter-vention dans ces luttes. Ainsi, unepartie de la majorité X et de la mi-norité Y a préféré argumenter pourla signature d’un communiquéavec le PCF et le PG, qui avait pourfonction d’appuyer les directionssyndicales alors que nos camaradesles combattent dans les AG. A laplace, il aurait fallu acter ensemblela nécessité pour nos militantEs demettre en avant la revendicationdu retrait de la réforme, la rupturedes négociations avec le gouverne-ment (dans l’opacité la plus totaleet sans contrôle des grévistes), depousser à l’auto-organisation pourdéborder les directions syndicalesou encore d’œuvrer concrètementà la convergence des secteurs enlutte.

Tendance CLAIRE,le 24 juillet 2014

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NPA

SNJ du 21 juin

Sur la grève descheminot-e-s

Si tout le monde s’accordait àdire que la grève des cheminot-e-s et des intermittent-e-s est trèsimportante pour nous et qu’il fauty intervenir, des divergences d’ap-préciation se sont exprimées surla façon d’intervenir des jeunes duNPA. Selon nous, le soutien de ca-marades jeunes est pleinement jus-ti�é, ne serait-ce qu’en tant quemilitant-e-s du NPA. Il est certainque ce soutien extérieur a beau-coup moins de poids que l’implan-tation de militants du NPA à laSNCF, mais ce soutien est néan-moins vital, aussi bien pour le ren-forcement de la lutte que pour me-ner des discussions politiques avecles grévistes et usagers. Il y avaitpar ailleurs accord pour dire quele démarrage d’un mouvement étu-diant à la rentrée serait un desmeilleurs soutiens possibles aux re-vendications de tous les secteursen lutte (et la relance de la grèveà la SNCF n’est pas impossible àl’occasion des négociations sur laconvention collective ferroviaire).

Par ailleurs, un débat est ap-paru sur l’in�uence d’idées d’ex-trême droite parmi les cheminot-e-s, et surtout sur la façon de les com-battre. La lutte en elle-même est le

principal levier pour faire reculerles idées de Le Pen ou Dieudonné.Mais levier ne signi�e pas automa-tisme, cela nécessite un sujet quil’actionne. Il n’y a qu’une politisa-tion « lutte de classe » qui puissefaire reculer des politisations natio-nalistes.

En�n, la question des direc-tions syndicales ne doit pas êtreesquivée. Car beaucoup de jeunesgrévistes ont fait l’amère expé-rience du freinage massif opéré parla direction de la CGT et de SUD.L’extrême droite s’appuie de plusen plus sur le sentiment de trahi-son de beaucoup de syndicalistespour avoir leur oreille. Il faut dis-cuter de réappropriation des syn-dicats avec ces secteurs combatifs,à la fois pour donner une compré-hension de la situation et une pers-pective, et pour avoir une chancede voir en�n de vraies grèves géné-rales ! Car la méthode du dialoguesocial, malgré ses crises, ne s’e�on-drera pas toute seule.

Sur le front unique etl’extrême droite

Un autre débat important aété celui sur les manifestations delycéen-ne-s suite au score du FNaux élections européennes.

Certains camarades estimentque le centre de gravité de lamobilisation devait être la luttecontre l’extrême droite. Nous pen-sons que la politique suivie par lesecteur jeune, de faire reprendreaux manifestant-e-s des slogansanti-gouvernement, était juste. Lapolitique anti-sociale du gouverne-ment et le racisme d’État depuisMitterrand jusqu’à Valls sont large-ment responsables de la montée duFN, et il faut bien voir que ce n’estqu’une petite minorité aujourd’hui

qui est prête à réagir à un scoresi élevé. Cette minorité de lycéen-ne-s doit donc justement nous in-téresser, mais puisqu’il n’y a pas deperspective immédiate à leur lutte,il faut surtout leur proposer uneperspective et une raison de s’orga-niser : la sortie de crise par la révo-lution, ou le danger réactionnaire.

Nous avons aussi défendunotre point de vue : le PS étantun parti capitaliste, et de plus di-rectement au gouvernement, il nefaut même pas discuter avec lessatellites du PS, qui apparaissentcomme tels (MJS, JRG...) mais nousprésenter comme un pôle tota-lement distinct des forces pro-capitalistes (de gauche commed’extrême-droite), tant dans lescommuniqués que dans les ma-nifestations. Nous ne pouvons pasnégocier courtoisement avec desjeunes qui nous écrivent de ruede Solférino, au moment où lesattaques sont issues du même en-droit.

Sur les enjeux desprochaines RIJ

Cette journée a aussi été l’oc-casion d’échanger sur les enjeux(et l’organisation) des RencontresInternationales de Jeunes de cetété. Une large partie des cama-rades, dont nous faisons partie, es-time qu’il est important de faire desbilans et des débats sur la ques-tion des « partis larges ». Il noussemble en e�et qu’entre la politiquede l’Alliance Rouge Verte au Da-nemark et celle de l’OKDE Spar-takos en Grèce, les débats doiventêtre posés sur la table. Il ne s’agitpas de cliver pour cliver, il s’agitd’éviter de nouvelles dérives et deprendre nos responsabilités pourqu’émerge un pôle révolutionnaireà l’échelle internationale.

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Pour autant, nous sommespour un regroupement large des ré-volutionnaires. La clarté sur le rôlede l’État, la di�érence entre anti-libéralisme et anti-capitalisme, lerefus de l’étapisme et la néces-sité de l’auto-organisation noussemblent par exemple essentiels. Iln’est en revanche pas nécessaire nisouhaitable de verrouiller l’orga-nisation sur telle ou telle varianteultra-délimitée de « trotskisme ».

Sur la capacité à débattre

Cette réunion des membres duSNJ a eu des aspects positifs et né-gatifs entremêlés. L’élément posi-

tif est la qualité des débats, qui ontabordé des questions politiques im-posées par la situation. L’élémentplus négatif est une certaine cris-pation conduisant à une logique debloc.

Nous avons toujours défenduque pour sortir le NPA de sa crise,il fallait une tendance la plus largepossible, regroupant les camaradesvoulant une orientation et une in-tervention révolutionnaire pour leparti. Il nous semble qu’il faudraitprioritairement se fédérer autourde cet objectif, en acceptant que desdébats et désaccords continuent denous traverser. La création du cou-

rant Anticapitalisme et Révolutionpourrait être un pas vers ce regrou-pement. Mais la direction d’A&Rcherchant à tout prix à construireet véri�er l’homogénéité de son re-groupement, est amenée à gros-sir des divergences et à refusercertains débats tant qu’ils n’ontpas été tranchés dans le courant(comme la résolution féministe auCPN d’avril). Il nous semble im-portant d’arriver à créer des cadresde débat sereins, sans que celaconduise automatiquement à destensions entre camarades.

Jeunes de la Tendance CLAIRE,le 24 juin 2014

CULTURE

Sur les enjeux de classes de l’écriturelittéraire

Compte rendu du livre PierreBergounioux, Le style comme expé-rience, Éditions de l’Olivier, 2013

Sous la forme d’un texte hy-bride, à mi-chemin entre un es-sai et un manifeste, Pierre Bergou-nioux propose une analyse mar-xiste de l’histoire de l’écriture etdu style littéraire, qui prend lecontre–pied des approches stylis-tiques traditionnelles. Celles-ci, ou-blieuses de la dimension historiquedu style et des liens qu’il entretientavec l’expérience du réel, sont ac-cusées d’avoir toujours négligé unedonnée fondamentale : la lutte des

classes. Car l’écriture et la littéra-ture, elles aussi, sont forgées parles con�its sociaux. Si le nom deMarx n’apparaît que vers la moi-tié du livre, c’est sous le signe de saconception de l’histoire et des rap-ports sociaux que le discours s’or-ganise dès le départ.

Dans un travail de synthèseparfois vertigineux, mais qui pré-sente une vue d’ensemble essen-tielle pour son propos, Bergou-nioux commence son récit avecl’apparition de l’écriture, qu’ondate de la �n du IVe millénaireavant J.-C. En s’appuyant sur lestravaux de l’anthropologue anglaisJack Goody, l’auteur invite à pen-ser le moment dans lequel l’hommea, pour la première fois, laissé des« traces hasardées à la pointe d’unroseau » sur un support matériel,comme l’événement le plus impor-tant de l’histoire humaine. Et quidépasse de loin toutes les révolu-tions successives marquant le pro-grès de la civilisation. Le dévelop-

pement matériel, y compris de laproduction des biens, dans les pre-mières sociétés est tel que l’activitépratique, en raison de sa nouvelleextension, « menace d’échapper aucontrôle de l’esprit » (p. 12). Lesconditions sont prêtes dès lors pourélaborer une technique permettantd’inscrire sur un support solide lesdiscours, les histoires, les calculsqui étaient jusqu’alors con�és auxseuls quatre vents. S’instaure ainsiun processus qui, du pictogrammeen passant par l’idéogramme et lescaractères cunéiformes, se perfec-tionne jusqu’à l’invention de l’al-phabet grec, par rapport auquelnotre époque elle-même n’a rienajouté.

Roland Barthes, dans son« aide-mémoire » sur la rhéto-rique ancienne qu’il rédigea en1965, organisait sa ré�exion autourd’un constat proche. Le dévelop-pement du système de productionétant à la base de la naissance dela propriété privée, c’est dans le

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cadre des procès pour la défensede celle-ci, donc à l’intérieur d’undiscours juridique, que la paroleéloquente trouve ses premiers dé-veloppements : « Il est savoureuxde constater que l’art de la paroleest lié originairement à une reven-dication de propriété, comme sile langage, en tant qu’objet d’unetransformation, condition d’unepratique, s’était déterminé nonpoint à partir d’une subtile mé-diation idéologique, mais à partirde la socialité la plus nue, a�rméedans sa brutalité fondamentale,celle de la possession terrienne : ona commencé - chez nous - à ré�é-chir sur le langage pour défendreson bien. » 1

De même, Bergounioux situel’émergence de l’écriture au cœurdu con�it social. L’invention decelle-ci, « c’est-à-dire de l’archive,de l’histoire comme science dupassé », va de pair avec « l’émer-gence des premières sociétés in-égalitaires, de castes et de classes,dont la lutte est l’élément moteur »(p. 10). La possession du nouvelinstrument de communication estsoumise à une distribution forte-ment inégale qui instaure une sé-paration entre une élite lettrée etl’immense masse de ceux et cellesqui n’y ont pas accès. C’est à par-tir de cette situation d’inégalité quese développent forme et contenudes récits, corps central d’une lit-térature qui, pendant des siècles,est restée inféodée à l’aristocra-tie. Mais les jours de celle-ci sontcomptés quand le texte tombe dansles mains des représentants de labourgeoisie émergente, en particu-lier de Voltaire, Diderot, Rousseau,dont les œuvres marquent un pointde non retour.

L’origine sociale de l’écriturefondée sur l’alphabet et le contextede ses applications ont eu égale-ment une conséquence formelle,

déterminant le contenu et l’organi-sation logique de tout récit. Cettepratique a été l’apanage d’uneclasse qui a un rapport au tempsfondé sur la contemplation et laré�exion, donc situé très loin dutemps réel de l’action. Les scribes etles narrateurs lettrés sont les seulsà pouvoir relater, dans le calme deleur vie retirée, les entreprises hé-roïques de la classe guerrière, aveccomme conséquence le fait capitalque « les structures temporelles del’action ont échappé à ceux qui s’ytrouvaient impliqués [les membresde la classe guerrière] comme àceux qui auraient dû les expliquer(les scribes justement) » (p. 35).

C’est là la limite principaled’une pratique littéraire qui fait su-bir aux gestes, à l’expérience vé-cue du réel, « la di�raction de l’écri-ture » — en substituant à la vé-rité de l’événement un artefact etune représentation déformée, fruitsdu travail d’une élite. Mais cetteconception de la littérature trouvesa �n, en même temps que sonaboutissement, au début du XXesiècle, avec trois �gures phares :Joyce, Kafka et Proust. Ces troishommes, juifs, malades et faibles,certains de ne pas pouvoir arri-ver au bout de leurs œuvres etécrivant à l’aube du con�it qui al-lait déchirer l’Europe, marquent la�n de l’écriture conquérante bour-geoise. Tous les trois ne réalisentleur projet littéraire qu’en a�r-mant son impossibilité : « Paro-dique avec Joyce, suspendue, tra-giquement, chez Kafka, portée, mi-née par le temps irréparable dontProust recense les sortilèges (...), lalittérature dit que le projet euro-péen – la raison – a avorté » (p. 57).La guerre qui éclate en 1914 appa-raît comme la concrétisation san-glante de cette conscience, et laconséquence de l’impossibilité derésoudre les deux con�its qui tra-

versent le vieux continent, la luttede classe et la rivalité entre nations,dont les œuvres de ces trois écri-vains sont pénétrées.

Pour trouver la suite de cettesorte d’épopée de l’écriture quenous présente Bergounioux, ilfaut désormais traverser l’océanet changer de continent, où s’ouvreun nouveau chapitre avec WilliamFaulkner. Celui-ci opère dans desconditions renouvelées où, la sé-grégation sociale étant – tempo-rairement et partiellement – as-souplie par rapport aux sociétéseuropéennes, l’écrivain n’est plusisolé, et en arrive à « abdiquer laroyauté de papier » que tout nar-rateur s’était arrogée au long dessiècles précédents. De là une œuvredu présent, qui s’élabore loin dessalons et des bibliothèques, qui al’audace et la possibilité de se dé-barrasser d’une tradition séculaire ;elle est faite pour les agents ano-nymes de l’histoire, elle s’e�orced’être �dèle à leur expérience dumonde. L’œuvre faulknérienne estmarquée par une révolution sty-listique qui permet de « dépasserl’impossibilité où le texte occiden-tal se trouvait », à cause d’un in-tellectualisme proliférant menacéconstamment de stérilité, « de neplus rien dire ce de qui arrivait »(p. 64).

Au �l de la narration, Bergou-nioux ne cache pas ses points derepère et ses �gures tutélaires, enprenant également position pourun écrivain, contre un autre. Sic’est souvent une vue partielle quinous est o�erte, le livre a le grandmérite d’opérer un recentrementimportant de l’histoire littéraire,et de se positionner résolumentcontre le fétichisme des Belles-Lettres. En élargissant à l’anthro-pologie la sphère de l’esthétique etde la poétique, il pose la littératureen dialogue avec les sciences so-

1. Roland Barthes, "L’ancienne rhétorique", dans la revue Communications n° 16.1, 1970, p. 176.

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ciales. Il se constitue ainsi en pre-mière ébauche d’une histoire quireste en grande partie à écrire,et rejoint d’ailleurs un projet quitrouve à l’heure actuelle nombred’échos dans la recherche acadé-mique 2.

La source du plaisir stylis-tique ne se trouve pas dans le de-gré de ra�nement et d’élabora-tion auquel l’écriture peut aspirer ;elle naît, similairement aux jouis-

sances qui concernent le corps, dusentiment de libération, d’« exten-sion de sens » et d’« accroisse-ment de l’existence », que le lan-gage révèle et permet d’expérimen-ter. Mais l’accès à ce plaisir, et c’estce qui le recouvre d’une coucheamère, a été et reste toujours li-mité et sélectif, profondément in-égal. En ceci militant, le livre deBergounioux se conclut sur un en-voi, au goût utopique : qu’un jour

l’égalité s’instaure dans l’accès aulangage. « L’état stylistique idéalsera celui où, pourvu égalementdes biens du corps et de l’esprit,chacun parlera, écrira, s’il le sou-haite, un langage parfait, c’est-à-dire le plus haut, le plus riche pos-sible, à un moment donné, en unlieu déterminé » (p. 70).

Andrea Vague,le 20 août 2014

CULTURE

Jimmy’s Hall, dernier chef-d’œuvre de KenLoach

Certains disent que c’est le der-nier �lm de sa carrière. J’espère quenon car il nous régale vraiment, levieux camarade Ken Loach !

Et puis, quand on voit la car-rière du Godard qui n’en �nit plusà 86 piges, qui a beau être reconnu

comme gôchiste – il ne m’a ja-mais Ô grand jamais intéressé, lebougre ! –, je souhaite vraimentque le vieux trotskard british de 78piges, quant à lui, nous �lme en-core quelques belles histoires à lamorale éclatante.

Donc, ce coup-ci, c’est l’his-toire du communiste irlandaisJames Gralton, déporté de forceen 1909 aux USA pour agitation,c’est d’ailleurs le seul à l’avoir étépour ces faits. Jimmy était ensuiterevenu en Irlande pour combattre

2. Di�érents courants de sociologie de la littérature ont dans les dernières décennies, et plus récemment, tenté de mettre au centrede la recherche le style, cet objet resté souvent impensé par toute approche sociologique. Qu’on pense au projet sociocritique lancé parClaude Duchet dans les années 1970, à la sociopoétique d’Alain Viala, aux travaux de Jérôme Meizoz et de la revue/collectif COnTEXTE(en ligne : http ://contextes.revues.org/). Voir aussi la publication récente de Nelly Wolf, Proses du monde. Les enjeux sociaux des styleslittéraires, Presses universitaires du Septentrion, 2014.

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lors de la guerre d’indépendanceirlandaise et, plus tard, en 1932pour s’occuper de sa mère à Lei-trim où il a dirigé le « soviet » deLeitrim (groupe des travailleurs ré-volutionnaires), d’ailleurs un desgroupes précurseurs du Parti com-muniste d’Irlande. Sa mère étaitune femme autodidacte qui possé-dait une bibliothèque privée qu’ellefaisait partager aux gamins duconté : Jack London, Robert LouisStevenson...

Il était surtout connu pouravoir ouvert une salle de danse àE�rinagh où il organisait des évé-nements gratuits, où il introduisitle jazz des Noirs américains, ra-mené de son séjour à New York(avec des disques et un grammo-phone) et où il exposa ses vuespolitiques avec ses camarades. Lesfemmes donnaient quant à elles descours de danse, de couture, de lec-ture aux gamins... l’éducation po-pulaire par le peuple lui-même.

Il y a eu une réaction trèsviolente contre ces danses et cesréunions, dirigée par des prêtrescatholiques et qui ont abouti à unefusillade sans morts à déplorer, puisl’incendie du « hall »...

Suite à cela, en 1933, Jimmy aété arrêté puis expulsé une dernièrefois vers les USA au motif qu’il étaitun étranger ( !) et sans procès bienévidemment. Il y est mort en 1945.

Cela a conduit à des mani-festations publiques partout sur

l’île organisées par l’IRA qui, parailleurs, a toujours été ambiguë dufait de son soutien à l’église ca-tholique. Ces événements ont eulieu au même moment que l’ex-pulsion du très grand syndicalisteanti-travailliste, très grand inter-nationaliste et créateur du PC deGrande-Bretagne : Tom Mann quifut, quant à lui, expulsé d’Irlandedu Nord pour avoir organisé la ré-volte conjointe des ouvriers irlan-dais et anglais contre l’empire bri-tannique et l’État libre d’Irlande.

Ce �lm me semble être la justesuite de son « Le vent se lève »,primé au festival de Cannes en2006, �lm qui chroniquait déjà laguerre d’indépendance irlandaisemais aussi la guerre civile qui s’ensuivit sur fond de con�it fratricideentre un frère partisan de Collinset l’autre de De Valera, sauf quecela se passe une décennie après laguerre civile qui prit �n en 1923.

On est donc sur le même re-gistre que « Land and freedom »(1995) qui chroniquait déjà les vraisclivages de la guerre d’Espagne etle camarade Ken signe là un vraichef-d’œuvre avec des acteurs su-blimes qui jouent super bien.

Voilà, courrez donc vite voir ce�lm du Loach (en VO, c’est beau-coup mieux), c’est vraiment un purmoment !

Quant à moi, je vais envoyerun mail à une jeune amie améri-caine pour l’inciter à aller le voir

aussi (si ce n’est déjà fait), amiequi est d’origine irlandaise (natu-ralisée depuis 1 an d’ailleurs) parson grand-père paternel et qui vità Boston, première ville d’immigra-tion irlandaise des USA et où jeme suis rendu en 2012. Je me sou-viens avoir vu un piquet de grèveau bas d’un building pour la régu-larisation de ses employées de ser-vices, immédiatement en entrantdans « downtown » (centre-ville),et avoir parlé avec un des grévistesqui était... irlandais à la 2ème géné-ration.

Quelques liens

— La bande-annonce en fran-çais :h�p://www.premiere.fr/Bandes-annonces/Video/Jimmy-s-Hall-VF-2

— La page wiki de Tom Mann :h�p://fr.wikipedia.org/wiki/Tom_Mann

— Et pour �nir, un classiquedes chants ouvriers deManchester par le génialgroupe irlandais ThePogues, ça fait toujours dubien :h�p://www.dailymotion.com/video/x121h_the-pogues-dirty-old-town_music

Un correspondant de Rouen,le 8 juillet 2014

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Débat stratégique 36

DÉBAT STRATÉGIQUE

Lip, les patrons de gauche et l’autogestionIl y avait déjà des �lms, des

livres, une pièce de théâtre...et depuis mars 2014, on peutaussi (re)découvrir la lutte destravailleur-se-s de Lip en BD. Lesauteurs se sont beaucoup docu-mentés, et l’immersion dans cetteusine de montres et les famillesde travailleur-se-s qui en viventfonctionne bien. Ce qui permetd’utiliser ce livre en exemple pourillustrer de nombreux enseigne-ments de la lutte des classes.

Le début des « planssociaux »

Les raisons de se pencher surcette lutte qui a marqué l’après68 et le début des années 1970 nemanquent pas. Tout d’abord parcequ’il s’agit d’une réaction à un planmassif de licenciements, commenous en avons connu de nombreuxdepuis. Les similitudes sont par-fois frappantes. Comme les syndi-

cats de PSA Aulnay, les Lip dé-couvrent les plans de la directionun peu par erreur, sous la forme denotes dans le sac d’un des adminis-trateurs : « allègement du personnelhorlogerie », « 480 à dégager »...

« On fabrique, on vend, onse paie »

Ce qui fait en revanche la par-ticularité de Lip, c’est la présencelocalement d’une unité syndicaleentre la CGT et une CFDT très ra-dicale, et surtout d’une traditionde démocratie directe forgée de-puis Mai 68. 1 Grâce à cette expé-rience précieuse, les Lip établissentdirectement une grève active, desdiscussions quotidiennes en assem-blées générales, et libèrent une for-midable énergie collective, débor-dant de loin le carcan de la légalitécapitaliste.

Et notamment la fameuse au-togestion de la production demontres, qui a été emblématiqueet qui a popularisé la lutte bienau-delà de la région. De nombreuxsoutiens achetaient �èrement des« montres Lip autogérées », en plusde venir manifester avec eux.

1. Lire une interview de Charles Piaget, dirigeant CFDT à Lip : h�ps://npa2009.org/node/39403

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Débat stratégique 37

Entre répression etémancipation

Mais à travers ce récit, on peuttirer de nombreux autres enseigne-ments. Par exemple, la répression :les CRS s’empressent de faire uncommando pour libérer le patronséquestré... puis plus tard ils at-taquent l’usine pour déloger lesgrévistes et récupérer le stock demontres. Les e�ets de cette ré-pression ne sont pas automatiques,entre démoralisation et radicalisa-tion. Beaucoup d’autres salarié-e-s en lutte ont depuis fait et refaitcette expérience du vrai visage del’État et de sa police.

Cette BD illustre aussi àquel point la solidarité ouvrièrepeut rapidement transformer laconscience de ceux et celles quiluttent. En termes de consciencede classe bien sûr, mais aussi pluslargement. Les auteurs ont parexemple utilisé les deux person-nages principaux – �ctifs – pourdécrire comment l’émancipationpar la lutte peut aussi venir heurterla domination masculine, jusquedans le couple. Ce qui est loin d’êtreanecdotique, dans une usine où lesouvrières spécialisées étaient ma-joritaires.

Deux taches sur le livre

Les seuls points noirs de la BDsont le début et la �n : Jean-LucMélenchon a écrit la préface, et(e�et miroir ?) la postface est deClaude Neuschwander, le « patronde gauche » qui a repris Lip de 1974à 1976.

L’enseignement de Lip, c’est laforce que peuvent avoir les tra-vailleurs unis (ces « héros ordi-naires ») prenant eux-mêmes lesdécisions. La politique de celui qui

vante la révolution par les urnesn’a rien à voir, et se retrouve sou-vent opposée, au nom du respectdes « lois républicaines ». De façonassez cynique, Mélenchon se meten avant, « moi j’étais étudiant àBesançon à l’époque », « moi j’aiaidé à sauver un ex Lip quandj’étais ministre de Jospin »... Maisil ne parle pas plus d’autogestiondans cette préface que dans sa cam-pagne de 2012.

Quant au « patron de gauche »en question, il avait beau êtreau Parti socialiste uni�é (PSU), etmaintenant au PS, il est utile de re-lever sa vision de l’autogestion :

« Il n’y a pas eu d’autogestion àpartir du moment où j’ai été patron.Si je crois à l’autogestion dans le

domaine du logement, desassociations, des syndicats... dans ledomaine des entreprises, surtout desgrosses entreprises, je n’y crois pas.

[...]Je n’ai jamais négocié sur une

question stratégique. Je considèreque c’est le patron seul qui prendune décision stratégique. On m’a

souvent dit que j’étais un peu facholà-dessus. Je ne crois pas ! Je croisque la stratégie ne se partage pas,sinon on fait de la bouillie. » 2

M. Neuschwander, bien qu’iln’ait pas été gêné par la bouilliede la base, a néanmoins fait cou-ler Lip. Après l’avoir repris en 1974,ses actionnaires n’aiment pas le ré-sultat, et le poussent à la démissionen 1976.

La faute aux réacs ?

Selon lui, cela n’était pas dûà un problème de rentabilité, maisà un choix délibéré de Giscard etdes patrons réactionnaires... Il esttout à fait possible que la volontéde revanche contre la combativité

des Lip et la volonté de faire unexemple aient joué un rôle. Maisl’explication est un peu courte. Onpeinerait à comprendre alors pour-quoi la France, l’Europe, le mondeentier ont connu des suppressionsmassives d’emploi à partir de cettepériode. Le secteur de l’horlogerieen particulier, important à Besan-çon, était déjà sur une tendanceà la centralisation du capital et àla restructuration depuis de nom-breuses années. 3

Prétendre que des capitalistes« progressistes » auraient la solu-tion et qu’avec eux l’exploitationserait plus douce est une chimère.Une chimère qui convient bien auxa�aires des patrons de gauche, etnotamment à toute une clique detraîtres de Mai 68, comme le jour-nal Libération 4.

La SCOP comme solution ?

Tout ceci étant dit, l’autoges-tion n’est pas une formule ma-gique qui se su�t à elle-même.Le PSU proposait que les salarié-e-s reprennent Lip en Société co-opérative ouvrière de production(SCOP), tandis que ceux-ci refu-saient et voulaient un repreneur.

Qui paie s’il faut réaliser degros investissements pour rebon-dir, si l’entreprise est en concur-rence avec d’autres travailleurssur-exploités ? Si c’est la SCOP, cesont les travailleur-se-s. Or juste-ment, les entreprises dont les pa-trons ne veulent plus sont souventen di�culté, même si certaines pe-tites SCOP s’en sortent sur certainsmarchés de niche. La tyrannie dusystème s’impose à travers le pou-voir des grands groupes et des Étatsà leur service, mais aussi partout àtravers la concurrence sur le mar-ché.

La SCOP en elle-même est uneforme légale, ino�ensive et impuis-

2. h�p://leblog2roubaix.com/claude-neuschwander-conversations/3. h�p://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l’horlogerie_à_Besançon4. h�p://www.liberation.fr/culture/2014/04/24/lip-strip-pour-les-ouvriers-horlogers_1003814

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Débat stratégique 38

sante. Les Lip, qui étaient mé�antsdès le départ, en ont fait l’expé-rience : après 1976, ils se sont ré-signés à se se morceler en di�é-rentes petites SCOP. Souvent engardant des objectifs subversifs,comme l’édition du « Chomageo-poly », mais chaque SCOP connais-sant ses di�cultés. 5

Et depuis l’éclatement de lacrise, les projets de SCOP re�eu-rissent (Sea France, Fralib...), appa-raissant souvent comme seule al-ternative aux licenciements quandaucun repreneur n’est en vue. Lemur du pouvoir des patrons esttoujours là (comme le montre lerefus du groupe Unilever de cé-der la marque Eléphant à la SCOP)comme la tyrannie du marché :

« Dans un contexte de guerreéconomique, il va falloir que lessalariés sociétaires relèvent

sacrément leurs manches, prévientun responsable d’un fonds

d’investissement dans l’économiesociale. Et qu’ils acceptent des

sacri�ces. » Il donne l’exemple d’uneSCOP dont le chi�re d’a�aires abaissé de 30% depuis 2008. « Pourabaisser la masse salariale, s’estposé le choix de diminuer lessalaires ou les e�ectifs. » 6

On pourrait se dire que cegenre de choix est au moins décidédémocratiquement. Mais rien n’estmoins garanti. Car dans la pénu-rie, l’élan émancipateur a vite fait

de se briser, les fonctions (trésorier,cadre...) de perdurer, et les hiérar-chies de se recréer. De nombreusesSCOP connaissent ces problèmes.Et lorsque les syndicats accèdentdirectement à la direction des nou-velles coopératives, le phénomènede bureaucratisation déjà présentdans l’entreprise privée ne fait quefaciliter la rechute dans une formeplus classique d’entreprise.

Se battre pour une SCOP oupour la nationalisation ?

On ne reprochera bien sûr pasà des salarié-e-s acculés de se re-plier sur une SCOP. Si c’est laseule option disponible à un mo-ment donné, elle peut être un pointd’appui, bien meilleur qu’accepterla liquidation des emplois. Mais lameilleure stratégie est de se battrepour que l’État exproprie le ca-pitaliste et nationalise l’entreprisesous contrôle des travailleurs/ses.C’est la seule solution pour espé-rer maintenir les emplois dans ladurée (même si l’entreprise n’estpas rentable). En outre, il faut aussise battre pour « sortir » l’entre-prise nationalisée du marché, engarantissant des prix et des débou-chés à la production. Il est évidentque cela nécessiterait un rapportde force très élevé. Ce rapport deforce ne peut être obtenu que pardes luttes qui s’étendent, qui serencontrent et se renforcent. Il nes’agit pas de véhiculer des illusionssur le rôle de l’État bourgeois quipourrait de lui-même se placer ducôté des travailleurs face aux ca-pitalistes. Il s’agit de contraindrel’État à intervenir et de le placersous surveillance des travailleurs.Cet axe de mobilisation a aussi lemérite de constituer un pont vers lavéritable solution que nous préco-nisons : l’expropriation des grands

groupes capitalistes pour que lestravailleurs puissent diriger la pro-duction en rupture avec la logiquedu pro�t. Si les expropriations par-tielles dans le cadre du capitalismepréparent le terrain, il faudra unerévolution, c’est-à-dire le conquêtedu pouvoir politique par les tra-vailleurs/ses, pour disposer des le-viers pour transformer en profon-deur les rapports de propriété et deproduction.

Cette stratégie exige de se pla-cer sur le terrain de la lutte declasse, de la confrontation entredeux classes antagonistes qui pour-suivent des objectifs incompatibles.C’est précisément ce terrain cequ’essaient toujours d’éviter lesbureaucrates à la tête des syndicats,de peur de perdre leurs entréespour les salons confortables del’Élysée ou du MEDEF. Du tempsdes Lip, la CGT confédérale di-sait « c’est une lutte locale » (sous-entendu, qu’elle le reste surtout !)et la CFDT, malgré son soutien of-�ciel et ses grandes phrases d’alorssur l’autogestion, ne faisait rien deconcret pour que le con�it sorte deBesançon. Lors du congrès CFDTde 1973, le secrétaire général Ed-mond Maire s’inquiétait de la mon-tée du « basisme » et du « gau-chisme » dans le syndicat.

L’important pour nous est depousser à la généralisation et à la

5. h�p://genepi.blog.lemonde.fr/files/2012/10/6.1_Les-SCOP-de-LIP_Piaget-Burgy.pdf6. h�p://www.lemonde.fr/economie/article/2013/06/18/cooperatives-et-syndicats-un-mariage-de-raison-pour-lu�er-contre-les-restructurations_

3432214_3234.html

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Débat stratégique 39

coordination des luttes pour ren-verser le pouvoir économique etpolitique des capitalistes. Dans cesens, il est important de combattreles idéologies coopérativistes et ré-

formistes, et d’articuler le com-bat pour l’autogestion dans l’entre-prise avec le combat pour le pou-voir des travailleurs/ses à l’échellede la société.

Julien (comité Jeunes TravailleursRP),

le 14 juillet 2014

DÉBAT STRATÉGIQUE

Retours historiques sur le réformismeantilibéral « de gauche »

Cet article très partiel revientsur deux épisodes de l’histoire poli-tique française, sous l’angle du dis-cours économique du réformisme.Cela permet de relever des élé-ments récurrents qui sont encoreceux que nous entendons aujour-d’hui, de confronter ce discours àl’expérience de « la gauche » aupouvoir, et de nourrir la ré�exionsur le réformisme.

1924 : Le cartel des gauchescontre le mur de l’argent

A la suite de la Première guerremondiale, l’État français est trèsendetté et en crise �nancière. Pourles intérêts de l’impérialisme fran-çais, il a eu recours pendant laguerre à des emprunts massifs eta fait tourner la planche à billets.Pour rétablir les �nances, résorberla dette, ce sont alors des budgetsde rigueur qui sont imposés, et qui,comme aujourd’hui, frappent plusdurement la classe travailleuse.

Le Bloc national au pouvoiraprès la guerre se veut le continua-

teur de l’Union sacrée, mais celle-ci a de plus en plus de mal à pas-ser. Dans le sillage de la révolutionrusse, les revendications ouvrièresont resurgi, poussant à gauche l’en-semble du spectre politique. Un« cartel des gauches » voit alors lejour pour les élections législativesde 1924, entre les socialistes (Sec-tion française de l’internationaleouvrière, SFIO) et des forces de lagauche bourgeoise centrées autourdu Parti radical. La SFIO n’ose pasparticiper au gouvernement Her-riot : le « ministérialisme » n’est pasencore assumé totalement (malgréle précédent de Millerand, un so-cialiste qui a accepté un poste deministre en 1899 avec le soutiende Jaurès), et il se justi�e déjà faceà la dénonciation de son oppor-tunisme par le jeune parti com-muniste (Section française de l’In-ternationale communiste, SFIC). Cecartel est néanmoins une prémissede « front populaire » basé sur ledénominateur de « gauche » et de« progressisme ».

Au delà de la trahison c’estaussi le début d’une propagandeprétendant que le « progrès »est possible pour les exploitésen s’alliant avec des forces pro-capitalistes.

Les radicaux étant naturelle-ment peu enclins à empiéter sur la« propriété privée », ce sont les so-cialistes qui vont les pousser à des

« réformes », visant à taxer le capi-tal et notamment les pro�teurs deguerre. Cela n’a pas débouché surun programme économique com-mun à l’échelle nationale, mais parexemple en Île-de-France, le carteldéclare :

« Nous voulons l’assainissement des�nances, la justice sociale par laprédominance de l’impôt directfrappant la richesse acquise, la

répression impitoyable des fraudeset des spéculations illicites (. . . ).

Nous voulons garantir lescommerçants contre les abus du

droit de propriété (. . . ) le commerceet l’industrie honnêtes contre lesmercantis, les classes moyennescontre les entreprises d’une

ploutocratie sans vergogne ». 1

La prétention à défendre les pe-tits patrons face aux gros, les entre-preneurs contre les spéculateurs,tout ça dans le cadre du système,est déjà là.

Aussitôt le nouveau gouverne-ment mis en place, une paniquebancaire se déclenche, ce qui ag-grave la crise et la pénurie budgé-taire. C’est alors qu’Édouard Her-riot emploie pour la première foisl’expression de « mur d’argent »,pour dénoncer le sabotage des mi-lieux bancaires et �nanciers, et no-tamment le rôle du conseil de ré-gence de la Banque de France, un

1. h�p://blogs.lesechos.fr/echos-d-hier/11-mai-1924-le-victoire-ambigue-du-cartel-des-gauches-a10511.html

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Débat stratégique 40

organisme semi-privé dirigé par lebanquier Rothschild et le métallur-giste Wendel.

Toutefois, on ne peut réduirecette crise à un complot de la �-nance. La fuite des capitaux étaitréelle, tout comme la dépréciationdu franc, la panique a gagné y com-pris les petits épargnants... C’est cequ’explique l’historien Jean-NoëlJeanneney 2, qui s’inscrit pourtantdans la pure lignée de cette gauchebourgeoise qui aboutit au PS d’au-jourd’hui. Le gouvernement Her-riot chute en avril 1925. Six gouver-nements du cartel lui succèdent etsont incapables de stabiliser la si-tuation économique, ce qui conduitau retour de Poincaré (alliance dela droite et des radicaux) en juillet1926. Cet échec montre l’impossi-bilité pour un gouvernement bour-geois de « gauche » de mettre enœuvre des mesures sociales signi-�catives, et donc les limites du vo-lontarisme dans le cadre capita-liste. Non pas simplement parceque les �nanciers n’en veulent pas,mais parce que ces mesures ac-croissent les dysfonctionnementsdu système capitaliste. Deux issuessont alors possibles : soit la lo-gique du système s’impose et lesmesures sont retirées, soit un gou-vernement révolutionnaire (c’est àdire un gouvernement porté par lamobilisation des masses ou issu decette dernière) prend des mesuresradicales pour mettre hors d’état denuire les capitalistes.

Il faut d’ailleurs noter quequelques mesures du cartel sontpassées, celles qui n’étaient pasvraiment structurelles et donc« digérables » par le système 3 :transfert des cendres de Jaurèsau Panthéon, reconnaissance de

l’URSS, une contre-o�ensive laïquetimide... ou même l’autorisationpour les fonctionnaires de se syn-diquer, et des amnisties pour desarrestations d’ouvriers et de pro-gressistes, Quant aux intérêts colo-nialistes, ils étaient bien défendus(répression au Maroc, en Syrie, auLiban...).

1936 : L’interventionnismedu Front populaire

Les partis conservateurs serontrenforcés pour un temps par cetéchec du « réformisme ». L’appli-cation de strictes politiques de ri-gueur (appelées alors « politiquesde dé�ation ») et de stabilisationmonétaire (le « franc Poincaré »sera �xé à l’or en 1928) reprendrontalors de plus belle, et le mouvementouvrier connaîtra un profond re-cul. 4 Mais après de nombreux sa-cri�ces subis, au lieu d’une amélio-ration, c’est la crise mondiale quivient frapper les exploités au débutdes années 1930.

Dans les milieux d’écono-mistes, les politiques classiques(dites de « laissez faire ») pro-voquent des remises en questionen raison des conséquences so-ciales désastreuses qui menacentla survie même du système. Lesthèses de Keynes ne sont pas vrai-ment connues en France (sa Théoriegénérale de l’emploi, de l’intérêt et dela monnaie sera publiée en françaisen 1942), ni même aux Etats-Unis(son ouvrage phare n’est publiéqu’en 1936, trois ans après le lan-cement du New Deal), mais l’in-terventionnisme étatique est déjàtenté aux États-Unis par Rooseveltdepuis 1933.

La « gauche » va épouser cetteécole économique, parce qu’elle

était idéale pour justi�er sa vo-lonté opportuniste de s’intégrerà l’État capitaliste. La SFIO serala plus créative dans l’élaborationd’un programme économique ré-formiste. Et cette fois, la SFIC (to-talement stalinisée) ne freinera pas,mais sera au contraire moteur pourl’adoption d’un programme avecles radicaux.

Dans les discussions qui pré-parent le Front populaire 5, LéonBlum constate entre les di�érentescomposantes « une entente sur lalutte anticrise par la re�ation, parl’accroissement de la consommationgénérale ». Et pour cela, la SFIO dé-fend la relance plutôt que l’austé-rité :

« Jusque-là, c’est de l’équilibrecomptable rigoureux du budgetqu’on espérait la renaissance

économique. C’est, au contraire, dela renaissance économique que nousattendons de bonnes �nances. »

Vincent Auriol

Mais les radicaux sont scep-tiques, et ne veulent pas d’un bud-get en dé�cit. Léon Blum argu-mentera en disant que ces mesuressont de nature à limiter la crise(les nationalisations partielles per-mettraient de diminuer les coûtsde production, le crédit pourraitêtre orienté vers l’achat de biens deconsommation. . . ). Mais tout en as-surant son parti qu’il n’y avait làaucun révisionnisme : ces nationa-lisations partielles avec indemnisa-tion des capitalistes (liées à « l’exer-cice du pouvoir » par le parti) nesont pas sur le même plan que les« socialisations » sans indemnisa-tion (liées à la « conquête du pou-voir » par le prolétariat, plus tard !).

Il est d’ailleurs intéressant denoter qu’alors que la SFIO (dans

2. h�p://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/quand-le-cartel-des-gauches-crevait-le-plafond_1421206.html3. Quelques a�ches de propagande de l’époque en disent long sur les oppositions de « valeurs » d’alors : h�p://www.

histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=7734. Le taux de syndicalisation était tombé à 7% en 1934, comme aujourd’hui.5. Michel Margairaz, L’État, les �nances et l’économie. Histoire d’une conversion 1932-1952 h�p://books.openedition.org/igpde/

2292?lang=fr

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laquelle existait un courant « pla-niste », pro-nationalisations) pro-posait sur le papier la « nationalisa-tion du crédit, des assurances et desgrandes industries monopolisées »,alors que la SFIC refusait en di-sant qu’il fallait « réunir le plusgrand nombre d’organisations et decitoyens ».

Le débat portait aussi sur la �s-calité. Les communistes mettaienten avant la « taxation du capital »,considérée comme « revendicationimmédiate », alors que socialisteset radicaux voulaient au contraireune « détente �scale » pour inci-ter les investissements. Pour au-tant, les communistes se souciaientde présenter leurs mesures commecompatibles avec le capitalisme.Ainsi ils précisaient que ce prélève-ment était « exceptionnel » et que :

« À un moment où les capitauxhésitent à s’investir, le prélèvementsur les grosses fortunes pour réaliserde grands travaux, loin d’être unefaute est une nécessité économique :il permet d’investir dans l’économienationale des capitaux nouveaux.Loin d’augmenter le chômage, ilcrée du travail et tout un nouveau

courant d’a�aires. »

Finalement, le programmen’inclura que la nationalisation des

industries de guerre ou encore laréglementation des milieux ban-quiers et la réorganisation de laBanque de France sans pour autantnationaliser le crédit. Cette mesurerevient donc à peu près au « pôlepublic bancaire » que propose leFront de gauche aujourd’hui 6.

Il est intéressant aussi deconstater que le débat sur la déva-luation du franc ressemble assez àdes débats actuels. O�ciellement,les deux partis ouvriers avaientpour position « ni dé�ation, ni dé-valuation », pour ne pas que lessalaires réels soient rognés par lahausse des prix. Les économistes dela SFIO étaient cependant très ten-tés par l’in�ation. . . si bien qu’il futconvenu lors d’une réunion secrèteentre socialistes et radicaux d’enacter le principe, sans le mention-ner dans le programme du Frontpopulaire.

Le Front populaire était unemanière pour le PCF (qui adopte àce moment-là le F de français) etla SFIO de canaliser dans les ins-titutions la mobilisation anti fas-ciste qui naissait au sein du mouve-ment ouvrier. Mais Au grand damdes vainqueurs, la victoire électo-rale fait éclater la grande grèvede juin 1936. Cette irruption destravailleur-se-s aurait pu débou-cher sur l’expropriation directe desgros capitalistes, et rendre ainsiobsolètes toutes ces lois écono-miques du système. C’en auraitété �ni des contradictions re�a-tion/dé�ation (politique de la de-mande / politique de l’o�re dirait-on aujourd’hui). Au lieu de cela,les bureaucrates mirent toute leurénergie pour que ce formidablemouvement soit calmé en toutehâte par des concessions (congéspayés, hausses de salaires, semaine

des 40h. . . ). 7

La stabilisation politique signi-�ait le retour à la soumission auxlois de ce système instable : l’aug-mentation des salaires fut absor-bée par la hausse des prix dès sep-tembre, les 40h ne furent jamais ap-pliquées, de nombreux riches par-taient en Suisse, Léon Blum an-nonça la « pause » des réformessociales en 1937. . . La réaction futincarnée de façon terrible par laguerre mondiale et le régime de Vi-chy.

Tirer les leçons du passépour montrer l’impasse duréformisme antilibéral

Ces retours historiques per-mettent de faire des constats et d’entirer les leçons, utiles dans le dé-bat idéologique avec le réformismed’aujourd’hui :

— L’austérité, les coupes dans lesdépenses publiques, les baissesd’impôts pour les patrons, lafrilosité à remettre en causela « liberté » des entreprisesne sont pas un simple choixque les politiques feraient parmitant d’autres, mais une tendancestructurelle sous le capitalismecar elles visent à maximiser letaux de pro�t. Cette même ten-dance est trop souvent présen-tée comme singulière sous lenom de « néolibéralisme » 8.

— La tentative d’élaborer des solu-tions à la crise dans le cadre dusystème est aussi une tendancerécurrente, et les courants detype keynésiens sont assez na-turellement l’expression princi-pale de ces tentatives.

— Ces tentatives de sortir descrises ou des marasmes capita-

6. Mitterrand en 1981 fut plus radical en nationalisant toutes les banques... avant d’imposer presque aussitôt le « tournant de larigueur ».

7. Voir notre brochure sur le Front populaire : h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=238. Il y a bien eu depuis les années 1980 un retournement idéologique et une profonde réorganisation du monde du travail, mais les

politiques économiques que l’on nous impose ne sont pas nouvelles.

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listes par des politiques de re-distribution ont échoué partout,et ces échecs ont entraîné desreculs terribles pour le mouve-ment ouvrier.

L’économie politique fait partieintégrante du terrain idéologique,sur lequel le réformisme doit êtrecombattu. Ceci est d’autant plusvrai si l’on prend du recul sur cequ’est le réformisme aujourd’hui.

Le vieux réformisme du mou-vement ouvrier visait à justi�er un« exercice du pouvoir » (bourgeois)tout en prétendant préparer le ter-rain à la révolution socialiste. Le ré-formisme du Front de Gauche n’a

plus vraiment à se justi�er devantun électorat ou une base militanteayant une conscience socialiste. Laconscience de classe a connu de telsreculs que ce réformisme est trèsproche d’un réformisme bourgeois,comme celui de Roosevelt.

Quant au Parti socialiste deFrançois Hollande, il n’a rien d’unparti réformiste, dans aucun sensque ce soit. Bien au contraire, ils’inscrit totalement dans la lignéedes partis bourgeois ordinaires quine cherchent qu’à servir au mieuxles intérêts des capitalistes.

En conséquence, il n’est pluspertinent de se contenter de dé-

noncer le réformisme sous l’anglede la « trahison » (il faudrait pourcela qu’il y ait des attentes socia-listes, une mémoire de ce que fai-saient les staliniens et les sociaux-démocrates, etc.). Il faut simultané-ment élaborer un vrai programmerévolutionnaire contre les capita-listes, et expliquer que les idéolo-gies fondées sur des réformes sontimpuissantes face à la crise du sys-tème. Pourtant, bien peu d’anti-capitalistes se sont attelés à cettetâche.

Julien (comité Jeunes TravailleursRP),

le 1eraoût 2014

DÉBAT STRATÉGIQUE

Intervention d’un militant du NPA Meuse àla réunion publique de Christian Piquet(Gauche unitaire) à Bar-le-Duc

Monsieur Picquet,1) La grève SNCF est en train

de mourir à petit feu sous les coupsdes directions syndicales qui onttout fait, à des degrés divers pourla stopper alors qu’elle pouvait êtrevictorieuse

Ainsi la CGT, présentée commele syndicat le plus virulent, a tou-jours refusé d’appeler au retrait puret simple du projet de loi.

La CGT appelait d’ailleurs à lareprise du travail un peu partout oùelle le pouvait dès le milieu de la

semaine dernière, c’est à dire là oùla base militante était la moins re-montée.

On apprend d’ailleurs dansle Canard enchaîné de mercredidernier que cette contre réformeavait été négociée depuis long-temps entre le gouvernement et laCGT.

C’est un véritable scandale !Et que fait le Front de gauche

auquel vous appartenez ? Eh bienil se comporte en parfait appendicede la CGT et le député André Chas-saigne du front de gauche, o�re uneporte de sortie au gouvernementen proposant un amendement mi-nable au projet de loi !

Un amendement qui ne changeabsolument rien au fond du projetvu qu’il ne modi�e qu’un sous ali-néa d’un des 19 articles de cette loi

scélérateC’est une trahison pure et

simple des cheminots.Si c’est ça la politique soit

disant indépendante du front degauche : une collusion avec le pou-voir, eh bien ne vous étonnez pasque des pelletées de voix aillent re-joindre le Front national.

2) Dans une contribution quevous avez faite récemment pourMarianne, trouvée sur votre blog,vous avez déclaré : « est à l’ordre dujour un nouveau rassemblement dela gauche pour une nouvelle majo-rité politique. Où le rose, le vert etle rouge uniraient leurs nuances auservice d’un changement radical decap ! » 1

Cette religion de l’unité àgauche que vous professez est pourmoi une impasse car l’histoire ré-

1. h�p://www.marianne.net/Le-Front-de-gauche-doit-retrouver-son-ambition-majoritaire_a239434.html?com&start=40

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International 43

cente et passée nous enseigne queça ne marche pas.

Que l’unité conduit immanqua-blement au compromis, puis à lacompromission, puis à la conni-vence tacite avec les sociaux libé-raux, c’est à dire avec le capita-lisme.

Aucun exemple qui n’ait mar-ché.

Alors que ce que vous appelez« sectarisme » qui n’est en fait quel’audace d’une position radicale etindépendante, eh bien c’est une dé-

marche politique qui n’est jamaisexpérimentée jusqu’au bout puis-qu’il y a toujours des gens commevous qui aspirent au pouvoir par lesurnes, et qui se rallient à ceux quisont plus à droite qu’eux.

Et cette politique politi-caillonne, c’est aussi ce qui faitle jeu du Front national.

Pour ma part, je me désolida-rise de cet unitarisme bêlant quinous mène dans l’impasse.

Il nous faut un vrai parti degauche, radical indépendant et ré-

volutionnaire, qui encourage etampli�e les luttes sociales et éco-logiques plutôt que de les freineren disant « stop, allez voter ! » ou« rentrez chez vous et laissez nousnégocier ».

Mais aujourd’hui hélas, ce partin’existe pas.

Pourquoi ne pas s’atteler à enreconstruire un plutôt que de cou-rir après des chimères électora-listes ?

Un militant NPA de la Meuze),le 23 juin 2014

INTERNATIONAL

100 ans après, toujours la même barbariecapitaliste

100 ans après le début de cetteboucherie qu’a été la 1ère GuerreMondiale, le capitalisme continuede répandre la barbarie à l’échelleplanétaire.

En Afrique de l’Ouest, fauted’accès à des soins de qualité, plusde 1500 personnes sont mortes etplus de 3000 autres sont atteintesdu virus Ebola, qui se propagede manière incontrôlée. C’est l’avi-dité des grands groupes pharma-ceutiques qui a empêché tout tra-vail de recherche sérieux pour ob-tenir un antidote capable d’anéan-tir ce virus ; ce sont les politiques

des impérialistes en Afrique rui-nant les populations, jouant un dic-tateur contre un autre, une ethniecontre une autre ; pour faire mainbasse sur les ressources locales. . .Ce sont elles qui sont les premièresresponsables de ces milliers de vic-times.

Sur d’autres continents, la fo-lie militariste laisse derrière elleson lot de morts, de mutilés, dedestructions. Plus de 2000 morts,11500 blessés, 475000 déplacés lorsde l’attaque par Tsahal de Gazaau cours de l’opération « BordureProtectrice » ; le chaos syrien s’estétendu à l’Irak, et déborde par mo-ments au Liban 1.

En Ukraine, pendant que l’ar-mée ukrainienne soutenue par l’UEet l’OTAN pilonne les populationsdans le Donbass, la Russie avanceses pions en appuyant les insurgésde l’est.

Ce sont les impérialistes, parleur instrumentalisation de ré-voltes populaires, qui sont les pre-

miers responsables de ce chaos.Par leur volonté de s’ouvrir desmarchés, d’accéder aux ressourcesnaturelles, d’élargir leurs zonesd’in�uence.

En Syrie en soutenant l’oppo-sition la plus réactionnaire à Ba-char el Assad, en Ukraine en ins-trumentalisant quasi symétrique-ment Maïdan et le mouvementdans l’Est. Plus que jamais, noussommes dans le camp de la classeouvrière, des classes populaires deces pays, contre leurs gouverne-ments, contre les impérialistes quiveulent les enchaîner, contre lesguerres.

Car les manipulations des puis-sants de ce monde �nissent parcréer des monstres : L’État Isla-mique à cheval sur la Syrie et l’Irakqui multiplie les crimes de guerre etvient de proclamer un califat isla-mique ; et contre lequel les kurdescombattent héroïquement dans lecadre de leur révolution de Rojava.Il y a aussi Boko Haram, autre

1. h�p://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/08/28/nouveaux-combats-au-liban-a-la-frontiere-avec-la-syrie_4478418_3218.html

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secte islamiste qui contrôle désor-mais le nord du Nigeria, multipliantles exactions dont le très média-tique enlèvement de centaines delycéennes de Chibook, sans oublierles islamistes du Sahel et ceux quipro�tent du cas actuel en Lybie,s’installant d’ailleurs dans les mon-tagnes tunisiennes frontalières.

Pour mettre en échec les capita-listes, les impérialismes de chaquebloc (et en premier lieu le notre), ilnous faudra reprendre le chemin dela lutte des classes.

Comme aux États-Unis où lesdockers de la côte ouest ont blo-qué des bateaux israeliens en sou-

tien à Gaza, où les salariés des fast-food se battent massivement pourdes augmentations de salaires et ledroit de se syndiquer...

Comme en Amérique Latine,où après que le Brésil ait été secouépar des mobilisations et des grèvesmassives comme celle du métro deRio pendant la Coupe du Monde,c’est autour de l’Argentine d’êtretraversée par une forte con�ictua-lité ouvrière (poussée de l’extrême-gauche avec les excellents résul-tats du FIT aux dernières élections ;des équipes syndicales combativeset antibureaucratiques ; grèves gé-nérales avec une forte participa-

tion de l’industrie, contrôle ouvrierà Donnelley. . . ) alors que le paysest au bord de la cessation de paie-ments, suite à la décision d’un jugeaméricain de donner raison à deuxfonds de pension rapaces qui ontspéculé sur la dette argentine.

Reprendre le chemin de la luttedes classes, pour arracher le pou-voir aux capitalistes et reprendreen main le cour de nos vies ; avantque la folie militariste ne nous en-traine dans les abîmes. Socialismeou barbarie !

Juno Smith,le 03 septembre 2014

INTERNATIONAL

États-Unis : Mariage pour touTEs et égalitédes droits, où en est on ?

Pour une mise en situation

Au 1er janvier 2014, 16 états(le Massachusetts, le Connecti-cut, l’Iowa, le New Hampshire, leMaine, le Vermont, l’état de NewYork, l’état de Washington, le Ma-

ryland, le Rhode Island, le Dela-ware, le Minnesota, la Californie,le New Jersey, Hawaï, l’Illinois, leNouveau-Mexique et le district fé-déral de Washington d.c, capitaledes États-Unis) autorisaient le ma-riage entre personnes du même

sexe, tandis que 27 autres l’interdi-saient dans leur constitution, s’ap-puyant sur le « Defense of MariageAct ». Cette loi est une loi fédé-rale, adoptée en 1996 et dé�nissantle mariage comme l’union d’unhomme et d’une femme et a été par-

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tiellement invalidée le 26 juin 2013par la Cour Suprême des États-Unis 1. Il aura fallu près de 10 anspour voir adopter le mariage pourtouTEs dans ces 17 états, depuisle vote fondateur du Massachusettsjusqu’à celui du Nouveau-Mexique,avec des interruptions comme enCalifornie de 2008 à 2013 ou dansle Maine de 2009 à 2012.

Aujourd’hui, de nouvelles dé-cisions de justice, suite à des pro-cédures engagées par des organi-sations LGBTI locales comme fé-dérales à l’image d’HRC (HumanRights Campaign) ont remis cettequestion sur le devant de la scène.Après avoir patiné, la mobilisationpour l’égalité des droits retrouveun second sou�e, une nouvelle vi-sibilité. Elle est passée par exemplepar le coming-out de personnalités,comme Ellen Page, actrice connuepour ses rôles dans Juno, Incep-tion, et X-Men, le 14 février lorsde la conférence « Time to thrive »organisée par HRC 2, celui de Mi-chael Sam qui va devenir le pre-mier joueur de football américainprofessionnel ouvertement homo-sexuel après son recrutement pourla prochaine saison par les Saint-Louis Rams 3, celui de Derrick Gor-don (premier basketteur du cham-pionnat universitaire NCAA), pré-cédés l’année précédente par ceuxdes actrices Maria Bello et JodieFoster, de Jason Collins (basketteurdes New Jersey Nets, et premiersportif ouvertement gay à évoluerdans un des 4 sports professionnelsmajeurs). . .

Un combat avant toutjuridique

Pour commencer, il nous fautfaire un détour rapide pour expli-

quer les spéci�cités du système ju-diciaire américain, son fonctionne-ment, sa structuration, ses juris-prudences. . .

L’instance de base dans chaqueétat est le comté, une division terri-toriale englobant une ou plusieursmunicipales. C’est la plus répandue(elle se nomme paroisse en Loui-siane, arrondissement en Alaska),même s’il existe des cas spéci-�ques : les cinq arrondissements dela ville de New York, les villes in-dépendantes, les zones de recen-sements et autres territoires nonorganisés (c’est à dire sans gou-vernement local) surtout situéesen Alaska. . . Dans chaque comtése trouvent un tribunal local oùles magistrats sont des fonction-naires civils possédant une compé-tence judiciaire déléguée en vertudu droit local en vigueur. Au des-sus, dans chaque état, se trouveau moins un tribunal fédéral, ju-geant tout ce qui relève des lois fé-dérales, et leurs adéquations avecles décisions locales. Le niveau su-périeur est les cours d’appel fé-dérales, au nombre de 13 (appe-lées circuits), chacune regroupantplusieurs états. Elles connaissentchaque décision judiciaire prise enamont par les cours de district dé-pendant de leurs juridictions, etpeuvent in�rmer ou con�rmer enappel celles-ci. En�n tout au som-met de la hiérarchie, indépendantede l’exécutif se trouve la Cour Su-prême des États-Unis, où siègent 9magistrats nommés à vie par le Pré-sident après approbation par le Sé-nat. C’est elle qui dé�nit la validitédes lois et des actes administratifs,aussi bien au niveau fédéral qu’auniveau de chaque état, en fonctionde la Constitution.

Ceux ci interprètent à chaquea�aire qui leur est portée la Consti-tution et ses amendements, et lejugement qui est rendu peut êtrecassé plus tard, suivant le mou-vement général de la société. Parexemple, « l’égale protection deslois » (présente dans le 5e amende-ment au niveau fédéral et dans le14e au niveau des états) a pu ser-vir d’abord à justi�er la ségréga-tion raciale et son « séparés maiségaux » (Arrêt Plessy vs Ferguson,1896) qui aura été cassé à partir de1954 (Arrêt Brown vs Board of Edu-cation of Topeka) imposant la dé-ségrégation dans l’éducation. Elle aservi en 1967 à bannir l’interdictiondes mariages dits interraciaux (Ar-rêt Loving vs Virginia), tout commeen 1973 (Arrêt Roe vs Wade) à em-pêcher les entraves légales au droità l’avortement. . .

C’est donc en invoquant ce fa-meux 14e amendement que les mi-litantEs LGBTI attaquent en jus-tice les constitutions des di�érentsétats pour discriminations.

Une nouvelle victoire a étéremportée le 21 août 2014 en Flo-ride 4 après la décision du juge fé-déral de déclarer anticonstitution-nel l’amendement adopté par l’étatvisant à interdire le mariage homo-sexuel. Dans cet état, les mêmes ju-gements avaient déjà été rendus auniveau de quatre comtés, entre le17 juillet et le 4 août 2014 : Mon-roe, Miami-Dade, Broward, et PalmBeach ; ce qui a très probablementservi à faire pression sur le tribunalfédéral.

C’est la 21e décision de justicefavorable au mariage pour touTEsdepuis la décision historique de laCour Suprême censurant partielle-ment la loi sur la défense du ma-

1. urlhttp ://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/06/26/etats-unis-la-cour-supreme-donne-raison-aux-defenseurs-du-mariage-homosexuel_3437118_3222.html

2. h�ps://www.youtube.com/watch?v=oy5TENjoTOg3. h�p://www.leparisien.fr/sports/football-americain-michael-sam-premier-joueur-gay-recrute-par-une-equipe-pro-11-05-2014-3831877.

php4. h�p://www.hrc.org/blog/entry/federal-judge-strikes-down-floridas-ban-on-marriage-equality

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riage vue plus haut.La veille, le 20 août, les juges de

l’Indiana déclaraient anticonstitu-tionnel la volonté de l’état de ne pasreconnaître les mariages entre per-sonnes de même sexe qui auraientété promulgués dans d’autres états.Cela fait suite à un premier juge-ment le 25 juin qui autorisait leshomosexuelLEs à se marier au seinde l’Indiana. Suite à l’interventiondu gouverneur de l’état, la questionpasse donc au niveau de la courd’appel du 7e circuit (recoupant leWisconsin, le Minnesota, l’Illinoiset l’Indiana) à partir du 26 août.

Depuis le début de l’année, cesrestrictions ont été cassées dansl’Oregon (le 20 mai), en Pennsyl-vanie (le 21 mai), autorisant ainsice type d’unions ; mais aussi dansl’Oklahoma, la Virginie, le Texas,l’Utah, l’Idaho, le Tennessee, le Co-lorado, l’Arkansas, le Wisconsin,le Kentucky, et le Michigan ; en-traînant là aussi des appels versl’échelon supérieur et suspendantainsi temporairement la délivrancedes papiers nécessaires au mariagepour les couples.

Au niveau des décisions descours d’appel, on peut noter quedans trois cas jugés, celles-ci ontdonné raison aux organisationsLGBTI (Virginie, Utah, Oklahoma)et en appellent à l’intervention dela Cour Suprême. Les auditions enappel pour les cas des autres étatss’échelonnent au fur et à mesure lelong d’un calendrier qui a débutéle 6 août et qui se poursuivra jus-qu’en septembre. Le 6e circuit estla seule cour d’appel fédérale dontle jugement s’appliquera à tous lesétats de sa juridiction, à savoir leTennessee, le Kentucky, l’Ohio, etle Michigan. Il y a donc en tout 70

procédures judiciaires, dans 30 des31 états qui interdisent les mariageshomosexuels.

Il est ainsi plus que vraisem-blable que d’autres décisions fa-vorables aux LGBTI d’Amériquesoient prises dans les prochainessemaines, tant au niveau des étatsque des cours d’appel fédérales, etau �nal devant la Cour Suprême ;tant le mouvement semble irréver-sible, soutenu par la majorité de lapopulation 5, et au vu de la juris-prudence américaine qui fait quela loi, l’interprétation de la Consti-tution �nit par suivre le fait, pars’adapter aux évolutions de la so-ciété. . .

D’autres avancées. . . et lacolère des réactionnaires

De la même manière, la nou-velle visibilité des LGBTI a pousséles politiques à adopter de nou-velles lois, de nouvelles disposi-tions pour les LGBTI, sous la pres-sion de ceux-ci. Ainsi, le 26 juillet,Barack Obama a �ni par signerune loi interdisant les discrimina-tions au travail sous des prétextesd’orientation sexuelle ou d’identitéde genre.

Le même type d’actions a étéengagée au niveau des collectivitéslocales et des municipalités. Ainsice sont aujourd’hui plus de 200villes et comtés qui ont signé desordonnances pour lutter contre cesoppressions 6, que ce soit dans lesvilles réputées les plus progres-sistes comme Denver, Minneapo-lis, San Francisco, Seattle ou NewYork ; mais également des cités ausein de régions bien plus conser-vatrices comme Coeur d’Alène etBoise dans l’Idaho ou Salt Lake Citydans l’Utah, en plein pays mormon.

Malheureusement, les homo-phobes aussi se mobilisent, es-sayant de s’appuyer ici sur lesmoyens et la logistique des églisesprotestantes, souvent proches de laConvention Baptiste du Sud, hé-gémonique dans la « Bible Belt »,la « Ceinture de la Bible », ber-ceau et principale zone d’in�uencede la droite républicaine ultracon-servatrice. . . Malgré cela, lors deleur Marche pour le Mariage à Wa-shington le 19 juin, ils n’étaient que2000 7. . . avec la présence de Lu-dovine de La Rochère, présidentede La Manif Pour Tous, jamais ab-sente quand il s’agit d’un rassem-blement homophobe. . . Sans ou-blier la sinistre Westboro BaptistChurch, petite secte intégriste pro-testante très active voire activiste ;et dont le slogan le plus connuest « God hates fags » (Dieu dé-teste les tapettes), connue pourses perturbations d’enterrementsde soldats 8 ou de victimes decrimes de masse comme à SandyHook, expliquant que ces mortssont « une vengeance divine pourpunir les USA de faire la promotionde l’homosexualité ». . . Cela dit,chacune de leurs apparitions pu-bliques se solde fréquemment pardes contre-manifestations de pro-testation, comme ce 16 février 2014où une marée humaine a fait unegrande chaîne en soutien à Mi-chael Sam pour son retour dans sonUniversité du Missouri après soncoming-out 9.

Vers l’unité des tou-te-s lesopprimé-e-s et exploité-e-s

Ces dernières années ont aussiété celles d’une certaine con�ictua-lité sociale aux États-Unis. Il y a eu

5. h�p://americansformarriageequality.org/polling6. h�p://www.hrc.org/resources/entry/cities-and-counties-with-non-discrimination-ordinances-that-include-gender7. h�p://www.lefigaro.fr/flash-actu/2014/06/19/97001-20140619FILWWW00428-washington-manif-contre-le-mariage-gay.

php8. h�p://www.msnbc.msn.com/id/12071434/9. Voir h�p://www.hu�ingtonpost.com/2014/02/16/westboro-baptist-church-michael-sam_n_4798837.html et h�ps://

www.youtube.com/watch?v=bYvPKpU6FXg

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l’élection de Kshama Sawant, can-didate pour le parti trotskyste So-cialist Alternative à Seattle et ledéveloppement de celui-ci dans denouvelles villes. Il y a égalementles mouvements des salariés de larestauration rapide pour des aug-mentations de salaires et le droitde se syndiquer, les grèves chezle géant WalMart, les Moral Mon-days en Géorgie et en Caroline duSud pour la justice sociale et contreles budgets d’austérité, les luttesdes fonctionnaires du Wisconsinen 2011, celles des enseignants,

pour les droits des immigrés. Descombats plus locaux contre la frac-turation hydraulique et les gaz deschistes. Le blocage par les dockersdes ports de la côte ouest en soli-darité avec Gaza ainsi que les ma-nifestations de masse qui les ontaccompagné. Nous n’oublions pasnon plus en�n les émeutes en coursà Ferguson dans le Missouri aprèsle meurtre de deux noirs par la po-lice locale ; ni la montée au créneaude centaines d’écrivains américainscontre Amazon et son modèle quicherche à faire davantage de pro-

�ts sur le dos des auteurs. . . Espé-rons que les militant-e-s anticapita-listes états-uniens sauront prendretoute leur place dans ces mobilisa-tions, en proposant un programmerévolutionnaire fondé sur la luttede classe tout en luttant aux cô-tés de tou-te-s les opprimé-e-s pourleurs droits, leur o�rant une autreperspective que le soutien au PartiDémocrate et aux Républicains lesplus progressistes.

Juno Smith,le 31 août 2014

INTERNATIONAL

31es Rencontres internationales de jeunes

Au début du mois d’août sesont déroulées les 31es RIJ, qui ontréuni des jeunes des organisationsliées au Secrétariat uni�é de laQuatrième internationale (la prin-cipale organisation internationaleissue du trotskisme). Ces notes enrestituent quelques éléments poli-tiques.

Une occasion importante defaire vivre

l’internationalisme

Il faut commencer par sou-ligner que les RIJ sont un desprincipaux, sinon le plus impor-tant des rassemblements interna-tionaux d’anticapitalistes. Il estdonc très positif d’arriver à main-tenir ce cadre de discussion mal-

gré la faiblesse générale de l’ex-trême gauche. On doit aussi sou-ligner que même s’il faut consta-ter lucidement qu’il s’agit essen-tiellement d’un rassemblement dejeunes Européens – ce qui risqueforcément de déformer la vision dumonde que nous avons – la pré-occupation d’aider matériellementà la venue de camarades d’autrespays est réelle. Nous saluons égale-

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ment le fait que des camarades ap-partenant à d’autres courants inter-nationaux puissent être présents.

L’absence d’une stratégiecommune

Cela dit, on ne peut pas plon-ger dans un œcuménisme béat pourpasser sous silence les profondesdivergences politiques. Malheureu-sement, c’est une tendance géné-rale, qui semble d’ailleurs existerdans la plupart des organisations.Les divergences sont pourtant bienréelles, et elles ne touchent pas qu’àdes points de tactique secondaires,mais pour beaucoup à des straté-gies di�érentes concernant le typede parti à construire, la séparationclaire avec les réformistes. . .

Il est évident que l’orienta-tion est très di�érente entre, parexemple, l’orientation majoritaireau Danemark (dans le SAP 1), etl’orientation majoritaire en Grèce(dans l’OKDE-Spartakos 2) :

— Le SAP est invisibilisé dansl’Alliance Rouge-Verte (pas detravail ouvert de tendance ré-volutionnaire), qui n’a pas deprogramme révolutionnaire, etdont les députés vont jusqu’àvoter un budget bourgeois (ceuxde 2011 et de 2012). Le critère�ou établi est : « s’il y a un pro-grès social, on vote pour le bud-get ». Dans une telle logique,un budget comprenant quelqueseuros de subventions en moinsau patronat pourrait être voté. . .

— L’OKDE participe à un frontanticapitaliste (Antarsya), et

y bataille pour que l’orienta-tion soit la plus correcte pos-sible. Par exemple en résistantà la pression de la composantemajoritaire (NAR 3, force issuedu KKE) qui voudrait faire dela rupture avec l’Union euro-péenne une « étape » avant larupture anticapitaliste.

Les camarades d’Izquierda an-ticapitalista (Etat espagnol) parti-cipent quant à eux à un nouveauparti, Podemos, qui est dominé parune �gure populiste de gauche (Pa-blo Iglesias), et qui sont balancésentre les succès électoraux que celapermet à court terme et le risquede semer des illusions réformistesqu’ils perçoivent. Une divergenced’une autre nature existe avec lesjeunes de Communia Net (Italie),qui étaient également présents, quiont préféré la forme d’un réseau àcelui d’un parti 4.

On le voit, il n’y a pas besoind’être des passionnés de polémiquepour trouver des désaccords, et cesdésaccords sont d’une importancecroissante, étant donné que la pé-riode de marasme du capitalismeet de tendances à la crise raviventl’alternative « socialisme ou barba-rie ».

De nombreux pointsd’accord avec l’OKDE

Spartakos

Nous avons pu constater quesur de nombreux points, l’OKDESpartakos défend des positions quela tendance CLAIRE défend de fa-çon bien isolée dans le NPA. Parexemple :

— L’insistance sur la distinctionprogrammatique entre l’antili-béralisme et l’anticapitalisme(les camarades de l’OKDE ontanimé un atelier avec cet inti-tulé). 5

— L’opposition claire à l’agres-sion du gouvernement de Kievcontre les insurgés de l’Est (quine se réduisent pas plus à despions de Poutine que les mani-festants de Maïdan ne se rédui-saient à des pions des occiden-taux). Les camarades ont animéun atelier nommé « La situationen Ukraine et l’impérialisme ré-gional ». 6

— La nécessité d’intégrer la rup-ture avec l’Union européenne etl’euro à notre programme révo-lutionnaire. 7

Vers une nécessaireclari�cation

Il est évident que certains dé-bats devront être tranchés dans unavenir proche. Très probablement,comme cela s’est déjà produit dansl’histoire, ce sont des secoussesbrusques de la lutte des classes quivont nous y obliger. Mais nous pen-sons qu’il est du devoir des révo-lutionnaires de ne pas attendre etsubir ces changements. Apprendreà débattre à la fois fraternellementet ouvertement n’est pas spon-tané. Les non-dits se transformentsouvent, quand ils recouvrent desécarts qui se creusent, en tensionsexagérées entre camarades, à desblocs a�nitaires qui remplacentdes débats précis par des procèsd’intention, voire des invectives.

1. Parti socialiste des travailleurs : h�p://www.sap-fi.dk2. Organisation des communistes internationalistes de Grèce : h�p://www.okde.org3. Nouveau courant de gauche : http ://www.narnet.gr4. Voir notre article : Italie : « Crise » ou « �n » du mouvement ouvrier traditionnel ? h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.

php?id=5855. Voir notre brochure : Antilibéralisme, keynésianisme... une critique marxiste h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=

716. Voir nos contributions : h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=all&keyword=Ukraine7. Voir nos contributions : h�p://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=all&keyword=Europe

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Tout cela nous semble con�rmépar les guerres de tranchées qui semettent en place au sein du NPA et

du secteur jeune. Nous reviendronssur ces débats dans de prochainescontributions, dans l’optique d’uncongrès du NPA (2015) qui soit le

plus constructif possible.

Julien (comité Jeunes TravailleursRP),

le 31 août 2014

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Brochures de la Tendance CLAIRE du NPA

? Brochures thématiques ?

— Textes pour la lutte féministe révolutionnaire

— Textes sur la jeunesse

— Textes sur l’art et la culture

— Les analyses stimulantes de Bernard Friot... et leurs limites

— Crise et lutte de classes en Grèce (2010-2012)

— Écologie, capitalisme, révolution

? Cahiers d’histoire des révolutions ?

— Mai-juin 68 en France : grève générale mais situation révolutionnaire trahie

— La révolution espagnole (1936-1939)

— Les révolutions russes

— Révolution et contre-révolution en Allemagne (1918-1933)

— Le Front populaire... ou la trahison des dirigeants socialistes et communistes

— Les révolutions chinoises

? Pour l’orientation ?

— Orientations pour la lutte de classe en France (2009-2011)

— Positions internationalistes et anti-impérialistes (2009-2011)

— La lutte pour un NPA révolutionnaire depuis le congrès fondateur

— Mélenchon : un sauveur pour les travailleurs ? (analyse critique du programme du FdG)

— Antilibéralisme, keynésianisme... une critique marxiste

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Sommaire

Édito . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 2)— Une crise politique qui s’approfondit . . . . . . . . . . . . . . (p. 2)

France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 4)— Valls II : après les cadeaux aux patrons, les « réformes struc-turelles » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 4)— Agriculteurs : les revenus s’e�ondrent . . . . . . . . . . . . . (p. 8)— Combattre la réforme territoriale ! . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 9)— Délabrement du réseau SNCF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 11)— La Cour des comptes : un « arbitre » juge et partie au servicedes exploiteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 13)

Lutte de classes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 14)— Lutte des intermittent-e-s et précaires. . . . . . . . . . . . (p. 14)— Cheminot-e-s et intermittent-e-s montrent la voie ! (p. 19)— Chasseur de prime . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 21)

NPA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 23)— Pour sortir le parti de la crise, il faut porter un projet révo-lutionnaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 23)— Pour écologie révolutionnaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 28)— Bilan du CPN de juillet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 29)— SNJ du 21 juin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 31)

Culture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 32)— Sur les enjeux de classes de l’écriture littéraire . . . . (p. 32)— Jimmy’s Hall, dernier chef-d’œuvre de Ken Loach . (p. 34)

Débat stratégique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 36)— Lip, les patrons de gauche et l’autogestion . . . . . . . . (p. 36)— Retours historiques sur le réformisme antilibéral « degauche » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 39)— Intervention d’un militant NPA Meuse à la réunion pu-blique de C. Piquet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 42)

International . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 43)— 100 ans après, toujours la même barbarie capitaliste (p. 43)— États-Unis : Mariage pour touTEs et égalité desdroits. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (p. 44)— 31es Rencontres internationales de jeunes . . . . . . . . . (p. 47)

Qui sommes nous ?

La Tendance CLAIRE du NPA (pour leCommunisme, la Lutte Auto-organisée,Internationaliste et RévolutionnairE) aété fondée le 14 février 2009, au len-demain du congrès fondation du NPA,par les militant-e-s venant de l’ex-GroupeCRI, certain-e-s de l’ex-LCR et d’autressans parti auparavant. Sa base est consti-tuée par le programme fondateur de laIVe Internationale, par les textes soumisaux AG électives et au congrès fondateurdu NPA et par l’ensemble de ses élabora-tions publiées depuis.

La Tendance CLAIRE a initié avecd’autres camarades la plateforme 4 lorsdu congrès du NPA de février 2011 (3,7%des voix) et, avec le CCR, la plateforme Zlors du congrès de février 2013 (9% desvoix).

Tout en contribuant résolument àconstruire le NPA dans la classe ouvrièreet la jeunesse, la TC fait des propo-sitions alternatives orientation miseen œuvre par la direction majoritaire.Elle estime notamment que le refusde trancher entre projet d’un véritableparti révolutionnaire et projet d’unerecomposition de la gauche de la gaucheest origine de la crise du NPA et nécessitede surmonter les importantes limites etambigues des textes fondateurs. La TCpoursuit son combat pour une grandeTendance révolutionnaire, pour un NPArévolutionnaire démocratique et ouvertqui donne la priorité lutte des classeset porte un programme de transitionaxé sur l’objectif du gouvernement destravailleurs et des travailleuses.

La Tendance CLAIRE du NPA édite lebulletin Au CLAIR de la lutte (N ISSN :2101-6135). Le comité de rédaction estcomposé d’Anne Brassac, Nicolas Faure,Laura Fonteyn, Gaston Lefranc, PaulineMériot, Antoni Mivani, Nina Pradier, JeanVeymont et Ludovic Wolfgang, respon-sable de la publication. Des pages detribune libre sont ouvertes aux lecteursaprès accord du comité de rédaction.

— Site du NPA : h�p://www.npa2009.org

— Site de la Tendance CLAIRE du NPA :h�p://tendanceclaire.npa.free.fr

— Courriel : [email protected]

— Téléphone : 06 64 91 49 63