pierre teilhard de chardin - furet du nord

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Nicole Timbal Pierre Teilhard de Chardin Un homme de Dieu au cœur de la matière

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Nicole Timbal

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Tim

balPierre Teilhard de Chardin

À travers l’ensemble des écrits de Pierre Teilhard de Chardin,Nicole Timbal dresse le portrait-souvenir de celui qui a été pourelle un initiateur, un guide, un compagnon spirituel. Une valse àquatre temps qui nous fait découvrir successivement un Teilhard« baptisé dans le réel » au contact de la Grande Guerre, un jésuitequi manifeste son désir de faire passer « son évangile » dans lemonde en dénonçant les frilosités de l’Église d’alors, un visionnaireaffirmant sa fidélité rénovatrice aux fondamentaux de la foi chré-tienne et un prêtre pieux, fervent et d’un charisme exceptionnel.Voici une approche simple et pleine de chaleur des points essentielsde la pensée teilhardienne concentrés dans un livre accessible etpropre à toucher un public hésitant à le découvrir. Cette prome -nade méditative à travers les textes de Teilhard démontre quellepuissance de vie son œuvre recèle aujourd’hui encore.

Nicole TimbalNicole Timbal (1936-2013) a découvert le Christ au lycée, notammentau travers des œuvres du P. Teilhard de Chardin. Après ses études depharmacie et de biologie, elle a assumé de nombreuses responsa -bilités en paroisse. Elle a publié plusieurs ouvrages dont deux autressur Teilhard : Teilhard de Chardin, au feu de l’amitié (2009) et Lerosaire. Un chemin de contemplation. Méditation à deux voix avec Teilhard de Chardin (2010).

Pierre Teilhard de Chardin

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9 782873 565824

ISBN 978-2-87356-582-4Prix TTC : 24,50 €

Un homme de Dieuau cœur de la matière

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Nicole Timbal

PierreTeilhard de Chardin

Un homme de Dieuau cœur de la matière

Préface de François Euvé s.j.Postface de Thierry Magnin

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© 2015, Éditions jésuitesBelgique : 7, rue Blondeau, 5000 NamurFrance : 14, rue d’Assas, 75006 Pariswww.editionsjesuites.com

Dépôt légal : D.2015, 4323.22

ISBN : 978-2-87356-582-4

Maquette : Jean-Marie Schwartz

En couverture et à la page 5 : La messe sur le monde, encre originale deMarie Bayon de la Tour.

Imprimé en Belgique

Du même auteurLa Prière, chemin de joie, Éditions des Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2007.

Teilhard de Chardin, au feu de l’amitié, Éditions des Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2009.

Le Rosaire, un chemin de contemplation. Méditation à deux voix avec Teilhardde Chardin, Éditions des Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2010.

Les Anges, messagers de lumière, Éditions des Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier,2011.

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«On n’écrit jamais pour soi, mais bien pour faire partagernos approches quand vient le moment où, après une

lente maturation, elles nous enveloppent de toutes parts, noussubmergent, comme les vagues à l’assaut du sable blond, à lamarée montante et qu’on sent l’urgence de transmettre un message ! »

Cette phrase de Nicole Timbal (p. 229) est une clé pourentrer dans la méditation qu’elle nous livre au gré de ce nouvelouvrage sur celui qui a été pour elle un initiateur, un guide, uncompagnon spirituel. On a tant écrit sur Teilhard que toutnouveau livre, tout nouvel article, tout nouveau texte pourraitsembler de la redite, une répétition d’idées déjà connues sur uneœuvre labourée en tous sens. Mais l’essentiel n’est justement pasdans les idées, les systèmes, aussi complexes, élaborés et subtils

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soient-ils, mais dans ce que l’œuvre est encore capable de nouscommuniquer aujourd’hui. La puissance de vie qui animel’œuvre de Pierre Teilhard de Chardin est contagieuse au pointde donner la parole à celui ou à celle qui la lit avec attention,sous des formes qui seront toujours neuves parce qu’elles procèdentd’une rencontre. C’est ce qui donne à l’ouvrage sa tonalité trèspersonnelle, car il est issu d’une expérience singulière. Chaquerencontre, s’il s’agit bien d’une rencontre personnelle, est unique,comme l’est au plus haut point la Rencontre ultime, celle quimet en présence de la Vie. Il y a quelque chose d’irrésistible,comme « les vagues à l’assaut du sable blond », ce spectacle dela mer, si familier à Nicole Timbal, quelque chose qui submerge,qui ne peut laisser indifférent à moins de vouloir rester extérieur.On ne peut s’empêcher d’évoquer les premières lignes de « LaVie cosmique », premier texte édité de Teilhard, écrit à la veilled’un assaut d’où il n’était pas sûr de revenir : « J’écris ces lignespar exubérance de vie, et par besoin de vivre. »

C’est un parcours qui est proposé ici, une promenade médi-tative à l’écoute des textes ou, plus justement, à l’écoute del’homme à travers les textes. Le parcours est en même tempschronologique et thématique, évitant à la fois la simple linéaritédu récit qui n’échappe pas toujours à l’anecdote et la systématicitéd’un discours trop ordonné, infidèle aux sinuosités de la vie.Bien que fortement inscrit dans une longue tradition, l’itinéraireteilhardien n’est pas déterminé au commencement. Fidèle à ladémarche ignatienne, il est sensible aux « circonstances », cesévénements dont la survenue semble fortuite, mais auxquels unregard rétrospectif est capable de donner sens. Sans doute certaines

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pages de Teilhard frôlent-elles parfois le « système », mais ce nesont pas les meilleures (de même qu’il est toujours dangereux detrouver dans son œuvre la réponse à toutes nos questions : c’està nous aujourd’hui qu’il revient d’élaborer nos propres réponses).

Il est pertinent de commencer par le « baptême dans le réel »que fut la Première Guerre mondiale, confrontation à la violenceet à la mort, tout autant qu’à la mesquinerie et à la fraternité.L’aristocrate Teilhard de Chardin découvre les hommes detroupe, leur vulgarité et leur générosité. Le religieux découvrel’indifférence ou d’autres formes de piété (l’islam). Le jeunehomme au parcours lisse découvre le fracas des obus, les blessésmutilés et leurs cris, l’odeur de la mort. Entre 1914 et 1918, c’estun monde qui disparaît brutalement. La « Belle Époque » estenterrée dans les tranchées de Douaumont. Ce n’est pas seulementla république bourgeoise (et anticléricale), c’est aussi la chrétientéqui s’efface dans l’affrontement des grandes nations de l’Europechrétienne. Du fait de son éducation et de son parcours, Teilhardne peut pas ne pas ressentir profondément cet effondrement. Ilpourrait perdre pied comme bien d’autres, se réfugier dans l’ab-surde « dada » ou se crisper dans la défense réactionnaire desvaleurs du passé. Mais il pressent que l’issue est « en avant »,« au-delà des rapides », écrira-t-il quelques années plus tard.« Ne pas se laisser dévorer par l’absurde », écrit Nicole Timbal(p. 92), autrement dit, faire confiance en la vie, une confiancequi s’impose avant de pouvoir la motiver par l’expérience dumonde. La montée vers la lumière suppose la traversée de lanuit.

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Pas de refuge non plus dans la « spiritualité », dans un « au-delà » imaginaire, même s’il est revêtu d’ornements chrétiens.Pour Teilhard, la foi est christologique, c’est-à-dire incarnée.Nicole Timbal souligne à juste titre le christocentrisme teilhar-dien, son sens profond de l’incarnation qui lui donne son assise.La personne du Christ est l’axe du christianisme, sans lequel lespratiques, les rites, la morale n’ont plus de sens. « Ne plus laisserqu’un seul autel dans le sanctuaire » (p. 110). La formule pourrait sembler exclusiviste, intolérante, surtout à notre époqueavide d’œcuménisme et d’ouverture à l’autre. Ouvert à l’autre,Teilhard l’est profondément, car il sait que Dieu ne s’atteintqu’à travers la rencontre de l’autre comme autre (l’altérité del’autre et non la réduction à soi). Il ne s’agit pas de démontrerla vérité du christianisme en rejetant les autres religions, maisde montrer que la bonne nouvelle évangélique est bien ce à quoiaspire toute personne humaine. La suite du Christ n’est pas unchemin ésotérique, mais la découverte (révélation) de l’authen-tique vocation humaine. « En dehors de moi, vous ne pouvezrien faire » (Jn 15, 5).

Suivre le Christ, c’est aussi rencontrer l’Église. Pas de Christsans Église, « le seul courant organique qui alimente notre foi »(p. 271). On sait à quel point l’Église institutionnelle a étépeu favorable à Teilhard (malgré le soutien de quelques-uns).Il aurait eu de bonnes raisons de prendre son indépendance etd’adopter la posture, si fréquente et confortable, du prophèteincompris. Beaucoup l’y encouragèrent. Son soutien de l’Églisen’a rien d’un manque d’audace. C’est l’idée que, d’une part, lemessage évangélique nous est transmis par l’histoire d’une com-

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munauté humaine et, d’autre part, qu’il mène à la constitutiond’une communion. On n’est pas chrétien tout seul. La rencontredu Christ n’est pas une communication directe avec le ciel,comme si chaque personne était une monade isolée dans sonmonde propre.

Ces éléments traditionnels sont aussi très actuels. Si Teilhardcontinue d’intéresser, c’est que sa méditation trouve des échosdans les préoccupations d’aujourd’hui. Plongé dans le mondescientifique, il a réalisé, pas seulement autour de lui mais aussien lui, à quel point l’idée de Dieu avait cessé de relever de l’évi-dence, sans parler de la théologie chrétienne et de la vie ecclésiale.Il y a sans doute chez lui des éléments d’apologétique, une défenseargumentée des grands thèmes de la foi chrétienne, mais — c’estplus original — il pressent que, si « Dieu » est rejeté, c’est souventune fausse image, une image déformée, rabougrie, idolâtrique,un Dieu réduit à une doctrine figée et à un moralisme étriqué.Ou alors, une fuite du monde, une mystique désincarnée qui sedésintéresse de ce qui fait le quotidien de l’humanité. Le Dieude Teilhard est, comme le Dieu de la Bible, un Dieu qui faitcorps avec le monde et son histoire, au point d’en assumer lesambiguïtés. Aborder la question de Dieu par la figure de Jésus,c’est quitter le « bien connu » d’une divinité instrumentalisée,pour rencontrer une personne vivante. La non-évidence de Dieuest une chance pour renouveler la connaissance que nous pensonsen avoir et pour mieux entrer dans le mystère. Le Dieu de Teilhardn’est pas « pour les inertes qui ont peur d’être » (p. 195-196).

Il ne s’agit pas de résumer le propos qui suit. Au lecteur defaire son itinéraire, en prenant son temps. Sans doute ne

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peut-on entrer dans l’œuvre teilhardienne si l’on n’est soi-même en quête. La rencontre de Dieu ne sature pas l’attente— Nicole Timbal en sait quelque chose ! — elle la relance tou-jours plus loin.

François Euvé, s.j.

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La vie est divine ou elle est absurde.

Pierre Teilhard de Chardin, s.j.

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À mes enfants et mes petits-enfants :Béatrice et OlivierBertrand et ArmelleVincent, Dorian, Gaucelm, Viviane, Garance et

Iroise.

Et à tous ceux qui oublient Dieu, l’ignorent, lerejettent ou le cherchent.

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Avant-propos

Pourquoi ce livre ? Un jour, à l’issue d’une conférenceque j’avais donnée en Bretagne — intitulée « Teilhard,

un priant, un mystique et un voyant », comme l’a si biendéfini Mgr Dupleix —, un prêtre congolais, qui ne connais-sait pas Teilhard et que mon propos avait intéressé, est venume demander de faire une autre conférence pour dire ce quece jésuite avait apporté à l’Église. Je l’ai faite l’année d’après,l’intitulant : « Teilhard hier et aujourd’hui » pour bien montrer la continuité, l’enracinement de sa pensée dansl’Église, son appartenance entière au christianisme des origines et en même temps son désir de voir bouger leschoses, son espoir de voir l’Église s’ouvrir, un jour, à des approches élargies.

Le P. Euvé ayant lu le texte de cette conférence m’aconseillé d’en faire un livre. J’ai beaucoup hésité sur le

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Les termes accompagnés d’un astérisque sont expliqués dans la section1.« Lexique et notes », en fin d’ouvrage.

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sous-titre à donner et, si j’ai choisi « Un homme de Dieu »,je sais que ce n’est pas original. Dans la Bible, cette épithètea été donnée à de nombreux personnages et il y a eu d’autreslivres portant aussi ce titre. Mais peu importe la nouveauté !D’après la définition, « l’homme de Dieu, c’est celui quidans ce monde manifeste les caractères de Dieu qu’il connaîtet auquel il a le sentiment d’appartenir tout entier ». Si Teil-hard n’épouse peut-être pas tout à fait le premier terme decette proposition (on ne connaît jamais complè tementDieu !), il le fait pleinement du second. Il a cherché à donnerà Dieu sa vraie place, celle d’un Dieu plus présent, à traverset par Son Christ, « toujours plus grand », ce qui est vitalpour le monde d’aujourd’hui. Il a été un témoin et un révé-lateur du Dieu qui l’habitait. Teilhard réorientera ses dons,ses découvertes, ses recherches scientifiques en fonction desa foi au Christ, car « il existe une incontestable dimensionchristologique de sa pensée et de son œuvre », comme le disent André Dupleix et Évelyne Maurice dans un livre remarquable sur la vision christologique de Teilhard deChardin. En effet, pour Teilhard, le Christ, et nous y reviendrons, est la vraie lumière qui nous illumine, le seulchemin vers le Père ; Christ oméga*1, en qui non seulement,tout converge, s’achève, mais plus encore tout commence ;celui qui nous engendre et nous appelle à la filiation. LeChrist qui est « l’Âme véritable du Monde ». Lui seul donne,en effet, à l’homme le pouvoir d’être un homme accompli,l’entraîne vers la réalisation de ses possibilités, lui donne senset plénitude dans le projet de Dieu.

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avant-propos

Vous me direz que Teilhard est plus « homme du Christ »qu’« homme de Dieu » tant la christologie est le fondementde sa pensée religieuse… C’est possible dans son expressionmais pas dans sa finalité. Et puis, saint Jean le martèle danssa première Épître, Dieu « dans le Christ, s’est laissé voir,entendre et toucher ». Le Christ lui-même a dit : « Qui mevoit, voit le Père » (Jn 14,  1-22). Le jésuite n’en a jamaisdouté ; pour lui le Christ de l’histoire et des Écritures est, depar l’Incarnation, le Dieu fait homme qui exprime magni-fiquement, à lui seul, la transcendance et l’immanence duDieu unique, à la fois trine et un et nous conduit vers Lui.« Je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6). Dans cespages, je voudrais dire la foi de cet homme tout au long desa vie. Du pastel accroché au mur de Sarcenat où l’on voitun enfant aux boucles sages au-dessus d’un fin visage où depetits yeux, brillants, intelligents, étonnamment profondsnous scrutent et semblent nous prendre en compte, au vieuxmonsieur délivrant, à New York, une dernière confidence,au P. Leroy* s.j. peu de temps avant sa mort : « Maintenant,je ne vis plus qu’en Dieu seul ! »

Si, dans ce livre où je cherche à cerner la spiritualité duP. Teilhard de Chardin, je ne m’étends pas sur l’homme del’Évolution, le scientifique, et si j’insiste sur l’immense dimension du religieux, fils obéissant et fidèle de l’Église, jene peux toutefois en faire l’impasse, ce serait le « mutiler »,comme disait le cardinal de Lubac*. Il y a, en effet, une tellecohérence entre sa vie et son cheminement spirituel que lescientifique et le spirituel interfèrent sans arrêt et s’appuient,l’un sur l’autre, nous le verrons. Venue à la foi par Teilhard,

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GP, p. 324 (les sigles que nous utilisons pour désigner des ouvrages fréquem-2.ment cités sont expliqués dans la Bibliographie, p. 461).

avant-propos

grâce à la sienne, c’est cette foi que je voudrais dire. Cettefoi qui, chez lui, n’est pas statique, sans questionnement,qui est déchirée parfois, mais jamais en veilleuse ; cette foiconquérante mais fidèle, héroïque et humble. Cette foi quirelève aussi de l’Évolution et lui donne son sens profond ;cette foi enfin reconnue à travers les nombreuses référencesqu’en ont données, aujourd’hui, les derniers tenants de lachaire de saint Pierre. Teilhard m’a permis, il y a bien long-temps, de rencontrer le Christ, non plus seulement dans saparole et dans son agir, mais dans le mouvement. En échoà sa pensée, j’ai été emportée dans cet élan qui converge versLui et avec Lui en Dieu. Et quand, un jour, je suis devenueoblate bénédictine, il m’a semblé entendre Teilhard mur-murer ce qu’il avait écrit à sa cousine avant une démarcheéquivalente : « Cela ne changera rien intérieurement dansla vie, mais toute la profondeur des choses en sera renou -velée2… »

Je voudrais que, pour écrire ces pages longuement mûries,l’Esprit saint ouvre mon esprit au « sens caché de l’Univers »,qu’il me donne la joie que Teilhard avait lui-même de « tra-vailler à l’œuvre de Dieu », qu’il « illumine mon intelligence,fortifie ma volonté de manière à me soulever au-dessus demes possibilités naturelles », comme le veut la Règle* de saintBenoît quand on s’attache à un travail qui semble impossible !Teilhard a été pour moi, comme pour beaucoup, le cheminde la vie véritable et je pense à son ami Max Begouën, écrivant

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LMB, p. 6, note 7.3.LMB, p. 10.4.Maryse Choisy, Sur la route de Dieu on rencontre d’abord le Diable, Éd. Émile5.

Paul, Paris, 1978, p. 346.Maurice Pontet, Pascal et Teilhard, témoins de Jésus-Christ, Desclée de Brou-6.

wer, coll. Christus n° 27, Bruges / Paris, 1968, p. 158.

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dans ses mémoires en hommage au jésuite : « L’action quevous avez eue sur mon esprit relève de la catalyse et de la fécondation et non seulement de l’asservissement et du remo -delage de ma personne3… » Il raconte, aussi, comment « unsoir d’automne de 1919, entre 21 heures et minuit, allant etvenant sous la pluie, entre Saint-Augustin et la Madeleine, lepère lui apporta une révélation sur la vision du monde quiillu mina sa vie, donnant un sens nouveau à toutes ses acti -vités4 ». Et il explique qu’alors « tous ces problèmes de liberté,de mort, de souffrance, d’évolution sur lesquels il avait butécomme devant un mur, changeaient totalement de nature etdevenaient perméables, le trouble faisant place à la joie ! »Comme Maryse Choisy, fondatrice de la revue Psyché, l’écriradans ses mémoires, en parlant de Teilhard, je peux dire, aussi,qu’« il m’a aidée à mieux aimer Dieu et les hommes5 ». Quand,plus tard, j’ai suivi les conférences du P. Feuillet, j’ai appréciéqu’il loue le P. Teilhard qui « par intuition avait retrouvé cettedimension universelle du Christ bel et bien revendiquée parsaint Paul6 » et trop oubliée de nos jours, et qu’il rende hom-mage à la « vision » de Teilhard sur l’importance du Cosmos.

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Les approches prophétiques du P. Teilhard, la richessede ses intuitions, n’ont pas toujours été reconnues ; elles ontété quelquefois malmenées mal interprétées, jalouséespeut-être, aussi parfois. En son temps, trop souvent, ellesn’ont pas été reçues à leur mesure, mais, malgré tout, beau-coup de ses confrères jésuites, d’amis philosophes ou scientifiques en avaient, déjà, cerné la richesse, la profondeuret les avaient bien accueillies. Ceux-là l’ont défendu coura-geusement, ont été des alliés précieux qui l’ont soutenu moralement et spirituellement. Le recteur de l’Institut catho -lique, Mgr Baudrillard, essaiera même par tous les moyensde lui conserver son poste à l’Institut quand il fut envoyé enChine en 1926. Encore aujourd’hui quelques réfractaires àla pensée de Teilhard, souvent abusés par des expressionsmal comprises, ont critiqué mon projet et m’ont, en mêmetemps, rendu service. Cela m’a aidée, en effet, à préciser mesapproches, à mieux expliciter le vocabulaire assez particulierdu père, à creuser sa spiritualité à travers son œuvre et sacorrespondance, pour en faire jaillir toute la sève qui a ali-menté la mienne comme une source pérenne. Il y a eu desoppositions fécondes qui ont ouvert le dialogue et sur lesquelles j’ai pu rebondir et malheureusement d’autres, sibornées, si stupides, qu’elles sont restées stériles !

Converger vers le Christ de l’avenir, du devenir, qui inviteà l’universalité ; tendre vers le « Christ toujours plus grand »,comme le P. Martelet définit le Christ de Teilhard, tel a été,en effet, le souci essentiel du père dont il a si magnifiquementtémoigné, qu’un jour, cela a bouleversé ma vie. J’ai été prisedans ce tourbillon ascensionnel, tourbillon d’amour quim’a investie en retour. « L’oméga en qui tout converge est

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Les citations extraites des Œuvres de Teilhard de Chardin, publiées au Seuil,7.seront notées par le tome et la page (ici, Œuvres, t. VI, p. 183). La liste complètede ces Œuvres figure dans la Bibliographie.

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réciproquement celui de qui tout rayonne7. » L’intentionqui va guider ma plume tout au long de ce travail et orientermon propos, est de montrer comment, aujourd’hui, les intui -tions de Pierre Teilhard de Chardin font avancer l’Églisetout en restant, profondément, matriciellement, ancrées dansles fondamentaux de cette même Église. Pour écrire ce livre,je me suis, à nouveau, penchée sur son œuvre, ces pages admirables qui ne laissent personne insensible mais aussi surses lettres qui nous rendent l’homme encore plus attachant,plus vrai et où passent le souffle qui l’animait, sa foi et sonimmense attachement au Christ. Nous pouvons y voir aussison questionnement, ses élans, sa souffrance et sa révolteparfois, à fleur de page, au fil de la plume.

« On ne connaît bien un homme qu’à travers sa corres-pondance », disait Lord Halifax. Bien sûr le revers de cettecorrespondance, Teilhard le reconnaît lui-même, c’est qu’ellene livre « que l’impression d’un moment » et des états d’âmequi ne durent pas toujours. Il faut donc parfois s’y référeravec prudence et faire preuve de discernement en la replaçantdans son contexte. Ses lettres si nombreuses s’expliquent parles distances, les moyens de communication limités del’époque, les deux guerres mondiales, l’exil et la solitude.Cette solitude, il ressent le besoin de la briser, de l’habillerd’amitié, de confrontations aussi pour mieux cerner sa pensée, la définir et l’exprimer.

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Cette approche comprendra quatre parties. Dans la première, je veux montrer la maturation de sa foi, aucontact, d’une part, de la guerre, qu’il appellera « le baptêmedu réel » et, d’autre part, au questionnement de la science.Dans un deuxième temps, j’essaierai de dire son désir defaire passer « son évangile », c’est-à-dire le besoin de rendreplus visible dans le monde, en dénonçant les frilosités del’Église d’alors, ce Dieu qui nous précède dans le Réel. Il a,en effet, pressenti que le Dieu auquel on se référait n’étaitpas à la mesure de sa réalité. Dans la troisième partie, jerappellerai sa fidélité rénovatrice à l’Église, aux fonda -mentaux. Enfin, dans un dernier temps, je me pencheraisur la vie de prière et sur le charisme exceptionnel de ce jésuite à qui l’Église d’aujourd’hui doit beaucoup.

Mais avant cela, une note introductive, intitulée « Com-ment recevoir le message de Teilhard », précisera quelquespoints de la pensée du jésuite qui ont posé question à certainset l’étonnante richesse d’un vocabulaire percutant, parfoisinsolite, que je ne me suis pas crue autorisée d’édulcorer etdont j’utilise les mots, sans peur de les répéter, en les mettanten italique dans mon texte.

Teilhard dira que « sa vision fut l’élément premier, fonda -mental à partir duquel tout le reste s’est développé commepar ondes concentriques et par degrés successifs ». C’est ceque j’ai découvert dans « Le Milieu divin » et la magnifique« Messe sur le monde ». J’en rends grâce encore aujourd’hui.C’est pour cela que j’ai voulu montrer chez lui cette foi quia donné à la mienne ses racines, son élan et qui m’a ouvertdes horizons nouveaux sur un divin à naître. Je voudrais en

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témoigner, avec force dans la paix et dans la joie. Teilharda été la lumière sur ma route ; je ne peux pas l’oublier etnéanmoins, si mes approches ne sont pas toujours exacte-ment celles du père, il faut voir en lui le prisme qui a irradiécette lumière éblouissante au point, peut-être, d’en déformerparfois la source et j’en demande pardon à ceux, qui, mieuxque moi, ont su analyser sa spiritualité.

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Introduction

Comment recevoirle message de Teilhard

Avant d’entreprendre ce travail, il m’a paru nécessaired’écrire ce préambule pour aider à comprendre ce que

le P. Teilhard de Chardin s.j. a voulu nous dire. J’ai vouluanalyser les malentendus ou les raisons de la défiance quientourent parfois encore la pensée du père. J’ai voulu donner,aussi, un autre regard sur ce que l’on n’a pas compris, oudéformé, et mettre en garde ceux qui voudraient récupérerd’une façon abusive sa vision ou ses approches.

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introduction

Ce que l’on a mal comprischez Teilhard

Dans ses approches ou ses idées

Beaucoup n’étaient pas préparés, à l’époque de Teilhard,à accueillir une pensée et des perspectives si nouvelles. C’estce qui lui a fermé des portes et effrayé parfois sa hiérarchie.Ceux qui l’ont accusé d’avoir méconnu le dogme, de s’êtredésintéressé de la philosophie religieuse, n’ont pas lu sonœuvre ou l’on fait avec un a priori, car justement sa seulepréoccupation a été celle de Dieu, du Dieu chrétien. Toutau long de ses écrits, dira le P. Leroy, « il est l’avocat passionnédu Dieu personnel à travers le Christ, du Dieu fait homme.Le Dieu qu’il vénère et qu’il adore est le Dieu qui EST. » Ilest vrai que, sans mettre en doute l’orthodoxie de Teilhard,nous sommes bien obligés de constater que le langage qu’ilutilise n’est pas toujours assez explicite, qu’il est nouveau,avec des formules dont le sens échappe à beaucoup et risqued’entraîner parfois une mauvaise interprétation de sa pensée.Mais si les hommes et les femmes de notre temps acceptentde faire l’effort de se pencher sur son œuvre, ils y trouverontun écho de la Vérité révélée, authentique et riche de sens !Le Christ universel en qui tout se rassemble, cher à sa pensée,n’est que la traduction fidèle de la pensée de saint Paul. Lesefforts positifs de l’Homme convergent vers un centre où leChrist universel attire et résonne.

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Bruno de Solages, Teilhard de Chardin. Témoignage et étude sur le dévelop-1.pement de sa pensée, Privat, Toulouse, 1967, p. 41.

NLV, p. 99 (note).2.

introduction

Bruno de Solages* reprend à son compte un jugement deVandel, de l’Académie des sciences, qui montrait bien que« l’œuvre novatrice de Teilhard a été systématiquementétouffée, tandis que la critique pouvait s’exprimer librementpar de vibrants pamphlets où l’incompréhension le disputaità la sottise… et [que] beaucoup n’ont connu l’œuvre teil-hardienne qu’à travers cette pauvre critique 1 ! » Ce jugementpeut paraître sévère, mais il est tristement vrai. J’en ai faitl’expérience avec quelques irréductibles, heureusement deplus en plus rares, pas encore libérés des stupides réductionsd’une pensée si large, qu’elle leur a échappé ! La vieille opposition « panthéisme*, christianisme » a jailli bien souvent sous la plume de ses détracteurs qui ont cru voir enlui, bien à tort, un panthéiste. Peut-être aussi que ses audacesd’écriture, ses mots forgés à la mesure de son désir ardent debien cerner les choses, ont apporté de l’eau au moulin de sesdétracteurs ? Il a voulu imposer ce terme de « panthéismechrétien » qui a fait frémir même les plus indulgents, plei-nement d’accord pourtant avec lui sur le sens qu’il donnaità cette expression ambiguë, peut-être maladroite. Elle ditbien pourtant, qu’à l’inverse du panthéisme qui identifietous les êtres et les choses avec Dieu, « lui y voit la conver-gence vers un Dieu personnel et transcendant, centre aimantet digne d’amour 2 ».

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PCTG, p. 217.3.Œuvres, t. X, p. 91.4.Œuvres, t. XII, p. 391.5.GP, p. 390.6.

introduction

Le P. Martelet précise que le « panthéisme opère uneconfusion nocive entre le Monde et Dieu grâce à un échangetotal de leur identité 3 ». Dans « Panthéisme et christianisme »,Teilhard affirme avec vigueur « qu’il est plus urgent quejamais qu’un chrétien dérobe au panthéiste le feu avec lequelcelui-ci menaçait d’embraser la Terre d’une ardeur qui n’auraitpas été celle de Jésus 4 ! » Il pense même qu’il atrophie la pos-sibilité qui nous est donnée de penser, il lui dénie toute valeurd’école. « Le panthéisme est ruineux philosophiquement. Etle voyant qui espérait à son école rencontrer palpablement leDivin n’étreint que de la poussière 5. » « Le panthéiste, sousprétexte d’unifier les êtres, les confond, c’est-à-dire anéantiten fait… le mystère et la joie de l’union. » C’est clair et devraitenlever toute ambiguïté ! Loin de diviniser le Cosmos, bienau contraire, il fait de la Matière l’escabeau de la Divinité. Il« oppose le milieu divin au panthéisme ».

« La Matière qui entraîne et libère ceux qui savent en saisirla puissance spirituelle 6 » écrivait-il à Marguerite en 1919, enlui expliquant le sens de son « Hymne à la Matière ». Celledont il parle, qu’il voit et aime ce n’est pas la matière, en soi,froide et inerte, mais ce qu’il y pressent, ce qui la fait vibrer,ce qui la traverse, tout le travail du Divin qui s’accomplit enelle. La Matière « c’est d’une part le fardeau, la chaîne, la douleur, le péché, la menace de nos vies, c’est ce qui alourdit,ce qui souffre, ce qui blesse, ce qui tente et ce qui vieillit…

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Œuvres, t. IV, p. 122.7.Œuvres, t. XIII, p. 86.8.Œuvres, t. IV, p. 126.9.

introduction

mais la Matière c’est en même temps l’allégresse physique, lecontact exaltant, l’effort virilisant, la joie de grandir… C’estce qui attire, ce qui renouvelle, ce qui unit, ce qui fleurit 7… »Pour lui, la Matière ce n’est pas seulement la Terre qui nousporte, les électrons qui s’entrechoquent ou s’harmonisent, leminéral inerte, ni même les étoiles qui dansent aux quatrecoins de l’univers ! C’est plus encore, ce « corps de mort » quinous a été donné, condamné à l’effacement, à la destructionmais aussi à la joie éternelle. « Baigne-toi dans la Matière filsde l’Homme… Plonge-toi en elle, là où elle est la plus violenteet la plus profonde ! Lutte dans son courant et bois son effort !C’est elle qui a bercé jadis ton inconscience. C’est elle qui teportera jusqu’à Dieu 8. » Cette Matière, Dieu l’a choisie pourêtre le berceau de l’Homme, pour le faire mûrir, advenir,monter jusqu’à Lui. Il est venu nous y rejoindre, pour mieuxnous attirer vers Lui, dans l’Incarnation.

Il n’y a pas de rivalité, d’opposition manichéenne « l’âme,le corps et l’esprit »… La Matière n’est pas abstraite, c’est« une réalité concrète » chargée de promesse, « la pente surlaquelle on s’élève ou on descend », entraîné par « le péchéd’origine » ou « l’attrait de l’Incarnation… » « Aucune âmene rejoint Dieu sans avoir franchi, à travers la Matière, untrajet déterminé… » « Une distance qui sépare » et en mêmetemps un « chemin qui réunit 9 ». Non pas s’y dissoudremais la traverser, plus fort et plus riche de certitude, pouraller au-delà. Un vertige nous saisit, humble, adorant, et

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Œuvres, t. XII, p. 479.10.Œuvres, t. IV, p. 139.11.Œuvres, t. XII, p. 305.12.

introduction

grandiose, certitude d’une joie, d’une finalité qui échappe àl’absurde ; la glèbe devient féconde ! La Matière a été crééepar Dieu et le Verbe y prit chair. « Je te salue, Milieu divinchargé de Puissance créatrice, Océan agité par l’Esprit, Argilepétrie et animée par le Verbe incarné 10. » Teilhard souligneque « le panthéisme nous séduit par ses perspectives d’unionparfaite et universelle. Mais qu’au fond, s’il était vrai, il nenous donnerait que fusion et inconscience… Notre Dieu,au contraire, nous dit-il, pousse à l’extrême la différenciationdes créatures qu’Il concentre en Lui 11… » C’est tout diffé-rent ! C’est vertigineux, superbe,… on s’y perd avec déliceet en même temps on s’élève avec elle et par elle au-dessus del’Univers, jusqu’aux limites du Divin… « L’Esprit planaitsur les eaux ! »

On a, aussi, souvent dit, avec un rien de condescendance,qu’il n’était pas philosophe. Non, bien sûr, de formation,« mais y a-t-il une barrière étanche entre la philosophie et lamystique ? » Philosophe, nous le sommes tous dès qu’on réflé -chit au sens de la vie, que l’on se penche sur l’Être, son pourquoi et son devenir ; si l’on réfléchit à l’existence, on nepeut pas ne pas se poser un jour la question de Dieu. Etcomme disait saint Jean de la Croix, « sans Dieu, il n’y a rien ».Pour Teilhard, « la meilleure philosophie sera toujours celle quilui permettra davantage de sentir le Christ, nécessairement etpartout 12 ». « Ce n’est pas avec le Dieu des philosophes qu’il

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Br. de Solages, Teilhard de Chardin, p. 72.13.CC, p. 166.14.

introduction

met l’Univers en relation, mais avec le Christ de saint Paul etde saint Jean qu’il appelle le Christ Universel, le Christ en quise récapitule l’Univers 13. »

Pas philosophe, pas théologien non plus, lui a-t-on re-proché !… Même après trois années de théologie au long deson parcours de formation, il n’était pas, en effet, théologien« de métier ». Bruno de Solages souligne bien qu’il « étaitplus à l’aise comme spirituel que comme théologien ». Maisquand on a la foi, on ne peut pas ne pas réfléchir à ce qu’elleveut dire. La foi est une « constitution de sens », répétaitAlain Cugno, un de mes amis philosophe, aux jeunes fiancésquand nous faisions ensemble partie d’une équipe de prépa -ration au mariage. « Si tu es théologien ; tu prieras vraimentet si tu pries vraiment, tu es théologien ! » disait Évagre* lePontique. La foi est une réponse. Elle nous est donnée ouon la trouve, mais ce n’est pas une construction. Dieu estun libre « choix, très simple entre un oui et un non, entre lesigne plus et le signe moins. Ce choix nul ne peut éluder dele faire un jour 14 », disait Teilhard d’une façon un peuabrupte en précisant qu’il lui semblait difficile de le faire dumauvais côté ! Ainsi, rien n’est démontré, rien n’est démon-trable. C’est une certitude qui nous bouscule, qu’aucunepreuve n’étaye : « Quelque chose se met en place : le comblement de nos désirs dans la divine flamme » dont parlait saint Jean de la Croix.

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On a dit aussi que Teilhard voulait un autre christianisme.C’est absurde ! Pas un autre, précise-t-il souvent, mais lenôtre, celui de toujours « mais dynamisé en quelque sorte ! »Certains l’ont aussi qualifié de visionnaire, avec une ironieamusée. Ce n’était pas si éloigné de la vérité, mais pas dansle sens qu’on prête généralement au mot avoir des visions,voir des choses extravagantes. Sa vision s’appuie, au contraire,sur « une certaine expérience personnelle, un événementinté rieur ». « Je crois que je vois quelque chose », écrivait-ilà sa cousine.

Certains partisans de l’eugénisme se réclament abusivementde Teilhard, parce qu’il a parfois utilisé ce mot. Cette idéen’est pas recevable, pour plusieurs raisons. D’abord ce mot,chez lui, est évidemment pris dans son sens étymologiquede « perfectionnement dans la prolongation et l’achèvementde l’espèce ». Ensuite, parce qu’à son époque, qui est aussicelle d’Alexis Carrel, le mot était à la mode, attaché à uneéventuelle amélioration qui ne recouvrait absolument pasles moyens sélectifs et la dimension mortifère d’éliminationque l’on y met aujourd’hui. Il est bien conscient qu’il y ades limites à ne pas franchir et qu’il faudra toujours rester,au-delà de ce pouvoir d’arrangement que permettent « lesprogrès de la science humaine », attentif aux « obligationsinternes » qu’impose l’exigence de la morale chrétienne. LeP. d’Ouince* rapporte une conversation où Teilhard lui aurait dit que les problèmes moraux seront ceux qui agiterontl’Église du xxie siècle. Le père avait souligné que dans ce do-maine, il « n’aurait pas été pour une solution de facilité ! »

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NLV, p. 100.15.Œuvres, t. I, p. 271.16.

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Il est resté toujours très ferme, en effet, sur les vérités fonda-mentales, les référents moraux et sur la discipline de l’Église.

D’autres ont parlé de racisme chez Teilhard, pour quelquesexpressions malheureuses dans ses lettres. C’est mal com-prendre ses précisions de scientifique, attaché au sens exactdes mots. Le 7 août 1950, il écrivait en effet, à Torres Bodet,alors directeur de l’UNESCO, à propos de l’égalité des races,une note où il précise qu’au « nom de la paléontologie et dela biologie, on ne pouvait pas parler d’égalité mais de complé -mentarité (de convergence), ce qui est plus vrai et plusbeau 15 ». Il s’est toujours méfié d’un égalitarisme abusif etréducteur aussi bien au niveau des races, des religions quechez l’homme et chez la femme, tout en étant sûr de la néces -sité de l’égalité des droits, ce qui est une tout autre chose. Lacomplémentarité est une richesse, plus féconde que l’égalité,elle achève la personnalité des uns et des autres dansl’échange ; elle est créatrice et révélatrice. Ce droit à la com-plémentarité et à la différence doit être reconnu et défendu.Ceux qui en doutent n’ont qu’à relire ce qu’il écrivait dans« Le Phénomène humain » : « Faux et contre nature, l’idéalraciste d’une branche captant toute la sève de l’arbre et s’éle-vant sur la mort des autres rameaux ! Pour percer jusqu’ausoleil, il ne faut rien moins que la croissance combinée de laramure entière… Les portes de l’Avenir ne s’ouvrent enavant, ni à quelques privilégiés, ni à un seul peuple élu…Elles ne céderont qu’à une poussée de tous ensemble 16 ! »

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George B. Barbour, Sur le terrain avec Teilhard de Chardin, Seuil, Paris,17.1965, p. 35.

introduction

Dans l’amour et vers l’Amour, et il ajoute… « Si nous nousdécidons à accepter la possibilité, la réalité de quelque Aimant… au sommet du Monde. »

Une autre suspicion tenace a été de penser qu’il était com-muniste ! C’est vrai qu’il a cru voir dans cette pensée nouvellese lever un espoir pour le monde de demain : de générosité,d’union, d’effort commun. Il y a vu « même si cette idéologien’est pas ce que l’on est en droit d’attendre, une fissure dansle fixisme sclérosant de l’époque ». Mais s’il en partage l’essencede base, « l’attente d’une ultra-humanité », s’il n’était pas« sans sympathie pour la passion de la Terre qu’il sentait aufond du communisme », dira Mgr de Solages, très vite il endénoncera « l’idéologie froide et étriquée », en découvrira leslimites et, plus graves, les dérives mortelles. Barbour, dansson livre de souvenirs, rapportera une conversation, où Teil-hard lui a dit : « Les communistes voient seulement les besoinsmatériels des gens. Mais ils ne voient pas combien importepour l’individu le besoin d’une croissance spirituelle 17. » « Lafoi chrétienne ne peut survivre et rebondir qu’en incorporantla foi au progrès humain », écrit-il à Ida Treat, une amie com-muniste, en 1947, c’est pour cette raison qu’il n’adhérerajamais aux idéologies totalitaires « sans âme ni figure » et « quituent le bourgeon même de l’Évolution qu’ils veulent pro-mouvoir et sauver ». Il est affligeant que cet amalgame, grossieret réducteur « évolutionnisme, synonyme de communisme »,ait pu circuler au sein même, parfois, des milieux catholiques

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M. Pontet, Pascal et Teilhard, p. 117.18.Œuvres, t. I, p. 125.19.Cité par André Georges dans la préface de IP.20.LLZ, p. 134.21.

introduction

de l’époque ! On ne peut qu’admirer le P. Teilhard d’avoirvécu ces assauts avec courage et dans la fidélité à l’Église !Chez Ida, il admire la générosité, l’intelligence remarquable,la richesse de la personnalité. « Que de forces encore en dehorsde l’Église », écrit-il à son sujet, mais loin de lui l’idée d’adhérerà une idéologie « étriquée, glacée et close sur elle-même, quijamais ne pourra prévaloir sur l’extraordinaire puissanced’amour du Christ ». Si au début « du marxisme dialectiqueil retint surtout l’humanisme qu’il essayait de dégager 18 », trèsvite il a dénoncé au contraire dans le communisme, autantque dans le national-socialisme « la plus effroyable des misesen chaîne !… la termitière au lieu de la fraternité 19 ». Son amiLéopold Senghor pourra dire : « Teilhard nous a permis defaire l’économie du marxisme et de dépasser cette étape 20. »

De nos jours, où la réincarnation a tristement droit decité dans beaucoup d’esprits, je voudrais dénoncer ici touterécupération éventuelle de Teilhard qui serait abusive. « Sanspersistance de la personne, notre travail intérieur le plus précieux deviendrait vain, nous n’aurions plus une raisonsuffisante d’agir et puis la perspective de la mort serait into-lérable. Le double fardeau de l’action à poursuivre et de lamort à affronter ne sont admissibles pour un être conscientque si l’âme est immortelle 21. » Cela dit bien que pour luil’« immortalité des âmes individuelles » est évidente et nepeut en aucun cas être mise en doute ! « Elles atteindront,

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Œuvres, t. XII, p. 152.22.Œuvres, t. X, p. 137.23.Œuvres, t. VI, p. 84.24.CC, p. 165.25.

introduction

au contraire, l’extrême maîtrise de leur personnalité 22. » Ilen perçoit toute la « transformation divinisante ! » Cettetransformation, ce tout, il ne faut pas l’imaginer comme unocéan immense, la mer où le grain de sel se dissout… Lamanière de Dieu de dissoudre, c’est d’unifier plus encore.« La Réalité où culmine l’Univers ne peut donc se développerà partir de nous qu’en nous conservant. Dans la Personnalitésuprême nous ne pouvons que nous trouver personnellementimmortalisés 23. » Plus encore, dans Esquisse d’un univers personnel, il a ces mots sans détours : « Une personne nepeut disparaître en passant dans une autre personne : car,par nature, elle ne peut se donner, en tant que personne,qu’autant qu’elle reste unité consciente d’elle-même, c’est-à-dire distincte 24. » C’est ce que nous dit plus simplementl’Église : nous sommes uniques aux yeux de Dieu ! ClaudeCuénot dans son livre rapporte un dialogue entre le père etHaardt sur les routes de la Croisière* jaune : « Mon Pèreque pensez-vous de la métempsycose ? — L’Église à qui j’ail’honneur d’appartenir a émis une opinion définitive à cesujet », et l’auteur ajoute en note que Teilhard a lui-mêmerejeté cette idée, strictement impensable, et étrangère à sonsystème de pensée 25.

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Œuvres, t. X, p. 138.26.Œuvres, t. X, p. 170.27.

introduction

Dans les mots eux-mêmesIl y a eu aussi des mots, des expressions que Teilhard, a

forgés, pour dire ce qu’il voyait au-delà des images tradi-tionnellement proposées. Prenons quelques exemples. Uneexpression qui revient souvent chez le père, celle « d’universpersonnel », dont il fera le titre d’un essai en 1936, n’a pastoujours été comprise. Certains y voyaient une contradictionavec l’ouverture attendue vers Dieu. Teilhard a souligné, aucontraire, que « le christianisme se manifestait comme leseul courant spirituel susceptible de développer dans lesâmes le sens de l’absolu et de l’universel, surtout Personnel,c’est-à-dire le véritable sens mystique. » Dans « Comment jecrois », il dit bien que « ce qui était d’abord intuition confusede l’unité universelle est devenu sentiment raisonné et définid’une Présence 26 ».

Il parle aussi de Christ Évoluteur. Il est vrai que l’expressionn’est pas heureuse et qu’elle a été mal interprétée. Pourtantdans un essai il explique l’émergence de cette notion quicorrespond à la « nécessité de réajuster à un Univers renou-velé, les lignes fondamentales de notre christologie… nonpar addition ou soustraction du contenu de la théologie,mais par accentuation et atténuation de ses traits. Le pro-cessus aboutissant chaque fois à l’émergence d’un concept oud’une attitude plus hautement synthétique 27 » qui s’appro-cherait au plus juste de la vérité nouvellement cernée.

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Œuvres, t. IX, p. 114.28.Œuvres, t. XIII, p. 64.29.

introduction

Certains mots ont paru insolites, comme le plérôme quesaint Paul, pourtant, avait déjà largement utilisé et qui signifietout simplement « la plénitude de tout, récapitulée en Christ »par qui nous percevons que « Dieu est une personne ». C’est,en quelque sorte, le Corps de l’Église, non seulement dans saréalité statique mais parce qu’il assume toutes les forces de laCréation régénérée : le plein développement du dessein deDieu de la Création à la Rédemption, le complexe organiquequi enveloppe Dieu et le Monde, tel que Teilhard le définitdans « Mon Univers » : « Cette réalité mystérieuse… quenous ne pouvons pas penser absolument gratuite, absolumentaccessoire, sans rendre incompréhensible la Création, absurdela Passion du Christ et inintéressant notre effort 28. » Cetteréalité est aussi admirable parce que Dieu l’a voulue alorsqu’Il aurait fort bien pu se passer d’elle ! « La christologie està la fois une théologie et une anthropologie », ai-je entenduun jour dire sur les ondes de radio Notre-Dame. En effet,Dieu ne peut se dire qu’en Jésus-Christ ; chercher Dieu c’estinévitablement trouver le Christ sur son chemin. Nous nepouvons pas en faire l’économie.

Il y a aussi un mot que Teilhard utilise souvent et qui n’estcompris que par un petit nombre de gens. C’est dommage ;ce mot dit si bien l’Être et l’agir de Dieu qu’on ne pouvaitpas trouver mieux : « Dieu métamorphisait le Monde et leMonde en retour devait endomorphiser Dieu 29. » Ces motseffraient, mais le père ne fait qu’emprunter cette image à un

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PCTG, p. 224.30.PCTG, p. 225.31.PCTG, p. 232.32.

introduction

phénomène qu’en bon géologue, il connaît bien. Il s’agit toutsimplement de la transformation que subissent des pierresl’une par l’autre, dans leur enchevêtrement, en se stratifiant,sur un même terrain, au passage de roches éruptives sur lesroches préexistantes. Par cette comparaison, il veut expliquer,combien pareillement, dans un échange du même type, Dieuqui s’est donné par l’Incarnation, a donné, afin de recevoir,intégrant notre humanité à ce mouvement. Les Pères* disaientaussi : « En s’incarnant, Dieu devient Homme pour quel’Homme devienne Dieu ! » Par là, le P. Martelet expliqueque Teilhard « symbolise une des profondeurs essentielles etpourtant méconnue de l’Incarnation…, la façon dont Dieu,qui dans le Christ nous divinise, s’humanise lui-même ennous divinisant 30. » Ce qui implique chez Dieu une « décisiond’amour », souligne le père qui ajoute : « et c’est là la grandenouvelle que Teilhard nous propose », voisine de celle desaint Irénée, « le Dieu de Jésus-Christ n’est pas seulement unDieu qui reste Dieu, mais un Dieu, qui pour nous faire Dieu,s’humanise lui-même 31 ». Dans cette approche, « ni Dieu, nil’Homme n’est pour autant détruit ; chacun reste soi-même,mais communie à la réalité de l’autre et l’un et l’autre acquièrent en cet échange une identité pour les deux jusque-là inconnue 32 ».

Je pense également à la noosphère qui pose question à beaucoup de gens. Là aussi il faut y voir une analogie avec ses

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Œuvres, t. I, p. 201.33.

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approches géologiques ; tout le monde connaît la compositionzonaire de notre planète, avec toutes ces couches en « sphères ».Teilhard a imaginé une autre couche et ciselé ce mot commeattestant « les progrès d’une couche de feu autour de l’étincelledes premières consciences réfléchies… le feu de proche enproche gagne la planète entière… c’est la nappe pensante quis’étale par-dessus le monde des Plantes et des Animaux 33 » etqui apparaîtrait « pour un être venu d’ailleurs non pas bleuede ses mers, ni vertes de ses forêts, mais phosphorescente depensée ! »

Un autre mot a aussi fait couler beaucoup d’encre, soulevébien des questions : la diaphanie. Ce mot, il l’a forgé avecson intuition de passeur de Dieu ; il embrasse sa vision duCiel et de la Terre, des premiers frémissements de la Créationau plus complet achèvement de la Parousie. Pour lui, leRoyaume de Dieu touche tout l’univers, autant le Mondequi nous entoure, que celui au-dedans de nous-mêmes etpour traduire sa vision, pour rendre compte de cette certitude,qui le consume comme un feu, il a ciselé ce mot. La diapha-nie est une façon de dire ce quelque chose à la fois consistantet fugace, comme un rayon de soleil qui provoque « l’incan-descence des nappes intérieures de l’être… la perception del’omniprésence divine, quelque chose qui déchire le voilede nos yeux et celui de notre âme… » Le Royaume de Dieuest d’un autre ordre que celui du visible, il relève de la trans-parence, mais plus encore : « Oh oui, Seigneur, pas seulementle rayon qui effleure, mais le rayon qui pénètre. Pas votre

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Œuvres, t. IV, p. 162.34.omas King, La Messe de Teilhard. Une lecture de « La messe sur le monde »,35.

Médiaspaul, Paris, 2008, p. 176.

introduction

Épiphanie, Jésus, mais votre Diaphanie 34 » car pour Teilhardle grand mystère du christianisme n’est pas l’apparition maisla transparence de Dieu dans l’univers. J’aime la définitionqu’en donne le P. King s.j. : « La diaphanie c’est la radicalitéde la transcendance de Dieu 35. » Peut-être en même tempscelle de son immanence, qui illumine, pénètre et perduredans l’éclatante lumière qui illumine toutes choses !

Amorisé revient aussi souvent sous sa plume. Cette expres-sion veut tout simplement dire « conduit par l’Amour, consi-déré par Teilhard comme la forme supérieure de l’énergiehumaine ». Celle qui accomplit et parachève les choses. S’il asouvent aussi utilisé des mots nouveaux, inusités, insolites,dont le sens échappait à beaucoup, c’est « également parcequ’il s’adressait le plus souvent, dans ses conférences ou dansses écrits, à une élite intellectuelle », comme l’a soulignéClaude Cuénot dans son livre. Mais le grand public, lui,n’était peut-être pas préparé à recevoir ses idées.

Et puis Dieu est immuable, éternel, inattingible, pour employer justement un mot cher à Teilhard ; Il est le Tout-Autre, alors pourquoi l’enfermer dans un discours rigide etprêt à dire, si j’ose dire par analogie avec le prêt-à-porter ?Ce mot intraduisible, qui revient très souvent dans montexte, montre la différence infinie, l’altérité totale qu’il y adans la distance, mais plus encore dans l’essence même decette différence. Les mots ont leur poids et il serait vain de

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introduction

vouloir les remplacer, cela appauvrirait la pensée de Teilhardet la vigueur de mon approche !

Toutefois, il a eu aussi parfois, il faut bien le dire, perduau milieu d’un enchantement des mots ciselés avec amour,des expressions malencontreuses, exprimant avec trop de hâtece qu’il ressentait et qui lui ont été reprochées. Mais ces querelles de mots ne témoignent chez le père d’aucune déviance dogmatique. Il a aussi beaucoup aimé les superlatifs,pas par jeu ni par goût de la démesure mais pour essayer detraduire au mieux la profondeur et la hauteur de ses espé-rances, de sa confiance sans limite en quelques réalités infi-niment plus larges que celles que l’Église offrait alors. Notreépoque aurait besoin de se tourner vers lui qui a aimé leChrist en aimant passionnément l’Univers. Pour lui, le Christest le centre définitif de la vie intérieure. Le Christ a besoinde nous, comme il a eu besoin d’une femme pour venir dansce monde. Et pour le rejoindre, Teilhard nous montre quenous devons passer par le dépouillement intérieur, par la rési -gnation, qui n’est pas l’acceptation mais le retournement dumal et l’accueil de l’amour.

Poète, il nous a donné, aussi, des mots qui disent « la largeur,la hauteur et la profondeur » du divin, riches d’émerveil -lement ; des mots qui disent l’attente, la confiance, le feu deson désir de Dieu. Des mots qui vivent, auxquels il voudraitfaire dire l’indicible de Dieu, conscient que nous sommes tropsouvent impuissants devant le choix des mots. Grégoire deNazianze le chantait déjà :

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introduction

Tu as tous les noms,Comment t’appellerais-je,Toi le Seul qu’on ne peut nommer ?Ô toi, l’au-delà de toutComment t’appeler d’un autre nom ?

Nos aînés dans la foi, nos frères juifs l’avaient bien com-pris, puisqu’ils ne prononçaient pas Son nom.

Ce que certains aimeraientlui faire dire

Face aux questions qui agitent le monde d’aujourd’hui,beaucoup s’en réfèrent avec autorité à Teilhard et imaginentl’adhésion du père aux fantasmes actuels. Le cardinal deLubac se méfiait déjà des orientations perverses que certainspourraient donner aux intuitions du P. Teilhard ! Sa visionchristologique n’a rien à voir « avec le besoin actuel de rompre avec le passé, de couper les racines, de tout reprendreà zéro ! » Il ne faut pas essayer de récupérer sa pensée à desfins réductrices ni lui faire dire n’importe quoi, comme nousl’entendons trop souvent. Il était trop certain que l’Églisene peut qu’annoncer « l’inédit de Dieu », pour se faire l’échodes modes, de nos manques de repères, se mettre à la suitede nos ambitions, d’épouser nos fractures. L’Église ne peutêtre comprise que dans le dépassement ; le P. Teilhard en

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Œuvres, t. X, p. 111.36.

introduction

est certain. Elle peut parler au Monde, mais « pas à la manièredu monde ».

Le mariage des prêtres ? C’est vrai que pour l’Église, c’estune notion de discipline et non un article de foi. Mais pourlui la chasteté n’a jamais été vécue comme une contrainte,une ascèse, mais au contraire comme une plénitude, unemontée indispensable à la fécondité du sacerdoce et à la disponibilité du prêtre. « La chasteté ne passera pas. » Aucontraire, son inépuisable énergie, enfin pleinement recon-nue, rayonnera. « Être pur, autrefois c’était principalements’abstenir, se garder des taches. La chasteté demain s’appellerasurtout sublimation des puissances de la chair 36 ! » Il a sufaire de son fiat, lors de ses vœux prononcés, un magnificat.Il le dit souvent, il appartient à Dieu, tout à Dieu. Il pensemême que cette chasteté permet, seule, de vivre la plénitudedu sacerdoce. Beaucoup de mes amis prêtres m’ont dit lamême chose. Son regard sur cette question rejoint celui ducardinal Newman qui, avant sa conversion au catholicisme,n’avait pas voulu fonder un foyer, ayant mis Dieu dans savie. « Je ne m’appartiens plus », diront-ils l’un et l’autre. Sil’on est tout à Dieu, il n’y a, en effet, plus de place pourd’autres amours, d’autres obligations, d’autres désirs. Le pré-fet de la Congrégation pour le clergé répétait encore le23 mars 2011, lui donnant tout son sens, non de contraintemais de « question évangélique », que le célibat des prêtresétait « un don du Seigneur à vivre en plénitude ». Commela pauvreté et l’obéissance, elle est « à vivre avec une passion

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introduction

missionnaire intense ». Benoît XVI, en juin 2010, rappelaitaussi la beauté de ce célibat qui devait être considéré comme« un grand signe de foi, de la présence de Dieu dans lemonde… C’est le laisser vous prendre par la main, s’offrirentre les mains du Seigneur… c’est un acte de fidélité et deconfiance. »

Teilhard avait une admiration adorante pour la Femmequi permet à l’Homme de s’accomplir. Son rapport au féminin touche trop à l’essence des choses pour qu’il soit jamais équivoque, nous l’avons vu. Il a toujours pensé qu’ilexistait « une voie initiée par le féminin » qui n’est pas celletracée pour l’homme. Il a souligné la complémentarité entreles deux et il se méfiait, il l’a écrit à son amie Léontine Zanta,d’un « féminisme qui ne serait qu’un masculinisme, prônantl’égalité de deux entités non seulement différentes, mais quela polarité opposée attire et appelle à un achèvement ». Levrai féminisme pour lui, n’était pas « dans une parité ridi-cule », mais bien dans la mise en valeur de la richesse dela femme, dans l’altérité, dans la découverte de l’autre. Il regrette cette rivalité des sexes qui se trompe de combat etignore la richesse de la complétude !

Teilhard pensait que la femme avait un rôle à jouer, unrôle original d’écoute qui lui est propre. Il a eu beaucoupd’amies, il a toujours cherché chez elles une « pleine compré -hension et un soutien » et encore plus, comme en écho, lamaturation de ses propres pensées, le déclic qui les font advenir quand elles se cherchent encore. Il est conscient quele féminin arrache l’homme à lui-même et le révèle. Ces

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Agence Zenit, 10 octobre 2012.37.

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amitiés, chez lui, relèvent d’une véritable expérience maïeu-tique qui lui a permis de « voir plus clair dans le passé etprévoir plus net dans l’avenir ». Il savait, comme vient de larappeler récemment Mgr Léonard que « le prêtre représentele Christ époux venu épouser l’humanité » et que c’est pourcette raison que les femmes ne peuvent être appelées au sa-cerdoce et non « parce ce qu’elles sont moins capables oumoins dignes, au contraire 37 ». Par contre, la question dudiaconat pourrait être envisageable car elle ne procède pasdu même symbolisme, de la même contingence et je nepense pas que Teilhard y aurait été hostile.

Pour dépasser ces questions stériles d’égalité abusive etmal comprise, il faut placer le débat dans le domaine sym-bolique qui est aussi celui du mariage : l’union de l’hommeet de la femme se fait en référence à l’union du Christ et del’Église. Jésus n’a pas invité de femme à être apôtre, mais s’ill’avait désiré il aurait pu, comme il l’a fait si souvent, braverles coutumes de son temps, bousculer des tabous, parfois aupéril de sa vie. Il ne faut pas oublier, non plus, qu’à cetteépoque, dans les religions des pays voisins, Égypte, Chaldée,Syrie, dans la Grèce antique et dans Rome, il y avait desprêtresses. Ce choix n’était donc pas une timidité de la partde Jésus, mais une volonté délibérée et répondait à un projet.Il a appelé ses apôtres à perpétuer ses gestes, à répondre ainsià un appel de personne à personne, et pour la femme il a faitplus encore : ressuscité, au seuil du tombeau, c’est à unefemme qu’il s’adresse, lui donnant mission de témoigner,

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d’aller annoncer sa résurrection aux Apôtres. Pourquoi ?Parce que la femme est porteuse de vie, qu’il y a de l’universeldans son message ; elle est intuitive, anticipe parfois. À Cana,c’est à la prière de sa mère, à sa douce incitation que Jésusdont « l’heure n’était pas encore venue » accomplit son pre-mier signe. Le Christ a donc mis derrière le sacerdoce del’un et de l’autre des choses profondément différentes, de lamême manière que Dieu a créé l’Homme et la Femme pourêtre appelés à des finalités différentes et complémentaires,que l’on ne peut nier. Jean-Paul II pensait que les femmesétaient seules « capables de révéler le mystère indicible desâmes », qu’elles étaient « l’âme de l’Église » et qu’il fallaitnon seulement les encourager dans cette mission, mais les ypréparer. À elles d’annoncer, comme les femmes du tombeau,aux quatre coins du monde que Dieu est vivant !

Un mot de Hans Urs von Balthasar* dit bien toute la richesse et la subtilité du sacerdoce féminin : « La femme estl’enveloppant de l’Église. » Les bras de la Femme, commeceux de Marie au pied de la Croix, forment, en effet, le berceau de l’Église. La finalité de la Femme n’est pas decopier ni de s’identifier à l’Homme dans ses fonctions maisde générer un climat d’accomplissement, de plénitude danslequel l’Homme puisse mener à bien sa tâche à son terme.C’est même une donnée anthropologique qui tient, seule,en équilibre le devenir de l’humanité. L’égalité n’est pasl’identité, nous ne le répéterons jamais assez !

Marie, la femme par excellence, étymologiquement « cellequi fait voir », est celle qui exalte. Beaucoup de femmes dans

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Agence Zenit.38.François Cheng, Quand reviennent les âmes errantes, Albin Michel, Paris,39.

2012, p. 30.

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la Bible ont joué un grand rôle dans l’histoire du salut. Jepense que Teilhard aurait vu la vocation de la Femme dansl’Église et dans le dessein de Dieu, différente de celle del’Homme, un rôle prépondérant, pas celui de perpétuer ungeste mais celui de s’investir par sa différence. Il voyait beau-coup plus large et ne pouvait pas cautionner ces mouvementsétriqués qui demandent simplement la parité des rôles. Ilattendait un féminisme qui reconnaîtrait enfin la richesse etla valeur des différences. Il espérait qu’on donnerait un jourà la Femme dans l’Église la place de guide, d’inspiration,d’écoute qu’elle mérite, « apportant par intuition, un regardtellement différent et parfois plus riche que celui de l’Hommesur l’invisible ». N’est-ce pas ce qui est en train de se dessinerau Vatican où l’on reconnaît à la Femme un don particulierpour l’accompagnement spirituel ? Flamina Giovanelli, sous-secrétaire du Conseil Justice et Paix, en témoignait un jouren disant que ses « idées étaient prises en considération parceque c’étaient les idées d’une femme, complémentaires et doncnécessaires, pour un jugement objectif 38 ». François Cheng*dit aussi combien, si « l’harmonie de leurs âmes » est vraie,« la Femme offre à l’Homme une des voies sûres pour atteindre la plus haute dimension de lui-même 39 ».

Beaucoup essayent de récupérer Teilhard en évacuant lereligieux profondément attaché à sa foi. J’ai aimé ce que leP. Martelet a confié dans une interview récente et qui résume

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si bien l’essence de la spiritualité du P. Pierre Teilhard deChardin : « On n’est pas teilhardien par une approche scientifique ; on est teilhardien par le fait que l’on conçoitque l’œuvre créatrice de Dieu ne peut être comprise — del’intérieur de l’Évolution — que si l’on définit Dieu commeétant l’Amour absolu 40. »

Dans Teilhard aujourd’hui, la revue de l’Association Teilhard, octobre 2012.40.

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En lecture partielle…

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Les œuvres

Les Œuvres de Teilhard de Chardin publiées par les Édi-tions du Seuil sont citées dans le corps du texte selon la to-maison suivante :

• Le Phénomène humain, 1955 Tome I• L’Apparition de l’Homme, 1956 Tome II• La Vision du passé, 1957 Tome III• Le Milieu divin, 1957 Tome IV• L’avenir de l’homme, 1959 Tome V• L’Énergie humaine, 1962 Tome VI• L’Activation de l’énergie, 1963 Tome VII• La Place de l’Homme dans la nature, (1956) 1965 Tome VIII• Science et Christ, 1965 Tome IX

Bibliographie

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• Comment je crois, 1969 Tome X• Les Directions de l’avenir, 1973 Tome XI• Écrits du temps de la guerre, 1976 Tome XII• Le Cœur de la matière, 1976 Tome XIII

Les lettres et autres œuvres

Les autres œuvres ou les lettres de Teilhard, dont je nedonne en référence que les sigles proposés ici, sont :

AH Accomplir l’homme. Lettres inédites à Ida Treat et Rhoda deTerra, Grasset, 1968.

BT Blondel et Teilhard de Chardin, correspondance com mentéepar H. de Lubac, Beauchesne, 1965.

EP Être plus, Seuil, 1997.GP Genèse d’une pensée. Lettres 1914-1919, présentées par Alice

Teillard-Chambon et Max Henri Begouën et précédéesd’une introduction de Claude Aragonnès, Grasset, 1964.

IP Images et paroles, album réalisé par Jeanne Mortier et MarieLouise Auboux, Seuil, 1966.

J Journal 1915-1919, Fayard, 1975.LE Lettres d’Égypte, Aubier Montaigne, 1963.LER Lettres à Édouard Le Roy (1921-1946), Maturation d’une pen-

sée, éditions des Facultés jésuites de Paris en partenariat avecla Fondation Teilhard de Chardin, 2008.

LFL Lettres familières de Pierre Teilhard de Chardin mon ami(1948-1955), éd. par Pierre Leroy, Le Centurion, 1976.

bibliographie

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LHP Lettres d’Hastings et de Paris (1908-1914), introduction parHenri de Lubac, annotation par Auguste Demoment etHenri de Lubac, Aubier-Montaigne, 1965.

LI Lettres inédites à l’abbé Gaudefroy et à l’abbé Breuil, Le Rocher, Monaco, 1988.

LIV Lettres intimes à Auguste Valensin, Bruno de Solages, Henride Lubac, André Ravier, 1919-1955, introduction et notes parHenri de Lubac, Aubier-Montaigne, 1974.

LJB Lettres de guerre inédites. Pierre Teilhard de Chardin etJean Boussac, présentées par François Guillaumont, O.E.I.L,1986.

LJM Lettres à Jeanne Mortier, Seuil, 1984.LLS Correspondance (lettres de Teilhard de Chardin et de Lucile

Swan), Lessius, Bruxelles, 2009.LLZ Lettres à Léontine Zanta, introduction par Robert Garric et

Henri de Lubac, Desclée de Brouwer, 1965.LMB Le Rayonnement d’une amitié, correspondance avec la famille

Begouën 1922-1955, Lessius, Bruxelles, 2011.LV Lettres de voyage (1923-1955), recueillies et présentées par

Claude Aragonnès, Grasset, 1962.NL Notes de lecture, 1945-1947, présentation et notes de Gérard-

Henry Baudry, Médiasèvres, 2007.NLV Nouvelles lettres de voyage (1939-1955), recueillies et présentées

par Claude Aragonnès, Grasset, 1957.NR Notes de retraite 1919-1954, introduction et notes de l’abbé

Gérard-Henry Baudry, Seuil, 2003.TCC Teilhard de Chardin en Chine, Correspondance inédite, 1923-

1940, Museum d’histoire naturelle / Édisud, Paris / Aix-en-Provence, 2004.

bibliographie

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Études

Parmi les études sur Teilhard, nous donnons en premierlieu sous les sigles suivants les références des plus fréquem-ment citées.

CD Jules Carles et André Dupleix, Pierre Teilhard de Chardin,Centurion, Paris, 1991.

CC Claude Cuénot, Pierre Teilhard de Chardin. Les grandesétapes de son évolution, Plon, Paris, 1986.

CPU André Dupleix et Évelyne Maurice, Christ présent et uni-versel. La vision christologique de Teilhard de Chardin, Mame-Desclée, Paris, 2008.

PA Pierre Leroy, Hélène Morin, Solange Soulié, Pèlerin del’avenir. Le père Teilhard de Chardin à travers sa correspon-dance, Centurion, Paris, 1989.

PR Henri de Lubac, La Pensée religieuse du père Pierre Teilhardde Chardin, Cerf, Paris, 2002.

PCTG Gustave Martelet, Teilhard de Chardin. Prophète d’unChrist toujours plus grand, Lessius, Bruxelles, 2005.

• Arnould Jacques, Teilhard de Chardin, Perrin, Paris, 2009.• Association des amis de Pierre Teilhard de Chardin, Défis d’une

évangélisation renouvelée. Les apports de Pierre Teilhard de Char-din, Lessius, Bruxelles, 2013.

• Barbour George, Sur le terrain avec Teilhard de Chardin, Seuil,Paris, 1965.

bibliographie

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• Baudry Gérard-Henry, Teilhard de Chardin ou le retour de Dieu,Aubin, Saint-Étienne, 2007.

• —, Teilhard de Chardin et l’appel de l’Orient, Aubin, Saint-Étienne, 2005.

• —, Qui était Teilhard de Chardin ?, chez l’auteur, 1972.• —, Le Credo de Teilhard, Aubin, Saint-Étienne, 2003.• Benoît XVI, Jésus de Nazareth, tomes 1 et 2, Flammarion, Paris,

2007 et 2011.• Cheng François, Quand reviennent les âmes errantes, Albin Mi-

chel, Paris, 2012.• Choisy Maryse, Sur la route de Dieu on rencontre d’abord le

Diable, Émile Paul, Paris, 1978.• Corté Nicolas, La Vie et l’Âme de Teilhard de Chardin, Fayard,

Paris, 1957.• Côté Ghislaine, Le Cénacle. Fondements christologiques et spiri-

tualité, Beauchesne, Paris, 1991.• Donnadieu Gérard, Le Christ retrouvé, Saint-Léger, Le Cou-

dray, 2012.• Dupleix André, Prier 15 jours avec Pierre Teilhard de Chardin,

Nouvelle Cité, Paris, 2001.• Fondation Pierre Teilhard de Chardin et Association des amis

de Pierre Teilhard de Chardin, Cahiers Pierre Teilhard de Char-din, Seuil, Paris, huit volumes publiés entre 1958 et 1974.

• Holzer Vincent, Le Dieu trinité dans l’histoire, Cerf, Paris, 1995.• King omas M. et Euvé François, La Messe de Teilhard. Une

lecture de « La messe sur le monde », Médiaspaul, Paris, 2008.• Pontet Maurice, Pascal et Teilhard, témoins de Jésus-Christ,

Desclée de Brouwer, coll. Christus n° 27, Bruges / Paris, 1968.

bibliographie

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Page 60: Pierre Teilhard de Chardin - Furet du Nord

• Rabut Olivier, Dialogue avec Teilhard de Chardin, Cerf, Paris,1958.

• Ratzinger Josef, La Foi chrétienne hier et aujourd’hui, Cerf,Paris, 2005.

• Rivière Claude, En Chine avec Teilhard. 1938-1944, Seuil, Paris,1958.

• Solages Bruno de, Teilhard de Chardin. Témoignage et étudesur le développement de sa pensée, Privat, Toulouse, 1966.

• Terra Helmut de, Mes voyages avec Teilhard de Chardin, Seuil,Paris, 1965.

• Timbal Nicole, La Prière, chemin de joie, Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2007.

• —, Teilhard de Chardin, au feu de l’amitié, Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2009.

• —, Le Rosaire, une méditation à deux voix avec Teilhard de Char-din, Béatitudes, Nouan-le-Fuzelier, 2010.

• —, Les Anges, messagers de lumière, Béatitudes, Nouan-le-Fuze-lier, 2011.

bibliographie

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Table des matières

Préface, par François Euvé s.j. .................................................... 7

Avant-propos .............................................................................. 17

Introduction. Comment recevoir le message de Teilhard ? .... 27Ce que l’on a mal compris chez Teilhard ...................................... 28

Dans ses approches et ses idées .................................................. 28Dans les mots eux-mêmes ........................................................ 39

Ce que certains aimeraient lui faire dire ...................................... 45

Première partie

DU BAPTÊME DU RÉEL À UNE FOI COSMIQUE

Chapitre premier. La maturation d’une foi .............................. 55Une foi génétique ...................................................................... 55Les années de formation .............................................................. 66

Chapitre 2. L’influence éclairante de Newman ...................... 73Un autre regard sur Dieu .......................................................... 73Teilhard découvre les Pères de l’Église .......................................... 78

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Chapitre 3. Le « baptême du réel » .......................................... 83La guerre 1914-1918 ................................................................ 85Son immense curiosité de la nature .............................................. 99Son approche des cultures qui nous sont étrangères ........................105L’âme du monde ........................................................................113La découverte du féminin ..........................................................118

Chapitre 4. Une lumière au bout du tunnel ............................123

DEUXIÈME PARTIE

À LA RECHERCHE D’UN CHRIST« TOUJOURS PLUS GRAND »

Chapitre premier. La foi, la science et l’action ........................133La foi au questionnement de la science ........................................133La foi et l’action ........................................................................145

Chapitre 2. Son désir de rénovation ........................................155Quand l’immobilisme devient une infirmité ! ..............................155« Elle est vivante, la Parole de Dieu » ..........................................166Une morale de « mouvement » ....................................................175

Chapitre 3. Une autre lecture de la Parole de Dieu ................183La Création : « L’œuvre de Dieu n’est pas finie » ..........................183L’évolution ouvre à une dimension trinitaire ................................190

Chapitre 4. Un autre regard sur le problème du mal ..............203Le mal précède l’être humain ......................................................203« La mort nous livre complètement à Dieu » ................................213L’enfer « échappe au processus béatifiant » ....................................221

Chapitre 5. L’intuition d’un Univers « christifié » ..................225Le Christ axe du christianisme ....................................................225L’univers christifié ......................................................................228« Le soleil se lève en avant » ........................................................232La foi au monde par le Christ ....................................................237Teilhard et l’esprit du concile ......................................................242

table des matières

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TROISIÈME PARTIE

LA PLÉNITUDE DE SA FOI

Chapitre premier. La cohérence entre foi et science ................251Cohérence incontournable ..........................................................251Cohérence nécessaire ..................................................................255Cohérence « mystique » ..............................................................258

Chapitre 2. Son « obéissance de vision » ..................................265Sa fidélité novatrice ....................................................................265Obéissance à l’Église ..................................................................271Obéissance à l’ordre des Jésuites ..................................................285

Chapitre 3. Son attachement aux fondamentaux ....................293La certitude d’une présence transfigurante ..................................293La tradition derrière une approche nouvelle ................................296Fidélité « sans restriction » aux dogmes ........................................300

Chapitre 4. « Heureux de n’aimer que le Christ » ..................307Prêtre avant tout ........................................................................307Un homme de prière ..................................................................316Son espérance eschatologique ......................................................327

QUATRIÈME PARTIE

DE LA FIDÉLITÉ À LA MYSTIQUE

Chapitre premier. Une prière vivifiée ......................................339L’Incarnation : le possible de la rédemption ..................................340La Transfiguration : « le divin rayonnant » ................................345L’Eucharistie : « le premier des sacrements » ................................347La Croix « où meurt la mort vaincue » ........................................358Le Sacré-Cœur « qui nous livre le mystère de Dieu » ....................363La Résurrection : le vivant qui nous précède ................................370L’Esprit saint : le feu sur la terre ..................................................374L’Assomption : « la première en chemin » ....................................380

table des matières

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Chapitre 2. Une foi conquérante ..............................................383Une foi indéfectible ....................................................................383Visionnaire et prophète ..............................................................388« Rendre témoignage de la vérité » ..............................................392« La Terre promise » ..................................................................400Un charisme de sainteté ? ............................................................406Une mystique d’action et d’abandon ............................................413

Chapitre 3. Ce qu’il a apporté au monde d’aujourd’hui ........421Une foi dynamique : « la route du feu » ......................................422Une foi qui nous rejoint dans nos aspirations ................................425La reconnaissance de ses intuitions ..............................................427Éveilleur d’âmes ........................................................................431« N’ayez pas peur » ....................................................................434

CONCLUSION

Conclusion ..................................................................................439

Postface. Un homme de Dieu et une femme de foi,par ierry Magnin ....................................................................445

Remerciements de l’auteur ........................................................451

Guide des personnes et des termes principaux ........................455

Bibliographie ..............................................................................461Les œuvres ..................................................................................461Les lettres et autres œuvres ..........................................................462Études ......................................................................................464

Table des matières ......................................................................467

table des matières

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Achevé d’imprimer le 10 septembre 2015sur les presses de l’imprimerie Bietlot, à 6060 Gilly (Belgique)

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Nicole Timbal

Nic

ole

Tim

balPierre Teilhard de Chardin

À travers l’ensemble des écrits de Pierre Teilhard de Chardin,Nicole Timbal dresse le portrait-souvenir de celui qui a été pourelle un initiateur, un guide, un compagnon spirituel. Une valse àquatre temps qui nous fait découvrir successivement un Teilhard« baptisé dans le réel » au contact de la Grande Guerre, un jésuitequi manifeste son désir de faire passer « son évangile » dans lemonde en dénonçant les frilosités de l’Église d’alors, un visionnaireaffirmant sa fidélité rénovatrice aux fondamentaux de la foi chré-tienne et un prêtre pieux, fervent et d’un charisme exceptionnel.Voici une approche simple et pleine de chaleur des points essentielsde la pensée teilhardienne concentrés dans un livre accessible etpropre à toucher un public hésitant à le découvrir. Cette prome -nade méditative à travers les textes de Teilhard démontre quellepuissance de vie son œuvre recèle aujourd’hui encore.

Nicole TimbalNicole Timbal (1936-2013) a découvert le Christ au lycée, notammentau travers des œuvres du P. Teilhard de Chardin. Après ses études depharmacie et de biologie, elle a assumé de nombreuses responsa -bilités en paroisse. Elle a publié plusieurs ouvrages dont deux autressur Teilhard : Teilhard de Chardin, au feu de l’amitié (2009) et Lerosaire. Un chemin de contemplation. Méditation à deux voix avec Teilhard de Chardin (2010).

Pierre Teilhard de Chardin

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9 782873 565824

ISBN 978-2-87356-582-4Prix TTC : 24,50 €

Un homme de Dieuau cœur de la matière

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