nos remerciements à m. vincent berger , greffier de ... · section 2 examen du respect des droits...
TRANSCRIPT
1
Nos remerciements à M. Vincent BERGER , Greffier de section à la Cour Européenne des droits de l’homme, Professeur au Collège d’Europe.
2
« Article 7 - Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale
protection de la loi . Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration, contre toute provocation à une telle discrimination . » Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948
« Article 26 - Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans
discrimination à une égale protection de la loi . A cet égard, la loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et efficace contre toute discrimination , notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique et de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation . » Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966
« Article 6-1 – Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. » Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, 1950
3
Table des Abréviations des Revues
A.J.D.A.: Actualité Juridique de Droit Administratif.
Al : Alinéa.
Art : Article.
Banque et Droit : Revue Banque et Droit.
Bull. Joly Bourse : Bulletin Joly Bourse et Produits financiers.
Bull. Joly : Bulletin Joly sociétés.
Bull. Civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de Cassation (chambres civiles).
Bull. C.O.B. : Bulletin mensuel de la C.O.B..
B.R.D.A. : Bulletin Rapide de Droit des Affaires.
C. Civ. : Code Civil.
D. : Dalloz
D. Affaires: Dalloz Affaires.
Décr. : Décret.
Dr. et patrimoine : Droit et patrimoine.
Dr. sociétés : Droit des sociétés.
G.P. : Gazette du Palais.
J.C.P., E.: Jurisclasseur périodique (Semaine Juridique), édition Entreprise.
J.C.P., G.: Jurisclasseur périodique (Semaine Juridique), édition générale.
J.O. : Journal officiel.
Justices : Revue Justices
Lamy actual. Jur.: Lamy Actualité Juridique.
Obs. : Observations.
Option Finance : Revue Option Finance.
Ordo. : Ordonnance.
P.A. : Petites Affiches.
Procédures : Revue Procédures
Règl. : Règlement.
Règl. Int. : Règlement intérieur.
R.D.B.B. : Revue de Droit Bancaire et de la Bourse.
R.F.D.A.: Revue française de Droit Administratif.
R.J.D.A.: Revue de jurisprudence de Droit des Affaires.
R.J.com.: Revue de jurisprudence commerciale.
4
R.R.J. : Revue de recherche juridique.
Rev. Soc. : Revue des sociétés.
Rev. sc. crim.: Revue de science criminelle et de droit pénal comparé.
Rev. trim. dr. com.: Revue trimestrielle de droit commercial.
R.T.D.E.: Revue trimestrielle de droit européen.
R.T.D.com. : Revue trimestrielle de droit commercial et de droit économique.
R.T.D.H.: Revue trimestrielle des droits de l’homme.
Quot. Jur.: Quotidien Juridique.
5
La C.E.D.H., l’équité et l’égalité des armes dans le cadre des sanctions en manquement
aux règlements de la C.O.B..
Partie I L’équité et l’égalité des armes : des principes s’imposant à la C.O.B..
Titre I L’application des prescriptions de l’art. 6 à la C.O.B..
Chapitre I Garanties institutionnelles de l’art. 6 et jurisprudence européenne.
Section 1 Le droit à un « tribunal ».
§ 1 La notion de tribunal au sens européen du terme.
§ 2 Application des caractéristiques du « tribunal » à la C.O.B..
Section 2 La matière pénale au sens du droit européen.
§ 1 Elargissement de la « matière pénale » par le juge européen.
§ 2 Assouplissement de la jurisprudence européenne.
Chapitre II Assimilation des sanctions de la C.O.B. à des sanctions pénales.
Section 1 Octroi du pouvoir répressif dans un souci d’efficacité de la fonction de régulation
de la C.O.B..
§ 1 Les sanctions pécuniaires, de nature administrative, prononcées par la C.O.B..
§ 2 Soumission du pouvoir répressif de la C.O.B. à un régime protecteur.
Section 2 Réception de la jurisprudence européenne dans un souci d’une bonne
administration de la justice.
6
§ 1 Reconnaissance du caractère « pénal » des sanctions administratives prononcées par la
C.O.B..
§ 2 L’application de la jurisprudence européenne aux procédures diligentées par la C.O.B..
Titre II Les incidences de cette application.
Chapitre I Au niveau de l’application de l’art. 6 à la C.O.B..
Section1 Controverses inhérentes à la nature de l’organe sanctionnateur.
§ 1Contradiction entre qualification et régime procédural applicable aux autorités
administratives.
§ 2 Admission de l’application de l’art. 6 aux sanctions administratives.
Section 2 Contrôles des décisions de la C.O.B..
§ 1 L’obligation de motivation et de publication des décisions de la C.O.B..
§ 2 Contrôle juridictionnel de l’action de la C.O.B..
Chapitre II Au niveau de l’exercice du pouvoir de sanction de la C.O.B..
Section 1 La nécessaire circonscription du pouvoir répressif de la C.O.B..
§ 1 Le principe non bis in idem.
§ 2 Le principe de personnalité des poursuites et des sanctions.
Section 2 Les situations critiquables de l’exercice du pouvoir de sanction de la C.O.B..
§ 1 L’absence de prescription des poursuites pour manquement aux règlement de la C.O.B..
7
§ 2 La capacité du président de la C.O.B. d’ester en justice.
Partie II L’importance de l’équité pour un procès à armes égales.
Titre I L’égalité des armes par l’exigence d’équité procédurale.
Chapitre I La C.O.B., structure garante d’un procès impartial.
Section 1 Les conditions d’un procès impartial.
§ 1 La condition d’impartialité personnelle des « juges ».
§ 2 La condition d’impartialité fonctionnelle de la juridiction.
Section 2 Confrontation du fonctionnement de la C.O.B. aux prescriptions du procès
impartial.
§ 1 L’insuffisance de séparation des fonctions d’instruction et de jugement.
§ 2 La nécessaire séparation des fonctions de poursuite et de jugement.
Chapitre II La C.O.B., structure garante d’un procès équitable.
Section 1 La garantie autonome d’égalité des armes.
§ 1 L’égalité des armes composante de la garantie d’un procès équitable.
§ 2 Débat contradictoire.
Section 2 Modalités du débat garantes d’un procès équitable.
§ 1 Le droit relatif au droit à la publicité.
8
§ 2 Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable.
Titre II L’égalité des armes par le respect des autres garanties procédurales.
Chapitre I Les droits de la défense dans la procédure en sanctions de la C.O.B..
Section 1 L’affirmation de la garantie des droits de la défense et la C.O.B.
§ 1 Etendue de la garantie.
§ 2 Expression de la garantie : le principe du débat contradictoire.
Section 2 Examen du respect des droits de la défense par la C.O.B..
§ 1 Lors de l’instruction de l’affaire.
§ 2 Au stade de la prise de décision.
Chapitre II Le droit au respect de la présomption d’innocence dans la procédure en sanctions
de la C.O.B..
Section 1 Affirmation du droit au respect de la présomption d’innocence.
§ 1 L’interdiction d’affirmer prématurément la culpabilité de l’accusé.
§ 2 Le nécessaire respect de la présomption d’innocence et le Collège de la C.O.B..
Section 2 Les effets d’une méconnaissance de la présomption d’innocence.
§ 1 Limites au pouvoir d’évocation de la Cour d’appel de Paris.
§ 2 L’impunité du transgresseur.
9
Introduction
1.- Quel condamné n’a pas rêvé tout au fond de lui, de se refaire un passé en effaçant peines
pécuniaires et humiliations d’un claquement des doigts ? Une jurisprudence récente, fondée
sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales, (ci-après C.E.D.H.), paraît être d’un recours intéressant pour la réalisation
de ce rêve hors du commun.
2.- Actuellement, le droit et la jurisprudence de la Convention européenne, se situent au
centre de la vie juridique nationale et internationale, parce que régissant bon nombre de
domaines. Rares sont ceux qui échappent à leur emprise. Ceci n’était pas évident dès
l’origine. Les rédacteurs de la Convention, visaient uniquement à garantir des droits
fondamentaux des personnes physiques et des libertés individuelles, contre l’arbitraire de la
souveraineté des Etats. C’est en raison de l’interprétation extensive dont elle a fait l’objet
par la jurisprudence européenne et parce que directement invocable devant les juridictions
nationales, qu’elle est en passe de devenir une véritable source du droit et selon M. le
professeur Jean-François FLAUSS1, du droit des affaires. D’une part, elle proclame des
prérogatives dites substantielles ; telles que la liberté d’expression, ou l’interdiction de
discrimination, d’autre part elle énumère des garanties procédurales, les unes et les autres
essentielles pour mener à bien l’objectif fondamental de la Convention ; celui de bonne
justice.
3.- L’art. 6 de la Convention européenne a un domaine vaste. Derrière l’exigence d’équité
procédurale qu’il proclame, il prévoit des garanties, qui n’établissant pas elles-mêmes des
libertés, en assurent la sauvegarde effective, de celles prévues dans la Convention.
Matériellement, le dit article prévoit que toute personne à qui sont reprochés des faits ayant
trait à ses droits et obligations de caractère civil ou constituant des accusations relevant de la
matière pénale, a le droit à ce qu’elle soit entendue de manière équitable, publique et dans
un délai acceptable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi et apte à
décider. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès à la salle d’audience est
susceptible d’être interdit à la presse et au public pendant tout ou une partie du procès pour
des raisons de moralité, d’ordre public, ou de sécurité nationale, lorsque tel est l’intérêt des
1 J.-F. FLAUSS, La C.E.D.H., une nouvelle interlocutrice pour le juriste des affaires, R.J.D.A., 1995, p. 524.
10
mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès, ou il est jugé nécessaire par
le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait susceptible de porter
atteinte aux intérêts de la justice (art. 6 §1, de la C.E.D.H.). Toute personne est présumée
innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement constatée, (art. 6 § 2 de la C.E.D.H.).
Enfin tout accusé a notamment le droit d’être informé des griefs dont il est l’objet ; le droit
de disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense, le droit de se défendre ou de se
faire assister par un défenseur de son choix ainsi que le droit d’interroger ou de faire
interroger les témoins et le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète (art. 6 § 3,
de la C.E.D.H.).
Ainsi l’art. 6 de la Convention, à travers la protection d’un certain nombre de droits
procéduraux, consacre dans une société démocratique, caractérisée par la prééminence du
droit, un procès équitable.
4.- La notion de procès équitable est une notion large en droit européen. L’expression
procès se réfère à une difficulté de fait ou de droit soumise à l’examen d’un juge ou d’un
arbitre. Celle d’équité2 empruntée du latin aequitas signifie : égalité, équilibre, morale,
esprit de justice, dérivé de aequus, égal, d’où impartial3. Le Vocabulaire Henri CAPITANT4
dégage cinq sens dont les quatre derniers peuvent être regroupés sous l’idée commune
d’atténuation de la règle de droit par des considérations particulières, de dépassement du
droit pour tendre vers la justice, justice supérieure au droit positif ; l’autre sens serait
l’égalité.
Les deux termes d’équité et d’égalité sont directement mis en relation, puisque parmi
les garanties du procès équitable, figure notamment l’égalité des armes. En d’autres termes
nous sommes dans l’hypothèse où la règle de droit prescrit l’équité. Et l’égalité est un des
instruments de réalisation de cette équité. Dès lors, l’art. 6 envisagé dans sa globalité 2 Dès l’antiquité, nous rencontrons l’idée d’équité. Elle est par exemple très présente chez Aristote, mais il la
conçoit comme une vertu, dont les effets doivent corriger les insuffisances du droit positif : la loi se caractérise
en effet par sa généralité. Elle n’est donc pas en mesure de s’adapter aux cas particuliers. En revanche l’équité
permet de respecter la particularité de chaque situation. Cependant, l’équité dont il est question à l’art. 6 § 1 n’est
pas celle qui s’oppose au droit ; ce n’est pas le dépassement du droit au nom des principes supérieurs. 3 Dans le dictionnaire historique de la langue française, éd. Le Robert, sous la direction d’Alain REY, V° Equité,
il s’agit de la « juste appréciation de ce qui est dû à chacun, selon un principe de justice naturelle, parfois
divine ». Selon Ph. ZESTAZ, Rép. Dr. civil, V° Equité, n°1, l’équité serait tantôt désobéissance à la loi lorsque
le juge écarte la règle de droit pour rendre un jugement « en équité », c’est à dire supposé plus juste que l’aurait
permis l’application du droit strict, tantôt l’adaptation de la règle de droit à un cas particulier, tantôt expression
d’une idée de justice comme fondement de droit. 4 V° Equité, PUF 1994, sous la direction de Gérard CORNU.
11
lorsqu’il se réfère au procès équitable, c’est davantage la racine equus, l’idée d’équilibre5,
qu’il faut retenir, pour mesurer les enjeux d’un procès équitable. De cette manière, tout
justiciable peut jouir de justice, d’égalité. C’est bien de l’égalité des armes dans un procès
qu’il s’agit, pour réaliser l’équité que cet article s’efforce à promouvoir.
5.- Le droit à un procès équitable, objet de l’art. 6 envisagé dans son ensemble, considéré
par la Cour européenne comme ayant une « place centrale »6 dans la Convention car étant
« consubstantiel à l’esprit même de la Convention »7, les autres garanties ne servant que de
critères, des éléments de celui-ci. Néanmoins, ni le mot égalité, ni le mot d’égalité des armes
n’y apparaissent en des termes exprès. Il s’agit plutôt de l’œuvre d’une qualification
jurisprudentielle, envisageant celle-ci comme instrument de l’équité. Par ailleurs, à
plusieurs reprises, la Cour européenne a rappelé que « le principe de l’égalité des armes est
compris dans la notion de procès équitable inscrite à l’art. 6 § 1 »8. Ce principe d’égalité
des armes, que ce soit dans un procès concernant un droit civil, ou tout particulièrement un
procès pénal, sous-entend qu’aucune des deux parties ne doit être désavantagée dans sa
relation avec l’autre. Concept large, il englobe les droits des paragraphes 2 et 3 de l’art. 6 de
la Convention afin de pouvoir être respecté. La garantie du procès équitable représente le
standard européen de bonne justice, dont nous trouvons des illustrations dans le caractère
public des audiences, dans l’exigence d’un tribunal indépendant et impartial. Ce sont ces
garanties qui assurent au justiciable dans un Etat de droit, le droit à un procès loyal,
équilibré. Le droit à un procès équitable, c’est le procès équilibré entre toutes les parties. En
essayant d’assurer le respect de celui-ci, ces garanties veillent à promouvoir l’idéal de
justice.
Force est de constater pourtant, que bon nombre de droits processuels consacrés par le
texte européen, faisaient déjà partie intégrante de l’ordre juridique interne en raison de leur
présence dans des textes à valeur constitutionnelle, ou en raison de leur qualité de principe
général de droit. Tel est le cas en l’occurrence, pour le droit au respect de la présomption
d’innocence, reconnu également par l’art. 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen du 26 août 1789. Ainsi, l’art. 6 n’a pas apporté davantage de protection par rapport
au droit interne. 5 Et non pas, l’idée d’être juste dans le jugement rendu, qui n’a pas sa place dans le procès équitable, car elle
mène au déséquilibre et à l’inégalité entre justiciables. 6 C.E.D.H., aff. SUNDAY TIMES, du 26 avril 1979, série A, n°30, §34. 7 J.-C. SOYER, M. DE SALVIA, L’art. 6, L.-E. PETTITI, P.-H. IMBELT, E. DECAUX, ECONOMICA
Commentaire article par article, 1999,p. 239. 8 C.E.D.H., aff. NEUMEISTER, in J.-C. SOYER, M. DE SALVIA, préc.
12
6.- L’intérêt pour le justiciable à invoquer la norme internationale réside ailleurs. En réalité,
ce sont les interprétations délivrées par la Cour européenne des droits de l’homme, qui
donnent une toute autre dimension à ces dispositions. En effet, la Cour a tendance à adopter
une méthode d’interprétation « finaliste ». Elle est par là même, amenée, à dégager une
interprétation autonome des termes de la Convention, et elle ne se considère pas liée ni par
les qualifications de droit interne, ni par le sens ordinaire des mots. Tel est le cas des
concepts de « tribunal indépendant et impartial », « d’accusation en matière pénale », de
« loi », ou de « délai raisonnable ». De la sorte, les plaideurs qui se réfèrent devant le juge
français aux notions puisées dans la Convention, cherchent à bénéficier de la signification
originale donnée à ces concepts par le juge européen. Or, malgré la force obligatoire de
l’art. 6 de la C.E.D.H., dans l’ordre juridique interne, il n’en va pas de même pour la
jurisprudence de la Cour européenne, dont les décisions sont revêtues d’une autorité relative
de la chose jugée. Il est loisible aux Etats de s’y conformer ou pas, sauf à prendre le risque
de se voir condamner par la Cour européenne. Il existe de plus l’inconvénient d’analyses
divergentes des décisions européennes par les juridictions d’ordre interne. Tel a été le cas,
jusqu’à très récemment entre la Cour de cassation et le Conseil d’Etat quant à l’application
de l’art. 6 aux sanctions administratives. Ce risque est accentué en raison de l’absence de
tout mécanisme de renvoi préjudiciel permettant aux juridictions nationales de se renseigner
auprès de la Cour de Strasbourg quant au sens à attribuer à tel ou tel article.
7.- Dans le cadre du droit boursier, la jurisprudence française relative à la Convention
européenne est relativement récente. Sans doute parce que cette dernière ne s’est intéressée
à ce domaine qu’à partir du moment où a été octroyé par la loi du 2 août 1989, un pouvoir
sanctionnateur à la Commission des opérations de bourse (ci-après C.O.B.), car n’oublions
pas que l’art. 6 s’estime compétent pour les litiges afférents au domaine civil, ou au
domaine pénal.
8.- La C.O.B., a été instituée par l’ordonnance n°67-833 du 28 septembre 1967, sur le
modèle de la Securities Exchange Commission des Etats-Unis née en 1933. Autorité de
régulation des marchés financiers, créée pour encadrer de manière satisfaisante les rapports
économiques, et donner des solutions pertinentes à des situations nouvelles auxquelles les
administrations traditionnelles ne sont pas bien adaptées9, elle se caractérise actuellement 9 La C.O.B. pour examiner les dossiers qui lui sont soumis, réunit des spécialistes que l’on ne trouve pas
habituellement dans la fonction publique ; ceux-ci doivent avoir une bonne connaissance des pratiques et
comportement des agents économiques. Par ailleurs, ils ont une bonne connaissance des droits spécifiques et des
terminologies en vigueur dans les autres pays économiquement importants afin de bien permettre à la C.O.B.
d’exercer ses propres pouvoirs et suivre les évolutions opérées dans le domaine financier. De manière générale
13
par une concentration de pouvoirs, qui lui confère un caractère profondément original et
nouveau. En effet elle dispose d’une gamme complète de pouvoirs, parmi lesquels celui de
réglementer, prendre des décisions individuelles et sanctionner.
Son apparition s’inscrit dans un mouvement de désengagement de l’Etat de l’organisation et
le fonctionnement des marchés financiers afin de les rendre indépendants et par la même les
soustraire des pressions d’intérêts particuliers. Toutefois, l’Etat, gardien de l’intérêt général,
dispose de multiples pouvoirs d’intervention. En effet, il peut modifier ou redresser
directement les conditions de fonctionnement des marchés ou plus généralement des
relations économiques. S’il les abandonne, pour laisser l’établissement de l’équilibre
économique aux acteurs privés et aux mécanismes des marchés, il doit encadrer ces
mécanismes par un très grand nombre de règles tendant à les rendre loyaux et efficaces.
L’ordonnance de 1967, a institué la C.O.B. en vue de protéger l’épargne nationale par
la surveillance du marché financier et pour contribuer à son développement rapide en raison
de l’interdépendance de ce dernier avec les autres marchés financiers. Depuis, elle a été
remaniée à plusieurs reprises, toujours dans un but d’affirmation de l’autorité et de
l’indépendance de la C.O.B. et de renforcement des pouvoirs de celle-ci.
9.- En vertu de l’art. 1 de l’ord. de 1967, la C.O.B. a pour mission essentielle d’assurer la
transparence des opérations qui se déroulent sur les instruments financiers. Elle veille :
-à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers et tous autres
placements donnant lieu à appel ;
-à l’information des investisseurs ;
-au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers, y compris les marchés de gré
à gré. C’est ainsi, qu’elle assure la surveillance et régulation de l’ensemble des opérations
faisant appel à l’épargne publique.
Initialement en comparaison avec le tout puissant S.E.C. américain, elle apparaissait
particulièrement démunie de moyens d’action. En effet, elle ne pouvait que saisir les
tribunaux pour faire respecter son action. De plus lorsque le comportement transgresseur
était susceptible de constituer une infraction pénale, la C.O.B. était tenue d’en informer le
procureur de la République qui se réservait le soin d’apprécier s’il devait engager des
poursuites ou non.
10.- Pour accomplir avec efficacité sa mission, elle a préféré dans un premier temps,
utiliser ses armes techniques, telles que le refus de cotation des titres, ou le refus de visa de
nous pouvons considérer que la C.O.B. constitue une très forte garantie du respect, des règles nécessaires à la
sécurité des transactions internationales.
14
notes d’information. Cependant, au fur et à mesure que ses exigences relatives au respect
des textes légaux et de sa propre réglementation s’est accrue, elle a rencontré de résistances
pour se faire respecter et assurer la transparence des transactions. De plus, l’avènement du
phénomène d’internationalisation des marchés, accompagné d’une internationalisation des
normes - notamment sous l’influence anglosaxone - a renforcé la nécessité d’un
accroissement de ses pouvoirs afin de pouvoir répondre aux nouveaux besoins des
opérateurs économiques. C’est pourquoi le législateur à la fin des années quatre-vingt, est
intervenu et l’a doté avec la loi n°89-531, du 2 août 1989 intitulée « Sécurité et
transparence du marché financier », de pouvoirs supplémentaires considérables; notamment
un pouvoir de sanction propre.
Dans le cadre de ce pouvoir la C.O.B. a aussi un pouvoir d’injonction qui lui est
conféré par l’art. 5-II de la loi (art. 9-1 nouveau de l’ord. de 1967), lequel est indépendant
du pouvoir de prononcer des sanctions ; c’est à dire que les sanctions peuvent toujours être
imposées, même en l’absence d’injonctions. La C.O.B. peut prendre des mesures
notamment lorsque les pratiques contraires à ses règlements ont pour effet, soit de fausser le
fonctionnement du marché, soit de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu’ils
n’auraient pas obtenu dans la cadre normal de celui-ci; et encore, soit de porter atteinte à
l’égalité d’information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts, soit enfin de
faire bénéficier les émetteurs et les investisseurs des agissements d’intermédiaires,
contraires à leurs obligations professionnelles. Dans ce cadre, selon l’art. 5-III de la loi de
1989 (art. 9-2 nouveau de l’ord. 1967), la C.O.B. peut prononcer les sanctions suivantes :
une sanction pécuniaire ne pouvant excéder dix millions de francs; lorsque des profits ont
été réalisés, une sanction pécuniaire ne pouvant excéder le décuple de leur montant, (la
C.O.B. peut également ordonner la publicité de la décision dans les journaux ou dans la
presse qu’elle désignerait).
11.- L’attribution de ce pouvoir de sanction financière à la C.O.B. a contribué à modifier
les perspectives : son exercice lui a permis non seulement d’améliorer l’efficacité de son
intervention, mais encore de conforter son autorité. Cependant, accorder un tel pouvoir à
une autorité administrative indépendante10 n’a pas manqué de susciter de vives critiques.
En effet, des craintes subsistaient à ce que cet organisme administratif – même s’il est
qualifié avec insistance d’ « indépendant » afin d’occulter sa véritable nature – use
arbitrairement la fonction administrative ainsi confiée au détriment des garanties des droits
10 La C.O.B. depuis la loi n°96-597, du 2 juillet 1996 de Modernisation des activités financières, a été
officiellement reconnu d’autorité administrative indépendante.
15
du justiciable. En effet, il a été invoqué que ce pouvoir de sanction allait à l’encontre du
principe de séparation des pouvoirs. Ceci parce que la loi du 2 août 1989, reconnaît à la
C.O.B. un pouvoir de sanction en même temps que son pouvoir réglementaire11 et prévoit
que le premier peut intervenir pour réprimer la méconnaissance du second. Il y avait risque
pour certains juristes d’une utilisation de la fonction normative par la fonction répressive
afin de permettre la répression la plus large.
Il a fallu que le Conseil constitutionnel élabore les raisonnements juridiques nécessaires
pour apaiser les préoccupations de ces juristes et reconnaisse la constitutionnalité de
l’existence dudit pouvoir; dans les limites des principes et des procédures du droit pénal
qu’il a précisé. D’importantes garanties de fond ont été posées; non-rétroactivité de la loi
pénale la plus sévère, le principe de légalité des infractions et des sanctions, le respect du
principe de proportionnalité entre la peine et les faits délictueux, ainsi que de garanties
procédurales ; telles que les droits de la défense, la motivation, le sursis à l’exécution. La
nécessité du pouvoir de sanction de la C.O.B. tient notamment à des considérations
pratiques. Il est important en raison de la rapidité de son intervention, et constitue une
solution contre l’engorgement des tribunaux judiciaires.
12.- Cependant, force est de constater que la double incrimination administrative et pénale
des infractions boursières est contestable. Ceci de surcroît car elle peut opérer un cumul de
poursuites et de sanctions pour un même fait. En effet l’art. 10-1 de l’ord. du 28 sept. 1967
prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans et une amende de dix
millions de francs dont le montant peut-être porté au-delà de ce chiffre, jusqu’au décuple du
montant du profit éventuellement réalisé, sans que l’amende puisse être inférieure à ce
même profit.
Par ailleurs le pouvoir de sanction de la C.O.B. se trouve encadré par le principe de
personnalité de poursuites et des sanctions qui prévoit l’engagement de poursuites
uniquement à l’encontre de l’auteur des faits répréhensibles et par le contrôle juridictionnel
exercé par la Cour d’appel de Paris. Si le pouvoir de sanction des autorités du marché n’est
pas en lui-même contesté, ses modalités de mise en œuvre lors d’une procédure en sanction
sont soumises - en raison de leur caractère répressif - aux garanties procédurales prévues par
l’art. 6 de la Convention européenne.
11 La C.O.B. pour assurer au mieux sa mission, élabore des règlements. Les règlements le plus souvent
transgressés sont le règlement n°98-02 relatif à l’information du public, le règlement n°90-04 relatif à
l’établissement des cours et n°90-08 sur l’utilisation d’une information privilégiée.
16
En effet, la C.E.D.H. en vertu de l’art. 55 de la Constitution de 1958, a une autorité
supérieure aux normes internes. Ainsi les garanties fondamentales de l’art. 6, ont vocation à
bénéficier à toute personne, en raison de la prévalence du traité sur l’ordre juridique interne.
Cette possibilité explique que les justiciables procèdent à un contrôle stricte de la
conformité de la procédure en sanctions de la C.O.B., avec l’art. 6 de la C.E.D.H. afin de
vérifier si elle respecte les caractéristiques du procès équitable. Nous en déduisons alors
facilement, que l’application de l’art. 6 de la C.E.D.H., est souvent utilisée dans le but de
faire échouer les dites procédures dont l’irrégularité a pour origine un texte (en l’occurrence
un décret) en contradiction avec le droit européen. Ce dernier constitue une arme pour
gagner un procès. La mise en œuvre du pouvoir de sanction de la C.O.B. repose sur des
règles de procédure, prévues actuellement par le décret n°90-263 du 23 mars 1990 dans sa
rédaction issue du décret n°2000-721 du 1er août 2000 qui s’intitule désormais « De la
procédure d’injonction, des enquêtes et de la procédure de sanction »12.
Le décret de 2000 est venu purger certains des vices de la procédure organisés par le décret
de 1990, dans sa rédaction issue du décret n°97-774 du 31 juillet 1997, afin de renforcer la
caractère équitable de la procédure. Désormais, lors de la mise en œuvre de la procédure en
sanctions, il est prévu une répartition de rôles; de poursuite, d’instruction et de jugement
entre des personnes différentes. Ainsi le déroulement de celle-ci se fait en termes
impartiaux, tel qu’il est exigé par l’art. 6 § 1.
13.- Cependant, il existe encore des situations critiquables indirectement liées avec
l’engagement d’une procédure ; telles que l’absence de prescription des poursuites pour
manquement aux règlements de la C.O.B., ainsi que la capacité du président d’ester en
justice. L’analyse des récentes décisions prononcées par la Cour de cassation met en
évidence une volonté d’étendre le domaine des diverses exigences du procès équitable, afin
d’assurer une protection toujours plus effective des justiciables. La C.O.B. est soumise à
celles-ci même si elles aboutissent à l’enfermer à un mécanisme procédural lourd en raison
des prescriptions qu’elles lui imposent. Dans le cas contraire, elle risque de voir ses
décisions annulées et son pouvoir paralysé. La Cour européenne a toujours admis qu’un
organe non qualifiable de « tribunal » en droit interne peut être soumis aux exigences du
procès équitable; il suffit que cette autorité puisse infliger des sanctions affectant les droits
12 J.O., n°177 du 2 août 2000, p. 11939.
17
des parties. Tel est le cas de la C.O.B., même si ses sanctions sont qualifiées
d’administratives13.
Cette soumission n’est pas toujours évidente. Sur le fond, elle oblige à répondre à une
question primordiale pour l’organisation de cette autorité régulatrice de l’économie.
La C.O.B., est-elle une autorité régulatrice d’un secteur particulier, le marché financier, qui
pour assurer son fonctionnement, déroge aux règles applicables aux juridictions ? Ou, est-
elle au contraire une juridiction compétente dans un secteur particulier, le domaine
boursier ? Si dans le premier cas, une dérogation à l’application des prescriptions de l’art. 6
de la C.E.D.H. est possible, dans le second non. C’est le prix à payer pour l’important
pouvoir répressif dont elle dispose. La C.O.B. n’est pas une simple autorité de marché; en
raison de ses pouvoirs juridictionnels, elle ne saurait se soustraire des règles et des
contraintes procédurales qui sont propres aux juridictions stricto sensu. L’art. 6 de la
Convention européenne, comporte des garanties afférentes à un tribunal et à un procès. Les
notions contenues dans l’art. 6 de la C.E.D.H. bénéficient d’une acception autonome. Nous
examinerons alors la place de l’exigence générale d’équité et de l’égalité des armes sous cet
angle.
D’abord nous envisagerons leur domaine d’application, puis leur mise en œuvre. Ainsi nous
procéderons dans un premier temps à l’examen de l’exigence générale d’équité et d’égalité
des armes en tant que principes s’imposant à la C.O.B. (Partie I), puis nous mesurons
l’importance de l’équité pour un procès à armes égales (Partie II).
13 La notion de sanction administrative n’est pas définie très clairement. cf. Rapport du Conseil d’Etat portant sur
les pouvoirs de l’Administration dans le domaine des sanctions, La documentation française, 1999, p. 35.
Pourtant très généralement, on pourrait donner une définition de la sanction administrative, comme étant une
décision unilatérale, prise par une autorité administrative dans le cadre de prérogatives de puissance publique et
qui inflige une sanction pour la violation des lois et des règlements.
18
Première partie
L’équité et l’égalité des armes : des principes s’imposant à la C .O.B.
14.- L’art. 6 de la C.E.D.H. institue une exigence générale d’équité devant régir tout le
déroulement du procès devant les juridictions étatiques. Il se pose le problème de savoir si la
Commission des opérations de bourse qui n’est pas un tribunal au sens commun est tenue
des obligations imposées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme. Pour répondre à cette question il est nécessaire d’étudier les conditions
d’application de l’art. 6 de la C.E.D.H. à la C.O.B.(Titre I), ainsi que les effets de la dite
application (Titre II).
Titre I L’application des prescriptions de l’art. 6 à la C.O.B.
15.- Nous savons déjà que l’art. 6 de la C.E.D.H., comporte des garanties, notamment
procédurales afin de sauvegarder les droits fondamentaux du justiciable, prévus par la
Convention. Le respect de ces garanties, est exigé en présence d’un tribunal, d’une
juridiction. Le domaine de l’art. 6 est déterminé, par l’existence de sanctions pénales. La
jurisprudence européenne, dans un souci d’extension de l’application des garanties
procédurales, a conféré une définition autonome aux notions « tribunal » et « accusation en
matière pénale », par l’interprétation qu’elle en a faite. En effet, l’art. 6, se voit appliqué,
même en dehors du cadre des sanctions pénales stricto sensu. Pour pouvoir mesurer
exactement l’incidence de l’article sur la C.O.B., nous examinerons dans un premier temps,
les garanties institutionnelles que comporte la C.O.B., pour voir si elle peut être assimilée à
un « tribunal » (Chapitre I), puis l’application de l’article, aux sanctions qu’elle inflige
(Chapitre II).
19
Chapitre I Garanties institutionnelles de l’art. 6 et jurisprudence européenne
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue… par un tribunal… »
16.- L’article 6 §1 de la C.E.D.H., consacre, en tant que garantie essentielle qui
conditionne toutes les autres garanties, le droit à un tribunal, élément d’un procès
équitable14. Toute personne, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une personne
morale, a le droit d’accéder à un tribunal, à la justice. Les conditions de cet accès, la
procédure suivie, les garanties accordées au justiciable, ainsi que le résultat obtenu
importent peu, en l’absence de celui-ci. Le droit d’accès à un tribunal, permet à chacun de
protéger ses droits, donc d’être protégé par le droit, et d’obtenir un jugement. Il faut
cependant noter que rares sont les fois où la C.O.B. se trouve saisie pour manquement à ses
règlements. Le plus souvent elle se saisit d’office, puisque ses agents disposent d’un
véritable pouvoir de constatation des infractions dans ce domaine.
La C.O.B., malgré son statut d’autorité administrative indépendante, intéresse l’art. 6
en raison du pouvoir sanctionnateur dont elle dispose et qu’elle peut utiliser en cas de non
respect des règlements qu’elle édicte. C’est pourquoi dans les développements qui vont
suivre nous tenterons de voir si la C.O.B. répond aux exigences institutionnelles que l’art. 6
impose (Section 1), puis, nous examinerons le régime de son pouvoir répressif (Section 2).
Section 1 Le droit à un « tribunal »
17.- La nécessité d’un tribunal est ressentie, dans un Etat de droit, comme l’essence même
de la justice. La Convention qui protège des droits « concrets et effectifs »15, lui confère une
place toute particulière, en raison de la « place éminente que le droit à un procès équitable
occupe dans une société démocratique »16. Pour que le droit d’accès à un tribunal soit
effectif, il faut que son bénéficiaire puisse l’exercer dans des conditions lui permettant de
bénéficier d’un juste procès17. Il se pose alors la question de savoir si la C.O.B. est un
14 C.E.D.H., aff. DEWEER, du 27 février 1980, A, n°35. 15 C.E.D.H., aff. AIREY c/ Irlande, du 9 oct. 1979, A, n°32, § 4. 16 ibid. 17 A l’époque, l’Irlande ignorait l’aide judiciaire pour les actions en séparation de corps. Mme AIREY, disposant
de moyens insuffisants pour rémunérer un avocat, avait la possibilité de se défendre seule. Compte tenu de la
complexité de la procédure devant la Haute Cour d’Irlande, la Cour Européenne en déduit que l’éventualité de
20
tribunal. Pour y répondre, il est nécessaire de définir la notion de tribunal au sens européen
du terme ( §1) et de voir dans quelle mesure la C.O.B. présente les mêmes caractéristiques
(§ 2) .
§ 1 La notion de tribunal au sens européen du terme.
18.- La Cour européenne entend assez largement la notion de « tribunal » et le caractérise
par son rôle juridictionnel. C’est un organe habilité à prendre des décisions contraignantes,
dans le domaine en cause18, ou un organe auquel « il appartient de trouver, sur la base des
normes de droit, et à l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa
compétence »19. Il n’est pas nécessaire qu’il soit intégré parmi les juridictions ordinaires du
pays, car de toute façon pour la Cour, les qualifications juridiques internes sont
« transparentes »20. La Cour déclare par ailleurs que ne mérite pas l’appellation
de « tribunal » un organe, qui ne possède que de simples attributions consultatives. N’est
donc pas, un tribunal au sens 6 §1 de la Convention, le Conseil néerlandais d’appel
économique, dont la décision peut être privée d’effets par une autorité administrative21. Seul
un organe doté d’une compétence de pleine juridiction, lui permettant d’examiner les
questions de fait, comme les questions de droit et répondant aux exigences de l’art. 6 §1 de
la C.E.D.H. devrait être défini comme tel. Ce dernier doit offrir certaines garanties de
caractère organique ; il doit être indépendant, impartial, établi par la loi et apte à décider.
Garanties liée entre elles et satisfaisant à l’exigence générale d’équité préalable nécessaire
pour qu’un procès se déroule à armes égales.
Tel ne peut être le cas, en principe, de l’administration classique, qui est soumise
hiérarchiquement au gouvernement. La situation est différente, lorsque dans un domaine
donné, la fonction de répression est confiée à des autorités administratives indépendantes,
qui sont censées bénéficier de ces garanties.
comparaître seule, n’offrait pas à la requérante un droit effectif d’accès, faute de pouvoir défendre utilement sa
propre cause. 18 C.E.D.H. aff. CAMPBELL et FELL c/ R.U., du 28 juin 1984, A, n°80, § 76, affaire relative à un comité de
visiteurs, ayant statué sur un accusation en matière pénale. 19 C.E.D.H. aff. SRAMEK c/ Autriche, série A, n°46, § 53, à propos d’une autorité régionale des transactions
immobilières. 20 Convention Européenne des droits de l’homme, entretien avec M.-A. FRISON-ROCHE, P.A., du 10 févr.
1999, n°29, p. 18. 21 C.E.D.H., aff. VAN DE HURK c/ Pays-Bas, du 19 avril 1994, A, n°288/145.
21
19.- Dans le cadre du droit boursier, nous savons que pour la répression des infractions, il
existe deux autorités : le tribunal correctionnel et la C.O.B.. Le premier, étant une autorité
judiciaire et relevant du domaine pénal, la qualification de « tribunal » au sens de l’art. 6 §1
de la C.E.D.H. est certaine, car découlant de son statut. De plus, son indépendance est
assurée par l’art. 64 de la Constitution, qui dispose que, « le Président de la République est
garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire ».La seconde, n’est pas un tribunal, parce
que qualifiée officiellement d’autorité administrative indépendante, par la loi du 2 juillet
1996. Pourtant la jurisprudence européenne ne s’oppose pas réellement à l’intervention
préalable des autorités administratives dans le cadre de la répression d’une infraction. Ainsi
que l’a jugé la Cour dans l’arrêt ÖZTÜRK22, « confier cette tâche », (…) « à des autorités
administratives ne se heurte pas à la Convention pour autant que l’intéressé puisse saisir de
toute décision ainsi prise à son encontre un tribunal offrant les garanties de l’art. 6 ».
Dès lors, il est possible pour la C.O.B. d’intervenir, à condition que ses décisions soient
susceptibles d’être soumises à une instance présentant les garanties de l’art. 6.
§ 2 Application des caractéristiques du « tribunal » à la C.O.B..
Conformément à l’art. 6 de la C.E.D.H.,
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et
impartial, établi par la loi qui décidera… »
20.- L’indépendance se définit comme « la qualité d’une personne ou d’une institution qui
ne reçoit d’ordres, ou mêmes de suggestions, d’aucune sorte, qu’elle est donc seule à
prendre des décisions, et qui n’a pas à rendre compte, car rendre compte évoque la
critique »23.
Son importance est alors évidente pour le justiciable, dans le cadre d’un organe qui impose
la sanction, car c’est la seule hypothèse dans laquelle, il peut former sa décision en dehors
de toute pression extérieure.
Selon la jurisprudence européenne, pour qualifier un tribunal d’indépendant, il faut prendre
en compte « notamment, le mode de désignation et la durée du mandat de ses membres,
l’existence d’une protection contre les pressions extérieures et le point de savoir, s’il y a ou
22 C.E.D.H., aff. ÖZTÜRK du 21 févr. 1984, A, n°37, infra. 23 J. PRADEL, La notion Européenne de tribunal impartial et indépendant selon le droit français, R.C.S., 1990,
n°4 p. 692.
22
non apparence d’indépendance24 ». Il faut noter, que les apparences revêtent une grande
importance, car elles peuvent mettre « gravement en cause la confiance que les juridictions
se doivent d’inspirer dans une société démocratique »25. Toutefois, il n’est pas nécessaire
pour le tribunal d’être composé de magistrats professionnels. L’essentiel étant la liberté de
juger.
La C.O.B., instituée par l’ordonnance du 28 septembre 1967, avait pour attributions
d’assurer la bonne information des épargnants ; de protéger les actionnaires et d’agir en
faveur du développement du marché. Sa structure témoignait qu’il s’agissait d’une autorité
administrative indépendante. Composée d’un président, nommé par décret en Conseil des
ministres et de quatre membres, nommés par arrêté du ministre de l’Economie et des
finances. Ce n’est que dans le cadre des efforts pour la rendre plus indépendante, afin
d’améliorer l’efficacité de son action, qu’un large pouvoir d’investigation et de sanction lui
a été accordé, par la loi du 2 août 1989.
21.- La C.O.B. est - désormais - composée de 9 membres. Son indépendance, lui
permettant de ne recevoir, ni ordre , ni instruction, est double. D’une part, elle a une
indépendance organique, résultant des règles de désignation de ses organes dirigeants. Le
président est nommé pour 6 ans par décret en Conseil des ministres, non renouvelables,
tandis que le mandat des autres membres est de 4 ans et renouvelable une fois. Pour se
délier de l’exécutif, la désignation des membres est faite de la manière suivante : un
conseiller d’Etat est désigné par le vice-président du Conseil, un conseiller de la Cour de
cassation est désigné par le premier président de la Cour, un conseiller-maître à la Cour des
comptes est désigné par le premier président de la Cour, un membre du conseil des marchés
financiers est désigné par ce conseil, un représentant de la Banque de France est désigné par
le gouvernement, et deux personnalités choisies en raison de leur compétence et expérience
en matière d’appel public à l’épargne, sont choisis par les 6 membres, désignés ci-dessus, et
par le président26.
Seul le président est soumis aux règles d’incompatibilité prévues pour les emplois publics.
Néanmoins, l’autonomie organique a été rendue plus complète, par la suppression des
fonctions de commissaire du gouvernement auprès de la commission. En définitive
l’indépendance de la C.O.B., est assurée d’une part pour son président ; par la durée de son
24 C.E.D.H. aff. LANGBORGER c/ Suède, du 22 juin 1983, A, n°32. 25 C.E.D.H., aff. SRAMEK, du 14 janv. 1981, A, n°52. 26 La commission en sa composition initiale comprenait un Conseiller à la Cour de cassation, un agent de
change, un chef d’entreprise et un directeur d’établissement financier.
23
mandat-6 ans, non renouvelable - qui lui permet de mieux asseoir son autorité. D’autre part,
quant aux membres, leur mode de désignation et la durée de leurs fonctions, garantissent
l’indépendance de la Commission, ainsi que son impartialité, obligation générale à laquelle
la C.O.B. est soumise27. L’indépendance de la C.O.B., s’exprime par la collégialité de son
organisation, qui permet d’une part la réduction des erreurs judiciaires ; qui échappent dans
ce cas moins facilement en présence de plusieurs et d’autre part de croire que la décision a
été prise librement. Elle renforce la confiance à l’impartialité de la juridiction.
22.- La C.O.B. bénéficie aussi d’une indépendance fonctionnelle, fondée sur l’autonomie
de gestion administrative et financière .
Son autonomie financière est assurée, car depuis la loi du 29 décembre 1994 et du décret du
31 juillet 1995, la C.O.B. est financée au moyen de « redevances »28 perçues sur les
personnes publiques ou privées, dans la mesure où celles-ci trouvent intérêt dans
l’intervention de la C.O.B.. De plus, elle n’est plus soumise au contrôle a priori du ministère
de l’Economie. L’indépendance de la C.O.B. est aujourd’hui, un fait incontestable.
Cependant, malgré son importance, elle n’a pas été érigée par le Conseil Constitutionnel en
principe à valeur constitutionnelle. Elle est regardée comme une garantie organique parmi
d’autres, assortissant le pouvoir sanctionnateur. Si elle constitue une condition préalable afin
que d’autres garanties puissent trouver leur pleine expression29, elle ne peut assurer une
répression administrative en dehors de tout arbitraire administratif.
23.- L’impartialité se réfère à la qualité de celui qui statue selon sa conscience, en
n’avantageant aucune des deux parties au détriment de l’autre. Elle se reflète dans les
notions d’« égalité, équité et justice » et est conçue sous l’angle d’impartialité personnelle et
fonctionnelle30.
24.- L’exigence d’un tribunal établi par la loi, peut s’entendre comme signifiant tribunal
conforme à la loi. Dans cette hypothèse, l’art. 6 §1 serait violé si la composition du tribunal,
dans une affaire considérée, n’était pas conforme aux prescriptions légales. Jusqu’à présent,
il n’y a jamais eu d’hypothèse dans laquelle cette condition s’est trouvée violée dans le
cadre du droit des marchés financiers.
27 Déc. Conseil Constitutionnel, n°89-260 du 28 juillet 1989, J.O. du 1er août 1989, p. 9676. 28 Cf. GENEVOIS, Le Conseil Constitutionnel et l’extension des pouvoirs de la C.O.B., R.F.D.A., 1989, n°4, p.
679. 29 En effet un organe qui n’est pas indépendant est partial et pas apte à décider tout seul. 30 En raison du fait qu’indépendamment des autres garanties elle intervient surtout dans le cadre de la procédure,
elle sera examinée dans la deuxième partie.
24
25.- Enfin, par l’exigence d’un organe apte à décider, il faut que cet organe soit en mesure
de rendre une décision obligatoire, qui ne puisse par la suite être modifiée par une autorité
non judiciaire31. A cet effet, il doit être en mesure d’apprécier, l’ensemble de fait et de droit,
pour pouvoir se prononcer et donner une solution au litige. Il en va ainsi des décisions de la
C.O.B., qui, lorsqu’elle prononce une sanction, celle-ci devient définitive et ne peut être
contestée qu’en cas de recours judiciaire devant la Cour d’appel de Paris.
A supposer que la C.O.B., puisse être assimilée à un « tribunal », encore faut-il savoir si les
règles de l’art.6 doivent être automatiquement appliquées. Le domaine de l’art.6, est
déterminé par l’existence d’une « accusation en matière pénale ».
Section 2 La « matière pénale » au sens du droit européen
26.- La C.E.D.H. ne donne aucune définition de la notion de sanction. Elle prévoit dans son
art. 6, les garanties de protection des droits fondamentaux des citoyens, qui doivent
s’appliquer à toute mesure de sanction. Initialement, cet article ne visait que les seules
catégories juridiques du droit civil et pénal32. L’extension des sanctions extra-pénales,
considérées comme dépourvues des garanties posées par l’art. 6 et le risque que les Etats
qualifient comme telles des sanctions dans le but de les soustraire du domaine de l’art.6, a
conduit la Cour Européenne à opter, dans un souci de justice et d’égalité33, pour un
élargissement du champ de l’art. 6. Pourtant, en raison des contraintes qu’elle faisait peser
sur les Etats, par l’interprétation autonome qu’elle conférait à certains concepts, la
jurisprudence européenne a évolué dans sa position, en la nuançant.
Nous procéderons à l’examen de la conception européenne de la « matière pénale » (§1),
puis de l’assouplissement opéré (§2).
§ 1 Elargissement de la « matière pénale » par le juge européen
31 C.E.D.H., VAN DE HURK c/ Pays-Bas, préc. 32 En effet, l’art. 6 de la C.E.D.H. dispose que : « toute personne a droit à ce que sa cause soir entendue
équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par
la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de
toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.» 33 Exprimé souvent par la notion de « bonne administration de la justice. »
25
27.- Pour investir les qualifications et les sanctions extra-pénales de garanties du procès
équitable, la conception autonome de « matière pénale », englobe - désormais - les
infractions des sanctions autres que des sanctions pénales stricto sensu, qui présentent un
caractère répressif. C’est essentiellement par le biais de la « matière pénale », que la Cour a
eu à connaître du problème des sanctions administratives.
En ce qui concerne la notion d’« accusation en matière pénale » l’arrêt DEWEER34, affirme
qu’en raison de l’importance considérable du droit à un procès équitable, elle doit être
conçue dans un sens matériel et non formel. Ainsi, même en dehors de toute notification
officielle, émanant de l’autorité compétente du reproche d’avoir accompli une infraction
pénale, il faut déterminer si la procédure applicable présente les caractères d’une procédure
pénale.35
Quant à la notion de la « matière pénale », avant 1976, il n’existait, sur cette notion que les
décisions de la Commission. Ce n’est que dans l’arrêt Engel36, par lequel la Cour a fait
entrer les sanctions disciplinaires dans la notion de matière pénale, qu’elle en précise
aussitôt les critères de son appréciation. Tout en précisant que les Etats demeurent
souverains pour qualifier la nature juridique des sanctions prévues en droit interne, elle leur
a cependant nié la possibilité en procédant à une répartition entre infraction pénale et non
pénale, par leur seule volonté, de faire échapper à l’art. 6 certaines sanctions et limiter le
champ d’application de la Convention37.
28.- La Cour, pour vérifier si une sanction administrative relève de la « matière pénale »,
procède à une analyse alternative de la qualification donnée par le droit interne, de la nature
de l’infraction, de la généralité et de la sévérité de la sanction.
Lorsque la qualification du droit interne affirme qu’elle relève du droit pénal, l’art. 6
s’applique et la Cour la retient pour ne pas amoindrir la protection conférée par celui-ci.
Dans le cas inverse, la Cour examine les textes juridiques, les pratiques judiciaires - des
juridictions de jugement et autorités de poursuite - ainsi que la nature de la procédure suivie,
pour se déterminer. Puis, pour déterminer la nature de l’infraction; elle se réfère au
caractère de la norme transgressée, en tenant compte de la valeur protégée, le dommage et la
réprobation attachée à la transgression. Enfin, elle apprécie la généralité et la sévérité de la
sanction, compte tenu de la nature de celle-ci; qui ne doit pas s’adresser à un groupe 34 C.E.D.H. aff. DEWEER, du 27 février 1980, A, n°35. 35 Ibid., il faut « regarder au-delà des apparences et d’analyser les réalités de la procédure en litige. » 36 C.E.D.H. aff. ENGEL et autres c. Pays-Bas, du 8 juin 1976, A, n°22. 37 C’est la raison pour laquelle la Cour détient d’office, le droit de contrôler les qualifications des Etats, afin de
pouvoir empêcher toute « fraude à la Convention ».
26
déterminé de personnes, à statut particulier, doit avoir un effet préventif, répressif et
dissuasif38 et des modalités de son exécution.
29.- C’est notamment dans l’affaire ÖZTÜRK39, que la Cour précise son analyse à propos
de l’applicabilité de l’art. 6 de la C.E.D.H. aux contraventions administratives. Avec
prudence, afin de laisser intacte la souveraineté des Etats dans la délimitation de ce qui
relève de la matière pénale et de ce qui ne relève pas, la Cour a affirmé qu’elles sont
censées appartenir à la « matière pénale », mais sans pour autant faire partie du droit pénal.
Par ailleurs, elle a admis, entre autres, que « la faiblesse relative de l’enjeu ne saurait retirer
à une infraction son caractère pénal » et que puisque le but de la sanction était de prévenir,
réprimer et dissuader, celle-ci « revêt le caractère punitif par lequel se distinguent,
d’habitude, les sanctions pénales ».
Dans le même ordre, l’arrêt STENUIT40, inclut les sanctions pécuniaires prises à l’encontre
d’une entreprise - sur la base de l’ord. du 30 juin 1945 - par le Ministre de l’économie et des
finances, dans la « matière pénale ». Dans ses conclusions, la Commission européenne
relève que le requérant n’avait pas bénéficié d’un examen de sa cause par un « tribunal »,
doté de la plénitude de juridiction, puisque le Conseil d’Etat, alors qu’il lui appartenait (par
la loi du 19 juillet 1977) de se prononcer sur le bien fondé de cette accusation, ne l’avait pas
fait.
En somme, pour l’application de l’art. 6, la finalité d’intérêt général de la norme enfreinte,
ainsi que la sévérité de la sanction encourue par le transgresseur, sont les paramètres
d’appréciation de la « matière pénale ».
Cette démarche pragmatique de la Cour, qui assimile certaines sanctions administratives, à
des sanctions pénales est considérée comme « bénéfique », dans la mesure où elle se traduit
« par une extension du champ d’application des principes garantissant les droits des
intéressés », mais d’autre part, elle est critiquée, parce que non accompagnée « d’une claire
définition de la ligne de partage entre les domaines d’intervention respectifs des sanctions
administratives et des sanctions pénales »41. Pourtant, il est clair que, si dans les affaires
38 C.E.D.H., 24 févr. 1994, Bendenoun, série A, n° 284, § 33. 39 Cf. C.E.D.H. du 21 févr.1984, aff. ÖZTÜRK, A, n°73.( à propos des infractions au code de la route). Depuis
cet arrêt la Cour utilise à peu près le même raisonnement dans les autres arrêts qui ont suivi, afin d’encadrer dans
la « matière pénale » les sanctions administratives. Aussi dans le même domaine C.E.D.H. LUTZ c/ R.F.A., A,
n°123. 40 Cf. C.E.D.H., aff. STENUIT c/ France, du 27 févr. 1992, A, n°232. 41 Cf. B. GENEVOIS, Le Conseil Constitutionnel et la définition des pouvoirs du C.S.A., R.F.D.A., 1989, (2), p.
228.
27
mentionnées ci-dessus les sanctions étaient assorties de garanties suffisantes, la Cour42 ne
serait pas intervenue pour les englober dans la matière pénale.
Force est de constater, qu’au fil du temps la Cour a été amenée à évoluer dans sa position et
à assouplir sa jurisprudence.
§ 2 Assouplissement de la jurisprudence européenne
30.- Il est vrai qu’ainsi définis, les concepts de « tribunal » et de « matière pénale »,
peuvent potentiellement recouvrir de nombreuses situations. En effet, nous l’avons vu par la
notion de « tribunal », même les autorités administratives indépendantes peuvent être visées,
ainsi que les sanctions qu’elles prononcent, malgré leur nature administrative dans la mesure
où elles comportent un caractère répressif.
La Cour européenne, soucieuse de ne pas imposer des contraintes particulièrement
lourdes aux Etats, et dans le cadre de sa démarche pragmatique, a nuancé sa position et a
admis que les autorités administratives auxquelles a été transféré le contentieux, pouvaient
se soustraire au respect de l’art. 6 de la C.E.D.H.. Ainsi dans l’arrêt Le Compte43 elle
affirme que « des impératifs de souplesse et d’efficacité, entièrement compatibles avec la
protection des droits de l’homme, peuvent justifier l’intervention préalable d’organes
administratifs ou corporatifs et d’organes juridictionnels ne satisfaisant pas sous tous leur
aspects à ces mêmes prescriptions ».
La même solution a été retenue, en matière pénale par l’arrêt ÖZTÜRK44, sous
condition que les décisions soient susceptibles d’être soumises à une instance présentant les
garanties de cet article. Ceci aboutit à ce que, la décision de condamnation prononcée par
une autorité administrative au mépris de l’art. 6, puisse échapper à la censure de la Cour
européenne. Toutefois, sans vouloir opérer une distinction entre les garanties prévues par
l’art. 6 - puisque l’article lui-même ne le fait pas - certaines d’entre elles, doivent être
respectées dans tous les stades, dans la mesure où leur inobservation initiale, risquerait « de
compromettre gravement le caractère équitable du procès »45, ce dernier, envisagé dans sa
globalité.
42 Qui ne s’intéresse, qu’à garantir les droits fondamentaux des personnes et les libertés individuelles contre
l’arbitraire des Etats. 43 C.E.D.H., , Le Compte, 23 juin 1983, série A, n°43, au sujet du Conseil de l’ordre des médecins belges. 44 C.E.D.H., aff. ÖZTÜRK, préc. 45 C.E.D.H., IMBRIOSCA, 24 nov. 1993, série A, n°275, § 36.
28
La C.O.B., est pourvu d’un pouvoir de sanction administratif pour les nécessités de sa
mission. Reste alors à savoir, si et dans quelle mesure l’art. 6, se voit compétent pour régir
ce pouvoir.
29
Chapitre II Assimilation des sanctions de la C.O.B. à des sanctions pénales
31.- L’octroi à la C.O.B. d’un pouvoir d’injonction, et surtout d’un pouvoir de sanction
pécuniaire propre, par les art. 5 II et 5 III de la loi de 1989, (art. 9-1 et 9-2 de l’ordonnance
de 1967), a été effectué afin de rendre de façon évidente, son action plus efficace. En effet,
avant la réforme de 1989, l’insuffisance des moyens de la C.O.B. ne lui permettait que de
recourir au juge, pour faire respecter son action.46 De plus, en raison des lacunes que
comportait la réglementation boursière, certaines infractions restaient insanctionnables,
parce qu’elles ne constituaient ni de délits, ni de fautes professionnelles. C’est la raison pour
laquelle est intervenu le législateur. Ce dernier, a confère à la C.O.B. un pouvoir de sanction
(Section 1). Ce pouvoir de sanction, encadré aussi bien par des principes internes,
qu’internationaux peut en raison des caractères qu’il présente relever du domaine « pénal ».
(Section 2).
Section 1 Octroi du pouvoir répressif dans un souci d’efficacité de la fonction de
régulation de la C.O.B.
32.- L’institution d’un régime administratif de sanction, rapide et efficace à la fois, puisque
prononcé directement par l’autorité régulatrice des marchés financiers, en combinaison,
avec les sanctions à caractère pénal et disciplinaire permettait de remédier à toute situation
irrégulière et de prévenir, de dissuader, ainsi que de réprimer les infractions boursières.
Cette attribution, allant toujours dans le sens d’un renforcement des pouvoirs de la C.O.B., a
été considérée par le ministre chargé de l’Economie comme « la principale innovation du
projet » de loi. Pour bien mesurer l’importance et l’efficacité de ce pouvoir répressif, il
convient de l’analyser dans un premier temps (§1), puis de se pencher tout particulièrement
sur son régime juridique (§2), sans oublier naturellement l’incidence de la C.E.D.H. dans
toutes ces démonstrations.
46 P. BEZARD, Le pouvoir de « sanction financière directe » de la C.O.B., les P. A., du 17 janvier 1990, n°8, p.
53.
30
§ 1 Les sanctions pécuniaires, de nature administrative prononcées par la C.O.B.
33.- Compte tenu de la qualification juridique de la C.O.B., dotée depuis la loi de 1996 du
statut d’autorité administrative indépendante, les sanctions ainsi que la procédure suivie, en
vue de les prononcer, obéissent aux règles de droit administratif .
Souvent remis en cause, car issu d’une technique suspectée de réaliser une sorte de « justice
hors du juge »47, le pouvoir de sanction administrative n’était initialement susceptible d’être
exercé qu’à la condition que son domaine soit étroitement limité, et séparé de la répression
pénale. L’évolution intervenue, s’inscrit dans le cadre du développement des autorités
administratives indépendantes, qui a progressivement conduit le législateur à remettre à ces
organismes un pouvoir de sanction étendu, en vue de leur permettre de mener à bien leur
mission.
Depuis la réforme en 1989, la C.O.B. dispose non seulement du droit d’édicter elle-même,
des règlements et d’en assurer la police, mais aussi celui de les sanctionner elle même48.
Cependant, ce renforcement des pouvoirs d’action de la C.O.B., a suscité la réaction des
parlementaires et de la doctrine, notamment en vertu du principe de séparation des pouvoirs
rappelé par l’art. 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et a amené le
Conseil Constitutionnel, à prendre position au sujet de la constitutionnalité de son pouvoir
sanctionnateur. En effet, dans sa décision n°89-260 du 28juillet 198949, le Conseil a
considéré que : « le principe de la séparation des pouvoirs, non plus qu’aucun principe ou
règle de valeur constitutionnelle, ne fait obstacle à ce qu’une autorité administrative
agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, puisse exercer un pouvoir de
sanction dès lors, d’une part que la sanction susceptible d’être infligée est exclusive de
toute privation de liberté, et d’autre part que l’exercice du pouvoir de sanction est assorti
par la loi de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement
garantis.»
Il est désormais acquis, que la notion de sanction administrative ainsi que le cumul des
pouvoirs normatifs, d’investigation et de sanction dont bénéficie la C.O.B., n’est pas illicite,
puisqu’il n’est pas contraire au principe de séparation des pouvoirs. Ce dernier50, impliquant 47 P. DEVOLVE, cah. dr. enterprise 1984, n°4, p. 6. 48 Cette innovation était sans précédent pour le droit français et même à l’étranger il n’existe aucun autre droit
allant si loin. 49 Déc. n°89-260, du 28 juillet 1989, préc. 50 Conformément à sa définition moderne.
31
une indépendance réciproque de l’exécutif, du législatif et de l’autorité judiciaire en
fonction de la répartition de compétences opérée par la constitution et pas un mode strict de
répartition des compétences consistant pour le juge de sanctionner, le législateur de légiférer
et l’exécutif de gouverner.
34.- La seule limite du pouvoir de sanction administrative, réside dans l’impossibilité de
prononcer de peines privatives de liberté. L’art. 66 de la Constitution réserve au seul juge
judiciaire, la garantie de la liberté individuelle. Ainsi la C.O.B., ne peut prononcer que des
sanctions pécuniaires, des amendes. Cette compétence accordée à la C.O.B. en vue de lui
permettre de mener à bien sa mission de surveillance et de régulation du fonctionnement des
marchés financiers, afin d’assurer leur efficacité économique, est limitée aux seules
pratiques contraires à ses règlements. De plus, il est exigé que le comportement
transgresseur porte atteinte à sa mission. Il ne s’agit cependant que de limitations
apparentes. Le pouvoir réglementaire de la C.O.B., n’étant pas réellement limité, le pouvoir
répressif non plus, en raison de l’identité des domaines51. De plus, toute pratique contraire à
ses règlements, est susceptible d’entraver sa mission. Cette dernière répondant à une
définition large.
La Cour Européenne a elle aussi admis le pouvoir sanctionnateur des autorités
administratives. Ainsi, dans l’arrêt LUTZ, elle a affirmé, en matière d’infractions au code de
la route, qu’« eu égard à la multiplicité des infractions légères, en particulier dans le
domaine de la circulation routière, qui ne dénotent pas une indignité propre à valoir à leur
auteur le jugement défavorable caractérisant la peine, un Etat contractant peut avoir de
bonnes raisons d’introduire un système qui décharge ses juridictions du soin de traiter la
grande majorité d’entre elles. Confier cette tâche, pour de telles infractions, à des autorités
administratives ne se heurte pas à la Convention pour autant que l’intéressé puisse saisir de
toute décision ainsi prise à son encontre un tribunal offrant les garanties de l’article 6 »
Si les sanctions administratives ne se heurtent pas au principe de séparation des pouvoirs, ni
à aucune autre disposition constitutionnelle ou internationale, elles sont entourées de
mesures destinées à garantir les droits des citoyens, aussi protectrices que celles du droit
pénal, car animées par les mêmes principes.
51 Cette situation a été critiquée par la doctrine. M. R. RAMETTE, in La réforme de la C.O.B. et le cumul de
pouvoirs normatif, de sanction et d’investigation. Bull. Joly Bourse, nov.-déc. 1995, n°86, p. 483, constate que
ce cumul de pouvoirs, chacun d’entre eux répondant à un objectif différent, amène la C.O.B. finalement à
privilégier l’un au détriment de l’autre.
32
§ 2 Soumission du pouvoir répressif de la C.O.B. à un régime protecteur
35.- Pendant longtemps, le seul système qui était censé détenir le maximum de garanties
contre les décisions arbitraires envers le citoyen, était le système pénal. La relation entre
Administration et administré, étant inégalitaire - la première disposant de prérogatives
exorbitantes de droit commun et de ce fait se trouvant dans une situation avantageuse-les
garanties dont bénéficiait le second, dans le cadre des sanctions administratives étaient
insuffisantes.
Nous l’avons vu, c’est lors de la consécration de la constitutionnalité des sanctions
administratives52, que le Conseil Constitutionnel - tout en consacrant un droit général de la
répression53 - les a soumises en contre-partie aux mêmes limites et garanties qu’ en matière
pénale. Il a exigé que l’exercice du pouvoir de sanction de la C.O.B., soit assorti « par la loi
de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis ».
Ces dernières également offertes par la C.E.D.H., nous procéderons à l’examen desdits
principes, sous l’angle aussi bien du droit interne, que du droit européen.
36.- Au nombre des garanties « transposées » du droit pénal, général54, nous retrouvons le
principe de la légalité des délits et des peines, qui constitue « l’axe premier d’une politique
criminelle »55.
Aux termes de ce principe, le juge, ne peut considérer comme infraction, que celle définie
par le législateur et ne peut pas infliger une peine non prévue par la loi. Cette affirmation
correspond aux deux volets du principe ; légalité de l’incrimination- nullum crimen sine lege
- d’une part, et légalité de la sanction - nulla poema sine lege- d’autre part.
Pour la première fois énoncé dans la Déclaration des droits de l’homme de 1789 (art.7 et 9),
le principe est, depuis, repris par plusieurs textes aussi bien de droit interne,
52 C.C., déc. du 28 juillet 1989, préc. considérant 18. 53 Ibid. « qui ne concerne pas seulement les peines prononcés par les juridictions répressives, mais s’étend à
toute sanction ayant le caractère d’une punition, même si le législateur, a laissé le soin de la prononcer à une
autorité de nature non juridictionnelle ». 54 Nous aborderons les garanties procédurales stricto sensu dans la deuxième partie. 55 Cf. Ch. ZAZEKGES, Les conflits de politique criminelle, A.P.C., 1984, p.39.
33
qu’international56. Cependant, il ne faut pas entendre les termes « législateur » et « loi »
dans un sens étroit. Depuis la Constitution de 1958, la détermination des infractions ; à
l’exception des crimes et des délits et des peines ; à l’exception des peines privatives de
liberté, peut être également faite par voie réglementaire. De plus, quant à la légalité de
l’incrimination, le principe est satisfait même avec une définition assez large de
l’infraction57, sous la condition posée par la Cour européenne qu’elle soit accessible, précise
et prévisible dans ses conséquences58. S’agissant de la légalité des sanctions administratives,
le principe a toujours été appliqué59, surtout dans le domaine économique.
37.- Ensuite, le principe de non rétroactivité fondé sur l’art. 8 de la Déclaration des droits de
l’homme, et prévu également par l’art. 7 de la C.E.D.H.. Ce principe, suppose que, dans un
Etat libéral, le citoyen a le droit de s’exprimer et d’agir en connaissant à l’avance la
conséquence de ses actes, sous la réserve de la loi pénale plus douce qui même en matière
économique est d’application immédiate .
38.- Le principe d’interprétation restrictive prévu par le même article, affirme que le juge
n’a pas en principe, le droit d’ajouter d’autres peines-non prévues expressément-au nom
d’une interprétation large. Cela signifie que dans l’hypothèse où une loi a un contenu
obscur ou douteux, le juge doit découvrir son véritable sens et en cas de doute, c’est
toujours en faveur de l’accusé que l’interprétation doit être faite, selon la règle : in dupis pro
mitiore.
39.- Enfin, le principe de proportionnalité, exprimé, dans l’art 7 de la Déclaration des
droits de l’homme - non expressément prévu par la Convention européenne-mais constituant
un principe général non écrit, s’applique tant comme mesure d’appréciation des restrictions
des droits individuels, que comme règle générale d’interprétation des dispositions
restrictives. En d’autres termes, ce principe vise à garantir l’essence des droits
fondamentaux, en évitant que ceux-ci puissent être compromis par des attaques injustifiées 56 Art. 4 du Code Pénal de 1810, Préambule de la Constitution de 1958, art. 111-2 et111-3 du nouveau Code
pénal de 1992. Le principe a acquis valeur constitutionnelle, après la décision du Conseil Constitutionnel du 16
juillet 1971, qui a intégré la Déclaration dans le bloc de constitutionnalité. Dans la C.E.D.H., il est prévu en
termes exprès dans l’art. 7 qui lui confère une signification autonome en englobant droit écrit ou non écrit,
législatif, réglementaire, ou jurisprudentiel. 57 Le Conseil Constitutionnel dans sa décision du 17 janv. 1989, relative à la loi de 1989 sur la liberté de
communication, avait déclaré qu’en dehors du droit pénal, le principe se trouvait satisfait en matière
administrative, « par référence aux obligations auxquelles le titulaire d’une autorisation administrative est
soumis en vertu des lois et règlements ». 58C.E.D.H. 25 MAI 1993, aff. KOKKINAKIS c/ Grèce, A, n°260. 59 Cf. H. HUBRECHT, La notion de sanction administrative, Les P.A., 1990, n°8, P. 10.
34
et disproportionnées. Cependant M. R. RAMETTE60 a relevé dans certaines décisions, une
méconnaissance de ce principe aussi bien dans le cadre du prononcé de la sanction prise par
la C.O.B., que lors d’exonération ou de réduction de la sanction.
Pourtant, force est de constater, que si tel est le cas, cette situation ne pourra pas échapper
devant la Cour d’appel, qui sous la pression de la Cour de cassation, exerce un véritable
contrôle de proportionnalité de la sanction.
Section 2 Réception de la jurisprudence européenne dans un souci d’une bonne
administration de la justice
40.- Traditionnellement attachée au droit européen pour la résolution des litiges internes, la
Cour de cassation n’hésite pas à utiliser la jurisprudence humanitaire européenne dans le
souci d’une bonne administration de la justice, pour condamner les pratiques contraires aux
garanties du principe de procès équitable. Pour ce faire, il fallait dans un premier temps,
reconnaître le caractère « pénal » des sanctions administratives prononcées par la C .O.B.
(§1), puis transposer tout simplement la jurisprudence européenne aux affaires dont elle était
saisie (§2).
§ 1 Reconnaissance du caractère « pénal » des sanctions administratives prononcées
par la C.O.B.
41.- La qualification de la C.O.B. d’autorité administrative indépendante, confère un
caractère administratif aux sanctions que celle-ci inflige. L’utilisation du vocable
« manquement » est employée justement pour bien faire distinguer la nature administrative
des sanctions que la C.O.B. inflige, des sanctions pénales stricto sensu, liées à la
commission des délits.
Pour pouvoir alors englober ces sanctions dans le cadre de la « matière pénale », un
examen de leurs caractéristiques s’impose selon la méthode du faisceau d’indices.
Le premier critère, celui de la qualification en droit interne, n’est pas rempli, puisque les
sanctions prononcées par la C.O.B. n’ont jamais reçu de la loi, la qualification de sanctions
pénales. Au contraire, en raison de la nature juridique de l’organisme qui les prononce, elles
60 R. RAMETTE, Le pouvoir de sanction de la C.O.B., Bull. Joly Bourse, juillet-août, 1994, n°67, p.365.
35
sont qualifiées de sanctions administratives. En raison de la « valeur formelle et relative »61
de ce critère, la Cour retient surtout les autres critères de qualification.
Quant à la généralité de la sanction, cette condition se trouve remplie, car le domaine
de la sanction, lié au domaine réglementaire, est a priori très large. De plus, ces règlements
ne comportent pas de précision quant à la qualité professionnelle requise pour leur
application.
La Cour d’appel de Paris a été amenée à l’affirmer à deux reprises.
Dans une première affaire, du 14 nov. 199562, la Cour de cassation confirme le prononcé
d’une sanction pour méconnaissance du règlement 90-02, (remplacé par le règlement 98-
07), relatif à l’obligation d’information du public, à M. P. DEHAYE, en qualité de
« président- directeur général » de la société les Beaux Sites. Ce dernier, pour tenter
d’échapper aux sanctions pécuniaires de la C.O.B., a contesté l’application de ses
règlements aux dirigeants des sociétés anonymes cotées, parce que, selon lui, seule la
société émettrice pouvait être condamnée. La Haute juridiction, rejette cette thèse, en se
fondant sur le terme « personne », désignant, au sens donné par l’art. 1 dudit règlement, une
personne morale, ou le dirigeant de celle-ci.
Plus récemment, dans l’affaire K.P.M.G.63, du 7 mars 2000, la Cour d’appel a reconnu
que la C.O.B. dispose d’un pouvoir de sanction directe à l’encontre des commissaires aux
comptes. En effet, la dite société, accusée d’une méconnaissance du même règlement, avait
soutenu qu’en l’absence de disposition expresse, le pouvoir de sanction de la C.O.B. n’était
pas applicable aux commissaires aux comptes. En conséquence, en la sanctionnant en cette
qualité, la C.O.B., aurait commis un détournement de procédure, parce que les commissaires
ne sont ni des personnes intervenant dans les opérations sur les titres placés par appel public
à l’épargne, ni des gestionnaires de portefeuilles de titres auxquels s’appliquent les
règlements, selon l’art.4 de l’ord. de 1967.
61 C.E.D.H., 23 nov. 1976, ENGEL, précit., § 82. 62 Pourvoi n° 93-13-716, arrêt n° 1903 : Bull. civ. IV, n° 260, Bull. Joly Bourse 1996, p. 111, § 21, note P. LE
CANNU. 63 J.C.P., E et Aff., n°25, 25 juin 2000, p.992, N. COURET . L’affaire était la suivante : en 1993, K.P.M.G.
certifie la note d’information par la société Dapta Mallinjoud qui s’apprête à lancer un emprunt obligataire de
245 millions de francs. Quelques temps plus tard, cette société est mise en redressement judiciaire. Les
souscripteurs de l’emprunt choisissent alors de saisir la justice pénale. Parallèlement, la C.O.B. décide
l’ouverture d’une enquête au terme de laquelle elle juge les commissaires aux comptes n’auraient pas dû certifier
les informations qui leur étaient soumises et les condamne à une amende de 500000 F. Les auditeurs décident
alors de contester cette sanction devant la Cour d’appel de Paris.
36
Pourtant, les magistrats de la Cour d’appel de Paris, se sont prononcés différemment. En se
fondant sur la définition large de la notion d’ « auteur » du manquement, déterminée par
rapport aux effets que la mauvaise information peut avoir, aussi bien au bon fonctionnement
du marché qu’aux intérêts des investisseurs,(art. 9-1 et 9-2 de l’ord. de 1967), combinée
avec les art. 2 et 3 du règlement n° 90-02, exigeant que la communication de l’information
au public doit être exacte, précise et sincère, ils ont considéré que les commissaires aux
comptes, signataires du document d’information - prospectus - soumis à leur contrôle, dans
la mesure où celui-ci ne répond pas à ces caractéristiques, sont considérés comme auteurs du
manquement et donc encourent la sanction.
C’est alors, la mauvaise qualité de l’information qui apparaît comme l’élément
essentiel de la faute pour la Cour d’appel et non le rôle officiel de la personne en cause.
Enfin quant à l’ampleur et au caractère dissuasif de la sanction, les critères sont
remplis du fait de la gravité des sanctions que prononce la C.O.B., qui ont pour effet à punir
les transgresseurs et de dissuader les autres opérateurs de méconnaître ses règlements.
En somme nous ne pouvons conclure qu’à la reconnaissance du caractère pénal des
sanctions prononcées par la C.O.B. puisqu’elles répondent aux critères européens.
§ 2 L’application de la jurisprudence européenne aux procédures diligentées par la
C.O.B.
42.- Soucieuses, de la protection des libertés individuelles, Les juridictions de l’ordre
judiciaire, ont tout de suite suivi et appliqué la jurisprudence européenne, en assimilant les
sanctions de la C.O.B. à des sanctions « pénales ».
La Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans l’affaire HADDAD64- relative à
l’allégation d’une violation des droits de la défense par la C.O.B., en raison du prononcé
d’une sanction pécuniaire, assortie de publication pour manquement à l’art. 2, du règlement
n°90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée - a confirmé la Cour d’appel de
Paris, en précisant que « les prescriptions de l’art. 6 de la C.E.D.H. s’appliquent aux
sanctions pécuniaires prévues à l’art. 9-2 de l’ordonnance du 28 septembre 1967 qui, bien
que de nature administrative, visent comme en matière pénale, par leur montant élevé et la
publicité qui leur en est donnée, à punir les auteurs de faits contraires aux normes
64 C. Cass. 9 avril 1996, HADDAD, P.A., 26 juin 1996, p. 29, n. Cl. DUCOULOUX-FAVARD, commentaire
portant davantage sur le caractère absolu ou non de l’obligation d’abstention de l’initié.
37
générales édictées par les règlements de la Commission et à dissuader les opérateurs de se
livrer à des telles pratiques ».
43.- C’est d’ailleurs la même solution qu’elle retrouve par son arrêt du 18 juin 1996
CONSO65 - relatif à l’atteinte portée au principe de la présomption d’innocence en raison
des déclarations publiques du président de la C.O.B. - en précisant que les sanctions ont le
caractère d’une punition.
Toutefois, la même chambre, dans l’affaire HADDAD, a refusé d’appliquer l’art. 6, en
s’inspirant de la position de la Cour européenne. Elle a ainsi jugée que « des impératifs de
souplesse et d’efficacité peuvent justifier l’intervention préalable dans la procédure
répressive d’une autorité administrative qui comme la C.O.B., ne satisfait pas sous tous
leurs aspects aux prescriptions de forme du paragraphe 1er de l’art. 6 de la Convention, dès
lors que les décisions prises par celles-ci, subissent a posteriori, sur des points de fait des
questions de droit, ainsi sur la proportionnalité de la sanction prononcée avec la gravité de
la faute commise, le contrôle effectif d’un organe judiciaire offrant toutes les garanties d’un
tribunal au sens de l’art. 6 ».
De cette manière, la Cour de cassation a admis une atteinte aux droits de la défense en
raison de l’intervention préalable d’une autorité administrative - laquelle, faut-il le préciser,
avait fait une exacte application des textes qui lui étaient applicables - et ceci même si les
sanctions qu’elle prononce sont considérées comme des sanctions « pénales » au sens de
l’art. 6 de la C.E.D.H..
Nous en déduisons alors, que l’art.6 n’est pas applicable à la C.O.B., lorsque un recours
ultérieur devant un tribunal, en l’occurrence la Cour d’appel de Paris, offrant toutes les
garanties prescrites par l’art.6 est organisé.
Il faut noter pourtant, que tel était l’état de la jurisprudence dans un premier temps, mais qui
ensuite a évolué.
65 C. Cass. aff. CONSO,18 juin 1996 R.D.B.B. 1996 , FRISON-ROCHE et GERMAIN.
38
Titre II Les incidences de cette application
44.- Il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne que le caractère juridictionnel ou
non, de l’autorité qui impose la sanction est un argument sans incidence réelle pour
déterminer si une sanction relève ou non de la « matière pénale ».
En effet, la Cour n’oblige pas les Etats à instituer des procédures qui se déroulent à chacun
de leurs stades devant des tribunaux conformes à ses prescriptions66. Cependant, si dans un
premier temps l’application de l’art. 6 à la C.O.B. et à son pouvoir sanctionnateur semblait
pouvoir être admise, ceci n’a pas été effectué en l’absence de toute ambiguïté. De plus, les
effets de l’application de l’art. 6 sont loin d’être négligeables. Si l’action de la C.O.B. se
trouve davantage contrôlée, son pouvoir sanctionnateur se trouve encadré et dans certaines
de ses modalités critiqué. Pour mesurer les incidences de l’application de l’art. 6, nous
procéderons à un double examen. D’abord, en ce qui concerne la C.O.B., en tant qu’organe
institutionnel (Chapitre I), puis en ce qui concerne l’exercice de son pouvoir de sanction
(Chapitre II).
Chapitre I Au niveau de l’application de l’art. 6 à la C.O.B.
45.- Alors même que les autorités de régulation des marchés financiers, sont investies de
prérogatives de puissance publique, elles ne sont pas des juridictions. Leurs décisions sont
par nature des actes administratifs, et ceci, selon le Conseil constitutionnel, même
lorsqu’elles prononcent des sanctions en répression des infractions à la réglementation des
marchés boursiers et financiers. Or, elles peuvent prononcer des sanctions lourdes, qui en
raison de leur caractère répressif, ont suscité l’application de l’art. 6 de la C.E.D.H..
Pourtant, jusqu’à très récemment personne ne pouvait conclure à une application générale
de cet article aux sanctions prononcées par les autorités administratives (Section 1).
L’admission de cette situation, a soumis le pouvoir décisionnel de la C.O.B. à un contrôle de
rigueur (Section 2).
66 C.E.D.H., aff. LE COMPTE, préc.
39
Section 1 Controverses inhérentes à la nature de l’organe sanctionnateur
46.- L’attribution aux autorités de régulation de pouvoirs « quasi juridictionnels »67, fait
que la procédure de celles-ci soit soumise aux contraintes de la procédure juridictionnelle,
prévues par l’art. 6 de la C.E.D.H.. Cette contradiction entre la qualification et le régime
applicable aux autorités administratives, a été relevée et a constitué la principale raison de la
divergence de positions entre les deux Hautes juridictions, quant à l’application de l’art. 6
aux sanctions des autorités administratives (§ 1). Cependant, en raison d’un infléchissement
opéré dans sa position par le Conseil d’Etat, nous pouvons conclure à présent à l’admission
de cette application (§ 2).
§ 1 Contradiction entre qualification et régime procédural applicable aux autorités
administratives.
47.- La divergence de positions entre la Cour de cassation et le Conseil d’Etat, révèle une
divergence d’approches, de lectures de l’art. 6 de la C.E.D.H. par les deux juridictions. La
Cour de cassation, soucieuse de faire prévaloir la garantie des droits devant la C.O.B., et,
placée dans la logique pragmatique du droit européen, s’en tient plutôt au caractère des
sanctions infligées. Elle s’intéresse à la situation concrète du justiciable plutôt qu’à la nature
juridique de la C.O.B.. En raison de la finalité à la fois préventive, répressive et dissuasive
de ces sanctions pécuniaires, - qui ne se justifient pas par la réparation d’un préjudice - et
des effets importants de celles-ci, la Cour de cassation admet largement l’application de
l’art. 6 dans le cadre des sanctions administratives comme en matière pénale.
La résistance du Conseil d’Etat à l’encontre de cet article a longtemps été claire et se
développe dans deux perspectives.
48.- D’abord le Conseil d’Etat refuse de voir toute analogie entre sanctions administratives
et sanctions pénales. En effet l’art. 6 de la C.E.D.H., vise des garanties procédurales, en
« matière pénale ». Selon le Conseil d’Etat, la jurisprudence de la Cour européenne, loin de
contribuer à une départition entre sanctions pénales - seules soumises au respect de
l’exigence générale de procès équitable - et sanctions extra-pénales entend, en adoptant une
conception autonome de la « matière pénale », s’affranchir des qualifications juridiques
internes, dans le but d’étendre le champ de l’art. 6.
67 En raison de la nature des sanctions prononcées, qui, par leur contenu et leur finalité, se rapprochent des
sanctions pénales.
40
Cependant, la position de la Cour européenne est toute autre. Ce qui est important en la
matière, n’est pas la situation du citoyen face à une sanction pénale ou administrative stricto
sensu, mais face à une sanction à caractère répressif. Il faut accepter qu’il puisse exister
plusieurs droits répressifs, de nature pénale, disciplinaire ou administrative et ce qu’il
importe est, en contre-partie, leur soumission aux garanties du système pénal seules
capables de protéger le citoyen efficacement. On passe ainsi de la notion de droit pénal, à
une notion plus large de « matière pénale », qui englobe toutes les sanctions à caractère
fortement répressif. C’est pourquoi comme nous l’avons déjà vu, les qualifications internes
n’ont qu’une valeur relative, seules comptent, les critères alternatifs adoptés par la Cour, qui
s’intéressent au caractère de la sanction.
La position du Conseil d’Etat fut longtemps ambiguë. Certes, il impose explicitement
la nécessité de respecter les « droits de la défense »68, mais il se refuse à prendre
formellement en compte l’art. 6 de la C.E.D.H.. Fidèle à sa culture juridique moins
européenne69, il s’en tient à une analyse stricte de la nature administrative de la procédure et
préfère se rattacher aux principes fondamentaux de droit interne, transposés du droit pénal70.
De cette manière il arrive à des résultats équivalents tout en restant fidèle à sa position.
49.- Ce n’est que récemment, que la jurisprudence administrative a accepté de confronter le
fonctionnement des autorités administratives non juridictionnelles aux prescriptions du
procès équitable. Ainsi, elle admet que le contentieux administratif puisse recouper la
« matière pénale ». Toutefois, cette affirmation est assortie de réserve. Le Conseil, en se
tenant à la lettre de l’art. 6, analyse d’abord la nature de l’organisme en cause, le qualifie et,
seulement, lorsqu’il s’agit d’une juridiction ou lorsqu’il ne comporte pas de règles
incompatibles avec le statut d’une juridiction, en déduit l’application de l’art. 6. Soucieux de
permettre l’efficacité de la procédure administrative, malgré la « coloration pénale » de la
sanction, l’extension de l’art. 6 de la C.E.D.H. est écartée, au delà du cadre de la procédure
juridictionnelle. Cependant la démarche d’analyser la nature de l’organisme, qui fait
« passer par le hiatus de la qualification, juridictionnelle ou non des autorités en cause »71,
ne répond pas à la question, de savoir si telle ou telle sanction doit être considérée comme
relevant de la « matière pénale ». Elle aboutit à soustraire des sanction lourdes aux
garanties efficaces du procès équitable. 68 Dans le cadre par exemple d’une instance disciplinaire, C.E. 29 mai 1981 MOATTI, P.A. 1981, n°249. 69 En effet, il n’a pris acte de l’effectivité du droit européen que très lentement. 70 C’est la condition à laquelle le Conseil constitutionnel avait subordonné les sanctions des autorités
administratives, dans sa décision du 28 juillet 1989 relative au renforcement des pouvoirs de la C.O.B., préc. 71Convention Européenne des droits de l’homme, entretien avec M.-A. FRISON-ROCHE.
41
Une évolution, cependant, a été opérée qui consiste à l’idée que si les garanties de l’art. 6 de
la C.E.D.H. doivent tenir compte des exigences d’efficacité de la procédure administrative,
en raison des spécificités des autorités de régulation du marché, cette efficacité ne peut
pourtant justifier tous les manquements à l’équité procédurale.
C’est essentiellement pour cette raison que le Conseil d’Etat a évolué dans ses idées et
a adopté la position de la Cour européenne et s’est rapproché de la position de la Cour de
cassation.
§ 2 Admission de l’application de l’art. 6 aux sanctions administratives
50.- C’est dans les affaires CONSO72 et OURY du 1er déc. 199873, que la Chambre
commerciale de la Cour de cassation, vise pour la première fois cet article et l’applique sans
réserve.
Elle indique qu’ « en vertu de l’art. 6 de la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause
soit entendue par un tribunal impartial qui décidera du bien-fondé de toute accusation
portée contre elle en matière pénale, à laquelle sont assimilées les poursuites en vue de
sanctions pécuniaires ayant le caractère d’une punition prononcée par une autorité
administrative ».
En se montrant plus exigeante que la jurisprudence européenne, parce qu’elle applique
l’art. 6 de la C.E.D.H. malgré l’existence d’un recours juridictionnel ultérieur, la Cour de
cassation admet que, dès lors qu’une sanction est prononcée, l’art. 6 de la C.E.D.H. doit être
respecté; la qualification de l’autorité sanctionnatrice important peu.
Cependant, force est de constater que sa position n’a pas toujours était assez claire.
Dans le cadre d’un autre litige né de l’affaire OURY du 5 févr. 199974, relatif à une sanction
prononcée par la C.O.B. en raison de la diffusion d’une fausse information, l’Assemblée
Plénière n’admet à aucun moment la compétence de l’art. 6 en termes exprès. Elle se limite
à confirmer l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, et seulement, sur le fondement implicite de
l’exigence d’impartialité du « tribunal », condamne la C.O.B.. C’est par l’interprétation qui
a était faite, de l’arrêt que, se trouve affirmée l’application de l’art. 6 de la C.E.D.H.. 72 Cass. com., aff. CONSO, préc. 73 Cass. com., 1er déc. 1998 : J.C.P., éd. G, 1999, II, n° 10057, n. E. GARAUD, P.A., 15 jan. 1999, p. 5, n. Cl.
DUCOULOUX-FAVARD. 74 J.C.P., G, 1999, II, 10060, n. H. MATSOPOULOU, affaire relative à la participation du rapporteur de la
C.O.B. à la formation de jugement.
42
Enfin, dans l’importante affaire K.P.M.G. du 7 mars 200075, la Cour d’appel de Paris a
réaffirmé le nécessaire respect par les autorités de sanction des garanties procédurales, dont
doit bénéficier la personne mise en cause. Pourtant, suivant la position de la Cour
européenne, les magistrats ont affirmé que la C.O.B. autorité administrative, peut ne pas
respecter toutes les garanties de l’art. 6, dès lors que la sanction prononcée peut faire l’objet
d’un recours de pleine juridiction.
51.- Cette indication-déjà mentionnée dans l’affaire HADDAD- est nouvelle par rapport
aux affaires OURY, qui n’admettaient aucune limitation à la compétence de l’art. 6 pour
régir la matière. Cependant par cette position tranchée, la Cour de cassation allait bien au-
delà de la position de la Cour européenne qui ne s’était jamais jusqu’alors prononcée pour
un litige relatif à une autorité du marché.
Sans doute, la Cour d’appel dans l’arrêt K.P.M.G., a voulu se placer dans la lignée de la
jurisprudence de la Cour européenne et diminuer les éventuels recours futurs - fondés sur
une interprétation stricte de l’art. 6 - à l’encontre des sanctions prononcées par la C.O.B..
Pourtant, force est de constater que compte tenu des modalités concrètes de mise en œuvre
du pouvoir de sanction, certaines garanties de l’art. 6 §1 - telles que l’exigence
d’impartialité, la présomption de l’innocence ou les droits de la défense - doivent être
respectées dès la phase administrative, dans la mesure où leur inobservation initiale
risquerait de ne plus pouvoir être couverte dans les autres étapes du procès. Ainsi la Cour
d’appel juge que « le moyen tiré de ce que la Commission se serait prononcée dans des
conditions qui ne respecteraient pas l’exigence d’impartialité peut, en revanche, être
utilement invoqué à l’appui du recours formé à l’encontre sa décision ».
52.- Quant à la position du Conseil d’Etat, c’est par l’arrêt Didier76 que la haute juridiction
administrative accepte d’appliquer l’art. 6 aux sanctions prononcées par le C.M.F.. En effet,
par une interprétation conforme à celle de la Cour de Strasbourg qui énonce que par
« tribunal », on n’entend pas nécessairement une juridiction, le Conseil d’Etat relève que le
75J.C.P.E. et Aff., n°25, 25 juin 2000, p. 992 n. A. COURET et Bull. Joly Bourse, §51, mai-juin 2000, p. 245, n.
N. RONTCHEVSKY. Cette affaire est à l’origine de la dernière modification du décret du 23 mars 1990, qui a
eu lieu le 1er août 2000. 76 Cf. C.E. 3 déc. 1999, n°207434 DIDIER, Banque et Droit, n° 69, janv.-févr. 2000, p. 53 n. H. DE
VAUPLANE. En l’espèce le C.M.F. avait retiré à M. DIDIER sa carte professionnelle pour une durée de dix
mois et lui avait infligé une amende de 5 M.F.. Ce dernier, a formé un recours devant le Conseil d’Etat en
annulation des sanctions prononcées, au motif que le C.M.F.- du fait de la présence du rapporteur aux débats et
au vote de la formation disciplinaire- n’aurait pas respecté les dispositions de l’art. 6 de la C.E.D.H..
43
C.M.F., organisme professionnel, lorsqu’il prononce des sanctions, en raison de leur gravité
doit être regardé comme décidant du bien fondé d’une accusation en matière pénale.
Si le C.M.F. peut être assimilé au « tribunal », les garanties de l’art. 6 ne sont pas
automatiquement applicables. Ainsi, en s’inspirant de la jurisprudence européenne77 le
Conseil d’Etat limite la portée de cette affirmation en admettant que le C.M.F. peut, du fait
de l’existence d’un recours de plein contentieux ultérieur, se soustraire aux garanties de
l’art. 6 §1.
Toutefois, lui aussi se réserve l’hypothèse de la méconnaissance du principe de
l’impartialité, qui peut entacher la procédure de vices tels qu’un recours ultérieur, devant le
Conseil d’Etat ne puisse satisfaire aux exigences de l’art.6 §1. Nous constatons alors qu’à
présent les positions des deux hautes juridiction convergent. Cette convergence constitue un
facteur d’unification de droit, source de sécurité juridique.
La dite sécurité juridique, est par ailleurs obtenue par les différents contrôles auxquels sont
soumis les décisions de la C.O.B..
Section 2 Contrôles des décisions de la C.O.B.
53.- Le respect des droits du justiciable implique, en plus des garanties prévues par l’art. 6
de la C.E.D.H., une garantie supplémentaire qui assurera pleinement les droits de celui-ci :
celle d’avoir un droit de contrôle de la décision prise par la C.O.B., imposant une sanction.
Quelles que soient les garanties dont le justiciable a bénéficié au cours de l’élaboration de la
décision, et même avant cette phase, la possibilité donnée à la C.O.B. d’infliger des
sanctions relevant de la « matière pénale » est, pour satisfaire aux exigences de l’art. 6 §1,
de la Convention, subordonnée au pouvoir de remettre en cause celle-ci. Ceci, est
essentiellement possible de deux manières; d’une part, le justiciable, ainsi que l’autorité
supérieure peuvent contrôler la décision, au moment de sa publication par le biais de ses
motifs (§1), d’autre part, par l’ouverture d’un recours devant une juridiction présentant
toutes les garanties requises par Convention (§2).
77 Affaires, LE COMPTE, ÖZÜRK et LUTZ, préc.
44
§ 1 L’obligation de motivation et de publication des décisions de la C.O.B.
54.- La jurisprudence de la Cour européenne, englobe la motivation dans le faisceau des
garanties qui forment le « procès équitable » et examine l’incidence de l’absence de
motivation sur la protection des droits de l’homme78. Le juge doit motiver sa décision avec
une clarté suffisante pour permettre au justiciable de vérifier que ses prétentions et moyens
ont bien été examinés.79
Ainsi, la C.O.B., comme toute autorité sanctionnatrice, est tenue d’exposer les motifs de fait
et de droit l’ayant conduite à prendre sa décision de sanction.
Initialement admise uniquement pour les décisions juridictionnelles, cette obligation de
motivation a progressivement été étendue, également aux sanctions administratives.
L’importance de la motivation s’accroît dans le cadre de sanctions administratives. Elle
restreint l’éventualité des décisions arbitraires et ajoute à l’accomplissement d’une bonne
administration de la justice dans le sens où elle oblige la C.O.B. d’informer le justiciable
des raisons qui fondent sa décision80.
Parfois liée au droit processuel, permettant un contrôle efficace des sanctions par un
contrôle de légalité des décisions, la motivation dépasse toutefois ce cadre. En effet,
l’exigence d’une motivation de la décision81 et, notamment lorsque celle-ci l’est de manière
précise, oblige la C.O.B. à rechercher l’auteur personnel de l’infraction, avant de décider
sur la sanction. De plus, elle contraint le juge, en raison du fait qu’il doit exposer les
78 C.E.D.H., aff. H. c/ Belgique, du 30 nov. 1987, Rec., n°127-B. La Cour exigeant une motivation adéquate des
décisions et en rapport avec la gravité de la question. En l’occurrence, c’était l’hypothèse de demande de
réinscription d’un avocat redié. 79 Toutefois, une motivation sommaire peut suffire, et le tribunal est libre de ne répondre qu’aux seuls moyens
pertinents, c’est-à-dire susceptibles d’exercer une influence sur la solution du litige, sans avoir à traiter de tous
les points que le plaideur estime fondamentaux pour son argumentation C.E.D.H., aff. Hiro Balani c/ Espagne:
D. 1996, somm., p. 202, obs. N. Fricero.. 80 Quant à l’importance de l’obligation de motivation, et son incidence sur le principe de proportionnalité-avec
une motivation précise, le juge est astreint à respecté la proportionnalité de la sanction prononcée au regard de la
gravité du comportement transgresseur, V. R. RAMETTE, Le pouvoir de sanction administrative de la C.O.B.,
préc., notamment p. 370-378. 81 IL faut préciser que malgré l’importance de la motivation, le Conseil Constitutionnel, dans sa décision du 17
janv. 1989, ne s’est pas prononcé explicitement sur la nature de l’obligation. La loi déferée au Conseil confirmait
la position de la loi du 11 juillet 1979 qui lui confère un caractère obligatoire.
45
fondements et les motifs qui l’ont décidé au prononcé de la sanction, à conserver une
attitude impartiale quant à sa décision, qu’il devra expliquer.
La motivation peut aussi être le prolongement du débat contradictoire, dans le sens que les
juges par la retranscription des arguments échangés, rendent public celui-ci. Dans cette
hypothèse une partie de la procédure est rendue publique-suivant le souhait de l’art. 6 - de la
C.E.D.H. ce qui renforce la transparence à laquelle est soumit un procès. En effet, la
combinaison de l’obligation de publication des décisions découlant de l’art. 6 § 1 de la
C.E.D.H. - et de l’obligation de motivation de manière précise est un moyen de combattre
la partialité d’un juge. Celui-ci qui doit aussi bien justifier sa position lorsqu’il suit la voie
de la jurisprudence antérieure et surtout, lorsqu’il ne reprend plus la règle du passé.
Première mesure de contrôle, la motivation peut se révéler insuffisante à la protection du
justiciable, aussi est-il parfois nécessaire de recourir à un contrôle juridictionnel qui
d’ailleurs permettra de vérifier le bien fondé de la motivation.
§ 2 Contrôle juridictionnel de l’action de la C.O.B.
55.- L’importance de la garantie du recours, dépend de la nature du contrôle, qui peut
varier du contrôle de la légalité de l’acte ; recours pour excès de pouvoir, au contrôle du
fond de l’affaire, qui semble être un contrôle plus étendu et permet non seulement
l’annulation, mais aussi la réformation de la sanction ; il s’agit du recours de pleine
juridiction.
Pour la Cour européenne, l’essentiel est l’existence des voies de recours. Interprété dans un
sens large ce recours doit être un recours effectif82, c’est à dire répondant aux garanties du
procès équitable au sens du paragraphe 1er de l’art. 6 de la Convention. Il semble que le
recours à un tribunal est garanti, si celui-ci est doté de la plénitude de juridiction. La
jurisprudence européenne, exige que le contrôle juridictionnel de la sanction soit entier et
qu’il porte sur l’adéquation de la sanction à la faute83. Le recours contre une décision de la
82 C.E.D.H. 27 févr. 1992, STENUIT c/ France, A, n° 232, préc. 83 ibid. La Cour européenne a pu juger que « Bien qu’il apparaisse que le contrôle du Conseil d’Etat sur les
sanctions pécuniaires infligées conformément à la loi du 19 juillet 1977 eût pu être un contrôle de pleine
juridiction selon le droit national, la Commission constate que dans le cas d’espèce, le Conseil d’Etat n’a pas
procédé à un examen du recours introduit par la requérante pour les motifs exposés ci-avant. De ce fait, le
Conseil d’Etat ne s’est pas prononcé sur le bien-fondé de l’accusation dirigée contre la requérante. Il apparaît
donc que celle-ci n’a jamais bénéficié, en définitive, d’un examen de sa cause par un ‘’tribunal’’ doté de la
46
C.O.B. ne constitue pas un appel, parce que la C.O.B. - autorité sanctionnatrice - n’est pas
une juridiction et à plus forte raison de premier degré.
56.- Pourtant le Conseil constitutionnel, n’a pas érigé le recours de plein contentieux en
condition de la constitutionnalité du pouvoir répressif des autorités administratives
indépendantes84. Le législateur dans la loi du 2 août 1989 ; pour des questions d’opportunité
pratique, a consacré la compétence du juge judiciaire pour les recours formés contre les
actes individuels à caractère de sanction, prononcées par la C.O.B..
Ce recours de pleine juridiction85 permet à la Cour d’appel de réexaminer entièrement, les
faits, l’application de la règle de droit et la proportionnalité de la sanction, eu égard à la
gravité de la transgression.
Il s’agit concrètement pour la Cour d’appel de procéder à un nouvel examen de l’affaire au
fond. Force est de constater, que le recours peut aboutir à l’annulation ou à la réformation de
la décision de sanction de la C.O.B.. Dans ce dernier cas la Cour d’appel de Paris, juge de
nouveau l’ensemble de l’affaire - en fait et en droit - et infirme partiellement la décision de
la C.O.B..
57.- Le point faible de cette garantie est que le recours n’est qu’exceptionnellement assorti
d’un sursis à exécution. En effet, l’art. 12 de l’ordonnance de 1967 subordonne le sursis à
l’exécution de la décision de sanction de la C.O.B. à ce qu’elle soit susceptible d’entraîner
« des conséquences manifestement excessives ». Ces conséquences sont appréciées au
regard de la situation de la personne sanctionnée et de la gravité de son acte. Enfin, les arrêts
de la Cour d’appel de Paris peuvent faire l’objet d’un pouvoir en cassation selon la
procédure de droit commun.
Nous savons que pour un même fait il peut y avoir une poursuite administrative et une
poursuite pénale. En raison de l’indépendance de la procédure administrative et pénale,
puisque la cause des infractions de chacune des infractions est différente, d’une part la chose
jugée dans l’une des ces instances n’a aucune autorité sur l’autre86 et d’autre part, la Cour
d’appel n’est nullement obligée de surseoir à statuer jusqu’à ce que les juridictions
plénitude de juridiction qui aurait statué sur le bien-fondé de l’accusation en matière pénale dirigée contre
elle ». 84 Dans sa décision de 17 janv. 1989 relative au C.S.A., le conseil avait considéré que « toute décision infligeant
une sanction peut faire l’objet devant le Conseil d’Etat d’un recours de pleine juridiction ». 85 Cf. CE. Français du 6 juillet 1990, Compagnie diamantaire d’Anvers et Delcovit, Réc., p. 406. 86 Avec toujours le risque relevé précédemment de décisions contradictoires.
47
répressives se soient prononcées sur les poursuites pénales engagées contre l’intéressé, pour
la même violation87. Les deux procédures et recours étant différents.
En conclusion, le recours juridictionnel n’est pas suspensif, la sanction pécuniaire et la
publication de la décision ont donc de plein droit un caractère exécutoire.
87 C.A. Paris, 12 janvier 1994, aff. FRAIBERGER, préc.
48
Chapitre II Au niveau de l’exercice du pouvoir de sanction de la C.O.B.
58.- Le fait d’avoir conféré un pouvoir de sanction à la C.O.B. autorité administrative
malgré son statut d’ « indépendante » constitue toujours une situation particulière. En effet,
ce pouvoir par nature administratif se confronte avec des principes fondamentaux qui
régissent le domaine pénal. De plus, force est de constater que les conditions d’exercice de
ce pouvoir sont critiquables. Nous examinerons l’exercice du pouvoir de sanction de la
C.O.B., sous l’angle de sa nécessaire circonscription (Section 1), puis, nous envisagerons
les hypothèses où son exercice est effectué de manière critiquable (Section 2).
Section I La nécessaire circonscription du pouvoir répressif de la C.O.B.
59.- Aussi étendus que sont les pouvoirs attribués à la C.O.B., il est nécessaire de les
limiter pour les besoins de l’équité. Aussi reprenant les principes généraux du droit pénal,
sous-tendus par l’équité et la sécurité juridique, la jurisprudence a admis en pratique
l’application du principe non bis in idem (§ 1), ainsi que celui de personnalité des peines (§
2).
§ 1 Le principe de non bis in idem
60.- L’ordonnance du 28 septembre 1967, dans sa rédaction du 2 août 1989, prévoit un
cumul des sanctions pénales et administratives, pour les mêmes comportements.
En effet, le comportement punissable pénalement par l’art. 10-1 de l’ordonnance de
1967-qui constitue un délit correctionnel - pour infraction à une disposition de celle-ci, peut
également être puni par une sanction administrative de la C.O.B., pour violation -
manquement - à l’un de ses règlements.
Ce cumul de sanctions, lesquelles peuvent a priori atteindre des montants identiques,
est incompatible avec le principe non bis in idem, lequel s’oppose à un cumul des sanctions
de différentes poursuites concernant la même infraction. Le fondement de se principe, réside
dans l’intérêt de l’accusé de connaître qu’il ne sera pas à nouveau poursuivi pour le même
fait88. A partir du moment où l’organe sanctionnateur se prononce définitivement, l’action
répressive est éteinte.
88 De cette manière sont garantis l’exigence générale d’équité, la sécurité juridique et les droits de la défense
après le procès.
49
61.- Principe reconnu entre autorités de même ordre89- p. ex. soit des juridictions pénales,
soit des autorités administratives - il s’est posé la question de son application entre autorités
d’ordre différent.
Dans ce cadre, la règle applicable est celle de l’indépendance des sanctions. En effet la
dualité de sanctions susceptibles d’être prononcées correspond à une dualité de
qualifications, les éléments constitutifs de chacune de ces infractions n’étant pas toujours
identiques, les sanctions sont censées être infligées, pour des causes juridiques différentes.
De plus, nous pouvons relever que la sanction administrative remplit une fonction distincte
de la sanction pénale. En effet, la C.O.B. utilise son pouvoir répressif comme moyen de
régularisation. Le but de l’amende est d’assurer le bon fonctionnement des marchés
financiers et non pas de maintenir l’ordre public. Saisi, le Conseil Constitutionnel, a précisé
dans la décision du 28 juillet 1989 que « si l’éventualité d’une double procédure peut
effectivement conduire à un cumul de sanctions, le principe implique qu’en tout état de
cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le
montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues » et qu’ « il appartiendra aux
autorités administratives et judiciaires compétentes de veiller au respect de cette
exigence »90. Avec beaucoup d’habileté91, le Conseil a pu neutraliser les conséquences de ce
cumul, les plus sujettes à critique.
Ainsi, le Conseil est parvenu en fait, à des résultats équivalents à ceux qu’ engendrait
une application du principe non bis in idem, entre sanctions de nature différente, venant
sanctionner le même acte. Ce cumul des poursuites pour des faits identiques porte en germe
un risque de confusion et de contradiction quant aux décisions prises par la justice pénale et
la C.O.B., les deux instances risquant de se prononcer en même temps en rendant deux
décisions contradictoires et ce, même si les incriminations pénales et administratives, se
sont rapprochées notamment quant à la définition du délit d’initié. Cette situation risque de
remettre en question la valeur des procédures suivies devant chaque autorité.
En effet, tel était le cas du P.D.G. d’Yves Saint-Laurent nonobstant le fait qu’il avait
été sanctionné sur la base du règlement 90-08, pour la vente des titres en disposant
89 Prévu par l’art. 368 et 6 al. 1 du Code de procédure pénale, assurant le non cumul des peines en prévoyant que
la personne qui a été légalement jugée, ne peut plus faire l’objet d’une poursuite en raison des mêmes faits,
même sous une qualification différente. 90 Cf. GENEVOIS, Le C. C. et l’extension des pouvoirs de la C.O.B., R.F.D.A., 1989, n°4, p. 671. 91 Puisqu’il s’agissait de tenir compte du montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues pour déterminer
le montant global des sanctions.
50
d’informations privilégiées, preuve facile à rapporter en raison du caractère matériel de
l’infraction, le juge pénal l’avait relaxé ne pouvant prouver son intention frauduleuse92.
C’est pour répondre à ces questions, que le législateur, sept ans après la décision du
Conseil Constitutionnel, a prévu la possibilité de non cumul entre sanctions pénales et
administratives de même type (pécuniaire). En effet, la loi du 2 juillet 1996, modifiant
l’ordonnance du 28 septembre 1967, en admettant en même temps qu’une sanction pénale et
une sanction administrative peuvent être appelées à réprimer les mêmes faits, ou des faits
connexes, prévoit dans l’art. 9-3 que « lorsque la C.O.B. a prononcé une sanction
pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes
faits ou des faits connexes, celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur
l’amende qu’il prononce ».
Par ce moyen le législateur, a exclu indirectement une partie de la sanction pénale,
puisqu’il a laissé à la faculté du juge le soin d’imputer ou pas la sanction administrative sur
la sanction pénale. Faculté qu’a priori il mettra en œuvre, en considérant qu’il soit tenu par
le principe de proportionnalité.
Ainsi, il peut arriver dans le cas où la C.O.B. a déjà infligé le maximum de la sanction
pécuniaire prévue, que le juge pénal ordonne l’imputation de la sanction administrative
pécuniaire sur l’amende pénale, que cette dernière s’exclue entièrement. En considérant que
les poursuites sont presque toujours diligentées à l’initiative de la C.O.B., étant donné que le
pouvoir de constatation des infractions dans ce domaine appartient à ses agents - le
Procureur de la République n’étant pas le premier informé - les sanctions administratives
imposées par la C.O.B. auront tendance d’empiéter indirectement dans le domaine pénal.
Ainsi la C.O.B. apparaît en fait comme « le véritable organe de poursuites, le Ministère
public ne lui servant que de relais purement formel »93. Nous constatons que la non
admission du principe de non cumul entre sanctions pénales et administratives se fondant en
partie sur la différence de nature entre ces sanctions n’est plus justifiée.
Par ailleurs, ce cumul risque de ne pas être admis par la Cour Européenne94. En effet,
dans l’arrêt GRADIGER c/ Autriche du 23 oct. 199595, relatif à un accident de la route, la
92 Cf. Le Monde, du 26-27 nov. 1995, p. 16, « Le non lieu du P.D.G. d’Yves Saint-Laurent remet en cause le
pouvoir de sanction de la C.O.B. ». 93 Cf. Mme DELMAS -MARTY, Droit pénal des affaires, T. 1, 1990, p. 204 et 246. 94 L’art . 4 du Protocole n°7 §1 énonce : « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du
même Etat en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif
conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat ». Nous pouvons trouver ce principe également prévu
51
Cour déclare qu’elle « n’ignore pas que les dispositions en cause se distinguent non
seulement sur le plan de l’appellation des infractions mais aussi sur celui, plus fondamental
de leur nature et de leur but. Elle relève en outre que l’infraction punie » par le code de la
route « ne représente qu’un aspect du délit sanctionné » par le code pénal. « Néanmoins, les
deux décisions litigieuses se fondent sur le même comportement. Partant, il y a eu violation
de l’art. 4 du Protocole n°7 »(§55).
Ainsi, comme la loi prévoit un cumul des sanctions pécuniaires, d’une part pénales et
d’autre part administratives, la question qui se pose, est quel est l’intérêt de cette double
procédure, notamment quand elle aboutit à des sanctions de même type ?
Le législateur, bien qu’il ait déjà admis que la sanction administrative et la sanction
pénale viennent en l’espèce réprimer les mêmes faits, hésite à admettre expressément
l’absence de différence de nature entre les sanctions pécuniaires des deux systèmes et
choisir officiellement l’une de deux sanctions pour les mêmes faits en faisant véritable
application de la règle non bis in idem.
62.- Si le législateur a agi de la sorte pour éviter l’encombrement des Tribunaux
correctionnels et pour que les sanctions prononcées dans ce domaine soient à la fois
effectives et efficaces, nous constatons que la certitude de la répression n’est pas assurée
ainsi. Malgré la possibilité de doubles poursuites, il existe des cas où le montant de la
sanction est largement inférieur au profit établit ; ou même que le transgresseur reste
impuni. La double incrimination est ainsi inutile.
63.- S’il est impossible d’établir une distinction entre infractions « graves » et infractions
de faible importance pour pouvoir faire un choix entre ces sanctions, ou de supprimer tout
simplement les infractions administratives, en raison de leur rapidité et efficacité
indéniables, nous pourrions adopter la solution proposée par M. M. H. de VAUPLANE et
O. SIMART96, qui consiste à confier exclusivement au droit pénal le domaine des
infractions troublant l’ordre social, composé de valeurs de haute protection et laisser les
infractions économiques à la compétence de la C.O.B..
par l’art. 6 dans le cadre d’une interprétation extensive de celui-ci. L’art. 6-qui contient une règle assez générale
sur le procès équitable-dans le sens qu’il serait interdit de punir une personne deux fois pour le même acte. 95 C.E.D.H., aff. GRADIGER c/ Autriche du 23 oct.1995, série A, N°328. 96 M. M. H. de VAUPLANE et O. SIMART, Délits boursier : propositions d’une reforme, R.D.B.B., n°61,
mai/juin, 1997, p.85.
52
§ 2 Le principe de personnalité des poursuites et des sanctions
64.- Le principe de personnalité des infractions – deuxième limite au pouvoir répressif de
la C.O.B. – est un principe essentiellement prévu en droit interne. Exprimé par l’ adage latin
nullum crimen sine culpa, est inscrit dans la plupart des législations en droit pénal. Le
principe, fondé sur des considérations d’équité, signifie la non imputabilité à une personne
d’un fait commis par autrui, en d’autres termes, implique l’application de la règle de la
personnalité des poursuites et des sanctions, que pose l’art. L121-1 du Code pénal, « nul
n’est responsable pénalement que de son propre fait ». De cette règle, il résulte qu’une
personne physique ou morale ne peut-être sanctionnée que si elle est l’auteur d’une
infraction. L’art. 121-4 du même Code, précise qu’est « auteur de l’infraction la personne
qui commet les faits incriminés ».
Ce principe, ne s’applique pas uniquement aux sanctions pénales stricto sensu. Erigé
par le conseil d’Etat à un principe général du droit français97, il a tendance à s’appliquer à
toutes les sanctions et de ce seul fait, en matière de répression administrative, avec les
mêmes implications qu’en matière pénale98.
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris, du 14 mai 199799, est la première illustration de celui-ci
en tant que principe général du droit boursier et ceci en se référant à l’art. 6 de la C.E.D.H..
En l’espèce la C.O.B., avait ouvert une procédure à l’encontre d’une société pour des
informations diffusées au public en infraction à son règlement 90-02, relatif à l’information
du public. Cette société avait été dissoute par scission, sur décision de son actionnaire
unique, avant que la C.O.B. n’examine l’éventualité d’une sanction au titre des faits
reprochés. Perçu par la C.O.B. comme un stratagème de la part de la société et voulant punir
le non respect de son règlement, elle poursuit les sept sociétés issus de la scission et leur
inflige les sanctions, parce qu’elles assuraient la « continuité économique de l’entité
préexistante ». 97 C.E. 8 janv. 1954 : LOUQUET, R.F.D.A., 1954, p. 85. 98 Le Conseil Constitutionnel ne lui a pas accordé de valeur constitutionnelle. Cependant, par une décision n°76-
88 du 2 déc. 1976 relative au transfert de la charge d’une condamnation pécuniaire, il a admis ce transfert à
condition de respecter les droits de la défense de la personne au profit de laquelle se transfert s’ opère. 99 C.A. Paris, ch. fin. Et éco., 14 mai 1997, S.N.C. Compagnie générale et immobilier George V. et autres c/
Agent judiciaire du Trésor, Bull. Bourse, juillet-août 1997, § 98, p. 646-657, n. N. RONTCHEVSKY.
53
La Cour de cassation100, par un arrêt confirmatif rejette le pourvoi en énonçant que « les
prescriptions de l’art. 6 de la Convention européenne des droits de l’homme s’appliquent
aux sanctions pécuniaires prévues par l’art. 9-2 de l’ordonnance du 28 septembre 1967
prononcées par la C.O.B., qui bien que de nature administrative visent comme en matière
pénale à punir les auteurs des faits contraires aux règles générales édictées par les
règlements de la C.O.B. et à dissuader les opérateurs de se livrer à telles pratiques, la Cour
d’appel en décidant que le principe de la personnalité des poursuites et des sanctions
s’oppose à ce qu’en l’absence des dispositions dérogatoires expresses, des personnes
physiques ou morales autres que l’auteur du manquement en cause, puissent se le voir
imputer et faire l’objet de sanctions à caractère pénal, loin de violer les textes visés au
moyen, en a fait une exacte application ».
A première vue, nous ne pouvons qu’être étonnés de la déduction du principe de
personnalité des poursuites par l’art. 6 de la C.E.D.H.. Ce dernier ne consacre en aucun de
ses paragraphes le principe du droit de la personnalité des poursuites et des sanctions, en
termes exprès. Mais comme le relève fort bien M. le professeur RONTCHEVSKY « il est
vrai que l’on pouvait considérer que l’imputation d’une infraction à une personne qui ne l’a
pas commise est contraire à la présomption d’innocence garantie par l’art. 6 §2 ».
En d’autres termes, en raison de l’absence de preuves caractérisant le caractère frauduleux
de l’opération, la C.O.B., ne pouvait sanctionner de personnes autres que le véritable
« auteur » de la pratique contraire à son règlement même si les dites sociétés étaient issues
de la fusion ou de la scission de cette dernière. Dans le cas contraire, la sanction était
infligée en méconnaissance de l’exigence générale d’équité prévue par l’art. 6 §1 ; la C.O.B.
ayant présumé de la culpabilité des sociétés issues de la scission.
100 Cass. com. 15 juin 1999, n°12379, C.O.B. c/ Cie gle d’immobilier Georges V et autres. Bull. Joly Bourse,
nov.-déc. 1999, p. 579 n. N. RONTCHEVSKY.
54
Section 2 Les situations critiquables de l’exercice du pouvoir de sanction de la C.O.B.
65.- Si l’octroi d’un pouvoir de sanction à la C.O.B. constitue une avancée appréciable et
incontestable, il n’en demeure pas moins que la procédure recèle quelques lacunes ;
notamment en ce qui concerne l’absence de prescription des poursuites pour manquements
aux règlements de la C.O.B. (§ 1) et la capacité du Président d’ester en justice (§ 2).
§ 1 L’absence de prescription des poursuites pour manquements aux règlements de la
C.O.B.
66.- L’absence de prescription des poursuites en raison des manquements aux règlements
de la C.O.B., est effectivement contestable. La prescription, règle juridique, peut
certainement consacrer des solutions, que la morale réprouve. Définie comme un « mode
d’extinction de l’action publique résultant du non exercice de celle-ci avant l’expiration du
délai fixé par la loi, dont la survenance résulte du seul écoulement du temps »101, elle est
admise par le droit sur le fondement de considérations sociales de sécurité juridique. En
effet cette règle a deux fondements principaux.
67.- Le premier réside dans ce qu’il est convenu d’appeler la « grande loi de l’oubli », qui
revient à considérer, qu’il n’y a plus lieu de poursuivre l’auteur des manquements,
lorsqu’une certaine durée est écoulée depuis la commission des faits. En effet, après un
certain temps lorsque l’opinion publique a oublié le trouble causé, la condamnation d’une
personne à des dommages et intérêts n’a plus vraiment d’utilité et ne peut causer que de
perturbations puisque personne ne réclame réparation. Pour empêcher qu’un tel risque se
réalise et donc par un souci de sécurité juridique, la loi vient dire que passé un certain délai,
toute action en justice est irrecevable.
68.- Le second fondement réside dans l’idée, que la négligence de la partie poursuivante
d’agir dans un certain temps, lui fait perdre ce droit.
101 Vocabulaire juridique CAPITANT.
55
Il en résulte que les règles de prescription poursuivent un but légitime, garantir la sécurité
juridique et empêcher les plaintes tardives, par crainte d’être parfois dolosives.
Ces deux fondements peuvent justifier l’application du principe de prescription aux
poursuites susceptibles d’être engagées par la C.O.B.. Nous pouvons d’emblée nous
étonner, car l’ordonnance de 1967, malgré ses nombreux remaniements, reste muette sur le
délai de prescription des infractions pour méconnaissance des règlements de la C.O.B.. De
cette manière, celle-ci est libre de sanctionner indéfiniment dans le temps102. Or, cette
situation singulière, est contraire au principe constitutionnel de proportionnalité des délits et
des peines. Nous l’avons déjà vu, ce principe exige une proportion entre l’infraction, le
comportement transgresseur et la sanction encourue.
69.- La C.O.B. ne dispose d’un pouvoir de sanction que pour réprimer la méconnaissance
de ses règlements. Or, toujours est-il, que ce pouvoir est également subordonné à l’existence
des effets faussant le bon fonctionnement du marché. Après un certain délai - plus ou moins
long - pendant lequel la C.O.B. s’est montrée négligente, plus rien ne justifie son
intervention. Dans ce cas il y aurait certainement absence d’adéquation entre la sanction et
la gravité de la faute, puisque a priori le marché aurait recouvré un fonctionnement efficient.
De plus, cette possibilité ouverte à la C.O.B. heurte le principe du respect de
l’exigence générale d’équité dans le cadre d’un procès posé par l’art. 6 de la C.E.D.H.103. Si
la « grande loi de l’oubli » exige pour des raisons de sécurité juridique d’oublier les
infractions commises, cet oubli est davantage nécessaire dans la mesure où le temps écoulé,
le justiciable pourra rencontrer des difficultés sérieuses pour se défendre et pouvoir établir
son innocence. Ainsi, tout procès dans cette hypothèse ne se déroulerait pas à armes égales.
Cette inégalité des armes se rencontre également dans les pouvoirs accordés au président de
la C.O.B..
102 Cette absence surprend d’autant qu’une prescription de trois ans existe au niveau des autres autorités
administratives indépendantes telles que l’Autorité de régulation des télécommunications, le Conseil de la
Concurrence or le Conseil supérieur de l’audiovisuel. 103 Cependant nous ne serons pas d’accord avec une partie de la doctrine qui fonde la nécessité de prescription
sur le principe du respect de chacun à faire entendre sa cause dans un délai raisonnable. En effet, selon la Cour
Européenne poursuivie pénalement a le droit d’obtenir, dans un délai raisonnable, une décision définitive sur le
bien-fondé d’une accusation pénale dirigée contre elle. Ceci vise à éviter une situation d’incertitude prolongée de
la personne mise en cause. Or, dans l’hypothèse qui nous intéresse nous reprochons à la C.O.B. d’ouvrir
tardivement une procédure, c’est à dire pour des faits anciens, a fortiori plus de trois ans (délai de prescription
prévu pour les autres autorités administratives).
56
§ 2 La capacité du président de la C.O.B. d’ester en justice
70.- Le souci d’indépendance de la C.O.B., à l’égard des pouvoirs publics d’une part et des
acteurs du marché d’autre part, a constitué l’une des préoccupations majeures du législateur
en 1989. Malgré les importants pouvoirs qu’il lui a octroyé c’est par la loi du 2 juillet 1996
qu’il lui affirme en termes exprès la qualité d’ « autorité administrative indépendante » et
confère à son président la capacité d’ester en justice.
En effet, avant la loi de 1996, aucun texte ne l’autorisait à se pourvoir en cassation
contre un arrêt de la Cour d’appel de Paris, statuant en application de l’art. 12104 de l’ord. de
1967. De plus, la C.O.B. ne pouvait se défendre, devant la Cour d’appel lors des affaires
tendant à l’annulation de ses décisions et à sa condamnation à la réparation des
conséquences dommageables de celle-ci, par la voie de l’indemnisation. Les recours
devaient être intentés contre l’Etat.
71.- L’art. 1 al. 2 de l’ord. de 1967, dans sa rédaction issue de la loi de 1996, dispose que
« dans l’accomplissement des missions qui sont confiées à la commission par la présente
ordonnance, le président de celle-ci a qualité pour agir au nom de l’Etat devant toute
juridiction à l’exclusion des juridictions pénales ». Cette possibilité de recours paraît
pourtant contestable et ceci ; à deux reprises.
D’une part, nous savons que la jurisprudence européenne a toléré l’intervention préalable –
des autorités administratives, donc de la C.O.B. – par une procédure répressive, en sanction
des manquements à ses règlements sans devoir respecter sur tous les aspects les
prescriptions de forme de l’art. 6 § 1 de la C.E.D.H., dans la mesure où est organisé par la
suite l’éventualité d’un recours devant une juridiction respectant les exigences d’une
procédure équitable. Tel est le cas de la Cour d’appel de Paris, qui en statuant sur des
recours de plein contentieux, intervient en tant que juridiction de « contrôle » et peut
confirmer, infirmer, annuler ou reformer les sanctions administratives prises.
72.- Cependant, la capacité du président de contester ces décisions va à l’encontre du
fondement même de la possibilité octroyée à la C.O.B. pour des « impératifs de souplesse et
d’efficacité » à ne pas être soumise à une application stricte de l’art. 6 de la C.E.D.H.. En
effet, dans le cadre d’un arrêt de sanction de la C.O.B. pour méconnaissance d’une garantie
104 L’art. 12 comme nous l’avons vu donne compétence au juge judiciaire pour connaître des recours contre les
décisions des sanctions prononcées par la C.O.B., autres que celles qui ont un caractère réglementaire ou qui sont
relatives à l’agrément des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, des gérants de portefeuille et
des sociétés de gestion de sociétés civiles de placement immobilier.
57
du procès équitable ; a priori admise parce que la C.O.B. n’est pas une juridiction, cette
dernière tentera de contester la décision de la Cour d’appel par le pourvoi en cassation. De
plus, cette situation va à l’encontre du principe général de procédure civile, de loyauté dans
le déroulement du procès. Celui-ci commande à tout organisme ; tribunal ou autorité
administrative, statuant en premier degré de « s’incliner » devant la décision de contrôle de
la juridiction supérieure. Enfin cette situation – la C.O.B. intervenant comme plaignante ou
demanderesse - est critiquable aussi quant à l’exigence de procès équitable et notamment
l’égalité des armes et les droits de la défense. En effet elle aboutit à ce que le juge de 1ère
instance, devient partie en deuxième et se pourvoie même en cassation.
Une solution a été donnée par les avocats M. M. DEGUELDRE et GRAMBLA et
Mme HERBIERE105 à cette incohérence. Ils proposent que le Procureur Général intervienne
dans les affaires auxquelles la C.O.B. est impliquée. En effet l’art. 12 du décret de 1990
dispose que « le ministère public peut prendre communication des affaires dans lesquelles il
estime devoir intervenir ».Ainsi dans le cadre de ce pouvoir d’intervention, le Procureur
Général pourrait exercer en cas de besoin un recours à la demande de la C.O.B. cette
dernière pouvant dans ce cas se joindre au pourvoi en cassation initié par celui-ci.
73.- C’est la seule manière afin que soient respectés les principes de procédure pénale,
ainsi que ceux de l’art. 6 §1 de la C.E.D.H.. Cependant la modification de la procédure
devant la C.O.B. intervenue le 1er août 2000 n’était que réglementaire et n’a concerné que le
décret de 1990, qui régit la procédure de sanction de la C.O.B.. Sur ce point, il faudrait
certainement une modification législative car est en cause l’art. 1er de l’ordonnance de 1967.
Si l’application de l’art. 6, aux sanctions administratives à caractère répressif prononcées
par les autorités de régulation des marchés financiers, est désormais définitivement acquise,
il est nécessaire de voir l’incidence de cette application lors de la mise en œuvre de ce
pouvoir répressif.
105 G. P. 24 et 25 févr. 1999, p. 8, n. DEGUELDRE, GRAMBALAT et HERBIERE.
58
Deuxième partie L’importance de l’équité pour un procès à armes égales
74.- L’exigence générale d’équité entendue comme la garantie qui découle de l’ensemble
de l’art. 6 de la C.E.D.H. est primordiale pour qu’un procès se déroule à armes égales. Le
respect de cette dernière, se trouve satisfait aussi bien dans le cadre d’un procès équitable
(Titre I), que lorsque les garanties dérivées de celui-ci sont respectées (Titre 2). N’oublions
pas que toutes les composantes de l’art. 6 sont interdépendantes.
Titre I L’égalité des armes par l’exigence d’équité procédurales
75.- L’équité procédurale exige aussi bien un tribunal impartial, condition nécessaire pour
un procès impartial, qu’un procès équitable (Chapitre 2). Dans les développements qui vont
suivre en raison du fait que nous apprécions l’impartialité du tribunal notamment lors d’un
procès, nous envisagerons la C.O.B. en tant que structure garante d’un procès impartial
(Chapitre 1).
Chapitre I La C.O.B., structure garante d’un procès impartial
76.- La C.O.B. est considérée comme garante d’un procès impartial lorsque les conditions
posées par la jurisprudence européenne quant à l’impartialité personnelle des juges et
l’impartialité fonctionnelle de la juridiction sont respectées. Nous envisagerons dans un
premier temps les conditions requises pour qu’un tribunal soit impartial (Section 1), puis
nous procéderons à la confrontation du fonctionnement de la C.O.B. aux prescriptions du
procès impartial (Section 2).
Section 1 Les conditions d’un procès impartial
77.- C’est dans l’arrêt PIERSACK c/ Belgique106, que la Cour européenne pose la
problématique de l’impartialité dans le cadre d’un procès répressif. Il s’agit d’une notion qui
revêt dans la jurisprudence européenne une place essentielle pour l’équité procédurale.
106 C.E.D.H., 1er oct. 1982, PIERSACK c/ Belgique, série A, n°53, § 27.
59
« Si l’impartialité se définit d’ordinaire par l’absence de préjugé…elle peut s’apprécier de
diverses manières. On peut distinguer…entre une démarche subjective, essayant de
déterminer ce que tel juge pensait dans son for intérieur en telle circonstance, et une
démarche objective amenant à rechercher s’il offrait des garanties suffisantes pour exclure
à cet égard tout doute légitime ».
L’adage, rappelé par la Cour européenne, selon lequel la justice doit non seulement être
rendue, mais également être, perçue comme telle, reflète bien l’idée que l’organe appelé à
statuer, doit non seulement être mais aussi apparaître neutre par rapport aux parties. La
Cour européenne lorsqu’elle se prononce sur l’impartialité d’un tribunal elle tient compte107,
aussi bien de l’impartialité « personnelle » du juge (§1), que de l’impartialité fonctionnelle
de la juridiction (§2).
§ 1 La condition d’impartialité personnelle des « juges »
78.- L’impartialité personnelle du juge, se définit par une démarche subjective qui tente
« de déterminer ce que tel ou tel juge composant le tribunal pensait dans son fort intérieur
en telle circonstance, et s’il arbitrait en lui quelque raison de favoriser le plaideur »108.
Elle peut se manifester par l’expression préalable de l’opinion individuelle de celui qui
va siéger109, elle relève, à l’instar de la célèbre formule d’Edouard LAFERRIERE, l’homme
« avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences ». Cette impartialité s’apprécie,
indépendamment de la fonction exercée, en raison des traits propres au juge. Cela demande
évidemment des preuves et c’est pourquoi l’impartialité personnelle du juge se présume
jusqu’à preuve contraire110.
107 Il faut bien reconnaître que la terminologie utilisé par l’arrêt de démarche objective et subjective n’est pas
satisfaisante. C’est à partir d’éléments objectifs qu’on vérifie l’impartialité subjective du juge. C’est pour cela
que nous adoptons la distinction opérée par Mme R. KOERING-JOULIN, dans Justices, 1998-10, p.1
d’impartialité « personnelle » et fonctionnelle. 108 J.-C. SOYER et M. DE SALVIA, art. 6 in La Convention Européenne des droits de l’homme, Commentaire
article opar article, sous la direction de L.-E. PETTITI et P.-H. IMBERT, Ecinomica, 1999, p. 239, spéc. p. 260. 109 Celui-ci prejuge en quelque sorte l’issue de l’affaire, il se montre partial envers les parties en faisant entendre
qu’il est déjà convaincu de la culpabilité de l’intéressé ou en tenant des propos racistes. Pourtant, il ne faut pas
confondre le préjugé avec le prejugement, qui est plutôt l’atteinte à la présomption d’innocence, le juge retenant
la culpabilité, de l’accusé en méconnaissant les garanties procédurales. Cf. infra. 110 C.E.D.H., aff. LE COMPTE c/ BELGIQUE, du 23 juin 1981, A, n°43, § 55. Cette situation peut aussi
s’expliquer en raison de l’ « intérêt » que tel ou tel juge peut trouver dans une affaire.
60
79.- D’après la jurisprudence de la Commission et de la Cour, l’impartialité est
suffisamment garantie par les règles permettant la récusation du juge111. En effet, lorsque un
ou plusieurs juges sont suspects quant à leur impartialité, la procédure de récusation aboutit
à ce que l’affaire soit jugé par une autre composition des juges. Cependant, un comparant,
n’ayant pas fait usage de son droit de récusation, ne peut plus relever ce manque
d’impartialité du juge.
80.- Dans le cadre du droit boursier, la loi de Modernisation des activités financières, du 2
juillet 1996, a introduit dans l’ordonnance du 28 sept. 1967, des dispositions visant à
renforcer l’exigence de transparence et d’impartialité du Collège vis-à-vis des intérêts
privés112, exception faite de l’art. 2 al. 4, qui prévoyait depuis 1989 la soumission du
président « aux règles d’incompatibilité prévues pour les emplois publics ». Désormais,
l’art. 2 ter. prévoit une obligation d’information envers la Commission, du président et des
membres de celle-ci « des intérêts qu’ils détiennent ou viennent à détenir des fonctions
qu’ils exercent ou viennent à exercer dans une activité économique et financière ainsi que
tout mandat qu’ils détiennent ou viennent à détenir au sein d’une personne morale ». Ainsi
s’exprime la volonté de prévenir qu’un de ses membres se trouve dans une situation de
conflit d’intérêt, dans laquelle il devra satisfaire un intérêt personnel, au préjudice d’un bon
fonctionnement de la justice.
De plus, afin d’éviter, que le président du Collège ne soit amené à être juge et partie,
dans une affaire dans laquelle il a un intérêt direct ou indirect, il leur est interdit de délibérer
dans cette affaire. Ceci vaut également s’ils ont représenté une des parties intéressées, au
cours des trois années précédant la délibération (art. 2 ter. al. 2, modifié).
Cette loi, comme le relève Mme DECOOPMAN, améliore la prévention des conflits
d’intérêts et ceci même si « les contours et le régime de l’interdiction méritent d’être
précisés ». Pourtant force est de constater, qu’accepter de s’interroger sur l’opinion
personnelle du juge, risque de multiplier les recours, souvent dilatoires, essayant de mettre
en question son impartialité. C’est pourquoi, il faut s’intéresser aussi, à l’impartialité
fonctionnelle du juge, laquelle, s’apprécie de manière objective.
§ 2 La condition d’impartialité fonctionnelle de la juridiction 111 La Cour considère déjà depuis longtemps que « doit se récuser tout juge dont on peut légitimement craindre
un manque d’impartialité. Il y va de la confiance que les tribunaux d’une société démocratique se doivent
d’inspire aux justiciables » C.E.D.H., aff. PIERSAK c/ Belgique, du 1er oct. 1982, A, n°53, § 30. 112 Sur ce point, N. DECOOPMAN, La Commission des opérations de bourse, in La modernisation des activités
financières, éd. Joly, thème 8, p. 105, spéc. 238 et s.
61
81.- Dans ce cas, l’impartialité du juge se pose à raison de l’exercice même de ses
fonctions, indépendamment de ses convictions personnelles, de son attitude. Nous sommes
alors amenés à rechercher si le juge offre des garanties suffisantes pour exclure tout risque
objectif d’impartialité et s’il présente en apparence des garanties telles que tout doute
légitime sur son impartialité soit exclu. Une telle approche est très favorable au justiciable,
puisque fondée sur le risque de partialité, au seul vu de l’apparence. Le professeur Marie-
Anne FRISON-ROCHE, affirme que « l’impartialité, qu’elle soit objective dans
l’organisation de la juridiction ou subjective dans le comportement du juge particulier,
consiste non pas à cesser d’avoir des opinions personnelles ou de parvenir à une sainte
désincarnation, mais plus simplement à être apte à être convaincu par un fait, un argument,
une interprétation juridique qu’une partie va proposer au juge »113. Ainsi la notion
d’impartialité dans sa globalité, exige du juge à fondre son intime conviction judiciaire
affranchie de toute opinion personnelle et pour la juridiction de placer les juges de telle
manière, afin que chaque justiciable ait objectivement et apparemment confiance dans la
justice. L’impartialité ne concerne évidemment pas seulement les juridictions. Les autorités
administratives indépendantes chargées d’assurer la régulation d’un secteur technique et
disposant à cet effet des prérogatives importantes - notamment un pouvoir de sanction -
peuvent tout aussi bien être visées.
82.- Dans le cadre de l’activité de la C.O.B. – nous l’avons déjà vu – certains de ses
membres, p. ex. le rapporteur, étaient amenés sous le régime du texte de 1997 à cumuler les
fonctions de poursuite, d’instruction et de jugement. Cette situation, a nui à cette
impartialité apparente qu’exige l’art. 6 de la C.E.D.H..
Une analogie ne manque pas d’apparaître à ce stade avec l’arrêt PROCOLA c/
Luxembourg114, du 28 sept. 1995 relatif au Conseil d’Etat Luxembourgeois. La Cour
européenne constate « qu’il y a eu confusion dans le chef de quatre conseillers d’Etat de
fonctions consultatives et de fonctions juridictionnelles. Dans le cadre d’une institution tel
le Conseil d’Etat Luxembourgeois, le seul fait que certaines personnes exercent
successivement à propos des mêmes décisions les deux types de fonctions est de nature à
mettre en cause l’impartialité structurelle de la dite instruction ».
113 L’impartialité du juge, D. 1999, chronique, p. 54. 114 D. 1996, jurispr., p. 301, comm. Fl. BENOIT-ROHMER. Quatre des cinq membres de la formation de
jugement (le comité du contentieux) avaient eu à connaître pour avis de la mesure objet du recours.
62
Ainsi, selon la Cour, le justiciable est fondé à craindre que les membres de la
juridiction se sentent liés par l’avis donné. Ce manque d’impartialité supposé, suffit alors
pour faire douter quant au bon fonctionnement du procès répressif. C’est une « impartialité
qui se donne à voir »115 qui est exigée.
Dans cette hypothèse, le cumul en la personne du rapporteur des fonctions de
poursuite, d’instruction et de jugement pose réellement problème. Comme il a été fort bien
relevé, l’accroissement de son rôle a été tel, qu’il est devenu le principal personnage de la
procédure de sanction devant la C.O.B.. Il nous appartient actuellement d’examiner la
compatibilité du rôle du rapporteur de la C.O.B. avec l’art. 6 § 1 de la C.E.D.H..
Section 2 Confrontation du fonctionnement de la C.O.B. aux prescriptions du procès
impartial
83.- Dès 1990, Franck MODERNE a observé que « le droit français des sanctions
administratives, fût-il validé dans son principe par le Conseil constitutionnel, souffre d’une
infirmité congénitale : celle de la confusion des genres. La Convention européenne pourrait
au moins contribuer à en atténuer les excès dans l’intérêt bien compris des libertés
individuelles »116 En effet, la Convention européenne a vocation à se substituer à la
Constitution nationale. Des pratiques considérées comme permissives en droit interne,
peuvent montrer leurs limites face aux prescriptions particulièrement exigeantes de l’art. 6,
qui n’oublions pas, traduit certaines notions de manière autonome et donne une importante
place à la théorie des apparences. Ainsi, malgré le fait que ces sanctions sont infligées par
des autorités administratives dans un souci d’efficacité de la répression et pour les
impératifs de leur action, argument décisif en matière administrative, leur confrontation
avec les prescriptions de l’art. 6, est inévitable, parce que relèvent de la matière « quasi-
pénale ». L’insuffisance du fonctionnement de la C.O.B. se situe au niveau du cumul des
fonctions prévu en son sein.
La pratique a montré qu’il est nécessaire, de séparer non seulement les fonctions
d’instruction et de jugement (§ 1), mais aussi des fonctions de poursuite et de jugement (§
2).
115M. A. FRISON-ROCHE L’impartialité du juge, préc. 116 F. MODERNE, Sanctions administratives et protection des libertés individuelles au regard de la C.E.D.H.,
P.A. 17 janv. 1990, p. 15.
63
§ 1 L’insuffisance de séparation des fonctions d’instruction et de jugement
84.- La C.OB., comme toute autorité administrative indépendante, munie d’attributions
proches d’une juridiction, assure la police d’un marché. A cet effet, elle cumule de
prérogatives importantes qui la rendent a priori impuissante à satisfaire à l’exigence de
l’impartialité objective. En effet, depuis les décisions de la Cour d’appel de Paris du 7 mai
1997117, rendues dans la même affaire OURY, était relevé la confusion des pouvoirs de
poursuite, d’instruction et de constatation de culpabilité118. Le décret intervenu en 1997, loin
de répondre à toutes les critiques de la Cour d’appel relatives au régime antérieur, a renforcé
le rôle du rapporteur119 dans la procédure de sanction afin de pouvoir remédier à l’absence
du respect du contradictoire au cours de cette procédure.
Ce renforcement, a compromis toute amélioration opérée par ce décret, car il a focalisé
les critiques sur le rôle du rapporteur. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle dans les arrêts
de l’Assemblée plénière du 5 févr. 1999, seule la présence du rapporteur a été contestée et le
cumul des fonctions d’instruction et de jugement dont il bénéficiait. Et ce, malgré le fait que
la C.O.B. avait strictement appliqué les dispositions applicables à sa procédure. En effet,
pour instruire l’affaire, il bénéficiait de l’aide du service des agents de la Commission, il
exposait l’affaire devant le collège et participait au délibéré. Tout doute éventuel sur son
impartialité était légitime, puisqu’en raison du cumul de ses fonctions au moment du
délibéré il était incapable de porter « un regard neuf » sur l’affaire en cause. Il était
susceptible d’influencer les autres membres du Collège. Situation qui à son apparence
même, était contraire aux droits de la défense et l’égalité des armes car susceptible de
provoquer une partialité dans les solutions.
85.- La jurisprudence européenne, sur la question de confusion des fonctions d’instruction
et de jugement est la suivante. Dans un premier temps la Cour européenne dans l’arrêt DE
117 Banque et droit mai-juin 1997, p. 40, obs. H. DE VAUPLANE. 118 Selon la Cour d’appel, en « confondant dans le même organe de décision les fonctions de poursuite,
d’instruction et constalation de la culpabilité, sans faire connaître la raison du maintien des poursuites ni
prévoir de débat contradictoire écrit sur le rapport d’instruction établi par l’un des membres ayant ensuite pris
part au délibéré (…) [la procédure] a pu donner l’impression que la sanction prononcée à l’encontre de M.
OURY n’avait pas été décidé dans les conditions d’impartialité, selon une procédure équitable ménageant les
droits de la personne poursuivie ». 119 En lui permettant d’intervenir dès l’ouverture de la procédure de sanction et ainsi en le constituant le
personnage clé de celle-ci, puisque le seul à maîtriser l’ensemble de l’affaire.
64
CUBBER120 a énoncé qu’ « un tel magistrat, qui, à la différence de ses collègues, connaît
déjà de manière approfondie, bien avant les audiences et grâce aux divers moyens
d’investigation qu’il a utilisés pendant l’instruction le dossier constitué par ses soins. Aussi
conçoit-on qu’il puisse paraître, occuper une situation lui permettant de jouer un rôle
capital dans la juridiction de jugement voire s’être formé par avance une opnion qui risque
de peser lourd dans la balance au moment de la prise de décision ». La même solution a été
retenue dans l’affaire BEN YAACOUB121, au motif que la même personne avait instruit la
cause en chambre du conseil puis fait partie de la juridiction de jugement.
Pourtant, suite à l’affaire HAUSCHILDT122, la conception de la Cour a évolué. Dans
cet arrêt la Cour indique que « l’élément déterminant consiste à savoir si les appréhensions
de l’intéressé peuvent passer pour objectivement justifiées ».
En conséquence, il apparaît clairement que l’absence de séparation des fonctions
d’instruction et de jugement, ne constitue pas automatiquement un manque d’impartialité.
Tout dépend des éléments concrets de l’affaire. La doctrine a eu l’occasion de critiquer
l’approche trop casuistique et subjectiviste que fait la Cour de cette notion, ce qui rendait
difficile la cohérence en la matière123. Dans l’affaire PADOVANI124 la Cour a conclu
également à l’absence de violation de l’art. 6 § 1, en raison « des circonstances de
l’affaire ». En l’occurrence, il s’agissait d’un magistrat qui ayant instruit l’affaire avant la
procédure de jugement, pris des mesures restrictives de liberté, avait cité à comparaître
devant lui le prévenu.
De la position de la Cour résulte que la procédure suivie devant la C.O.B. ne
nécessitait pas ipso facto d’être censurée et qu’il fallait mener une analyse particulière dans
chaque affaire afin de se déterminer. Cependant, la C.O.B. a très justement tiré les
conséquences de sa condamnation par la Cour de cassation, en privant le rapporteur du
délibéré125. 120 C.E.D.H., aff. De CUBBER, du 26 oct. 1984, série A, n°86, a propos d’un magistrat qui avait occupé des
fonctions d’instruction et de juge de fond. 121 C.E.D.H., aff. BEN YAACOUB, série A, n°127. 122 C.E.D.H., aff. HAUSCHILDT, du 24 mai 1989, série A, n°154, R. KOERING-JOULIN, La notion
européenne de tribunal indépendant au sens de l’art. 6 § 1, de la Conv.E.D.H., Rev. sc. crim., spéc. p. 765, 772 et
773. 123 J.-Fr. FLAUSS, Actualité de la Convention européenne des droits de l’homme, A.J.D.A. 1998, p. 987. 124 C.E.D.H., aff. PADOVANI, du 26 février 1983, série A, n°257. 125 Suite à une modification de l’art. 6 du règlement intérieur, celui-ci dispose désormais, que « ni le président, ni
aucun membre de la Commission ne peut délibérer dans une affaire dans laquelle il a exercé les fonctions de
rapporteur ». Déc. 16 févr. 1999 : J.O. 25 févr. 1999, p. 2936.
65
Si l’obligation faite à la C.O.B., de remplir par elle-même les exigences de l’art. 6 § 1,
en dépit du réexamen complet de l’affaire opérée par la Cour d’appel de Paris peut paraître
une sanction sévère et comme allant au delà de la position européenne, il faut se pencher
sur les raisons pour lesquelles une telle démarche a été adoptée. Comme nous l’avons déjà
vu, la Cour de cassation se préoccupe du fait que la décision prise par la C.O.B. s’assimile
par ses effets à une sanction pénale. Puis, elle applique l’art. 6, sans se préoccuper du statut
de l’organisme. Cette solution offrant un plus haut degré de protection au justiciable,
satisfait aussi bien l’objectif général de protection des libertés individuelles voulu par la
Convention, que le justiciable même, qui n’aura aucune raison à saisir la Cour européenne.
Même si la solution de la Cour de cassation constitue un renforcement des droits de
l’homme, la seule interdiction faite au rapporteur de participer au délibéré laisse subsister
encore un risque de partialité.
§ 2 La nécessaire séparation des fonctions de poursuite et de jugement
86.- L’affaire PIERSACK présente très bien la position de la Cour européenne en la
matière.
« Pour que les tribunaux inspirent au public la confiance indispensable, il faut tenir compte
de considérations de caractère organique. Si un juge, après avoir occupé au tribunal, au
parquet une charge de nature à l’amener à traiter un certain dossier dans le cadre de ses
attributions, se trouve saisi de la même affaire comme magistrat du siège, les justiciables
sont en droit de craindre qu’il n’offre pas assez de garanties d’impartialité. Il en a été ainsi
en l’occurrence ».
Pour la Cour européenne, il suffit que quelques doutes quant à l’impartialité objective d’un
tribunal surgissent pour conclure à une violation de l’art. 6 de la C.E.D.H..
Lorsque la C.O.B. constate des anomalies sur les opérations boursières et de plus, qui
sont suspectes de constituer des violations des dispositions d’un de ses règlements, elle
procède aussitôt à une enquête afin de pouvoir exécuter sa mission.
Ce stade est important parce que c’est à ce moment là qu’elle se détermine, de poursuivre ou
non, la personne suspectée. En d’autres termes, à partir des résultats de ses enquêtes, de ses
constatations, elle aura une première idée sur l’éventuel manquement de cette personne.
Ainsi il est nécessaire, dans le cas où elle se décide d’engager des poursuites contre celle-ci,
en raison de l’opinion qui risque d’être déjà faite à ses membres dès ce stade, d’opérer une
séparation des fonctions de poursuite et de jugement, car c’est vraiment difficile de
66
concevoir les personnes qui ont décidé du principe même d’une enquête, donc, ayant déjà
pris un parti si tôt, les laisser participer aussi lors de la prise de décision.
La Cour d’appel de Paris, dans l’affaire K.P.M.G., du 7 mars 2000126, en dénonçant
l’absence de séparation des fonctions des membres du Collège, le président compris, lors de
l’ensemble de la procédure de sanction constate que, « Le Collège de la Commission a
successivement […] décidé la mise en accusation de la société K.P.M.G. sur des faits qu’il a
constaté, formulé les griefs visant la personne poursuivie, statué sur sa culpabilité et
sanctionné cette dernière ». Puis, elle annule la décision de la C.O.B. au nom de
l’impartialité objective, en énonçant que « Considérant que l’exigence d’impartialité doit
s’apprécier objectivement ; considérant qu’il résulte des constatations qui précèdent que les
craintes de la société K.P.M.G. quant à l’impartialité de la Commission des opérations de
bourse doivent être regardées comme objectivement justifiées ; que la requérante est, en
conséquence, fondée à soutenir qu’il a été porté atteinte à son droit d’accès à un procès
équitable et à conclure pour ce motif, à l’annulation de la décision déférée ».
Ce n’est plus un membre du Collège de la Commission qui est visé, mais le Collège entier.
Le grief portait sur le fonctionnement global de la procédure engagée par la C.O.B. au
regard de la Convention européenne. Certes, la Cour d’appel ne conteste pas les pouvoir
dont dispose la C.O.B.127, cependant elle exige lors de la mise en œuvre de ses attributions,
une répartition des compétences en son sein afin de garantir à la personne accusée son droit
à un procès impartial, donc équitable.
87.- En effet, il résulte d’un examen rapide du texte de 1997 en vigueur à cette date que les
mêmes personnes interviennent dans chaque phase de la procédure. D’abord l’ouverture de
l’enquête peut résulter d’une délibération du Collège de la C.O.B., même si le président peut
également l’ordonner de sa propre initiative. Le déclenchement de l’enquête incombe, aussi,
au collège (art. 2) et le rapporteur notifie à la personne poursuivie « une lettre qui énonce les
griefs formulés par la Commission ». Enfin, à la séance de décision se réunissent à nouveau
les membres du collège, qui délibèrent sans la présence du rapporteur. Par conséquent, à
plusieurs occasions les mêmes personnes réfléchissent sur une affaire donnée dans tous ses
126 Bull. Joly Bourse § 51, mai-juin 2000, p. 245, n. N. RONTCHEVSKY. 127 Selon M. M. PRADA, président de la Commission, « La C.O.B. est confirmée dans sa nature, dans sa
compétence et dans ses pouvoirs ». Ceci parce que « la Cour admet que l’autorité administrative peut cumuler
les fonctions de poursuite, d’instruction et de jugement. Ce considérant un débat substantiel en faveur du
maintien, au niveau du principe, de l’utilité profonde de la C.O.B. dans la pluricapacité de sa compétence. Il
consolide ainsi la base même du pouvoir de sanction administrative », Bull. C.O.B., n°344, mars 2000, p. 12 et
13.
67
stades, d’où le risque qu’ils aient déjà formé leur opinion avant la date de la décision. Une
telle situation nuit à la garantie d’impartialité conférée aussi bien dans son acception
subjective car les juges sont suspectés d’avoir pris une position quant à l’issu du litige bien
avant le jour de décision, que dans son acception objective car de manière apparente le
justiciable peut douter de l’impartialité du juge. Dans ces conditions le justiciable ne
bénéficie plus du « regard neuf » sur l’affaire, exigé par la jurisprudence européenne et il est
fondé à douter objectivement de leur impartialité.
88.- Suite à l’affaire K.P.M.G., la C.O.B. a été amené à suspendre les procédures en cours,
pour lesquelles une sanction n’était pas encore prononcée et s’est mise à modifier les
dispositions de l’ancien décret128. Actuellement le décret de 1990, dans sa rédaction issue du
décret n°2000-721 du 1er août 2000 régi la procédure et opère cette répartition des fonctions.
89.- Désormais, le soin de l’ouverture des enquêtes est laissé à l’initiative du directeur
général. Celui-ci surveille le déroulement des enquêtes menées par les services de la C.O.B.
(art. 3, du décret) et le rapporteur n’est désigné par le président, sur proposition du directeur
général, que s’il apparaît à ce dernier que les faits reprochés sont susceptibles de
« caractériser des manquements aux règlements de la Commission » (art. 5, du décret).
Ainsi le rapporteur intervient uniquement à partir de l’instruction de l’affaire et non plus dès
la décision d’injonction comme sous le régime antérieur. Lors de la séance de décision, le
rapporteur évoque l’affaire devant les membres de la Commission, mais reste en dehors du 128 Dans son comm. du 20 mars 2000 elle a déclaré, « La Cour d’appel de paris a annulé, le 7 mars 2000, une
décision de sanction prise par la Commission le 18 juin 1999. Sans se prononcer sur les faits ni critiquer la
matière dont la C.O.B. les avait analysées, la Cour a considéré que la procédure suivie par la Commission
n’était plus conforme à l’interprétation des termes de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l’Homme et des libertés fondamentales.
Le pouvoir de sanction de la Commission n’est pas en cause, mais sa procédure actuelle, qui résulte de
l’application stricte des dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, doit être réformée.
A cette fin, des projets de texte seront très prochainement soumis au Gouvernement afin de permettre à
la Commission d’exercer sa mission de surveillance de l’intégrité des marchés dans des conditions de sécurité
mieux assurées.
La Commission a pris la décision de ne pas mener à leur terme les procédures en cours pour lesquelles
le délibéré sur une éventuelle sanction n’est pas encore intervenu. L’organisation de ce délibéré n’est en effet
pas possible dans des conditions qui satisfassent aux exigences jurisprudentielles compte tenu des modalités
d’ouverture de ces procédures. Ces dossiers, au nombre de treize, concernent 31 personnes physiques et
morales.
Aucune conclusion ne peut être faite de cette décision sur la position qu’aurait adoptée la C.O.B. au
terme de chacune de ces procédures. Les faits relevés à l’issue des enquêtes correspondantes, et susceptibles de
constituer des délits, ont été ou seront transmis au paquet compétent ».
68
délibéré (art. 9 al. 1 du décret). La décision n’est prise qu’ « en la seule présence du
président, des membres autres que le rapporteur et du secrétaire de la Commission » (art. 9
al. du décret).
Le nouveau décret intitulé « de la procédure, des enquêtes et de la procédure de
sanction », en englobant désormais la phase d’enquête montre explicitement son effort à ce
que sans mettre un terme au cumul dans un même organe de décision des fonctions de
poursuite, d’interdiction et de constatation de culpabilité, « par le biais d’un jeu de
délégation et de séparation fonctionnelle des tâches, de faire en sorte que les actes de
procédure, dès lors qu’ils sont substantiels, ne soient jamais accomplis par un membre
appelé ensuite à se prononcer sur le fond du dossier». Telle est la modification qui a été
opérée afin d’arriver à une Commission des opérations de bourse objectivement impartiale.
69
Chapitre II La C.O.B., structure garante d’un procès équitable
90.- Pour que la procédure en sanctions devant la C.O.B. se déroule de manière équitable,
il est nécessaire pour les parties de comparaître à armes égales (Section 1) et de manière
contradictoire. De plus le débat doit être rendu selon certaines modalités pour permettre un
procès équitable (Section 2).
Section 1 La garantie autonome d’égalité des armes
91.- L’égalité des armes, est l’expression du procès équitable la plus anciennement mise en
valeur par la Cour européenne. L’art. 6 § 1 de la Convention dispose que, « Toute personne
a droit ce que sa cause soit entendue équitablement…par un tribunal… ». Selon la
jurisprudence européenne toute partie à une action, doit avoir une possibilité raisonnable
d’exposer sa cause dans des conditions non pas identiques, mais qui ne la désavantagent pas
manifestement par rapport à l’autre partie. Ceci pour un procès équitable. L’égalité des
armes constitue un application autonome de l’art. 6 (§ 1) parce qu’en dépit du fait qu’elle
n’est pas énoncée en des termes exprès, elle a été dégagée par la jurisprudence européenne.
Force est de constater, qu’une autre notion autonome a été dégagée, comme découlant de
l’art. 6 § 1, en raison de ses liens avec l’égalité des armes, celle du débat contradictoire (§
2).
§1 L’égalité des armes composante de la garantie d’un procès équitable
92.- L’art. 6 de la C.E.D.H., considéré dans son ensemble, représente le droit à un procès
équitable, condition indispensable pour une bonne justice. Affirmé tout particulièrement
dans son alinéa 1er , l’existence du principe non écrit d’égalité des armes devant la Cour
européenne, est apparue d’abord dans le procès pénal ; son objet est de ne pas laisser la
personne poursuivie se trouver dans une situation désavantageuse par rapport à l’accusation
et vise à établir un équilibre entre les deux.
Un exemple significatif est fourmi dans l’affaire, BORGERS c/ Belgique129, a propos de
l’exercice des voies de recours. Les dispositions du code de procédure pénale belge
prévoyaient un traitement différencié entre accusé et ministère public en matière d’exercice
de voies de recours. Notamment, il était accordé au ministère public des pouvoirs non
129 C.E.D.H., aff. BORGERS c/ Belgique, du 30 oct. 1991, série A, n°214-B.
70
reconnus à la défense tels que assister au délibéré avec voix consultative et le dépôt de
mémoires sans possibilité de réplique de la part du défendeur. Manifestement, ces
dispositions engendraient une rupture d’égalité entre les parties, provoquant par là même, un
traitement contraire à la notion de procès équitable.
Dans un procès criminel, l’égalité des armes lors du procès se matérialise par une égalité
entre le ministère public et la personne mise en cause. La jurisprudence ultérieure précise
que chacun des éléments de l’affaire BORGERS était suffisant pour altérer l’égalité des
armes et que même « en absence d’un ministère public, un procès n’est pas équitable s’il se
déroule dans de telles conditions que l’accusé est mis dans une situation
désavantageuse »130. Le principe d’égalité des armes, puisque contenu de manière sous-
jacente dans l’art. 6 § 1, a le même champ d’application que l’article dont il est issu. Dès
lors, il est régi par les mêmes conditions que celui-ci, à savoir tout particulièrement dans le
cadre qui nous intéresse, la nécessité des accusations « en matière pénale ». Pourtant, la
jurisprudence récente a étendu son application à la procédure d’instruction – phase
préparatoire du procès pénal – ainsi que, dans le cadre du procès, en appel comme en
cassation.
Ce domaine désormais très large du principe, car incluant l’ensemble du procès, opère une
extension du champ d’application de l’art. 6 qui en principe ne s’estime compétent que dans
le cadre d’un procès. Ainsi, dans l’arrêt BORGERS c/ Belgique précité, la Cour a opéré une
extension de l’art. 6 en précisant, « nul ne doute de l’objectivité avec laquelle le parquet de
cassation s’acquitte de ses fonctions… Néanmoins, son opinion ne saurait passer pour
neutre du point de vue des parties à l’instance en cassation : en recommandant l’admission
ou le rejet du pourvoi d’un accusé, le magistrat du ministère public en devient l’allié ou
l’adversaire objectif. Dans la seconde hypothèse, l’art. 6 impose le respect des droits de la
défense et du principe de l’égalité des armes ».
93.- Cette situation de la notion d’équité procédurale n’est pas sans incovéniant, le
principal en est qu’elle devient une notion incertaine. L’art. 6, comporte plusieurs
exigences, mais la jurisprudence pour chacune d’elles, se réfère à l’exigence général de
procès équitable. De plus si l’on peut relever dans la jurisprudence européenne l’égalité des
armes en tant que composante du procès équitable, son individualisation est difficile par
rapport aux autres garanties.
130 C.E.D.H., aff. MONNELL et MORRIS c/ R. U., du 2 mars 1987, série n°115, § 62, cité dans J.-C. SOYER,
M. DE SALVIA, L’art. 6, il la C.E.D.H., Economica 1999, préc. P. 242.
71
Cette situation pourrait se rattacher au fait que la Cour n’a pas donné de définition
générale du droit à un procès équitable, mais a précisé l’ensemble de ses composantes, en
énonçant qu’elles doivent garantir une bonne justice. Ainsi en définissant l’objectif de l’art.
6, elle laisse aux Etats le choix des moyens pour le satisfaire. Il s’agit là d’une obligation de
résultat. De plus, malgré ce contrôle concret qu’opère la Cour, en prenant en compte les
circonstances propres à chaque espèce, elle vérifie le respect de chaque garantie par rapport
à l’ensemble du procès ; incluant les divers stades de la procédure nationale. Ainsi, même
dans le cas où l’une des exigences de l’art. 6 n’est pas respectée, elle peut conclure qu’il n’y
a pas rupture de l’égalité des armes. Ainsi, dans l’affaire BENDENOUN131, du 24 févr.
1994, elle a considéré qu’il n’y avait pas eu rupture d’égalité des armes même en l’absence
de communication au requérant de l’intégralité de son dossier de l’administration fiscale.
Son appréciation se fait au cas par cas, sans pouvoir dégager une réponse a priori.
Ensuite, la prise en compte des apparences, inspirée de l’adage de common law,
« justice must not only be done, it must also be seen to be done » apparue d’abord pour
l’exigence de l’impartialité du tribunal, est étendue à d’autres composantes de l’art. 6, telle
l’égalité des armes. Ainsi dans l’affaire BORGERS, la Cour d’appel de paris, déclare que
« l’importance attribuée aux apparences et à la sensibilité du public aux garanties de bonne
justice ». Dans ce cas finalement, malgré le fait qu’antérieurement la cour faisait un contrôle
« au-delà des apparences », là dans l’objectif d’améliorer la protection accordée à la
défense par l’égalité des armes, elle vérifie si en définitive il existe le sentiment que les
plaideurs ont été à armes égales. Dans ce cas il n’y a plus définition réelle de l’égalité des
armes, l’égalité ne se mesure pas, elle se ressent. Avec les conséquences que ceci peut
impliquer.
Enfin, nous constatons que les différentes exigences du procès équitable, en raison des
liens qu’elles ont entre elles, parfois elles se glissent l’une dans l’autre et il est difficile de
les individualiser. Tel est le cas lorsque l’égalité des armes est envisagée sous l’angle du
droit à une procédure contradictoire.
§ 2 Débat contradictoire
94.- Le débat contradictoire, autre manière pour assurer l’équité procédurale devant la
Commission, est un concept très important car il est considéré comme la garantie
nécessaire d’une élémentaire justice. Notion pas expressément invoquée par l’art. 6 de la
131 C.E.D.H. aff. BENDENOUN, du 24 févr. 1994, série A, n°284.
72
Convention européenne, elle est imposée en tant que principe général du droit pénal par
celle-ci, en raison de ses liens avec le principe d’égalité des armes, déduit de la notion de
« procès équitable ». Selon la Cour européenne, le principe de l’égalité des armes
« représente un élément de la notion plus large de procès équitable qui englobe aussi le
droit fondamental au caractère contradictoire de l’instance »132. Il est vrai qu’un procès où
son caractère contradictoire n’est pas respecté, porte atteinte aussi bien à l’égalité des armes,
qu’au procès équitable.
De plus, le droit à un procès équitable « implique, pour une partie, la faculté de prendre
connaissance des observations ou pièces produites par l’autre ainsi que d’en discuter »133.
Ainsi le juge ne pourra fonder sa décision que sur les éléments discutés en contradiction
entre les parties.
95.- L’application du principe du contradictoire semble, a priori, au niveau de la procédure
de sanction, suffisamment assurée par le décret de 1990, dans sa rédaction de 1997. C’est à
la suite de la décision de la Cour d’appel de Paris du 7 mai 1997, relative à l’affaire
OURY134 dans laquelle a été annulée une sanction prononcée par la C.O.B. au motif que les
prescriptions de l’art. 6 n’avaient pas été respectées, que le décret n°97-774, du 31 juillet
1997, est intervenu et a renforcé la garantie du contradictoire en la matière. En l’occurrence,
il était reproché à la C.O.B. de ne pas avoir communiqué à M. OURY le rapport d’enquête
et donc les raisons de la procédure, puis de ne pas avoir prévu de débat contradictoire sur le
second rapport auquel le rapporteur consignait le résultat de la phase d’instruction.
Le décret de 1997 a prévu la transmission du rapport d’enquête dans le cas où des
manquements sont constatés et est décidé l’ouverture d’une procédure en sanction. De plus,
est joint à l’envoi une lettre énonçant les griefs retenus par la Commission, ainsi qu’un
document rappelant les droits de la défense. D’autre part, le second rapport résultant de la
phase d’instruction est joint à la lettre de convocation pour la séance de jugement. Ainsi, le
principe du débat contradictoire, élément du procès équitable est respecté. Ces mesures qui
renforcent les droits de la défense rapprochent cette procédure de l’art. 6 § 3 de la C.E.D.H.
qui impose notamment que tout accusé soit « informé dans le plus court délai…et de
manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ».
Pourtant, nous constatons qu’alors que le principe du contradictoire fondé sur le
procès équitable ne concernait que le procès proprement dit, en l’occurrence, en raison de
132 C.E.D.H., aff. RUIZ MATEOS c/ Espagne, du 23 juin 1993, série A, n°262 § 63. 133 C.E.D.H., aff. BLANDSTETTER c/ AUTRICHE, série A, n°211. 134 C.A. Pris, 7 mai 1997, J.C.P., éd. E, 1997, I, n°667, spec. n°14.
73
ses liens avec l’égalité des armes, il est exigible dans la phase préparatoire, dès l’instruction
de l’affaire. Ceci, conduit à « judiciariser » les procédures, notamment en imposant le
respect des garanties, dont l’ « inobservation initiale, risque de compromettre gravement le
caractère équitable du procès »135, Il faut souligner qu’il n’était pas dans l’intention des
auteurs de la Convention de les soumettre aux règles du contentieux pénal, puisque le texte
de l’art. 6 se limite à l’existence d’un procès.
Ainsi, tel qu’il a été opéré pour les affaires OURY, il reste finalement le sentiment que
chaque fois qu’une instance est investie de pouvoirs de sanctions, relevant de la « matière
pénale », il faut étendre les exigences de l’art. 6 à son fonctionnement, en dépit du fait qu’il
ne s’agit pas d’une juridiction. Une telle situation, où le caractère contradictoire de la
procédure s’impose dès la phase préparatoire du procès, avec les conséquences que ceci
implique, telles que l’obligation de communiquer le rapport d’enquête dès ce stade, abouti à
alourdir toujours plus la procédure et des fois à remettre en cause les traditions nationales.
Cependant, c’est le seul moyen afin que les droits du justiciable soient préservés et ceci pour
une meilleure justice.
Section 2 Modalités du débat garantes d’un procès équitable
96.- Le procès équitable se caractérise aussi par les modalités de son exercice. Il est
nécessaire que celui-ci se déroule dans un délai raisonnable (§ 2). La publicité des débats
devant la C.O.B., autorité administrative n’est pas obligatoire (§ 1).
§ 1 Le droit relatif du droit à la publicité
L’art. 6 § 1 de la C.E.D.H. prévoit que,
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendu publiquement… »
97.- La publicité des débats et du jugement est importante parce qu’elle « protège les
justiciables contre une justice secrète échappant au contrôle public, elle constitue aussi l’un
des moyens pour préserver la confiance dans les cours et tribunaux »136.
Son fondement se trouve alors au-delà de l’intérêt particulier de l’accusé, dans l’intérêt
général. Il ne suffit pas que la justice soit rendue. Il faut que chacun puisse voir qu’elle est
135 C.E.D.H., aff. IMBRIOSCIA, préc. 136 C.E.D.H. aff. PRETTO du 8 déc. 1993, série A, n°71.
74
rendue137. L’exigence de publicité n’est pas une fin en soi, mais elle contribue à la
transparence de la justice. En effet, un défaut d’audience publique est critiquable,
seulement s’il n’a pas assuré la garantie d’un procès équitable. Conçue comme un moyen de
contrôle sur la manière dont la justice est rendue, et comme garantie de la liberté de la
défense, elle implique que le public ait accès à la salle d’audience. Cependant, il ne s’agit
pas d’un droit absolu et il doit être revendiqué au moment même où il n’est pas respecté,
sous peine d’en perdre le bénéfice. Le justiciable peut y renoncer de manière expresse ou
implicite. L’omission de demander une audience publique peut être considérée comme une
renonciation tacite.
De plus, c’est la suite même de l’art. 6 § 1, qui autorise des limites au droit à la publicité.
C’est le cas pour la presse et le public dans la salle d’audience, pour la totalité ou une partie
du procès, lorsque leur présence parait incompatible « avec l’intérêt de la moralité, de
l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les
intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties l’exigent, ou dans la
mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans les circonstances
spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ». Il faut
noter que cette exigence de publicité, doit s’apprécier selon l’ensemble du procès. Ainsi
l’absence de publicité des débats au premier degré – c’est le cas souvent pour les autorités
administratives indépendantes – peut être compensée par son respect au second degré, ou
l’inverse, si ceci est possible. Cependant la publicité au niveau de la Cour de cassation, qui
ne statue qu’en droit ne saurait compenser des défaillances antérieures138. En effet, il a été
souligné par la Cour européenne, la caractère insuffisant de l’examen public de l’affaire par
la Cour de cassation car « il n’entre pas dans les compétences de la Cour de cassation de
corriger les erreurs de fait, ni de contrôler la proportionnalité entre faute et sanction ». Il
n’y a pas alors recours de pleine juridiction au sens de la Convention au niveau de la Cour
de cassation.
98.- En droit boursier la question du procès public s’est posé dans le cadre de l’affaire
HADDAD du 9 avril 1996139. M. HADDAD, président-directeur général de la société
Métrologie International, bénéficiant d’une information privilégiée en rapport avec
l’évolution du cours de l’action de la société – non communiquée au public – la C.O.B. le
sanctionna au visa de l’art. 2 de son règlement n°90-08 parce qu’il avait manquait à
137 Selon l’adage anglais « Justice must not only to be done, but to be seen to be done ». 138 C.E.D.H., aff. LECOMPTE, VAN LEUVEN et DE MEYERE du 23 juin 1981, série A, n°43. 139 C. Cass. aff. HADDAD, du 9 avril 1996, R.J.D.A., 5/96, p. 438, n. M.-Ch. PINIOT.
75
l’obligation d’abstention que lui imposait le dit article. M. HADDAD, parmi les moyens
qu’il invoque, a soulevé la violation de l’art. 6 § 1 de la Convention, en ce que l’audience de
la C.O.B., relative à l’accusation en matière pénale, aurait dû être publique.
La Cour de cassation par un arrêt confirmatif a écarté ce moyen. En effet, comme nous
l’avons déjà vu la Cour européenne lorsqu’elle admet « pour des impératifs de souplesse et
d’efficacité » l’intervention préalable dans le cadre de la répression de certains domaines des
autorités administratives140, elle « commande l’un des deux systèmes suivants : ou bien les
dites juridictions remplissent elles-mêmes les exigences de l’article 6 § 1, ou bien elles n’y
répondent pas mais subissent le contrôle ultérieur d’un organe judiciaire de pleine
juridiction présentant, lui, les garanties de cet article ».
En l’occurrence, c’est la Cour d’appel de Paris qui est la juridiction de droit commun
pour les recours et qui contre les décisions de la C.O.B., assure un contrôle de pleine
juridiction. La publicité du procès qu’elle assure constitue dès lors une garantie suffisante au
regard de l’art. 6 de la C.E.D.H..
§ 2 Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable
99.- L’art. 6 de la C.E.D.H. prévoit qu’un tribunal doit statuer dans un délai raisonnable.
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue…dans un délai raisonnable ».
Pour la Cour européenne, il est essentiel de ne pas compromettre par des retards
« l’efficacité et la crédibilité de la justice »141 et ceci vaut pour toutes les procédures visées
par l’art. 6 de la C.E.D.H.. La garantie de célérité procédurale constitue la traduction
juridique de l’adage français « justice rétive, justice fautive »142 et dans le cadre des
procédures en sanctions diligentées par la C.O.B., elle vise à éviter une situation
d’incertitude prolongée, susceptible d’avoir - p. ex. dans le cadre d’une allégation d’un
manquement à l’information du public – des conséquences importantes sur la crédibilité de
la société qui les a communiqués.
La Cour astreint alors les Etats à adopter toutes les mesures appropriées, afin de permettre à
leurs autorités juridictionnelles ou non, de rendre une justice en toute célérité. Toutefois, il
faut préserver la garantie essentielle de bonne justice qui est d’ordre public. En effet, il ne
140 Cf. aff. LECOMPTE, préc. 141 C.E.D.H., aff. ACQUAVIVA c/ FRANCE, du 21 nov. 1995, série A, n°333-A. 142 Ou anglais « justice delayed, justice denied ».
76
sert aucunement, des décisions prises trop rapidement et qui risquent d’être remises en cause
à l’échelon supérieur.
100.- En droit boursier, la pratique a montré que la procédure d’instruction menée par les
services de la C.O.B. est beaucoup plus rapide que l’instruction pénale143 et ceci surtout dans
les domaines où les manquements en droit boursier et les délits pénaux visent des situations
similaires. Ainsi, nous pouvons affirmer que le pouvoir sanctionnateur rapide et efficace des
infractions boursières, répond encore aux nécessités qui ont conduit à son institution en
1989. Garantir aux acteurs du marché ; investisseurs et épargnants la « sécurité et
transparence de leurs placements ». Ceci malgré l’allongement d’un mois du délai
nécessaire pour présenter sa défense aussi bien dans le cadre de la notification des griefs
relevés lors de l’enquête, que de ceux résultant de la phase de l’instruction.
Cependant le caractère raisonnable de la procédure s’apprécie suivant les circonstances de
la cause et non pas in abstracto. C’est la date de l’accusation qui fait courir le délai, et
comme nous l’avons déjà vu elle s’apprécie de manière large. Ainsi, il suffit d’un acte
pouvant s’interpréter comme une notification officielle de la part de l’autorité compétente,
d’avoir commis une infraction. C’est alors, au moment de la notification des griefs par le
rapporteur à l’intéressé, suite à la phase d’enquête prévue par l’art. 6 du décret de 1990,
modifié qui constitue le point de départ et le délai s’achève lorsque la sanction se trouve
fixée définitivement144. Cela veut dire ; à la date de décision de la C.O.B., en l’absence de
recours, ou dans le cas contraire lorsque les juridictions supérieures se prononceront.
Pourtant, si le délai parait excessif avant la fin du déroulement de l’ensemble du procès, il
n’est pas nécessaire d’attendre qu’une éventuelle décision sur recours soit intervenue, pour
protester contre la lenteur du procès145.
101.- Il existe trois critères dégages au fil des espèces, par la Cour européenne pour
mesurer la durée d’un procès ; aucun n’étant prédominant, puisque la Cour se livre à un
examen global, sur l’ensemble de la procédure :
-la complexité de l’affaire, en fait et en droit, en nombres des parties, en difficulté de
preuve. Ainsi, pour la procédure devant la C.O.B., mettant en lumière des infractions
économiques et financières nécessite des mesures d’expertise et d’investigation pouvant
justifier la longueur du délai. Mais comme nous l’avions vu, en raison de la compétence des 143 Bull. C.O.B. 1990, p. 237 et p. 238. Alors que l’instruction d’un dossier pénal peut parfois durer plus de cinq
ans, la procédure devant la C.O.B. ne dépasse généralement pas 12 mois et les recours devant la Cour d’appel de
Paris 6 mois. 144 C.E.D.H., aff . ECKLE c/ Allemagne, du 15 juillet 1982, série A, n°51. 145C.E.D.H., aff. ALAIN VALEE c/ FRANCE, du 26 avril 1994, rév. univ. dr. ho. 1994, p. 183.
77
agents de la C.O.B., les affaires se déroulent relativement vite. De plus il faut prendre en
compte l’enjeu du litige, une diligence spéciale est exigée quand le procès revêt une
importance extrême pour le justiciable146.
-le comportement du requérant est très important. Tout est pris en compte. Sans aller
jusqu’à attendre de lui de faciliter la preuve des accusations portées contre lui, un minimum
de coopération est exigé. C’est essentiellement la raison pour laquelle – à notre sens – l’art.
4 du décret de 1990 modifié, prévoit que les procès verbaux établis suite à l’enquête
effectuée par les agents de la Commission, doivent être signés par la personne sur laquelle
portaient les investigations. « En cas de refus de celle-ci, mention en est faite au procès-
verbal ». Un tel comportement pourra être traduit par la suite de dilatoire, si d’autres
éléments le permettent.
-Enfin, le comportement du juge chargé de l’affaire ou des autorités étatiques, permet de
compléter l’opinion de la Cour. Il y a par exemple violation de l’art. 6, si la C.O.B. diffère
sans raison la notification des griefs rassemblés lors de l’enquête et la Cour d’appel vérifie
les raisons qui l’ont amené à le faire ; car cette situation est susceptible de nuire aux droits
de la défense de l’intéressé147.
Toute violation d’un délai raisonnable de la procédure peut permettre à la personne lesée, de
déposer une requête devant la Cour européenne des droits de l’homme et si la procédure
aboutit, à obtenir une compensation pécuniaire148. La Cour admet qu’une réduction de
peine, accordée par le juge national peut constituer une réparation adéquate, fondée sur cet
excès du délai de procédure, mais l’intéressé ne peut espérer sur ce seul motif, une remise
en cause de la décision, ou une annulation de la procédure149.
146C.E.D.H. aff. VOCATURO c/ ITALIE, du 24 mai 1991, Rév. univ. dr. ho. 1991, p. 402. Affaire relative à un
litige de travail qui « par nature appelle en général une décision rapide ».
147 Cf. infra. 148 IL agit de la « satisfaction équitable » prévue par l’art. 41 de la Convention, accordée par la Cour à l’intéressé
si le droit interne « ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation ». 149 Cass. crim., 22 sept. 1998, Procedures, mars 1999, n° 71, obs. BUISSON.
78
Titre II L’égalité des armes par le respect des autres garanties procédurales.
102.- Pour qu’un procès soit équitable, nous savons que le tribunal doit repondre aux
conditions exigées par celui-ci et que le procès doit être rendu conformément à certaines
modalités. L’égalité des armes exige aussi que les garanties dérivées du procès équitable
soient respectées. Il en est ainsi pour les droits de la défense (Chapitre I), ainsi que pour la
présomption d’innocence (Chapitre II).
Chapitre I Les droits de la défense dans la procédure en sanctions de la C.O.B..
103.- Les différentes garanties édictées au paragraphe 3 de l’art. 6 de la Convention,
visent à assurer le respect des droits de la défense, qui est la règle en matière de procès
pénal. Dans ce contexte, la défense joue un rôle capital. Ainsi, si l’intérêt du bon
fonctionnement du marché, exige une répression rapide, effective et exemplaire des
manquements, aux règlements de la C.O.B., celui de l’accusé exige que ce dernier puisse au
moins se défendre. Il est nécessaire dès lors, de prévoir un cadre juridique qui puisse
permettre aux différentes prérogatives du principe, d’être sauvegardées au cours du procès,
afin de lui permettre de mieux remplir ses fonctions protectrices des droits individuels. Ceci
n’est possible, que si, toute l’organisation du procès permet le respect de l’égalité des armes;
entre l’accusation et la défense et de l’exigence générale d’équité. Si l’importance du
principe est considérable et son affirmation certaine dans la jurisprudence européenne
(Section I). Nos interrogations s’orientent de ce qui l’en est, dans le cadre des procédures en
sanction diligentées par la C.O.B. (Section II), qui, ne l’oublions pas relèvent du droit
administratif.
Section 1 L’affirmation de la garantie des droits de la défense et la C.O.B..
104.- Le concept de « droits de la défense », englobe a priori, toutes les garanties
procédurales ; de la garantie d’un débat contradictoire, au droit à un recours juridictionnel.
Pourtant, pour mieux étudier l’art. 6 de la Convention, nous nous limiterons à la lettre du
troisième paragraphe. Ce principe de protection de la personne poursuivie, nécessaire à
toute nation civilisée, se trouve au cœur de la Convention européenne. Comme le précise la
79
jurisprudence de la Cour, son respect n’est pas un but en lui-même150 mais, il doit être
interprété afin de permettre a tout un chacun de bénéficier une justice équitable. C’est
pourquoi, la Cour porte une attention toute particulière à ce que son exercice soit effectif.
Comme nous l’avons déjà vu, s’il est vrai que le but de la Convention consiste à protéger
des droits concrets et effectifs, « la remarque vaut spécialement pour ceux de la défense eu
égard au rôle éminent que le droit à un procès équitable, dont ils dérivent, joue dans une
société démocratique »151.
Nous procéderons dans un premier temps à l’étude de l’étendue du principe (§ 1), puis
l’examen du principe du contradictoire qui constitue un mode d’expression du principe des
droits de la défense (§ 2).
§ 1 Etendue de la garantie.
105.- Les droits de la défense peuvent se définir, comme des droits dont toute
personne doit pouvoir disposer dans le cadre d’un procès, afin que celui-ci se déroule de
manière équitable. Notion large, comportant plusieurs garanties, elle vise à restaurer
l’équilibre des forces dans un procès entre les parties ; accusation et défense, pour établir un
procès à armes égales, donc, une égalité devant la justice.
La Cour européenne des droits de l’homme réserve cette garantie à l’accusé. Dans le
cadre du droit boursier, elle a été transposée du droit pénal, au droit administratif répressif,
afin que le pouvoir de sanction des autorités administratives puisse s’organiser sur un mode
moins autoritaire. En effet, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 28 juillet 1989, a
validé le pouvoir sanctionnateur de la C.O.B. en le subordonnant aux « droits et libertés
constitutionnellement garantis », donc aussi au respect des droits de la défense152.Ce
150Avis de Commission européenne, CAN, réc., A, n°48. 151 C.E.D.H. aff. ARTICO c/ ITALIE, du 13 mai 1980, A, n°37, § 32. 152 Il a pourtant relevé d’office l’inconstitutionnalité de l’art. 10 de la loi du 2 août 1989, car donnait la
possibilité au président de la C.O.B., a raison des mêmes faits, de se constituer partie civile devant le juge pénal
dans le cadre des délits boursiers. Le Conseil avait jugé que de cette manière, il était porté atteinte au principe
fondamental, qui implique notamment en matière pénale, « l’existence d’une procédure juste et équitable
garantissant l’équilibre des droits des parties ». Par cette formulation qui rappelle bien les termes de l’art. 6 de
la C.E.D.H. (droit à un procès équitable et exigence de l’égalité des armes entre les parties au procès pénal), le
Conseil a censuré la disposition qui permettait à la C.O.B. d’être juge lors d’une procédure administrative dans
sa mission d’intérêt général et partie civile lors d’une procédure pénale, parce que dans ce dernier cas, l’intérêt
80
contentieux appartient à ce que le droit européen qualifie de « matière pénale », laquelle
excède le droit formellement pénal. C’est dans l’arrêt BENDENOUN153, que nous trouvons
une application des garanties du procès équitable, notamment l’égalité des armes et les
droits de la défense, en matière de répression administrative. Selon cet arrêt, le fisc doit
désormais fournir au justiciable certaines pièces, ou même l’intégralité de son dossier, afin
qu’il puisse en prendre connaissance.
La valeur supranationale de cette garantie fondamentale, représente un grand intérêt
pratique, dans la mesure où elle permet de contrôler la conventionnalité des textes de valeur
légale ou réglementaire, ainsi que les procédures qui leur sont conformes.
Elle confère au citoyen, une protection équivalente, à celle offerte par les principes
constitutionnels154 visant à assurer à tout accusé le droit de savoir sur quoi porte
l’accusation, le motif et de se faire entendre préalablement au prononcé d’une sanction.
L’importance de ce principe s’accentue encore, en raison de son applicabilité directe en
droit interne. Consacré par l’art. 6 § 3 C.E.D.H., un citoyen peut exercer un recours direct
devant la Cour européenne, si les juges français n’en ont pas été suffisamment respectueux.
Matériellement, et selon l’art. 6 § 3 de la C.E.D.H. les droits de la défense stricto
sensu155, recouvrent156, le droit d’être informé des griefs dont on est l’objet et le droit
d’avoir un défenseur. La jurisprudence de la Cour européenne, a précisé que la liste des
prérogatives énoncée par l’art. 6 §3 n’est pas limitative ; ceci résulte de l’adverbe
« notamment », utilisé dans la phrase initiale.
106.- « (Tout accusé a droit notamment à …),
allégué pour se constituer partie civile, se confondait avec l’intérêt social, dont le ministère public est déjà le
représentant. 153C.E.D.H., aff. BENDENOUN c/ FRANCE, du 24 févr. 1994, A, n°284. Le requérant se plaignait de n’avoir
pas bénéficié d’un procès équitable devant les juridictions administratives lors de la contestation de majorations
d’impôts auxquelles il avait été assujetti au terme d’une procédure de redressement fiscal. 154 Reconnu par les lois de la République, il est consacré par la jurisprudence du Conseil constitutionnel depuis
sa décision du 2 déc. 1976, R.D.P. 1978, p. 817, commentaire L. FAVOREU. Ce principe est apparu en droit
administratif par l’art. 65 de la loi du 22 avril 1905, instituant pour les membres de la fonction publique la règle
de communication du dossier avant toute sanction disciplinaire. En matière de sanction les arrêts Dme veuve
Trompier Gravier du 5 mai 1944 et Aramu du 26 oct. 1945 affirment qu’ « aucune sanction ne peut être
prononcé légalement, sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense ». 155 Outre le débat contradictoire. 156 Nous étudierons les garanties de l’art. 6 § 3 qui se rapportent au débat contradictoire ultérieurement.
81
être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière
détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ».
La mise en accusation157 d’une personne oblige les autorités à lui faire savoir, ce qui lui est
reproché. L’information qui lui est fournie, doit porter sur la cause de l’accusation, qui
s’entend des faits matériels mis à la charge de l’intéressé, et sur sa nature ; c’est à dire sa
qualification juridique. L’information donnée ne doit pas être incomplète ou inductive en
erreur, car elle détermine la manière dont l’accusé va bâtir sa défense. De plus, elle doit
parvenir à l’accusé dans le « plus court délai ». Ce délai ne commence à courir que le jour
où la décision d’engager les poursuites est prise. Dès lors, le texte est inapplicable au stade
de la procédure de constatation des infractions.
Nous savons que le juge qui qualifie les faits, n’est pas lié par la nature de l’accusation.
L’équité de la procédure implique néanmoins, que toute modification soit préalablement
communiquée à l’accusé, afin qu’il puisse s’expliquer sur cette nouvelle qualification. Dans
le cadre du droit boursier, la C.O.B. satisfait à ces exigences, par le biais de la
réglementation instituée par le décret du 23 mars 1990, modifié en 2000.
§ 2 Expression de la garantie : le principe du débat contradictoire
107.- Sans qu’il soit vraiment facile de tracer les frontières entre le principe du
contradictoire et les droits de la défense, nous pouvons dire, qu’a priori, le premier constitue
le corps même du second.
Le débat du contradictoire est considéré comme le « centre de gravité d’un procès »,
dès lors qu’on considère le procès comme l’institution d’une mise en doute avec la décision
au bout. Le principe du débat contradictoire, a été transposé dans le cadre du procès
administratif répressif, pour garantir les droits de la défense158. Il comporte essentiellement
deux éléments. D’une part il exige, que le justiciable soit averti des griefs qui lui sont
imputés et d’autre part, le défendeur doit avoir la possibilité, de s’exprimer sur ces griefs et
donner ses observations.
157 Nous avons déjà vu que l’accusation se matérialise par « la notification officielle émanant de l’autorité
compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale ». C.E.D.H. aff. BROZICEK c/ ITALIE, du 19
déc. 1989, A, n°167 § 38. A partir de ce moment là, le débat contradictoire commence. 158 Depuis 1828, la Cour de cassation proclamait que la défense étant un droit naturel, personne ne doit être
condamné sans avoir été interpellé et mis en demeure à se défendre. Cf. B. BOCCARA, La procédure dans le
désordre. Le désert du contradictoire, J.C.P., 1981, I, 3004, § 21.
82
108.- Dans le cadre des procédures en sanctions organisées devant la C.O.B., des
efforts ont été effectués pour assurer une protection renforcée aux droits de la défense, par
la mise en œuvre d’une procédure pleinement contradictoire.
D’une part, ceci a été opéré essentiellement lors de la modification du décret de 1990, en
1997, par l’institution de l’obligation de désigner un rapporteur dès la décision d’ouverture
de la procédure. Celui-ci, lors de l’envoi de la notification des griefs à l’intéressé prend soin
de lui rappeler de droit de disposer d’un délai pour préparer se défense et notamment de son
droit de s’entretenir avec un avocat, afin qu’il puisse utilement sa défendre159. D’autre part
le rapporteur, après avoir octroyé un délai à la personne mise en cause, pour préparer sa
défense, noue avec elle, un véritable dialogue lors de la phase de l’instruction de l’affaire,
afin de se déterminer dans sa décision. C’est incontestablement la seule manière, pour que
des sanctions ne soient pas prises sur des faits matériellement inexacts. Puis, il lui
communique le résultat de son rapport par écrit160. Le principe du contradictoire énonce que
109.- « (Toute personne a droit notamment à…),
disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ».
Nous l’avons déjà vu, dans un procès pénal, la défense joue un rôle capital. Il faut alors que
celle-ci n’a pas été privée d’une partie de ses chances. De trop brefs délais impartis à
l’accusé pour organiser sa défense, sont de nature à fausser l’équité du procès pénal. Le juge
ne retiendra une violation de l’art. 6 § 3 de la C.E.D.H. que si deux conditions sont réunies.
D’une part, un réel manque de temps doit être discernable compte tenu de la complexité de
l’affaire, du programme de travail de l’avocat chargé de la défense, ou encore de l’attitude et
des capacités personnelles de l’accusé161.
159 cf. infra.. 160 En effet dans le régime antérieur, l’art. 3 du décret de 1990, prévoyait une étape procédurale intermédiaire.
Celle-ci permettait à la C.O.B. de décider sans véritable contradictoire, uniquement au vu des observations
écrites produites en réponse de la notification des griefs d’abandonner la procédure ; auquel cas elle en informait
la personne intéressée, ou de la poursuivre ; auquel cas elle procédait à la désignation d’un rapporteur. Ainsi
souvent l’intéressé ignorait pourquoi ses observations écrites n’étaient pas retenues. De plus, même s’il
demandait d’avoir connaissance du dit rapport l’énoncé des griefs étaient souvent imprécis. Cf. Cl.
DUCOULOUX-FAVARD et N. RONTCHEVSKY, Bull. Joly Bourse, mars-avril 1998, p. 107 et notamment p.
110. La procédure modifiée se déroule alors avec plus de transparence. 161 C.E.D.H. aff. MELLIN c/ France, série A, n°261-A. Ainsi, un individu familier des procédures judiciaires et
qui a renoncé aux services d’un avocat doit faire preuve de diligence au soutien de sa propre cause : il est
irrecevable à se plaindre de s’être trouvé forclos pour présenter un pourvoi en cassation au prétexte que le texte
de l’arrêt de la Cour d’appel le condamnant lui a été notifié avec retard, puisque rien ne l’empêchait de se
procurer rapidement une copie du procès verbal de l’audience en s’adressant au greffe.
83
D’autre part, même si le délai imparti à l’accusé fut très bref, celui-ci devra prouver
l’existence d’un préjudice : il est nécessaire que ses chances d’échapper à une condamnation
ou d’obtenir une peine plus légère, aient été substantiellement compromises.
110.- Pour préparer utilement sa défense, l’accusé a droit a priori d’obtenir
communication du dossier le concernant, dès la phase de l’instruction. Toutefois il est
possible qu’il existe une obligation au secret pesant sur les personnes qui concourent à la
procédure162. Cette interdiction est levée lors de la saisine de la juridiction de jugement.
Enfin, le juge peut refuser l’expertise par l’accusé si l’état du dossier permet de douter
qu’elle conduise à des résultats probants163.
111.- « (Tout accusé a droit notamment à …),
se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas le
moyen de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office,
lorsque les intérêts de la justice l’exigent ».
L’alternative donnée à l’accusé - de se défendre tout seul, ou par l’intermédiaire d’un avocat
- n’est pas absolue. L’Etat peut l’obliger se faire représenter par un membre du barreau. S’il
préfère de se défendre tout seul, il doit bénéficier de toutes les prérogatives dont un avocat
dispose pour assister son client et, notamment, du libre accès au dossier.
Lors de la procédure devant la C.O.B. il est pourtant préférable, en raison de la technicité et
de la difficulté que présentent les affaires, que la personne convoquée soit assister d’un
avocat. Sinon, elle risque d’être privée d’une part de ses chances de gagner. Il ne s’est
jamais posé la question de la nécessité d’aide judiciaire.
112.- « (Tout accusé a droit notamment à …),
interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et
l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à
charge ».
Cet alinéa, institue ce qu’il est convenu d’appeler un droit à un complément d’enquête, en
demandant l’interrogation des témoins à charge et à décharge et ce dans les mêmes
conditions. Ce droit, n’est pas applicable, lors de l’instruction, mais seulement devant la
162C.E.D.H. aff. KAMASINKI c/ Autriche, du 19 déc. 1989, série A, n°168 : Il n’est pas contraire à l’art. 6 § 3 le
fait que l’accessibilité intégrale au dossier est réservée seulement à l’avocat de la défense. 163 C.E.D.H. aff. BRICMONT c/ Belgique, du 7 juillet 1989, série A, n°158 : a propos d’une expertise comptable
et financière sur des transactions laissant peu de traces bancaires.
84
juridiction de jugement. Dans un souci d’une bonne administration de la justice, le juge peut
procéder à un partage entre les auditions des témoins à décharge, présentant une utilité réelle
et celles ayant un caractère superflu ou dilatoire, mais en toute circonstance, il doit motiver
sa décision. Lorsque l’accusation s’appuie uniquement sur des dépositions de témoins, il est
nécessaire, que la personne poursuivie ait eu possibilité de les interroger à un moment
quelconque de la procédure. Ceci vaut aussi pour les témoignages anonymes qui ne
sauraient à eux seuls suffire à fonder une décision affirmant la culpabilité de l’accusé164.
Cependant, dans le cadre du droit boursier M. E. DEZEUZE165, admet que le rapporteur,
puisse ne pas interroger quelques témoins et ceci sans porter nécessairement atteinte à l’art.
6 § 3 de la C.E.D.H., puisque l’intéressé pourra reformuler la demande dans le cadre d’un
recours devant la Cour d’appel de Paris. Dans le cadre d’un tel recours, la Cour d’appel
devra procéder aux interrogations sollicitées, sauf refus de sa part par une décision motivée
en indiquant les raisons pour lesquelles elle n’estime pas nécessaire à le faire.
Ainsi dans les affaires SCHWARTZMANN et FRAIBERGER 166, la Cour d’appel a jugé
qu’à partir d’une enquête unique, puis d’une instruction unique, la C.O.B. a pu « sans
compromettre l’équité du procès ni méconnaître les garanties de la défense et le principe de
la contradiction, poursuivre des procédures distinctes de sanctions administratives à
l’encontre de chacune des personnes impliquées dès lors que, s’agissant de comportements
individuels quoique se rapportant au marché du même titre, les faits examinés sont
indépendants les uns des autres et ne nécessitent ni débat collectif ni confrontation des
moyens de défense ».
En effet, en l’espèce il n’a nullement été démontré que la connaissance des
déclarations des autres personnes mises en cause « à partir des faits constatés lors de la
même enquête » était indispensable à l’exercice de leur propre défense.
113.- « (Tout accusé a droit notamment à…),
se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la
langue employée à l’audience ».
Il doit s’agir d’une incompréhension véritable et cette assistance linguistique vaut pour
les actes de procédure dont la personne poursuivie doit avoir compris la signification pour
être en mesurer d’assurer sa défense, pouvoir suivre les débats et communiquer avec son 164 C.E.D.H. aff. KOSTOVSKI, 20 nov. 1989, A, n°166. Ils peuvent valoir comme des éléments d’information
mais pas en tant que preuve principale. 165 La reforme de la procédure de sanction administrative de la C.O.B., à propos du décret n° 97-774, du 31
juillet 1997, J.C.P., 1997, éd. E, n°48, p. 495. 166 C.A. Paris, sect. Bourse, du 12 janv. 1994, R.J.D.A. 11/94, n°1150, 1ère et 2ème espèces.
85
avocat. Les frais d’interprète ne peuvent être mis à la charge de l’accusé et ce quelle que soit
l’issue de la procédure. Jusqu’aujourd’hui, il ne s’est jamais posée cette question.
114.- Ces garanties, sont des facettes, des applications particulières de l’exigence
générale de l’équité, elles forment un tout.
En effet, un lien nécessaire les unit ; le droit à une information précise, dans le plus court
délai et dans une langue compréhensible pour l’accusé, de la nature et de la cause de
l’accusation, conditionne les droits de la défense dont l’exercice effectif suppose que
l’accusé dispose du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense.
Lorsque les organes de Strasbourg se prononcent sur une éventuelle atteinte aux droits de la
défense, ils l’examinent à la lumière de l’art. 6 § 1. Ils regardent concrètement si l’exigence
générale d’équité n’a pas été compromise.
Section 2 Examen du respect des droits de la défense par la C.O.B..
115.- La procédure de sanctions devant la C.O.B. telle que prévue par le décret de
1990, dans sa rédaction issue du décret n°2000-721, du 1er août 2000 et de l’ordonnance du
28 sept. 1967 se déroule en trois étapes ; une phase d’enquête, une phase d’instruction et
une phase de décision. L’art. 6 § 3, en utilisant le terme « d’accusé » se limite dans le cadre
d’un procès, c’est à dire à partir du jour où la décision d’engager des poursuites est prise et
se trouve alors a priori exclu, la phase d’enquête, sous prétexte que la procédure n’est pas à
ce stade formellement entamée. La phase de l’enquête167 doit respecter, pourtant les
dispositions protectrices du code de la procédure pénale168.
167 Deux remarques préalables s’imposent. D’une part, l’art. 3 al. 2 du décret, dans sa rédaction de 2000, prévoit
que les enquêteurs doivent « rappeler le droit de la personne convoquée de se faire assister d’un conseil de son
choix ». Le niveau de protection est donc sur ce point, satisfaisant puisque dès ce stade l’intéressé est informé du
droit qu’il a d’être assisté d’un avocat, dont le rôle consistera essentiellement à lui faire comprendre la procédure
et à le faire comprendre des enquêteurs. Ainsi, la phase d’enquête se déroulera loyalement et de manière
transparente. Ce droit était prévu antérieurement par l’art. 5, de l’ordonnance de 1967. Cependant ce qui est
regrettable est que, la mise à disposition du dossier ; des procès verbaux et des rapports d’enquête, n’ait lieu qu’à
la communication des griefs, alors que la recherche des preuves est quasiment terminée. Avant cette mise en
cause, la procédure est interne et l’intéressé n’a pas connaissance du dossier. Cette situation, justifiée par le fait
que ce n’est qu’à partir de la notification des griefs que commence le débat contradictoire, nuit considérablement
l’égalité entre l’accusation et la défense puisque la première a toujours quelques « pas en avance » par rapport à
la seconde. 168 A savoir l’art. 56 al. 3 Code de procéd. pén. relatif au respect du secret professionnel et des droits de la
défense, (art. 5 ter, al. 6 de l’ord. de 1967)
86
Nous serons obligés de limiter l’examen du respect des droits de la défense au stade de
l’instruction de l’affaire (§ 1), et au stade de la prise de décision (§ 2). Il ne faut pas oublier
que pour l’examen de la conformité du décret de procédure à la C.O.B., nous nous
intéressons à ce que son interprétation globale, réponde à l’objectif de l’art. 6 § 3 qui est un
procès à armes égales, pour aboutir à un procès équitable.
§ 1 Lors de l’instruction de l’affaire.
116.- Dès lors, que les faits relevés par les enquêteurs sont susceptibles d’être des
manquements aux règlements de la C.O.B., le président de celle-ci désigne – à la démande
du directeur général,-un rapporteur parmi les membres de la Commission169 (art. 5, du
décret de 1990, modifié). Ce dernier, procède à un examen du dossier et s’il trouve que les
allégations du directeur général sont fondées notifie « les griefs à la personne mise en
cause » (art. 6 al 1 du décret de 1990, modifié)170.
La notification des griefs, matérialise l’accusation de la procédure pénale ; puisqu’elle
informe l’intéressé des fautes qui lui sont reprochées. Par cette communication, la personne
reçoit le rapport d’enquête qui justifie l’ouverture de la procédure de sanction en
manquement devant la C.O.B. et l’application de l’art. 6 § 3 de la C.E.D.H. ; le droit à un
défenseur et la mise en œuvre d’un débat contradictoire. De cette manière l’intéressé prend
connaissance exacte des résultats de l’enquête et de ses droits171. A ce stade la Cour d’appel
vérifie, si la Commission n’a pas artificiellement différé la notification du rapport afin de
faire échec aux droits de la défense172. Cependant dans l’affaire GLOTIN173, du 1er févr.
2000, la Cour d’appel de Paris, en raison d’une sanction prononcée par la C.O.B. à une
169 Par une combinaison des art. 5 et 9 al. 3, nous en déduisons qu’il ne peut s’agir du président. Cette situation
est satisfaisante, parce qu’elle n’est plus contraire à l’exigence d’impartialité de l’art. 6 § 1 de la C.E.D.H., cf.
supra. Pourtant, il conviendrait par une intervention législative modifier l’art. 2 al. 4 de l’ord. de 1967, qui
dispose que les décisions sont « rapportées par le président, ou par un membre de la Commission désigné à cet
effet ». 170 Dans le régime antérieur, dès lors que la Commission décidait de l’ouverture de la procédure, la notification
des griefs incombait au seul président. 171 Cette possibilité prévue depuis le décret de 1997, été destinée à rendre effectif et à faciliter l’accès au rapport
par la personne accusée ; antérieurement ténu à sa disposition, auprès des services de la C.O.B.. 172 C.A. Paris, sect. Bourse, aff. SCHARTZMANN, du 12 janv. 1994, R.D.B.B. 1994, p. 37, dos. M. GERMAIN
et M.A. FRISON-ROCHE la procédure. 173 C.A. Paris, aff. GLOTIN, du 1er févr. 2000, n°1999/15867, Bull. Joly Bourse, mai-juin 2000, § 50, p. 239, n.
L FAUGEROLAS.
87
société et son dirigeant pour manquement au règlement 90-02 relatif à l’obligation
d’information du public, a jugé que le décret du 23 mars 1990, tel qu’il résulte du décret du
31 juillet 1997, n’oblige pas à ce que la décision de communication des griefs soit
concomitante à la décision d’engagement de la procédure. En effet, elle affirme que la
notification des griefs, ne vise qu’à ouvrir la phase contradictoire de la procédure174 et elle
doit accompagner le rapport d’enquête. La Cour a, en l’occurrence, accepté un délai de plus
de 6 mois entre les deux décisions.
Enfin l’intéressé est informé du délai qui lui est imparti – qui ne peut être inférieur à un
mois - pour présenter ses observations écrites, relativement aux faits susceptibles d’être
transgresseurs aux règlements de la C.O.B., il reçoit un document rappelant les droits de
défense et il est informé de « la possibilité de se faire assister ou représenter par toute
personne de son choix et de prendre connaissance et copie des pièces du dossier » (art. 6 al.
2, du décret de 1990, modifié). Ce droit d’accès à la procédure est acquis dès cette date et il
incombe à la partie qui prétend qu’elle n’a pas pu accéder en tout ou en partie du dossier
d’en apporter la preuve175.
117.- L’information du droit à un « défenseur », est essentielle à cette phase de la
procédure. Celui-ci, l’aidera à comprendre l’objet de l’enquête, la mécanique du procès, car
ils étudieront ensemble les pièces du dossier, les faits reprochés, leur qualification juridique,
les preuves et témoignages ainsi que les enjeux du procès. Il le conseillera et présentera sa
défense. L’intéressé devra « disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation
de sa défense » (art. 6 § 3, al. b) de la Convention. A ce titre le délai qui lui est imparti est
supérieur d’un mois, au lieu de 10 jours, prévu sous la rédaction antérieure du décret. Force
est de constater que malgré l’allongement, le délai risque de ne pas être suffisant compte
tenu du volume et de la complexité de certaines affaires. Il y aurait recours dans ce cas à une 174 Cette solution risque de surprendre. L’art. 2 du décret de 1990, modifié en 1997 énonce, que dès que la
C.O.B. décide d’engager la procédure de sanctions, son président communique à l’intéressé le rapport d’enquête
et les griefs retenus à son encontre. Il ressort alors une certaine concomitance entre la décision d’ouverture de la
procédure et la communication des griefs. De plus l’art. 6 § 3 al. a) exige une célérité dans l’information de
l’accusé. Celle-ci doit intervenir dans le « plus court délai », qui commence à courir le jour de la décision
d’engagement des poursuites. Or, en l’espèce un délai assez long, était écoulé, nuisant, les droits de la défense du
requérant, qui aurait pu bénéficier du temps pour préparer correctement sa défense. Cette situation semble a
priori ne pas respecter ni l’esprit, ni la lettre du décret de 1990 modifié, ni de l’art. 6 § 3 de la C.E.D.H.. Il faut
noter que le texte actuel du décret prévoit qu’ « Après avoir examiné le dossier, le rapporteur notifie, s’il y a
lieu, les griefs à la personne mise en cause », aucune mention expresse n’est faite à l’engagement de la
procédure, qui est cependant sous entendue. 175 C.A. Paris, sect. Bourse, aff. SCHARTZMANN, préc.
88
pratique déjà admise antérieurement de demande de prorogation du délai initial, dont la
décision ne sera pas susceptible de recours.
118.- Le jour de la convocation, lors du débat contradictoire le rapporteur avec les
services de la commission, procédera « à toutes les diligences utiles ». Il peut entendre
l’intéressé, s’il l’estime utile, ou se contenter de ses observations écrites. Il est obligé de
respecter le droit d’être entendu de l’intéressé, ainsi que toute personne qu’il lui propose, si
celui-ci le lui demande. Ainsi l’accusé pourra présenter utilement sa cause et utiliser à son
appui les témoignages qu’il estime nécessaires. Puis, le rapporteur communique à la
personne intéressé le rapport écrit qu’il a établi, lui donne au moins un mois pour y répondre
et joint à cet envoi la lettre de convocation à la séance de décision de la Commission. Le
tout envoyé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise contre
récépissé (art. 8 du décret, modifié).
Nous constatons alors un renforcement des droits de la défense, en raison de l’allongement
du délai pour prendre connaissance du rapport, qui antérieurement était de 10 jours.
§ 2 Au stade de la prise de décision
119.- L’affaire est représentée par le rapporteur, lors de la séance au cours de
laquelle, la Commission se prononce. C’est le règlement intérieur publié au Journal officiel,
qui précise les règles relatives aux délibérations et notamment aux conditions dans
lesquelles les affaires sont rapportées176. L’ancien art. 5 al. 2 du décret, qui énonce que « le
président peut faire entendre par la Commission toutes les personnes dont il estime
l’audition utile », n’existe plus177. En effet, il avait octroyé un pouvoir discrétionnaire au
président de procéder à sa guise aux auditions qu’il pourrait estimer nécessaires. Ceci est
satisfaisant, dans la mesure où ceci comporte une diminution des pouvoirs du président et
empêche toute apparence de préjugé qu’une telle attitude pourrait naître à l’esprit de la
personne intéressée. Cette dernière, procède à sa défense avec l’aide de son conseil et peut
« prendre la parole en dernier ». Ceci est prévu afin de donner la dernière impression, la
plus favorable donc aux juges. 176 Ce règlement intérieur a été publié par un avis du Journal officiel du 31 août 1997, p. 12833, puis modifié –
suite à l’arrêt de l’assemble plénière du 5 févr. 1999 – par avis publié au J.O. du 25 févr. 1999, p. 2936. Ce
règlement non homologué par le ministre de l’Economie, n’a pas valeur réglementaire. 177 De plus, comme nous savons un deuxième décret n°2000-720 du 1er août 2000 modifié le décret n°68-23 du 3
janv. 1968, en opérant transfert au profit du directeur général les pouvoirs du président concernant la procédure
de sanctions.
89
120.- Seuls le président, le secrétaire et les membres de la commission autres que le
rapporteur, participent au délibéré, d’où sont exclus les services de l’inspection, ayant
procédé à l’enquête, dont aussi, le directeur général de la Commission.
Selon l’art. 9 al. 4, si la Commission estime qu’elle n’est pas suffisamment « éclairée », elle
peut demander « au rapporteur de poursuivre ses diligences ». Le décret ne comporte pas
d’information supplémentaire sur le déroulement de cette phase. Certainement le rapporteur
ne peut plus procéder à une nouvelle enquête, puisque ce stade est clos. Il peut par contre
proroger la séance et procéder à une interrogation supplémentaire de l’intéressé. Ce qui est
important est que lors de cette phase les droits de la défense de l’intéressé soient
scrupuleusement respectés. Tel sera par ailleurs le principal souci de son conseil. Cependant
il y a des fortes chances, en l’absence de précision ultérieure dans le règlement intérieur, par
exemple et en raison de l’imprécision des termes de cet alinéa, que cette situation
constituera une piste pour des nouvelles contestations du pouvoir de sanction de la C.O.B..
A moins que finalement ce dernier soit transféré à l’autorité judiciaire, ce qu’une part de la
doctrine a déjà réclamé.
Enfin selon le dernier alinéa de l’art. 9, la décision prise est signée par le président et
le secrétaire ; le rapporteur étant désormais clairement exclu, et elle est notifiée par lettre
recommandée avec demande d’avis de réception à l’intéressé.
90
Chapitre II Le droit au respect de la présomption d’innocence dans la procédure en
sanctions de la C.O.B.
121.- L’art. 6 § 1 de la C.E.D.H. dispose que « toute personne accusée d’une
infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ».
A priori cette formule ne semble que désigner le contentieux pénal et s’adresser aux
membres d’un tribunal. Cependant, l’autonomie de la notion de la matière pénale, concerne
les trois paragraphes de l’art. 6, donc elle s’applique également à la présomption
d’innocence. Le principe clairement affirmé en droit européen (Section 1), est envisagé
comme toutes les autres garanties du texte de manière concrète et effective. Ainsi sa
méconnaissance comporte des conséquences importantes (Section 2).
Section 1 Affirmation du droit au respect de la présomption d’innocence
122.- La présomption d’innocence est une garantie spécifique aux affaires à caractère
pénal : la personne poursuivie ne saurait être considérée comme coupable avant que sa
responsabilité soit légalement constatée (§ 1). Elle traduit l’idée selon laquelle, la personne
accusée d’avoir commis une infraction pénale, à droit à une justice indépendante et
impartiale. La présomption d’innocence - intimement liée au principe de l’égalité des armes
- bien que composante de l’art. 6 § 1 de la C.E.D.H. ne se limite pas dans les strictes limites
d’un procès. Ainsi, elle doit être respectée par la C.O.B. durant l’ensemble de la procédure
répressive (§ 2).
§ 1 L’interdiction d’affirmer prématurément la culpabilité de l’accusé.
123.- L’interdiction d’affirmer prématurément la culpabilité de l’accusé est un
principe constant dans la jurisprudence européenne. La Cour européenne jusqu’à présent, ne
s’est prononcée que sur des affaires où la présomption d’innocence était méconnue en cours
de procès. D’autre part, quant à la Commission, cette garantie ne constitue pas une simple
garantie procédurale, contentieuse.
Une personne qui dès l’ouverture des débats comparaît comme coupable, ne bénéficie pas
vraiment de procès équitable. Une obligation de réserve s’impose alors aux membres de
l’organe appelé à délibérer sur des faits commis par l’accusé. La présomption d’innocence
l’exige, dans le but de protéger contre des allégations de culpabilité sans que celle-ci ait été
91
préalable légalement et définitivement établie et que ce dernier ait exercé ses droits de
défense. Ainsi dans l’affaire ALLENET DE RIBEMONT178 du 10 févr. 1995, il a pu être
jugé que « La présomption d’innocence se trouve méconnue si, sans établissement légal
préalable de la culpabilité d’un prévenu, et notamment, sans que ce dernier ait eu
l’occasion d’exercer les droits de la défense, une décision judiciaire le concernant reflète le
sentiment qu’il est coupable. Il peut en aller ainsi même en l’absence de constat formel ; il
suffit d’une motivation donnant à penser que le juge considère l’intéressé comme
coupable ». Encore une fois nous sommes amenés à constater l’importance que la
Commission confère aux apparences. De plus ce n’est pas seulement la formation de
jugement d’un tribunal qui doit s’abstenir de traiter à priori l’accusé comme coupable mais
toute autorité publique.
Ce qui est à proscrire, ce sont les actes dans lesquelles est discernable un constat de
culpabilité. En revanche, l’art. 6 § 2 ne saurait empêcher les autorités de renseigner le public
sur des enquêtes à caractère répressif en cours. Dans un tel cas, il est exigé qu’elles le
fassent avec discrétion et réserve afin de ne pas porter atteinte à la présomption d’innocence.
124.- Quant au contentieux boursier, ce principe est évidemment applicable dans la
procédure de sanction même en amont du procès. Ainsi a été annulée la décision de sanction
prise par la C.O.B.179 sous la présidence d’un haut fonctionnaire, qui dans une interview
accordée à la presse, avait dévoilé son opinion sur les faits en cause en stigmatisant par là
même l’image de l’accusé en question. En l’occurrence, le président de la C.O.B. avait
dénoncé des « lacunes dans l’information » et la « mise en place d’un mécanisme de
dissimulation ». La Cour de cassation avait cassé sans renvoi l’arrêt de la Cour d’appel de
Paris parce « qu’il était établi que ces déclarations publiques avaient été faites entre la
notification des griefs à M. CONSO et le prononcé de la sanction prise contre lui sous la
présidence de leur auteur… ». Le dit membre de la C.O.B. était en exercice pendant le
178 C.E.D.H., affaire ALLENET DE RIBEMONT c/ France, du 10 févr. 1995, Réc., n°308 et comm. De L.-E.
PETTITI, Rév. sc. crim. 1995, (3), p. 639. En l’occurrence, alors qu’il se trouvait en garde à vue le requérant
avait été présenté par le ministre de l’intérieur et deux hauts fonctionnaires de ce ministère, comme le complice
de l’assassinat de M. Jean DE BROGLIE. 179 Cass. com. aff. CONSO c/ Agent judiciaire du Trésor, du 18 juin 1996, R. J. com. 1997, p. 65, n. D. VATEL,
dans le cadre d’un manquement à l’obligation d’information du public. Ce n’est pas la première fois que la
jurisprudence se prononce sur la question. Déjà dans l’affaire DEVERLOY, du 15 janv. 1993, Bull. Joly Bourse
1993, p. 148, n. A VIANDER, la Cour d’appel de Paris avait annulée une décision de sanction prononcée par la
C.O.B. – sans pour autant se fonder sur le texte européen – pour non respect des droits de la défense et de la
présomption d’innocence.
92
déclenchement et le déroulement de la procédure en sanction du manquement et avait
participé au délibéré. En raison de ses propos partiaux, il avait manqué à son devoir de
réserve. Force est de constater cependant que, dans un des litiges de l’affaire OURY180, une
annulation de la sanction de la C.O.B. prononcée pour le même manquement est intervenue
malgré le départ cette fois-ci du membre (en l’occurrence du président), qui avait
publiquement tenu des propos préjugeant de la culpabilité du dirigeant social. Selon la Cour
de cassation, la mise en cause de l’information diffusée par la société par des déclarations
reproduites dans la presse avant toute constatation légale de culpabilité, allait à l’encontre
du respect du principe de la présomption d’innocence, même si le dit président n’était plus
en fonction. Dès lors, la C.O.B. n’était plus en mesure de prendre une décision de sanction
valable.
125.- La portée de l’arrêt du 1er déc. 1998 est alors non négligeable, car la Cour de
cassation va encore plus loin dans la protection des droits de l’homme en amont du. Dans
l’affaire CONSO, c’est l’impartialité du Collège dans la prise de décision qui est contestée.
Dans le litige OURY c’est essentiellement la présomption d’innocence ; garantie découlant
de l’exigence d’impartialité. Enfin, la Cour d’appel de Paris étend le devoir de réserve de la
C.O.B. aux informations données dans son rapport annuel qui – rappelons-le – est public181.
En l’occurrence, celui-ci faisait état d’un résumé partial du dossier DEBUS en cours
d’instruction. Alors que M. DEBUS, n’avait pas encore pu présenter ses observations, le dit
rapport avait laissé entendre que les infractions constatées et poursuivies étaient d’ores et
180 Cass. com. aff. OURY c/ Agent judiciaire du Trésor, du 1er décembre 1998, J.C.P. 1999, éd. E., II, p. 372, n.
E. GARAUD. En l’espèce le président dénonçait les « acrobaties comptables de l’immobilière Phénix, où des
hôtels sont passés à des prix gonflés de filiale, en filiale comme un mistigri » 181 C. A. Paris, aff. DEBUS, du 2 juillet 1999, Banque et Droit, n°66, juillet-août 1999, p. 30, n. H. DE
VAUPLANE. Dans le cadre d’une affaire relative à un manquement au règlement n°90-08, relatif à l’utilisation
d’une information privilégiée, le rapport annuel pour 1997 au Président de la République, la C.O.B. mentionnant
que « trois enquêtes ont révélé des faits susceptibles de constituer des délits d’initiés ou de contrevenir aux
dispositions du règlement n°90-08 de la Commission relatif à l’utilisation d’une information privilégiée. La
première a porté sur les transactions qui ont lieu sur les titres d’une société inscrite au hors cote avant
l’annonce du changement de contrôle de celle-ci. Les investigations ont fait apparaître que le jour même de cette
opération, un responsable de la société ayant des liens familiaux avec les dirigeants, avait acquis un nombre
relativement élevé de titres de la société à un prix inférieur de près de 90% à celui retenu pour la cession du
contrôle. Ayant relevé que ce responsable avait obtenu l’information sur l’existence du changement de contrôle
et du prix auquel celui-ci effectué avant la réalisation de la transaction, la Commission a décidé d’ouvrir une
procédure aux fins de sanctions administratives à l’encontre de cette personne sur le fondement de son
règlement n°90-08 […] et de transmettre ce dossier au Parquet ».
93
déjà établies. Cette méconnaissance du principe ne pourrait pas subsister, la Cour d’appel de
Paris a annulé la décision de sanction de la C.O.B..
126.- Il faut cependant constater, que le droit à la présomption d’innocence et le
devoir corrélatif de réserve ne doivent pas empêcher la C.O.B. de mener à bien sa mission
de surveillance quant au bon fonctionnement et la transparence des marchés financiers182.
Le public et la presse sont en droit d’obtenir certaines informations sur les enquêtes pour
manquement en cours mais la Commission en raison du caractère répressif des sanctions
qu’elle inflige est tenue de prendre des précautions quant aux informations fournies. Il est
alors question de conciliation du devoir d’information du marché prévu par l’art. de l’ord.
de 1967 et des droits de la défense au regard de la présomption d’innocence posée par l’art.
6 § 2 de la C.E.D.H.. Dans le cas contraire, les décisions de sanction seront condamnables
pour préjugement car intervennant avant le prononcé définitif de jugement183.
Deux remarques restent à faire encore. D’une part, la personne contre laquelle une
sanction administrative est prononcée, est considérée comme coupable si sa responsabilité
est légalement constatée. Or, une telle constatation n’est susceptible de dériver que d’une
véritable juridiction. Le Conseil constitutionnel ne s’est jamais prononcé sur le caractère
exécutoire des sanctions administratives, nonobstant l’implication de cette situation avec la
présomption d’innocence, principe à valeur constitutionnelle en droit français. A supposer,
que nous acceptions le caractère exécutoire des sanctions de la C.O.B., il demeure un
inconvénient. En effet, il faut tenir compte des voies de recours susceptibles de frapper la
décision et de l’effet suspensif ou non, qu’elles comportent.
D’autre part, si la volonté des juridictions de contrôle des décisions de la C.O.B. de conférer
une protection de plus en plus accrue aux droits de l’homme est satisfaisante, il reste un
point critiquable. En effet, nous ne pouvons pas nous empêcher de nous demander quant à la
justification concrète des décisions d’annulation des sanctions de la C.O.B. qui, n’oublions
pas, par leurs implications paralysent en quelque sorte le pouvoir de sanction de cette
dernière. Ainsi, si dans l’affaire DEBUS, il y a mise en cause du rapport annuel de la
C.O.B., document officiel présentant la position de la C.O.B. en tant qu’institution sur une
affaire donnée. Dans les affaires CONSO et OURY, ce sont les propos d’un membre du 182 En effet, l’effet de l’ord. du 28 sept. 1967 prévoit que la C.O.B. est tenue de « porter à la connaissance du
public les observations qu’elle a été amenée à faire à une société » 183 C’est pourquoi il a été indiqué de manière officieuse que la C.O.B. recherchait des moyens de respecter son
obligation d’information du marché sans nuire à la présomption d’innocence, in Le Monde, art. : La C.O.B.
modifie son règlement interne pour se conformer à un arrêt de la Cour de cassation, du 20 févr. 1999, p. 20, par
M. ORANGE.
94
Collège qui sont condamnables. Or, il ne faut pas omettre que lors du délibéré la décision
est prise par neuf membres et qu’une décision collégiale ne doit pas être annulée en raison
des propos irréfléchis de l’un d’entre eux.
§ 2 Le nécessaire respect de la présomption d’innocence et le Collège de la C.O.B.
127.- La Cour a admis que le principe de la présomption d’innocence184 s’applique
aux personnes accusées d’infractions pénales, dès la phase préparatoire du procès pénal ;
indépendamment de l’issue des poursuites, mêmes si l’infraction est considérée comme non
punissable par l’effet d’une excuse absolutoire ou, si les poursuites aboutissent à une
décision de ne pas « donner suite à la plainte ».
Expressément prévu par la Convention européenne dans le domaine pénal, la jurisprudence
a admis également que « le principe s’applique aux procédures administratives »185. En
effet, dans l’arrêt ALLENET DE RIBEMONT c/ France du 10 févr. 1995186 bien que le
gouvernement français ait soutenu que l’art. 6 § 2 n’était pas applicable, car une atteinte à
cette garantie n’aurait pu provenir que d’une autorité judiciaire en application de la
jurisprudence de la Cour européenne, cette dernière se ralliant à l’opinion de la Commission
à considéré que l’art. 6 § 2 de la Convention pourrait être méconnu par d’autres autorités
publiques et que le suspect gardé à vue (il fut mise en examen ultérieurement) était bien un
accusé en matière pénale.
184 Le principe est également garanti par l’art. 9 de la Déclaration des droits de l’homme ; « tout homme étant
présumé innocent jusqu’à ce que qu’il ait été coupable », l’art. 9-1 du C.C. « chacun a droit au respect de la
présomption d’innocence », l’art. 11 § 1 de la Déclaration Univers elle des droits de l’homme, l’art. 14 § 2 du
Pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques. 185 C.E.D.H. aff. ÖZTÜRK c/ R.F.A., préc. 186 C.E.D.H., aff. ALLENET DE RIBEMONT, du 10févr. 1995, Rec., n°308 et comm. De L.-E. PETTITI, Rev.
sc. crim. 1995, (3), p. 639.
95
128.- La présomption d’innocence est notamment liée, à la question de la charge de
la preuve187. Celle-ci pèse sur la C.O.B., autorité poursuivante, même dans le cadre d’un
appel de la personne poursuivie devant la Cour d’appel de Paris. Le doute profite à
l’intéressé. Force est de constater que cette charge qui est consacré par le principe de la
présomption d’innocence, l’est aussi par le respect des droits de la défense qui consacrent le
droit de ne pas témoigner contre soi-même188.
La Cour a considéré que les juges ne doivent arriver à la condamnation que sur la base de
preuves directes ou indirectes mais suffisamment fortes189. Elle a en outre, jugé que si l’art.
6 § 2 ne se désintéresse pas des présomptions de fait ou de droit contenues dans les lois
répressives, il se contente de commander aux Etats de les enserrer dans des limites
raisonnables, prenant en compte la gravité de l’enjeu et préservant les droits de la défense.
Dans le cadre du droit boursier, le principe de la présomption d’innocence doit être respecté
dès avant la phase d’instruction190. Dans la situation contraire, où le Collège de la C.O.B.
parte de l’idée préconçue que l’intéressé a commis l’acte incriminé, il sera partial,
l’intéressé sera démuni d’une partie de ses chances afin de convaincre de son innocence et le
procès ne sera pas équitable.
129.- Le décret du 1er août 2000, en prévoyant l’intervention de différentes personnes
aux phases antérieures au prononcé de la sanction et en interdisant leur participation au
délibéré va dans le sens d’un renforcement de la présomption d’innocence devant la C.O.B..
En effet, dans le régime antérieur, les personnes participant au délibéré étaient celles qui 187 Il faut regarder la protection des droits des individus, non seulement sous l’optique de la charge de la preuve,
mais aussi sous celle de la recherche de la preuve, où la liberté risque d’être restreinte par les organes de
l’autorité poursuivante effectuant p. ex., des visites domiciliaires et des saisies. Dans ce cadre les agents de la
C.O.B. sont soumis à l’autorisation préalable de l’autorité judiciaire, qui doit également contrôler la régularité de
leur exécution et tranche tous incidents survenant à cette occasion. 188 Le principe nemo tenetur se impsum accusare, se présente comme corollaire du principe de la présomption
d’innocence, dans le double sens du droit de garder le silence, et du droit de ne pas témoigner contre soi-même.
Sur cette question cf. arrêts de la C.E.D.H., aff. FUNKE, CREMIEUX, MIAILLE c/ France, du 25 févr. 1993,
D., 1993, p. 457, n. J. PANNIER et Commission européenne des droits de l’homme, aff. SAUNDERS, du 10
mai 1994. Il ressort de la jurisprudence que le respect de ce principe a une portée plus large que dans l’enquête
judiciaire classique. 189 C.E.D.H., aff. BARBERA, MESSEGUE et JABARDO c/ Espagne, du 6 déc. 1988, Rec. n°146. 190 De plus, comme nous l’avons déjà vu, son respect, implique l’extinction de l’action répressive à l’égard d’une
personne morale dissoute et l’absence de transmission de sa culpabilité aux sociétés issues de sa scission, en
raison du principe de personnalité des peines déduit implicitement de l’art. 6 § 2 dans la mesure où les pratiques
reprochées ne leur sont pas matériellement imputables. V. Cass. com. 15 juin 1999, n°12379, C.O.B. c/
Compagnie générale immobilière Georges V et autres, préc.
96
avaient engagé les poursuites, donc elles avaient déjà manifesté un doute quant à
l’innocence de l’intéressé.
Section 2 Les effets d’une méconnaissance de la présomption d’innocence.
130.- La méconnaissance par la C.O.B. de la garantie procédurale de la présomption
d’innocence entraîne inévitablement en cas d’appel, la censure de la décision de sanction,
prononcée; par la Cour d’appel de Paris. Comme nous l’avons déjà vu, cette
méconnaissance constitue une irrégularité – qui en raison des ses effets néfastes sur la
situation de la personne mise en cause – vicie de manière irrémédiable le caractère équitable
de la procédure de sanction et le recours ultérieur devant la Cour d’appel de Paris est
insusceptible de suffire à lui-seul pour remédier à cette situation. Le non respect de la
présomption d’innocence constitue d’une part une limite aux pouvoirs dont dispose la Cour
d’appel de Paris (§ 1), ce qui finalement aboutit à l’impunité du transgresseur (§ 2).
§ 1 Limites au pouvoir d’évocation de la Cour d’appel de Paris
131.- Nous savons déjà que dans le cadre de son intervention sur une demande
d’annulation ou de réformation d’une sanction de la Commission des opérations de bourse,
la Cour d’appel de Paris – qui n’intervient pas comme juge d’appel mais en premier ressort
comme juridiction de contrôle des décisions de celle-ci – est pleinement soumise aux
garanties procédurales prévues par l’art. 6 de la C.E.D.H..
Lorsque la Cour d’appel de Paris annule une sanction pour méconnaissance des garanties de
forme prévues par le texte européen, cette solution ne devrait pas mettre à l’abri de toute
sanction la personne poursuivie, dont le caractère transgresseur de ses agissements, est déjà
établi. La Cour d’appel de Paris, devrait ainsi pouvoir reformer la décision de sanction
déférée ou l’annuler et lui en substituer une autre, en prononçant éventuellement les
condamnations pécuniaires nécessaires. Elle apprécie ce que doit être sa décision, en se
plaçant à la date même où la C.O.B. s’était prononcée et en tenant compte les éléments de
fait et de droit existant à cette date.
De plus la Cour d’appel de Paris a la possibilité d’exercer son droit d’évocation191.
L’évocation, est une faculté qui appartient au juge du deuxième degré, saisi de l’appel de
191 M.-A. LAFORTUNE, concl. Préc. Avait invité la Cour d’appel de Paris d’exercer son droit d’évocation prévu
par l’art. 520 de Code de procédure pénale « Il m’apparaît aussi que la Cour d’appel de Paris, saisie des recours
97
certains arguments de première instance de s’emparer de toute l’affaire et de statuer sur le
tout, c’est à dire sur l’appel et le fond du procès par une seule et même décision. Dans le
cadre qui nous intéresse, l’art. 520 du Code de procédure pénal octroi cette possibilité à la
Cour d’appel de Paris, lorsque la décision attaquée est annulée pour « violation ou omission
non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité ». Ainsi, l’évocation
prononcée par la Cour d’appel de Paris dans un souci de célérité dans le traitement des
affaires permet aux juges du second degré de remplir valablement la mission des premiers
juges et à ce que l’exigence générale d’équité, de l’art. 6 de la C.E.D.H., n’aboutisse pas à
une injustice. Pourtant force est de constater, que lorsque l’autorité sanctionnatrice se
prononce prématurément sur la culpabilité de la personne mise en cause, le manquement à la
garantie de la présomption d’innocence, se situe dès le départ ; la phase d’enquête et la
phase d’instruction se trouvant viciées, il est interdit à la Cour d’opérer une simple
substitution de décision.
§ 2 L’impunité du transgresseur
132.- La méconnaissance de la garantie de la présomption d’innocence, comme nous
l’avons vu est un vice de procédure qui se sanctionne par la nullité de la sanction prononcée.
Cette contestation de la décision de la C.O.B. a pour conséquence de paralyser son pouvoir
de sanction, ainsi que son action en général. De plus, la Cour d’appel de Paris se trouve
incapable de prononcer une autre, en raison du fait que ce vice affecte la procédure dès le
début.
Cette situation est reprochable à la C.O.B. parce qu’en vertu de l’art. 40 al. 2 du Code
de la procédure pénale192, elle est tenue d’en informer le procureur de la République dès tendant à la réformation ou l’annulation des décisions de la C.O.B. sur le fondement des moyens de droit ou des
faits invoqués par le requérant, pourrait, lorsque c’est possible, dans l’exercice de sa plénitude de juridiction,
au cas d’annulation des actes de la procédure mise en œuvre par l’autorité administrative dans ‘‘une
intervention préalable’’, exercer son pouvoir d’évocation des faits constitutifs des manquements aux règlements
reprochés et prononcer à l’encontre des opérateurs fautifs les sanctions pécuniaires méritées dans le cadre
d’une procédure nécessairement équitable par référence aux prescriptions de l’art. 6 de la Convention
européenne. La non-conformité avec ce texte de la procédure mise en œuvre par l’autorité administrative
poursuivante ne saurait être une prise supplémentaire à l’impunité des opérateurs qui ont agi en violation des
normes générales édictées pour le développement harmonieux de la vie économique, même si par ailleurs les
mêmes faits peuvent constituer des infractions pénales dénoncées au Parquet par la C.O.B. » p. 996. 192 Cet article prévoit que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de
ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au
98
lors, qu’elle prend connaissance d’un crime ou d’un délit. En l’occurrence comme nous
l’avions déjà vu certains manquements de la C.O.B. sont susceptibles de constituer des
délits ; tels que le délit d’initié. Lorsque les services de la C.O.B., constatent un
manquement, susceptible d’être qualifié ainsi, ils doivent transmettre le dossier au procureur
de la République aussi. Dans le cas contraire comme en l’occurrence, où une sanction de la
C.O.B. est annulée pour un vice de procédure, si le délai pour l’action publique est passé,
cette dernière se trouve prescrite193.
Force est de constater que, conformément au principe de l’opportunité des poursuites,
lorsque le procureur de la République prend connaissance de l’existence d’une infraction
boursière constitutive d’un délit pénal, il peut se saisir d’office. De plus il a même la
possibilité, de demander une suspension de la prescription de l’action publique c’est à dire
l’arrêt temporaire du cours de la prescription qui n’anéantit pas pourtant le délai
antérieurement écoulé194. Cette suspension est fondée sur le fait que la partie poursuivante
ayant été placée dans l’impossibilité d’exercer son droit d’action publique, le délai de
prescription doit être suspendu. Cependant, il faut que les raisons de son inaction ne lui sont
pas imputables. Sinon le transgresseur reste impuni.
133.- Cette situation d’imputé du transgresseur révèle l’inadaptation et l’inutilité du
régime de la double incrimination. Enfin, il est nécessaire de repondre à la question
suivante. Cette inaction est-elle hasardeuse ou a-t-elle lieu pour bien montrer l’insuffisance
de la sanction administrative ? N’oublions pas que certains manifestent déjà très clairement
leur souhait de suppression de ce pouvoir répressif administratif195, au profit de la
juridiction judiciaire, ainsi qu’un retour au régime avant la loi du 2 août 1989.
procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes
qui y sont relatifs ». 193 Tel a été le cas dans l’affaire DEBUS, préc. 194 V. Vocabulaire juridique Capitant, op. cit. 195 Cf. DUCOULOUX-FAVARD, P. A. 10 févr. 1999, n°29, p. 14, spéc. 16. Sur ce point, nous ne sommes pas
d’accord avec l’éminente juriste ; le pouvoir répressif administratif est indispensable. Nous souhaitons que la
nouvelle loi sur la régulation économique, tienne compte de l’inutilité du maintien de la possibilité de la double
incrimination et que lors du rapprochement de la C.O.B. et du C.M.F., elle adoptera la proposition de M. H. de
VAUPLANE précitée.
99
Conclusion
La rencontre de la C.O.B. et les exigences du procès équitable définies par l’art. 6 de
la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales, a illustré la fragilité de la procédure prévue par le décret du 23 mars 1990,
dans sa rédaction issue du décret du 31 juillet 1997.
Par application de la Convention, la Cour d’appel196 - qui en avait l’obligation en raison de
la primauté des règles de la première sur la loi interne, a écarté les textes de procédure
nationaux qu’elle estimait non conformes aux garanties du procès équitable, notamment en
196 Dans l’affaire K.P.M.G. du 7 mars 2000, préc.
100
ce qu’ils confondent les autorités d’accusation et de jugement. Cet arrêt n’a pas pour autant
entendu supprimer ou compromettre l’existence du pouvoir répressif de la C.O.B.. Il oblige
seulement à une adaptation de la procédure, pour la rendre conforme avec les règles du
procès équitable
Cette adaptation a été entreprise avec l’intervention du nouveau décret du 1er août 2000.
134.- Les décisions rendues par la Cour de cassation et le Conseil d’Etat, ont en effet
révélé les divergences d’interprétation initiales entre les deux cours suprêmes - quoique
actuellement ayant adopté le raisonnement des juges de Strasbourg - et l’influence sans
cesse croissante du texte européen, sur les systèmes nationaux juridictionnels ou
administratifs.
135.- Alors même que la Commission des opérations de bourse, n’est pas qualifiée
de juridiction au sens du droit interne, les sanctions administratives qu’elle rend en raison de
leur forte coloration pénale, due à leur importance et leur caractère répressif et préventif les
fait entrer dans la compétence de l’art. 6 de la C.E.D.H.. C’est pourquoi elle est - ainsi que
les autres autorités non juridictionnelles qui disposent d’un cumul de prérogatives, astreinte
au respect de ses prescriptions.
De plus, pour assurer l’efficacité de l’action de la C.O.B., aucun principe à valeur
constitutionnelle ne s’oppose à son pouvoir répressif. Seulement, il existe un certain
encadrement. Cependant, trois aspects importants de la procédure en sanctions restent en
suspens. Le cumul de sanctions, d’une part, la question de l’absence de prescriptions des
poursuites en raison des manquements de la C.O.B. d’autre part et enfin le rôle du président
tout au long de la procédure. Ces situations allant à la fois à l’encontre de l’exigence
générale d’équité et de l’égalité des armes, sont critiquables.
Malgré la modification de la procédure en sanctions opérée par le décret du 1 août
2000 qui s’est attaché à ce que les fonctions, de poursuite, d’instruction et de jugement ne
soient pas exercés par les mêmes personnes et qui a de la sorte mis, ne serait-ce qu’en
théorie, un terme au risque de partialité objective de la C.O.B. lorsqu’elle se prononce dans
le cadre de son pouvoir de sanction, d’autres aspects de la procédure en vigueur sont
susceptibles de se heurter aux exigences de l’art. 6 de la Convention relatives au respect des
droits de la défense ou de la présomption d’innocence. En effet, force est de constater qu’en
dépit d’une amélioration de la procédure, celle-ci n’est pas encore conforme aux droits de la
défense. Le directeur général de la C.O.B. – désormais chargé du suivi de la procédure –
reste encore en pratique sous le contrôle du président de la C.O.B.. Ainsi, selon l’art. 5 du
décret, du 1er août 2000 - malgré le fait que le premier exerce l’autorité sur les services
101
concernés pendant la procédure - il doit demander au président de désigner un rapporteur
parmi les membres de la Commission. Cette situation est alors contradictoire et finalement
le président malgré son rôle secondaire intervient à nouveau à la procédure dès le départ.
136.- Une fois de plus nous nous trouvons face à un décret qui est pris suite à un
arrêt condamnant la C.O.B. en raison des modalités d’exercice de son pouvoir de sanction.
Certaines situations sont décrites de manière vague et imprécise. Cependant, il ne faut pas
oublier, comme l’a précisé le ministre de l’Economie et des Finances M. Laurent
FABIUS197, qu’il ne s’agit que d’un décret provisoire qui vise à permettre à la C.O.B. de
travailler, pour sanctionner les agissements répréhensibles d’acteurs sur les marchés
financiers ; en attendant sa fusion avec la C.M.F. au début de l’année 2001198. En effet ce
décret ne témoigne pas d’un travail approfondi sur la procédure en sanctions devant la
C.O.B., il tend seulement à se mettre en conformité avec la jurisprudence européenne sur les
points que l’affaire K.P.M.G. a relevés.
En conclusion, ce qui semble retenir l’attention de tous est la mise en place des
nouvelles règles de régulation des marchés financiers en vue de l’harmonisation
européenne. A cet effet, le rapprochement entre la C.O.B. et le C.M.F. pour aboutir à une
autorité de régulation puissante et efficace devrait s’insérer dans l’actuel projet de loi sur les
nouvelles régulations économiques et est justifié par les nécessités de l’évolution rapide des
marchés financiers mondiaux.
137.- C’est la multiplication des volumes des opérations financières et le
développement des transactions sur l’Internet qui rend nécessaire un renforcement de
l’autorité régulatrice des marchés financiers. Le souci d’assurer une transparence financière
et le respect de l’égalité de traitement des intervenants qui s’entend comme l’égalité d’accès
à l’information financière, justifient la contrainte d’une information précise complète, rapide
et fiable. C’est l’exigence d’amélioration de la qualité d’information financière, notamment
via Internet et la nécessité d’aboutir à un droit boursier européen qui rend nécessaire la mise
en place; des structures pour accueillir ce rapprochement entre la C.O.B. et le C.M.F. d’une
part et une procédure de sanction en cas de manquement sans contestation possible, d’autre
part.
197 In Les Echos, mardi 11 juillet 2000, p.3. 198 Selon M. FABIUS, « L’objectif est de développer une approche nationale et trans-sectorielle du contrôle
financier qui restera décentralisée, gagnera en efficacité », in Les Echos, art. préc.
103
TABLEAU N°1
COMMISSION DES OPERATIONS DE BOURSE
GARANTIES DE FOND
LOI DU
2/8/89
DECRET
DU 23/3/90
LOI DU
2/7/96
LEGALITE
art. 5-II
art. 6
art. 8
NON BIS IN
IDEM
art. 10
(bis in idem)
art. 9-3 art. 89-IX
(non bis in
idem)
PROPORT.
art. 5-III al. 4
INDEPEND.
art. 1 art. 89-II, III
104
TABLEAU N°2
COMMISSION DES OPERATIONS DE BOURSE
GARANTIES DE PROCEDURE
LOI DU 2/8/89 DECRET DU
23/3/90
DROITS
DE LA
DEFENSE
art. 5-III art. 3 art. 9
art. 6
art. 7
RECOURS
art. 9 art. 10
art. 11
art. 12
SURSIS
art. 11
105
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES GENERAUX. -N. DECOOPMAN : La C.O.B., La Modernisation des activités financières : éd. Joly 1996,
p.105.
-P. DEVOLVE : Droit public de l’économie, Précis Dalloz 1998, n°395.
-E. PUTMAN, Contentieux économique, P.U.F. 1998, n°177.
OUVRAGES SPECIAUX.
-Lamy sociétés commerciales, 1999.
-Lamy droit du financement, 2000.
-H. de VAUPLANE et J.-P. BORNET : Droit des Marchés financiers, Litec, 1998.
-F. STASIAK : Nature des autorités de régulation à pouvoir répressifs et garanties
fondamentales de la personne : Thèse Nancy II 1995.
3)ARTICLES ET ETUDES.
-D. ALLIX : Le droit à un procès pénal équitable, Justices, n°10, avril/juin 1998, p. 19.
-P. AUVRET : Le droit au respect de la présomption d’innocence, J.C.P. 1999, I, p. 3802.
-C.B., Les autorités administratives indépendantes et l’article 6-1 de la C.E.D.H., Cahiers
de la fonction publique, mai 2000, p. 12.
-W.BARANES, M.-A. FRISON-ROCHE et J.-H. ROBERT : Pour le droit procéssuel,
D., 1993, chron., p. 9.
-J. BARTHELEMY : Les nouvelles frontières du procès équitable in Les Nouveaux
Développement du procès équitable au sens de la C.E.D.H., éd. Bruylant 1996, p. 103.
-P. BEZARD : Le pouvoir de sanction financière directe de la C.O.B. P.A. 17 janvier 1990,
p. 52.
-B. de BELVOL : Procédures et C.O.B. : à l’occasion du décret du 31 juillet 1997,
Procédure, janvier 1998, p. 3.
-V. BERGER : Jurisprudence de la C.E.D.H., 5ème éd., Sirey.
-F. BIBET :Du rapporteur de la C.O.B. à celui du Conseil de la Concurrence, in Revue de
la concurrence et de la consommation, n°108, mars-avril 1999, p.47-50.
-A. BIENVENU-PERROT : Procès équitable et sanction boursières : les équivoques ne
sont pas toutes levées, Bull. Joly Bourse §121, nov.-déc. 1999 p. 549.
106
-J-Cl. BONICHOT: L’application de l’art. 6, §1 de la C.E.D.H. aux autorités de
régulation : la position du Conseil d’Etat : P.A. 11 mai 2000, n°94, p. 3.
-J-Cl. BONICHOT : Quelques remarques sur le champ d’application de l’art. 6 §1 dans le
droit français, in Nouveaux Développements du procès équitable au sens de la C.E.D.H.,
Bruylant, 1996, p. 50.
-J-Cl. BONICHOT : Art. 6 de la C.E.D.H. : actualité jurisprudentielle, entretien, P.A., 15
janvier 1999, p. 10.
-J-Cl. BONICHOT : Les juridictions administratives appliquent l’art. 6 de la C.E.D.H.,
dans sa lettre et dans son esprit : P.A. 15 janvier 1999, p. 20.
-J-Cl. BONICHOT : Quelques remarques sur le champ de l’art. 6 § 1dans le droit
français, in Les Nouveaux Développements du procès équitable au sens de la C.E.D.H., éd.
Bruylant, 1996, p. 49.
-J-Cl. BONICHOT : L’application de l’art. 6 § 1 de la C.E.D.H. aux autorités de
régulation : la position du Conseil d’Etat , P.A. 11 mai 2000, n°94, p. 3-7.
-D. BORDE et A. PONCELET :Le pouvoir de sanction administrative conféré à la C.O.B.
par la loi du 2 août 1989.Bilan des premières décisions, R.D.B.B., n°39, sept/oct. 1993
p.217-221.
-J-F. BRISSON : Les pouvoirs de sanction des autorités de régulation et l’art.6§1 de la
C.E.D.H. : à propos d’une divergence entre le Conseil d’Etat et la Cour de cassation.
R.J.D.A. 20 nov. 1999, p.847.
-F . BUCHER :Vers un progrès des droits de la défense devant la C.O.B. : Rév. soc., 1997,
p.41
-F . BUCHER :Procédures de sanction de la C.O.B. et garanties fondamentales, D. Aff.
6 mai 1999, n°160, p.746.
-G. CAVINET: Les garanties de procédures applicables à la procédure de sanction de la
C.O.B. D. Aff. n°3/ 1996 p.63.
-G. CAVINET: La procédure de sanction administrative des infractions boursières à
l'épreuve des garanties fondamentales. R.J.D.A. 5/1996, p.423-431.
-G. CAVINET : Les droits de la défense à l’occasion d’une procédure de sanction
administrative de la C.O.B., Bull. C.O.B., n°315, juillet 1997, p. 21.
-A. CHARVERIAT : C.O.B., un pouvoir de sanction à ne pas négliger, Option Finance,
n°601, du 19 juin 2000.
-J. CHEVALIER : Les autorités administratives indépendantes et la régulation des
marchés, Justices, n°1, janvier-juin 1995, p. 81.
107
-D.-N. COMMARET : Une juste distance ou réflexions sur l’impartialité du magistrat, D.
1998, chron. p. 262.
-J.VAN COMPERNOLLE : Evolution et assouplissement de la notion d’impartialité
objective, R.T.D.H. 1994, p.437.
-A. COURET :Les droits de la défense devant la C.O.B., Bull. Joly 1991, p.1081.
-A. COURET: La sauvegarde des droits de la défense devant la C.O.B. R.J.D.A. 3/99,
p.203.
-P. CROCQ : Le droit à un tribunal impartial : in Droit et libertés fondamentaux, sous la
direction de R. CABRILLAC, M.-A. FRISON-ROCHE, Th. REVET, D3 5ème éd.
-P. DECHEIX : Droits de défense et défense des droits, P.A. du 3 avril 1995, p. 9.
-N. DECOOPMAN : Le pouvoir de sanction administrative de la C.O.B.,R.D.B.B. 1990,
p.16.
-N. DECOOPMAN : Juris-Classeur : Sociétés Traité, Fasc. 1510.
-E. DEZEUZE : La réforme de la procédure de sanctions administratives de la C.O.B. (à
propos du décret n°97-774 du 31 juillet 1997) : J.C.P., éd. E., 1997, I , n°709
-P. DEVOLVE : La nature des recours devant la Cour d’appel de Paris contre les actes
des autorités boursières : Bull. Joly 1990, p. 499.
-P. DEVOLVE : cah. dr. enterprise 1984, n°4, p. 6.
-P. DOURNEA-JOSETTE : Les acteurs économiques, le juriste des affaires et la
C.E.D.H. : D. Aff. 1998, p. 610.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD : Le juste procès en matière financière : P.A. 12 mai 2000,
n° 101, p. 4.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD :Investigations et enquêtes des autorités des marchés
boursiers, P.A.,30 janv. 1995, p. 3.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD :Questions de procédure devant les autorités boursières,
P.A., 19 sept.1997, p. 13.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD : Où en est on avec le contradictoire et l’impartialité dans
les procès boursiers ?, P.A., n°1, du 3 janvier 2000, p. 12-14.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD : Manquement et délit d’initié, D 1992, chron., p. 197.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD : Investigations et enquêtes des autorités des marchés
boursiers P.A. 30 janvier 1995, p.3.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD : Questions de procédure devant les autorités boursières
P.A. 19 sept. 1997, p.13.
108
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD et N. RONTCHEVSKY: La procédure de sanction
administrative des infractions boursières après le décret n°97-774 du 31 juillet 1997. Bull.
Joly
Bourse, mars-avril 1998, §31, spéc.n°15, p.107.
-Cl. DUCOULOUX-FAVARD et N. RONTCHEVSKY : Infractions boursières, délits
boursiers, manquements administratifs, éd. Joly, 1997, jhtgujy.Y.
-O. DUFOUR : Pour rendre le jurisprudence plus lisible, P.A., 20 janvier 2000, n°14, p. 5.
-O. DUFOUR : La C.O.B. modifie l’exercice de son pouvoir de sanctions, P.A., 18 août
2000, n°65, p. 3.
-M.FABRE : Le droit à un procès équitable : étude de la jurisprudence sur l’application de
l’art. 6, §1. C.ED.H., J.C.P., éd. G, n°31-35, 29 juillet 1998, p.1425-1430.
-J-F. FLAUSS: La C.E.D.H., une nouvelle interlocutrice pour le justice des affaires :
R.J.D.A. 1995, p. 524.
-J-F. FLAUSS: Les nouvelles frontières du procès équitable in Les Nouveaux
Développement du procès équitable au sens de la C.E.D.H., éd. Bruylant 1996, p.81.
-P. FLEURIOT : L’origine et le bilan de l’exercice par la C.O.B. de son pouvoir de
sanction, in Le juge et le marché boursier, P.A., n° spéc.,15 juin 1994, p.102.
-A. FOUCAUD : Du droit boursier, de l’Europe et de l’harmonisation, A.G.E.F.I., 19 mai
1999, in collaboration avec C. LE NAIN.
-M.-A. FRISON-ROCHE :L’impartialité du juge, D.1999, chron., p. 53.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Vers un droit procéssuel économique, Justices, n°1, Justice et
économie, janvier-juin 1995, D3, p. 91.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Les garanties de la défense dans les procédures de sanction
devant la C.O.B., R.D.B.B., n°63, oct. 1997, p. 182.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Les droits de la défense en matière pénale, in Droit et libertés
fondamentaux sous la direction de R. CABRILLAC, M.A. FRISON, Th. REVET, D3, 3ème
éd..
-M.-A. FRISON-ROCHE :Les autorités de régulation confrontées à la C.E.D.H., P.A. 10
févr. 1999, p. 17.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Vers un droit processuel économique, Justices, n° 1, janv.-juin
1995, p. 91.
-J.-P. LE GALL : A quel moment le contradictoire ?, in Nouveaux Développements du
procès équitable au sens de la C.E.D.M., Bruyant, 1996, p.55.
109
-E. GARAUD : Droit des Affaires et droit d’homme, J.C.P., éd. E et Aff., n°25, 22 juin
2000, p. 986-991.
-Y. GAUDEMET : Le pouvoir de réformation de la C.A. de Paris dans le contentieux des
décisions du Conseil de la Concurrence, J.C.P., éd. G, n°50, 15déc.1999, p. 2241.
-B. GENEVOIS : Le Cons. Const. et l’extension des pouvoirs de la C.O.B. : R.F.D.A.,
1989, p. 671.
-Th. GONTARD : Le pouvoir de sanction de la C.O.B., A.G.E.F.I., 4, 5, 6, 7, juin 1996.
-Th. GONTARD : Le pouvoir de sanction de la C.O.B., M.T.F., juin 1996.
-S. GUINCHARD : Le procès équitable, droit fondamental ?, A.J.D.A., 20 juillet-10 août
1998, p. 191.
-H.-G. HUBRECHT : Sanctions administratives, J.Cl., adm. fasc. 202, n°10 et s.
-L. IDOT : Droit procéssuel économique, rev. gén. Des procédures n°2, avril/juin 1999, p.
269.
-L. IDOT : Droit procéssuel économique, rev. gén. Des procédures n°4, oct./déc. 1999, p.
711-746.
-D. JEAN- PIERRE et F. MELIN-SOUCRANIER : Le principe de l’égalité des armes
R.R.J., 1993, p. 489.
-KOERING-JOULIN: La notion européenne de tribunal impartial et indépendant : Rev.
sc. crim. 1990, p. 765.
-KOERING-JOULIN : La notion européenne de tribunal impartial et indépendant : Rev.
sc. crim. 1996, p. 369.
- KOERING-JOULIN : Le juge impartial : Justices 1998, n°10, p.1.
-M.-A. LAFORTUNE: L'application de la C.E.D.H. aux procédures de sanctions
administratives .R.D.B.B. n°76 nov./déc. 1999, p.217.
-A. LIENHARD : Remarques à propos de l’affaire Oury, Dalloz affaires du 25 févr. 1999.
-LOYRETTE : L’adaptation de la loi D.S.I. au droit interne, M.T.F., Haute finance, 7 août
1995.
-C. MAMONTORFF : La notion de pleine juridiction au sens de l’art. 6 de la C.E.D.H. et
des implications en matière de sanction administratives : R.F.D.A. 1999, p. 1004.
-F. MATSCHER : La notion de « tribunal » au sens de la C.E.D.H., in Les Nouveaux
Développement du procès équitable au sens de la C.E.D.H., éd. Bruylant, 1996, p.29.
-H. MATSOPOULOU :La présence du rapporteur du Conseil de la Concurrence au
délibéré, au regard de la C.E.D.H. :P.A. 1996, n°114, p.4.
110
-P. MAYER : Droit aux procès équitable et conflit des juridictions, in Les Nouveaux
Développement du procès équitable au sens de la C.E.D.H., éd. Bruylant 1996, p. 125.
-P. MERTENS : La tyrannie de l’ apparence, R.T.D.H. 1996, p. 640.
-F. MODERNE : Sanctions administratives et protections des libertés individuelles au
regard de la C.E.D.H. : P.A., 17 janvier 1990, p. 15.
-N. NIKOLOPOULOS : La procédure devant les juridictions, Rev. sc. crim.1989, p. 1.
-M. PRADA : in Bull. C.O.B. n°344, mai 2000.
-M. PRADA : La C.O.B. et la surveillance des marchés, E.N.A., mai 1996.
-J. PRADEL: La notion Européenne de tribunal impartial et indépendant selon le droit
français, R.C.S., 1990, n°4, p. 692.
-J. PRADEL et Ph. LEGER : Pour un procès pénal dans un délai raisonnable, D. 1982,
Chron., p. 105.
-R. RAMETTE : Le pouvoir de sanction administrative de la COB Bull. Joly Bourse
juillet-aout 1994 n°67 p .365.
-R. RAMETTE : La réforme de la C.O.B. et le cumul de pouvoirs normatifs, de sanction et
d’ investigation, Bull. Joly Bourse, nov.-dec. 1995, n°86, p. 483.
-D. REBUT : Le droit à un tribunal impartial devant la chambre criminelle, Rév. Sc. Crim.,
1998, p. 449.
-J . RIFFAULT- TRECA : La répression administrative (C.O.B. et Conseil de la
concurrence), Rév. Sc., crim.1996, p. 262.
-J.-H. ROBERT : La C.O.B. et les droits de l’homme, éd. Juris-Classeur Pénal, juin 2000,
p. 13.
-J.-H. ROBERT : Les sanctions administratifs et le juge Constitutionnel P. A. 8 janvier
1990, p. 42.
-N. RONTCHEVSKY: La C.O.B. à l'épreuve de l’exigence d'impartialité.Bull. Joly
Bourse, mars-avril 1999, p.129.
-M. SCOTTO : La France condamnée pour violation du droit à un « procès équitable », Le
Monde, du 16 déc. 1999, p. 13.
-Val. De SENNEVILLE : Les autorités administratives indépendantes verront-elles leur
pouvoir de sanction remis en cause par les juges ?, Les cahiers Entreprise et finance du 3
févr. 1999, p. 23.
-Val. de SENNEVILLE : Les autorités administratives indépendantes verront-elles leur
pouvoir de sanction remis en cause par les juges ? Les cahiers Entreprise et Finance,
l’A.G.E.F.I., mercredi 3 févr. 1999, p. 23.
111
-F. STASIAK : Les cumuls de sanctions en droit boursier, Bull. Joly Bourse, 1997, §20,
p.181.
-F. SUDRE: La Convention européenne des droits de l’homme, in J.C.P., éd. E, 2000, p.
511.
-F. SUDRE : Droit de la C.E.D.H. : J.C.P., éd. G, 1993, I, 3654.
-H. SURREL : La publicité des audiences et d’applicabilité de l’art. 6 de la C.E.D.H. aux
juridictions financières : R.F.D.A. 1999, p. 1022.
-C. TEITGEN COLLY : Sanctions administratives et autorités administratives
indépendantes, P. A. 17 janvier 1990, p. 25.
-F. TERRE : La réforme de la C.O.B., la confusion des pouvoirs, Vie judiciaire, 7 août
1989, p. 3.
-D. VATEL :Aspects judiciaires et juridictionnels du pouvoir de sanction de la C.O.B.,
Rév. Soc. 1994, p. 25.
-H. de VAUPLANE et O. SIMART: Délits boursiers: propositions de réforme. R.D.B.B.
n°61,mai/juin1997,p.85.
--A. VIANDIER : Le modèle français de relation entre le juge et les autorités de marché,
in Le juge et le marché boursier, P.A., n° spec., 15 juin 1994, p. 17.
-N. VIGNAL : La C.O.B. rappelée à l’ordre dans l’exercice de son pouvoir de sanction.
Bull. d’ actualité Lamy sociétés commerciales, mars 1999, p. 1.
-I. ZAKINE : L’exigence du contradictoire, in Les Nouveaux Développement du procès
équitable au sens de la C.E.D.H., éd. Bruylant 1996, p. 69.
-Cf. Ch. ZAZEKGES, Les conflits de politique criminelle, A.P.C., 1984, p. 39.
-L’intégrité du marché : intervention de M. PRADA, Président de la C.O.B., sur l’arrêt de la
C.A. de Paris du 7 mars 2000. Bull. C.O.B. n° 344, mars 2000, p. 11-22.
-Avis C.O.B., 16 févr. 1999 : J.O. 25 févr. 1999 : J.C.P., éd. E 1999, n° 11, p. 474.
-D. n° 90-263, 23 mars 1990, J.C.P., éd. E, 1990, III, 63748.
-Les droits de la défense à l’occasion d’une procédure de sanction administrative de la
C.O.B., Bull. C.O.B., n° 315, juillet-août 1997, p. 21.
-Les commissions indépendantes, administratives et juridictionnelles : la C.O.B. et le
Conseil de la Concurrence, les Annonces de la Seine du 24 oct. 1996.
-Décision du 28 juill. 1989, V.B. GENEVOIS, Le Conseil Constitutionnel et l’extension des
pouvoirs de la C.O.B., R.F.D.A. 1989, p. 671.
-Les droits de la défense à l’occasion d’une procédure de sanction de la C.O.B. en matière
de gestion pour compte de tiers : Bull. C.O.B., n°315, juill.-août 1997, p. 29 et s.
112
-Les droits de la défense à l’occasion d’une procédure de sanction administratives de la
C.O.B. : Bull. C.O.B., n° 315, juill.-août 1997, p. 13 et s.
-Vos droits à l’occasion d’une enquête de la C.O.B. : Bull. C.O.B., n° 315, juill.-août 1997,
p. 21.
-Communique C.O.B. du 31 juillet 1997 : Les droits de la personne dans les procédures
ouvertes par la C.O.B. : Bull. C.O.B., n° 315, juill.-août 1997, p. 5.
-La C.E.D.H. et le Droit des Affaires, dossier, en Droit et Patrimoine, n° 74, sept. 1999, p.
63-91.
-La C.O.B. et le C.M.F. aujourd’hui : Intervention du président de la C.O.B. devant
l’Association Française des Trésoriers d’Entreprise à l’occasion de sa Réunion Plénière
Annuelle.
-Assemblée Nationale, Commission des Finances, ce l’économie générale et du plan,
compte rendu n° 62, mercredi 21 juin 2000.
-décret n°2000-721 du 1er août 2000, J.O. n°177, p. 11939.
-décret n°2000-720 du 2 août 2000, J.O. n°177, p. 11938.
-Déc. 16 févr. 1999 : J.O. 25 févr. 1999, p. 2936 ; Modification règlement interne C.O.B. :
J.O. 25 févr. 1999, J.C.P., éd. G, 1999, III, 20050.
-Rapport annuel C.O.B., 1998, p. 98.
JOURNAUX -Pasc. BESSES-BOUMARD : La Cour d’appel de Paris remet en cause la procédure de
sanction de la C.O.B., Les Echos, du 12 juin 1997.
-G. CAVINET : L’organisation judiciaire doit aussi être pensée en termes d’efficacité,
interview du premier Président de la Cour de cassation, in Les Echos du 27 avril 2000,
propos recueillis par P. HENISSE, p. 6.
-A. CHARVERIAT :L’utilisation d’informations privilégiées sous contrôle, du sept. 1999.
-A. CHARVERIAT : La présomption d’innocence s’impose même à la C.O.B., Option
Fin., n°574, 6 déc. 1999, p. 25.
-M. DELMAS-MARTY : Il faut aller vers une définition du délit européen, Le Monde du
21 sept. 1999.
-Oliv. DUFOUR : La C.O.B. suspend l’exercice de son pouvoir de sanction, AGEFI du 21
mars 2000.
-P. FABRA : Autorité de marché ou pouvoir d’Etat ?, Les Echos du 21-22 janv. 2000, p. 1.
113
-M.-A. FRISON-ROCHE : La Cour de cassation met en cause le fonctionnement des
autorités de régulation, Le Monde, du 9 février 1999, p.18.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Le C.M.F. limite son pouvoir disciplinaire, Le Monde, du 8
juin 1999, p. 20.
-M.-A. FRISON-ROCHE : Les autorités de régulation françaises modifient leur
fonctionnement interne, Le Monde, du 14 sept. 1999, p. 24.
-M.-A. FRISON-ROCHE : La régulation économique : un droit en émergence, Le Monde,
du 16 nov. 1999, p. 22.
-M.-A. FRISON-ROCHE : La jurisprudence précise en quoi consiste le manquement
d’initié, Le Monde, du 14 déc. 1999, p.22.
-E. GUIGOU : Justice, du ministère des affaires au ministères du droit, Le Monde, 1er sept.
1999, p. 12.
-Ph. GUILLAUME : La C.O.B. va être connaître de revoir sa procédure de sanction, Les
Echos du 8 févr. 1999, p. 7.
-J.-Ph. L.: Le “gendarme” de la Bourse sanctionne Marie Brizard et son ancien président,
La Tribune du 2 sept. 1999, p. 9.
-J.-Ph. L.: Une nouvelle sanction de la C.O.B. annulée en appel, La Tribune du 5 juillet
1999.
-J.-Ph. L.: L’assemblée examine la réforme sur la présomption d’innocence, La Tribune du
24 mars 1999.
-A. LEPARMENTIER : La C.O.B. n’ a pas su imposer son autorité, Le Monde, du 4 oct.
1995, p. 16.
-Y. MAMOU : Publiés au « Journal officiel ». De nouveaux règlements précisent les
pouvoirs de la C.O.B., Le Monde, du 23 juillet 1990, p. 14.
-M. ORANGE : La Cour de cassation juge les méthodes de la C.O.B., Le Monde, du 1
février 1999, p. 16.
-M. ORANGE : La Cour de cassation condamne les procédures de la C.O.B., Le Monde,
du 8 février 1999, p. 16.
-M. ORANGE : La Cour de cassation condamne les procédures du Conseil de la
concurrence, Le Monde, du 7 oct. 1999, p. 20.
-M. ORANGE : La C.O.B. modifie son règlement intérieur pour se conformer à un arrêt de
la Cour de cassation, Le Monde, du 20 février 1999, p. 20.
-G. RAMEIX : Le point de vue du directeur général de la C.O.B., Le Figaro –
Economique, du 6 et 7 févr. 1999.
114
-Ph. RINCAZAUX : La Cour de cassation impose les règles du procès équitable aux
autorités de marché, Les Echos, du 26 févr. 1999.
-A. SALOMON : La C.O.B. tenue de devoir sa procédure, Le Fig-Eco du 6-7 févr. 1999.
-V. D. S. : La C.O.B. privée de son pouvoir de sanction, AGEFI du 3 févr. 1999.
-V. D. S. : La C.O.B. publie sa charte des droits de la défense, La Vie Judiciaire du 17 août
1997.
-GUENAELLE LE SOLLEU : Le pouvoir de sanction des autorités administratives
contesté, La Tribune, du 2 juillet 1999, p. 19.
-Chr. TARDIVON : Transparence et droit à la confidentialité, août- sept 1999, p. 19-20.
-Fr. VIDAL : La condamnation de la C.O.B. favorise-t-elle les entreprises ?, Option Fin.
Du 13 févr. 1999. -G.L.S. : Les autorités administratives entre soumission et indépendance, La Tribune du 4
juillet 2000.
-La C.O.B. devra revoir sa procédure de sanction, La Tribune, du 8 févr. 1999.
-L’impartialité des régulateurs en question, La Tribune, du 23 sept. 1999.
-La Cour d’appel annule une sanction de la C.O.B.., Le Figaro - Economique du 14 janv.
2000.
-La C.O.B. attend avec impatience la révision de se sanction administrative, Les Echos, 4
mai 2000
-Une jhg impartialité possible qui a fait chuter la C.O.B., arrêt du 5 février 1999, Les
Annonces de la Seine-Supplément au journal n°12, du 15 février 1999, p. 2-5.
-La Correspondance économique du 6 août 1997.
-Les conditions d’enquête de la C.O.B., in la Correspondance économique du 8 sept. 1997,
p. 1-8.
-V.D.S. : La C.O.B. privée de son pouvoir de sanction, A.G.E.F.I., le 3 févr. 1999.
-Figaro économique du samedi 6 févr. 1999.
-B.R.D.A. 6/00, n°2, p. 3.
-Sa procédure étant contestée dans l’affaire K.P.M.G., la C.O.B. suspend ses sanctions, Les
Echos 21 mai 2000, p. 32.
-La Cour d’appel relance la polémique sur la procédure de sanction de la C.O.B. : Les
Echos 10 et 11 mai 2000, p. 39.
-La C.O.B. et la surveillance des marchés, E.N.A. mai 1996.
115
JURISPRUDENCE. -C.A. Paris 7 mars 2000 :aff . K.P.M.G., n. Cl. DUCOULOUX-FAVARD, P.A., 22 mai
2000, n° 101, p. 4,Incompatibilité de la procédure de sanction pécuniaire de la C.O.B.
avec l’art. 6 de la C.E.D.H., J.C.P. éd. E et Aff., n°25, 25 juin 2000, p. 992-996. n. A.
COURET.
-C. Cass. 15 juin 1999,aff. C.O.B. c/ Cie générale d’Immobilier Georges-V, rev. soc., oct.-
déc. 1999, p. 844-850, n.VATEL. -Cass. Ass.Pl., 5 févr.1999, aff. OURY G.P. Mecr. 24, Jeudi 25 févr. 1999, p.8. concl.
LAFORTUNE, note DEGUELDRE, GRAMBLAT et HERBIERE, p.34-99 ; P.A. 10
févr. 1999, p.3- , n. P.M., Cl. DUCOULOUX-FAVARD : La C.O.B. et les droits de
l’Homme (à propos de l’arrêt de l’ass. pl. de la Cour de cass. du 5 févr.1999) » : ibid., p.14 ;
J.C.P., éd. 1999, n°22, p. 957, n. E. GARAUD ;J.C.P., éd. 1999, n°37, p. 1435, §17, obs.
J.-J. DAIGRE; J.C.P., éd. G, n°13, 31 mars 1999, p. 636-639 P n. H. MATSOPOULOU.
-Cass. com. 1er déc. 1998, OURY ,P.A. n°11 du 15 janv. 1999, p. 5, n. Cl. DUCOULOUX-
FAVARD ; R.D.B.B. : 1999, p. 32, n. M.-A. FRISON-ROCHE et M. GERMAIN ; J.C.P.,
éd. G, n°12, 24 mars 1999, p. 589-592 ; Lamy droit des Affaires févr. 1999, n°788. D. 1999,
inf. rap. p. 31;
C .Cass.., 15 janv. 1999, aff.DEBUS p. 5, n. Cl. DUCOULOUX-FAVARD, J.C.P., éd. E.,
1999, jur., p. 372, n. E. GARAUD ;JCP E et affaires n°3-20janv.2000 p.85-88 n. Séb.
ROBINEAU ; R.D.B.B. 1999, p. 124, obs. M.-A. FRISON-ROCHE et M.
GERMAIN ;Bull. Joly Bourse, sept. 1999, p. 495, n. N. RONTCHEVSKY; P.A. n° 206,
15 oct. 1999, p. 6, n. Cl. DUCOULOUX-FAVARD
-Cass. ass. Plén., 6 nov. 1998, arrêt n°430 P : D. Aff., 1999, p. 127, 2° espèce J. F.
-Cass. ass. pl. 4 nov. 1998, D 1999, J.-F. BURGELIN.
J.C.P. 1998, II, 10198, rapport P. SARGOS.
-C-Cass. com. 18 juin 1996 : aff. CONSO: -Dr. et patrimoine 10/1996, p. 85. n. J.-P.
BERTREL.Banque et Droit, juill.-août 1996, p. 34, obs. Fr.PELTIER et H. de
VAUPLANE ;R.D.B.B. 1996, p. 177, obs. M.-A. FRISON-ROCHE et M. GERMAIN ;R.J.
com. 1997, p. 65, n. D. VATEL, Bull. civ. IV, n° 179 ; D. 1998, somm. P. 65, obs. I. Bon-
Garcin Bull. civ. IV , n°115.
-Cass. com., 9 avr. 1996. Haddad c/ Agent judiciaire du Trésor (affaire Métrologie), D.
Aff. 1996, p. 606, R.J.D.A. 1996, n° 645, et couc. PINIOT, p. 438 ;R.D.B.B. 1996, p. 177,
116
obs ; M. GERMAIN et M.-A. FRISON-ROCHE ; P.A. 26 juin 1996, p. 29, n. Cl.
DUCOULOUX-FAVAR ;. Bull. Joly Bourse 1996, p. 305, n. F. PELTIER.
-C.A. Paris, 14 mai 1997 : aff.Cie immobilière Georges V ,J.C.P., éd. E 1997, II, p. 973
n. A. COURET;R.D.B.B. 1997, p. 120, obs. M. GERMAIN et M.-A. FRISON-
ROCHE ;Rév. des sociétés 1997, p ; 827, n. H. LE NABASQUE ;Bull. Joly Bourse 1997,
p. 647, n. N. RONTCHEVSKY; D. 1998, somm. p. 76, obs. Y. REINARD et p. 137, obs.
M.-L. NIBOYET;
-C.A. Paris 7 mai 1997 :aff. OURY J.C.P., éd. E, 1997, I, n°676, obs. A. VIANDIER et J.-
J. CAUSSAIN, spéc.n°14 ;R.D.B.B.1997, p.119, obs. M. GERMAIN et M.-A. FRISON-
ROCHE ; Banq. et Dr., mai- juin 1997, p.40,obs. H. de VAUPLANE.
-C.AParis 10 sept.1996 :aff. Oury c/ Agent judiciaire du Trésor .PA : 23 oct. 1996 n° 128
p. :La transparence du marché boursier passe par une bonne application du règlement
C.O.B.90-02 ; P.A. 23 oct. 1996, p. 22, n. Cl. DUCOULOUX-FAVARD.
-C.A. Paris, 26 avr. 1994 : G.P. 1994, 2, p. 648 n. JOBARD ;Contrats, Couc., Consom. 1994,
comm. n°94, obs. VOGEL
-C. A. Paris, 15 janv. 1993, aff. Derveloy : D. 1993, p. 273 n. DUCOULOUX-FAVARD ;
J.C.P. 1993, éd. E, II, 414, n. M. DOBKINE; G.P. 1993, 2, p. 354 n. J.P. MARCHI ;
Bull. Joly Bourse 1993, p. 148 n. A. VIANDIER ;Dr. sociétés 1993, n° 102 n. H.
HOVASSE ; Bull. C.O.B. juin 1993 p. 40, C.O.B. n°277,février 1994 p. 27, Bull. Joly
Bourse, 1994 p.121, §20, jh. N. DECOOPMAN.
Arrêts de la C.E.D.H.
-C.E.D.H. aff. Helle, 19 déc. 1997, Rec., p. 2911, § 46.
-C.E.D.H., 25 août 1997, aff. A.P., M.P. et T.P. c/ Suisse : G.P. 1998, 2, p. 483, obs. M.
PUECHAVY.
-C.E.D.H., 22 févr. 1996, aff. Berchet c/ Autriche, J.C.P. 1997. 1. 4000, n° 25, obs. F.
SUDRE.
-C.E.D.H. : aff. Grandinger c/ Autriche : Rev. sc. crim. 1996, p. 487, obs. KOERING-
JOULIN.
-C.E.D.H., 28 sept. 1995, aff. PROCOLA, série A, n°326: J.C.P. 1996, éd. G, I, 3910 §23.
-C.E.D.H., du 19 avril 1994, aff. VAN DE HURK c/ Pays-Bas, A, n°288/145.
-C.E.D.H., du 24 févr. 1994, aff. BENDENOUN, série A, n°284, § 33.
-C.E.D.H., 28 oct. 1993, aff. Imbroscia c/ Suisse, série A, n° 275.
-C.E.D.H., du 25 mai 1993, aff. KOKKINAKIS c/ Grèce, A, n°260.
117
-C.E.D.H., aff. Padovani c/ Italie, 26 févr. 1993, Rec. Cour E.D.H., série A, n° 257.
-C.E.D.H., 25 févr. 1993, aff. Funke, J.C.P. 1993. II. 22073, n. R. et A. GARNON.
-C.E.D.H., du 27 févr. 1992, aff. STENUIT c/ France, A, n°232.
-C.E.D.H., 30 oct. 1991, aff. Borgers, série A, n° 214 B.
-C.E.D.H.: aff. HAUSCHILOT c/ DANEMARK, 24 mai 1989, série A, n° 154.
-C.E.D.H., 24 mai 1989, aff. HARSCHILOT, série A, n° 154.
-C.E.D.H., 29 avr. 1988, aff. Belilos c/ Suisse : Série A, n° 132.
-C.E.D.H.: aff. F. c/ SUISSE, 18 déc. 1987, série A, n° 128.
-C.E.D.H., du 28 juin 1984, aff. CAMPBELL et FELL c/ R.U., A, n°80, § 76, affaire
relative à un comité de visiteurs, ayant statué sur un accusation en matière pénale.
-C.E.D.H., 26 oct. 1984, aff. DE CUBBER, série A, n° 86.
-C.E.D.H., 21 févr. 1984, aff. ÖZTÜRK, série A, p. 73.
-C.E.D.H., du 22 juin 1983, aff. LANGBORGER c/ Suède, A, n°32.
-C.E.D.H., 1er oct. 1982, aff. PIERSAK c/ Belgique, série A, n° 53.
-C.E.D.H., 23 juin 1981, aff. LE COMPTE, VAN LEUVEN et DE MEYERE c/
Belgique : série A, n° 43, G.P. 1981, 2, p. 775, obs. G. DELAMARRE.
-C.E.D.H., du 27 février 1980, aff. DEWEER, A, n°35.
-C.E.D.H., du 9 oct. 1979, aff. AIREY, a, n°32, § 4.
-C.E.D.H., 8 juin 1976, aff. ENGEL et autres c/ Pays- Bas, série A, n°27 cah. dr. Eur. 1979
n°2- 3, chron. p. 368.
-C.E.D.H., 8 juin 1976, aff. Engel c/ Pays-Bas, Rec. Cour E.D.H., série A, n° 22.
-C.O.B., 12 sept. 1996, Bull. C.O.B., févr. 1997, p. 3 à 151, Bull. Joly Bourse, mai-juin
1997, p. 379, n. N. RONTCHEVSKY.
118
TABLE DES MATIERES.
Abréviations : p. 4-5.
Plan :p. 6-9.
Introduction :p.10-18.
Corps du sujet :p.19-93.
Conclusion :p. 94-96.
Tableaux :p. 97-98.
Bibliographie :p. 99-111.
Table des matières :p. 112.
Annexe : Décret n°90-263 du 23 mars 1990.
Décret n°2000-720 du 1er août 2000.
Décret n°2000-721 du 1er août 2000.
Règlement intérieur de la C.O.B.
Ordonnance n°67-833 du 28 septembre 1967.