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L'HOSPITALITÉ EN VUE ET EN ACTE. LES MÉTHODES DE LA TRADUCTION ET LEUR LIEN À L'HERMÉNEUTIQUE ET À LA DIALECTIQUE Denis Müller Institut Catholique de Paris | Transversalités 2013/3 - N° 127 pages 31 à 41 ISSN 1286-9449 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-transversalites-2013-3-page-31.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Müller Denis, « L'hospitalité en vue et en acte. Les méthodes de la traduction et leur lien à l'herméneutique et à la dialectique », Transversalités, 2013/3 N° 127, p. 31-41. DOI : 10.3917/trans.127.0031 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Institut Catholique de Paris. © Institut Catholique de Paris. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Laval - - 132.203.227.62 - 20/04/2014 06h48. © Institut Catholique de Paris Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Laval - - 132.203.227.62 - 20/04/2014 06h48. © Institut Catholique de Paris

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L'HOSPITALITÉ EN VUE ET EN ACTE. LES MÉTHODES DE LATRADUCTION ET LEUR LIEN À L'HERMÉNEUTIQUE ET À LADIALECTIQUE Denis Müller Institut Catholique de Paris | Transversalités 2013/3 - N° 127pages 31 à 41

ISSN 1286-9449

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-transversalites-2013-3-page-31.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Müller Denis, « L'hospitalité en vue et en acte. Les méthodes de la traduction et leur lien à l'herméneutique et à la

dialectique »,

Transversalités, 2013/3 N° 127, p. 31-41. DOI : 10.3917/trans.127.0031

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L’HOspItALIté EN VuE Et EN ACtE. LEs MétHODEs DE LA trADuCtION Et LEur LIEN

à L’HErMéNEutIQuE Et à LA DIALECtIQuE

denis MüllerUniversité de Genève

il nous a été demandé, pour cette contribution, d’éclairer la problématiquede la traduction, dans ses liens avec la transmission et la tradition, en partantde l’approche de ces questions dans l’œuvre de Schleiermacher. À vrai dire,notre entrée dans la problématique doit beaucoup aux renouvellements quenous avons tentés ces dernières années à propos de la catégorie trop souventnégligée de tradition, négligence dont on peut penser qu’elle est particuliè-rement typique de la « tradition protestante », justement1. il n’y a pas depensée pure, au sens d’une pensée sans précédence, sans traditum, sansconditions de possibilité catégoriales et pas seulement transcendantales.déjà, au plan philosophique, la dialectique, chez Schleiermacher, nousavait alertés sur les illusions de la pensée pure, détachée de ses contingencestraditionnelles et langagières ; ce qui nous contraint à une relecture critiqueet plus différenciée de la question de l’universalité dans ses liens avec latraditionalité. Mais le phénomène de la traduction, apparemment technique,semble constituer un défi encore plus radical, comme si un nouveau passagedevenait nécessaire, nous conduisant de la thématique de l’identité, encoredominante dans la problématique de la traditionalité, à celle de l’altérité. Àlire et à mettre en regard d’une part les considérations de Schleiermacher et

1. denis Müller, L’éthique protestante dans la crise de la modernité. Généalogie,critique, reconstruction, Paris, cerf, 1999.

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d’autre part les réflexions contemporaines d’un ricœur, d’un derrida ou d’unaskani sur l’altérité, une ouverture devient indispensable à propos de l’atti-tude d’hospitalité sans laquelle aucune dialectique de l’altérité et de l’iden-tité ne saurait être dynamique et ouverte. À certains égards, la tentation detoute dialectique n’est-elle pas justement de viser l’articulation purementconceptuelle des concepts antinomiques ? Moins frontale que celle deKierkegaard, la critique schleiermacherienne de la conception dialectique dehegel n’en vise pas moins à éviter le même piège spéculatif et à donner droitaux exigences spécifiques de l’étrangeté et de l’altérité. un tel déplacementne conduit pas nécessairement, selon nous, à une révocation de la questionde l’universalité de la vérité2 ; il y va, bien plutôt, d’une nouvelle perceptionde la vérité comme universel concret, inscrit à même la texture de l’histoireet de la contingence.

À la fin de ses considérations très fines sur le « paradigme de la traduc-tion », Paul ricœur avait mis en évidence les liens étroits entre la traductionet l’hospitalité, au sein même du processus langagier : « amener le lecteurà l’auteur, amener l’auteur au lecteur, au risque de servir et de trahir deuxmaîtres, c’est pratiquer ce que j’aime appeler l’hospitalité langagière. c’estelle qui fait modèle pour d’autres formes d’hospitalité que je lui voisapparenter : les confessions, les religions, ne sont-elles pas comme deslangues étrangères les unes aux autres, avec leur lexique, leur grammaire,leur rhétorique, leur stylistique, qu’il faut apprendre afin de les pénétrer? etl’hospitalité eucharistique n’est-elle pas à assumer avec les mêmes risquesde traduction-trahison, mais aussi avec le même renoncement à la traduc-tion parfaite ? »3 comme nous le verrons, cette dialectique inévitable de lafidélité et de la trahison, modèle préféré par ricœur à l’opposition tradui-sible-intraduisible, s’aggrave et s’entrouvre au choc radical de l’étranger dèsl’instant seulement où le xenos peut aussi être ennemi, hostis. l’hospitalitéest une riposte pratique à l’épreuve de l’inimitié, à la violence de la guerreillimitée et achevée. Mais elle ne constitue pas selon nous une réponsepurement pragmatique, limitée pour ainsi dire au langage ; elle engage un

2. Voir nos articles : « confrontation des traditions et intensité de la vérité : une approchefrancophone et protestante du débat sur les communautarismes », Recherches de sciencereligieuse, tome 95/1, janvier-mars 2007, p. 41-60 ; « Vérité intensive et projet universel.légitimité et limites des processus de ré-identification », RETM, Hors-Série, septembre 2012,p. 83-92.

3. Paul ricœur, Le Juste 2, Paris, éditions esprit, 2001, p. 135-136. ce texte résulte d’uneleçon d’ouverture des cours donnée en 1999 à la Faculté libre de théologie protestante de Paris.

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corps-à-corps radical avec la question même de la vérité, en son horizonincontournable d’universalité ; l’hospitalité invite à repenser la pensée, àrefonder la théorie, plutôt qu’à simplement la déplacer ou la déporter enavant d’elle-même4.

dans sa Dialectique de 18225, Friedrich daniel Schleiermacher avaitaffirmé que ceux qui se comprennent le moins sont ceux qui parlent deslangues différentes. on retrouve cette thèse dans la conférence académiquedu même auteur intitulée Des différentes méthodes du traduire (1813)6.

de manière nullement étonnante et au contraire très bienvenue, on aurade nouveau affaire à cette thèse au cœur des réflexions d’un des meilleursconnaisseurs actuels de Schleiermacher, heinz Wismann, dans son essaiParler entre les langues7.

Schleiermacher avait notamment souligné la différence radicale entreDolmetschung et  Übersetzung8. Selon lui, cicéron interprète la penséegrecque plus qu’il ne la traduit9. le point de départ de Schleiermacherenvisage « une langue » mais des hommes « éloignés » (entfernt) (p. 30-31).

d’où la prise en compte d’un double écart, sur la terre et à travers lesépoques ; chaque langue varie à l’interne, selon les dialectes (Mundarten) etles siècles. déjà à ce niveau on a besoin d’une « traduction complète »,vollständige Dolmetschung ; même les contemporains ont besoin entre euxd’une «  semblable médiation  » (ähnliche Vermittlung). Schleiermacher

4. Pour le débat avec ricœur à ce sujet, voir ma contribution « Paul ricœur (1913-2005) :un philosophe aux prises avec la théologie », Revue Théologique de Louvain 37, 2006/2,p. 161-178, repris, sous une forme légèrement différente, dans mon recueil La théologie etl’éthique dans l’espace public, Berlin-zurich, lit Verlag, 2012, p. 97-113.

5. Friedrich daniel SchleierMacher, Dialectique, trad. fr., Genève, labor et Fides,p. 105. « introduction à la dialectique » (1833), p. 275 (= odebrecht p. 13), à propos de laséparation des langues ; le dialogue ne semble possible qu’entre gens parlant la mêmelangue.

6. Friedrich daniel SchleierMacher, Des différentes méthodes du traduire, Paris, Seuil,1999 (texte allemand et français) ; les chiffres entre parenthèses dans le texte renvoient à cetteédition; voir l’édition allemande: « über die verschiedenen Methoden des übersetzens » SW3, 2, 207-245 ; édition critique : SW, vol. 20, p. 67-93 (avec correspondance des autreséditions).

7. Paris, albin Michel, 2012. cf. d. Müller, « la séparation, le désir et le temps. étudecritique », RTP 144, 2012/iii, p. 173-182 ; et ma recension plus courte du même ouvrage,RETM 272, 2012, p. 112-114.

8. Voir note 1 p. 275 (Dialectique) SW 1 (Braun) p. 119-120.9. SW 3/2, 1838, p. 207-245 (texte de base utilisé par Berman/Berner).

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resserre alors la réflexion ; pour comprendre les discours de l’autre (dieReden eines Andern), nous avons besoin de traduire (übersetzen, on verraplus loin que l’übersetzen n’est pas mécanique, contrairement au dolmets-chen) : nous sommes exactement les mêmes (gleich) mais nous recourons àune autre sorte de « sens » (Sinn) et de sentiment (Gemüth, p. 32-33).

Pour parvenir à nous comprendre, à comprendre l’idée (Gedanke), nousdevons traduire. Paraphrasons: pour Schleiermacher, nous sommes toujoursdans la traduction. certes, nous ne sommes pas complètement « perdus dansla traduction »10, mais nous sommes immergés dans la nécessité herméneu-tique de devoir toujours traduire. non seulement la pensée secrète et étrangede l’autre, mais aussi ce qui sommeille en nous de non-transparence. nousdevons même nous traduire nous-mêmes, au fil de nos changements histori-ques et existentiels. nous ne sommes jamais offerts à une pleine transparence,mais avons l’obligation de nous coltiner avec la séparation fondamentale denotre être, notre déchirure permanente qui, pour changer de configuration, n’endemeure pas moins comme un horizon transcendantal de la compréhension.Pas d’herméneutique sans inscription dans les aléas du Missverständnis !

cela va en effet jusqu’à ce point extrême de tension et de provocation :même notre propre discours a besoin de traduction, après un certain temps !Même si l’hospitalité la plus profonde ouvre notre être à une altérité transfor-matrice, notre être lui-même ne nous devient jamais parfaitement élucidable.ce n’est pas seulement dieu qui demeure comme mystère, c’est notre êtremême qui, devant dieu, se révèle lui-même mystère.

ce qui compte dès lors, au plan pratique, c’est « une pure dispositionmorale » (eine rein sittliche Stimmung) (p. 32-33) : il faut que le sens (Sinn)reste ouvert à qui n’est pas coutumier (verwandt). il faut que le sens traverseles défis du non-sens et aborde les rives menaçantes et incertaines del’autre, de l’étrange.

admettons un instant, de manière plus terre-à-terre, d’en rester unique-ment au problème de la traduction d’une langue étrangère dans la nôtre ; ily a deux faces que Schleiermacher va développer dans ce discours : d’unepart le Dolmetschen, compris comme un acte commun, commercial,purement oral et mécanique ; d’autre part l’Übersetzen, s’exerçant dans lesdomaines de la science et de l’art, sous forme écrite.

10. Selon le titre du film très intéressant de Sofia coppola, Lost in translation.

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Même dans l’ordre de l’Übersetzen, il y a des textes purement narratifsou descriptifs qui relèvent du Dolmetschen. l’Übersetzer a toujours plusbesoin d’exercer sa supériorité dès lors qu’il entre dans la science et quel’expression de l’artiste ou du chercheur devient personnelle et idiosyncra-sique (eigentümlich (p. 36-37) ; le traducteur est obligé de s’élever au niveaudes « productions spirituelles  » (geistige Erzeugnisse) de l’art et de lascience.

Mais le problème central devient : comment le lecteur étranger peut-ilavoir le même accès à l’auteur et à son œuvre que le lecteur de la langued’origine? dans le domaine des arts et de la vraie science, là où se joue latraduction authentique la plus difficile, l’Übersetzen, il n’y a pas seulementde la compréhension d’une langue étrangère, mais du dialogue exigeant etmystérieux le plus intense avec l’autre comme autre, en tant qu’il pensecomme moi et peut-être mieux que moi. c’est une question d’ouverture,d’offre ou de dédicace de soi à l’autre.

Visiblement Schleiermacher ne croit pas à la possibilité d’une langueuniverselle : « nous ne tiendrions en aucun cas pour une amélioration qu’iln’y ait qu’une seule langue pour tous. car seule la somme de ces variationsépuise la pensée de l’esprit humain » (Introduction à la dialectique, 1833,p. 277 = p. 16). il part de la langue (allemande, française, anglaise) puisadmet une meilleure compréhension dans une « aire linguistique » (Sprach-kreis) comme celle qui repose sur la reprise du latin. la pensée pure nesemble possible que dans la même langue ou à la rigueur dans une mêmeaire linguistique.  et il en tire la conséquence apparemment irréfutable :« nous sommes dans l’obligation de renoncer à toute prétention à la validitéuniverselle » (ibid., p. 278 = p. 18).

cette conclusion est assez paradoxale si on remonte au point de départ dela Dialectique, comprise comme « l’exposition des principes pour la conduitedu dialogue conformément à l’art dans le domaine de la pensée pure » (ibid.,p. 267 = p. 5). qu’est-ce donc que cette pensée pure pour Schleiermacher?elle n’est justement pas que langagière, mais touche, de la manière la plusgénérale qui soit, à la représentation (Vorstellung), référée via des impressionssensibles et des images aux objets mêmes, aux faits comme tels. elle n’estpas pure au sens d’abstraite, mais en tant qu’elle intègre l’activité imagina-tive (die Tätigkeit der Phantasie). comme telle, cette pensée pure – qui nese limite pas elle-même à n’être que représentation – a pour objet elle-même, et non pas quelque chose qui lui serait extérieur (comme c’est le cas

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pour la pensée pragmatique) et elle fait preuve de persistance dans le temps,à la différence de la pensée artiste, limitée aux instants fugaces.

qu’en est-il de la place du conflit ? Serait-il seulement possible dans unemême langue, entre gens certains de se comprendre? il importe ici d’élargirle champ de la traduction, en sa spécificité langagière, à celui de l’inter-compréhension, qui pointe vers la dialectique même de la pensée. dans le§ 3 de l’introduction à la Dialectique, le conflit tient sa condition de possibi-lité dans le fait que la pensée humaine (indépendamment de la langueparticulière utilisée) porte sur l’être même ; le conflit naît du fait que deuxindividus singuliers discutent sur la même chose. il est donc irréductible,ontologiquement parlant, et ne se laisse pas réduire à la seule question de latraductibilité.

au § 4, Schleiermacher ajoute que la pensée pure n’a jamais de commen-cement absolu pour un individu. nous sommes confrontés anthropologi-quement à la précédence de la langue, mais aussi de la tradition, comme leprolongeront Gadamer et Macintyre au xxe siècle.

on pourrait espérer, en parvenant au § 5, que la pensée pure seraitcapable de surmonter le conflit, tant au niveau de l’obstacle représenté parla différences langues qu’à celui du rapport aux choses elles-mêmes. or iln’en est rien. l’individu reste livré à son propre choix. nous devons trouverla solution dans une autre direction. non pas vers le dépassement de lasituation de conflit par la pensée pure elle-même, mais dans l’hospitalitépropre aux peuples dans leur différence même.

en fin de compte, malgré l’échec de tous les projets d’une langue philoso-phique universelle (y compris celui de leibniz), Schleiermacher croit en effeten la possibilité éthique et normative d’une noble « hospitalité des peuples »(Gastfreiheit der Völker)11. c’est ainsi que se distingue, plus clairement, unevalidité universelle, qui serait de pure équivalence, et l’hospitalité, seulecapable d’une authentique ouverture, d’un dépassement du malentendu quine soit pas le résultat d’une abstraction ou d’une fuite en avant.

christian Berner a très bien résumé les enjeux à la fois herméneutiques,dialectiques et éthiques de la traduction :

11. Voir l’article de Schleiermacher, « Sur l’idée leibnizienne, encore inaccomplie,d’une langue philosophique universelle » (1831), in : Des différentes méthodes du traduire,op. cit, p. 105-106.

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Pour l’herméneutique, traduire est un cas particulier de l’acte decomprendre ;

Pour la dialectique, penser et parler sont intimement liés : « la traductionest indispensable au dialogue qui construit le savoir en édifiant un systèmede concepts correspondant au réel » ;

« Pour l’éthique, la traduction conditionne les échanges et la communi-cation, fondateurs des communautés qui sont l’objet de l’éthique. »12

au cœur de la méditation schleiermacherienne sur la traduction et sur lacompréhension, nous retrouvons la problématique spéculative et éthique del’altérité.

dans son article « altérité » du Dictionnaire encyclopédique d’éthiquechrétienne13, le théologien allemand de Genève hans-christoph askani, quise penche depuis des années sur les problèmes de la traduction et de l’inter-compréhension langagière et herméneutique14, a souligné des points particu-lièrement pertinents pour ce qui touche à la présente problématique.

le terme « altérité » situé dans ce contexte peut être entendu comme l’indi-cation d’un programme – paradoxal – de non-conciliation. Pourquoiparadoxal? a) Parce que la non-conciliation ne saurait jamais être souhaitée;et b) parce que l’altérité, l’apparition, l’irruption d’autrui est justement cequi se soustrait à tout programme, à toute intentionnalité. d’où ce bascule-ment fondamental de la philosophie elle-même. il vient d’une impossibilité :comment rendre compte de ce qui ne sera jamais pris en compte suffisam-ment? comment rendre justice à cela – celui ! – qui, dans son advenir, danssa proximité – déjà trop grande, déjà trop proche (et dans son éloignementdéjà trop loin) – fait éclater la catégorie même de la justesse, de l’équilibre?(p. 107).

12. christian Berner, « un penchant à traduire », in : Des différentes méthodes dutraduire, op. cit., p. 12.

13. laurent leMoine, éric Gaziaux et denis Müller dir., Dictionnaire encyclopédiqued’éthique chrétienne, Paris, cerf, 2013, p. 106-122. les chiffres entre parenthèses dans le texterenvoient à cet article.

14. Voir son livre Das Problem der Übersetzung – dargerstellt an Franz Rosenzweig. DieMethoden und Prinzipien der Rosenzweigschen und Buber-Rosenzweigschen Übersetzungen,Tübingen, J. c. B. Mohr (Siebeck), 1997. Sur la distinction de Schleiermacher, cf. p. 119-124 et 126-131. la vraie traduction, à la différence du Dolmetschen, culmine dans lareconnaissance de l’étrangeté de l’autre (129).

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la traduction révèle, à notre sens, le mystère de l’altérité tel qu’il sedonne à saisir dans l’exposition au comprendre. c’est dire que l’autre n’estpas saisi ou compris comme tel dans le phénomène de la traduction, maissignifié dans sa transcendance, dans son irréductibilité foncière.

il nous faut donc revenir à Schleiermacher. Son mérite est d’avoir montréque la traduction, loin de constituer un simple problème technique ou mêmecommercial (le Dolmetschen, la transcription ou la transposition), pose unequestion proprement philosophique, celle de l’accueil de l’autre ou del’hospitalité entre les gens et même entre les peuples. c’est cela que visel’Übersetzen. l’éloignement (Entfernung) ou la séparation (Trennung)demandent à être surmontés, afin que les êtres humains puissent réellementse rencontrer et se connaître15. Mais déjà à se limiter à la question de latraduction d’une langue étrangère dans la nôtre, nous faisons cette expériencede la différence entre la transcription technique et la traduction comme telle :la transposition, simple truchement, a quelque chose de mécanique, que latraduction ne saurait jamais avoir (34-35). c’est que la traduction oblige àenvisager à la fois le monde de l’auteur et le monde de sa langue, elle estdonc confrontation directe et incontournable avec l’altérité. le traducteur estcontraint d’entrer dans le monde étrange et étranger de la production(Erzeugnis) de l’art et de la science (36-37), il ne peut pas se contenter d’unesimple transposition technique de terme à terme. on retrouve bien là lasubtilité que Schleiermacher a conférée, en herméneutique, à l’interprétationpsychologique. avec le traduire, on entre de plain-pied dans le domaine dela pensée, et la langue elle-même participe de cette pensée de la manière laplus intime, jusqu’à dominer celui qui parle, comme on le voit bien lorsquecette langue est d’autant plus éloignée de la nôtre (40-41). l’homme quipense librement est à la fois porté par sa langue et conduit à la transformer.un lien puissant unit ainsi la langue et la pensée, ce que le truchementmécanique de la traduction commerciale tend à occulter.

Schleiermacher ajoute que c’est cette coappartenance profonde de lalangue et de la pensée qui donne aux productions de l’esprit leur durabilité.on n’oublie pas une production culturelle lorsqu’elle a elle-même contribuéà changer le langage et la culture (on pourrait citer à titre d’exemple la tracelaissée sur la langue et la pensée françaises par le passage au français chez

15. Des différentes méthodes du traduire et autres textes, op. cit., p. 30-31 (les chiffresentre parenthèses renvoient à cette édition bilingue (les pages paires donnant l’originalallemand).

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rabelais ou calvin). l’effort requis ici concerne aussi bien l’esprit de lalangue que la sensibilité (Gemüth) de l’auteur (42-43).

ce lien entre la langue et la pensée, déjà difficile à saisir dans notreculture propre, devient d’autant plus difficile lorsqu’il s’agit de comprendreun texte ou un discours étrangers. ainsi donc, Schleiermacher nous indiqueque l’étrangeté de l’autre est encore plus étrangère à nous-même que l’étaitdéjà, au sein de notre propre identité, la différence entre la langue et lapensée. l’altérité véritable est une radicalisation d’une expérience dont lesujet a déjà connaissance par lui-même!

la difficulté est la plupart du temps escamotée ou contournée par des pis-aller, comme le sont principalement la paraphrase et l’imitation (44-45).Plutôt que de nous coltiner avec l’altérité profonde à laquelle toute véritableentreprise de traduction nous confronte, nous fuyons en somme dans leplagiat, ce qui nous permet d’éviter le choc un peu fou, déstabilisant en toutcas, avec l’impression (Eindruck) de l’autre sur soi. le plagiat se révèle ainsinon seulement comme vol de la production spirituelle de l’autre, maiscomme incapacité à se saisir soi-même de son originalité, à s’élever à lahauteur de sa provocation.

Schleiermacher nous entraîne alors dans une méditation complexe sur lesaléas de l’authentique traduction, sans cesse ballotée entre la lettre et le sens(50-51) et obligée de faire des choix drastiques et dramatiques entre lafidélité à l’original (en son sens mais aussi en sa musique propres !) et lacohérence originale de la langue d’arrivée. la sensation de l’étrangeté (dasGefühl des fremden) demeure extrêmement vive et pour tout dire insurmon-table (62-63).

Toute vraie traduction se distingue donc d’une simple recopie littérale del’original, qui deviendrait totalement incompréhensible pour le lecteurd’arrivée. il s’agit à la fois de se hisser à la hauteur du sens de l’original etd’exprimer ce sens dans cette autre langue qui est la nôtre.

Si l’idéal de la traduction la plus parfaite de la langue étrangère dans notrelangue se heurte ainsi à une imperfection répétée – ce qui justifie la pluralitédes traductions d’un même texte – il existe cependant aux yeux de Schleier-macher une méthode opposée, consistant, cette fois-ci, à traduire le textecomme si l’auteur étranger parlait lui-même parfaitement notre langue (70-71). dans cette manière de faire, c’est la langue d’arrivée, et la pensée quil’accompagne de fait, qui deviennent en quelque sorte le référentiel spirituel

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du traducteur. il n’est plus question de traduire l’auteur classique, ou ancien,dans notre langage moderne, mais de faire parler cet auteur comme unmoderne, s’adressant directement à notre temps. on voit bien que ce qui étaitperdu dans la première méthode par la distance, propre à l’étrangeté, estrécupéré ici moyennant une appropriation, qui risque, elle, d’occulter toutedistance. la conclusion à laquelle parvient ici Schleiermacher ne laisse pascependant d’être plus romantique que moderne : l’idéal cosmopolitique detransparence tendrait à faire oublier qu’aucun homme ne peut appartenirvéritablement à deux langues (78-79). c’est cela sans doute qui explique que,pour Schleiermacher, la deuxième méthode de traduction est nettementplus rare et plus exceptionnelle ; elle peut même devenir capricieuse etarrogante, illusoire pour tout dire, ce qui conduit clairement Schleiermacherà lui préférer la première, dont on a bien vu qu’elle signale beaucoup mieuxl’énigme de l’altérité qui préside à toute entreprise de traduction authentique.Schleiermacher va même jusqu’à prétendre que les allemands se sont vouésà la traduction généralisée pour une double raison, le respect pour l’étranger(Achtung für das fremde) et la nature de médiateur (vermittelnde Natur) dupeuple allemand comme tel (90-91).

dans sa conclusion, il montre bien que la traduction oblige à retrouverla rigueur de la langue, en évitant le bavardage (Plaudern, 92-93) ! ainsi,l’exigence de la traduction véritable reconstruit l’identité plus forte dutraduisant, via la médiation bienfaisante et roborative de l’autre !

nous nous démarquons pourtant de l’idéalisme romantique de Schleier-macher sur un point précis. nous ne croyons pas que l’hospitalité commetelle puisse être posée comme télos de la traduction et de l’inter-compré-hension, sans que soit énoncé dans la foulée l’hostilité inhérente à toutprocessus d’accueil.

c’est Jacques derrida qui, de la manière la plus radicale, a souligné cetteinterférence factuelle, et pas simplement sémantique, de l’hostilité au cœurde l’effort même d’hospitalité16.

la proximité et la différence des propos de derrida, quand on a dansl’oreille les propos anciens de Schleiermacher, sont frappantes. « la question

16. Voir Anne Dufourmantelle invite Jacques Derrida à répondre de l’hospitalité, Paris,calmann-lévy 1997 ; Mohammed SeFFahi, Manifeste pour l’hospitalité. Autour de JacquesDerrida, Grigny, Paroles d’aube, 1999 : Jacques derrida, Les yeux de la langue. L’abîmeet le volcan, Paris, Galilée, 2012.

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de l’hospitalité commence là, écrit derrida : devons-nous demander àl’étranger de nous comprendre, de parler notre langue, à tous les sens de ceterme, avant et afin de pouvoir l’accueillir chez nous ? S’il parlait déjànotre langue, avec tout ce que cela implique, si nous partagions déjà tout cequi se partage avec une langue, l’étranger serait-il encore un étranger etpourrait-on parler à son sujet d’asile ou d’hospitalité ? » (dufourmantelle,p. 21). un tel paradoxe doit être évalué. l’étranger demeure étranger, dansl’hospitalité même. ce n’est pas l’accueil du même, mais l’accueil del’autre, dans sa différence irréductible. la traduction ne consiste pas àrapprocher l’un et l’autre comme deux mêmes, mais à les obliger à sereconnaître comme autres. Soi-même comme un autre signifie bien « commeun autre véritablement autre » et non « comme un autre soi-même ». latraduction échappe au simple jeu de miroirs, pour ressembler plutôt à undécentrement constant. l’hospitalité est exigeante, puisqu’elle contraint à selaisser déplacer, surprendre, décentrer. l’hospitalité est metanoia. elle a lieuà propos du conflit, non à sa marge. elle traverse, subvertit, éclaire lacondition conflictuelle de la mécompréhension dans laquelle nous noustrouvons d’entrée de jeu, dans toute situation de communication.

denis Müller

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