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Mémoires du Puy-de-Dôme

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Page 1: Mémoires du Puy-de-Dôme

Mémoires du Puy-de-DômeBrochure réalisée avec le soutien financier de l’Office National des Anciens

Combattants et Victimes de Guerre (ONAC).

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Service départemental de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre du Puy-de-dôme - Commission Mémoire Cité Administrative - Rue Pélissier - B.P. 151 - 63034 Clermont-Ferrand Cedex 1 - 04 73 98 39 45

Page 2: Mémoires du Puy-de-Dôme

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1939

1er septembre Entrée des troupes allemandes en Pologne. Mobilisation générale en France.

3 septembre Déclaration de guerre de l’Angleterre et de la France à l’Allemagne.

23 novembre Repli à Clermont-Ferrand de l’Université de Stras-bourg.

1940

10 mai La Wehrmacht attaque la France.

14 juin Les Allemands entrent dans Paris.

20 juin Mutinerie à la prison de Riom.

16 juin Philippe Pétain est appelé par le président de la IIIe République, Albert Lebrun, à former le gouvernement.

17 juin Philippe Pétain demande l’armistice ; il est signé le 22 juin.

18 juin De Londres, à partir de la BBC, le général de Gaulle appelle les Français à continuer la lutte contre les forces de l’Axe.

21 juin Entrée des Allemands à Clermont-Ferrand. Instauration du couvre-feu.

28 juin Départ des Allemands.

29 juin Le gouvernement décide de s’installer à Clermont-Ferrand. Cérémonie des couleurs, place de Jaude.

1er juillet Départ du gouvernement pour Vichy.

3 juillet Le gouvernement de Pétain s’installe à Vichy.

Chronologie des événements des années 1939 à 1945

Le Puy-de-Dôme pendant la Seconde Guerre Mondiale

Page 3: Mémoires du Puy-de-Dôme

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4 juillet Prise de fonctions du général de Lattre de Tassigny, commandant la 13e région militaire du Puy-de-Dôme. Il crée l’école des cadres à Opme.

2 août Le tribunal militaire de la 13e division condamne à mort par contumace le général de Gaulle pour trahison, at-teinte à la sûreté de l’État et désertion à l’étranger en temps de Guerre.

20 août Jean Zay est interné à la prison militaire de Clermont-Ferrand. Les responsables de Vichy l’accusent d’avoir voulu constituer un gouvernement libre en Afrique du Nord.

31 août Arrestation de Pierre Mendès France ; il est conduit à la prison militaire de Casablanca.

6 septembre Le général Cochet, ancien commandant des Forces aériennes de la Ve armée lance de la Haute-Loire son premier appel à la Résistance.

1er octobre Généralisation des tickets d’alimentation.

4 octobre Le tribunal militaire permanent de la 13e division mili-taire, siégeant à Clermont-Ferrand, condamne Jean Zay à la déportation à vie et à la dégradation militaire, pour désertion en présence de l’ennemi.

12 octobre Transfert de Pierre Mendès France à la prison militaire de Clermont-Ferrand.

3 octobre Loi portant sur le statut des Juifs, décrétée et signée par Philippe Pétain.

24 octobre Entrevue Hitler-Pétain à Montoire (Loir-et-Cher).

1941

7 janvier Après avoir été transféré, le 4 décembre 1940, au fort Saint-Nicolas, à Marseille, Jean Zay est incarcéré au quartier spécial de la maison d’arrêt de Riom.

22 janvier Procès des meneurs de la mutinerie de la prison de Riom.

5 mars Arrivée en gare de Clermont-Ferrand du premier train de prisonniers rapatriés.

16 avril Alerte aérienne à 23 h 30.

9 mai Pierre Mendès France, inculpé de désertion devant le tribunal militaire de Clermont-Ferrand, est condamné à six ans de prison.

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15 mai Création du mouvement de résistance "Front National" par les communistes.

21 juin Évasion de Pierre Mendès France de l’hôpital de la Providence, annexe de l’hôpital militaire de Clermont-Ferrand.

22 juin L’Allemagne attaque l’URSS.

23 juin Création d’une Direction régionale des questions juives à Clermont-Ferrand.

7 juillet Recensement des réfugiés.

27 juillet Délai de rigueur pour le recensement des Juifs.

Août Création du groupe armé "Francs-Tireurs et Partisans" par Charles Tillon.

9 août Remise de son nouveau drapeau au 92e RI.

27-28 sept. Rassemblement à Volvic des Chantiers de la jeunesse d’Auvergne avec participation des autres mouvements de jeunesse.

29 novembre Arrestation de 11 communistes.

1942

19 février Ouverture du procès de Riom où sont jugés : Léon Blum, ancien président du Conseil du Front populaire ; Édouard Daladier, ancien ministre de la Guerre et pré-sident du Conseil de 1938 à 1940 ; Paul Reynaud, ancien président du Conseil en 1940 ; Georges Mandel, ancien ministre de l’Intérieur ; le général Maurice Gamelin, an-cien chef d’état-major ; Guy La Chambre, ancien minis-tre de l’Air ; Robert Jacomet, ancien contrôleur général de l’administration des armées.

14 avril Suspension du procès de Riom.

2 juin Les Juifs français devront se faire recenser "au bureau spécial de l’intendant de police".

3 juin Recensement des Juifs étrangers.

22 juin Laval instaure la relève.

30 août Rassemblement à Gergovie. Pétain mêle la terre appor-tée de tous les départements à l’occasion du deuxième anniversaire de la Légion des combattants. 30 000 lé-gionnaires sont réunis place de Jaude.

8 novembre Débarquement des Alliés en Afrique du Nord (opéra-tion Torch).

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11 novembre Les troupes allemandes occupent la zone sud. Arrestation du maréchal de Lattre à Riom.

Henry Ingrand est nommé chef régional du mouvement "Combat" pour la région R6.

27 novembre Sabordage de la flotte française à Toulon.

Occupation de la caserne d’Assas par la Wehrmacht. Démobilisation des casernes et établissements militai-res. Occupation de la base aérienne d’Aulnat.

28 novembre Démobilisation de l’armée d’armistice.

28 décembre Naissance de l’ORA sous l’impulsion du général Frère.

1943

9 janvier Condamnation, par le tribunal d’État de Lyon, du géné-ral de Lattre à 10 ans d’emprisonnement.

30 janvier Création de la Milice.

16 février Loi instituant le Service du travail obligatoire (STO).

1er mars Création des Mouvements Unis de la Résistance (MUR).

27 mai Première réunion du Conseil national de la Résistance (CNR), dirigée par Jean Moulin.

3 juin Création à Alger du Comité français de Libération na-tionale (CFLN).

13 juin Arrestation du général Frère, chef de l’ORA à Royat.

8 juillet Événements de la Rapine : arrestations des résistants qui interceptaient les messages radio entre les armées allemandes et le maréchal Pétain.

14 juillet Manifestation de 1.500 Clermontois et étudiants de Strasbourg, de la place de Jaude à la cathédrale de Clermont-Ferrand.

23 juillet Arrestation de Marcel Michelin. Mort en déportation le 21 janvier 1945.

31 juillet Sabotage de l’imprimerie du journal Le Moniteur, à Clermont-Ferrand, par Camille Leclanché et Raymond Labaune.

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3 août Évasion de seize patriotes, en gare de Pontmort, orga-nisée par les MUR.

10 août Établissement du couvre-feu.

28 août Alexandre Varenne décide d’arrêter la parution de La Montagne, qui reparaîtra le 15 septembre 1944.

2 septembre Attaque du maquis des "Ardents" au "Bac-de-Montmeyre" (Ceyssat) par la Gestapo.

2-3 septembre Évasion du général de Lattre de la maison d’arrêt de Riom.

1er octobre Arrivée à Chamalières et Clermont-Ferrand du Sonderkommando de l’Hauptsturmführer Geissler.

12 octobre Évasion de la maison d’arrêt de Clermont-Ferrand de Robert Janthial, de Georges Gance et de Camille Leclanché.

26 octobre Arrestation de Nestor Perret (Serge), responsable des MUR pour Clermont, à son domicile. Après de nom-breuses tortures, il décède dans sa cellule.

25 novembre L’Université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand subit une rafle englobant la presque totalité des uni-versitaires alsaciens et auvergnats. Le professeur Paul Collomp trouve la mort.

9 décembre Peter Dmytruck (Pierre le Canadien), du 1er Corps franc d’Auvergne, est tué en combattant aux Martres-de-Veyre.

16 décembre Attaque de l’hôtel du Globe, rue Montlosier, par les FTP du groupe Gabriel Péri.

16 décembre La Wehrmacht et la Gestapo, aux ordres de Geissler, investissent Billom. 200 personnes sont arrêtées.

20 décembre 20 patriotes arrêtés à Billom et dans l’agglomération clermontoise sont fusillés au stand de tir du 92.

27 décembre Combats FTP de Sarpoil, près de Parentignat.

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1944

9 janvier 130 étudiants alsaciens détenus à la prison militaire alle-mande du 92 sont déportés en Allemagne.

15 janvier Tentative de sabotage des usines Michelin. Son échec entraînera le bombardement du 16 mars.

20 janvier Première réunion du Comité départemental de Libération présidé par Émile Coulaudon (Gaspard).

28 janvier Exécution du commandant Madeline dans la prison mi-litaire allemande du 92.

9 février Sept FTP, en gare de Clermont-Ferrand, s’emparent de plus de 1 003 millions appartenant à la Banque de France.

16 février Émile Coulaudon est nommé chef régional action pour la région R6.

1er mars Investissement par la Luftwaffe et la Gestapo de la com-mune de Volvic, après l’attaque du QG du 1er Corps franc à Lespinasse.

8 mars Attentat, rue Montlosier, contre un détachement de la Wehrmacht, par la 1re compagnie FTP du Puy-de-Dôme.

9-10 mars Bombardement par la RAF de l’aérodrome d’Aulnat.

16 mars Bombardement des usines Michelin par quatre Lancaster de la RAF.

5 avril À la Brasserie des Sports, à Clermont-Ferrand, plusieurs chefs de la Résistance, dénoncés, sont pris au piège par la Gestapo et la Milice. La brasserie est incendiée, les propriétaires – les époux Lafarge – sont déportés.

25-26 avril Le corps franc dit "Les Truands" du capitaine Mazuel détruit cinquante pylônes, privant Clermont-Ferrand d’électricité.

27 avril L’hôtel International du Mont-Dore est transformé en centre d’internement par le préfet.

29-30 avril Bombardements par la RAF des installations de la base école allemande et de l’AIA à Aulnat.

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2 mai 3e réunion du Comité régional de Libération. Émile Coulaudon devient chef régional FFI. La concentration du mont Mouchet est organisée.

13 mai Arrestation en gare de Clermont-Ferrand, puis suicide de Jacques Bingen ("Baudet", "Necker", "Cléante"), dans les locaux du SD, 2 bis avenue de Royat. Il était le suc-cesseur de Jean Moulin.

26 mai Arrestation de Mgr Piguet, évêque de Clermont.

2 juin Première attaque du mont Mouchet.

6 juin Débarquement des Alliés en Normandie.

10 juin Deuxième attaque du mont Mouchet.

11 juin Troisième attaque du mont Mouchet. Les FFI sont obli-gés de se replier.

12 juin Geissler est abattu à Murat.

13 juin Une colonne de blindés allemande pille et incendie le village d’Esteil, près de Jumeaux, dans sa totalité.

13-14 juin Ratissage de la région du mont Mouchet par la Wehrmacht.

20 juin 1944 Des miliciens de Joseph Darnand viennent chercher Jean Zay à la prison, sous le prétexte d’un transfert à la pri-son de Melun. Ils lui laissent entendre ensuite qu’ils sont des résistants déguisés qui ont pour mission de lui faire rejoindre le maquis. Ils l’assassinent dans un bois, près d’une carrière abandonnée, au lieu-dit "Les Malavaux", à Molles, dans l’Allier.

21 juin La Gestapo et la Milice investissent Gerzat et procèdent à des arrestations. 33 personnes sont déportées. Il y aura cinq survivants.

22 juin Départ d’un convoi d’internés vers Compiègne, d’où ils seront déportés.

30 juin Bombardements de Saint-Floret par la Luftwaffe.

13 juillet 24 résistants sont fusillés à Orcines.

20 juillet Exécution d’Anne-Marie Menut, épouse de Max-Roger Menut.

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15 juillet 24 résistants sont fusillés à Bourg-Lastic.

21-22 juillet Rafles en ville. Des miliciens de Nîmes, de Clermont-Ferrand et des GMR encerclent les cités ouvrières de la Plaine. 200 arrestations, 25 personnes partiront tra-vailler dans les usines autrichiennes.

24 juillet 16 détenus s’évadent de l’hôtel-Dieu.

30 juillet Combats de Chaméane.

11-14 août Combats du Lioran (Cantal).

13 août 114 détenus sont libérés de la prison de Riom après un coup de main organisé par Jean Bac, dit "commandant Lenoir".

15 août Débarquement des Alliés en Provence.

20 août Déportation des détenus de la prison militaire alleman-de du 92, dans la soirée.

À 18 h 40, départ du dernier convoi de déportés de Clermont-Ferrand.

25-26 août Libération de la ville de Thiers par les armes.

27 août Entrée des FFI dans Clermont-Ferrand : libération de la capitale régionale.

24 septembre Découverte d’un charnier à l’AIA et au 92.

1945

8 mai Capitulation sans condition de l’Allemagne – Fin de la guerre en Europe.

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Préambule sur les origines de la Seconde Guerre Mondiale

Les traités de paix signés après la Première Guerre Mondiale, avaient suscité rancœurs, frustrations et désirs de reconquête chez les peuples Allemands, Autrichiens, Hongrois et Bulgares. La crise de 1929 avait conduit les différents états à adopter des mesures protectionnistes et à se placer en position de rivalité les uns par rapport aux autres. Alors que l’agressivité des démocra-ties se situe sur le plan économique, les dictatures fascistes vont adopter une stricte autarcie et, naturellement, concevoir leur défense et leur expansion en termes militaires. Mais partout, les politiques d’armement sont mises en place efficacement pour sortir du marasme économique. Ces faits auraient pu servir à expliquer une guerre dans un contexte où la politique de l’Allemagne aurait été inspirée par les classes dominantes traditionnelles. La guerre en Europe est toutefois directement issue des ambitions expansionnistes du parti nazi, au pouvoir en Allemagne, et exprimées dès 1924 par Adolf Hitler dans Mein Kampf. A ces ambitions visant à reconstituer un espace vital pour le peuple germanique se greffent les velléités expansionnistes du régime fasciste italien qui essaie tant bien que mal de se constituer un empire colonial en Éthiopie et en Europe du Sud.

La France et le Royaume-Uni veulent combattre pour le respect des traités internationaux, notamment ceux garantissant les frontières des pays menacés par l’Allemagne comme la Pologne, la Grèce ou la Turquie.

Le pacte germano-soviétique signé le 23 août 1939 scelle une alliance sur-prenante entre les dictatures nazie et bolchevique.

Le 1er septembre 1939, l’Allemagne, prétextant une agression, attaque la Pologne. La France et le Royaume-Uni qui ont promis assistance à leur alliée, se déclarent le 3 septembre en état de guerre contre le Reich. En moins d’un mois, la Wehrmacht balaie l’armée polonaise. Varsovie, encerclée, capitule le 28 septembre 1939. La Pologne est également envahie à l’est par les Sovié-tiques en vertu d’une clause secrète du pacte germano-soviétique. L’armée allemande menace le reste de l’Europe. Les Français partent à la guerre sans enthousiasme : ils gardent tous en mémoire l’effroyable hécatombe de 1914-1918. Quatre millions et demi de Français sont appelés sous les drapeaux. Les espoirs de la nation reposent surtout sur la ligne Maginot, réputée invincible, qui doit garantir la frontière. Après quelques combats en Sarre, le front se

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stabilise et commence une longue période calme où les ennemis s’observent : c’est la "drôle de guerre".

A l’arrière, le sentiment de la population se situe entre résignation et ré-solution. Sur le front du Nord et de l’Est, l’état-major français, avec à sa tête le général Gamelin, s’en tient à la défensive. L’armée se retranche derrière la ligne Maginot et espère retarder l’offensive pour combler son retard matériel et profiter des ressources de l’Empire. Gamelin a partagé ses forces en deux : une partie orientée vers la Belgique, en cas d’agression de ce pays neutre ; l’autre partie derrière la ligne Maginot pour contrecarrer une attaque par la Suisse.

Après un conflit soviético-finlandais, Hitler engage ses troupes à l’assaut du Danemark puis de la Norvège, en avril 1940. Le royaume norvégien présente un intérêt stratégique car il commande le bon approvisionnement du Reich en minerai de fer suédois et en pétrole russe. En quelques jours toute résis-tance sérieuse est anéantie. Un corps expéditionnaire franco-anglais est alors constitué pour reprendre pied en Norvège. Cette bataille du fer se solde par une victoire alliée, alors qu’en France, dans le même temps, l’issue du conflit bascule en faveur de l’Allemagne.

Avec la campagne de France qui débute en mai-juin 1940, quatre années de guerre s’ouvrent. Les événements de ces années sombres vont mar-quer durablement les menta-lités. Le Puy-de-Dôme est un département qui a su résister contre les Allemands. En effet il possède dès 1940, toutes les caractéristiques sociales, politiques et géographiques favorables à la naissance de la Résistance.

Affiche de mobilisation générale, 2 septembre 1939.

Musée de la Résistance, de l’Internement et de la déporta-tion de Clermont-Communauté - AMRID (Droits réservés)

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I. Clermont-Ferrand sous l’occupation

1. Les prémices de la guerre dans le département

et le gouvernement de Vichy

Suite au début de l’offensive allemande du 10 mai 1940, les premières co-lonnes de la Wehrmacht apparaissent aux faubourgs de Clermont-Ferrand et plus particulièrement à Aulnat le 20 juin 1940. Le 21, les Allemands entrent dans la ville proclamée ouverte comme toutes les villes de plus de 20 000 habitants. L’avancée de l’occupant allemand a duré quatre semaines. Elle va marquer le département, tant du point de vue militaire, que du point de vue politique, avec la présence à 36 kilomètres, de Vichy qui deviendra capitale de l’État français.

En juin 1940, la présence allemande à Clermont-Ferrand fut de courte du-rée. Arrivée le 20 juin, la Wehrmacht se replie en direction de la Loire le 28, en accord avec les conventions d’armistice signées le 22 juin 1940.

La première attaque allemande eut pour conséquence le bombardement des Ancizes le 10 mai 1940 ainsi que la réquisition de l’aérodrome d’Aulnat et de la totalité de la garnison du 92e régiment d’infanterie stationné à Riom et à Clermont-Ferrand le 21 juin. Le Puy-de-Dôme a connu une semaine d’occu-pation qui contribua à créer, chez certaines personnes, un début de sentiment anti-allemand.

En juillet 1940, les contraintes imposées par la situation de guerre et par l’occupant sont levées : couvre-feu, interdiction de circulation, suspension de parution de journaux (La Montagne ne paraît pas entre le 21 et le 28 juin 1940 en protestation contre le contrôle allemand sur la presse). Le département est dit "libre" jusqu’au sud de la ligne de démarcation qui passe à Moulins. Jusqu’au 11 novembre 1942, la guerre est une affaire de journaux et de radios. Le 28 juin 1940, les troupes allemandes évacuent Clermont. Mais le "Grand Hôtel" demeure le siège de la commission d’armistice.

Le 29 juin 1940, le maréchal Pétain s’installe à Clermont-Ferrand, il est pro-clamé chef de l’État français le 10 juillet 1940. Comme le souligne Michel-le Audouin dans Clermont-Ferrand sous l’occupation : "Pour la première fois de son histoire, Clermont-Ferrand va s’endormir capitale de la France". Le mercredi 10 juillet 1940 est soumise au Parlement, c’est-à-dire la réunion de la Chambre des députés et du Sénat, une proposition de révision de la Constitution per-

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mettant d’attribuer les pleins pouvoirs au maréchal Philippe Pétain, président du Conseil. Sur 649 suffrages exprimés, 57 députés et 23 sénateurs votent "non", 20 autres parlementaires s’abstiennent (dont 3 après demande de rec-tification de leur vote) et le reste approuve. La séance fut présidée par Jules Jeanneney. Il est à noter que 27 parlementaires sont à ce moment-là en fuite vers Casablanca sur le bateau Massilia. Quant aux parlementaires communis-tes, ils ne peuvent siéger. En effet, depuis le 16 janvier 1940, ils sont déchus de leur mandat et condamnés à la clandestinité. Parmi les courageux qui votèrent non, Vincent Badie est célèbre pour s’être écrié après le vote "Vive la Répu-blique quand même !". Le texte adopté était : "Article unique – L’Assemblée nationale, donne tous pouvoirs au gouvernement de la République sous la si-gnature et l’autorité du maréchal Pétain, président du Conseil, à l’effet de pro-mulguer par un ou plusieurs actes la nouvelle Constitution de l’État français. Cette Constitution sera ratifiée par les assemblées qu’elle aura créées."

Le 1er juillet 1940, Clermont-Ferrand perd son rang de capitale au profit de Vichy qui allait accueillir le gouvernement officiellement le 3 juillet 1940. Le gouvernement renonce à Clermont-Ferrand en raison du trop petit nombre de locaux disponibles et du caractère ouvrier de la ville. En revanche, Vichy a de grands hôtels de luxe qui peuvent être transformés en ministères, une bonne liaison avec Paris par l’autorail et un central téléphonique international moderne. De plus, Vichy est une station thermale renommée.

2. Le repli de l’Université de Strasbourg

à Clermont-Ferrand

Le 23 novembre 1939, l’Université de Strasbourg est repliée à Clermont-Ferrand. En effet, à la déclaration de guerre, la ville de Strasbourg avait été déclarée zone militaire par l’état-major Français et évacuée d’office, ce qui ne fut pas le cas pour tout le reste de l’Alsace-Lorraine. Les premiers regroupe-ments d’étudiants et de professeurs alsaciens contestataires eurent lieu du-rant l’été 1940 autour de Gergovie. Après l’armistice de juin 1940, les Alle-mands annexèrent l’Alsace-Lorraine, rouvrirent les Facultés à Strasbourg et ordonnèrent aux professeurs et étudiants alsaciens-lorrains qui se trouvaient à Clermont-Ferrand de rentrer immédiatement chez eux. Un certain nombre, réunis autour du vice-recteur Danjon refusèrent catégoriquement toute idée de retour. Cette décision de "non jamais" des professeurs et des étudiants al-saciens-lorrains de l’Université Française de Strasbourg représentait déjà une forme de résistance. Les Allemands allaient leur faire payer très cher cette attitude. Le professeur d’histoire Gaston Zeller décida d’édifier à Gergovie sur les lieux de fouilles gallo-romains, un chalet qui servirait de maison de vacan-ces aux étudiants dont la famille était restée en Alsace-Lorraine. Grâce à l’aide

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du général de Lattre de Tassigny, le bâtiment fut édifié au cours de l’été 1940. Le général de Lattre de Tassigny a séjourné en 1940, au château d’Opme où il créa l’école des cadres qui devait former des officiers pour l’armée française rénovée.

3. La présence allemande

Les services de police allemands, Sicherheitsdientst (SD) et Sicherheitspoli-zei (SIPO) sont sous les ordres du capitaine Hugo Geissler à Vichy avec pour mission de maintenir l’ordre et de contrôler le gouvernement du maréchal Pétain. Au 2, bis avenue de Royat à Chamalières, se trouve l’antenne du KDS (Kommando der SIPO und SD) de Vichy. C’est l’équivalent en zone libre de la Gestapo, chargé comme elle, des affaires politiques et de la recherche des en-nemis du régime nazi. La présence allemande vient renforcer l’occupation des esprits qu’exerce le régime de Vichy sur la population du Puy-de-Dôme.

Le 22 mai 1940, le maréchal Pétain a su mettre fin au conflit perdu, il est donc perçu par une certaine catégorie de la population comme un "sauveur". Le régime de Vichy se maintient et se renforce dans les premiers temps, grâce à la politique de la Révolution Nationale qui repose sur l’ordre, le corporatis-me, l’encadrement de la population, le travail, la famille et la patrie. Pétain bé-néficie également du soutien d’une partie des anciens combattants de la pre-mière guerre 1914-1918, qui le considèrent comme le vainqueur de Verdun.

4. La Légion Française des Combattants

Elle est créée le 29 août 1940, elle regroupe des anciens combattants fidè-les au maréchal qui lui portent un soutien inconditionnel. Elle s’installe dans le Puy-de-Dôme en octobre 1940 à l’initiative du Doc-teur Grasset qui est dési-gné par le maréchal Pétain. R. Lachal, ancien député d’Ambert devient prési-dent communal. Les visi-tes officielles du maréchal remportent une grande ferveur populaire comme l’indiquent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auver-gne. Le gouvernement de Vichy, de par le statut d’an-cien combattant de son chef, s’efforce de fabriquer

Congrès cantonal de la Légion Française des combattants à

Courpière en 1940. Musée de la Résistance, de l’Internement et de la déportation de Clermont-Communauté. AMRID (Droits réservés)

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un paravent entre lui et le peuple français. Il filtre les décisions du gouverne-ment vers la population et les réactions de celle-ci sur Vichy. Les anciens com-battants ne sont pas les seuls à bénéficier des attentions de Vichy, les jeunes vont être sollicités.

5. Les Chantiers de Jeunesse

Créés à l’initiative du général de la Porte du Theil, à Clermont-Ferrand, en juin 1940, ils remplacent le service militaire supprimé par la convention d’armistice. En juillet 1940, ils sont obligatoires pour les jeunes de 20-22 ans. Quatre chantiers sont fondés dans le Puy-de-Dôme : Pontgibaud, Messeix, Châtel-Guyon et Courpière. Les jeunes du Puy-de-Dôme seront ensuite re-crutés par le STO, (le 16 février 1943), mais les désertions sont nombreuses. Les Compagnons de France ou le mouvement des Scouts de France essaieront de les enrôler dans l’idéal de la Révolution Nationale. Le maréchal Pétain se rendra régulièrement dans les camps des Compagnons de France où ses visites suscitent une grande ferveur. Après le 11 novembre 1942, les jeunes hommes préfèreront "prendre le maquis" et entrer dans la clandestinité.

Affiche de propagande en faveur des Chantiers de la Jeunesse.

AMRID (Droits réservés)

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6. Le 11 novembre 1942, invasion de la zone sud

Le siège du gouvernement du maréchal Pétain était à Vichy depuis le 3 juillet 1940. Toutefois, Clermont-Ferrand demeurait la "capitale administrative". En effet le service de renseignement militaire était à Royat, la direction des grou-pements de jeunesse était à Châtel-Guyon, la direction de la gendarmerie à Romagnat puis à Chamalières. Le Conseil d’État s’était replié à Royat de 1940 à 1942. La caisse des dépôts et consignations ainsi que le tribunal militaire étaient à Clermont-Ferrand.

Le 8 novembre 1942, le Ministère de la Guerre installé à Royat et les servi-ces spéciaux de la Défense du colonel Rivet, sont informés de l’imminence du franchissement de la ligne de démarcation par les troupes allemandes. Un plan de résistance était prévu par l’intermédiaire des 90 000 hommes de l’armée d’armistice. Le 9 novembre 1942, selon les écrits de A. Alizon : Rapine – 1er juillet 1940 – 8 juillet 1943 : "…convoqué à Vichy, le chef de bataillon, Leschi prit connaissance d’un télégramme secret adressé par l’état-major allemand aux divisions militaires." Il prescrivait qu’en cas de franchissement de la ligne de démarcation par les troupes allemandes : "les troupes et états-majors quitteront leurs casernements en emportant leurs munitions…" Il était urgent de contrer l’avancée allemande. Cependant rien ne fut fait. L’ordre est donné, le 11 no-vembre 1942, aux troupes de regagner leurs cantonnements.

La 189e division de la Wehrmacht va s’installer dans le Puy-de-Dôme jusqu’au 7 juillet 1944. Deux escadrilles de la Luftwaffe et quelques bataillons antiaériens sont stationnés sur la base d’Aulnat comme l’évoque Eugène Martres dans Les troupes allemandes dans le Massif Central. Après l’occupation de la zone sud, des états-majors de liaison appelés Verbindungsstäbe s’installent dans tous les chefs lieux des départements dont Clermont-Ferrand. Ces états-majors étaient des organismes administratifs en relation avec les autorités françaises. Leur fonctionnement était assuré par des hommes âgés, des secrétaires, des interprètes et des spécialistes de l’économie et de la surveillance.

Les états-majors sont relayés par la Feldgendarmerie qui se consacre à la lutte anti-résistance.

Le général Niehoff commande l’état-major principal de Clermont-Ferrand, dix départements sont placés sous son autorité et il dispose d’environ 6 000 hommes. Un chiffre qui augmentera selon les besoins comme l’atteste Eugène Martres car ils seront : "7 200 après le 15 mai 1944 et 12 000 du 3 au 10 juin 1944". L’armée allemande avait pour principal objectif d’assurer le contrôle et le bon fonctionnement des voies de communication. Les groupes mobiles allemands étaient chargés de repousser de manière très violente, les résistants selon la méthode "rücksichtslos", c’est-à-dire de façon impitoyable. En novembre 1942, à l’arrivée des forces allemandes en zone sud, le général de Lattre donne l’ordre à ses troupes de sortir des garnisons et de résister. Trahi, arrêté, il est interné à Toulouse, puis au Fort Montluc à Lyon. Condamné

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à dix ans de prison en janvier 1943, il est transféré à Riom, d’où il s’évade, dans la nuit du 2 au 3 septembre 1943, pour rejoindre Londres. Sous le faux nom de Dequesne, le général de Lattre quitte la France, grâce à un appareil de la RAF venu le chercher à Manziat dans l’Ain, le 17 octobre. Le 11 novembre 1943, il est promu général d’armée par le général de Gaulle, il le rejoint à Alger cinq semaines plus tard.

En annexe page 62 : télégramme adressé au Préfet de la Région Auvergne

annonçant l’arrivée des troupes allemandes à Clermont-Ferrand.

7. La démobilisation du 92e RI et la création de la "prison

militaire allemande du 92"

Après l’invasion de la zone sud, le 11 novembre 1942, les troupes alleman-des vont prendre possession des bâtiments de la caserne du 92e à Clermont-Ferrand. Le 27 novembre, le 92e RI est cerné et démobilisé en quelques heu-res par les Allemands. Il est alors dissout comme la majorité des régiments situés sur le sol français. Du 11 novembre 1942 à fin août 1944, la prison militaire allemande du 92 a détenu une grande partie des résistants internés et des personnes raflées de la région Auvergne avant leur déportation. Avant sa démobilisation, la caserne du 92e comprenait des cellules qui étaient utilisées en cas de problèmes de discipline comme l’indiquent Manuel Rispal et Paul Santoni dans leur rapport1.

1. "La prison du 92 à Clermont-Ferrand pendant l’occupation allemande (novembre 1942-août 1944"), 14 février 2003.

La prison militaire allemande du 92 : bâtiment. AMRID (Droits réservés)

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Trois bâtiments for-maient la prison alle-mande du 92 : le pre-mier bâtiment situé sur la rue Pélissier était celui de l’ancien Conseil de guerre où se trou-vait durant l’occupation, l’administration de la prison. C’est là que les familles des internés venaient déposer des colis de nourriture ou vêtements : "Beaucoup de familles se souvien-nent encore de ces mercredis où la file d’attente débordait sur la rue" relatent Manuel Rispal et Paul Santoni. Les personnes internées dans cette prison sous commandement du SD Siecherheitsdienst (service de sécurité) venaient de toute la région Auvergne (Puy-de-Dôme, Cantal, Haute-Loire, Allier) et au-delà (Corrèze, Creuse) avant de partir en déportation. Les cellules où étaient enfermés les prisonniers étaient situées sur deux niveaux, dans le deuxième bâtiment de la prison militaire allemande. Une chapelle désaffectée servait de cellule mais on y célébrait également des offices. Les gardiens étaient des sol-dats âgés de la Wehrmacht d’origine allemande ou autrichienne mais la prison était contrôlée par le service de sécurité de l’armée allemande qui comprenait des agents allemands et français. Les femmes étaient internées dans des cellu-les du deuxième bâtiment de la prison jusqu’au début de l’année 1944.

La troisième bâtiment regroupait quatre grandes cellules : H1, H2, H3 et H4. Dans le même secteur de la caserne, jouxtant le quartier Verdun, se trouvait le bâtiment du stand de tir. C’est là que seront fusillés, le 20 décembre 1943, 20 patriotes, dont 17 seront identifiés en 1945. Ils figurent sur une plaque, dans l’impasse d’Estaing. Ces derniers n’étaient pas internés dans la prison militaire allemande du 92 mais dans un des bâtiments de l’ancienne caserne du 92 (voir rafle de Billom).

Dans le Puy-de-Dôme, deux lieux de détention existaient : la Maison d’arrêt de Clermont-Ferrand et celle de Riom où furent internés essentiellement des prisonniers politiques. Avant d’être enfermées à la prison du 92, les personnes subissaient, à la villa "René" du 2, bis avenue de Royat, à Chamalières, tout près de Clermont-Ferrand, un ou plusieurs interrogatoires ainsi que des tor-tures par les membres du SD allemand. Une plaque apposée sur le premier bâtiment de la prison militaire allemande témoigne de l’horreur vécue par les

Poteaux d’exécution, stand de tir du 92.

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La villa "René" du 2, bis avenue de Royat à Chamalières.

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prisonniers qui partaient ensuite pour les camps de la mort : "1942-1944 Gloire et honneur aux martyrs, souvenons-nous ! De ces lieux partirent vers les camps de concentration et la mort les patriotes victimes de la cruauté nazie"

Le 92e régiment d’infanterie a été reconstitué, après la Libération. Le dra-peau du régiment a été remis aux Invalides, par le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire, le 2 avril 1945, au commandant Luc Belmont. Il était l’adjoint du colonel Prince (Robert Huguet) et dirigea la première colonne rapide.

8. Les difficultés de la vie quotidienne

Le rationnement alimentaire •

Dès le 1er octobre 1940, le régime des tickets et cartes d’alimentation est mis en place dans le Puy-de-Dôme. La nourriture est rationnée selon l’âge et la catégorie sociale :

La catégorie E désigne les en-fants, la catégorie J1 (avant 6 ans), J2 (de 6 à 14 ans), J3 (de 14 à 21 ans), A (Adultes), T et C (travailleurs et cultivateurs), la catégorie V (vieillards).

Les attributions sont effectuées en fonction des lettres A, B, C et D qui désignent des catégories de den-rées. Les tickets d’alimentation sont remis en échange de la nourriture achetée. Les restrictions s’étendent aussi à l’énergie, car dès le 19 fé-vrier 1941, le Préfet Chevreux exi-ge des Puydômois qu’ils réduisent de 30 % leur consommation de gaz domestique, sous peine d’amendes. Pour ce qui est de l’alimentation, les rations de pain en 1940 étaient de 350 grammes par jour, en avril 1943, elles ont diminué pour passer entre 100 et 350 grammes par jour selon les catégories de personnes

Carte de denrées. AMRID (Droits réservés)

Carte d’alimentation : fromages, matières grasses.

AMRID (Droits réservés)

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concernées. La consommation de matière grasse est aussi réglementée. Elle varie entre 220 et 225 grammes par mois, 100 grammes supplémentaires sont accordés aux travailleurs de force.

En février 1944, un arrêté préfectoral fixe de nouvelles rations pour le lait réservé aux enfants et aux femmes enceintes : entre trois-quarts et un demi-litre par jour. Le café introuvable est remplacé par des grains d’orge grillés. Ces taux de ravitaillement ne sont bien sûr pas suffisants. Un marché parallèle dit "marché noir" voit le jour dès 1940. L’élevage urbain se développe.

Les restrictions de liberté•

En dehors des mesures limitées à certaines catégories de population, tout le monde doit respecter le couvre-feu, la fermeture des débits de boisson tôt le soir, l’interdiction de se réunir à plus de deux personnes.

La vie intellectuelle est également orientée. Les cinémas proposent des films imposés par le service de propagande tels que "le Juif Sûss" diffusé à Clermont-Ferrand car "les Allemands sans faire une pression énorme, poussaient tout de même à sortir leurs films" comme l’atteste Marcel Ophuls dans Le chagrin et la pitié.

L’écoute de la radio est aussi réglementée. Un arrêté préfectoral du 22 no-vembre 1940 interdit : "sur tout le territoire du Puy-de-Dôme la réception dans les lieux ouverts au public des émissions radiophoniques anglaises". Le 11 novem-bre 1942, l’interdiction est totale.

Les habitants du Puy-de-Dôme doivent faire face à des restrictions de plus en plus importantes de leurs libertés, un facteur favorable à l’action de la Résistance.

En annexe page 63 : courrier daté du 28 octobre 1941, de Monseigneur

Piguet adressé au maire de Clermont-Ferrand relatif au film Monsieur

Brotonneau. L’avenir du Plateau Central du 28 octobre 1941. Archives Départementales du Puy-de-Dôme 901 W 116. Droits réservés.

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II. La Résistance dans le Puy-de-Dôme

La géographie du département du Puy-de-Dôme de par son relief et son climat est propice à la création de zones refuges inaccessibles. Le Puy-de-Dôme a résisté en moyenne trois fois plus que l’ensemble de la France. Le nombre total des résistants en France est évalué à environ 200 000 et 300 000. Le SD allemand prévoit le 9 août 1944 une "attaque concentrique de Clermont-Ferrand menée par quelques 12 000 FFI" comme l’attestent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne.

On peut distinguer trois phases de recrutement dans la Résistance dans le département : la première période se situe autour de juin 1940 à décembre 1941, c’est une résistance active : en effet, le département est en zone libre. De plus, cette période correspond à la naissance d’un certain nombre de mouvements de résistance sur lesquels on reviendra. La deuxième phase commence avec l’année 1942 et ce jusqu’en octobre. La troisième phase débute en octobre 1942 et jusqu’en juin 1944 et correspond à l’invasion de la zone sud au mois de novembre 42. En effet, le refus de la défaite et de l’occupation du territoire national par les Allemands sont les principales raisons de la naissance de la Résistance en France. Les mesures telles que le STO fin 1942 – début 1943, ont également plongé certaines personnes dans la clandestinité obligée.

1. Le Service du Travail Obligatoire : STO

Le service du travail obligatoire (STO) fut, durant l’occupation de la France par l’Allemagne nazie, la réquisition et le transfert contre leur gré vers l’Al-lemagne de centaines de milliers de travailleurs français, afin de participer à l’effort de guerre allemand (usines, agriculture, chemins de fer, etc.). Les personnes réquisitionnées dans le cadre du STO étaient placées dans des camps de travailleurs situés sur le sol allemand. Avec la complicité active du gouvernement de Vichy, les travailleurs forcés français sont les seuls d’Eu-rope à avoir été requis par les lois de leur propre État, et non pas par une ordonnance allemande. Le régime nazi imposa la mise en place du STO pour compenser le manque de main-d’œuvre dû à l’envoi de ses soldats sur le front russe. Au total, 600 000 à 650 000 travailleurs français sont acheminés vers l’Allemagne entre juin 1942 et juillet 1944.

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En juin 1942, l’Allemagne exige de la France 350 000 travailleurs. Pierre Laval obligé de maquiller cette sommation, annonce le 22 juin la création de la Relève qui consiste à échanger un prisonnier libéré contre trois travailleurs volontaires envoyés. Mais seuls les ouvriers "spécialistes" sont en fait pris en compte dans l’échange, tandis que les prisonniers libérés doivent être des paysans, ou des hommes déjà âgés et malades, donc improductifs et qui auraient probablement été rapatriés de toute façon. La Relève n’est pas nominative. Toutefois, on ne peut pas s’enrôler pour faire libérer son frère, son mari, son voisin, etc. Le manque de succès de cette mesure (17 000 volontaires fin août) sonne le glas du volontariat. Pétain promulgue alors la loi de réquisition du 4 septembre 1942, malgré l’opposition de quatre minis-tres et une aggravation sensible de l’impopularité du régime. Moins connue que la loi du 16 février 1943, la loi du 4 septembre ne frappe de fait que des ouvriers. Elle fut surtout appliquée en zone occupée, la plus industrielle et la plus peuplée. Cette loi est responsable du départ forcé de près de 250 000 travailleurs en six mois. Le 16 février 1943, Pierre Laval instaure le Service Obligatoire du Travail, ainsi appelé la première semaine, et en raison des railleries dues aux initiales, fut rebaptisé STO. Le recrutement par catégories se fait désormais par classes d’âge entières. Les jeunes gens nés entre 1920 et 1922, c’est-à-dire ceux des classes 40, 41 et 42 sont obligés d’aller travailler en Allemagne. La classe d’âge 1942 fut la plus touchée, et les exemptions ou sursis initialement promis aux agriculteurs ou aux étudiants disparurent dès juin. Les filles pouvaient être aussi concernées.

Les Chantiers de Jeunesse contribuèrent aussi activement à l’envoi de leurs propres jeunes en Allemagne, par groupements entiers. Un grand nombre de requis pour le STO refuseront de se soumettre. Beaucoup d’entre eux vien-dront rejoindre les maquis de la Résistance et participer aux combats pour la libération de la France. Selon John F. Sweets dans Clermont-Ferrand à l’heure allemande : "Plus le gouvernement augmentait les forces de police qui pourchas-saient les réfractaires au STO, plus vive était la résistance. Sur les 630 000 Français qui furent requis pour aller travailler en Allemagne, près de la moitié étaient partis avant que le STO ne fût officiellement mis en place et le nombre des départs décrut régulièrement après le printemps 1943".

2. La naissance des mouvements de Résistance

Le Groupe de Gergovie •

Dès les premiers mois de l’année 1941, les étudiants alsaciens-lorrains, les "Gergoviotes", se réunissent dans le chalet de Gergovie. Ils accueillent de nou-veaux étudiants évadés d’Alsace qui avaient franchi la ligne de démarcation. A

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la fin de l’année 1941, ils diffusent les premiers numéros des journaux clandes-tins des premiers mouvements de Résistance puis ils adhérent et militent au sein des mouvements "Combat", "Libération" puis "Franc-Tireur".

Les Mouvements Unis de Résistance : MUR•

La majorité des résistants du Puy-de-Dôme adhère aux MUR. Ceux-ci sont créés dans le département en mars 1943, ils regroupent les trois grands mou-vements de la zone sud : "Combat" d’Henri Frenay, "Libération Sud" d’Emma-nuel d’Astier de la Vigerie et "Franc-Tireur" d’Antoine Avinin.

- Combat est la principale composante en importance numérique des MUR puisqu’il regroupe 24,8 % de leurs effectifs. Henri Frenay installe son mou-vement dans le Puy-de-Dôme en 1941, en contact avec le général Cochet. Dès le début, il est structuré et cloisonné en section ROP : Recrutement Organisation Propagande et complété par deux centres, Renseignement et Choc. Les Groupes-Francs sous la direction régionale de Pierre Thiébaut dit "Théret" sont les exécutants du mouvement dont la base géographi-que est l’Auvergne (région R6). Henry Ingrand est désigné chef régional du mouvement en novembre 1942. L’Armée Secrète dont le responsable est Pierre-Marie Dejussieu est l’autre volet militaire de Combat. L’Armée Secrète se compose essentiellement de sédentaires. Le NAP : Noyautage des Administrations publiques est placé sous la direction de Nestor Perret. C’est le principal centre de renseignements. Émile Coulaudon, "colonel Gaspard" est le chef départemental des MUR. Ce dernier formera le 23 avril 1943, le Premier Corps Franc d’Auvergne avec l’aide d’Antoine Llorca, "Laurent" et de Robert Jeanthial, "Dumas".

Le premier Corps Franc d’Auvergne•

C’est Lucien Blanchet, "Bernard", chef du canton de Pontgibaud qui, le 28 avril 1943, proposa la masure de Lespinasse, située au cœur des bois de Louchadière, dans la chaîne des Volcans d’Auvergne, sur la commune de Pulvérières. Les propriétaires acceptent de louer leur maison et les deux remi-ses attenantes à M. Coulaudon qui s’était présenté pour la circonstance com-me exploitant forestier devant loger ses bûcherons. Ce Corps Franc, composé de volontaires, qui œuvrent depuis novembre 1942 dans la Résistance, est situé au Nord-Est de Pontgibaud, il est à l’origine des opérations les plus re-marquables qu’ait connues le département. Gaspard répartissait les tâches, Robert Huguet, "Prince" qui n’avait pas réussi à passer en Angleterre, accepta de s’occuper des réfractaires au STO dans le Puy-de-Dôme. Il était néces-saire de sauver et de préparer à la Résistance ceux qui avaient refusé de par-tir travailler en Allemagne. Le responsable régional était Gabriel Montpied. Raymond Labaune, "Irma", Camille Leclanché, "Buron", étaient les spécialistes

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des explosifs et avaient pour tâche les destructions de voies ferrées, usines, lignes électriques etc…Antoine Llorca, "Laurent" et Robert Jeanthial, "Dumas" étaient chargés de préparer des expéditions en vue de récupérer du matériel de toute sorte : carburant, armes, vivres et habillement. Max Roger Menut, "Bénévol" est responsable des effectifs. Les membres du Corps Franc orga-nisèrent en août 1943, en gare de Pontmort, l’évasion de 10 maquisards en route pour la centrale d’Eysses. Irma et Buron, détruisirent, en plein midi à Clermont-Ferrand, la rotative du Moniteur, journal de Pierre Laval. La pre-mière grande action organisée par le 1er Corps Franc fut celle d’Authezat en octobre 1943. 70 hommes se retrouvèrent pour subtiliser dans un énorme dépôt de matériel et de carburant appartenant aux ateliers de l’Air, 20 000 litres d’essence, 2 500 litres d’huile à moteur, des pneus, des batteries et de l’outillage. Après l’arrestation de plusieurs membres du Corps Franc et la mort de Nestor Perret, le 26 octobre 1943, le responsable des MUR pour la ville de Clermont-Ferrand, Émile Coulaudon, demande à tous les chefs actifs de pren-dre le maquis et aux chefs politiques cantonaux de quitter le département. Les responsables doivent changer de pseudonyme. Le 15 janvier 1944, le Corps Franc va subir la perte de Camille Leclanché dit "Buron". En effet, ce dernier est arrêté à la Bourboule avec "Irma". C. Leclanché sera torturé, son corps ne sera jamais retrouvé.

Après la rafle de Volvic, le 1er mars 1944, les SS mettront le feu à l’hôtel du Commerce et à la vieille maison de Lespinasse qui avait vu naître le 1er Corps Franc d’Auvergne.

- Le mouvement Franc-Tireur, ex-France-Liberté est créé le 20 novem-bre 1940 à Lyon par Antoine Avinin, Noël Cavier, Elie Peju, Gayet et Jean Soudeille, autour de la rédaction et la diffusion du journal Franc-Tireur. Il s’installe à Clermont-Ferrand début 1941. Il recrute principalement au sein du milieu étudiant avec Marc Gerschel mais aussi parmi le monde ouvrier par l’intermédiaire de Claudius Jeantet de l’action ouvrière des usines Michelin et de Maurice Jouaneau comme l’indiquent G. Levy et F. Cordet dans A nous Auvergne. Au début de l’année 1942, Marc Gerschel en deviendra le respon-sable régional.

- Libération Sud s’installe, en juillet 1941, dans le Puy-de-Dôme à l’initiative de Lucie Aubrac et Jean Cavaillès, maître de conférence à la faculté des Lettres de Strasbourg. Il entre en contact avec Emmanuel d’Astier de La Vigerie et Samuel Spanien. Jean Rochon, secrétaire de rédaction au journal La Montagne, prendra contact avec Jean Cavaillès, il deviendra le chef ré-gional du mouvement. Les objectifs de Libération Sud sont la propagande et le renseignement. Propagande dans les usines et les administrations avec Gabriel Montpied dit "Monique" et dans les universités avec Henri Rochon.

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Le renseignement est placé sous la responsabilité de Jean Michel Flandin et André Paquot. Libération Sud parrainera la naissance du Mouvement Ouvrier Français (MOF) en mai 1942 qui regroupe des militants CGT et CFTC.

Ces trois mouvements : Combat, Franc-Tireur et Libération Sud ont des contacts de plus en plus nombreux et vont fusionner au sein des MUR, en mars 1943, avec à leur tête, comme chef régional, Henry Ingrand dit "Mazière" as-sisté de Pierre-Marie Dejussieu dit "Pontcarral", Jean Rochon et Robert Waitz. Le Mouvement de résistance Les Ardents adhère aussi aux MUR Il est créé dès la défaite de juin 1940 à l’initiative de Roger Lazard, général François sous le haut patronage du général Cochet. En 1941, Roger Lazard fait paraître un aide-mémoire "un seul ennemi, le boche et avec lui, tous ceux qui l’aident ou l’appellent" comme le soulignent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne2. Il rédigera un manifeste "La délivrance par l’insurrection" et l’enverra en mai 1941 aux 80 députés et sénateurs qui avaient voté contre les pleins pouvoirs de Pétain les incitant à passer à l’action. Charles Rauzier, Tranchet était le chef régional des Ardents. L’objectif de ce mouvement de résistance était la déli-vrance de l’Auvergne et du territoire national.

Les Ardents étaient présents dans tous les corps de métiers : Compagnie des tramways, SNCF, PTT et Compagnie du Gaz et d’Electricité. Début 1943, le Corps Franc des Ardents constitue son maquis dans les bois du col de Ceyssat. Le responsable en est Pierre Bellut dit Contact. Ce maquis servira de cachette à de nombreux réfractaires. A partir du mois d’avril 1943, il sera reconnu par l’autorité militaire en unités combattantes.3

Les FTPF : Francs Tireurs et Partisans Français •

Ce mouvement de résistance est issu du Front National (FN). D’origine communiste, il a pour objectif "la libération, la renaissance et l’indépendance de la France". Il rassemble des hommes de tous milieux et de toutes conditions. Organisation paramilitaire issue du Front National, la création des FTPF : Francs-Tireurs et Partisans Français intervient au printemps 1942. Elle résulte de l’unification de trois branches paramilitaires et groupes de défense issus du parti communiste :

les OS : organisations spéciales créées par le PC fin 1940, pour assurer la • défense des militants et effectuer les premiers sabotages économiques ;les groupes de jeunesse communistes, auteurs des premiers attentats • contre l’occupant ;les combattants de la main d’œuvre immigrée (MOI). •

2. A nous Auvergne, G. Lévy, F. Cordet, p. 26.3. Historique des Unités Combattantes de la Résistance, général de la Barre de Nanteuil, Ministère

des Armées, Service Historique, Château de Vincennes, 1985, p. 122.

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Les FTP sont créés pour coordonner ces groupes et intensifier leur action. Ils sont dirigés par un comité militaire national composé de Charles Tillon,

commandant en chef, Henaff (puis Complein), Albert Ouzoulias, Beyer. Prenant est le chef d’état-major.

Ils possèdent un service de renseignements militaires en relation avec le BCRA à Londres, le réseau "Fana" ainsi qu’un service de santé et d’armement. Le 16 décembre 1942, l’état-major FTP crée les camps "Gabriel Péri" et "Guy Mocquet". Il assure le recrutement, l’organisation et le contrôle des premiers éléments de la Résistance armée FTPF du département du Puy-de-Dôme.

Le responsable du camp Gabriel Péri est "Delmas". "Bigot" est le chef du camp Guy Mocquet. L’instauration du STO entraîne l’afflux de jeunes dans les rangs FTP. L’organisation des FTP est différente de celle des autres mouve-ments de la Résistance, comme le soulignent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne. En effet, la région FTP est constituée par un ou deux départements. On retrouve également la structure régionale triangulaire, la troïka composée d’un commissaire aux effectifs (CER), un commissaire aux opérations (COR) et d’un commissaire technique (CTR). Ces trois commissaires conjointement responsables, forment le Comité militaire régional avec à sa tête, le commis-saire aux effectifs. Dans le Puy-de-Dôme, les responsables formant une unité de base, sont au nombre de sept : Raoul Sauer "La Meuse", Crevat, Henri Martin, Marcel Sanitas, Einchelin, Prugne, Besse. Les FTP pratiquent la tacti-que des gouttes de mercure selon l’expression de Charles Tillon : les groupes de combat doivent être assez mobiles pour devenir insaisissables. Les priorités d’action des FTPF sont les sabotages de transport du courant électrique et de chemins de fer et surtout l’attaque directe de l’occupant.

Les Milices Patriotiques : émanation du parti communiste. Elles sont constituées de résistants sédentaires. Elles ont été créées dans les villes pour aider à la prise du pouvoir. Elles représenteront de juin à août 1944 une des principales forces résistantes organisées à l’intérieur de Clermont. Durant cette période, elles seront responsables de nombreux attentats et sabotages commis dans l’agglomération.

Le commandant Debain dit "Ligier" est à la tête des Milices patriotiques jusqu’au 17 août 1944 puis c’est le lieutenant-colonel Tabouis "Barrère" qui les dirigera.

L’ORA : Organisation de Résistance de l’Armée•

L’ORA, anciennement appelée l’OMA (Organisation Militaire d’Action) est née le 28 décembre 1942 à Clermont-Ferrand, sous l’impulsion du général Frère, comme le soulignent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne : « "Frère explique au lieutenant-colonel Bonotaux : "vous tâcherez de convaincre l’état-ma-

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jor inter-allié que nous sommes en mesure de réaliser le vieux projet de l’armée d’armistice, ce réduit national d’Auvergne d’où nous sortirons un jour pour couper toutes les communications allemandes en France". »

Pour le Puy-de-Dôme, le responsable est le lieutenant-colonel Jean Garcie, sous les ordres du commandant régional, le lieutenant-colonel Jacques Boutet assisté d’Henri Madeline. En raison de ses contacts avec certains mouvements de résistance dont "Combat" et de son implantation dans les services spéciaux de l’État français, l’ORA va rapidement disposer d’armes camouflées avant novembre 1942. Bien que jalouse de son indépendance, l’ORA va conclure des accords avec le PCF et les FTPF en zone sud, en 1943, accords d’entente locale en vue d’actions immédiates, d’opérations de libération mais aussi d’en-cadrement et d’instruction des réfractaires.

Le 1er octobre 1943, l’ORA va subir plusieurs rafles, au siège de l’état-major à Clermont-Ferrand, à Royat, à Romagnat, au cours desquelles le lieutenant colonel Boutet et le commandant Madeline, entre autres, vont être arrêtés. Si de nombreuses arrestations ont pu avoir lieu, c’est en raison des forces de po-lice qui connaissent parfaitement le terrain. C’est pourquoi, le maréchal Pétain crée la Milice, le 5 janvier 1943 dans le département pour les renforcer.

3. La création de la Milice

Créée par la loi du 30 janvier 1943, à la demande de Pierre Laval, elle de-meure le symbole d’une collaboration policière et paramilitaire dont le but est la lutte contre le "terrorisme". Cependant, ni la police, ni la gendarmerie, ni les groupes mobiles de réserve, ne sont en mesure de répondre à cette exigence. Laval a donc décidé de mettre en place une formation nouvelle en marge des structures étatiques classiques. Sur le plan national, Joseph Darnand assure le commandement de la Milice assisté de Pierre Cancé, Noël de Tissot et Francis Bout de l’An. En Auvergne, Jean Achon est le responsable régional de la Milice dont le siège est situé 3, boulevard Desaix à Clermont-Ferrand. Autissier en est le responsable départemental. L’état-major est installé tout d’abord à l’hôtel Moderne puis à l’hôtel Métropole. La Milice a une double mission de répression et de propagande active en faveur de l’ordre politique. Elle est do-tée d’une école chargée de la formation des futurs cadres et elle se compose d’une base d’éléments non permanents et de membres très actifs appelés les "francs-gardes". Au 15 juillet 1943, l’effectif des francs-gardes clermontois est d’environ 100 personnes : trois trentaines qui se divisent en trois dizaines. La Milice, lors d’opérations, agit soit seule, soit en liaison avec la Gestapo ou les troupes allemandes, soit encore avec les forces de police françaises. Cette collaboration est confirmée dans les interrogatoires de miliciens et ex-mem-bres de la Gestapo clermontois tristement célèbres pour leurs exactions, tels que Jean et Gérard Vernières, Georges Mathieu et Louis Bresson entre autres. Ces miliciens étaient motivés par la haine du communisme, le goût du pou-

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voir, la soif de commandement pour Mathieu, l’appât du gain pour Bresson. Ils étaient grassement rémunérés, entre 3 000 et 6 000 francs par mois. Quant à Jean et Gérard Vernières, ils croyaient en l’idéal national-socialiste. On retrouve toutes les raisons de l’engagement de ces miliciens dans leurs interrogatoires.4

4. Une Résistance active dès 1943

Dans la nuit du 2 au 3 juin 1943, des ouvriers Michelin brûlent les entrepôts, rue d’Estaing. Le 20 juin1943, un attentat a lieu, rue Jolie, contre deux sol-dats allemands qui regagnent leur cantonnement. En représailles, la Préfecture communique : "jusqu’au 28 juin, seront fermés, cinémas, théâtres, cafés, concerts et autres lieux publics. Jusqu’au 5 juillet, les cafés restaurants, salons de thé seront fermés à 20 heures. Le couvre-feu est établi de 21 heures à 5 heures du matin."

Camille Leclanché dit Buron forme avec Raymond Labaune dit Irma, au sein du Premier Corps Franc d’Auvergne, une équipe chargée de réaliser les princi-paux sabotages de la région Auvergne. On peut citer à leur actif, entre autres :

4. Interrogatoires de Mathieu, Vernières Jean et Gérard : service de recherche des crimes de Guerre : AD 908W614.

Entrepôts Michelin rue d’Estaing après l’incendie du 3 juin 1943.

AMRID (Droits réservés)

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le 31 juillet 1943, la destruction du matériel aux imprimeries Mont-Louis à Clermont-Ferrand, notamment la rotative imprimant Le Moniteur : journal de Pierre Laval.

Le 1er août, ils sabotent un transformateur électrique à l’usine Michelin de Cataroux.

Le 23 octobre 1943, une bombe explose au dépôt de la SNCF, route d’Aul-nat. A 22 heures, avenue des États-Unis, au centre de la propagande de Vichy, une explosion fait voler les vitrines en éclat. Le 18 novembre 1943, sur ordre de Londres, A. Llorca procède avec ses hommes à la destruction de 30 000 pneumatiques au dépôt des usines Michelin.

Après la disparition de Camille Leclanché, le 15 janvier 1944, c’est son frère Edmond, alias "Tonio" qui prendra sa place au service sabotage et assumera cette responsabilité jusqu’à la Libération. Antoine Llorca dit "Laurent", respon-sable du matériel au sein du 1er Corps Franc d’Auvergne va effectuer lui aussi, une série d’actions d’envergure qui ont déjà été évoquées dans la présentation du premier Corps Franc d’Auvergne.

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III. La déportation dans le Département du Puy-de-Dôme

Le Puy-de-Dôme a été particulièrement touché par la déportation comme le souligne Daniel Martin dans La déportation dans le Puy-de-Dôme. Deux fac-teurs l’expliquent : tout d’abord sa situation de terre d’accueil proche de la ligne de démarcation. On recense en effet, entre 1936 et 1946, un afflux de 600 000 personnes, ce qui accentue l’incertitude quant au nombre exact de victimes de la déportation. Le deuxième facteur est la présence de nombreux maquis qui sont durement réprimés par les services de répression allemande, SD, Feldgendarmerie et Wehrmacht qui procèdent à 80 % des arrestations à partir de 1943. Ainsi comme l’indique Daniel Martin : "1 689 personnes (de na-tionalité française) arrêtées dans le Puy-de-Dôme furent envoyées dans les camps de concentration allemands et plus de la moitié n’en revinrent pas. Ce sont les jeunes gens de 18 à 30 ans qui fournirent le plus gros contingent (754) mais ni les enfants et adolescents, ni les femmes ni les personnes âgées ne furent épargnés."

De 1940 à 1942, on recense 40 arrestations suivies de déportations, ce chif-fre s’explique par la situation de zone dite "libre" du Puy-de-Dôme. Il faut cependant établir une distinction entre les personnes arrêtées pour motif po-litique "communisme" par le gouvernement de Vichy dès 1940-1941 et les

Certificat de non-appartenance à la race juive. AMRID (Droits réservés)

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arrestations des premiers résistants et personnes d’origine israélite qui inter-viennent fin 1942. Le 3 octobre 1942, l’intendant de police Mayade ordonne que les commerçants juifs de Clermont collent sur la vitrine de leur magasin une affiche jaune.

Ce sont les Juifs qui paient le plus lourd tribut, en 1941, 1 776 Juifs français sont recensés dans le département, 188 sont déportés, soit près de 16 % et 86,7 % d’entre eux sont morts dans les camps d’extermination. Les Juifs déportés en 1942 résident en zone libre, c’est-à-dire dans la partie de France non occupée par les Allemands où le gouvernement de Vichy est souverain et exerce son autorité sans partage. En février 1942, des affiches apposées dans les mairies appellent les chefs de famille à se faire recenser. Tous les membres doivent être déclarés et indiquer l’emploi occupé, les moyens d’existence, le tout sous contrôle de la municipalité et de la gendarmerie locale. Les pères de famille n’imaginaient pas que pour beaucoup d’entre eux, ils signaient l’arrêt de mort de leurs familles. En juillet, une convention est signée entre Pierre Laval et les SS de Paris sur la déportation des Juifs de France. Bousquet est alors secrétaire général de la police, des réunions ont lieu avec les Allemands pour organiser l’arrestation des Juifs étrangers à Paris. Elle aboutissent le 16 juillet 1942 aux événements tragiques connus sous le nom de la "rafle du Vélodrome d’Hiver » où 12884 Juifs étrangers (hommes, femmes et enfants de moins de 16 ans) sont arrêtés par les gendarmes et les GMR.

Le 26 août 1942, à Herment, dans le Puy-de-Dôme, des gendarmes ras-semblent devant l’hôtel Moderne des femmes et des jeunes qui figurent sur la liste des étrangers établie à la demande de l’État français, pour les envoyer en déportation. Ils sont une soixantaine de Juifs étrangers réfugiés à Herment et aux alentours. Une seconde rafle a lieu le 27 février 1943 et une troisième le 1er novembre 1943.

Cette même année, la Résistance s’organise, les Allemands décident alors de démanteler les organisations de résistance, 681 personnes sont arrêtées dans le Puy-de-Dôme.

1. La répression allemande : rafles et exécutions

1943-1944

2 septembre 1943 : les Ardents•

Le 2 septembre 1943, un camion et une voiture de la Gestapo gagnent le Col de Ceyssat. Les Allemands ont découvert la véritable activité des "bûche-rons". Les maquisards n’ont pas le temps de se sauver. Trois d’entre eux, âgés d’une vingtaine d’années sont tués, trois blessés et deux meurent en dépor-tation. La destruction du maquis de Ceyssat oblige les membres du maquis à cesser quelque temps leur activité. Le maquis de Brousse le remplace mais est aussi détruit par l’ennemi en février 1944.

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1• er octobre 1943, les rafles de l’état-major

Le Capitaine Hugo Geissler, chef de la délégation de la police allemande auprès du gouvernement décide de mener une offensive contre l’état-major de la XIIIe division militaire à Clermont-Ferrand, le 1er octobre 1943, à 9 heures. Elle concerne à la fois, le bâtiment du 35, cours Sablon, l’Inspection centrale du Matériel à Romagnat, la Direction de ce service à Royat ainsi qu’un autre organisme du Matériel à Clermont-Ferrand. Le bâtiment du cours Sablon est rapidement encerclé par la Feldgendarmerie, le lieutenant Arno Weser du SD de Vichy donne l’ordre de conduire toutes les personnes arrêtées à la caserne du 92e pour vérification d’identités. Parmi celles-ci on peut noter la présence du commandant Henri Madeline, adjoint du chef régional de l’ORA, le com-mandant de gendarmerie Antoine Fontfrède et Henri Weilbacher, secrétaire de l’Intendant de police. D’autres arrestations suivent à la direction du maté-riel, rue Pascal, à Romagnat où le capitaine de la Blanchardière est appréhendé. Au total, 32 personnes dont 16 officiers sont emprisonnées. Certains détenus importants sont transférés à Vichy, d’autres à la prison allemande du 92e ou envoyés en déportation. Henri Weilbacher, François Marzolf et le commissaire Marc Juge seront fusillés les 22 et 24 mars 1944.

26 Juin 1943 et 25 novembre 1943 : rafles de l’Université de • Strasbourg

Le 26 juin 1943, la cité universitaire Gallia rue de Rabanesse est assiégée par la Feldgendarmerie suite à l’assassinat de deux officiers allemands au domicile du professeur Flandin. 35 arrestations s’en suivent, 26 étudiants sont déportés et 9 meurent en Allemagne.

Le 25 novembre 1943, une véritable opération de police est menée contre l’Université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand. De nombreux étu-diants font partie des réseaux de résistance et l’Université représente aux yeux des Allemands : "un foyer d’action subversive tant par ses étudiants… que par ses professeurs." comme l’indiquent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne. Les ordres sont d’arrêter 17 personnes, en majorité des profes-seurs dont les noms ont été relevés à la suite des actions menées contre le réseau Mithridate et l’ORA, mais également d’appréhender les étudiants d’origine juive et tous les Alsaciens et Lorrains âgés de 18 à 30 ans. Pour mener à bien l’ensemble de cette opération, la Gestapo a demandé l’appui d’une unité de la Luftwaffe placée sous le commandement du colonel Eltsatz. Pour ne pas attirer l’attention, le convoi doit partir d’Aulnat où stationnaient les aviateurs allemands. Le jeudi 25 novembre 1943, tous les effectifs dispo-nibles de la Gestapo de Clermont-Ferrand et de Vichy pénètrent dans les bâtiments de l’Université. C’est Blumenkampf et Ursula Brandt qui mènent les interrogatoires assistés de 6 spécialistes et du milicien Georges Mathieu. Ce dernier se rend au secrétariat afin de recueillir la liste des adresses des

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professeurs au cas où certains d’entre eux n’auraient pas eu cours à l’heure de l’arrestation. Toutes les personnes appréhendées sont réunies dans la cour de l’Université. Le professeur Paul Collomp refuse d’obtempérer, il est abattu sur place. Au total près de 800 personnes sont arrêtées et transfé-rées à la prison militaire allemande du 92e. Après plusieurs vérifications, 83 d’entre elles sont maintenues prisonnières. Les femmes sont libérées à l’ex-ception de celles d’origine étrangère, alsacienne-lorraine ou ayant un nom à consonance juive. Les étudiants israélites sont envoyés à Drancy, les étran-gers dans des camps d’internement et les Alsaciens-Lorrains à Compiègne d’où 39 sont déportés et 11 meurent dans les camps.

12 décembre 1943 : rafle de Saint-Maurice-ès-Allier•

Blumenkampf décide de mener une action importante dans la région de Vic-le-Comte et Saint-Maurice où il a découvert qu’une habitation servait de refuge aux réfractaires au STO et qu’un membre important de la résistance, Lucien Jarrige "Lamy" résidait à Vic-le-Comte. La maison en question est en réalité le PC d’Antoine Llorca dit "Laurent". De plus, Lucien Jarrige était déten-teur d’un porte-documents contenant des informations capitales sur l’organi-sation des MUR du Puy-de-Dôme et la liste des collaborateurs à éliminer. Le 12 décembre 1943, les Allemands procèdent à l’arrestation de 15 personnes, le village sera pillé et les maison brûlées.

16 décembre 1943 : rafle de Billom•

Le matin du 16 décembre 1943, Hugo Geissler, à la recherche du PC des MUR, déclenche une vaste opération punitive sur Billom. Deux mille hommes sont réquisitionnés, membres de la Gestapo de Vichy, de Clermont-Ferrand, un bataillon de la Feldgendarmerie de Gannat et des unités motorisées alle-mandes de Clermont. La ville de Billom est occupée en totalité, les résistants n’ont pas d’échappatoire. Geissler arrête 200 personnes parmi lesquelles se trouvent quelques dirigeants locaux des MUR. Il saisit également une grosse quantité d’armes et de munitions. Les résistants arrêtés seront conduits dans un des bâtiments de l’ancienne caserne du 92e, certains sont fusillés sans même subir d’interrogatoire.

Le 16 décembre, les FTP du groupe Gabriel Péri déclenchent une attaque contre l’hôtel du Globe à Clermont-Ferrand. En représailles, Blumenkampf demande la mort de 24 personnes arrêtées à Billom qui doivent elles-mê-mes creuser leur tombe. Cette exécution supervisée par Kaltseiss et Roth, aura lieu le 20 décembre 1943 au stand de tir du 92. Les autres prisonniers arrêtés à Billom partiront vers les camps de concentration de Flossenburg et Buchenwald.

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1• er mars 1944 : rafle de Volvic

Le matin du 1er mars 1944, Lespinasse est encerclé par les troupes alle-mandes composées d’une quarantaine d’hommes de la Luftwaffe, 14 feldgen-darmes et un officier. Très vite, le PC est investi, seuls trois maquisards sont présents : Jean Lesme dit "Milano" originaire de Volvic est abattu, Georges Marchadier et Guy Penide sont arrêtés et faits prisonniers en compagnie de trois paysans du hameau : Marcel Chaput, Marius Chaput et Antonin Paquet.

En tout début d’après-midi, la colonne allemande se rend à Volvic. L’hôtel Martinon, qui servait de refuge aux résistants du 1er Corps Franc d’Auvergne, est encerclé ainsi que la Place de l’Eglise. Raymond Labaune "Irma", Edmond Leclanché dit "Tonio" et Maurice Pérol qui se cachaient à l’hôtel Martinon parviennent à s’échapper et tuent un Allemand du nom d’Otto Staage. Les clients de l’hôtel et les familles de Volvic sont rassemblés devant l’hôtel du Commerce. Une fusillade s’ensuit au cours de laquelle de nombreux habitants sont touchés y compris des enfants. Une vingtaine de personnes sont arrê-tées et transférées à la prison militaire allemande du 92e. Avant de partir, les Allemands mettent le feu à l’hôtel du Commerce et aux maisons alentour.

8 mars 1944 : attentat et rafles de la Poterne•

Le 8 mars 1944, un détachement de troupes allemandes passe dans la rue Montlosier en contrebas de la terrasse du quartier de la Poterne. Une grenade explose, la troupe riposte. Les soldats assaillent la place, fouillent et incendient les maisons les plus proches de l’avenue. Les habitants tentent de s’enfuir sous les tirs des armes. Rue Montlosier, les immeubles sont fouillés, les SS arrêtent et déporteront un groupe d’étudiants en conférence au cercle Saint-Louis. D’autres rafles d’étudiants sont organisées à l’Académie de Billard, au Café des Sports et autres lieux fréquentés par les jeunes.

Ottmann, chef de la section criminelle du SD de Vichy, organise une série de rafles dans les cafés des quartiers de la place de Jaude, de la Gare où résident de nombreux réfugiés d’origine alsacienne. On estime les arrestations à plus de 100 personnes. A cela, s’ajouteront les exécutions de cinquante résistants considérés comme des "ennemis du Reich" comme le soulignent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne.

Il s’en suivit une série d’opérations de représailles menées par les occupants : le 1er avril, rue Fontgiève à Clermont-Ferrand on dénombrera 26 arrestations, une vingtaine à Randan le 19 avril 1944 et 26 à Aigueperse le 8 mai 1944.

21 juin 1944 : rafle de Gerzat•

Le 21 juin 1944, le major Bambach établit une liste de 40 résistants à appré-hender. Ce même jour, la commune de Gerzat est investie par la Gestapo et les miliciens. En peu de temps, trente-cinq Gerzatois (hommes et femmes) sont arrêtés, un seul est relâché. Tous les autres sont transférés à la prison

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allemande du 92e, torturés puis envoyés en déportation. Cinq seulement re-viennent des bagnes nazis. Parmi les personnes appréhendées à Gerzat, se trouvait Mme Simone Godard, institutrice et directrice de l’école, elle-même résistante, arrêtée à la place de son mari. Elle sera déportée au camp de Belzig où elle décèdera le 21 avril 1945, cinq jours avant la libération du camp. Son fils, Serge Godard est l’actuel maire de Clermont-Ferrand.

13 juillet 1944 : les fusillés d’Orcines•

Le 13 juillet 1944, 24 résistants sont fusillés sur l’initiative du chef milicien, Jean Filliol. Ces hommes venaient pour la plupart des quatre départements d’Auvergne. Ils sont tous extraits de leur cellule de la prison militaire alle-mande du 92 de Clermont-Ferrand. Des membres du SD allemand les ont conduits dans une carrière d’Orcines, tout près de Clermont-Ferrand où ils les ont fusillés. L’un d’entre eux était le maire de Saint-Floret.

Leurs noms sont inscrits sur le monument aux Morts d’Orcines : "A la mé-moire de 24 patriotes morts en ce lieu fusillés par les Allemands le 13 juillet 1944". Certains d’entre eux n’avaient que 17 ans. Louis Dabert "Jean-Pierre" un des premiers résistants d’Auvergne, était un militaire courageux, un organisateur remarquable et un chef estimé. Le "fusillé inconnu" a maintenant une identité, il s’agirait d’Edouard-Louis Carmarans, un maquisard aveyronnais, né en 1903 à Enguialès. Celui-ci aurait participé aux combats du mont Mouchet et aux com-bats du réduit de la Truyère, dans la région de Chaudes-Aigues (Cantal). Lors des

Les fusillés d’Orcines. AMRID (Droits réservés)

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combats vers le bois de Vedrines (entre Jabrun et Chaudes-Aigues) son camion aurait pris feu. Lorsque la Wehrmacht et le SD ont ratissé ce secteur, ils ont fait prisonnier Édouard Carmarans et l’ont conduit à la prison militaire allemande du 92 à Clermont-Ferrand. De là, il a été conduit avec les 23 autres résistants à la clairière d’Orcines. Une demande de rectification de jugement déclaratif de décès est en cours car Edouard-Louis Carmarans a été déclaré mort dans le bois de Védrines. Cet acte est nécessaire pour ses ayants droit.

• 15 juillet 44 : les fusillés de Bourg-Lastic

Bourg-Lastic et Messeix, communes proches de la Corrèze, sont en 1944, depuis des mois, une région acquise à la Résistance. Après la dissolution du camp de Saint-Genès-Champespe, les maquisards chevronnés sont regroupés dans les première et deuxième compagnies FFI. Le 7 juillet 1944, une colonne de ravitaillement de la Wehrmacht est attaquée par surprise par la 3e compagnie de la zone 3 dans les gorges du Chavanon. Elle laisse sur le terrain 24 morts et 7 prisonniers, dont un milicien qui sera fusillé quelques jours plus tard. Ce convoi est chargé de ravitailler la garnison d’Ussel, encerclée par les FTP.

Le dimanche 9 juillet, c’est la fête patronale de Bourg-Lastic. Vers 19 heures, une fusillade a lieu en Corrèze et Bourg-Lastic est envahi. Tous les maquisards se dispersent, mais certains sont pris au piège par le déploiement du régiment ennemi. La première victime sera Monsieur Chalus, capturé dans les gorges du Chavanon. Il est abattu sur la place, sous les yeux de sa fillette de cinq ans qui se couche sur son cadavre. Tous les hommes sont rassemblés à la Mairie, certains sont relâchés, d’autres gardés. Parmi eux se trouvent des résistants. Un détachement du SD, ayant à sa tête le sinistre Hector Martin "Braun", est arrivé. Ce dernier, un Sarrois ayant séjourné avant-guerre dans la région, a été interné en 1919 au camp de Lastic, il connaît tout le monde.

Des interrogatoires sévères ont lieu. Vingt-quatre résistants sont condam-nés à mort, Vingt-quatre autres, dont plusieurs maquisards non identifiés, vont être envoyés en Allemagne. Ils partent le 14 juillet pour Clermont-Ferrand mais une lettre de dénonciation provoque l’arrestation de quatre d’entre eux, dont trois de la même famille. Ils sont déportés au Struthof puis à Dachau. Deux reviennent, mais l’un meurt quelques mois après. Deux femmes résis-tantes sont envoyées à Ravensbrück et survivent.

Le 15 juillet à l’aube dans un vallon désert du camp militaire de Lastic qui sert habituellement de champ de tir, un peloton d’exécution de la Wehrmacht, sous les ordres d’Hector Martin, fusille les condamnés par groupe de 5, semant ain-si le deuil et la douleur dans toute la région. Le maire de Bourg-Lastic, Pierre Chassagny, âgé de 75 ans, Lucien Giraud, 19 ans, sont parmi les 23 victimes, ainsi que 3 frères dont l’un père de 5 enfants. Messeix a aussi payé son tribut à la bestialité nazie. Deux instituteurs seront fusillés : Maurice Piedpremier et Louis Beaulaton. Le lendemain, une 24e victime sera tuée.

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En annexe page 67 : lettre de l’adjoint au maire de Bourg-Lastic adressée

au Préfet de la Région Auvergne concernant les événements du 15 juillet

1944. Archives départementales du Puy-de-Dôme 901 W 175. (Droits réservés)

22 juillet 1944 : rafle de la Plaine•

Une vaste opération policière dans les cités ouvrières Michelin de la Plaine, centre actif de la résistance, a lieu ce jour-là. Très vite, les issues sont bloquées et investies par les GMR. Des miliciens de Nîmes se dirigent vers le nord de Clermont-Ferrand et envahissent les cités. Les maisons des habitants sont fouillées, saccagées, pillées. Deux cents personnes sont arrêtées dont deux femmes qui sont alors dirigées vers l’école Diderot. Les miliciens recherchent certains résistants, ils ont une liste de noms, les interrogatoires se succèdent.

Le 22 juillet au soir, 110 arrestations sont maintenues. Les détenus sont incarcérés dans les écoles Amédée Gasquet, Godefroy de Bouillon et le lendemain, à la maison d’arrêt de Clermont-Ferrand. L’opération est un échec car les miliciens ne parviennent pas à trouver les "terroristes" qu’ils recherchent. 25 personnes sont remises à l’Office de Placement Allemand, place Delille.

Le 1er août 1944, les détenus sont emmenés en gare de Clermont-Ferrand, le voyage en direction de Vienne, en Autriche, sera long et pénible, il va durer quatorze jours. A leur arrivée, les prisonniers sont répartis dans des usines où ils se mélangent aux STO. Ils y resteront jusqu’à leur libération par l’Armée rouge qui démantèlera le matériel et l’enverra en URSS. Sur le chemin du retour, ils s’arrêteront à Ebensee, commando de Mauthausen, libérés par les Américains, ils verront l’horreur des camps de concentration. La Plaine était un centre de résistance actif, quarante-huit noms inscrits sur le monument aux Morts témoignent de son martyrologe. Des familles entières furent décimées. Tous les ans, aux dates anniversaires de ces événements tragiques, les familles et les autorités rendent hommage à ces résistants fusillés, raflés et morts en déportation.

2. Bilan de la déportation dans le Puy-de-Dôme

Toutes ces rafles ont pour but la destruction des organisations de résistance en particulier celles de l’Université et de Billom. Comme le souligne Daniel Martin le motif "résistance" : "englobe celle-ci sous tous ses aspects, depuis la résistance armée ou l’activité de renseignement jusqu’au refus du STO, l’écoute clandestine de la radio anglaise ou l’affichage de sentiments anti-allemands…"

Un nombre important de personnes a été fusillé pour cause de résistan-ce dans le département du Puy-de-Dôme puisqu’on en relève 238 selon les Archives Départementales (MO 7244). 60 % des déportés du Puy-de-Dôme l’ont été pour faits de résistance, 15 % en tant qu’otages, 10 % pour raison

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raciale (Judaïsme) et 8,5 % pour motif politique, c’est-à-dire l’appartenance au parti communiste ou à une activité syndicaliste marquée (voir tableau n°2 AD). Les déportés du Puy-de-Dôme ont été envoyés majoritairement à Buchenwald, 1/3, puis à Dachau 1/5 et Mauthausen à 13 %. Neuengamme, Auschwitz-Birkenau, Ravensbrück – seul camp de femmes – Dora et Flossenburg ont reçu entre cent et deux cents déportés puydômois. (Voir tableau n°5 AD).

Selon Daniel Martin, les déportés du Puy-de-Dôme ont subi un lourd tribut car plus de la moitié ne rentrèrent pas. A ce chiffre, s’ajoutent les personnes décédées à leur retour, des suites de maladies contractées en déportation ainsi que celles qui ont souffert et souffrent encore de séquelles physiques et mora-les dont elles ont été et sont encore victimes.

Comme on peut le constater dans le tableau n°3 de la série M des archives départementales du Puy-de-Dôme, établi par le comité d’histoire de la Seconde Guerre Mondiale, l’année de départ en déportation influait sur les pourcentages de retour. En effet, comme l’atteste Daniel Martin : "les déportés partis en 1942 ne rentrèrent pas à 90 %, ceux de 1943 à plus de 56 % et ceux de 1944 à 48 %". Plus le séjour se prolongeait plus les chances de retour diminuaient. L’objectif de ce travail n’est pas d’établir des comparaisons entre les camps de déportation aussi durs les uns que les autres. Toutefois, on peut dire qu’Auschwitz-Birkenau a été le plus meurtrier. C’était un camp d’extermination où périrent en majorité des milliers de Juifs et Tziganes. Si certains Juifs échappèrent à la déportation, c’est grâce à l’aide de personnes qui les cachèrent au péril de leur vie. Celles-ci sont reconnues depuis la loi de 1953, "Justes parmi les Nations". Monseigneur Piguet, évêque de Clermont-Ferrand pendant la seconde guerre a été l’un d’eux. Au début, après la défaite de juin 1940, Mgr Piguet est un fervent pétainiste. Sa pensée évoluera. Il demandera aux congrégations religieuses du diocèse qui avaient des écoles de cacher des enfants juifs. Pour cela, il sera convoqué par la Gestapo le 28 mai 1944 puis interné et finalement déporté à Dachau en passant par le Struthof. Il est le seul évêque français à avoir été déporté. C’est à Dachau que Gabriel Piguet procédera à l’ordination de Karl Leisner le 17 décembre 1944. Le 14 janvier 1945, il est de retour à Clermont-Ferrand.

Le 22 juin 2001, le comité Yad Vashem a décerné à titre posthume à Gabriel Piguet la médaille des Justes parmi les nations, pour le sauvetage de familles juives.

A ce jour, le Puy-de-Dôme compte quarante-trois Justes (voir liste page 71).

En annexe pages 69 et 70 : tableaux n°2, 3 et 5 série M des Archives Départementales du Puy-de-Dôme. Droits réservés.

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IV. Les principaux événements de février 1944 à juin 1944

Au début de l’année 1944, les Allemands et leurs auxiliaires français vont renforcer leur position et perfectionner leur organisation. Les mois de jan-vier et février 1944 vont être vécus difficilement par les résistants du Puy-de-Dôme car les occupants vont multiplier les actions de répression. En réponse, la Résistance va élaborer des plans d’action et rassembler ses forces pour faire front.

1. Février 1944 : le plan du maintien de l’ordre

Pour maintenir l’ordre, les Allemands installent dans la région clermontoise des états-majors de liaison. A Clermont-Ferrand, l’état-major principal de liaison 588 (HVS 588) est présent du 1er février au 16 août 1944. C’est un organisme attaché à la Wehrmacht spécialisé dans la lutte contre les maquis. Il centralise les renseignements venant de toute l’Auvergne, de la Creuse, la Haute-Vienne, la Corrèze, la Dordogne, le Cher, l’Indre-et-Loire, la Vienne et la Charente pour les parties de ces départements situées en zone sud.

L’état-major de liaison 588 •

Le général de division Fritz von Brodowski est le commandant de l’état-major principal de liaison 588 qui est situé à côté de la préfecture régionale de Clermont-Ferrand. Son chef est le lieutenant-colonel Kurt Aweyden, il a sous ses ordres plusieurs chefs de bureau qui gèrent les "opérations", le "renseigne-ment", le "ravitaillement et l’administration", etc. Un état-major de liaison 785, spécialisé dans la lutte contre les maquis se situe dans un immeuble adjacent à la préfecture du Puy-de-Dôme.

La police allemande•

Elle est placée sous l’autorité du général SS Karl Oberg. Elle comprend :

- Le service de sécurité (der Sicherheitsdienst ou SD) et la police de sûreté (die Sicherheitspolizei ou SIPO). Ces deux formations sont plus connues, bien que le terme soit impropre, sous le nom de Gestapo par analogie avec la Geheim Staatspolizei ou police secrète de l’État qui sévissait en Allemagne. Le siège régional est à Vichy mais une antenne importante est située au 2, bis avenue de Royat à Chamalières.

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- La police de l’ordre (die Ordnungspoliezi ou ORPO) basée à Clermont-Ferrand, est une police militaire en uniforme chargée du maintien de l’ordre, de la répression des "terroristes".

- La feldgendarmerie n°932 (gendarmerie aux armées) est placée sous le commandement de l’état-major principal de liaison 588, elle est presque entièrement motorisée.

Ces formations sont composées d’Allemands fanatiques au service du ré-gime nazi et de quelques Français dont Jean Vernières.

Les services spéciaux de l’armée allemande•

Les agents de l’Abwehrstelle qui opèrent à Clermont dépendent de la cen-trale de Lyon. Leur activité consiste principalement à traquer les réseaux de résistance, ils les infiltrent, les sabotent et pratiquent également le contre-es-pionnage. Si l’agent est appréhendé avec les membres de l’organisation qu’il a dénoncée, il doit se laisser emprisonner puis s’évader. Les agents de l’Abwe-hrstelle actifs dans le Puy-de-Dôme étaient des anciens policiers français ou belges.

Les auxiliaires français •

Les services allemands engagés dans la répression contre la résistance ont recours aux autorités françaises du maintien de l’ordre dont la Milice, l’OPA et les indicateurs.

- La Milice : son rôle a déjà été évoqué, il sera renforcé avec la création d’une brigade spéciale dirigée à Vichy par Gilbert Blanchard dit Gil et de la franc-garde permanente de Marcel Venturini à Clermont-Ferrand. A partir du 1er janvier 1944, Joseph Darnand s’installe à Vichy. Le 20 janvier 1944, l’appareil juridique de la Milice se perfectionne sous l’impulsion de Darnand avec l’ins-tauration des cours martiales et d’une procédure expéditive aboutissant à la peine de mort. On recense sept cent soixante-dix miliciens pour la région clermontoise dont six cent dix pour l’agglomération de Clermont-Ferrand.

- L’OPA : office de placement allemand. Les bureaux sont situés, 16, place Delille à Clermont-Ferrand. Dans l’immeuble au numéro 20, se trouve la prison où les détenus sont incarcérés aux deuxième et troisième étages.

Tout individu peut y contracter un engagement, même si l’OPA est composé en grande majorité de membres de la Milice ou du parti populaire français. Les volontaires doivent suivre un stage à Paris au cours duquel, ils appren-nent le maniement des armes, la manière de perquisitionner, d’opérer une rafle etc.

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A la fin du stage, le futur inspecteur regagne son office de placement alle-mand où il reçoit une carte signée par le Kommandeur der Sicherheitspolizei und des Sicherheitsdienst de sa région l’accréditant dans son travail auprès des autorités allemandes et françaises.

Les inspecteurs de l’OPA armés de pistolets automatiques type "Herstal" opèrent en civil, ils traquent les réfractaires au STO, les résistants, les Juifs et les communistes. Au cours de leurs opérations, ils s’accaparent bijoux et objets de valeur.

- Les indicateurs : ils dénoncent les opposants au régime (les résistants) en envoyant des lettres anonymes aux autorités allemandes et françaises soit pour assouvir des vengeances personnelles, soit par appât du gain.

Le système de répression allemand se perfectionne afin d’appréhender les résistants qui vont intensifier leur action.

2. L’affaire du milliard de la Banque de France

Les FTPF ne reçoivent pas tout le matériel et les fonds qui leur sont destinés lors des parachutages. Aussi, le 9 février 1944, un commando dirigé par Henri Saintes alias Marceau, commissaire militaire FTP et Eugène Rougier, alias Marc s’empare du milliard de la Banque de France dont les billets sont fabriqués à Chamalières. Le wagon de la Banque de France, contenant un montant de 17 milliards de francs est stationné en gare de Clermont-Ferrand. Il est en partance pour Paris. L’opération se déroule sans incident. Cependant, la four-gonnette des résistants ne parvient pas à contenir l’ensemble du chargement. De nombreux sacs sont laissés sur place. L’argent prélevé pour la Résistance s’élève à 1 003 008 540 de francs. La police ne récupérera que 35 millions de francs.

Six membres de la Résistance sont arrêtés et identifiés : Rougier, Calverie, Chollet, Lothe, Waleski et Rey. Ils sont condamnés à mort et exécutés. Victor Lothe mourra au cours de son transfert pour Dachau.

3. Les Aciéries Aubert et Duval des Ancizes :

"l’usine du maquis"

Aubert et Duval est l’une des rares entreprises françaises à ne pas colla-borer avec l’occupant allemand dès juin 1940. A Manzat, se trouve un im-portant camp de réfugiés où se mêlent Polonais, Anglais, Belges, Espagnols, Luxembourgeois et Juifs d’origine étrangère. Les dirigeants d’Aubert et Duval aux Ancizes connaissaient l’existence de ce camp. Ils mettront tout en œuvre pour faciliter la vie de ces réfugiés en les intégrant aux activités de l’usine. De

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plus, Aubert et Duval est l’usine française qui a le moins "donné" au STO. Très vite, les Allemands espèrent s’approvisionner auprès des aciéries des Ancizes en matière première transformée. Ils font pression sur les dirigeants de l’en-treprise mais les produits demandés ne sont jamais livrés grâce à divers pré-textes fournis comme les sabotages, qui servent à justifier la non production de matériel de guerre, ou les rebuts. La consigne est de ne rien livrer aux Allemands. Ces derniers ne tardent pas à se rendre compte que l’on se joue d’eux, que les dirigeants de l’usine sont complices de l’opération et que l’usi-ne des Ancizes est un nid de résistance. On l’appelle d’ailleurs dans la région "l’usine du maquis".

Londres avait donné l’ordre de saboter dès que cela serait nécessaire les usines Aubert et Duval. La direction ne parvenant pas à freiner suffisamment d’elle-même sa production, l’aide nécessaire vint du sabotage organisé par le maquis. Cette même direction a indiqué où il fallait provoquer une explosion afin d’assurer l’immobilisation partielle de l’usine.

Un premier sabotage d’envergure auquel participe une quinzaine de person-nes, est organisé le 13 novembre 1943. Il consiste à la destruction du château d’eau qui alimente l’usine, le transformateur est également atteint ainsi que les disjoncteurs. Un second a lieu le 18 février 1944 avec cette fois sept ou huit saboteurs.

4. Tentative de sabotage et bombardements

des usines Michelin

A la demande de Londres, le bombardement des usines Michelin est programmé par la Résistance car la production était utilisée par les nazis. Cependant, une telle entreprise engendrerait des pertes civiles et un manque à gagner pour les ouvriers. Émile Coulaudon dit "Gaspard" réunit son corps franc composé de "Irma, Buron, Judex et Dumas", Henry Ingrand supervise les opérations. Après plusieurs interrogations, la décision est prise de bombarder l’usine des Carmes qui est le point clé du circuit de fabrication, ce qui devait entraîner l’arrêt des usines de la ville.

Le dimanche 15 janvier 1944, à 5 heures du matin, l’équipe du corps franc est sur le point de passer à l’action mais une patrouille de gendarmes survient et les oblige à ralentir le processus. A 6 heures du matin, les bombes sont lan-cées mais les systèmes de sécurité se mettent en action aussitôt et l’incendie est circonscrit. L’opération a avorté. Son échec entraînera le bombardement du 16 mars 1944.

Le 10 mars 1944, la base d’Aulnat va être bombardée par 33 Lancaster de la Royal Air Force.

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Le 16 mars 1944, les alliés bombardent les usines Michelin, les dégâts sont lourds, en effet, comme l’attestent G. Lévy et F. Cordet dans A nous Auvergne : "30 maisons sont détruites, 100 gravement endommagées, 200 tou-chées. Il y a plus de 19 morts et blessés.". Le maréchal Pétain se rendra sur les lieux le 19 mars.

Dans la nuit du 25 au 26 avril 1944, le groupe des "Truands" de Jean Mazuel dit "Judex" fera exploser une vingtaine de pylônes autour de Clermont-Ferrand, la ville sera ainsi paralysée pendant quelques jours.

5. Vers l’unification de la Résistance

Sous l’impulsion d’Henry Ingrand, le 20 janvier 1944, à Aubière, le Comité départemental de Libération se réunit pour la première fois. Émile Coulau-don, chef départemental des MUR, assure la présidence du comité avec les principaux responsables de la Résistance du Puy-de-Dôme. Cependant, cette première tentative d’unification n’aboutira pas en raison de trop nombreuses divergences entre les responsables des différents mouvements de résistance présents.

6. Les projets de réduits dans le Massif Central

L’idée de constituer un réduit militaire dans une région favorable de la zone sud de la France a été formulée par l’état-major du général de Gaulle en oc-tobre 1942, lors de la mission d’Henri Frénay (chef du mouvement Combat) à Londres. De retour en France, Frénay étudie le projet avec d’autres chefs de la résistance intérieure et établit un rapport le 28 janvier 1943 dans lequel il propose l’installation de plusieurs réduits dans les régions montagneuses des Alpes, du Jura, et du Massif Central à condition d’avoir l’assurance formelle de Londres que ces maquis soient ravitaillés en vivres et munitions.

A partir de janvier 1944, l’imminence d’un débarquement allié et les pro-blèmes provoqués par la présence de nombreux maquisards dans les monts d’Auvergne pour échapper au STO, amènent les Mouvements Unifiés de Résistance d’Auvergne à étudier concrètement le projet d’un réduit, mais sans aucune coordination avec le Bureau Central de Recherches et d’Ac-tion en Angleterre. Dans l’ignorance de ce qui se passe à Londres, Émile Coulaudon, dit "Gaspard", devenu chef de L’Armée Secrète en R6 (Puy-de-Dôme, Cantal, Allier, Haute-Loire) en avril après l’arrestation de son chef "Christophe", recherche des liaisons avec l’extérieur et réclame des cadres, des armes et munitions. Il rencontre le major "Philippe" chef des réseaux Buckmaster du SOE : Special Operation Executive, réseau de l’intelligence service britannique. Très vite l’aide lui parvient en Margeride, d’abord le 8

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mai par une mission Jedburgh puis le 10 par un gros parachutage d’armes non loin de la Truyère qui sera suivi de beaucoup d’autres. Ainsi "Gaspard" se croit assuré de l’appui du haut commandement allié. Pourtant il est clair que la décision des chefs auvergnats de constituer des réduits est une initiative locale bien antérieure à l’élaboration du plan "Caïman" et de la force C. Ce plan, confié au colonel Billotte pour étude en juin 1944, envisageait dans le cadre du débarquement en Provence en août 1944 de soutenir la résistance intérieure en Auvergne avec des troupes aéroportées. Il fut abandonné le 31 juillet.

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V. Les combats du mont Mouchet

1. La mobilisation du 2 mai 1944

Le 2 mai 1944, près de Paulhaguet (Haute-Loire) non loin du mont Mouchet, une réunion des chefs des mouvements de résistance d’Auvergne, sous la pré-sidence de Henry Ingrand chef des MUR, prend la décision de constituer trois réduits :

Le réduit du mont Mouchet, situé sur un large plateau de 1 000 à • 1 500 mètres d’altitude, est à cheval sur les trois départements de la Haute-Loire, du Cantal et de la Lozère et fait environ 15 kilomètres de diamètre. Le réduit de la Truyère, vers Chaudes-Aigues, beaucoup plus difficile d’ac-• cès, est protégé au nord par les gorges de la Truyère. Le réduit du Lioran est au pied du Plomb du Cantal. •

La décision est prise à l’unanimité mais non sans heurt à cause de diver-gences sur le rôle précis à donner aux réduits. Elle semble s’imposer à tous par la situation difficile de la Résistance en Auvergne en raison des attaques et des risques encourus par les résistants et réfractaires.

Les représentants de l’organisation de résistance de l’armée (ORA) ne participent pas à cette réunion car ils n’ont pas été invités, mais Gaspard as-sure qu’il sera aidé par des officiers de carrière pour encadrer les réduits. En s’installant au mont Mouchet il choisit comme chef d’état-major le colonel Garcie Gaston. Le colonel Mondange Thomas est nommé responsable mili-taire du réduit de la Truyère. L’ordre de mobilisation générale n’intervient que le 20 mai 1944. Cependant, la décision de rejoindre immédiatement le maquis avait commencé à circuler le 8 mai. Le 20 mai ne fait qu’accélé-rer le mouvement. A pied, en voiture, par car ou par le train, les volontai-res de toute la région et spécialement du Puy-de-Dôme convergent vers la Margeride. De nombreux Clermontois ont répondu à l’appel de mobilisation générale du 20 mai 1944 pour les rassemblements.

En quinze jours, 2 700 hommes rejoignent le mont Mouchet, 1 500 la Truyère. L’engagement est tel que l’on a dû ouvrir un passage à Saint-Genès-Champespe, à la limite du Puy-de-Dôme et du Cantal.

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Les maquisards du mont Mouchet, bien armés grâce aux parachutages an-térieurs, sont répartis en 15 compagnies occupant des emplacements sur le pourtour de la zone. La Margeride avait reçu en effet plus de 55 tonnes d’ar-mes et matériels dont 3 000 armes individuelles, 150 fusils mitrailleurs, 3 600 à 4 000 grenades. Six compagnies sont dotées de mitrailleuses légères et de bazookas. Beaucoup de jeunes cependant n’ont pas le temps de se familiariser avec cet armement par manque de formation.

2. L’assaut allemand contre le mont Mouchet

Tout au long du mois de mai 1944 les Allemands apparaissent bien ren-seignés sur les regroupements des maquis en Margeride. En avril, des ac-crochages avaient opposé maquisards et Allemands et avaient apporté des renseignements précis qui permettaient de délimiter les zones de regrou-pement. Le général von Brodowski qui commande l’état-major principal de liaison de Clermont-Ferrand et qui avait la responsabilité du maintien de l’ordre dans le Massif central, réclame des troupes au commandant al-lemand pour la zone sud. Le 3 juin, 1800 hommes environ, sous le com-mandement du général Jesser, sont mobilisés pour "rétablir l’autorité des troupes d’occupation dans le Cantal, combattre et détruire par tous les moyens les bandes existantes".

Sur la scène nationale, l’annonce du débarquement du 6 juin 1944 va créer une exaltation collective, la nouvelle court dans toute l’agglomération et beaucoup de personnes ont du mal à cacher leur joie. Dans le camp alle-mand, elle va générer une certaine fébrilité, notamment à la prison militaire allemande du 92, où certains détenus vont être changés de cellule.

Le 9 juin à 15 heures la circulation des véhicules est interdite sur les routes de campagne, la mise en place des troupes pour l’assaut du mont Mouchet est terminée.

Le 10 juin 1944, dans l’après-midi, l’attaque allemande est menée par 3 co-lonnes avec mitrailleuses sur pneus, mortiers légers, canons anti-aériens de calibre 20 mm. convergeant vers le réduit :

L’une sur l’axe ouest-est, Saint-Flour, Ruynes-en-Margeride, Clavières • (400 à 450 hommes) côté cantal.

L’autre, sur l’axe nord-sud Brioude, Pinols, (500 à 600 hommes). •

La troisième venant du sud en direction de Saugues et Monistrol (500 à • 600 hommes).

Des combats très violents vont se dérouler jusqu’à la nuit sur les axes de pénétration du réduit :

à Saugues d’abord où les maquis du réduit de Venteuges (Haute-Loire) • bloquent la colonne sud ;

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à Pinols, où 2 compagnies du maquis et le célèbre corps franc des Truands • stoppent la progression de l’adversaire ;

à Ruynes-en-Margeride où les Allemands fusillent 27 civils ;•

autour de Clavières en flammes où la colonne allemande venant de Saint-• Flour progresse, quand elle le peut, sur deux itinéraires au milieu de plu-sieurs compagnies de maquisards.

Toutefois les attaques déclenchées trop tard dans la matinée ne permettent pas l’encerclement du réduit et obligent les Allemands à se replier. Dans la soirée du 10 juin, "Gaspard"et son état-major décident un repli général vers la Truyère pour le 11 juin au matin. Durant ce temps, le poste de comman-dement est transféré à Paulhac en Margeride. Le colonel Garcie se rend dans le réduit de la Truyère pour demander au colonel Mondange que des renforts soient dirigés sur Clavières dans la nuit.

Le dimanche 11 juin 1944, vers 10-11 heures, l’attaque allemande reprend avec un effectif d’environ 2 700 à 2 800 hommes avec artillerie et aviation, qui s’élance vers le mont Mouchet sur trois axes.

Murat

Cantal

Saint-Flour

Buynes

Pinols

Langeac

Haute-Loire

vers Brioude

Paulhaguet

Paulhac

Lozère

Monistrol

Le Malzieu

vers Mendevers Mende

St Chély d'Apcher

Venteuges

Fridelons

Truyè

re

Gorges de l'Allier

0 3 500 m

vers Plomb du Cantalet Lioran

20/6

20/6

11/6

20/620/6

20/6

10/6

10/6

10/6

2/6

10/6

Clavières mont Mouchet 1405

Chaudes-Aigues

LEGENDESlimites de départements

repli des maquisards

zone des réduits

direction d'attaques allemandes

Saugues

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Les combats sont acharnés à Saugues, Pinols et Clavières où des compagnies contiennent la progression allemande pendant que d’autres s’échappent par la route du sud laissée libre avec une seule idée : trouver une voie de retraite ou périr. A la nuit, toutes les compagnies avaient pu s’échapper, et les trois colon-nes allemandes n’avaient pas réussi à faire leur jonction grâce au courage et à la résistance des maquisards.

3. Le bilan des pertes

Coté français, les documents, enquêtes et publications donnent un total de 119 à 126 maquisards tués. En majorité, ils appartenaient à la 26e compagnie venant de la Truyère près de Clavières, à la 14e compagnie située au nord du dispositif et aux Truands au sud. On dénombre également 60 blessés ainsi que 54 à 57 civils fusillés.

Les pertes allemandes en Margeride se situent entre 25 et 37 tués et une soixantaine de blessés. Les sources allemandes et les enquêtes menées par E. Martres, publiées dans son article intitulé : Le Cantal de 1939 à 1945 ; les trou-pes allemandes, à travers le Massif Central, confirment la modestie des pertes ennemies.

4. Le combat de la Truyère

Le réduit de la Truyère était tenu depuis octobre 1943 par le maquis Revanche rattaché à l’AS. Il est composé de 300 à 400 hommes environ. Après le 20 mai 1944, 1 300 hommes répartis en 14 compagnies sont ras-semblés sur le plateau entre la Truyère et le Bès. A la veille de l’attaque allemande l’effectif, brutalement renforcé par des hommes échappés du réduit de la Margeride dans la nuit du 11, atteint environ 3 000 hommes. Les Allemands, informés par leurs reconnaissances aériennes et les divers accrochages qui se déroulent autour du réduit, localisent dès le 18 mai avec précision le nouveau rassemblement.

Le mardi 20 juin l’assaut allemand se développe à partir de 3 axes de pé-nétration avec un effectif de 1 700 à 2 000 hommes et pour ne pas renou-veler les erreurs de la Margeride, l’attaque est déclenchée dès 8h30. Assaillis de toutes parts, les maquisards défendent pied à pied leurs positions. Les villages d’Anterrieux, Pradelles, Saint-Martial où "Gaspard" a son PC, sont totalement détruits. Dans de nombreux hameaux, des maisons sont pillées et incendiées. Devant la supériorité du feu allemand "Gaspard" donne alors, dans l’après-midi, l’ordre d’abandonner le réduit et de décrocher à la nuit en direction du Plomb du Cantal. Dans la nuit du 20 au 21 les maquisards abandonnent tout le matériel, notamment les véhicules dont une partie est détruite avant leur départ. Ils se sont bien battus et la grande majorité des hommes a pu échapper à la mort ou à la capture en traversant la Truyère qui heureusement était très basse et guéable en de nombreux points.

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Les pertes françaises se chiffrent le soir du 20 juin à 113 combattants FFI et à une dizaine de civils qui seront abattus dans les jours suivants. On dénombre une trentaine de prisonniers dont le sort reste inconnu. Les pertes allemandes sont faibles et se situent autour de 15 tués.

Après les combats du mont Mouchet, les responsables de la Résistance constatent que les grandes concentrations d’hommes et de matériel rendent les forces de libération plus vulnérables. En analysant cette situation, ils décident de changer de stratégie.

Refusant un affrontement massif, les forces de libération qui étaient concen-trées au mont Mouchet s’éclatent en plusieurs groupes. La tactique adoptée sera la guérilla qui permettra à ces groupuscules de se rapprocher de Clermont-Ferrand en l’encerclant. Il est important de créer un climat d’insécurité autour des colonnes allemandes. Afin de parvenir à la libération de la capitale régionale, il s’avère nécessaire qu’une certaine union règne au sein des formations de résis-tance. En effet, chaque mouvement veut prendre une part active à la libération de la ville. Un manque d’organisation mettrait les mouvements de résistance en concurrence et ne ferait qu’accroître leurs divergences politiques. Après de nombreux pourparlers, les groupements arrivent à une fusion qui est effective le 13 juillet 1944 au barrage de l’Aigle (Cantal, limite Corrèze).

5. Unification des Mouvements de Résistance :

13 juillet 1944

Les FFI sont créées (Forces Françaises Intérieures) le 1er juin 1944 par or-donnance du Comité Français de Libération Nationale. Leur commandant ré-gional est le général de La Laurencie. Il ne prendra jamais ses fonctions car Londres s’y opposera formellement. En effet, il faisait partie du tribunal militai-re qui avait condamné le 2 août 1940 le général de Gaulle à la peine de mort. Il sera remplacé par son adjoint Émile Coulaudon dit colonel "Gaspard". Le Chef d’état-major est le colonel Roger Fayard, membre de l’ORA (Organisation de Résistance de l’Armée). Le lieutenant-colonel Robert Huguet est responsable des 1er et 3e bureaux. Une étape essentielle de l’histoire de la Résistance vient d’être franchie. FTPF, ORA, Milices patriotiques se joignent aux MUR pour réaliser l’unité complète de la Résistance sous le sigle FFI.

L’ordonnance du 9 juin 1944 du Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF) définit les FFI de la façon suivante :

"Ensemble des unités combattantes ou de leurs services qui prennent part à la lutte contre l’ennemi sur le territoire métropolitain, dont l’organisation est re-connue par le gouvernement et qui servent sous les ordres des chefs reconnus par lui comme responsables. Ces forces armées font partie intégrante de l’armée française et bénéficient de tous les droits et avantages reconnus aux militaires par les lois en vigueur."

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Les autorités allemandes et le gouvernement de Vichy les considèrent en outre comme des rebelles, passibles de la peine capitale.

Entre le mois de juin et le 25 août 1944, les résistants multiplient les atten-tats et les sabotages. En effet, on dénombre 121 actions "terroristes" dans la région clermontoise. Les sabotages d’installations ferroviaires (53,60 %) et téléphoniques (21,40 %) sont également en nombre important, la Résistance cherche à empêcher les liaisons ennemies.

De leur côté, les Allemands procèdent à de nombreuses perquisitions et opérations punitives. Les maquisards effectuent des missions afin d’évacuer les prisons et hôpitaux où sont enfermés de nombreux prisonniers politiques. On compte 7 opérations d’évasion entre le mois de juin et le 25 août 1944 qui ont permis à 118 détenus d’échapper aux polices allemande et française. Le 13 août, une opération FTP de grande envergure a lieu à la prison de Riom où 70 résistants parviennent à libérer 114 détenus politiques.

Dans l’organisation du commandement lors de la création de l’état-major FFI, la région Auvergne a été divisée en 29 zones, Clermont en est la 17e. Chacune possède un chef civil et un chef militaire. Depuis le débarquement de Provence du 15 août 1944, l’état-major régional FFI et le commissaire de la République d’Auvergne Henry Ingrand se sont installés à La Tour d’Auvergne et au Mont-Dore. Les forces FFI se rapprochent de Clermont-Ferrand. Les premiers indices de la retraite allemande se précisent.

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VI. La libération de Clermont-Ferrand et de sa région

A La Tour d’Auvergne, les responsables FFI réfléchissent à la manière de procéder afin de libérer la capitale régionale totalement encerclée. Ils en-visagent la mise en place des nouvelles autorités dont le commissaire de la République et le préfet et souhaitent empêcher les vengeances personnelles. Des contacts sont établis avec les Milices patriotiques de la ville placées sous la direction du lieutenant-colonel Tabouis (Barrère) afin que la prise du pou-voir se déroule dans le calme. Certains groupes FFI font des incursions dans la ville. Les Milices patriotiques apposent de nombreuses affiches destinées à informer les Clermontois, leur demandant de rester calmes, de suivre les directives données.

En effet, le jour de la libération, le nouveau pouvoir ne supporte aucun excès quelle qu’en soit la forme. Des mesures sont mises en place par le commandant d’armes de Clermont le lieutenant-colonel Tabouis. Elles figu-rent sur les affiches diffusées dans la ville dont : la fermeture des cafés, les restaurants seront autorisés à servir les repas de 11 heures à 14 heures et de 19 heures à 21 heures. Tous les magasins seront fermés sauf ceux d’alimenta-tion. Les ouvriers devront suivre les consignes de leurs organismes syndicaux respectifs. Aucune exécution ne devra être faite. Un tribunal sera constitué à cet effet afin de juger les traîtres ayant travaillé au profit de l’ennemi.

Le 25 août 1944, le couvre-feu est institué de 23 heures à 5 heures du matin. Les laissez-passer doivent être demandés au commissariat central. Le feu sera ouvert sur toute personne trouvée dans la rue entre ces heures et ne s’arrêtant pas aux sommations.

Le lieutenant-colonel Tabouis obtient du préfet Brun la libération de 98 détenus politiques sur les 103 que comptent encore les prisons de l’agglo-mération. Les Allemands préparent méthodiquement leur départ avec des destructions progressives.

1. La libération de la ville de Thiers

Les FFI locaux apprennent dans la nuit du 23 au 24 août que la garnison allemande se prépare au départ. En effet, les 400 hommes du 18e bataillon de grenadiers SS de la Panzer Division "Horst Wessel" sont encore dans la ville attendant un ordre de départ de Vichy.

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Le 25 août au matin, des combats ont éclaté entre résistants et soldats alle-mands au Moutier. Le pilote d’un véhicule léger allemand passant à proximité des Français est abattu sur le champ.

Le 103e bataillon FTP met en place une colonne rapide à partir des trois compagnies aux ordres du capitaine Bonnet soit 32 hommes du maquis du Grand Cognet et 90 résistants des groupes sédentaires de la ville également FTPF auxquels se sont ajoutés quelques patriotes FFI-MUR au sein du CFL (Corps Franc de Libération). L’heure est à l’insurrection. Un groupe de com-battants tente de rejoindre le centre ville où se trouvent les forces ennemies. Il passe par le quartier de la Vidalie afin d’éviter des tirs venant de l’école Saint-Joseph où sont installés une quarantaine de SS. Les camions allemands prêts à partir sont stationnés rue des Grammonts, rue Nationale et rue Pasteur. Les résistants s’ils veulent libérer la ville doivent neutraliser les centres névralgi-ques de l’occupant dont la mairie et l’école Saint-Joseph utilisée comme dépôt de munitions.

Assez rapidement, les officiers allemands demandent une trêve afin d’éva-cuer leurs nombreux blessés vers Vichy. Le président de la commission spé-ciale de Thiers, le lieutenant-colonel Brasset nommé en remplacement d’An-tonin Chastel, sert d’intermédiaire entre les SS et les commandants Pigeon (FTPF) et Victoire (FFI-MUR) ainsi qu’avec le Capitaine Bonnet. Les Allemands demandent quatre heures pour se retirer. Les résistants refusent, acceptant seulement de cesser les combats en ville, afin de protéger les civils. Un dra-me survient ensuite, 3 hommes, Claude Goutequillet, Charles Hainchelin et Antoine Calmard tombent sous les balles allemandes. Puis c’est au tour d’An-dré Ossedat de trouver la mort alors qu’il sort d’un bâtiment occupé par l’ar-mée allemande en brandissant un drapeau blanc et que le président de la com-mission spéciale venait de faire sonner la sirène du cessez-le-feu. Les soldats allemands retranchés à l’école Saint-Joseph se sont rendus entre temps. Les combats pour la libération de la ville font une dernière victime le 26 août 1944 alors que l’évacuation commence : Pierre Bernardi, âgé de 18 ans.

Le 26 août au soir, Thiers est définitivement libérée.

2. La libération de la capitale de l’Auvergne

Dès le 25 août 1944, les troupes allemandes se concentrent à la Fontaine du Berger, à Royat et à Aubière. Avant de quitter la capitale auvergnate, les occupants vont se livrer à certaines destructions notamment sur le terrain d’aviation d’Aulnat.

Le 25 août vers 19 heures 30, des soldats allemands font sauter la poudriè-re de Crouël. Deux jours plus tard, le 27 août, vers 8 heures 45, la place des Bughes est détruite ainsi qu’une partie des installations du poste de relais. Toujours le 27 août 1944, de nombreuses explosions provoquées par les oc-

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cupants détruisent la majeure partie des ateliers de l’arsenal des Gravanches. A 11 heures 30, les troupes d’occupation quittent Clermont-Ferrand en di-rection de Riom. Les Milices patriotiques prennent la Préfecture d’assaut, l’état de siège est proclamé. Le soir même, des membres des FFI pénètrent dans la ville et mettent en place le nouveau préfet Pierre Sauvanet et le lieute-nant-colonel Huguet "Prince" sera nommé secrétaire général pour la police. Simultanément, de nombreuses arrestations ont lieu : le préfet de Région, le préfet délégué du Puy-de-Dôme, Honoré Guérin, le secrétaire général de la Préfecture, le commissaire central de Clermont, le directeur de cabinet du préfet, le rédacteur en chef de l’Avenir du plateau central, Maurice Vallet et un certain nombre de fonctionnaires ayant prêté leur concours aux autorités alle-mandes. Des groupes FFI se rendent aux sièges des organismes gouvernemen-taux et pro-allemands tels que la Milice, la Légion Française des Combattants etc. et les incendient. Henry Ingrand fera dissoudre ces derniers.

Le lendemain, 28 août 1944, le commissaire régional de la République, Henry Ingrand est solennellement installé à la Préfecture. Il fait un discours empreint d’émotion et d’enthousiasme d’un balcon de la Préfecture devant 15000 personnes massées boulevard Desaix, place Sugny et place de Jaude. Pierre Sauvanet prend également la parole ainsi que les membres de l’état-major FFI, ils sont chaleureusement ovationnés. La manifestation se termine par le chant de la Marseillaise repris par la foule à l’unisson et par des "Vive la France" "Vive la République".

La garnison allemande de Riom peu nombreuse attend le passage des unités venant de Clermont-Ferrand dans la matinée du dimanche 27 août 1944, pour quitter la ville. A 15h30, les derniers éléments se replient en direction d’Aigue-perse après avoir fait sauter un dépôt de munitions situé rue Chaptal et détruit le central téléphonique des PTT. Il n’y aura pas de combats, ni de mesures prises par les Allemands contre la population de Riom. Dans l’après-midi du même jour, vers 16 heures, les FFI pénètrent dans la ville sous les acclamations de la foule. Ils procèdent à une soixantaine d’arrestations dont le sous-préfet, le lieutenant de gendarmerie et le sous-directeur de la maison centrale.

A partir du 27 août 1944, la joie règne parmi les habitants de Clermont-Ferrand. Ils pavoisent leurs habitations aux couleurs françaises et alliées. Ils espèrent que la guerre se terminera rapidement et que le changement de régime s’effectuera dans l’ordre. Un relatif sentiment de sécurité règne sur la capitale de l’Auvergne.

La Libération de Clermont-Ferrand s’est déroulée dans le calme, sans ba-taille, sans victime, ni destruction matérielle importante. La poursuite de la libération s’effectue au rythme du repli des colonnes allemandes pressées par les troupes FFI. Le 31 août 1944, les FFI d’Auvergne ont achevé, seuls, la libé-ration de la région R6.

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Entrée des FFI à Clermont-Ferrand et défilé, place de Jaude,

le dimanche 27 août 1944, en fin d’après-midi. AMRID (Droits réservés)

La foule en liesse devant l’opéra municipal. AMRID (Droits réservés)

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La Seconde Guerre Mondiale a bouleversé le paysage politique. A la Libération du département du Puy-de-Dôme, l’attribution des postes clés sera liée à l’attitude de chacun durant les années noires de l’occupation. Un vaste mouvement général d’épuration va secouer également le département mais il sera rapidement maîtrisé par les autorités.

Les résistants vont être au centre de la vie politique dans la période qui va suivre la Libération. Le rôle le plus important est dévolu aux commissaires de la République qui sont chargés d’administrer une région entière. La victoire du 8 mai 1945 n’a pas suscité dans le Puy-de-Dôme, les mêmes manifestations d’explosion de joie que celles exprimées lors de la libération du département. Dans l’après-midi du 8 mai 1945, à 15 heures, au moment où retentissent partout les sirènes et les cloches des églises, la population descend dans les rues, sur les places publiques, devant les mairies, pour écouter l’annonce officielle de la capitulation allemande faite à la radio par le général de Gaulle et diffusée par des haut-parleurs.

Cependant, l’euphorie de la victoire va faire place peu à peu à l’inquiétude et à la déception face au problème du ravitaillement. Les magasins ne sont pas approvisionnés, tout manque. C’est ce que découvrent les prisonniers à leur retour, en 1945. Malgré la joie de recouvrer la liberté, les retrouvailles sont difficiles dans un pays si éloigné des rêves faits pendant leur détention : il leur faut réapprendre à vivre. Tous les prisonniers n’ont pas subi la même captivité. 1 800 000 soldats français ont été capturés dans la débâcle de mai-juin 1940. 1 600 000 ont été emmenés en Allemagne. Ils sont encore près de 1 000 000 à rentrer en 1945 après cinq ans passés en terre ennemie. Cependant, les prisonniers, comme les travailleurs requis dans le cadre du STO, savent que la privation de liberté, l’humiliation, la promiscuité, la faim qu’ils ont connues, sont sans commune mesure avec les souffrances endurées par les personnes déportées.

Le 27 janvier 1945, les troupes soviétiques entrent dans le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau, mais ce n’est que le 25 avril 1945 que les Anglo-Américains et les Soviétiques libèrent les autres camps de concentration. Sur 220 000 Français déportés, 38 000 sont rentrés ; 2 à 3000 ont succombé dans les deux mois qui ont suivi leur retour. Les survivants de l’univers concentrationnaire n’ont pas la force physique de prendre la parole, ils doivent d’abord se reconstruire physiquement et moralement. L’indicible les condamne aussi au silence, comment faire comprendre la violence absolue vécue dans les camps. De plus, les récriminations matérielles et catégorielles l’emportent souvent sur le sort des déportés. Les autorités et le nouveau pouvoir en place vont devoir faire face à un mécontentement grandissant. L’heure est à la réorganisation, à la reconstruction et aux transformations dans tous les domaines. La Libération ouvre une période transitoire qui s’achèvera à la fin de l’année 1946 avec la naissance de la IVe République.

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Bibliographie

AUDOUIN MichelleClermont-Ferrand sous l’occupation, éd. Ouest-France, 1985.

COINTET Michèle et Jean-PaulDictionnaire Historique de la France sous l’occupation, éd. Tallandier, 2000.

GIBOT FrançoiseDe la Libération à la Quatrième République, Evolution politique du Puy-de-Dôme : août 1944-décembre 1946, Mémoire de Maîtrise, M. J. J. Becker, 1983.

LA BARRE DE NANTEUIL (général Hugues de)Historique des unités combattantes de la Résistance (1940-1944), Puy-de-Dôme, Vincennes, 1985, 139 p.

LÉVY Gilles et CORDET FrancisA nous Auvergne, Presses de la Cité, 1974.

MARTIN Daniel, La déportation dans le Puy-de-Dôme, Revue d’Auvergne, Tome VI, n°3, 1972, pp. 282-293.

MARTRES EugèneLe Cantal de 1939 à 1945, Les troupes allemandes à travers le Massif Central, Cahiers d’Histoire, Occupants, Collaborateurs et Résistants,1940-1944, Tome XXII, IV, 1977, pp. 406-420. L’Auvergne dans la tourmente 1935-1945, éd. de Borée, 1998.

MATHIEU EricSociologie de la Résistance du Puy-de-Dôme 1940-1944, Professeur A. Gueslin, 1987-1988.

RISPAL ManuelLes chemins de la Victoire, Auvergne 1945, numéro spécial La Montagne, hors-série, 2005.

RISPAL Manuel, SANTONI PaulLa prison du 92 à Clermont-Ferrand pendant l’occupation allemande (novembre 1942-août 1944), 14 février 2003.

SWEETS John F.Clermont-Ferrand à l’heure allemande, éd. Plon, 1996.

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Annexes

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Document 1

Télégramme adressé au Préfet de la Région Auvergne annonçant l’arrivée des

troupes allemandes à Clermont-Ferrand.

Archives Départementales du Puy-de-Dôme 901 W 570

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Document 2

Courrier daté du 28 octobre 1941, de Mgr Piguet adressé au maire de Clermont-

Ferrand relatif au film Monsieur Brotonneau.

Archives Départementales du Puy-de-Dôme 901 W 116.

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Document 3

L’avenir du Plateau Central du 28 octobre 1941.

Archives Départementales du Puy-de-Dôme 901 W 116.

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Document 4

Lettre de l’adjoint au maire de Bourg-Lastic adressée au Préfet de la Région

Auvergne concernant les événements du 15 juillet 1944.

Archives départementales du Puy-de-Dôme 901 W 175.

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Document 5

Statistiques relatives aux déportés du Puy-de-Dôme :

Tableau n°2 : motifs d’arrestation des déportés (hommes et femmes).

Tableau n°3 : année et mois de départ en Allemagne.

Archives Départementales du Puy-de-Dôme série M.

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Statistiques relatives aux déportés du Puy-de-Dôme :

Tableau n°5 : répartition des déportés par camps de déportation.

Archives Départementales du Puy-de-Dôme série M.

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Liste des villes décorées de la Croix de Guerre

Aulnat, Bourg-Lastic, Billom, Clermont-Ferrand, Gerzat, Saint-Floret et Volvic

2 Régiments : 92e RI et 28e RT

Liste des Justes du Puy-de-Dôme

1973 : Abbé Marius Imberdis, Amélie Imberdis et Jean Imberdis à Domaize.

1986 : Gabrielle Rémy à Clermont-Ferrand.

1987 : Marie-Louise Matinier, Michel Matinier et Mme Trébose-Matinier à Clermont-Ferrand.

1988 : André Jourdan à Aigueperse et Yvonne Patras de Campaigno-Beghin à Royat.

1990 : Emma Chantelauze et Joseph Chantelauze à Clermont-Ferrand.

1992 : Marius Péraudeau à Ambert.

1993 : Marthe Schmidt à Saint-Anthème.

1996 : Maurice Berger à Riom, Marie-Lafarge et mère Marie-Angélique Murat à Clermont-Ferrand, Marthe Guillaume à La Tour d’Auvergne, Marie Pelin à Vertolaye, Jeanne Vernusse et Mme Vernusse à Montferrand.

1997 : Ernest Blaise à Saint-Nectaire, Alice Chevalier (sœur Marie-Angélique) au Vernet-la-Varenne.

1998 : Denis Jourdan et Henri Jourdan à Clermont-Ferrand, Marie Pillière et Marius Pillière à Vertolaye, Eugénie Rolhion à Vertolaye.

1999 : Gaston Créon et Marie Créon à Chamalières.

2000 : Claude Deschamps et Maria Deschamps à Effiat.

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2001 : Marcel Genestier à Pontgibaud, Georges Mazeau et Marie-Louise Mazeau à La Bourboule. Monseigneur Gabriel Piguet à Clermont-Ferrand.

2002 : Lucienne Defaisse à Clermont-Ferrand, François Quinsat à Gelles, Germaine Retrut à Clermont-Ferrand.

2005 : Françoise Vigne et Paul Vigne à Youx.

2007 : Georgette et Pierre Zwiller à Paris.

2008 : Institution Saint-Pierre de Courpière à titre posthume pour le père Delaire.

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Remerciements

Les membres de la Commission mémoire du conseil départemental de • l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre (ONAC) du Puy-de-Dôme.Le comité de lecture composé des membres de la commission mémoire.• Les Archives Départementales du Puy-de-Dôme. • Micheline Vaillant, Présidente du Musée de la Résistance, de l’Internement • et de la déportation de Clermont-Communauté.Les animatrices du Musée de la Résistance, de l’Internement et de la • déportation de Clermont-Communauté : Christine Perraud et Isabelle Vaillant.Monsieur Manuel Rispal.• Monsieur Daniel Massacrier, photographe de la ville de Clermont-Ferrand.• Monsieur Stéphane Le Borgne, responsable du département de la mémoire • combattante de la direction générale de l’Office National des Anciens Combattants.

Rédaction

Anne-Marie Coffi, déléguée à la mémoire combattante au service départemental de l’ONAC du Puy-de-Dôme.

Crédits

Photos figurant sur la couverture :La Libération de Clermont-Ferrand, D. R.Photo du mont Mouchet : Manuel Rispal

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Achevé d’imprimer au CRDP d’Auvergne - décembre 2008

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Mémoires du Puy-de-DômeBrochure réalisée avec le soutien financier de l’Office National des Anciens

Combattants et Victimes de Guerre (ONAC).

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Service départemental de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre du Puy-de-dôme - Commission Mémoire Cité Administrative - Rue Pélissier - B.P. 151 - 63034 Clermont-Ferrand Cedex 1 - 04 73 98 39 45