memoire lbo en difficulte antoine pepin
TRANSCRIPT
-
1
MEMOIRE - MASTER 1 FINANCE
Anne universitaire 2011 - 2012
Ralis et prsent par Antoine PEPIN
Sous la direction du Professeur Hubert de LA BRUSLERIE
LBO EN DIFFICULTE : DIAGNOSTICS, INTERVENANTS ET SOLUTIONS
-
2
REMERCIEMENTS
Je souhaiterais remercier tout particulirement mon tuteur de mmoire Monsieur le Professeur
Hubert de la Bruslerie pour l'aide efficace qu'il m'a apporte et les conseils aviss quil m'a
prodigus tout au long de mon travail.
Llaboration du prsent mmoire ma galement fourni lopportunit de travailler avec tous
les intervenants financiers associs aux oprations de LBO, aussi bien dans les phases
prparatoires que dans lidentification et la rsolution des difficults rencontres : banquiers,
avocats daffaires, experts comptables et commissaires aux comptes, directeurs financiers,
managers de transition, administrateurs judiciaires, prsidents de chambre honoraires au
tribunal de Commerce de Paris.
Je tiens remercier, pour leurs conseils aviss, leurs suggestions et le temps significatif quils
mont consacr, les professionnels trs expriments suivants :
David BRAULT, ancien directeur financier et dirigeant fondateur dObjectif Cash, principal
cabinet spcialis dans la direction financire oprationnelle et le management de transition (il
a men depuis 10 ans plus de 400 missions, en France et linternational, avec une quipe
dune soixantaine de collaborateurs. La plupart de ces missions a t ralise dans des
participations de fonds dinvestissement, supportes par des LBO, sous-performantes en
termes de gestion de cash et souvent en crise de trsorerie)
Philippe DE NERCY, banquier chez BNP Paribas, anciennement head of leveraged finance
en Espagne et spcialiste des refinancements des LBO
Pascal FERRON, expert comptable et commissaire aux comptes, prsident pour la France du
cabinet daudit international Baker Tilly
Jacques GOYET, avocat et prsident du directoire de Bignon Lebray & Associs (cabinet
prsent Paris, Lille, Lyon, Marseille et Shanghai, qui runit prs dune centaine de
professionnels, organiss en 8 ples dexpertise dont le ple Fusions, Acquisitions et Droit
des Socits Entreprises en difficult).
-
3
Jacques Goyet intervient dans des oprations de fusions-acquisitions, de restructurations et de
haut de bilans de socits cotes et non cotes. Cette activit lamne conseiller aussi bien
des actionnaires privs que des socits dinvestissement ou des industriels.
Laurent LE GUERNEVE, administrateur judiciaire et associ au sein de lune des
principales tudes dadministrateurs judiciaires franaises, la SCP Valiot-Le Guernev-
Abitbol. Laurent Le Guernev a t entre autres en charge de la sauvegarde dEurotunnel.
Bernard SOUTUMIER, prsident de chambre honoraire au tribunal de Commerce de Paris
et ancien directeur gnral au sein de grands groupes industriels internationaux.
-
4
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS 2
INTRODUCTION 6
LANNONCE DU PLAN 8
LA DEMARCHE ADOPTEE 9
I. LE LBO : UN MODE DE FINANCEMENT DACQUISITION DENTREPRISES
QUI NEST PAS SANS RISQUES 10
A. Dfinition du LBO, ses formes et les 4 effets de levier 10
1. LBO et private equity 10
2. Dfinition 10
3. Approche historique du LBO 17
4. Typologie et acteurs du LBO 18
B. Le LBO comme outil de restructuration et transformation dune socit cible 22
1. La cible idale dun LBO 22
2. Ltablissement du business plan et de la stratgie 24
C. Le LBO sappuie sur un montage complexe 27
1. Evaluation et ngociation du prix de laffaire 27
2. Structuration du financement, subordination et rle des covenants 28
D. Le LBO : une opration non sans risques 36
1. Les risques inhrents au recours une holding 36
2. Lacquisition dune cible avec effet de levier nest pas neutre en termes oprationnels. 37
II. DIAGNOSTICS DU LBO EN DIFFICULTE ET FRAGILITES INTRODUITES
DANS LENTREPRISE RACHETEE 39
A. Etat des lieux des LBO : une crise discrte 39
1. Des acquisitions de plus en plus chres et des performances qui rgressent 39
2. Linquitude lie aux comportements des nouveaux acteurs et lmergence de critiques 40
3. Pas de risque systmique mais des menaces 42
B. Typologies de LBO en difficult 43
1. Une problmatique triple : financire, juridique et humaine 43
2. La bonne fin remise en cause 43
C. Le non respect de la trajectoire assigne par le business plan des LBO 45
1. Des business plans trop optimistes 45
2. Dcrochage, accident, dgradation 46
-
5
D. Les situations de non-respect des covenants bancaires et leur impact sur les relations avec les parties au
LBO 47
1. Bris de covenants sans que la socit ne cesse d'tre bnficiaire 48
2. Constat simultan du non-respect des covenants et d'une situation dficitaire: le cumul des difficults 50
E. Lapparition dune nouvelle tendance chez les banques : la prise de contrle 54
1. La crainte dtre assimiles des dirigeants de fait 54
2. La prise de contrle par les banques : le cas Monier 54
III) LES SOLUTIONS POUR REDRESSER LE LBO EN DIFFICULTE : LA
SECURISATION DU MONTAGE, LA GESTION DES TURBULENCES, LES AIDES
A LA RENEGOCIATION ET LES ALTERNATIVES 56
A. La gestion du LBO en amont des difficults et limportance du management 56
1. Scuriser lacquisition 56
2. Prvoir la sortie, le coup daprs 58
3. Le dfaut danticipation et linefficacit des alertes comme explication des checs ? 61
4. Le management en place est-il capable de grer les transitions et turbulences ? 62
B. Les procdures amiables et collectives comme aide la rengociation 66
1. LBO et Droit franais 67
2. Les procdures amiables : linitiative du dbiteur, confidentielles et volontaires 68
3. Les procdures collectives au service du LBO 73
4. Lapparition de procdures semi-collectives, la Sauvegarde financire acclre 78
C. La possibilit de recours une approche plus stratgique : le LBU 80
1. Combinaison des approches stratgique et financire 80
2. Un montage efficace et peu risqu 81
D. La remise en cause du modle LBO 82
1. Le modle du LBO a encore de lavenir 82
2. Mais pour combien de temps ? 82
CONCLUSION 84 Les enjeux 84
Les leons 85
ANNEXES 87 Le groupe Bollor et leffet de levier juridique 87
Fonds dinvestissement et principales oprations 88
Lvaluation des socits cibles par la fonction Score 89
Exemple de structuration dun montage LBO 90
Statistiques du LBO en France 92
BIBLIOGRAPHIE 93
-
6
INTRODUCTION
Dans le milieu des annes 1980, des montages, en provenance des Etats-Unis et
rapidement apprcis des investisseurs, ont merg en France, permettant un repreneur
ayant des capacits de financement limites par rapport la valorisation dune socit, de
prendre le contrle de cette dernire.
Ces oprations, connues sous lappellation de LBO (leveraged buy-out) ou oprations effet
de levier, ont dabord rpondu la problmatique de renouvellement de la population des
chefs dentreprises familiales et de rallocation dactifs dans le cadre de grands groupes
(Carrefour avec Picard, Accor avec Courtepaille).
Aujourdhui, le LBO est dfini comme le rachat dune entreprise considre saine, financ
partiellement par de la dette, dans un cadre juridique particulier, en associant les dirigeants
des investisseurs spcialiss. Ladjonction de leverage rend compte de laspect essentiel
du mcanisme, leffet de levier. Plusieurs modes de transmission existent mais recouvrent les
mmes caractristiques communes : une holding de reprise acquiert une socit ( la cible )
grce de lendettement, la contrle ainsi de faon indirecte et ralise des conomies dimpt
grce la dduction, de son rsultat global, des frais financiers dcoulant de lemprunt. Pour
reprendre une clbre formule, il sagit pour la holding de contrler sans argent et
demprunter sans surface .
Fleuron de lindustrie du Private Equity, le montage LBO repose sur la capacit de la cible
verser des dividendes la holding de reprise. Il fonde sa stratgie sur la viabilit de belles
entreprises, susceptibles de dgager davantage de cash-flows durant la priode de dtention,
afin que le risque de non-remboursement de la dette soit acceptable. La valorisation de la
cible est directement corrle limportance de ses cash-flows futurs. A fonds propres
constants, le montant de la dette dacquisition (porte par la holding) sera dautant plus lev
que la rentabilit prvisionnelle de la cible sera forte.
Le march du LBO se caractrise par sa sensibilit la situation macro-conomique, que cela
soit laversion pour le risque, la pnurie de liquidits ou bien encore le resserrement de laccs
au financement de sources bancaires. Il a t particulirement impact par la crise de ces
dernires annes.
-
7
La croissance du march sest accompagne dune sophistication du mcanisme : le montage
type se dcline dsormais en situations particulires, ce qui ncessite, de fait, un encadrement
accru par le biais de rglementations spcifiques. Lensemble de ces contraintes va dans le
sens de la prservation de lquilibre entre capital et dette, entre actionnaires et prteurs,
majoritaires et minoritaires, dans loptique du maintien ou du dveloppement dune activit
conomique relle.
Lanalyse de lopration par lapproche de ses leviers permet de bien saisir les enjeux de la
sophistication du montage et de faire apparatre ses points de tension. Dfini par Jensen
comme lantidote des dfauts de la grande socit cote, et larchtype dune structure de
gouvernance efficiente , le LBO est cependant crateur de risques juridiques et conomiques.
En effet, la reprise dentreprises saines nempche pas des rats et il ne faut pas occulter le
fait quune entreprise sous LBO fait face des contraintes fortes.
Depuis la fin de lanne 2011, lindustrie du Private Equity traverse une crise sans prcdents
marque par un resserrement du crdit, dit credit crunch , qui rappelle douloureusement
lanne 2009 durant laquelle de nombreux fonds dinvestissement ont perdu jusqu
lintgralit de leur investissement (en fonds propres).
La reprise conomique rcente a occult le fait que de nombreux LBO ntaient pas viables
financirement. Historiquement, avant la crise du LBO, le systme cible + holding
dmontrait toute son efficacit en matire de financement dacquisition dentreprises. Les cas
de LBO en difficults montrent les limites de lopration et, selon lAFIC (Association
Franaise des Investisseurs en Capital), 22,8% des entreprises sous LBO en 2010 nont pas pu
respecter leurs covenants financiers (clauses incluses dans un contrat de prt qui peuvent
entraner le remboursement anticip du prt). Plus inquitant encore, les dernires annes ont
t marques par lmergence de LBO dits zombies, car concernant des entreprises dont la
valeur est devenue largement infrieure celle de leur dette et dont les actionnaires nont plus
gure despoir de rcuprer leur mise.
Dans ce contexte,
Quels sont les lments de fragilit dun LBO et les principales crises auxquelles il peut
tre confront ?
Comment alors redresser la situation par le dploiement de solutions prennes ?
-
8
LANNONCE DU PLAN
Le prsent mmoire vise non seulement dterminer les fondamentaux dune opration de
LBO mais aussi ses zones de fragilit, expliciter les difficults rencontres par les
intervenants et les solutions mises leur disposition.
La premire partie tentera de lgitimer le montage LBO, de le replacer dans le contexte
conomique et financier des dernires annes, de prsenter la problmatique des financements
structurs, tout en mettant en lumire les risques associs et la complexit de la
documentation financire. Viendra ensuite lexpos de notre seconde partie, rvlatrice des
problmes et situations de crises auxquels font face certains LBO. Nous commencerons par
un tat des lieux du LBO, avant daborder les diffrentes situations de crise par ordre de
gravit. Nous associerons chacune delles le positionnement et les ractions des principaux
cranciers, tout en identifiant les possibles conflits dintrt de nature complexifier les
restructurations subsquentes. Nous expliciterons ensuite le large spectre des solutions qui
existent pour redresser un LBO, en tentant de dterminer les plus appropries. Nous
terminerons notre tude en traitant de lavenir possible du montage.
-
9
LA DEMARCHE ADOPTEE
Il existe une abondance de chiffres sur lactivit des LBO. Pour autant, toutes ces donnes ne
prsentent pas des gages de fiabilit parfaite. La grande opacit qui caractrise ce milieu ma
conduit mener lenqute auprs des acteurs du LBO, adopter une dmarche empirique
afin didentifier non seulement les failles du systme mais aussi les voies damlioration, dans
un contexte de droit en constante volution.
Le culte du secret qui entoure les LBO trouve largement son origine dans lampleur des
enjeux financiers concerns, la multiplication des acteurs et intervenants, et dans des
situations de difficults extrmes la ncessaire confidentialit associe au droulement des
procdures relevant du tribunal de commerce. Jai malgr tout eu la grande opportunit de
suivre plusieurs dossiers, dexaminer la situation juridique, conomique, sociale et financire
dentreprises en difficult, ainsi que les dispositions prises pour y remdier.
Compte tenu de la confidentialit rappele ci dessus, il ne m'a pas t possible de citer la
plupart des noms des socits concernes. Je n'ai pu le faire que lorsque ces socits ont
diffus de l'information dans les mdias.
Je dois admettre trs volontiers que cest aussi grce au support clair de plusieurs dcideurs
trs expriments, couvrant tout le spectre des problmatiques de LBO, que jai pu mener
bien mon tude. Ce mmoire se veut la fois une synthse des informations offertes par les
professionnels qui mont consacr une partie de leur temps, ce qui implique une certaine
fidlit aux paroles prononces, mais galement une prise de recul permettant de dgager des
tendances, sil sen prsente, et des prconisations dbouchant sur des pratiques pertinentes.
-
10
I. LE LBO : UN MODE DE FINANCEMENT DACQUISITION DENTREPRISES
QUI NEST PAS SANS RISQUES
A. DEFINITION DU LBO, SES FORMES ET LES 4 EFFETS DE LEVIER
1. LBO ET PRIVATE EQUITY
Lorsquelle se trouve confronte aux contraintes et limites poses par les sources
traditionnelles de financement, une entreprise peut trouver une alternative de financement
auprs dacteurs du Capital Investissement ou Private Equity. Une opration de Private Equity
peut intervenir tout au long de la vie dune entreprise. Elle vise prendre des participations
dans les fonds propres de socits non cotes et constitue une classe dactifs part entire. On
distingue cinq grands types doprations correspondant aux cinq grandes tapes du cycle de
vie des entreprises : la cration, le dmarrage de lactivit, le dveloppement, la maturit et le
dclin.
Quand une entreprise atteint sa maturit, quelle bnficie dun management expriment,
dun historique de performances stables et dun positionnement de premier plan sur son
march, se pose la problmatique de la transmission de lentreprise. Les oprations de Capital
Transmission les plus clbres sont les rachats avec effet de levier ou LBO.
2. DEFINITION
La technique du LBO est communment dfinie comme une opration par laquelle une ou
plusieurs personnes prennent, par lintermdiaire dune ou de plusieurs holdings, le contrle
dune socit ayant une activit industrielle ou commerciale ( la cible ), en finanant la plus
grande partie de cette acquisition par un emprunt, lequel est ensuite rembours grce aux
remontes de trsorerie provenant de la cible. Lemprunt est ainsi utilis comme un levier
pour rentabiliser linvestissement dacquisition.
2.1. Le LBO : un outil de transmission
La transmission dune entreprise reprsente une rupture importante et lentreprise est un actif
dont il convient dassurer la survie et qui doit tre valoris au mieux dans lintrt du cdant.
-
11
Le LBO constitue souvent une solution une succession familiale ou une cession par un
groupe dune division. Cette opration peut galement permettre de sortir une socit de la
bourse quand elle est mal valorise ou lorsque la cotation fait peser dimportantes contraintes
sur la socit.
Le LBO est ralis autour du management actuel ou avec laide dune nouvelle quipe
dirigeante. Il est financ en capitaux propres par des fonds spcialiss et repose sur des dettes
aux priorits de remboursement diffrentes.
Une entreprise sous LBO nest pas foncirement diffrente des autres dans le sens o elle est
confronte aux questions entrepreneuriales fondamentales : comment gagner et fidliser les
clients, comment sassurer dune position concurrentielle favorable, comment gnrer un
bnfice distribuable tout en continuant dinvestir ?
La diffrence rside, en fait, dans le type dactionnariat et le poids de la dette.
2.2. qui sappuie sur une holding dacquisition
Principe et constitution dune holding
Lachat est ralis par lintermdiaire dune holding qui, quelque soit le contexte, est
constitue et dtenue par les fonds et les managers qui rentrent dans le capital. Vritable
coquille financire, cette holding sendette afin dacqurir lentreprise cible : on y loge la
dette.
Les excdents de rsultat de la socit cible remontent ensuite la holding sous la forme de
dividendes, afin de rembourser les intrts et le capital emprunt. Les banques prennent en
garantie les titres acquis par la holding et exercent un contrle attentif sur le droulement des
oprations. En France, contrairement aux Etats-Unis, la loi interdit de rembourser la dette
dacquisition par apprhension des actifs de la cible ou par constitution de garantie reposant
sur ces actifs. Le montage se heurte la ncessit pour la holding de reprise de dtenir 95% de
la cible si elle souhaite lancer une procdure de retrait obligatoire permettant de quitter la
Bourse et instaurer une intgration fiscale (voir effet de levier fiscal).
Il peut tre envisag de crer une cascade de socits holdings dans le but de dmultiplier la
force de contrle du montage. Un investisseur cre une holding dont il dtient 51% et qui
sendette pour dtenir une holding 51% elle-mme endette pour dtenir 51% dune autre
-
12
socit. Linvestisseur dtient alors le contrle dune socit en ayant investi une trs faible
part des capitaux dont elle dispose.
Le montage LBO mobilise de nombreuses parties prenantes et certaines vont participer
minoritairement au capital de la holding, dite New Co . La prsence de minoritaires impose
de rgler initialement les dcisions et situations auxquelles les actionnaires pourraient avoir
faire face. Dans ce contexte, le pacte dactionnaires organise le pouvoir et les relations entre
les parties et cre un statut dactionnaire impliqu.
Schma simplifi du montage financier LBO
-
13
Quelle forme juridique de la holding pour rpondre aux attentes du montage ?
Faire le choix de la socit par actions permet de runir des acteurs poursuivant des objectifs
financiers diffrents. Dans cette optique, la holding de reprise prend presque toujours la forme
dune socit anonyme ou dune socit par actions simplifies (SAS). La socit en
commandite par actions (SCA) nest pas adapte aux oprations de LBO car les investisseurs
en capital nont aucun droit, et en particulier pas celui de sanctionner une gestion inadquate
de lentreprise. Par ailleurs, les capacits dmission et le droit linformation de lassoci
sont limits dans une SARL.
Au contraire, la SAS et son absence de soumission un cadre juridique obligatoire,
permettent une grande libert dorganisation des relations entre actionnaires en prvoyant des
clauses dagrment ou dexclusion, et les clauses statutaires ne peuvent tre adoptes ou
modifies qu lunanimit des associs. Son inconvnient principal se situe dans
linterdiction pour la SAS de faire appel public lpargne. Or, les investisseurs considrent
cette opration comme une voie de sortie avantageuse. Enfin, la constitution de la holding en
SCA ou SAS permet la stipulation dune clause de variabilit du capital et ainsi un
accroissement instantan de la liquidit du capital, une caractristique propre attirer de
nouveaux investisseurs.
2.3. et 4 effets de levier
Le principal intrt dune acquisition par LBO rside dans le fait quelle conjugue des effets
de levier, quelle joue leffet de levier au-del des limites bancaires usuelles, lobjectif tant
damplifier et dacclrer la rentabilit naturelle de linvestissement.
Certains des leviers vont directement gnrer un accroissement de la performance financire
(leviers primaires). Dautres contribuent indirectement et plus marginalement la
performance ; ces leviers sont secondaires. Lengagement de ces leviers impose une
structuration.
Leffet de levier de la dette et laugmentation du multiple taient par le pass les leviers
majeurs de cration de valeur. La performance de quelques LBO a engendr un got prononc
pour leffet de levier avec parfois des ratios capital sur dette de 1 sur 200. Ce gigantisme a eu
pour consquence dentraner le lgislateur limiter certaines oprations.
-
14
Dans le contexte actuel, la croissance de lEBITDA est devenue dterminante alors que la
hausse des taux dintrt, la rarfaction du crdit et les perspectives conomiques peu
favorables diminuent leffet de levier de lendettement.
Le levier augmente la volatilit et le niveau de risque de la valeur des fonds propres. Cela
explique pourquoi les fonds ont des objectifs de TRI (Taux de Rendement Interne) lev.
Effet de levier financier
Dans la thorie financire, leffet de levier rend compte dun phnomne simple : si la
rentabilit conomique dun investissement est suprieure au taux dintrt des emprunts, le
propritaire dune entreprise a tout intrt faire financer cet investissement en augmentant
lendettement de sa socit.
Appliqu au LBO, leffet de levier financier reflte le fait que le rendement dun investisseur
qui acquiert une entreprise sera, toutes choses gales par ailleurs, dautant plus important que
le montant de capital quil aura investi pour cette acquisition sera faible. Il permet donc
linvestisseur dacqurir une entreprise sans en avoir les moyens, tout en transfrant le
maximum de risque au prteur.
Lexprience a montr aux banquiers quil est fondamental que lengagement de chacun soit
important : accepter un levier trop important revient, pour le banquier, prendre un risque
dinvestisseur sans pouvoir en esprer la rmunration.
Entre linvestisseur qui cherche naturellement rduire sa mise de dpart et le banquier qui
doit limiter son risque, le levier correspond bien au point dquilibre des forces en prsence.
Le montage de lopration doit rester Investment Grade (notation comprise entre AAA et
BBB- selon lagence de notation Standard & Poors).
Effet de levier fiscal
Leffet de levier fiscal rsulte des moyens mis en uvre permettant de minimiser le cot
dopportunit fiscal du LBO, en palliant lexistence simultane dun dficit fiscal dans la
socit holding et dun rsultat imposable dans la cible.
Aprs lacquisition, la cible devra remonter des dividendes la Newco pour que celle-ci
puisse rembourser sa dette dacquisition. Le groupe aura alors le choix, sur le plan fiscal, de
rester dans le rgime mre-filiale ou dopter pour le rgime dintgration fiscale.
-
15
Ces deux systmes fiscaux varient selon le montant de la participation de la holding dans la
socit cible.
Rgime mre-fille ou
Si la holding dtient au moins 5% du capital de la cible, elle a la possibilit dopter pour le
rgime, optionnel, mre-fille. Dans ce cas, les dividendes que la holding recevra et qui lui
seront verss par la cible sont dfiscaliss. Ils ne rentrent pas dans lassiette de limpt sur les
socits (IS) que celle-ci doit payer puisque ces dividendes proviennent dun rsultat qui a
dj subi lIS. La holding va pouvoir apprhender les bnfices de la fille en exonration
dimpts sur les socits, sous rserve de la rintgration dans son rsultat imposable au taux
de droit commun dune quote-part de frais et charges gale soit 5% du montant total des
dividendes soit au montant rel si ce dernier est infrieur.
Intgration fiscale
Introduite en France en 1988, lintgration fiscale permet au groupe constitu de la holding et
de la cible de bnficier dune conomie dimpt de par la diminution de lassiette fiscale du
montant des intrts de la dette dacquisition. Dans ce montage, les charges financires lies
la dette viennent en dduction, pour le calcul de limpt du groupe, du rsultat avant impt de
la cible : il y a confusion des rsultats des structures. LEtat prend donc en charge une partie
du remboursement de la dette dacquisition. Lconomie dimpt gnre est gale au taux
dimposition de lIS multipli par le montant des charges financires.
Pour que le groupe bnficie dune pleine conomie dimpt, le rsultat avant impt de la
cible doit tre suprieur aux charges financires du holding.
Le montage lpreuve de lamendement Charasse
Lamendement Charasse a pour objectif de limiter la cration artificielle de charges financires
chez le holding dans le cadre du financement doprations dacquisition soi-mme. Cet
amendement fait suite lclosion de montages juridiques dune grande complexit ayant pour
seul but fiscal de dgager des liquidits par le biais dune vente lui-mme des filiales dun
groupe. Parce que ladministration fiscale, le seul perdant dans le montage, ne voulait plus
supporter le cot de ces rachats, les intrts des emprunts ayant servi lacquisition doivent tre
rintgrs dans le rsultat taxable du groupe, les titres des filiales entrant ensuite dans le groupe
intgr.
-
16
Effet de levier juridique
Leffet de levier juridique consiste dmultiplier le contrle dun actionnaire par la mise en
place dune succession de holdings et renvoie la notion de cascade de holdings. Grce
cette technique, de nombreux entrepreneurs1 ont pu constituer des groupes de taille importante
avec un apport de capitaux personnels limit.
Certains LBO ont t monts grce cette technique, avec parfois la mise en place de dettes
dans les holdings intermdiaires, ce qui dmultiplie la puissance financire de lactionnaire
majoritaire.
Lexprience douloureuse de la crise a mis un terme quasi complet aux montages de ce type.
Effet de levier social
Les leviers agissent en cascade sur toutes les strates de lorganisation. Leffet de levier social
concerne le rle jou par les repreneurs dans lopration de LBO. Initi par un investisseur, le
LBO sollicite la fois les managers et les principaux actionnaires.
Il ncessite lintervention de nombreux acteurs dont les objectifs et le niveau dexposition au
risque peuvent diffrer, mme si lintrt de tous converge dans la russite de lopration.
Le levier social sappuie sur la capacit des investisseurs rallier les managers. Lquipe
dentrepreneurs doit tre comptente, complmentaire et motive. Il est important que les
repreneurs dtiennent une part du holding afin quils ne ragissent pas en salaris mais en
capitalistes contraints au succs.
1 L exemple du groupe Bollor figure en annexes.
Pour une socit dont le prix est de 300 000, les repreneurs ne disposant que de
75 000, dcident de les apporter la cration dune premire socit holding. Avec un
crdit bancaire de 75 000, cette dernire pourra apporter la somme de 150 000 au
capital dune holding intermdiaire. Ensuite, cette seconde holding contractera un crdit
bancaire de 150 000, qui pourra lui permettre de racheter lintgralit du capital de la
socit cible.
-
17
3. APPROCHE HISTORIQUE DU LBO
Le LBO est n aux Etats Unis dans les annes 1960 et sest surtout dvelopp dans les annes
1980. Il connait trs vite un grand succs avec le rachat de RJR Nabisco par KKR en 1988
pour 25 milliards de dollars. Mais le dbut des annes 1990 est difficile tant les entreprises
sont fragilises dans un contexte de rcession conomique (crise des Junk Bonds ). Malgr
ces difficults, le LBO se rvle un placement rmunrateur pour les investisseurs mais aussi
les prteurs.
LEurope suit avec retard les Etats-Unis. En effet, ce nest quau cours des annes 1980 que
lEurope, et surtout le Royaume-Uni, se sont lancs dans le mouvement. Le phnomne est
encore plus rcent en France bien que, ds le milieu des annes 1980, le fonds LBO France ait
mis la main sur Darty. Le march du LBO a connu une forte et rapide expansion du fait de la
hausse de la capitalisation boursire de la place de Paris et de la prsence de liquidits
abondantes.
Initialement, les fonds de LBO se focalisaient sur la problmatique de succession dans les
petites entreprises et la rallocation dactifs pour les plus importantes. Les montants mobiliss
taient peu significatifs mais, trs vite, la tendance sest inverse, entranant avec elle une
croissance accrue des oprations. La taille des entreprises nest dsormais plus un obstacle.
Les fonds se multiplient sur le territoire franais sous limpulsion du succs conomique des
oprations, de la modernisation du contexte rglementaire en France, de la
professionnalisation des acteurs et de lafflux des capitaux dans les annes 2000.
-
18
4. TYPOLOGIE ET ACTEURS DU LBO
4.1. Les diffrents LBO
Plusieurs modes de transmission sont apprhends par la notion de LBO. Il nen existe pas
une forme unique mais une dclinaison en de multiples variantes.
Les LBO adosss sur le management
- Le LMBO (Leveraged Management Buy-Out),
Plus communment appel MBO , le LMBO est une opration de rachat dune entreprise
dans laquelle des banques et investisseurs extrieurs financent lquipe de management en
place dans loptique dacqurir la socit qui les emploie.
Lopration est monte par le personnel de la socit rachete. Le cas typique dun LMBO est
celui o un groupe industriel cde ses cadres dirigeants une de ses business units (on parle
alors de spin off ). Deux facteurs sont dterminants dans la russite dun LMBO : lquipe
dirigeante et la socit cible. Le fonds peut nanmoins devenir rapidement majoritaire et de
nombreux LMBO sont de faade, le Fonds agissant masqu par les cadres. Le LMBO
prsente des limites parmi lesquelles la capacit des cadres mobiliser du financement pour
leur apport en fonds propres (dits equity ) et lentente et la coopration entre les cadres.
- Le LMBI (Leveraged Management Buy-In)
Lopration ne se fonde pas sur les cadres en place mais sur un ou plusieurs nouveaux
managers qui sont recruts spcialement pour lopration laquelle ils participent
financirement en prenant une partie du capital de la New Co. Le management prend en main
la gestion de la cible avec une double logique dactionnaire et de manager. Ces oprations ont
tendance tre inities par des repreneurs qui dposent leur offre sans obtenir la certitude que
le propritaire sera effectivement vendeur. Parce que les nouveaux actionnaires cherchent
maximiser la valeur de lentreprise, laccent est mis sur les cash-flows. Il existe un risque
important de vives tensions avec lencadrement en place et les LMBI ncessitent un quilibre
entre la socit cible et lassociation repreneur-investisseur.
La transaction doit tre ralise dans un esprit qui prserve la prennit et lindpendance de
lentreprise, tout en lui apportant les moyens pour un dveloppement fort et un renforcement
de sa position. Le LMBI est trs souvent un pari sur un homme.
-
19
- Le BIMBO (Buy-In Management Buy-Out)
Le BIMBO est une opration hybride, car y participent la fois lquipe dirigeante en poste et
des managers extrieurs. Le capital de la New Co est dtenu par certains cadres en place
lorigine dans la cible et/ou plusieurs cadres recruts pour lopration et qui y investissent.
Les LBO adosss sur les cdants
Dans une opration de LBO, le cdant peut devenir actionnaire de la holding de reprise. Cela
permet de rduire le risque de transmission et autorise une sortie plus en douceur du vendeur :
la sortie dfinitive sera ultrieure. Pour linvestisseur, cette continuit vite les difficults de
la transmission mais il est ncessaire de cadrer la prsence du cdant afin quil ne bloque pas
les changements oprationnels induits par le LBO.
- Le VBO (Vendor Buy Out)
Le vendeur est actionnaire minoritaire aux cts dun Fonds dinvestissement. Il investit en
dettes par le biais dun crdit vendeur subordonn important.
- LOBO (Owner Buy Out)
Cette opration, caractristique des socits familiales, revient une vente soi-mme. Elle
permet, en effet, un actionnaire de raliser la vente de son entreprise tout en la conservant.
Le cdant constitue alors une holding dont il dtient le capital (parfois avec un fonds
minoritaire) et vend sa socit la holding afin de disposer des fonds pour souscrire le capital.
La holding sendette auprs de cranciers financiers, souvent de manire plus raisonnable que
dans les LBO classiques. La difficult rside dans la recherche de lavantage de lintgration
fiscale alors quil ny a pas de rel changement de contrle.
Certains LBO peuvent galement sappuyer sur les marchs financiers (oprations de Public
to Private, Private Investment in Public Equity, Reverse LBO) mais elles scartent de la
stricte dfinition du Private Equity, qui raisonne sur des actions non cotes.
4.2. A la base des oprations, le fonds dinvestissement
Dans une opration de LBO, les dirigeants sont associs des investisseurs spcialiss et
professionnels sur un horizon de temps dfini.
-
20
Au premier rang des investisseurs figurent les fonds dinvestissement2 (APAX, 3I, SIPAREX,
KKR, LBO France). Ces derniers prsentent une large palette de comptences : stratgie,
ingnierie financire, excution des transactions, juridique, management, dveloppement,
Les critres de diffrenciation
Le premier critre de diffrenciation des fonds LBO est lorigine des fonds grs. Ces fonds,
investis dans les oprations de Private Equity, nappartiennent pas linvestisseur en capital
dont le rle sapparente celui dun gestionnaire. Lorigine des fonds influence la politique de
gestion de linvestisseur, mais aussi les objectifs et exigences de rendement.
Une segmentation peut ainsi soprer entre :
- Les fonds indpendants : ils lvent les capitaux quils grent auprs de tiers
- Les fonds captifs : filiales de groupes dont la quasi-totalit des capitaux grs provient
de la maison-mre.
- Les fonds semi-captifs : filiales dun groupe, ils lvent des capitaux auprs de tiers et
oprent comme les fonds indpendants.
- Les fonds publics : leurs capitaux proviennent majoritairement dorganismes publics.
Le second critre de diffrenciation des fonds est la taille des socits susceptibles dtre
reprises, taille qui sapprcie par le chiffre daffaires et la valeur dentreprise. On distingue
communment : le small cap (valeur dentreprise infrieur 100 000 000), du mid cap
(valeur comprise entre 100 000 000 et 500 000 000) et du large cap (suprieur
500 000 000). Une telle segmentation conditionne lorganisation interne ainsi que le montant
des capitaux levs.
Dautres critres permettent de distinguer les fonds comme la part du capital de la socit qui
est acquis chaque opration, le montant unitaire moyen que le fonds investit ou la
spcialisation sectorielle.
2 Les principaux fonds dinvestissement, classs en fonction de la taille des socits reprises, ainsi que leurs oprations majeures de ces dernires annes figurent en annexes.
-
21
Limportance des chiffres
Maximiser la rentabilit de linvestissement est lobjectif affich du LBO. Il sagit pour
linvestisseur de raliser un taux de rendement interne (TRI) de lordre de 20%, ce qui
correspond un multiple de son investissement de 2 5 sur une dure de 3 7 ans.
Linvestisseur achte en premier lieu des perspectives, de la croissance, des rsultats stables
ou des effets de synergie. En tant quopration de transmission, le LBO se doit dtre tourn
vers lavenir, de crer de la valeur autour de trois variables cl (laugmentation du multiple,
lamlioration de lEBITDA et la diminution de la dette nette) et de trois leviers
stratgiques (la croissance de lactivit, le recentrage et la diminution des cots).
-
22
B. LE LBO COMME OUTIL DE RESTRUCTURATION ET TRANSFORMATION DUNE
SOCIETE CIBLE
WARREN BUFFET
La nature des leviers utiliss par lentreprise sous LBO et ses caractristiques propres
linscrivent dans une squence de transformation stratgique. Les oprations de LBO
rpondent des problmatiques varies (problmes de succession, dallocation dactifs, de
restructuration du capital,) mais toutes les socits ne sont pas ligibles. Les investisseurs
vont, par exemple, viter de slectionner une cible dont lactivit repose trop sur la
personnalit du dirigeant cdant car, lorsque ce dernier aura quitt lentreprise, le repreneur
risque de se heurter des difficults.
Le financement par LBO est litiste et les entreprises cibles sont slectionnes par les fonds
selon des critres exigeants. La russite d'une opration de rachat par effet de levier doit
remplir des conditions essentielles:
La capacit de la cible dgager des cash-flows disponibles pour rembourser la
dette et les intrts,
L'investissement d'une quipe dirigeante motive et comptente,
La possibilit d'augmenter la valeur de la cible :
- en interne par synergies sur les cots, la restructuration, l'innovation et la cration
nouveaux couples produits/marchs,...
- en externe par la croissance externe, la cession d'actif ou par fusion.
1. LA CIBLE IDEALE DUN LBO
La cible idale dun LBO doit tre une cash-cow, c'est--dire une socit mre, de croissance
moyenne, qui gnre un cash suprieur ses besoins et cre de la valeur sur un march stable.
Si la croissance est trop forte, des besoins supplmentaires de financement (BFR et
investissements) risquent de mettre en pril le remboursement de la dette dacquisition.
Its far better to buy a wonderful company at a
fair price than a fair company at a wonderful price.
-
23
Les besoins en cash ncessaires pour dvelopper lactivit doivent tre rduits. La cible idale
aura un cash conversion cycle court.
La structure de cots, c'est--dire la rpartition entre cots fixes et cots variables, est un autre
dterminant dans le choix de la cible. De mme, les variations de cash-flows sur lanne
doivent tre prvisibles et values lors des due diligences pr-acquisition. Une activit
saisonnire pour laquelle les ventes et les approvisionnements sont concentrs sur une courte
priode est susceptible de mettre en danger le montage et une trop forte variation du BFR
selon les priodes peut empcher la remonte de trsorerie.
Pr-audit ou due diligences prliminaires : plan for the worst, hope for the
best
Les due diligences pr-acquisition visent porter un il critique, stratgique et conomique
sur le positionnement de la cible au sein de son environnement. Elles sont menes dun point
de vue la fois externe (environnement de la cible) et interne (valuer la cible au sein de son
environnement).
Lanalyse externe comprend deux tapes : la description du secteur et de ses facteurs cls de
succs et lanalyse des forces concurrentielles du march. On distinguera ainsi cinq types
dindustrie : les industries mergentes, les industries en transition vers la maturit, les
industries en dclin, les industries fragmentes et les industries multinationales. Ces industries
prsentent des profils et enjeux stratgiques diffrents. Alors que dans une industrie
mergente, lenjeu est de verrouiller laccs la technologie et le rseau de distribution, il est
de parvenir crer des conomies dchelle dans une industrie plus fragmente.
Une fois ltude du secteur industriel termine souvre une phase danalyse interne de la cible.
Lanalyse stratgique permet au repreneur de valider la stratgie qui a t conduite jusquici
par les dirigeants de la socit. Il en dduira les zones de risques ainsi que les opportunits de
dveloppement. Michael Porter identifie trois grandes stratgies pouvant tre menes par une
socit, savoir la domination par les cots, la diffrenciation et la focalisation.
Les due diligences reposent avant tout sur lexamen de la situation financire de la cible et sur
lidentification des risques propres lacquisition. La comptabilit ne donne quune indication
globale de la performance et toute mesure de performance doit rapporter les rsultats de
lentreprise aux capitaux engags pour les gnrer.
-
24
Lvaluation de la cible accorde une grande importance limpact du risque et les
investisseurs utilisent plusieurs ratios afin de mesurer lendettement de la cible (fonds
propres/capitaux permanents, dettes financires/CAF,...). Il sagit de dterminer la faisabilit
de lopration de levier. La fonction score (Conan Holder3), plus labore, est prcieuse car le
score obtenu par la firme donne une indication quant la probabilit de sa dfaillance.
Quid de lvaluation du capital humain ?
On voque bien souvent le capital financier, industriel mais peu le capital humain. Ce dernier
recouvre lensemble des comptences et des savoir faire qui sont disponibles dans
lentreprise.
Un des risques fondamentaux et une raison dchec dans une opration de LBO est de dtruire
ou sous-utiliser le potentiel humain. En charge de la gestion oprationnelle de lentreprise
cible, le candidat repreneur idal a une exprience de direction gnrale dau moins 5 ans. Il
est choisi pour ses qualits de matrise de soi et son aptitude grer des situations de crise,
rsister la pression que reprsente lendettement de lopration et valuer les besoins
futurs de la socit.
Parce quun LMBI est un pari sur lhomme, le repreneur doit justifier lopration et garantir
sa russite.
2. LETABLISSEMENT DU BUSINESS PLAN ET DE LA STRATEGIE
Condition sine qua none du montage, les cash-flows doivent tre suffisants pour garantir la
fois le remboursement des dettes du LBO et le retour sur investissement exig par les
investisseurs. Lanalyse de la cible doit donc permettre dvaluer le Cash Flow Available for
Debt Service (CFADS), le flux effectivement disponible pouvant tre vers la holding et la
partie verse aux actionnaires (Free Cash Flow for Shareholders).
A la base du plan de financement qui sera bti en vue de lacquisition, le business plan mont
par le repreneur a pour objectif de garantir aux investisseurs une visibilit sur cinq ans.
Souvent rsolument optimiste, il nest pas systmatiquement en accord avec la ralit
conomique.
3 Voir annexes : application de la fonction score aux entreprises cibles
-
25
Parce que les performances passes naugurent en rien des performances futures,
linvestisseur se tournera vers lanalyse du business plan qui est lexpression chiffre dune
stratgie, aussi bien un projet quune ambition.
Parce que cest un projet, il doit montrer des adquations entre les fins et les moyens, entre le
profil de lentreprise et son environnement. Parce que cest une ambition, il permet de
positionner lentreprise dans son espace concurrentiel en termes de modalits de
dveloppement, de croissance et de rentabilit. Le business plan couvrira non seulement les
aspects comptable et financier, mais aussi stratgique, technique, juridique et social de
lentreprise. Il doit faire preuve de concision et de clart de telle sorte que lopportunit que
constitue le projet apparaisse vidente. Le business plan est indispensable pour obtenir le
financement dune banque. Elaborer un business plan, obtenir linformation, nest pas
toujours une tche aise. Parfois, les informations sont obtenues sans lautorisation du cdant,
par lintermdiaire de dmarches auprs du Tribunal de commerce.
Les 7 points cls du business plan
Identifier les produits et charges dexploitation (par ligne de produits,
clients,) afin de connatre la formation et lvolution des rsultats et les
cash-flows induits. Essentiel, ce point garantit la viabilit du montage. Les
apporteurs de fond examineront trois questions en priorit : le montant des
cash-flows existants, leur dcomposition et la crdibilit des projections.
Identifier les facteurs de sensibilit et dlasticit du cash-flow par lanalyse
des performances historiques tout en distinguant les facteurs rcurrents de
ceux qui sont exceptionnels
Analyse dtaille des performances rcentes pour dceler une potentielle
rupture de tendance par rapport lhistorique
Assurer la cohrence des hypothses financire, humaine, industrielle,
Construire un modle de prvisions synthtique et comprhensible par tous
Effectuer une analyse de sensibilit des facteurs cls pour construire
plusieurs scnarios
Valider la cohrence globale des prvisions ralises
-
26
Avant de communiquer les contrats, il est dusage de faire signer par le repreneur un accord
de confidentialit portant la fois sur lexistence des ngociations et les informations
recueillies.
Parce que lquilibre dun LBO est dpendant de la capacit de lentreprise gnrer de la
trsorerie et du rsultat pour satisfaire aux contraintes de remboursement de la dette ainsi
quaux ncessits internes lies au dveloppement de lentreprise, le business plan
conditionne la faisabilit du montage.
-
27
C. LE LBO SAPPUIE SUR UN MONTAGE COMPLEXE
1. EVALUATION ET NEGOCIATION DU PRIX DE LAFFAIRE
Le repreneur est assist de son conseil tout au long de lopration, de lvaluation de la
cible jusqu la ngociation du prix de cession.
LBO et multiples
La valeur de la cible doit tre distingue de son prix : la valeur dcoule uniquement de
lutilisation de mthodes dvaluation alors que le prix rsulte dune transaction. La valeur
peut donc ne pas correspondre au prix rellement pay par lacqureur. On distinguera deux
modes de cession : lorsque lacqureur prend linitiative de proposer au cdant dacqurir la
cible et lorsque le cdant prend linitiative de vendre sa cible en faisant appel au march.
La russite de lopration de LBO dpend avant tout du prix dentre ; une des prrogatives
est dviter un rachat trop cher. Dans lvaluation de la cible, il est commun dopposer
lapproche patrimoniale, selon laquelle la valeur des actions de lentreprise est gale celle de
son patrimoine net, et lapproche par les flux, selon laquelle la valeur de la cible est fonction
des flux financiers futurs que lentreprise pourra gnrer.
Dans leur valuation, de nombreux fonds utilisent des multiples, associs des indicateurs
comptables tels que lEBE, lEBIT, lEBITDA, le BPA (bnfice par action), le PER (Price
Earning Ratio), ou dautres indicateurs (les sites Internet sont valoriss en fonction de leur
trafic). Le choix du multiple est fondamental : le chiffre daffaires est un multiple
compltement inadapt car il oublie la notion de rentabilit. Cette valuation a comme
avantage de constituer une valorisation relative qui rsulte dune comparaison avec le march
mais cette comparaison au march peut se transformer en pige lorsque le march est en
pleine bulle (euphorie Internet des annes 2000, impact ngatif de la crise partir de 2008).
Lvaluateur va chercher rcolter des informations provenant de cessions antrieures
dentreprises identiques ou de valorisations de socit cotes.
-
28
2. STRUCTURATION DU FINANCEMENT, SUBORDINATION ET ROLE DES
COVENANTS
Dans le cadre dune opration de LBO classique, le financement de la holding dacquisition
est double : il seffectue la fois par apport en capitaux propres et par la voie de lemprunt.
Les techniques de financement se sont perfectionnes au fil du temps et sont maintenant dune
grande diversit.
Les ressources du plan de financement
Les ressources du plan de financement sont de deux types : remonte du cash gnr par la
cible (les distributions de dividendes) et financements manant des partenaires financiers
(investisseurs et banquiers).
2.1. La remonte des cash-flows et le risque dabus de biens sociaux
La remonte des cash-flows de la cible vers la holding prend la forme juridique dune
distribution de dividendes. Par ailleurs, si au moment de lacquisition la cible dispose de
trsorerie, elle la remontera vers la holding dacquisition.
Lutilisation des actifs aux dpens de la socit cible peut constituer un abus de biens sociaux,
le principal obstacle la libert de gestion des repreneurs, et faire supporter un effort financier
particulirement lourd. La Cour de Cassation estime quil y a abus de biens sociaux lorsque
lintrt poursuivi dans les oprations nest pas celui du groupe mais celui du dirigeant
repreneur, qui fait emprunter des fonds par sa holding afin de prendre le contrle dune
socit cible, alors que cette holding ne dispose pas de ressources suffisantes pour effectuer
les remboursements. Pour sexonrer de cette accusation, le dirigeant devra apporter la preuve
de trois lments principaux : la prsence dun intrt de groupe, dune contrepartie quilibre
et labsence de mise en pril de la socit prteuse.
Des situations rptes dabus de biens sociaux dans un pass rcent font quaujourdhui, les
dispositions des contrats dendettement sont examines avec grand soin.
-
29
2.2. Les financements manant des partenaires financiers
Le montage dune opration de LBO ncessite un savoir-faire particulier, ce qui explique que
des fonds dinvestissements se spcialisent dans ce type doprations. Les fonds de LBO
apportent des capitaux propres mais loutil principal de financement consiste en une dette
bancaire senior qui peut tre complte par une dette junior et/ou par une dette mezzanine. La
dette leve auprs des banques est consentie Newco pour financer lacquisition de la cible.
Dans certains cas, le fonds peut descendre une partie de la dette au niveau de la cible dans une
opration dite de debt push down ; un montage qui est surtout utilis par les socits cotes.
Larrt rendu par la Cour de Cassation le 10 juillet 1995 dans laffaire du LBO Delattre-Levivier
illustre la notion dabus de biens sociaux. Alors que lexpert nomm par le tribunal concluait que la
holding et la cible constituaient un groupe de socits, certains faits lont conduit reconnaitre labus
de biens sociaux :
- Leffort financier consenti par la cible navait pas t fait dans lintrt du groupe, mais
seulement en vue de permettre la holding dacqurir les titres de la cible
- Ce sacrifice prsentait des risques trop importants au regard de la fragilit financire de la
holding, dont lendettement tait dj lourd
- Cet endettement avait empch la cible deffectuer les investissements ncessaires
- Leffort de la cible tait dnu de contrepartie suffisante
Holding
Banque Cible
1. Distribution
des dividendes
2. Prt garanti sur les actifs de la cible
Debt push down
-
30
a) Le financement par fonds propres
Il est ncessaire de capitaliser le holding de reprise un niveau suffisant pour que les
banquiers donnent leur accord de principe sur loctroi du financement. Le fonds dispose
rarement de moyens suffisants pour constituer lapport en fonds propres. Il apporte des
capitaux propres reprsentant de lordre de 30% 50% du financement total contre seulement
20% en 2007. Pour faciliter la remonte de cash, une partie des capitaux propres peut prendre
la forme dobligations convertibles subordonnes (ou mme de TSS : titres super-
subordonns) dont la conversion devient effective en cas de difficults financires de la
socit. On parle alors de quasi fonds propres.
Sur le plan financier, lapport en capital est le plus risqu, du fait du risque de non-restitution
des fonds en cas de liquidation judiciaire. Linvestisseur en capital exigera une rentabilit plus
leve quun prteur ordinaire : plus le risque est lev, plus le financement sera coteux.
b) Le recours lendettement et la rduction des conflits dagence
Dirigeant de la socit dinvestissement Carlyle
La technique du LBO utilise un endettement lev pour financer son actif.
Selon la thorie dveloppe par Jensen (1986), cette dette reprsente une contrainte efficace et
impose aux dirigeants de mieux grer les actifs de lentreprise dont ils deviennent
systmatiquement actionnaires directement ou via des intressements. Le dirigeant, mis sous
tension par un endettement lourd et motiv participer la plus-value finale, va tenter de
grer le plus efficacement possible lentreprise et amliorer sa valeur.
Il est particulirement intressant pour les banques de participer des oprations de LBO car
elles prtent des taux suprieurs ceux du march et parce que leur dette sera rembourse en
priorit sur les autres dettes dites subordonnes, tout en bnficiant de garanties spcifiques.
Cheap debt is the rocket fuel. Try to get as much as you
can, as cheaply as you can and as flexible as you can
-
31
Les oprations de LBO constituent une opportunit trs attractive mais rserve seulement
quelques intervenants du fait de la spcialisation et de lextrme professionnalisme impliqu
par ce type de transmissions.
Pour les petites oprations (infrieures 10M), la dette est contracte auprs dune unique
banque, souvent la banque de la cible, mais pour les plus importantes, la mise en place du
financement est bien plus complexe.
Le principe du LBO repose sur la mise en place dune dette senior par opposition la dette
mezzanine qui la subordination confre un caractre junior. Le levier financier recherch
ncessite diffrents niveaux de financement aux niveaux de risque croissants.
Ces financements peuvent tre complts par un crdit vendeur (le vendeur de la cible nest
pas pay de lintgralit du prix immdiatement) et par des oprations de titrisation dactifs de
la cible comme les crances ou les stocks si ceux-ci disposent dun march.
Spcificits dune dette senior
La dette senior, contracte auprs des banques, se prsente sous la forme dune dette moyen
terme (5 7 ans) structure par tranches : A,B,C typiquement (+ tranche D / second lien). Elle
est dclare senior dans le sens o elle sapprcie par la priorit dans son remboursement par
rapport aux autres modes de financement. La diffrence essentielle entre une dette bancaire
classique et une dette senior LBO provient du fait que la prise de risque est de nature trs
diffrente. La dette LBO ne procure aucune contrepartie lentreprise en termes de rsultats
mais appauvrit la socit ce qui la rend vulnrable aux alas de la conjoncture.
La mise en place dune dette senior LBO nest jamais similaire dune opration une autre et
le montage doit tenir compte des caractristiques de la socit cible, de tous les paramtres
affectant la capacit de remboursement. Ainsi le financement senior peut prvoir des lignes
supplmentaires destines au financement de besoins particuliers de la socit cible :
financement de lactivit (lignes de BFR, dcouverts bancaires,), financement
dinvestissements, financement de la croissance externe (build-up), lignes adosses une
cession ultrieure dun parc immobilier,
Au cours de larrangement entre tablissements financiers, le chef de file a parfois recours
une syndication au march, mais garde le plus souvent 10 20% de la dette son compte.
-
32
Le financement des LBO les plus importants est le fait dun nombre restreint dintervenants
de la place (nous tudierons lexemple de BNP Paribas) qui entretiennent des relations
privilgies avec les fonds dinvestissement. On constate, par ailleurs, un diffrentiel de
marge bancaire important pour le financement dune PME et de grandes entreprises.
Positive and negative covenants
Inclus dans lacte de prt, les covenants contraignent les emprunteurs au respect de certaines
normes financires et comportementales et font du banquier senior un vritable partenaire de
lentreprise. Le but pour le banquier, tant donn le caractre particulier de son financement,
est dtre tenu inform de lvolution de lentreprise et de dfinir un cadre contractuel.
On y trouve des clauses varies qui vont au del de simples ratios financiers (Dette nette /
EBITDA < 5, FCF / Service de la dette total > 1,1,) :
- Les clauses dinformation :
Lemprunteur sengage fournir au banquier ses comptes annuels certifis ainsi que ceux de
ses filiales, indiquer toute modification ou vnement pouvant affecter sa situation.
- Les clauses de limitation dendettement :
Lendettement supplmentaire de la Newco est prohib, et celui de ses filiales est plafonn.
Cette limitation vise vite de masquer une situation qui se dtriorerait ainsi que toute
croissance non matrise. Les banques, aujourdhui, estiment que ce nest pas elles seules
dassumer la croissance et que les actionnaires doivent participer cet effort.
- Les clauses de limitation dinvestissement :
Ces clauses sont fondes sur le plan prvisionnel dexploitation et cherchent cadrer la
politique de dveloppement du groupe, en interne comme par croissance externe. Il sagit de
faire comprendre au dirigeant quune opration de LBO nest pas sans contrainte.
- Les clauses de non-alination des biens du groupe :
Ces clauses vitent que la socit puisse cder des actifs et donner des biens en garantie qui
rduirait, pour le banquier senior, la substance de sa garantie.
-
33
- Les clauses de non-versement de dividendes et dexcess cash flow
Lemprunteur ne peut pas rmunrer ses actionnaires tant que le prt senior nest pas
rembours. Lemprunteur devra utiliser tout ou partie de lventuel cash flow supplmentaire
dun exercice pour rembourser par anticipation la dette senior.
- Les clauses de modification de lactionnariat de lemprunteur :
Il est essentiel pour la banque davoir le choix de sortir ou non de lopration en cas de
changement dactionnaire avant le remboursement complet de sa dette. Toute modification de
lactionnariat peut dclencher lexigibilit anticipe.
Les bris de covenants associs un contrat revtent une importance variable : une distribution
de dividendes non autorise pourra tre synonyme de poursuites alors quun non-respect de
ratio ne sera pas forcment sanctionn (voir II.). Ils nimpliquent pas forcment une
dfaillance de lentreprise ou une impossibilit de respecter lchance.
Les financements mezzanines : caractristiques et intrts de la subordination
Dans le cadre du montage, il existe un niveau dengagement que les banques ne voudront pas
dpasser. Ce niveau dendettement maximum pourra tre complt par lintroduction dun
financement mezzanine qui prsente lavantage dtre subordonn, c'est--dire interpos entre
les capitaux propres et la dette senior (financement dune dure typique de 10 ans).
Linvestisseur sera incit recourir un financement mezzanine afin dobtenir une structure
de montage plus souple et une diversification de ses financements.
Les principaux covenants associs une opration de LBO
- Non-distribution de dividendes ou assimils de la part du holding
- Limitation de lendettement et des investissements
- Contrle de la croissance externe
- Interdiction de donner des garanties, consentir des prts et de
souscrire de nouvelles dettes
-
34
Ce financement est rembours aprs le dsintressement complet des prteurs senior (en deux
ou trois annuits aprs la dernire chance de la dette senior) et comporte un droit sur le
capital.
Le caractre subordonn de cette dette la rend plus risque que la dette senior. En contrepartie
de ce risque plus lev, le prteur mezzanine va pouvoir exiger une rmunration plus
importante : par exemple, intrts cash (Euribor + 4,5%) et intrts capitaliss (4,5%).
Les instruments les plus utiliss dans le financement mezzanine sont les obligations bon de
souscription dactions (OBSA) et les obligations convertibles en actions (OCA). Pour mettre
ce type de titres, il faut que la socit holding soit une socit par actions ayant deux annes
dexistence et ayant tabli des bilans approuvs par les actionnaires.
Une OCA, mise par la holding de reprise et non convertie, sera rembourse comme un
emprunt ordinaire. Les OBSA, quant elles, comprennent une partie dette ainsi quune partie
donnant accs au capital. Leur rmunration se compose donc dune rmunration sous forme
de coupons et dun droit sur le capital : le kicker. Les prteurs mezzanine bnficient donc
dun rendement complmentaire confr par les BSA, qui leur donnent accs une partie de
la plus-value du fonds LBO. Il a cependant t observ que ceux-ci ne donnent accs qu une
part minoritaire du capital.
Parce quil comporte des aspects qui lapparentent une dette et dautres aspects qui
lapparentent des fonds propres, le financement mezzanine est bien un financement
intermdiaire.
Dans un contexte daccs difficile aux marchs de capitaux, la dette mezzanine est de plus en
plus prise. Par ailleurs, il nest pas rare dobserver sur certaines transactions large cap
une substitution de la dette mezzanine par des obligations High Yield.
Formalisation de la subordination de la dette : la convention de subordination
Dans un montage LBO, prteurs mezzanine et senior se consultent afin dharmoniser leurs
contrats avant la signature dfinitive, notamment les clauses dexigibilit anticipe. La
subordination est un lment essentiel de leurs relations.
Sa formalisation prendra souvent la forme dune convention qui lie emprunteur et prteurs
dans une relation tripartite. La convention de subordination tablit notamment que tant quil
existe une somme due au titre du prt prioritaire senior, lemprunteur et les prteurs
-
35
subordonns sinterdisent de verser et de recevoir tout autre paiement quun paiement
dintrt.
En cas de difficults rencontres par le LBO, de redressement ou de liquidation judiciaire, les
prteurs subordonns cderont et transfreront par avance toutes sommes qui pourraient leur
tre attribues au prteur prioritaire.
Remboursement de la dette et garanties de plus en plus fortes exiges par les
prteurs : la barrire de larticle L.225-16 du Code de Commerce
Avec larrive de ladite crise financire, les banques ont renforc leurs critres doctroi de
crdit et se montrent trs slectives sur les dossiers, ce qui conduit logiquement rduire le
volume global des montages LBO. La viabilit des oprations est conditionne par la capacit
de la cible gnrer des cash-flows en vue de rembourser le capital et les intrts de la dette.
Le remboursement de la dette est une contrainte forte ce qui explique que le financement
dopration de LBO soit considr par le banquier comme un investissement particulirement
risqu. Plus le volume de la dette reprsente un montant lev et plus le banquier cherchera
se prmunir dun risque de non-remboursement (do de nombreuses clauses contractuelles et
la syndication laquelle sajoute parfois la titrisation de la dette).
Aprs un ralentissement du march du LBO, la slectivit des dossiers par les fonds et par les
banques de financement sest accrue. De nombreux fonds sont en cours de leve ou doivent
entrer en leve de fonds mais, dans un contexte de raret de la liquidit, lchec est de plus en
plus envisag.
De ce fait, le banquier exigera systmatiquement des garanties en contrepartie de son
financement. Or, contrairement aux rglementations anglaises et amricaines, qui permettent
en autorisant des garanties consenties sur les actifs de la cible de scuriser des oprations plus
risques, le droit franais interdit toute socit, par larticle L.225-16 du Code de
Commerce, de donner ses actifs en garantie des engagements financiers pris pour lacquisition
de ses propres actions.
Aujourdhui, les banques ne veulent plus se limiter aux actifs de la Newco : le nantissement
des comptes des actions dtenues par la holding nest plus considr comme suffisant. Elles
exigent dornavant une garantie portant sur les socits actionnaires, sur les fonds
dinvestissement : cest le Double Luxco .
-
36
D. LE LBO : UNE OPERATION NON SANS RISQUES
1. LES RISQUES INHERENTS AU RECOURS A UNE HOLDING
Lutilisation dune holding dans le cadre dun LBO nest pas une opration dnue de risques.
Ces risques trouvent leur origine dans les relations avec les actionnaires minoritaires de la
cible, ladministration fiscale, ou les partenaires financiers de la holding.
Dun point de vue juridique, la responsabilit des repreneurs peut tre engage dans deux cas :
lappauvrissement de la filiale et la fusion prmature entre la holding et la cible. Si les
prlvements de la holding sur la filiale deviennent excessifs et quils mettent en danger
lquilibre financier de cette dernire, les actionnaires minoritaires pourront invoquer devant
la justice labus de majorit. Afin de limiter ce risque, il convient de procder une gestion
adapte des distributions de dividendes.
La fusion entre la holding et sa filiale constitue laboutissement habituel de lopration de
transmission mais une fusion prmature peut tre sanctionne. Pour constituer un abus de
majorit, la dcision de fusionner doit tre contraire lintrt gnral de la socit :
prjudiciable aux minoritaires et procder de lintention des majoritaires de savantager.
Ladministration fiscale interviendra plutt en cas dabus de droit ou dacte anormal de
gestion (abus de bien social). Lacquisition dune socit suivie dune fusion avec sa holding
peut tre constitutive dun acte anormal de gestion si la fusion est effectue peu de temps
aprs.
La socit cible peut galement ne pas raliser les performances conomiques et financires
qui ont t envisages dans le plan de financement soit en raison dalas tenant la situation
conomique gnrale ou au march, soit en raison de la mauvaise estimation de sa valeur. Au
final, si la constitution dune holding, la base du montage LBO, prsente des avantages
indniables du point de vue financier ou fiscal, il apparait essentiel de prendre en compte le
scnario de lchec du plan de financement dans le montage juridique.
-
37
2. LACQUISITION DUNE CIBLE AVEC EFFET DE LEVIER NEST PAS NEUTRE EN TERMES OPERATIONNELS.
Sous LBO, le mode de gestion de la cible va voluer pour sorienter vers une stricte logique
de performance financire. La gestion courante est optimise, un systme de reporting trs
prcis est mis en place ; confiance et transparence avec les sponsors deviennent
indispensables alors que lhorizon de dcision est resserr du fait dun objectif de sortie
moyen terme.
Il apparait quil ny a pas dopration de LBO russie sans un vritable partenariat gagnant-
gagnant et que ce dernier peut tre gnrateur dinstabilit (le LBO nest quune tape,
absence de politique de trs long terme) ou dune atmosphre tendue.
La finalit nest pas toujours le dveloppement proprement dit de lentreprise mais plutt le
dtournement de la cration de valeur de la firme vers les apporteurs des fonds propres. Les
entreprises reprises sont mises sous pression. Louvrage de rfrence Vernimmen dfinit
dailleurs le LBO comme une diminution des fonds propres de lentreprise, la cration dune
situation dendettement sans raison conomique fondamentale . La recherche doptimisation,
par effets de levier, comporte de plus en plus un risque de rupture et le stress gnr par la
dette peut tre un mauvais stress.
2.1. La difficile conciliation des intrts des diffrents acteurs
Mcaniques complexes et oprations denvergure, les LBO font se rencontrer de nombreux
acteurs. Alors que les investisseurs professionnels (les fonds) investissent dans une optique de
rendement attractif, les banquiers financeurs mettent la disposition des fonds et cherchent
minimiser le plus possible les risques pris ; les mezzaners se distinguant par leur degr
daversion au risque. Enfin, les managers offrent des comptences et leurs qualits
oprationnelles.
2.2. explique le recours au management package ou plan dintressement
Si linvestisseur en capital apporte les fonds ncessaires au dveloppement de lentreprise,
cest bien le management qui porte le projet. Un systme dintressement motivant permet de
fidliser le management (managers cl et principaux cadres de la socit) et de le rcompenser
pour les efforts entrepris. Lincentive la russite du projet de LBO prend la forme
dinstruments daccs au capital (obligations convertibles, BSA, stock-options).
-
38
Il est calcul comme une rtrocession de la plus-value du fonds en fonction du TRI atteint ou
alors sur la base du multiple du montant investi par le fonds.
La tendance est de plus en plus laccroissement de la gnrosit des fonds (prime la
gestion) : les rtrocessions sont plus leves et les seuils de dclenchement plus bas. La
structure permet aux managers dobtenir un multiple dinvestissement et un TRI suprieurs
celui du fonds, avec un effet dacclrateur. Au cours des dernires annes, certaines quipes
de management dentreprises sous LBO ont fait de trs bonnes affaires. Il tait plus ais et
plus rapide de faire fortune dans un LBO comme membre de lquipe dirigeante que comme
cadre dirigeant dans un grand groupe, si bien quil existe dsormais parmi les directeurs
financiers un vritable fantasme pour le LBO.
Pourtant, de nombreuses oprations ont rencontr et rencontreront des difficults.
-
39
II. DIAGNOSTICS DU LBO EN DIFFICULTE ET FRAGILITES INTRODUITES
DANS LENTREPRISE RACHETEE
A. ETAT DES LIEUX DES LBO : UNE CRISE DISCRETE
Alors que le modle postule la bonne sant de la cible, les cas de LBO en difficult montrent
les limites de ces oprations. En effet, nombreuses sont les socits achetes il y a quelques
annes et aujourdhui en situation dlicate : parce que les holdings se sont endettes sur la
base dune valeur des actifs qui est aujourdhui remise en cause et pour certaines ne sont plus
capables de respecter les engagements pris auprs de leurs cranciers.
Plus de 814 milliards de dollars de dettes LBO doivent arriver maturit dans le monde au
cours des six annes venir. La France4, avec 71 milliards de dollars de dette LBO d'ici 2016
et 8 milliards en 2011, occupe la troisime position en Europe (sources cabinet Freshfields
Bruckhaus Deringer). Les socits concernes sont, bien souvent, en mauvaise sant.
Lagence de notation Fitch Ratings a tabli, en mars 2010, que 62% des socits europennes
sous LBO taient nots B- ou moins, une notation qualifie de trs spculative.
La situation inquite et les LBO zombies, auparavant invisibles, se multiplient. Condamns
dun point de vue comptable, ils continuent survivre en payant simplement les intrts de la
dette, nhsitant pas sous-investir dans les entreprises quils dtiennent.
1. DES ACQUISITIONS DE PLUS EN PLUS CHERES ET DES PERFORMANCES QUI
REGRESSENT
Selon les secteurs, les multiples dEBE sont passs dune moyenne de x5 ou x6 une
moyenne de x7 x8 en seulement quelques annes. Dans le mme temps, les leviers de dette
senior sont passs de plus de 5 fois lEBITDA 3,5 fois au maximum. Les acquisitions
dentreprise sont donc de plus en plus coteuses et de moins en moins finances par de la
dette. Nous avons montr quil est dusage, dans le cadre dun LBO, de mesurer la
performance de lactivit partir du taux de rentabilit interne (TIR) car ce dernier permet
lgalisation de la valeur des montants investis et de la somme actualise des flux de trsorerie
gnrs par linvestissement.
4 Des statistiques du LBO en France figurent en annexes.
-
40
Le niveau de ce taux dpend donc grandement du niveau des flux de revenus ; ces derniers
tant de deux ordres, les dividendes (remontes des socits cibles) dune part et les plus-
values dautre part.
Lessentiel de la performance dpend du niveau de la plus-value ralise au moment du
dnouement de lopration. La priode de rfrence va donc fortement jouer sur la
performance.
Ainsi lachat dune socit en 2007 sur la base dune forte valorisation, a toutes les chances de
se solder fin 2011 par un TRI ngatif en raison de la baisse de valeur des titres par rapport
leur valeur dachat. A lhorizon 2013, il se peut que selon lvolution de la socit et de
lconomie, le TRI de cette opration redevienne positif.
Il est souligner que les rgressions enregistres par les LBO en 2008 et 2009 sont clairement
lies une nette baisse des prix des entreprises. Ce nest pas tant la crise financire en elle-
mme qui a constitu une menace pour les socits sous LBO, mais plutt la crise
conomique qui la suivi : la dgradation de la rentabilit conduisant inexorablement un
renchrissement des conditions demprunt, une hausse du degr dexigence des covenants.
2. LINQUIETUDE LIEE AUX COMPORTEMENTS DES NOUVEAUX ACTEURS ET LEMERGENCE DE CRITIQUES
La structuration des montages rcents a t impacte par lmergence de prteurs non
bancaires, la multiplication des instruments de dette et laugmentation, toutefois lgre, de la
part de la dette remboursable in fine. Les hedge funds font dornavant de lombre aux fonds
de Capital Investissement et encouragent les financements de maturit longue ainsi que
laugmentation des effets de levier, ce qui accroit dautant les chances de faire face des
difficults du ct de la cible.
De par sa nature, et qui plus est en priode de fragilit de lconomie mondiale, le modle
LBO a t ouvertement critiqu. Dans le mme temps, les montages se sont sophistiqus et
lacquisition schelonne de plus en plus sur plusieurs tapes. Le nombre de LBO secondaires
(technique consistant cder lentreprise sous LBO un autre fonds, qui met en place un
nouveau montage) a mme atteint la moiti du nombre des transactions en Europe ; un
mcanisme critiqu car ne partant pas dune intention pertinente damliorer la situation de la
socit.
-
41
Une reprsentation limite au seul aspect financier dnonce les faits que :
- Le LBO est court-termiste , privilgie les intrts des actionnaires aux dpens dune
stratgie industrielle plus long terme.
- Le LBO participe la destruction de lemploi, ce dernier faisant office de variable
dajustement pour optimiser la rentabilit.
- Le LBO peut tre lorigine dattitudes spculatives qui concourent la formation de
bulles financires.
Face au dveloppement des LBO, une contestation organise du modle est mme ne : le
Collectif LBO . Ce collectif dfinit le montage comme tant une vritable infection, tudie
les cas les plus svres et envisage les consquences ngatives du LBO, savoir :
- Le resserrement de la gestion qui conduit sans cesse rengocier avec les fournisseurs
qui se voient contraints de faire plus defforts.
- La recherche de meilleures marges et de cash-flows levs peut entraner des
rductions deffectifs et un recours plus important la sous-traitance, pouvant affecter
ngativement lemploi.
- Loptimisation de la gestion et une stricte gestion des cots font craindre des
politiques salariales restrictives.
En 2012, la cration de valeur dun LBO semble rsider de plus en plus dans laptitude des
managers, leurs conseils et dans une moindre mesure les investisseurs, augmenter la
performance de lentreprise acquise. Si le projet de LBO aboutit et si la stratgie mise en
uvre sinscrit dans le temps, alors le LBO prend toute sa lgitimit conomique.
-
42
3. PAS DE RISQUE SYSTEMIQUE MAIS DES MENACES
Les critiques ont beau tre fondes, il apparait quil ny a pas de risque systmique des LBO
et 7 LBO sur 10 nont pas de problmes de dette (donnes 2011). Lobservation sur les
priodes rcentes semble tmoigner que les logiques conomiques qui ont sous-tendu les
dossiers reposaient sur des bases saines, lgitimant ainsi la mise en place du montage.
Au sein dun march extrmement cyclique, le LBO reste une classe dactifs apprcie par les
investisseurs. On ne peut, par contre, ngliger certains lments qui devraient peser
ngativement sur lactivit des LBO :
- La forte diminution des leviers dendettement
- Le ralentissement des leves de fonds au niveau mondial
- La slectivit croissante des dossiers
- Lexistence dun mur de dettes chance 2012-2013 qui risque de se cumuler avec
les difficults actuelles de certaines banques.
- Les contraintes apportes par Ble III (pour les banquiers) et Solvency 2 (pour les
socits dassurance)
Parce que plus du tiers des fonds investis proviennent des assureurs et des banquiers, les
sources de financement pour la reprise dentreprises risquent de se tarir. Ni le FSI (Fonds
Stratgique dInvestissement), dont les moyens sont limits, ni les particuliers qui prfrent
limmobilier ou lassurance-vie ne constitueront des voies de recours.
-
43
B. TYPOLOGIES DE LBO EN DIFFICULTE
1. UNE PROBLEMATIQUE TRIPLE : FINANCIERE, JURIDIQUE ET HUMAINE
Le montage LBO sapplique thoriquement une cible en bonne sant, cense le rester et
amliorer sa situation. Il se fonde donc sur une hypothse optimiste.
Cependant, plusieurs cas de difficults, de gravit diffrente, sont envisageables et peuvent se
cumuler ; leffet de levier, en cas de difficults de la cible, assurant une contagion immdiate
de la holding. Le systme cible + holding est plus facilement vulnrable que la cible, en ce
sens que la non-ralisation des objectifs du business plan peut entraner rapidement la
dfaillance sur le remboursement de la dette LBO, alors mme que la cible est encore
bnficiaire.
Compar au cas de difficults dune entreprise classique, le LBO prsente des spcificits du
fait de limportance de lendettement financier et de la dpendance de la holding des
remontes de la cible et de linvestissement personnel des dirigeants.
Des dcalages, positifs comme ngatifs, peuvent apparatre entre le prvisionnel dorigine et
le ralis . Ces dcalages, lorsquils sont positifs, peuvent entraner, par le jeu de la
documentation bancaire, des amortissements anticips de la dette (clauses dexcess cash-
flow). Les dcalages ngatifs sont plus problmatiques, car ils affectent la capacit de
lemprunteur honorer sa dette.
En outre, la problmatique nest pas exclusivement financire, elle est galement juridique et
surtout humaine.
2. LA BONNE FIN REMISE EN CAUSE
Un LBO en crise se matrialise par lincapacit de la socit holding rembourser la dette
dacquisition, des free cash-flows durablement infrieurs aux prvisions. Cela signifie que
non seulement linvestissement ralis na pas atteint la rentabilit escompte mais aussi
(dans la mesure o la transaction a t en grande partie finance par concours financiers
externes) que lquilibre de lopration risque dtre boulevers et donc la bonne fin du LBO
remise en cause. Lchec du LBO ne se traduit pas forcment par une faillite ou une cessation
dactivit.
-
44
Un scnario rcurrent implique que les fonds et les managers actionnaires perdent leur
investissement et que la banque devienne propritaire de lentreprise avant de chercher la
revendre dautres investisseurs ou un industriel.
La pire issue reste la cessation de paiements (incapacit de faire face au passif exigible avec
lactif disponible), mais cette situation est rare dans la mesure o la dette aura la plupart du
temps t ramnage, ou le taux aura t diminu, en fonction de la nouvelle donne
conomique ayant justement conduit la crise du LBO.
Parce quil est impratif de dterminer quel niveau se situent les difficults et si les crises
sont passagres, cette partie vise mettre en vidence les droutes des LBO ainsi que leurs
raisons. Parmi ces dernires, il est commun dvoquer une mauvaise estimation du march de
la cible, des due diligences incompltes, une quipe de management insuffisamment prpare
ou une dette mal calibre.
Nous aborderons les situations de crise par ordre de gravit.
-
45
C. LE NON RESPECT DE LA TRAJECTOIRE ASSIGNEE PAR LE BUSINESS PLAN DES
LBO
1. DES BUSINESS PLANS TROP OPTIMISTES
Au cours des dernires annes, de nombreuses entreprises sous LBO ont prsent les
caractristiques suivantes :
- Rentabilit positive
- Trsorerie prserve
- Mais la socit accuse un retard par rapport son plan de dveloppement daffaires.
Ceci nest pas vritablement une surprise car certains business plans la base de montages
financiers ont t raliss avant 2008 et le ralentissement conomique a rendu obsoltes les
prvisions de chiffre d'affaires ou les modles de croissance. Or, le business plan se doit
dtre cohrent (avec la structure de lentreprise et son march) et raliste.
Une des principales causes dchec du LBO est un business plan irraliste qui a tendance
surestimer les cash-flows ou a prvu ds lorigine un niveau de dette trop lourd (qui ne
produit pas un effet de levier mais un effet de massue) ou encore qui na pas correctement pris
en compte les variations du BFR au cours de la priode de remboursement de la dette.
Surtout pour les grands LBO (portant sur des cibles dune valeur suprieure 200 millions
deuros), les considrations lies au montage financier ont pris le pas sur celles tenant au
projet entrepreneurial. Cela a engendr des business plans dont lambition tait
proportionnelle limportance du levier et des plans dintressement exponentiels incitant le
management entrer dans la logique dun dveloppement rapide assorti dune revente dans
les meilleurs dlais. Invitablement des dcalages futurs sont apparus dans les business plans
sous forme dun BFR trop important, de marges dcevantes, ou dune croissance en de des
prvisions.
-
46
2. DECROCHAGE, ACCIDENT, DEGRADATION
En cas de non-respect du business plan initial, il est commun de distinguer plusieurs
situations :
Le dcrochage : lorsque la cible ne dgage pas les performances prvues, les remontes de
cash sont plus faibles que prvues et la valorisation infrieure aux prvisions.
Laccident : du fait dun problme conomique, la socit traverse des difficults qui mettent
en pril sa situation financire et affecte sa profitabilit
La dgradation : la cible voit sa performance dorigine se dgrader, le changement de
contrle na pas les consquences escomptes et ne permet pas de freiner la dgradation
rgulire de la situation financire.
Le repreneur de lentreprise devra agir vite car sa crdibilit sera inversement proportionnelle
aux carts entre les prvisions et les ralisations. Dans ce contexte, information et la
transparence revtent une importance capitale. Il faut amener les dirigeants repenser leur
modle conomique et les sensibiliser la remise en cause de celui-ci. Cette sensibilisation
passe par la rcriture dun prvisionnel fiable, sur une priode plus courte et dont la visibilit
sera suffisante. Ce document servira de rfrence pour les discussions avec les partenaires
externes dont le banquier. Le dirigeant doit tre capable dexpliquer son bilan et le non-
respect du business plan pour anticiper les ractions de la communaut financire.
2.1. Que va faire le banquier ?
Les banquiers mettent laccent sur le signal dalerte que constitue la non atteinte du business
plan. Ceux engags dans la dette senior, aprs la rception des tats financiers, vont examiner
les diffrences entre les chiffres raliss et ceux attendus. Ils avaient, en effet, tudi le
financement de lacquisition sur la base des rapports daudits et dun prvisionnel.
Ils retiennent comme critre majeur la capacit de rsistance de lentreprise et vont
ractualiser leurs simulations en tudiant limpact de la non ralisation du business plan sur le
modle de lentreprise au travers de crash tests qui mettent en scne diffrents scnarii
dgrads pouvant altrer les comptes de la socit. Cela peut consister prvoir par itrations
successives une croissance moindre que celle annonce par le management.
-
47
Cette analyse permettra de comprendre et de valider les options prises par la direction tout en
anticipant certaines dcisions qui permettront d