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    INTRODUCTION

    L'avarie commune est une ancienne forme de division des risques du transport

    maritime qui a merg avec l'volution du commerce.

    Confrontes un pril susceptible d'entraner leur perte collective, les proprits corps

    et cargaisons engages dans une mme aventure maritime, doivent supporter, proportion de

    leurs valeurs finalement sauves, les dpenses et les sacrifices exceptionnels raisonnablement

    encourus pour permettre leur salut. Cest le principe mme de lavarie commune qui repose

    sur le principe dquit et de solidarit en mer.

    Dans des situations de prils, il peut y avoir conflit dintrts puisque les propritaires

    des marchandises jetes par dessus bord, par exemple, auraient prfr que le capitaine

    choisisse une autre alternative. Lmergence de lavarie commune est due ce conflit

    dintrts qui, ainsi, disparat. En effet, le prjudice subi par les propritaires des

    marchandises sacrifies est partag avec les propritaires dont les marchandises nont pas t

    sacrifies.

    Lavarie commune a dbut au moment o la navigation la plus florissante seffectuait

    en Mditerrane orientale. Une vingtaine de sicles plus tard, son corpus juridique sest

    considrablement amplifi au point de constituer un ensemble de rgles trs consquent.

    Son concept remonte aux ges les plus anciens. Elle est apparue pour la premire fois

    dans la Lex Rhodia de Jactu qui est connue par le texte du Digeste de Justinien1

    qui prvoit

    que : si le navire senfonce et ne ragit plus la lame, sil prend de leau, si trop

    lourdement charg, il ne peut gagner de vitesse le pirate qui le poursuit, bref sil est menac

    dun pril et que, pour sen protger, on dcide de jeter une partie de sa cargaison la mer,

    il faut que tous ceux qui sont sauvs participent au sacrifice 2. Ce texte a introduit une

    procdure de contribution car les avaries communes les plus frquentes dans lantiquit

    taient le jet la mer de la marchandise pour allger le navire, la coupure des mts ou des

    1 Digeste, Livre XIV Titre 2, Fr 1.2 Jurisclasseur Transport Fasc. 1245 : avaries communes.

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    ancres ou tout acte pour le salut commun afin dviter que le navire coule par un danger de la

    mer.

    Aussi, l'antiquit phnicienne avait dj nonc ce principe qui a t intgr, au fil du

    temps, par les lgislations des principales nations maritimes. Son application est demeure

    strictement limite au seul domaine maritime l'exception de certains grands courants de

    navigation fluviale, notamment en Europe, sur le Rhin, la Moselle et autres fleuves allemands,

    belges et hollandais3.

    Les rclamations devenant importantes de la part des intrts marchandises et

    galement de l'armateur pour les pertes non attribuables sa faute, l'ide de rdiger un code

    international de l'avarie commune est ne afin de surmonter les divergences apparues dans les

    diffrentes lgislations et pratiques nationales susceptibles de s'appliquer un mme voyage

    et donc une mme avarie commune4.

    Ainsi, des tentatives pour crer une harmonisation internationale sous forme de Rgles

    ou de Conventions ont vu le jour. La premire tentative a t faite en 1860 sous les auspices

    de laNational Association for the Reform and Codification of the Law of Nations qui a abouti

    une srie de confrences internationales, la premire s'tant tenue Glasgow en septembre

    de la mme anne.

    Certaines rsolutions, dont l'objectif tait de crer une codification uniforme de

    l'avarie commune et son intgration dans les lois nationales, ont t adoptes.

    Ainsi, un projet a t prpar et soumis tude lors de la troisime confrence tenue

    York en 1864. Les parties prsentes se sont mises d'accord pour l'adoption de onze rgles

    connues sous le nom Les Rgles d'York. Il fut recommand de les inclure dans les lois

    nationales, et dans l'attente de les incorporer dans les connaissements et les chartes-parties.

    3 Lamy Transport, tome II 2009 1278 Avaries communes, la France excluant lavarie commune except sur

    les fleuves frontaliers, les transports rhnans, les transports mosellans transfrontires ainsi que les transports

    fluvio-maritimes ; Convention de Budapest du 22 juin 2001 relative au contrat de transport de marchandises ennavigation intrieure en son art. 26 dispose que la prsente Convention naffecte pas lapplication des

    dispositions du contrat de transport ou du droit interne relatives au calcul du montant des dommages et descontributions obligatoires dans le cas dune avarie commune .4 Afin de voir la rpartition des causes davarie commune, se rfrer lannexe n 1.

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    Les Rgles dYork furent amendes lors de la Confrence d'Anvers en 1877 et une

    douzime Rgle fut ajoute, celles-ci devenant Les Rgles d'York et d'Anvers . Elles furent

    largement incorpores dans les chartes-parties et les connaissements et de ce fait, l'ide de les

    intgrer dans le code maritime des lois nationales fut laisse au choix des pays concerns.

    Lors d'une Confrence de laNationalAssociation for the Reform and Codification of

    the law of Nations tenue Liverpool en 1890, six autres rgles furent ajoutes pour devenir

    Les Rgles d'York et d'Anvers de 1890 .

    Toutefois, avec l'volution importante du commerce maritime, ces Rgles sont

    devenues insuffisantes pour rsoudre tous les problmes, les dix-huit Rgles ne couvrant que

    des cas spcifiques.

    Ainsi, en 1924, aprs la premire guerre mondiale, la Confrence de l'International

    Law Association tenue Stockholm a rvis les Rgles de 1890 et a adopt des rgles de

    principes caractres gnraux pour s'appliquer dans les cas non couverts par les rgles

    numrotes. Sept rgles lettres ont t adoptes (Rgles A G). Les principes gnraux de

    ces rgles et ceux spcifiques des rgles numrotes ont t ainsi mis cte cte sans relle

    cohrence, crant des problmes de comprhension quant leur application.

    Le premier cas srieux fut voqu dans l'affaire MAKIS 5. Dans cette affaire, qui a

    eu un retentissant effet dans le monde maritime, un juge anglais a statu que les principes

    gnraux voqus par les rgles lettres devaient primer sur les rgles numrotes traitant de

    cas particuliers. Aussi, a-t-il conclu qu'il ne pouvait y avoir admission en avarie commune

    sous l'effet d'une rgle particulire traitant un cas spcifique moins que cela ne soit couvert

    par les provisions des rgles gnrales. Cette interprtation tait contraire l'intention des

    parties ayant rdig les Rgles de 1924. Un accord est donc intervenu pour sopposer cette

    dcision, connu sous le nom du Makis Agreement.

    En outre, les Rgles de 1924 n'avaient pas obtenu l'accord des Etats-Unis. Une des

    raisons voques tait que la Rgle A donnait une interprtation restrictive quant l'admission

    en avarie commune des sacrifices faits et des dpenses extraordinaires encourus, les limitant

    5Vlassopoulos contre British & Foreign Marine Insurance Co, 1928 31 L1 Lloyds Report 313.

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    aux seuls cas de salut commun. Cela tait contraire la loi nationale amricaine qui les

    admettait en avarie commune quand ils taient exposs pour la prservation et la continuation

    du voyage en toute scurit et ce, sur le fondement de l'intrt commun.

    Ainsi, elles furent rvises en 1950 par le Comit Maritime International (CMI) qui a

    pris la suite de l' International Law Association. Il y a t ajout une nouvelle rgle

    d'interprtation d'inspiration anglaise la suite de l'affaire MAKIS et de la dcision rendue

    Londres par la Haute Cour de Justice. Cette Rgle accorde dans son deuxime alina la

    primaut des rgles numrotes sur les rgles lettres. Elle a t ajoute en dpit des efforts

    dploys par les franais et les pays latins pour faire adopter une solution plus juridique, plus

    logique, les principes gnraux devant avoir priorit sur les cas spcifiques, ceux-ci ne

    constituant que des complments et des prcisions6.

    Les Rgles de 1950 ont subi d'autres amendements en 1974 par le CMI lors d'une

    Confrence Hambourg et en juin 1990 lors d'une Confrence Paris, o la Rgle IV a t

    amende l'initiative de lOrganisation Maritime Internationale suite la Convention

    Internationale d'Assistance de 1989 devenant Les Rgles d'York et d'Anvers de 1974

    amendes en 1990 7.

    En 1994, lors de la 35me Confrence du CMI, qui s'est tenue Sydney en octobre

    1994, les Rgles d'York et d'Anvers 1994 ont t adoptes.8

    Une Rgle Paramount, propose par la dlgation amricaine avec le soutien de la

    dlgation britannique, a t ajoute suite l'affaire ALPHA de 1991 9. Etant donn que

    les rgles numrotes primaient sur les rgles lettres, le caractre raisonnable voqu par la

    Rgle A s'effaait devant les rgles numrotes ne contenant pas toutes la condition du

    caractre raisonnable de la dpense ou du sacrifice expos. Cette nouvelle Rgle a t insre

    pour mettre un frein certains abus, primant sur toutes les autres et exprimant qu'en aucun

    cas un sacrifice ou une dpense ne sera admis en avarie commune s'il n'a pas eu un caractre

    6 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, p. 307 et s., 1972.7 R. Parenthou, la Convention Internationale du 28 avril 1989 sur l'assistance et ses incidences sur l'avarie

    commune DMF 1990, p. 459 et s.8 R.Parenthou, Rflexions autour de lavarie commune avant le lifting de 1994, revue de Droit franais

    commercial, maritime et fiscal, janvier mars 1994, p. 23 et s..9 MYERSON, The York-Antwerp Rules 1994 : The American experience at Sydney, LMCLQ 1997, p. 379 ;

    1991 2 Lloyds Report p. 515 521 ; Corfu Navigation Co. V. Mobil Shipping 1991.

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    raisonnable. En principe, le caractre dominant des rgles numrotes sur les rgles lettres

    sera supprim chaque fois que la notion du caractre raisonnable de l'acte d'avarie commune

    sera en cause 10

    .

    Enfin, les derniers changements ont t apports lors de la Confrence de Vancouver

    en 2004 aprs de vives critiques entre les partisans et les opposants au maintien de l'avarie

    commune.

    Ainsi, comme nous l'avons vu, l'histoire de l'avarie commune a volu depuis les

    premires Rgles de 1864 jusqu'aux dernires Rgles de 2004. Les cas se sont multiplis les

    premires annes faisant voluer la jurisprudence et modifier les Rgles le plus souvent en

    faveur de l'armateur au dtriment des intrts marchandises par le biais du bnfice commun,

    crant ce qu'on a appel l'avarie commune artificielle , except la dernire en date de 2004

    qui est plus quilibre.

    Il est important de souligner que ces Rgles nont pas un caractre de conventions

    internationales. Il s'agit d'une simple codification. Elles peuvent tre imposes par des clauses

    spciales ou contractuelles, principalement les connaissements11. De plus, l'insertion des

    Rgles d'York et d'Anvers dans les connaissements et les chartes-parties constitue une

    pratique quasi universelle. Il suffit donc dinsrer la clause selon laquelle les avaries

    communes seront rgles suivant les Rgles dYork et dAnvers en prcisant lanne. Cette

    clause a pour effet dcarter lapplication des rgles du Code de commerce. Mme s'il est

    habituel de renvoyer au texte le plus rcent, ces Rgles tant purement prives12

    , les parties

    peuvent choisir de faire rfrence telle ou telle version.

    Les pays nordiques13 et la Chine14 ont incorpor dans leur code maritime les Rgles

    dYork et dAnvers.

    10 R.Parenthou, Revue de droit commercial, maritime, arien et des transports : Les nouvelles Rgles dYork et

    dAnvers 1994.11 Goulandris Brothers Ltd. v. B. Goldman & Sons Ltd (1957) 2 Lloyds report. 207 p. 213 et 214.12 Rodire et du Pontavice, Droit maritime, Dalloz, 1991, n479.13

    Hugo Tiberg, professeur de droit maritime l'universit de Gteborg, Chronique de droit maritime sudois1994-1995, DMF 1996 n560, mai 96.14 Louise Zhang, docteur en droit : Le Code maritime chinois ; DMF 1994 n534 01-1994.

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    En droit franais, la matire est rgie par la loi du 7 juillet 196715 relative aux

    vnements de mer, complte par le dcret du 19 janvier 196816

    . Cette loi contient une

    rglementation prcise des avaries communes mais ses dispositions ne sont pas d'ordre public.

    Elle ne simpose qu dfaut de stipulations contraires des parties intresses 17

    . Les

    parties peuvent choisir de les carter au profit des Rgles d'York et d'Anvers par une clause

    insre au connaissement. Elles pourraient mme supprimer la contribution aux avaries

    communes mais en pratique, elles ne le font jamais.

    Le rglement davarie commune est une opration trs complexe. Dans une expdition

    maritime, ce nest parfois quaprs plusieurs annes que le rglement sera tabli. La thorie de

    lavarie commune a fait lobjet de vives critiques. En effet, dans les annes 1960-1970, de

    nombreuses critiques ont man des pays en voie de dveloppement qui reprochaient de

    permettre aux armateurs certains abus et des procdures trop longues et compliques.

    Aujourdhui, linstitution est accepte par la totalit des pays maritimes et galement par les

    pays socialistes18

    . Elle a conserv son utilit. Elle autorise des dpenses trs coteuses que le

    capitaine hsiterait faire sil ne savait pas quelles seraient rparties entre tous les intresss.

    Comme nous allons le voir tout au long de ce mmoire, l'analyse pratique et juridique

    de l'avarie commune est complexe.

    Le dispacheur ou expert-rpartiteur a une lourde tche car sa mission consiste

    collecter toutes les informations pour valoriser d'une manire impartiale et juridique la

    contribution de chacune des parties engages dans l'aventure commune.

    Ainsi, dans la premire partie, nous aborderons l'analyse pratique de la mise en place

    de la dclaration d'avarie commune, les diffrentes tapes suivies depuis le dbut du voyage

    jusqu' la dlivrance des marchandises au port de dchargement final suite une avarie

    commune, toute la documentation ncessaire cette relche et enfin l'laboration de la

    dispache et son excution.

    15 Annexe n2.16

    Loi 67-545 du 7 juillet 1967, art. 22 42 ; dcret n68-65 du 19 janvier 1968, art.3 6.17 Loi 67-545 du 7 juillet 1967, art. 22.18 Trait de droit maritime, Pierre Bonassies et Christian Scapel, n532, 2006.

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    Dans la deuxime partie, nous nous pencherons sur l'tude juridique des Rgles

    dYork et dAnvers rgissant l'avarie commune, leur interprtation travers les textes et la

    jurisprudence et enfin, nous voquerons les arguments des partisans de l'abolition de l'avarie

    commune et de ceux qui souhaitent son maintien.

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    PREMIERE PARTIE

    ANALYSE PRATIQUE DE

    LA MISE EN PLACE DE

    LAVARIE COMMUNE

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    Chapitre I : Dfinition et caractres

    de lavarie commune

    Section 1 : Dfinition

    Il y a acte d'avarie commune quand, et seulement quand, intentionnellement et

    raisonnablement, un sacrifice extraordinaire est fait ou une dpense extraordinaire encourue

    pour le salut commun, dans le but de prserver d'un pril les proprits engages dans uneaventure maritime commune

    19. Telle est la dfinition immuable donne par la Rgle A des

    Rgles dYork et dAnvers, propre au droit maritime et qui, bien que remontant lantiquit

    nen reste pas moins dactualit. En effet, malgr les progrs techniques, la navigation en mer

    reste une aventure prilleuse. De mme, larticle 24 de la loi du 7 juillet 1967 dispose que

    sont avaries communes les sacrifices faits et les dpenses extraordinaires exposes pour le

    salut commun et pressant des intrts engags dans une expdition maritime .

    La thorie des avaries communes est une exception la rgle res perit domino

    imputant au propritaire la perte de la chose. Lavarie commune contraint navire et cargaison

    participer ensemble la dpense faite dans lintrt de tous.

    Il s'agit, en fait, d'un mcanisme de rpartition, entre le navire et les biens chargs

    bord au moment de l'vnement, des consquences financires rsultant d'une dpense ou d'un

    sacrifice fait pour sauver l'ensemble de l'expdition.

    Ainsi, lorsquun incendie menace gravement le sort de lexpdition, le capitaine, pour

    la sauver, va tre amen prendre des mesures appropries par exemple en inondant les cales

    pour teindre lincendie, en jetant la mer des marchandises, en faisant chouer le navire. Les

    dommages subis par le navire et les marchandises du fait de ces mesures vont faire lobjet

    dun rgime spcial de rpartition et vont donner lieu une contribution due par lensemble

    de tous les intresss lexpdition en proportion de leurs intrts sauvs.

    19 CA de Versailles du 15 janvier 2009, BTL n3257 du 2 fvrier 2009, p. 76 et 77.

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    Bonnecase dfinit lavarie commune comme le dommage ou la dpense manant de

    la libre volont du capitaine et destin carter un danger srieux de perte, soit totale, soit

    partielle, qui paraissait menacer lensemble du navire et de la cargaison20

    .

    Les avaries communes se distinguent des avaries particulires par la communaut

    dintrts qui conduit prendre telle mesure et oblige les deux parties contribuer aux pertes

    qui en rsultent. Les avaries particulires, elles, ne sont pas ordonnes par le capitaine mais

    tiennent soit la faute soit un vnement de force majeure et ce sont les conventions

    internationales qui sappliqueront sachant que sont particulirestoutes les avaries qui ne

    sont pas classes en avaries communes21

    . Afin de pouvoir distinguer lavarie commune de

    lavarie particulire, il faut rechercher la cause de lacte dont rsulte lavarie.

    Selon la doctrine traditionnelle, on peut retenir quatre lments de l'avarie commune22

    :

    sacrifice ou dpense extraordinaire ;

    qui doit tre volontaire et raisonnable ;

    contre un pril ;

    pour le salut ou le bnfice commun.

    En revanche, le caractre unilatral de la dcision, le rsultat de lacte ainsi que la

    faute de lun des participants sont sans incidence sur lavarie commune, il y aura donc quand

    mme admission en avarie commune.

    Toutefois, la Rgle Paramount des Rgles d'York et d'Anvers de 1994 a confirm que,

    pour qu'il y ait admission en avarie commune, il fallait que le sacrifice ou la dpense ait un

    caractre raisonnable.

    Lorsquun acte volontaire rpond ces quatre conditions, lavarie est commune. Mais

    dans le cas o ces conditions ne sont pas runies, lavarie sera particulire.

    20 Bonnecase, J, Trait de Droit Commercial Maritime, Sirey 1923.21 Loi 67-545 du 7 juillet 1967, art. 23.22

    CA Aix en Provence, 2me ch.com 13 mars 2002 n98/14032, Blue Shire Marine contre Mutuelle du MansLamyline. ; Loi 67-545 du 7 juillet 1967, art. 24 ; Martine Rmond-Gouilloud, Droit Maritime, 2. Ed, Editions

    A. Pedone, Paris, 1993 au paragraphe 703.

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    Pendant longtemps, lacte du capitaine devait avoir un rsultat utile pour quil y ait

    avarie commune. Il ny avait contribution que si quelque chose tait sauve. De nombreux

    auteurs estimaient que le rsultat utile de laction tait une condition dexistence de lavarie

    commune23

    . Alors mme que cela ne figure plus dans aucun texte, les tribunaux lont souvent

    appliqu. En effet, une dcision rcente en fait expressment rfrence24

    . Toutefois, le rsultat

    utile nintervient que comme une condition dexistence de la contribution et non comme une

    condition dexistence de laction25

    . Dautres auteurs, au contraire, pensent qu'il ne faut pas

    exiger que l'acte du capitaine ait eu un rsultat utile mais plutt admettre que cet acte ralis

    dans l'intrt commun suffise, quelque soit le rsultat. La Rgle A, cite ci-dessus, nindique

    pas que lacte du capitaine doit avoir un rsultat utile. La loi franaise de 1967 nexige pas

    davantage cette condition.

    Toutefois, on ne parlera d'avarie commune que lorsque le navire n'est pas

    compltement perdu. Pour qu'il y ait contribution d'avarie commune, il faut que l'acte du

    capitaine ait eu pour rsultat de sauver partiellement ou totalement le navire et la cargaison26

    .

    Section 2 : Caractres de l'avarie commune

    A.Le sacrifice ou la dpense extraordinaire

    Lacte davarie commune peut se caractriser par un sacrifice ou par une dpense

    extraordinaire.

    Ainsi, les frais ordinaires exposs par le transporteur ou larmateur dans

    laccomplissement du contrat de transport nentrent pas en avarie commune. En effet, prenons

    lexemple de la Rgle VII concernant lavarie aux machines. Elle fait une distinction entre les

    dommages aux machines dun navire chou et dun navire flot. Si les machines sont

    endommages lors dune tentative de renflouement du navire, les frais seront admis en avarie

    23 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer n324, 1972.24 CA Rouen, 2me ch.civ. 19 novembre 1998, BTL 1999 p. 350 approuv par Cass.com du 29 mai 2001 n99-

    10.752, Lamyline.25 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer n324, 1972.26 Art. 703 HGB ; Loi 67-545 du 7 juillet 1967, art. 26.

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    commune dans la mesure o cette dcision procde de lintention relle de renflouer le navire

    pour le salut commun. En revanche, si les machines ont t endommages alors que le navire

    tait flot, les frais seront exclus. Il sagira, dans ce cas, dune avarie particulire la charge

    de larmateur.

    Les Rgles dYork et dAnvers ainsi que la loi franaise exigent que linitiative du

    capitaine soit prise dans des circonstances exceptionnelles. Par consquent, la dpense ou le

    sacrifice qui nest que la consquence de mesures ordinaires prises dans le cadre des

    obligations incombant au transporteur au titre du contrat de transport, nest donc pas admis en

    avarie commune.

    B.Le caractre volontaire, intentionnel et raisonnable de l'acte

    Afin dtre constitutif dune avarie commune, le sacrifice ou la dpense doit rsulter

    dun acte volontaire du capitaine pour le salut commun.

    Les biens ne peuvent tre sacrifis si, au moment du sauvetage, ils ont dj t perdus

    ou endommags. La Rgle IV illustre ce principe. Elle concerne le coupement des dbris :

    la perte ou le dommage prouv en coupant des dbris ou des parties du navire qui ont t

    enlevs ou sont effectivement perdus par accident, ne sera pas bonifi en avarie commune.

    De mme, un incendie dans une cale nest pas en lui-mme constitutif dune avarie

    commune. Pour quil le soit, le capitaine doit, par exemple, sacrifier des marchandises saines

    afin dviter la propagation rapide des flammes27

    . Il sagit l dun acte volontaire fait par le

    capitaine pour le salut commun.

    Cependant, jusquen 1873, les dispacheurs anglais considraient que les dommages

    causs la cargaison par leau ntaient pas admissibles en avarie commune dans la mesure

    o le capitaine, en inondant la cale, navait pas lintention dendommager la marchandise, son

    intention premire tant dteindre lincendie qui sest dclar. De plus, contrairement un jet

    la mer, aucun lot de marchandise ntait spcifiquement slectionn pour tre sacrifi. Ce

    type de dommage tait class dans la catgorie des avaries particulires. Aprs pression des

    27 CA Rouen, 2me ch.civ. 19 novembre 1998, BTL 1999, p. 350 confirm par Cass. com du 29 mai 2001 n99-

    10.752, Lamyline.

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    juges anglais, lassociation des dispacheurs a chang de position et a estim ensuite que les

    dommages causs au navire et la cargaison par leau en vue dteindre un incendie

    donnaient lieu contribution. Ceci semble plus quitable, la marchandise inonde, ayant t

    endommage pour sauver le reste de la cargaison et du navire, doit tre compense par ces

    derniers.

    L'avarie des machines est habituellement une avarie particulire. Mais si les

    rparations entreprises en pleine mer pour permettre au navire de rejoindre le port de

    destination n'entrent pas dans les prvisions des Rgles d'York et d'Anvers, une aggravation

    des conditions mtorologiques justifie la dcision du capitaine de gagner, pour le salut

    commun, un port de refuge. Les dpenses engages pour cette partie du voyage doivent ds

    lors tre admises en avarie commune28

    .

    Il y a galement acte volontaire lorsque le capitaine dcide de schouer sur la rive afin

    dviter une collision dans un chenal avec un navire dsempar.

    En revanche, lorsquun abordage a lieu la suite dune fausse manuvre ou quun

    transporteur a mal arrim la cargaison, ou encore quun navire perd son hlice ou son

    gouvernail, il y a faute du transporteur ou cas fortuit. Ce sont des avaries particulires du fait

    quil ny a pas eu son origine lintention ou la volont dlibre du capitaine.

    Seul un acte intentionnel peut engendrer lavarie commune. Ce qui est intentionnel, ce

    nest pas le dommage lui-mme mais lacte qui le cause. En effet, nul ne veut que le

    dommage se produise mais lacte dont le dommage rsulte doit tre effectivement voulu. Par

    exemple, un capitaine sait que leau rpandue sur les marchandises va les abmer. Ce nest pas

    le dommage qui est recherch mais seulement lextinction de lincendie.

    Un acte intentionnel est ncessaire. Cette condition est trs explicite. En effet, la Rgle

    A dispose que le sacrifice ou la dpense doit avoir t fait ou encouru

    intentionnellement. Or, le sacrifice se dfinit comme loffrande caractrise par la

    28 CA Aix en Provence, 2me ch.com 13 mars 2002 n98/14032, Blue Shire Marine contre Mutuelle du Mans

    Lamyline.

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    destruction ou labandon volontaire de la chose offerte29. Lintention de lacte est

    essentielle. Il ne peut en tre diffremment car le dommage fortuit pse sur celui qui le subit.

    Le capitaine est-il la seule personne prendre la dcision de lacte volontaire ? Lacte

    tait gnralement ordonn par le capitaine, grant des intrts communs et reprsentant tous

    les intrts engags dans lexpdition ou par dautres officiers bord du navire. En revanche,

    en Grande-Bretagne, un acte davarie commune peut tre ordonn par un tranger laventure

    commune. Originellement aux Etats-Unis, seul larmateur, le capitaine ou quelquun sous son

    autorit pouvait ordonner lacte davarie commune et donc dcider de sacrifier lun deux.

    Maintenant, les tiers sont autoriss le faire condition que leur ordre ait t accept par le

    capitaine. En France, le capitaine peut, seul, ordonner lacte. En effet, larticle 25 de la loi

    franaise affirme que les sacrifices et les dpenses doivent avoir t dcids par le

    capitaine alors que les Rgles dYork et dAnvers nindiquent pas la faon selon laquelle la

    dcision doit tre prise30

    .

    Le Code de commerce exigeait du capitaine des dlibrations motives31

    ou lavis des

    principaux de lquipage32

    . En effet, auparavant, lorsque ceux-ci embarquaient avec leurs

    marchandises, il tait normal de recueillir leur avis avant de jeter leur cargaison par-dessus

    bord. Mais le capitaine prenait tout de mme seul la dcision. La rforme de 1967 a donc

    supprim cette formalit.

    De plus, lacte du capitaine doit avoir un caractre raisonnable. En effet, la Rgle

    Paramount prvoit quune admission en avarie commune ne pourra tre en aucun cas

    prononce pour un sacrifice ou une dpense qui na pas t raisonnablement consenti . On

    peut penser que la situation de pril dans laquelle se trouve le navire peut aider dans

    lapprciation du caractre raisonnable de lacte par les tribunaux. Ainsi, la dcision prise en

    urgence par le capitaine sera prsume tre raisonnable jusqu preuve contraire.

    Ce caractre raisonnable est apprci subjectivement. Le sacrifice doit avoir t fait de

    manire raisonnable, sans abus. Le capitaine doit agir de faon rflchie.

    29 Dictionnaire Petit Robert.30

    Rodire et du Pontavice, Droit maritime, 12me dition 1997, n481.31 C.com, ancien, art. 400.32 C.com, ancien, art. 410.

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    C.Le danger couru par lexpdition

    Il ny a pas avarie commune sans danger couru par lexpdition. Il doit y avoir un

    pril. Mais, on nexige pas que le danger soit imminent33

    . Il doit tout de mme tre rel et

    important. Toute mesure prise raisonnablement par le capitaine pour viter un pril futur,

    voire ventuel, peut tre classe en avarie commune.

    Lavarie commune est admise ds lors que le capitaine a de srieuses raisons de penser

    que le navire est en danger de telle sorte que la dcision prise parat raisonnable. La Cour

    d'appel d'Aix-en-Provence a pris en compte le pril srieux auquel tait expose l'expdition,

    le navire qui avait perdu une grande partie de sa force propulsive rencontrant une dgradationdu temps.

    34

    Le naufrage de l AMOCO-CADIZ est un exemple intressant. Si le navire est en

    panne de gouvernail, sa perte ne semble pas inluctable. Mais, la prudence commande de ne

    pas attendre quelle le devienne pour dcider quil soit aid. Le capitaine doit prendre une

    dcision et sa raction est naturellement subjective35

    .

    Il convient donc de faire une distinction entre la ralit ou limminence du danger et

    le caractre prventif de la mesure prise.

    Ainsi, la Cour dappel de Versailles a admis le caractre de pril et l'admission en

    avarie commune dans son attendu : Attendu que le navire ANNA MARIA H tait en pril

    lorsque, ayant doubl le cap de Bonne Esprance, il s'est trouv la drive, en panne de

    moteur principal ; qu' ce moment, la condition du pril des proprits engages dans

    l'aventure maritime commune tait bien remplie36 . Toutefois, si le capitaine dcide, par

    prudence, de trouver un refuge pour son navire alors quil est en bon tat de marche, pour

    viter un cyclone qui se rapproche, cela nentrera pas dans le cadre de lavarie commune. De

    33 Ripert, Droit maritime, Tome II : Rousseau 1952 n2268 ; Rodire, Trait gnral de droit maritime,

    vnements de mer, p. 349, 1972.34 CA Aix en Provence, 2me ch.com 13 mars 2002, n98/14092, Blue Shire Marine contre Mutuelle du Mans

    Lamyline.35 Jurisclasseur Transport, Fasc. 1245 ; Avaries communes : pril et salut n44.36 CA de Versailles du 15 janvier 2009, BTL n3257 du 2 fvrier 2009, p. 76 et 77.

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    mme, le droutement dun navire, pris par prudence pour viter une tempte, ne justifie pas

    une avarie commune.

    Dun point de vue historique, les anglais considraient que le navire devait tre en

    danger immdiat pour dclarer lavarie commune.

    Certains auteurs considrent que le capitaine doit se trouver face un danger imminent

    afin quil puisse entreprendre des sacrifices entrant en avarie commune. Cest la position qua

    prise la Cour dAppel de Rouen le 19 novembre 199837

    . Elle a estim en effet que

    limminence du pril est une condition de la mise en uvre de lavarie commune. En

    revanche, cette exigence nest pas retrouve dans les Rgles dYork et dAnvers, ni dans la loi

    franaise.

    Dautres auteurs, au contraire, ne considrent pas limminence du danger pour se

    prvaloir de lavarie commune38

    .

    La Rgle A parle dun sacrifice fait ou dune dpense encourue pour le salut commun

    dans le but de prserver dun pril les proprits engages dans une aventure commune.

    Lenjeu duMakis Agreementet de la Rgle dinterprtation a t de dpasser cette condition

    pour faire admettre certaines contributions dans la seule hypothse du bnfice commun, ce

    qui conduit lavarie commune artificielle 39

    .

    Le droit maritime admet que les dommages ou dpenses rsultant dune faute du

    capitaine, du transporteur ou du chargeur sont admis en avarie commune quand il y a pril,

    lobjectif de lavarie commune tant de garantir lexpdition maritime. Une fois lincident

    rgl, une action en restitution est possible. Le chargeur pourra demander restitution verse

    larmateur ou au chargeur en faute.

    La notion de pril et celle de dpense extraordinaire doivent coexister pour qualifier le

    sacrifice ou la dpense davarie commune.

    37 CA Rouen, 2me ch. civ, 19 novembre 1998, BTL 1999, p. 350, DMF 1999, p. 431.38 Chauveau P., D 1963, p. 374, Parenthou R. Revue Scapel 1987 p. 2 ; Rodire R. Trait gnral de droit

    maritime, vnements de mer n322, 1972 ; CA des Etats-Unis du 5 janvier 1981 : Eagle Terminal Tankers Inccontre Ingosstrakh n279, dossier 80-7498.39 L.J Burglass, Marine insurance and general average, 1981, p. 182.

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    D.Lintrt commun (common benefit)

    La loi franaise considre que, pour tre admis en avarie commune, il faut que les

    circonstances restent proches du salut commun (common safety).

    Le sacrifice des biens faits et/ou les dpenses extraordinaires engages, alors que le

    navire et la marchandise se trouvent en pril, doivent tre raliss pour le salut commun. La

    loi anglaise et la pratique internationale ne reconnaissaient que cette catgorie d'avarie

    commune. Toutefois, la jurisprudence a volu pour inclure lintrt commun (common

    benefit) suite la pression des juges anglais depuis laffaire MAKIS .

    En effet, ds que le navire se trouve dans un port de refuge, les dpenses ncessaires

    permettant au navire de continuer en toute scurit le voyage sont admises en avarie

    commune, tels que les frais de dchargement et rechargement des marchandises pour procder

    aux rparations, les frais de port, les rparations temporaires, les salaires et priodes d'attente

    au port de refuge40

    . Ces dpenses ainsi exposes sont faites dans lintrt commun.

    Ainsi, la Cour dappel dAix en Provence a considr comme avarie commune

    toutes dpenses faites dans lintrt commun du navire et de la cargaison, mme en dehors

    du cas du pril imminent41

    .

    De mme, la Cour dappel de Rennes a fait application du droit de lassistance et de

    lavarie commune alors quil napparaissait pas que le navire KALKAS et t en pril

    certain de faire naufrage42

    .

    Laction doit tre faite pour la scurit commune dans le but de sauver lexpdition et

    non dans lintrt dune seule partie.

    40 Cela du moins jusquen 1994, les Rgles de 2004 ayant cart les salaires et provisions de lquipage pendant

    la priode dattente au port de refuge.41 CA Aix en Provence, 10 dcembre 1976, navire TERPANDROS, DMF 1978, p. 207.42 CA Rennes du 18 octobre 1971, DMF 1972, p. 337.

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    Seuls les intrts engags dans lexpdition maritime, au moment o la dcision

    davarie commune est prise, sont appels contribuer. Cette rgle est applique avec

    souplesse puisque des marchandises dbarques temporairement y contribueront.

    A titre dexemple, si une violente tempte oblige le capitaine jeter la mer la

    cargaison arrime en ponte afin de rtablir la stabilit du navire et sauver lexpdition, il y a

    acte davarie commune. Le navire et le reste de la cargaison doivent contribuer puisque lacte

    du capitaine a t accompli sous leffet du danger commun et dans lintrt de lensemble de

    lexpdition.

    Lacte davarie commune rsulte dun vnement en face duquel il importe de

    rechercher avant tout le salut commun quelle que soit la cause premire de la situation dans

    laquelle se trouvent le navire et la cargaison, que cette cause provienne dun accident, dune

    faute ou dun vice propre 43

    .

    Trois conditions doivent tre remplies :

    Les intrts doivent appartenir des propritaires diffrents car une mme personne ne

    peut pas contribuer pour elle-mme moins que ces valeurs ne soient assures auprs

    dassureurs diffrents ;

    Seuls les intrts se trouvant bord du navire au moment de lacte volontaire du

    capitaine sont pris en compte dans lavarie commune ;

    Tous les intrts doivent tre en danger. Dans le cas contraire, il y aura avarie

    particulire.

    En effet, supposons quun navire transporte des marchandises rfrigres et que les

    machines frigorifiques tombent en panne, le capitaine est oblig de prendre la dcision

    de se rendre au port le plus proche pour faire les rparations. Dans un tel cas, la

    menace de dommage est limite aux marchandises rfrigres seulement. Concernant

    43Sentence CAMP du 9 juillet 1976,DMF 1976, p. 765.

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    le navire et le reste des marchandises bord, il ny a aucun danger. Par consquent, ce

    droutement au port ne sera pas dclar en avarie commune. Il y aura avarie

    particulire supporte par les propritaires des marchandises rfrigres et/ou leurs

    assureurs facults qui pourraient se retourner contre le transporteur maritime sil

    savre quil a commis une faute.

    Il est frquent que, lors dun mme vnement, certaines mesures soient prises dans

    lintrt de tous alors que dautres ne le sont que dans lintrt de certains. Il appartient alors

    lexpert deffectuer la rpartition ncessaire.

    En outre, lavarie commune fait natre une obligation de paiement plusieurs

    personnes qui ne sont pas responsables du dommage ou de la dpense et sans que leur

    consentement ne leur ait t demand. Mais, on peut considrer quelles ont tir profit de ce

    sacrifice, de cette dpense. Ainsi, si le propritaire du navire paie pour une assistance qui

    profite tous, il est normal quil soit rembours par ceux qui elle profite.

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    Chapitre II : Mise en place de

    lavarie communeDiverses formalits doivent tre accomplies afin de mettre en uvre la procdure

    davarie commune.

    Section 1 : La dclaration davarie commune

    Lavarie commune est juridiquement constitue ds lors que toutes les conditions

    cites prcdemment sont remplies. Dans ce cas, le capitaine doit en aviser larmateur. Il

    appartient ce dernier de dclencher ou non la procdure davarie commune. Elle intervient,

    gnralement, la fin du voyage avant la livraison de la marchandise aux destinataires. Dans

    certains pays, il faut faire une dclaration formelle davarie commune. Elle doit tre notifie

    dans les plus brefs dlais aux propritaires des marchandises44. Il arrive occasionnellement

    que cette dclaration soit prise comme une mesure de prcaution, notamment lorsque lavarie

    commune a lieu juste avant la livraison et que le temps ne permet pas une valuation de ce qui

    est engag.

    Cependant, la libert de larmateur a une limite. En effet, si le sacrifice a port sur les

    marchandises transportes, leurs propritaires ne doivent pas tre privs de la rpartition

    contributive. Larmateur devra donc dclencher la procdure. La Cour de cassation sest dj

    penche sur cette question en relevant que le transporteur maritime, nayant pas fait le

    ncessaire en omettant de dclarer le navire en avarie commune, avait priv les demandeurs

    de la possibilit dobtenir une lgitime indemnisation45

    .

    En lespce, les conteneurs renfermant des cartons de jouets ont t chargs sur le

    navire NEPTUNE AMAZONITE pour tre transports de Hong Kong au Havre. Un

    44 Annexe n 3 : Avis de dclaration davarie commune aux intrts marchandises, Avis de dclaration rcente

    du navire MOL PROSPERITY suite un incendie bord le 1 Juillet 2009.45 Cass.com, 29 mai 2001, bull n102, n99-10-752, Lamyline ; http://www.glose.org/Juris/12969.html, DMF

    2001, obs. M-N Raynaud et obs. P.Bonassies, DMF 2002, hors srie n6 au n49.

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    incendie sest dclar au cours du voyage et a endommag la marchandise. Les assureurs,

    aprs avoir indemnis le destinataire de la marchandise de son prjudice, ont assign la

    socit Orient Overseas en tant que transporteur maritime. Cette dernire forme un pourvoi en

    cassation car la Cour dappel de Rouen a accueilli cette demande. Elle soutient que les avaries

    communes doivent tre supportes par le propritaire du navire et par les propritaires de la

    cargaison et quelle ntait pas larmateur mais seulement laffrteur despaces et que, par

    consquent, il ne lui revenait pas de dclarer le navire en avarie commune. La Cour de

    cassation rejette le pourvoi car dune part, lincendie sest dclar bord du navire au cours

    du voyage et la majorit des cartons a t dtruite la suite dun acte volontaire du capitaine,

    celui-ci ayant dcid de faire inonder la marchandise afin dviter la propagation du feu et que

    la socit Orient Overseas, qui a mis le connaissement affrent cette marchandise, est le

    transporteur maritime et donc le capitaine tait son prpos. Donc, il appartenait au

    transporteur maritime dune part, de dclarer le navire en avarie commune et dautre part, les

    mesures prises par le capitaine constituent un sacrifice ds lors que sont devenus hors dusage,

    du fait de leau, les cartons qui ntaient que superficiellement tachs ou noircis de fume et

    qui taient en plus grand nombre.

    Certains auteurs ont considr que le destinataire aurait pu se retourner directement

    contre le transporteur maritime non pas parce quil navait pas dclar lavarie commune mais

    sur le fondement du contrat de transport, le dommage par leau ayant t fait

    intentionnellement par le capitaine alors que seul le dommage d par lincendie lui-mme est

    exonratoire.

    De mme, la Chambre arbitrale maritime de Paris la relev dans le cadre dun litige

    n du refus dun capitaine douvrir une procdure davarie commune alors quil rsultait du

    connaissement ou de la charte-partie que linitiative dune telle procdure relevait de sa

    dcision46

    .

    46 Sentence n1109, 6 mai 2005, DMF 2006 p. 67, la suite d'un incendie en haute mer et extinction par l'eau,

    une cargaison de papier a t endommage. Les assureurs facults ont assign le transporteur pour n'avoir pas

    dclar avarie commune. Les arbitres ont dcid d'admettre en avarie commune les dommages occasionns parl'eau, le connaissement prvoyant l'application des Rgles d'York et d'Anvers car le transporteur maritime aurait

    d prendre l'initiative de dclarer l'avarie commune et ainsi protger les intrts des propritaires desmarchandises sacrifies, s'appuyant sur les usages du commerce, les clauses du connaissement et l'arrt de la

    Cour de cassation du 29 mai 2001.

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    Dans lhypothse o lincendie est dorigine fortuite, les avaries qui en rsultent sont

    des avaries particulires. Mais, celles qui trouvent leur cause dans les moyens de lutte contre

    lincendie sont des avaries communes condition que cette lutte concerne le navire et sa

    cargaison. Les avaries particulires sont donc suivies davaries communes ds lors que lacte

    intentionnel du capitaine a bris la chane de la causalit47

    .

    Une fois que larmateur a dclench la procdure davarie commune, il doit dsigner

    un dispacheur (average adjuster) ou expert-rpartiteur. Celui-ci a pour mission de vrifier que

    les conditions de lavarie commune sont runies pour ensuite conseiller larmateur sur les

    mesures accomplir afin de terminer le voyage. Il collecte tous les documents afin dtablir le

    rglement davarie commune. Il transmet ensuite larmateur un document appel le

    compromis davarie commune . Ce document permet larmateur dexiger des

    rceptionnaires lengagement de payer avant de dlivrer les marchandises48

    . Cependant,

    dfaut d'accord entre les parties sur le rglement, un ou plusieurs dispacheurs peuvent tre

    nomms49

    . Toutefois, la dclaration peut tre luvre de la cargaison si elle y voit son intrt.

    Par ailleurs, si les intrts cargaison contestent la dclaration ou la dsignation dun

    dispacheur nomm par larmateur, ils peuvent saisir le tribunal pour la dsignation dun

    expert judiciaire avec mission tendue de dterminer la cause de lvnement ayant conduit

    larmateur dclarer lavarie commune. Ainsi, le Tribunal de commerce de Marseille a

    accept, par Ordonnance du 14 juin 2001, la dsignation dun expert judiciaire afin de

    dterminer les causes et les circonstances de lentre deau dans les cales du navire

    NORMANDIE suite son chouement et chiffrer les prjudices subis50

    .

    Un rclamant, armateur ou intrt cargaison, ne peut bnficier dune contribution

    simplement parce que le sacrifice ou la dpense a eu le caractre raisonnable prvu la Rgle

    Paramount ou simplement si lacte volontaire et raisonnable a bnfici aux intrts communs

    face au danger. Le transporteur ne doit pas avoir commis une faute contraire la loi

    applicable. La Convention de Bruxelles de 1924 et celle amende connue sous le nom de La

    47 CA Rouen, 25 mai 1973, DMF 1974, p. 84 ; CA Aix en Provence, 10 dcembre 1976, navire

    TERPANDROS , DMF 1978, p. 207.48 TC de Ste du 10 mars 1964, DMF 1965, p. 50.49 Dcret n68-65 du 19 janvier 1968, art.5.50

    TC de Marseille, Ordonnance de rfr du 14 juin 2001 , DMF 2002 hors srie juin No. 6 p. 47 ; RevueScapel, 2001, p. 188 190.

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    Haye Visby ne mentionnent pas directement lavarie commune, toutefois larticle 5

    prcise : aucune disposition dans ces rgles ne sera considre comme empchant

    linsertion dans un connaissement dune disposition licite quelconque au sujet des avaries

    communes . Cette provision met en chec toute clause du connaissement donnant droit au

    transporteur de bnficier dune contribution des intrts marchandises en cas de faute prvue

    par ces Conventions.

    Ainsi, on peut considrer que si la faute du transporteur nest pas condamnable au

    regard de ces conventions internationales, le transporteur peut obtenir une contribution des

    intrts marchandises. Par contre, si la Convention est applicable et si la faute est

    condamnable par cette Convention telle par exemple, une innavigabilit du navire avant ou au

    commencement du voyage, aucune contribution davarie commune ne peut tre rclame aux

    intrts marchandises. Ceci est applicable en Grande-Bretagne et dans diffrents pays except

    aux Etats-Unis.

    En effet, sous la loi amricaine, la COGSA (Carriage of Goods by Sea Act) ne permet

    pas au transporteur de rclamer une contribution davarie commune mme sil est exonr

    pour les pertes ou dommages subis par les marchandises suite sa ngligence. Si le

    transporteur veut bnficier dune contribution davarie commune, les connaissements

    doivent inclure la New Jason Clause 51

    . Cette clausedit ce qui suit : En cas daccident,

    danger, dommage, ou dsastre avant ou aprs le commencement du voyage rsultant dune

    quelconque cause, provenant dune ngligence ou pas, pour laquelle ou pour les

    consquences desquelles le transporteur nest pas responsable par la loi, le contrat ou autre,

    les marchandises, les expditeurs, les destinataires ou les propritaires des marchandises

    sobligent contribuer avec le transporteur dans lavarie commune au paiement de tous

    sacrifices, pertes ou dpenses dune avarie commune qui pourraient tre faits ou subis et

    sobligent payer toute assistance et dpenses engages concernant les marchandises 52

    .

    51 Tetley, 1.CC. 3me d. 1988 ; Lowndes & Rudolf 12 d, 1997 paragraphe 52.52 Traduction libre du texte anglais : In the event of accident, danger, damage or disaster before or after the

    commencement of the voyage, resulting from any cause whatsoever, whether due to negligence or not, for which,

    or for the consequence of which, the carrier is not responsible, by statute, contract or otherwise, the goods,

    shippers, consignees or owners of the goods shall contribute with the carrier in general average to the paymentof any sacrifices, losses or expenses of a general average nature that may be made or incurred and shall pay

    salvage and special charges incurred in respect of the goods .

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    Ainsi, aux Etats-Unis, larmateur, cherchant une contribution davarie commune des

    intrts marchandises, doit dabord prouver que lacte davarie commune a eu lieu. Par la

    suite, les intrts marchandises, cherchant viter la contribution, doivent prouver que le

    navire tait innavigable et que cette innavigabilit a caus la perte ou le dommage. Toutefois,

    larmateur peut rclamer la contribution davarie commune sil prouve avoir exerc la

    diligence raisonnable pour mettre le navire en tat de navigabilit avant le voyage. Si la perte

    ou le dommage rsulte dune faute qui nest pas actionnable sous la COGSA, notamment une

    erreur dans ladministration ou une faute nautique, les intrts marchandises sont tenus

    contribuer seulement si laNew Jason Clause a t incorpore dans le connaissement53

    .

    En ce qui concerne les Rgles de Hambourg, larticle 24-1 prvoit qu aucune

    disposition de la prsente Convention ne soppose lapplication des dispositions du contrat

    de transport par mer ou de la lgislation nationale relative au rglement des avaries

    communes et larticle 24-2 stipule que les dispositions de la prsente Convention qui

    rgissent la responsabilit du transporteur pour pertes ou dommages subis par les

    marchandises dterminent aussi la question de savoir si le destinataire peut refuser de

    contribuer aux avaries communes et si le transporteur est tenu dindemniser le destinataire de

    sa contribution ventuelle aux avaries communes ou aux frais de sauvetage. . Larticle 5-1

    prcise que le transporteur est responsable du prjudice rsultant des pertes ou dommages

    subis par les marchandises ainsi que du retard la livraison, si lvnement qui a caus la

    perte, le dommage ou le retard, a eu lieu pendant que les marchandises taient sous sa garde

    au sens de larticle 4, moins quil ne prouve que lui-mme, ses prposs ou mandataires ont

    pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement tre exiges pour viter lvnement ou

    sa consquence. Ainsi, contrairement la Convention de Bruxelles de 1924 et de La Haye

    Visby qui prcisent que le transporteur nest pas responsable des actes, ngligences ou

    53La Cour suprme des Etats-Unis avait rejet la demande de larmateur faire contribuer les marchandisessauves pour les dpenses volontaires exposes par ce dernier suite lchouement du navire IRRAWADDY

    par la faute du capitaine, statuant que la loi maritime amricaine permettant lexonration de larmateur pour les

    dommages subis par les marchandises en cas de faute nautique sous le Harter Act (actuellement COGSA) ne

    permettait pas ce dernier de rclamer une contribution davarie commune des intrts cargaisons quand le

    danger vit par le sacrifice ou la dpense a t occasionn par la faute du capitaine ou de lquipage. Ainsi,

    pour se prmunir contre cet arrt, les armateurs ont insr dans leur connaissement ou charte-partie une clause

    qui sintitule General Average Negligence Clause permettant au transporteur de rclamer une contribution

    davarie commune en cas de faute nautique ou erreur dans ladministration du navire. Cette clause est reste

    incertaine quant sa validit jusqu lchouement du navire JASON au large de Cuba en 1904. La Coursuprme a considr quelle tait licite et quelle ntait pas contraire la loi, ayant un caractre contractuel.

    Suite cet arrt la clause est devenue la Jason Clause et a par la suite volu en la New Jason Clause .General Average Clauses Charter Party Law by Jeffrey A. Weiss, www.sealaw-usa.com/generalaverage.html

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    dfauts du capitaine, marin, pilote ou des prposs du transporteur dans la navigation, ou

    dans ladministration du navire , sous les Rgles de Hambourg, ces fautes ne sont plus

    exonratoires et empchent le transporteur maritime de demander une contribution davarie

    commune moins quil prouve avoir pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement

    tre exiges pour viter lvnement et ses consquences. Cela rduira notablement

    ladmission des dclarations davarie commune puisque les fautes de navigation ne sont plus

    exonratoires pour le navire. Il y aura donc moins de cas davarie commune si lincident est

    d une faute du capitaine ou de son quipage sous lemprise des Rgles de Hambourg.

    Section 2 : A chaque tape du voyage

    La procdure suivre par le capitaine, larmateur, ses agents locaux, le dispacheur

    dsign ainsi que toute autre partie engage dans laventure, est complexe.

    Nous allons la schmatiser en trois tapes diffrentes, savoir au commencement du

    voyage, durant la relche du navire dans un port intermdiaire ou de refuge et enfin la fin du

    voyage suite labandon ou lacheminement des marchandises la destination initialement

    prvue.

    A.Au commencement du voyage

    Le contrat de transport se traduit par lmission dun connaissement ou dune charte-

    partie ou les deux la fois. Il est dusage international quune clause davarie commune soit

    incorpore dans le contrat. Le plus souvent, il sagira des Rgles dYork et dAnvers de 1994,

    celles de 2004 tant quelque peu moins favorables larmateur.

    Lorsquune diffrence apparat entre le connaissement et la charte-partie, un avenant

    doit tre mis au moment de la ngociation du contrat.

    Larmateur, responsable du financement des dpenses davarie commune, peut

    souhaiter que celles-ci se fassent dans une monnaie solide. La clause du connaissement

    concernant lavarie commune peut ainsi prvoir une monnaie particulire. Cette clause estrecommande pour les navires conteneurs ou transportant des marchandises diverses. En effet,

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    vu la multitude des connaissements et des marchandises diverses, il serait utile de prendre en

    compte une monnaie internationale tels que le dollar amricain, leuro ou la livre sterling afin

    de ne pas avoir convertir dans la monnaie dun pays dont la monnaie nationale pourrait

    fluctuer de faon incontrlable.

    En effet, en labsence de monnaie dsigne, lavarie commune sera calcule en

    diffrentes monnaies, ce qui gnre des cots importants et devient trop complexe.

    Dans certains cas, les frais et les sacrifices engags par larmateur sont faibles alors

    que les contributions pour dommages aux marchandises sont leves. Le fait de prparer un

    dcompte complet et de collecter toutes les garanties peut donc engendrer un cot suprieur.

    Cependant, si lavarie commune nest pas dclare, les propritaires des marchandises

    sacrifies seront dmunis de leurs droits lencontre des propritaires des marchandises

    sauves.

    Afin de rgler cette difficult, le transporteur est donc oblig de dclarer lavarie

    commune moins quil ne dcide de supporter, pour des raisons commerciales, le montant

    total de lavarie commune.

    Une autre alternative est possible. Elle consiste pour le dispacheur prparer des

    chiffres aux assureurs corps du navire en les invitant payer lavarie commune en totalit sur

    une base dconomie.

    La meilleure solution est tout de mme dinsrer une clause dans la police corps dite

    clause dabsorption, telle la Bimco Clause54

    permettant au transporteur maritime de

    prendre en charge les dpenses et sacrifices d'avarie commune lorsqu'ils ne dpassent pas un

    certain seuil prvu dans la police. Lintroduction de cette clause dans la police dassurance

    corps a rduit considrablement la dclaration davarie commune. De ce fait, le cot pour

    lobtention de garanties et le paiement dune contribution des intrts marchandises sont

    vits et ne concernent que les cas importants.

    54 Bimco Standard Absorption Clause, www.jssusa.com/Bimco.pdf.

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    B.Au cours du voyage

    Lorsquun incident a lieu et quil entre dans le cadre de lavarie commune, le

    dclenchement de la procdure ncessite la preuve, les mesures conservatoires et un

    compromis d'avarie commune.

    La preuve constitue un lment indispensable pour la mettre en uvre. Il y aura lieu de

    faire constater qu'un dommage et/ou une dpense peuvent tre classs en avarie commune.

    Cette preuve consiste dmontrer que les vnements survenus au cours du voyage vont

    donner lieu un rglement d'avarie commune. Elle ncessite que le demandeur produise des

    documents, des preuves pour justifier son action afin que les contestations ne viennent pas,par la suite, mettre en cause la dclaration. Gnralement, c'est le capitaine, l'armateur ou le

    propritaire du navire qui la dclare, ne voulant pas tre tenu responsable pour la perte des

    marchandises rsultant des actes volontaires de destruction, dtrioration ou de jet la mer.

    C'est ainsi que le capitaine doit annoter sur le journal de bord, ds que les conditions le lui

    permettent, les date, heure et lieu de lvnement ainsi que les motifs qui ont dtermin sa

    dcision et les mesures quil a ordonnes. Il doit ensuite dclarer dans les 24 heures de son

    arrive au premier port touch, les faits quil a consigns dans son journal de bord assorti du

    rapport de mer au tribunal ou aux autorits maritimes comptentes55

    . Si ces formalits ne

    suffisent pas, il devra prouver que les avaries et les dpenses, dont il rclame ladmission en

    avarie commune, entrent dans les limites des pertes ayant ce caractre, selon les conventions

    contractuelles et lgales qui les rgissent56

    .

    A cet effet, il convient donc de notifier les parties concernes, savoir :

    Le dispacheur : il sagit de la personne la mieux place pour donner son avis

    notamment sur les procdures correctes et les formalits. Le dispacheur est le

    dispacheur de tous . Son impartialit doit tre absolue57. Il doit sassurer que toutes

    les parties lexpdition sont impliques. Il doit valuer le montant des dpenses et les

    rpartir ensuite sur tous les intrts qui en ont profit, proportionnellement la valeur

    sauve, afin dindemniser les intrts sacrifis. Il a pour mission de constituer une

    55

    Rodire, Droit maritime, n482, 11me

    dition, 1991 ; Dcret n68-65 du 19 janvier 1968, art.3.56 Dcret n68-65 du 9 juin 1969, art.4 ; Rgles dYork et dAnvers, Rgle E.57 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, n470, 1972.

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    masse crancire et une masse dbitrice. Il nest pas un arbitre mais un expert, mme

    sil a t dsign judiciairement58

    . Sa dcision, mme sil entend des points de vue

    opposs et mme si elle est motive, na pas le caractre ni la valeur juridique dune

    sentence arbitrale.

    Les assureurs : les assureurs corps et machines doivent tre immdiatement aviss afin

    quils puissent nommer leur propre expert qui dterminera lorigine, la cause ainsi que

    ltendue des dommages aux machines et corps du navire et protger ainsi leurs

    intrts.

    Protecting & Indemnity Club (P&I) : il doit tre avis lorsque le navire transporte des

    marchandises et lorsque des dommages ou risques de pollution sont possibles, afin de

    faire, par exemple, des investigations dans les plus brefs dlais quant aux causes et

    circonstances de l'incident. En cas de soucis de machines, le P&I Club doit s'assurer

    de la cause de la panne, si elle existait avant le dbut du voyage ou si elle aurait pu

    tre dcouverte et rpare avant le dpart du navire. Ces considrations pourront

    dterminer si le transporteur a failli son obligation contractuelle et si les intrts

    marchandises peuvent sexonrer du paiement de la contribution et des frais gnrs

    par l'acte d'avarie commune. Lorsquelle est dclare, le P&I Club se rapproche de

    l'armateur et du dispacheur. Dans certains cas, des assurances spciales peuvent tre

    requises. Ainsi, si un navire doit tre mis en cale sche avec marchandises bord ou si

    les marchandises doivent tre dcharges ou entreposes, une couverture d'assurance

    peut tre accorde pour couvrir la responsabilit ventuelle du transporteur maritime

    en cas de perte ou dommage.

    Affrteurs : si le navire est en affrtement temps ou au voyage, laffrteur devra tre

    inform de laccident.

    Expert davarie commune : larmateur pourra en nommer un afin quil agisse dans

    lintrt gnral. Cette nomination est effectue aprs avis du dispacheur.

    58 CA de Rouen du 24 mai 1933 : Dor. Suppl. 11, p. 312

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    Expert de classification : sil est ncessaire de faire des rparations avant de continuer

    le voyage, lexpert de classification peut assister ces rparations et dterminer si

    celles-ci permettront au navire de maintenir sa classe et sa navigabilit.

    Agents au port de dchargement : lavis de dclaration davarie commune leur permet

    dinformer les rceptionnaires sil y a un retard et de commencer la procdure des

    contributions.

    Avocats : lorsquun navire a t remorqu ou sil y a eu abordage, il serait judicieux de

    consulter un avocat.

    Lorsquun incident peut donner naissance une avarie commune, le capitaine doit

    transmettre le plus rapidement possible le dtail de la situation et des marchandises

    larmateur afin que celui-ci puisse donner les instructions ncessaires.

    La coordination des informations est essentielle, les garanties pouvant provenir de

    diffrents endroits et couvrir des intrts consigns dans diffrents ports. Des informations

    claires sont requises afin dviter que les marchandises ne soient retardes sans raison valable.

    Par suite dune avarie, quelle soit particulire ou commune, le navire peut faire

    relche dans un port intermdiaire ou port de refuge pour y tre rpar.

    Ce port dsigne tout port dans lequel le navire a des dpenses lies lavarie

    commune. Il peut tre aussi un port de chargement ou un port de dchargement normal. Ainsi,

    il peut y avoir acte d'avarie au port, la Cour dappel d'Aix-en-Provence a statu que la

    lecture des dispositions de la loi du 7 juillet 1967 et des Rgles d'York et dAnvers ne laisse

    aucun doute sur le fait qu'il peut y avoir acte d'avarie commune au port ; qu'il existe de

    nombreux prcdents, que l'aventure maritime commune n'tait pas termine, dans la mesure

    ou une partie de la cargaison tait bord ; que le pril commun prsent exigeant un sacrifice

    commun et la pertinence des mesures de sauvetage prises par le capitaine sont certains .

    Elle ajoute que l'avarie commune ne peut intresser que la cargaison se trouvant bord au

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    moment du pril, les notions de pril et de salut commun ne s'entendent que pour ce qui se

    trouve bord cet instant59

    .

    Lorsquun navire arrive dans un port intermdiaire, une multitude de problmes

    complexes peuvent surgir surtout sil faut dcharger une partie ou la totalit du chargement du

    navire afin deffectuer les rparations lui permettant de poursuivre le voyage.

    Au moment de lvnement, les dmarches suivre sont laisses lapprciation du

    capitaine et autres personnes bord. Cependant, les dcisions importantes sont prises par

    larmateur qui doit, pour cela, tre muni dinformations dtailles, tels le dtail des oprations

    ncessaires pour permettre au navire de continuer son voyage, la priode de dtention due

    lvnement, ltendue et la cause du dommage au navire, savoir quelles sont les rparations

    faire, si elles sont permanentes ou temporaires, la quantit, la nature ainsi que la valeur des

    marchandises qui doivent tre dcharges et la raison de ce dchargement, mais galement,

    les recommandations des experts du navire et des marchandises.

    Lorsquun incident a lieu durant les oprations de manutention, il est important

    dobtenir la proportion des marchandises se trouvant bord au moment dudit incident. Il est

    ncessaire de connatre les lments concernant les dommages aux marchandises et enfin une

    estimation des dpenses exposes ou qui seront exposes.

    Concernant le dernier point, sur lestimation des dpenses, il est trs important pour

    larmateur de connatre les frais approximatifs afin de prendre une dcision s'il y a lieu de

    dclarer une avarie commune. Ainsi, un message doit tre envoy par lagent du navire au

    port de refuge aussi vite que possible en faisant une liste des frais : frais de port, de

    dchargement des marchandises, de stockage, de rechargement, de rparations temporaires ou

    permanentes, d'expertises ainsi que des frais dquipage. En revanche, les estimations des

    salaires et de l'approvisionnement de lquipage, du combustible et des fournitures sont, en

    gnral, calcules par l'armateurlui-mme.

    59

    CA dAix-en-Provence du 17 septembre 1985, Cie Fabre c/ la Concorde, BT 1986, p. 266 ; Revue Scapel1987, p. 5.

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    Comme nous lavons vu, il existe un expert davarie commune qui agit dans lintrt

    gnral. Il est parfois ncessaire de le nommer. Il a pour mission daviser toutes les parties

    afin de prserver la scurit du navire et des marchandises, de surveiller les dmarches ayant

    t prises par les parties, de vrifier tous les frais exposs afin de savoir si les cots ont t

    raisonnables et quitables et par la suite en aviser le dispacheur, et enfin didentifier et de

    quantifier tout sacrifice davarie commune.

    Son avis doit tre recherch dans tous les sujets concernant la manutention et le

    traitement des marchandises endommages.

    Lexpert davarie commune doit tre consult :

    En cas de jet la mer : le jet de la cargaison la mer est lexemple typique des actes

    davarie commune. Il a pour effet de redresser le navire et de sauver lexpdition.

    Toutefois, la Rgle I dispose qu : aucun jet de cargaison ne sera admis en avarie

    commune moins que cette cargaison nait t transporte conformment aux usages

    reconnus du commerce . Il sera donc ncessaire de connatre la nature et le montant

    des marchandises jetes mais galement davoir quelques indications concernant cette

    marchandise au moment du jet, savoir si elle tait en bon tat, endommage, sans

    valeur ou charge en ponte.

    Dommages par la manutention : la Rgle XII prvoit que le dommage ou la perte

    subis par la cargaison, le combustible ou les approvisionnements dans les oprations

    de manutention, dchargement, emmagasinage, rechargement et arrimage seront

    admis en avarie commune lorsque le cot respectif de ces oprations sera admis en

    avarie commune et dans ce cas seulement. Cela signifie que les dommages dus aux

    dchargement, stockage et rechargement peuvent donner naissance contribution.

    En cas dincendie : la correcte classification de perte ou dommage est trs importante.

    En effet, un avis incorrect peut aboutir une certaine confusion. Lorsque les Rgles

    dYork et dAnvers sont applicables, les dommages doivent tre classifis par rapport

    la cause prcise, par exemple, par le feu, la chaleur, leau, lcume ou toute autre

    mesure utilise pour teindre le feu.

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    Le rle de lexpert davarie commune nest que celui dun conseiller. Cependant, il a

    une influence considrable sur les parties du fait de sa position impartiale. Mme sil agit dans

    lintrt gnral, il est parfois mandat par le dispacheur. Son mandat est pour le compte de

    larmateur qui est responsable de la conduite de lavarie commune.

    De mme, larmateur doit protger les marchandises qui sont sous sa garde. Il sagit

    dune obligation continue. Dans la pratique, les dcisions prises par lui doivent tre transmises

    aux propritaires des marchandises. La plupart du temps, ce nest pas possible car les

    destinataires sont nombreux. Dans ce cas, larmateur doit agir lui-mme aprs avoir pris le

    meilleur avis possible. Mme si le capitaine a certains pouvoirs concernant la marchandise,

    sauf en cas dextrme urgence, aucune action ne peut tre prise par lui ou lagent local pour

    reconditionner, transporter ou vendre les marchandises sans en rfrer larmateur.

    Dans certains cas, la marchandise est vendue au port de refuge. Dans cette hypothse,

    les rsultats de la vente doivent tre conservs par lagent du navire jusqu rception

    dinstructions de mise disposition.

    Le propritaire du navire doit tre inform le plus rapidement possible de la nature et

    de ltendue de toute perte ou dommage aux marchandises.

    Un navire peut arriver au port de refuge et avoir besoin dune rparation majeure afin

    de continuer le voyage. Il sera alors ncessaire de dcharger tout ou partie de la cargaison

    pour pouvoir faire les rparations.

    Ces frais pourront bnficier aux parties si le chargement est transfr destination

    par un autre navire au lieu de le stocker et le recharger. Dans cette situation, les cots

    supplmentaires de transfert peuvent tre allous en avarie commune.

    Mme sils taient responsables de contribuer jusquau dchargement, une fois

    spares du reste de laventure, les marchandises achemines destination par un autre navire

    n'taient plus obliges de contribuer durant l'attente du navire au port de refuge.

    En effet, d'aprs les Rgles dYork et dAnvers de 1974, il tait ncessaire de fairesigner un document appel A Non-Separation Agreement afin que le propritaire des

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    marchandises sengage contribuer lavarie commune comme si le chargement avait t

    transport destination dans le navire dorigine en change du bnfice davoir les

    marchandises plus vite. Les Rgles de 1994 ont prvu cela dans la Rgle G paragraphe 3 qui

    invoque ce cas quand un navire se trouve en quelque port ou lieu que ce soit, dans des

    circonstances qui seraient susceptibles de donner lieu une admission en avarie commune

    sur la base des dispositions des Rgles X et XI et quand la cargaison ou une partie de celle-ci

    est achemine destination par d'autres moyens, les droits et obligations relatifs l'avarie

    commune demeureront, sous rserve que les intrts cargaison en soient autant que faire se

    peut aviss, aussi proches que possible de ce qu'ils auraient t si, en l'absence d'un tel

    acheminement, l'aventure s'tait poursuivie sur le navire d'origine, et ce aussi longtemps que

    cela apparatra justifi en l'tat du contrat de transport et de la loi qui lui est applicable .

    Ainsi, la Rgle G n'impose plus la signature du Non-Separation Agreementmme si les

    intrts marchandises doivent en tre informs.

    Par consquent, le dispacheur devra bien vrifier si les Rgles de 1974 sont prvues au

    contrat de transport auquel cas il faudrait faire signer unNon-Separation Agreementalors que

    si les Rgles de 1994 ou de 2004 sont applicables, la signature d'un tel document n'est plus

    ncessaire60.

    Lorsque les parties laventure ont subi des dpenses davarie commune au port de

    refuge, les parties doivent contribuer aux dpenses qui seront estimes sur la valeur du navire

    et de la marchandise la fin du voyage.

    Il peut arriver que le dchargement des marchandises soit rendu ncessaire afin de

    permettre au navire de repartir aprs leur rembarquement. A cet instant, laventure commune

    continue car la sparation momentane ne fait pas disparatre lintrt commun. En revanche,

    si, lors de cette sparation temporaire, un vnement nintressant que lun des intrts cause

    lavarie de cette partie distincte, celle-ci ne peut tre considre comme commune. Cest le

    cas dun incendie terre endommageant les marchandises spares. Mais, cette solution ne

    60 Toutefois, la clause de Non- Separation Agreement est insre par prcaution dans la plupart des Average

    Bond et Average Guarantee, car le dispacheur ne peut savoir si les connaissements mis par les diffrentstransporteurs, affrteurs despaces, dans le navire ayant dclar avarie commune, incorporent les Rgles de

    1974 ou celles de 1994. Dans les annexes n4 et n7 : lAverage Bond et lAverage Guarantee mentionnent titre de prcaution that the standard form of Non-Separation Agreement is to apply to any goods carried under

    Bills of Lading that do not provide for adjustment under York Antwerp Rules 1994 .

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    peut stendre au navire car celui-ci est toujours indispensable la poursuite de laventure

    commune61

    .

    Lorsque le navire est gravement endommag et quil est impossible de le rparer,

    larmateur peut dcider dabandonner le voyage. Dans ce cas, il doit prendre lavis de ses

    avocats et du P&I Club car il sagit dune dcision importante.

    On peut citer quelques exemples dabandon du voyage :

    Lorsque le chargement se dtriore rapidement et ne peut arriver destination ;

    La survenance dune guerre ou dun vnement soudain mettant en risque le navire et

    son quipage ;

    Lorsque le navire est svrement endommag et que les frais de rparation pour

    achever le voyage excdent sa valeur aprs rparation ou sa valeur assure. Dans ce

    cas, lassur doit donner un avis dabandon aux assureurs corps et savoir sil doit

    dclarer son navire en perte conomique.

    Si le voyage est abandonn, la valeur contributive doit tre rduite. En effet, aucune

    des parties intresses ne doit payer une contribution davarie commune plus leve que la

    valeur du bien.

    De plus, labandon du voyage naffecte pas les cots dentretien au port de refuge.

    Ceux-ci sont admis en avarie commune62

    .

    61 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, n358, 1972.62 Rgles dYork et dAnvers, Rgle X.

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    C.La fin du voyage

    Lorsque larmateur, par lintermdiaire du capitaine, engage des frais afin de sauver

    lexpdition, il est en principe le seul en supporter le cot jusquau rglement de rpartition

    par lequel chaque rceptionnaire connatra lexacte contribution qui est sa charge. Or,

    ltablissement dun rglement davarie commune est assez long. Il peut, en effet, prendre des

    mois, voire des annes. Cest pour cela que larmateur dispose de garanties notamment le

    droit de rtention.

    Ce droit se traduit par le fait pour un crancier qui dtient ou possde un bien

    appartenant au dbiteur de le conserver et de ne le livrer que si le dbiteur sengage donnerune contribution. Par consquent, larmateur, crancier, a le droit de garder les marchandises

    bord du navire et de ne les livrer que contre une contribution.

    La loi franaise lui confre ce droit. En effet, larticle 41 de la loi du 7 juillet 1967

    dispose que le capitaine peut refuser de dlivrer les marchandises et demander leur

    consignation jusquau paiement de la contribution qui leur incombe sauf caution suffisante de

    layant droit. Il sagit dune reconnaissance juridique de dette. Mais celle-ci nest que celle

    de la contribution provisoire63

    . Il ne peut lexercer que si la marchandise reste en sa

    possession. Si la marchandise est transporte dun port intermdiaire destination sur un

    navire appartenant au mme armateur que le premier, celui-ci conserve le contrle et la garde

    de la marchandise. Il en est de mme si la dlivrance se fait avec les connaissements

    dorigine.

    Ainsi, les rceptionnaires, pour prendre possession de leurs marchandises, doivent

    donner une garantie larmateur. Cette garantie se prsentera souvent sous la forme dun

    Lloyds Average Bond64, compromis d'avarie commune ou engagement contribuer

    que le rceptionnaire doit signer avant la livraison de la marchandise, portant engagement de

    payer la contribution telle quelle rsultera du rglement davarie commune qui sera tabli par

    le dispacheur65

    . Il est rdig par larmateur assist des dispacheurs66

    . En le signant, les

    63 Rodire, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, n461, 1972, DMF 1973, p. 131.64

    Annexe No. 4.65 CA Rouen 12 novembre 1998, DMF 1999, p. 436, note de Tantin.66 Pierron, Le compromis davarie commune, DMF 1976, p. 579.

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    rceptionnaires prennent lengagement de payer leur contribution avec soit un paiement dun

    dpt au comptant, soit par la garantie dun assureur rput valant engagement de contribuer

    lavarie commune.

    Il est important que tous les dtails des marchandises figurent sur le General Average

    Bondafin dviter les confusions. Doivent figurer, en particulier, le nom complet et ladresse

    du destinataire, du signataire, le nom du navire, les noms et adresses des experts rpartiteurs,

    la description des marchandises, la valeur, les faits ayant suscit cette procdure, le montant

    de la contribution provisoire rclame la livraison.

    Dans tous les cas davarie commune, les agents doivent sassurer quune photocopie

    de la facture soit jointe au General Average Bond.

    Toutefois, l'engagement ainsi requis est rarement inconditionnel. En effet, lors de sa

    signature, le rceptionnaire n'est jamais certain que les conditions de l'avarie commune

    dclare par l'armateur soient runies et il peut galement contester le montant de la

    contribution67

    .

    Si le destinataire refuse de signer ce document, l'armateur a un droit de gage sur la

    marchandise lui autorisant sa conservation ou sa mise en mains tierces. Cette procdure n'a

    d'autres objectifs que de protger les parties dont les biens ont t sacrifis.

    Si le transporteur maritime dlivre les marchandises sans que le rceptionnaire nait

    sign le compromis, il nest tout de mme pas priv de son droit de rclamer par la suite une

    contribution lamiable ou en justice. Cependant, il ne peut la rclamer quaprs

    ltablissement du rglement davarie commune.

    Sauf avis contraire, les garanties doivent tre collectes sur toutes les marchandises.

    Les marchandises qui sont perdues par un sacrifice sont engages dans lavarie commune.

    Larmateur ne pouvant leur dlivrer cette marchandise, les parties concernes peuvent refuser

    de signer un GeneralAverage Bondou de donner une scurit. Il nest pas possible de les y

    obliger. Toutefois, il faut essayer dobtenir la signature de ces documents. En effet, ceux-ci

    67 Rodire et Lureau, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, p. 468, 1972.

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    tablissent lidentit des parties quil faudra compenser une fois le dcompte tabli. Ainsi, en

    signant un General Average Bond, le destinataire prend lengagement de donner les

    renseignements sur la valeur des marchandises. Cela est dans son intrt afin de pouvoir

    rclamer, par la suite, la contribution qui lui est due par la masse dbitrice.

    Une promesse de signer les documents nest pas suffisante. La signature des parties

    est ncessaire pour que la marchandise soit relche.

    Larmateur peut percevoir, titre de garantie, lors de la dlivrance de la marchandise

    avant que le rglement soit tabli, des contributions provisoires qui sont des dpts dargent.

    Celles-ci sont gnralement exiges lorsque lintrt cargaison nest pas assur ou lorsque

    lassureur nest pas reconnu.

    Au moment de larrive du navire, il nest pas possible de chiffrer immdiatement,

    dune faon exacte et complte, les pertes et dpenses qui seront admises en avarie commune

    par le dispacheur.

    En pratique, celui-ci les value de faon approximative, tablit leur pourcentage par

    rapport leur valeur totale qui est elle-mme estime, des intrts en cause et soumet la

    livraison des marchandises au versement pralable dune contribution provisoire calcule sur

    ces donnes. En gnral, il majore un peu le taux de contribution provisoire de manire

    raisonnable afin de couvrir lventuelle estimation trop basse. Cette majoration sexplique par

    le fait que le remboursement dun excdent est plus facile effectuer que la demande du

    paiement dun complment de contribution.

    Lorsque les marchandises sont endommages et que les agents ne sont pas satisfaits de

    lestimation faite des dommages, le taux de contribution devra tre appliqu sur toute la

    valeur. Le destinataire en sera avis afin dobtenir un remboursement partiel en temps

    opportun. Un reu (General Average Deposit Receipt)68

    donnant droit au dtenteur un

    remboursement devra tre mis sauf si le dispacheur donne des instructions contraires. Aucun

    remboursement ne sera fait sans production de loriginal. Si loriginal est perdu, le dispacheur

    pourra recommander un remboursement contre une lettre dindemnit.

    68 Annexe n5.

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    La contribution provisoire sera rembourse intgralement sil ny a pas de rglement et

    partiellement si la contribution dfinitive est infrieure la contribution provisoire.

    Il peut y avoir remboursement de dpt avant la finalisation du dcompte :

    Si la rduction na pas t faite au moment de larrive des marchandises, par exemple

    lorsque le taux a t par la suite jug trop lev, un remboursement partiel est

    ncessaire. Le reu original doit tre communiqu afin de noter le montant collect et

    le montant restitu ;

    Lorsque la garantie dun assureur est donne aprs quun dpt ait t collect. Dans

    ce cas, le reu original doit tre restitu lavance pour annulation.

    Les dpts restent la proprit du dpositaire et ne doivent pas tre utiliss pour

    rgler des frais, mme des frais davarie commune sans laccord expresse des intrts

    marchandises. Il est prfrable que le dpt se fasse dans une monnaie solide et transfrable.

    Larmateur ne peut en disposer qu lunique condition que ce soit pour les besoins de

    lavarie commune et quavec laccord pralable du dispacheur.

    En pratique, les garanties bancaires69

    ne sont pas acceptes car elles sont limites dans

    le temps ou dans le montant. Mais, le rceptionnaire peut remplacer cette contribution

    provisoire par une caution bancaire dune banque de premier ordre qui fournit une caution

    sans limitation de dure. De plus, les armateurs se contentent gnralement dune promesse

    ferme du rceptionnaire accompagne dun engagement de son assureur dont la solvabilit est

    reconnue, Rodire dclarant que le choix dune caution bancaire ou dun engagement des

    assureurs appartient larmateur70

    . Ils acceptent galement lengagement des assureurs des

    marchandises de rgler le moment venu la contribution dfinitive, cet engagement tant

    concrtis par la remise par lassureur larmateur ou au dispacheur dune lettre de garantie.

    Ce document est la General Average Guarantee 71

    ou Garantie d'Avarie Commune signe

    69 Annexe n6.70

    Rodire et Lureau, Trait gnral de droit maritime, vnements de mer, p. 468, 1972, dclarant que ce choixappartient l'armateur ; TC du Havre 3 juillet 1923, note Audoin.71 Annexe n7.

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    pour le compte des assureurs facults72. Selon larticle L-172 du code des assurances,

    lassureur rpond de la contribution des objets assurs lavarie commune . La police

    facults prend en charge cette contribution.

    Ce nest qu la clture du rglement davarie commune que sera connue la

    contribution dfinitive mise la charge de larmateur et des propritaires des marchandises.

    Nous notons que la chambre commerciale de la Cour de cassation du 8 fvrier 1965 a

    statu que le transitaire, Lamberti, porteur d'un connaissement ordre, qui a accept de signer

    en son nom sans dcliner sa qualit de mandataire et, de surcrot, a fourni une caution en son

    propre nom, est personnellement tenu de contribuer aux frais de l'avarie commune, cette

    obligation tant dtermine par le compromis sign. Il a lui-mme un recours contre ses

    mandants73

    .

    Pour viter cela, tant les transitaires agissant pour les destinataires que les

    commissaires d'avaries agissant pour les assureurs ont intrt dcliner leur qualit d'agent

    en signant le General Average Bondou le General Average Guarantee.

    Enfin, dans lhypothse de linsolvabilit dun contribuable, larticle 38 de la loi du 7

    juillet 1967 fait peser linsolvabilit de lun sur lensemble des contribuables. Par contre, cette

    solution ne se retrouve pas dans les Rgles dYork et dAnvers ni dans de nombreuses

    lgislations nationales.

    Par ailleurs, en cas d'assistance, il est usuel de faire signer le propritaire des

    marchandises et ses assureurs une Salvage Guarantee Form74 (lettre de garantie de

    sauvetage), en complment des documents davarie commune. Cela permettra de garantir que

    lindemnit dassistance mise la charge de la cargaison sera rgle aux sauveteurs par les

    assureurs facults s'il y a eu un rsultat utile.

    72Pierron, Lengagement des assureurs contribuer lavarie commune, DMF 1977, p. 375.

    73

    Cass.com, 8 fvrier 1965, DMF 1965, p.344 ; note Lureau cassant la CA Caen 28 mars 1958, DMF 1958,p. 596.74 Annexe n8.

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    Section 3 : Le classement des avaries communes

    Deux grandes catgories davaries communes existent :

    Les avaries-dommages : dommages rsultant dun sacrifice volontaire ou consistant en

    un dommage caus la cargaison et au navire (jet dune marchandise la mer,

    chouement volontaire, forcement des machines, inondation volontaire des

    marchandises suite un incendie).

    Les avaries-frais : dpenses faites par le capitaine dans lintrt de tous. On peut citer

    par exemple lassistance, les frais de relche. Lavarie commune tient donc compte

    des frais engags