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1 Les modes de transmission des virus phytopathogènes par vecteurs Hébrard E, Froissart R, Louis C et S Blanc*. Équipe Vection, Laboratoire de Biologie Cellulaire et Moléculaire, Station de Pathologie Comparée, INRA-CNRS 30380 Saint-Christol-lez-Alès * auteur pour correspondance e-mail : [email protected] RESUME Les virus phytopathogènes sont le plus souvent transmis d’une plante à l’autre par un organisme tiers dénommé vecteur. Il existe des vecteurs chez les champignons, les nématodes, les acariens et les insectes. Les stratégies virales adoptées pour l’interaction virus/vecteur sont très diverses. Certains virus s’adsorbent à la surface externe du vecteur alors que d’autres pénètrent le milieu intérieur où seuls certains se multiplieront. Quelle que soit la nature du vecteur, certaines stratégies de transmission se ressemblent et peuvent être classées en trois grandes catégories. Sur la base des exemples des relations virus/vecteur les mieux connus, les caractéristiques de chacune de ces catégories sont décrites. Le choix de caractères qualitatifs plutôt que quantitatifs, utilisés pour définir les différents modes de transmission, est discuté dans cette synthèse dans l’optique d’établir une classification extrapolable à tous les virus de plantes. Mots-clé : Virus de plantes, transmission, vecteurs, classification. ABSTRACT Plants viruses are most often transmitted by vectors which can be fungi, nematodes, mites or insects. Viruses have evolved a wide range of strategies for interacting with their respective vectors. Some viruses are externally transported by the vector whereas others can penetrate inside the vector body (and/or cells) where they will, in some cases only, replicate. Some mechanisms of virus/vector interaction are found to be rather alike and the overall diversity of the strategies encountered among plant viruses can be grouped in three major categories. Based upon the best known exemples, the virus-vector relationship corresponding to each category is described herein. A few qualitative, rather than quantitative, parameters were chosen here to simplify the system classifying the different strategies used by viruses for vector transmission. The possibility to extrapolate this classification to all plant viruses, whatever the vector, is discussed. Keywords : plant viruses, transmission, vectors, classification

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Les modes de transmission des virus phytopathogènes parvecteurs

Hébrard E, Froissart R, Louis C et S Blanc*.Équipe Vection, Laboratoire de Biologie Cellulaire et Moléculaire,Station de Pathologie Comparée, INRA-CNRS30380 Saint-Christol-lez-Alès

* auteur pour correspondancee-mail : [email protected]

RESUME

Les virus phytopathogènes sont le plus souvent transmis d’une plante àl’autre par un organisme tiers dénommé vecteur. Il existe des vecteurs chez leschampignons, les nématodes, les acariens et les insectes. Les stratégies viralesadoptées pour l’interaction virus/vecteur sont très diverses. Certains viruss’adsorbent à la surface externe du vecteur alors que d’autres pénètrent le milieuintérieur où seuls certains se multiplieront. Quelle que soit la nature du vecteur,certaines stratégies de transmission se ressemblent et peuvent être classées en troisgrandes catégories. Sur la base des exemples des relations virus/vecteur les mieuxconnus, les caractéristiques de chacune de ces catégories sont décrites. Le choix decaractères qualitatifs plutôt que quantitatifs, utilisés pour définir les différents modesde transmission, est discuté dans cette synthèse dans l’optique d’établir uneclassification extrapolable à tous les virus de plantes.

Mots-clé : Virus de plantes, transmission, vecteurs, classification.

ABSTRACT

Plants viruses are most often transmitted by vectors which can be fungi,nematodes, mites or insects. Viruses have evolved a wide range of strategies forinteracting with their respective vectors. Some viruses are externally transported bythe vector whereas others can penetrate inside the vector body (and/or cells) wherethey will, in some cases only, replicate. Some mechanisms of virus/vector interactionare found to be rather alike and the overall diversity of the strategies encounteredamong plant viruses can be grouped in three major categories. Based upon the bestknown exemples, the virus-vector relationship corresponding to each category isdescribed herein. A few qualitative, rather than quantitative, parameters were chosenhere to simplify the system classifying the different strategies used by viruses forvector transmission. The possibility to extrapolate this classification to all plantviruses, whatever the vector, is discussed.

Keywords : plant viruses, transmission, vectors, classification

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INTRODUCTION

Les virus sont des parasites endocellulaires obligatoires dont la pérennitédépend bien sûr de leur capacité à se répliquer au sein d’une cellule hôte, mais pasuniquement. Avant la mort de cette cellule, le virus doit également être capabled’infecter d’autres cellules du même hôte en opérant des mouvements de cellule àcellule, et des mouvements systémiques en empruntant les tissus vasculaires de sonhôte (pour revue [1]). Enfin avant ou peu après la mort de l’hôte, les virus devrontimpérativement en infecter un autre. Cette étape de transmission est indispensable etcommune à tous les virus connus et elle implique le plus souvent un passage trèsdélicat du virus dans le milieu extérieur. Les solutions adoptées par les virus pouraccomplir cette étape avec succès (étape que nous considérons comme l’une des plusproblématiques du cycle viral), sont impressionnantes tant par leur nature que parleur diversité.

Les virus de plantes sont confrontés aux difficultés de la transmissionaccentuées par le fait que leurs hôtes sont immobiles. Ceci explique probablementpourquoi la majorité des stratégies de transmission adoptées par les phytovirus faitappel à un organisme tiers, bien que certains virus soient transmissibles par la graine,le pollen ou par contact (cas de transmission non traités ici). De nombreux animaux,en particulier des invertébrés, puisent leurs ressources dans les tissus de végétauxsupérieurs. Ils sont le plus souvent très mobiles, capables de passer de manièreautonome d’une plante à une autre et ne détruisent pas immédiatement la plante surlaquelle ils se nourrissent. Tous ces organismes sont susceptibles d’être utiliséscomme véhicules de transport entre plantes hôtes, dans l’espace ou dans le temps,par des virus phytopathogènes et sont dans ce cas dénommés « vecteur ». Ainsi, pourl’ensemble des virus connus infectant des plantes variées dans différentes régions dumonde, des vecteurs ont été décrits chez les champignons du sol, les nématodes dusol, les acariens et les insectes. Les études sur la transmission par vecteurs (vection)ont débuté dès le début de ce siècle [2] et la grande majorité des donnéesexpérimentales accumulées depuis concernent principalement les virus transmis parinsectes dont l’adaptation de l’appareil buccal est de type piqueur-suceur. Il s’agit là,en tout cas, du seul groupe de vecteur pour lequel la masse d’informations a permisl’établissement d’une classification des différentes stratégies de transmission virale.

Les insectes de type piqueur-suceur se trouvent principalement dans troisordres : Diptera, Heteroptera et Homoptera. Très peu de diptères se nourrissent surplantes, ce qui est plus fréquent chez les hétéroptères et caractéristique chez leshomoptères, où l’on trouve l’immense majorité des vecteurs. L’ordre Homopteraregroupe les cochenilles, les cicadelles, les aleurodes et surtout les aphides(pucerons). C’est pour la transmission de virus par pucerons que la classificationdes différentes stratégies a été originellement élaborée. Ce n’est que par la suitequ’elle fut, par usage consensuel, extrapolée aux cas des virus transmis par les autresfamilles d’homoptères cités ci-dessus.

Nous présenterons ici cette classification de manière critique, notre objectifétant d’en proposer une actualisation et d’évaluer la possibilité d’élaborer unsystème simplifié (tout en restant informatif) qui soit extrapolable à tous les cas detransmission de virus phytopathogènes, quel que soit le vecteur considéré.Cette démarche de réflexion sur les problèmes de classification nous paraitparticulièrement importante pour les deux raisons suivantes. (i) Un mode declassement (bien conçu) des stratégies de transmission devrait, à terme, permettre deconfirmer des liens évolutifs entre différents groupes viraux. (ii) Les cas où laphylogénie (établie sur d’autres caractères que la transmission) ne permet pasd’expliquer que deux groupes viraux possèdent la même stratégie de transmission

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sont plus intéressants encore sur un plan fondamental et épidémiologique. En effet,ils permettront de poser de nouvelles hypothèses concernant l’évolution de lastratégie de transmission correspondante.

A l’aide de quelques exemples bien connus, nous décrirons les interactionsmoléculaires entre un virus et son vecteur pour chacune des stratégies detransmission présentées. Dans cette optique, nous ne dresserons pas un inventaireexhaustif des différents couples virus/vecteur dans chaque catégorie, un tel inventaireserait ici inutile et fastidieux.

Historique de l’évolution du système de classification

Le système de classification généralement admis résulte de la synthèse deplusieurs systèmes revus et complétés au fil de l’approfondissement desconnaissances depuis plus de cinquante années. Cette évolution est liée à l’apparitiongraduelle de nouvelles techniques telles que la microscopie optique,l’immunocytochimie, la microscopie électronique et enfin la biologie moléculaire.Une des toutes premières tentatives de classification des stratégies de transmissionfut proposée par Watson et Roberts [3] qui introduisent les notions de transmission« persistante » et « non-persistante », complétée par Sylvester [4] avec les virus àstratégie intermédiaire, qualifiée de « semi-persistante ». Ces travaux étaient baséssur des critères quantitatifs : la mesure du temps nécessaire à l’acquisition du virus(le vecteur devient ainsi infectant) et son inoculation par le vecteur, ainsi que la duréede rétention du virus infectieux et inoculable par le vecteur. Cette classification avaitl’inconvénient de placer le vecteur comme une véritable « boîte noire » dans laquellele virus peut entrer et d’où il peut sortir, mais dont les événements internes restaienttotalement inconnus. Kennedy et al. [5] et plus tard Harris [6] proposent les termesqualitatifs de transmission « circulante » (à la place de persistante) et « non-circulante » (à la place de non et semi-persistante) suivant que le virus effectue uncycle passant par l’hémolymphe du vecteur (i) ou pas (ii).

(i) Un virus à transmission dite circulante est ingéré par le vecteur lors d’unrepas sur une plante infectée et atteint l’intestin. Il traverse alors la paroi intestinalepuis diffuse dans l’hémolymphe jusqu’aux glandes salivaires. C’est la salivation duvecteur lors de l’introduction des stylets dans une nouvelle plante hôte qui seraresponsable de l’inoculation du virus. Cette catégorie était divisée en deux sous-groupes suivant que le virus se réplique dans le vecteur durant ce cycle (virus àtransmission circulante propagative) ou ne s’y réplique pas (virus à transmissioncirculante non-propagative).

(ii) Un virus à transmission dite non-circulante est retenu au niveau desstylets et/ou du tube digestif antérieur du vecteur à partir d’où il sera inoculé à unenouvelle plante saine. Cette catégorie est encore aujourd’hui divisée en deux sous-groupes : transmission non-persistante et semi-persistante suivant les critères anciensdéfinis par Watson et Roberts [3] et Sylvester [4].

Le résultat de cette évolution terminologique reste somme toute assezcomplexe puisque toutes les notions suscitées, parfois même un cumul de cesnotions, sont encore utilisées dans la littérature de façon plus ou moins sporadique etque la terminologie varie de manière importante suivant les auteurs. La synthèse laplus récente a été proposée par Nault [7], mais nous emploierons une terminologiesimplifiée basée sur des caractères qualitatifs. Lorsqu’un virus se réplique durantson passage dans le vecteur, nous parlerons de virus à transmission propagative.Lorsque le virus passe par le milieu intérieur du vecteur sans s’y répliquer nousparlerons de virus à transmission circulante. Enfin, si le virus ne pénètre jamais lemilieu intérieur du vecteur, nous parlerons de virus à transmission non-circulante.C’est sur cette base que nous essayerons de proposer et de justifier, au fil du texte,

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quelques actualisations qui nous paraissent plus satisfaisantes au vu des résultatsapportés par les outils de biologie moléculaire au cours de la dernière décennie.

Stratégie de transmission propagative

Les virus à transmission propagative appartiennent aux genres Cyto- etNucleorhabdovirus, Phytoreovirus, Fijivirus, Oryzavirus, Marafivirus et Tenuivirusqui sont tous apparentés à des familles virales aussi inféodées aux animaux etnotamment aux insectes ([7], pour revue sur la taxonomie voir [8]). La majorité deces virus est transmise à la descendance, chez l’insecte, par passage transovarien etaucun d’entre eux ne l’est, chez la plante, par transmission par la graine.

L’acquisition du virus par son vecteur lors d’un repas sur une plante infectées’effectue en une période pouvant durer de quelques minutes à quelques heures. Lavariabilité de cette mesure dépend vraisemblablement de la répartition du virus dansla plante hôte et par conséquent, du temps nécessaire aux vecteurs pour atteindre lorsdu repas, les tissus infectés. Il existe une phase de latence, après le repasd’acquisition, durant laquelle le vecteur n’est pas infectant pour la plante. Cephénomène correspond au temps nécessaire au virus pour s’accumuler sous formeinfectieuse dans les glandes salivaires et donc dans la salive. Bien évidemment,puisque le virus se multiplie dans l’insecte durant son transfert, la durée de cettephase de latence est proportionnelle à la durée du cycle de multiplication virale. Onpeut donc s’attendre à ce que ce paramètre soit influencé par des facteurs tels que: lanature et l’état physiologique de l’insecte (stade du développement et âge), latempérature, la génétique du virus et celle du vecteur. En tout état de cause, cettephase de latence dure de quelques jours à plusieurs mois. Le vecteur restera alorsinfectant et infecté jusqu’à sa mort, bien que l’efficacité d’inoculation du virus à laplante diminue souvent à des âges avancés du vecteur. La durée minimale du repas aucours de laquelle ces virus sont inoculés à la plante est relativement courte puisquequelques minutes suffisent le plus souvent. L’ensemble de ces informations estdétaillé par Nault [7].

Les arguments expérimentaux qui sont en général interprétés comme despreuves de la multiplication virale dans le vecteur sont issus de différentes approches.Des observations en microscopie optique et électronique ont montré que les virustransmis suivant la stratégie propagative sont présents dans les cellules de nombreuxorganes de leurs vecteurs : les ovaires, les corps gras, les muscles, les tissus dusystème nerveux, les tissus conjonctifs et les glandes salivaires [9]. Des injectionsd’extraits d’insectes vecteurs virulifères dans l’hémolymphe d’autres insectespermissifs non porteurs du virus provoquent l’infection de ces derniers. Cettetransmission par injection peut être répétée (en chaîne) un nombre de fois supérieur àcelui qui, si le virus ne se multipliait pas, aboutirait à sa perte par simple effet dedilution limite [10]. La principale preuve de la multiplication du virus dans sonvecteur a été la mesure quantitative du taux d’antigènes viraux dans le vecteur qui adémontré une augmentation du titre viral après que le vecteur ait été isolé de la planteinfectée, source de l’inoculum [11]. Enfin, il a été possible dans quelques cas depropager le virus sur des cultures de cellules de l’insecte vecteur (pour revue voir[7]).

Les mécanismes moléculaires régissant l’interaction virus/vecteur sont trèscomplexes puisqu’ils correspondent à toutes les étapes du cycle de multiplicationvirale dans l’insecte. Dans le cadre de cette revue, nous nous limiterons aux étapescaractéristiques de la reconnaissance et donc des premiers stades de l’infection duvecteur par le virus. Qu’il s’agisse de virus enveloppés comme les Rhabdoviridae ounon enveloppés comme les Reoviridae, la reconnaissance de récepteur(s) chez le

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vecteur (au niveau de l’intestin) se fait à l’aide d’une protéine associée à la surfacede la particule virale. Les deux exemples les plus connus sont ceux du potato yellowdwarf nucleorhabdovirus (PYDV) et du wound tumor phytoreovirus (WTV). Pour lePYDV, la protéine G glycosylée faisant saillie hors de l’enveloppe virale estresponsable de la reconnaissance du vecteur et donc de la spécificité de vection. Lasuppression de cette protéine G diminue fortement l’infectiosité du virus en culturede cellules d’insecte, alors qu’aucune modification n’est notable dans l’infectiositédu virus pour les cellules végétales [12]. Un mécanisme tout à fait similaire est connupour les rhabdovirus d’animaux (voir [7] et références citées). Chez le WTV, la pertede la possibilité d’être transmis par insecte vecteur est associée à la perte de deux desdouze segments de l’ARN génomique, les segments S2 et S5. Le fait que les deuxprotéines codées par ces segments d’ARN, P2 et P5, forment la capside externe duWTV suggère que cette structure pourrait être impliquée dans la reconnaissance duvecteur ou dans la pénétration du virus dans la cellule végétale hôte (voir [13] etréférences citées). Plus précisément, une mutation de la protéine P2 du rice dwarfphytoreovirus (RDV) est à elle seule suffisante pour abolir la possibilité d’infectiondu vecteur et donc la transmissibilité du virus [13].

Les virus ayant adopté la stratégie de transmission propagative présentent desdifférences importantes avec les autres virus de plantes [7]. En effet, si les autresvirus sont généralement considérés comme des virus de végétaux à part entière, ceuxqui sont transmis suivant la stratégie propagative sont plutôt considérés comme desvirus d’insectes phytophages ayant acquis au cours de l’évolution, la capacité des’établir dans les tissus végétaux, au départ de façon transitoire et locale. Ainsi, cesvirus auraient pu se maintenir momentanément sous forme infectieuse pour l’insecteseulement, dans les plantes (au niveau du site d’alimentation d’un insecte) etconstituer de la sorte un « réservoir » dans lequel un nouvel insecte pourraits’infecter. Ce phénomène existe encore pour quelques virus d’insectes dont leNilaparvata lugens reovirus (NLRV) [14] qui est un virus phylogénétiquementproche du genre Fijivirus, infectant des insectes homoptères delphacides. En plus desa capacité de transmission verticale transovarienne à l’insecte, le NLRV peut êtretransmis de façon horizontale (d’un insecte à l’autre) quand ceux-ci se nourrissentsur la même plante, bien que ce virus soit incapable de se répliquer dans la plante.

Les phytovirus transmis suivant la stratégie propagative ont tous acquis,probablement secondairement, les fonctions nécessaires à leur réplication etpropagation dans les plantes. Ces dernières sont, en quelque sorte, devenues deshôtes alternatifs si bien qu’il est difficile de décider qui, de la plante ou de l’insecte,transmet le virus à l’autre.

Stratégie de transmission circulante

Les virus transmis selon ce mode sont transportés de façon interne, maisjamais ils ne se répliquent durant leur passage dans le milieu intérieur du vecteur. Ilsdoivent traverser différentes barrières membranaires : au niveau du tube digestif pourentrer, et des glandes salivaires pour sortir de leur vecteur. Le virus ingéré avec lasève phloémique lors de la prise de nourriture du vecteur traverse les cellulesépithéliales de l’intestin vers l’hémocèle (phase d’acquisition) et diffuse dansl’hémolymphe jusqu’aux glandes salivaires. Il traverse les cellules de ces glandes etest injecté dans la plante hôte avec la salive lors d’une nouvelle piqûre (phased’inoculation) (voir figure 1).

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Les virus pour lesquels les mécanismes de la transmission circulante sont lesplus connus sont membres de la famille Luteoviridae et surtout des genresLuteovirus et Polerovirus (pour détails de taxonomie voir [8]).

Les voies de transport du virus dans son vecteur ont principalement étéétudiées par microscopie sur le barley yellow dwarf luteovirus (BYDV) ainsi que surle beet western yellows polerovirus (BWYV) et le potato leafroll polerovirus (PLRV)[15]. Le passage des virus au niveau de l’intestin nécessite une phase dereconnaissance certainement prise en charge par un récepteur spécifique des cellulesépithéliales du tube digestif. Le virus est transporté activement par endocytose dansdes vésicules particulières pour être ensuite relargué par exocytose dans l’hémocèledu puceron [15]. Le passage du virus de l’hémolymphe vers les glandes salivairesaccessoires semble être la principale barrière déterminant la spécificité detransmission (voir [16] et références citées). En effet, certaines souches non-transmises peuvent être détectées dans l’hémolymphe mais pas dans le canalsalivaire. Des études sur le passage in vitro du BYDV au travers des glandessalivaires accessoires laissent supposer que la lame basale et le plasmalemme de cesorganes contiennent chacun des composants spécifiques régulant activement etindépendammant la reconnaissance et l’endo-exocytose des Luteovirus [16]. Lalame basale constituerait une première barrière extracellulaire très spécifique, lavariation de l’affinité de la liaison virus/vecteur correspondant à la variation del’efficacité de transmission. Le plasmalemme des glandes salivaires accessoiresconstituerait une autre barrière régulant la reconnaissance du virus et son transfert,par passage intracellulaire, vers le canal salivaire [16]. Les auteurs suggèrent qu’unrécepteur du même type que celui associé à la transmission du virus Sindbis, quipasse à travers la lame basale des cellules de moustique, pourrait être impliqué.

Les bactéries du genre Buchnera, endosymbiotiques des pucerons, sécrètentla symbionine. Cette protéine est présente en très forte concentration dansl’hémolymphe des pucerons. Sa séquence est à 85 % homologue à celle de laprotéine GroEL d’E. coli qui est, elle, limitée au cytosol. GroEL appartient à lafamille des protéines chaperonnes qui lient et stabilisent les polypeptidesnouvellement synthétisées, et aident à leur repliement fonctionnel et à leurassemblage (voir [17] et références citées). Van den Heuvel et al. [18] remarquentque les pucerons traités par des antibiotiques (dépourvus de bactériesendosymbiotiques et donc de symbionine) sont de mauvais vecteurs. En fait, cesauteurs suggèrent que la transmission des membres de la famille Luteoviridaeimplique probablement l’intervention de symbionine durant leur passage dansl’hémolymphe.

L’implication de la capside dans la transmission des virus appartenant à lafamille Luteoviridae a d’abord été démontré par des expériences d’hétéro-encapsidation (pour revue [19]). L’hétéro-encapsidation est un phénomène naturelqui consiste à envelopper le génome d’un virus avec des protéines de capsideprovenant d’un autre virus. Or, une des principales spécificités des Luteoviridae estde posséder une capside virale constituée d’une protéine majeure, la protéine decapside et d’une protéine mineure, qui ne semble pas nécessaire à l’encapsidation duvirus, appelée protéine de translecture (readthrough = RT). Toutes les donnéessuivantes non référencées concernant la protéine de translecture sont répertoriéesdans la revue de Miller et al. [19]. La protéine de translecture est formée par laprotéine de capside fusionnée avec un domaine dit de translecture (readthroughdomain = RTD). En effet, le gène de la protéine de capside se termine par un codonde terminaison faible (UAG) et la traduction peut parfois continuer grâce àl’intervention d’un ARN de transfert dit suppresseur. Les expériences d’hétéro-

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encapsidation évoquées ci-dessus ne permettent pas de déterminer laquelle de cesdeux protéines capsidaires est impliquée dans la transmission par pucerons.

Les séquences du domaine de translecture de différents membres de lafamille Luteoviridae sont très conservées dans la région N-terminale et plus variablesdans la région C-terminale. Sachant que cette protéine est ancrée dans la particulevirale par son domaine « protéine de capside », le RTD serait donc localisé à lasurface externe de la particule virale. Dans cette dernière, le RTD apparaît sous uneforme tronquée dans sa partie C-terminale (pour revue [20]).

Le RTD est multifonctionnel : il intervient (i) dans l’accumulation du virusdans la plante, (ii) dans l’apparition des symptômes par sa partie C-terminale et (iii)dans la transmission par vecteur par sa partie N-terminale. Le rôle de la protéine detranslecture dans la transmission par vecteur a été démontré par comparaison deséquences de souches virales transmissibles ou non et par mutagenèse dirigée auniveau du RTD. Elle pourrait être impliquée dans la reconnaissance de récepteur auniveau des glandes salivaires accessoires du puceron. La protéine de translecturepourrait également permettre d’expliquer le rôle de la symbionine dans latransmission, évoqué précédemment. En effet, la particule virale a une forte affinité invitro pour la symbionine [18] et c’est le domaine N-terminal du RTD qui estresponsable de cette interaction [21]. De plus, l’interaction RTD / symbionine estspécifique du couple virus/vecteur [17]. La symbionine, par sa liaison avec laprotéine de translecture, pourrait protéger le virion contre sa dégradation par lesenzymes présentes dans l’hémocèle et/ou par le système immunitaire de l’insecte. Eneffet, Van den Heuvel et al. [18] [21] remarquent que la protéine de capside n’estplus détectable dans les pucerons traités par des antibiotiques.

L’interaction in vitro d’une protéine composant la capside (mineure oumajeure) avec une protéine de type symbionine a également été mise en évidencepour un membre de la famille Geminiviridae transmis par aleurodes : le tomatoyellow leaf curl begomovirus (TYLCV) [22]. L’intervention de symbionine (ou demolécules similaires) semble donc être un phénomène généralisable à l’ensemble descas de transmission circulante.

La principale autre famille de virus transmis selon le mode circulant est celledes Geminiviridae. Beaucoup moins d’informations sont disponibles sur leurmécanisme de transmission, mais il est encore à ce jour considéré commeglobalement similaire à celui des membres de la famille Luteoviridae. La familleGeminiviridae est caractérisée par des particules doubles (jumelles) quasi-icosaédriques. Cette famille est divisée en 3 genres [8]. Les membres des genresMastrevirus (ancien groupe I) et Curtovirus (ancien sous-groupe II) possèdent ungénome à ADN simple brin circulaire monopartite et sont transmis par cicadelles, ilsse distinguent par leurs plantes hôtes qui sont respectivement des monocotylédoneset des dicotylédones. Enfin, le genre Begomovirus (ancien sous-groupe III)rassemble de nombreuses espèces virales qui possèdent un génome mono ou, plussouvent, bipartite (molécules A et B) transmis par aleurodes (principalement Bemisiatabaci) à des dicotylédones. Le génome des Curtovirus présente une forte similaritéavec la molécule A du génome des Begomovirus [8].

Il semble que la spécificité de la relation virus/vecteur soit régulée à différentsniveaux suivant les genres considérés. En effet, les mastrevirus et les curtovirus sontnormalement non-transmissibles par cicadelles, mais ils peuvent le devenir aprèsinjection des particules virales dans l’hémolymphe de ces insectes [23, 24]. Pour cesvirus, la barrière intestin/hémocèle semble donc être l’élément majeur de la spécificitéde transmission. En revanche, Cohen et al. [25] ont montré que certaines espècesd’aleurodes peuvent acquérir de grandes quantités d’un bégomovirus dansl’hémocèle, bien qu’elles restent incapables de le transmettre. La spécificité de

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transmission, pour ce troisième genre, semble donc résider au niveau des glandessalivaires. Néanmoins, une telle généralisation semble quelque peu hâtive et laspécificité des barrières membranaires de différents couples virus/vecteur devravraisemblablement être étudiée au cas par cas.

Contrairement aux Luteoviridae, les Geminiviridae ne possèdent pas deprotéine de translecture, seule la protéine de capside semble impliquée dans latransmission. Les protéines de capside sont fortement similaires à l’intérieur dechacun des genres, alors qu’elles diffèrent d’un genre à l’autre. En conséquence, laspécificité de vection pourrait être due à des différences à ce niveau. Des viruschimériques ont été construits en remplaçant le gène de capside de la moléculed’ADN A de l’ACMV (african cassava mosaic begomovirus) par celui du BCTV(beet curly top curtovirus). Après injection du virus chimérique dans des cicadellesvectrices du BCTV, il a pu être transmis, alors que l’ACMV sauvage n’estnormalement pas transmissible par cet insecte (voir [26] et références citées). Cesrésultats montrent donc que les déterminants de la spécificité du passage du BCTVentre l’hémocèle et les glandes salivaires de la cicadelle sont portés par la protéine decapside. De même, le remplacement du gène codant pour la protéine de capside duAbMV (abutilon mosaic begomovirus, non transmissible par vecteur) par le gènecorrespondant du SiGMV-Co (sida golden mosaic begomovirus du Costa Rica,transmissible) permet l’acquisition et la transmission du virus par aleurode [26].

Plusieurs résultats obtenus récemment sur le tomato yellow leaf curl virus(TYLCV) induisent un doute quant à la stratégie de transmission adoptée par cebégomovirus. En effet, l’ADN viral reste détectable dans les aleurodes vectricesdurant toute la vie adulte. De même, après un repas d’acquisition, ces aleurodesrestent vectrices jusqu’à leur mort et elles possèdent une fécondité et une espérancede vie inférieures aux aleurodes non-virulifères. Ces effets négatifs du TYLCV sur levecteur semblent le rapprocher des virus pathogènes d’insectes [27]. Récemment, etpour la première fois dans la famille des Geminiviridae, la transmission à ladescendance du vecteur, par passage transovarien, a été démontré pour le TYLCV[28]. Ces observations sont tout à fait atypiques pour un virus à transmissioncirculante et ressemblent plutôt à des caractéristiques de virus se multipliant dans leurvecteur. Une démonstration directe de la réplication du TYLCV dans l’aleurodevectrice serait toutefois indispensable pour déterminer si les virus de la familleGeminiviridae (tout au moins les bégomovirus) doivent être considérés comme ayantadopté une stratégie de transmission propagative.

D’autres résultats plus surprenants encore concernant le TYLCV méritentd’être mentionnés ici. Contrairement à l’ADN viral, détectable durant toute la vie duvecteur, la protéine de capside n’est plus présente dans l’adulte à partir du douzièmejour après l’acquisition [27], comme si l’ADN pouvait persister alors que lesparticules virales disparaissent. Cette observation, bien que très préliminaire, pourraittrahir une stratégie d’interaction virus/vecteur encore inconnue à ce jour.

Stratégie de transmission non-circulante

Ce chapitre regroupe des informations sur les stratégies de transmissionanciennement qualifiées de non- et semi-persistantes. Les premières études ont étémenées sur des virus à transmission dite non-persistante transmis par pucerons. Leterme de non-persistance du virus dans son vecteur a été défini selon différentscritères quantitatifs : (i) le temps minimal d’acquisition par leur vecteur est réduit(quelques secondes à quelques minutes), (ii) il n’y a pas de phase de latence (c’est-à-dire que le vecteur peut transmettre le virus immédiatement après son acquisition),(iii) il n’y a pas de passage dans l’hémolymphe du vecteur, (iv) le virus est perdu

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lors de la mue de son vecteur et (v) la période de rétention du virus par son vecteurest courte (quelques minutes à quelques heures) (pour revue [6]). L’hypothèse laplus ancienne du mécanisme impliqué a été formulée par Doolittle et Walker [2] :l’acquisition serait un phénomène passif correspondant à une contamination externedes stylets. Cette transmission mécanique pourrait être accentuée par lecomportement du puceron qui lors de sa recherche de nourriture effectue denombreuses piqûres d’essais (pour « goûter ») dans les cellules épidermiques.Kennedy et al. [5] proposent donc le terme de « virus de stylets ». Les puceronsagiraient ainsi comme de simples « aiguilles volantes » [29]. L’incapacité detransmission des virus après traitement des stylets aux UV ou au formaldéhydesemblait renforcer cette hypothèse.

Cependant, Harris [6] conteste cette interprétation considérant ces traitementscomme un facteur de stress pour les pucerons. La perte de transmissibilité du virusserait, selon lui, plus due à une modification du comportement du vecteur qu’àl’inactivation du virus lui-même. Il formule donc une nouvelle hypothèse sur lemécanisme d’acquisition/inoculation des virus à transmission non-persistante : ils’agirait d’un phénomène actif par « ingestion/égestion » de la part du vecteur. Ceciexpliquerait notamment que l’introduction de stylets de pucerons anesthésiés dansdes feuilles ne permettent pas la transmission. Selon ce point de vue, les puceronsagissent plutôt comme des « seringues volantes » (sur cette polémique voir [29] etréférences citées). En effet, pour sélectionner ses plantes hôtes, le puceron doit les« goûter » c’est-à-dire aspirer les fluides présents dans les cellules épidermiquesjusqu’à ce qu’ils atteignent les organes chimiorécepteurs localisés dans leprécibarium (voir figure 2A). Si les liquides induisent une phagostimulation, ilspassent dans le cibarium vers l’intestin. Si non, les fluides sont expulsés par le canalalimentaire. Les virus acquis lors de l’ingestion au cours d’un repas préalablepourraient ainsi être inoculés lors de l’égestion, durant un repas ultérieur.

La mise au point de l’électro-pénétrographie (EPG) a permis d’étudier plusprécisement le comportement alimentaire du puceron. Cette technique est basée surl’enregistrement des différences de potentiel entre une électrode fixée sur le puceron,lui-même posé sur sa plante hôte, et une autre électrode en relation avec les vaisseauxde cette plante. Elle permet de déterminer les différentes phases d’alimentation dupuceron : salivation/ingestion/égestion. De récentes études ont ainsi montré quecertains virus seraient inoculés à la plante lors de la salivation qui se produit avantmême la phase d’ingestion/égestion sur une nouvelle plante [29]. Il faut noter que lecanal salivaire est séparé, sur presque toute la longueur des stylets, du canalalimentaire (qui est une des principales zones d’acquisition des virus) à l’exceptionde sa partie distale (à environ 8 µm) où ils sont communs. Le mécanisme desalivation n’est donc effectif pour l’inoculation que pour les particules virales qui sefixent en aval de cette jonction.

La transmission dite non-persistante serait donc un phénomène actif rapidequi pourrait se produire lors des piqûres d’essai comprennant une phased’acquisition par ingestion sur une plante infectée et une phase d’inoculation parégestion et/ou salivation sur une plante saine.

Lorsque le sous-groupe des virus à transmission dit semi-persistante a étédéfini par Sylvester [4] à partir de différences observées sur les critères quantitatifsdéfinissant la persistance, on a cherché des explications à ces variations. Ces virussont souvent localisés dans les vaisseaux du phloème, le vecteur devrait donceffectuer une piqûre plus profonde pour les acquérir. Ce type de piqûre correspond àune phase d’alimentation plus longue que la phase de piqûre d’essai. Quoiqu’il ensoit, ces critères de semi-persistance ne tiennent pas compte des mécanismes utiliséspar le virus dans le vecteur. Certains de ces virus (à transmission semi-persistante)ont été localisés dans le tube digestif antérieur et appelés « virus du tube digestif

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antérieur » par opposition aux « virus de stylets » (à transmission non-persistante)(pour revue [7]). Cependant, les virus se retrouvent parfois dans ces deux organessur un même individu vecteur ; de plus, d’un point de vue technique, la localisationdans les stylets est beaucoup plus difficile à déterminer. Les limites du groupe des« virus du tube digestif antérieur » ne nous paraissent donc pas assez bien définies.De plus, la compréhension du mécanisme d’inoculation de ces virus resteproblématique, puisque l’égestion a été définie comme partant du précibarium et nondu tube digestif antérieur.

Les stylets et le tube digestif antérieur sont deux organes originaires de tissusectodermiques, ils sont donc recouverts de cuticule. Les virus dits non-persistants etsemi-persistants se fixent tous sur cette cuticule, ils ne traversent pas de barrièresmembranaires et sont perdus lors des mues. Nous retiendrons donc que les virus quise localisent sur ces organes sont associés de façon externe au vecteur.

Concernant la distinction entre virus à transmission non-persistante (ou destylets) et virus à transmission semi-persistante (ou du tube digestif antérieur), nouspensons que les critères choisis (discutés ci-dessus) ne sont pas suffisammentdiscriminants, alors que la localisation externe (sur la cuticule) de ces virus est uncaractère satisfaisant puisqu’il est simple et exclusif (oui/non). Cette dichotomie adéjà était proposée par ailleurs par Hull [30]. Ces arguments nous paraissentsuffisants pour abandonner ces deux catégories au profit d’une seule : latransmission non-circulante.

En revanche, les progrès des connaissances moléculaires de l’interactionvirus/vecteur ont mis à jour deux mécanismes significativement différents. Nouspensons que ceux-ci permettent de distinguer deux stratégies de transmission non-circulante : la « stratégie capside » et la « stratégie FAT » (voir figure 2B). Cettedichotomie a été proposée dans une revue récente [31]. Toute les informationsprésentées ci-après sans références particulières sont détaillées dans cette revue quicontient la liste des travaux correspondants.

Stratégie capsideSi après alimentation artificielle avec des particules virales purifiées, un

vecteur transmet ces particules, cela prouve qu’elles sont capables d’interagirdirectement avec la cuticule des vecteurs. Ceci est le cas par exemple pour lecucumber mosaic cucumovirus (CMV), l’alfafa mosaic alfamovirus (AlMV), le peastreak carlavirus (PSV) et le red clover vein mosaic carlavirus (RCVMV). Le ou lesseuls déterminants viraux impliqués dans la transmission de ces virus ne peuventdonc être qu’une ou des protéines de la capside. Dans ce sens, des expériencesd’hétéro-encapsidation in vitro ont permis de transmettre l’ARN du TMV (tobaccomosaic tobamovirus), naturellement non-transmissible par pucerons, en utilisant laprotéine de capside du CMV pour former une particule virale chimérique. De même,l’efficacité de transmission du CMV est différente selon que la capside provient desouches hautement ou peu transmissibles. Certains domaines importants de cetteprotéine ont été identifiées, notamment des acides aminés qui jouent un rôle dans laspécificité de vecteur [32].

Nous définissons ici la « stratégie capside » comme une stratégie virale detransmission non-circulante qui consiste à utiliser exclusivement la protéine decapside ou plus largement toute protéine structurale constituant la particule virale,pour l’interaction avec le vecteur.

Stratégie FATSur l’ensemble des virus actuellement connus transmis selon le mode non-

circulant, seul un faible nombre peut être transmis à partir de particules viralespurifiées, comme ci-dessus (virus à stratégie capside). En effet, la plupart des autres

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virus, comme par exemple le turnip mosaic potyvirus (TuMV) et le cauliflowermosaic caulimovirus (CaMV), ne sont pas transmis suivant cette stratégie. Dans cecas, un composant additionnel nécessaire à la transmission pourrait être perdu lors dela purification de ces virus. Le premier indice de l’existence de ce type de composanta été obtenu par des expériences d’acquisition séquentielle menées sur plantesinfectées par le potato potyvirus C (PVC), virus connu pour n’être transmissible parpuceron que s’il est en présence du potato potyvirus Y (PVY) lors d’une infectionmixte. Le PVC peut également être acquis individuellement puis transmis par despucerons, lorsqu’ils ont préalablement été nourris sur des plantes infectées par lePVY. La séquence inverse d’acquisition (PVC puis PVY) ne permet pas latransmission du PVC. Un composant, induit lors de l’infection de la plante par lePVY, semble donc nécessaire à la transmission des particules de PVC, il est appelé« helper component » (HC). Par la suite, il a été démontré qu’il ne s’agit pas de laparticule virale du PVY elle-même, mais plutôt d’un composant extra-capsidaire codépar ce dernier.

Chez les membres du genre Caulimovirus, le virus le plus étudié est lecauliflower mosaic caulimovirus (CaMV). La présence d’un facteur assistant appelé« Aphid Transmision Factor » (ATF) a été montré de la même manière paracquisitions séquentielles sur des plantes infectées par des souches transmissibleset/ou non transmissibles. Dans la suite de cette revue, le HC des Potyvirus et l’ATFdes Caulimovirus seront désignés sous le terme commun de « Facteur Assistant dela Transmission » (FAT).

Des fractions de nature protéique ayant une activité FAT ont été obtenues pardifférentes purifications à partir d’extraits de plantes infectées par le PVY ou letobacco vein mottling potyvirus (TVMV). Par l’analyse de ces fractions, les FAT despotyvirus ont été caractérisés comme des protéines d’un poids moléculaire variant de53-58 kDa dont la forme active serait apparemment dimérique. La comparaison desséquences du FAT de souches transmissibles et non-transmissibles a révélé desmutations dans deux motifs très conservés : un domaine N-terminal centré sur lemotif protéique KITC (lysine-isoleucine-thréonine-cystéine) et un autre C-terminalcentré sur le motif PTK (proline-thréonine-cystéine). L’importance de ces domainespour la fonction FAT a pu être confirmée par mutagenèse dirigée.

De manière équivalente, la comparaison des séquences de souchestransmissibles et non transmissibles par pucerons du CaMV, indique que le FAT duCaMV correspond au produit de l’expression du gène II. Il s’agit d’un polypeptidede 18 kDa n’ayant apparemment pas d’autre fonction dans le cycle viral. En effet,l’isolat CM4-184 dont le gène II est entièrement délété n’est pas transmissible parpucerons, mais il reste parfaitement infectieux pour la plante. Contrairement aux FATdes Potyvirus, celui du CaMV n’a pas encore pu être purifié à partir d’extraits deplantes infectées. En revanche, il peut être produit sous forme active en systèmehétérologue « baculovirus/cellules d’insectes » .

L’hypothèse du mécanisme d’action des facteurs assistants de transmissionla plus communément admise est que ce type de molécules joue un rôle dans larétention et le relarguage du virus par le vecteur par « pontage réversible » entre lesdeux. Un domaine du FAT serait impliqué dans l’interaction avec la capside virale etun autre domaine avec un récepteur hypothétique sur la cuticule des pièces buccaleset/ou le tube digestif antérieur du vecteur. Ainsi, la non-transmissibilité d’un virus àstratégie FAT peut être due à un facteur assistant non fonctionnel (qui ne peut plusinteragir avec le vecteur et/ou le virion) ou à une protéine de capside nonfonctionnelle (qui ne peut plus interagir avec le FAT). Le FAT d’un virustransmissible est capable d’assister la transmission de souches non-transmissibles (àcause d’une absence ou d’une non-fonctionnalité de son propre FAT) dans un

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phénomène défini comme « l’hétéro-assistance » [33], en permettant l’interaction deces derniers avec le vecteur concerné. L’hétéro-assistance est logiquement possibleentre deux virus transmissibles et ce phénomène est soumis à une certaine spécificité.Pour preuve, les FAT des potyvirus et des caulimovirus ne sont pas interchangeables.A l’intérieur du genre Potyvirus, le FAT d’un virus donné peut « assister » latransmission d’un certain nombre d’autres virus mais pas tous; lors d’infectionmixte ou d’expériences d’acquisition séquentielle in vitro, ce FAT assisterapréférentiellement la transmission du virus homologue. Chez les Caulimovirus,l’hétéro-assistance d’isolats de CaMV non-transmissibles par puceron a pu êtreobtenue à l’aide des FAT du carnation etch ring caulimovirus (CERV) et du figwortmosaic caulimovirus (FMV).

Bien que le rôle de « pontage réversible » des facteurs assistants detransmission, présenté ci-dessus soit hypothétique, les résultats récemment publiéssemblent en accord avec cette explication. Chez les potyvirus, l’utilisation de lamutagenèse dirigée couplée à des expériences d’interaction protéine/protéine in vitroont permis de montrer que la protéine de capside interagit avec le FAT [34]. Plusprécisément, le domaine N-terminal de la protéine de capside centré sur le motifprotéique très conservé DAG (acide aspartique-alanine-glycine) [34] estspécifiquement reconnu par le domaine PTK du FAT, mentionné ci-dessus [35].Pour le CaMV, le domaine C-terminal du FAT est responsable de l’association avecla particule virale en un site inconnu. Ces interactions FAT/virion démontrées pourles potyvirus et les caulimovirus sont corrélées à l’efficacité de la transmission parpucerons.

Pour ce qui est de l’interaction du FAT avec le vecteur, Wang et al. [36]montrent que le FAT des potyvirus peut réguler la spécificité et l’efficacité detransmission en contrôlant l’accrochage des virions dans les stylets et le tube digestifantérieur. C’est le domaine KITC (mentionné ci-dessus) du FAT qui serait impliquéde manière directe ou indirecte dans la reconnaissance des récepteurs, toujourshypothétiques, du vecteur [37]. Aucune information n’est actuellement disponiblesur le domaine équivalent du FAT pour le CaMV.

Nous avons vu que les potyvirus et les caulimovirus pouvaient être considéréscomme transmis par puceron suivant la stratégie FAT. Cependant, les facteursassistants de ces deux genres viraux diffèrent en plusieurs points. (i) Les FAT despotyvirus sont multifonctionnels, alors que celui du CaMV n’est impliqué que dansla transmission par pucerons. (ii) Le FAT du CaMV interagit fortement avec lesmicrotubules d’insectes, de mammifères et de plantes [38]. Le rôle de cette propriétéest pour l’instant incompris et cela n’a jamais été décrit pour le FAT des potyvirus.(iii) Enfin, contrairement aux Potyvirus, il semble qu’en plus du FAT et de laparticule virale, l’intervention d’un facteur supplémentaire soit nécessaire à latransmission du CaMV par pucerons [39].

Nous définissons donc la « stratégie FAT » comme une stratégie virale detransmission non-circulante qui consiste à utiliser obligatoirement, en plus de laprotéine de capside, un ou plusieurs composants viraux extra-capsidaires. Une despropriétés de cette stratégie, à nos yeux très importante, est qu’elle autorise lephénomène d’hétéro-assistance (tableau I).

La stratégie FAT semble largement répandue aux sein des virus àtransmission non-circulante. La liste des genres de virus concernés est présentéedans le tableau II.

Les cas de transmission par des vecteurs autres que les homoptères

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Ce chapitre ne vise pas à détailler précisément les interactions virus/vecteurpour chacun des groupes de vecteurs autres que les homoptères mais plutôt àrésumer les caractéristiques principales de chacune des stratégies de transmissionrencontrées. Lorsque cela est possible, les stratégies décrites seront assimilées àl’une ou l’autre des catégories présentées ci-dessus.

Transmission par champignonsLes données récentes sur la transmission de virus phytopathogènes par

champignons sont rares. Toutefois, la synthèse bibliographique proposée parCampbell [40] indique que l’association virus/vecteur peut se faire suivant deuxstratégies bien différentes.

Les virus des genres Furovirus et Bymovirus par exemple colonisent lecytoplasme du champignon vecteur (genre Polymyxa) dès la formation de la spore etsuivent l’ensemble du cycle fongique jusqu’à l’hôte végétal suivant. C’est lors ducontact entre le cytoplasme du vecteur et celui de l’hôte que le virus est inoculé.

Les membres d’autres genres viraux tels que Necrovirus ou Tombusvirus nepénètrent jamais le cytoplasme du vecteur (genre Olpidium) mais opèrent uneassociation spécifique avec la surface externe de la paroi de la zoospore.L’adsorption du virus sur la spore se fait dans le sol et c’est par la blessure,provoquée par le champignon lors de sa pénétration dans les tissus végétaux, que levirus est inoculé.

Ces deux mécanismes ont parfois été considérés comme une transmissionpersistante dans le premier cas et non-persistante dans le second. Toutefois,Campbell [40] conteste l’application d’une telle terminologie aux virus transmis parchampignons. Nous préfèrerons classer ces deux stratégies de transmission suivantle système proposé dans cette revue (tableau I et II) : (i) lorsque le virus esttransporté de manière interne par le champignon, nous considérons qu’il s’agit là detransmission circulante, puisque aucun cas de multiplication virale dans lechampignon vecteur n’a été signalé à ce jour et (ii) lorsque l’association du virus sefait sur la surface externe de la spore de son vecteur, nous assimilons ce phénomèneà la transmission non-circulante. Dans ce dernier cas, trop peu de données sontdisponibles au sujet des déterminants viraux impliqués pour permettre de précisers’il s’agit d’une stratégie capside ou FAT.

Transmission par nématodesLes Népovirus sont transmis par des nématodes des genres Xiphinema et

Longidorus et les Tobravirus sont transmis par des membres des genresTrichodorus et Paratrichodorus. Tous les nématodes vecteurs décrits sontectoparasites de plantes, vivent dans le sol et se nourrissent sur les parties distalesdes racines. Une espèce de nématode n’est vectrice que pour un nombre limité devirus et un même virus est transmis avec une efficacité très variable suivant l’originegéographique de son nématode vecteur (pour revue voir [41]). De par cesobservations, un processus de transmission assimilé à un simple phénomènemécanique ne peut pas être invoqué.

Lors de la prise de nourriture, le nématode projette ses stylets à travers laparoi et la membrane cellulaire jusqu’au contact direct avec le cytoplasme de lacellule racinaire. Il aspire alors la quasi-totalité du contenu cellulaire, y compris levirus quand la cellule est infectée. Lorsque virus et vecteur sont compatibles, le viruss’adsorbe très solidement sur la cuticule des stylets ou de la capsule buccale,probablement par des interactions de type électrostatique. Le relarguage du virus estinduit petit à petit par les sécrétions salivaires éjectées au cours de nouvelles piqûres.Après un repas d’acquisition, le virus peut être inoculé successivement à plusieursplantes par le même vecteur, dans lequel il persiste de quelques mois à quelquesannées.

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Bien que le virus puisse persister aussi longtemps dans son vecteur, nouspensons que la stratégie utilisée est clairement la stratégie non-circulante. Lapersistance du virus dans le nématode résulte probablement d’une interaction trèsforte entre les deux et de la grande stabilité des virus considérés. Cette persistancen’est pas le reflet d’un mécanisme qualitativement différent et nous ne la prendronsdonc pas en compte dans l’identification de la stratégie de transmission.

Pour des raisons liées à la biologie des nématodes phytophages, il sembleque la mise au point d’un protocole expérimental d’alimentation artificielle desnématodes soit extrêmement difficile, voir impossible (G. Demangeat,communication personnelle). La transmission à partir de préparations de viruspurifiés n’a donc jamais pu être testée. Cependant, des expériences de mutagénèsedirigée sur l’ARN 2 des tobravirus [42] montrent que, outre la protéine de capside,au moins une protéine virale extracapsidaire est nécessaire à l’efficacité de latransmission. Bien qu’une preuve expérimentale directe fasse encore défaut, ilsemble cela soit aussi le cas des népovirus (G. Demangeat, communicationpersonnelle). Il nous apparaît raisonnable de suggérer que la transmission non-circulante des Nepovirus et des Tobravirus par nématodes suive des modalitésassimilables à ce que nous avons dénommé la stratégie FAT.

Transmission par acariensLes vecteurs appartiennent aux familles Eriophyidae et Tetranychidae. Ces

organismes se nourrissent par perforation de la cellule végétale puis aspiration deson contenu. La plupart des espèces ont une gamme de plantes hôtes restreinte et laspécificité de vection des virus phytopathogènes est stricte [43].

Certains virus apparentés aux rhabdovirus sont probablement transmissuivant la stratégie propagative. En effet, bien que peu de données expérimentalessoient disponibles, la transmission verticale d’un rhabdovirus « atypique » de l’orgechez le vecteur Petrobia latens, par passage transovarien, a pu être démontrée (pourrevue [7]).

Les acariens de la famille Eriophyidae transmettent des virus plus étudiés telsque les Rymovirus (Potyviridae). Le wheat streak mosaic rymovirus (WSMV)persiste dans son vecteur après une mue et a pu être détecté dans plusieurs de sesorganes dont l’hémolymphe et les glandes salivaires [43]. La question de lamultiplication des Rymovirus dans leur vecteur acarien reste obscure et aucune miseen évidence de ce type n’a été décrite à notre connaissance. De ce fait, il est encoreimpossible de déterminer si les Rymovirus sont transmis par acariens suivant unestratégie de transmission circulante ou propagative.

Transmission par coléoptèresUn certain nombre d’insectes vecteurs ont été décrits dans l’ordre

Coleoptera et plus précisemment dans la famille Chrysomelidae (pour revue voir[44]). Ils transmettent des virus appartenant aux genres Tymovirus, Comovirus,Bromovirus et Sobemovirus qui ont des particules isométriques, très stables ettransmissibles mécaniquement.

Ces insectes mâchent les tissus végétaux en broyant les cellules puis lesabsorbent avec le virus, si la plante est infectée. Le temps nécessaire à l’acquisitiondu virus par le vecteur est très bref, une seule morsure peut suffire. Lors du repassuivant sur une plante saine, le virus sera inoculé en un temps également très court.Longtemps un processus pûrement mécanique a été invoqué pour expliquer latransmission mais, depuis une vingtaine d’années, les données qui s’accumulent fontapparaître des interactions bien plus complexes et spécifiques entre virus et vecteurs[44]. Après acquisition, certains virus passent dans l’hémolymphe de l’insecte enquelques minutes, parfois même quelques secondes seulement [45]. Bien qu’il ait étépossible d’obtenir des cas de transmission après injection du virus purifié dans

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l’hémocèle du vecteur, le caractère obligatoire du passage du virus dans le milieuintérieur du coléoptère pour la transmission n’a pas pu être établi de manièrecertaine. En effet, Wang et al. [46] démontrent que la présence de virions dansl’hémolymphe dépend du couple virus/insecte considéré et que ceci n’est pasdirectement lié à l’efficacité de la transmission.

Les éléments qui déterminent la spécificité de la relation virus/vecteur sontparticulièrement intéressants puisqu’une partie au moins semble liée aucomportement du virus dans la plante immédiatement après l’inoculation par levecteur. Les virus non-transmissibles semblent initier leur cycle réplicatif auxalentours du site d’inoculation alors que les virus transmissibles, eux, sont capablesde se déplacer via le xylème et de s’éloigner du site d’inoculation avant de serépliquer. Les coléoptères phytophages ne possèdent pas de structures semblablesaux glandes salivaires des homoptères et ils humectent ou lubrifient leur piècesbuccales par régurgitation lors du repas. Le fluide de régurgitation contient uneactivité RNAsique très élevée qui pourrait dégrader les virus initiant leur cycle auxabords du site d’inoculation. Les détails des phénomènes pouvant expliquer laspécificité de vection ont récemment été compilés (pour revue [7]).

Bien que Wang et al. [46] considèrent que les virus puissent avoir adoptédeux stratégies de transmission (non-circulante et circulante) par coléoptères, nouspensons que de plus amples informations seront nécessaires avant de déterminer si laou les stratégies de transmission rencontrées pour ces virus seront assimilables àl’une ou l’autre de celles présentées ici, ou si une nouvelle catégorie devra être crée.

Transmission par thripsDes travaux relativement récents (pour revue voir [47]) indiquent que les

thrips (ordre Thysanoptera) utilisent des stylets pour perforer les tissus végétaux,injecter leur salive qui va lyser les cellules avoisinantes et enfin aspirer le lysatcellulaire. Une particularité notable de l’appareil buccal des thrips réside dans le faitque l’architecture interne des stylets forme un canal unique, utilisé à la fois pourl’absorption de nourriture et pour l’excrétion de salive.

Le seul groupe connu de virus transmis par thrips est le genre Tospovirus etplus particulièrement le tomato spotted wilt virus (TSWV). Ce genre appartient à lafamille Bunyaviridae qui regroupe des virus essentiellement inféodé aux animaux.De manière comparable aux bunyavirus d’animaux et aux virus de plantes à stratégiede transmission propagative, le TSWV reconnaît spécifiquement des récepteursmembranaires au niveau de l’intestin de son vecteur via des glycoprotéines del’enveloppe virale. La fusion de cette enveloppe avec la membrane cellulaire libère lesnucléocapsides infectieuses dans le cytoplasme des cellules de l’insecte où le virusse multipliera, ainsi que dans d’autres organes, avant de rejoindre les glandessalivaires (voir [48] et références citées). Il est à noter qu’une protéine réceptrice duTSWV a été mise en évidence au niveau de l’intestin moyen du thrips vecteur,Frankliniella occidentalis [48].

Les mécanismes moléculaires de l’interaction virus-vecteur permettentd’assimiler sans équivoque la transmission des Tospovirus par thrips à unetransmission propagative.

CONCLUSION

Selon les écosystèmes dans lesquels ils évoluent, les virus se trouvent soumisà des contraintes et conditions extrêmements variées, mais tous sont, à un moment ouà un autre, confrontés à la transmission. Face à ce problème, la stratégie adoptéedépend de l’histoire évolutive du virus et d’un ensemble de paramètres liés à soncycle biologique, à celui du vecteur et à l’écologie et la biologie de la plante hôte. Ilest possible d’imaginer que parfois, pour des virus très éloignés du point de vue

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taxonomique, la résultante globale de tous ces paramètres se ressemble. Onobservera alors des convergences au niveau de la stratégie de transmission viraleadoptée. Le nombre de groupes de vecteurs, de plantes hôtes et de virus est trèslargement supérieur à celui des modes de transmission connus. C’est ainsi quedifférents virus, infectant des hôtes différents, sont transmis par des vecteursdifférents suivant des mécanismes globalement similaires.

Etablir une classification des différentes stratégies de transmission est unproblème complexe, justement du fait de la multitude et de la diversité des tryptiquesplante/virus/vecteur existants. La clef de l’établissement d’un système declassification simple et extrapolable à tous les virus de plantes repose sur le choixdes critères définissant chaque catégorie. Ces critères doivent être simples et assezgénéraux et surtout, ils ne doivent pas tenir compte de variations quantitatives ou liéesà la nature et au comportement du vecteur. C’est pour cela que nous proposonsd’abandonner les termes de transmission non-persistante, semi-persistante etpersistante dans cette revue. Nous pensons que cette terminologie est de nature àlimiter l’extrapolation de la classification à l’ensemble des virus de plantes, définiepour la transmission par pucerons (puis étendue aux autres homoptères), elle nesemble applicable sensu stricto qu’à ce type de vecteurs.

Les critères de classification des stratégies de transmission virales que nousproposons dans le tableau I repose sur des caractères qualitatifs discréminants. Nousavons essayer ici d’extrapoler la classification des modes de transmission à tous lesvirus de plantes, quel que soit le vecteur (tableau II). Les tableaux I et II ne reflètentpas la taxonomie des virus, ils visent simplement à identifier des stratégies,globalement similaires, ayant été adoptées par des virus qui peuvent être très éloignésphylogénétiquement.

Les transmissions propagative et circulante correspondent à des catégoriespréexistantes (pour revue [7]). Rien n’est donc changé dans ces catégories pour lesvirus transmis par homoptères, mais les critères simples que nous utilisonspermettent d’y adjoindre certains des cas de transmission par d’autres groupes devecteurs tels que les champignons et les acariens. La transmission non-circulante estgénéralement scindée en deux catégories : non-persistante et semi-persistante. Pourles raisons discutées ci-dessus, nous avons préféré à ces deux catégories lesstratégies de transmission « capside » et « FAT ». Les mécanismes moléculaires misen jeu par les virus concernés par chacune de ces stratégies sont significativementdifférents et seule la stratégie FAT permet le phénomène de l’hétéro-assistance. Decette modification résulte une redistribution de certains genres viraux à l’intérieur dela transmission non-circulante ainsi que l’intégration de genres transmis parchampignons et nématodes.

La plupart des virus connus s’intègre d’ores et déjà à ce système declassification (tableau II). Cependant, il est facile d’imaginer que des stratégiesoriginales puissent être découvertes. Il faudra alors probablement créer descatégories, ou plus vraisemblablement des sous-catégories, nouvelles.

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Figure 1 : Stratégie de transmission circulante des virus phytopathogènes par insectevecteur de type piqueur-suceur. A. Schéma anatomique du vecteur. CA canalalimentaire, CB cibarium, CS canal salivaire, E estomac, GS glande salivaire, GSAglande salivaire accessoire, H hémocèle, IM intestin moyen, IP intestin postérieur, OEoesophage, P pharynx, PCB précibarium, PS pompe salivaire, R rectum. B.Représentation schématique du mécanisme. (1) Le virus est transporté dans le CA desstylets jusqu’au CB grâce à la succion générée par la décompression de celui-ci lors dela prise de nourriture de l’insecte sur une plante infectée. (2) La fermeture de la vannedu PCB, l’ouverture de la vanne du P et la compression du CB chasse le virus avec lesfluides alimentaires vers le P et l’OE. (3) La vanne de l’OE s’ouvre et les fluidespassent dans l’E, l’IM et l’IP vers le R. (4) Le virus utilise la clé moléculairecorrespondant à la serrure de la barrière intestinale et il passe dans l’H par endo-exocytose. (5) Le virus possède la pièce moléculaire du puzzle qui permet sareconnaissance et sa protection par l’autre pièce du puzzle portée par la symbionineproduite par les endosymbiontes de l’insecte. (6) Le virus circule dans l’hémolymphejusqu’aux sites de production de la salive : les GS et GSA. Il utilise les deux autres clésmoléculaires qui permettent sa reconnaissance par les serrures des barrières salivairesdes GSA et son passage par endo-exocytose vers le canal salivaire où il est relargué.(7) Le virus passe la PS avec le flux de salive et est inoculé dans la plante au momentde la salivation lors d’un nouveau repas de l’insecte.Le circuit emprunté par les virus ayant une stratégie de transmission propagative est lemême. L’intervention de symbionine n’a toutefois pas été démontrée et la localisationdes sites de multiplication du virus est multiple et variée.

A

P

GSAGS OE

R

PS HIM

E IP

CSCA

CB

PCB

PI

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Figure 2 : Stratégie de transmission non-circulante des virus phytopathogènes parinsecte vecteur de type piqueur-suceur A. Représentation schématique du mécanisme.(1) Le virus est aspiré dans le CA en direction du CB par sa décompression lors d’unepiqûre par l’insecte dans une plante infectée. (2) Le virus utilise sa pièce moléculairedu puzzle pour s’accrocher à la pièce réceptrice dans les pièces buccales et/ou le tubedigestif antérieur de l’insecte. L’inoculation se fera lors d’une autre piqûre. Lemécanisme de décrochage du virus de sa pièce réceptrice dans l’insecte n’est pasconnu. Il pourrait avoir lieu lors de l’égestion et/ou de la salivation. Les zones del’insecte concernées par ces deux mécanismes sont différentes. La salivation se produitjuste avant l’ingestion et l’égestion a lieu lors d’une piqûre d’essai non satisfaisante.(3) Lors d’une piqûre d’essai, le PCB contrôle la composition des fluides tests ingérés.Si le test de phagostimulation est positif, une piqûre d’alimentation est effectuée. Si letest est négatif, la compression du CB est déclenchée sans qu’il y ait ouverture de lavanne du P : il y a égestion des fluides du CB vers le CA et l’extérieur. CA canalalimentaire, CB cibarium, CS canal salivaire, H hémocèle, PCB précibarium, PS pompesalivaire. B. Représentation schématique des interactions moléculaires entre le virus (àstratégie capside ou FAT) et son vecteur. Les connaissances actuelles ne nouspermettent pas de savoir si c’est le même récepteur hypothétique dans l’insecte quiportent les deux sites d’interaction avec les déterminants des virus à stratégie capside età stratégie FAT.

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23A

4

2

3

1

4

PI

zone dereconnaissancesoumise àl’égestion

zone dereconnaissancesoumise à lasalivation

PS

CB

PCB

CA

CS

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B

Stratégiecapside

StratégieFAT

particule viralepossédantla protéine de la capsidecompatible avec le FATFacteur Assistant deTransmissionprotéine virale extra-capsidairecompatible avec le récepteur

particule virale possédantla protéine de la capsidecompatible avec lerécepteur

récepteur hypothétique quipermetla reconnaissance et l’accrochagesur la cuticule du vecteur

lumière du CA