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Les journées de l’Entreprise de l’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises Décembre 2013 Le financement du stade précoce de l’innovation (Early Stage) : Quelques pistes de réflexions Mme Zouhour Karray * (1 er décembre 2013) * Professeur en Sciences Economiques Université de Tunis Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis Chercheur à UAQUAP ISG de Tunis Chercheur associé à Economic Research Forum E-mail : [email protected]

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Les journées de l’Entreprise de l’Institut

Arabe des Chefs d’Entreprises

Décembre 2013

Le financement du stade précoce de l’innovation (Early

Stage) : Quelques pistes de réflexions

Mme Zouhour Karray*

(1er décembre 2013)

* Professeur en Sciences Economiques Université de Tunis Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis Chercheur à UAQUAP – ISG de Tunis Chercheur associé à Economic Research Forum E-mail : [email protected]

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I. Introduction

Dans l’état actuel de l’économie tunisienne, deux défis majeurs sont à relever. Réaliser une

croissance économique soutenue capable de créer de l’emploi relativement qualifié et de

réduire les inégalités régionales. Face à ces questions essentielles, le rôle des Petites et

Moyennes Entreprises (PME) innovantes est primordial car elles représentent le tissu

économique de demain. En effet, au fur et à mesure que se tarissent les grandes sources

d'emplois que constituent les grandes entreprises et la fonction publique, les PME innovantes

ou potentiellement innovantes apparaissent comme le seul agent économique susceptible de

croître, d'embaucher et de créer de la valeur ajoutée. Cependant, selon le Répertoire National

des Entreprises (RNE, 2011), le tissu industriel semble vulnérable dans la mesure où la

création des entreprises est largement dominée par les micro-entreprises (moins de 5

employés). En effet, 89% des créations de nouvelles entreprises sont de très petites tailles

alors que seulement 1% et 0,4% des nouvelles entrées concernent respectivement les grandes

et moyennes entreprises. Cette même dynamique est observée pour la sortie des entreprises.

Par ailleurs, durant les cinq dernières décennies, nous pouvons dire que l’économie tunisienne

a connu des transformations structurelles de son appareil productif : en passant d’une

économie basée sur l’agriculture et l’activité minière à une économie relativement

industrialisée ; en passant d’une économie interventionniste à une économie basée sur

l’initiative privée en développant le tissu industriel et l’investissement privé ; en passant d’une

économie fermée tournée vers l’intérieur à une économie ouverte dont la croissance est

induite par les exportations ; en passant d’un panier d’exportations concentrées dans le secteur

du textile & habillement et cuir & chaussures à un panier plus diversifié et à contenu

technologique relativement amélioré ; et enfin en passant d’une économie dirigée où la

politique industrielle revient à une mise en place des mesures de protections tarifaires, de

subventions et d’incitations fiscales à une économie basée sur la collaboration entre les

pouvoirs publics et les acteurs privés afin qu’ils puissent identifier collectivement les

contraintes qui pèsent sur le développement industriel. Malgré tous ces efforts et ces

évolutions, la transformation économique semble inachevée, un grand chemin reste à faire

pour l’économie tunisienne afin d’assoir son développement sur les activités novatrices

capables de générer plus de valeur ajoutée et d’assurer une montée en gamme.

De toute évidence, les nouvelles stratégies étaient marquées par une orientation vers

l’économie du savoir tel que recommandé par le 10ème

Plan de développement (2002-2006).

L’accélération vers une telle économie est accentuée dans le cadre du 11ème

Plan de

développement (2007-2011) qui avait ciblé un taux de croissance annuelle du PIB de 6,1%.

La Tunisie devait assurer sa migration progressive des secteurs traditionnels (qui restent

coincés dans l’ensemble dans des activités de simple transformation et d’assemblage à faible

valeur ajoutée) à des industries plus avancées du point de vue technologique. En 2008, le

gouvernement a adopté une nouvelle politique industrielle baptisée « Horizon 2016 ». Elle

découle d’une étude du ministère de l’Industrie, intitulée « Stratégie industrielle nationale à

l’horizon 2016 » qui essaye d’ancrer l’innovation et la valeur ajoutée dans les stratégies de

développement des secteurs.

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Plus encore, l’innovation est largement reconnue aujourd’hui comme un moteur de la

croissance économique et une force majeur pour créer les conditions d’un développement

durable s’attaquant à des challenges environnementaux et sociaux. Cependant, les activités

innovantes sont confrontées à des difficultés particulières relatives aux sources de

financement. Un soutien efficace à l'innovation ne nécessite pas uniquement de ressources

supplémentaires. Il exige la présence d'intermédiaires financiers spécialisés qui sont en

mesure de fournir non seulement l'argent mais aussi une expertise technique et managériale.

L'émergence et la croissance d'une infrastructure de financement pour le soutien à un stade

précoce d'entreprises innovantes est un processus complexe qui dépend de plusieurs

conditions et exige une allocation efficace des capitaux.

Alors que la compétitivité d’une économie dépend essentiellement de sa capacité à innover, la

Tunisie investit insuffisamment dans l’innovation et la Recherche & Développement (R&D).

Durant la période 2005-2010, le pourcentage du PIB consacré à la R&D1 a dépassé la barre du

1% contre 0,84% pour la Turquie, 0,63% pour la Malaisie et 2,24% pour la France. Mais, en

Tunisie, l’essentiel de l’investissement est réalisé par le secteur public et souffre d’un grand

problème de valorisation. En effet, en 2009, seulement 20% de la dépense intérieure en R&D

est effectuée par le secteur privé en Tunisie contre 40% pour la Turquie, près 70% pour la

Malaisie et 61,7% pour la France. Le défit est alors double. D’une part, il s’agir de voir

comment inciter les entreprises existantes à investir dans la R&D et à innover et de les

accompagner dans leurs efforts respectifs. La compétitivité des entreprises tunisiennes passe

avant tout dans les années à venir par l’innovation et donc par la R&D. Ce n’est qu’à travers

l’innovation que ces entreprises peuvent diversifier leurs gammes de produits et conserver

leur part de marché international et même national. D’autre part, la création d’entreprises

innovantes lancées par de jeunes porteurs d’idées de projets innovants constitue une véritable

opportunité pour l’économie tunisienne. En effet, le nombre des diplômés dans les domaines

de la science et technologie est en croissance depuis plus d’une décennie. L’un des enjeux

pour la Tunisie est de faciliter la création puis le développement de ces PME innovantes car

elles représentent le tissu économique de demain capable de générer une plus grande valeur

ajoutée et des retombées positives par le biais des relations en amont et en aval.

Pour les entreprises existantes, le gouvernement suit une politique industrielle relativement

active et pour le moins généreuse (Erdle, 2011). Si les résultats sont relativement décevants en

matière d’innovation, c’est probablement en raison des politiques micro-économiques et de

l'existence d'institutions peu performantes qui apparaissent comme des facteurs dissuasifs

pour l'investissement dans l’innovation. Ceci est vrai aussi bien pour l’investissement privé

intérieur que pour l’investissement étranger qui constitue le meilleur potentiel de rattrapage

technologique.

Par contre, le financement des projets innovants qui donnent naissance à des PME innovantes

pose de grandes difficultés en Tunisie. L’environnement réglementaire et institutionnel,

l’esprit d’entreprendre, l’intensité de la concurrence ou encore le contexte économique ont un

1 Les données relatives aux dépenses intérieures de R&D sont issues de l’UNESCO (http://data.uis.unesco.org).

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impact sur le taux de natalité des entreprises innovantes. Ces activités d’innovation font face à

des difficultés pour trouver des financements appropriés. En effet, si elles offrent le plus

grand potentiel de développement et de rentabilité, les start-up innovantes présentent aussi le

risque le plus important pour les investisseurs. La question de financement de l’innovation

concerne les différentes étapes : l’amorçage/démarrage (Seed/Start-up), le développement

(Early growth) et l’expansion (Later-stage). Mais, le financement des stades précoces (early

stage) pose le plus de difficultés. En effet, les jeunes entreprises innovantes ne sont pas en

phase de production, mais en amont du processus, voir même à l’état embryonnaire du projet

et ne peuvent pas donc compter sur les mécanismes classiques de financement ou alors à un

coût prohibitif compte tenue de l’incertitude qui pèse sur leur survie et des difficultés à

évaluer ces projets. L’environnement réglementaire et juridique n’offre pas de cadre approprié

pour le financement du stade précoce de l’innovation dans la mesure où le système de

financement traditionnel ne permet pas d’assumer un tel niveau de risque dès lors que le

promoteur ne dispose pas de garanties. De même, l’absence de système de valorisation

efficace pour la recherche rend difficile la gestion du risque auquel sont exposés à la fois

l’investisseur et le promoteur. D’où la nécessité de développement des différentes formes de

financement par capital-risque (fonds d’amorçage, capital d’investissement, capital

accélérateur/incubateur, Business Angel, etc.) permettant non seulement de jouer le rôle du

financier passif mais aussi d’accompagner le jeune entrepreneur innovant en s’impliquant

dans la vie de l’entreprise au niveau des fonctions managériales et stratégiques.

L’objet de cette étude est donc double : i) préciser les défis en termes de financement par

capital-risque (venture capital) auxquels se heurtent les entrepreneurs innovants en Tunisie

pour financer le besoin en fonds propres pour le Early stage de l’innovation ; et ii) proposer

par la suite quelques réflexions afin d'identifier quel rôle le gouvernement pourrait jouer dans

la promotion du cadre réglementaire. Le reste du papier est organisé comme suit. La section

suivante fournit un bref aperçu des entreprises innovantes en discutant leur nature, leurs

besoins de financement et les difficultés à répondre à ces besoins dans leurs premiers stades

de développement. La section 3 présente les principaux mécanismes de financement par

capital-risque du Early stage de l’innovation. Le reste du papier est consacré à la discussion

de la possibilité de révision ou de mise en place des mécanismes de financement du stade

précoce de l’innovation. La section 4 revient sur le rôle manqué par les SICAR à financer ce

type d’activité. La section 5 discute la possibilité de développement des Business Angel.

Enfin, la section 6 propose un modèle mixte de liens stratégiques entre les pôles de

compétitivité et les sources de financement.

II. Nature et financement des entreprises innovantes

Entrepreneuriat et innovation sont maintenant largement reconnus comme des piliers de la

croissance économique et la création d'emplois. Les petites entreprises en particulier ont été la

principale source d'activité innovante et ont toujours représenté la grande majorité des

nouveaux emplois (Wilson et Silva, 2013). Parce que l'innovation est une activité diversifiée,

multi-facettes, il y a une variété d’entreprises innovantes, qui se distinguent par le type

d'innovation dans laquelle elles sont engagées. La source de la nouveauté peut-être de

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nouvelles connaissances scientifiques (invention), le transfert de connaissances d'un secteur à

un autre, ou d'une demande différente pour les clients nouveaux ou existants. L'application de

la nouveauté peut être sous la forme de produits nouveaux ou améliorés, des procédés

nouveaux ou améliorés, des processus organisationnels ou de commercialisation nouveaux ou

améliorés et de nouvelles sources de matières premières. Enfin, selon son ampleur et sa plus

ou moins grande continuité des processus actuels du marché, la nouveauté peut être

incrémentale ou radicale, dans laquelle l'ordre économique existant peut être «détruit» et de

nouvelles façons de faire les affaires seront établi.

La plupart des entreprises innovantes naissent petites et privées dans la mesure où une

personne ou un groupe de personnes - attirés par le potentiel commercial d'une idée nouvelle -

prennent des mesures formelles pour transformer cette idée en projet réel. En raison de la

résistance de l'ordre existant à la nouveauté, la commercialisation de nouvelles idées passe par

plusieurs obstacles qui peuvent être plus ou moins pris en compte par les étapes de

développement suivantes (UNECE, 2007) : (1) l'exploration du potentiel du marché, la

faisabilité technique et la viabilité économique, (2) le développement du produit, (3)

l'introduction sur le marché, et (4) l'expansion du marché. Dans les premières étapes, il y a

beaucoup d’incertitude technique, commerciale et économique qui rendent difficile

l’évaluation du potentiel de l'entreprise. Dès que l’entreprise atteint le stade du marché, il y a

beaucoup moins de doute sur son potentiel et son attrait pour les bailleurs de fonds. Ainsi, les

entreprises innovantes se distinguent par leur besoin de résoudre l'incertitude fondamentale et

de révéler, ainsi que de créer, leur potentiel économique.

Le développement d'entreprises innovantes varie en fonction des coûts de développement de

leur produit initial et de la longueur de leur processus d’entrée et de développement sur le

marché. Il y a plusieurs étapes critiques dans ce processus de développement où la

disponibilité d’un financement suffisant est cruciale : la R&D, la conception des produits et le

développement de prototypes, la définition du marché, les essais et la production initiale. Le

montant du financement nécessaire est souvent suffisamment large pour épuiser les sources

immédiatement disponibles comme les fonds propres et les fonds de la famille et des amis.

Sur la base de ces étapes de développement et des besoins de financement, plusieurs étapes de

financement peuvent être distinguées, chacune caractérisée par son montant et l'utilisation

spécifique des ressources financières. La phase d'amorçage (seed stage) couvre la recherche

initiale et le développement d'une idée ou d'un concept d'entreprise visant à déterminer sa

faisabilité technique, le potentiel du marché et la viabilité économique. La phase de

démarrage (start-up stage) couvre le développement de prototypes de produits, l’étude initiale

du marché ainsi que des activités de portée du marché et la mise en place d'une organisation

commerciale officielle. L’étape de croissance précoce (early growth) se rapporte à la

commercialisation et à la croissance à petite échelle ainsi qu’au développement des piliers de

l'évolutivité de l'entreprise. Enfin, la phase d'expansion (expansion stage) de l'entreprise

couvre la croissance substantielle de l’échelle de production et de l'impact sur le marché de

l'entreprise.

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La figure 1 donne une représentation du diagramme de flux de trésorerie d'une entreprise

innovante typique selon ses étapes de développement et cartographie les différentes sources

de financement en fonction de ces étapes. Au fil du temps, le cash-flow suit un modèle de

«courbe en J», avec une chute initiale à la phase d'amorçage (connue sous l’appellation la

«Vallée de la mort»), en rapport avec les ressources financières consacrées à la preuve du

concept nouveau. La phase initiale (amorçage et démarrage), qui s’étend du moment de

l’élaboration effective de la technologie, du produit ou du procédé jusqu’au moment où il est

commercialement viable, est généralement la phase pendant laquelle le financement est le

plus difficile à obtenir. À ce stade, faute de financement, de nombreux innovateurs ne peuvent

pas poursuivre le processus d’innovation qui pourrait aboutir à la mise au point de produits

commercialement rentables. Si l'entreprise émerge de la «vallée», le flux de trésorerie devient

positif et l'activité génère peu à peu la dynamique du marché et se déplace vers les premiers

stades de croissance et d'expansion. Dans ces étapes, les ressources financières nécessaires à

l'entreprise sont nettement plus importantes. La figure illustre la complexité de financement

des phases d’amorçage et de démarrage et le besoin d’une multitude d’instruments pour

pouvoir accéder aux différentes étapes de croissance du projet.

Figure 1. Stades de développement, trésorerie et sources de financement

Source : UNECE (2007)

Ces activités d’innovation ont du mal à attirer des financements traditionnels. Il y a beaucoup

d'incertitude autour des entreprises innovantes dans leur phase d'amorçage ou de démarrage.

Endettement/financement-relais

Bourse

Fonds de capital-rique

Vallée de

la mort

Amorçage Démarrage Croissance Expansion

Phase de développement

Sold

e de

trés

ore

rie

Fondateur, 3F*

Subventions de faisabilité

Business Angels

*3F : Friends, Family and Fools

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Ces entreprises n'ont pas d’historique et d’expérience (non plus de garanties) et, souvent, ne

disposent pas d’une preuve tangible du produit ou de la faisabilité du service. En outre, il

existe peu d’informations du marché sur le potentiel de leurs produits ou services. Enfin, et en

particulier dans les domaines à forte intensité cognitive et technologique, les produits ont

souvent des taux relativement élevés d'obsolescence ou sont soumis à des externalités de

connaissances qui empêchent l'entreprise de capturer la valeur économique totale de son

innovation. Ces caractéristiques rendent le risque perçu de ces entreprises prohibitif pour les

investisseurs ordinaires, augmentant le coût d'opportunité de tels investissements.

Une autre caractéristique du développement initial d'entreprises innovantes est la présence

d'asymétrie d'information. Sur la base de leur expérience, leurs connaissances, leurs

compétences et leurs relations inter-personnelles, les entrepreneurs sont bien placés pour

percevoir les opportunités d'affaires et d'anticiper leur potentiel de marché. En revanche, les

investisseurs potentiels ne peuvent pas vérifier la validité de telles opportunités et ne peuvent

pas non plus distinguer entre les bonnes et les mauvaises opportunités. Dans une économie

fondée sur la connaissance, cela est dû à la difficulté d'évaluer la valeur de la connaissance ou

d’autres actifs incorporels détenus par l'entrepreneur. Ceci conduit les investisseurs potentiels

soit à estimer des coûts de financement prohibitifs soit à se retirer entièrement de ce créneau

de financement à un stade précoce (défaillance du marché).

La valeur d'une entreprise innovante est basée sur le potentiel de croissance à long terme

provenant de la connaissance scientifique et de la propriété intellectuelle. Le modèle de

génération du cash est distinct et requiert une grande patience de la part des investisseurs à

recevoir leur remboursement. Les flux de trésorerie sont non seulement incertains et volatiles

mais requièrent aussi de longues périodes pour générer un cash initial. En outre, les

entreprises innovantes manquent d'actifs corporels qui peuvent servir de garantie pour le

financement.

Ceci explique le recours aux différentes formes de financement spécifiques au Early stage des

entreprises innovantes. L’étude récente menée par l’OCDE montre l’importance du

financement d’amorçage et du Early stage (OCDE, 2011) dans une économie caractérisée par

un investissement croissant dans le savoir (Andrews and Criscuolo, 2013), ainsi que

l’importance de la croissance de ces firmes en matière de création d’emploi (Bravo-Biosca et

al., 2013). Mais, la plupart des sources traditionnelles de financement à un stade précoce ne

sont pas immédiatement ou suffisamment adaptées pour les entreprises innovantes. Les fonds

personnels des porteurs de projets innovants ainsi que de leurs familles et amis représentent

une source importante à la phase d'amorçage de l'entreprise, mais sont souvent insuffisants

pour couvrir les besoins de l'entreprise.

Compte tenu des périodes plus longues que les entreprises innovantes prennent à générer de la

trésorerie, des techniques telles que le crédit commercial et avances à des clients d'amorçage -

qui sont très efficaces pour les entreprises qui cherchent à occuper des niches dans les

marchés et les industries établies - sont inappropriées. En outre, l'incertitude associée aux

études de faisabilité, la nature intangible des actifs d'entreprises innovantes, la volatilité de

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leurs flux de trésorerie et l'absence d'antécédents d'exploitation suffisante rendent le

financement par crédit inapproprié.

A priori la forme la plus appropriée de financement des entreprises innovantes en phase de

démarrage, celle qui correspond au profil risqué de l'entreprise avec ses gains potentiels, c'est

le financement externe par capital-risque. Le capital investissement est un moyen de financer

le démarrage, le développement, la transmission ou l'acquisition d'une entreprise non cotée. À

la différence d’un prêt, l’investisseur n’est pas rémunéré par des intérêts, sa prise de risque est

récompensée par un pourcentage du capital de l’entreprise. Les principaux fournisseurs de ce

type de financement sont les business angels et les fonds d’amorçage et de capital-risque, bien

que la plupart des fonds de capital-risque se concentrent généralement sur les entreprises avec

des produits déjà développés. Ils reçoivent une partie du capital de l'entreprise en échange du

financement qu'ils fournissent, leur permettant de partager pleinement le potentiel de

croissance de l'entreprise, si une telle expansion est réalisée. En outre, ces investisseurs

reçoivent des droits de contrôle importants et exercent une surveillance qui les aide à gérer le

risque lié à l'investissement. Enfin, ils fournissent souvent une expertise précieuse et des

possibilités de réseautage pour l'entreprise, augmentant ainsi son potentiel commercial. La

section suivante donne un aperçu sur les principaux mécanismes de financement par capital-

risque en Tunisie.

III. Les mécanismes de financement par capital-risque du Early

Stage de l’innovation en Tunisie : état des lieux

Depuis des années, la situation du capital-risque en Tunisie suscite des débats sans qu’aucun

consensus n’ait pu se dégager sur un diagnostic clair. Pour les uns, il existe une offre

abondante de capital-risque en Tunisie mais il manque de projets de qualité susceptibles

d’intéresser les investisseurs. Pour les autres, des entreprises d’avenir ne parviennent pas à

trouver, en Tunisie, les capitaux nécessaires à leur croissance, en raison d’une insuffisance de

« venture capitalists ». Le financement par capital-risque en Tunisie – susceptible de financer

le Early stage de l’innovation – se fait essentiellement à travers les SICAR (Sociétés

d’Investissement à Capital Risque) et le FCPR (Fonds Commun de Placement à Risque) et,

plus récemment et dans de moindres mesures, à travers les quelques fonds d’amorçage et

business angels.

III. 1. Les SICAR et le FCPR : peu d’investissements consacrés à l’innovation

En Tunisie, le Capital Investissement est un mode de financement en fonds propres

d’entreprises non cotées en bourse quelque soit leurs stades de développement.

Depuis 1990, le secteur financier tunisien a assisté à la création de plusieurs sociétés

d’investissement à capital-risque aussi bien publiques que privées. L’objectif principal des

SICAR est de promouvoir l’investissement privé, en particulier celui des PME, à travers une

participation aux fonds propres des entreprises tunisiennes. Leurs interventions sont en

général plus orientées vers l’industrie et les services et couvrent avant tout les investissements

liés au programme de Mise à Niveau ou des projets à forte valeur ajoutée.

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Le FCPR2, quant à lui, a été créé en 2005 et intervient surtout pour participer aux fonds

propres des entreprises dans le cadre :

- des nouveaux projets dans les créneaux porteurs

- du développement technologique et l’innovation

- de l’extension, du développement et de modernisation des PME adhérentes au

programme de mise à niveau.

La nouvelle loi du Capital Investissement (99-100-octobre 2011) a apporté certaines

améliorations relatives aux dysfonctionnements de l’activité :

- Nouveau cadre juridique et fiscal

- Séparation du cadre d’exercice et fiscal

- Élargissement du champ d’activité

- Intégration maîtrisée des instruments de dettes

En Tunisie, le secteur du capital investissement (SICAR et Fonds) compte 46 acteurs, dont 16

SICAR bancaires, 6 SICAR régionales, 16 SICAR de groupes et 8 fonds de capital

investissement. La structure du volume des investissements par opérateur durant la période

2009 à 2011 (Figure 2) montre que, jusqu’à 2010, les SICAR bancaires représentent plus de

2/3 de l’activité du capital investissement. En 2011, les SICAR de Groupes ont gagné plus de

20 points pour atteindre une part de marché de 36% avec un montant de 45,85 Million de

dinars.

Figure 2. Structure du volume des investissements par opérateur, 2009-2011

Source : ATIC

2 Ce Fonds, connu aussi sous l’acronyme FCPR-In Tech, a été crée par la loi n°2005-105 du 19/12/2005. Il

permet de financer des investissements dont le coût global se situe entre 100.000 dinars et 5 millions de dinars

selon un schéma de financement s’appuyant principalement sur les fonds propres. En revanche, les

investissements doivent répondre aux critères et domaines d’intervention des SICAR et doivent être approuvés

par la commission d’investissement du fonds.

6% 12% 6%

71% 67%

48%

14% 16%

36%

9% 5% 10%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

2009 2010 2011

SICAR régionales SICAR bancaires SICAR de groupes FONDS

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Jusqu’à la fin de l’année 2011, le Capital Investissement en Tunisie a financé 2000 entreprises

pour un volume cumulé de participations brutes à hauteur de 1,2 Milliard de dinars. En 2011,

l’effort d’investissement en termes de nombre de projets concerne plus la création (67%) que

le développement (33%) alors que la tendance est inversée en terme montant investi, soit

seulement 39% pour la création contre 61% pour le développement. En termes

d’investissements cumulés jusqu’à fin 2010, le capital-risque et le capital développement ont

représenté 91% de l’activité des opérateurs du capital investissement3. Les SICAR bancaires

ont investi davantage en développement qu’en création. Elles ont représenté, en cumulé, 50%

de l’activité capital-risque et 81% de l’activité capital développement. En revanche, les

SICAR régionales ont focalisé leur investissement sur le capital-risque. Elles ont représenté

16% de l’activité capital-risque contre 4% seulement de l’activité capital développement. Les

FCPR ont représenté 5% de l’activité capital-risque et 8% de l’activité développement. Enfin,

les SICAR de groupe ont financé 29% des investissements en capital-risque et 7% en termes

de développement.

Le trait le plus marquant est que, contrairement aux attentes issues de la nature même des

financements en capital-risque, les SICAR et Fonds affichent une faible participation dans le

financement de l’innovation avec seulement 4% du total investi jusqu’à fin 2010. En plus, ces

investissements concernent principalement le secteur des Technologies de l’Information et de

la Communication (TIC). L’évolution des investissements en capital-risque dans l’innovation

montre une certaine volatilité entre 2008 et 2010 (Figure 3). En effet, les montants investis en

innovation ont plus que doublé entre 2008 et 2009 alors qu’ils ont baissé de 64% en 2010.

Figure 3. Investissement annuel (en m.D) en innovation entre 2008 et 2010

Source : ATIC

En 2010, 82% des montants investis en innovation sont réalisés par les SICAR bancaires alors

que 14% sont effectués par les SICAR de groupes et seulement 3% et 1% des montants

investis sont réalisés respectivement par les SICAR régionales et les Fonds. Le tableau 1

montre la répartition des investissements en innovation par opérateur (SICAR et Fonds) en

considérant à la fois le nombre de projets et les montants investis.

3 Le reste étant consacré au capital retournement et capital transmission (Levrage By Out).

7,4

15,8

5,7

2008 2009 2010

+113% -64%

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Tableau 1. Investissements SICAR et Fonds en innovation, cumul 2007-2010

Opérateur CUMUL 2007 2008 2009 2010 Total

Nombre

Total

Montant

(En m.D) Nombre Montant

(En m.D) Nombre

Montant

(En m.D) Nombre

Montant

(En m.D) Nombre

Montant

(En m.D)

SICAR

Régionales 6 408,31 2 86.5 0 0 2 190 10 684,81

SICAR

Bancaires 14,5 10 541 ,1 5 6 809,541 4,75 15 678,044 2,2 4 651,847 26,45 37 680,532

SICAR

Groupes 711 3 383 0 550 0 175 1 769 12 4 877

Fonds 0 0 0 0 0 0 1,33 73 1,33 73

TOTAL 31,5 14 332,41 7 7 446,0415 4,75 15 853,045 6,5333 5 683,847 50 43 315,342

Source : ATIC

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Les opérateurs du Capital Investissement ont financé 50 projets dans le domaine des TIC sur

la période cumul 2007-2010, soit 2,80% du total des projets pour un montant de 43 315 M.D,

soit 4% du total investi. Le financement de l’innovation a été effectué à hauteur de 92 % par

le secteur privé et 8% par le secteur public. Nous constatons que les SICAR bancaires

financent 52% des projets et 87% du total des montants investis en innovation. Les SICAR

régionales, quant à elles, financent 20% des projets et à peine 1,5% du total investissement.

Les SICAR de groupes contribuent au financement du capital investissement à hauteur de

11% pour 24% des projets. Enfin, la contribution des Fonds demeure faible, soit 0,5% du

montant investi en innovation pour 4% du nombre de projets.

Au final, nous pouvons constater très rapidement que l’offre de financements de capital-risque

est largement dominée par les SICAR bancaires. Ces mécanismes commencent à peine à

exister, en Tunisie, dans l’optique d’une politique volontariste de création d’entreprises

innovantes. Et pourtant, le portefeuille de leurs financements comprend à peine 4%

d’investissement en innovation. Il paraît nécessaire de poser les premiers jalons qui en

permettront un développement progressif.

III. 2. Les Fonds d’Amorçage et les Business Angels : état embryonnaire

Les Fonds d’Amorçage

Parmi les Fonds Communs de Placement à Risque analysés plus haut et censés participer aux

fonds propres des entreprises dans le cadre de projets innovants, deux fonds sont de types

fonds d’amorçage.

Au sens de la loi tunisienne, le fonds d’amorçage est donc un mécanisme de financement qui

intervient, en fonds propres, dans des entreprises innovantes en création et qui présentent un

fort potentiel de croissance avant la phase de démarrage effectif. En effet, le développement

de la recherche scientifique et technologique en Tunisie commence à donner naissance à des

idées de projets portées par des compétences tunisiennes, non aguerries aux parcours souvent

éreintants qui séparent l’idée de sa concrétisation en projet (APII, 2012). Les fonds

d’amorçage sont des fonds communs de placement en valeurs mobilières ayant pour objet le

renforcement des fonds propres des projets innovants avant la phase de démarrage effectif.

Ces fonds interviennent essentiellement pour aider les promoteurs à :

- exploiter les brevets d’invention,

- achever l’étude technique et économique du projet,

- développer le processus technologique du produit avant la phase de la

commercialisation,

- achever le schéma de financement.

Les fonds d’amorçage sont régis par le code des organismes de placement collectif (Loi n°

2005-58 du 18 juillet 2005). Ces fonds s’engagent à employer leurs actifs dans la participation

au capital des entreprises qui s’engagent à réaliser les projets prévus dans les titres donnant

accès à leurs capitaux, ainsi que sous forme d’avance en compte courant associés.

Les porteurs de parts de fonds d’amorçage ne peuvent demander le rachat de celles-ci avant

l’expiration de la période fixée dans le règlement intérieur du fonds et au terme de ce délai,

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les porteurs de parts peuvent exiger la liquidation du fonds si leurs demandes de rachat,

déposées auprès du gestionnaire du fonds, n’ont pas été satisfaites dans un délai d’une année à

compter de la date de dépôt (APII, 2012).

Le gestionnaire d’un fonds d’amorçage est soit une banque ou un intermédiaire en bourse

ayant la forme d’une société anonyme ou une société habilitée légalement à gérer des

portefeuilles en valeurs mobilières pour le compte des tiers. Deux fonds d’amorçage, l’un

public et un autre privé, ont marqué le lancement de ce mode de financement en Tunisie. Le

premier, géré par IKDAM, est formé par 4 SICAR régionales d’un capital de 1 Million

Dinars. Le second (Phenicia Seed Fund), crée en 2007 et géré par Alternative Capital

Partners, une joint venture entre des gestionnaires de fonds Tunisiens et Viveris Management

de France, est co-fondé par la BEI et CDC, d’un montant initial de 10 Millions de Dinars. Les

deux fonds ont pour vocation de soutenir les fonds propres des start-up dans leurs phases de

démarrage qui ne devrait pas dépasser les 2 années. Plus récemment, en mai 2012, le Conseil

du Marché Financier a accordé son visa au prospectus d’émission du Fonds d’amorçage

CAPITALease Seed Fund auquel est adossé l´incubateur WIKI START UP. L´objectif étant

de fournir un financement aux jeunes promoteurs innovateurs pour la finalisation de leurs

plans d´affaires, études de faisabilité et protection de leurs propriétés intellectuelles dans la

phase initiale du projet. De même, en février 2013, la société UNITED GULF FINANCIAL

SERVICES North Africa (UGFSna) et la BANQUE INTERNATIONALE ARABE de

TUNISIE (BIAT) ont obtenu l'agrément du Conseil du Marché Financier pour la création d'un

Fonds d’amorçage bénéficiant d’une procédure simplifiée, dénommé « Start up Factory Seed

Fund » d'un montant de 2 500 000 dinars divisé en 25 000 parts de 100 dinars chacune.

Ces instruments sont des Fonds Communs de Placement à Risque, à durée limitée, contraints

par la même loi des SICAR de ne pas être majoritaire dans le capital des sociétés investies, et

d’investir dans les 5 axes prévus par la loi des SICAR. Leur intervention est indispensable

pour la participation des fonds publics, tels que le FOPRODI et le RITI. Leurs approches

sectorielles, leurs conditions de participations, et leur suivi des projets investis diffèrent.

Les Business Angels

Les investisseurs providentiels (appelés aussi investisseurs particuliers), connus sous le nom

de business angels, sont des particuliers fortunés qui font des placements dans des entreprises

prometteuses. En plus de leur contribution aux fonds propres, ils apportent également leur

expérience dans le monde des affaires et leur réseau de contacts au profit de l'entrepreneur. Ils

fournissent la majorité du capital d'amorçage et de démarrage pour des projets

entrepreneuriaux de type High-tech. Les business angels représentent un sous-ensemble

distinct des investisseurs informels (UNECE, 2007) qui inclut la famille, les amis et parents

ainsi que d'autres sources de financement à un stade précoce. Ce réseau d’investisseurs

informels révèle de plus en plus un impact important en matière de financement en capital-

risque. Les business angels, qu’ils investissent seuls ou à plusieurs, ont pour vocation d’être

des investisseurs minoritaires et de le rester le plus longtemps possible.

Aux États‐Unis, les investisseurs particuliers financent 10 fois plus de sociétés que les

capitaux risques. En 2005, l’investissement informel s’élève à près de 1% du PIB au Etats-

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Unis, à plus de 2% du PIB en Allemagne et à près de 3,5% du PIB en Israël4. Jusqu’à la fin de

l’année 2012, la France compte 4100 business angels (regroupés autour de 82 réseaux) qui, en

2012, ont financés 352 projets (parmi les 1400 dossiers présentés) pour un montant total de 40

millions d’Euros.

En Tunisie, il n’existe pas de statistiques officielles sur l’activité des business angels.

Remarquons que selon une étude récente menée par l’OCDE, il n’existe que peu

d’informations sur les investisseurs providentiels dans les pays les moins avancés (OCDE,

2013). Selon une étude menée par la Commission Européenne dans le cadre du programme

Euromed pour l’innovation et la technologie (Medibtikar) durant la période 2006-2008, il a

été constaté que ce type d’investisseur privé n’existe pratiquement pas sous la forme

communément admise en Europe ou aux États‐Unis. En effet, les résultats révèlent que :

- Au Maghreb, ce type d’investisseur correspond à des hommes d’affaires fortunés et

discrets qui utilisent leurs amis et leurs relations familiales pour trouver les

promoteurs qu’ils soutiennent. Ils travaillent en général dans une logique analytique,

qui consiste à fournir des idées commerciales et des fonds aux entrepreneurs qu’ils

embauchent pour diriger des projets, contrairement au processus synthétique de

l’investisseur traditionnel dans lequel les promoteurs présentent leurs projets

commerciaux en vue d’un financement.

- Au pays du Machreq (en Syrie et en Jordanie, notamment), ce type d’individu

investisseur plus classique semble exister, du moins selon les aveux des associations

de jeunes entrepreneurs dont ces investisseurs particuliers semblent tirer leur flux

d’affaires.

- Par ailleurs, certains entrepreneurs parrainent également des projets dans la région

MEDA. Par exemple au travers de l’association Maroc Entreprendre5, dont l’objectif

est le développement économique du pays, contrairement aux motivations plus

complexes des investisseurs particuliers en matière de gestion patrimoniale.

En revanche, en 2010, il y a eu la création de la première association de business angels en

Tunisie, à savoir Carthage Business Angels dont les objectifs sont :

Faciliter l’identification de projets innovants ayant un potentiel de croissance

Mettre les membres et associés Business Angels en relation avec les porteurs de

projets.

Les accompagner dans :

- le processus d’investigation

- les décisions d’investissement dans les projets présentés

- l’accompagnement au cours des premières années de la vie des entreprises

financées

4 Source: Global Entrepreneurship Monitor (UNECE, 2007)

5 Un ensemble de 70 grands dirigeants de sociétés marocaines qui sélectionnent les projets devant être parrainés

par l’un d’entre eux et fournissent des garanties vis‐à‐vis des prêts souscrits par les promoteurs.

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Suite aux événements de Janvier 2011, l’association n’a pu démarrer ses activités qu’en Juin

2011 avec une conférence sur le « Rôle et Statut Fiscal du Business Angel en Tunisie ». En

une année, elle a accordé un financement à quatre Start-up innovantes pour un montant total

de 200 mDT. Le nombre d’investisseurs providentiels adhérant à cette association de business

angels en Tunisie a augmenté de 12 à 60 entre 2011 et 2013. Remarquons que le fonds

CAPITALease Seed fund a été lancé par les actionnaires de Wiki Start Up (l’un des

partenaires de CBA) et les membres de Carthage Business Angels afin de renforcer la chaîne

de financement des projets innovants dans les phases pré-amorçage et amorçage (early stage).

Au final, nous pouvons constater que le financement par capital-risque à travers les fonds

d’amorçage et les business angels demeure à un stade embryonnaire en Tunisie. Leurs

contributions à la chaîne de financement, quoique indispensable, demeure assez limitées.

Contrairement aux banques, aux SICAR et au Fond Commun de placement à Risque (où les

investisseurs sont des gestionnaires financiers), ce maillon de la chaîne de financement des

entreprises (où les investisseurs sont des entrepreneurs) permet : de financer l’entreprise dans

la phase la plus critique et la plus risquée ; de renforcer la crédibilité du projet vis-à-vis des

autres financeurs ; de mutualiser les risques d’investissement avec d’autres investisseurs ; de

donner accès à une expertise pour faciliter la décision d’investissements ; et d’assurer une

meilleure gouvernance de l’entreprise.

III. 3. Où en est la Tunisie par rapport aux pays de la région en matière de

financement du Early stage ?

Selon le rapport MedFunds élaboré par le réseau ANIMA en 2011, le capital‐investissement

(private equity) s’est beaucoup développé au Sud et à l’Est de la Méditerranée (MED6) depuis

les années 2000, en particulier dans les pays arabes, où il était très peu présent auparavant.

ANIMA a recensé plus de 500 fonds investissant dans les PME de la région MED, dont près

de 300 actifs début 2011. Les rives Sud et Est de la Méditerranée ont ainsi pu attirer près de

60 milliards de dollars depuis 1990 (montants levés, dont 89% depuis 2000) et financer par ce

biais près de 5 000 entreprises à hauteur de 26 milliards de dollars (montants effectivement

investis, dont 84% depuis 2000). Les statistiques par région ne sont disponibles que pour le

cumul jusqu’à 2008 (Tableau 2).

Jusqu’à la fin de l’année 2008, sur les 320 fonds d’investissement destinés à au moins un des

pays de la région MEDA identifiés par l’observatoire ANIMA des fonds d’investissement en

Méditerranée, 181 concernent des sociétés israéliennes. Par ailleurs, le montant levé par ces

fonds représente 54% du montant total levé par les fonds destinés aux pays de la région

MEDA. Dans la région du Maghreb, le Maroc accueille 6% des fonds en capital-

investissement, soit le double de la Tunisie (3%). En revanche, en termes de montants levés,

le Maroc concentre 3% des fonds alors que le Tunisie n’en accueille que 0,2%. De même, la

Turquie accueille 3% des fonds dont le capital levé représente 4%.

6 MED‐11 : les 11 pays de la région appelée aussi MEDA : Algérie, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Syrie, Tunisie, Palestine

et Turquie.

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Tableau 2. Fonds par région et pays d’accueil (enquête ANIMA)

Région hôte Pays hôtes Fonds (Nombre et %) Capital levé (montant Mln US $, et %)

Euro-MENA

Euromed 4 1% 463 1%

MEDA-11 14 4% 1 781 6%

MENA 44 14% 6 983 23%

MENA + émergents 4 1% 190 1%

Total Euro-MENA 66 21% 9 417 30%

Maghreb

Algérie 1 0,30% 2 0,01%

Alg./Mar./Tun. 16 5% 1 579 5%

Libye 2 1% 52 0,2%

Maroc 18 6% 846 3%

Tunisie 9 3% 64 0,2%

Total Maghreb 46 14% 2 543 8%

Machrek

Egypte 10 3% 611 2%

Jordanie 5 2% 432 1%

Liban 2 1% 36 0,10%

Syrie 1 0,30%

Total Machrek 18 6% 1 079 3%

Autres MEDA Israël 181 57% 16 740 54%

Turquie 9 3% 1 218 4%

Total autres MEDA 190 59% 17 958 58%

Total général 320 100% 30 997 100%

Source : ANIMA, MedFunds 2008

De même, les statistiques détaillées par pays et par stade ne sont disponibles qu’à partir de

l’enquête ANIMA de 2008. L’analyse de la stratégie d’investissement des fonds dans la

région MEDA montre que le capital-investissement reste toujours intéressé par les phases du

later stage (Tableau 3). Ce qui est la règle plutôt que l’exception. Israël est généralement

considéré comme le seul pays doté de fonds actifs aux stades précoces de la vie d’une

entreprise (R&D, amorçage et capital-risque). Dans la région du Maghreb, le Maroc est

relativement le mieux dotés en fonds d’amorçage et de capital-risque. La Tunisie se trouve au

second rang après le Maroc parmi les pays du Maghreb avec un écart réduit en termes de

nombre de fonds consacrés au Early stage (10 au Maroc contre 8 en Tunisie). En revanche,

les fonds en Jordanie ne consacrent aucun investissement pour le Early stage.

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Tableau 3. Fonds par stade d’investissement, pays et région (enquête ANIMA)7

Région hôte Pays hôtes R&D Amorçage Venture Capital

Dévelop. LBO

Euro-MENA

MENA 4 8 33 28

Pays Euromed 3 1

MEDA-11 1 2 7 5

MENA + émergents 3 4

Total Euro-MENA 5 10 46 38

Maghreb

Algérie 1 1

Libye 1 1 2 1

Maroc 3 7 14 9

Tunisie 1 7 7 5

Alg./Mar./Tun. 3 7 9

Total Maghreb 5 19 31 24

Machrek

Egypte 3 3 7 2

Jordanie 3 1

Liban 1 1

Total Machrek 3 4 11 3

Autres MEDA Israël 110 120 82 63 4

Turquie 1 4 8 3

Total autres MEDA 110 121 86 71 7

Fonds par stade/ Nombre total de Fonds 110/320 134/320 119/320 159/320 72/320

Source : ANIMA, MedFunds 2008

Par contre, le tableau 4 ci‐dessous indique les montants déjà levés auprès de leurs actionnaires

par tous les fonds d’investissement présents dans au moins un des pays de la région MEDA :

En 2008, il représente par conséquent les investissements potentiels dans les sociétés de la

région MEDA. Il est remarquable de constater la faible part de capitaux consacrés aux

investissements d’amorçage et de capital-risque. Sur un investissement potentiel de 13,04

milliards d’USD (hors Israël), les sociétés en phase initiale ont uniquement accès à 9,07 % :

soit 439 millions d’USD pour les investissements d’amorçage et 747 millions d’USD pour les

projets de capital-risque). En comparaison, le potentiel d’investissement ultérieur (capital-

croissance et capital-transmission dit LBO, Leverage Buy-Out) ne représente que 23 % des

fonds à investir en Israël. L’écart en termes de développement des participations privées entre

les deux sous‐régions de la région MEDA est favorable aux pays du Maghreb. Le

multiplicateur d’investissement potentiel dans les sociétés en phase initiale est de 8 entre les

pays du Machreq (22 millions d’USD dans les sociétés en phase initiale) et ceux du Maghreb

(175 millions d’USD). Contrairement aux statistiques en termes de nombre de fonds (tableau

3) qui laissent croire que l’écart est réduit entre la Tunisie et le Maroc, les statistiques en

termes de montants levés montrent un écart considérable entre les deux pays. Les montants

7 Chaque fois qu’un fonds affecte une partie de son capital à l’un des stades d’investissement considérés, il est

compté comme une unité. Ce qui explique pourquoi le total des fonds dépasse le total de référence 320.

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levés par les fonds au Maroc pour le Early stage (amorçage et capital-risque) sont 10 fois plus

importants que ceux levés en Tunisie.

Tableau 4. Montants levés par région et stade d’investissement (Mln US $, ANIMA)

Région Hôte Pays Hôte R&D Amorçage Venture Capital

Dévelop. LBO Total

Euro-MENA

MENA 305 515 3 322 2 865 7 007

Pays Euromed 234 30 264

MEDA-11 25 80 376 279 760

MENA + émergents

105 105 210

Total Euro-MENA 330 595 4 037 3 279 8 241

Maghreb

Algérie 1 1 2

Libye 3 6 36 12 57

Maroc 86 48 534 266 934

Tunisie 1 12 46 7 66

Alg./Mar./Tun. 18 627 733 1 378

Total Maghreb 90 85 1 244 1 018 2 437

Machrek

Egypte 9 9 453 54 525

Jordanie 290 181 471

Liban 4 14 18

Total Machrek 9 13 757 235 1 014

Autres MEDA Israël 4 238 4 680 4 804 4 082 157 17 961

Turquie 9 53 939 342 1 344

Total autres MEDA 4 238 4 689 4 857 5 021 499 19 305

Total 4 238 5 119 5 551 11 059 5 030 30 997

Source : ANIMA, MedFunds 2008

IV. Quels rôles devraient jouer les SICAR et le FCPR pour le

financement du Early Stage ?

Le capital-risque offre un potentiel de financement important et qui reste sous-utilisé en

Tunisie. Il aide les entreprises à répondre à leurs besoins en capitaux propres au cours de

divers moments critiques de leur vie (démarrage, développement, rachat) et peut apporter des

solutions appropriées aux préoccupations des entrepreneurs surtout les PME. Le règlement

semble être complet et a permis clairement l'émergence de différents types d'instruments de

financement, notamment les sociétés d'investissement (SICAR), les fonds communs de

placement dédiés aux activités de private equity (FCPR), et des fonds pour les start-up (Fonds

d'amorçage). Cependant, l'activité de capital-risque reste faible en Tunisie en raison d'un

certain nombre d'obstacles qui empêchent les investisseurs de jouer pleinement leur rôle dans

le financement du secteur privé. Le gouvernement n'a pas encore défini les mesures qu'il

entend adopter pour faciliter le développement du capital-risque en Tunisie, mais plusieurs

mesures possibles sont explorées (Banque Mondiale, RPD, 2013).

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La contribution des sociétés de capital-risque au financement de l'innovation est limitée. Les

mécanismes existants, en particulier les SICAR, financent principalement la création

d'entreprises et fonctionnent comme des banques classiques par la négociation les conditions

de financement semblables au crédit. Par exemple, la plupart des transactions prennent la

forme d'un "portage", dans lequel les SICAR récupèrent leurs fonds à un moment déterminé

avec un taux d'intérêt fixe. La prise de risque est minime dans le système SICAR. Les SICAR

ne représentent que 1,2 % du total des financements distribués par le secteur financier. Un

petit nombre d'entreprises bénéficient toutefois de fonds internationaux ou de lignes de crédit

dédiées à soutenir l'innovation (par exemple, la ligne de la Banque Européenne

d'Investissement).

Pour renforcer le système du capital-risque, le cadre juridique de la SICAR a été modifiée en

2009 afin d'encourager la prise de risque et l'investissement dans les régions en retard de

développement (loi de finances 2009). Cependant, selon la revue des politiques de

développement élaborée par la banque mondiale en 2010 (et portant réflexion sur les

mécanismes qui pourraient orienter la Tunisie vers une croissance tirée par l’innovation),

d'autres réformes sont nécessaires :

- Le cadre juridique pourrait être renforcé par la transformation des SICAR en

gestionnaires de fonds (Société de Gestion de Fonds), sous la supervision du

Conseil du Marché Financier (le régulateur du marché boursier). Cette réforme

doit être accompagnée par l'adoption de normes comptables internationales dans le

domaine du capital-risque.

- La création d'un fonds public ouvert à la participation du secteur privé pourrait être

envisagée pour des activités considérées comme à haut risque pour stimuler

l'émergence d'une forte valeur ajoutée ou des secteurs stratégiques pour lesquels la

Tunisie a fait preuve d'un réel potentiel.

- Le développement des activités de capital-risque se fait parallèlement avec le

développement du marché boursier afin de faciliter et diversifier les options de

sortie.

En 2011, une nouvelle réforme a été adoptée selon laquelle les sociétés doivent libérer 80%

au moins de leur capital et 80% au moins de chaque montant mis à leur disposition sous forme

de fonds à capital-risque (au lieu de 65% selon le régime précédent). De même, les SICAR

bénéficient d'un champ libre qui couvre toutes les sociétés établies en Tunisie et non cotées à

la bourse à l'exception de celles exerçant dans le secteur immobilier relatif à l'habitat (au lieu

d'un catalogue de sociétés selon le régime précédent). Aussi, les délais de leurs interventions

ont été prolongés d'une année supplémentaire. Ces réformes étant récentes, il est encore très

tôt pour observer statistiquement une plus grande prise de risque de la part des SICAR que ce

soit en termes de projets ou, mieux encore, en termes de montants investis. Pour Artus (2005)

si l’on veut financer l’innovation par le capital-risque, il faut réallouer l’épargne domestique

vers des investissements de moyenne durée et peu liquides. De même, il semblerait qu’une

véritable dynamisation et orientation de l’activité des SICAR vers le financement des projets

innovants nécessite la fixation d’un seuil minimal, dans leur portefeuille de financement,

consacré aux activités en Early stage (par exemple 5%).

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De même, outre les mécanismes incitatifs, le développement du capital-risque implique une

évolution des pratiques managériales vers une plus grande transparence et le respect des

critères d'évaluation reconnus de façon universelle, car l'un des grands enjeux est la « sortie »

des investisseurs. En particulier, la sortie en Bourse des capitaux risqueurs peut constituer un

facteur de dynamisation du marché du capital investissement. Une des limite constatée au

niveau réglementaire réside dans le fait que le législateur a focalisé tout son effort sur la

création d'entreprises et a marginalisé les stades ultérieurs de financement des entreprises qui

sont le développement, la transmission et le retournement (alors que ces lacunes ont été

largement dépassées dans des pays émergents, tel que le Maroc à titre d’exemple).

Par ailleurs, la Tunisie a poursuivi depuis au moins cinq décennies une politique de promotion

des exportations qui sont devenues un véritable moteur de croissance économique. Cette

politique a donné lieu à la mise en place de plusieurs fonds et mécanismes incitatifs visant à

accompagner l’entreprise tunisienne dans son effort à l’exportation. Cet effort devrait être

repensé et réhabilité en fonction des priorités nationales. Dans l’état actuel de l’économie

mondiale, les PME tunisiennes sont confrontées à deux difficultés majeures. L’innovation est

devenue synonyme de croissance et compétitivité saines, et la rapide internationalisation des

entreprises est liée à cet état de fait. Ainsi, les Fons Commun de Placement à Risque devraient

pouvoir financer et accompagner les étapes initiales des sociétés innovantes et potentiellement

exportatrices. Dans un bon nombre de situations, l’effort d’innovation pourrait correspondre à

un effort d’adoption et d’adaptation de la technologie au besoin du marché ciblé.

Les fonds d’investissement sont habituellement spécialisés dans des secteurs, des

technologies, des chaînes de valeur ajoutée ou des processus particuliers, et visent à

développer des synergies au sein des sociétés qui figurent dans leur portefeuille. Agissant

souvent en tant que parrain, notamment lors des phases d’amorçage et de développement

initial, un fonds d’investissement développe une expertise sur le marché où évolue sa société.

Un fonds qui investit dans différents pays peut ainsi développer une expertise internationale,

et le cas échéant constituer un groupe de sociétés travaillant au succès commun. Tel est

l’avantage d’intégrer des investisseurs internationaux aux étapes initiales de sociétés

innovantes.

Malgré la souplesse que présentent ces instruments en matière de présentation de garanties

réelles et de taux d’intérêt de remboursement, la complexité des procédures ainsi que la

lourdeur et la lenteur administrative apparaissent comme un frein à leur potentiel de

développement aussi bien au niveau de leur mise en place que de leur exécution. Alors que les

projets innovants nécessitent la flexibilité et la célérité dans leur réalisation surtout que toute

idée innovante peut être exploitée par un autre investisseur si elle n'est pas réalisée dans les

meilleurs délais. Une des questions qui se posent est de savoir dans quelles mesures

l’obligation de créer une société dans la phase d’amorçage et pré-amorçage pourrait être

supprimée comme c’est le cas en France par exemple. En effet, toute création nécessite une

série d'actes administratifs, juridiques et fiscaux. Naszalyi (2003) identifie de nombreuses

difficultés qui ralentissent, fragilisent ou empêchent la création d'une entreprise.

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Le rôle du secteur financier dans l'accompagnement des efforts d'innovation est crucial. Les

institutions de capital-risque et de fonds commun de placements à risque jouent un rôle clé en

offrant aux investisseurs et aux gestionnaires de firmes des capitaux pour financer le

développement de produits et procédés. En assurant une meilleure liquidité des transactions

de capital-risque, le marché boursier peut jouer également un rôle important.

V. Comment accélérer le développement des Business Angel ?

Les investisseurs particuliers, qui sont souvent des entrepreneurs ou des gens d'affaires

expérimentés, sont devenus de plus en plus reconnus dans le monde (OCDE, 2013) comme

une source importante de capitaux propres au démarrage et au pré-démarrage de la création de

l'entreprise (Harrison et Mason, 2010). Ils opèrent dans un secteur qui se situe entre les

fondateurs informels, les amis et le financement de la famille, et les investisseurs formels en

capital-risque (Freear et Wetzel, 1990; Sohl, 1999). L’absence d’un cadre légal pour les

business angels peut être considérée comme une barrière pour le développement de

l’investissement en Early stage. L’absence de motifs juridiques aux investissements

particuliers de ce type est à l’origine aussi d’une barrière d’ordre culturel (Euromed-

MedIbtika, 2008) : les investisseurs particuliers préfèrent parfois conserver un caractère

discret à cette partie «non productive» de leur activité. Il est rare de trouver des sociétés ayant

reçu l’appui d’investisseurs particuliers en dehors de leur cercle familial ou amical.

Et pourtant, les réseaux d’investisseurs providentiels constituent un moyen d’améliorer le

financement des start‐up innovantes, tout en respectant l’anonymat des investisseurs

particuliers. Ces derniers sont souvent considérés comme le maillon manquant dans la chaîne

de financement des entreprises innovantes. En effet, face à un jeune qui est porteur d’idée

mais qui manque de fonds propres, le système bancaire ne peut pas proposer de solution de

financement. Les SICAR et FCPR, censés fournir cet investissement en capital-risque, ne

jouent que très marginalement ce rôle. Le système de financement en Tunisie souffre du

manque d’un maillon dans la chaine de financement. Les business angels, par définition,

complète ce maillon, à savoir celui du segment le plus risqué de la chaîne de financement, à

savoir le financement du projet innovant en l’absence de fonds propres. Ils apportent

également le réseau et dans certains cas introduisent les clients. Selon Euromed-MedIbtikar

(2008), les réseaux d’investisseurs particuliers doivent se professionnaliser et faire acte de

présence dans les pays de la région MEDA.

Il est clair que la mise en réseau de plusieurs investisseurs particuliers pourrait répondre à

plusieurs motifs liés au degré de conviction et de motivation des investisseurs à l’égard de

cette nouvelle forme de financement par capital-risque :

- En s’associant, les investisseurs particuliers peuvent avoir accès à des projets plus

intéressants et plus innovants (un réseau est un pôle d’attraction régional pour les

entrepreneurs désireux d’obtenir des financements).

- Ils peuvent partager leurs compétences et leurs expériences avec d’autres

investisseurs particuliers.

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- Ils peuvent analyser et étudier ensemble les projets et ainsi réduire les risques

d’égarement ou d’erreur.

- Ils peuvent enfin investir avec d’autres investisseurs particuliers dans les mêmes

projets, et accéder ainsi à des projets plus importants, ou investir dans un plus

grand nombre de projets, d’où une diminution des risques individuels.

Cependant, ces incitations sont personnelles et sont tributaires aussi de la présence d’un

blocage culturel. Sur le plan juridique, un réseau de business angels, tel que Carthage

Business Angels en Tunisie, est une association permettant la mise en relation d'investisseurs

potentiels et d'entrepreneurs avec un objectif général de faire réaliser des investissements par

des business angels et d’être le point d’attraction des entrepreneurs à la recherche de

financement.

Les cadres législatif et fiscal (incitatif) devraient évoluer vers la mise en place d’un

environnement propice au développement de ce type de financement. A l’instar des Société

Anonyme Simplifié (SAS) qui existent aux Etats Unies ou en Angleterre, la loi doit changer

pour faciliter les formalités administratives et donner plus d’avantages fiscaux. C’est un

véritable challenge pour la Tunisie qui a besoin désormais d’un autre type de société qui soit

facilité sur le plan structurel et institutionnel. Par ailleurs, et afin de dynamiser l’offre de ce

type de capital, les investisseurs providentiels devraient pouvoir bénéficier, au moins, des

mêmes incitations fiscales que les investissements institutionnels. Actuellement, un effet

d’éviction par le placement boursier explique, entre autres, pourquoi le financement par

business angels est en-dessous de leurs potentialités.

Une meilleure définition du cadre juridique et fiscal des investissements des business angels

permettrait de promouvoir ce type de financement. En effet, il s'agit là d'un investissement

direct de personnes physiques à la différence des fonds d'investissement qui sont dotés de la

personnalité morale en tant qu'institutions. La contractualisation de la relation entre le jeune

promoteur et l’investisseur pourrait des fois poser des interrogations quand au partage du

risque entre les deux partenaires. D’une part, la participation des business angles se veut

«minoritaire» afin de préserver le leadership et la motivation chez l'entrepreneur. D’autre part,

le promoteur est à court de fonds propres. A ce niveau, se pose également la difficulté

d’évaluation du projet innovant et de son potentiel ainsi que de valorisation des

connaissances. Il pourrait même être question de la mise en place d’un système incitatif qui

pourrait stimuler davantage le développement d’un véritable marché de capitaux en Tunisie.

VI. Comment renforcer le rôle des parcs de compétitivité en Tunisie

? Vers un modèle mixte d’introduction du financement dans les

pôles de compétitivité

La stratégie industrielle de la Tunisie à l’horizon 2016 établit la clusterisation comme un de

ses facteurs clés de croissance, pour ancrer l’innovation et la valeur ajoutée dans les stratégies

de développement des secteurs. En vue d’améliorer la compétitivité de son économie par

l’innovation et favoriser la création d’une nouvelle génération d’entreprises à haute valeur

ajoutée, la Tunisie a fait du développement des pôles de compétitivité et des technopôles un

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axe stratégique de sa politique économique. Le programme des pôles de compétitivité a

démarré officiellement en 2006 dès lors que la progression vers une économie du savoir est

apparue dans le 10ème

Plan de développement (2002-2006) et qui est encore en phase de

recadrage et de montage. L’approche des pôles de compétitivité consiste à abriter sur un

espace géographique donné, des entreprises, des centres de formation, et des unités de

recherche publiques et privées, engagés dans une démarche partenariale destinée à dégager

des synergies autour d’un marché et un domaine technologique ou scientifique pour

promouvoir la compétitivité et l’innovation industrielle. Les secteurs phares de l’économie

sont ciblés par la stratégie de mise en œuvre des pôles de compétitivité. De même, outre

l’objectif d’une couverture de l’ensemble du territoire, le choix du lieu d’implantation de

chaque pôle est réalisé en fonction des spécificités économiques de chaque région du pays.

L’approche adoptée des pôles de compétitivité associant des établissements d’enseignement

supérieur (des écoles d’ingénieur, des universités, etc.), des établissements de recherche

scientifique (centres de recherche spécialisés), des institutions favorisant l’innovation et la

valorisation (les centres de ressources technologiques et les pépinières d’entreprises) et d’un

espace de production et de développement (zone industrielle) offre un cadre favorable au

développement des échanges et des interactions. Malgré le démarrage relativement difficile de

certains parcs technologiques (en dehors du parc El-Ghazala), en raison notamment de la

période transitoire par laquelle passe le pays depuis janvier 2011, la politique de clusterisation

semble indispensable pour aider les entreprises à innover, à produire des biens ayant un

contenu technologique plus important, à exporter des produits plus sophistiqués et à plus forte

valeur ajoutée ou pour offrir des services de pointe. L’évaluation de cette stratégie ainsi que

les résultats des parcs en termes d’innovation est encore prématurée d’autant plus que certains

parcs trouvent des difficultés à démarrer.

Les pépinières d’entreprises fournissent un cadre d’incubation des projets innovants à travers

la mise à la disposition des porteurs de projets un réseau de compétences multidisciplinaires.

En plus, le pôle offre un cadre capable d’accompagner le promoteur dans ces différentes

phases de recherche et de conception et aussi d’évaluer le projet innovant et ses potentialités

de réussite et de croissance. Cependant, le projet innovant en question risque de rester

longtemps stocké dans un incubateur en attente d’être adopté par un marché intérieur

hypothétique (UE, 2008). Il y a alors une séparation totale entre les fournisseurs visibles de

flux d’affaires (incubateurs, technopoles) et les investisseurs particuliers potentiels. En

Tunisie, les SICAR régionales siègent au conseil d’administration des «pépinières» créées par

le gouvernement. Par conséquent, ils participent à la sélection des projets à «faire croître»

dans la pépinière, sont sensibilisés à l’aide et au coaching fourni aux détenteurs de projets, et

des performances de projets, et sont ainsi plus à même d’investir dans certains d’entre eux.

Mais, malheureusement, et comme précisé plus haut, les SICAR prennent très peu de risque et

financent très peu de projets innovants.

Il n’est pas toujours facile pour les jeunes entrepreneurs d’identifier un partenaire commercial

(distributeur, bénéficiaire de licence, partenaire commercial pour une offre), technologique

(centre de R&D, université) ou industriel (co-ou sous‐traitant). D’où, le rôle important d’un

environnement favorable : programmes publics de développement international, réseaux

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internationaux d’incubateurs, technopoles ou universités, réseaux de transfert de technologie

et parrains internationaux, y compris les actionnaires financiers de l’entreprise. C‘est pour

cette raison qu’il semble important d’envisager une intégration entre l’incubateur (ou le lieu

d’incubation) et la source de financement. Les parcs technologiques jouent pleinement leur

rôle lorsqu’ils mettent en place les infrastructures nécessaires à l’installation de nouvelles

entreprises innovantes. Mais, le projet risque de finir dans la « vallée de la mort » s’il ne

trouve pas d’investisseur. Un modèle doit probablement être crée où les pôles technologiques

puissent disposer directement d’un fonds publics (ou un mélange de fonds publics et privés)

dédié au financement des étapes en amorçage et démarrage des projets innovants des jeunes

promoteurs. Ce fond pourrait être une partie issue de la Caisse des Dépôts et de Consignations

(CDC) dont la gestion et l’approbation sont confiées à une commission mixte. Cette

association entre lieu d’incubation et moyens de financement permet d’éviter de perdre des

opportunités de projets innovants en attente de financement. Cette solution garantit d’une part

la capacité d’évaluation du projet d’innovation de la part du pôle de compétitivité, et d’autre

part l’engagement du pôle dans le suivi et l’accompagnement des nouveaux projets innovants

allant de l’offre d’infrastructure à l’offre de financement.

Créer des liens stratégiques entre les incubateurs et les fonds de capital-risque devraient ainsi

être facilitées car les recherches montrent que les liens entre l'incubation d'entreprises et les

fonds de capital-risque ne sont souvent pas optimaux (Callegati et al., 2005). Le cas du

Bahrain fournit un exemple intéressant où la stratégie a eu un gain significatif (OCDE, 2006).

L’incubateur Bahrain Business Incubator Center (BBIC), financé par la Banque de

Développement du Bahrain et mis en œuvre par l'ONUDI, prévoit le renforcement des

capacités et de la formation pour les jeunes entrepreneurs qui cherchent à créer leur propre

entreprise tels que les conseils pour élaborer et évaluer la viabilité des projets et l’assistance

dans la mise en place des plans d'affaires. Basé sur la viabilité du plan d'affaires, il organise

également des liens avec la Banque de Développement de Bahrain. Le BBIC facilite la

formation des joint-ventures et/ou des partenariats et la mise en place de la technologie. Le

BBIC est détenue par le ministère des Finances, la Commission Pension Fund (PFC) et

l'Organisation générale de l'assurance sociale. Le modèle de Bahrain a fait ses preuves et

l'ONUDI / ARCEIT a essayé de reconduire ce même modèle d’intégration entre incubateur et

fonds de capita-risque dans d'autres endroits au Bahrain, ainsi que dans d’autres pays tels que

le Koweït, l'Arabie saoudite, la Syrie et le Liban.

La Tunisie a déjà réalisé un grand pas vers l’intégration des liens entre les pépinières

d’entreprises, les institutions de la recherche et les espaces productifs à travers la création et la

mise en place, voire même le démarrage, des pôles de compétitivité depuis plus d’une

décennie. Ces pôles ont pour principal objectif d’accélérer l’effort d’innovation des

entreprises afin d’opérer une transition progressive du tissu productif des activités à faible

valeur ajoutée vers des activités à plus fort contenu technologique. La Tunisie a également

investit dans la promotion de l'entrepreneuriat à travers les incubateurs d'entreprises. L’effort

qui semble désormais essentiel à accomplir consiste à faciliter les liens entre les incubateurs et

les sources de financement. La mise en place d’un fonds technologique dédié à cette fin

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permettrait d’accélérer sensiblement la promotion des projets innovants pour qu’ils se

transforment en PME innovantes en facilitant l’accès au financement par capital-risque.

Enfin, même si la Tunisie offre une panoplie de structures, de systèmes et d’organisations

d’aide à la création et au financement d’entreprises, les outils existants (fonds publics,

technopôles, pépinières d’entreprises, sources de financement, etc.) sont éparpillés. Les

promoteurs souffrent d’un manque d’informations au niveau des organismes et institutions

concernées pour aiguiller convenablement les demandeurs de fonds vers les bons relais. De

même, le porteur de projet souffre d’un manque de visibilité et de transparence car la

communication relative aux différents mécanismes est insuffisante.

VII. Conclusion

La compétitivité nationale, régionale et internationale d'une économie est de plus en plus

reliée à la présence d'un environnement favorable à l'innovation et la prise de risques.

L’innovation gagne en importance dans les agendas des gouvernements à travers le monde qui

apprécient de plus en plus la nécessité de développer les économies fondées sur le savoir

comme une condition préalable à la compétitivité et à la croissance. Compte tenu de cette

reconnaissance, il devrait être peu surprenant que la conception des politiques pour soutenir

l'innovation dans le secteur privé est devenue une question prioritaire pour la Tunisie. La

nature même de la phase initiale du processus d’innovation, le Early stage, caractérisée à la

fois par un niveau de risque élevé mais aussi par un potentiel de croissance important, fait que

les mécanismes de financement bancaires sont défaillants. Le recours au financement par

capital-risque est la seule voie à emprunter. En dépit de sa croissance récente, le problème

général de la disponibilité de données sur ces questions montre que « l'industrie » du capital-

risque dans la région du MENA et du Maghreb, et en Tunisie en particulier, est encore à un

stade précoce de développement.

Malgré les efforts réalisés par la Tunisie pour stimuler l’offre en capital-risque à travers la

création des SICAR et du FCPR, ces mécanismes ne semblent pas en mesure de promouvoir

le financement des phases de création et d’amorçage du projet innovant. Les SICAR, étant

dominantes sur le marché du capital-risque, prennent très peu de risque, fonctionnent comme

des banques et ne financent par conséquent quasiment pas le Early stage de l’innovation. La

contribution du FCPR, quant à lui, demeure réduite par rapport aux attentes et aux nouvelles

orientations adoptées par le pays. Des suggestions quant à la révision de leur rôle ont été

formulées. D’une part, la transformation des SICAR en gestionnaires de fonds tout en

adoptant les normes comptables internationales dans le domaine du capital risque pourrait

constituer une bonne issue pour dynamiser l’action des SICAR en matière de financement du

Early stage. De même, la création d'un fonds public ouvert à la participation du secteur privé

pourrait être envisagée pour des activités considérées comme à haut risque pour stimuler

l'émergence d'une forte valeur ajoutée. D’autre part, l’élargissement du champ de financement

du FCPR à l’étranger pourrait ouvrir de nouvelles opportunités surtout que la Tunisie est

amenée à réviser sa politique de promotion des exportations afin que ces dernières puissent

incorporer un contenu technologique plus important.

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Par ailleurs, le financement du Early stage à travers les business angels et les fonds

d’amorçage, quoique commençant à se développer, n’est qu’à son état embryonnaire. Une

politique publique volontariste envers ces nouveaux modes de financement à travers

l’élaboration d’un cadre législatif et fiscal stimulant pourrait contribuer sensiblement au

financement des phases de création et de démarrage du projet innovant. Cependant, la

contribution la plus significative qui pourrait déclencher un véritable saut dans le

développement du financement du Early stage renvoi à la création de liens stratégiques entre

les incubateurs (les pépinières d’entreprises et technopôles) et les sources de financement. Le

lancement des pôles de compétitivité en Tunisie offre un excellent cadre pour développer ces

relations stratégiques à travers le déblocage d’un fond dédié au financement du Early stage de

l’innovation. Bien qu'il n'y ait pas de manque d'idées d'affaires intéressantes en Tunisie, leur

formalisation et concrétisation représente un défi. Les pépinières d'entreprises et les pôles

technologiques offrent un cadre approprié pour aider les entrepreneurs à concrétiser leurs

idées et augmenter le niveau d'innovation brevetable. Renforcer ce cadre par la disponibilité

des sources de financement ne peut qu’améliorer à la fois la dynamique des pôles et celles des

modes de financement en gestion mixte public-privé.

Enfin, indépendamment des mesures incitatives pour stimuler le développement de l'industrie

du capital-risque, des progrès significatifs ne sont possibles que dans un environnement avec

un taux élevé d'innovation et un cadre qui facilite la transformation des idées en plans

d'affaires concrètes. Même si un grand réservoir de chercheurs est un atout pour n'importe

quel pays, c'est la qualité des chercheurs et leur utilisation efficace dans le système productif

(y compris le secteur privé) qui est déterminant. Malheureusement, les chercheurs en Tunisie

semblent largement confinés à la sphère publique et ont peu de liens avec le secteur productif.

En termes de qualité de l'enseignement des sciences et de la technologie, il semble urgent de

devoir l'aligner sur les besoins des secteurs émergents et stratégiques. Par exemple, la

nouvelle stratégie industrielle de la Tunisie appelle à la promotion des secteurs tels que

l'électronique, l'aéronautique et les plastiques techniques. Le système éducatif doit s'adapter et

fournir des ingénieurs et des techniciens dans ces nouveaux domaines.

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