les 20 ans de l’h.a.p.a. - hebergement-urgence-apt.com · souvenir du froid et du mistral sur mes...

32
Les 20 ans de l’H.A.P.A.

Upload: vokien

Post on 12-Sep-2018

222 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Les 20 ans de l’H.A.P.A.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!1!

!! !

Les 20 ans de l'H.A.P.A. Un mot d'ordre, "Je dis, je fais !"

Lorsque François Gallegos prend le chemin de la salle paroissiale d'Apt, ce soir de décembre 1994, il ne sait pas combien de personnes auront entendu son appel.

Quelques jours auparavant, à Apt, un homme, sans abri, est mort de froid devant la Cathédrale.

En tant que citoyen, François Gallegos, attiré depuis l'enfance par les SDF et pour qui la fraternité et l'action sont des valeurs fondamentales (voir ci-contre), ne peut rester inactif face à un tel drame. Aidé d'une de ses filles, il fabrique, avec les moyens du bord, des tracts invitant les aptésiens à créer une association pour accueillir les SDF.

François Gallegos et le Père Carbonneau

Ils les distribuent le samedi au marché d'Apt. Il passe, en outre, quelques coups de téléphone à des personnes de son entourage qu'il sait capables de passer à l'action. Celles-ci, à leur tour, contactent leurs proches. Il appelle le Père Carbonneau, qui prête la salle paroissiale pour la réunion. Et le projet est lancé !

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

2

« Ça remonte à l'enfance. Mon rêve, c'était d'être SDF ! On habitait Avignon, j'étais louveteau et on était habillé en culotte courte. J'ai le souvenir du froid et du mistral sur mes jambes nues. Et quand on passait sous le pont de chemin de fer, il y avait régulièrement des SDF qui dormaient là, dans des cartons. Et je me disais "ce que ça doit être bien d'être là, bien au chaud sous des cartons" !

Et puis, ça remonte aussi à ma grand-mère. Ma grand-mère a été une des premières licenciées en philosophie à Aix, elle était née en 1892 et avait été l'élève de Blondel. Elle m'a appris que pour qu'une idée soit vivante il faut qu'elle passe par les actes. Pendant la guerre, avec son mari, ils ont fait un peu de résistance. Lui était gestionnaire à l'hôpital, et il faisait en sorte que les résistants blessés partent à la barbe des allemands. En plus, ils hébergeaient des cousins juifs. A la libération, il y a eu des pendus et des femmes tondues à Aix. Ma grand-mère en a été révoltée. Quand elle a vu ça, elle a caché des amies, une mère et une fille, qui aimaient un peu trop les allemands...

Cela m'a toujours marqué, ce sens de la fraternité et cette façon de mettre ses idées en actes, au-delà des idéologies.

Et puis, pendant mes études j'ai été soutenu par des gens modestes. J'ai vécu et travaillé en Algérie, quand je suis rentré, j'ai continué à m'occuper des SDF, et de ce qu'on appelait alors le tiers-monde. »

Alors quand le gars est mort, je me suis dit "je dis, je fais" !

François Gallegos (Entretien)

Quand il entre, il découvre une salle pleine ! Ils sont une cinquantaine, « des gens de tous bords, qui avaient le sens de l'action, voulaient faire », pour que plus jamais un pareil drame ne se produise. Immédiatement, il se dit « C'est jouable » !

Ce soir-là, après un tour de table de présentation, ils se posent une unique question : doivent-ils créer une association pour réaliser leur projet d'accueil ?

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!3!

!! !

Ils se sépareront sans trancher. Ils choisissent de se donner un temps de réflexion, chacun de son côté.

Un mois plus tard, ils se retrouvent. Ils sont unanimes, il faut créer une association !

Un noyau actif d'une douzaine de personnes se constitue, préfiguration du futur conseil d'administration de l'association. Outre François Gallegos, il y a Robert Bernhart, André Bourgue, Marie-Agnès Bourin, Marie-Thérèse Bouvier, Thierry Carrelet, Paul Fullana, Véronique Giorgi, Joëlle Goll, Jean-François Sacile, Jean-Jacques Saïs, Joseph Thiollier, Albert Tregon. Ils font plus ample connaissance. Ils sont militaires, menuisier, chirurgien, assistante sociale, fonctionnaire des services fiscaux... Ils apprendront dans l'action à se connaître et à travailler ensemble.

Ils n'ont rien, pas un sou, pas de locaux, pas de partenaire, rien que leur énergie et leur détermination pour répondre à toutes les questions qui se posent déjà : quel public accueillir ? Combien ? Où ? Quand ? Faut-il du personnel ? Qui ? Pour quoi faire ? Les financements : combien ça coûte ? Qui peut financer ? Comment les mobiliser ? Comment se faire connaître ?

Et, malgré tout, les choses vont aller vite, très vite !

Désormais ils se réunissent une fois par mois, mais entre chaque réunion ils ne chôment pas. Ils prennent des contacts multiples. C'est à la porte des élus d'Apt que François Gallegos frappera en premier lieu.

« Ils ont été... prudents ! L'adjointe aux Affaires Sociales nous a dit - Si vous faites, on suivra, mais commencez par faire - alors que j'aurais voulu qu'ils me donnent quelque chose pour démarrer. Mais finalement, elle a eu raison, ça nous a motivé !".

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

4

Ils rencontrent les organismes caritatifs locaux, envoient des courriers aux associations, à l'administration afin de solliciter leur aide sous toutes les formes, contactent une dizaine de municipalités du pays d'Apt, activent leurs réseaux personnels.....

Le projet prend rapidement forme

En février 1995, le futur conseil d'administration de l'association est constitué.

En mars 1995, l'association Hébergement, Accueil en Pays d'Apt (H.A.P.A.) est officiellement créée, ses statuts sont déposés à la sous-préfecture. L'association compte soixante adhérents et dispose de six mille Francs environ, provenant de dons et des cotisations de ses membres.

Une première question trouve réponse, celle des locaux d'accueil. L'association pensait acheter des mobil-homes. Mais les réseaux personnels fonctionnent et on apprend que l'Union départementale des associations familiales (UDAF) de Vaucluse possède des structures Algéco, entreposés dans la cour du collège de Bédarrides. Ils sont en très bon état, ils ont servi en 1992 lors des inondations de Vaison-la-Romaine, après avoir accueilli les journalistes pendant les Jeux Olympiques d'Albertville. L'UDAF est disposée à les prêter à l'H.A.P.A.

C'est une aubaine, certes, mais ce n'est pas tout, il faut encore les acheminer jusqu'à Apt ! Et à moindre frais ! Parmi les membres du conseil d'administration il y a des militaires. Ils en parlent au Colonel du 1er GMS (Groupement des missiles stratégiques) qui offre les services de l'armée pour le transport des Algéco de Bédarrides à Apt. Une entreprise de BTP locale (Ets Rey) apportera également son concours.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!5!

!! !

Entre-temps il a fallu rechercher un terrain. Contact est pris avec la SNCF pour disposer du terrain jouxtant l'ancienne gare d'Apt, à l'entrée de la ville. Là, la réponse est moins généreuse qu'à l'armée ! Il faudra débourser 500 Francs par mois pour pouvoir entreposer les Algéco sur ces 150 m2, qui ne sont alimentés ni en eau ni en électricité.

Le terrain de la Gare d’Apt

Voyant que l'association agit, effectivement, la Municipalité d'Apt tient son engagement et prend en charge le raccordement aux réseaux.

Mais pour pouvoir commencer à accueillir des personnes, encore faut-il trouver la façon de les nourrir, d'équiper les structures et de garder les lieux.

Grâce au réseau professionnel d'un des membres du conseil d'administration, un accord est passé avec l'hôpital d'Apt qui fournira gracieusement les repas du soir, que les bénévoles iront chercher chaque jour, à tour de rôle, avec leurs propres véhicules.

Le mobilier, l'équipement ménager et des vêtements sont récupérés ici et là, gratuitement. La Caisse d'Epargne donne du petit matériel de bureau.

Reste, enfin, le gardiennage des lieux à assurer. L'association n'a pas les moyens de rémunérer un gardien, mais en contrepartie de

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

6

l'astreinte, elle peut offrir l'hébergement dans une des structures et le couvert. Un couple accepte le « marché », heureux de trouver un logement.

La communication, elle aussi, est menée tambour battant : contact avec les communes alentours, courriers et rencontres avec les associations caritatives, articles de presse, présence au Salon des associations du pays d'Apt, le 16 septembre 1995. Très vite l'H.A.P.A. est reconnue comme association caritative.

Le 13 novembre 1995, le centre d'accueil ouvre officiellement. Le 26 novembre, les premiers hébergés sont accueillis, soit moins d'un an après l'appel de François Gallegos.

« 1995 ! Une année belle mais difficile pour tous les bénévoles ô combien actifs mais décidés, car pleinement convaincus. Il y avait François, bien sûr, le "boss", mais aussi Paul, Joseph, Marie-Agnès, Thierry, Joëlle, Jean-Jacques, Michel et Robert et bien d'autres......

Après notre assemblée générale H.A.P.A. du 3 novembre, bel apport financier du "Lions club" le 8 de ce mois, avant le complément justifié mais indispensable de la DDASS d'Avignon (Direction Départementale de l’Action Sociale et Sanitaire), confirmé le 14 décembre 1995.

Le démarrage de l'accueil en bungalows (Centre d'accueil d'Apt), comprenant deux permanents responsables de nuit, s'est effectué le 13 novembre, les deux premiers hébergés étant accueillis le 26 du même mois.

Victoire assurée et pérenne.... Beaucoup de mairies des alentours de la ville-centre (Apt) ont été contactées entre juillet et octobre 1995, les maires ou premiers adjoints nous ayant accueillis favorablement et encourageant la démarche de notre équipe.

N'oublions pas la SNCF d'alors (terrains à disposition) et bien sûr, nos militaires du plateau d'Albion (grues, matériel, conseils), grâce à Jean-François.

Et, pour bien attaquer l'année 1996, une soirée spectacle donnée

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!7!

!! !

gratuitement le 27 janvier par Didier Gustin !

Beaucoup d'émotion quand j'y repense et remerciements renouvelés à toutes et à tous de l'époque et bien entendu aux actuels bénévoles, connus et inconnus mais irremplaçables. »

Et comme l'a écrit Voltaire "Puissent les hommes se souvenir qu'ils sont frères !".

Robert Bernhart (témoignage écrit)

Le centre d'accueil est ouvert

Le centre est ouvert pendant la période hivernale, du 15 novembre au 30 avril, de 19h à 8h. Trois bungalows, équipés chacun d'une salle de bain, sont destinés à l'hébergement, le quatrième est réservé aux espaces communs. Six personnes peuvent être accueillies.

Tous les soirs, deux bénévoles de l'association viennent, à tour de rôle, de 19h à 22h dîner et passer la soirée avec les hébergés.

C'est une façon de rompre leur isolement, ce peut être, aussi, l'occasion d'aider ceux qui le souhaitent à faire des démarches.

Le centre est ouvert aux personnes de tous âges sans ressources ou Rmistes, pour cinq nuits maximum.

Une contribution financière de 20 Francs par nuit leur est demandée. L'alcoolisme et les addictions ne sont pas tolérés.

Il apparaît que les hébergés sont majoritairement des hommes, et parmi eux beaucoup sont des routards, de passage à Apt.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

8

« On a tourné comme ça, c'était à la bonne franquette, c'était adapté à nos moyens. On ne pouvait qu'accueillir, on ne voulait pas s'occuper d'insertion. Si besoin, pour cela, on faisait appel aux structures compétentes, il fallait un pro pour ça, nous on n'avait pas les moyens... En même temps, sur le plan de l'esprit, on estimait que l'insertion ne devait pas être imposée, et les gens ne manifestaient pas le souhait de s'insérer ! Leur dignité c'était leur liberté, c'était tout ce qui leur restait, alors, il ne fallait pas leur imposer... »

François Gallegos (Entretien)

Très vite les questions d'argent reprennent le dessus. Même si l'H.A.P.A. a bénéficié de nombreux dons et soutiens en nature, même si, comme le dit son Président d'alors « c'était à la bonne franquette », il faut des moyens financiers pour assurer l'accueil. Les six mille Francs du départ ont permis de payer les dépenses liées au démarrage du projet, la garantie et les loyers à la SNCF. Pour assurer trois mois de fonctionnement il faut trente cinq mille Francs. Les contributions des hébergés n'y suffisent pas, bien évidemment, et il n'est pas question de fermer le centre faute de moyens.

Deux possibilités existent pour obtenir des ressources : organiser des événements lucratifs et solliciter des subventions auprès des pouvoirs publics. Soucieuse, dès l'origine, de ne pas être « tenue » par les subventions, et ceux qui les distribuent, l'association aura tout de suite recours aux deux.

De ce point de vue, la prudence de la Mairie d'Apt, au moment de la création de l’H.A.P.A., aura eu un effet immédiat et durable sur la ligne de conduite qui sera désormais la sienne en matière de financement.

« On ne voulait pas qu'on nous dise "Vous n'attendez que des subventions". On cherchait aussi à rapporter de l'argent ».

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!9!

!! !

Plus tard, pourtant, en contrepartie de subventions, il arrivera que l'association doive faire évoluer ses pratiques. Mais, toujours, elle le fera en s'appliquant à conserver l'esprit insufflé par ses fondateurs.

Ainsi, en janvier 1996, l'humoriste Didier Gustin, que connaît personnellement un membre du conseil d'administration, offre un spectacle au profit de l'H.A.P.A., dans la salle des fêtes d'Apt. Il fait salle comble. La recette est très bonne.

Didier Gustin

Au cours des années suivantes l'association tentera, avec parfois un bonheur mitigé, différents types de manifestations pour se procurer de l'argent : lotos, spectacles, dîners dansants, vide-greniers...

Dans le même temps, des subventions sont sollicitées auprès des services de l'Etat (Direction départementale de l'action sanitaire et sociale), de la municipalité, du Lions club.

Et c'est ainsi que les hivers 1995-1996 et 1996-1997 voient l'H.A.P.A. « prendre de la bouteille » et tenir une place reconnue parmi les associations caritatives locales. Elle peut même devenir force de proposition auprès de ces dernières, et ne s'en prive pas !

De l'accueil de nuit à l'accueil de jour, L'OASIS

L'accueil de nuit, c'est une impérieuse nécessité, il est en place, mais quid de l'accueil de jour ?

En 1997, les associations humanitaires locales (Les Restos du cœur, le Secours Catholique, la Croix-Rouge et l'H.A.P.A.), ont chacune plus ou moins l'idée d'ouvrir un lieu d'accueil de jour pour leurs publics et plus généralement pour les sans-abris.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

10

Ce sont deux membres de l'H.A.P.A., Marie-Thérèse Bouvier et André Bourgues, également responsables du Secours Catholique, qui, en février 1997, prennent l'initiative de réunir ces quatre associations.

Ils ont un triple objectif : mieux se connaître, mettre en évidence leurs spécificités et leurs complémentarités, et développer des actions communes.

La première réalisation sera simple, du moins en théorie : confectionner une affiche unique indiquant le but, les coordonnées, les lieux d'accueil et les heures d'ouverture de chacune des associations. Et pourtant, plus de quinze ans après, Marie-Thérèse Bouvier s'en souvient encore, « C'était difficile de travailler avec autant d'associations... Il nous a fallu trois mois pour faire une affiche commune ! ».

Le collectif ainsi constitué ne s'arrête pas là pour autant. Il décide de créer un accueil de jour où les sans domicile fixe, les personnes seules, isolées, celles qui fréquentent l'accueil de nuit ou ont besoin de discuter autour d'une tasse de café, peuvent venir se réchauffer.

Contact est pris avec le C.C.A.S. (Centre Communal d'Action Sociale) d'Apt, qui se joint au collectif. Les Restos du Cœur mettent à disposition une partie de leurs locaux. La municipalité prend en charge les travaux de mise aux normes et d'aménagement (WC, chauffe-eau, réfection du sol...)

Le 11 décembre 1997 l'OASIS ouvre officiellement ses portes.

Il est ouvert durant la période hivernale, du lundi au vendredi, le matin de 8h30 à 11h30 et éventuellement, par grands froids, à l'heure du déjeuner. Les Restos du Cœur assurent deux permanences par semaine, les trois autres associations chacune une.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!11!

!! !

Fort du succès de cette première réalisation, le Collectif décide de se lancer dans l'organisation d'une fête pour Noël 1997 qui se déroulera dans les locaux de la MJC d'Apt, avec une soixantaine de personnes.

Pour le Noël de 1999, une centaine de personnes se retrouvera à la Salle des Fêtes d'Apt. En revanche la fête de Noël 2000 ne comptera qu'une dizaine d'inscriptions. Le Collectif décidera alors d'annuler la fête de fin d’année, sans parvenir à analyser ni comprendre réellement les raisons de

ce retournement. Il ne pourra que constater une singulière coïncidence avec l'instauration de la prime de Noël.

L'OASIS, lui, fonctionnera bien jusqu'en 2000. Puis, il survivra cahin-caha, avec des défections de la part de membres du Collectif, jusqu'en 2005, date à laquelle l'H.A.P.A., restée quasiment seule, rapatriera l'activité dans ses nouveaux locaux.

L'H.A.P.A. déménage

En 1998 l'H.A.P.A. connaît plusieurs événements.

D'une part, son président, François Gallegos, ne souhaite pas se représenter à la présidence.

« Peu à peu, pour obtenir des subventions il a fallu passer à une autre vitesse, l'insertion, et à ce moment-là je suis passé à autre chose. Et puis cela prenait une telle dimension que je ne pouvais pas continuer. J'ai donné l'impulsion... et une fois que la plante a été bien arrosée, il n'y avait pas de raison que cela s'arrête. J'avais confiance dans les gens qui m'entouraient. Je crois à la force de l'esprit ! »

François Gallegos (Entretien)

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

12

D'autre part, après trois hivers d'accueil, l'hébergement dans les Algeco apparaît quand même bien précaire, et en outre « Les cinq cent Francs mensuels à la SNCF nous faisaient mal au cœur ! »

C'est Yvonne Wrona qui lui succède en juin 1998.

Grâce à ses relations personnelles, elle trouve un terrain de 800 m2 dans la zone industrielle d'Apt sur lequel est implantée une petite maison.

Elle propose que l'association en fasse l'acquisition. Un emprunt est contracté et l'ensemble est acquis en octobre 1998.

La petite maison

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!13!

!! !

Il faut à nouveau transporter les bungalows ! Entre-temps, l'armée a quitté le plateau d'Albion. C'est l'entreprise REY qui s'en chargera, mais cette fois il faudra quand même payer.

L’installation des bungalows sur le nouveau terrain

Ce déménagement s'accompagne d'une augmentation de la capacité d'accueil : d'une part, le gardien est logé dans la maison, libérant ainsi une structure et, d'autre part en 1999, un mobil-home est donné à l'association. Il est équipé d'une cuisine, de sanitaires et de deux chambres. Douze personnes peuvent désormais être accueillies.

À tour de rôle, les bénévoles continuent de venir de 19h à 22h pour passer la soirée avec les hébergés. Ceux-ci arrivent toujours dans un état de grand dénuement. On sent toutefois, au fil des années, une évolution du public accueilli : de moins en moins de routards, en majorité des personnes exclues, en situation de grande précarité (surendettement, sans-papiers...) qui, de ce fait, restent de plus en plus longtemps, avec des problèmes d'éthylisme et d'addiction plus fréquents.

Il faut adapter les conditions d'accueil et « l'accompagnement » assuré par les bénévoles, à cette évolution. Cette adaptation sera, en quelque sorte, forcée par les faits. En effet, les bungalows vieillissent, ils commencent à prendre l'eau. Il faut les remplacer ou bien fermer !

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

14

Mais, de cela il ne peut être question ! Il est donc nécessaire de construire de nouveaux locaux et obtenir des financements ! De fait, ceux-ci s'accompagneront, de la part des financeurs, d'exigences relatives à l'accompagnement des personnes hébergées et à sa professionnalisation.

Nous sommes fin 2004, Yvonne Wrona arrive au terme de son deuxième mandat, les statuts de l'association ne l'autorisent pas à en briguer un troisième dans la foulée.

C’est donc le nouveau Président, Paul Fullana, qui s'attelle à ce chantier entre 2005 et 2011.

Paul Fullana

L'H.A.P.A. s'installe durablement

Dès 2007, l’association commence par faire des travaux dans la petite maison occupée par le gardien.

La cuisine du logement du gardien La cuisine du Centre

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!15!

!! !

Grâce aux dons de bricolage de Jacques Coquelet, membre de l’association, l'espace intérieur est réorganisé de façon à en libérer une partie pour y aménager une salle à manger commune, l'autre partie est réservée au logement du gardien ; Les murs sont isolés, des volets roulants sont installés, la plomberie et l’électricité sont mis aux normes.

L'H.A.P.A. autofinance l'ensemble de ces travaux grâce aux recettes des diverses manifestations qu'elle organise.

« C'était extraordinaire ! Tout le monde dînait dans une salle-à-manger, plus dans un Algéco ! ».

La salle à manger

Puis, le Président en tête, tout le monde se mobilise pour trouver des solutions aux multiples problèmes que pose la construction d'un hébergement durable.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

16

Le premier d'entre eux n'est pas ordinaire !

L'H.A.P.A. est installée dans une zone industrielle où la construction de logements n'est pas autorisée. Néanmoins, il est possible de réaliser « un hôtel à but social ». Ce faisant, elle est assimilée à une entreprise, dispose d'un code APE et à ce titre, peut être autorisée à construire des locaux à usage d'hébergement.

Encore faut-il savoir quel type de construction adopter ! L’équipe qui porte le projet est séduite et inspirée par le bâtiment à ossature bois de l’Armée du Salut de Marseille. Elle choisit Yann David, Architecte local, pour la conception du projet.

Plan de masse du projet

Reste le plus déterminant et en même temps le plus nouveau pour l'association : construire un budget prévisionnel et aller défendre son projet auprès de financeurs potentiels publics et privés qui seront sollicités.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!17!

!! !

Si l'exercice est nouveau pour l'association, il ne l'est pas à titre personnel, pour certains de ses administrateurs, en particulier pour Jacques Chanet dont les compétences et les réseaux seront déterminants dans cette phase.

Parmi les premiers financeurs, se trouve l'Etat à travers la Direction départementale de la cohésion sociale (D.D.C.S.). En quelque sorte, son soutien financier officialise la reconnaissance de l'H.A.P.A. comme structure d'hébergement d'urgence. Ceci a une double conséquence : d'un côté, l’accès de l'H.A.P.A. aux aides auxquelles ce type de structure peut prétendre, d'un autre côté, le respect des contraintes administratives qui lui est imposée.

Désormais, l'association devra percevoir les aides au logement au prorata des nuitées. Par ailleurs, l'hébergement d'urgence n'étant prévu que durant la période hivernale, elle devra demander une autorisation spéciale à la D.D.C.S. pour pouvoir accueillir l'été des saisonniers, afin de rentabiliser son investissement. Enfin, il lui est demandé de « se professionnaliser ». Le Conseil Régional et le Conseil Général participent également au financement du projet.

Financeurs publics

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

18

Les financements privés prennent plusieurs formes avec des dons de particuliers, des subventions de la part de fondations, du mécénat d'entreprise pour des matériaux de construction, du matériel de signalisation offert notamment par l’entreprise locale Carol Pub ou des prestations de services, telle la maîtrise d’œuvre assurée par l’Atelier Florence Derycke.

Enfin, pour boucler le plan de financement, un prêt est sollicité auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations. Il est obtenu après quelques péripéties et grâce à la garantie conjointe de la ville d'Apt et du Conseil général.

Les financeurs privés

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!19!

!! !

Une fois les 400 000 Euros nécessaires au projet assurés, les travaux commencent au début de l'été 2010 et s’achèvent, sans encombre, le 16 novembre 2010 pour l’ouverture des logements à la saison hivernale.

Les logements

A nouveaux locaux, nouvelle organisation et nouvelle vie « commune » !

Les huit studios à ossature bois, dont un accessible aux handicapés, ont une surface de 20 m² chacun avec salle d’eau et sont tous équipés d'une plaque de cuisson et d'un frigo non utilisés l’hiver puisque les repas continuent à être pris en commun, le soir, dans la grande cuisine.

L’un des studios

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

20

L’ensemble est complété en 2011 par un bâtiment en bois de 60 m² offert par le constructeur des logements. Il devient un espace de vie devenu indispensable pour offrir un abri convivial aux hébergés en période de grands froids. Une chambre supplémentaire y est aussi créée.

L’espace de vie Le Centre

Le 12 Novembre 2011, en présence des membres de l’association et de tous les partenaires, l’H.A.P.A. inaugure officiellement le centre dénommé à juste titre « l’Escale » pouvant accueillir quinze personnes pour une durée maximum de six mois.

L’Escale

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!21!

!! !

À l’occasion de l’inauguration, une identité visuelle est créée : une petite maison souriante pour le logo, un coloris violet pour la sérénité et l’amitié, un coloris vert pour l’espérance et l’apaisement.

L’ensemble pour « reconnaître » l’H.A.P.A. au premier coup d’œil. Parallèlement, la communication se développe sur différents supports, panneaux, véhicule, presse, brochures et un site web.

Le panneau d’accueil Le véhicule de l’H.A.P.A. acquis grâce au Rotary Club Apt-Cavaillon en Luberon

En 2012, pour être en conformité avec l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite, un espace sanitaire avec douche vient s’inscrire dans le prolongement des logements.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

22

En 2013, la législation évolue imposant aux centres d'hébergement d'urgence d'accueillir des sans abri toute l'année, moyennant un petit bonus financier supplémentaire.

Les Algéco, eux, repartent pour une nouvelle vie ! Ils deviennent chèvrerie...

Le départ des Algécos

L'H.A.P.A. se professionnalise

Conformément à la demande de l'Etat, l'H.A.P.A. se professionnalise. Pour la première fois de son histoire, elle devient « employeur » en embauchant un « permanent » en 2010. Celui-ci est à la fois gardien et accompagnant, il est logé sur place dans la petite maison.

En 2011, un veilleur de nuit est embauché. Il intervient en alternance avec un animateur social. En Mai 2014, une monitrice-éducatrice est recrutée. En collaboration avec les bénévoles et conformément à la demande de la D.D.C.S., elle est chargée d'accompagner les hébergés dans leurs démarches administratives, le règlement de leurs problèmes de santé, leur recherche d'emploi et de logement.

Une commission sociale est créée au sein de l'association. Ses membres se retrouvent plusieurs fois par mois, reçoivent les hébergés, les aident dans leurs différentes démarches de recherche

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!23!

!! !

d’emploi, de logement, de santé. Ils s’assurent du respect du règlement intérieur et rencontrent aussi d'autres structures d'accueil pour échanger et partager des expériences.

Depuis 2005 le profil des personnes hébergées a encore évolué. On dénombre plus de personnes en rupture familiale, ainsi que des retraités pauvres, des travailleurs en situation de surendettement...

Alors qu'auparavant les bungalows étaient mis à disposition seulement pour la nuit (19h-8h30), les occupants peuvent désormais disposer librement de leur logement toute la journée. Leur seule obligation est de participer au repas du soir pris en commun avec des bénévoles de l’association.

Ayant mené à bon terme ce grand projet de construction, Paul Fullana achève en 2011 son deuxième mandat. Tout comme Yvonne Wrona quelques années auparavant, les statuts de l'association ne lui permettant pas d'enchaîner un troisième mandat, il cède sa place à Geneviève Marino qui restera Présidente quelques mois.

C'est Yvonne Wrona qui reprend le flambeau de la Présidence au début 2012.

Convaincue que l'association est capable de mener des projets ambitieux et complexes, elle ne va donc pas s'arrêter là !

Avec son équipe, elle va se lancer dans un projet de diversification... créatrice d'emplois.

Yvonne Wrona

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

24

L'H.A.P.A. se diversifie

Yvonne Wrona part d'un constat simple : d'une part, les aides publiques suffisent tout juste à assurer l'équilibre financier de l'association, d'autre part, les emplois sont rares pour les hébergés qui recherchent du travail.

Une seule solution, « gagner par nous-mêmes l'argent qui pourrait manquer et surtout mettre le pied à l'étrier aux hébergés qui veulent retourner vers l'autonomie ».

Suite à des discussions avec des hébergés ayant travaillé dans des entreprises de récupération, naît le projet de Recyclerie. Yvonne Wrona et André Jacquet prennent en main ce projet en 2012 et le mènent à son terme en 2014.

Une fois de plus les choses sont menées rondement ! L'association fait l'acquisition du hangar situé juste à côté de « l'Escale ». Grâce à Jean-Paul Blachère, fidèle partenaire de l’association, un bungalow est installé pour recevoir le bureau de la Recyclerie. L'Etat finance une étude de faisabilité confiée à un prestataire extérieur, spécialiste de l'économie sociale et solidaire.

L'équipe va visiter des Ressourceries existantes, prend contact avec le Réseau des Ressourceries, et bien sûr... recherche des fonds !

Les financements viendront essentiellement de fondations privées et pour partie d’aides publiques notamment de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie), du Conseil Régional et du Conseil Général.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!25!

!! !

Et... le 9 avril 2014, moins de deux ans après que l'idée en ait été lancée, la Recyclerie Apt Luberon ouvre officiellement ses portes avec un slogan fort : « Ne jetez plus, nous recyclons ! » et bien entendu, un petit logo dont le cœur est l’H.A.P.A. !

Jean-Paul Mathieu, Directeur de la Recyclerie devant l’Atelier

Son but est de récupérer des objets, meubles, outils, appareils ménagers, bibelots, vaisselle, linge de maison, vêtements, livres... en état d'usage ou de fonctionnement, de les trier, les vérifier, les nettoyer et de les mettre en vente à des prix abordables pour toutes les bourses.

En partenariat avec l’H.A.P.A., le SIRTOM du Pays d’Apt met à disposition un chalet « refuge du réemploi » destiné à accueillir les objets en bon état qui sont recyclés par la Recyclerie.

L'objectif de l'H.A.P.A. est multiple : réduire le gaspillage en donnant une seconde vie aux objets et, ainsi, s'inscrire dans une démarche éco-responsable et raisonnée ; contribuer à la réinsertion des personnes qu'elle héberge, créer des emplois de proximité et sensibiliser le public à une consommation plus citoyenne.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

26

Le succès est immédiat. Un an après son ouverture, la Recyclerie emploie cinq personnes, le hangar ne suffit plus à abriter les objets récupérés, les recettes dépassent les prévisions.

Yvonne Wrona aura tout juste le temps de se féliciter de cette réussite. Elle décédera au lendemain de l’Assemblée générale de 2014 et peu de temps après l'aboutissement de son projet, au sujet duquel elle aura eu le temps d'écrire :

« Début 2014, la Recyclerie a ouvert ses portes. Je suis ravie d'avoir pu atteindre cet objectif que nous avions fixé. Je sais aussi qu'elle sera bien dirigée et ne pourra que marcher ».

Charge à la nouvelle équipe et à tous les membres de l’association présidée par Jean Saletti, de développer ce projet et continuer l’œuvre de leurs prédécesseurs.

Déjà, les idées ne manquent pas : l’H.A.P.A. prévoit l’installation d'un bungalow offrant une place d'accueil supplémentaire, envisage d’acquérir une maison à proximité de l'Escale, recherche un espace-atelier pour réparer et remettre en état les objets récupérés par la Recyclerie, prépare la négociation d'une délégation de service public (D.S.P.) pour le ramassage des

encombrants sur le pays d'Apt... Jean Saletti

À l’occasion des 20 ans de l’H.A.P.A. et un an après la disparition d’Yvonne Wrona, l’association lui rend hommage en inaugurant l’espace de vie de « l’Escale ». Mieux qu’aucun autre, ce lieu s’honore désormais de porter le nom d’Yvonne Wrona.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

!27!

!! !

S’adapter pour l’avenir sans renier le passé

Structure fondée en 1995 sur des principes humanistes et portée par de nombreux acteurs locaux, nationaux et institutionnels et privés, l’H.A.P.A., reste 20 ans après, une force vive, active, en constante évolution, attentive aux difficultés croissantes et aux besoins majeurs auxquels se trouvent confrontés trop d’hommes et de femmes.

Comme il y a vingt ans, les administrateurs et les membres actuels de l’association continuent de « croire aux forces de l'esprit ».

Bénévoles engagés et actifs, ils sont ; Bénévoles engagés et actifs, ils resteront.

Ils savent faire entendre leur voix et trouver leur place entre le professionnalisme, légitimement exigé par les pouvoirs publics, et la fraternité, tout aussi légitimement recherchée par les hébergés, et si chère à François Gallegos.

* * *

l’Escale – Centre de l’H.A.P.A. Z.I. Les Bourguignons - 479 Bd de Roumanille – 84400 APT

L’Association remercie chaleureusement toutes les personnes citées ou qui ont participé à la réalisation de ce recueil, notamment Madame Rose Meunier pour son aide précieuse.

Les vingt ans de l’H.A.P.A.

28

Postface

Avant de rejoindre le Paradis des belles âmes, Yvonne Wrona a achevé l’écriture d’une merveilleuse histoire, la sienne. Empli d’amour et de générosité, ce livre est une ode à l’optimisme et au courage.

Selon la volonté d’Yvonne Wrona, l’association H.A.P.A. est seule bénéficiaire des ventes de ce livre (15€) que vous pouvez vous procurer à la Fondation Blachère – 384 Avenue des Argiles

Z.I. Les Bourguignons – 84400 APT

LE CŒUR D’UNE MAMAN

Yvonne Wrona

Ayant grandi dans un orphelinat Nïmois, Yvonne Wrona raconte dans « le cœur d’une maman » combien la vie est belle quand on la prend du bon côté. Entre les hauts et les bas, cette maman a choisi de ne garder au fond du cœur que les moments de joie et de nous transmettre son secret : « le positif attire le positif ».

Sa famille, Yvonne l’a choisi et l’a agrandie en 1998 en embrassant le monde associatif...

© F.D. Communication H.A.P.A. – Édition Juin 2015 Toute reproduction sans autorisation des personnes, des associations ou tout organisme mentionnés dans cet ouvrage est formellement interdite

Achevé d’imprimer en Juin 2015 – L’Imprim – 57, rue Cely – 84400 APT

Association H.A.P.A.

« L’Escale » 479,%Av.%de%Roumanille%Z.I.%Les%Bourguignons%

84400%APT%

04.90.71.90.01

Courriel : [email protected]