le véritable enseignement de jésus

Upload: wotan06

Post on 15-Jul-2015

183 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

WULFING VON ROHR

LE VERITABLE ENSEIGNEMENT DE JSUSLE MESSAGE CACH DE LA BIBLE

Traduit et adapt de l'allemand par Peter Schmidt

EDITIONS GUY TREDANIEL 65, rue Claude-Bernard 75005 PARIS

Table des matires

Ddicace ....................................................................................7 Ire PARTIE Sur les traces d'un message cach Notes personnelles...................................................................11 A la recherche de la vrit au-del des croyances ...................21 Le livre des Livres ...................................................................23 IIe PARTIE Jsus et son enseignement de la vie ternelle Le verbe mystrieux ................................................................33 Le baptme en tant qu'initiation ..............................................45 L'homme comme temple de Dieu............................................55 Le troisime il ......................................................................63 Les rvlations de la lumire et de la musique intrieures.............................................................................71 Naissance et mort, rincarnation et rsurrection .....................81 Qu'est-ce que le pch ? .......................................................... 91 La voie de la religion .............................................................. 95 Jsus - vu par lui-mme......................................................... 105 Jsus - fils unique de Dieu?....................................................111 5

IIIe PARTIE Quelques questions toujours d'actualit Jsus est-il vraiment mort sur la croix?.................................123 De 12 30 ans : Jsus a-t-il sjourn en Inde ? Fut-il Essnien ? ................................................................ 125 Jsus, " l'immacule conception " et sa famille.....................131 La Bible et le Karma............................................................. 137 La Bible et la rincarnation................................................... 141 Pour une nourriture digne de l'homme.................................. 145 IVe PARTIE Autres sources L'vangile de Thomas .......................................................... 153 Commentaires sur quelques extraits de l'Evangile de Thomas ................................................... 155 L'vangile des Essniens.................................................. . . 169 Les tmoignages de quelques grands mystiques................... 175 Ve PARTIE La mditation du Christ En guise de conclusion .......................................................... 189 La mditation du Christ ..........................................................197 Plan de mditation pour aboutir la lumire intrieure ........................................................ 207 La recherche de l'me : amour et grce ..................................211

6

Ddicace

Les rflexions contenues dans ce livre sont ddies cette puissance que nous dnommons Dieu, et Jsus qui en est porteur et qui est messager de cette puissance. Je le ddie galement tous les saints et tous les prophtes ainsi qu'aux hommes mystiques de toutes les religions ayant apport le message de l'existence de Dieu et celui de la ralit d'une me individuelle une humanit qui a de plus en plus besoin de la lumire, de l'amour et de la paix de Dieu. Nous avons tous besoin de la bndiction, de la grce et de la religion de notre me avec la force cratrice pour connatre le mystre de la vie, pour surmonter la mort et pour tre accueilli dans la vie ternelle et spirituelle. Puisse cet ouvrage contribuer faciliter l'veil de l'me et relier cette ouverture une exprience mystique personnelle et une responsabilit spirituelle pour tout ce qui existe. Au commencement tait le verbe... Puisse ce livre toucher - ne serait-ce que quelques lecteurs et lectrices dans la profondeur de leur cur et de leur me pour les ouvrir, travers les paroles, au verbe ternel.7

Je remercie enfin pour leurs bndictions, leurs conseils spirituels, leurs tmoignages et leurs dcouvertes et toutes leurs uvres, l'ensemble des autres mes sans lesquelles la moindre ligne de ce livre n'aurait pu tre crite.

8

Ire Partie

SUR LES TRACESD'UN MESSAGE CACHE

Notes personnelles

Chez mes parents, le jour de Nol, la tradition voulait que nous lisions l'histoire de Nol telle qu'elle est crite dans l'vangile selon Luc : " Or, en ce temps-l, parut un dcret de Csar Auguste pour faire recenser le monde entier. " L'histoire de la nativit raconte inlassablement la naissance de Jsus, dans une table, entre un buf et un ne. Suit alors l'annonciation faite par l'ange : " Il vous est n aujourd'hui... un Sauveur ", puis l'adoration de Jsus par les bergers. Cette belle histoire se termine par le chant des louanges entonn par les puissances clestes : " Gloire Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour les hommes, ses bien-aims. " Le 2,1-14. Ainsi eut lieu ma premire rencontre consciente avec la Bible, avec Jsus, avec Dieu. Ce texte de Nol m'a profondment marqu quand j'tais enfant et il me touche encore aujourd'hui car il voque l'histoire d'une promesse, d'un message plein de joie et d'un accomplissement allant droit au cur. Un rayon de lumire divine traverse l'obscurit de ce monde, pntre dans nos incertitudes et ptrie nos angoisses existentielles, cette nuit faite de misre, de guerre et de mort pour nous faire oublier notre souffrance en apportant un nouvel espoir notre me. La puissance invisible existant en filigrane 11

de toute vie, ce Dieu si lointain et apparemment si peu concern par notre vie sur terre est capable de faire rayonner sa lumire travers un tre humain visible qui peut nous consoler, nous redresser, nous aider et mme nous guider vers Dieu. Quelle bndiction et quelle grce ! Plus tard, l'cole, on nous familiarisait davantage avec la Bible, alors que nous avions de plus en plus de mal comprendre la Bible en soi. La Gense relatant l'histoire de la cration du monde, celle de l'homme et celle du paradis ainsi que l'expulsion de ce jardin, le dluge, les livres prophtiques, les preuves de Job; ensuite les miracles de Jsus, la rsurrection et finalement l'Apocalypse selon Jean - beaucoup de ces descriptions nous semblaient " irrationnelles ", " peu dignes de foi ", " charges seulement d'un sens symbolique " ou mme plus prosaquement " des histoires que nous devions croire aveuglment ". Mme si, alors, surgissaient toujours davantage de questions nouvelles que les rponses qui nous taient fournies, je suis encore aujourd'hui reconnaissant envers ceux qui m'ont permis tout jeune ces rencontres avec la religion chrtienne et sa Bible. La preuve, cet extrait de l'ptre de Paul aux Galates - "Portez les fardeaux, les uns des autres" dont ma grand-mre avait fait le principe de son mariage - est rest grav dans ma mmoire. Sa devise, elle la conservait dans une minuscule bote ct de son lit dans le petit studio qu'elle habitait Koldingen pour s'en souvenir en permanence. Et mme dans les moments les plus pnibles de sa vie, elle a toujours appliqu ce principe. Malgr le fait qu'elle fut une protestante convaincue, elle a ralis toute sa vie le principe 12

bndictin " ora et labora " - prie et travaille - en soulageant de leur fardeau normment de gens, mme si elle-mme en avait un lourd porter. Le principe " Portez les fardeaux, les uns des autres " trouve sa suite et son perfectionnement dans la deuxime partie de la sentence : " Accomplissez ainsi la loi du Christ! " Ga 6, 2. Devenu adolescent, je me suis longtemps intress la question de savoir comment un Dieu, dcrit comme plein de grce et d'amour, avait pu laisser autant de ses propres cratures dans une "damnation ternelle ' mme si elles n'avaient jamais eu la chance de connatre ni lui ni son fils divin. Je pense par exemple aux tres ayant vcu avant la naissance de Jsus ou tous les " paens " qui n'ont jamais entendu parler du Christ. Plus tard dans ma vie, j'ai suivi Berlin quelques cours de Helmut Gollwitzer sur l'histoire des religions compares, et je me suis mis lire Karl Barth et Rudolf Bultmann, Karl Rahner et Hans Kng, Martin Buber et d'autres philosophes et thologiens. Ce qui se prsentait au premier abord sous la forme d'une rflexion et d'une analyse intellectuelles, s'est lentement transform en une vritable question intrieure, l'exemple de Saint Franois d'Assise, l'uvre d'Albert Schweitzer ou les tmoignages d'hommes comme le Pre Maximilian Kolbe, Dietrich Bonhoeffer et le Pre Rupert Mayer dont la foi profonde a permis de faire face courageusement des situations les plus pnibles, m'ont donn l'impulsion ncessaire pour approfondir ensuite de plus en plus ma propre rflexion. Ma prise de contact avec la littrature mystique d'Orient et d'Occident s'est avre particulirement importante pour moi, notamment celle 13

avec Matre Eckhart, auteur de Du miracle de l'me et d'Angelus Silesius, auteur du Plerin Chrubinique m'a tout particulirement touch. Les Grands Initis de Schur et In dir ist das Licht de K. 0. Schmidt m'ont autant apport que les textes des sages indiens tels que Vivekananda, Ramana Maharshi, Hazur Sawan et Kirpal Singh qui m'ont permis d'importantes dcouvertes. Grce mon professeur de Yoga de Munich, Anneliese Harf, j'ai pu aussi avoir accs divers aspects mystiques du Christianisme Finalement j'ai abouti, au printemps 1975, m'accorder quotidiennement, pendant quelques semaines, entre quelques minutes et une demie heure, matin et soir, pour me retirer en moimme et demander : " Seigneur, si tu existes, j'aimerais venir vers toi. " Il ne s'agissait pas d'une prire parce que mon attitude tait critique et non dpourvue de doutes et parce que mon dvouement tait un peu dfaillant. Cela reprsentait plutt une question ou une requte refltant mon dsir de ne pas me priver de cette chance, aussi infime soit-elle pour moi, de pouvoir vivre quelque chose ressemblant une puissance suprieure. Je ne voulais pas permettre mon ego - la fois si grand et pourtant si petit - ou mon mental - se prenant tellement comme suprieur et, en ralit, si minuscule - de faire obstacle cette possibilit de pouvoir vivre, en tant qu'tre humain, cette ralit divine qui, grce de multiples tmoignages, ne me semblait pas totalement inexistante. Il existe apparemment un lien troit et insparable entre notre qute d'une ouverture religieuse et notre prise de conscience spirituelle d'une part, et de l'autre la grce et la bndiction que nous pouvons ventuelle14

ment vivre; ces dernires peuvent devenir les conditions sine qua non pour nous mettre sur la voie de la recherche de l'me, de la vie ternelle et de Dieu. La plupart du temps, nous ne savons pas trs clairement si nous avons d'abord t touchs par la grce nous permettant d'entamer notre recherche, ou si ce sont justement nos efforts pour devenir un homme meilleur, plus gentil et plus conscient se posant la question de l'existence de Dieu qui a fait merger en nous cette grce. Quoi qu'il en soit, suite ma requte j'ai pu recevoir de petits - mme de trs petits - signes qui, cependant, ont t parfaitement clairs et perceptibles, et ce sont ces signes en dfinitive qui m'ont conduit progressivement sur la voie de la recherche de la vrit existentielle. Un regard neuf et le cur largement ouvert, j'ai lu cette description fascinante de la cration au commencement de l'Ancien Testament :Lorsque Dieu commena la cration du ciel et de la terre, la terre tait dserte et vide, et la tnbre la surface de l'abme... Et Dieu dit: " Que la lumire soit! " Et la lumire fut... Gn 1, 1-3

Peu importe pour moi qu'il s'agisse l d'une explication historiquement ou scientifiquement "crdible". Depuis longtemps, Dieu n'tait plus " le vieil homme gentil la longue barbe blanche " vivant dans les hautes sphres ; il se prsentait moi comme une force cratrice engendrant la vie et la lumire. Les tentatives d'explication des physiciens les plus clbres ne pourraient jamais me convaincre dans la mesure o ils partent de l'ide que la conscience et le mental sont des lments 15

tout fait secondaires, " irrels ", des produits du hasard, tandis qu'ils considrent les processus chimiques, physiques et biologiques comme " rels ", importants et la signification durable. J'ai dj trait cet aspect de ma rflexion dans un autre livre Es steht geschrieben... Ist unser Leben Schicksal oder Zufall ? et je ne souhaite pas donner ici les arguments contre une telle conception apparemment matrialiste du monde. Il me semble vident qu'une puissance se trouve l'origine de la cration, et cette puissance doit tre plus grande que toutes les puissances et les phnomnes ainsi crs en mme temps. La raison humaine n'y changera rien. Qu'existait-il avant le " big bang " et d'o venait cette masse d'nergie pouvant dclencher un tel vnement? Du nant? L'me voit et entend; le cur ressent et sait ce qui est cach - et restera toujours cach - nos sens limits et notre raison vacillante. Nous sommes capables d'identifier une vrit fondamentale en nous, mme si nous ne voulons pas en dbattre publiquement parce que nous ne pouvons pas la prouver de manire " logique " et "rationnelle". Selon les indications contenues dans la Bible, Dieu n'tait pas seulement la force cratrice ayant engendr d'abord le cosmos et ensuite la lumire, mais il est galement une force vivant quelque part directement en nous, bien qu'elle y soit encore peut-tre cache ou inconnue. Un peu plus loin dans la Gense, on peut lire en effet :Dieu cra l'homme son image, l'image de Dieu, il le cra; mle et femelle il les cra... Gn 1, 25

16

On peut difficilement s'imaginer contradiction plus grande : d'un ct un Dieu tout-puissant et plein de grce qui a cr un " paradis " o toutes ses cratures vivent en harmonie, et de l'autre, nous, les hommes, qui sommes ptris d'incomprhension, de doute, d'envie et de comportement brutal, capables d'empoisonner non seulement notre propre vie, mais aussi la terre entire ! O se loge donc en nous la moindre tincelle de cette nature divine ? Cela nous serait-il impossible par principe ? Ou bien, avons-nous tout simplement perdu la cl et la voie d'accs cette vie sainte, c'est--dire holistique ? A moins que nous ne les ayons carrment ignores? La question se pose galement de savoir comment un Dieu tout-puissant aurait-il pu crer des tres son image et les doter d'un libre arbitre incluant par-l mme une utilisation errone d'une telle libert de volont comme, par exemple, le mpris des lois divines ayant engendr " l'expulsion du paradis " et le fardeau port par chaque tre humain au titre du " pch originel ". S'agirait-il donc d'un Dieu qui laisse faire les choses sans protger les hommes de leur malheur prvisible, comme l'aurait fait un pre veillant sur les siens ? Un rel dsir a pris en moi une telle importance qu'il m'a conduit chercher lucider de telles contradictions, surtout partir du moment o j'ai pu effectuer mes premires expriences avec une force suprieure. Comment se fait-il que la Bible et de nombreux autres textes sacrs galement aient t visiblement remplis de contradictions ? Pourquoi une sagesse claire et facile apprhender ctoie-t-elle des textes au contenu appa17

remment incertain ? Pourquoi les indications des voies mystiques suivre ne semblent-elles jamais donnes avec prcision tandis qu'un grand nombre de donnes mythologiques et historiques, thologiques et thiques se trouvent-elles tre dveloppes avec moult dtails ? La raison se trouverait-elle dans le fait que les textes originaux n'existent plus et que, de faon gnrale, il n'y en ait eu qu'une transmission orale dont le contenu peut dj avoir t modifi au moment de la rdaction livresque? Serait-il possible de savoir si l'indication selon laquelle l'homme serait l'image de Dieu comme explique la Gense - est prendre au pied de lettre ou ne s'agit-il seulement que d'une image symbolique ? Je me suis mis lire et tudier la Bible de faon systmatique, en parler avec des personnes plus avances que moi sur un plan spirituel et j'ai commenc mditer. J'ai dcouvert en permanence de nouveaux indices attestant qu'un message mystique cach traverse, comme un fil rouge, la Bible dans son intgralit et notamment le Nouveau Testament, mais aussi l'Ancien. Il s'agit d'un message indiquant que Dieu ne s'est pas born tout crer et faire de l'homme le porteur de la force divine qui le pntre ( peu importe qu'il s'en rende compte ou non! ), mais que chaque tre humain est capable de ressentir concrtement cette force divine en lui-mme car elle le guide pour rsoudre les nigmes de son existence. J'ai longuement recherch les traces de ce message aussi bien dans la Bible que dans les textes annexes et secondaires. Ce que nous pouvons y puiser est tonnant et prometteur la fois. 18

Je ne cache pas mes propres limites concernant une telle recherche : je ne suis ni thologien ni exgte de formation ni prtre ordonn d'une glise chrtienne ni expert en langues anciennes (aramen, hbreux, grec et latin) et je ne suis pas non plus un mystique qui, grce ses propres expriences et ralisations, a pu traverser ce pont menant vers Dieu ou le montrer d'autres personnes pour les y guider ensuite. Je me considre comme un chercheur voulant utiliser la libert de penser offerte par la nature ou par Dieu, pour trouver et donner un sens ma vie. Je me refuse penser que Dieu soit seulement chrtien ou seulement islamique, ou seulement hindouiste ou bouddhique ou juif. Je ne pense pas non plus qu'une seule religion puisse se l'approprier pour elle seule puisque tous les textes sacrs rvlent des lments essentiels sur Dieu et sur la relation entre Dieu et l'homme. Je ne m'intresse pas tant aux limites des sens et de la raison qu'aux possibilits de la vision intrieure et de la contemplation, de la prire et de la mditation. Je fais confiance la sensibilit du cur et la comprhension de l'me consciente car ils peuvent tre compris et vcus comme faisant partie intgrante d'une force colossale. Pour moi, la religion est la base de toute vie, condition de la comprendre comme tant l'ouverture vers une alliance personnelle avec Dieu ou bien comme un effort ncessaire pour appliquer des donnes spirituelles notre vie quotidienne. La religion revt pour moi un aspect intrieur et un aspect extrieur : la prire et l'exprience mystique sont ranger du ct personnel tandis que la compassion et l'aide concrte destine autrui, le comportement19

thique dans la socit et l'utilisation crative de nos talents et de nos possibilits reprsentent son rle social. Muni d'une telle conception, j'ai essay de retrouver les traces d'un message cach dans la Bible. Sur cette base s'est forge en moi la certitude que Jsus a enseign plus que la croyance en Un seul Dieu et plus que l'thique dans le Sermon sur la Montagne. Il enseignait, mon avis, une mthode comprhensible et accessible tout tre humain pour prendre contact en lui-mme avec la force de Dieu dont il tait l'image. Il enseignait ce que Jsus aime appeler la "Mditation du Christ". Je crois qu'il existe dans la Bible un message religieux dpassant largement toutes les religions et se situant en dehors des doctrines et des dogmes, mais s'adressant tous les tres humains. La prsence de ce message peu tudi ou cach correspond mon opinion personnelle et ma vision subjective sur lesquelles mes lecteurs sont invits rflchir. Jsus explique mon opinion partir de citations de la Bible, de paroles de Jsus, de textes des Evangiles et d'extraits d'autres textes sacrs, mais tout cela ne reprsente pas une " preuve " absolue parce que les citations pourraient aussi tre interprtes autrement. Il n'est pas question dans cet ouvrage de prouver que je puisse avoir " raison "; il s'agit plutt de savoir, si et comment nous pouvons accder nous-mme aux questions essentielles de notre tre : D'o venons-nous ? Pourquoi sommes-nous sur terre ? Qui ou quoi vit dans et travers nous ? L'me existe-t-elle ? Est-elle ternelle ? Qu'est ce que la conscience? Quelle peut tre aujourd'hui la signification du message de Jsus pour notre volution spirituelle, notre victoire sur la mort et notre ouverture vers Dieu ?20

A la recherche de la vrit au-del des croyances

Les uns considrent la Bible comme tant la rvlation divine o chaque phrase est prendre au pied de la lettre; pour d'autres, il s'agit d'un recueil de contes de fes un peu dmods. Certains enfin y voient le rcit mystique et idaliste d'un (hypothtique) fondateur d'une religion, moins que ce ne soit l'expression mythologique de la recherche d'une entit qui serait plus grande ou moins phmre que le commun des mortels et dont l'ide hante depuis toujours l'esprit des hommes. La connaissance de la voie qui serait la plus directe pour chaque individu pour atteindre la puissance divine et les moyens de trouver cette voie faite de visions intrieures se sont perdus progressivement, ont t refouls ou supprims au cours des sicles de mme que la clbre loi du rapport de cause effet, laquelle reste assez floue pour la plupart des gens, tout comme les textes bibliques sur la rincarnation et la rsurrection demeurs en gnral assez mal compris... Cet ouvrage dcrit une recherche spirituelle de la vrit, dans la mesure o nous, tres humains, sommes capables de connatre la vrit. Il pose la question de 21

savoir si les propos contenus dans la Bible, et notamment dans le Nouveau Testament, ne concernent pas tout autre chose que simplement l'thique et la morale, l'enseignement thologique ou les structures ecclsiastiques. Or, ce livre cherche expliquer s'il existe un message mystique, voire mme " sotrique ", un enseignement spirituel cach, voire mme oubli de Jsus de Nazareth. Il pose l'hypothse selon laquelle nous pourrions trouver dans la Bible certaines descriptions claires et prcises permettant d'atteindre la vritable religion, c'est--dire la jonction entre l'me et Dieu. L'ouvrage conclut que la religion, ainsi comprise, reprsente la quintessence des enseignements de Jsus. Ce livre tend contribuer une comprhension nouvelle de la Bible puisqu'il dmontre le rle de Jsus en tant que mystique. Grce aux trs nombreuses citations, le lecteur peut se rendre compte lui-mme de la richesse des indications spirituelles trs concrtes que Jsus a donne ses disciples. Ainsi, les messages de la Bible se prsentent sous un aspect tout fait nouveau. Les enseignements des mystiques chrtiens ainsi que de ceux venus d'autres horizons religieux retrouvent grce cette interprtation de la Bible une nouvelle clart et une nouvelle importance.

22

Le livre des Livres

La Bible est le livre le plus imprim et le plus rpandu dans le monde. Il a t traduit intgralement ou partiellement en 1500 langues. Le terme " bible " vient du mot grec " biblia " qui signifie " livres ". Sous le nom de Bible sont runis aujourd'hui un grand nombre de textes sacrs du Judasme et les textes les plus importants du Christianisme. L'Ancien Testament se compose essentiellement de textes juifs de la priode prchrtienne et de tmoignages religieux crits en hbreu, en aramen et en grec. Nous y trouvons les textes des lois comme le Pentateuque, des livres historiques, de la posie et des textes de sagesse comme les psaumes et le Cantique des Cantiques ainsi que des livres prophtiques. L'Ancien Testament souligne constamment l'aspect unique et majestueux de Dieu, les liens existants entre lui et le peuple d'Isral, la loi qu'il a tablie, la toutepuissance de Dieu influenant aussi bien le droulement de l'histoire de notre terre que celle du peuple d'Isral. Il voque la rvlation de Dieu par les prophtes, la nature de l'humanit et ses " pchs " collectifs et individuels ainsi que sa rmission par l'adoration vritable de Dieu, l'attente d'un Messie, d'un Rdempteur, fait23

galement partie intgrante de la religion juive, surtout des groupuscules mystiques existant l'intrieur de cette religion. Pendant des sicles, les spcialistes croyaient que le Nouveau Testament avait d'abord t rdig en grec. Aujourd'hui, les chercheurs pensent plutt qu'il fut en partie crit en aramen et sans doute aussi en hbreux. Saint Jrme a traduit ce texte au 4e sicle en latin et le concile de Trente, au 15e sicle a dclar cette " Vulgate " comme version officielle catholique de la Bible. En 1545, Martin Luther en a prsent une version allemande connue sous le nom de " Bible de Luther " et qui a eu un impact semblable la version catholique. Le Nouveau Testament a t conu, en grande partie, aprs la mort de Jsus. Puis, sa rdaction, la slection des diffrentes parties et ses diffrents remaniements ont pris plusieurs sicles. Le Nouveau Testament est compos des quatre vangiles dont on sait qu'ils ne furent pas du tout rdigs par les quatre vanglistes Luc, Marc, Matthieu et Jean. Selon les recherches les plus rcentes, l'vangile selon Marc serait le plus ancien et daterait probablement des annes 70 environ ap. J. C. L'vangile selon Luc et l'vangile selon Matthieu dateraient de 85 environ ap. J. C. et l'vangile selon Jean aurait t rdig entre 95 et 100 ap. J. C. - voire mme encore plus tard. De plus, le Nouveau Testament contient l'Acte des Aptres selon Luc, les ptres des aptres Paul, Pierre, Jean et quelques autres ainsi que l'Apocalypse selon Jean. A ct de ces textes " canoniques ", c'est--dire reconnus par l'Eglise, il existe toute une srie de textes " apocryphes ", c'est--dire de textes " cachs " et pas24

( encore ) reconnus par l'Eglise. Le nombre de ces documents qui viennent d'tre dcouverts et seulement maintenant dcrypts et classs, augmente sans arrt. Parmi les plus importantes, les dcouvertes de Qumran et de Nag Hammadi faites aprs la Deuxime Guerre Mondiale ont permis l'accs un grand nombre de sources nouvelles, ce qui a contribu l'dition d'un cinquime vangile connu sous le nom " d'vangile selon Thomas ", et celle des textes de " l'vangile des Essniens ". On sait aujourd'hui que la "Bible " en tant qu'uvre monolithique n'existe pas, mais qu'il s'agit d'un certain nombre de textes qui reprsentent les parties des ditions reconnues ou qui consciemment ou " par hasard " ne le sont pas. L'Ancien Testament et le Nouveau Testament ont en commun la foi en un seul Dieu, ils sont donc monothistes. Tandis que l'Ancien Testament se concentre surtout sur la loi et l'alliance de Dieu avec Isral, le Nouveau Testament s'intresse surtout la signification de Jsus en tant que Christ ou que Messie, en tant que rdempteur et librateur, en tant que fils d'homme et fils de Dieu en mme temps, en tant que Seigneur et prophte. Le mot grec " christos " est synonyme de " messie " et signifie galement " celui qui a t oint par le Seigneur ". Comme nous le verrons ultrieurement, dans deux des vangiles, l'origine ( prsume ) de Jsus de la ligne royale des David, joue galement un rle important dans le Nouveau Testament. Le deuxime thme central du Nouveau Testament est la rsurrection (prsume) aprs la crucifixion; quant au troisime point essentiel, il voque la signification de la parole et l'importance du Saint-Esprit ainsi que la confirmation25

donne par Jsus considrant que ces deux lments existent chez tous les hommes. En mme temps, il demande que tous les tres humains puissent s'unir la parole du Saint-Esprit pour atteindre le salut spirituel et la vie ternelle au-del de leur mort physique. Finalement, certaines mtaphores de Jsus ont pu laisser croire ses compatriotes chrtiens et nombre des chrtiens primitifs que la destruction de l'ancien ordre " impie " du monde tait imminente et que le royaume de Dieu s'installerait incessamment de manire visible. On a pu imaginer que derrire ces interprtations et ces convictions se cachait autre chose qu'un nouvel ordre socio-politique et humaniste lequel sera tudi en dtails dans la deuxime partie de cet ouvrage. Mme si Jsus et ses disciples et adeptes optaient plutt pour un Dieu issu de leur environnement juif en gnral et mme s'ils ne doutaient pas, en principe, de l'autorit des textes et des enseignements de l'Ancien Testament, les doctrines de Jsus ont largi les moyens de salut et " l'alliance " avec Dieu, de telle faon que l'ensemble des tres humains puisse et doive entrer en communion avec Dieu. Ainsi, Jsus dclare-t-il une " alliance nouvelle " incluant des Juifs et des Non-Jufs. Paul, qui de ses propres aveux, n'a jamais rencontr personnellement Jsus, est devenu le promoteur le plus enthousiaste de la chrtient et, ce titre, il peut tre considr comme le vritable fondateur de la forme actuelle de l'glise chrtienne. Toutefois, la Bible n'est pas le plus ancien des " textes sacrs " des dites grandes religions. Le Talmud babylonien et palestinien, cette collection de textes juifs sacrs contenant essentiellement le Pentateuque, ces cinq 26

livres des Lois de Mose qui forment la Thora, sont plus anciens que notre Bible actuelle. Les livres de sagesse gyptienne et l'pope Gilgamesh d'origine sumrienne, crites bien longtemps avant la naissance de Jsus, peuvent galement tre considrs comme des textes " sacrs " de notre monde. Les origines du Livre des Morts Tibtain et sans doute aussi le Zend-Avestaz du Zoroastrisme datent galement de la priode avant Jsus-Christ. Les textes religieux bouddhistes existent depuis le 6e sicle av. J. C. Le Yi King, le livre chinois des transformations, existe depuis plusieurs millnaires et le Tao Te King de Lao Tseu est plus ancien que le Nouveau Testament. Les Vda et les Upanishad, les textes primitifs de l'Hindouisme et des religions qui s'en sont inspires comme le Brahmanisme, le Bouddhisme, le Janisme etc. ne connaissaient nullement une conception missionnaire comme le Christianisme ou mme l'Islam. Ainsi, ces textes n'ont pas connu, jusqu' prsent, cette diffusion norme travers le monde telle la Bible. Que les vdas remontent deux ou trois mille ans avant l'Ancien Testament ou que la Bhagavad Gta date de mille ou quatre mille ans plus tt que le Nouveau Testament, s'est avr pour nous sans grande importance. En revanche, il me semble important de concevoir la Bible comme faisant partie intgrante de toute une srie de textes sacrs et de la comprendre dans la continuit de tmoignages humains s'intressant aux sujets les plus essentiels et les plus nobles de notre existence. Pour conclure, je rsumerai qu'il y essentiellement trois conceptions de la Bible qui visiblement s'excluent rciproquement :27

* La Bible rapporte des vrits historiques et en mme temps une ralit rvle par Dieu et donc inattaquable. Mme si, peut-tre, certains lments sont un peu plus discutables, notamment l'histoire de la Cration qu'il ne faut pas considrer en soi. Les textes du Nouveau Testament demeurent des textes prendre comme autant de descriptions prcises de faits empiriques qui doivent tre compris tels que nous les lisons aujourd'hui. * La Bible est un recueil de textes mythologiques qui donne davantage d'informations sur les dsirs de l'me humaine que sur des faits historiques ou scientifiques. On peut la considrer comme une sorte d'inspiration pour s'ouvrir intrieurement au domaine spirituel, mais elle ne reprsente nullement une " vrit " indiscutable. * La Bible est une srie de textes dont les sources sont sans doute partiellement authentiques, mais impossibles vrifier aujourd'hui, contenant la rvlation divine sur la vie et sur l'enseignement de Jsus. Les " pres de l'Eglise ", grce leur analyse plus approfondie et leur jugement suprieur, lui ont donn sa forme qu'ils considraient comme la plus sre afin de l'riger ainsi, juste titre, de l'riger au rang de doctrine et de canon. Ce livre n'est pas le contexte idal pour examiner davantage la question de la " vracit " de la Bible. Certes, certains lments d'information sont passs de manire fragmentaire de la forme orale la forme crite de la Bible; certains sens se sont perdus cause des traductions multiples; un grand nombre de sources et de28

documents authentiques a t dtruit ou a disparu jamais, je prtends quand mme que les paroles de la Bible sont prendre au sens littral. Partant de ce principe, la base de ma tentative pour suivre les traces de son message secret consiste pour moi prendre le texte de la Bible stricto sensu ! Il est une vidence que la Bible raconte le rcit mythologique ou historique de la Cration et qu'elle retrace l'ordre divin du cosmos : un ordre divin pour tous les tres vivants et pour toutes les donnes cosmiques. L'Ancien Testament et le Nouveau Testament transmettent des indications concernant une vie thique et morale sur un plan aussi bien priv que collectif tel qu'on le retrouve surtout dans les Dix Commandements et dans le Sermon sur la Montagne (Ex20,l-17;Mt5,3-10). Mais peut-tre, la Bible serait-elle un peu plus que le simple rcit de la cration ou une suite de conseils concernant l'thique et la foi? Le Nouveau Testament contient-il peut-tre encore beaucoup plus que la description de la vie de Jsus, fils de Dieu ? Les textes, sur lesquels cet ouvrage se fonde, proviennent des ditions de la Bible courantes et autorises. Mais ne soyez pas tonn de trouver quelquefois des citations diffrentes de celles qui vous sont peut-tre restes graves en mmoire, et si vous comparez deux bibles issues de diverses " rvisions ", vous ne retrouverez sans doute dans aucun verset les mmes paroles. Dans cet ouvrage, je m'appuierai avant tout sur les textes canoniques avant d'inclure dans mes recherches des sources apocryphes et les tmoignages de certains mystiques. Les thses de ce livre se trouvent galement confirmes par d'autres vangiles, notamment par29

l'vangile selon Thomas qui a t reconnu aujourd'hui comme authentique et qui est prsent ici pour la premire fois avec des commentaires sur son fondement mystique. Comme vous le savez, l'vangile selon Jean commence galement par une sorte d'histoire de la Cration :Au commencement tait le Verbe, et le Verbe tait tourn vers Dieu, et le Verbe tait Dieu... Tout fut par lui... En lui tait la vie et la vie tait la lumire des hommes, et la lumire brille dans les tnbres, et les tnbres ne l'ont point comprise. Jn 1, 1 -3

Qu'est-ce que ce " Verbe "? Comment un Verbe peutil tre la vie des hommes et en mme temps la lumire ? De quelles tnbres s'agit-il? Comment pouvons-nous " comprendre " cette lumire qui brille apparemment en nous ? Commenons notre recherche avec ce terme nigmatique Verbe qui fait pntrer la lumire dans les tnbres. Partons la recherche souvent pnible des lments de ce puzzle multicolore qu'il faut d'abord classer selon ses " couleurs " et selon ses "formes " et les faire correspondre entre elles afin de pouvoir dterminer une image plus globale.

30

IIe Partie

JSUS ET SON ENSEIGNEMENT DE LA VIE TERNELLE

Le verbe mystrieux

Les vangiles selon Luc, Marc et Matthieu commencent par des rcits sur la vie de Jsus, son origine, l'poque et la socit dans lesquelles il tait n. L'vangile selon Jean, quant lui, commence par un rcit de la cration trs mystrieux, l'auteur appel Jean ( qui est d'ailleurs toujours rest inconnu ) utilise un terme peu courant pour dsigner la force cratrice primaire et originelle. Il ne parle ni d'une " force " ni d'une " volont divine " ni d'un " Saint-Esprit ", pas plus que d'une "lumire " (en tout cas pas au dbut de son vangile), mais d'un " Verbe ". Ce terme correspond l'expression grecque " logos " qui signifie parole, verbe, sermon, raison. Mais apparemment, Jean se rfre ainsi d'autres concepts nettement suprieurs la parole et la raison. Lisons ce texte de la Bible :Au commencement tait le Verbe, et le Verbe tait tourn vers Dieu, et le Verbe tait Dieu. Il tait au commencement tourn vers Dieu. Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut sans lui. En lui (le Verbe) tait la vie et la vie tait la lumire des hommes, et la lumire brille dans les tnbres, et les tnbres ne l'ont point comprise.

33

Il y a eu un homme, envoy de Dieu; son nom tait Jean. Il vint en tmoin, pour rendre tmoignage la lumire, afin que tous croient par lui. Il (Jean) n'tait pas la lumire mais il devait rendre tmoignage la lumire, le Verbe tait la vraie lumire qui, en venant dans le monde, illumine tout homme. Il tait dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l'a pas reconnu. Jn 1, 1-10

Le Verbe dont parle ce texte, existe ds le dbut, il tait associ Dieu et Dieu mme tait dans le Verbe. Selon cette description, le Verbe est dot d'tonnantes qualits et de forces puissantes : il cre et ralise tout phnomne. Ce n'est donc pas Dieu qui cre tout par lui-mme, mais le Verbe qui en est issu et qui engendre la manifestation de tous les tres que nous percevons. Ce terme mystrieux est non seulement la force qui fait jaillir la Cration, mais il contient galement " la vie ". Qu'est ce que la vie ? La vie humaine ? Certainement pas seulement l'existence physique. Il s'agit galement de sentiments, de pense, de raison : bref, de conscience : " En lui (le Verbe) tait la vie et la vie tait la lumire des hommes... " Le verbe est donc une force cratrice, porteur de la " vie " et, de surcrot, il est mme la " lumire des hommes ". Le Verbe est donc beaucoup plus que la " raison " ou que les paroles d'un discours. Ensuite, nous lisons que le Verbe brille dans les tnbres, mais que celles-ci ne l'ont pas compris. Jean reprend cette ide expressment la fin de la citation en assimilant le Verbe et la Lumire et il dit : " Il tait dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l'a pas reconnu. " Puis nous en apprenons encore davantage : cette lumire est une lumire " illuminant " tous les34

hommes qui viennent ici ; mais visiblement, nous n'avons reconnu ni le Verbe crateur et donneur de vie ni la Lumire qui nous illumine. Grce ce dbut de l'vangile selon Jean, il devient vident que le Verbe reprsente une force divine tout fait particulire. Le Verbe est d'origine divine, il ne fait qu'un avec Dieu et pourtant, il en diffre puisqu'il reprsente la force qui, tout en tant l'origine de la cration du monde, symbolise la vie et la lumire des hommes. Ainsi, le Verbe devient une sorte de " cordon ombilical " entre Dieu et sa cration pour nourrir toute cette cration (et par consquence tous les hommes aussi) de vie, de lumire et de conscience. Quand, lors de la naissance, le cordon ombilical est coup, le nouveau-n acquiert une vie physique, indpendante de sa mre. Si l'me dsire retourner vers Dieu, le lien spirituel doit tre repris de nouveau grce au " cordon ombilical " du Verbe. Cependant, les "tnbres" de l'inconscience humaine n'ont pas (encore) reconnu ce Verbe et sa lumire, or, ceci est parfaitement possible puisque le but principal de toute religion est justement d'indiquer la voie permettant de prendre conscience de cette lumire. Le Verbe joue vraiment un rle trs particulier dans la Bible, qui nous donne d'autres exemples de l'identification de ce terme avec la force. Ainsi, pouvons-nous lire un peu plus loin cette phrase tonnante :Et le Verbe s'en fait chair, et il a habit parmi nous... Jn 1, 14 35

Or, le Verbe possde non seulement la capacit d'agir en tant que force invisible, mais galement celle de s'incarner dans un tre humain. Nous reparlerons plus loin de cette phrase difficile apprhender. Dans l'vangile selon Matthieu, nous trouvons d'autres remarques concernant le Verbe:Ce n'est pas seulement de pain que l'homme vivra, mais de toute parole sortant de la bouche de Dieu. Mt, 4,4

Comment devons-nous interprter une telle phrase ? Dieu parle-t-il d'une bouche au sens d'organe physique ? Ou s'agit-il d'une tentative pour exprimer autrement le fait que le Verbe soit Dieu et que le Verbe soit en mme temps mis par lui en tant qu'lment actif et cratif comme l'voquait dj Jean? Les aptres connaissent parfaitement la diffrence entre les paroles et le Verbe, entre les formes penses et l'action de la force divine. Ainsi, lisons-nous chez Paul :Mais je viendrai bientt chez vous, si le Seigneur le veut, et je prendrai connaissance, non des paroles des orgueilleux, mais de leur action. Car le royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en action. 1 Coq 4, 1 920

Paul confirme donc qu'il s'agit visiblement d'une action directe et non pas de paroles, mme si celles-ci sonnent agrablement, c'est--dire si elles sont faites d'action et de force relles. Dans l'ptre aux Hbreux, Paul reprend le mme thme : 36

Ce Fils est resplendissement de sa gloire et expression de son tre et il porte l'univers par la puissance de sa parole. Aprs avoir accompli la purification des pchs, il s'est assis la droite de la Majest dans les hauteurs, devenu d'autant suprieur aux anges qu'il a hrit d'un nom bien diffrent du leur. He 1, 3-4

Dans cette citation, nous trouvons le terme de " nom " sur lequel nous reviendrons ultrieurement et qui reprsente une sorte de synonyme de l'efficacit de " la puissance de sa parole " ou, qui en est, au moins, le " label " de rfrence. Une indication intressante de la " parole " mystrieuse et puissante se trouve dj dans l'Ancien Testament :Par sa parole, le Seigneur a fait les cieux, et toute leur arme par le souffle de sa bouche... c'est lui qui a parl, et cela arriva; lui qui a command, et cela exista. Ps 33, 6,9

A jamais, Seigneur, ta parole se dresse dans les cieux. Ps 119, 89

Dans une version anglaise de la Bible, nous retrouvons d'ailleurs cette mme phrase : " Seigneur, ta parole reste pour toujours ancre dans le ciel." A croire cette interprtation, le Verbe est donc une puissance divine dont la dure est ternelle. Mais qu'advient-il du Verbe qui brille en chaque tre humain? Il " tait la vraie lumire qui, en venant dans le monde, illumine tout homme", est-il crit dans l'vangile selon Jean.37

Pourquoi ne la percevons-nous pas? L'vangile selon Marc nous fournit une explication complmentaire :Le semeur sme la parole. Voil ceux qui sont au bord du chemin o la parole est seme: quand ils ont entendu, Satan vient aussitt et il enlve la parole qui a t seme en eux.

De mme, voil ceux qui sont ensemencs dans des endroits pierreux: ceux-l, quand ils entendent la parole, la reoivent aussitt avec joie; mais ils n'ont pas en eux de racines, ils sont les hommes d'un moment; et ds que vient la dtresse ou la perscution cause de la parole, ils tombent. D'autres sont ensemencs dans les pines: ce sont ceux qui ont entendu la parole, mais les soucis du monde, la sduction des richesses et les autres convoitises s'introduisent et touffent la parole qui reste sans fruit. Et voici ceux qui ont t ensemencs dans la bonne terre: ceux-l entendent la parole, ils l'accueillent et portent du fruit, 30 pour une, 60 pour une, cent pour une. Il leur disait: Est-ce que la lampe arrive pour tre mise sous le boisseau ou sous le lit ? Nest-ce pas pour tre mise sur son support ? Car il n'y a rien de secret qui ne doive tre mis au jour, et rien n'a t cach qui ne doive venir au grand jour. Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il entende! Il leur disait: Faites attention ce que vous entendez. La mesure dont vous vous servez servira de mesure pour vous et il vous sera donn plus encore. Car celui qui a, il sera

38

donn; et celui qui n'a pas, mme ce qu'il a lui sera retir. Me 4, 14-25

Dans l'vangile selon Luc se trouve la mme allgorie, exprime en des termes presque identiques, et le dbut du texte est parfaitement explicite :La semence, c'est la parole de Dieu. Le 8, 11

Et chez Jean, c'est Dieu en personne qui parle :Je leur ai donn ta parole. Jn 1 7,14

La puissance de la parole est donc seme dans chaque tre humain. Chez Marc, la parole se trouve de nouveau associe la lumire. Quant au devenir de cette semence, il dpend d'influences trs diverses. Comme nous pouvons le lire un peu plus loin, l'un des sens majeurs que l'on puisse donner notre vie peut consister rechercher un lien conscient avec la parole, c'est-dire nous rendre conscient de l'existence de la parole en tant que force cratrice divine, en tant que force vitale et force de lumire. Dans la premire ptre de Pierre, nous trouvons une confirmation de ce sens de la parole:Vous qui avez t engendrs nouveau par une semence non pas corruptible mais incorruptible, par la parole de Dieu vivante et permanente... la parole du Seigneur demeure ternellement. 1 P 1, 23, 25

L'aptre Jacques, considr souvent comme un frre de Jsus, parle dans une ptre retrouve de la parole : 39

Aussi, dbarrasss de toute souillure et de tout dbordement de mchancet, accueillez avec douceur la parole, plante en vous et capable de vous sauver la vie. Je 1, 21

Ici, la parole est " plante " tandis qu'auparavant, elle tait " seme ". Pour expliquer le sens de la parole, Jacques ajoute que la parole est capable de rendre les mes heureuses. Dans l'ptre aux Hbreux, nous trouvons encore d'autres dfinitions de cette parole mystrieuse :Vivante, en effet, est la parole de Dieu, nergique et plus tranchante qu'aucun glaive double tranchant. Elle pntre jusqu' diviser me et esprit, articulations et moelles. Elle passe au crible les mouvements et les penses du cur. Il n'est pas de crature qui chappe sa vue; tout est nu ses yeux, tout est subjugu par son regard. Et c'est elle que nous devons rendre compte. He 4, 12-13

La parole est donc quelque chose qui pntrera tout et qui peut mme agir en tant que " juge ". On aurait mme tendance penser que la parole porte en elle des quantits de force cratrice divine. Citons deux extraits de l'Ancien Testament o la parole joue galement un rle important :Ta parole est une lampe pour mes pas, une lumire pour mon sentier. Ps 119, 105 Il t'a donn manger la manne que ni toi ni tes pres ne connaissiez, pour te faire reconnatre que l'homme ne vit pas de pain seulement, mais qu'il vit de tout ce qui sort de la bouche du Seigneur. Dt 8, 3

40

Et chez Matthieu, nous lisons :Ce n'est pas seulement de pain que l'homme vivra, mais de toute parole sortant de la bouche de Dieu. Mt 4, 4

Chez Jean, nous dcouvrons l'explication suivante des qualits merveilleuses de la parole :Celui qui coute ma parole... est pass de la mort la vie. Jn 5, 24

La parole peut donc vaincre la mort. Nous avons dj constat que les termes Parole et Lumire sont identiques si l'on y croit la description de la Cration au dbut de l'Evangile selon Jean et nous retrouvons d'ailleurs son quivalent dans un verset de la Gense :Et Dieu dit: Que la lumire soit! Et la lumire fut. Gn 1, 3

Que signifie ce langage de Dieu? Serait-ce un langage compos de paroles sortant d'une bouche? Ou plutt une force, une nergie qui agirait d'elle-mme? De surcrot, un terme associe le baptme la parole : c'est le terme de " nom ". A mon avis, ce terme de nom s'identifie la parole invisible et malgr cela efficace qui rgne dans l'homme. Ainsi, nous lisons dans l'ptre aux Hbreux :Ce Fils est resplendissement de sa gloire et expression de son tre et il porte l'univers par la puissance de sa parole. Aprs avoir accompli la purification des pchs, il s'est assis la droite de la Majest dans les hauteurs, devenu

41

d'autant suprieur aux anges qu'il a hrit d'un nom bien diffrent du leur. He 1, 3-4

Ceci indique que la parole est porteuse d'une autre qualit essentielle, celle de purifier l'homme de ses pchs. Le Christ a hrit d'un nom... Mais qu'est-ce que ce nom ? Jean utilise galement ce mme terme :Je leur ai fait connatre ton nom et je le leur ferai connatre encore, afin que l'amour dont tu m'as aim soit en eux, et moi en eux. Jn 17, 26

Dans l'Ancien Testament, nous trouvons galement des indications sur la puissance particulire du nom :... c'est toi, Seigneur, qui est notre Pre, notre Rdempteur depuis toujours, c'est l ton nom. Es 64, 16

Si nous faisons rfrence certains passages de la Bible, la parole possderait apparemment une qualit de plus : celle d'tre la " voix divine ", audible dans certaines circonstances :Aprs le tremblement de terre, il y eut un feu; le Seigneur n'tait pas dans le feu. Et aprs le feu le bruissement d'un souffle tnu. Alors, en l'entendant, Elie se voila le visage avec son manteau; il sortit et se tint l'entre de la caverne. Une voix s'adressa lui: " Pourquoi es-tu ici, Elie?" 1 R 19, 12-13

Dans la version anglaise King-James, nous trouvons une autre interprtation fort intressante :42

Et aprs le feu, une petite voix silencieuse se dressa...!

Il ne s'agit donc plus du bruissement d'un souffle, mais d'une petite voix silencieuse. Dans le Nouveau Testament, il ne s'agit plus de la voix de Dieu, mais de celle de son fils :En vrit, en vrit, je vous le dis, l'heure vient - et maintenant elle est l - o les morts entendront la voix du Fils de Dieu et ceux qui l'auront entendue vivront. Jn 5, 25

Quelle est donc cette " voix "? Pouvons-nous partir de l'hypothse qu'il s'agit-l toujours de cette parole, donc non pas de la voix humaine et extrieurement audible de Jsus, mais de cette voix spirituelle et intrieurement audible du Christ ? Qui sont ces " morts "? Ces morts ne reprsentent peut-tre pas du tout ceux qui ne vivent plus sur un plan physique, mais plus exactement nous, qui sommes vivants, mais en qui l'obscurit rgne davantage que la lumire ? Sommes-nous ces "morts" parce que nous n'entendons pas la voix silencieuse de la parole divine ? Parce que toute notre attention est oriente vers le monde bruyant et relatif des formes au lieu d'essayer d'couter et de voir ce qui est divin en nous ? Un autre terme pour cette puissance extraordinaire de la parole s'exprime, selon moi, travers le mot de " fleuve d'eau ":Puis il me montra un fleuve d'eau vive, brillant comme du cristal, qui jaillissait du trne de Dieu... Ap 22, 1

43

Pourvu que la parole reprsente, d'une part, la vie et la lumire des hommes et du monde et que, de l'autre, il existe un fleuve d'eau vive partant de Dieu et animant la Cration, alors la parole et " l'eau vive " semblent tre identiques.

Pour rsumer : La Bible et tout particulirement l'Ancien Testament voquent plusieurs reprises la puissance merveilleuse appele gnralement parole et souvent associe la lumire. Le nom et la voix de Dieu ainsi que l'eau vive paraissent tre en rapport avec cette puissance. Cette parole fait un avec Dieu; il s'agit de cette force cratrice " divine " qui engendre et anime tout. Lorsque Dieu s'exprime et lorsqu'il manifeste sa puissance, il s'appuie sur la parole. Cette parole vhicule un certain nombre de qualits qui, en dfinitive, s'avrent indescriptibles : elle apporte la vie la cration et aux hommes et les illumine sans qu'ils le sachent; elle purifie des pchs et triomphe de la mort, car elle est ternelle. Sans cette parole exprimant la force trs particulire de Dieu, il n'y aurait donc ni d'tre conscient ni de vie de l'me ternelle. Mais comment peut-on se relier cette parole ? L aussi, la Bible apporte une rponse.

44

Le Baptme en tant qu'initiation

Ce chapitre traite du baptme et de sa signification relle, selon le Nouveau Testament. La question se pose alors de savoir si Jsus a pratiqu lui-mme le baptme par immersion d'un tre humain dans l'eau ou s'il a baptis les bbs en les arrosant symboliquement avec quelques gouttes d'eau. Les chercheurs ne sont pas (encore) unanimes sur ce point. En revanche, une chose est sre, le baptme des adultes dans l'eau du Jourdain, tel que Jean-Baptiste le pratiquait, symbolisait la purification et l'acceptation de la pnitence et avait lieu parmi un public nombreux. Il apparat galement comme une certitude que Jsus lui-mme se soit fait baptiser. Chacun sait que Jean-Baptiste a souvent t considr comme le Messie dont parlent les prophties; plusieurs reprises, il a mme t mis l'preuve pour dmontrer qu'il ne se dnommait pas lui-mme comme tant le Christ. Au dbut de l'vangile selon Jean, il est considr expressment comme le " tmoin de la lumire ". Selon toutes les sources connues l'heure actuelle, Jean rpondit toujours clairement qu'il n'tait pas le rdempteur, mais qu'il prparait uniquement sa venue.45

Concernant le baptme tel que Jean-Baptiste le pratiquait, nous lisons dans l'vangile selon Matthieu :Moi (Jean), je vous baptise dans l'eau en vue de la conversion mais celui qui vient aprs moi est plus fort que moi: je ne suis pas digne de lui ter ses sandales; lui, il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu. Mt 3, 1 1

Dans ces vers dj, l'vangliste nous explique qu'il y a visiblement deux types de baptme : l'un est uniquement accompli par l'eau et n'a de valeur que symbolique; tandis que l'autre correspondrait une exprience concrte du Saint-Esprit et du feu. Jsus insiste sur le fait de s'tre fait baptiser par Jean-Baptiste dans l'eau, mme s'il se fit baptiser plus tard par le SaintEsprit et le feu :Alors parat Jsus, venu de Galile jusqu'au Jourdain auprs de Jean pour se faire baptiser par lui. Jean voulut s'y opposer: " C'est moi, disait-il, qui ai besoin d'tre baptis par toi, et c'est toi qui viens moi! " Mais Jsus lui rpliqua: " Laisse faire maintenant: c'est ainsi qu'il nous convient d'accomplir toute justice. " Alors, il le laisse faire. Ds qu'il fut baptis, Jsus sortit de l'eau. Voici que les cieux s'ouvrirent et il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et voici qu'une voix venant des cieux disait: " Celui-ci est mon Fils bien-aim, celui qu'il m'a plu de choisir. " Mt 3, 13-17

Deux lments me semblent importants dans cette description : Jsus qui est souvent appel " Matre", se soumet lui-mme au baptme dans l'eau dont la valeur n'est que simplement symbolique, et il fait accomplir ce baptme par un baptiste qui se considre lui-mme 46

comme lui tant infrieur au niveau spirituel. Pourquoi cet acte de Jsus ? Peut-tre pour souligner qu'il accepte lui-aussi une sorte de " mdiateur " pour ne pas apparatre comme parfait de manire inne? Cette thse se trouve confirme du fait que tous les textes du Nouveau Testament voquent le mme fait : ce n'est qu'au moment du baptme que le Saint-Esprit est " descendu " en lui. Cela signifie-t-il que Jsus n'a retrouv toutes ses forces divines qu'au moment du baptme? Ou cela signifie-t-il simplement que sa tche publique n'a commenc qu' ce moment prcis ? Il tait donc g de trente ans et les Evangiles ne racontent rien de son volution, de sa vie et de ses activits jusqu' ce moment-l Dans l'Evangile selon Marc, nous trouvons un texte presque identique sur l'activit de Jean et le baptme de Jsus :Jean le Baptiste parut dans le dsert, proclamant un baptme de conversion en vue du pardon des pchs. Me 1, 4

Et un peu plus bas :Il proclamait: Celui qui est plus fort que moi vient aprs moi et je ne suis pas digne, en me courbant, de dlier la lanire de ses sandales. Moi, je vous ai baptiss d'eau, mais lui vous baptisera d'Esprit Saint. Or, en ces jours-l, Jsus vint de Nazareth en Galile et se fit baptiser par Jean dans le Jourdain. A l'instant o il remontait de l'eau, il vit les cieux se dchirer et l'Esprit, comme une colombe, descendre sur lui. Et des cieux vint une voix: Tu es mon Fils bien-aim, il m'a plu de te choisir. Me 1,7-11

47

L'vangile selon Luc fait du baptme le thme central du commencement de l'activit publique de Jsus :Il (Jean-Baptiste) vint dans toute la rgion du Jourdain proclamant un baptme de conversion en vue du pardon des pchs. Le 3, 3

Toujours selon le mme Evangile, on demanda Jean s'il n'tait pas Elie de retour ou un autre prophte voire le Messie-mme. Voil sa rponse :Moi, je vous baptise d'eau; mais il vient celui qui est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de dlier la lanire de ses sandales. Lui, il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu. Le 3, 16

Et un peu plus loin :Or, comme tout le peuple tait baptis, Jsus, baptis lui aussi, priait; alors le ciel s'ouvrit; l'Esprit Saint descendit sur Jsus sous une apparence corporelle, comme une colombe, et une voix vint du ciel " c'est toi mon fils. Moi, aujourd'hui, je t'ai engendr." Le 3, 21-22

Enfin, l'vangile selon Jean donne la description suivante :Or ceux qui avaient t envoys... continurent l'interroger en disant: Si tu n'es ni le Christ, ni Elie, ni le Prophte, pourquoi baptises-tu? Jean leur rpondit: Moi, je baptise dans l'eau. Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas; il vient aprs moi et je ne suis mme pas digne de dnouer la lanire de sa sandale. Jn 1, 24-27

48

On ne retrouve d'ailleurs dans l'vangile selon Jean ( au moins dans sa forme connue ) aucune indication du fait que Jean ait baptis Jsus sa demande exprs, bien qu'on y trouve une remarque discrte concernant un baptme collectif auquel Jsus aurait particip. Aprs ce baptme, Jean explique le pouvoir rel de Jsus :Et Jean porta son tmoignage en disant: J'ai vu l'Esprit, tel une colombe, descendre du ciel et demeurer sur lui. Et je ne le connaissais pas, mais celui qui m'a envoy baptiser dans l'eau, c'est lui qui m'a dit: Celui sur lequel tu verras l'Esprit descendre et demeurer sur lui, c'est lui qui baptise dans l'Esprit Saint. Et moi j'ai vu et j'atteste qu'il est, lui, le Fils de Dieu. Jn 1, 32-34

Dans un contexte trs diffrent alors que Jsus va tre condamn par les grands prtres et par Pilate, deux de ses disciples lui demandent de pouvoir partager son sort pour accder ainsi la place ct de lui dans le royaume de Dieu. La Bible cite Jsus et ce qu'il dit du baptme :Jsus rpondit: Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire? Ils lui disent: 1 Nous le pouvons. Il leur dit: Ma coupe, vous la boirez ; quant siger ma droite et ma gauche, il ne m'appartient pas de l'accorder: ce sera donn ceux pour qui mon pre l'a prpar. Mt 20, 22-23

1. Ndt : Dans la version franaise de l'vangile selon Matthieu, il manque cette phrase importante : et vous faire baptiser avec le baptme qui m'a baptis. 49

Il ne semble pas vident selon cette citation que Jsus fasse allusion son baptme avec le Saint-Esprit qui remonte dj quelques annes en arrire ou s'il dnomme ainsi sa crucifixion proche et dont il avait connaissance, l'assimilant par consquent au " baptme ". Chez Matthieu, il semble s'agir du baptme avec l'Esprit Saint auquel ses disciples avaient assist. Chez Luc, la conclusion est bien diffrente :C'est un baptme que j'ai recevoir, et comme cela me pse jusqu' ce qu'il soit accompli! Le 1 2, 50

Les Actes des Aptres situent clairement le baptme de Jsus dans le Jourdain comme le dbut de sa vie active publique, notamment grce la prsence de ses disciples. Nous y lisons :Il y a des hommes qui nous ont accompagns durant tout le temps o le Seigneur Jsus a march notre tte, commencer par le baptme de Jean jusqu'au jour o il nous a t enlev... Ac 1, 21-22

Ce mme chapitre du Nouveau Testament apporte d'autres informations intressantes sur la diffrence entre le " baptme de Jsus " et le " baptme de Jean ". La citation suivante dmontre qu'apparemment, les aptres baptisaient galement au nom du Saint-Esprit :Jean a bien donn le baptme d'eau, mais vous, c'est dans l'Esprit Saint que vous serez baptiss d'ici quelques jours... Ac 1, 5

50

Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu, les aptres qui taient Jrusalem y envoyrent Pierre et Jean. Une fois arrivs, ces derniers prirent pour les Samaritains afin qu'ils reoivent l'Esprit Saint. En effet, l'Esprit n'tait encore tomb sur aucun d'eux; ils avaient seulement reu le baptme au nom du Seigneur Jsus. Pierre et Jean se mirent donc leur imposer les mains et les Samaritains recevaient l'Esprit Saint. Ac 8, 14-17

Il s'agit l d'une citation fortement intressante qui prouve que non seulement le baptme fait par Jsus luimme ( dans l'Esprit Saint et dans le feu ), mais galement celui de ses aptres et de ses disciples fait aprs sa crucifixion, se diffrencie fondamentalement du baptme avec de l'eau effectu par Jean. Les hommes baptiss par les aptres recevront donc galement l'Esprit Saint! Un autre extrait nous montre que Jsus avait donn une puissance particulire ses disciples en les rendant aptes continuer accomplir ses tches et de rpandre son message :Pierre exposait encore ces vnements quand l'Esprit Saint tomba sur tous ceux qui avaient cout la parole. Ac 10, 44 ... Avez-vous reu l'Esprit Saint, quand vous tes devenus croyants ? - Mais, lui rpondirent-ils, nous n'avons mme pas entendu parler d'Esprit Saint! Paul demanda: Quel Baptme, alors, avez-vous reu ? Ils rpondirent: Le baptme de Jean. Paul reprit: Jean donnait un baptme de conversion et il demandait au peuple de croire en celui qui viendrait aprs lui, c'est--dire en Jsus. Ils l'coutrent et reurent le baptme au nom du Seigneur Jsus. Paul leur

51

imposa les mains et l'Esprit Saint vint sur eux: ils parlaient en langues et prophtisaient... Ac 19, 2-6

Il me semble vident que les disciples baptisaient selon le " baptme de Jsus ", autrement dit dans l'Esprit Saint. Mais ils le firent au nom de Jsus et non pas en leur propre pouvoir ; puisque le Christ leur avait donn ce pouvoir de baptiser dans 1 Esprit Saint. Dans l'Epitre aux Ephsiens, Paul reprend le thme du baptme :...un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptme, un seul Dieu et Pre de tous, qui rgne sur tous, agit par tous, et demeure en tous. Ep 4, 5-6

L'vangile selon Jean donne une rponse ambigu la question de savoir si Jsus baptisait lui-mme ou non :Aprs cela, Jsus se rendit avec ses disciples dans le pays de Jude; il y sjourna avec eux et il baptisait. Jn 3, 22

Mais un peu plus loin, nous lisons :Quand Jsus apprit que les pharisiens avaient entendu dire qu'il faisait plus de disciples et en baptisait plus que Jean, - vrai dire, Jsus lui-mme ne baptisait pas, mais ses disciples - il quitta la Jude... Jn 4, 1 -4

Il paratrait que le " baptme de Jsus " ne fut jamais clbr avec de l'eau, mais qu'il se passait souvent par imposition des mains sur la tte. Il semblerait probable que Jsus, ds le dbut, avait dlgu l'acte du baptme52

extrieur ses disciples. En tout cas, ces derniers agissaient sur mission de Jsus et le baptme s'accompagnait d'une exprience relle de la venue de l'Esprit Saint. Le fait que Jsus ait dlgu ses disciples le droit de pratiquer le baptme apparat plusieurs reprises :Allez donc: de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Pre et du fils et du Saint-Esprit... Mt 28, 19

Et il leur dit: Allez par le monde entier, proclamez l'Evangile toutes les cratures. Celui qui croira et sera baptis sera sauv... Me 16,15-16

Cependant, dans l'vangile selon Luc, on ne parle pas du baptme au nom de Jsus en tant que tche confie aux disciples, mais dans l'Evangile selon Jean, le message est bien clair :Alors, nouveau, Jsus leur dit: La paix soit avec vous. Comme le Pre m'a envoy, mon tour je vous envoie. Ayant ainsi parl, il souffla sur eux et leur dit: recevez l'Esprit Saint; ceux qui vous remettrez les pchs, ils leur seront remis. Ceux qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. Jn 20, 21-23 Dj vous tes monds par la parole que je vous ai dite. Jn 15, 3

Donc, Jsus a transmis de manire dfinitive un pouvoir ses disciples - " il souffla sur eux... recevez l'Esprit Saint " - qui leur procurait l'aptitude de baptiser d'autres personnes et de les librer de leurs pchs.53

En rsum : Jean le Baptiste a excut un baptme avec l'eau symbolique; Jsus lui-mme s'est fait baptiser. Lors de ce baptme de Jsus avec de l'eau, il s'est pass un vnement trs particulier puisque le " Saint-Esprit " est descendu sur Jsus. Selon le tmoignage de Jean, Jsus est ainsi ( partir de ce moment-l?) capable de pratiquer un baptme beaucoup plus puissant que Jean parce qu'il pouvait baptiser avec le Saint-Esprit et le feu. Jsus a alors dlgu ses disciples de baptiser d'autres personnes en s appuyant sur sa force ce qui en faisait un rel " baptme de Jsus " et non pas un baptme l'eau symbolique. Ce baptme fait descendre l'Esprit Saint sur les hommes baptiss, mme sans la prsence physique de Jsus. Le baptme se fait en gnral, ou dans la plupart des cas, par une imposition de la main, mais aussi quelquefois par la transmission de la parole ( ou de plusieurs paroles ). Ce baptme relie donc au Saint-Esprit ; en plus, il rend bienheureux et peut mme racheter les pchs. Aprs avoir tudi les forces merveilleuses de la parole et avoir lucid le pouvoir particulier du baptme, interrogeons-nous maintenant sur l'homme, pour dcouvrir un miracle sans doute aussi tonnant que celui de la parole ternelle et du baptme rel.

54

L'homme comme temple de Dieu

" Homme, connais-toi toi-mme ", telle tait la sentence inscrite au fronton du temple de l'oracle de Delphes. " La connaissance de soi prvaut sur la connaissance de Dieu " fait partie des nombreux aphorismes de la spiritualit orientale. Et vous-mme, vous avez bien d dj vous poser la fameuse question : " Qui suis-je?" Ne serions-nous qu'un simple amoncellement de molcules organises selon certains principes, par groupes capables de grandir, de se multiplier et de se modifier avant de mourir et de se dcomposer dans leurs composants d'origine ? Ne vivons-nous nos sensations et nos penses volutives que comme le rsultat d'un processus biochimique labor dans le cerveau et dans le corps ? Ou bien, sommes-nous, en tant qu'homme, autre chose? Nous avons bien un corps; nous avons des yeux et des oreilles; un cerveau; nous prouvons des sentiments et des penses; mais ne sommes-nous pas davantage que tout cela? Le grand philosophe Karl Popper a, dans un de ses derniers livres, justement pos la question de savoir si le cerveau " possdait " la conscience ou si ce n'tait pas plutt la conscience qui avait un cerveau.55

Qu'est-ce que cette fameuse conscience? Y a-t-il quelque chose en nous d'immuable ? Si la description de la parole dans l'vangile selon Jean est juste, alors cette force ternelle, qui est l'origine de toute cration, devrait se trouver galement en nous. tudions quelques messages de la bible sur ce sujet.Ne savez-vous pas que vous tes le temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous? Si quelqu'un dtruit le temple de Dieu, Dieu le dtruira. Car le temple de Dieu est saint et ce temple, c'est vous. 1 Co 3, 16-17

Un peu plus tard, nous lisons un passage similaire :Ou bien ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous et qui vous vient de Dieu, et que vous ne vous appartenez pas? 1 Co 6, 1 9

Et un peu plus bas :Qu'y a-t-il de commun entre le temple de Dieu et les idoles? Car nous sommes, nous, le temple du Dieu vivant comme Dieu l'a dit: Au milieu d'eux, j'habiterai et je marcherai, je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. 2 Co, 6, 16

Les Actes des Aptres insistent expressment sur le fait que Dieu n'habite pas dans des temples btis par l'homme :Mais ce fut Salomon qui lui btit une maison. Et pourtant le Trs-Haut n'habite pas des demeures construites par la main des hommes. Comme dit le prophte: Le ciel est mon trne et la terre un escabeau sous mes pieds. Quelle mai-

56

son allez-vous me btir, dit le Seigneur,et quel sera le lieu de mon repos? N'est-ce pas ma main qui a cr toutes ces choses. Ac 7, 47-50

Paul s'adresse aux habitants d'Athnes pour leur expliquer que ces monuments de pierre ne peuvent pas tre le temple vritable :Quand je parcours vos rues, mon regard se porte en effet souvent sur vos monuments sacrs et j'ai dcouvert entre autres un autel qui portait cette inscription: Au dieu inconnu. Ce que vous vnrez ainsi sans le connatre, c'est ce que je viens, moi, vous annoncer. Le Dieu qui a cr l'univers et tout ce qui s'y trouve, lui qui est le Seigneur du ciel et de la terre, n'habite pas des temples construits par la main des hommes... lui n'est pas loin de chacun de nous. Car c'est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l'tre... Ac, 17,23-28

Un peu plus bas, dans l'Eptre aux Ephniens, nous trouvons ce passage :Ainsi, vous n'tes plus des trangers, ni des migrs; vous tes concitoyens des saints, vous tes de la famille de Dieu. Vous avez t intgrs dans la construction qui a pour fondation les aptres et les prophtes, et Jsus-Christ lui-mme comme pierre matresse. C'est en lui que toute construction s'ajuste et s'lve pour former un temple saint dans le Seigneur. C'est en lui que, vous aussi, vous tes ensemble intgrs la construction pour devenir une demeure de Dieu par l'vangile. Ep 2, 1 9-22

La citation suivante dmontre que le corps humain est le temple de Dieu :57

...Quel signe nous montreras-tu...? Jsus leur rpondit: Dtruisez ce temple et, en trois jours, je le relverai. Alors les Juifs lui dirent: Il a fallu 46 ans pour construire ce temple et toi, tu le relverais en trois jours ? Mais lui parlait du temple de son corps. Jn 2, 1 8-21

Toutes ces citations sont on ne peut plus claires : ce n'est pas le btiment extrieur de l'glise, le temple difi en pierres par l'homme qui peut tre la vritable demeure de Dieu, mais c'est l'homme lui-mme ! Il ne peut pas en tre autrement parce que la Gense nous dit que Dieu cre l'homme " son image ". Que trouvons-nous donc de commun toutes ces cathdrales, toutes ces mosques, tous ces temples et toutes ces glises de toutes les religions ? Tous se dressent vers le ciel, l'intrieur brle une " lumire ternelle " sous la forme de lampes huile ou de bougies ou d'autres sortes de lumires; tous rsonnent de cloches ou de conques ou d'une autre sorte de musique. En l'homme, lequel doit tre le vritable temple de Dieu, rayonne une " lumire dans les tnbres ", une lumire ternelle et sans ombres. Dans le temple humain rsonne l'ternelle parole de Dieu. Comme je l'expliquerai ultrieurement dans un des chapitres suivants, l'architecture extrieure des glises symbolise notre temple intrieur. Dans l'homme, en nous-mme au niveau de notre me, nous pouvons capter la parole divine, la lumire ternelle et la musique cleste nous conduisant vers Dieu. C'est ici, dans le corps humain, que nous pouvons raliser et dvelopper ce lien avec le Saint-Esprit reu lors du Baptme, pour devenir une seule entit avec lui. Les temples extrieurs58

servent initialement de rappel visible d'une ralit purement spirituelle. La rvlation que Dieu possde en nous un temple par la force de la parole devrait nous rendre reconnaissants et heureux. Car cela signifie que Dieu n'est pas loin de nous puisqu'il vit en nous. De plus cela signifie qu'il est possible d'tablir un lien direct entre nous et lui. En mme temps, cette rvlation implique une trs grande responsabilit de notre part qu'il s'agit d'assumer avec engagement, mais aussi avec humilit. Il s'agit l en effet de prendre la responsabilit d'accepter le corps humain en tant que temple de Dieu et de s'efforcer de conduire notre vie humaine comme tant au service de Dieu. Nous vacillons souvent entre deux extrmes : d'un ct, nous nous prenons trop au srieux, mais nous avons tendance nous considrer comme particulirement intelligents; de l'autre nous nous considrons encore plus petits que nous sommes en ralit. Cela engendre soit une attitude franchement de supriorit soit des complexes d'infriorit. Dans le Nouveau Testament, nous trouvons un passage tonnant sur notre vrai tre, une phrase qu"il s'agit d'accepter en toute humilit, mais aussi avec la volont de reconnatre une vrit divine :Vous tes la lumire du monde. Mt 5, 14

Qui est cette lumire du monde ? N'est-ce pas Jsus seulement? Non, ne seraient-ce pas aussi ses disciples inspirs par le Saint-Esprit, veills pour rpandre la parole, baptiss eux-mmes par l'Esprit Saint et aptes baptiser d'autres hommes au nom de Jsus pour que ces 59

derniers puissent reconnatre leur propre nature de lumire et leur quintessence ternelle? Tous les tres humains sont invits se fondre en Dieu. Nous sommes un temple de Dieu o rgne l'Esprit de Dieu ce qui nous permet de vivre une relle religion. Relisons quelques extraits de la Bible :...l o je suis, vous serez vous aussi. Quant au lieu, o je vais, vous en savez le chemin. Jn 14, 3-4

Ce ne sont pas seulement ses disciples, mais chaque tre humain qui est destin vivre Dieu :Vous donc, vous serez parfaits comme votre Pre cleste est parfait. Mt 5, 48

Nous lisons dans la premire ptre selon Jean :Mes bien-aims, ds prsent nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n'a pas encore t manifest. Nous savons que, lorsqu'il paratra, nous lui serons semblables, puisque nous le verrons tel qu'il est. 1 Jn 3, 2

Dans l'Ancien Testament, il est crit que du point de vue de la cration pour le moins, l'homme est aussi " saint " que Dieu l'est lui-mme :Le Seigneur adressa la parole Mose: Parle toute la communaut des fils d'Isral; tu leur diras: Soyez saints, car je suis saint, moi, le Seigneur, votre Dieu. Lv 1 9, 1 -2

Si l'homme est donc le temple de Dieu, comment dcouvrir Dieu en soi ? Deviendrait-il de ce fait inutile 60

de se rendre jusque dans une glise extrieure? Nullement, parce que chaque visite dans une glise peut s'avrer trs utile - elle peut permettre de s'intrioriser, de se rappeler des vrits premires; elle favorise la communion avec les autres hommes prenant galement le temps d'orienter leur conscience vers l'aspect spirituel de la vie humaine et facilite ainsi votre propre effort spirituel. L'vangliste Jean explique mme o et comment nous pouvons entrer directement en contact avec Dieu :Dieu est esprit et c'est pourquoi ceux qui l'adorent doivent adorer en esprit et en vrit. Jn A, 24

En rsum : Aucun difice fait de bois et de pierre, de verre et d'acier, dress selon des critres artistiques ou simplement par amour pour Dieu ne peut tre le vritable temple de Dieu car c'est le corps humain qui hberge Dieu. Ce corps humain cr par Dieu et sa propre image est anim par la force de la parole divine; y rayonne une lumire ternelle car c'est le rceptacle de l'esprit de Dieu sous forme de l'me. Dans l'obscurit du sommeil de notre me, nous n'avons ni reconnu notre rle en tant que temple de Dieu ni peru l'esprit de Dieu pourtant prsent en nous. L'exprience du baptme avec l'Esprit Saint s'effectue cependant dans ce temple corporel et nulle part ailleurs. Il faudrait donc prendre davantage de prcaution l'gard de ce vritable temple de Dieu, mais seulement sur le plan spirituel parce que 61

ce n'est que sur ce plan-l que nous pouvons adorer et vivre Dieu. Comment peut-on vivre soi-mme, sur un plan pratique, la lumire sans ombre de ce temple divin? Laussi, les vangiles canoniques nous donnent des recommandations trs surprenantes. Il semble exister quelque chose comme un " Troisime il " un " il de l'me " nous permettant de regarder vers l'intrieur, vers le haut et jusqu'aux plans spirituels !

62

Le Troisime il

Nous percevons les choses dans le monde avec nos yeux physiques; avec nos oreilles physiques nous entendons les bruits et les sons du monde. Comme tous les organes sensoriels, les yeux et les oreilles sont phmres et soumis transformation. La parole et la lumire, le Saint-Esprit et Dieu cependant sont ternels et " subtils ". Pouvons-nous les percevoir avec des moyens aussi grossiers et aussi matriels que notre corps prissable ? Si nous sommes un temple de Dieu, ce temple lui-mme peut-il voir la lumire de Dieu et entendre la voix divine? Est-ce le temple qui voit et entend Dieu, ou cette fonction est-elle rserve l'me ? Depuis toujours, les saints et les mystiques nous enseignent qu'il existe une vision interne sans vue extrieure parce qu'elle passe travers un prtendu " Troisime il ". tudions ce que la Bible en dit :...voil que te tiendra lieu de signe sur la main, de mmorial entre les yeux, afin qu'en ta bouche soit la loi du Saint-Esprit. Ex 13; 9

63

...tu en feras (des paroles des commandements) un signe attach ta main, une marque place entre tes yeux... Dt 6,8

Mes paroles que voici, vous les mettrez en vous, dans votre cur, vous en ferez... une marque place entre vos yeux. Dt 11, 18

C'est qu'apparemment, il existerait donc, entre les deux yeux, un endroit, o l'on puisse placer une marque. Or, c'est prcisment cet endroit que toutes les autres traditions religieuses placent le Troisime il. Les textes des livres de Mose montrent donc une similitude tonnante avec d'autres enseignements quivalents. Job le confirme dans la citation suivante o il atteste que l'on puisse voir et entendre Dieu :Et aprs qu'on aura dtruit cette peau qui est mienne, c'est bien dans ma chair que je contemplerai Dieu. C'est moi qui le contemplerai, oui, moi! Mes yeux le verront, lui, et il ne sera pas tranger. Jb 1 9, 26-27

Ainsi donc, mme si le corps physique est ananti, il pourra continuer - si l'on en croit Job - voir Dieu. Il doit par consquent s'agir d'une perception spirituelle sans intervention des organes sensuels. Il poursuit :Je ne te connaissais que par ou-dire, maintenant, mes yeux t'ont vu. Jb 42, 5

Voir Dieu n'est pas la mtaphore d'un dsir, mais une ralit tout fait tangible : 64

Moi, et c'est justice, je verrai ta face; au rveil, je me rassasierai de ton image. Ps 17, 15

Toutefois, cette ralit ne peut se concrtiser que pour l'homme " veill ". En attendant ce moment, la lumire divine brille dans l'obscurit du temple de Dieu sans que l'esprit humain qui vit dans le temple, le sache. Comment trouver cet veil ? Par le baptme par le SaintEsprit ? Par l'ouverture du Troisime il ? Le thme du Troisime il se trouve, plusieurs reprises, trs clairement voqu dans le Nouveau Testament :La lampe du corps, c'est l'il. Si donc ton il est sain, ton corps tout entier sera dans ta lumire. Mais si ton il est malade, ton corps tout entier sera dans les tnbres. Si donc la lumire qui est en toi est tnbres, quelles tnbres! Mt 6, 22 -23

Dans l'dition anglaise de King James, nous lisons galement :... when thine eye be single, thy whole body also is full of light. Mt 6, 22 -23

On parle donc dans ces diffrents extraits d'un " seul il ", une notion que l'on retrouve dans d'autres contextes :Et si ton il entrane ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi; mieux vaut pour toi entrer borgne dans la vie que d'tre jet avec tes deux yeux dans la ghenne de feu! Mt 18,9

65

Ce texte ne cherche nullement indiquer qu'il faille s'arracher un il. L'interprtation mystique de ce passage nous apprend que le Troisime il nous permet de voir la vie relle et ternelle et de connatre notre vritable nature spirituelle; nos deux yeux physiques cependant ne peuvent percevoir que la relativit chimrique du monde des apparences. Concernant cette lumire divine que nous ne voyons que grce l'il de l'me, nous y trouvons une rfrence dans l'vangile selon Luc :Personne n'allume une lampe pour la mettre dans une cachette, mais on la met sur son support, pour que ceux qui entrent voient la clart. La lampe de ton corps, c'est l'il. Quand ton oeil est sain, ton corps tout entier est aussi dans la lumire ; mais si ton il est malade, ton corps aussi est dans les tnbres. Examine donc si la lumire qui est en toi n'est pas tnbres. Si donc ton corps est tout entier dans la lumire , sans aucune part des tnbres, il sera dans la lumire tout entier comme lorsque la lampe t'illumine de son clat. Le 11, 33-36

Certains lments du puzzle commencent concorder : la parole brille dans les tnbres, sans que celles-ci l'aient reconnue. Si l'homme reconnat cependant qu'il est le temple de Dieu et que la lumire divine brille en lui, il devient capable de percevoir cette lumire grce au Troisime il ! En relisant l'Apocalypse selon Jean, nous y dcouvrons certaines informations concernant l'importance du Troisime il. Le jugement apocalyptique ne s'appliquerait-il pas tous les tres humains... 66

...mais seulement aux hommes qui ne portent pas sur le front le sceau de Dieu. Ap 9,4 Gardez-vous de nuire la terre, la mer ou aux arbres, avant que nous ayons marqu du sceau le front ds serviteurs de notre Dieu. Et j'entendis le nombre de ceux qui taient marqus du sceau: 144.000 marqus du sceau, de toutes les tribus des fils d'Isral... Ap 7, 3-4 Ils verront son visage et son nom sera sur leurs fronts. Ap 22, 4

L'Ancien Testament voque un signe de reconnaissance plac sur le front entre les yeux et les vangiles dsignent cet endroit mystrieux en plein milieu du front comme tant l'oeil unique. L'Apocalypse selon Jean accrot encore le mystre puisque les hommes choisis sont marqus du sceau sur leur front. Il est sr qu'il existe dans le temple de Dieu, entre les yeux, un endroit particulier, une sorte de saint des saints, qui permet l'me humaine concerne de percevoir la lumire divine qui l'habite. La Bible voque non seulement une vision intrieure, mais aussi une coute intrieure :Le Seigneur m'a donn une langue de je sache soulager l'affaibli, il fait surgir aprs matin, il me fait dresser l'oreille, comme les disciples; le Seigneur m'a moi, je ne me suis pas cabr, je ne me arrire. Es 50, 4-5 disciple: pour que une parole. Matin pour que j'coute, ouvert l'oreille. Et suis pas rejet en

De quelle oreille peut-il s'agir ? Certainement pas de nos oreilles physiques, plus exactement de la capacit 67

de l'me percevoir les sons intrieurs, la voix silencieuse de Dieu. Mme si cette coute intrieure est dcrite maintes reprises, les dtails et la description du Troisime il et de ses caractristiques prdominent nettement. On peut lire ce propos dans le soi-disant vangile secret selon Marc qu'il existait un enseignement oral, destin aux cercles internes, pouvant expliquer l'absence de citations se rfrant l'oreille dans la Bible. La voie vers son intrieur qui passe par l'oreille unique est un chemin trs particulier ; pour l'emprunter, il nous faut dtourner notre attention du monde et de ses innombrables objets, et l'orienter vers l'intrieur, vers le monde spirituel. Or, cela ne se fait pas sans difficults :Entrez par la porte troite. Large est la porte et spacieux le chemin qui mne la perdition, et nombreux ceux qui s'y engagent; combien troite est la porte et resserr le chemin qui mne la vie, et peu nombreux ceux qui le trouvent. Mt 7, 13-14

La " vie " dont parle ce texte, est identique la parole et la lumire de l'vangile selon Jean. La "perdition" est lie au fait que nous soyons attachs (presque uniquement) aux formes phmres terrestres et des expriences terrestres passagres. Cette porte et ce chemin vers la plnitude de ce monde sont trs allchants, mais ils ne mnent nullement une prise de conscience de la part de l'me concernant son origine divine et sa vie ternelle. Jsus, dans sa mtaphore des riches, 68

explique quelle attitude intrieure il faut adopter pour passer par la porte troite du Troisime il :Mes enfants, qu'il est difficile d'entrer dans le royaume de Dieu! Il est plus facile un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu' un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. Me 10,24-25

Certaines versions anciennes de la Bible sont encore plus explicites : si je m'appuie sur " ma richesse" - qu'il s'agisse d'argent, de biens, de connaissances, de raison, de sensations - c'est que j'ai fait confiance quelque chose d'phmre. Attach de tels lments transitoires, je ne pourrai pas entrer dans le Royaume de Dieu parce que la porte d'accs en est trs troite et que le chemin qui y mne est, lui, trs peu large. Le seul accs m'est possible en tant qu'me, c'est--dire en tant qu'entit spirituelle dpouille de toute forme d'gosme et de fausses identifications avec tous ces lments phmres. Dans les Psaumes, nous trouvons galement des passages voquant une faon apparemment inhabituelle de s'ouvrir Dieu :Portes, levez la tte! levez-vous, portails antiques! Quil entre, le roi de gloire! Ps 24, 7

Notre conscience est l o est focalise notre attention. Si nous regardons vers le haut, vers l'intrieur, vers le divin, et si nous ouvrons notre me la lumire et la parole, condition de regarder travers la porte du Troisime il, alors " le roi de la gloire " peut entrer en nous. 69

En rsum : La Bible rpte plusieurs reprises qu'il est tout fait possible de voir Dieu et la Lumire divine. Cet espace situ entre les deux yeux physiques joue un rle important et le Nouveau Testament indique trs clairement l'il unique comme tant le Troisime il nous permettant de percevoir la Lumire divine, c'est--dire cette Lumire qui brille pour les tres humains. Il existerait nn phnomne similaire la vision par le Troisime il galement au niveau de la parole ou de la "voix divine ", reposant donc sur l'coute intrieure. La voie vers le Troisime il ou mme travers le Troisime il n'est pas simple parce qu'il ncessite de laisser derrire soi tout ce qui n'est pas ternel si nous dsirons y pntrer un jour. Essayons maintenant d'observer d'un peu plus prs les passages de la Bible voquant cette vue et cette coute intrieures.

70

Les rvlations de la lumire et de la musique intrieures

" Veillez ce que la lumire en vous ne soit pas des tnbres ", rappelle l'vangile. Apparemment, de nombreux auteurs de la Bible connaissaient dj la vue et l'coute intrieures sans organes sensoriels. Dans l'Ancien Testament, nous trouvons par exemple le passage suivant :En ce jour-l, les sourds entendront la lecture du livre et, sortant de l'obscurit et des tnbres, les yeux des aveugles verront... Es 29, 18 Celui qui doit t'instruire ne se drobera plus et tes yeux le verront. Tes oreilles entendront la voix qui dira derrire toi quand tu devras aller ou droite ou gauche. Es 30, 2021

Qu'est-ce donc que les sourds peuvent bien entendre? Qu'est-ce que les aveugles peuvent bien voir ? Sans aucun doute rien de ce qu'ils peuvent percevoir avec leurs sens corporels sourds et aveugles. Il doit donc forcment s'agir d'une autre forme de perception, de la perception interne, spirituelle, au niveau de l'me. 71

La plupart des tres humains reste cependant (encore) incapable de s'intresser aux perceptions et aux ralits invisibles mais nanmoins perceptibles :Ecoute donc ceci, peuple born et sans cervelle: - Ils ont des yeux et ne voient point, des oreilles et n'entendent pas. N'aurez-vous pas de respect pour moi, oracle du Seigneur? Jr 5, 21 -22

De nouveau il est vident qu'il ne s'agit ni de la capacit de voir physiquement avec ses yeux ni d'couter avec ses oreilles corporelles, parce que, si les tres humains dont parle ce vers de Jrmie possdent galement ces organes, ils sont toutefois incapables ni de voir ni d'entendre. Ce dernier passage devient plus clair encore, appliqu la vision et l'coute internes. Qu'allons-nous voir et entendre que nos yeux et nos oreilles ne peuvent pas capter ? Dans les Psaumes, nous obtenons l'indication suivante :Heureux le peuple qui sait t'acclamer! Il marchera la lumire de ta face, Seigneur! Ps 89, 16

Dans la version anglaise, o nous retrouvons cette citation sous Ps 89, 15, sa signification est lgrement diffrente :Heureux le peuple qui connat le son qui rend heureux, Saint-Esprit; il marchera la lumire de ta face.

Quel est donc ce son - ou cette musique - capable de rendre heureux? S'agit-il de la douce Voix de Dieu ? S'agit-il de la parole ? S'agit-il ici de ce que d'autres mys72

tiques appellent la " musique des sphres " ou la musique cleste ? Il est fort dommage que beaucoup de versions se limitent des traductions assez loignes du sens initial, sans doute par manque de comprhension de la ralit mystique de ce passage. Regardons maintenant le message des aptres dans le Nouveau Testament en ce qui concerne ces questions :Et voici ceux qui ont t ensemencs dans la bonne terre:ceux-l entendent la parole, ils accueillent et portent du fruit... Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il entende! Me 4, 20, 24

Entendre la parole et l'accepter : il ne peut par consquent pas s'agir de mots prononcs par une bouche humaine parce que pour les couter, des oreilles normales et un mental normal seraient amplement suffisants. Pourquoi Marc ferait-il dire Jsus : Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il entende?... Qui n'aurait pas d'oreilles ? Il ne s'agit, mon avis, pas non plus d'oreilles humaines, mais de " l'oreille intrieure ", qui doit tre ouverte, tout comme le Troisime il. Qu'une telle ouverture doive tre faite avant que nous puissions percevoir ce que Jsus demande, se reflte travers l'extrait suivant de l'Acte des Aptres :...vers qui je t'envoie pour leur ouvrir les yeux, les dtourner des tnbres vers la lumire, de l'empire de Satan vers Dieu, afin qu'ils reoivent le pardon des pchs et une part d'hritage avec les sanctifis, par la foi en moi. Ac 26,18

73

La force de la parole, la puissance du Saint-Esprit, se prsentent nous non seulement - et nous le savons dj - comme lumire, mais galement comme son :Tout coup il y eut un bruit qui venait du ciel comme celui d'un violent coup de vent: la maison o ils se tenaient en fut toute remplie... Ils furent tous remplis d'Esprit Saint et se mirent parler d'autres langues... Ac 2, 2-3

Pour comprendre le sens du mot " bruit ", comparons cette sentence l'dition anglaise King-James qui prfre parler, elle, plutt de " sound ", c'est--dire de son. Le passage suivant souligne galement qu'il s'agit toujours de deux formes de perceptions diffrentes, d'une part, celles du monde extrieur et, d'autre part, celles d'un monde diffrent, intrieur, mais toujours " rel ":Les disciples s'approchrent et lui dirent: Pourquoi leur parles-tu en paraboles ? Il rpondit: Parce qu' vous il est donn de connatre les mystres du royaume des cieux, tandis qu' ceux-l ce n'est pas donn. Car celui qui a il sera donn, et il sera dans la surabondance; mais celui qui n'a pas, mme ce qu'il a lui sera retir. Voici pourquoi je leur parle en paraboles: parce qu'ils regardent sans regarder et qu'ils entendent sans entendre ni comprendre; et pour eux s'accomplit la prophtie d'Esae, qui dit: Vous aurez beau entendre, vous ne comprendrez pas; vous aurez beau regarder, vous ne verrez pas. Car le cur de ce peuple s'est paissi, ils sont devenus durs d'ore