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Le Suricate Magazine La malédiction du Suricate Une nouvelle écrite pour le magazine par Frédéric Livyns SPECIALBIFFF2013 films/ambiance/dvd/photos/nouvelle/critiques/tops/interview

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L'e-Magazine culturel en francophonie au BIFFF

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Page 1: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Le SuricateMagazine

La malédiction du SuricateUne nouvelle écrite pour le magazine par

Frédéric Livyns

SPECIAL BIFFF 2013

films/ambiance/dvd/photos/nouvelle/critiques/tops/interview

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Page 3: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Sommaire

21avril 2013

Special BIFFF

Edito : A l’intérieurTerrier : La face cachée du Suricate

BIFFF 2013, BIFFF de la b****Jour 1 : Démarrage sans imposture pour le BIFFF au BozarJour 2 : Du Fantastique, de l’onirique, du bon et du très mauvais

Interview Martin VilleneuveInterview François Schuiten

Jour 3 : Des araignées, Blanche-Neige, de l’inceste ... What else ?Jour 4 : Vendredi, journée du foirageJour 5 : Ca y est c’est le week-end, un super week-end !Jour 6 : Et nous revoilà enfin dans la voiture !Jour 7 : Les chinois, ils font ça bien parfois. Bébé Lynch aussi d’ailleursJour 8 : Cruise le nain gay philippin avec Cendrillon dans les légions de l’enfer (ou quelque chose du genre)

Interview Iain SoftleyInterview Roland Joffé

Jour 9 : Une tronçonneuse, un container et une ville déserte ...

p. 7p. 6

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Special BIFFF

Jour 10 : Pourquoi les morceaux de corps humain cuit me donnent faim ?Jour 11 : Belgian Day et tonton Argento is back !

Interview de Dario Argento

Jour 12 : Foutre ! C’est déjà fini !Post-BIFFF, Roxane déprimeBIFFF, la fin. Dis papa, c’était comment les Bozar

Top 10 de la rédactionClassement de la rédactionCinéma FantastiqueCollectiFFFJean-Luc MaitrankRémy S. Legrand

PalmarèsMake up et Body PaintingBook Photo

La malédiction du Suricate (nouvelle de Frédéric Livyns)

Remerciements

p. 42

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Edito

A l’intérieurNon, nous n’allons pas parler du très glauque film avec Béatrice Dalle en femme enceinte.

Mais plutôt de la couverture d’un festival de l’intérieur. Pour cela j’ai recruté une équipe de choc !

Roxane, la fille du BIFFF qui a fait son mémoire sur ce festival, ancienne attachée de presse et fana de gore.

Olivier, l’étudiant en journalisme. Il veut faire de la politique mais sans renier sa passion avouée et sa grande culture pour le cinéma de genre .

Cécile, sa plume humoristique et son envie de découvrir un monument culturel bru-xellois.

Anastasia, la photographe de choc, spé-cialiste du Body Painting et qui a l’envie d’explorer d’autres domaines pour son book.

Et bien sûr, le rédac’ chef, qui a appris à aimer le fantastique grâce au BIFFF. C’est déjà mon quatrième festival. Et c’est toujours un plaisir.

Découvrez au fil des pages, les chroniques journalières, les notations, les hauts personnages du BIFFF, etc.

Prenez un verre (ou plus) et plongez-vous dans l’horreur païenne ...

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La face cachée du Suricate

Je suis sûr que la plupart des gens quand ils ont découvert le nom du nouveau magazine en septembre dernier n’ont vu qu’un petit animal mignon, ressemblant au Timon du dessin animé de Disney Le Roi Lion !

Mais l’actualité en a décidé autre-ment, le 27 août 2012 à Pairi Daiza, le parc animalier belge hennuyer, les visiteurs indisciplinés ont provoqué les gentilles bébêtes sur leur terri-toire.

Regardez la jolie photo à gauche et voyez à quel point un Suricate c’est pas très très gentil. C’est même plutôt méchant et ça peut faire des dégats !

Pour le Special Brussels Interna-tional Fantastic Film Festival, il était de bon ton de remettre les choses à plat !

Vous n’êtes pas encore convaincu ? Alors, entamez la lecture de la nouvelle écrite par le romancier Frédéric Livyns pour notre numéro spécial Halloween !

Et comme on est gentil et que l’on ne veut pas vous forcer à revenir en arrière dans les publications, on a placé cette histoire dans ce numéro spécial.

Attention suricates méchants ! Vous ne verrez plus notre magazine de la même manière ...

Le terrier du Suricate

L.S.

Une publication du magazine

Le Suricate © http://ww.lesuricate.org

Directeur de la rédaction : Matthieu MatthysRédacteur en chef : Loïc SmarsDirecteur section littéraire : Marc BaillyDirecteur section musicale : Christophe PaulyDirecteur section théâtre : Baptiste Rol

Webmaster : Benjamin MourlonSecrétaires de rédaction : Pauline Vendola, Maïté Dagnelie, Adeline Delabre

Relation clientèle : [email protected]égie publicitaire : [email protected]

Ont collaboré à ce numéro :

Loïc Smars, Roxane De Quirini, Cécile Marx, Anastasia Vervueren, Olivier Eggermont et Matthieu Matthys (un peu sans le savoir).

Crédits

21 avril 2013

L.S.

Page 6: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF 2013, BIFFF de la b**** !

Pardonnez-moi tout d’abordmon écart de langage, heureusement protégé par des astérisques, je l’es- père pertinentes. Si ce titre vous a offusqué d’emblée, ne poussez pas plus loin votre curiosité. Car le BIFFF, pour ceux qui ne le savent pas, c’est tout de même des meurtres, du sexe, des monstres et une tonne d’autres déviances.

Cette année encore, du 2 au 13 avril, le BIFFF et ses BIFFFeurs enva- hissent Bruxelles pour 10 jours de fantastique. La plus grande origi-nalité de cette année est le dépla-cement au Bozar en plein coeur de Bruxelles (+1). Mais beaucoup redouterons sûrement l’adaptation au BIFFF d’une salle qui est fort loin du style de ce genre d’évènement (-1). Mais il y a deux salles, donc plus de films (+1).

Nous serons cinq journalistes du Suricate Magazine à essayer de vous faire vivre ce festival. Vous pourrez nous suivre en direct sur Twitter (@SuricateOrg), ainsi que lire l’inté- gralité du reportage dans notre numéro spécial BIFFF d’avril ou en résumé dans la parution du 2 avril.

Mais qui vient à la sÔterie ?

L'Ordre du Corbeau accueillera un nouveau membre : Neil Jordan, le réalisateur d’Entretien avec un vam- pire, Ondine, Crying Games, etc. Mais l’avantage au BIFFF est d’aussi d’avoir les équipes des films ou des gens du milieu dans les jurys. Citons par exemple : Dario Argento (!!!),

Frédéric Fonteyne, Vincent Lannoo, John Hough, Roland Joffé (!!!), Patrick Ridremont, Iain Softley, ...

C’est bien, mais on voit quoi comme films ?

Le BIFFF c’est évidemment des dizaines d’avant-premières euro- péennes ou internationales.

Dès l’ouverture, il faudra aller voir le nouveau film de Neil Jordan, Byzan- tium et un retour aux vampires dans la salle 1 et The Imposter, le docu- mentaire sur Frédéric Bourdin qui a défrayé la chronique en prenant la place de gens disparus dans la seconde.

En fermeture, le dernier film de Chan-Wook Park, Stoker avec, entre autres, Nicole Kidman en salle 1 et en salle 2, The Brass Teapot avec Juno Temple (Killer Joe).

C’est aussi plusieurs sections : Belgo- rama, Inédits, 1ère réa, Fils de Brutes (fils ou fille de Lynch, Cassavetes, Cronenberg ou Hough), BIFFF en herbe pour les plus jeunes (The Host, Jurassic Park 3D, Moon Man, etc.), une nuit du Fantastique, des com-

pétitions, des courts-métrages, des films de minuit,etc.

Et on fait quoi d’autre ?

Il y a des Cosplay, des Body Pain-ting, des artistes de rue, des maquil-lages, une ZombiFFF parade, des Master- class (Jordan, Argento, etc.), des expos, des rétrospectives à la Cine- matek, des Workshops, etc.

Cette année encore, les organisateurs ont sorti la grosse artillerie, de nou- velles idées. On était habitué certes à Tour & Taxis mais le défi Bozar est d’autant plus excitant malgré les doutes sur la classe du lieu. Suivez-nous dans les entrailles du Bozar pour découvrir, cette année encore, l’ambiance si particulière du BIF-FF ...

Films attendus

The Host d’A. Niccol sur base d’un roman de Stephenie Meyer, Oblivion avec Tom Cruise, Mama avec Jessica Chastain, Upside Down avec Jim Sturgess et Kirsten Dunst, Maniac et Elijah Wood en psychopathe, Dra- cula 3D d’Argento, Hellgate avec Cary Elwes et William Hurt, etc.

Twitter Live : @SuricateOrg

Loïc Smars

« Le BIFFF c’est du meurtre, du sexe, des monstres et une

tonne d’autres déviances»

La rencontre

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Chroniques journalières

- Que dit le corbeau ? -

AFFFril arrive et nous revoilà dans la voiture ...

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Page 7: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Le BIFFF c’est reparti ! Fini de se morfondre chez soi devant la série-télé du moment. On va passer deux semaines d’effroi et de défou-lement total.

Arrivé au Bozar, l’accréditation en poche, on se retrouve, comme tout le monde, à essayer de prendre ses repères dans le dédale de ce sublime bâtiment. Sans être sûr d’avoir encore tout trouvé, on se rassure d’avoir réussi à localiser les deux salles, le bar et le Maitrank de Jean-Luc. Sur ce, terminons notre verre rapidement, les premières séances vont commencer...

Pendant que tout le monde file admirer Neil Jordan recevoir l’hon-neur d’être Chevalier de l’Ordre du Corbeau, nous nous sacrifions pour découvrir l’intriguant The Imposter. Mélangeant le documentaire et re-constitutions, le film retrace une période de la vie du français Frédéric Bourdin. Recherché par Interpol pour des dizaines de cas similaires, il se fait passer pour un adolescent américain retrouvé en Espagne après avoir été, selon lui, exploité, violé et torturé. Très vite il se rend compte que la famille, qui l’a reconnu contre toute attente, l’accepte un peu trop

facilement et a peut-être, elle aussi, quelque chose à cacher.

La grande originalité est de se faire succéder les interviews des différents protagonistes à l’époque actuelle avec des reconstitutions, malheureu-sement pas toujours impeccables. L’autre grosse originalité est que Bent Layton (dont c’est le premier film) joue aussi la carte de l’humour et de la légèreté sur un sujet qui, pourtant, ne prête que peu à rire. Bien aidé, il est vrai, par la folie mythomane de Bourdin et le manque de discernement de la famille ou des enquêteurs.

Dans tous les cas, le BIFFF com-mence en beauté avec un très bon film et une ambiance qui, malgré les doutes, reste tout de même bon enfant et animée. Demain nous débuterons avec 25th Reich. Le type même de film pouvant être une grosse poilade ou un gros navet déprimant.

A demain pour plus de sang, de boyaux, de rates et de cerveaux !

Je rentre dans un lieu que je ne connais pas. Un labyrinthe même. Les couloirs aux trop hauts plafonds

et le blanc comme couleurs première, suis-je vraiment au BIFFF ?

Soudain un panneau attire mon regard, je dois descendre d’un étage. Première volée d’escalier, voici un rideau noir. Deuxième volée, un stand de body painting. Enfin, dernière volée et voici des visages que je reconnais enfin. Oui. Ca y est. J’y suis.

Le labyrinthe m’avale, je me suis perdue au sein de ce petit coin où les zombies croisent les trolls. Ho BIF-FF tu nous avais manqué.

Direction le bar et d’ores et déjà je sens l’odeur des hamburgers, des hot-dogs et de Rémy. Le monde s’agglutine autour du bar, les tables sont toutes prises, les discussions vont bon train.

« Hé la fille du BIFFF ! »Ca y est, je suis chez moi !

Les vannes se lancent, les gens se marrent. Une foule hétérogène qu’ une seule passion unit se retrouve pour partager 2 semaines de bonheur.

Mon ticket en poche, je me dirige vers la salle.

Je ne réalise pas encore tout à fait où je suis. Mais lorsqu’enfin les lumi-ères s’éteignent, que le public lance sont fameux « Tuer encore ? Jamais plus ! », la réalité m’atteint de plein fouet.

Ce que c’est bon d’être de retour.

Loïc Smars

21 avril 20137

« On va passer deux semaines d’effroi et de

défoulement total. »

BIFFF, jour 1 : Démarrage sans imposture pour le BIFFF au Bozar

Roxane de Quirini

Page 8: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, jour 2 : du fantastique, de l’onirique, du bon et du très mauvais ...

Deuxième jour en terre paï-enne et on commence fort, avec 25th Reich, le nouveau nanar assumé avec des nazis. Des quoi ? Effectivement, des nazis, on n'en verra pas beau-coup. On ne verra d’ailleurs pas grand chose dans ce film (vrai-ment ?) qui n’arrivera même pas à nous faire rire. Rien ne fonctionne dans ce récit incohérent, à l’interpré-tation inutile. L’ambiance chère au BIFFF sauvera un peu le fiasco.

Pendant ce temps avait lieu la Master Class de Neil Jordan. Passée la déception de n’avoir pu l’inter-viewer, le reste de l’équipe retrousse ses manches et part glaner quelques informations sur ce réalisateur culte.

A 14h, entretien avec un réali-sateur : Neil Jordan nous fait l'hon-neur de venir présenter une Master Class dans le Ciné 3 et ce, pour le plus grand bonheur de tout ses (nombreux) fans ! Pendant plus d'une heure et demie, le réalisateur de The Crying Game répond aux questions avec plaisir et verve. Confiant no-tamment que, malgré les apparences, il n'est pas un grand fan de films de vampires, parlant de sa collaboration avec Brad Pitt et Tom Cruise. Lors-qu'on l'interroge sur son métier, il est même un peu nostalgique : pour lui,

réaliser un film est plus dur et moins gratifiant que par le passé.

Le film suivant ne sera pas for-cément plus intéressant malgré ses quelques vedettes américaines. Plus concrètement, c’est le dernier-né de John Penney : Hellgate. Sous le cou-vert d'un titre peu original se cache en réalité un film... très peu original.

Mettant en scène un Cary Elwes (Saw, L'Ombre du Vampire) endeuillé par la mort de sa femme et sa fille, le film se présente comme étant une mauvaise adaptation de Sixième Sens avec une touche thaïlandaise (après la mort de sa famille, Jeff commence à voir des morts aux endroits où ils sont morts,... ça ne vous rappelle rien?). Bref, on s'en-nuie ferme et, mis à part les pres-tations de Cary Elwes et William Hurt, passez votre chemin, il n'y a rien à voir !

Pour la suite, 18h accueille deux genres totalement différents. D’un côté l’énigmatique Légende de T-Dog du taïwanais Tien-Chueh Lee, de l’autre les vampires à la sauce Xan Cassavetes, la fille de l’autre.Sa sauce à elle, c’est de revisiter le film de vampires en revenant aux fondements du genre. Un retour en arrière au contraire de par exemple Twilight ou Blade. On suit l’histoire

d’une jolie vampire bourgeoise très civilisée (elle boit le sang des ani-maux) et qui tombe amoureuse de Paolo, un fougueux humain. D’ail-leurs Paolo tombe aussi amoureux et n’a pas peur d’être lui-même trans-formé en vampire pour profiter pleinement des siestes crapuleuses. Mais voila que Mimi, la soeur légè-rement plus portée sur la décadence et les humaines bien chaudes, arrive leur rendre visite. D’un coup, tout part en cacahuète.

Il y a un certain paradoxe sur ce film : on a une histoire simple, vue encore dernièrement dans Twilight ou Sublimes Créatures (bien que ce soit des sorcières, l’histoire est très très proche) mais l’autre visage du film possède un côté plus adulte ainsi qu’une interprétation et une manière de filmer bien plus captivante. On ne regrette pas sa séance tout en se désolant de se rendre compte que rien de nouveau n’est apporté.

En même temps, passait l’énig-matique T-Dog. Vu le nom, ça aurait pu être une série retraçant le parcours du seul afro-américain ayant réussi à arriver à la troisième saison de la

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Page 9: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

série The Walking Dead. Mais c'est beaucoup plus dubitatif que je me rends au ciné 2. Il faut dire que ni le synopsis, ni l'affiche, ni les origines du film (Taïwan) ne sont encoura-geants ! Mais finalement, au fur et à mesure que le film avance, on se prend à l'histoire et elle en devient même prenante. Il est clair que ce film fait figure d'ovni au milieu de la tripaille habituelle du BIFFF mais il n'est pas désagréable, et ,malgré son côté très décalé, il prête souvent à rire et nous fait passer un bon moment. La surprise du jour !

Cette première journée étant assez longue, on enchaîne directement par Mars et Avril et Complex. La fatigue ne nous guette pas encore et l’alcool ne coule pas encore à flots. Com-mençons par la nouvelle oeuvre japonaise qui fait peur.

Asuka, étudiante infirmière, emmé-nage dans un nouvel appartement avec toute sa famille. Dès la pre-mière nuit, des bruits sourds se font entendre depuis l’appartement du voisin. Décidée à se présenter à celui-ci, elle finit par pénétrer dans son appartement et le retrouve mort. Lorsque les bruits reviennent, Asuka commence à considérer les rumeurs disant que son immeuble est hanté…

Cela faisait un petit temps que l’on n’entendait plus parler d’Hideo Na-kata, le réalisateur qui avait terrorisé toute une génération avec des films

comme The Ring 1, 2 et 3 ou encore Dark Water. Le voici cependant de retour avec une œuvre qui reprend un par un tous les codes de la terreur qui ont fait le succès des Nakata.

Malheureusement, le film est un désastre et on s’ennuie plus qu’on ne crie. Long, lent, prévisible et tension inexistante, voici quelques mots pour décrire le petit nouveau de Nakata. Une ghost story aux effluves de déjà vu, un film sur-explicatif et ennuyant du début à la fin. Nakata semble vouloir filmer l’infilmable et comble les blancs par des scènes inutiles. Les dialogues sont pour ainsi dire inexistant tout comme l’action qui, si elle se révèle au 9/10 du film, ne surprend plus personne. Bref un film à jeter aux oubliettes aussi vite que possible.

On ne peut s’empêcher aussi de vous immerger dans le très original Mars et Avril. Première réalisation de Martin Villeneuve qui a porté ce projet pendant huit ans, on assiste à quelque chose de couillu, d’original. J’aime quand les gens osent de nouvelles choses, se mettent en danger tout en sortant des carcans cinématographiques actuels. Fran-çois Schuiten, grand dessinateur belge, ne s’y est d’ailleurs pas

trompé en acceptant de collaborer sur son film mais aussi en demandant à Villeneuve de réaliser son prochain projet. Vous pouvez en apprendre plus en découvrant les interviews des deux protagonistes dans ce même numéro. Sinon, passez à la suite du texte et apprenez que l’onirisme, la poésie, l’univers créé et l’héroïne principale sont à couper le souffle. Mais n’en déplaise aux BIFFFeurs, pas de sang ni monstres, ce qui peut déranger un public pas prêt pour un départ dans un beau voyage. Nous, oui.

Vu que vous avez été bien sage de lire jusqu’ici, on vous offre, gratui-tement, comme ça, un avis sur Citadel.

Raflant les prix de beaucoup de festivals, Citadel était attendu com-me une claque. Bien sûr, comme pour tous les films glorifiés par la presse, le déception est de mise. L’image est maitrisée et l’histoire plutôt bien trouvée, la tension est de mise et les acteurs (du moins James Cosmo) sont impressionnants de vérité. Mais voilà, voulant partir du sujet de l’agoraphobie, le film plonge dans une intrigue fantastique sans trop savoir comment ni pourquoi il nous y emmène. La mise en scène de la première moitié du film nous don-nant à voir une cité glauque, sombre voire sinistre nous plonge dans cette atmosphère malsaine, angoissante.

9 21 avril 2013

« Vu que vous avez été bien sage de lire jusqu’ici, on vous offre gratuitement, comme ça,

un avis sur Citadel. »

Page 10: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Thomas et Joanne, jeune couple heureux s’apprête à la naissance de leur premier bambin et, pour mieux l’accueillir, emménage dans un HLM des plus sympathiques. La veille de l’accouchement, Joanne est victime d’une terrible agression qui laissera Thomas veuf et père solitaire d’une jolie petite fille. Reclus dans son appartement, le jeune homme souffre d’une agoraphobie profonde se refusant tout contact avec le monde extérieur.

Mais voilà, un malheur n’arrive jamais seul et bientôt les agresseurs reviennent avec pour seule envie de s’en prendre à l’enfant de son couple déchiré.

Alors heureuse ?

Après cette journée fort inconstante, on termine la soirée avec le très attendu Maniac avec Elijah Wood (enfin, en Belgique, car les Français l’on découvert il y a déjà trois mois). Alors, sauveur de soirée ou enfon-ceur de couteau dans la plaie ?

Remake de l’excellentissime Maniac de William Lustig, ce film laisse un arrière goût de trop peu qui dérange.

A la sortie le public BIFFFiens se scandait de beaucoup de « pas mal pour un remake ». Une phrase bien trop facile à mon gout. Le Maniac de 2013 est un raté dans la mesure ou l’originalité qu’il apporte n’est pas à la hauteur d’un film comme l’était l’original. La caméra subjective utilisée à tout bout de champs donne finalement le mal de mer. Dommage puisque le personnage de Franck Zito est probablement l’un des psychopathes qu’on adore détester, à

l’image de Norman Bates ou encore du Hannibal Lecter du Silence des Agneaux.

Le choix d’Elijah Wood pour inca-rner ce personnage froid, sadique, perturbé est, à mon sens, un très mauvais choix.

Lorsqu’on vous répète à tout bout de champ que c’est Frodon qui scalpe les jeunes filles en fleur, il n’y a rien à faire, le charme est rompu. On s’attend à tous moment à ce que l’ancien hobbit vous sorte l’anneau de sa poche et vous emmène au Mordor.

Bien fichu par ailleurs (quand il n’est pas flou à cause des mouvement de la caméra subjective) et se dotant d’une bande original sympa, Maniac ne nous a pas convaincu. Pas du tout même.

Le reste de l’équipe (Olivier et Loïc) n’étant pas d’accord, on en a profité pour pinailler un petit temps au bar. Mais vraiment que pour pinailler !

Roxane De Quirini, Olivier Eggermont et Loïc Smars

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Page 11: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Bonjour M. Villeneuve. Mars & Avril est votre premier long métrage. Racontez nous votre parcours jusqu'ici dans ce milieu.

Tout d'abord j'ai fait des études en cinéma avant d'aborder un cursus en design graphique et après cela j'ai fait des livres qui étaient un peu des hybrides de ces deux choses. M. Schuiten (le concepteur visuel du film) s'est retrouvé dedans. Ensuite les droits du livre ont été racheté par un des acteurs du film : M. Robert Lepage qui voulait en faire un film de science-fiction. J'ai trouvé cela très emballant. Au départ j'ai été engagé en tant que scénariste. Petit à petit François Schuiten et Robert Lepage m'ont encouragé à devenir réalisateur, j'ai finis par accepter et le film s'est fait tant bien que mal.

Vous faites partie de cette nouvelle génération de réalisateur québécois montants, y a-t-il un réel potentiel au Québec à ce niveau ?

Effectivement ! Le cinéma québécois rayonne à l'international. Pour la troisième année consécutive on avait un film nominé aux Oscars (pour le meilleur film étranger avec « War Witch »). C'est donc un cinéma qui se porte plutôt bien dans le contexte international actuel où il est de plus en plus difficile de faire des longs-métrages indépendants. Bien entendu ce n'est pas un cinéma très rentable. Le but d'un film comme « Mars & Avril » n'est évidemment pas de faire de l'argent mais de marquer l'esprit et de lancer des carrières, de bousculer les codes établis. Tous les réalisateurs rentables à Hollywood ont commencé par des films comme cela.

Vous attendiez vous à un accueil aussi enthousiaste de la critique internationale pour votre film ?

Ce qui est étonnant, c'est qu’au Québec ce n'est pas du tout élogieux. Nul n'est prophète en son pays. Au Québec la critique a été très sévère avec le film. Les gens n'ont pas su, je pense, entrer dans le film. Il y a une espèce de rejet car le film est tourné vers l'avenir alors qu’au Québec on produit très souvent des films tournés vers le passé, des drames noirs ou des comédies. Heureusement, cela a créé une certaine curiosité des gens qui ont voulu aller le voir pour se faire leur opinion.

Votre film tranche par rapport aux « habituels » du BIFFF, cela est-il un avantage pour vous au niveau de sa visibilité ?

Je crois que oui. Si tu fais un film pour plaire à tout le monde ça ne va plaire à personne ! C'est important de faire un premier film qui nous correspond et ce film me correspond parfaitement. Et j'aime le fait que le BIFFF décide de mettre en avant de jeunes cinéastes comme moi, c'est un beau tremplin pour nous et le fait que mon film soit un ovni dans la pro-grammation lui donne un avantage je pense. Cela crée de la curiosité. C'est, je crois, la meilleur façon de se faire remarquer.

On ressent dans votre film une grand influence de réalisateurs comme Terry Giliam.

Effectivement ! Pas au point de dire « je vais le faire à la manière de... » mais c'est sûr que des cinéastes comme Gilliam ou Stanley Kubrick

m'ont inspiré. Même si, à la base, ma première inspiration en tant que réalisateur vient du monde de la bande dessinée. J'ai essayé avec François (Schuiten) de trouver la forme qui convenait le plus au contenu du film. On a essayé de se distancer de ce qui a déjà été fait tout en s'approchant de certaines autres choses.

L'idée de la musique est essentielle dans le film ainsi que celle d'un visuel très soigné.

Effectivement. La manière dont la musique peut libérer l'âme. Je pense que tout le monde vibre sur certaines fréquences. L'univers est musical, ce n'est pas nouveau, c'est une théorie qui nous vient de la mythologie mais encore aujourd'hui des recherches de pointes se font sur cette comparaison entre la musique et le cosmos. Je suis parti du modèle cosmologique de Kepler pour composer mon film et après nous l'avons adapté à notre sauce.

Enfin quel est votre film fantas-tique/horreur et votre film roman-tique favori ?

Je ne suis pas un grand fan du cinéma d'horreur ! J'ai d'ailleurs fait Mars & Avril en réaction à la violence que l'on voit habituellement au cinéma puisque l’on y voit pas une seule scène violente. Pour le film fantas-tique j'hésite entre 2001, l'odyssée de l'espace et Brazil et pour un film romantique je dirais Harold et Mau-de.

11

A la rencontre de Martin Villeneuve

Propos recueillis par Olivier Eggermont

21 avril 2013

Page 12: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Vous êtes présent au BIFFF pour deux événements : d’un côté un film, et de l’autre, une deuxième affiche dessinée pour le festival. Pouvez-vous nous parler de cette affiche et de vos sources d’inspi-rations ?

J’ai fait la première affiche du BIFFF, il y a 30 ans (1983). A l’époque, il n’y avait pas de moyens, le rouge était le minimum et il fallait faire avec pas beaucoup. Il y avait aussi peu d’expérience. Depuis, il y a eu vraiment de très belles affiches, ce qui rendait les choses intimidantes. Intimidant de concevoir une affiche pour un festival que vous connaissez mieux avec le temps, où des liens de complicités se sont créés.

J’ai pensé assez rapidement à cette idée de souffle comme un rayon de projection, d'un rayon lumineux ou encore d’un appareil de projection cinématographique. Je fais aussi le parallèle entre le rayon de projection et le souffle d’un cinéaste, le souffle d’un homme. Cette image s’est imposée comme si ce corps, ce visage dans le ciel de Bruxelles, inhalait ce souffle venant du Bozar.

Vous aviez déjà la garantie que le festival se déroulerait au Bozar quand vous avez commencé à tra-vailler sur l’affiche ?

Oui, et c’est justement ce qui m’a intéressé, car j’adore ce bâtiment. C’est un bâtiment de Victor Horta, qu’on a parfois un peu dénigré pour son style Art Nouveau, un style plus classique, mais que je trouve remar-quable. Quand on a la chance de déambuler dans son architecture, on comprend toute l’intelligence et toutes les qualités de cet architecte.

Qu’est-ce qui vous a poussé à faire le don de vos planches originales aux différents centres de la bande-dessinée ou à la fondation Roi Baudouin ? Je n’ai pas souvenir que d’autres dessinateurs aient fait la même chose.

L’inquiétude, sans doute, de voir que ce qui est à l’origine d’une BD (du papier, en ce qui me concerne) être vendu dans des galeries, des ventes publiques ou simplement par mes enfants pour payer les droits de succession. Ces planches originales risquaient alors, à long terme de disparaître. (si ça intéresse encore quelqu’un à l’avenir). Au moins, si quelqu’un a envie de faire des livres, qu’il puisse les faire les plus beaux qu’ils soient car il aura le matériel d’origine. Et je suis convaincu que l’on fera des plus beaux livres encore qu'aujourd'hui et que l’on aura des moyens d’entrer dans l’image, des moyens de voyager, d’entrer dans le dessins, le détail du dessin et ça, seul les planches originales peuvent le donner.

Cela a surpris beaucoup de monde comme décision.

J’ai mis du temps pour me décider, car ce n’est pas une décision facile. Il y a des moments où l’on passe financièrement par des périodes complexes, et c’est, en quelque sorte, une façon de vous dessaisir de quelque chose qui a compté pour vous.

Revenons-en au BIFFF. Question rituelle : quel est votre film d’hor-reur préféré et quel est votre film d’amour préféré ?

Que cette question est difficile ! Alors, je vais peut-être faire mon

intéressant et mon cinéphile, mais je pense que mes films d’horreur préférés sont les films de Murnau. Je trouve que le noir et blanc, que j’adore, donne une expression très limitée et qu’avec très peu, il crée beaucoup. Mais je peux parler aussi des films de Fritz Lang (M le maudit) qui, pour moi, ont créé une inquié-tude, une angoisse très forte.

Pour passer à l’autre question, je trouve qu’une des plus belles scènes d’amour dont j’ai le souvenir, c’est dans Blade Runner quand Harrison Ford embrasse cette femme dont il sait qu’elle est peut-être un robot. Et le trouble que nous avons en tant que spectateur, de savoir que cette femme de très grande beauté n’est peut-être pas humaine, change complètement cette scène et lui donne une toute autre dimension.

Mais il est vrai que je ne suis pas très film d’amour au sens classique du terme. Je n’ai donc pas une très grande expérience cinématographi-que sur ce sujet.

Parlons maintenant du film Mars et Avril. Vous avez travaillé avec Martin Villeneuve pour son tout premier film. En quoi votre travail consistait-il sur ce film et comment la collaboration s'est-elle passée avec lui ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?

On s’est rencontrés tout simplement parce qu’un jour, il m’a envoyé ses deux livres et que j’ai vu qu’il avait déjà le désir de concrétiser son rêve. Je lui ai dit souvent que c’est un rêve d’adolescent ce film. Il a les rêves d’un jeune garçon qui est à la découverte du corps de la femme. Il y a des choses très poétiques, dans le sens de ce qui émeut un jeune garçon,

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A la rencontre de François Schuiten

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un jeune adulte. Il reste de cela dans son film qu’il a commencé à écrire à 18 ans. Son projet, il l’a d’abord concrétisé sous forme de livre et ça m’a touché. Je trouvais alors qu’il y a avait une sorte d’obstination que moi j’adore. J’aime quand quelqu’un est obstiné, d’une façon obsessionnelle, attaché à son projet et qu’il n’en démord pas. Et j’ai vu cela jusqu’au bout car il a défendu son projet comme un malade pendant 8 ans, il a même hypothéqué sa maison. Après, que ce soit le film le plus décrié, le plus critiqué, cela m’est égal car je suis prêt à suivre quelqu’un qui me montre ça.

Et vous, que lui avez-vous apporté concrètement ?

J’ai l’impression d’avoir été surtout un parrain. C’est à dire quelqu’un qui était toujours derrière lui pour lui dire : « Je suis avec toi ! Et si tu as besoin de moi et de mes capacités d’auteur, qui ne sont pas celles d’un producteur, je serai toujours là. » Je l’ai donc surtout soutenu.

Vous n’avez pas fait sa scénogra-phie ?

J’ai plutôt dialogué avec lui. J’étais à son service et j’étais présent s’il me demandait : « Tu peux imaginer ça ? » Et ensuite c’était remalaxé par les contraintes d’une production comme celle-la, c’est-à-dire très peu de moyens.

L’Orient-Express qui fait le tour du monde ressemble fort à la Douce ?

Bien sûr ! Martin Villeneuve a pris aussi parfois des choses dans mes livres. Il y a des éléments qui viennent de La Fièvre d’Urbicande. Il m’a demandé si ça ne me dérangeait pas et je lui ai dit de se servir, si ça pouvait l’aider. Dans ce projet, vous avez

envie, surtout, d’être utile, de servir le film.

Vous avez travaillé avec Jaco Van Dormael ou avec Chris Weitz ?

Avec Chris Weitz, c’était une petite collaboration, car en fait, je devais travailler avec le précédent réalisateur. Ensuite ils ont viré ce réalisateur et le producteur. J’avais fait tout un travail de conception et Chris Weitz a récupéré des petits morceaux.

Confirmez vous que le projet Aqua-rica avec Benoît Sokal serait réalisé par Martin Villeneuve ?

Tout à fait. On était là ce matin et hier a travaillé à trois. C’est vraiment notre projet à Benoît et à moi. Cela fait 10 ans que l’on est sur ce projet d’Aqua-rica et on était heureux de le donner à Martin pour qu’il puisse l’interpréter et se le ré-approprier avec un regarde neuf, un point de vue qui va un peu nous bousculer. Et d’ailleurs les séances de travail que l’on a eues étaient vraiment très riches !

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet ? Ce que l’on va voir ?

C’est un monde fantastique, qui mélangera acteurs et images de syn-thèse. C’est un projet beaucoup plus ambitieux, en terme de moyens et en terme d’ambitions artistiques. C’est un projet assez complexe. Je crois que c’est assez juste que l’on travaille avec lui pour des tas de raisons, mais surtout parce qu’il a une réelle proxi-mité avec l’image. Maintenant, vous décrire le projet en lui-même m’em-bête un petit peu. C’est vraiment un monde qui recoupe celui de Benoît et le mien. Je vous dirai que c’est un monde surprenant.

Avec Benoît on est amis depuis très longtemps et on se connaît très bien et

on aime raconter des histoires et, en fait, c’était très amusant de faire cette histoire ensemble. Ça fait tellement d’années qu’on la tricote. C’est encore un projet de très longue durée. Je pense que je suis condamné à ça.

Vous avez touché à tout, des fres-ques, des musées, des films, de la BD, des stations de métro, etc. Y a-t-il encore une spécialité qui vous attire ?

Je ne compte pas élargir à l’excès. Je trouve que j’en fait déjà un peu trop. J’aimerais parfois être plus concentré. J’ai une nouvelle histoire en cours. Ça fait 40 ans que je fais de la BD, j’ai commencé très jeune, à 16 ans et j’ai envie effectivement de ne pas m’épui-ser. Donc, il faut que je me recharge. Travailler avec Martin, travailler sur le TrainWorld et sur des tas de projets qui me sortent et qui m'obligent à m’enrichir, à gratter, à explorer de nouveaux espaces, ça profite un petit peu aux récits que je fais. Je crois que l’on ne peut pas tout le temps être derrière une table de dessin et juste tirer le fil de votre imaginaire ; à un moment donné il va s’épuiser. Il faut le remplir. Et le remplir, comme je travaille beaucoup, c’est vivre en travaillant. C’est vivre des choses qui vous lient à des projets et faire en sorte que ceux-ci soient passionnants.

Concernant le BIFFF, vous partez après ou vous restez avec nous profiter de l’ambiance ? Est-ce que l’ambiance vous plaît ?

Oui j’adore. J’ai toujours adoré et cette équipe me plaît énormément. Vous savez quand on a connu des gens très jeune, les voir garder leur rêve, leur passion, c’est un énorme plaisir. Ils sont aussi fous, ils sont aussi bordéliques et c’est formidable de les retrouver fidèles à eux-mêmes.

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A part l’histoire en cours et le film avec Martin Villeneuve et Benoît Sokal, de quels projets pouvez-vous nous parler ?

Oh oui, je ne sais par quel bout commencer. Le Train World est un projet qui me tient très fort à cœur, qui ouvrira vraisemblablement fin 2014. Il me tient à cœur parce que j’en suis vraiment le scénariste, scénographe et c’est un domaine qui touche à tellement de dimensions. Il n’y a pas que le ferroviaire, on touche aussi à l’urbain, à la société, à l’industrie, à tout ce qui construit le monde actuel. Le train a vérita-blement transformé notre monde. C’est passionnant d’entrer dans là-dedans, de rencontrer tous ces fous furieux, ces cheminots qui ne pensent qu’à ça. Quand on voit des gens perdus au fin fond d’un dépôt en Belgique, qui dépensent toute leur énergie, leurs moyens à astiquer des locomotives dans des hangars énor-mes et dont c’est le rêve, le Graal, je trouve cela extrêmement attachant.

Est-ce qu’il y a un projet BD qui risque de sortir bientôt ?

Oui oui, je travaille sur une nouvelle histoire. J’ai déjà fait treize planches, et tout à l’heure, j’attaque la quator-zième. Ce sera une sorte de science-fiction avec Benoît Peeters. Donc, on se bouscule un peu. C’est encore un travail de collaboration. J’ai fait un livre seul avec La Douce, et peut-être que j’en referais, mais collaborer m’aide à bouger. Je suis obsédé par l’idée de l’entonnoir créatif. L’autre vous bouscule, vous pousse dans vos derniers retranchements. On est dans une société qui aime, malgré tout, que vous répétiez ce que vous savez faire et il faut faire tout le contraire, il

faut tout le temps s’aventurer vers les choses qui vous mettent en danger.

D’autres cinéastes ont déjà fait appel à vous ?

Oui, j’ai fait un film de science-fiction, un moyen-métrage grec. Plus fou, je ne connais pas comme projet. Je trouve qu’il a de la gueule. C’est un film vraiment curieux. Un film très intéressant à faire. Il sont venus vers moi un jour et je leur ai trouvé un concept, une façon d’utiliser une dimension conceptuelle, pour aider leur histoire. Ça a tellement marché, qu’ils l’ont pris.

J’ai aussi travaillé avec un très bon créateur de Los Angeles que je n’ai rencontré que par Skype. On travaille dans le cinéma comme ça, parfois, au bout du monde. Il y a des gens extrêmement talentueux qui font, avec des bouts de ficelle, des miracles. On invente de nouvelles collaborations et c’est très excitant. Je crois énormément à cette nouvelle façon de penser où l’on se construit des collaborations très imprévisibles, pas du tout dans les configurations que l’on aurait pu s’imaginer il y a quelques années. Il y a un nouveau cinéma qui est en train de s’inventer, de nouvelles façons de penser l’image. Un nouveau cinéma où l’on part à l’aventure. C’est très jubila-toire.

Propos recueillis par Loïc Smars

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BIFFF, jour 3 : des araignées, Blanche-Neige, de l’inceste ... What else ?

Troisième jour dans le super-be bâtiment du Bozar signé Horta, et les créatures BIFFFeuses prennent leur marques petit à petit. C’est aussi le jour où les traditionnels problèmes techniques apparaissent.

C’est d’ailleurs avec presque une heure de retard que commencera le film Cult dans le Ciné 2. En cause un problème avec les projecteurs. Il aurait peut être mieux valu qu'ils ne soient pas fonctionnels ! Car après visionnage du film, le moins que l'on puisse dire c'est « pffffffff ». Le film de Koji Shiraishi n'a en effet pas grand chose pour plaire. Entre un scénario banal et peu recherché qui tourne en rond et des acteurs stéréo-typés et mous, le film nous emmène dans une sorte de reprise nippone de Paranormal Activity avec des appa-ritions de créatures ressemblant aux limaces de Horribilis. Film de mau-vais goût, sors de cette salle !

Sortie de cette poubelle filmesque, l’équipe se sépare. Quand certains vont voir des gosses jouer à la guerre, d’autres découvrent (mais pas pour longtemps) le film asiatique fantastico-musical.

Le dernier film d’Uchida Kenji ne nous a pas du tout convaincu. Comédie policière dont le scénario

ne tient pas la route et auquel il est très difficile d’accrocher. Humour un peu niais et histoire peu originale, Key of Life nous emmène au cœur d’une comédie où deux personnes diamétralement opposées échangent leurs vies. D’un coté Kondo, tueur professionnel sans foi ni loi immo-ralement riche et de l’autre Sakurai, acteur au chômage et ayant des tendances suicidaires. Lors d’une séance aux bains turcs, Kondo glisse malencontreusement sur un morceau de savon et la chute, violente cela va sans dire, lui fait perdre la mémoire. C’est la chance que Sakurai saisit, échangeant leurs clés et donc leurs vies.

Nous devons vous avouer chers lecteurs, que nous n’avons pu rester jusqu’au bout de cette œuvre, les vannes redondantes et lourdes com-me celles que l’on retrouvait il y a une vingtaine d’années dans les comédies américaines un peu limites n’ont pu nous charmer et l’appel de la Troll fut plus fort que l’envie de rester. A 18h, nous avons aussi pu admirer un film de Jason Lapeyre et Robert Wilson : I Declare War. Et le moins que l'on puisse dire c'est que le film dénote avec le reste de l'affiche ! Racontant l'histoire de gamins qui

jouent à « se faire la guerre », le long métrage réussit à nous mettre dans l'imagination de ces enfants qui sont prêts à tout pour gagner la bataille ! Avec un scénario très bien ficelé et des performances d'acteurs très crédibles, ce film à la croisée de Stand by Me et Il faut sauver le Soldat Ryan apporte un vent rafraî-chissant.

Sur les coups de 20h, on insiste du côté oriental du ciné avec Horror Stories.

Une jeune fille se fait kidnapper par un personnage tourmenté que seules les histoires d’horreur peuvent aider à s’endormir. L’étudiante n’aura que quelques heures pour l’aider à se coucher dans les bras de Morphée…

Ce film à sketchs coréen (oui en-core !) a déjà fait des émules lors de sa présentation au PIFFF. Divisé en 4 histoires au sein d’une cinquième servant de fil rouge, Horror Stories souffre du mal que contractent énormément de films à sketchs, la demi réussite.

La première histoire, The Sun and The Moon, reprend les classiques de l’horreur coréenne en matière d’his-toire de fantôme. Deux enfants rentrent chez eux après l’école et

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s’occupent comme ils le peuvent attendant que leur mère rentre du travail. Réalisé par Jung Burn-Sik, ce segment impressionne pour plusieurs raisons, d’abord la maitrise, le talent des deux enfants qui nous entrainent dans leur cauchemar éveillé avec une facilité remarquable. La maitrise de l’image, du son et de la réalisation ensuite. Ce segment se termine dans un final époustouflant qui entraine le spectateur dans les tréfonds de l’angoisse.

La seconde histoire, la moins réussie de toutes selon nous, se déroule cette fois dans un avion. Im Dae-Woong nous emmène dans un trajet pas comme les autres. Un tueur en série est escorté par deux policiers pour un vol qui l’emmène dans son prochain lieu de résidence. Mais c’était sans compter les ruses du tueur.

Meurtres très réussis, tension pré-sente mais cependant, ce segment fonctionne beaucoup moins bien que le premier et même s’il se laisse suivre il ne marquera pas pour autant les esprits.

La troisième histoire nous emmène à nouveau dans une légende coréenne, Kongjwi and Patjwi qui conte comment une jeune fille sera prise en grippe par sa belle mère et sa belle sœur. Commençant dans une ambi-ance pseudo-romantique, le segment s’enfoncera dans le gore et les actes de violence comme on les aime.

Dénotant complètement des autres histoires, le segment de Hong Ji-Young est probablement le plus réussi graphiquement et le plus prenant du film. La réalisatrice s’éclate à détourner l’histoire ori-ginale pour en faire un film violent, jouissif que les acteurs, très bons par ailleurs, arrivent à porter de façon convaincante.

Enfin le dernier segment, lui, s’axera sur le phénomène à la mode : les zombies. Usant et abusant, malheu-reusement, des flashs, des lumières fortes, les frères Kim, réalisateurs de cette histoire nous perdent par mo-ment.

Huis clos au sein d’une ambulance, l’histoire de cette mère et de sa fille mordue par un zombie doit convain-cre les médecins que la petite peut encore être sauvée. Malheureu-sement, le tripe zombiesque assorti aux codes du genre (flashs, sursauts, sons très violents…) ne parvient pas à convaincre un public dont les yeux ont dévoré les trois premiers quarts du film.

Si certaines scènes semblent se répéter à l’infini, Horror Stories

nous convainc malgré tout et par-vient à nous entrainer dans ces différents mondes et légendes coré-ens. Une œuvre finie, très bien écrite et dont l’esthétique bluffera tous les passionnés de films asiatiques.

Mais c’est au même moment, que le public du BIFFF a découvert le très attendu Blancanieves (critique déjà parue dans le numéro 14 du Suricate Magazine).

Le dernier projet de Pablo Berger est en effet très attendu et la salle est comble pour le recevoir, ce qui est encore plus impressionnant quand on sait que le film est muet et en noir et blanc ! Le moins que l'on puisse dire c’est qu'il n'usurpe pas sa réputation. Ayant remporté le Goya du Meilleur Film à la cérémonie des Goyas, l'intrigue nous plonge dans l'Espagne des années '30 pour un remake moderne de l'histoire ancestrale des frères Grimm. Dans cette adaptation, Carmen (Blanche Neige) est la fille de Antonio Villalta, un matador reconnu. Sa femme meurt en accouchant tandis qu'il est condamné à passer sa vie dans un fauteuil roulant suite à un accident de corrida. La suite suit les grandes lignes de l'histoire originale mais adaptée à l'époque et au pays. Par la musique et un esthétisme très soigné,Blancanieves réussit à nous surpren-dre et nous divertir. Après The Artist, il semble que le cinéma

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« Une oeuvre finie et bien écrite dont l’esthétique

bluffera tous les passionnés de films asiatiques.»

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muet ait à nouveau de beaux jours devant lui.

Parfois au BIFFF, plus la nuit avance, plus la qualité décroît. Cette soirée ne mentira pas l’adage. Comment se préparer à un film 3D avec des araignées qui tuent tout le monde ? La réponse se trouve bien évidemment du côté du bar. On ne se prive pas, l’alcool aidant à supporter les navets.

Spiders 3D c’est le film d’exploi-tation américain calibré pour faire plaisir à un public qui cherche du Direct To Video à 1€ le DVD. Le réalisateur Tibor Takacs est la per-sonne idéale pour ce genre de projet. Avec des titres révélateurs comme Rats, Ice Spiders, Mega Snake, Sanctuaires, Lectures Diaboliques, etc., il représente le cinéaste même du sous-genre.

Tout y est : l’histoire d’amour, le grand héros qui sauve sa famille, le scientifique fou, le méchant vraiment méchant et, bien sûr, le monstre qui fait peur (enfin essaye, malgré des effets spéciaux souvent approxi-matifs). L’avantage de ces films est que l’on ne s’embête pas malgré le poids des lunettes 3D totalement inutile.

Ça ne peut être pire ? Attendez de voir Found. C’est typiquement le film amateur qui n’a, comme argu-ment, que des scènes trash et qui pense que cela suffira pour plaire.

Bien sûr que non ! En plus, les scènes calmes et psychologiques sur le héros sont pesantes et parasitent le film, rendant le tout finalement peu choquant. Un comble !

L’histoire ? Ha oui… Un jeune garçon sage, mais curieux, fouille les secrets familiaux et trouve une tête de femme noire dans le sac de bowling du grand frère (en conflit avec les parents). Un jour, il trouve un film amateur gore qui a sûrement influencé son frérot et qui consiste à couper la tête avant de pratiquer une sympathique fellation morbide. Le petit garçon se rebelle de plus en plus, fracassant la tête d’un camarade contre un arbre. La tension à son comble dans la famille, tout va terminer en orgie sanglante. Mais pas de problèmes, ça reste en famille !

Mais est-ce que tourner cela avec la vieille caméra de papa retrouvée au grenier suffit à se revendiquer réalisateur de films ? À vous de choisir.

Ne perdons pas espoir : demain, il y a du lourd (du moins sur papier) : la nouvelle comédie annoncée comme déjà culte avec Simon Pegg, A Fantastic fear of everything, le carton comico-SF brésilien, The Man from the future, Vanishing Waves et ses Méliès, des nazis à la sauce Frankenstein, Frankenstein’s Army, et l’attendu film The End, film annuel sur la fin du monde (on avait déjà vu l’année passée Extraterrestre

de Nacho Vigalondo). Et pour les courageux, une Master Class du cagoulé et mystérieux Jean-Jacques Rousseau (pas l’écrivain français, hein ! ) avec Rémy ... en guest star !

Loïc Smars, Olivier Eggermont et Roxane de Quirini

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BIFFF, jour 4 : Vendredi, journée du foirage

La journée a bien commencé (rires) avec la suite de Berserk et l’habituel et immuable manga du BIFFF.

Une belle surprise que voici. Bersek 2 est le deuxième opus de la trilogie homonyme. N’ayant malheureuse-ment pas eu la chance d’en voir le premier épisode, nous arrivons avec un tantinet d’appréhension à la sé-ance de 18h. La chance est avec nous ! Notre voisin, un ami de la Zone Geek, s'emploie à nous expli-quer vite fait, juste avant le lance-ment du générique, de quoi il en retourne (un tout grand merci à Gillus).

Le manga commence et… nous sommes embarqués dans ce qui s’avère être un récit de guerre, de pouvoir, en compagnie d'une troupe hors du commun, celle du faucon blanc. Avec de la violence, du sang et du sexe, l’adaptation de l’œuvre de Kentaro Miura s’avère aussi gore que ses tomes. Le seul reproche que l’on peut lui faire, c’est de se terminer sur une fin ouverte, mais qu’à cela ne tienne, c’est pour mieux titiller notre impatience en attendant le futur troisième opus. Le rythme est soutenu et nous n’avons pas le temps de nous embêter. Au final, alors que nous n’avions pas plus

envie que cela de voir ce manga, nous ressortons séduits. Nul besoin par ailleurs de voir le premier volet pour comprendre le second, ce qui en fait un film à part entière, une œuvre qui est à découvrir, surtout si vous êtes comme nous, très sceptiques face à l’art du manga. Rabibochez-vous avec le pays du soleil levant, regardez Berserk 2 !

Entretemps, tout dérape. Après s’être fait avoir sur les réservations de The End et The Man from the future (plus de places), on n’aura pas la pos-sibilité d’entrer à la séance de Vanishing Waves, la salle est archi-comble (mais là c’est notre faute, nous étions en retard). Heureu-sement les meubles sont sauvés grâce à A Fantastic fear of every-thing.

Mais avant d’arriver au summum de la journée, opérons un détour par l’Indonésie et son représentant : Modus Anomali. John se balade en forêt, John fait du bricolage, John lance un caillou, John se cache (souvent!) derrière une pierre. C'est un peu le résumé de ce thriller indonésien qui nous était présenté ce vendredi 5 avril au BIFFF. Et finalement, John nous a un peu

emmerdés. Car, outre un jeu d'acteur (presque unique) qui laisse parfois à désirer, le suspense n'est pas présent et le scénario est des plus banals. On s'ennuie ferme (et on le fait entendre dans la salle!). Bref, pas grand chose à voir ni à conclure de ce film à part qu'on a perdu 1h30.

Nous y sommes enfin ! Tous les fans du genre le vénèrent depuis Shaun of the Dead ... Simon Pegg est de retour dans son Angleterre natale après son détour hollywoodien (Mission Im-possible ou Tintin), mais sans ses potes Edgar Wright et Nick Frost. Nous suivons la quête paranoïaque d’un écrivain qui tente de survivre au milieu des pires meurtriers de son imagination. La vie de tous les jours n’est pas facile pour lui, mais elle deviendra totalement cauchemar-desque quand il sera appelé par son agent pour signer un gros contrat ! Ca fait des semaines qu’il n’est pas sorti de chez lui. Il faut pourtant qu'il aille au lavoir pour nettoyer ses vêtements, malgré la phobie incon-trôlable qu'il a là-bas depuis que sa mère l’a abandonné dans cette antre terrifiante. Magistralement débuté par des séquences de paranoïa dignes des plus grands, A Fantastic... perd un peu de son rythme soutenu dans une deuxième partie très psycha-nalyse de comptoir ...

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avant bien sûr de pénétrer dans le lavomatic tant attendu. Grâce à un Simon Pegg en roue libre qui profite totalement de son rôle, on passe un moment d’anthologie devant le premier film de Crispian Mills (lea-der du groupe psychédélique Kula Shaker). Et montrer ça à un public comme celui que l’on retrouve au BIFFF, c’est un peu regarder d’un oeil émerveillé d’enfant, son premier cadeau de Noël.

Passons le douloureux souvenir d’avoir raté Vanishing Waves (en fait non, on n'est pas si tristes), Roxane a pu voir Ghost Weepers (et ce n'est pas forcément une chance) ! Imagi-nez un endroit envahi d’esprits malins très très méchants. Imaginez que cet endroit soit justement en Corée et que pour vaincre ces fan-tômes, on décide d’envoyer une équipe de tous les exorcistes/spécia-listes en paranormal du pays. Et maintenant imaginez que tous ces pseudos charlatans soient des abrutis toujours prêts à faire rire l’assem-blée. Vous suivez ? Voici Ghost Sweepers c’est tout ça. Si les 45 minutes sont savoureuses, on s’en-nuie un peu vite et l’histoire a de la peine à tenir la route. Finalement bâti sur du vent, le château de cartes qu’est Ghost Sweepers s’écroule laissant le spectateur un peu perdu dans une intrigue vide de sens. Encore une œuvre qui, plutôt que de se vêtir d’un scénario, a préféré s’habiller de blagues tantôt grotes-ques, tantôt savoureuses. Après son

film sur le sanglier géant, Shing Jeong-Won nous offre à voir une comédie grotesque qu’on s’empres-sera vite d’oublier.La journée n’est pas encore finie : il reste la projection d’1h du matin. Le film des séances (historiquement appelé) Midnight, sont un peu ceux qui, même pour le BIFFF, sont

décadents. Sexe, drogue, alcool, violence à outrance, inceste, canni-balisme, ... on trouve vraiment de tout à ces séances, mais c’est souvent le pire.

Après le désolant Found, on se chauffe pour Frankenstein’s Army. Prenez des Russes à la fin de la Seconde Guerre Mondiale qui tuent des nazis par dizaines, amenez-les dans un lieu improbable et effrayant et ajoutez un scientifique fou, vous obtiendrez des monstres rafistolés avec les parties de plusieurs soldats nazis morts. Les monstres haute-ment improbables et mal foutus sont le lot de cette série Z dans laquelle finalement, comme pour 25th Reich, on ne verra que peu de nazis. C’est pas hyper bien foutu mais ça a le mérite d’être pas trop amateur et presque correctement joué. C’est

déjà pas si mal de ne pas s’endor-mir ?

Nous sommes fatigués. Mieux vaut aller dormir. Demain, c’est la journée principale du BIFFF : zombies, Fantastic Night, etc.

Roxane de Quirini, Loïc Smars et Olivier Eggermont

21 21 avril 2013

« Sexe, drogue, alcool, violence à outrance, inceste,

cannibalisme ... on trouve vraiment de tout à ces

séances, mais c’est souvent le pire »

Page 22: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Crispian Mills a ouvert la porte. Droit et élégant, comme un rosier bien taillé. On suppose derrière ses lunettes noirs, un regard nous invitant à rentrer. Jambes croisées, inévitable tasse de thé, le rockeur londonien semble enclin à nous parler de son pre-mier film en tant que réalisateur.

Rencontre avec un personnage cha-leureusement distant, subtil et pas-sionné.

Comment avez vous procédé pour réaliser votre premier long métra-ge, lorsque vous venez d'un art différent, la musique ?

Je ne pense pas que ce soit si différent.

Les milieux le sont eux par contre, on ne fait pas face au même type de personne, en ce qui concerne par exemple la persuasion, la demande d'argent pour un budget...

Mais le procédé à suivre pour créer quelque chose de nouveau reste le même pour moi.

Pour être réalisateur, je pense que vous devez davantage communiquer avec les gens, être dans l'échange, en revanche lorsque vous êtes musicien, c'est plus simple d'être et de rester

dans sa bulle. Être réalisateur c'est avant tout savoir faire des compro-mis, apprendre à collaborer.

Ce film c'était vraiment comme être dans un groupe (ndlr : un groupe de musique), c'est un film indépendant donc nous étions principalement entre amis, l'équipe artistique était très détendue.

Par contre, devoir gérer un budget au cinéma est totalement différent, très complexe. Je trouve ça miraculeux que n'importe quel film puisse être fait.

Simon Pegg est le producteur exé-cutif de votre film. Faisait-il part de la production depuis le début du projet, ou c'est son rôle dans le film qui lui a donné envie par la suite de s'investir encore plus ?

A la base, A Fantastic Fear Of Everything devait être un court métrage de vingt minutes. C'est Simon Pegg qui m'a convaincu d'en faire un long métrage. Il savait qu'il était parfait pour ce rôle.

C'est un acteur sensationnel, il a pris beaucoup de plaisir à jouer son personnage.

Il passe dans le film, le plus clair de son temps à courir en sous-vête-

ments, peu de personnes peuvent le faire avec autant de crédibilité que lui.

Lorsque vous faisiez de la musique, vos oreilles étaient sûrement la chose la plus importante pour votre perception, vos créations, et dans ce premier film, on remarque l'omniprésence d'un œil , est-ce un lien direct avec l'utilisation de l'organe sensoriel choisi, inhérent au média sur lequel vous travail-lez ?

Pour être honnête, lorsque j'enregis-trais mes albums, je visualisais tou-jours des scènes, des images. Ce qui était frustrant, car ce que je voyais dans ma tête était toujours plus excitant que le rendu final, comme si je n'avais fait passer que la moitié de ma vision. C'est à 27 ans que j'ai eu cette révélation : « Ce que je veux vraiment faire, c'est des films, des films avec beaucoup de musique dedans ! »

J'avais la sensation de perdre mon temps à jouer la rockstar. Puis j'ai compris plus tard que les réalisateurs viennent toujours d'un art différent, l'écriture, la musique le montage, la comédie... C'est ce qui fait la parti-cularité de chacun. Moi je suis un réalisateur « musical ».

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A la rencontre de Crispian Mills

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© 31st BIFFF - Saskia Batugowski

Page 23: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

À quelle époque exactement se déroule votre film ? On a un peu l'impression de faire un retour dans les années 90, alors est-ce un passé récent, ou un présent idéalisé ?

On a essayé de créer une époque ambiguë. Le personnage principal a un gsm, mais rédige son livre à la machine à écrire... Lorsque l'on ne peut pas totalement définir une époque dans un film, ça l'empêche de vieillir, il échappe à la désuétude.

Qu'avez vous ressenti lorsque les gens se sont mis à crier dans la salle devant votre film ? Comment avez vous vécu votre premier Bifff ?

C'était génial ! Le cinéma c'était comme ça avant, interactif...

On a perdu ce côté vivant, ludique. Excepté dans certains festivals bien sûr. Oui je n'avais pas vu ça depuis longtemps, ça m'avait manqué. Mais je ne pense pas que ce cinéma là soit mort, seulement il s'est restreint à un publique particulier, plus indépendant.C'est drôle lorsque j'ai trouvé le titre de mon film, je ne savais pas qu'il existait un festival comme le BIFFF. Et on se retrouve soudain à faire partie d'une famille, alors qu'on l'ignorait.

Est-ce la première fois que vous venez en Belgique ? Qu'en pensez vous ?

J'étais déjà venu il y a trois ans, enregistrer un disque, pas loin de Chimay. C'est un très bel endroit, les forêts semblent presque médiévales. J'avais vraiment passé un bon mo-ment. Et la bière, ce dont je me rappelle en tout cas (ndlr : rires) est incroyable, vraiment forte ! « Le pain liquide », c'est comme ça que l'on dit ?

Quels sont vos projets futurs ?

Je vais faire un autre film avec Simon Pegg, un film « Bollywood ».

Mais ça prend tellement de temps de faire un film. C'est la seule chose frustrante, on doit rester motivé, en enthousiasme constant et égal sur la croyance que l'on a en notre projet.

Même lorsque l'on se fait rejeter plusieurs fois de suite. Car les gens ont souvent peur, peur de prendre des risques. Le monde vit dans la peur, c'est d'ailleurs le sujet du film A Fantastic Fear Of Everything. C'est à cela qu'il faut faire attention lorsque l'on fait un film, aux gens qui vont essayer de non seulement vous décou-rager, mais vous transférer leur peur. J'ai essayé de faire une comédie autour de la peur, et de son irratio-nalité.

Propos recueillis par Cécile Marx (remerciement à Roxane de Quirini)

23 21 avril 2013

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BIFFF, jour 5 : ça y est c’est le week-end, un super week-end !

Le premier samedi du BIF-FF, c’est la Nuit du Fantastique et des Zombies ! On a aussi été voir d’autres films mais ils sont mini-misés par les deux principales activités de la journée, du soir et de la nuit.

Arrivé à 14h (pas eu le courage de me lever pour voir Moon Man à 11h après la journée de la veille), j’enta-me ce samedi par un film « BIFFF en herbe » In the Name of Sherlock Holmes.

Venu tout droit de Hongrie, le long-métrage de Zsolt Bernath raconte l’histoire de deux jeunes enfants se prenant pour une sorte de Sherlock Holmes, enfants qui veulent résoudre l’énigme en cours dans le quartier : les enfants disparaissent et revien-nent chez eux totalement changés et ne sachant plus rien faire, comme vides de tout esprit.

Malgré quelques carences due peut-être au peu de moyens, le film démarre à toute vitesse grâce à deux jeunes acteurs bourrés de charmes et à la reconstitution d’un Sherlock Holmes jeune assez intéressant (comme dans Le Secret de la Pyra-mide). Mais sur la dernière demi-heure, le charme se rompt en entrant dans une résolution d’enquête qui

tire en longueur vers le fantastique alors que l’on aurait préféré, comme pour l’original, un résultat plus réaliste d’un fait divers étrange. Dommage mais conseillé pour mon-trer à nos chères têtes blondes.

Cécile, qui vient de nous rejoindre est un peu perdue. Pour son premier film, elle résume très bien sa pre-mière expérience BIFFFienne :

C'est mon premier BIFFF, mais pas la première fois que je rentre au Bozar. C'est donc plus ou moins détendue que je pénètre dans ce lieu qui m'était rendu familier jusqu'ici par des conférences, expositions ou séances de cinéma...

Lorsque je croise quelques mètres plus loin, un prêtre ensanglanté qui me susurre au creux de l'oreille que je dois me repentir de mes péchés, je comprends alors que je dois oublier tout ce que je sais des festivals, des déguisements et autres performances.

Enivrée par l'odeur des hot-dogs et de la peinture du stand « Body Painting », je sens que l'esprit du BIFFF commence à prendre posses-sion de moi, et une chose est sûr, je n'ai pas (encore), envie de m'en faire exorciser.

C'est avec Here Comes de Devil que démarre mon marathon du Fantas-tique : un film réalisé par Adrian Garcia Bogliano.

Une famille part en excursion dans la montagne, les parents voulant passer un peu de temps ensemble, ils laissent leurs deux jeunes enfants filer se défouler dans les collines arides et lointaines de la station service où ils ont ordre de revenir une heure et demie plus tard. Après leur disparition une nuit entière, c'est métamorphosés que les petits retour-nent au point de rendez-vous. Mais que s'est il passé cette nuit-là ?

Ce film exécute la prouesse d'étendre la courbe spatio-temporelle. En effet, sa durée d'une heure et trente sept minutes me parurent deux longues et pénibles années. Malgré une aryth-mie décourageante, je suis, la plupart de la séance, terrée dans mon siège, les épaules crispées, prête à tourner de l’œil à tout moment. Est-ce dû au fait que je suis plus sensible que la population moyenne siégeant dans la salle ? Il semblerait que oui, car fusent réflexions, hululements, bla-gues et réactions exagérément drôles de la part du public.

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Vivre ce film ennuyeux mais terri-fiant de cette façon, fût l’exutoire parfait pour ne pas en ressortir traumatisée. Je tiens quand même à saluer la prestation de Francisco Barreiro et Laura Caro, les deux parents. Car ils ont le mérite d'être d'une intense vérité, malgré les dialogues creux et le scénario cousu de fil blanc.

C'est un peu sonnée et amusée par les commentaires des gens sortant de la salle que je vais pour me détendre avant d'entamer la réputée starlette du BIFFF « La nuit du Fantastique ».

Pendant ce temps, Olivier, maquillé de cicatrices bien pendantes et Anas-tasia derrière l’appareil photo ont testé la ZomBIFFF Parade et com-ment rater cet événement unique qu'est la ZomBIFFF Parade ? Le jour où chacun peut se balader en ville grimé en mort vivant, effrayer les passants, faire pleurer des bébés, montrer à tous notre passion pour la chair fraîche et tout cela légalement ! Départ du Parc de Bruxelles cette année avec moins de monde que précédemment. En effet, le temps n'est pas au beau fixe et la tempé-rature (5° environ) n'incite pas à sortir! Mais qu'à cela ne tienne, nous sommes tout de même nombreux à suivre le char construit pour l'occa-sion dans toute la ville et malgré une ambiance plus calme, tous auront pris du bon temps.

Dans le cadre du Zombie Day, le film de mort vivant qui nous était présenté est Zombie Fever, une petite perle qui nous vient de Russie. Le synopsis: Une météorite porteuse d'un virus zombie s'écrase en Russie au milieu d'une méga-fête... Dit comme ça on s'attend forcément à un nanar sans intérêt. Mais pourtant ce film aura mis l'entièreté du public d'accord !

Au milieu de tous les comédies zombiesques, Zombie Fever réussit l'exploit de nous apporter un produit de très bonne qualité! Kirill Kemnits mélange parfaitement le style du film de zombie avec une comédie décalée et savoureuse! Ca baise, ça picole, ça tue du zombie de toutes les manières possibles et surtout ça joue sur l'absurde tout en restant un bon défoulement. Alors bien sûr le film n'est pas du même calibre qu'un Shaun of the Dead mais il nous fait tout de même passer un très bon moment et mérite bien sa place dans le Zombie Day !

Pendant qu’ils prennent du bon temps, Roxane et Loïc assistent

impuissants à l’un des plus gros foi-rages du BIFFF : The Between.

L’histoire un papa presque mort qui emmène sa fille et son garçon cam-per en forêt, pour profiter une dernière fois de leur compagnie. Evidemment rien ne se passe comme prévu, et le lendemain au réveil, papa est mort et voilà les adolescents livrés à eux-mêmes. Sacs sur le dos, ils entament la traversée de la forêt qui va vite se révéler très capri-cieuse, tout en essayant de fuir un ennemi invisible. Pendant que ma-dame dort, petit frère se carapate avec de nouveaux amis, genre de Robinson Crusoë junior de la forêt.

Déjà, le résumé ne se prolongera pas, car il ne faut pas trop en dire (comment ça je n’ai pas compris ?) ! Malgré une interprétation assez cor-recte, rien ne décolle vraiment. L’image est belle, la forêt aussi mais on est pas dans le magazine Géo, on ne veut pas un documentaire sur la nature mais un film d’horreur ! Et ce n’est pas les méchants ridicules qui vont nous aider à y croire. Comment croire à deux bonhommes habillés en cow boys tartinés de cirage et aux lentilles rouges, qu’ils peuvent faire peur ? Et ceci bien sûr sans parler de l’histoire assez foutraque et d’un twist final vu une dizaine de fois depuis Le Sixième Sens (quoi je spoile ? vous voyez que j’ai com-pris !).

25 21 avril 2013

« Comment croire à deux bonhommes habillés en

cow boys tartinés de cirage et aux lentilles rouges,

qu’ils peuvent faire peur ? »

Page 26: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

La suite promet un peu plus : un thriller avec mÔssieur Tim Roth, The Liability.

Il a 19 ans, il se prend pour un caïd alors qu’il n’en a que la casquette et le jogging. Lui, c’est Adam, ce qu’on appelle chez nous un bouffon de première. Mais voilà, en plus de ne pas être très intelligent, Adam est aussi maladroit. Il bousille la jolie Mercedes de son mafieux de beau père. Celui-ci, pas content (tu m’étonnes, personne serait super heureux de se faire déclasser sa merco par un idiot en Sergio Tac-chini), d’abord explose la xbox d’Adam (il l’avait bien cherché, on ne va pas s’en cacher) puis lui propose un dilemme : soit il purge une peine de prison pour réparer sa faute, soit il travaille au service de beau papa afin de rembourser chaque cent de la dite automobile.

Adam n’est pas futé, mais il n’a absolument pas envie de se faire démonter en ramassant une savon-nette à Lantin, il accepte donc le boulot proposé et rencontre pour son premier jour, Roy, tueur à gage au service de beau papa.

Si vous n’appréciez pas l’humour anglais, amis, passez votre chemin ! Ici les gags s’enchainent et les répliques d’outre manche font sou-vent sourire. Malheureusement, le scénario est par moment un peu baclé et souvent le film semble n’être porté que par la prestance de Tim Roth. Son rôle nous ravit et son jeu nous comble, mais c’est à peu près tout. Si l’image n’est pas mal, il est à signaler que la bande originale est un orgasme musical qui donne envie de remuer son booty !

La célèbre nuit approche à petit pas, la foule se masse dans le bar du Bozar, tout le monde est serré et la

moitié de l’équipe se carapate vers une nuit bien méritée. Mais « La Fille du BIFFF », elle-même, Dame Roxane prend son courage à deux bites et décide de se faire une petite after intime loin des cris des BIF-FFeurs nocturnes. Elle se livre à nous :

Imagines un peu que tu t’éclates à une énorme soirée où l’alcool coule à flot et durant laquelle tu compte bien t’enfiler quelques bonnasses ! Et puis soudain, c’est le matin, tu as la gueule de bois de ta vie, tu te réveille avec la soi-disant bonnasse que tu as probablement défloré durant la nuit et la maison dans laquelle tu te

trouve ne possède aucune issue. Probablement le pire lendemain de veille de ta vie, non ? Imagine maintenant que le réalisa-teur de cette œuvre ait cité les trois mots magiques avant le lancement de son film : Blood, sex and fun (sang, sexe et fun pour ceux qui regardent leurs films en VF).

Le problème d’aujourd’hui pour les films tels qu’After Party c’est que, quoi qu’il arrive, on connaît absolu-ment tous les codes. Scream et autres slashers nous avaient déjà averti de ce qu’il allait se passer dans ce film. Et malgré les incohérences qui s’enchainent à une vitesse phéno-ménale, on finit par deviner, au bout de 45 minutes dans quelle direction le film compte aller. Mais comme on est gentil et un peu concon, on se laisse emporter dans cette baraque qui a une cave aussi grande que Tour et Taxis et un méchant aux milles et un visages. Pas mal mais pas non plus transcendant.

Déprimé par l’idée de voir un chaperon rouge qui montrer ses nichons en tuant/baisant avec des

loups-garous, elle laissera Cécile se charger de couvrir la horde de sauvages aux PQ’s toute la nuit. Et si on regardait ce qu’elle en a pensé ?

C'est à 23 heures que je me rends dans la salle numéro une du Bozart pour le premier film de la nuit.

La salle est bondée, mais je parviens à me faire une place, entre un zombie survolté et un vampire trépignant. La foule hurle déjà, gonfle des préservatifs par dizaines, flottants, rebondissants de BIFFFeurs en BIF-FFeurs.

Le réalisateur de Mama, Andres Muschietti, fait son entrée, accom-pagné de la co-scénariste, sa sœur Barbara Muschietti.

Tandis que les rouleaux de papier toilette traverse la salle, rythmés par les cris du public, le réalisateur essaye tant bien que mal de nous parler de son film.

Mama vécu dans un premier temps en 2008 comme court métrage, jusqu'au jour où Guillermo Del Toro appela Andres Muschietti pour lui proposer de le produire en long métrage.

Nous n'en saurons pas tellement plus car la foule commence à scander : « Une chanson, une chanson ! »

Le réalisateur se prend au jeu et nous rassérène d'une performance « Broa-dway Style » enveloppée d'une bonne couche de second degré. Sa sœur décide alors de l'enrouler d'un rouleau de papier toilette qui avait chu sur la scène, le public est en délire, satisfait. La fratrie repart en coulisse, les lumières s'éteignent doucement, Mama s'affiche sur notre écran géant.

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Page 27: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Victoria et Lily, deux petites filles, se retrouvent livrées à elles même dans une cabane en forêt, suite au décès mystérieux de leur père qui les avait enlevé après avoir tué sa femme.

Pendant cinq ans, leur oncle Lucas, et sa petite amie Annabel, les cherchent sans relâche. Lorsqu'elles sont enfin retrouvées, les petites sont de véritables animaux, comment ont elles pu survivre seules pendant tant d'années ?

Une fois logées et adoptées par le couple, des choses étranges com-mencent à se produire dans la mai-son. Annabel est convaincu qu'une présence maléfique entoure et « pro-tège » les enfants...

Mama est un film réussi. Malgré des dialogues souvent niais et un ton ne révolutionnant pas le genre, tout fonctionne. La constance de sa tension crispe tous nos muscles et saccade notre respiration, chaque minute de ce film est utile, et l'intrigue nous emporte dans une tornade d'angoisse. On y croit, à la relation qui se construit au fur et à mesure entre Annabel et les petites filles, aux fantômes, aux portes qui claquent.

Déjà à la moitié du film je paniquais de devoir rentrer seule chez moi. Guillermo Del Toro a eu raison. Les gens continuent à hurler, je suis transportée par l'adrénaline, je crie, ça y est, je suis une BIFFFeuse.

La nuit reprend cette fois avec John Dies at the end. Un film de Don Coscarelli, adapté de la nouvelle de David Wong, publiée en 2007.

Deux copains, John et Dave, décou-vre la « soy sauce », au delà du fait qu'elle assaisonne bien les nouilles, elle est une drogue ultra puissante qui leur fera découvrir une réalité parallèle.

Jusqu'ici, je riais à chaque séance alors que les sujets ne s'y prêtaient

pas. Grâce aux vannes du public, je me suis retrouvée à m'esclaffer devant la mort d'une enfant de cinq ans, à pouffer joyeusement devant un homme obèse et sale, découpant à la machette les doigts d'une jeune femme, ...

Alors je vous laisse imaginer ce que cela peut rendre devant un comédie. Une excellente de surcroît, John dies at the end est un film résolument décalé, où le quatorzième degré ne suffit pas toujours pour suivre les frasques délirantes des deux héros.

L'ambiance générale a joué certes, mais je n'ai aucun doute sur la valeur humoristique (entre autres) de ce film, dont le titre est probablement la plus grande trouvaille du vingt et unième siècle (juste après les doset-tes Nespresso).

Deuxième break, puis retour dans une salle commençant à ressembler à un lendemain de fête d'Halloween, j'ai une pensé pour le staff, brève, car la nuit continue cette fois avec Fresh meat de Danny Mulheron.

Lorsque Richie est transféré dans une prison de haute sécurité, Paulie, Gigi et Johnny vont en profiter pour organiser son évasion. Traqué par la police, le gang Tan doit se cacher, ils prennent en otage une famille bour-geoise, les Crane. Le plan parfait ? Pas sûr, derrière leur façade chic et étriquée, les Crane s'avèrent être... cannibales.

Le réalisateur espérait que son film : « Donne aux gens l’envie de rire, qu'ils passent un bon moment, et qu'ils ressortent en ayant faim ! »

Alors pour les deux premiers, nous pouvons lui accorder sans trop de difficultés.

Oui même si, on est dans la classique comédie trash. Toujours un peu lourde, avec un scénario trop mince

tournant uniquement autour de mains tranchées et de giclées de sang.

Pour ce qui est d'en ressortir affamé, ce ne fût pas mon cas, j'espère que ce ne fût le cas de personne d'ailleurs, sinon il faudra vraiment que je surveille mes arrières dans les jours à venir...

C'est avec Grabbers de John Wright, que l'on terminera cette mémorable soirée.

Dans un petit village irlandais, Erin Island, il commence à se passer des choses étranges. Les habitants retrouvent sur leurs plages des dizai-nes de baleines échouées, massa-crées, des pêcheurs disparaissent.

Un seul semble cependant échapper à son funeste destin, et il est fortement alcoolisé du soir au matin.Et oui, pour les villageois mainte-nant, la solution est simple, s'ils veulent survivre, il faudra être ivre... Vraiment ivre.

Le choix parfait pour ce dernier film, quand la moitié de la salle en est à son deuxième litre de « Maitrank » ou encore de « Troll ». Cette comédie rafraîchissante (ou plutôt assoiffante) ne se cache pas derrière des effets spéciaux mirobolants, ce n'est effectivement pas son point fort.

Soit, mais tant qu'il y a du sang du rire de l'alcool et des marins les Bifffeurs sont heureux, et c'est ça le plus important.

A demain, fols amis.

Loïc Smars, Olivier Eggermont, Cécile Marx et Roxane de Quirini

27 21 avril 2013

Page 28: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, jour 6 : et nous revoilà enfin dans la voiture !

Les jours se suivent, ne se ressemblent pas. La Troll coule à flots, les gens se tapent dans le dos, l’humour nous dévore tel un monstre affamé. Nous sommes à la moitié du festival et pourtant je sens déjà l’odeur de la dépression post-BIFFF. Les gens, fatigués, semblent vouloir s’épuiser ici. Vivre l’expérience jus-qu’au bout. Ne regretter aucun mo-ment passé au sein des Bozar.

C’est peut-être ça la beauté du festival, ce sentiment qu’ici tout est possible tant qu’on le vit à fond.

Mes amis, incrédules, sont venus voir de leur propres yeux le festival dont je leur parle tant. Je compte donc 7 nouveaux bifffeurs au sein de mes potes. 7 personnes dont cer-taines n’aiment ni le cinéma ni le fantastique mais que l’ambiance bon enfant a charmé.

Encore 6 jours. Plus que 6 jours.

Les gens se croisent, ne se ressem-blent pas et pourtant dans leurs yeux on retrouve cette même lueur. Celle que l’on voit aussi dans les aéro-ports, vous me suivez ? Celle que vous aviez lorsqu’au détour d’un arrêt de bus, vous croisiez un ancien camarade de classe avec lequel vous aviez fait les 400 coups et que vous n’aviez plus revu depuis quelques bonnes années. BIFFF, vieux pote, qu’as-tu de beau à nous raconter après un an d’absence ?

C’est drôle non ? Cette impression de se retrouver en famille pendant deux semaines. C’est bizarre de réaliser que même si un an s’est écoulé, nous avons l’impression de ne nous être jamais quittés.

6 jours déjà.

6 jours de folies, de cris, de rires, de larmes, de trolls, d’hot-dogs, de nuits trop courtes et de taxis trop chers.

Lorsque je suis en plein BIFFF, le seul super pouvoir que j’aimerais avoir, c’est celui de pouvoir ralentir le temps. Transformer chaque se-conde en une heure, pour que le festival dure des mois, des années. Plus que 6 jours.

Roxane résume très bien l’impres-sion des gens au BIFFF. Mais cessons de nous lamenter, Jurassik Park va commencer ! Malgré la 3D qui nous pèse tous un peu, quel plaisir de revoir le chef-d’oeuvre de Maître Spielberg sur grand écran entouré de fans survoltés !

Je vous passerai le résumé d’un film que tout le monde connaît et pré-fèrerai vous parler du bonheur de revoir les très crédibles dinosaures de Stan Winston et Dennis Muren sur grand écran. Le public comme prévu, a fait la fête au plus jurassiquien des films des années 90. Seul bémol, qui malgré tout n’arrivera pas à nous gâcher l’évènement, la 3D encore une fois totalement inutile et une VO qui déconcertera les plus franco-philes de nous, ne retrouvant pas le rythme des phrases devenues cultes dans les cours de récrés.

Cécile ayant raté la fête, espère se rattraper avec The Host, la sortie SF amerloque pour ados écrite par Stephenie Meyer (celle qui risque la chaise électrique pour Twilight).

The Host, fût en quelque sorte mon « Ovni » du Bifff. Ce n'est pas tellement le fait que ce film soit mauvais, car on sait bien que les navets font parties intégrantes de l'institution du Bifff. C'est surtout cette froideur cinématographique : The Host nous parle de l'âme, mais en revanche le film lui, en est dénué, on ressort de la salle avec la désa-gréable sensation d'avoir été broyé dans une machine à dollars. Et en faisant la rétrospective des com-mentaires jetés à tout va dans la salle lors de la projection, je peux affirmer que je ne suis pas la seule à l'avoir pensé.

La planète terre est envahie par : « les âmes », une race d'extraterrestre supérieurement intelligente. Ces peti-tes masses blanches étincelantes ne pouvant vivre sans corps où loger, elles possèdent et colonisent les humains depuis plusieurs années. Jusqu'ici Melanie Stryder y avait échappé... Une fois habité par une âme vagabonde, l'esprit de Melanie continu à se battre pour essayer de retrouver son frère et l'homme qu'elle aime.

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Page 29: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Réussira-t-elle à vaincre, ou à con-vaincre l'ennemi juré siégeant dans son corps pour sauver les êtres qui lui sont chers ?

The Host est l'adaptation d'un livre du même nom, écrit par Stephanie Meyer, également auteur de la saga Twilight.

Il répond à la plupart des codes attendus de son style. Niais jusqu'à la nausée, soporifique du début à la fin et ouvertement manichéen. Passé les premières vingts minutes où l'his-toire prend place et où l'on fait face à quelques remous lymphatiques de début d'intrigue, le reste du film s'enlise sans conviction dans un triangle amoureux aussi peu crédible qu’excitant, les éléments de science fiction l'entourant n'en sont que prétexte.

Saoirse Ronan possède une seule et unique expression, dont on salue cependant la constance ! On retrouve également la glaçante Diane Kruger dans le rôle de la méchante , une vraie de vraie, qui fronce les sourcils tout le temps et qui se déplace à l'aide d'une moto très rapide et très argentée...

Étonnement ce film est réalisé par Andrew Niccol. Simone, Bienvenue à Gattaca, Lord of War... C'est lui. Cette troublante donnée mise à part, on peut admettre cependant que l'histoire fondamentale de The Host

est originale, la dualité de Melanie/Wanda (l'âme extra terrestre) fonc-tionne plutôt bien malgré tout, et de leurs querelles incessantes on ne peut parfois réprimer un glous-sement.

Stephanie Meyer, ne souhaitant pas s'arrêter en si bon chemin, elle annonce une trilogie.Sachant qu'au cinéma, la tradition exigerait presque que les suites soient ratées... Qu'at-tendre alors des prochaines aventures de Melanie et ses copains résistants ?

Au même instant, les autres trublions découvrent Robo-G. C'est un peu le film japonais typique, l'histoire d'une bande de trois loosers qui doivent réaliser un robot qui marche pour leur entreprise alors qu'ils n'ont aucunes connaissances là-dedans.

Ils utiliseront donc une supercherie afin de tromper tout le monde mais ils ne réalisent pas encore la portée de celle-ci. La réalisation de Shinobu Yaguchi est drôle, avec quelques rebondissements, et inventive. Mais cela s'arrête malheureusement là. Robo-G nous fait passer un bon moment mais on ne peut que s'inter-roger sur sa présence dans un festival comme le BIFFF. Qu'à cela ne

tienne, ce n'est pas comme si cela nous déplaisait.

Ensuite, Loïc parti bouder car il n’a pas réservé pour un Ghost Gradu-ation qui s’annonce comme THE film du BIFFF, nous nous dirigeons à nouveau la salle CINE 1 pour décou-vrir ce mélange de Teen Movie et de film fantastique basé sur l’apparition d’esprits.

Modesto a un don. Enfin, peut-on appeler ça un don ? Il voit des fan-tômes depuis sa plus jeune enfance et doit, aujourd’hui à l’âge adulte, encore vaincre ces « hallucinations » qui le poursuivent. Cela ne s’avèrera pas évident puisqu’il débarque com-me nouveau professeur dans un lycée abritant toute une bande d’esprits frappeurs. Peut-être qu’il est fina-lement temps pour Modesto de se confronter à eux et de découvrir comment, lui, modeste professeur, va pouvoir les aider.

La bande originale est extraordinaire, le rythme est soutenu et, si parfois on sent l’inspiration du réalisateur pour les grands du Teen Movie, on se retrouve malgré tout transporté par les acteurs. L’histoire, si elle n’est pas super originale, offre malgré tout son lot de surprises. Les gags et l’humour espagnols ont touché le public de BIFFFeurs en plein cœur et c’est un public emballé qui est ressorti de la salle.

29 21 avril 2013

« Les gags et l’humour espagnols ont touché le public du BIFFF en plein coeur et c’est un public

emballé qui est sorti de la salle. »

Page 30: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Fini de bouder pour le chef, tout le monde se retrouve pour Stitches et son clown psychopathe, mort vivant et irlandais. Mais que demande le peuple ! Après nous avoir chanté The Wild Rover sur la scène du BIFFF (and it's no nay never !!! clap clap clap clap!) Conor McMahon nous présente sa dernière réalisation et le moins que l'on puisse dire c'est que ça pète bien ! Stitches c'est l'histoire d'un clown revenu d'entre les morts afin de se venger des petits merdeux qui l'ont tué. Et pour ce faire il met en oeuvre des trésors d'inventivité ! Entre gonfler les intestins de l’un d'eux et de lui faire un chien avec (comme avec un ballon) ou bien de trans-percer la tête d'un autre avec un parapluie, le film nous fait passer un excellent moment. Naviguant entre scène de tueries et humour gore bien gras, la réalisation est soignée, le jeu d'acteur convaincant et le scénario vaut la peine. Un très bon petit divertissement donc à conseiller pour passer une bonne soirée.

Et enfin, quoi de mieux qu’un petit film d’1h pour bien terminer cette terrible journée ?

Vous vous souvenez de La Colline a des yeux de Wes Craven et/ou Alexandre Aja ? C’est en fait basé sur une légende écossaise racontant que Sawney, cannibale du 16ème siècle aurait bouffé 40 ennemis. On pensait les avoir détruit, mais des descendants ont survécu. De nos jours à Glasgow, des gens sont

enlevés à la sortie des boîtes de nuit pour servir de méchouis à notre sympathique famille. Evidemment, ça fout tout le monde sur les nerfs.

Au vu des tonnes de barbaque et de sang ainsi que les scènes assez bien torchées où l’on voit le paternel découper et bouffer son petit monde, on comprend que le film n’est pas à montrer à tout le monde ! Il y a une rigolote atmosphère dans ce film, quelque peu entâchée par les fistons dégénérés rois du Kung-Fu. Même si tout est convenu et attendu, l’aficio-nado a sa dose de gore bien juteux. C’est bien le principal, non ?

C’est fini pour aujourd’hui. Un petit steak et au lit !

Loïc Smars, Olivier Eggermont, Cécile Marx et Roxane de Quirini

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BIFFF, jour 7 : les chinois, ils font bien ça parfois. Bébé Lynch aussi d’ailleurs ....

En ouverture de cette jour-née, le film chinois Tai Chi Zero suivi de sa suite : Tai Chi Hero. Alors, qu'on soit clair, en arrivant au BIFFF on s'attendait à s'ennuyer ferme ! On avait même apporté des bières et de l'alcool pour faire passer le temps. Mais quelle fût notre surprise dès le début de Tai Chi Zero ! Une réalisation soignée, de bons acteurs et surtout une origina-lité qui fait toute la différence ! Tai Chi Zero c'est l'histoire d'un jeune homme orphelin qui veut absolument apprendre le kung-fu du village de Chen. Il va devoir aider les villageois à protéger leur village et ce, au péril de sa vie. Ce qui fait la grande originalité du film c'est le mélange de scènes cinématographiques et de scènes typées jeux vidéos. Ce steam-punk (comme on appelle ce genre trop peu répandu) chinois réussit à nous enchanter et nous fait passer un très bon moment.

Le second opus de Stephen Fung n'est malheureusement pas à la hauteur du premier même si il reste de bonne facture. La petite touche de folie présente dans le premier n'est plus là et le film ressemble plus à un long métrage asiatique typique trai-tant des arts-martiaux. Il n'empêche

que les deux films sont à conseiller pour tout les fans d'arts-martiaux et pour les autres également.

Passé la bonne surprise du début d’après-midi, nous partons découvrir deux films plus classiques. Mais voyons l’avis sur Rat King de Petri Kotwica, tout droit venu de Finlande.

Si je vous parle d’un film sur un jeune geek découvrant un jeu tordu duquel il est difficile de sortir, vous me dites… ? Wah quelle originalité ? Détrompez vous. Rat King est le melting pot de tout ce qui s’est déjà vu dans le genre thriller informatique pseudo stressant. Un quart d’heure après le générique, le public com-prend déjà vers où se dirige le film et certains ont même pu clore leurs yeux durant la demi-heure suivante. Vous n’avez rien raté messieurs les endormis. Le film se déroule sans encombre et c’est bien dommage. La tension est nulle, le stress absent et nos yeux, s’ils ne se ferment pas ne s’éblouissent pas davantage.

Au final, un film aussi vite regardé (même si le temps semblait long, le film est court, je vous l’assure) qu’oublié.

Pendant ce temps à Vera Cruz... Ou en CINE 1, c’est pareil, commence Night Train to Lisbon avec excusez du peu : Jeremy Irons, Mélanie Laurent, Bruno Ganz (Hitler dans La Chute), Charlotte Rampling et même une apparition de Christopher Lee (!!!). Etrangement programmé au BIFFF, c’est pourtant une magni-fique histoire d’amour et un drame sur la révolution portugaise de bonne facture.

La caméra suit la petite vie pépère du très morne professeur de latin suisse Raimund Gregorius. Un jour, il sauve une femme en l’empêchant de se suicider. Il l’emmène à son école pour qu’elle se repose. Mais mada-me, génée, fuit en laissant sa veste. Raimund trouve dans la poche (de gauche ou de droite), un mystérieux livre sublime d’un auteur inconnu. Obsédé par l’ouvrage, il embarque dans le train de nuit pour Lisbonne à la recherche des réponses à ses questions.

Le déroulement se centre sur l’en-quête du professeur et la révélation des secrets familiaux autour de cet auteur mystérieux.

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Ces secrets puisent leur source dans la révolution portugaise, montrée aux spectateurs au moyen de flash backs. Notre cerveau assoiffé de sang mis au vestiaire, on se prend à savourer le voyage initiatique du vieux profes-seur. Night Train to Lisbon, s’avère une très belle histoire à découvrir à sa sortie en salle.

Comme toujours depuis ce BIFFF, l’équipe se scinde ensuite en deux pour voir un maximum de films. Deux salles sont idéales pour faire découvrir un maximum de films mais c’est assez dur de choisir. Suivons Olivier dans l’univers de Jennifer Lynch et Roxane partie se perdre en forêt.

Chained c'est sûrement l’un des films les plus attendus du festival ! Et ça se comprend. Réunissez la fille de David Lynch (aussi timbrée que son père) et l'engagé baleine devenu un psychopathe compulsif après s'être tiré une balle dans Full Metal Jacket et vous aurez Chained. L'his-toire c'est celle d'un petit garçon séquestré par l'homme qui a tué sa mère. Celui-ci lui fait faire toutes les tâches ingrates tout en l'enchainant dans la maison (une sorte de version Dark de Cendrillon à première vue). Mais au plus le film avance au plus la relation entre les deux évolue. Et c'est cela qui est la grande réussite de Jennifer Lynch, ses personnages sont très fouillés, détaillés et en devien-nent fascinants. L'atmosphère du film est très sombre et très glauque et la lenteur de la mise en scène apporte

cette impression de lourdeur, de fardeau de ce jeune homme torturé. Bref, Chained est à voir à tout prix !

Dans The Forest, la guerre civile espagnol traitée avec finesse et parfois même poésie. Même si le public est sorti plus perplexe que nous, The forest a su nous charmer par la justesse du jeu de l’actrice principale, Maria Molins.

Certes l’histoire traine en longueur et s’achève sur une apothéose digne de la friterie du coin, mais quoiqu’il en soit, on ne s’embête pas.

La touche fantastique peu enva-hissante permet de rester ancré dans cette vision de la guerre entre fas-cistes et communistes, mais introduit néanmoins une variable qui permet de nous détacher de la « pro-fondeur » du thème abordé.

En deuxième partie de soirée, on enchaîne le mauvais et le moyen. Boire un Bloody Mary ou un conte sur la Fée des dents ? À vous de choisir ...

Vous reprendrez un peu de Bloody Mary pour la route ? A 23h c'est American Mary qui nous attend au ciné 1. Il était une fois une étudiante en chirurgie violée par l’un de ses profs, elle devient une psychopathe qui torture ses victimes en les opérant. The end. C' est un peu le résumé du film. Alors, bien sûr, il n'apporte rien au genre mais cela reste quand même un bon petit slasher (on voit du sang, des seins et une psychopathe dénuée de tout remord) et on est content ! Il en faut peu pour être heureux comme dirait l'autre. On regrettera parfois la lenteur du script mais bon on ne va pas faire les difficiles, ce American Mary, sans être un film incon-tournable, s'inscrit bien dans le genre et nous fait bien marrer et ça, c'est le plus important.

« Je vous averti, le film a été fait sans aucun effet numérique ». Et voici en quelques mots comment Stéphane Everaerts, notre présen-tateur adoré du BIFFF a réussi a transformer une daube affreuse en un pure moment de bonheur. Autant vous le dire tout de suite, le film n’est à peu près fait que d’effets numériques. Et mauvais en plus.

Basé sur la légende de la fée des dents (la petite souris chez nous), le film se trouve être d’une part un amoncellement de copier-coller et d’inspirations de films du même acabit mais d’autre part d’une inco-hérence marquante.

33 21 avril 2013

« Deux salles sont idéales pour faire

découvrir un maximum de films mais c’est assez

dur de choisir. »

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Le pitch est classique, les seules surprises vinrent de la part du public qui réussit durant Fairytale à faire des commentaires aussi drôles que nombreux.

Un film qui passe de l’anglais à l’italien, à l’anglais et puis encore à l’italien mais personne ne semble s’en surprendre. Une franche partie de rigolade qui finalement permettra au film de rester dans la mémoire d’un public déchainé.

Et puis, il n’y a rien a faire, le coup des moustiques apprivoisés, c’est quand même du lourd !

Sans pour autant être des lopettes, on abandonne les filles au film de 1h. Les filles pleines de courage (ou pas) nous livrent leurs impressions sur Pastorella.

Les paupières qui tombent. Nous ne sommes plus que 5 de la bande et nous sommes épuisés. Le film commence. Le film bug. Le film re-commence. Le film bug. Le film re-recommence et le public connaît le générique par cœur. La cinquième fois sera la bonne. Mais c’est trop tard. Ils nous ont perdu.

Le début, nous l’avons déjà vu. 5 fois déjà. Et finalement, après les 20 premières minutes, les premiers ronflements se font entendre. Les suivants, nous ne les entendrons pas. Nous dormons aussi.

Réveil en sursaut à la moitié du film. Notre voisin s’en va. Toute la rangée s’est redressée pour laisser passer le malotru. 5 minutes s’écoulent. Tout le monde se rendort. Nous restons éveillé. Nous luttons à vrai dire contre les affres de la fatigue qui nous torturent.

La somnolence ne nous lâche plus et nous prions pour que le film s’arrête vite. Soudain, l’écran s’illumine de rouge et la scène finale, gore à souhait, démarre.

« Super, pensons-nous, tout le monde va se réveiller ! » Erreur de notre part, nous ne sommes que deux à voir se lancer le générique de fin. Le public dort profondément et c’est lorsque les spectateurs au sommeil léger se réveillent et commencent à crier « c’est fini » qu’enfin la salle se met en mouvement.

Film soporifique ? Erreur de pro-grammation ?

Nous n’en savons rien. Une chose est sûre, nous étions en forme le lende-main.

Loïc Smars, Olivier Eggermont, Cécile Marx et Roxane de Quirini

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BIFFF, jour 8 : Cruise le nain gay philippin avec Cendrillon dans les légions de l’enfer (ou quelque chose du genre)

Moi, rédac’ chef, me fait souvent avoir pour faire plaisir à mes sous-fifres et je me sacrifie pour les films que personne ne veut ou je laisse ma place si nous n’en avons pas assez. Pendant qu’ils vont tous voir Trap for Cinderella, je me prépare mentalement à un film de Zombies gays philippins à l’affiche psychédéliquement atroce. Mais que suis-je venu faire dans cette galère ?

On suit la jeunesse de ce cher Remington, petit con homophobe qui traite tout le monde de « Bala Bala » ou quelque chose dans le genre qui veut sûrement dire PD en philippin. Mais il tombe un jour sur le mauvais gay qui lui lance un sort qui prédit à Remington une vie d’adulte homo-sexuelle, un comble ! Devenu adulte, il commence à avoir des compor-tement étranges de grande folle. Ca tombe mal, un tueur en série local assassine les homosexuels avec son Gaydar, genre de sèche-cheveux anti-gay. Pour couronner le tout, les morts (mortes ?) reviennent à la vie.

Après avoir maudit mon équipe, j’ai fini en sortant de la salle, fumant une clope en leur compagnie à me foutre d’eux car j’ai vu une comédie folle et déjantée pendant qu’ils ont maté un

thriller psychologique. Ce sont eux qui ont de la jalousie dans les yeux !

Maintenant tout n’est pas bon à prendre dans cette histoire. Le Gay-dar est quand même hautement ridicule, les zombies sont ratés et ne pointent que le bout de leur nez bouffé qu’en dernière partie de film et la morale finale, presque anti-gay, est désespérante. Mais bon, on a ri. Et j’aime rire.

Mais laissons notre cher Olivier nous dire ce qu’il a pensé de Trap for Cinderella (voir son interview aussi du réalisateur !) :

Le nouveau film de Ian Softley Trap for Cinderella (en compétition pour le thriller) se base sur le roman du même nom écrit par Sébastien Japrisot. C'est l'histoire de Micky et Do, deux meilleures amies. Do est secrètement amoureuse de Micky et jalouse d'elle aussi au point de vouloir devenir elle. Mais l'est-elle vraiment devenue ? Plus qu'un thriller, Trap for Cinderella est selon l'aveu du réalisateur lui-même plus un drame psychologique. Les deux actrices principales parviennent à rendre parfaitement les émotions

ambivalentes qui les habitent et M. Softley nous livre un très bon film acclamé par la critique et très profond.

Pour 20h30, on va enfin découvrir en exclusivité, le gros blockbuster Obli-vion. La salle est bien sûr complète de BIFFFeurs et d’impatients qui ne veulent pas attendre le lendemain au cinéma. Evidemment, on a pas beau-coup aimé ...

L'histoire de base la voici : « 2077 : Jack Harper, en station sur la planète Terre dont toute la population a été évacuée, est en charge de la sécurité et de la réparation des drones. Suite à des décennies de guerre contre une force extra-terrestre terrifiante qui a ravagé la Terre, Jack fait partie d’une gigantesque opération d’extraction des dernières ressources nécessaires à la survie des siens. Sa mission touche à sa fin. Dans à peine deux semaines, il rejoindra le reste des survivants dans une colonie spatiale à des milliers de kilomètres de cette planète dévastée qu’il considère néanmoins comme son chez-lui.

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Vivant et patrouillant à très haute altitude de ce qu’il reste de la Terre, la vie céleste de Jack est bouleversée quand il assiste au crash d’un vais-seau spatial et décide de porter secours à la belle inconnue qu’il renferme. Ressentant pour Jack une attirance et une affinité qui défient toute logique, Julia déclenche par sa présence une suite d’événements qui pousse Jack à remettre en question tout ce qu’il croyait savoir. Alors bon, loin de nous l'idée de dire que ce film est foncièrement mauvais mais on y est presque . Pour résumer, le film c'est plus de 2h de Tom Cruise non stop à l'écran qui combat des méchants, tire sur des trucs, se bat contre lui-même, échappe à des explosions etc. Pour ceux qui n'aiment pas le lilliputien d’Holly-wood, passez votre chemin, Oblivion n'est pas pour vous !

On nous avait promis aussi Morgan Freeman mais ce dernier ne fait qu’une apparition de 5 minutes dans le film, décevant quand on sait qu'il est un véritable monstre sacré du cinéma. Alors bon, les effets spé-ciaux sont bien faits et les scènes d'actions nous font passer un bon moment mais le scénario est beau-coup trop faiblard et incroyablement prévisible.

Après Tron Legacy, Joseph Kosinski nous livre une autre adaptation d'un de ses romans graphiques et, comme pour ce dernier, les tares sont facile-

ment visibles. Le scénario reprend tous les clichés d'un film de science-fiction et même si celui-ci tient la route on sent venir la fin à des années lumières.

Bref, Oblivion c'est une grosse production américaine avec beau-coup de moyens, ce qui permet au spectateur de pouvoir, dans une certaine mesure, apprécier le film mais qui se prend très au sérieux. On y voit (beaucoup (trop)) Tom Cruise tout désigné une fois de plus sauveur de notre planète mais malheu-reusement cela s'arrête là. Pas vrai-ment une déception, on ne s'attendait pas à beaucoup mieux.

Et on vous le promet, ce n’est à cause du fait que l’on était au premier rang ! Mais terminons la soirée avec le très coté Hellbenders dans une salle CINE 1 encore fort remplie.

Hellbenders, c’est une légion d’exor-cistes de la dernière chance. Quand aucun moyen n’a fonctionné pour virer à coups de santiags dans le trou de balle différents démons, on les appelle. Pour cela, ils suivent tous un entraînement strict à base de 7 péchés capitaux : baises, cocufi-cations, orgies, taules extrêmes, blasphèmes, vols, drogues, etc. Le tout dans le but d’aller tout droit vers l’Enfer en compagnie du démon récalcitrant. Mais ils vont être atta-qué d’une part par l’Opus Dei qui

n’aime pas leurs manières et d’autre part par un ancien Dieu très puissant voulant l’Apocalypse.

Très vite, toute la salle a commencé à être légèrement dépité devant cette frasque de J.T. Petty. Car autant le pitch de départ est jouissif, autant au final rien n’est exploité comme il faut et l’historiette reste trop gentille de peur d’une censure américaine trop contraignante. C’est assez révol-tant de ne pas profiter d’idées aussi géniales et ça ne mérite pas que l’on s’y attarde plus.

Je suis vener. Allez dormir !

Loïc Smars, Olivier Eggermont et Roxane de Quirini

37 21 avril 2013

« Deux salles est idéal pour faire découvrir un maximum de films mais

c’est assez dur de choisir. »

Page 38: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Bonjour M. Softley, que cela signifie-t-il pour vous de faire partie du jury international du BIFFF ?

Je l'ai déjà fait quelques fois mais c'est la première fois que je le fais dans une langue différente de l'ang-lais. Mais nous parlons tous français donc cela ne pose pas de problèmes. C'est très intéressant de passer deux semaines à voir des films et à analyser ceux-ci, c'est assez stimu-lant. Et c'est quelque chose que j'aimerais faire plus souvent à l'ave-nir. Je trouve aussi que le public est vraiment incroyable à ce festival !

Que pensez vous de la Belgique en général ?

Je ne connais pas beaucoup la Belgique en fait. C'est la première fois que j'y retourne depuis l'âge de huit ans. Je me rappelle qu'on avait été à Ostende et à Bruges. Et puis ça m'a frappé que Bruxelles ne soit qu’ à deux heures de Londres. J'aime beaucoup Bruxelles, c'est très beau et les gens sont très sympathiques aussi. De l'Angleterre je sais aussi que votre équipe de football commence à devenir vraiment très forte !

Même si vous nous avez battu la dernière fois !

Et oui (il rit) !

Hier se déroulait l'avant première mondiale de votre film Trap for Cinderella, comment vous est venue l'idée d'adapter le roman de Sébastien Japrisot ?

J'ai lu le roman il y a une dizaine d'années et dans celui-ci il y avait beaucoup de thèmes qui m'intéres-

saient. J'ai été attiré par le personnage de Micky. Et puis, il y a l'espoir qui est très important dans le roman. L'espoir de pouvoir faire quelque chose dans sa vie à cet âge-là quand on a la vie en face de soi et cela m'a rappelé tout ce que je voulais faire quand j'avais cet âge. Le côté français m'attirait aussi. J'ai vécu en France une année à l'âge de 18 ans. Au début, je voulais faire une adaptation assez fidèle mais au fur et à mesure, j'ai décidé de la faire plus person-nelle. C'est pour cette raison que l'histoire se passe à Londres en grande partie. Il y a aussi des similarités de thèmes avec l’un de mes films : Les ailes des colombes : la poursuite de l'identité, l'obsession, le fait de prendre la vie de quel-qu'un, ...

Dans vos films les relations humai-nes sont toujours très importantes et fouillées. C'est quelque chose que vous travaillez énormément ?

Oui en effet, j'aime que les relations se teintent de mystère dans mes films afin que ceux-ci soient agréables à voir. Ces relations sont aussi toujours compliquées. La douleur et l'angoisse sont très présents et c'est aussi pour cela que c'est passionnant. Avec l'ambiance, la musique, etc. Il y une possibilité de créer un monde et c'est quelque chose que je recherche.

Votre film est en compétition pour le titre du meilleur thriller. Est-ce vraiment un thriller dans le sens actuel du terme ?

Je ne veux pas empêcher la possi-bilité de gagner cette compétition mais oui, je pense que ce n'est pas tout à fait un thriller comme on les entends maintenant. Mais aujour-

d'hui on croit qu'un thriller c'est un film dans lequel il y a des morts toutes les cinq minutes, mais ce n'est pas ça ! C'est plus un mystère policier en fait, un drame psychologique plus qu'un thriller et c'est un genre qui est très cinématique.

Autant dans K-Pax que dans Trap for Cinderella la fin peut donner lieu à plusieurs interprétations. Préférez-vous donner une fin ou-verte aux spectateurs ?

Oui, c'est un risque de faire cela mais j'aime finir un film comme cela et je pense que beaucoup de films se trompent car il y a trop de fins ! « Too many endings » en anglais. Et ce n'est pas toujours ça qui va donner le plus d'impact à la fin d'un film. Il faut se rendre compte de cela. Mais je crois que pour Trap for Cinderella cette fin est appropriée.

Quels sont vos prochains projets de films ?

J'aimerais réaliser un film sur Ivan-hoé ! Il y a un côté très contemporain à cette histoire, c'est contre les guerres religieuses. On est en train de mettre ça en boite avec notamment Sam Claflin qui va sortir dans le prochain Hunger Games.

Enfin, quels sont vos films d'hor-reur/fantastiques et romantiques favoris ?

Je dirais The Shining ou bien Les Autres pour le film fantastique et pour le film romantique c'est bien sûr Casablanca !

Propos recueillis par Olivier Eggermont

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A la rencontre de Iain Softley

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Page 39: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Bonjour M. Joffé, c'est vot-re première visite au BIFFF, com-ment trouvez vous l'ambiance ?

Je la trouve vraiment très agréable. Les spectateurs du festival sont vraiment incroyables. Leurs hurle-ments et leur engagement pendant le film a une vérité et une beauté formidable ! J'ai été très pris par cette ambiance.

Qu'est-ce que cela vous fait d'être le président du jury international du BIFFF ? Comment cela est-il arrivé ?

J'adore les films et je ferais tout pour en encourager la production donc je pense que cela est un véritable privilège. Pour moi, le plus important est de voir des bons films et même les mauvais films ont des belles choses en eux. Je pense qu'il est important d'encourager des festivals comme celui-ci. Je suis devenu président du jury grâce au co-producteur de mon dernier film (Singularity) qui est belge. Il m'a décrit le festival et cela m'a d'emblée intéressé.

Justement à propos de Singularity, quels sont les principaux thèmes abordés dans ce film ?

C'est une histoire assez incroyable. La vie est une chose magique, nous pensons savoir ce qui est réel, mais la science nous prouve de plus en plus que nous ne le savons pas. Et cela c'est fascinant pour un réalisateur. Alors j'ai pris cette idée et je me suis questionné sur ce que la vie est. Car, si nous ne savons pas ce qu'est la vie, nous ne pouvons pas savoir ce qu'est la mort. Que savons-nous de la vie ou des vies que nous menons ? Le temps est relatif alors comment savons nous

que nous ne vivons qu'une seule fois ? L'histoire se passe en 1777 en Inde e t nous en voyons l e s conséquences dans le futur en 2020.

Votre seul film d'horreur ou fantas-tique fût Captivity. Que pensez vous de ce genre de film ?

Pour moi, un film c'est comme une danse. Et bien sûr, la salsa par exemple n'est pas la même chose que la valse. Ils expérimentent différents aspects de l'expérience humaine. Pour moi, c'est la même chose pour les films. Les films fantastiques ont un rôle très important à jouer car je pense qu'ils sont une métaphore. C'est un jeu mais un jeu à propos de ce que la vie pourrait être. Et des sentiments comme la peur, l'horreur, etc. font partie de l'humain.

L'aspect historique des choses est toujours très important dans vos films. Pourquoi ?

J'aime beaucoup l'histoire car l'his-toire c'est comme une carte de la réalité que nous vivons maintenant. Cela donne d'autres perspectives à ce qui arrive dans la vie. L'histoire est très importante et surtout pour un réalisateur de film. J'aime l'histoire car je pense que c'est une manière d'ouvrir notre vision des choses.

Le thème de la religion est égale-ment récurrent dans vos films. Pourtant vous clamez être agnos-tique, n'est-ce pas une peu contra-dictoire ?

La religion m'intéresse car la religion est quelque chose d'ancien et je suis fasciné par tout ce qui est ancien. La religion est intégrée dans notre cul-ture et dans notre psyché. La plupart des histoires comportent des éléments

religieux mais on ne s'en rend pas toujours compte. Je suis agnostique car l'image que les gens ont de dieu, si il existe, est fausse. Dieu n'est pas une certitude pour moi. Pour moi, la science n'exclut pas l'existence de dieu.

Quel est le meilleur acteur avec lequel vous avez travaillé ?

Wow, j'ai travaillé déjà avec des acteurs incroyables ! Il est très difficile de dire lequel est le meilleur. Tous ont des talents différents. Robert de Niro a son talent, très pas-sionné. Paul Newman est plus intel-lectuel, humoristique. Olga Kury-lenko est une actrice de grand talent et bien sûr John Malkovich qui a une faculté incroyable à se fondre dans un rôle ! Chacun apporte quelque chose à un film.

Quels sont vos projets futurs ?

Pour le moment, j'ai écrit trois projets. Dans un de ceux-là, on y retrouvera Forest Whitaker et, je l'espère, Josh Hartnett. J'ai un autre scénario pour un film qui s'intitulera In God We Trust et je viens de terminer d'écrire The fall frome Singapour qui est une histoire d'espionnage se déroulant pendant la Seconde Guerre mondiale.

Enfin, quel est votre film fantas-tique préféré et votre film roman-tique préféré ?

Je dirais Le Labyrinthe de Pan pour le film fantastique et pour le film romantique Sleepless in Seattle.

Propos recueillis par Olivier Eggermont

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A la rencontre de Roland Joffé

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Page 40: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, jour 9 : une tronçonneuse, un container et une ville déserte ...

Tout le monde commence à être crevé, que ce soit au Suricate Magazine ou chez nos confrères de Cinéma Fantastique, Sci Fi Uni-verse, ... Seul Mr Gilles Esposito du Mad a l’air de n’avoir que faire de l’enchaînement d’un festival éprou-vant. Et puis ce mercredi 10 avril n’a pas été vraiment exceptionnel. Mais laissons nos G.C. (Gentils Chroni-queurs) vous expliquer ce qu’ils ont vu !

The Peach Tree

Un ami nous a dit : les films coréens, une valeur sûre !

Notre ami n’a pas vu Peach Tree, ce qui explique son mensonge.

Imaginez maintenant qu’après près de 10 jours de BIFFF, on nous propose un film coréen avec un enfant ayant un visage devant et un visage derrière son crane qui chante des chansons à propos de sa mère complètement folle (en même temps comment vous réagiriez vous si votre gosse avait deux faces ?) et sur un pêcher (l’arbre, hein ! ).

Et bien, nous, nous avons réagi de façon stricte et directe. Nous sommes

sortis. Non mais ho, faut pas pousser bobonne non plus.

Abuctee

Imaginez un mix de Buried et de Push. Le tout en japonais. Tentant ? Pourquoi pas.

Atsushi Chiba, 50 ans, se réveille dans un container seul, attaché et en compagnie de son téléphone portable et d’un étrange rocher. Parieur invétéré, il conclut rapidement qu’un de ses créanciers en a eu marre d’attendre et que, n’écoutant que son porte-monnaie, a décidé de passer à l’action. C’était sans compter les cris venant de l’extérieur. Cris de per-sonnes qui, comme lui, proviennent de containers.

Un film qui démarre comme le drame de Rodrigo Cortes, la tension en moins, les rallonges en plus. Et qui soudain, part dans tous les sens !

Malheureusement, les temps morts du début lassent vite le spectateur qui, non seulement, est épuisé par les 10 jours de festival qu’il a dans les pattes mais qui, également, n’aime pas se retrouver devant des images

qui lui rappellent vaguement un film vu il y a moins de 3 ans.

Il est, de plus, clair et net qu’enten-dre un homme séquestré décrocher son téléphone avec un « mochi mochi » peu viril et peu effrayant n’est pas pour accentuer la tension quasi inexistante.

Au final, on sort de cette séance avec l’impression d’avoir vu un melting pot de tout et n’importe quoi, une débandade de délires dont seul Yamaguchi a le secret.

Texas Chainsaw 3D :

On est tous un peu partagé avant d'entrer dans la salle, d'un côté on se dit : « et merde, encore un remake pourri de ce film incroyable ! Et en plus c'est en 3D ! » et d'un autre : « chouette on va bien se marrer ! Tronçonneuse ! Ah ah ah ! ». Et à la fin, c'est bien sûr notre seconde réflexion qui l'emporte ! Ce remake réalisé par John Leuessehop n'est cependant pas dénué de toute qualité, le scénario se laisse voir et, pour le genre, le film se débrouille pas mal.

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Page 41: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Alors bon, les redites sont nom-breuses et le scénario est déjà vu mais cela ne nous empêche pas de passer un bon petit moment à regar-der Leatherface dézinguer des gens avec sa légendaire tronçonneuse.

After :

Le BIFFF nous avait promis, je cite, « Quand Stephen King récrit Silent Hill ». Ils ont malheureusement oublié de préciser que c'était pour la lenteur de Silent Hill. Par contre Stephen King on le cherche toujours (un peu comme le scénario du film). L'histoire, c'est celle de Freddy et Ana qui après s'être pris un bus en pleine tronche se réveillent dans leur ville désertée de tout habitant. Il leur faudra un petit temps pour comp-rendre qu'ils sont presque morts et que ils doivent ouvrir une porte (la poooooorte!!). Alors bien sûr, After n'est pas un mauvais film, les acteurs sont pas mal et le dénouement est plutôt bien fait mais bon, on s'ennuie quand même un peu et niveau originalité on repassera, les traite-ments de ce concept étant encore plus nombreux que les mauvais films de Patrick Lussier (c'est dire!).

The Second Death

Au fin fond de l’Argentine, une fliquette au lourd secret, s’enterre dans une petite bourgade et attend que les choses se passent. Quand on trouve un fermier totalement brûlé en pleine prière, elle veut mener à fond

l’investigation, histoire d’amener un peu de piment dans sa vie. En rencontrant son frère, sa soeur, sa nièce (oh oh ce serait le bonheur), elle se rend compte qu’ils ont quel-que chose à cacher. En plus, un petit garçon qui lit dans le passé et son tuteur arrivent en ville. Ca va vrai-ment partir en sucette.

Anticlérical à souhait, The Second Death n’arrive à rien et n’a que cet argument pro-païen pour sauver un film lent et chiant. Au bout d’une dizaine de souffles de désespoir, n’y tenant plus, j’ai quitté la salle. Il y a quand même pas mal de bouses cette année, non ?

Dust Up

1h du matin et découvrir un film mélangeant les influences de Troma, Machete, Kill Bill et Mad Max, c’est quand même le pied. Jack, ancien militaire choqué par la guerre s’ins-talle au milieu du désert et devient homme à tout faire qui passe le plus clair de son temps à faire du Tai-Chi et ne rien faire avec son pote, un prétendu indien aux socquettes d’un joueur de foot. En allant dépanner la jolie mère au foyer Ella, il ne s’attend pas à tomber dans un cauchemar. Mais avec la volonté de

faire pardonner ces erreurs guer-rières, il se met en tête de sauver la gentille petite famille des griffes de Buzz, taulier de bar black camé et sadique qui veut récupérer l’argent que le papa drogué lui doit.

On sent bien l’influence Troma dans le générique, les moyens modestes et le ridicule assumé de certains personnages. Un générique d’ailleurs qui se révèle être une pure mer-veille ! Même si le film en son milieu devient fort long et tourne en rond, la dépravation et l’orgie finale sont tout à fait ce que l’on peut attendre d’un tel film. Que demande le peuple ? Plus de nichons peut-être ...

Courage BIFFFeurs et BIFFFeuses, plus que trois jours.

Loïc Smars, Olivier Eggermont et Roxane de Quirini

41 21 avril 2013

« Que demande le peuple ? Plus de

nichons peut-être ? »

Page 42: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, jour 10 : pourquoi les morceaux de corps humain cuit me donnent faim ?

La journée commence en douceur avec Mai I Kill U avec Kevin Bishop (l’anglais insup-portable de l’Auberge Espagnole) en vedette.

Barry est un gendarme à bicyclette , il arpente son secteur sans relâche pendant de violentes émeutes en compagnie de sa coéquipière, éper-dument amoureuse de lui. Ce qui lui est bien égal, trop occupé à acheter les médicaments de sa mère alcoo-lique et profondément malveillante. Un jour, ce petit homme sans his-toire, se fait agresser sauvagement par un voyou au casier judiciaire déjà conséquent.

Une fois remis de sa convalescence, Barry, souffrant toujours de terribles migraines, recroise ce jeune criminel, et décide de le tuer. Suite à ce pre-mier assassinat, il fera régner sa propre justice dans les rues de Londres. En achevant ses victimes après leur avoir demandé la permis-sion, dans toute son élégance anglai-se...

Petit détail, il filme les meurtres de ses victimes, puis les poste sur dif-férents réseaux sociaux où il créera un buzz magistral, se faisant passer pour un héros, un justicier de l'om-bre.

Sa rencontre avec une grand-mère cleptomane risque cependant de faire déchanter ce Dexter british, avançant masqué jusqu'alors de façon impa-rable.

May i kill you est réalisé par Stuart Urban, venu présenter comme il se doit son oeuvre sur la scène du BIFFF avant la séance. Le public est agité devant le titre de ce film, promesse de jets d'hémoglobines en tout genre et d'humour noir, grinçant comme on l'aime.

Le seul réel défaut de cette produc-tion réside dans ses longueurs. Ce n'est pas ennuyeux pour autant, juste déstabilisant. Car on passe un bon moment, du début à la fin, Kevin Bishop est merveilleux, détraqué et sage à la fois, les personnages sont tous remarquablement justes et légi-times, le scénario résolument bien construit, et pourtant on ne peut s'empêcher de constater que ce film paraît long, comme s'il s'étirait à l'infini.

C'est cette même réflexion que j'ai entendu fuser de toutes les bouches des BIFFFeurs sortant de la salle. Malgré ce détail qui, je vous l'ac-corde, a son importance, May I Kill You, est un film drôle et acide, trash

mais intelligent qui vaut définiti-vement le détour.

À 18h, deux alternatives forts dif-férentes nous sont offertes : un prétendu néo-giallo italien ou un bazar étrange indonésien ? Olivier pris le premier et Roxane le deu-xième. Les deux n’en sont toujours pas revenus ...

Paura 3D. Pourquoi ce film ? Pour-quoi la 3D ? Pourquoi tous les personnages ont le même quotient intellectuel que Britney Spears ? Pourquoi le tueur a-t-il le même charisme qu'un croisement entre Ryan Reynolds et une limace ? Mais surtout, pourquoi on nous a menti en disant que ce serait un néo-Giallo ? Tant de questions qui demeurent sans réponse. Le film dure 104 minutes. Comptez 45 minutes de mise en place et environ 30 minutes de tirage en longueur à cause de la stupidité des personnages du film. Bref, beurk.

Est-ce que tu peux imaginer un Donnie Darko indonésien ? Et ben Belenggu, c’est l’histoire d’un film indonésien dans lequel il y a un lapin et aucune tension.

En fait, nous avons assisté à une oeuvre ennuyante.

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Autant certains films ne sont pas bons mais on trouve quand même de quoi nourrir cette petit boite au fond de notre cœur, celle que l’on appelle passion. Autant là, on se fait chier. On s’emmerde à proprement parlé. Personne ne trouve son bonheur dans cette œuvre qui n’arrive même pas à nous faire sourciller. Un enfer. Une damnation pour le BIFFFeur qui, lui, veut s’égosiller devant des gerbes de sang, du sexe et de la violence. Rien de tout ça ici. Du vent et un scénario vide de sens. Nous aurions bien aimé nous endormir devant, mais même ça c’était impossible. Le son allait trop fort. L’appel de la Troll nous a malgré tout touché et nous sommes sortis après 1h15 de film (oui quand même. Mais dans la rédaction du Suricate, nous sommes un peu maso).

Après cette déprimante fin d’après-midi, la soirée s’annonce bien plus intéressante grâce à un monde sans dessus-dessous, une course contre la mort au purgatoire, deux fillettes horrifiées et Hansel et Gretel fumeur de weed.

Upside Down

Adam et Eden sont amoureux. Le problème c’est qu’Adam habite sur la planète nullos, pauvre et pas cool d’en bas et qu’Eden, elle, vit sur la planète super riche, super classe d’en haut. Deux mondes, deux planètes, deux personnes et un seul amour que finalement tout oppose. Upside Down

ou comment vaincre l’apesanteur et s’effondrer lamentablement.

Une idée aussi incroyable que celle de deux planètes coexistantes à quel-ques mètres l’une de l’autre est une idée qui aurait pu donner naissance à un film extraordinaire. Si en plus on nous fait miroiter la présence de Jim Sturgess (toutes les gonzesses font HAAAA) et de Kirsten Dunst (tous les mecs font HOOOO), alors l’œuvre s’annonce réellement inté-ressante.

Mais Juan Solanas n’a fait qu’une moitié de travail pour son film. Il a trouvé l’idée, il l’a mise en image mais par contre, pour ce qui est du scénario, il s’en est passé du début à la fin de son film. Les 20 premières minutes plantant le décor de ce monde incroyable où les gens d’en bas côtoient les gens d’en haut et où l’apesanteur se dédouble pour ne permettre à personne de passer d’une planète à l’autre donnent l’eau à la bouche. Et puis soudain, c’est le drame.

Sérieusement, qui voudrait voir une comédie romantique à l’eau de rose dans un festival du film fantastique ? Pourtant, le public l’attendait, cette romance fantastique sortie de nulle

part et réalisée par un homme dont le nom nous est pour ainsi dire inconnu. Le jeu de miroir entre ces deux terres que tout oppose mais qui se res-semblent étrangement aurait par exemple été un très bon filon à exploiter. Mais peut être était il plus facile, plus banquable de créer une pâle copie du monde de Total Recall (pour rappel, les deux pôles de la terre communiquent par un unique ascenseur qui fait le lien entre le pôle riche et le pôle pauvre) ?

Upside Down nous fait dire que peut-être certaines idées ne devraient pas dépasser le cadre de l’imaginaire, ne devraient peut être jamais être mises en image tant leurs magies sont peu représentables…

The Human Race

The Human Race est l’un des films les plus attendus du festival (il y en a quand même beaucoup, non ?), il faut dire que le concept a tout pour lui et attire forcément ! Septante (soixante-dix pour les vilains) personnes se réveillent dans un endroit inconnu et entendent leurs propres voix dans leur tête leur énoncer les règles du jeux macabre auquel ils vont devoir prendre part : si ils touchent l'herbe, ils meurent, si ils ne suivent pas les flèches ils meurent et si ils se font dépasser deux fois, ils meurent.

Plus qu’une version marathonienne du purgatoire, ce film nous emmène

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« Mais dans la rédaction du Suricate, nous

sommes un peu masos. »

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dans l'esprit humain et touche dans le mille. La réalisation de Paul Hough (le fils de John Hough qui a réalisé notamment Legend of Hell House) est audacieux et surprenant. Malgré une fin un peu bâclée, il fait souffler un vent de fraîcheur sur le genre.

Forgotten

Deux copines d’enfance se retrou-vent bien des années plus tard, par hasard, aux urgences ou Hanna (l’une des deux) travaille. C’est comme si c’était hier et elles déci-dent de repartir sur l’île, où elles ont passé quelques étés ensemble. Mais Hanna ne se souvient pas de grand chose, même pas le secret partagé avec Clarissa (l’autre). Sauf que le secret va réapparaître sous forme de visions fantomatiques de la jeune fille qu’elles auraient laissé mourir. La vengeance est un plat qui se mange froid.

Ce film allemand à l’atmosphère lourde est assez réussi et réuni tout pour plaire, jusqu’au traditionnel twist final. Malgré tout, le film souffre d’affreuses longueurs de mise en place. Mais l’attente permet un plus grand effroi par la suite. Les péquenauds du coin sont très cré-dible et l’interprétation est à la hauteur du projet. Seul gros souci du film, la fin qui s’éternise éternel-lement d’explications inutiles. Les spectateurs ne sont pas cons non plus.

Hansel et Gretel get baked

S’il y a bien un moment où les BIFFFeurs sont passés de l’autre coté de la frontière SAIN/MAL-SAIN, c’est bien pendant ce film de Duane Journey. Le moment où la vilaine sorcière s’apprête à déguster un steak de viande humaine cuit à la perfection, ruisselant de sauce… Et que le ventre du public se met à gargouiller, que les spectateurs pous-sent un soupir et que l’on entend se répercuter sur les murs de la salle les « mmm, j’ai faim » de plusieurs aficionados du festival, c’est ce moment où tu te dis que, oui, la barrière est franchie. Pire encore, ton propre ventre se met à grogner, tu crève la dale et ce ne sont surement pas les dinosaurus que tu as mis dans ton sac ce matin qui vont te rassasier.

Hansel et Gretel, c’est un peu la bonne surprise des films de 1h ! Un rythme qui t’embarque, des gags, de l’humour et un grand n’importe quoi qui dessine lentement mais surement un sourire sur ton visage.

Et puis il n’y a rien à faire, mettez une bombasse cannibale dans un film et les BIFFFeurs hurlent leur joie. Pour les plus prudes (ou les moins carnivores) sachez qu’en plus d’être drôle, l’acteur c’est un peu votre chouchou d’amour de Twilight. Non, pas Robert. Non, le mec qu’on voit deux fois. Allé, hein ! le petit mignon là…

Michael Welch ! Le genre d’acteur que tu as vu dans plein de films sans vraiment te rappeler de qui il s’agit…

Bref de l’éclate avec un grand E. L’adaptation en comédie adolescente du conte recueilli par les Frères Grimm est plutôt savoureuse et on prend assez bien son pied devant cette débandade de violence, de gags et de nourriture.

Les films finis, Loïc se rend compte qu’il doit se lever pour être à la compétitions de courts-métrages et dépriment. Les autres ont le sourire aux lèvres de commencer à 18h.

Bonne nuit.

Loïc Smars, Olivier Eggermont et Roxane de Quirini

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BIFFF, jour 11 : Belgian Day et tonton Argento is back !

Séparons la chronique en deux parties : le Belgian Day chroniqué par le Boss en CINE 2 et la salle CINE 1 pour le reste du groupe.

CINE 1

Commençons par Pieta, le nouveau film de Ki-Duk Kim qui a gagné le Lion d'Or au festival de Venise (mais celui-ci fût très controversé). Et le moins que l'on puisse dire c'est qu'on comprend bien cela. C'est l'histoire de Kang-Do, un homme qui vit seul et qui gagne sa vie en amputant des gens afin que l'assurance lui reverse l'argent que les créanciers de la banque pour laquelle il travaille lui doivent. Jusqu'au jour où une femme fait irruption dans sa vie et prétend être sa mère. Le scénario est promet-teur et on voit durant tout le film la relation entre le fils et celle qui prétend être sa mère évoluer au fur et à mesure. Si certaines scènes sont franchement glauques, la trame de fond vaut la peine même si à certains moments on s'ennuie un peu. Bref, on sort de ce film un peu comme on y est entré, interloqué et ne sachant quoi en penser. Ensuite, le légendaire réalisateur Dario Argento s'attaque au mythe de Dracula sous la férule de rien de moins que la Hammer. L'histoire pas besoin de vous la raconter tous le

monde la connaît déjà. Ce qui était intéressant ici c'est le traitement que Argento allait en faire. Et finalement on est quand même un peu déçu. Alors bon, le film est bien réalisé (à part cette scène assez grotesque dans laquelle Dracula se transforme en mante religieuse) et on passe un bon moment malgré la 3D. Mais force est de constater que ce n'est pas vrai-ment un chef-d’œuvre non plus. Argento a réalisé son film à la manière des années 70, revenant à un Dracula plus classieux. Le point positif est la liberté qu'il prend par rapport au roman de Stoker qui apportent tout de même un certain effet (en donnant moins d'importance par exemple au personnage de Jonathan Harker). Mais bon, à la fin on reste sur sa faim et même si le réalisateur de Suspiria a étanché notre soif de sang et de chair fraîche, la déception est présente. Dommage, parfois la réunion de plusieurs mythe ne donne pas l'effet escompté. (N’oubliez pas l’interview de Dario Argento !)

Et pour finir la soirée, après avoir vu Peach Tree, j’appréhende légèrement (lourdement en fait) le prochain film coréen. Confession of a Murder, un nom qui ne me dit absolument rien, réalisé par un certain Byeong-gil Jeong (à prononcer 10 fois très vite) que je ne connais absolument pas.

Je m’assieds dans la salle, m’affale devrais-je plutôt dire, m’attendant à voir débarquer l’enfant aux deux visages qui serait à jamais associé à la culture coréenne dans mon esprit. En plus ça dure 2h, la joie. Le film se lance.

Je suis. Je m’accroche. J’apprécie. Je stresse. Un régal en fait. J’assiste à une projection comme on en voit peu de nos jours, que ce soit au BIFFF ou dans un cinéma classique. Le film, long certes, m’embarque. Le pitch est sensé, les twists sont surprenants mais cohérents.

Alliant humour, stress, tension, gags, Confession of a Murder est sans aucun doute LA surprise de la sélection thriller. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il remportera, haut la main, le prix de la compétition. Quel pied sincèrement. De l’action et du rythme comme on en voit peu dans les films coréens.

L’histoire se veut simple. Plusieurs crimes affreux ont été commis il y a de cela une vingtaine d’années et, le lendemain de la date d’expiration de condamnation pour ces dits-crime, un homme publie un roman repre-nant les détails les plus sordides de cette affaire.

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Des détails, non-révélés au public, qui le désigne comme étant le présumé coupable.

La fin vous laisse hébété, presque épuisé d’avoir embarqué à bord de ce train à grande vitesse, ce voyage au cœur d’une enquête dans le temps.

CINE 2

Totalement épuisé par 5h de sommeil et l’achat d’un énorme thé Starbuck, j’arrive les yeux explosés, la démar-ché hésitante au Bozar prêt à bouffer de la pellicule. Mais je ne déprime pas. J’aime découvrir les courts-mét-rages et la débrouillardise de jeunes auteurs en recherche de reconnais-sance. J’aime aussi ce mélange de daubes et de pépites condensés en quelques heures de projections inin-terrompues.

Les lumières s’éteignent, une ou deux personnes crient les phrases rituelles mais tout le monde est assez calme. Les habitués dorment dans leur lit ou simplement dans les fauteuils de la salle. Les autres sont là pour dé-fendre les films et se retiennent des commentaires lour-dauds du BIFFFeur lambda. Mais découvrons sans plus attendre les courts.

Working Girl Superhero : Amélie arrive dans les bureaux d’une multi-nationale pour décrocher un bon boulot. Elle n’a pourtant pas l’air à sa place. Mais elle possède le pouvoir de recommencer indéfi-

niment l’entretien. Film de N’Dembo Ziavoula déjà présent l’année passée à la même compétition livre un petit film assez sympathique qui pêche un peu par le manque de charisme de son actrice principale.

Bird : film d’animation de Koen De Gussem, retrace l’étrange histoire arrivée à un prisonnier malade qui endure ces journées dans une cellule froide. Un jour, un mystérieux voya-geur lui offre en cadeau un puzzle qui s’avèrera magique. L’animation est fluide et réussie, l’histoire est très jolie. Très bon début pour le jeune réalisateur qui espérons, continuera sur sa lancée.

Délivre-moi : réalisé par Antoine Duquesne, le film raconte l’historie d’une petite fille qui arrive avec ses parents dans un hôtel. Parti sans le papa qui doit travailler (clin d’oeil) voir la Grand Roue, elle revient avec sa maman au moment où un drame s’est passé. Mais à trop vivre avec ces fantômes, ceux-ci finissent par vous emmener au bord du préci-pice... Vous n’avez pas tout com-pris ? Nous non plus et c’est peut être le plus gros défaut de ce court qui a quand même tapé dans l’oeil d’un jury.

Perfect Drug : un film de Toon Aerts. Une voiture est garée devant un étrange hôtel, sur la banquette arrière, des éprouvettes en grand nombre. L’un des occupants va boire le contenu de l’une d’elles, ce qui va provoquer des effets extraordinaires. Je n’ai personnellement pas apprécié énormément le film mais il est vrai qu’il était taillé pour le BIFFF : de la violence et des monstres plutôt bien réussis. Ce qui lui ouvrira les portes du Grand Prix à Bruxelles et du second à Amsterdam.

Bona Nox : depuis la mort de maman, papa ne fait que pleurer, et moi je me déplace dans Fauteuil, mon fauteuil roulant. Mais je peux arranger tout cela grâce à ma ma-chine à voyager dans le temps ! Ces paroles de la voix off du jeune héros résument très bien ce court, sûrement le plus poétique et émouvant de la sélection. Et rien que pour ça Jean-Frédéric Eerdekens, bravo.

This is Love : une ville est envahie de zombies. Un geek égoïste, enfermé chez lui, voit un jour sa jolie voisine Sandra poursuivie par les monstres. Réalisé (ce qui est rare faut l’avouer) par deux femmes (Florence Boisée et Pia Callewaert), This is Love prend le parti de l’animation et de bourrer de références leur court. C’est payant ! Et la fin est juste géniale. Dommage que l’animation est par-fois vraiment dégueulasse.

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« J’aime ce mélange de daubes et de pépites

condensées en quelques heures de projections

ininterrompues. »

Perfect Drug

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Pour vous servir : l’histoire d’un pauvre gars qui va passer la pire journée de sa vie. Film de Christophe Clin est pour moi (et accessoirement pour l’UPCB) le plus original et le plus drôle de la compétition. Clin part dans un délire totalement fou assaisonné d’absurde à la belge. J’ai adoré.

Tempo : j’ai rencontré Benoît Fonte-nelle et Tony Marioni, les réalisateurs, à la conférence de presse du BIFFF et en plus d’être sympathiques, ils ont de bonnes idées. Ils cherchent à nous faire découvrir Tempo qui vit dans le ciel, dans un lieu magique où il exerce une profession très particulière : c’est lui qui invente toutes les histoires. Doté d’une introduction magistrale, d’une idée et d’un univers génial, le film rate le coche à cause d’un comédien principal loin du niveau de l’imagi-naire créé.

Chambre Double : Gilles est médecin et est interrogé... Cela a en fait com-mencé quelques heures avant, en pleine nuit, dans un hôtel miteux, où le réceptionniste le sollicite afin de soi-gner une femme tabassée. Malheureu-sement pour Mathieu Mortel-mans, les conditions n’étaient pas au beau fixe pour l’image de son film qui finale-ment a paru trop sombre. Mais cela n’a pas décontenancé les jurés qui lui ont donné tout de même trois prix !

Vertige : de Christophe Gautry et Mathieu Brisebras. Dans notre monde urbain, le système jette les hommes à terre dans l’indifférence quasi géné-rale... mais paradoxalement, vue sous cet angle neuf, la ville devient un espace à redécouvrir et à reconstruire. Le concept du film de retourner les perspectives est juste génial mais trouve ça limite dans la durée. C’est vite long et ça tourne les têtes au bout d’un moment. Un concept à garder mais à petites doses.

Pilate 53 : de Luc Bourgeois. Le notaire Wilquet a été sauvagement assassiné, le commissaire Veys et son adjoint enquêtent. En dehors du fait

que Bernard Yerlès est de la distri-bution, ce court est loin d’être un chef-d’oeuvre. Mais on rigole beau-coup et c’est le principal pour passer un bon moment.

Highway Fever : de Bart Nouws. Jusqu’où peut aller un américain moyen dans le partage du rêve améri-cain ? C’était pour ma part mon favori. L’histoire est simple mais de haut niveau. L’animation est fluide et inté-ressante. Dommage qu’il parte les mains vides ...

Pour la première fois, une diffusion hors-compétition existe pour le court-métrage et cela permet de revoir les coups de coeur de l’année ! Comme d’habitude on a de tous les styles. Bloody Eyes revisite le mythe de la gorgone. Ecrit par Luc Dardenne, c’est d’un ennui total. Par contre Un Monde Meilleur de Sacha Feiner a réussi avec ce court à créer un monde à part. Le Petit bonhomme vert montre, que même sans argent, ont peut réussir quelque chose de très bien fichu. Voir l’actrice tentée par une voix d’ET de s’empaler le vagin sur une plante piquante est réellement hilarant ! La folie de Fable Domestique déconcerte et parfois ennuie mais on ne pourra reprocher aux réalisateurs de sortir des sentiers battus. Le très attendu et nominé aux Oscars Dead of a Shadow a eu malheureusement un souci tech-nique et n’a pu être vu qu’en V.O. (néerlandais) et a perdu beaucoup de son public. La séance se termine avec Worst Case Scenario ou com-ment faire un film résumant le BIFFF : sexe, violence, fantastique, inceste, viol, drogue, etc., le tout dans un trip sous acides incompréhensible mais déjanté.

Par la suite, et pour continuer sur la lancée belge,on découvre un court-métrage : Les Oubliées. Cest une sorte de pilote à une (peut-être) future web-série créée par Thierry De Coster, acteur reconnu de théâtre belge (Qui est Mr Schmitt ?) mais surtout pour avoir été le grand dadais de la pub

Kriek il y a quelques années. Le peu que l’on en a vu laisse présager quelque chose de vraiment intéressant. (http://www.les-oubliees.com/). On découvre ensuite le film de Lucle Desamory, Abracadabra. On suit un journaliste qui veut écrire une hagio-graphie sur l’Abbé Pierre et qui se rend dans les centres Emmaüs pour effec-tuer des interviews. Il ne prête pas attention aux taches de sang qui ruinent son parquet ou le fait que sa langue soit noire comme du charbon. Dans le dernier centre qu’il visite, le monde logique que l’on connaît laisse la place à un enchaînement de situa-tions qui partent totalement en caca-huète. Le spectateur aussi, s’il n’est pas parti, est perdu par ce film aux couleurs moches et à l’histoire complè-tement dégénérée. On se demande toujours ce qui a pu faire que ce film ait vu le jour. Sa présence au BIFFF est par contre compréhensible, ce n’est pas tous les jours que sort un film fantas-tique belge. Si c’est pour ça, autant éviter.

Heureusement, notre belgitude est sauve avec la projection d’Au Nom du Fils. Mais attardons-nous d’abord aux deux courts-métrages/bandes-annonces diffusés avant la projection. Le premier est Un homme bien de Steve De Roover, très sympathique court-mét-rage traitant du vampirisme. Sa grande force est le choix de son acteur au visage très marquant. Encore une fois c’est plus une bande-annonce qu’un court. Celui-ci ayant été fait avec les premières images tournées pour le long. L’autre segment est la bande-annonce du projet soutenu entre autre par les fous de la Zone Geek. Son nom ? Paranoïa Project, basé sur le célèbre jeu de rôle. J’ai été un peu déçu car les annonces sur Facebook présa-geaient du meilleur et au final, nous n’avons qu’une bande-annonce vrai-ment trop courte pour commencer à apprécier le projet. Mais on attend le long ou le moyen métrage pour prendre la mesure complète de l’idée. En tout cas, ils ont des couilles et ça c’est beau !

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Commence alors Au Nom du Fils que nous connaissons déjà pour avoir fait les interviews de leur dossier de presse et la critique est déjà parue dans le numéro 15. Le co-créateur du Suricate Magazine avait dit ces mots :

Au nom du père, du fils et du jouissif.

Elisabeth est une catholique convain-cue. Fervente chrétienne et mère de famille, elle vit sa religion de mani-ère dévouée et servile. Animatrice d’une émission sur une radio chré-tienne, elle vient en aide aux per-sonnes par le biais d’une libre antenne. Ce qu’elle croit être une vie idyllique va très vite tourner au cauchemar. Se retrouvant confrontée de plein fouet à la réalité de la vie mais surtout à la face sombre de l’Eglise, elle décide de partir en croisade afin de mener son propre combat.

Ne vous fiez pas aux apparences, ce film n’est en rien un drame social ayant pour origine un fait d’actualité sordide. Au contraire, celui-ci s’érige comme un pamphlet imaginaire à l’encontre du mutisme de l’insti-tution ecclésiastique que nous con- naissons aujourd’hui. Ce mutisme d’un autre âge qui apparait comme inflexible face aux exigences de transparence du monde moderne. Dans une société en constante mutation et en constante évolution, Vincent Lannoo et Philippe Falar-deau (le co-scénariste) ont voulu

pointer du doigt un phénomène de société qui semble aussi inoxydable qu'inaccessible. Pour ce faire, le réalisateur belge a souhaité présenter un récit humoristique sur fond de drame. Un paradoxe pour certains, une toile de maître pour les autres.

Le film de Vincent Lannoo nous a plu par son côté résolument décalé et subversif. Malgré le thème, la réali-sation nous projette un film jouissif où les protagonistes ne s'apitoient pas sur leur sort. Et pour cause, ce long métrage belge nous emmène dans une vendetta politiquement incorrecte menée par une mère devenue assassin.

En résumé, il est difficile de classer ce film, de le résumer, de l’expliquer car la réalité n’y est que superficielle et ne sert qu’à introduire un récit fantastique. Au bilan, on se surprend à rire, à se moquer, à jubiler face à des scènes volontairement absurdes ou dénuées de toute logique. Un film belge choquant et déjanté signé Vincent Lannoo.

En tout cas il a convaincu tout le public du BIFFF qui n’était pas allé voir Dracula 3D ! Au vu de la piètre réalisation d’Argento, on peut s’esti-mer chanceux d’avoir pu vivre ce bon moment de folie de Vincent Lannoo !

Pour la fin de soirée, la Belgique n’est plus à l’honneur. C’est Excision ou l’histoire d’une jeune fille, souf-

fre-douleur à l’école et animée de pensées les plus morbides qui exis-tent. En plus, sa jeune soeur est vachement malade et sa mère ne sait plus comment lui parler. Un jour, on pense que tout va mieux, elle se fait dépuceler, elle parle aux gens et demande pardon à ses parents. Du moins jusqu’à l’apogée finale ! Moins gore qu’annoncé, Excision est un film bien fichu, avec une appari-tion du sieur Malcom MacDowell. Les rêves de la jeune fille sont parfois vraiment débiles mais ont leur quota monstrueux. Et c’est sans compter sur un final prodigieusement atroce qui risque d’en retourner plus d’un !

Après cette longue journée, j’envoie un message à tout le monde : C’est le dernier jour, on va boire ! J’avais peut-être juste oublié que non, il restait encore la clôture. Mais bon, au dixième verre, on ne pense plus à changer le cours de la soirée. Et on commence tous à être triste de se quitter.

Loïc Smars, Olivier Eggermont, Cécile Marx et Roxane de Quirini

49 21 avril 2013

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Bonjour M. Argento, c'est votre sixième visite au BIFFF, ce festival représente-t-il quelque chose de spécial pour vous ?

Dario Argento : Oui, c'est vraiment un festival très spécial. J'étais présent à la première édition et je me souviens ce n'était encore qu'un petit festival mais j'avais vu qu'il avait des possibilités énormes ! C'est une foule magnifique et hier soir (lors de la présentation de son film Dracula 3D) l'accueil du public a été superbe.

Vous avez la volonté d'innover dans toutes vos réalisations, pour-quoi avoir utilisé la 3D pour votre nouveau film Dracula ?

J'avais cherché quelque chose qui donne une possibilité de réinventer le personnage de Dracula. Et j'ai trouvé que la 3D pouvait apporter quelque chose. Car la technologie a beaucoup innové et maintenant on peut avoir une 3D parfaite avec beaucoup de profondeur. J'ai pensé que ça pouvait apporter une nouvelle vision à Dracula. Que le public rentre réel-lement dans le film.

Votre version de Dracula se rap-proche des adaptations qui étaient réalisées dans les années 60/70. C'est un peu à contre courant de la nouvelle mode des vampires actuels avec des films comme Twilight. Était-ce intentionnel ?

Oui effectivement, je voulais me rapprocher des vampires de la Ham-mer de ces années-là. Plus spécia-lement les films avec Christopher Lee, c'était des chefs-d'oeuvre qui m'ont beaucoup inspiré. Tout le travail de la Hammer Film en fait. Les films de vampires actuellement sont des petites histoires d'amour inintéressantes. Je n'aime pas ça mais je pense que cela va bientôt passer de mode.

Vous êtes le scénariste de presque tout vos films, est-ce une obligation pour vous ?

Oui, c'est très important pour moi d'écrire mes films car alors je prends possession du film, il vient de mon imaginaire, de mes rêves. Pour moi ce n'est pas intéressant de réaliser un film écrit par un autre.

Vos films sont souvent contro-versés, pouvez vous nous parler de votre rapport à la censure ? En avez-vous déjà fait les frais ?

Heureusement très peu souvent. Bien sûr il y a toujours certaines restric-tions. Parfois c'est trop pour les producteurs donc ils vous obligent de couper des petites choses. Aujour-d'hui, la censure officielle des gou-vernements n'existent plus mais a laissé la place à celle des producteurs qui sont devenus les nouveaux censeurs.

En 2007 vous avez terminé la Trilogie des Trois Mères (Suspiria, Inferno et Mother of Tears) qui est considérée comme un fil conduc-teur de votre carrière. N'était-ce pas difficile de passer à autre chose ?

Non pas vraiment, car je fais un film et puis je l'oublie (il rit). Je cherche une nouvelle aventure et une nou-velle inspiration donc non je suis vite passé à autre chose.

Dans vos films vous aimez conf-ronter l'irréel et le rêve pour former une réalité. D'où cela vient-il ?

J'ai beaucoup d'inspiration par la psychanalyse et l'étude des symboles. Mes films comportent beaucoup de symboles. Les personnages eux-mêmes sont symboliques. Mon film Le syndrome de Stendhal parle d'ailleurs de cela. Et le fait de mélanger le réel, l'irréel et le rêve permet d'utiliser des métaphores de la réalité.

Vous êtes contre l'idée du remake mais récemment Hollywood a an-noncé vouloir en faire un de votre film Suspiria. Avez vous été consul-té ?

Je ne pense pas qu'ils soient en train de faire cela. Jamais on ne m'a parlé de cela mais j'espère que cela ne se fera jamais !

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A la rencontre de Dario Argento

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Page 51: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Vous êtes un des meilleurs réali-sateur de films d'horreurs de tous les temps, qu'est-ce qui continue à vous motiver à faire de nouvelles réalisations ?

La même chose qu'à mes débuts. Avoir une relation intense avec le public. Avec le public jeune aussi qui est plus libre que les adultes. Le cinéma et moi c'est une belle histoire qui continue encore maintenant.

Parmi les réalisateurs actuels vous sentez-vous proche d'un ou de plu-sieurs en particulier ?

Plutôt de ceux venant de la Corée du Sud, du Taïwan et des japonais. Ce sont ceux qui ont vraiment quelque chose de profond à raconter et qui sont très intéressants.

En 1978, vous avez travaillé avec George Romero pour son film Zombie. Vous représentez deux visions du cinéma d'horreur très différentes, est-ce un point positif ?

Bien sûr. C'est bien que nous ayons des visions différentes. Nous sommes très unis car nous n'avons justement pas la même vision d'un film. Nous aimons tout les deux beaucoup travailler ensemble car chacun a ses idées.

Et quels sont vos futurs projets ?

Pour le moment je n'ai rien. Je n'ai que quelques idées qui doivent encore être creusées mais pour le moment je me repose un peu.

Enfin, quel est votre film d'horreur/fantastique et votre film romantique favori ?

Désolé mais je ne pourrais pas choisir un film favori ! Il y en a tellement qui sont exceptionnels.

Propos recueillis par Olivier Eggermont

(interview réalisée en collaboration avec Jean-Philippe Thiriart d’En

Cinemascope et Richard Bourderionnet de Sci Fi Universe)

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Page 52: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, jour 12 : foutre ! C’est déjà fini !

Légère gueule de bois au réveil ce samedi, dernier jour du BIFFF. On est tous conscient que l’on doit profiter au maximum de ce dernier jour ! Ce soir, on veut boire, tous se voir une dernière fois, profiter d’un maximum de Jameson gratuit (hein Guillaume !). Mais en attendant, il y a encore du boulot ! J’en profite en préambule de vous rappeler aussi que Roland Joffé, président du Jury international est passé par les micros de nos intervie-weurs et qu’il ne faut pas oublier d’aller lire ! Mais revenons à nos moutons et reparlons cinéma !

The Thompsons

Encore un film de vampire ? Sérieu-sement ?

La suite de l’œuvre The Hamiltons dans laquelle on nous présentait une famille américaine dysfonctionnelle de vampires, The Thompsons, rac-onte comment, prise en chasse par la justice, cette famille va s’exiler en Angleterre, prenant ce nouveau nom afin de passer inaperçue.

Arrivé au Royaume-Uni, la famille assoiffée tente de contacter le clan secret des vampires anglais. Ceux-ci

ne sont peut-être pas aussi accueil-lants qu’ils en ont l’air.

Altieri et Flores nous donnent à voir un énième film de vampire dont l’originalité est pratiquement absen-te. Un Twilight plus violent, plus sombre mais un Twilight quand mê-me.

Le film est ennuyeux même par moment, laissant le public stoïque devant ce manque de prise de risque. Certes l’image est belle, l’histoire se laisse suivre, mais le film ne mar-quera en aucun cas les esprits BIF-FFesques qui, en cette fin de festival, préfèrerait s’égosiller plutôt que d’attendre une action qui ne semble pas prête d’arriver.

The Grand Heist

Dernier jour du festival, vous repren-drez bien un petit peu de coréen, il en reste ! L'histoire c'est un peu Braquage à l'italienne chez les bri-dés du Moyen-Age. Après le départ de ma voisine de gauche à la moitié du film qui avait jusque là passé le plus clair de son temps à roupiller, le film s'anime un peu et le scénario se met définitivement en place. Alors bon, cette production ne révolution-nera rien et le scénario c'est du déjà

vu, mais bon, on se prend quand même au jeu et on se surprend même à apprécier cela. Promis, pour le prochain BIFFF, j’apprends le coréen, c'est plus utile que l'anglais ici !

The Brass Teapot

Film alternatif de clôture, The Brass Teapot raconte l’histoire de John et Alice, couple surprenant de la fille populaire du lycée et d’un looser qui sont contre tout attente tombé amou-reux. Madame cherche désespé-rément un boulot qui lui correspond et monsieur vient de perdre le sien. Les ennuis commencent ? Non, car la chance leur sourit, en découvrant par hasard une vieille théière qui donne de l’argent à celui qui, pour elle, s’inflige une douleur. Et le pognon arrive plus vite si on se fait vraiment mal. Commence alors une avalanche masochiste qui va se découvrir de plus en plus incontrô-lable, peut-être due à une malédi-ction entourant cet objet mystérieux. Arriveront-ils à s’arrêter à temps ?

Le plaisir de revoir Juno Temple après Killer Joe l’année passée s’estompe assez vite pour une bonne comédie violente sur l’appât du gain

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et le masochisme pour réussir (le parallèle avec les idiots qui font les cons à la télé n’est pas loin). Nous retrouvons un schéma déjà vu dans plusieurs films : le Graal dans Indiana Jones, la lampe d’Aladdin, le diable dans Endiablé, les chaus-sures de foot dans Jimmy Grimble, etc. Un objet magique ou des sou-haits sont disponibles à quelques personnes fondamentalement gentil-les, mais au final, c’est pas si idéal que ça et seul leur courage ou leur bon fond arriverons à les faire sortir du piège dans lequel ils se sont lancés. Mais ce n’est pas parce qu’un film a une trame peu originale que cela fait un bon film. Et The Brass Teapot malgré son nom ridicule nous aura fait rire du début à la fin.

Stoker

Le film qui pose le plus grand dilemme en cette fin de festival.

Pas de note unique pour le film de Park Chan-wook. Pas de critique solitaire non plus. Une double critique :

Le scénario tout d’abord. Ecrit par Wentworth Miller (haaaaa c’est le canon de Prison Break !!! Ouais, d’accord, mais ne nous emballons pas), Stoker tarde à démarrer, si quand bien même il démarre à un moment. L’affiche ainsi que le synopsis nous annonçaient un film malsain basé sur l’inceste, l’attirance physique et la violence. Certes ces éléments s’y retrouvent mais sont

comme qui dirait éparpillés dans un tourbillon de scènes inutiles. Mia Wasikowska est réellement bluffante en jeune fille perturbée voire autiste sur les bords et Nicole Kidman est parfaite dans son rôle de mère peu aimante. L’histoire développe en nous un arrière gout dérangeant de déjà vu. Là où nous aurions du trouver la pesanteur d’une histoire dure, abrupte, malsaine… nous ne trouvons que l’ennui.

La réalisation ensuite. Stoker donne les larmes aux yeux tant il est beau visuellement. Des images qui vous rappellent que, oui, il existe des gens avec un réel don. Park Chan-wook nous bluffe par son talent. Ce film est réellement une merveille et, malgré le scénario faible, je ne saurais vous déconseiller de le regar-der. Des images d’une pureté, d’une netteté, d’une beauté, un florilège de ce que j’ai vu de plus beau au cinéma. Les plans s’enchainent, chacun surpassant le précédent. La qualité du film nous coupe le souffle, et lorsque l’on pense avoir fait le tour de cette œuvre d’art, la scène où Mia (Wasikowska) brosse les che-veux de Nicole (Kidman) finit de nous achever. Je ne saurais remercier plus Park pour ce qu’il nous a offert lors de cette clôture, la beauté à l’état brut. Vivifiante, troublante, éton-nante de vérité. Merci le BIFFF de nous avoir offert ce superbe cadeau en guise d’au revoir.

Avant la projection du film de Park Chan-Wook, a eu lieu la cérémonie des remises de prix du festival. Les favoris sont récompensés : Ghost

Graduation, Blancanieves ou encore Confession of Murder. Mais cette année, les jurés nous réservaient quelques surprises. Le jury 7ème Parallèle (et l’impulsion de Christo-phe Bourdon) a lancé un Harlem Shake géant avec tout le public dans le Bozar et le Jury Thriller, grâce au talent de Patrick Ridremont, a pour sa part fait faire au public un Haka géant. (À retrouver sur youtube !) Mais le Jury International, plus calme, n’a pas pour autant démérité ! Après une chanson sublime, aux paroles très poétiques suivante : « À poil cher BIFFF, La porte cher BIFFF », ils ont décernés un prix spécial au public qui les a bluffé. Demandant un volontaire dans la salle, le public a scandé le volontaire désigné d’office : Rémi. Habillé presque correctement pour une fois, il a eu son moment de gloire sous les applaudissements des 1400 person-nes venues fêter le cinéma. Après la projection de Stoker, tout le monde s’est donné rendez-vous au bar pour fêter dignement la fin de l’évène-ment. Mais ceci est une histoire qui ne se racontera pas, comme on s’en doute, on a tout de même une vie privée. (Comment ça, on a fait des conneries ?)

Bisous.

Loïc Smars, Olivier Eggermont et Roxane de Quirini

53 21 avril 2013

« Le jury 7ème parallèle a lancé un Harlem Shake

géant (...), le jury Thriller (...) un Haka géant. »

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Post-BIFFF, Roxane déprime

13ème jour :

Et soudain, la porte du taxi claque. « A Uccle s’il vous plait ». Dernière fois que je prononce ces mots et soudain la réalité me frappe.

Adieu BIFFF. A l’année prochaine.

Adieu mes séances inoubliables. Ô tu sais BIFFF, nous nous sommes bien amusés une fois de plus. Cette année encore, tes salles furent emplies de nos (mes) hurlements, et c’est le cœur battant, le corps tremblant, que je t’abandonne pour une année.

Adieu mes cuites à la Troll. Adieu Quentin et ses palpitations. Adieu les « Tu me suces ? » et « On baise ? ». Adieu les doigts boudinés de Beige et les commentaires déplacés de Damien. Adieu Charles Six, ses en-cas en salle et sa technique de drague de ma maman. Adieu Loïc et ses insultes par SMS, les taxis et les emmerdes, l’odeur des pizzas, des croques-monsieur et des hamburgers, le manque de chaises et les sièges inconfortables, le sourire de Richard, les blagues de Seb, les coups de coude de Jonathan, les compliments de Pepino, les cadeaux d’Arthur, les câlins de Sammy, les demandes en mariage improbables, Jeannine et l’attente que tout le monde avait de la rencontrer…

On s’est bien éclaté BIFFF. Si tu savais comme on a ri. Cette année encore tu nous as comblé. Pourtant BIFFF, c’est le cœur gros et la gorge serrée que je claque cette porte de taxi ce soir. BIFFF, 358 jours sans toi, c’est une année à t’attendre. Une année, c’est long. Et pourtant, rien ne change en un an. BIFFF tu es toujours mon paradis. Chez toi, c’est chez nous. Qui que nous soyons. Lorsque tu te termines, je sais que je ne suis pas la seule (j’en suis certaine d’ailleurs), à rentrer chez moi en ayant l’impression de dire au revoir à un vieux pote. Merci BIFFF. Vrai-ment.

A l’année prochaine,

La fille du BIFFF.

*La porte du taxi claque*

« A Uccle, s’il vous plait. »

15ème jour :

Je broie du noir. La déprime post-BIFFF est la plus terrible de toutes.

Parfois, lorsque je lance un film, je tend l’oreille afin d’entendre le « Tuer encore ? Jamais plus. » qui ne vient pas. Lorsque je cuisine, mon nez recherche l’odeur d’hamburger qui, malheureusement, n’émane pas de ma salade.

Je n’ai pas eu de supers pouvoirs, pourtant j’ai essayé de toutes mes forces, j’ai manqué de faire exploser mon cerveaux tant j’ai tenté de ralentir le temps.

BIFFF, tu es déjà reparti. Mais peut être est-ce cela qui fait que l’on t’aime tant. Le fait que tu ne dures que quelques jours, que tu sois nos vacances, nos moments de liberté.

L’autre jour, Jeannine m’a demandé « Mais pourquoi ? ».

BIFFF, j’ai réfléchi. Ma réponse est simple. Chez toi, nous sommes nous. Qui que nous soyons. Pas de masque à porter dans un festival où l’horreur a ses quartiers, pas de jugement, pas d’apriori. Juste nous, notre passion et notre envie de la vivre à fond.

BIFFF, je décompte d’ores et déjà les jours jusqu’à nos prochaines retrou-vailles.

Roxane de Quirini

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Page 55: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

BIFFF, la fin : dis papa, les Bozar c’était comment ?

Ca y est le BIFFF c’est fini. On rentre tous chez nous, prêts à retourner au boulot ou aux études dès lundi après deux semaines en autarcie. J’ai eu faim en voyant des bouts de corps cuits, j’ai rigolé en voyant des enfants se faire buter, j’ai hurlé en voyant un baiser entre amoureux, je crie la porte au cinéma et ma copine quand elle rentre à la maison, j’ai une envie désespérée de tuer tout mon entourage, de boire, de prendre de la drogue ou de dispa-raître dans un trou tri-dimensionnel. Allo Docteur ? Que dois-je faire ? Patienter jusqu’au prochain BIFFF ? Vous êtes sûrs qu’il n’y a pas d’effets secondaires ? J’ai vu que Roxane crie encore « ta gueule » aux gens dans la rue, qu’Olivier dit « dans ton cul » tout le temps (mais ça c’est normal), que Cécile se cache sous ses draps et n’ose plus sortir de chez elle et qu’Anastasia rêve du véritable visage de Jean-Jacques Rousseau et voit Rémi rampant par terre (ha non, ce n’est pas un rêve... ou presque). Non ? Ha alors tout va bien, je vais essayer de me contrôler, merci doc-teur.

En statistiques officielles, le BIFFF c’est 232 journalistes de 14 pays les plus exotiques et 64 400 personnes venues au Bozar visionner l’étrange. Pour nous se serait plutôt par jour : 8h de films, 2 litres de Trolls, 1/2 litre de Maitrank, des hamburgers/hot-dog/sandwich à en avoir la diarrhée, 5h de sommeil et des milliers de mots à coucher sur papier.

Contrairement à d’autres années, les jury ont récompensé des films en adéquation avec leur public (le gros buzz de Ghost Graduation) et ont été totalement conquis par l’ambiance

jusqu’à offrir un prix au public. Se sont eux aussi qui ont lancé un Harlem Shake et un Haka géant avec un public de VIP à la clôture.

On a vu de très bons films dans cette éditions et on suit de près leur future carrière (Ghost Graduation, Confes-sions of Murder, Au Nom du Fils, The Human Race, Night Train to Lisbon, Taichi Zero, Mamma, A Fantastic fear of everything, Zombie Fever, Stitches, Jurassik Park 3D ou encore la révélation Mars et Avril) mais on a aussi vu de très grosses daubes (The 25th Reich, Found, Key of Life, Abracadabra, The Between, Paura 3D, Hellbenders, The Peach-tree, The Second Death ou encore Belenggu). Mais c’est un peu le jeu du festival où l’on vient essentiel-lement pour l’ambiance. On a vu aussi de très bons courts-métrages qui annonce un futur radieux pour le film de genre.

On oublie pas le magnifique maga-zine concocté encore une fois par Cinéma Fantastique et le DVD du Collectifff qui nous avait plus qu’emballé l’année passée.

On remercie l’équipe de presse (Jonathan Lenaerts en tête) pour leur disponibilité, leur gentillesse et d’en-fin être passé à la méthode de donner tous les tickets presse d’un coup, ce

qui évite de rater les films, Stéphane qui nous a régalé de son Talent, l’équipe organisatrice de nous don-ner encore des étincelles dans les yeux, à Sci Fi Universe de nous envoyer Richard (je ne saurais jamais dire ton nom de famille), Rémi pour pouvoir lancer des « Ta Gueule » retentissants, la madame qui vend des hamburgers dont je connaitrais le nom un jour, Guil-laume pour les « bistouquettes » (ça vous intrigue, hein !) et tous les gens vus pendant cette édition !

Il y a eu des foirages (comme chaque année), les bières étaient encore plus chères, la ZombiFFF n’a pas pas eu autant de succès que quand il fait chaud mais on oublie tout ça quand on se remémore les bons moment passés au Bozar.

Le BIFFF, c’est le festival fantas-tique le plus fou au monde et le passage de Tours et Taxis au Bozar n’est pas du tout un problème et redonne au contraire un regain au festival et un sentiment de Passage 44, en toute mesure bien sûr. A l’année prochaine. Comme d’habi-tude.

Tuer encore. Jamais plus. TA GUEULE REMI !

Loïc Smars

55 21 avril 2013

« Le Bozar n’est pas du tout un problème et

redonne au contraire un regain au festival et un sentiment de Passage

44, en toute mesure bien sûr. »

Page 56: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Le Top 10 des journalistes du Suricate Magazine sur les films du BIFFF 2013

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10 janvier 2013 - 20h

12 janvier 2013 - 20h

Ghost Graduation

de Javier Ruiz Calderaavec Raul Arevalo, Alexandra Jimenez, Javier Bodalo

Le coup de coeur de tout le monde, prix du Suricate Magazine, prix du Public et Prix du Jury International. What else ?

15 janvier 2013 - 20h14 janvier 2013 - 20h

Argo

Le Top 10 de la rédaction

A Fantastic fear of everything

de Crispian Mills et Chris Hopewellavec Simon Pegg, Alan Drake, Kiran Shah

Bientôt il faudra inventer le terme « Simon Pegg’s Movie » à estampiller sur ces films tant il les porte au sommet rien que par sa présence.

Confession of murder

de Steve Martino et Mike Thurmeieravec Gérard Lanvin, Vincent Cassel, Elie Semoun, etc.

Film coréen perdu dans la programmation. Nos journalistes en sont sortis bouleversés, le jury thriller aussi.

Au nom du fils

de Vincent Lannooavec Astrid Whettnall, Philippe Nahon, Achille Ridolfi

Le cinéma belge change (en bien) et Au Nom du fils en un des meilleurs exemples. A voir et à revoir !

Chained

de Steve Martino et Mike Thurmeieravec Gérard Lanvin, Vincent Cassel, Elie Semoun, etc.

Le retour écrasant de Vincent D’Onofrio sur le devant de la scène et la consécration pour la fille de David Lynch, tout de même plus structurée que papa.

21 avril 2013

Page 57: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

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10 janvier 2013 - 20h

12 janvier 2013 - 20h

Stitches

de Conor McMahonavec Ross Noble, Tommy Knight, Eoghan McQuinn

Tout droit venu d’Irlande, sûrement le slasher le plus décomplexé et drôle de la sélection. En tout cas, nous, on a aimé.

15 janvier 2013 - 20h14 janvier 2013 - 20h

Argo

I declare war

de Jason Lapeyre et Robert Wilsonavec Siam Yu, Gage Munroe, Michael Friend

Un récit d’enfants qui font la guerre. Quand les gosses se prennent pour des adultes, ça donne souvent quelque chose de sympa. Gagné !

Horror stories

de Collectifavec Kim Ji-Young, Jeong Eun-Chae, Nam Bo-Ra

Les films à sketches sont souvent inégaux. Ici c’est aussi le cas, mais force est de constater que c’est surtout très bien.

John dies at the end

de Don Coscarelliavec Chase Williamson, Rob Mayes, Paui Giamatti

Un film qui avait déjà fait le buzz avant d’arriver au BIFFF et en plus il a un titre trop cool. Cette année, la Fantastic Night avait de la qualité.

Trap for cinderella

de Iain Softleyavec Tuppence Middleton, Alexandra Roach, Kerry Fox

Ce film a divisé, d’où sa dernière place mais il a satisfait la majorité et Iain Softley est très sympathique. C’est déjà pas mal.

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Page 58: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Anastasia Olivier Roxane Loïc Cécile25th Reich (The)

Abductee

ABRACADABRA

After

Afterparty

American Mary

Au nom du fils

Belenggu

Bersek 2

The Between

Blancanieves

The Brass Teapot

Chained

Citadel

The Complex

Confession of Murder

Cult

Dracula 3D

Dust Up

Excision

Fairytale

A Fantastic Fear of Everything

The Forest

Forgotten

Tous les journalistes ont coté les films qu’ils ont vu au BIFFF cette année, êtes-vous d’accord avec eux ?

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Les cotations de la rédaction

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Page 59: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Anastasia Olivier Roxane Loïc CécileFound

Frankenstein's Army

Ghost Graduation

Ghost Sweepers

Grabbers

The Grand Heist

Hansel & Gretel get baked

Hellbenders 3D

Hellgate

Here Comes the Devil

Horror Stories

The Host

The Human Race

I Declare War

The Imposter

In The Name of Sherlock Holmes

Inhuman Resources

John Dies at the End

Jurassic Park 3D

Key of Life

Kiss of the Damned

Legend of the T-Dog

The Liability

Mama

Maniac

Mars et Avril

59 21 avril 2013

Page 60: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Anastasia Olivier Roxane Loïc CécileMay I Kill U ?

Modus Anomali

Night Train to Lisbon

Oblivion

Pastorela /

Paura 3D

The Peach Tree

Pieta /

Rat King

Remington ...

Robo-G

Sawney: Flesh of Man

The Second Death

Spiders 3D

Stitches

Stoker

Tai Chi 0

Tai Chi Hero

Texas Chainsaw 3D

The Thompsons

Trap for Cinderella

Upside Down

Zombie Fever

60

14 janvier 2013 - 20h

ScénarioRéalisation

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Cinemag Fantastique

Après le buzz réussi l’année passée avec un nouveau magazine papier et son gros dossiers spécial BIFFF des 30 ans, Cinéma Fantastique n’a pas baissé le rythme. Un deuxième numéro est sorti dans un certain anonymat mais c’est sans compter sur la motivation des énergumènes.

Cette année, ils sortent le troisième numéro avec une offre exceptionnelle couplée avec le DVD du CollectiFFF.

On les remercie de leur passion et on leur dit à l’année prochaine. (surtout Quentin parce que Damien dit que je suis glauque)

Consultez le shop pour savoir comment obtenir les magazines ou le coffret DVD.

http://www.cinemafantastique.net/-Shop-.html

Loïc Smars

Le DVD du CollectiFFF

(l’article a été écrit en 2012 pour la première projection des courts)

Après ce premier opus, je me désaltère avec une Cuvée des Trolls et j’enchaîne avec le Collectifff. Une quinzaine de courts métrages allant de génial à merdique, d’original à la limite du plagiat, de marrant à soporifique. Je retiens surtout les courts métrages suivants ;

Bowling Killers, ou comment mélanger C’est arrivé près de chez vous avec Rien à déclarer ;

Belgian Psycho, ou comment regretter que David Bateman n’ait pas été une bombasse ;

Halloween, la colocation, qui fut filmé avec une réelle passion pour le genre. Le tout mixé avec une bonne dose d’hu-mour ;

Et finalement le court métrage Resis-tance, qui n’est qu’une flagrante copie de They Live de Carpenter, mixé avec un

Terminator parlant comme Duke Nuke’em. Si l’on accepte que le plagiat est la plus flagrante forme de flatterie, on voit qu’il y a un réel travail et une volonté de ne pas faire dans l’amateu-risme. Pour cela, je dis bravo ! Mais pour l’originalité, je dis zéro.

Prenons aussi en vrac : l’anni-versaire d’un zombie, une bataille entre Dieu et le Diable, une découverte de la salle du BiFFF bien des années plus tard, une réflexion sur la valeur d’un bénévole du BIFFF, un fou libéré pour aller au BIFFF, le Slutterball ou un nouveau sport futu-riste et cruel, une torture érotique ou encore un huis clos de deux personnes cachées d’un serial killer !

Et grande nouvelle cette année ! Le DVD est sorti et se trouve à 20€

Loïc Smars et Michaël Heiremans

21 avril 2013

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Jean-Luc Maitrank

Nous en profitons présenter un pers-onnage atypique de la vie festivalière belge : Jean-Luc Ligot ! Plus connu sous le nom de Jean-Luc Maitrank. Il fabrique son propre Maitrank artisanal d’après une recette de sa grand-mère (il a des origines luxembourgeoises malgré qu’il habite dans les Marolles). Mais Jean-Luc ne vend pas son Maitrank à la légère ! Il le vend surtout pour financer des projets sociaux-culturels, rencontrer de nouvelles personnes et créer de nouveaux projets. Il a grâce à son alcool, financé une école au Brésil qui accueille de jeunes enfants issus des bidonvilles. Il vend aussi différents ac-cessoires locaux (demandez à Neil Jordan s’il apprécie la canne artisanale qu’il lui a acheté) et sacs en capsules de canettes (très beaux !). Vous l’avez sûrement croisé dans de nombreux festivals et croyez-moi il n’est pas encore prêt d’arrêter ! De plus son Maitrank est délicieux, ce qui ne gâche rien. Jean-Luc Maitrank ou comment aider les gens miséreux en saoulant les gens aisés. Loïc Smars

Rémy S. Legrand

Tu marches dans les couloirs des Bozar et soudain relents de parfum extrêmement fort.

Mon dieu, qui a bouffé un sapin magique ?

« Quentiiiiiin, tu veux venir voir ma déco ? »

Ha, pas d’affolement, c’est Rémy.

Rémi, l’homme aux seins. Oui l’ami, tu as bien lu. Mais surtout Rémy est l’une des mascottes du BIFFF depuis quelques années. Armé de ses sacs Carrefour, de son cache sexe du jour (un coup une marguerite artificielle, un coup une queue de fouine) et de son parfum qui prend plus au nez que la moutarde de Dijon, Remi est un aficio-nados du BIFFF.

Tu le retrouveras toujours dans les premiers rangs de la salle, s’installant tel un prince sur son trône et tu entendras forcément dès les premières minutes du film le public se fendre de quelques « TA GUEULE REMY ! ».

Rémi c’est l’un des BIFFFeurs qui, quelque soit le jour, l’heure ou le lieu, arrive à te mettre de bonne humeur de par son accoutrement et ses réflexions acerbes (surtout celles faites à Quentin Meignant, le fantasme absolu de Rémy).

Et si ces descriptions ne vous ont pas encore donné l’envie de rencontrer ce personnage haut en couleurs, sachez qu’il a remporté cette an-née un prix spécial du jury pour sa pré-sence et son humour.

Roxane de Quirini

21 avril 2013

Page 64: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

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Jury International

Roland Joffé Frédéric Fonteyne Marina Anna EichIain Softley

Corbeau d’Argent : AbducteeCorbeau d’Argent : American MaryCorbeau d’Or : Ghost Graduation

Jury Européen

Adrian Politowski John Engel Stéphane

StrekerMyriam Leroy

Marie-Hélène Dozo

Pauline Duclaud-Lacoste

David Mathy

Méliès d’Argent : May I kill UMention spéciale : Earthbound

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Jury Thriller

Eric Godon Patrick RidremontPaul Cleave

Grand prix : Confession of Murder

Jury 7ème Parallèle

Patricio Lagos Jean-Michel

VovkChristophe Bourdon

Charles Tatum Jr

Grand Prix : BlancanievesMention spéciale : Vanishing Waves

Grand Prix du Public

Compétitions courts-métrage

• Le Prix Jeunesse pour Chambre Double, de Mathieu Mortelmans.

• Le Prix La Trois pour Délivre-Moi, de Antoine Duquesne.

• Le Grand Prix pour Perfect Drug, de Toon Aerts.• Le Prix Fedex pour This Is Love, de Florence

Bolsée et Pia Callewaert.• Le Prix Sabam pour Chambre Double, de Mathieu

Mortelmans.• Le Méliès d’Argent pour Chambre Double, de

Mathieu Mortelmans.

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• Le 3e prix à Stéphanie Andino avec Le Paradis Exquis

• Le 2e prix à Sophie Fauquet avec Le Cri De Munch• Le 1er prix à Magali Couset avec Pop Art de Keith

Haring

Body Painting

• Le 3e prix à Julie Van Gaans• Le 2e prix à Cathy Grandjenette• Le 1er prix à Stéphane Defauwe

Make Up amateur

• Le 3e prix à Raquelle Marques• Le 2e prix à Marie Fontaine• Le 1er prix à Jana Van der Veken

Make Up semi-pro

• Le 3e prix à Maud Kersale• Le 2e prix à Sandrine Lahou• Le 1er prix à Carole Descamps

Make Up FX Compétition

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La malédiction du Suricate, de Frédéric Livyns

Littérature

Roger Leblanc vérifia plusieurs fois la fermeture de la porte d’entrée de son appartement. Il occupait le rez-de-chaussée d’un petit immeuble non loin du centre-ville. Un quartier situé dans le vieux Bruxelles. Roger regrettait de voir les magnifiques maisons de maître transformées en logements bon marché afin de permettre à une population, en grande partie immigrée, de se loger. Ce qu’il avait toujours considéré comme étant l’un des fleurons architec-turaux de la capitale laissait sa décrépitude écailler jusqu’à ses façades.

Roger n’était pas pour le brassage culturel. S’il n’avait pas exercé les fonctions de concierge dans son immeuble depuis tant d’années, s’il n’avait pas été aussi âgé, il y a belle lurette qu’il aurait mis les voiles. Mais où pourrait-il aller maintenant avec son maigre salaire, la promesse d’une pension toute aussi dérisoire et un loyer à payer en plus ? Il n’avait aucune échappatoire. Il était condamné à finir ces jours dans ce petit appartement jadis charmant.

Il disait souvent, à qui voulait l’entendre, que Bruxelles était foutu. Et il en voulait pour preuve qu’il était désormais le seul Européen dans son immeuble ! Et l’unique à travailler, de surcroît ! Il passait souvent pour un raciste, un étroit d’esprit volontiers rétrograde, mais il n’en avait cure.

Il soupira, exaspéré, en voyant la statuette posée à droite, pile sous les boites aux lettres ornant le mur du hall d’entrée. Quatre jours auparavant, un nouveau locataire avait pris possession du premier étage. Roger n’avait pas retenu la région dont cet homme était originaire. Juste le continent : l’Afrique !

« Un de plus ! » avait-il pensé en le voyant.

Dès son arrivée, l’homme avait placé cette sculpture représentant un animal dont il n’avait jusque-là jamais entendu parler : un suricate. Le gaillard disait que cette bestiole symbolisait la famille et sa protection. Roger s’était

forcé à rester calme alors qu’il n’avait qu’une seule envie : fracasser le crâne de l’homme avec l’objet d’art. Non seulement il était obligé de supporter leur présence, à lui et à tous ses congénères, mais fallait en plus qu’il compose avec leurs superstitions primitives. Il lui avait alors dit de dégager son grigri du hall de l’immeuble. Il n’avait qu’à le mettre sur le pas de sa porte si cela lui plaisait.

L’homme n’avait rien dit et s’était contenté d’un sourire poli contrastant d’avec le comportement insultant de Roger. Depuis, chaque matin, c’était le même rituel. Roger sortait de chez lui et voyait la statuette posée systématiquement au même endroit. Une provocation silencieuse, il en était certain ! Et, à chaque fois, il allait sonner à l’appartement du premier étage afin de lui remettre l’objet et rappeler le règlement d’ordre intérieur de l’immeuble.

La veille, Roger avait spécifié à l’homme que c’était la dernière fois qu’il lui ramenait la statuette. Il l’avait menacé de la jeter aux ordures à la prochaine incartade. L’homme s’était alors énervé et avait haussé le ton en faisant de grands gestes des bras, l’avertissant que s’il faisait cela, un grand malheur s’abattrait sur lui. Des fadaises comme quoi cet objet était sacré et que le briser ou le jeter pouvait porter malheur.

- Des croyances de primitifs ! lui avait rétorqué Roger, les lèvres pincées.

Il avait craint un moment que l’homme, de colère, ne se jette dessus mais il s’était contenté de le regarder, les bras ballants. Il voyait bien qu’il ne servait à rien d’argumenter avec le vieil homme. Ses idées d’antan étaient trop ancrées en lui, faisant surgir la peur de l’étranger.

- Faites ce que vous voulez. Je vous ai averti, s’était-il contenté de dire avant de fermer la porte au nez du concierge.

Auteur de plusieurs livres donc « Les contes d’Amy » (Prix Masterton 2012) et du « Souffle des ténèbres » fraichement sorti de presse, Frédéric Livyns nous offre une histoire d’Halloween rien que pour nous

faire cauchemarder…

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Page 69: Le Suricate Magazine - Special BIFFF 2013

Le sang de Roger n’avait fait qu’un tour et il avait crié, d’un ton péremptoire, qu’il n’était pas dans un pays conquis. Qu’il y a peu, ses semblables ne connaissaient pas la civilisation. Il déversa son flot de bile haineuse face au battant qui resta désespérément clos.

Il se l’était promis : c’était la dernière fois que ce… cet énergumène l’importunait avec ses superstitions.

Et voilà que, ce matin, le suricate se tenait fièrement debout près de la vitre fendillée du sas donnant sur la rue, le regard tourné vers l’extérieur.

- Toi, c’est la dernière fois que tu me nargues ! s’exclama Roger en empoignant vivement la posture.

Il se dirigea d’un pas décidé vers la benne à ordures le long du trottoir et y balança le suricate qui heurta le fond du container métallique dans un bruit d’enfer.

Ensuite, comme chaque jour depuis plus de 20 ans, Roger Leblanc se dirigea vers le centre-ville afin d’acheter son journal. C’était là sa petite promenade quotidienne. Sa vie était réglée comme du papier à musique. Roger détestait les imprévus. Pour lui, l’organisation était le maître-mot. Feu sa femme, qui le traitait souvent de maniaque, en est témoin de là-haut.

Il râlait en voyant les façades décorées pour Halloween. Sur cette vitre-là, une sorcière sur un balai. Sur celle d’à-côté, un gros chat noir au dos bombé sous une lune rousse. Un peu partout fleurissaient des décorations macabres. Cette fête stupide n’était qu’un prétexte commercial pour vendre plein de cochonneries sucrées aux gosses. Et le pire, c’est que les parents rentraient volontiers dans le jeu ! Roger ne comprenait absolument pas l’engouement pour cette fête. Le pire, c’est que ces gamins se déguisaient avant de venir embêter les honnêtes gens pour leur extorquer d’autres bonbons ! Quelle stupidité ! Et, surtout, quel manque d’éducation ! Non, Roger n’aimait pas Halloween non plus. De toute façon, il savait bien qu’il ne serait pas dérangé cette année. Pas plus que l’année précédente d’ailleurs. Pas depuis qu’il avait arrosé les enfants avec la lance à incendie placée dans le hall d’entrée. Bien sûr, il y avait eu des pleurs d’enfants, des plaintes déposées, une visite de la police… Mais Roger n’avait absolument rien eu comme amende. Et le principal, c’était le résultat. Les gosses ne venaient plus l’ennuyer ! Il n’avait jamais voulu d’enfants, ce n’était pas pour laisser ceux des autres lui pourrir sa soirée !

Une petite heure plus tard, il regagna son domicile, son quotidien sous le bras. Il jubilait en pensant à la tête que ferait ce Monsieur quelque-chose-ngwa en voyant son grigri au fond de la poubelle. Au moins, il saurait qui était le maître ici ! Un sourire de joie mauvaise étirait encore ses lèvres lorsque, par un savoureux concours de circonstances, il croisa son locataire en revenant à l’immeuble.

Mais sa joie disparut bien vite. Roger avait transpercé d’un regard empli de défi le grand gaillard qui s’était contenté de le saluer d’un air désolé. Il n’affichait pas le visage de quelqu’un qui était triste parce qu’on avait abîme ou volé un objet lui appartenant. Absolument pas. C’était l’air attristé de quelqu’un présentant sincèrement ses derniers hommages.

Roger s’aperçut alors que l’homme croyait sincèrement à son histoire de suricate. Il aurait pu éprouver une pointe de remords et aller rechercher l’objet dans la poubelle mais il savait très bien que ce serait faire preuve de faiblesse. De toute façon, il était certains que ces gens-là ne comprenaient que la manière forte.

Roger ouvrit la porte de son appartement et fut pris d’une quinte de toux. Quelle était cette odeur épouvantable, mélange de poils mouillés et de déchets ? Il ne tarda pas à en identifier la provenance. La cuisine était sens dessus-dessous. La poubelle avait été déchiquetée, les détritus ménagers recouvraient le sol, … et il y avait un animal mort au centre de la pièce !

- Qu’est-ce que… ? bredouilla-t-il en s’approchant de la dépouille.

Il n’y avait pas de doute ! C’était l’un de ces satanés rongeurs que vénérait le type du premier ! Mais qu’est-ce qu’il foutait là ? En un éclair, Roger comprit. Ce n’est pas triste qu’il était le grand Black en le croisant dans l’entrée ! C’était forcément lui qui était responsable de cette blague immonde ! Lui ou un des siens ! Mais il se croyait où ? Il y a des lois dans ce pays ! On ne peut pas pénétrer comme ça chez les gens ! Et puis qui sait combien d’autres de ces bestioles ils ont dans leur appartement ? C’était contraire à toutes les règles d’hygiène ! Roger essaya de recouvrer suffisamment de calme pour pouvoir raisonner. La première chose à faire : voir par où le mauvais plaisantin aurait pu rentrer. Il ne tarda trouver la solution à ce mystère : la petite fenêtre des commodités était restée grande ouverte. Un enfant aurait facilement pu s’y faufiler pour commettre son méfait. A cet instant, Roger fut certain de tenir son coupable. Il ne comptait pas avertir la police. De toute façon, ce n’était qu’un ramassis de bons-à-rien ! L’affaire serait directement classée verticalement ! Il allait régler cela lui-même. Ils allaient apprendre qui était Roger Leblanc !

Au pas de charge, il gravit les marches menant au premier étage et tambourina à la porte de l’appartement appartenant au suspect. Pas de réponse évidemment. Il devait se terrer chez lui comme un lâche !

Il redoubla de fureur dans ses coups et invectiva les locataires de sobriquets tous plus insultants les uns que les autres. Lorsqu’il se calma, une voix derrière la porte lui dit doucement, apeurée :

- Mon mari… pas là. Toi apporter malheur. Toi partir…

Roger en resta bouche bée. Il hésita une fraction de seconde avant de prendre une décision dans la foulée.

Mari pas là ?

Très bien. Il allait l’attendre et lui montrer de quel bois il se chauffait !

Toi partir ?

- Tu vas voir qui va partir ! hurla-t-il. Et à coups de pied au cul !

21 avril 201369

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Il n’obtint aucune autre réponse, ce qui ne fit qu’augmenter sa fureur. En devisant intérieurement sur le fait que des perroquets s’exprimaient mieux que ces gens-là, il alla chercher une chaise dans sa cuisine et la tira jusque devant la porte d’entrée de son appartement. Pour rentrer chez lui, le gaillard devrait passer par ici. Et Roger était bien décidé à l’attendre.

Les heures passèrent, le soir tomba, mais l’homme ne revenait toujours pas. De guerre lasse, mais en se jurant de ne pas abandonner l’affaire, Roger se retira entre ses murs. Ce n’était que partie remise. La fatigue avait, pour l’instant, raison de sa colère.

Il décida de se détendre quelques instants devant la télévision. Il sentit l’énervement monter en lui à nouveau lorsqu’il constata que chaque chaîne consacrait sa soirée à la fête d’Halloween soit au travers de films soit dans des documentaires thématiques. Il pesta contre le manque de considération envers les téléspectateurs de sa tranche d’âge et décida de gagner son lit après avoir avalé son somnifère.

****

Des grattements répétés tirèrent Roger de son sommeil. Il ouvrit les yeux et le bruit lui faisant penser à des rats courant dans les murs s’arrêtèrent. Il décida de se tourner sur le flanc afin de se rendormir. Il essaya de bouger mais ne put remuer ni les bras ni les jambes. C’est alors que la douleur, cuisante, fit son apparition. Il tourna la tête et hurla. A chaque coin de son lit se trouvait l’un de ces maudits animaux. Ils lui entaillaient les chairs des poignets et des mollets, le rivant inexorablement à son matelas. Ils ne grignotaient pas les chairs mais ils se contentaient de l’immobiliser de leurs crocs plantés dans ses membres. Plus il se débattait, plus leurs mâchoires se resserraient, affermissant leur prise.

Il remarqua alors le mouvement, au pied du lit. Là où il avait replié la couette en gesticulant durant son sommeil. La surface de l’édredon paraissait parcourue de vagues, comme si des animaux progressaient en dessous. Roger sentit la sueur perler sur son front. Il voulut hurler pour appeler à l’aide mais aucun son ne sortit de sa bouche. Il resta ainsi, la bouche grande ouverte, lorsque le museau d’un suricate émergea de sous le linge de lit. Il frétillait en humant l’air. L’animal grimpa sur la poitrine de l’homme et se dressa sur ses pattes arrière. Il fixa Roger de ses petits yeux avant de se remettre sur ses quatre pattes. La couette fut alors agitée de plusieurs vagues, toutes plus violentes les unes que les autres. Des dizaines et des dizaines d’autres rongeurs déferlèrent alors sur Roger et se mirent à lacérer et déchirer avidement son poitrail. Cette fois, le hurlement jaillit d’entre ses lèvres.

****

Roger se redressa brusquement. Son pyjama était trempé de sueur.

- Un cauchemar ! murmura-t-il. Ce n’était qu’un cauchemar !

Il ferma les yeux pour se calmer. Il avait été réveillé par ses propres hurlements. Il avait d’ailleurs dû réveiller tout l’immeuble avec ses beuglements ! Jamais de sa vie il n’avait

fait un cauchemar aussi violent ! Il en rejeta la faute sur le locataire du premier et ses histoires douteuses de malédiction.

Roger laissa échapper un petit rire nerveux. Il se demandait qui était le plus stupide des deux. L’autre, de croire en de telles stupidités ou lui, de s’être laisser bêtement impres-sionner au point d’en rêver la nuit. Lorsque les battements de son cœur eurent repris leur rythme normal, Roger ouvrit les yeux.

Le soulagement laissa alors la place à la surprise. Là, dans l’embrasure de la porte de chambre, il crût distinguer une petite ombre. Bien résolu à ne plus laisser son imagination l’emporter de la sorte, il alluma la lumière. L’inquiétude le disputa à la peur lorsqu’il comprit qu’il avait bien vu et que la petite ombre n’était aucunement le fruit d’un jeu de lumière ou un reliquat de ses rêves.

Debout à la sortie de la pièce, se trouvait l’un de ces maudits animaux. Les mains de Roger se crispèrent nerveusement sur les draps. Maintenant, il en était certain : l’Africain du premier faisait un élevage de ces satanées bestioles ! Qui sait quelles maladies ces bêtes pouvaient transporter ! Roger sortit doucement de son lit, son drap à la main. Il comptait en recouvrir l’animal afin de l’immobiliser. Ensuite, il télépho-nerait à la police pour faire constater le fait que les règles d’hygiène étaient enfreintes par le locataire.

- A malin, malin et demi, ricana Roger en s’approchant de l’animal d’un air mauvais.

Pour lui, cela ne faisait aucun doute. Le locataire, ou l’un des siens, avait dissimulé l’animal dans l’appartement afin de lui faire la peur de sa vie. Ils voulaient jouer ? Eh bien, ils ignoraient sur qui ils étaient tombés.

La froideur du carrelage sous sa plante des pieds revigora Roger qui, d’un geste brusque du bras, jeta le drap sur l’animal.

- Et merde ! jura-t-il.

Sa proie avait réussi à s’échapper et filait vers la cuisine.

- Tu ne perds rien pour attendre ! promit-il en se jetant à sa poursuite.

En arrivant à l’entrée de la cuisine, Roger s’arrêta. Il n’en croyait pas ses yeux. Il n’y avait plus de pièce. En lieu et place s’étendait une plaine désertique ! L’animal l’attendait à l’entrée d’un terrier s’enfonçant sous terre. Il semblait le narguer, le mettre au défi d’approcher.

C’était impossible ! Il devait rêver ! Il lui semblait d’ailleurs se rappeler que la posologie de son somnifère mentionnait des risques d’hallucination en cas de prise trop importante. C’était forcément cela ! Il était en plein bad trip, comme disent les jeunes drogués. Mais les tentatives de son esprit pour se rattacher à la raison s’envolèrent lorsque la surface sablonneuse remua comme sous la poussée d’un animal gigantesque.

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La tête jaillit alors du sol. Monstrueuse, gigantesque,… cauchemardesque ! D’un bond, Roger se précipita vers l’entrée de l’appartement mais le monstrueux suricate ouvrit alors la mâchoire et, rapide comme l’éclair, la referma sur les jambes de Roger, broyant les os.

Roger hurla, autant de peur que de douleur, lorsqu’il fut tiré inexorablement vers le terrier. Ses doigts tentèrent de s’agripper au battant de la porte mais il ne réussit qu’à en écailler la peinture. La dernière chose qu’il entendit avant d’être complètement englouti fut des coups à la porte et une voix demandant s’il avait besoin d’aide. Lorsqu’il ouvrit la bouche pour crier une ultime fois, le sable s’insinua en lui, l’étouffant complètement.

****

L’agent Fressin ...

L’agent Fressin essayait de comprendre ce qui s’était passé dans ce petit bâtiment sis rue Haute. L’homme se tenant derrière lui, manifestement effrayé, avait téléphoné à la police.

Il déclarait son voisin du dessous, concierge de l’immeuble, poussait des hurlements terrifiants. A leur arrivée sur place, les forces de l’ordre avaient dû enfoncer la porte de l’appartement.

Qui était vide. Il n’y avait personne.

Le locataire déclarait que personne n’était sorti de l’appar-tement, qu’il était arrivé dès qu’il avait entendu les hurlements mais que personne ne lui avait répondu lorsqu’il avait frappé à la porte.

Après analyse des lieux, il fut indubitablement prouvé que la porte de l’appartement était fermée de l’intérieur ainsi que toutes les fenêtres. Il n’y avait aucune trace d’agression.

Le locataire désigna alors à l’agent la statuette grimaçante du suricate. Celle-là même que Roger Leblanc avait jeté à la poubelle la veille. Posée sur la table de la cuisine, elle paraissait fixer de son air narquois les griffes laissées par Roger au bas de la porte.

Fressin n’allait quand même pas retenir les propos décousus du locataire où il était question de suricate et d’une vieille malédiction africaine !

FIN

Frédéric Livyns

21 avril 2013

Né en 1970Vit à Tournai

Livyns Frédéric est né le 02 juin 1970 à Tournai (Belgique)

Il se passionne très tôt pour la littérature fantastique et de science-fiction.

Il s'adonne ensuite à l'écriture dans des registres tels que la poésie, le roman noir ou le fantastique que ce soit sous forme de romans ou encore de nouvelles.

L'auteur vit actuellement en Belgique avec sa compagne et ses enfants.

Bibliographie :

Les Contes d’Amy (Prix Masterton 2012) (Edilivre)

Oxana (Editions Sharon Kena)

Le Souffle des ténèbres (Val Sombre Editions)

© Cornette de Saint-Cyr

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Remerciement

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Je tiens à remercier l’équipe du Suricate partie à l’aventure (Roxane de Quirini, Anastasia Vervueren, Cécile Marx et Olivier Eggermont), l’attaché de presse du festival (Jonathan Lenaerts) et son équipe, Stéphane pour ses présentations, Aline pour la qualité des bénévoles et de m’avoir ramené en voiture, Youssef pour sa gestion des invités (dédicace à Adeline), l’équipe organisatrice (Annie, Freddy, Gigi, Georges et Guy), les collègues (Quentin, Damien, Guillaume, Richard, Gilles, ...), au Bourlingueur pour nous avoir fait tellement rire, aux jury pour leur palmarès, au Bozar pour leur accueil, aux films pour m’avoir foutu les yeux en l’air, au public pour m’avoir empêché de dormir en séance, à la Troll, à Jean-Luc pour son Maitrank, aux amis passés me voir au BIFFF sans que je puisse vraiment leur accorder beaucoup d’attention, à Adeline et ma maman pour les quelques corrections qu’elles ont eu le temps d’effectuer, à Matthieu le co-fondateur du Suricate Magazine pour lui avoir piqué son article sur Au nom du fils, Michaël pour son article de l’année passée sur le CollectiFFF et surtout à tous ceux qui liront ce numéro spécial et/ou les autres numéros du magazine. L’aventure est belle, pourvu que ça dure ...

AttentionSuricate méchant(mais qu’au BIFFF)