le suricate - septième numéro

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Le Suricate 27 novembre 2012 Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts À la une Magazine Opeth était à l’AB Le groupe atypique suédois était présent à Bruxelles pour une soirée mémorable N° 7 Cogan Un coup d’oeil sur la foire du livre belge Mais aussi... Bi-mensuel Brad Pitt excellent dans un polar aussi cynique que réaliste

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Page 1: Le Suricate - Septième numéro

Le Suricate27 novembre 2012

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

À la une

Magazine

Opeth était à l’ABLe groupe atypique suédois était présent à

Bruxelles pour une soirée mémorable

N° 7

Cogan

Un coup d’oeil sur la foire du livre belge

Mais aussi...

Bi-mensuel

Brad Pitt excellentdans un polar aussicynique que réaliste

Page 2: Le Suricate - Septième numéro

www.ramdamfestival.be

IMAGIX TOURNAIÄJ[PVUZ� I�KVJ\TLU[HPYLZ� I� Yt[YVZWLJ[P]L

15 > 22 JANVIER 2013

Page 3: Le Suricate - Septième numéro

Sommaire

27 novembre 2012

Edito - J’aime pas Cameron DiazIn Memoriam, le compact disc

p. 5

Scènes

La vie c’est comme un arbreLa fin d’année au TTO ?Ceci n’est pas une illusionLes pièces non vues

p. 28p. 29

p. 34p. 35p. 37p. 38

Littérature

Le Maître des ombresInterview de J-C ChaumetteFoire du livre belgeAlix / La villa sur la falaiseMoi, Réné Tardi, au Stalag IIBLe petit garçon de la forêtMarilyn Monroe : fragmentsTotal RecallRobocalypse

Aucun lien familial avec Timon

Cinéma

Cogan, la mort en doucePopulaireFor EllenMais qui a re-tué Pamela RoseDocumentairesSorties du 28 novembreSorties du 5 décembreActualités cinéma

p. 8p. 6

p. 9p. 10p. 11p. 12p. 13p. 15

Musique

Sequed’in rockOpeth à l’ABMartha Wainwright - Green DayLoud Cloud - Françoise HardyManowar - Kopek

p. 18p. 22p. 24p. 25p. 26

Agenda p. 44

p. 16

Télévision

Les remakes dans les sériesCotations

Rien à sauverMauvaisMitigéBonTrès bonExcellent

3

p. 30p. 32

p. 39p. 40p. 41p. 42p. 43

Page 4: Le Suricate - Septième numéro

Tentez de gagner 5 livres audio

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Pour jouer et remporter un livre, répondez à la question suivante et envoyez votre réponse à [email protected]

Quelle est la nationalité de Donna Leon ?

Concours

Les Joyaux du paradisde Donna Leon

Page 5: Le Suricate - Septième numéro

Edito

J’aime pas Cameron DiazBen oui, c’est mon droit ! Vous n’êtes pas d’accord ? Certes, elle est jolie avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus, ce n’est pas pour rien qu’elle a commencé sa carrière en tant que mannequin. Mais bon, ça ne pardonne pas tout.

Elle commence dans The Mask, sans avoir aucune expérience d’actrice, et ça se voit. Pourquoi a-t-elle été engagée si ce n’est pour ses beaux yeux et son sourire charmeur ? Bon, c’est vrai c’est pas la seule. Elle passe ensuite par des films sans grand intérêt pour atterrir en 1997 dans Le Mariage de mon meilleur ami où sa plastique de rêve fait encore des ravages. Mais bon, elle y joue quand même une ravissante idiote. Mary à tout prix la consacre star mondiale en 1998. Là encore, tous les mâles à ses genoux, attirants au préalable, mais où son jeu se limite à des petits cris de jeune fille effarouchée. Par après, Charlie et ses drôles de dames en 2000 et, avouons qu’on ne croit pas une seconde à son rôle de femme prête à tous les combats.

Mais le summum de sa carrière arrive avec le terrible Bad Teacher où elle frôle avec l’excellence vers le bas. Ce rôle de prof qui se drogue, qui rote, qui boit lui va comme un gant. Un véritable régal.

Cameron Diaz, limitez-vous à vos rôles de «voix» dans les dessins animés, au moins on ne vous voit pas.

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In Memoriam : Le Compact Disc

Depuis l'invention du gramo-phone en 1889 par Emile Berliner, les supports musicaux n'ont eu de cesse d'évoluer. Après le vinyl en 1894, ce fut la cassette qui prit le pas dans les années 60. Plus compacte et donc portable, celle-ci ne détrôna néan-moins pas le disque microsillon. En effet, celui-ci restait alors le symbole "éternel" de la qualité sonore et de la durabilité. (une cassette pouvant s'effacer dès qu'elle rencontrait un champ magnétique).

En 1979, les ingénieurs de Sony et Philips unirent leurs efforts pour créer un nouveau support révolutionnaire: le disque compact. Après quelques tests pour s'assurer de la qualité de ce nouveau support, le premier album CD vit le jour le 1er octobre 1982. (il s'agissait de l'album 52nd Street de Billy Joel).

Rapidement, le monde entier s'arrache ces nouveaux disques dont le procédé laser fascine. Pour beaucoup, ce sup-port représente le futur. Mais d'autres audiophiles critiquent ce petit nou-veau, le jugeant fragile, car très facilement «griffable» et n'offrant qu'un son très métallique et sans âme.

Dans les années 90, le vinyl perdra de plus en plus de part de marché jusqu'à devenir presque inexistant. Mais un évènement va bouleverser le monde de la musique: l'invention du format MP3 et des lecteurs portables.Dès l'apparition de ces derniers, le MP3 va se populariser et le public va alors télécharger la musique sur internet plutôt que de se déplacer chez le disquaire.

Autrefois illégale et vivement critiquée par les artistes et les maisons de disques, cette pratique s'est officialisée avec l'arrivée du magasin en ligne "iTunes" en 2001. Dès lors, les ventes de CD ne cessèrent de diminuer. (-60% entre 2003 et 2010).Fini le temps où l'on déballait son nouvel album frénétiquement, où on écoutait chaque piste du début à la fin en lisant les paroles des chansons dans des livrets à la décoration soi-gnée. Place à l'immédiat et à l'im-matériel à 9,99€, aussi cher qu'un CD finalement.

Aujourd'hui, c'est la mort du CD qui est envisagée. Sans vraiment le dire officiellement, les labels délaissent progressivement le compact pour revenir au... vinyl ! Ainsi, les coffrets en éditions limitées contiennent à présent des vinyls et certains ne comportent d'ailleurs plus de CD mais uniquement le vinyl de l'album et un code per-mettant de télécharger le même dis-que en format électronique.

Peu de gens savent si cette rumeur est fondée, mais il semblerait que les jours du Compact Disc sont comptés. Le coût de production et de distribution semble un argument un peu trop facile de la part des labels. En vérité, ceux-ci ont très vite compris que ce format électronique était bien plus lucratif que n'importe quel format physique. D'ailleurs, de ces 9,99€, combien reviennent à l'artiste? Sur chaque album vendu, auteur, compositeur et éditeur doivent se partager 70 cen-times. Voilà la triste réalité au-delà du mensonge que semble vouloir nous faire gober les majors.

Le terrier du Suricate

C.P.

Une publication du magazine

Le Suricate ©

Directeur de la rédaction : Matthieu MatthysRédacteur en chef : Loic SmarsDirecteur section littéraire : Marc BaillyDirecteur section musicale : Christophe Pauly

Relation clientèle : [email protected]

Webmaster : Benjamin MourlonSecrétaires de rédaction : Pauline Vendola, Maïté Dagnelie, Adeline Delabre

Régie publicitaire : [email protected]

Ont collaboré à ce numéro :

Jérémie Piasecki, Véronique De Laet, Julien Sterckx, Manon Delberg, Christophe Corthouts, Marc Van Buggenhout, Stellina Huvenne et Nele De Smedt

Crédits

27 novembre 2012

M.B..

Page 6: Le Suricate - Septième numéro

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Cogan, la mort en douce, le plein de cynisme

Depuis quinze ans, Brad Pitt est l’un des acteurs les plus bankables d’Hollywood. Sans cesse, l’acteur a su époustoufler son public composé aussi bien de midinettes fascinées par sa plastique que de cinéphiles scrutant les films de bonne facture. À main-tenant 48 ans, il signe avec Killing them softly un polar intéressant et surtout intrigant. Baladant constam-ment le spectateur entre doute, angoisse et humour, ce film nous a fait penser à ceux des frères Coen.

Brad Pitt, une valeur sûre

C’est justement là tout l’intérêt du film, une dérision assez marquée face à un récit très glauque et excessivement noir. Bien entendu, une affiche mon-trant le beau Brad Pitt transformé en tueur à gages a de quoi attirer les foules. Pourtant, et contrairement à ce que certains pourraient penser, l’acteur américain casse dans cet opus son image de bon gendre à la mèche bien mise. À l’instar de son rôle de Tyler Durden dans Fight Club, il insuffle à ce film son côté sombre et s’installe dès lors comme le méchant de l’histoire. Bien évidemment, puis-qu’il s’agit d’un film sur la pègre, tout le monde est mauvais, mais comme dans chaque société, dans chaque business, chacun a sa place au sein d’une hiérarchie bien définie. Autant le dire tout de suite, le film ne dévoile réellement son intérêt que lorsque Brad Pitt arrive à l’écran dans un

personnage évoluant en parallèle au récit.

Gangsters modernes

Parlons justement de cette histoire : dans une ville de l’Amérique profonde, la mafia locale organise régulièrement des soirées poker où l’argent coule à flot. Ce rassemblement illégal est l’occasion rêvée pour deux braqueurs amateurs de pouvoir se faire un paquet d’oseille sans être interpellés par la police. Mais voilà, même si le braquage se déroule sans anicroche, les caïds du coin sont bien décidés à faire payer ces voleurs à la petite semaine et leurs commanditaires. Seul souci : qui est réellement im-pliqué dans ce casse ? Pour répondre à cette question et surtout, pour faire trembler les coupables, ils font appel à Jackie Cogan (Brad Pitt), un tueur à gages à l’allure sympathique et flegmatique qui cache en réalité un réel talent du crime.

Evidemment, à la lecture de ces quelques lignes, on pense à un film violent, bourré de testostérone. Mais le réalisateur Andrew Dominik a travaillé son film de manière à ne pas lasser ou

dégouter le spectateur. Le néo-zélandais a tourné son film à la dérision et a surtout voulu nous montrer des gangsters plus modernes. Fini les costumes rayés, les rendez-vous nocturnes dans les boites de strip-tease et le langage vulgaire. Place à un nouveau style de malfrat qui se déplace seul, qui ne fait pas de vagues et qui, surtout, est d’un cynisme sans égal. Ce nouveau «méchant» apporte beaucoup plus de possibilités au scénariste pour accen-tuer le côté commun du bandit. Ici, Andrew Dominik a donné à ses personnages une touche d’impudence semblant sonner le glas d’une époque mafieuse révolue. L’ancienne mé-thode, représentée par Mickey (James Gandolfini), fait face aux techniques aussi machiavéliques que marginales de Cogan.

Le trio soprano

En parlant de James Gandolfini, excellent dans ce film, le casting est aussi marqué par la présence de trois acteurs de la série à succès Les Soprano... une série sur la mafia. De fait, notre protagoniste James Gandolfini mais également Vincent Curatola et Max Casella sont présents dans cet opus. Sans nul doute une volonté du réalisateur de renforcer le réalisme assumé du film.

«Un film tourné à la dérision nous montrant des

gangsters modernes»

Après avoir galéré avec l’échec commercial de «L’assassinat de Jesse James...», Andrew Dominik s’attaque au monde du banditisme à l’aide de personnages charismatiques et cyniques

La critique©KFD

6

Page 7: Le Suricate - Septième numéro

Ce réalisme, c’était le leitmotiv d’Andrew Dominik. Afin d’éviter de se vautrer comme avec son film précé-dent L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (où Brad Pitt incarne Jesse James) , il a fait appel à des valeurs sûres du cinéma mais a souhaité également rester fidèle à l’idée du bouquin de George V. Higgins, L’art et la manière, dont le film est entièrement inspiré. Ce qui l’a marqué dans l’écriture, c’est le charisme impressionnant des person-nages qui pouvaient dès lors capter l’attention du public. Néanmoins, il lui fallait encore leur créer un univers cinématographique en alliant l’humour noir aux situations absurdes que vivent ces fameux personnages. Un pari largement gagné car ceux-ci sont l’essence même du récit et de l’intérêt du film.

Un film de cinéphile

Au final, que penser qualitativement parlant de ce film ? De fait, les acteurs sont excellents, à commencer par Brad Pitt qui, comme dit précédem-ment, est la clé de voûte de l’histoire. Mais à ses côtés, on notera aussi les prestations quatre étoiles de Scoot McNairy et surtout Ben Mendelsohn. Ces deux acteurs sont tout bonnement impeccables. De surcroit, il en faut du talent pour incarner deux personnages dépassés par les évènements qui

s’enchainent par leur faute. Ensuite, le scénario est d’une originalité efficace dans le sens où, le spectateur arrive à valdinguer du rire aux larmes en passant par le dégoût. De plus, les dialogues sont d’une richesse in-croyable sans pour autant tomber dans la surenchère narrative. Rien n’est dit au hasard et rien n’est dit pour combler des blancs. Enfin, le jeu de caméra est époustouflant et fait partie intégrante de l’histoire comme le ralenti réalisé sur le premier meurtre de Cogan, une pure merveille. Bref, vous l’aurez compris, ce film est taillé pour un esprit cinéphile car, et il faut bien l’admettre, les autres trouveront peut-être ce long métrage trop lent ou trop déluré. Pour terminer, il convient également de mettre en garde certains comme les enfants ou les femmes détestants irrémédiablement les bas-tons, ce film est, malgré son côté ironique, parsemé de scènes parti-culièrement violentes.

«Ce film est taillé pour un esprit de cinéphile, trop déluré pour les autres»

Cogan, la mort en douce(Killing them softly)

de Andrew Dominik

Genre : Thriller

Durée : 97 min

Nationalité : Etats-Unis

Sortie le 5 décembre 2012

Avec Brad Pitt, Richard Jenkins, James Gandolfini, Ray Liotta, Scoot McNairy

Lorsquʼune partie de poker illégale est braquée, cʼest tout le monde des bas-fonds de la pègre qui est menacé. Les caïds de la Mafia font appel à Jackie Cogan pour trouver les coupables. Mais entre des commanditaires indécis, des escrocs à la petite semaine, des assassins fatigués et ceux qui ont fomenté le coup, Cogan va avoir du mal à garder le contrôle dʼune situation qui dégénère.

Matthieu Matthys

©KFD

27 novembre 20127

Page 8: Le Suricate - Septième numéro

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

PopulaireUn film complètement déjanté dans l’univers des fifties.

Populaire, c’est avant tout un film d’époque. Toute l’action se déroule à la fin des années 50. Vieilles voitures, looks et coiffures sixties, machine Triumph vintage... Un mélange entre le cinéma amé-ricain des années 50 et la vision de la France sur ce cinéma et cette période. Dès les premières images, on est plongé immédiatement dans l’ambiance de cette décennie où le summum pour les femmes en recherche de travail était de devenir secrétaire… « Être secrétaire, c'est moderne. Toutes les filles veulent être secrétaire », dialogue entre Déborah François et Romain Duris.

Populaire, c’est aussi, un scénario inattendu et rafraîchissant. Le réalisateur, Régis Roinssard, dont c’est le premier film, a eu l’idée saugrenue et originale de nous plonger dans le monde des con-cours de dactylographie. Fallait y penser, car ce n’est pas vraiment très « à la mode ». La dacty-lographie nous est présentée prati-quement comme un sport à part entière. On se rend tout de suite compte de la difficulté de cette pratique (entraînements, exercices quotidiens, performances…). Un scénario bien mené, des plans rapprochés sur les machines et les visages des concurrentes permet de comprendre entièrement la dureté des épreuves en question. Car le personnage central de cet excellent film, c’est bien la dactylographie, plus que le duo Rose Pamphyle et Louis Echard qui joue pourtant un rôle important. Comme le dit le réalisateur : « J'ai réalisé quelques courts-métrages et documentaires et l'un des documentaires dont je me suis occupé revenait sur le métier de secrétaire et plus particu-lièrement sur la dactylographie. Elle y était représentée comme une activité sportive et ça m'a captivé. Je me suis demandé comment des personnes pouvaient se mettre en tête de faire de la dactylographie comme sport. L'idée d'en faire un film m'est tout de suite venue à l'esprit ainsi que le personnage de Rose Pamphyle ».

Rose Pamphyle, interprétée par l’excellente Déborah François, évo-lue au fil du film. De frêle et timide au départ, elle prend de l’assurance et de la confiance. Grâce à son mentor et à la dactylographie, elle va devenir une tout autre femme. « Tout d'abord, j'étais très très motivée pour faire le film et j'ai eu la chance de pouvoir m'entraîner à la dactylographie pendant 4 mois de préparation avant le début du tournage, ce qui nous fait en tout 7 mois en comptant le temps du tournage ».Louis (Roman Duris) est un homme au caractère fort qui dévoile ses failles au fil du récit. On va en apprendre de plus en plus sur lui et ces faiblesses justement vont nous le rendre plus humain. « Quand j’ai reçu le scénario, j'étais totalement plongé dans “La nuit juste avant les forêts”, la pièce que mettait en scène Patrice Chéreau. Depuis un an, j'avais refusé toutes les propo-sitions qu'on m'avait fait car rien ne m'emballait. Et là, j'ai tout de suite accroché à l'originalité de ce qu'avait imaginé Régis : une jeune secrétaire qui va devenir championne du mon-de de vitesse dactylographique. J'aimais aussi l'idée de me retrouver à jouer un personnage appartenant à la génération de mon grand-père et l'aspect étrange et mystérieux qui se dégageait de celui-ci. Jusque-là, Louis a toujours été numéro deux dans son existence. Dans sa vie personnelle comme professionnelle puisque son métier n'est pas, sur le papier, le plus chevaleresque de tous. Et voilà que, tout à coup, il se prend de passion pour cette secré-taire dont il veut faire une cham-pionne. Il devient coach comme dans ROCKY ! Je trouve le parcours de ce personnage extrêmement touchant, jusque dans sa manière de s'effacer devant cette jeune femme pour la propulser au som-met. Il me paraissait évident que ce Louis Echard serait passionnant à interpréter ».Romain Duris, que l’on avait vu dans L'arnacoeur et L'homme qui voulait vivre sa vie, revient à un genre qui

lui réussit bien: la comédie. En 2013, on le verra également dans L'écume des jours, l'adaptation du roman de Boris Vian et Casse-tête chinois, la suite de L'auberge espagnole et des Poupées russes de Cédric Klapisch.Déborah François, qui avait éclaté dans Les tribulations d'une cai-ssière, après avoir reçu le César du meilleur espoir féminin et le Prix Romy Schneider en 2009, reprend un rôle d'employée.N’oublions pas les seconds rôles. Avec un Nicolas Bedos plus trucu-lent que jamais ; Bérénice Bejo en amie et ex-copine de Louis Echard ; et les parents de Romain Duris joué par Miou-Miou et Eddy Mitchell, remarquables dans leur rôle.Un savoureux mélange entre une comédie et une romance pas si ba-nale que ça entre deux personnages que tout oppose au préalable. Ce film se démarque de la production actuelle et nous propose un véri-table rafraîchissement.Un premier film totalement réussit, un scénario efficace, des person-nages attachants. Que demander de plus

8

La critique

Marc BaillyPopulaire

Comédiede Regis Roinsard

Avec Romain Duris, Déborah François,

Bérénice Bejo

Rose Pamphyle vit avec son père, veuf bourru qui tient le bazar dʼun petit village normand. Elle doit épouser le fils du garagiste et est promise au destin dʼune femme au foyer docile. Mais Rose ne veut pas de cette vie. Elle part pour Lisieux où Louis Echard, patron dʼun cabinet dʼassu-rance, cherche une secrétaire. Lʼentretien dʼem-bauche est un fiasco. Mais Rose a un don : elle tape à la machine à écrire à une vitesse vertigineuse.

Page 9: Le Suricate - Septième numéro

For EllenEntre séparation et immaturité, Joby n’est pas le mec le plus heureux du monde. Par ce film, So

Yong Kim a souhaité travailler sur la complexité d’un triangle familial en crise.

For Ellen est le 3ème film de la réalisatrice So Yong Kim. Dans ce long métrage, elle nous propose un drame social traitant des rapports difficiles entre un père, ex-rockeur de 30 ans n’ayant vécu que pour sa passion, et sa fille, Ellen, qu’il n’a pour ainsi dire jamais vu.

L’histoire commence dans ce que l’on pourrait appeler un désert de neige. Une vieille Impala roule à travers champs et se gare sur le bas-coté de la route. C’est Joby, un gars de la ville, paumé dans cette immensité. Certes, il ne connait pas le lieu, et doit demander son chemin car c’est là que vivent sa future ex-femme et sa petite fille dont il s’est désintéressé durant des années. Pas de carte de voeux ou de ca-deau d’anniversaire, Joby n’avait pas le temps pour ces choses-là. Il préférait enchaîner les concerts dans des clubs miteux et faire le paon devant quelques groupies. Satisfait de cette gloriole éphémère, la «star» est rattrapée par la réalité lorsqu’il doit signer les papiers du divorce. Là, il découvre que son ex lui demande de renoncer à ses droits sur Ellen en échange de la moitié de la maison qu’ils avaient acheté ensemble. Joby semble toujours entre deux eaux et n’est pas vraiment attentif à ce que lui dit son avocat. Résultat, le voilà devant un accord dont il ne se souvient même plus des grandes lignes.

Et c’est là que le bas blesse. On a ici un personnage nonchalant, hagard, souvent saoul et inconscient des réalités. Un personnage qui fuit en permanence ses responsabilités. Mais il ne veut pas perdre Ellen car, tout à coup, il se souvient qu’il a une fille et, surtout, qu’à sa naissance,

sa mère ne se sentait pas prête et ne voulait pas garder cet enfant.

Malgré le fait que la situation entre son ex et lui soit très tendue, il va essayer de rencontrer sa fille. De fait, il a droit à une visite et, si le rapport est tendu au début, les deux protagonistes vont finir par se rap-procher. On se dit que cela va for-cément l’amener à réagir, à se battre pour la garde de sa fille, à montrer qu’il veut changer et devenir quel-qu’un de meilleur. Mais non, Joby est un mou, sans volonté réelle de changement. Il finira dès lors par signer et abandonner une seconde fois sa fille.

Ce film aurait pu être le symbole du combat des pères célibataires pour la garde de leurs enfants. Mais on est loin du chef-d’oeuvre. Le per-sonnage principal manque cruel-lement de courage et déçoit. On se demande donc ce que So Yong Kim a voulu nous montrer et surtout nous dire à travers ce film. Au bout de ces deux heures, on a l’impression de ne pas avoir avancé d’un pouce. Le film est trop lent et rempli de silen-ces inutiles.

Joby est un personnage insipide et sans personnalité. Il ne comprend pas ce qui lui arrive et, malgré deux heures d’attente, ne se réveille pas. Il subit, à tel point que cela en devient révoltant. On a envie de se lever et de le secouer un peu.

Bref, l’histoire ne mène finalement nulle part et on se lasse d’attendre une réaction de ce mollusque en hibernation. La performance de Paul Dano n’im-pressionne pas, mais je ne pense pas que cela soit de sa faute.

Comment bien jouer un personnage principal qui ne l’est pas ?

L’autre coté dérangeant dans ce film est la répétition des séquences. On a droit à tous les démarrages et les arrêts du véhicule de Joby. De même, à chaque fois, il soupire, se traine hors de sa voiture et sort une cigarette.

Enfin, il y a aussi ces séquences où le sujet principal n’est pas net et où la camera joue avec la profondeur de champ. Mais l’inconvénient lors-que l’on répète ce procédé, c’est que cela finit par lasser.

La critique

Christophe Pauly

For EllenDrame

de So Yong Kim

Avec Paul Dano, Jon Heder, Shaylena

Mandigo

Quand Joby, rock-star en herbe, accepte finalement de signer les papiers de son divorce, il dé-couvre quʼil est sur le point de renoncer à la garde de sa fille Ellen, âgée de 6 ans. Il réalise soudain quʼil nʼest pas prêt à perdre cette part de lui-même. Espérant rattraper le temps perdu, il cherche à gagner son cœur.

©OʼBrother distribution

27 novembre 20129

Page 10: Le Suricate - Septième numéro

Voilà quelques temps que nous n’avions plus vu Kad Merad et Olivier Baroux réunis dans un même film. De fait, les deux complices ont tracé chacun leur chemin avec du succès pour l’un et un peu moins pour l’autre. Quoi qu’il en soit, Pamela Rose était l’occasion rêvée pour nos deux acolytes de se retrouver. Dix années ont passé depuis le premier volet et on aurait pu croire que le tandem Bullit/Riper s’était assagi. Et bien non. Au contraire, ce deuxième opus s’inscrit parfaitement dans la lignée du premier et certains gags sont même plus truculents qu’autrefois.

Kad et Olivier avaient créé ces deux personnages sur la chaîne Comédie et avaient donc pu les tester à de nom-breuses reprises avant de les faire évoluer dans une fiction. Mais qui a tué (ou re-tué) Pamela Rose, c’est un peu la bonne excuse car, surtout dans le second film, tout l’intérêt de cette comédie ne réside pas dans l’histoire mais bien dans la succession de sketches que nous procure la bobine. Il ne faut pas bouder son plaisir, les blagues sont hilarantes par leur non-sens mais aussi par la crédulité assumée de nos deux compères. Mais voilà, ce qui

nous a un peu laissé sur notre faim, c’est que le film tombe assez vite dans la monotonie. Les blagues potaches ou ridicules fonctionnent pendant un moment mais, arrivé à l’heure de film, le rire s'essouffle car l’entrain n’y est plus et, de fait, l’histoire ressurgit au premier plan. Le seul souci, c’est que cette histoire n’est pas vraiment novatrice car elle nous a renvoyé dans les comédies des années 80 et à un certain Y a-t-il un flic pour sauver la reine ?, reine à remplacer ici par une présidente.

En résumé, ce film est un ovni du cinéma français. Si vous aimez l’hégémonie du ridicule et de la blague redondante, vous serez conquis. Si, au contraire, vous détestez cette réflexion simplette sur l’essence même de la comédie, vous vous ennuierez irrémédiablement.

Mais qui a re-tué Pamela Rose

de Kad Merad et Olivier Baroux

sortie le 5 décembre 2012

Comédie (90ʼ)

Avec Kad Merad, Olivier Baroux, Audrey Fleurot, Laurent Lafitte, Omar Sy,

Guy Lecluyse

Matthieu Matthys

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

10

Page 11: Le Suricate - Septième numéro

11

Créé par Jean Libon et Marco Lamensch pour la RTBF, Strip-Tease est un documentaire mensuel original et décalé, diffusé en prime time jusqu’en 2002. Depuis 1992, le magazine est réalisé en France sur France 3. Pour les 20 ans de diffusion française, cela valait bien un coffret et ses trois DVD’s aussi dingues les uns que les autres.

Que ce soit un juge au franc-parler, une femme voulant arrêter la cigarette, une Madame Pipi qui parle beaucoup ou encore les pauvres d’Uccle (commune riche de Bruxelles), l’émission culte a de quoi nous offrir de grands moments, le tout dans un style documentaire épuré de tout montage, scénario ou effet de style qui font la marque de fabrique de Strip-Tease.Que l’on aime ou que l’on n’aime pas la presque voyeuriste émission, on ne peut

nier son statut iconique du paysage audio-visuel. De fait, le coffret ne pourra que ravir les amateurs du genre.

Composé de trois DVD’s et de cinq ou six épisodes par galette, le coffret Strip-Tease, c’est plusieurs heures de découverte de la vie brute de nos congénères.

Loïc Smars

Nouveau documentaire sur la Seconde Guerre mondiale, L’Opéra des assassins explore la partie méconnue de l’amitié ou plutôt des relations qu’ont eues deux des plus grands dictateurs du XXème siècle : Hitler et Mussolini.

L’un, fier du sud et catholique, l’autre nordiste protestant et rigoureux. Ils ont essayé de s’entendre, sans jamais réussir à empêcher l’un et l’autre d’être jaloux, envieux ou plus orgueilleux voir plus puissant que l’autre.

Le documentaire est réellement passion-nant et bien ficelé. Au moyen d’une voix-off aucunement professorale et de nombreuses images d’archives parfois très peu connues, nous retraçons une douzaine d’années de relations entre

deux personnes qui firent souffrir l’Eu-rope entière.

Le projet était ambitieux et il est réussi haut la main. À conseiller à tout pas-sionné d’histoire ou à ceux qui veulent en savoir plus sur qui sont réellement ces deux hommes qui ont changé la face du monde par la peur et la cruauté.

Les Editions Montparnasse fournissent ici un élégant coffret et un DVD qui a le grand mérite de proposer (chose rare), la version couleur et la version noir et blanc du documentaire.

Loïc Smars

27 novembre 2012

En complément du DVD proposé, nous vous conseillons aussi lʼhistoire extra-ordinaire vécue par un professeur dʼuni-versité très peu fasciste qui fut obligé de guider les deux dictateurs à travers les beautés des grandes villes italiennes.

Il révèle dans son livre un journal complet du voyage et les anecdotes étonnantes, amusantes ou effrayantes sur les deux hommes et leur clique de fanatiques.

Honnête et neutre dans ses écrits, Ra-nuccio Bianchi Bandinelli, ne laisse pas ses idées antifasciste voiler son juge-ment. Ce qui en fait un témoignage exceptionnel sur le caractères de deux hommes plutôt que sur lʼimage quʼils donnaient au peuple.

A découvrir dès maintenant aux Editions Carnets Nord, équivalent littéraire des Editions Montparnasse.

Page 12: Le Suricate - Septième numéro

Films à l’horizon (sorties du 28/11)

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Les cinq légendesAnimation

de William Joyce et Peter Ramsey

Lʼaventure dʼun groupe de héros. Emmenées par Jack Frost, un adolescent rebelle et ingénieux, ces cinq légendes vont devoir, pour la première fois, unir leurs forces pour protéger les espoirs, les rêves et lʼimaginaire de tous les enfants.

Ce dessin animé est une adaptation dʼune saga littéraire relativement célèbre, The Guardian of Childhood. Cette saga comptera une quinzaine de romans, de quoi alimenter le cinéma dʼoutre-Atlantique. Un film qui devrait ravir les bambins et autres fans de lʼanimation. En outre, celui-ci est en course pour les Oscars.

Al est sur le point d'épouser la fille de son patron et de succéder à ce dernier à la tête de sa concession. Une nuit, après l'enterrement de sa vie de garçon, il renverse un inconnu mais, poussé par ses amis, il abandonne le blessé et s'enfuit.

Dans ce film, il faut bien comprendre que lʼon a affaire à un film français donc, pas de slasher aussi drôle que trash mais bien un drame. Pour la petite histoire, la réalisatrice Cathe-rine Corsini a fait ce film car elle a été elle-même renversée par une voiture lorsquʼelle était encore une enfant. Il a été nommé au Festival de Cannes.

Heather Mason et son père n'ont jamais cessé de fuir, échappant à chaque fois de justesse aux mysté-rieuses forces qui les pourchassent. Arrivée à la veille de ses 18 ans, Heather doit faire face à la disparition soudaine de son père.

On prend les mêmes et on re-commence, même six ans après. De fait, Michael Basset a repris le casting du précédent opus dirigé par Christopher Gans. Ce film fait partie du Survival-horror, où lʼhistoire nous emmène dans la peau dʼun per-sonnage esseulé devant faire face à des zombies et autres monstres.

Silent Hill : Revelation

Horreurde Michael Basset

Avec Sean Bean, Radha Mitchell

Trois mondesDrame

de Catherine Corsini

Avec Arta Dobroshi, Clotilde Hesme,

Raphael Personnaz

Louise apprend simultanément qu'elle est enceinte de Pablo et que sa mère est gravement malade. Le bonheur et la culpabilité, l'euphorie et la tristesse, l'amour filial et l'amour tout court. Il lui faudra bien neuf mois pour gérer tout ça.

Nous avions été convié à voir ce film. Mais faute de temps, nous nʼy sommes pas allés. Ce récit est tiré dʼune histoire vraie, celle de la romancière Justine Levy. Une histoire qui pourrait être intéressante à regarder malgré la présence de Carole Bouquet qui remplace dans son rôle Sandrine Bonnaire.

Mauvaise filleDrame

de Patrick Mille

Avec Carole Bouquet, Izia Higelin, Bob

Geldof

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Page 13: Le Suricate - Septième numéro

Films à l’horizon (sorties du 05/12)

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Anna KareninaDrame

de Joe Wright

Avec Keira Knightley, Jude Law, Aaron Taylor-Johnson

Russie, 1874, la belle et ardente Anna Karénine jouit de tout ce à quoi ses contemporains aspirent : mariée à Karénine, un haut fonctionnaire du gouvernement à qui elle a donné un fils, elle a atteint un éminent statut social à Saint-Pétersbourg.

Le cinéaste britannique Joe Wright nous revient avec un conte historique russe après avoir gagné des galons suite au succès dʼHanna. Souvent adapté au cinéma, Anna Karénine est un chef-dʼoeuvre de Léon Tolstoï. Pour se simplifier la vie, le scénariste Tom Stoppard a choisi de sʼaxer sur la romance présente dans le récit.

En Suède, une famille recomposée comme une autre : Lasse, le père de Mia et Oskar, va épouser Elisabeth, la mère de Frida, et organise à cette occasion une fête où tous deux convient leurs amis et enfants.

Entre romance et drame, ce film nous emmène à nouveau dans la froi-deur des pays scandinaves. Malgré cela, selon les médias français, ce film est dôté dʼun intérêt certain pour la prestation des actrices mais éga-lement pour lʼatmosphère rempli de tensions érotiques quʼa su insuffler la réalisatrice.

Chaque jour, Brian Taylor et Mike Zavala, jeunes officiers de police, patrouillent dans les rues les plus dangereuses de Los Angeles. À travers les images filmées sur le vif, on découvre leur quotidien sous un angle jamais vu.

Une balade au coeur de Los Angeles a toujours fait frétiller les Européens par le côté gangsta de ses quartiers. Ce bonheur nʼest cependant pas par-tager par les habitants eux-mêmes. Voici dès lors un docu-fiction de très bonne qualité. Par son réalisme, ce film est efficace et bien construit.

End of WatchThriller, Dramede David Ayer

Avec Jake Gyllenhaal, Michael Pena,

America Ferrera

Kyss migDrame

de Alexandra-Therese Keining

Avec Lena Endre, Ruth Vega Fernandez

Des hommes et des femmes, nés dans l'entre-deux-guerres. Ils n'ont aucun point commun sinon d'être homosexuels et d'avoir choisi de le vivre au grand jour, à une époque où la société les rejetait.

Lʼhomosexualité est un sujet très repris dans le cinéma contemporain. Les documentaires sur ce thème sont aussi nombreux que les fictions. Mais, on connait moins leur position dans lʼentre-deux-guerres, une pé-riode sombre où le monde vit dans la peur du lendemain et de la différence. Comment exister dans tout cela?

Les InvisiblesDocumentaire

de Sébastien Lifshitz

Pas vus!

27 novembre 2012

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l’actu cinéma

En ces temps de crise et de gronde sociale, les réactions contestataires et parfois révolutionnaires se font entendre aux quatre coins de la planète. Cette fois-ci, c’est le monde du cinéma qui a été légèrement chamboulé par l’attitude aussi compréhensible que surprenante du réalisateur britannique Ken Loach.

Via un communiqué de presse, la société de distribution de son dernier film en date, La part des anges, a souhaité faire passer un message du cinéaste : «C’est avec grand regret que je suis contraint de refuser le prix que m’a accordé le festival du film de Turin». Dans ce festival italien, Ken Loach était censé recevoir un prix pour l’ensemble de son oeuvre. Mais voilà, au même moment, des techniciens du Musée national du Cinéma basé à Turin, ont été licenciés car ils refusaient des réductions salariales.

Il n’en fallait pas moins au réalisateur pour fustiger cette décision et de faire un parallèle avec un de ses films, Bread and Roses, qui évoque un cas similaire de lutte sociale.

Ken Loach refuse un prix à TurinDans le cinéma actuel, et princi-palement dans le cinéma d’épou-vante, une technique est largement exploitée, celle du Found Footage. La majorité des cinéphiles ne connait pas ce procédé et pourtant, il est omniprésent dans le cinéma contem-porain. Cette technique cinéma-tographique assez basique consiste à incruster des vidéos amateurs, faus-sement réalistes, dans un long mé-trage de fiction. La caméra amateur peut aussi bien être externe à l’histoire ou interne à celle-ci. Dans le second cas, le plus fréquent, l’un des protagoniste tient lui-même la caméra et relate les évènements en voix-off.

Cette technique au départ assez simple crée une véritable ambiance inquiétante. Son coût modeste a per-mis à des films amateurs de devenir des blockbusters comme Le Projet Blair Witch (500000$ de budget) ou encore Paranormal Activity (15000$). Le premier cité est d’ailleurs celui qui a lancé la vague déferlante qui nous oblige, à l’heure actuelle, d’en manger à toutes les sauces. Mais avant ce film, d’autres s’y étaient déjà frottés avec pas mal de succès. Cannibal Holocaust mais aussi C’est arrivé près de chez vous utilisaient égale-ment cette technique.

Aujourd’hui, les studios l’utilisent à tout va, parfois sans réel intérêt. Mais quel avenir lui prévoir ? On ne le sait pas mais en tout cas, l’année 2012 a été la plus prolifique en la matière.

Found footage,la technique bon marché

Nous en parlions justement dans nos colonnes consa-crées à la télévision, Dallas refait surface et ravit les spectateurs du monde en-tier. Vendredi dernier, nous apprenions que Larry Hag-man, alias J.R. dans la série, est décédé des suites d’un cancer à l’âge de 81 ans.

De 1978 à 1991, c’est lui qui interprétait l’homme d’affaire sans scrupule John Ross Ewing. La série popu-laire Dallas avait fait de lui un incontournable de la télévision. Outre cela, Larry Hagman était apparu une vingtaine de fois au cinéma comme dans Superman ou encore dans Nixon.

Mais dans sa vie privée, l’acteur souffrait depuis 1995 d’un cancer du foie. Malgré une greffe réussie, la vie a fini par le rattraper.

Larry Hagman, alias J.R. est décédéBox office US

1. Twilight Breaking II

2. Skyfall

3. Lincoln

4. Wreck-It-Ralph

5. Flight

6. Rise of the guardians

7. Life of Pi

8. Red Dawn

9. Argo

10. Taken 2

DVD - Blu ray L’âge de glace 4 : La dérive des continentsAlors que Scrat poursuit inlassablement son gland avec toujours autant de malchance, il va cette fois provoquer un bouleversement d’une ampleur planétaire… Le cataclysme continental qu’il déclenche propulse Manny, Diego et Sid dans leur

plus grande aventure. Tandis que le monde bouge au sens propre du terme, Sid va retrouver son épouvantable grand-mère, et la petite troupe va affronter un ramassis de pirates bien décidés à les empêcher de rentrer chez eux.

M.M.

M.M.M.M.

27 novembre 2012

Source : Box Office Mojo

Du 16 au 22 novembre 2012

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Télévision

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Les remakes à la télévision

Avec le cinéma qui recycle les super héros de BD, puise la majorité de ses scénarios dans la littérature, le monde de l’écran, petit ou grand, a appelé ce phénomène le « REMAKE ».

Mais kezako le « remake » ?

Le remake, en français « refonte », est une forme de recyclage intellectuel.

On compte 4 formes de « remakes » :

1. La reprise d’une série vieille d’au moins 20 ans. On reprend l’idée ou on continue l’histoire autour d’un person-nage principal vieilli. « Dallas » est l’exemple type de ce principe et on reviendra un peu sur cette version qui débarque sur nos écrans.

2. La reprise d’une série étrangère qui a déjà eu du succès et qui est remise à la sauce locale.

3. La reprise d’un film qu’on décline en série télé.

4. Le passage de la série au film : Mission Impossible, Charlie’s Angels sont des exemples mais ce ne sera pas le propos de cet article.

Quand au changement de support comme du papier à l’écran, on appelle cela une adaptation ou une novelli-sation si on publie une histoire basée sur un épisode.

Un peu de détails, svp

Les séries revenues de force sont légion. Déjà en 2005, Kojak n’avait pas vu ses cheveux repousser et Le fugitif en 2000 avait, lui, bien tenu la route, sans apporter du neuf.

Mais depuis 2000, crise de neurones des scénaristes ou la peur d’investir des millions dans un projet incertain, la mode du remake est en plein essor.

Partout dans le monde, la loi de l’offre et de la demande est d’application. Dans les années 1970-1980, les USA créaient sans s’inquiéter des ventes à l’étranger car tout s’amortissait rien que sur les réseaux des grandes chaînes et les multi-diffusions locales. Mais, la multitude de stars aux salaires en six chiffres, les techniques de l’audiovisuel et les exigences des spectateurs ont rendu impossible la création d’une série qui ne serait pas rachetée pour le marché européen et asiatique.

Il est donc facile et plus sûr de re-prendre une recette qui a fait ses preuves et de vendre les droits avant l’épisode pilote, au risque que la série s’interrompe très vite, même en cours de première saison. Les acheteurs prennent aussi ce risque pour ne pas passer à côté de LA série.

Drôles de Dames, Wonder Woman, V, Super Jaimie/Bionic Woman ou Le

retour de K2000 comptent parmi les plus gros échecs. Soit le public n’avait plus envie de grandes blondes nunuches et perruquées, soit la série de l’époque était tellement originale et a tant marqué les mémoires (V) qu’il a fallu en rajouter des tonnes dans le gore, récupérer des anciens héros pour sauver le bateau… et le voir couler quand même.

Certaines séries vivotent quelques saisons comme 90210 Beverly Hills, nouvelle génération, Fame LA avant de disparaître, sans égaler leurs originaux.

Heureusement, parfois, le remake se révèle bien « refondu ». Sous les huées des fans de la première heure qui se sentent trahis, Hawai 5-0 ou Battlestar Gallactica respectent la structure de base mais créent d’autres éléments : souvent un personnage apparaît neuf ou transformé (Starbuck dans Battlestar devient une femme, et dieu sait combien les cris d’horreur ont été puissants). Ces deux séries jouent sur des éléments nouveaux : un hu-mour un peu Magnum et surtout des personnages avec des failles et des doutes pour Hawai 5-0 et un côté mystique et manichéen bien/mal dans Battlestar Gallactica. Bref, quelque part, les scénaristes ont osé sortir des ornières pour garder le meilleur et ajouter ce qu’il fallait pour renouveler le genre.

L’ aperçu

©TNT

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Le second genre, l’appropriation de séries étrangères, est très varié : des séries anglaises reprises aux USA (Abfab, Life on Mars, 11 Hours, Beiing Human, The Office). Mais aussi de Suède, avec The Killing, d’Israël avec En analyse ou Homeland, du Mexique avec Ugly Betty. Du Canada, qui nous a envoyé Un gars et une fille. Evi-demment, souvent avec succès et pour la raison principale qu’il s’agit de séries contemporaines juste adaptées à la culture du pays.

La reprise d’un film pour en faire une série, c’est de loin la version la moins fréquente, mais on y range des noms comme Les chroniques de Sarah Connor, dérivée de Terminator, Small-ville, décliné des Superman plus qu’un « remake » des Loïs et Clark : les nouvelles aventures de Superman. Ou des Stargate aussi, au départ du film éponyme.Au final, sans en faire des listes exhaustives, la version du long mé-trage à la série télé est probablement souvent une réussite car il faut d’office étoffer la matière de base pour arriver au format saison de minimum 12 épisodes.

Dans les mois à venir, le projet le plus marquant est le remake de L’in-croyable Hulk par Guillermo Del Torro.

Dallas

Monstre télévisuel de 1978 à 1990, la saga de la famille Ewing a tenu des millions de personnes en haleine : savoir qui avait tué JR occupait les discussions pendant tout l’été. Les épisodes étaient construits avec des cliffhangers (suspense) à la fin de chaque épisode qui « feuilletonnait ».

Rater quelques épisodes compliquait la compréhension.

Aujourd’hui, Dallas, 20 ans après présente les personnages d’origine et leur descendance. Ceux qui ont vu la série originale se demandent com-ment JR Junior va-t-il apprendre qu’il est le fils de Cliff Barnes, ex-beau-frère de Bobby et que Christopher, fils adoptif de Bobby, est celui de Kristin, sœur de Sue Ellen et de… JR. Bref si JR Junior accuse Christopher de ne pas être un Ewing… c’est qu’il faudrait lui diffuser la série originelle en 14 saisons et 357 épisodes !

Succès aux USA, certains acteurs n’ont que peu changé (J.R), d’autres… comme Lucy Ewing (Charlene Tilton) passent de 19 à 33 ans dans la première série et sont ici quasi sexa-génaires. Le choc est rude.

N’ayant vu comme beaucoup que 2 ou 4 épisodes, on va attendre un peu avant de lui mettre une étiquette : stop ou encore ?

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Véronique De Laet

©AMC

27 novembre 2012

©Sony Pictures

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Festival

Cette semaine, c’est à Sequedin, à quelques kilomètres de Lille que nous nous rendons pour un événement unique dans la région, le Sequed’In Rock Fest. C’est l’un des seuls festivals annonçant une telle affiche et gratuit. Pour vous y rendre, une seule chose à faire, annoncer votre venue sur l'événement facebook. Mais Fred, l’homme à l’origine du projet vous parlera de cela mieux que moi... Voici ses propos.

Bonsoir, et merci de nous accueillir. Pourquoi faire un festival gratuit?

Bonsoir, Eh bien je pense que même 2 euros est une somme qui peut freiner les gens. Dès le départ, je voulais faire un événement totalement gratuit, ca permet à tout le monde de découvrir la musique, de la vivre. Je pense que si ça avait été payant, certaines personnes ne seraient pas venues.

Quel est le plus gros défi logistique d’un tel événement?

Même si on est subventionné par la municipalité, l’argent reste difficile à trouver. Heureusement, j’ai une société et je peux investir mes fonds propres. Ma volonté est vraiment que le festival reste gratuit! Cette année, on a pu avoir Aqme grâce à la vente de vieux matériel. Je me fais un petit plaisir tous les ans en organisant ce festival et je compte bien continuer. Même si assurer la gratuité est loin d'être évident.

Quel groupe rêverais-tu de voir monter sur «ta» scène?

Le rêve, ce serait Gojira. Pour les 10 ans peut être, même si c’est pas vraiment dans mes moyens. Les groupes font aussi un effort financier, je dois négocier avec eux, ça leur fait une bonne promo de se produire dans un évent gratuit. On filme également tout le festival en HD.

Que voudrais-tu améliorer pour la prochaine édition?

Je voudrais une meilleure salle, ici le son n’est pas génial. La mairie rénove une ancienne salle, on peut donc penser que d’ici 2 ans, on aura déménagé. J’aimerais également trouver des partenaires, améliorer la publicité, ... La pub se fait essentiellement par le bouche à oreille, et a du mal à passer la frontière.

Merci et à l’année prochaine!

Vous serez les bienvenus!

Voilà pour la présentation du festival. Cette année, la foule s’est amassée en nombre pour découvrir les groupes qui se produiront ce soir... L’affiche de cette année se veut orientée Métal et Hardcore et ce, même si la soirée commence avec DELUXE RENEGADES, un groupe qui va droit au but, sans fioritures, du bon vieux rock... Bref, notre coup de coeur de la soirée! Nous avons tenu a vous les présenter...

Salut. Qui sont les Deluxe Renegades?

Hello. Nous sommes Pierre à la guitare, Laurent à la batterie, et Louis au chant et à la basse. On fait du «Rock Patate», on va droit au but, on met la patate! C’est le but du trio, pas de fioritures, c’est plus efficace, plus simple, plus harmonieux.

C’est peu banal de voir un bassiste chanter, pourquoi avoir choisi cette formation?

Pierre ne le sentait pas et Louis voulait gérer ça, prendre les devants. A la base, il y avait un second chanteur et on s’est rendu compte que c’est pas vers ça qu’on voulait aller. On est donc retourné à un trio et on va en rester là.

Vous vendez un EP à un prix libre, pouvez-vous nous expliquer pourquoi?

Le prix libre permet à un grand nombre d’écouter notre musique. Les gens peuvent participer à notre aventure même avec 1 euro en poche. Cet EP est plus une carte de visite pour nous faire connaitre.

Où vous voyez-vous dans 5 ans?

Un peu partout, sur des fests internationaux, au Splendid de Lille. On veut donner le max...

Quelle scène serait pour vous la consécration?

L’AB, ou Anvers, des gros fests, même à une plage horaire de merde, Dour, Werchter,... Partout!

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27 novembre 201219

Qu’avez vous envie de dire aux gens pour qu’ils vous découvrent?

La mode maintenant, c’est le metal, on se détache de cela en faisant du rock brut, et c’est ce qui plait aux gens. On est arrivé sur l’affiche du fest en dernier, un grand merci à Fred, il a vu notre prestation à St Sauveur une salle, et à pensé qu’on tenait la route. Ca fait 1 an qu’on fait ça, on est tout nouveau et on en veut!

Un mot sur le fest?

Un mot? ... On va réfléchir alors... Un mot... Bite (rires) en référence à l’affiche sur le mur (rires)... Nan nan... Patate! Et en tous cas, super accueil!

Merci et bonne continuation!

Merci à vous.

Place maintenant au métal avec ILL LOGIC, ARKANAN, DARKNESS DYNAMITE, BETRAYING THE MARTYRS, des groupes aux sons lourds, aux voix fortes et à l’énergie débordante! Ces groupes sont plus à découvrir sur scène qu’à découvrir sur album, car aucun album ne traduirait

correctement l’ambiance qu’ils font régner durant leurs concerts.

C’est au tour de KELLS de montrer ce qu’ils ont dans le ventre! Et ils y arrivent à merveille! Ce groupe de néo-metal symphonique ne tient pas en place... Le Public non plus d’ailleurs. Nous avons été les trouver à leur sortie de scène pour avoir leurs impressions...

Bonsoir Virginie. Dis-nous, qui sont Kells?

Bonsoir, Au départ, c’était pas une vocation, je chantais pour m’amuser et j’étais plus attirée par la pop. Quand le groupe s’est formé, chacun y a amené sa touche et on est parti vers le métal mélodique. Ensuite les influences ont changé, les rencontres ont fait que...

Les rumeurs vont bon train, certaines disent que tu remplaceras Candice dans Eths, d’autres disent le contraire... Qu’en est il vraiment?

Oui, je vais remplacer Candice, et ce provisoirement. Mais pas question d’abandonner Kells. Mon groupe restera la priorité!

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Où vois-tu le groupe dans 5 ans?

Toujours sur les routes, sans fin, comme un vieux groupe!

La scène de rêve pour toi?

Pourquoi pas le Zénith?

Qu’as-tu pensé du public ce soir?

Un public sage. En Belgique, le public est plus expressif et d’habitude dans le sud de la France aussi. Mais le public a été sage avec les autres groupes aussi. Ca à été mieux dans les derniers morceaux.

Un mot sur le fest?

Super accueil, L’organisation est super aussi. Juste la salle qui n’est pas au top pour l'acoustique.

Merci et à bientot.

AQME a bien changé depuis son jeune temps, c’est maintenant un groupe tirant sur le Hardcore. Ne vous attendez donc pas à retrouver l’ambiance musicale de titres comme «A Chaque Seconde» ou «Le Rouge et le Noir». C’est une ambiance beaucoup plus criarde qui vous attend. Et il faut avouer que les amateurs des premiers albums n’y trouveront pas forcément leur compte. Leur nouvel opus : «Epithète, Dominion, Epitaphe» est donc le symbole d’un genre nouveau pour Aqme. Mais si leur genre a changé, leur énergie sur scène reste la même... Bonne redécouverte si vous écoutez cet album.

La soirée touche à sa faim, les dernières bières se vendent et le public repart heureux de sa soirée... N’oubliez pas de vous inscrire pour l’édition 2013 et notez déjà ce nom : Sequed’In Rock Fest.

Texte de Manon Delbecq et Jérémie PiaseckiPhotos de Jérémie Piasecki

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Une bien belle affiche  que celle proposée par l’AB en cette sombre soirée de novembre.Réunir Opeth, groupe atypique suédois  mélangeant entre autre le prog et le death metal et Anathema, groupe spécialiste des mélodies envoûtantes, sur une même affiche, je ne pouvais rater ça !

Après quelques difficultés pour parvenir à l’AB (Saint V oblige), j’arrive devant la salle où une immense file d’attente s’est déjà formée. Car s’il y a quelques années , Opeth ne jouait que dans des petites salles obscures, les choses ont bien changé : Malgré la concurrence en ce 20 novembre (Motorhead et Anthrax mettant le feu à Deinze le même soir), le concert affiche complet !En observant un peu la file d’attente, je me rends compte que le public est assez diversifié: jeunes et vieux metalleux côtoient pas mal de personnes d’une trentaine d’année, d’un look plus classique.Les choses vont ensuite assez vite: la salle ouvre légèrement en retard, ce qui n’empêche pas Anathema, la première partie de ce soir, de commencer quant à lui… quelques minutes à l’avance, fait assez rare que pour être souligné.

Chez Anathema aussi les choses ont bien changé: passé le premier morceau, le classique «Deep», le groupe enchaine ensuite sur toute une série de morceaux issus de leurs deux derniers albums.Je me dis alors qu’il est loin le temps où Vincent growlait et ou Anathema était catalogué comme un groupe de Doom-Death Metal. Non l’Anathema «new style» (enfin nouveau, cela fait déjà pas mal d’années que le changement s ’es t e f fec tué) p ra t ique un rock atmosphérique plus calme, mais tellement envoûtantLes nouveaux morceaux sont relativement longs et suivent à peu près le même schéma de montée en puissance terminant par une explosion d'émotions. Je dois avouer que je n’avais pas écouté leurs deux derniers albums et ce concert m’a tout simplement donné envie de foncer chez mon disquaire pour me les procurer. Le double morceau «Untouchable» est un véritable bijou. Le groupe est accompagné pendant la moitié de son set d’une chanteuse qui apporte un réel plus à leur prestation.

Le concert se termine par l’étrange mais tellement tripant «Closer», puis ensuite par le classique «Fragile Dreams» qui ravit les fans des premières heures.Bref, plus qu’une simple première partie, un excellent concert qui fut malheureusement trop court (45-50 minutes seulement) pour commencer la soirée.

Vingt minutes plus tard, Opeth entre sur scène sous les cris d’un public enthousiaste. D’entrée de jeu , ils entament le tout bon "The Devil's Orchard" tiré de leur dernier album

" Heritage" . Les premières choses qui me marquent sont le jeu de lumière impeccable, le jeu toujours aussi pro des musiciens, et en particulier celui du batteur, Martin Axenrot. Celui-ci m'avait laissé une piètre impression il y a quelques années, et il semble s'être véritablement métamorphosé.

Pas vraiment de gros show scénique par contre, car comme le dira plus tard un Mikael en pleine forme, Opeth est là pour que les gens profitent de leur musique et non d’un show à la Kiss (qu’il dit malgré tout adoré, on le croira volontiers , vu qu’il arbore d’ailleurs ce soir un T-shirt à leur effigie )

Parlons justement un peu plus de Mikael Akerfeldt, le charismatique chanteur du groupe. Celui-ci est une attraction à lui tout seul. Non seulement sa voix clean et son jeu de guitare sont magiques, mais surtout celui-ci prend un malin plaisir à raconter blagues et anecdotes entre chaque morceau. On a droit à des boutades sur d’autres stars qu'il a côtoyé , des choses croustillantes qui lui sont arrivées pendant la tournée, des petits détails cocasses sur sa vie, etc. Le public apprécie et éclate de rire à chacune de ses interventions.

Mais bon, je m’égare,revenons en à l’essentiel : la musique. «Ghost of Perdition» est le deuxième morceau de la soirée d'une setlist comprenant uniquement 9 morceaux. Il faut dire que Opeth est passé maître dans l'art d'écrire des morceaux longs passant régulièrement la bare des dix minutes, dur à ce moment-là de proposer 25 titres.

Le groupe nous propose ensuite un énorme retour en arrière avec " White Cluster ". S’en suit ensuite un duo de désormais classiques de Opeth : «Deliverance» et son final épique, et le toujours très émouvant «Hope Leaves».

La fin manque par contre à mon goût un peu de saveur : certes «Häxprocess» tiré du dernier opus est rempli de qualités, mais le public n’a pas l’air enchanté (du moins, de mon côté de la salle). «Reverie/Harlequin Forest» et «Hessian Peel» sont certes deux bons morceaux, mais j’aurais préféré d'autres titres et l'album «Watershed» et du génial «Ghost Reveries».

L’ article

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a fait trembler l’Ancienne Belgique

Page 23: Le Suricate - Septième numéro

Le groupe quitte alors la scène, et le public enthousiaste fait alors le bruit nécessaire pour l’habituel rappel. Et là, bardaf c’est l’embardée, le groupe nous envoie un «Blackwater Park» énorme malgré de petits soucis vocaux du chanteur.

Que retenir de cette soirée ? Que Opeth en live, c’est toujours un moment de plaisir musical intense et qu’Anathema a fait beaucoup plus que de simplement assurer la première partie du show. Bref, je repars de l’AB heureux , comme beaucoup de monde autour de moi.

Texte de Julien Sterckx

27 novembre 201223

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Peu connue du grand public, Martha Wainwright sort pourtant son 4e album : « Come Home to Mama ».. Née en 1976, Martha Wainwright est une chanteuse canado-américaine. Son style s’apparente à la folk-pop. Elle sort son premier album en 2005.

Son quatrième album comprend dix chansons. Son titre « Prosperina » est un bel exemple de l’émotivité des mots de la chanteuse et de la mélodie de sa musique. Elle collabore avec des gens comme Yuka Honda à la réalisation et Nels Cline (Wilco) à la guitare. Ce qui amène des ambiances nouvelles, des synthés omniprésents qui placent parfois la voix magnifique de la chanteuse au second plan.

Peut-être moins lyrique et moins harmonique que ses albums précédents, Come Home To Mama permet plus la création d’un style exclusif. Come Home to Mama est plus personnel, un peu à mi-parcours entre le chant posthume et l’ode à la maternité. De son folk sentimental initial, on ne garde presque plus rien. La chanteuse se dirige vers des sonorités un peu plus rock.

Sa performance vocale est riche et puissante. On croirait parfois entendre Kate Bush. L’ensemble respire le rêve, une sorte de sensualité dansante.

Une voix très agréable, le talent brut de Martha et des mélodies envoûtantes font de cet album une très belle découverte.

Nouveaux albums

Martha Wainwright«Come home to mama»

V2 Records

Marc Bailly

Après Uno et en attendant Tré, l’album Dos est dans les bacs pour le plus grand plaisir des fans de Green Day. Le groupe de punk californien nous revient avec une trilogie dont les parties sortiront avec un mois d’écart chacune. Dos est celui qui fait actuellement le bonheur des jeunes adultes qui ont adulé le groupe dans leur jeunesse.

Entièrement écrit par Billie Joe Armstrong, ce deuxième volet est fidèle à l’esprit teenager du groupe. De fait, dès les premières plages de l’album, on est irrémédiablement renvoyé vers les teen movies et les springbreaks dont seuls les américains ont le secret. Comme ils le narrent à qui veut bien l’entendre, Green Day définit cet album comme réussi et davantage axé sur le garage rock, un genre pouvant être qualifié de post-punk et largement délaissé à la fin du siècle dernier. Ce n’est que très récemment que le garage rock a retrouvé une seconde jeunesse avec les groupes à la mode que sont The Libertines ou encore The Strokes. Green Day a, pour l’occasion, créé un groupe parallèle se dénommant Foxboro Hot Tubs qui est composé des mêmes membres mais dont les influences se trouvent dans le rock.

Mais que penser réellement de cet album, milieu d’une trilogie «marketisée» ? Tout d’abord, il faut certainement être un fan du groupe ou du genre pour apprécier celui-ci car, il faut bien l’avouer, ce n’est pas le style de musique à laisser en sourdine dans sa voiture. Soit on l’écoute à basses saturées, soit on ne l’écoute pas. Passé cette étape, Dos vous séduira, vous fera revenir à vos quinze ans (pour peu que vous en ayez trente). Stray Heart, dont le single est sorti quinze jours avant l’album, est probablement le morceau le plus abouti. Celui-ci passant en boucle sur les ondes britanniques et australiennes, il est d’un entrain rarement atteint ces dernières années dans le punk californien. Hormis cela, on soulignera la présence du skud Amy, dernier morceau de l’album, que le groupe a souhaité réaliser en dédicace à Amy Winehouse, décédée l’année dernière.

Green Day«iDos!»

Reprise Records

Matthieu Matthys

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Loud Cloud est le nouveau projet de Lone Kent qui, après trois albums sous son nom, a décidé de renoncer à l’excédent de bagages d’un son de groupe et d’opter pour une configuration épurée allant droit à l’essentiel. C’est en duo, la forme la plus basique de collaboration, qu’il poursuit son odyssée musicale. Le guitariste et songwriter américain s’est musicalement « pacsé » avec Seb Gisbert, jeune percussionniste connu pour son ouverture, sa quête constante de nouvelles sonorités et pour la diversité de ses collaborations. L’album, dont ils cosignent l’ensemble des titres, a été enregistré et mixé par Eric B. Barr au Studio Elisa (France) et masterisé par John Dent à Loud Mastering (Taunton, Angleterre).Inspiré, le tandem navigue entre sensualités aériennes, harmonies bluesy, mélodies pop entêtantes et riffs rock, efficacement servis par une voix au timbre chaud et prenant.Rarement, un duo a autant occupé l'espace sonore. Minimaliste dans l'approche, leur jeu complice n'en est pas moins d'une grande richesse et d'une étonnante inventivité, dans les climats, les rythmes et les sons. Chercheur sonore aux étranges éprouvettes, Lone Kent nous a toujours habitués à un son d’une pureté rare, à un style pour le moins envoûtant, entre rock atmosphérique et ambient blues, entre country fusion et métal zen. On qualifiera ce nouvel album de trip-rock. Sensuel et aérien mais

aussi dynamique et percutant. Chacun étant responsable - à part égale - du résultat sonore, la tension est palpable. Comme s’ils (re)découvraient l’intimité du minimalisme (From Blinding Light...) et la puissance du son (... To Bloody Heavy).Qualifié par la presse de « guitariste hors normes » et de « musicien extraterrestre », Lone Kent est aussi connu pour son travail avec des compositeurs avant-gardistes (Hector Zazou, Rhys Chatham, Kasper Toeplitz) et ses excursions dans des musiques plus conventionnelles : Les Faux Bijoux, Francis Lalanne, Audrey Lavergne, Alima & Lone Kent... Après « Granite & Sand », paru en 1993 chez Crammed Disc/Columbia (salué par Guitares & Claviers comme un « premier disque exceptionnel d’un guitariste surdoué, multi-instrumentiste et génialement avant-gardiste »), puis « The Need To Know » (Willing Productions/Scalen) en 1999 et « Oysters » (Noa Music) en 2005.

Seb Gisbert est un jeune percussionniste français qui a étudié au conservatoire de Toulouse. Plusieurs fois primé, il est connu pour son ouverture à toutes sortes de musiques et pour sa quête constante de nouvelles sonorités. Il a joué avec divers groupes (Sfora, Funky Style Brass, Doctor Groove, Rockbox...), avec l’orchestre du Capitole de Toulouse et des compagnies de danse contemporaine.

Loud Cloud«From Blinding Light... To Bloody

Heavy»

Noa Music

Marc Bailly

Pour ses 50 ans de carrière, Françoise Hardy, l’égérie des années 1960, nous offre son 27e album, rien que ça…

Un album qu’elle écrit pratiquement seule, sauf pour deux titres sur les dix présents. Les autres auteurs sont rien moins que… Victor Hugo pour « Si vous n’avez rien à me dire » et Julien Doré pour « Normandia ». Les huit autres chansons sont donc écrites par Françoise Hardy elle-même qui possède une belle plume, faut-il le souligner. Une belle plume certes, mais pas toujours très… rigolote. En effet, ses textes sont mélancoliques et parlent d’amours impossibles. Rien de très réjouissant donc, mais agréable à écouter quand même. Pour deux raisons. La première, je le disais, l’écriture, est belle et fluide. Les textes sont travaillés. La deuxième est la voix de Françoise Hardy. Toujours aussi cristalline, malgré le temps qui passe. On prend toujours autant de plaisir à entendre cette voix qui, en 1963, nous susurrait « Tous les garçons et les filles » ou en 1973 nous livrait son « Message personnel ». Il est évident que les choses ont évolué depuis dans la carrière de celle qui partagea la vie de Jacques Dutronc, et qui nous a également donné l’excellent Thomas Dutronc (avec qui elle réalise un album en 2004 « Tant de belles choses »).

Dans les années 1980, elle se tourne vers l’astrologie pour apprendre à mieux se connaître, elle et les autres.

Un bel album donc composé de dix chansons dont les musiques ont été écrites par des cadors du genre, dont Calogéro en personne. Un cd qui nous parle d’amour aussi passionné que destructeur, celui qui fait perdre la raison. Des chansons un peu autobiographiques, Mme Hardy ?

Françoise Hardy«L’Amour Fou»

Virgin/ EMI Music

Marc Bailly

27 novembre 201225

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Après 5 ans d'absence, les rois autoproclamés du métal sont de retour, dans le but de faire trembler une fois de plus le commun des mortels. Pochette pleine de muscles, textes clichés et titres de chansons remplis de mots guerriers, c'est certain, «The Lord of Steel» est bien un album de Manowar.

Venons en au principal : la musique. Que dire de cet album? Tout simplement que c'est du Manowar... en pas très très inspiré.Les fans, les vrais comprendront. Pour les autres, allons un peu plus loin..

Manowar pratique sur cet album comme à son habitude un Heavy Metal basique " old-school" Les morceaux rapides («Manowarriors»), les hymnes guerrières mid-tempo ( «Born in a Grave», «Black List», «Hail Kil Die») et les ballades larmoyantes («Righteous Glory») s'enchainent.

Alors, il y a 30 ans, la recette fonctionnait à merveille mais maintenant cela sent furieusement le réchauffé. On sent que l'inspiration n'y est plus et même la production a du mal à suivre.

Quelques points positifs tout de même , la voix d'Eric Adams est toujours aussi puissante , et quelques chansons donnent furieusement envie de bouger la tête («Manowarriors» en tête )

Les Mano fans apprécieront peut-être, les autres, je ne suis vraiment pas sûr

Nouveaux albums

Manowar«Lord of Steel»

Magic Circle Music

Julien Sterckx

Cela faisait pas mal de temps que l'Irlande ne nous avait plus servi de groupe de rock digne de ce nom. Voici Kopek, un groupe qui semble enfin sortir du lot. Formé en 2002, ce trio a connu un parcours assez atypique. Sans doute est-ce le résultat d’années de galère que connaissent beaucoup pour trouver un label, toujours est-il que Kopek n’a sorti son premier album qu’en 2010 aux USA et maintenant en Europe. Entre-temps, les trois bonshommes ont beaucoup tourné et gagné divers prix comme le Best Live Act au Global Battle of the Bands, engrangeant 100.000$ et une tournée mondiale.

Alors, que dire de ce premier opus? Tout d'abord, la pochette semble assez loufoque. On y voit un homme, en costume-cravate, ayant un champignon atomique en guise de tête. (Un moyen efficace d’attirer le regard chez les disquaires.) Au-delà du contenu visuel, le contenu musical est également assez efficace. Tout commence par «Cocaine Chest Pains», une chanson bien pêchue qui compare l’addiction à la cocaïne à celle que l’on peut ressentir envers quelqu’un lorsqu’on est amoureux. Le second morceau est en fait le titre éponyme de l’album et semble déjà plus engagé. On y retrouve une dénonciation des vies sacrifiées par des politiciens corrompus. «Love is Dead» rappelle tous les meilleures choses

des années 90 qui ont perdu de leur saveur aujourd’hui. Un bon morceau d’alternatif avec une basse fort présente pendant les couplets. Ce qui est intéressant dans cet album, c’est que chaque chanson a son identité et son charme. Kopek a le don d’allier simplicité et authenticité. «Sub Human» apporte aussi une touche de tension intéressante au travers d’un voyage acoustique. «Love Sick Blues» a des relents d’Alice in Chains qui amène une ambiance un peu malsaine à ce titre. La voix de Daniel Jordan est aussi l’un des point fort de cette formation. Un grain et une sensibilité à fleur de peau qui vous fait dresser l’épiderme. Beaucoup de choses passent à travers cette voix qui dégage énormément d’émotion.On peut toutefois reprocher le format de trois minutes des chansons, le manque de solos de guitare et de breaks qui auraient donné un bol d’air dans certains morceaux un peu trop concis entre une intro parfois lente et des paroles qui n’en finissent pas.

Kopek a donc réussi à faire un bon album de rock alternatif dans lequel se mélangent des influences des années 60-70 et 90 mais qui semble manquer de quelques éléments pour vraiment convaincre

Kopek«White Collar Lies»

Another Century Records

Christophe Pauly

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C’est drôle. Dans le numéro du 16 octobre, je parlais du documentaire «Cinema Inch’Allah» où l’on parlait de 4 cinéastes passionnés. Un de ceux-là (Mohamed Ouachen) changeait de cap et se dirigeait vers le théâtre professionnel. Par le hasard des choses me voici le retrouvant sur scène dans «La vie c’est comme un arbre» et je peux prendre mesure de son talent hors caméra.

Mais revenons à nos moutons. «La vie c’est comme un arbre», c’est l’histoire de trois amis, qui, en 1964 à Tanger, sont sans emploi, désabusés et broient du noir. Le tenancier de leur bar favori va leur donner son contact en Belgique. C’est le début d’une incroyable odyssée à travers les difficultés de départ mais aussi les difficultés d’entrée. Il y a Aziz, trouillard et geek mais aussi intellectuel romantique. Abdelhak, le cousin petit et comique, genre de Charlot marocain et Hamid, le jeune bellâtre, dragueur et coiffeur.

Déjà plusieurs années que la pièce tourne. Des milliers de spectateurs ont déjà assisté au buzz humoristique écrit par Mohamed Allouchi et Rachid Hirchi. En 2010, la distribution change et accueille de jeunes artistes comme Mohamed Ouachen (voir ci-dessus). Ils sont cette fois-ci dans l’antre du TTO, le théâtre de l’humour par excellence. Les places partent à une vitesse folle, les représentations sont sold out : la

pièce continue à entrevoir un bel avenir.

Mais ce bel avenir ils le gagnent chèrement. Tout d’abord au niveau de l’écriture. Le texte, bien que parfois trop caricatural ou facile, est sincère et drôle. Le talent des acteurs a interprété ce texte y est aussi pour beaucoup. Le parti pris du minimalisme des décors est apparu aux débuts de la pièce et malgré le succès, les acteurs continuent à jouer du mimep pour remplacer les décors. Seuls les costumes permettent de s’y retrouver visuellement. Les autres rôles sont interprétés par les autres comédiens de la «Compagnie des voyageurs sans bagage»

Pendant 1h30, nous allons donc suivre ces trois pieds nickelés et leurs envies d’une autre vie. Les acteurs sont drôles et attendrissants, l’histoire parfois trop caricaturale est malgré tout très sincère. Le thème de l’immigration marocaine est bien présente mais peut représenter toutes immigrations. Une pièce à voir, à vivre, à rire.

Loïc Smars

Odyssée marocaine au TTO !

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La critique

Un petit teaser ?

http://www.youtube.com/watch?v=Z5z_ecvVMLs

Enjoy !

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Scène

La vie c’est comme un arbre

Théâtre de la Toison d’Or

Mise en scène et écriture de Mohamed Allouchi et Rachid Hirchi

Avec : Issam Akel, Mohamed Allouchi, Mohamed Ouachen, Fionn Perry, Rachid Hirchi, Omar Meloul, Naura Darchambeau et en alternance Valeria Beccera et Gaëlle Swann)

La vie c’est comme un arbre nous emmène dans les pérégrinations de trois marocains en quête d’immigration ...

Jusq

u’au 0

1/12/12

!

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Si il y a un théâtre à Bruxelles où ça bouge, c’est bien le TTO (pas de stress pour les autres, vous

aussi !). Et pour la fin d’année et les fêtes, ça va envoyer du lourd !

Plusieurs pièces, un one-man show, un spectacle pour les

enfants de Jean-Luc Fonck, une reprise d’anthologie et même un

festival inédit !

Avec autant de chose prévues, la fin d’année va se passer du côté des Galeries de la Toison d’or ...

La fin d’année au TTO ?Ca va envoyer du lourd ...

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L’ analyse

27 novembre 2012

Dernier jour des «Il n’y a pas de sot métier», le 3 décembre 2012 : «Tu travailleras dans les médias

mon fils»

Page 30: Le Suricate - Septième numéro

« J’aimerais vous parler d’un mystérieux objet scénique, étrange spectacle qui va se dévoiler à vous en novembre 2012 » , c’est par cette phrase que Sybille Wilson commence l’explication de son spectacle si intriguant. Dans l’antre si particulier du théâtre du Parc, un OSNI (Objet Scénique Non Identifié) est apparu.

L’intrigue tourne autour de la disparition de la femme du grand Maître de magie Ophéo Trimegi et de leur fils : Fantin. Pendant que le père tente de renouer contact avec sa femme, le fils, soutenu par sa femme, se bat pour obtenir le secret du plus grand tour du Maître qui malheureusement a fait perdre la vie à la femme et mère aimée. Tout est conflit familial jusqu’à l’apparition de la mystérieuse Alice, poursuivie par le Docteur Munch.

La pièce démarre dans un monde illusoire et de magie où la vie est chantée, où la musique est permanente, pour tendre, avec l’apparition d’Alice, vers l’abandon du chant pour la parole. Car l’idée de la pièce est de mélanger plusieurs arts dans une œuvre de qualité. Nous retrouvons donc sur scène le chant avec le grand José Van Dam qui fait ses premiers pas sur scènes, Pierre Dherte qui apporte sa magie, différentes

acteurs et un orchestre. Tout le monde ou presque, devra par la même occasion apprendre l’art de son voisin et ainsi assurer une alchimie parfaite entre eux tous. Le magicien chante, le chanteur fait de la magie.

Mais, écrit par Thierry Debroux, le directeur du théâtre du Parc lui-même, « Le Maître des Illusions » réussit son pari par l’écriture dont la pièce a bénéficié. Dans une histoire reprenant les grands thèmes de la vie, Debroux insère avec brio, dans son écriture, la magie et le chant, en s’éloignant d’un spectacle de magie ou d’une comédie musicale, tout en en reprenant les points forts.

« Dans ce temple de l'illusion, qu'est-ce qui est conscient, qu'est-ce qui est inconscient ? Mais aussi, et surtout, qu'est-ce qui est illusion, et qu'est-ce qui peut être de l'ordre du réel ? » Sybille Wilson résume fort bien l’état du spectateur devant la beauté du spectacle. On oscille entre deux mondes jusqu’à en ne plus savoir lequel est le réel.

Sans oublier, non plus, la présence du scénographe Jim Claybrugh, membre fondateur du Wooster Group, séjournant maintenant à Bruxelles, qui fournit un décor unique mais adaptable en de

multiples possibilités suivant les besoins de l’histoire ainsi qu’un travail de collaboration autour des besoins de Dherte pour ses illusions.

Effrayé au préalable par la superposition de plusieurs arts de la scène, je n’étais pas convaincu. Au fur et à mesure, j’entre dans l’histoire, subit de plein fouet le talent de tous et fini, conquis par cette nouvelle réussite du théâtre du Parc.

Loïc Smars

Ce n’est pas une illusion !Le Maître des illusions ou l’alchimie entre les arts.

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La critique

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

jusq

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2/12

Page 31: Le Suricate - Septième numéro

Malika Madi

FESTIVAL FEMMES ET MIGRATIONS

Souvent silencieuses, pourtant elles ont tellement de choses à dires. Ce festival souhaite donner la parole à des femmes artistes, les faire découvrir en tant que

créatrices et non plus objet de créations (souvent masculines). Auteures, compositrices, chanteuses, comédiennes, militantes ou intellectuelles, elles seront

là pour ouvrir nos sens et nos cœurs à cette expression féminine si riche, à ces voix qui ont, parfois, du mal à se faire entendre.

Page 32: Le Suricate - Septième numéro

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théâtres à l’horizon Pas vus!

Le BrasierThéâtre des Martyrs

Mis en scène de Georges Lini

Lorsque le sang qui coule dans nos veines est brûlant comme la lave et qu'on en hérite de mère en fille...

Pour pallier à la blessure et à la solitude, restent les dragons en chocolat, les liqueurs à deux pailles et les autres perversions inavouables.

Le Brasier, une comédie héréditaire où la moitié des gens meurent brûlés. À voir en famille.

On vit peu mais on meurt longtempsThéâtre des Martyrs

Mis en scène de Samuel Tilman et

Alexis Goslain

Sur le ton de la comédie, le nouveau seul en scène de Fabrizio Rongione épingle avec jubilation les paradoxes quotidiens de la globalisation. Tout est matière à rire dans ce spectacle qui se moque de l’emballement d’un monde ne sachant plus à quoi se raccrocher.

Fabrizio Rongione arpente notre modernité globale à la manière d’un funambule étonné. Surfant sur le fil de l’actualité, il joue les décodeurs facét ieux et impitoyables. Généreux, il ne donne pas de leçon pour autant : c’est de lui-même qu’il se moque aussi.

Après une tournée d’un an en Belgique et en France, Fabrizio Rongione revient à Bruxelles avec un spectacle actualisé qui décode notre monde, tel un funambule étonné.

Jusq

u’au 8/

12/12

!

Jusq

u’au 8/

12/12

!Moi, je crois pas

Atelier Théâtre Jean Vilar

Mise en scène deVincent Dujardin

Quelque part entre l’univers de Beckett et des séries télévisées des années ‘60, un couple se chamaille à qui mieux mieux. Madame veut croire à tout et Monsieur à rien.Jour après jour, bien installés dans leur salon, Monsieur et Madame s’affrontent en joutes verbales désopilantes. Ils s’insultent, plaident, menacent, argumentent, mêlant la mauvaise foi à l’ingénuité et l’absurdité au bon sens, chacun tentant d’imposer son dérisoire point de vue au r e g a r d d e q u e l q u e s é v i d e n c e s fondamentales. Dieu, Hitler, le yéti, l’évolution darwinienne, le lobby juif, rien n’échappe à leur misérable existence. Ainsi le temps, la vie même, passent et au bout du compte, Monsieur ne se souvient plus de ce à quoi il ne croyait pas et Madame a oublié ce à quoi elle croyait.

Jusq

u’au 22

.12/12

!

Vivons heureux en attendant la

mortLes Riches ClairesMise en scène de

Fabrice Gardin

Il faut vivre avec les morts, surtout quand ils sont bien vivants. Pierre Desproges ne se prenait pas pour un con, mais, fort heureusement, il ne nous prenait pas pour des cons non plus. Ce qu’il a écrit est intelligent, érudit et pourtant drôle, mais pas que. Monter Desproges, c’est penser aux matins glauques, mais aussi aux lendemains qui chantent.

Pourquoi riez-vous ?J’aimerais tellement vous émouvoir... disait Desproges.

Et il y arrivait, à faire rire et à émouvoir car son talent était dans la réplique cinglante autant que dans la pudeur des vérités. Derrière la gaieté du clown se cachait (à peine) un métaphysicien de la vie. Un misanthrope ouvert au monde.

La Revue 2013Théâtre des Galeries

Mise en scène de David Michels,

Bernard Lefrancq et Francesco Deleo

Le Théâtre des Galeries vous propose, le temps d’un spectacle, une vision tout à fait surprenante de notre mère patrie… La troupe des Galeries ne mâche pas ses mots pour décortiquer l’actualité de notre plat pays !

La recette ? Une grosse portion d’ironie, une bonne part d ’ imi tat ion, une généreuse dose d’humour. Mélanger le tout avec chansons, chorégraphies, un soupçon de glamour et un zeste de paillettes. Vous avez tous les ingrédients pour un menu de fête, pas toujours facile à digérer pour nos politiques, mais concocté tout spécialement pour régaler le public.

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Vous saviez, vous, que les rouquins ont une odeur ? Et si votre patron vous demandait si vous êtes communiste ? ou pédéraste ?

Ça ! De nos jours, les gens bien n’osent plus sortir le soir. Avec ces gnoufs, juifs, bougnouls et autres bicots. Même en vacances. Faut se méfier. Les Gens bien n’osent plus sortir le soir regroupe des pièces coups de poing, drôles et féroces de Jean-Claude Grumberg, qui nous invitent à nous poser sérieusement la question de notre identité et de notre rapport à la différence. Et ne nous laissent pas y échapper…

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Les gens n’osent plus sortir le soir

Atelier Théâtre Jean Vilar

Mise en scène d’Eric De Staercke

Page 33: Le Suricate - Septième numéro

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Charles BerlingThéâtre 140

Est-il besoin d’évoquer le charisme de l’acteur qui marqua de son empreinte des films comme Ridicule, L’Ennui, Nettoyage à sec ? C’est oublier tout un parcours théâtral et qu’il fut le metteur en scène inspiré du Caligula de Camus, s’y identifiant avec une perfidie mêlée à une étrange séduction. Il me rappelait alors le phénomène Orson Welles, comédien et réalisateur. Et voilà qu’il crée des chansons et qu’il les chante. Il se fait que c’est superbe, on est un peu abasourdi. Mais son spectacle s’ouvre aussi au répertoire théâtral, il sera notamment un moment Le chasseur de lions qui m’avait tant réjoui au Théâtre de la Bastille, sans parler de Cravate Club, qui ne put se jouer au 140, Edouard Baer était en tournage et cela ne se joue pas seul…

Jo Demkine

CendrillonThéâtre National

Mis en scène de Joël Pommerat

Joël Pommerat est un sorcier plein de tendresse pour les humains et leurs tourments . Il fallait l’être pour transformer ce conte de fées un brin mièvre en un spectacle d’une aussi rare intelligence, d’une aussi lumineuse poésie. La Cendrillon de Pommerat s’appelle Sandra et elle croit comprendre dans les dernières paroles de sa mère mourante qu’elle doit penser à elle toutes les cinq minutes sous peine de la voir mourir vraiment. Une tonitruante montre chantant une musique horripilante lui rappellera ce serment, gag acide qui installe un rire qui se fait vite dérangeant. Vite évacuée dans le conte de Grimm, la mort de cette mère est le coeur battant de cette histoire, réflexion stimulante sur les liens entre chagrin et culpabilité.

27/11/1

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La petite filleOcéan Nord

Mise en scène deEmilie Maréchal

Le sacrifice ôte la vie. Ou une partie de la vie. Une personne s’offre. Volontairement ou forcée.

Pour le bien d’autrui ou d’un intérêt supérieur, pour affirmer des convictions.

Ou par amour pour quelqu’un. C’est une privation que l’on s’impose. Sa limite avec le martyr peut être floue. Jusqu’où peut-on aller pour des idéologies, des croyances ?

Pourquoi nous engageons-nous ? Dans une famille, où se mêlent sacré et quotidien, une enfant enquête sur son passé.

26/11/

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Fée un voeuThéâtre de la Toison

d’Or

Mis en scène de Nathalie Uffner

Comédie musicale à voir en famille

Du 08/12/12 au 06/01/13Tous les we et tout le congé de Noël à 14h30Relâche les 16/12, 24/12, 25/12 et 01/01

Ainsi fait Fonck Fonck Fonck. Tout ce qu’il touche se transforme en succès. A croire qu’il a une baguette magique, même pour écrire une comédie musicale enfantine. Que de moments féeriques passés l’année dernière par les bambins du royaume !

Soeur, je ne sais pas quoi frère

Varia

Compagnie pour Ainsi Dire

Idée première : cinq sœurs d’une même famille, âgées de 10 à 75 ans, mais pas nées du même lit. Et une poupée que la plus jeune tiendrait constamment dans ses bras. Idée deuxième : une histoire policière, façon « Cluedo », avec ces cinq personnages, une maison à cinq pièces et cinq objets – dont la poupée - qui seraient comme les clés d’un mystère qui se noue et se dénoue. Idée troisième : parler d’un secret de famille qui passerait par les hommes ou par leur absence que la présence des cinq femmes rendrait éloquente. Une trompe l’œil en toile de fond : la Russie de la fin du 19e siècle. Entre princesses esseulées et gardes rouges en marche, une cascade de femmes imbriquées l’une dans l’autre comme des Matriochkas, pour parler de la transmission et de la descendance.

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Jean et BéatriceThéâtre Blocry

Mise en scène deCathy Min Jung

« Jeune héritière recherche un homme qui pourra l’intéresser, l’émouvoir et la séduire. Récompense substantielle à la clé. »

Béatrice placarde cette annonce sur tous les murs de la ville, avant de s’enfermer dans son appartement au 33eme étage d’une tour. Princesse des temps modernes, elle attend l’homme qui la délivrera de sa solitude. Jean, un chasseur de primes expérimenté, se soumet aux épreuves par appât du gain. Commence alors un jeu étrange, drôle et fascinant. En tentant de correspondre à l’homme idéal selon Béatrice, Jean s’égare et se dévoile, malgré lui. A force de trop vouloir mener la danse, Béatrice s’emmêle les pieds. L’appartement se transforme en piège et la rencontre devient un duel…

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Page 34: Le Suricate - Septième numéro

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Le Maître des Ombres

En 2031, les Etats Sanctifiés et Unis d’Amérique contrôlent le Proche et le Moyen Orient, à l’exception de l’Iran contre qui a été lancée l’opération « Justice divine ». Jason Garnett, lieutenant de l’Armée de Terre, capture un soldat ennemi dans la crypte d’une ziggourat vieille de trente-trois siècles. La vision d’un terrifiant pictogramme gravé sur un des murs entraîne Jason dans une quête plus dangereuse que toutes les luttes qu’il a menées jusqu’ici.

Pourchassé par les combattants de l’Islam, il part à la recherche de la geôle dans laquelle les Zoroastriens pensaient avoir enfermé l’incarnation du dieu des ténèbres. Avec l’aide de son prisonnier, d’un rabbin de la secte des Haredim et d’une infirmière française, il devra comprendre quelle est la pire menace : le Maître des ombres, ancien démon captif depuis des millénaires ou la folie des hommes dont l’âme est le véritable champ de bataille entre Ormuzd et Ahriman, le dieu de la lumière et celui des ténèbres.Il y a comme une terrible injustice à voir un auteur aussi talentueux que Jean-Christophe Chaumette publié par les Editions Rivière Blanche... Attention, loin de moi l’idée de décrier le travail, excellent, de Philippe Ward sur cette collection qui offre aux amateurs de SF et de

fantastique une jolie brochette de textes d’auteurs aussi variés que François Darnaudet, Laurent Whale ou encore le regretté Alain le Bussy... Non, ce qui m’énerve c’est de constater que la plume de Jean-Christophe, qui s’illustra en son temps dans la collection Terreur chez Pocket n’est pas plus largement offerte aux yeux des amateurs... Et des autres. Avec ce « Maître des Ombres », Chaumette prouve une fois de plus son total contrôle, narratif et littéraire sur un texte aux implications aussi bien politiques que fantastiques, religieuses, philosophiques et épiques. En trois cents pages, on assiste à une sorte de fusion démente entre l’univers de Graham Masterton et

celui d’un James Cameron période « True Lies ». Oui, je sais, je mélange allègrement cinéma et littérature ? Et alors ? C’est voulu. Parce que le travail de Chaumette n’hésite pas à piocher dans ces deux univers populaires, afin de mener tambour battant, un récit foisonnant sans être saoulant (Tom Clancy devrait lire ce bouquin pour apprendre comment on exploite un univers militarisé sans en faire un catalogue chiant comme une partie

de pétanque sans cochonnet...), une aventure fière de ses archétypes qui dynamite les stéréotypes.

Et c’est à peine si on râlera gentiment sur une fin trop vite emballée... Une fin d’ailleurs à contre-courant des tendances actuelles... Mais convenue. Paradoxe ? Non, vous comprendrez en découvrant ce roman. Puisque vous allez le découvrir. Je vous l’ordonne.

Editions Rivière Blanche

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La critique

« Vous allez le découvrir. Je vous l’ordonne. »

Christophe Corthouts

Jean-Christophe Chaumette

J-C Chaumette

Né en 1961

Fantasy, Fantastique, SF

L’Arpenteur des mondes (Prix Masterton 2001)

L’Aigle de sang (Prix Masterton 2002)

Le Dieu Vampire (Prix Masterton 2011)

Littérature

Page 35: Le Suricate - Septième numéro

« Le Maitre des Ombres » possède une évidente parenté avec « L’Arpenteur de Mondes », ou encore « L’Aigle de Sang » paru en son temps chez Pocket. Est-ce une histoire à laquelle tu avais pensé à l’époque ?

Oui, la parenté est certaine. Initialement, « Le Maître des ombres » devait paraître chez Pocket Terreur, ainsi d’ailleurs que « Le Dieu vampire ». Mais le départ du regretté Patrice Duvic a tout chamboulé. Les deux manuscrits sont restés dans mes tiroirs jusqu’à ce que je trouve d’autres éditeurs.

Traiter des religions monothéistes, dans le contexte actuel... même avec l’alibi de l’anticipation, il fallait « oser ». Tu as exercé une certaine autocensure dans ton écriture ? Ou as-tu naturellement « équilibré » les choses ?

Non, pas de censure. Le roman reflète mes opinions profondes. Je considère que la quête de spiritualité est naturelle chez l’Homme, et sans doute vraiment souhaitable. Mais systématiquement, cette quête conduit à l’élaboration de systèmes religieux qui, eux, sont hautement nocifs. Ce qui apparaît dans « Le Maître des ombres » apparaît également dans la plupart de mes romans. Je m’intéresse beaucoup au mysticisme, à la recherche du divin, tout en étant plus que critique à l’égard des religions. J’ai de la sympathie pour les mystiques, ils n’embêtent personne, ils mènent leur quête seuls dans leur coin, ce qui me semble être la démarche juste. A mon avis, la spiritualité devrait avoir le niveau d’intimité de la sexualité. Donc je suis choqué par les systèmes religieux qui, au nom de la quête spirituelle, élaborent toutes sortes de codes de conduite et prétendent que ces codes doivent se situer au-dessus des lois. Tout cela est une affaire personnelle, privée. Que chacun vive (ou ne vive pas) sa

spiritualité dans l’intimité et qu’il foute la paix aux autres ! Les religions ne savent pas faire ça… Elles sont intrusives, toutes intrusives. Je n’ai pas cherché à « équilibrer » les choses. Les trois « religions du Livre » se valent dans leur volonté de régenter l’existence des humains, avec des cycles et des variations au cours de l’Histoire. Cela ne m’a donc posé aucun problème de critiquer ces trois religions dans mon roman, par des biais différents d’ailleurs. Et en essayant aussi de montrer à quel point une certaine vision actuelle des religions est ridicule, celle qui consiste à fustiger l’Islam tout particulièrement, en lui conférant une sorte « d’intolérance intrinsèque ». Le problème n’est pas l’Islam, le problème ce sont les systèmes religieux. Dans le roman, les intolérants et les fanatiques sont partout. Pour tous ceux qui s’intéressent à ces questions, regardez le merveilleux film d’Alejandro Amenabar, « Agora ». Les mécanismes de l’intolérance religieuse et de ses dangers y sont admirablement démontés, avec tant de talent que l’histoire est absolument intemporelle. Une leçon à méditer par tous (de toutes les confessions) et tout le temps.

Toutes les technologies employées sont juste « un chouïa » plus avancées que celles d’aujourd’hui... Tu as mené des recherches ?

Les technologies avancées sont un sujet qui me passionne depuis l’adolescence. Je lis en permanence des monceaux de revues et de bouquins sur la question (utile quand on veut faire de la SF). Il est possible aussi que ma formation scientifique me pousse vers ce genre de centre d’intérêt. Donc « mener des recherches », oui et non… Je ne me suis pas lancé dans des recherches spécifiquement pour ce roman (comme j’ai pu le faire par exemple pour mon roman historique « Le Pays des chevaux célestes ») mais je suis continuellement

en train de me renseigner sur les nouveautés en aéronautique, matériaux, armement, biologie… Tout ce qui est décrit dans le roman est en cours de développement ou en projet. Tout ne verra probablement pas le jour, mais une partie de ces technologies seront utilisées dans un avenir proche.

En 300 pages, on a plutôt parfois l ’ impression que tu ne fais qu’effleurer certains concepts ou certains personnages... Il existe une version « Echiquier du Mal » du roman, en 1000 pages ?

Je suis obligé d’être pragmatique. Une nouvelle sera publiée plutôt facilement. Un roman, c’est plus dur. Une énorme saga, ça devient vraiment difficile… Je n’ai rien contre les « versions longues », et « L’échiquier du Mal » est un de mes livres cultes. Et j’ai donné dans la saga à rallonge avec le cycle du « Neuvième cercle ». Mais à n’écrire que des ouvrages dont la longueur se chiffre en milliers plutôt qu’en centaines de pages, on court le risque qu’ils restent dans un placard. Et puis de nombreux lecteurs n’aiment pas la « rumination », le développement de chaque concept dans le détail, le foisonnement de personnages complexes étudiés sous toutes les coutures. Personnellement j’aime bien ça en tant que lecteur, mais ce n’est pas un goût universel… C’est un format qui convient bien à la Fantasy, en matière de Fantastique, c’est plus rare. Mais chaque histoire peut se décliner de toutes les manières, sous la forme d’une courte nouvelle, d’une nouvelle longue, d’un court roman, d’un gros roman, d’un cycle. Il faut faire un choix. C’est vrai que « Le Maître des ombres » aurait pu donner un roman plus gros. Mais j’ai choisi un « rythme » au départ ; et c’était aussi un format qui s’adaptait bien à la collection « Pocket Terreur », à laquelle il était initialement destiné.

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L’ interview

27 novembre 2012

Page 36: Le Suricate - Septième numéro

Tout au long du roman, je ne cessais de penser aux aventures de la Force Sigma, due à la plume de James Rollins... C’est un auteur que tu connais ? Ou c’est un vrai hasard ?

Un vrai hasard. Je ne le connais absolument pas mais maintenant je vais me renseigner… Il faut dire que je ne connaissais pas Graham Masterton quand j’ai écrit « L’Arpenteur de mondes ». Là non plus on ne peut pas évoquer une quelconque influence. En biologie, on parle de « convergence adaptative ». Deux espèces animales se développent séparément, isolées totalement, sans filiation l’une avec l’autre, et aboutissent à des « solutions » morphologiques ou physiologiques quasi-jumelles. Il y a sûrement de la « convergence adaptative » en matière d’auteurs de Fantastique.

Comme je le dis dans ma chronique, j’aime beaucoup le travail qu’effectue Rivière Blanche, mais cela reste une « petite maison ». Ce roman, tu l’as présenté ailleurs ? Franchement il aurait sa place sous le parasol de 5000 personnes !

Comme je l’ai dit précédemment, « Le Maître des ombres » avait été accepté par Patrice Duvic pour sa collection « Pocket Terreur ». Et puis Patrice a été poussé à la démission, on lui a fait des tas de misères et ce roman n’est pas sorti. A l’époque, j’ai été un peu écœuré par le monde de l’édition, j’ai laissé mes romans de côté pour me consacrer à mon travail. Et puis bien sûr, au bout d’un certain temps, j’ai eu envie que mes manuscrits de Fantastique deviennent des ouvrages publiés. Je connaissais le travail entrepris par « Rivière Blanche » et je les ai proposés à Philippe Ward. Il les a aimés tous les deux, mais m’a expliqué le problème que tu évoques dans ta question : « Rivière Blanche » est un petit éditeur, ces deux romans méritent un éditeur plus important. Donc j’ai cherché… Pour « Le Dieu vampire », le manuscrit a plu à un éditeur qui ne fait pourtant pas ce genre de littérature ; il a fait une exception parce que c’était un peu un « coup de foudre ». Pour « Le Maître des ombres », je l’avais proposé à Bragelonne, avec un avis des plus positifs de Benoit Domis qui s’occupait du Fantastique, mais je n’ai plus eu de nouvelles. Benoit n’était pas décideur. Les lecteurs donnent un avis, l’éditeur décide ; le mystère,

c’est souvent pourquoi et comment… Bref, j’en ai eu marre et je suis revenu vers Philippe Ward, et sans regret. Je dois dire que j’apprécie ses qualités humaines et notamment son honnêteté intellectuelle. Dire « le roman me plaît, mais il est trop bien pour moi… » ce n’est pas si courant. Du coup, une fois que nous nous sommes mis d’accord, j’ai été sollicité par un autre éditeur plus important qui voulait savoir si j’avais des inédits en Fantastique et je lui ai dit non. Je n’étais pas lié contractuellement et je suis sûr que Philippe ne m’en aurait pas voulu, étant donné son discours depuis le début si j’avais « changé de cap », mais j’estimais que je lui étais redevable. J’ai vécu toutes sortes d’expériences avec le milieu de l’édition, des bonnes et surtout des moins bonnes. Alors si ma route croise celle de personnes qui possèdent ces fameuses qualités humaines que j’aime tant et qui sont si rares, j’aime autant travailler avec elles.

*Question spoiler * La fin de l’histoire porte en elle un certain espoir... Mais un espoir qui passe par la fin de notre civilisation... Pessimiste Jean-Christophe Chaumette ?

Je crois qu’on peut dire ça. Je répète toujours que la force des pessimistes est de n’avoir que des bonnes surprises. Mais j’avoue que plusieurs de mes livres tournent autour de la fin du monde et mes enfants se moquent régulièrement de moi à ce propos. Plus sérieusement, je suis un passionné d’Histoire et quiconque s’intéresse à l’Histoire sait que chaque civilisation nait, grandit et meurt. Et de ces cendres émerge quelque chose de nouveau.

Tu penses que l’avenir est à « plus de religion », « plus de guerres », « plus de médias » et « plus de manipulation » ? (c’est un peu la version non spoiler de la question d’avant, je te l’accorde).

Plus de tout cela, malheureusement… La religion prend une place grandissante dans notre siècle. Moi j’ai été ado dans les « seventies », et ceux qui se souviennent de ce qu’était cette époque doivent être effarés par la régression, ce que je ressens moi comme une régression, dans certains domaines. Je crois que les jeunes du 21ème siècle doivent être bien mis en garde. Certaines choses ne sont pas acquises définitivement. Le droit à l’avortement, les droits des

femmes d’une manière générale, la primauté de la Science sur « les vérités révélées » (Darwinisme versus créationnisme par exemple) sont ou seront menacés par les systèmes religieux.

Plus de médias, c’est indéniable, avec la bouteille à l’encre Internet, notre moderne langue d’Esope, qui va avec plus de manipulation forcément. Et aussi plus de flicage, plus de surveillance. Une évolution effarante là encore pour un « fils des seventies ». J’ai lu quelque part que Facebook avait réalisé une sorte de rêve de dictateur, à la nuance prêt que les gens étaient volontaires pour être fichés. Gare au monde virtuel dans lequel nous épanchons nos sentiments, exprimons tout sans retenue, laissons la trace de nos paiements et de nos passages. L’époque actuelle est une époque « d’exhibitionnisme frénétique ». On se filme, on s’enregistre, on diffuse cela, on veut être vu et entendu de la terre entière (cf « Le Maître des ombres » et le flux d’images généré par l’armée des Etats Sanctifiés et Unis d’Amérique), on est prêt à se ridiculiser devant une caméra de télévision parce qu’être vu sur des millions d’écrans semble avoir plus d’importance que tout. J’espère qu’un jour sera redécouverte la valeur de la pudeur et de l’intimité ; l’importance du jardin secret.

Quant à plus de guerres, j’espère me tromper. Mais je suis persuadé que nous entrons dans une cr ise économique, environnementale, démographique, et l’histoire de l’humanité démontre que les crises se résolvent en général dans la guerre. Mais je suis tellement pessimiste que je peux espérer de bonnes surprises.

Tes projets ?

Un roman qui va sortir en 2013 chez Voye’l, « Gospel ». Très différent de ce que j’ai écrit jusqu’ici. Mais là ce n’est plus vraiment un projet, c’est déjà écrit.

Pour le futur j’ai des envies qui sortent du cadre dans lequel je me suis toujours tenu. Scénario de BD, de film, de série. J’ai des projets dans chacun de ces domaines. Plus difficile à concrétiser que l’édition d’un roman, mais qui vivra verra.

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Propos receuillis par Christophe Corhouts

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Page 37: Le Suricate - Septième numéro

Étalée sur trois jours, la dixième Foire du livre belge se tenait les 16, 17 et 18 novembre au centre culturel d’Uccle. Au programme, des auteurs belges édités en Belgique. Rendez-vous des amoureux et amateurs du livre sous toutes ses formes, cette foire est l’occasion de rencontrer les auteurs et d’échanger des idées, sans parler d’obtenir des dédicaces. C’est aussi la possibilité d’assister à des interviews et des débats axés sur la littérature et les problèmes de société. Évidemment, il ne faut pas oublier les éditeurs belges qui proposent un panel très diversifié de la production nationale. En y regardant de plus près, on constate qu’il existe des livres belges de qualité qui n’ont rien à envier à la production hexagonale. Ils ont une touche propre à la Belgique, qui les distingue très nettement de la production française. C ’es t la même d i f fé rence qu i caractérise le cinéma belge du cinéma français. Les f i lms, acteurs et réalisateurs belges se sont distingués ces dernières années et on espère

évidemment que le même phénomène se reproduise dans le domaine du livre. En dehors de cela, la différence majeure tient dans le volume édité et le circuit de distribution en Belgique qui est beaucoup plus restreint que celui de la France.

On le constate, la Belgique est loin d’être en reste et cette foire est la vitrine idéale pour le prouver. La Foire en est à sa dixième édition et au vu du nombre d’invités, on devine qu’elle continuera sur sa lancée les années prochaines. Cette année-ci, on a eu droit à Jean-Baptiste Baronian, Olivier Grenson, Evelyne Guzy, Véronique Biefnot, Richard Miller, Pierre Kroll, Jean Van Hamme, Yves Sente pour n’en citer que quelques-uns. Près d’une cinquantaine d’auteurs auront été des acteurs de cette dixième Foire du livre belge. On retrouve les éditeurs suivants : Espace de libertés, Chloé des Lys, Meo, Le Cri, Luc Pire, Le Lombard, Racine, Onlit, La Renaissance du livre, Dupuis.

Cette foire était aussi l’occasion d’assister au plateau du magazine Marginales qui était consacré au « Dérèglement de compte » et aux futurs textes écrits par Véronique Biefnot, Bernard Dan, Luc Dellisse, Evelyne Gusy, Corinne Hoex, Marc Lobet, Richard Miller, Jean-Marc Rigaux. Plateau animé par Jacques De Decker et Jean Jauniaux.

La BD était également à l’honneur lors de cette foire du livre, avec le dernier Blake et Mortimer et la présence de Jean Van Hamme et Yves Sente. Un stand consacré à la BD présentait les dernières productions belges.

Voilà une dixième édition qui en appelle d’autres dans le futur, une occasion pour chacun d’entre nous de découvrir toute la diversité de nos auteurs et éditeurs belges.

Marc Van Buggenhout

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La dixième foire du livre belge

27 novembre 2012

Page 38: Le Suricate - Septième numéro

Nous parlions, il y a peu, d’Alix vieilli et devenu sénateur dans «Alix Senator». Pour «L’ombre de Sarapis», c’est la suite des Alix traditionnels, fidèle au héros créé par Jacques Martin.

Au scénario nous retrouvons François Corteggiani, déjà connu pour une autre reprise de héros célèbre avec «La jeunesse de Blueberry» et Marco Venanzi, pas tout à fait un inconnu dans le monde de la BD (Masquerouge, Les Templiers, ...) au dessin.

«L’Ombre de Sarapis» évoque la disparition de Césarion, l’enfant de César et Cléopatre qui a disparu. Alix et le fidèle Enak sont envoyés en mission à Alexandrie. Arrivés sur place après avoir réussi à éviter des espions, ils arrivent chez Cléopatre peut-être pas si innocente que ça dans les tourment qui lui arrivent.

Contrairement à «Alix Senator» qui se voulait novateur et radicalement changeant, nous parcourons, ici, un Alix très fidèle à

l’original, que se soit dans le dessin ou dans le scénario.

Malgré tout, nous surprenons quelques nouveautés assez osées comme l’évocation du sexe et des sentiments de nos héros. Les seins sont nus, Alix aurait eu une aventure d’une nuit avec Cléopatre, Enak tombe amoureux d’une courtisane, etc.

Que se soit un Alix vieilli ou un Alix immortel, cette année le fan du gallo-romain seront servis car les deux ouvrages sont de qualités et se laissent aisément dévorer. «L’Ombre de Sarapis» a le malheur d’être moins palpitant et original mais reste tout de même une très bonne aventure d’Alix.

Bon voyage !

Disponible depuis le 14 novembre

Loïc Smars

Les aventures d’Alix : L’Ombre de Sarapis

de François Corteggiani et Marco Venanzi

Editions Casterman, 48 p.

Conçu par Benoît Sokal pour le dixième anniversaire de la collection «Ecritures» de Casterman, «La villa sur la falaise» est un livre anniversaire regroupant plusieurs auteurs à succès de la collection autour d’un pitch de base imaginé par Sokal lui-même.

En bord de mer, une tempête d’une rare violence a littéralement coupé en deux, une villa située sur un promontoire rocheux, exposant soudain à la curiosité de tous l’intimité d’une ancienne demeure familiale. La fille héritière, Charlotte Dorval, débarque avec son enfant pour régler les affaires courantes.Entre souvenirs et volonté d’en finir vite ...

La première partie est de Cati Baur. Elle imagine une variante assez simple d’une femme moderne déconnectée de cette vie côtière à la fin résolument optimiste.

Nate Powell, américain que l’on a découvert il y a peu dans «Le silence de nos amis» sur la lutte des droits civiques des afro-américains nous livre une oeuvre viscéralement paranoïaque, proche des thrillers américains.

La britannique, Hannah Berry («Britten et Associé») crée un récit où Charlotte Derval va se perdre totalement dans l’absurdité de l’administration et ses travers.

Saulne, français autodidacte influencé par le Japon accouche de quelques pages très informatiques et l’amour impossible de deux amis d’enfance qui n’ont malheureusement pas les mêmes

vues sur leur avenir.

Isavel Kreitz, bdéiste allemande parle des séparations entre la fille devenue citadine et un peuple ancré dans son monde qu’elle a renié depuis longtemps.

Davide Reviati, né à Ravenne, exploite lui aussi l’option «amour impossible» entre celle qui est partie et l’amant resté au bercail.

Le japonais Taniguchi délaisse l’histoire originale pour s’intéresser à l’histoire d’une famille autour d’un phare difficile d’accès.

Fred Bernard, au dessin, de prime abord, au dessin difficile d’accès fourni une histoire sans dialogues sur une jeune femme qui a les souvenirs douloureux.

Gabrielle Piquet, remarqué dernièrement dans «Arnold et Rose», parle de la folie et des vieilles affaires de famille.

Takahama raconte lui les retrouvailles de Charlotte et son demi-frère après la disparition de leur père.

Encore une fois, nous voyons le grand défaut des collectifs est le manque de régularité dans la qualité des historiettes. L’ouvrage a de quoi, pourtant, nous faire passer un bon moment.

Loïc Smars

La Villa sur la Falaise

Collectif(Cati Baur, Fred Bernard, Hanna

Berry, Isabel Kreitz, Gabrielle Piquet, Nate Powell, Davide Reviati, Sylvain Saulne, Kan Takahama et Jirô Taniguchi)

Editions Casterman, 208 p.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Page 39: Le Suricate - Septième numéro

Tardi, le célèbre auteur de bande dessinée tel Adèle Blanc-Sec ne sort pas en cette fin d’année un nouveau tome de sa populaire héroïne. Il surprend tout le monde en finissant une énorme BD sur la Seconde Guerre Mondiale et plus précisément sur l’histoire de son père.

René Tardi, engagé en 1935 dans l’armée sentant un vent de guerre approché, est affecté à l’artillerie et vit la débacle française à l’intérieur de son char (on ne dit pas un tank !), seul avec son mécano. Affligé du manque de réalisme de ses officiers, il essaye de faire son boulot tant bien que mal avant de se faire capturer par l’armée allemande. Il est ensuite envoyé de convoi de train en camp de transit avant d'atterrir au Stalag IIB au fin fond de la Pologne. S’en suit les cinq longues années de quotidien d’un camp de prisonniers et les privations subies.

«Moi, René Tardi, prisonnier de guerre au Stalag IIB», c’est tout d’abord une affaire de famille. Tout a commencé dans les années 80 avant la mort de son père ou le jeune

Jacques demande à son vieux de consigner par écrit tous ses souvenirs sur trois petits cahiers d’écolier. A la mort de René Tardi, l’auteur passe à autre chose jusqu’à aujourd’hui où le besoin de raconter cette histoire se fait sentir. Avec sa femme et son fils à la documentation et sa fille aux couleurs (primées à Angoulème), l’affaire reste familiale.

Après un long travail, le bébé est en fin de gestation et Tardi accouche d’un impressionnant ouvrage de 200 pages presque intégralement en noir et blanc avec tous les souvenirs de son père. Mais le fiston ne recule pas devant le parti pris et se met en scène, enfant, aux côté des pérégrinations de son père, n’hésitant pas à le critiquer et donner son avis.

L’histoire suit le parcours quotidien et peu palpitant d’un prisonnier de guerre. Ce qui pourtant n’enlève rien au côté passionnant de l’histoire et l’on se met à la place du jeune garçon et l’on est totalement impliqué dans l’histoire.

On retrouve tout, de la faim, terrible à la radio bricolée en secret pour capter la BBC jusqu’au comportement des gardiens, parfois sympathiques, souvent cruels.

Le dessin est documenté, le noir et blanc magnifique, l’histoire instructive et la sincérité de Jacques Tardi est communicative. Empaquetez vos affaires, montez dans le char (on ne dit pas tank !) et partez à la guerre dans le dernier hommage touchant d’un fils à son père.

Une question nous reste sur les lèvres, la dernière page tournée : quand arrive la suite ?

Editions Casterman

Disponible depuis le 21/11/12

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La critique

27 novembre 2012

Loïc Smars

Page 40: Le Suricate - Septième numéro

Nathalie Minne, auteure parisienne du Petit Voleur des mots, est une jeune illustratrice découverte récemment chez Casterman. Elle vient de réaliser aux éditions Casterman un livre pour enfant « Le petit garçon de la Forêt », destiné aux enfants dès l’âge de 5 ans. Dans « Le Petit garçon de la Forêt », elle raconte l’histoire d’un enfant qui vit dans la forêt entouré d’animaux. Au fil des saisons, un ami va lui rendre visite et une amitié forte va naitre. Un jour d’été, il décidera de quitter les lieux pour partir vivre en ville avec son ami. Il devra dire adieu à la forêt et à tous ses animaux. L’histoire n’est pas prenante et laisse le lecteur sur un goût de trop peu. Le livre se lit rapidement et les textes ne sont pas forcément très compréhensibles

pour les jeunes enfants. Son travail d’écriture est recherché mais trop élaboré. Par contre, les illustrations sont superbement t ravai l lées et e l les amènent à l’observation. Chaque page est unique et a son univers singulier. Nathalie Minne réalise un beau travail.Son livre est plus porté sur le visuel que sur l’histoire en elle-même et il mérite d'être découvert.

Stellina Huvenne

Editions Casterman

Le petit garçon de la forêt

de Nathalie Minne

Editions Casterman, 32 p.

« La Peste des Innocents : tel est le nom du fléau qui tua la majorité de la population masculine du monde de Clothilde. Mercenaire amnésique et en quête de gloire, elle combat sans relâche Gunhild, une femme pirate assoiffée de chaos !

Lors d’un voyage diplomatique avec un jeune ambassadeur du nom de Raphaël, Clothilde sera embarquée bien malgré elle dans un complot où le meurtre et les faux semblants sont rois…

Changement de registre pour Kara ! Après s’être frotté aux essais philosophiques et mystiques, au style graphique mêlant franco-belge et manga, Kara verse cette fois dans le grand spectacle… pour le grand public.

Héroic fantasy et Steam punk se rejoignent enfin dans une aventure au style manga assumé et sensuel, dans un cocktail détonant de cape et d’épée, de thriller politique et d’explosions dantesques pour un récit épique 100% action. »

Une Bd qui a le mérite d’être reconnue ! Fini les filles aux mensurations de rêve et aux tenues légères juste présentes pour mettre en appétit un public masculin ne tenant plus en place face aux aventures de ces demoiselles en détresse.

Les personnages sont inspirés des dessins de mangas, sont toujours aussi sexy, mais surtout ce sont des battantes.

A travers un univers de pirates, ce sont des amazones prêtes à tout qui sont mises en avant. On assiste à de vrais combats, à une réelle « rivalité » entre Gunhild et Clothilde. Bien que Gunhild fasse tout pour écarter Clothilde, cette dernière compte bien faire régner la paix. Mais, il semblerait que cette petite guerre entre les deux femmes soit plus profonde que Clothilde ne le pense.

Tout au long de la BD, le lecteur est transporté par l’univers ainsi que les majestueux vaisseaux pirates, mais aussi par la découverte d’éléments qui, pièce par pièce, vont révéler une vérité oubliée qui est la conséquence de tous ces conflits.

Une histoire à recommander aux fans des dessins mangas, mais aussi aux aventur iers av ides de nouvel les découvertes !

Nele De Smedt

Editions Soleil

La guerrière innocente : T1 Ma meilleure ennemie

de Kara

Editions Soleil, 48 p.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Page 41: Le Suricate - Septième numéro

Qui ne connait pas Marilyn ?? Celle qui fut l’inoubliable interprète de films comme « Les hommes préfèrent les blondes », « Sept ans de réflexion » ou encore « Certains l’aiment chaud ». Elle acquiert un statut de star du cinéma mondial. Mais en dépit de cette réussite professionnelle, sa vie privée est un véritable échec. On croit tout connaître d’elle, ses sourires, ses poses, ses clins d’œil. Même sa vie privée a été déballée à tout va… Elle meurt à seulement 36 ans dans des conditions encore totalement mystérieuses, malgré plusieurs tentatives d’explications.

Dans ce livre qui présente les seuls écrits intimes connus de Marilyn Monroe : 104 fac-similés de manuscrits, accompagnés de leur traduction en français. Les textes sont assortis de 33 photos en couleur et en noir et blanc, dont certaines inédites.

On y retrouve un visage inédit de la star. Car 50 ans après la mort de Marilyn Monroe, on peut encore apprendre sur la femme qu’elle était. C’est ce que nous révèle de livre qui rassemble poèmes,

extraits de carnets intimes et lettres, presque tous inédits. Marilyn s’y montre fragile, solitaire et désespérément lucide, bien loin de ce que l’on imagine d’elle.

Un livre plein de sensibilité et de désespoir par celle qui s’affiche pourtant rayonnante. Un livre fort et puissant…

Marc Bailly

Editions SeuilMarilyn Monroe : Fragments

de Marilyn Monroe

Editions Seuil, 256 p.

Pour ceux qui s’intéressent au football, René Taelman est certainement une personnalité. Pour moi, il m’était inconnu. Ce qui ne m’empêche pas d’être curieux de connaitre son parcours et de lire ce qu’il a à dire sur le foot.Dans son livre, cet entraineur de 66 ans nous parle de son parcours qui l’a mené en Roumanie, au Congo, au Maroc, en Algérie, au Burkina Faso, au Koweït, en Libye, mais aussi en Belgique. Il y aborde des thèmes inusités pour le grand public (la corruption, le dopage, les pressions politiques, la sorcellerie, ingérence politique dans la composition des équipes nationales, matchs truqués, intimidations, arbitres achetés, etc.)Ce livre est le récit intégral depuis ses débuts. Il a entraîné 17 clubs dans 12 pays différents.Avec une verve digne d’un journaliste, René Taelman y dévoile les dessous des fonctionnements des clubs dans lesquels il a sévi. Il partage également ses analyses sociopolitiques.Intransigeant avec lui-même, ainsi qu’avec ses joueurs et les dirigeants, son travail n’a jamais été de tout repos. «Je n’ai donc jamais accepté l’intrusion intempestive d’un dirigeant dans le cadre strict de mon travail, je voulais être le

seul maître de mon vestiaire et exercer mon métier comme je l’entendais. Il ne faut pas croire non plus que j’aie accepté n’importe quelle proposition. Je suis toujours allé là où j’étais sûr d’être payé. Cela dit, des pressions, j’en ai connues.»

René Taelman est un T1 atypique. Il a déjà écrit huit ouvrages techniques et pédagogiques qui, en 30 ans, et en tout, ont été vendus à plus de 120.000 exemplaires. Ses livres se sont écoulés dans les pays francophones et hispanophones.. Un livre qui plaira aux amateurs de foot comme à ceux qui veulent découvrir la face cachée du football.

Marc Bailly

Editions Jourdan

Les aventures exotiques d’un entraîneur de foot

de René Taelman

Editions Jourdan, 48 p.

4127 novembre 2012

Page 42: Le Suricate - Septième numéro

Arnold Schwarzenegger : Total Recall

« Quel est ton livre de chevet ? » me demandait-on récemment, « Total Recall » d’Arnold Schwarzenegger, ai-je répondu provoquant le sourire chez mon interlocuteur. Et oui, lire la biographie d’Arnold Schwarzenegger peut prêter à sourire car, à l’instar d’un certain Sylvester Stallone, l’homme est avant tout connu pour sa plastique et ses films d’action plutôt que pour son intelligence. Pourtant, la vie de cette star du cinéma hollywoodien n’a rien de banal. Comment fait-on pour devenir star de cinéma puis gouverneur de la Californie (l’Etat le plus peuplé des Etats-Unis) lorsque l’on est fils de soldat né dans un village du fin fond de l’Autriche pendant la Seconde Guerre mondiale ? Voilà la question que l’on doit plutôt se poser en regardant la couverture de cette autobiographie intitulée Total Recall, en référence au film de science-fiction où l’acteur incarnait le rôle principal. Ses mémoires retracent sa vie mais également ses doutes et ses choix. Une autobiographie qui se lit comme un roman.

Dans ce bouquin très épais de 657 pages, Arnold nous raconte évidemment sa vie mais tourne son écriture vers la drôlerie et la légèreté. En effet, au fil de la narration, on sent que l’ancien Mister Univers a voulu faire une

histoire remplie d’informations sur son parcours mais a souhaité également faire un parallèle entre la perception qu’il avait de la vie à l’époque et ce qu’il en a retiré aujourd’hui. Cette biographie est d’un intérêt extraordinaire par la vie complètement ascendante d’Arnold.

Dès les premières pages, le décor est planté. On sent dans sa plume toute la complexité de sa relation avec son père, un ancien soldat devenu alcoolique et souhaitant faire d’Arnold un automate parmi tant d’autres. Comme il le dit lui-même, c’était cela la culture germanique de l’époque : casser l’individu au profit du groupe. Ce conformisme, notre protagoniste n’en avait cure et cela le poursuivra tout au long de sa vie qui l’emmènera jusqu’au sommet du pouvoir. Pour autant, l’histoire ne romance que légèrement la vraie vie de l’acteur, rien ne sonne faux ou exagéré, parfois même le

contraire. En outre, au lieu de se vanter de sa réussite, le natif de Thal signe également une partie rédemptionelle dans son livre. De surcroit, le chapitre intitulé « Le S e c r e t » p e r m e t à A r n o l d Schwarzenegger de revenir sur une période difficile de sa vie mais surtout de celle de sa femme, son infidélité. Cette femme qui, malgré cela, continuera à le soutenir.

Au bilan, ce récit autobiographique nous a séduit par la sincérité d’un acteur que l’on ne connaissait pas en dehors de ses films. Même si la prose est simpliste, on se contente de suivre avec grand intérêt une histoire aussi folle que magnifique, aussi cruelle que majestueuse, bref, on suit une vie exceptionnelle.

Editions Presse de la Cité

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La critique

« Dès les premières pages, le décor est planté. On sent la complexité de sa relation avec son père, ancien soldat alcoolique souhait de faire d’Arnold un automate parmi tant d’autres. »

Matthieu Matthys

D’Arnold Schwarzenegger

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Page 43: Le Suricate - Septième numéro

Robocalypse

Les robots sont omniprésents que ce soit pour assister la conduite, garder les enfants ou autre, ils sont devenus indispensables à l’homme dans la vie quotidienne. Les progrès faits sont énormes mais le robot ne fait que répondre à des programmes… Jusqu’à ce qu’un savant, à force d’acharnement, réussisse à le rendre intelligent avec pour conséquence immédiat un dérapage : le robot décide d’éradiquer l’espèce humaine qui arrive à son sens à la fin de son destin.

Découpé en cinq parties : « Incidents isolés », « L’Heure Zéro », « Survie », « Éveil », « Représailles », le roman narre chronologiquement les événements depuis les signes avant-coureurs jusqu’à la reprise en main de la situation par les humains. Les robots qui, selon les lois de la robotique, doivent obéir aux humains et leur être favorable, font preuve d’initiative et se rebellent jusqu’à tuer les humains. « Vous autres humains êtes des machines biologiques conçues pour créer d’autres outils intelligents. Vous avez atteint l’apogée de votre évolution. Toute l’existence de vos ancêtres, l’apparition et la chute de vos civilisations, chaque bébé rose et joufflu – tout vous a conduits ici, maintenant, en ce jour où vous avez accompli le destin de l’humanité en

créant son successeur. Votre espèce vient d’expirer. Vous avez terminé ce pour quoi vous étiez conçus. » La narration est faite par plusieurs personnages et de manières d i f f é r e n t e s : t é m o i g n a g e s , enregistrements vidéo et audio, etc.

Les différentes parties de narration se chevauchent et réapparaissent au fil du récit. C’est presque un recueil de nouvelles avec des personnages principaux récurrents et une construction chronologique.

L’auteur est diplômé en robotique et intelligence artificielle, mais son écriture ne nécessite aucunement des connaissances dans ces domaines. La narration est mise clairement sur l’action.

Ce roman va être adapté au cinéma par Steven Spielberg, rien que ça…

Pourtant ce livre n’est pas vraiment neuf et ne m’a pas emballé outre mesure. On suit cette prise de pouvoir par les robots et immédiatement la résistance humaine les combat. Malgré quelques belles scènes, on comprend immédiatement où l’auteur veut en venir. Il est impossible de ne pas faire le lien avec d’autres films ou livres plus anciens, dont le dernier en date est le génial Terminator bien plus sombre encore.

Un roman sur la guerre robotique, assez divertissant, efficace, mais qui m’a laissé un peu sur ma faim. Cela se lite vite et bien.

Editions Fleuve Noir

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La critique

« L’auteur est diplômé en robot ique et intel l igence artificielle, mais son écriture ne nécessite aucunement de conna i ssances dans ce domaine. La narration est mise clairement sur l’action. » Marc Bailly

De Daniel H. Wilson

27 novembre 2012

© Andrea Brizzi

Page 44: Le Suricate - Septième numéro

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Agenda

CinémaLes sorties (Belgique)28 novembre 2012

Les cinq légendes de William Joyce (Animation)Premium rush de David Koepp (Action)Silent Hill : revelation 3D de Michael Basset (Horreur)Populaire de Regis Roinsard (Comédie)Mauvaise fille de Patrick Mille (Drame)La grammaire intérieure d’Hadikduk HaPnimi (Drame)

5 décembre 2012Killing them softly d’Andrew Dominik (Thriller)Anna Karenina de Joe Wright (Romance)End of Watch de David Ayer (Action)Kyss Mig d’Alexandra Keining (Romance)Mais qui a re-tué Pamela Rose de Kad et Olivier (Comédie)For Ellen de So Yong Kim (Drame)

ScènesLes piècesBruxelles et environs

Il n’y a pas de sot métier au TTO du 05/11/12 au 03/12/12On vit un peu mais on meurt longtemps jusqu’au 08/12/12Le Brasier au théâtre des Galeries du 24/10/12 au 18/11/12Le maître des illusions du 22/11/12 au 22/12/12La Revue 2013 au théâtre des Galeries du 05/12/12 au 03/02/13Les gens n’osent plus sortir le soir à l’Atelier Jean Vilar (LLN) du 27/11/12 au 30/11/12Moi je crois pas à l’Atelier Jean Vilar (LLN) du 04/12/12 au 08/12/12Jean et Béatrice au théâtre Blocry (LLN) du 29/11/12 au 12/12/12Soeur, je ne sais pas quoi frère au Varia le 27/11/12La petite fille à l’Océan Nord du 26/11/12 au 05/12/12Occident (rideau de Bruxelles) au Marni du 04/12/12 au 15/12/12Cendrillon au théâtre National du 27/11/12 au 31/12/12

Fée un voeu au TTO du 08/12/12 au 06/01/13Vivons heureux en attendant la mort au théâtre des Riches Claires du 04/12/12 au 22/12/12La vie c’est comme un arbre au TTO du 01/11/12 au 01/12/12

Paris

Les Menteurs (Chevalier et Laspalès) au théâtre de la Porte Saint-Martin à partir du 07/09/2012Volpone ou le Renard au théâtre de la Madeleine à partir du 12/09/2012Doris Darling au théâtre du «petit» Saint-Martin à partir du 14/09/2012

Michaël Gregorio au Bataclan du 04/10/12 au 05/01/13

Good Mourning au théâtre National du 27/11/12 au 22/12/12

Les invisibles de Sébastien Lifshitz (Documentaire)

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Ty Segall (chanson) à l’Atelier 210 le 30/11/12Odezebben Veence Hanao (danse) à l’Atelier 210 le 08/12/12Charles Berling au théâtre 140 du 30/11/12 au 01/12/12Pénombre (danse) au théâtre 140 du 04/12/12 au 06/12/12