le financement de la politique de santé de l'allemagne - enjeux et perspectives

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  • 8/8/2019 Le financement de la politique de sant de l'Allemagne - enjeux et perspectives

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    Le financement de la politiquede sant de lAllemagne

    Enjeux et perspectives

    ______________________________________________________________________

    Rolf Schmucker

    Aot 2010

    Comit dtudes des relations franco-allemandes

    NNoottee dduu CCeerrffaa 7777

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    LIfri est, en France, le principal centre indpendant de recherche,dinformation et de dbat sur les grandes questions internationales. Cr en1979 par Thierry de Montbrial, lIfri est une association reconnue dutilitpublique (loi de 1901).

    Il nest soumis aucune tutelle administrative, dfinit librement ses activits etpublie rgulirement ses travaux.

    LIfri associe, au travers de ses tudes et de ses dbats, dans une dmarcheinterdisciplinaire, dcideurs politiques et experts lchelle internationale.

    Avec son antenne de Bruxelles (Ifri-Bruxelles), lIfri simpose comme un desrares think tanksfranais se positionner au cur mme du dbat europen.

    Les opinions exprimes dans ce textenengagent que la responsabilit de lauteur.

    Cette Note du Cerfafait lobjet dun soutien de la Fondation Boschdans le cadre du Dialogue davenir franco-allemand .

    Directeurs de collection : Louis-Marie Clouet, Hans Stark

    Traduction : Anne-Cline Cornet

    ISBN : 978-2-86592-767-8 Ifri 2010 Tous droits rservs

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    Notes du Cerfa

    Publie depuis 2003 un rythme mensuel, cette collection estconsacre lanalyse de lvolution politique, conomique et socialede lAllemagne contemporaine : politique trangre, politique int-rieure, politique conomique et questions de socit. Les Notes duCerfa sont des textes concis, caractre scientifique et de nature policy oriented . Envoyes gratuitement plus de 2 000 abonns, linstar des Visions franco-allemandes, les Notes du Cerfa sont

    accessibles sur le site Internet du Cerfa, o elles peuvent treconsultes et tlcharges gratuitement.

    Dernires publications du Cerfa

    Pascal Kauffmann, Henrik Uterwedde, La France etlAllemagne face la crise de leuro : la recherche de laconvergence perdue , Visions franco-allemandes, n 17, juillet 2010

    Markus Kaim, Lengagement militaire allemand en

    Afghanistan : conditions, valuation, perspectives , Note du Cerfa,n 76, juillet 2010

    Brigitte Lestrade, Les rformes sociales Hartz IV lheurede la rigueur en Allemagne , Note du Cerfa, n 75, juin 2010

    Christoph Egle, Lavenir des Verts allemands : vers un particharnire ? , Note du Cerfa, n 74, mai 2010

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    Lauteur

    Rolf Schmucker, n en 1969, a tudi les sciences politiques, lessciences juridiques et lhistoire luniversit Philipps de Marbourg. Il ya soutenu une thse en sciences politiques. De 2001 2010, il a tassistant de recherche lInstitut de sociologie mdicale deluniversit Goethe de Francfort-sur-le-Main.

    Depuis lors, ses recherches portent sur la politique et lessystmes de sant, et plus particulirement sur les mutations du

    pilotage des politiques de sant, la comparaison entre systmes desant, lintgration europenne, la transformation de ltatprovidence.

    Depuis avril 2010, Rolf Schmucker est assistant de rechercheauprs du Dpartement 1 de la Facult de Sciences de la Sant deluniversit de Bielefeld.

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    Rsum

    Laugmentation des dpenses de la Gesetzliche Kranken-versicherung(GKV), le systme lgal dassurance maladie, mais plusencore la hausse des taux de cotisation et donc de la chargeassume par les employeurs et les assurs, constituent depuislongtemps des thmes vivement dbattus de la politique de santallemande. Laugmentation des dpenses de la GKV, mais plusencore la hausse des taux de cotisation et donc de la charge

    assume par les employeurs et les assurs, constituent depuislongtemps des thmes vivement dbattus de la politique de santallemande.

    Depuis le milieu des annes 1970, tous les gouvernementsfdraux ont essay de freiner la hausse des dpenses de la GKV.Les diffrentes mesures prises au nom de cette politique de matrisedes cots nont cependant pas permis dempcher la poursuite de lahausse des cotisations la GKV. Si les efforts politiques se sontlongtemps concentrs sur la rduction des dpenses, on discutedepuis quelques annes de changements dans le financement dusystme.

    Sous les mots cls de Brgerversicherung ( assurancecitoyenne ) et de Kopfprmie ( forfait par tte ) sopposentdeux modles qui ont tous les deux lambition dapporter de vasteschangements au financement de la sant. Le gouvernement fdrallibral-conservateur au pouvoir depuis octobre 2008 avait annonc,ds sa prise de fonctions, vouloir financer la GKV par le forfait partte . Ce projet a dabord chou, notamment en raison de diver-gences dopinions au sein de la coalition. Un compromis a alors ttrouv, qui ne signifie pas un changement immdiat de systme, maislabandon progressif des principes traditionnels du modle bis-marckien.

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    Sommaire

    INTRODUCTION ................................................................................... 5

    CARACTERISTIQUES FONDAMENTALES

    DU SYSTEME DE SANTE ALLEMAND ...................................................... 7

    LA POLITIQUE DE REDUCTION DES COUTS

    DEPUIS LE MILIEU DES ANNEES 1970 .................................................... 9

    ASSURANCE CITOYENNE OU FORFAIT PAR TETE ? ................... 11

    LE COMPROMIS DE 2007 : LA GKV-WSG .......................................... 13

    LE CONTEXTE POLITIQUE

    APRES LES ELECTIONS LEGISLATIVES DE 2009 ................................... 15

    2011LE PROJET DE REFORME DU FINANCEMENT ............................. 17

    PERSPECTIVES ................................................................................. 20

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    Introduction

    En 2008, les dpenses de sant slevaient en Allemagne 263,2 milliards deuros, soit 10,5 pour cent du produit intrieur brut(PIB) du pays. Au niveau mondial, lAllemagne figure ainsi parmi lespays qui dpensent proportionnellement le plus pour la sant. La plusgrande partie du financement du systme de sant (160,8 M 1) estassure par la Gesetzliche Krankenversicherung (GKV), le systmelgal dassurance maladie2. Laugmentation des dpenses de la

    GKV, mais plus encore la hausse des taux de cotisation et donc de lacharge assume par les employeurs et les assurs, constituentdepuis longtemps des thmes vivement dbattus de la politique desant allemande.

    Depuis le milieu des annes 1970, tous les gouvernementsfdraux ont essay de freiner la hausse des dpenses de la GKV.Les diffrentes mesures prises au nom de cette politique de matrisedes cots nont cependant pas permis dempcher la poursuite de lahausse des cotisations la GKV. Si les efforts politiques se sontlongtemps concentrs sur la rduction des dpenses, on discutedepuis quelques annes de changements dans le financement dusystme.

    Sous les mots-clefs de Brgerversicherung ( assurancecitoyenne ) et de Kopfprmie ( forfait par tte ) sopposentdeux modles qui ont tous les deux lambition dapporter de vasteschangements au financement de la sant. Le gouvernement fdrallibral-conservateur au pouvoir depuis octobre 2008 avait annonc,ds sa prise de fonctions, vouloir financer la GKV par le forfait partte . Ce projet a dabord chou, notamment en raison dedivergences dopinions au sein de la coalition. Un compromis a alorst trouv, qui ne signifie pas un changement immdiat de systme,mais labandon progressif des principes traditionnels du modle

    bismarckien.Cet article retrace les dbats qui ont eu lieu autour des

    rformes de la politique de sant en Allemagne. Pour une meilleurecomprhension, il esquisse dans un premier temps quelques

    1 Statistisches Bundesamt: www.destatis.de (31.05.2010)2 NdT : Fournie par plus de 250 caisses rgionales, la GKV couvre prs de 90 % dela population totale. Un systme dassurances prives (PKV, Private Krankenv -ersicherung) facultatif, dispens par une cinquantaine de caisses prives, est ouverten parallle aux personnes revenu lev et couvre prs de 10 % de la population.

    http://www.destatis.de/http://www.destatis.de/
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    caractristiques fondamentales du systme allemand, avant dexa-miner le contexte actuel de la discussion actuelle et les futurschangements dans le financement de la GKV.

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    Caractristiques fondamentalesdu systme de sant allemand

    Depuis la mise en place de la Gesetzliche Krankenversicherung(GKV), sous le chancelier dEmpire Otto von Bismarck en 1883, lesystme allemand passe pour tre le prototype dun systme descurit sociale. Employeurs et salaris contribuent de manireparitaire au financement de lassurance maladie. Destine lorigine

    aux seuls ouvriers, cette rforme a t tendue des groupes depopulation toujours plus grands au cours des dcennies suivantes.Louverture des employs, des retraits, des agriculteurs et destudiants, ainsi qu des parents non actifs, ont fait de la GKV, jusquau milieu des annes 1970, une institution qui fournissaitlassurance sant plus de 90 % de la population.

    Le systme allemand prsente cependant, aujourdhui encore,une particularit qui le distingue des autres systmes de scuritsociale en Europe. En effet, il existe, ct de la GKV, une brancheprive dassurance, qui propose des assurances sant auxfonctionnaires, aux indpendants et aux plus hauts revenus. LaPrivate Krankenversicherung(PKV), qui est en partie en concurrenceavec la GKV, assure aujourdhui prs de 10 % de la populationallemande. la diffrence de la GKV, le taux de cotisation la PKVnest pas dfini en fonction du revenu (principe de solidarit), mais enfonction du risque individuel de maladie (principe dquivalence)3.

    Schma 1 : Financement de la GKV jusquen 2004

    Source : auteur

    3 Bckmann, Roman, Die private Krankenversicherung weder Solidaritt nochWettbewerb ? , in Ders. (d.), Gesundheitsversorgung zwischen Solidaritt undWettbewerb, Wiesbaden, 2008, p. 63-90.

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    La politique de rduction des cotsdepuis le milieu des annes 1970

    Ds le milieu des annes 1970, les dbats de politique de sant sontmarqus par la question du financement. Alors que le nombre desassurs et le primtre de la prise en charge avaient t augments,la crise conomique provoqua une rosion de la base des recettes.En 25 ans, le ralentissement de la croissance conomique, le nombre

    des chmeurs, en hausse dans les annes 1970, et le recul dessalaires ont conduit un dcrochage entre les recettes de la GKV etses dpenses. Pour couvrir les dpenses nouvelles, il fallait donccontinuellement rehausser le taux de cotisation des caisses maladie.

    Si, en 1975, le taux de cotisation slevait en moyenne 10,4 % du revenu brut, il reprsente, en 2010, 14,9 %5. La partici-pation paritaire des employeurs au financement de la GKV a contri-bu faire de la question de lvolution du taux de cotisation un sujetdintrt pour la politique conomique. La hausse des taux de cotisa-tions sociales passe pour constituer un dsavantage pour les entre-prises dans la comptition internationale6. Pour combattre cela, denombreuses mesures dconomie pour le systme de sant ont tadoptes partir du milieu des annes 1970.

    Lun des problmes centraux se rvla tre le pilotage ducomportement des acteurs, en particulier des mdecins libraux etdes hpitaux. En raison du paiement lacte (secteur ambulatoire) etdu forfait hospitalier journalier unique, ces deux catgories dacteursntaient pas incites montairement rduire le volume ou le tempsde soins. Le changement des modes de rmunration (introductiondes budgets et des forfaits) devait endiguer la tendance laugmen -tation quantitative des soins mdicaux.

    De plus, les cots de traitement taient de plus en plus

    transfrs vers les patients : une partie des frais leur incombait etcertains soins taient supprims du catalogue des prestations prisesen charge par la GKV7. Le renforcement de la concurrence dans le

    5 www.bmg.bund.de/cln_178/nn_1168278/DE/Ministerium/Statistik/Statistik.htm,consult le 31 mai 2010.6 Pour une critique de cette vision, le lecteur pourra se reporter Reiners, Hartmut,Mythen der Gesundheitspolitik, Huber , Berne, 2009, p. 41 et suivantes.7 Bauer, Ullrich, Die Sozialen Kosten der konomisierung von Gesundheit inAus Politik und Zeitgeschichte, 8-9/2006, p. 23.

    http://www.bmg.bund.de/cln_178/nn_1168278/DE/Ministerium/Statistik/Statistik.htmhttp://www.bmg.bund.de/cln_178/nn_1168278/DE/Ministerium/Statistik/Statistik.htm
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    systme de sant (entre les diffrentes caisses de sant, mais aussientre les prestataires de soins) doit permettre aux acteurs efficientsde simposer sur un march de la sant rorganiser8. Enfin, en2005, le financement paritaire a t amend afin de dcharger lesentreprises : le taux de cotisation des seuls salaris a t augmentde 0,9 % du salaire brut.

    8 Ebsen, Ingwer, Die gesetzliche Krankenversicherung auf dem Pfad derMarktorientierung in Gellner, Winand et Schmller, Michael (d.), Solidaritt undWettbewerb. Gesetzliche Krankenversicherungen auf dem Weg zu profitorientiertenVersicherungsunternehmen Zukunftsoptionen und Probleme, Baden-Baden,Nomos, 2009, p. 75-98.

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    Assurance citoyenne ou forfait par tte ?

    Les mesures de rduction des cots prises au cours des troisdernires dcennies ont pu contribuer ralentir la progression desdpenses de la GKV, mais elles nont pas permis dempcher lapoursuite de la hausse des taux de cotisation. Ceci montre que laproblmatique du financement nest pas conditionne seulement par

    le dveloppement des dpenses, mais quelle est aussi troitementlie au couplage des recettes aux ressources des salaris. Leralentissement de la progression des rmunrations et salaires, ainsique la part de plus en plus importante des autres sources de revenus(revenus du capital, revenus de lpargne et revenus locatifs), qui nesont pas pris en compte dans la hausse des cotisations, ont affaibli labase financire de la GKV.

    En 2003, dirige par le chancelier Gerhard Schrder, lacoalition rouge-verte (forme par les sociaux-dmocrates du SPD etles cologistes de Die Grnen) a install une commission dexpertsqui devait laborer des propositions pour le futur financement desscurits sociales. La commission, appele Commission Rrup ,du nom de son prsident, lconomiste Bert Rrup, a esquiss deuxmodles concurrents de financement pour lassurance maladie : une assurance citoyenne et une prime de sant 9.

    Le modle de lassurance citoyenne mise sur une extensionde lassiette de recettes de la GKV par llargissement du cercle desassurs. Daprs cette conception, tous les groupes de la population,donc aussi les travailleurs indpendants, les fonctionnaires et leshauts salaires, devraient relever de la GKV. La proposition vise lasuppression de lassurance maladie prive (PKV), qui couvreaujourdhui prs de 10 % de la population allemande. Par lintgrationde ces groupes qui disposent en moyenne de revenus plus

    importants et sont en meilleure sant, les taux de cotisation doiventpouvoir tre baisss court terme. De plus, la base de cotisation doittre tendue : les revenus de lpargne, les revenus locatifs et lesrevenus du capital doivent tre pris en compte pour le calcul.

    Alors que le modle de lassurance citoyenne reste attach un mcanisme de redistribution solidaire lintrieur du systme de

    9 Commission Rrup, Nachhaltigkeit in der Finanzierung der sozialen Sicherungs-systeme, Bonn, Bundesministerium fr Gesundheit und Soziale Sicherung, 2003.

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    financement de la GKV et souhaiterait consolider celui-ci, laproposition dinstaurer une prime de sant se dtourne dusystme actuel de financement. Afin de rduire les charges nonsalariales, le volume des contributions ne serait plus dfini par lerevenu. Tout assur adulte devrait payer une prime, qui seraitidentique pour tous les assurs dune caisse (forfait par tte). Lacotisation patronale actuelle est verse et naugmente plusautomatiquement si lassurance maladie prsente des dpenses enhausse. Ceci soulagerait les entreprises. Une prquation sociale, aubnfice des faibles revenus, est prvue par lintermdiaire desimpts. La PKV devrait tre maintenue en tant quassurance maladie.

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    Le compromis de 2007 :la GKV-WSG

    Sur lchiquier politique, les diffrents modles ont fait apparatre deslignes de fracture relativement claires. Les partis de gauche (SPD,Die Grnen, Die Linke) se sont prononcs en faveur dune assurancecitoyenne, alors que les chrtiens-dmocrates (CDU et CSU)voulaient instaurer un systme de forfait par tte. Les libraux du

    FDP ont rejet tant lassurance citoyenne que le forfait par tte,prnant le renforcement de la prvoyance prive et le passage dunfinancement par transfert un financement par capitalisation10. Enraison de ces divergences, la grande coalition SPD-CDU/CSU de lachancelire Angela Merkel (2005-2009) nest pas parvenue prendreune dcision de principe quant au financement de la GKV.

    La rforme de la sant de 2007 (Gesetz zur Strkung desWettbewerbs in der GKV, loi sur le renforcement de la concurrenceau sein de la GKV , GKV-WSG) a nanmoins introduit quelquesnouveauts importantes. Elle a ainsi instaur un Fonds de Sant ,au travers duquel est organise la rpartition centrale des moyensentre les diffrentes caisses, et qui est aliment la fois par descotisations et par des recettes fiscales. Cest le ministre de la Santqui dfinit maintenant un taux de cotisation unique pour toutes lescaisses (depuis juillet 2009, il slve 14,9 %, les salaris contri-buant hauteur de 7,9 % de leur salaire brut et les employeurs, hauteur de 7 %).

    Une caisse na donc plus la possibilit de rviser la hausseson taux de cotisation propre si ses besoins de financementaugmentent. Laugmentation des dpenses ne doit plus se traduireimmdiatement par la hausse du taux de cotisation, mais doit dabordtre finance par une contribution supplmentaire verse par lesseuls assurs, sans que les entreprises naient en supporter le

    cot. Le plafond de cette contribution supplmentaire, qui est fix parles diffrentes caisses maladie, est cependant limit. Il ne peut pasdpasser 8 par mois ou 1% du salaire brut de lassur. Unecomposante forfaitaire a ainsi t introduite. En raison des dficits,les premires caisses publiques ont t contraintes, ds fvrier 2010,de prlever la contribution supplmentaire.

    10 Die Mitte strken. Deutschlandprogramm der Freien Demokratischen Partei ,motion adopte lors du congrs du FDP qui sest tenu du 15 au 17 mai 2009 Hanovre.

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    La rforme de la sant de 2007 tait ainsi le fruit duncompromis politique entre la CDU/CSU et le SPD. Sa particularitrside dans le fait quelle a mis en place, au travers du Fonds deSant et de la contribution supplmentaire, une structure institu-tionnelle qui pourra voluer soit en direction dune assurance, soit endirection dun forfait par tte11.

    11 Gerlinger, Thomas ; Mosebach, Kai ; Schmucker, Rolf, Mehr Staat, mehr Wett-bewerb: Gesundheitsfonds ante portas , Bltter fr deutsche und internationalePolitik, 10/2008, p. 107-116.

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    rejet ce modle au motif quil ne serait pas solidaire et pserait surles seuls salaris. Mais au sein de la CDU aussi, notamment danslaile des salaris, des voix se sont leves contre le projet.

    En deuxime lieu, la politique de sant a suscit de vives

    altercations au sein de la coalition parce que le projet dun forfait partte est trs impopulaire dans la population. La CDU avait dj pusen apercevoir lors des lections lgislatives de 2005, quand ellestait engage en faveur de ce modle forfaitaire pendant lacampagne. Les experts ont imput au forfait par tte une part nonngligeable de lchec imprvu du parti. Lors de la campagne pourles lections au Bundestag de 2009, la CDU/CSU en a retenu laleon et na pas mis en avant ses revendications en matire depolitique de sant. Le sujet est aussi trs sensible dans la perspectivedes prochaines lections (en 2011, six Lnder renouvelleront leurLandtag, leur parlement rgional).

    Troisimement, la crise financire qui dure et saggrave rendplus difficile la mise en uvre du modle forfaitaire. La prquationsociale destination des bas salaires finance par limpt coteraitchaque anne entre 25 et 40 milliards deuros (selon la mthode decalcul retenue). Au vu du haut niveau dendettement public et du ca-ractre politiquement prioritaire que revt la consolidation des finan-ces publiques, le financement dune telle mesure parat aujourdhuiimpossible.

    Quatrimement, les rapports de force au sein du Bundesrat(Conseil fdral) ont t modifis par les lections en Rhnanie duNord-Westphalie de mai 2010. Le gouvernement du Land est passdes mains de la coalition conservatrice-librale une coalitionminoritaire constitue du SPD et de Die Grnen. Le gouvernementfdral a ainsi perdu en juillet 2010 la majorit quil dtenait auBundesrat, dont lapprobation est ncessaire pour nombre de loisfdrales. Le Bundesrat disposerait dun droit de veto contre lintro-duction du forfait par tte si cette rforme affectait ladministration desLnder. Ceci serait par exemple le cas si le mcanisme de prqua-tion sociale financ par limpt tait mis en uvre par les servicesfiscaux des Lnder, comme cela est prvu dans diffrents scnarios.

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    2011 Le projet de rformedu financement

    La faible marge de manuvre politique et les divergences dopinion ausein de la coalition gouvernementale ont longtemps empch lespartenaires de coalition de se mettre daccord sur un modle commun.Diverses propositions du ministre de la Sant ont t rejetesprincipalement par la CSU. La pression exerce sur les acteurs

    politiques en vue de les conduire agir tait cependant extraordi-nairement leve, puisque le financement de la GKV sannonaitmenac par de trs importants dficits. Des projections partaient delide quil manquerait 11milliards deuros aux caisses maladie en 2011et que ce dficit continuerait se creuser dans les annes suivantes.

    La proposition conjointe dune rforme du financement de laGKV, prsente en juillet 2010 par le gouvernement fdral, sedtournait pragmatiquement du modle originel de la prime de sant. Onrenonait lide selon laquelle on pouvait oprer court terme unchangement systmique complet, pour passer dun financement parcotisation un financement par prime. Au lieu de cela, la contributionsupplmentaire constitue maintenant une part forfaitaire croissante dufinancement, ct des cotisations fondes sur les revenus. Quels sontles principaux changements dans le financement de la GKV ?

    Le taux de cotisation passe de 14,9 15,5 %. Ilavait atteint ce niveau ds lintroduction du Fonds deSant, en 2009, mais avait ensuite t baiss plu-sieurs reprises, dans le cadre des mesures destines relancer la conjoncture. La baisse avait alors t com-pense par limpt. Grce la hausse du taux de coti-sation, la GKV doit enregistrer 6 milliards deuros derecettes supplmentaires.

    La cotisation patronale est fixe 7,3 %. Lesemployeurs ne devront pas tre concerns par defutures hausses des cotisations, qui seront assumesprincipalement par les assurs.

    Linstrument dj existant de la contributionsupplmentaire, dont la somme peut tre fixe parchacune des caisses, est dvelopp. Le plafonnement 8 ou 1 % du revenu est supprim. Dornavant, lacontribution supplmentaire sera perue exclusivementcomme un forfait indpendant des revenus.

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    Un mcanisme de prquation sociale, financpar les impts, doit empcher que la contribution sup-plmentaire moyenne excde 2 % des revenus dunactif. Il doit tre mis en uvre par les employeurs, quidoivent verser la somme correspondante au salari etrduire dautant leur contribution au Fonds de Sant.Ces contributions rduites doivent tre leur tourcompenses par le transfert au Fonds de produits delimpt.

    Le ministre de la Sant pense que cette rforme met en placeune forme prenne de financement de la GKV, qui permettra aussi derpondre de futures hausses des dpenses de sant. La contri-bution supplmentaire se voit confrer un rle clef, puisquelle doitpermettre aux caisses de couvrir des dpenses suprieures, quinaissent par exemple des progrs mdicaux. Comme cette

    contribution supplmentaire nest plus plafonne, les caisses sont enmesure daccrotre plus leurs recettes que cela ntait le cas jusquprsent. En mme temps, la nouvelle contribution supplmentairedoit favoriser la concurrence entre les caisses : lautonomie renforcedoit agrandir les carts de prix et les rendre lisibles, afin dinciter lesassurs changer de caisse et daccrotre la pression de la concur-rence sur les caisses.

    Schma 2 : Projet de financement de la GKV partir de 2011

    Source : auteur

    Le ministre de la Sant postule que la ncessit de recouriraux contributions supplmentaires ou de les augmenter ne crotraque lentement au cours des prochaines annes. Cette approcheoptimiste est cependant remise en cause au-del de la seule

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    opposition. Au sein des partis au pouvoir aussi, certains estiment quela situation financire de la GKV continuera se dgrader au coursdes prochaines annes parce que les dpenses continueront crotre, conduisant une nette augmentation de la contribution sup-plmentaire.

    Les recettes supplmentaires dues la rforme, values 6 milliards deuros, ne suffiront cependant pas couvrir le dficit de11 milliards deuros annonc pour 2011. Pour atteindre cet objectif, legouvernement fdral versera la GKV 2 milliards deuros suppl-mentaires tirs des recettes fiscales. Les 4 milliards restants devronttre obtenus par des mesures dconomie.

    Dans le domaine des mdicaments, des dispositions ont djt prises ; les fabricants devront consentir des rductions plusimportantes la GKV et les ngociations autour du prix desmdicaments chers, protgs par un brevet, devront tre menes

    plus efficacement, afin de rduire considrablement les dpenses.Sont aussi prvus le gel des dpenses de fonctionnement descaisses pendant deux ans, la rduction de moiti (en volume) de lahausse prvue jusqu prsent des dpenses pour les hpitaux et lesdentistes, la rduction des prix des vaccins au niveau europenmoyen, la rimportation de mdicaments et la limitation de lacroissance disproportionne des soins des mdecins de famille, quidevra tre ramene au niveau des mdecins spcialistes.

    Ces mesures devront permettre la GKV dconomiser3,5 milliards deuros en 2011 et 4 milliards en 2012.

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    Perspectives

    Le changement de systme annonc par le gouvernement noir-jaunepour le financement de la GKV, qui devait voluer vers un modleforfaitaire par tte, a (pour le moment) achopp sur les divergencesdopinion internes la coalition, ainsi que sur le contexte politique etconomique complexe. Le compromis adopt, qui doit gnrer partir de 2011 des revenus supplmentaires pour les caissesmaladie, ne doit cependant pas tre sous-estim dans ses effets. Il

    participe de la poursuite de la mutation incrmentielle qui conduit,depuis plusieurs annes, labandon progressif du modle bismarc-kien classique de financement de lassurance maladie. Certes, lacotisation dpendant du revenu en constitue toujours un lmentimportant, mais elle est de plus en plus complte par des contri-butions forfaitaires et fiscales. Le financement de la GKV volue versun systme mixte qui prsente les caractristiques suivantes :

    Le financement paritaire par les employeurs etles salaris est restreint.

    Les employeurs sont dchargs et exonrs dela contribution de futures hausses des dpenses,puisque leur taux de cotisation est arrt.

    La charge du financement est reporte demanire croissante vers les salaris. Si leur taux decotisation slevait en moyenne, en janvier 2005, 7,1 % de leur salaire brut, il pourra atteindre 10,2 %aprs la rforme de 2011 (cf. schma).

    Puisque la contribution supplmentaire seraforfaitaire, le lien entre le financement et les salairessera distendu.

    De futures hausses des dpenses seront toutdabord finances par la hausse des contributions sup-plmentaires. Limportance de cette part forfaitairecontinuera donc de crotre lavenir.

    Le financement par limpt restera en fonctionde la situation budgtaire un lment important dufinancement de la GKV, en particulier parce que laprquation sociale lie aux contributions supplmen-taires le rend ncessaire.

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    Lun des points centraux de la critique contre le projet de rformeest la nouvelle rpartition des charges du financement. Elle soulve dunepart un problme dquit, puisque le financement sera de plus en plustransfr sur les paules des assurs, au travers des contributions plusleves ou supplmentaires. Le gouvernement fdral souligne certes quela prquation sociale confrera de lquit aux contributionssupplmentaires. Ceci ne saurait cependant faire oublier que le montantmaximal exig de la part de lassur sera nettement plus lev quavant.Les assurs seront, moyen terme, les perdants de la rforme dufinancement (cf. schma 3).

    Schma 3 : volution de la part patronale et de la part salarialemaximale dans le financement de la GKV

    Source : auteur

    Dun autre ct, le projet de rforme change aussi le point devue des employeurs sur lvolution du systme de sant. La fixationdu taux de cotisation patronale, qui rpond des impratifs lis aumarch du travail, peut conduire ce groupe trs influent dans lasocit et la vie politique moins sinvestir pour une utilisationefficiente et conomique des moyens de la sant quil ne le fait

    aujourdhui. Les projets de rduction des cots et de hausse delefficience, qui sont difficilement ralisables sils sont contraires lintrt des prestataires, devront probablement aussi se passer dusoutien des employeurs.

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    Le Cerfa

    Le Comit dtudes des relations franco-allemandes (Cerfa) a tcr en 1954 par un accord gouvernemental entre la Rpubliquefdrale dAllemagne et la France. LIfri, du ct franais, et la DGAP,du ct allemand, en exercent la tutelle administrative. Le Cerfabnficie dun financement paritaire assur par le Quai dOrsay etlAuswrtiges Amt; son conseil de direction est constitu dunnombre gal de personnalits franaises et allemandes.

    Le Cerfa a pour mission danalyser les principes, lesconditions et ltat des relations franco-allemandes sur le planpolitique, conomique et international ; de mettre en lumire lesquestions et les problmes concrets que posent ces relations lchelle gouvernementale ; de trouver et de prsenter des propo-sitions et des suggestions pratiques pour approfondir et harmoniserles relations entre les deux pays. Cette mission se traduit parlorganisation rgulire de rencontres et de sminaires runissanthauts fonctionnaires, experts et journalistes, ainsi que par destravaux de recherche mens dans des domaines dintrt commun.

    Hans Stark assure le secrtariat gnral du Cerfa depuis

    1991. Louis-Marie Clouet y est chercheur et responsable de lapublication des Notes du Cerfa et des Visions franco-allemandes.Nele Wissmann travaille au Cerfa comme assistante de recherche etest charge de mission dans le cadre du projet Dialogue davenir.