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Le Curieux « Tout l’intéresse, tout le passionne, rien ne l’ennuie » 10 Numéro été 2/2 La mer

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Le Curieux« Tout l’intéresse, tout le passionne, rien ne l’ennuie »

10

Numéro été 2/2La mer

1

Sommaire

La mer sous l’influence des marées

La mer vers de nouvelles contrées musicales

Mer poubelle ou mer nourricière

Amma, la mère universelle

Agrippine, la mère d’un monstre

L’archétype de la mer

Fiction Azura

Devoir patienter plusieurs heures pour sortir, en ba-teau, d’un port breton  ; attendre un week-end de «  grandes marées  » pour aller pêcher le crabe à pied  ; s’amuser, en Méditerranée,  à  rester  long-temps  au même endroit sans finir les  pieds dans l’eau….

Selon l’heure, la période de l’année, la situation géo-graphique, l’amplitude et la durée des marées diffè-rent.

La principale  responsable  de la marée est la Lune,  qui exerce  une  force  d’attraction sur la Terre.  Le  Soleil a une influence environ deux fois moins importante, malgré  sa masse très  supérieu-re, car plus éloigné.

Cette attraction  se voit nettement  sur les masses li-qu ides ,  mais  ex i s t e  aus s i su r l a pa r t i e terrestre. Cependant,  les solides se déforment plus difficilement, et  la croûte terrestre se déplace seule-ment, à chaque marée, d’une vingtaine de centimè-tres par rapport au centre de la Terre. 

La Lune est un satellite naturel de la Terre, son orbi-te  est elliptique. Plus  elle  est  proche de la Terre, plus son attraction est forte. Le mouvement des mas-ses liquides  évolue  avec sa  rotation.  Il en est de même pour le Soleil. La résultante de ces forces gé-nère les déplacements des eaux de la mer.

Les  effets  centrifuges  créés  par le fait que la Terre tourne sur elle-même, la Lune autour de la Terre, et l’ensemble autour du Soleil, jouent aussi un rôle.

Il en découle que marées basses  et hautes  se trou-vent théoriquement  au même moment en deux points opposés de la Terre

Une marée dure approximativement 6 heures : on a donc  2  marées basses et  2  marées hautes par 24 heures.

En effet, si on prend comme référence un point fixe sur Terre,  à pleine mer  à T0, 6 heures après,  il  se trouve à 90 degrés – rotation de la Terre d’un quart de tour – et àmarée basse. 12 heures après, ce point est à l’opposé -marée haute à nouveau – et 18 heu-res après, à 270 degrés – marée basse.

Durant les mêmes 24 heures, la Lune s’est déplacée sur son orbite d’environ 13 degrés : il faut donc 24 heures + 50 minutes pour qu’un point se retrouve exactement dans la même direction de la Lune, après un tour. Uncycle de marée dure donc approxi-mativement 6 heures et 25 minutes.

Vous suivez ?

La mer sous l’influence des marées

par Périne

Si le Soleil et la Lune sont sur un même axe, on a un cumul de leurs attractions  : ce sont les marées de vives-eaux, ou grandes marées (pleine lune et nouvelle lune, donc)

Si le Soleil et la Lune sont à « angle droit » par rapport à la Terre, ce sont les marées de mortes-eaux, ou petites marées.

La Lune fait le tour de la Terre en approximativement un mois, les vives-eaux et mortes-eaux alternent donc à un rythme semi-mensuel. / bimensuel

Quand le Soleil est situé dans le plan de l’Equateur de la Terre, la déclinaison solaire est nulle. C’est le  cas deux fois par an  : aux alentours du 21 mars et du 23 septembre. Dès que  le Soleil et la Lune sont alignés en syzygie, la grande marée d’équinoxe prend place, et les pêcheurs à pied peuvent s’amuser !

Selon  le volume d’eau dans une mer donnée, l’amplitude de la marée diffère : faible en Méditerranée « petite mer », plus élevée le long des côtes océaniques.

On continue ? Attention, ça se corse : 

La déformation de la masse liquide suit le mouvementapparent de la Lune et du  Soleil. Mais cette propagation rencontre des obsta-cles : les continents. De plus, la vitesse de propagation des ondes dépend de la  hauteur d’eau  : faible près des côtes, plus gran-de dans les zones profondes.

Ceci provoque des variations géographiques des heures de marée. En Manche, la faible profondeur de la mer ainsi que son rétrécisse-ment d’Ouest en Est sont des freins à la progression de la marée. Ainsi, quand la mer est haute à Brest, elle est basse à Calais !

La  rotation de la Terre sur elle-même engendre  la force de Corio-lis – observable d’ailleurs en vidant un lavabo  : l’eau tourne dans un sens chez nous…et dans l’autre dans l’hémisphère Sud – qui dé-cale le trajet de l’onde de marée. Ainsi, l’onde de marée est déviée dans l’Atlantique Nord dans le sens  inverse  des aiguilles d’une montre, et à l’opposé dans l’hémisphère Sud. 

Il en résulte que la marée est une onde stationnaire tournant autour de points fixes, les points amphidromiques, où l’amplitude de ma-rée est nulle  :dans l’atlantique Nord,  il en existe un seul, et dans l’Océan Pacifique et l’Océan Indien, plusieurs.

L’onde de marée peut  aussi  être amplifiée par résonnance  à  cer-tains endroits  : ceci est lié à la forme des bassins océaniques, les développant plus ou moins bien.

Le phénomène de résonnance a lieu quand l’onde de marée  inci-dente rebondit au fond d’une baie et crée une onde réfléchie : l’am-plitude de marée peut alors être doublée  – ex : baie du Mont Saint Michel – si les deux ondes sont en phase.

Enfin, un dernier facteur peut modifier  l’amplitude de la marée  : les dépressions atmosphériques. Elles« aspirent » les océans et font monter le niveau de la mer. On parle de marée atmosphérique.

Si les phénomènes de marées  sont globalement connus, il n’en demeure pas moins que leur compréhension précise reste très com-plexe…  J’en ai fait un abord résumé ici. Pour ceux qui souhaite-raient compléter, l’Encyclopaedia Universalis  est  une bonne réfé-rence. Le cours des Glénans peut aussi servir de base.

Claude Debussy est avec Schoenberg et Stravinsky l’un des trois fondateurs de toute la musique du XXème siècle. Par son langage musical révolution-naire, complexe sous une facilité apparente, il a jeté en quelques partitions (le Prélude à l’Après-midi d’un Faune, Pélléas et Mélisande, la Mer, et Jeux) les bases d’une poétique musicale entièrement re-nouvelée, qui deviendra l’un des principaux objets d’études de l’école musicale moderne, et pour Ra-vel, Messiaen et Boulez une de leurs influences mai-tresses.

Debussy commence la composition de la Mer en Bourgogne durant l’été 1903, l’année suivant l’achè-vement et les premières représentations de son opé-ra, Pelléas et Mélisande. Poursuivie en 1904 à Jer-sey, puis à Dieppe, la partition est achevée l’année suivante, et créée le 13 octobre 1905 par l’Orches-tre des Concerts Lamoureux, sous la direction de Camille Chevillard. D’abord accueillie avec froi-deur par la critique en partie due au fait d’une exé-cution médiocre, elle s’installe progressivement dans le paysage orchestral français jusqu’à en devenir l’un des plus importants représentants.

L’œuvre se présente en 3 parties, qui rappellent par leur succession la forme symphonique  : un mouve-ment allant, un mouvement en rythme ternaire, et un mouvement de fin plus rapide et contrasté. Des formes musicales habituellement utilisées pour la construction des mouvements d’une symphonie sont utilisées. Ainsi, un rondo, structure de type

ABACA – A pour le thème principal et B et C pour des couplets, fournit l’ossature du dernier mouve-ment, comme souvent dans une symphonie classi-que. Une forme sonate (ABA – A pour l’exposition du thème, B pour le développement intermédiaire) se laisse vaguement percevoir dans le second mou-vement. Une mélodie cyclique est présente, on la retrouve dans les 1er et 3e mouvements. 

Mais ces reliquats de cadres classiques sont estom-pés, réinventés par plusieurs aspects. Le renouvelle-ment orchestral est constant au fil de l’oeuvre. Nor-malement dans les sections de reprise A d’une forme classique, on recopie de la 1ère section A les instruments et ce qu’ils jouent. Ce n’est jamais cas ici. Seule la mélodie et la tonalité sont réutilisées. Et les développements entre ces fameuses sections A sont également d’une liberté inhabituelle dans une oeuvre classique : les transitions et changements de tonalité pour passer d’un instant à un autre sont inat-tendus, d’une originalité et d’une ingéniosité souve-raines.

Debussy rappelle par plusieurs aspects les peintres impressionnistes dans cette oeuvre. Lorsqu’il prend pour sujet un élément naturel, il ne se veut pas des-criptif. Plus que les formes, c’est le mouvement et les perceptions visuelles ou les émotions qu’il provo-que qui l’intéressent, et il  les évoque par les tim-bres et les dessins mélodiques. C’est par des arpè-ges de harpe qu’il représente le lent déroulé des vagues, et leur fracas par de brusques irruptions de cuivres et de glockenspiel. 

La mer vers de nou-velles contrées mu-sicales

par Olivier Cambon

Les motifs musicaux se superposent par touches, joués par des petits groupes d’instruments. Il en va de même pour les accords qui vien-nent harmoniser la ligne mélodique principale. Tous ces éléments donnent la sensation de mouvements multiples, ayant chacun leur vie propre, mais mus par une houle commune. Debussy introduit égale-ment des traits mélodiques de quelques notes, à peine esquissées, et placées avec une stupéfiante liberté rythmique. On pense aux tou-ches de pinceau individualisées constituent la vision d’ensemble sug-gérée dans un tableau de Monet. Il dessine des mélodies sinueuses, parfois irrégulières ou impaires au niveau de leur découpage de temps, et laissant pourtant toutes une forte empreinte dans la mé-moire de l’auditeur. Il insère par endroits des décalages volontaires de temps entre ces mélodies et l’accompagnement formé par les mo-tifs. Ce sont alors les mouvements contraires des vaguelettes et des courants de la mer que l’on ressent. L’oeuvre reste gouvernée par la mesure musicale traditionnelle à 3 ou 4 temps. Mais celle-ci com-mence elle aussi à s’estomper, sous la plume d’un compositeur plus attentif aux pulsations de la nature qu’à la rigueur métronomique de la musique de son époque.

L’orchestration est foisonnante de variété et d’effets inouïs avant lui, mais il ne s’agit pas là de virtuosité gratuite. Elle contribue de ma-nière inédite à la respiration et à la vie de l’oeuvre. Elle se renouvelle constamment, subtilement et lentement dans les plages calmes, et du tout au tout, en dialogue resserré d’une mesure à l’autre dans les mo-ments les plus animés. Nous n’en sommes pas encore à la Klangsfar-benmelodie, que Schoenberg et Webern développeront plus tard en confiant chaque note d’une mélodie à un instrument différent. Ici, chaque mélodie est jouée d’un bout à l’autre par le même groupe d’instruments. Mais par la mobilité orchestrale de la Mer, Debussy amorce cette fragmentation instrumentale, qui se poursuivra tout au long du 20e siècle.

Les mélodies s’enchainent, constituant un fil continu qui conduit l’oeuvre d’un bout à l’autre. Debussy réutilise ici un principe de com-

position si caractéristique du Prélude à l’Après-Midi d’un Faune, où cette continuité jointe à des variations toujours changeantes don-naient une impression d’improvisation. Ici c’est d’un voyage au long cours qu’il s’agit, pendant lequel le soleil, le vent, la mer, nous ac-compagnent par la récurrence des mélodies qui les représentent. Mais nous ne ré-entendons jamais tout à fait ce qui fut joué avant. C’est donc bien un voyage sans retour. Et c’est ainsi, en filigrane, que Debussy instille à l’auditeur un autre sentiment caractéristique de la mer, et qui deviendra une des plus grandes beautés de cette oeuvre : son immensité.

MI FA, FA FA#

Trois notes, voilà ce qui compose l’une des musiques de cinéma les plus connues au monde. John Williams décrivit son morceau comme «broyant» le spectateur «un peu comme un requin le ferait, instinctif, impla-cable, inarrêtable». Williams reçut un golden globe, un grammy award et un oscar pour la musique des dents de la mer. Mais plus encore, il donna ses lettres de noblesse à un genre musical bien particulier. Spielberg reconnaissait ainsi que sans la musique de John Williams, son film aurait probablement eu moi-tié moins de succès.

La vie trouverait son origine dans la mer, il y a envi-ron 4,3 milliards d’année. Aujourd’hui encore, son rôle est essentiel : 71% de la surface de la Terre est recouverte d’eau, entre 50 et 80% du biotope terres-tre se trouve dans les océans, plus de 60% des servi-ces d’écosystèmes qui nous permettent de vivre sont générés par l’Océan mondial, entre autres cho-ses la régulation du climat terrestre à hauteur de 80%, et la génération de la majeure partie de l’oxy-gène que nous respirons.

Et pourtant, malgré cette importance cruciale, la mer est bien maltraitée  : il est estimé que 40% de l’océan mondial serait fortement perturbé par l’acti-vité humaine, et seulement 4% relativement épar-gné  ! Sans même parler des perturbations d’écosys-tèmes par introductions d’espèces exotiques dans un milieu qui n’est pas le leur, l’Homme ne manque pas de moyens de perturber le fragile système ma-rin  : marées noirs, dégazages sauvages, chalutage, immersions d’explosifs ou de déchets radioactifs, déchets… mais également et surtout (à hauteur de 80%) d’origine terrestre, par les rejets d’eaux usées, les infiltrations de polluants d’origine industrielle ou agricole, ou même simplement les quantités anor-malement élevées d’éléments non polluants qui pro-duisent un déséquilibre. On constate de plus en plus de zones  hypoxiques, ou zones mortes  : il s’agit de zones dans lesquelles l’oxygène dissout dans l’eau est trop faible. Or, l’un des premiers ef-fets de l’hypoxie (manque d’oxygène inspiré) est de rendre stupide et incapable d’agir pour assurer sa propre survie (c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est indiqué dans les avions d’enfiler son masque à

oxygène avant d’aider les autres en cas de décom-pression – si on ne le fait pas, en quelques secon-des, on ne pourra plus ni le faire, ni aider les au-tres). Résultat, de nombreuses espèces animales meurent dans ces zones, réduisant encore le bras-sage d’oxygène, on est dans un cercle vicieux.

Depuis maintenant plusieurs années, on entend par-ler de plus en plus d’un « 7ème continent de plasti-que » grand comme 6 fois la France, qu’on imagine comme une immense plaque de déchets agglutinés. Cette vision, si elle permet d’éveiller les conscien-ces, ne correspond pas à la réalité. Il s’agit en fait de principalement de fragments inférieurs à 5mm éparpillés entre la surface et 30m de profondeur, difficiles à repérer, et répartis principalement au sein de 5 zones ou les grands courants marins circu-laires les concentrent. Sur une même surface d’eau, la masse de plastique est 6 fois plus importante que celle du plancton. Et ces fragments de plastiques vont mettre des centaines d’années à se dégrader, devenant entre temps des billes de plus en plus peti-tes qui vont être absorbées par les poissons et les oiseaux, les blessants et les intoxiquant… et cela peut remonter la chaîne alimentaire jusqu’à l’Hom-me !

Toutefois, un éveil des consciences se fait, 76% des Français jugent que les océans sont en mauvaise santé et plus encore approuvent le développement d’activités plus respectueuses pour protéger no-tre « mer » nourricière.

Mer poubelle ou mer nourricière

par Guillaume Pointel

Ainsi, le Néerlandais Boyan  Slat, alors  âgé  de 19 ans, a fondé en 2013 la fondation « The Ocean Cleanup » dont l’objectif est de col-lecter cette pollution de plastiques à l’aide de filets dérivants. 

A l’heure actuelle le système est en phase d’essais en mer du Nord. Bien sûr, cela ne solutionnera pas tout, et les plus fines particules ne seront pas attrapées, mais il s’agit déjà d’un début, auquel viendra peut-être s’ajouter d’autres initiatives.

De plus en plus d’initiatives se tournent également vers la mer pour fournir de l’énergie non polluante. On peut ainsi citer :

– Les usines marémotrices, dont la première et la plus puissante en-core à ce jour est celle de l’estuaire de La Rance, construite en 1966. Ressemblant à des barrages, elles sont équipées de turbines pouvant fonctionner dans les deux sens : à marée haute, la mer est plus haute que le fleuve sur lequel est placée l’usine, l’eau s’écoule vers le fleuve. A marée basse, c’est l’inverse. Dans les deux cas, les turbines sont entrainées et fournissent de l’énergie. La centrale de la Rance répond à 3,5% des besoins d’électricité de la Bretagne. Il s’agit d’une source d’énergie régulière et prévisible, avec un très faible coût d’entretien et d’exploitation, mais qui demande un important investissement de départ, et d’avoir un site approprié.

– Les hydroliennes sont de grandes hélices sous-marines, entrainées par les courants, comme les éoliennes sont entrainées par le vent. Les courants marins sont forts et réguliers dans certaines régions, ce qui permet d’avoir une fourniture constante et stable, à la différence des éoliennes. De plus, à dimension égale, l’énergie produite est bien plus importante. Par contre, il faut  limiter leur vitesse de rota-tion pour ne pas risquer de blesser la faune environnante, et les im-planter assez profondément pour éviter les risques qu’un bateau les percute. Ce qui rend le coût d’entretien plus élevé, puisqu’il faut ré-gulièrement s’assurer que le sable ou les algues ne perturbent pas le mouvement. Toutefois, cette technologie pourrait trouver son intérêt intégrée dans les projets d’habitats flottants qui sont actuellement envisagés.

– L’énergie thermique maritime est une idée consistant à utiliser la différence de température entre l’eau de surface chauffée par le so-leil à 25°C, et l’eau de profondeur (-1000m environ) qui elle reste froide à 2°C, pour alimenter une machine à chaleur. Jules Vernes en avait déjà imaginé le principe dans « 20.000 lieues sous les mers ». Cette technologie demandant un écart de température suffisant pour fonctionner, elle n’est vraiment utilisable que dans les zones intertro-picales, son potentiel est donc limité.

– Les centrales houlomotrices profitent de l’oscillation de la surface de l’eau pour déplacer des flotteurs, qui entrainent l’arbre de généra-trices déportées. La densité d’énergie produite est énorme et le poten-tiel de production pourrait rivaliser avec la production nucléaire mondiale. A l’heure actuelle, plusieurs expérimentations sont en cours de par le monde pour mettre au point un système économique et fiable sur ce principe.

Il existe sûrement encore de nombreuses possibilités de vivre en bonne intelligence avec la mer, de continuer à bénéficier de ses ap-ports tout en s’abstenant de lui nuire, puisqu’au final c’est l’humani-té qui a le plus à perdre. En effet, les grandes extinctions ont mon-trées que la nature et la vie trouvent toujours une solution pour per-durer. Les espèces, par contre, pas forcément.

Alors que pourrions-nous trouver, nous, enfants terribles mais inven-tifs, pour soulager les maux que nous avons pu infliger à notre « mer » ?

Il était une fois une enfant qui vivait dans un petit village indien dans la vallée du Kerala. Son père était un simple pécheur. Ce bébé ne pleurait pas, elle était toujours souriante. On lui donna le nom de Sudhamani. Tout le monde disait qu’elle était unique. Elle apprit à marcher et parler à l’âge de 6 mois. À trois ans, elle passait son temps à chanter et arrivée à l‘âge de 5 ans, elle composait des chan-sons en l’honneur de Krishna.

Tous tombaient sous son charme. Cependant, alors qu’ils la voyaient grandir, les chants, les danses, les transes méditatives commençaient à ennuyer sa fa-mille. Ils la réprimandaient, faisant souvent usage de la force et des humiliations. Quand elle atteignit l’âge de 9 ans, sa mère tomba malade. Bien qu’elle ait été l’élève la plus brillante de sa classe, elle dut abandonner l’école pour s’occuper de sa famille. C’était une tache difficile avec 7 frères et soeurs à nourrir et habiller et des animaux à soigner. Elle était devenue l’esclave de la famille littéralement, travaillant de l’aube au crépuscule.

Parmi ses taches ménagères, elle devait trouver des restes pour nourrir les vaches de la famille. Elle fai-sait alors le tour des maisons voisines, ramassant de l’herbe et demandant s’il restait des épluchures de légume ainsi que du gruau de riz. À cet époque là, elle vit de nombreuses choses qui la troublèrent. Elle constata que certains mourraient de faim pen-dant que d’autres avaient plus que de raison. Elle remarqua que beaucoup des personnes malades et souffrantes n’avaient pas les moyens de s’offrir un simple antalgique. Et, elle nota que les personnes

âgées étaient négligées et maltraitées par leur pro-pre famille. Son empathie était telle qu’elle ne pou-vait supporter de voir les autres souffrir. Ainsi, alors qu’elle n’était qu’une enfant, elle réfléchit beau-coup sur la souffrance. Elle se demanda pourquoi les gens étaient malheureux… Et la présence de Dieu était tellement évidente en elle qu’elle fut prise d’une volonté irrépressible de réconforter ceux qui étaient moins chanceux qu’elle.

C’est à ce moment là que la mission d’Amma débu-ta. Elle partageait sa nourriture avec les miséreux, elle lavait et habillait les personnes âgées qui étaient délaissées. Elle fut punie lorsqu’elle donna la nourriture de la famille aux pauvres mais Sudha-mani poursuivit ses actes de bonté. Elle trouva re-fuge dans la solitude de la nuit, passant des heures à méditer et prier Krishna. Pendant la journée, elle portait une photo de lui dans la poche de sa robe, récitant ses noms sans arrêt. Pendant tout le temps de ses corvées, elle commença à imaginer que tout ce travail qu’elle accomplissait, c’était pour lui qu’elle le faisait.

À la fin de son adolescence, Sudhamani commença à s’élever spirituellement. Un jour, alors que Sudha-mani rentrait chez elle, portant une botte d’herbe sur son dos, elle entendit les derniers vers de Sri-mad Bhagavatam venant d’une maison voisine. La lecture venait de se terminer et les chants dévotion-nels commençaient. Sudhamani s’arrêta brusque-ment et écouta les chants. Elle courut vers le lieu où les dévots s’étaient rassemblés. Possédée par Krish-na, ses mouvements et même ses traits devinrent

Amma, la mère uni-verselle

par Julie Bailleul

ceux de la divinité. Interrogée plus tard sur cet évènement, Amma raconte « Au début, je dansais seule, invoquant Krishna mais per-sonne ne le savait. Un jour j’ai souhaité me fondre avec l’Être Su-prême totalement pour ne jamais revenir. Alors j’ai entendu une voix qui me disait « Des milliers de gens dans le monde sont marqués par la misère. Tu as beaucoup de choses à faire pour moi, toi qui est avec moi. » ».

Après cela, régulièrement, Sudhamani apparaissait en Krishna Bava et les gens venaient la rencontrer sur la plage à coté de chez elle. Seulement, des jeunes qui se faisaient appeler «  les rationalistes  » l’ont attaquée. Son père a fini par avoir pitié d’elle lui construisit un abri pour qu’elle puisse voir ses dévots.

Aussi extraordinaire que cela ait pu être, Krishna Bhava n’était pas le point culminant de la spiritualité de Sudhamani. C’est ainsi que, peu après cet évènement, elle eut une vision inoubliable d’Adi Parashakti (l’essence du pouvoir de la Mère Divine).

Jusque là, Sudhamani était capable de s’occuper de toutes ses cor-vées À partir de ce moment là, elle ne pouvait même plus prendre soin d’elle même. Elle oubliait de se laver ou de manger. Elle considé-rait que même ces choses essentielles étaient une perte de temps. Elle voulait uniquement penser à la Mère Divine et rien d’autre.

Son frère aîné, incapable de comprendre son extase, la maltraita. Un jour, dans un moment de rage, il la jeta dehors. Sudhamani vécut alors dans la rue. Ce sont les animaux qui la protégèrent et s’occupè-rent d’elle. Ils semblaient mieux la comprendre que n’importe quel être humain. Ils lui apportèrent à manger, un aigle déposa du poisson entre ses jambes, une famille de vaches lui présentaient leurs mamel-les pour qu’elle puisse avoir du lait, un chien rapporta des sachets de nourriture et tous la veillèrent pendant qu’elle méditait. On dit même que certains animaux pleurèrent quand ils la virent dans un tel état de misère.

La Mère Divine grandit et s’éleva en elle. Elle se mit à embrasser tous ceux qui venaient lui parler, voyant en chacun d’eux, un de ses en-fants. Des centaines de personnes vinrent la voir pour passer quel-ques minutes dans ses bras. Amma écoutait leurs malheurs et les con-solait.

Pendant ce temps, les jeunes du village intensifièrent leur harcèle-ment au point d’essayer de la tuer. En 1979, les premiers dévots d’Amma vinrent vivre auprès d’elle. Alors que de plus en plus de per-sonnes venaient l’embrasser et profiter de sa présence, un ashram fut construit. Cepndant, puisque les enfants d’Amma n’étaient pas tous indiens, elle accepta leurs invitations et fit son premier tour du monde.

À présent, Amma passe le plus clair de son temps en voyage et les gens se rassemblent par dizaines de milliers pour venir prendre Am-ma dans leurs bras. Ils patientent des heures durant, pour quelques secondes de sa présence. En 30 ans, Amma a embrassé plus de 33 millions de personnes. Le darshan d’Amma, son don est au centre de son existence. Certains jours, devant l’affluence de personnes venant lui rendre visite, elle passe plus de 20 heures sans discontinuer à prendre les gens dans ses bras.

La maison d’Amma est à Amritapuri dans le Sud de l’Inde. C’est aussi la maison de moines, religieuses, dévots et étudiants. Ils ont été inspi-rés par l’amour d’Amma et dévouent leurs vies au service du monde à travers les oeuvres humanitaires d’Amma. Elle est au coeur d’une orga-nisation non gouvernementale, Embracing the world, qui offre de la nourriture, des vetements, des abris et une éducation aux plus dému-nis. Elle a construit des orphelinats, des écoles, des hopitaux, et des habitations un peu partout en Inde. Aux Etats-Unis, Embracing the world fournit des douches et des refuges aux sans abris, propose des livres et des visites médicales pour les prisonniers et aide les victimes de violences conjugales. L’organisation mobilisa 1 million de dollars pour aider les victimes de l’Ouragann Katrina. Après le séisme de 2004, elle permit de loger et nourrir des milliers de personnes dans des zones de l’Inde où l’aide gouvernementale était inadaptée. Elle parti-cipe à améliorer la qualité de vie de millions d’Indiens en nettoyant les eaux des fleuves et rivières et en mettant à disposition des toilettes pu-bliques.

Les adversaires d’Amma sont nombreux. Un rationaliste l’accusa même de meurtres et tenta de prouver que tous les miracles d’Amma étaient un vaste mensonge. Le parti communiste indien émit les mê-mes accusations dans un journal national. En 2002, l’auteur des pro-pos s’excusa et affirma que toutes les morts invoquées étaient naturel-les. Les proches des défunts l’avaient contacté pour démentir ses pro-pos et le journal dut faire face à un procès pour diffamation. Il fut con-clu par les juges que seuls des motifs religieux avaient justifié les atta-ques et le journal fut donc condamné.

Toutefois, ce qui est certain c’est que les finances de l’organisation ne sont pas du tout transparentes. Puisque c’est une église, les États-Unis, autant que l’Inde ne cherchent pas à connaitre la manière dont les fonds sont dépensés. Les frais de scolarité de l’université de Embracing the World sont aussi bien plus élevés que ceux des universités indien-nes traditionnelles mais elle parvient à attirer les meilleurs professeurs du pays. Elle finance également un centre de recherche dont l’équipe-ment rivalise avec le MIT. La majorité des personnes n’est pas rémuné-ré mais aucune dépense n’est attendue d’eux non plus. On les nourrit, on les loge et on se contente facilement du minimum. Certains disent qu’Amma est parvenue à bâtir une utopie.

Amma affirme qu’elle n’est pas une déesse, qu’il n’y a rien de divin en elle et qu’elle ne fait que répandre de l’amour. Cela entre en totale con-tradiction avec la manière dont son image est mise en scène en tous cas : dans son ashram, sur les lieux où elle embrasse des gens, les pho-tos d’elle sont omniprésentes, des vêtements qu’elle a porté sont en vente, de même pour ses bijoux, un peu comme des reliques… L’histoire que j’exposais au début de cet article est celle là même que l’on vend au public qui lui rend visite. Il y a un entrelacement entre le mythe et la réalité qui est troublant et il est difficile de se forger une opinion éclairée sans y appliquer nos préjugés et notre cynisme occi-dental.

Pour ceux que cet article aura rendu curieux, Amma sera à Toulon du 6 au 8 novembre et à Chalons-en-Champagne du 24 au 26 novembre 2017.

« Si nous voulons apporter la paix au monde extérieur, il faut que la paix règne dans notre monde intérieur. La paix n’est pas une décision intellectuelle. C’est une ex-périence. » Amma

Quand on parle de Néron, on voit tous ce person-nage fantasque qui déclamait des vers en regardant brûler Rome, mais peu savent comment il arriva au pouvoir, peu connaissent le rôle que joua véritable-ment sa mère dans son accession au trône.

Nous sommes en hiver 14, ou peut être 15, dans un camp romain situé à l’emplacement de l’actuel Co-logne, une femme, Agrippine l’Ainée donne nais-sance à sa fille Agrippine la Jeune. Descendante directe d’Auguste, fille d’un victorieux général, le destin de cette jeune fille semble être béni des dieux et pourtant…

Caius Julius Caesar, le père d’Agrippine est admiré par tous. À la mort de son père, Auguste pousse son fils Tibère à l’adopter et à faire de lui son héritier, contrariant les chances de son fils naturel d’accéder au pouvoir. Caius s’illustre sur le champs de ba-taille, à tel point que les Germains finissent par le reconnaitre comme leur seul et unique maître. Mo-deste, il offre la Germanie à son empereur ne con-servant que le titre et nom « Germanicus ». Seule-ment, la vie à Rome n’a rien à envier aux feux de l’Amour et après moults rebondissements, Germani-cus meurt assassiné. Agrippine n’a que 4 ans. Elle est élevée par sa mère et ses grands-mères décou-vrant les coulisses du pouvoir et le rôle des femmes qui, bien que non officiel existe réellement. Elle apprend ainsi à survivre dans un milieu plus qu’hos-tile.

L’oncle d’Agrippine, Tibère, qui est aussi son grand père adoptif la marie avec son cousin Gnaeus Domi-tius alors qu’elle est âgée de 13 ans. Consanguinité,

inceste, … tout va très bien Madame la marquise. On ne sait pas grand chose de leur relation mais les mauvaises langues de l’époque décrivent Domitius comme un homme autoritaire et insensible. Sué-tone, le Stéphane Bern de l’Empire romain dit même de lui qu’il est peut être riche mais il est sur-tout fourbe et mesquin. On imagine donc que les relations de couple n’étaient pas des plus tendres et ont bien participé à durcir le caractère d’une Agrip-pine à peine pubère.

Libère décède en 37, et c’est Caligula, le seul frère d’Agrippine ayant survécu aux divers complots qui prend le pouvoir. Cette même année Agrippine donne naissance à un fils qu’elle baptise «  Lucius Domitius Athenobarbus  ». L’enfant-roi, l’enfant-ty-ran, il en est l’archétype tant et si bien qu’il se trans-forme rapidement de petit ange en empereur Né-ron. Ainsi, Domitius, extrêmement lucide ou cyni-que répondit aux félicitations pour sa paternité avec une phrase terrible : « Je ne pense pas que quoique ce soit produit par moi et Agrippine pourrait être une bonne chose pour l’État ou le peuple. »

Caligula adore ses soeurs et leur réserve de multi-ples honneurs comme le droit réservé aux Vestales Vierges d’assister aux jeux du cirque depuis les siè-ges les plus hauts du stade et aussi le privilège de voir leur minois s’afficher sur les pièces de mon-naie. Il pousse son amour si loin que des rumeurs de relations incestueuses entre frère et soeurs com-mencent à se répandre. Eh oui, à Rome, on épouse son cousin mais on ne touche pas à ses propres soeurs. Il ne faut pas exagérer non plus, les romains ne sont pas des barbares.

Agrippine, la mère d’un monstre

par Yvonne

Riechthofen

La soeur préférée de Caligula, Drusilla meurt en 38. À partir de ce moment là, Caligula perd la tête. Les conflits avec le Sénat s’aggra-vent. Au même moment, Agrippine, Livilla et le veuf de Drusilla, Le-pidus décident de mettre un terme à son règne. Ils mettent au point l’intrigue des trois dagues, un complot visant à tuer Caligula pour le remplacer par Lepidus. Les trois protagonistes sont accusés d’être des amants adultères. L’homme est exécuté et les deux soeurs sont en-voyées en exil. Caligula vend leurs meubles, leurs esclaves et donne congé à leur personnel.

Domitius, le mari d’Agrippine décède en 40 et leur fils part vivre chez une tante. Il paie cher la trahison de sa mère, tous ses biens sont confisqués et le trône semble lui échapper. C’est donc avec un certain soulagement qu’Agrippine apprend l’assassinat de Caligula, de sa femme et sa fille en 41. Son successeur, Claude lève l’exil et Agrippine retrouve son fils. Rapidement elle se remarie avec un homme riche et puissant, Crispus. L’enfant et Agrippine retrouve donc tous leurs biens. Crispus décède quelques mois plus tard. Sué-tone pense qu’Agrippine l’a empoisonné, récupérant ainsi le célibat et une énorme fortune du même coup.

Agrippine est donc un coeur à prendre. Son attention se porte sur l’empereur Claude mais il est déjà marié, et pas à n’importe qui, à Messaline. Mais si, vous savez qui elle est, on l’appelle aussi « la pu-tain impériale ». Il parait qu’elle a un appétit sexuel débordant, elle aurait même transformé une partie du palais en lupanar et n’hésite-rait pas à se prostituer… Et le pire, c’est que son mari, Claude, ac-cepte de tomber dans son jeu et d’exécuter tous les obstacles à sa débauche : amants récalcitrants et concurrence déloyale, tous y pas-sent.

Agrippine se tient donc éloignée du palais. Prudence est la mère de sureté. Cependant Messaline sent tout de même que le jeune Lucius, futur Néron est une menace pour son propre fils Brittanicus. Elle dé-cide donc de le faire exécuter, mais difficile de trouver un motif vala-ble alors que ce n’est qu’un enfant et que la mère se tient à l’écart… Elle envoie donc des mercenaires étouffer le jeune garçon dans son sommeil. Seulement, lorsque le tueur soulève l’oreiller, il découvre

un serpent et s’enfuit à toutes jambes. Agrippine avait fait dissimuler une peau inerte afin de protéger son fils.

La rivalité entre les deux mères est palpable. Ainsi pendant les jeux de 47, Agrippine et Lucius reçurent plus d’applaudissements que l’im-pératrice et son fils. Beaucoup commençaient à plaindre Agrippine qui avait vécu un certain nombre d’évènements traumatisants. Messa-line scella son sort toute seule, et surprise au coeur d’un complot visant à tuer l’Empereur, elle est exécutée. On peut croire qu’à ce moment là, Claude est refroidi par ses mauvaises expériences. Déjà trois mariages dont un qui aurait pu lui couter la vie… Il aurait pu se dire « on ne m’y reprendra plus ». Que nenni, Claude résolu à ne pas se laisser abattre (prenez ce mot dans le sens qui vous plaira), décide de se marier une quatrième fois.

Deux femmes sont en lice pour le poste d’impératrice. Il est clair que l’on épouse pas Claude parce qu’il est charmant et sympathique mais bien parce que c’est l’escalier qui conduit au sommet de l’État. Agrip-pine se voit alors mère du futur empereur avec tous les honneurs liés à un tel rang. En 49, c’est elle qui épouse son oncle. Les plus conser-vateurs n’aiment pas tellement cette union… Se marier entre cousins, c’est une chose, mais alors entre oncle et nièce… C’est plus difficile à accepter. Qu’importe, Agrippine fait fi de tout cela et en profite pour éliminer sa rivale Paulina qu’elle fait inculper pour magie noire. La pauvre femme n’a droit à aucun procès, on lui confisque ses biens et elle finit par se suicider.

Agrippine a beaucoup d’ambition. C’est une femme déterminée qui connait parfaitement les arcanes du pouvoir. Tout empereur doit avoir une femme à sa hauteur afin de consolider les liens familiaux et le droit de prétendre au titre d’Auguste. Claude a une fille mais elle est déjà fiancée. Est-ce un obstacle pour une mère dévouée ? Bien sûr que non. Il faut se débarrasser du fiancé et puis c’est tout. Le plus simple, c’est de l’accuser d’inceste avec sa petite soeur. On écarte ainsi deux personnes du pouvoir. Le fiancé se suicide, Agrippine fait assassiner le grand frère de celui-ci pour échapper à sa vengeance. Voilà, comment on sécurise une position et un héritage dans la Rome antique, il faut bien se salir les mains de temps en temps.

Le problème, avec les meurtres, c’est un peu comme avec les men-songes : il faut en faire de plus en plus pour ne pas être inquiété. Puis-que Messaline n’est plus un obstacle, Agrippine doit se débarrasser de Britannicus. Elle le prive de son héritage et l’isole. Sosibius, le tu-teur de Britannicus n’est pas vraiment d’accord. Il faut dire que son prestige aussi en prend un coup : de tuteur du futur empereur, il devient un obscur professeur d’un enfant envoyé à la campagne et dépourvu de tout… Agrippine le fait condamner à mort sous prétexte qu’il « complotait contre Lucius ».

Tous ces meurtres ne l’inquiètent pas plus que cela. Le roi celte, vain-cu par Claude s’incline devant elle, lui rendant les mêmes homma-ges qu’à l’empereur. Quelle importance me direz-vous ? C’est très bon pour l’ego et ça impressionne le public. Là on se dit, celle-là, c’est pas n’importe qui. Pour consolider tout cela, Agrippine est faite « Auguste », c’est la troisième femme romaine à recevoir ce titre. Ce n’est pas rien. D’ailleurs, à la place de Cologne, là où est née Agrip-pine, Claude fonde une nouvelle colonie romaine qu’il appelle « Agrippinensium ». Une ville à son nom, ça c’est un cadeau roman-tique… Noël approche, Messieurs, pensez-y !

Lucius est adopté par Claude qui en fait son successeur. Il est renom-mé à l’occasion Néron Claudius Caesar Drusus Germanicus. Néron est alors fiancé à Octavia, la fille de Claude et Agrippine fait revenir Sénèque le Jeune de son exil pour qu’il devienne le tuteur de Néron. Après mure réflexion, Claude commence à regretter d’avoir donné autant de pouvoir à sa femme. Non seulement, il doit abandonner son fils naturel, mais en plus elle commence à occuper un peu trop l’attention. Il décide donc de former Britannicus pour qu’il puisse lui succéder. Agrippine n’apprécie pas vraiment ce revirement de situa-

tion. Elle prend les devants et empoisonne Claude en 54 avec une assiette de champignons meurtriers.

Le plus ironique, c’est qu’Agrippine devient la prêtresse du culte de Claude qui a été déifié. Cela lui donne le droit d’assister aux réu-nions du Sénat et aux débats alors qu’elle est cachée derrière un ri-deau. C’est parfait quand on a des raisons d’être un peu paranoïa-que. Elle se ne doute pas que la trahison viendra de son coeur de mère. Néron est très manipulable pendant les premiers mois et dans les faits, c’est elle qui dirige l’Empire. Cependant, Néron est un homme, jeune certes, mais un homme tout de même. Alors, lors-qu’une femme fort jolie et irrésistible passe par là, il a tôt fait de se retourner contre sa mère. Tant et si bien qu’Agrippine complote pour porter Britannicus sur le trône, à la place de son propre fils.

Les tensions se multiplient. Néron la fait écarter du pouvoir, puis de Rome et lui retire même ses gardes du corps. Néron la fait donc as-sassiner. C’est le début d’un règne compliqué et meurtrier. On l’ac-cuse rapidement de matricide. Se déclare alors un vaste incendie pour lequel certains soupçonnent Néron d’en être l’auteur parce qu’il voulait reconstruire la ville à sa manière et la renommer « Nero-polis ». D’autres le dépeignent en train de jouer de la lyre pendant que Rome brûle sous ses yeux. Certains vont clamer le contraire et disent que Néron a ouvert son palais aux victimes… Seulement, rien n’y fait. L’opinion public est contre lui. Il fait donc exécuter les chré-tiens en les soumettant aux pires tortures, les accusant de tous les maux…

Agrippine restera dans l’Histoire comme la mère d’un monstre, aussi cruelle que vaillante.

Avec ce titre technique et prétentieux, je commence direct en mettant la pression sur vos douloureux et mollassons neurones, fatigués par la lecture des au-tres articles ! Et oui, je suis taquin ! Vous devriez le savoir depuis le temps …

Tous en eu ont une, ne fusse-t-elle que biologique (par pour longtemps, non merci d’avance aux bio-technologies). Mais quel est le rôle psychique de la mère ? Ne sont-elles pas là uniquement pour nous faire venir au monde, nous faire des bisoux (hiboux, choux, genoux, cailloux … bisoux), et des tartes aux pommes ? Pourquoi je n’ai pas éteint la télé quand je suis tombé sur le « Clash des ch’tis contre les marseillais dans la villa des coeurs brisés des princes dont l’amour est dans le pré des chasseurs d’appart’» ? … Je ne sais pas ! Pourquoi liriez-vous un article au sein duquel je commence par vous affirmez que je ne sais rien du sujet qu’il aborde ? … Taquin vous dis-je !!

La mère en devenir (« humaine » ou « animale »), le devient concrètement lorsqu’elle transmet la vie, telle une «  passeuse  » de relais olympique. C’est déjà pas mal, mais après ? Et bien elle a surtout un rôle « contenant ». Elle va embrasser la totalité de l’être de ses petits, de manière rassurante, manifes-tant une bienveillance chaleureuse par sa capacité d’accueil, neutre et inconditionnelle. C’est que le début … encore et encore, mais c’est déjà énorme … d’accord, d’accord … C’est certainement cet as-pect après lequel courent tous les êtres, avant même

la satisfaction des désirs, car c’est notamment de là que l’être tire sa confiance en lui, cette dernière devant être complétée par la confiance d’aller dans le monde (mais ça c’est pour une prochaine revue). Ce besoin de calinoux (hiboux, choux, genoux, cailloux, bisoux … calinoux) n’est pas un désir de désir, mais un besoin de tendresse. Mais là ou on peut identifier un rôle psychique, c’est que, une fois l’âge adulte atteint, et la mère génitrice dûment mé-prisée et fuie lors de l’adolescence, le besoin ne disparait pas mais le média, oui ! Cet état de fait vient nous montrer qu’en fait, il existe bien une es-sence de l’émotion, indépendant de la source, auto-nome, et que la vie, intrinsèquement, la contient déjà, et qu’il nous appartient, après avoir réalisé tout ça, d’aller trouver satisfaction de ce besoin par-tout ou elle peut se manifester. Dès lors la figure maternelle vient nous connecter à certaines parties de nous, mais comme un exemple, en tant que pre-mière expérience. Son rôle est donc de manière empirique, d’être un vecteur psychique, un média. Et, il serait bien possible d’y rattacher plusieurs ar-chétypes. En effet il serait réducteur de ne considé-rer que l’aspect de douceur contenante. Par exem-ple, notamment, aussi, pas que, mais quand même, si je suis lourd vous me le dite, attendez … attendez … les tarots ! (cartes de divination représentant cha-cune une étape du chemin psychique de l’être hu-main), ça valait le coup d’attendre, nous montrent plusieurs figures maternelles qui balisent notre che-min.

L’archétype de la mère

par Mr FeeX

Ainsi commencent-ils par nous montrer une étape d’accumulation de connaissances, en gestation. Amoureusement protectrice, le savoir et la sagesse nécessaires à une vie d’adulte sont rigoureusement et sérieu-sement accumulés, en attendant l’émergence d’une énergie qui permet-tra de les faire éclore. Cette éclosion se fait dans le monde, d’une ma-nière totalement incontrôlée, mais chaleureuse, conquérante et sûr d’elle : l’humanité pointe le bout de son petit nez (c’était pas trop tôt). Viendra ensuite une figure d’équilibre et de perfection, marquée par la justesse du jugement, devant préparer l’âme à sauter vers une nouvelle étape d’épanouissement. La figure maternelle viendra ensuite décou-vrir, vaincre, puis équilibrer le rapport entre la conscience et l’instinct : l’équilibre entre le raisonnement rationnel et la saine violence. Plus tard, une fois choses faites, c’est la guérison, et l’équilibre entre le ter-restre matériel et le transcendant du «  personne ne sait ce que sait mais il pourrait sembler que ça existe par ce que, quand même, les coïncidences dans la vie je veux bien mais à ce point là faut arrêter de déconner ! ». Puis, la mère vient irradier son environnement de ce qui est sorti de l’équilibre précédent.

Plus intéressant et plus profond encore (je change de paragraphe pour vous montrer un changement de niveau spirituel, … pas que taquin, également malinou : hiboux, choux, genoux, cailloux, calinoux … ma-linoux) : la transmission de l’intuitif profond, la fameuse intuition fémi-nine … présente uniquement chez le femmes et les guitaristes cheve-lus … Cette figure, mélancolique , onirique vient nous connecter à notre nature profonde, la partie qui est venue s’incarner. Nous faisant ressentir ce souvenir d’avoir été contenu de manière inconditionnelle (ou le manque total sinon), vient avec le besoin d’aller le retrouver et nous pousser à le faire (sinon on a la flemme … en même temps y a la dernière saison de « Games of Thrones » qui débarque, alors je com-prends bien !).

Enfin, la dernière figure archétype de la mère vient couronner le tout (je vous l’avais dit que ce sont les femmes qui dominent le monde) : l’accomplissement total dans le monde ! Voilà enfin ce que la figure de la mère représente ! Une fois toutes les étapes passées, c’est l’épanouis-sement de notre féminité à tous qui vient nous permettre d’être enfin grand, pas par notre réussite, par notre humanité … Elle est pas belle la vie ?!

L’archétype de la Mère chez Jung

L’archétype de la mère chez Jung prend la forme d’une mère biologique, d’une grand-mère, d’une belle-mère, d’une infirmière, d’une gouvernante. On peut la retrouver dans certaines images comme Marie mère de Dieu. Les autres symboles de la Mère sont l’Église, le pays, la Terre, les bois, la mer, un jardin ou une mer...

Les aspects positifs de l’archétype de la mer comme l’amour ou la chaleur, si célébrés dans l’Art et la poé-sie nous donne notre première identité dans le monde. Pourtant, il peut prendre un visage très néga-tif comme la Mère du destin. Jung y voyait l’arché-type le plus important parce qu’il contient tout le reste.

Quand il y a un déséquilibre chez la personne, on voit apparaître le complexe «de la Mère» : chez les hommes il se caractérise par un Don Juanisme qui lui donne l’envie de plaire aux femmes. Malgré cela, un homme qui a le complexe de la Mère est aussi résis-tant, persévérant et extrêmement ambitieux.

Chez les femmes, ce complexe peut surdévelopper les instincts maternels avec une femme qui ne vivrait que pour ses enfants en sacrifiant son individualité. Son mari devient alors uniquement un meuble comme un autre. les hommes sont attirés par les fem-mes qui ont ce complexe parce qu’il est l’image même de la féminité et de l’innocence.

Dans des variations de cet archétype, la femme va tout faire pour ne pas être comme sa mère. Elle peut se créer son propre monde par exemple en devenant une femme diplomée alors que sa mère n’a aucune forme d’éducation. Le choix du mari peut aussi être une façon de s’éloigner de sa mère. D’autres femmes vont développer une relation incestueuse avec leur père biologique, et une profonde jalousie envers leur mère. Elles peuvent alors s’intéresser aux hommes ma-riés ou bien collectionner les aventures amoureuses.

Le Nautilus glissait dans les eaux noires, à faible vitesse, silencieux. Sur la passerelle, le capitaine Bjorn Thorgilson pivota son siège de comman-dement vers le sonar :

— Statut de la cible ?

— Défilement constant, vitesse constante, capitaine, répondit l’officier en charge de la console, un gnome dont les grandes oreilles étaient cou-vertes par le casque acoustique.

— Torpilles 1 et 3 ? fit le capitaine en se tournant vers la console d’arme.

— Armes parées et sous tension, solution entrée, tubes 1 et 3 ouverts.

Bjorn hocha la tête, appréciateur. L’équipage se comportait à la perfection. Du moins, il le supposait : c’était pour lui son premier engagement réel. Il regarda son moniteur de situation tactique. Au centre était indiqué le Nautilus, dont il avait le commandement depuis un mois seulement, en remplacement du précédent capitaine, blessé au cours d’un accrochage. Un mois depuis qu’un représentant de l’Aurora Corporation lui avait proposé une mystérieuse mission, sans donner de précisions : explorer une planète aquatique et en chasser l’envahisseur extraterrestre. L’esprit d’aventures ancré dans ses gènes de Nordien, associé à la réquisition récente de son précédent commandement par l’armée vaporiste avait suffit à lui faire accepter. Et du jour au lendemain, lui qui n’avait jamais quitté la terre que pour prendre la mer s’était retrouvé embarqué dans un avion hypersonique en route pour Néo Athena, une des villes fondées par les colons terriens à leur arrivée sur Neorld. De là, il avait été escorté, émerveillé, dans l’ascenseur orbital tandis qu’on lui transmettait ses instructions et le détail de sa mission. Les 8 heures de transit lui avaient juste donné le temps de constater l’ampleur de la tache. Les deux semaines suivantes passées dans l’Apollon, la corvette spatiale de l’Aurora, pour rejoindre la ceinture d’anneaux en orbite de la planète Azura, avaient été bien courtes pour apprendre les spécificités du submersible qu’il allait devoir commander, et prendre connaissance des dossiers de l’équipage. En particulier la propulsion « nucléaire » lui restait bien mystérieuse. Il avait juste retenu que cette technologie, issue de la Terre, avait été bannie par les colons, mais que la guerre avec les Lélantons avait apparemment motivé l’armée à contourner cette interdiction. Comment l’Aurora Corporation avait pu en équiper son sous-marin, voilà un autre mystère. L’entrée atmosphérique dans une capsule de ravitaillement, masqué par une pluie de météorite provoquée, avait été assez éprouvante, mais l’émerveillement de se retrouver sur cette planète dont la surface était quasiment intégralement recouverte d’eau avait suffit à lui faire ou-blier tous ses désagréments. Il avait suivi le chargement des blessés dans la capsule comme dans un rêve, et c’est le départ de celle-ci pour re-joindre l’Apollon qui l’avait ramené à la réalité.

Depuis, il avait navigué dans les eaux Azuriennes, apprenant à connaître le navire et son équipage, mais surtout cette mer tellement différente des océans de Neorld, ses courants changeants, ses fonds, sa faune qui avait curieusement de grandes similitudes avec celle de sa planète – ce qui en rendait les différences d’autant plus impressionnantes.

Deux jours plus tôt, leur route les avait amenés à proximité d’un navire lélanton isolé. Ils l’avaient suivi de loin, tourné autour en restant à dis-tance, de façon à analyser toutes ses émissions sonores. Apparemment, les Lélantons n’étaient pas experts en technologie maritime : le moteur du navire était très bruyant, son hélice cavitait – lui-même avait appris ce terme définissant la création et l’effondrement bruyant de bulles d’air autour d’une hélice mal optimisée – et la structure ressemblait à une coque basique sur laquelle on aurait posé un maximum de structures sans véritable souci d’optimisation. Peut être n’avaient ils pas d’océans sur leur planète ? Pour quelqu’un issu d’un peuple de marins, c’était la seule explication possible.

Quoi qu’il en soit, il estimait le navire comme déplaçant entre 2000 et 3000 tonnes. Il avait décidé arbitrairement de le classer comme frégate, au vu de ce qu’il supposait être des armes. L’analyse n’avait pas été facile du fait d’une mer très agitée depuis la rencontre.

La voix de l’officier sonar le ramena à la situation présente : « Transitoires multiples dans l’azimut de la cible. J’ai des bruits d’impacts de surface. On dirait un grenadage ! Explosions multiples !

— Feu tube 1, et à plonger toute ! » lança-t-il immédiatement.

La surpression d’air éjectant la torpille lui fit claquer les tympans. Quelques instants plus tard, au travers de la coque, de sourdes détonations se firent entendre, étouffées.

— Je ne pense pas qu’ils nous visent, capitaine, fit le sonar d’une voix étonnée. Ils semblent tirer sur quelque chose à leur niveau. Mais je n’ai aucun autre bruit mécanique dans la zone, juste du biologique !

Fiction : Azura

Bjorn afficha la recopie de l’écran du sonar sur son pupitre, et saisit l’écouteur. Il savait que rien ne remplaçait l’oreille, mais la technologie permettant l’affichage aidait grandement. L’affichage en cascade des fréquences sonores faisait apparaître une longue ligne représentant le navire lélanton. Tout en haut apparaissait une autre ligne venant de l’avant du Nautilus, et qui changeait progressivement d’azimut pour rejoindre le navire : il s’agissait de la torpille. Quelques traits horizontaux indiquaient les explosions qui filtraient, étouffées, à travers la coque. En augmen-tant le gain, le capitaine fit apparaître une autre trace, discrète, intermittente, qui ne se repérait que par des sons émis à intervalles réguliers. La fréquence des émissions sonores s’était accrue depuis le début du grenadage. Se callant sur leurs émissions, il tenta de les écouter. Il n’était pas sûr, mais il lui sembla percevoir comme une lamentation, un appel à l’aide — ou était-ce son imagination ?

La torpille avait parcouru la moitié de la distance la séparant du navire. Rien n’indiquait que les lélantons l’aient détectée, mais cela ne saurait tarder. Devait-il annuler le tir et poursuivre ses observations ? Ou laisser l’arme finir sa mission ? Il ne connaissait pas les capacités de communi-cation des lélantons, ni leur vitesse d’intervention. Il n’était même pas sûr que la torpille suffise à couler la frégate. Tant d’inconnues… mais le choix lui incombait.

Quelques minutes passèrent, puis l’officier sonar signala :

« Capitaine, j’ai des transitoires sur la cible. J’ai l’impression qu’il tourne vers la torpille. Le nombre de tours d’hélice accélère !

— Ils ne savent pas ce que c’est, alors ils l’attaquent. Ils vont avoir une sacrée surprise ! fit Bjorn, provoquant quelques rires dans le comparti-ment. Immersion périscopique ! Je veux voir ce qu’il fait. Timonier, stabilise au mieux sans trop découvrir le mat. Je sais que la mer est agitée, priorité à la sécurité du bâtiment ! »

Rapidement, le chuintement de sortie du périscope se fit entendre, tandis que le Nautilus commençait à rouler sous la houle. L’écran du capi-taine renvoya l’image de la caméra en surface. On y voyait plus souvent sous les vagues qu’au dessus, mais régulièrement, la structure du navire lélanton était visible, elle aussi bousculée par les fortes vagues. Un étrange objet composé de trois tubes triangulaires semblait projeter, à inter-valle régulier, un faisceau lumineux vers la mer. Soudain, la frégate fut prise dans une boule de feu. Le bruit de l’explosion, assourdit, leur par-vint quelques instants plus tard. Une seconde explosion, encore plus forte, se fit entendre également. Deux minutes plus tard, tous les regards rivés sur les moniteurs regardaient la poupe de la frégate disparaître dans les flots qui semblaient s’être un peu calmés.

Bjorn avait ordonné de faire surface, et était sorti sur le pont, bravant les embruns. Cela lui rappelait son enfance, aux côtés de son père sur le bateau long en bois et voile carrée, loin de la technologie qu’il utilisait maintenant. Quelques débris flottaient en surface.

— Mettez deux chaloupes à la mer, et récupérez tout ce que vous pouvez, on fera des analyses. Restez sur vos gardes, méfiez vous de tout ce qui pourrait être explosif, toxique ou encore vivant !

Pendant que les hommes sortaient deux canots gonflables d’une écoutille, il fouilla les environs avec ses jumelles en mode infrarouge. Sur quoi pouvaient-ils tirer ? Une tache lumineuse se découpait, un peu plus loin. Il ordonna de s’en approcher à vitesse lente.

L’animal lui évoquait une sorte de baleine : d’une vingtaine de mètres de longs, la massive créature grise agitait doucement deux paires de na-geoires pectorales, et une immense nageoire caudale multicolore. Son flanc était comme brulé sur trois lignes. Un sang visqueux et noirâtre s’écoulait de plusieurs blessures donc certaines contenaient encore des éclats d’un matériau blanchâtre. Le submersible manœuvra pour se ran-ger contre le flan de la créature. Il posa sa main sous l’immense œil qui semblait le fixer.

Thadémus, le xénobiologiste de l’expédition et également second officier, s’approcha : « Et si sa peau sécrétait des toxines, tu y as pensé ?

— Thad, au lieu de dire des sottises, sors moi ces fragments de cette pauvre créature, fais des prélèvements, et soigne-la du mieux que tu peux. Et ce n’est pas la peine de gonfler tes plumes ! On est sur sa planète, elle n’a rien demandé, et pourtant on vient y faire la guerre.

— Nous non plus, on ne l’a pas demandé, cette guerre. Ce sont les Lélantons qui ont attaqué sans raison.

— Hum, je me demande… Aucun des tiens n’était présent pour le savoir, fit le capitaine en se dirigeant vers l’écoutille.

Thadémus faisait partie d’une race surnommée « les gardiens ». Ces individus avaient une apparence majoritairement humanoïde, mais chacun affichait également des traits plus ou moins marqués d’une espèce animale. L’officier, l’un des rares de son espèce à avoir décidé de se mêler activement aux autres espèces au lieu de les observer de loin, voyait sa pilosité remplacée par des plumes. Même si aucun gardien ne le confir-mait vraiment, il était communément admis qu’il suffisait qu’un d’entre eux assiste à un évènement pour que tous les autres en aient immédiate-ment connaissance. Ils formaient ainsi une sorte de réservoir de l’histoire du monde – ou du moins ce qu’ils en voyaient.

Lorsque Bjorn arriva dans le poste de commandement, il réalisa que les mouvements du bateau s’étaient atténués. Il jeta un œil sur les moni-teurs : la mer se calmait, effectivement. Il remarqua que l’officier de veille radar changeait régulièrement son sélecteur de mode.

Lorsque Bjorn arriva dans le poste de commandement, il réalisa que les mouvements du bateau s’étaient atténués. Il jeta un œil sur les moni-teurs : la mer se calmait, effectivement. Il remarqua que l’officier de veille radar changeait régulièrement son sélecteur de mode.

« Quelque chose au radar ?

— J’ai eu un écho de surface se dirigeant vers nous au cap 040, de façon intermittente, comme si quelque chose perturbait le signal. Plus aucune trace depuis deux minutes. Par contre sur le radar météo, j’ai une formation orageuse qui évolue anormalement vite autour de sa der-nière position. Je n’ai pas assez de données pour estimer une vitesse et direction, mais je le situe à plus de 150 nautiques. Je n’ai jamais vu des conditions météo comme cela !

— Cette mer est différente de celles qu’on connaît sur Neorld. Il va falloir l’apprivoiser, apprendre à la lire. C’est peut être normal par ici. Te-nez-moi informé, fit le Capitaine. Il se tourna vers l’officier d’armement : Que donnent tes enregistrements ?

— C’est parfait : la signature acoustique montre des fréquences facilement identifiables. La torpille a explosé avec le détonateur de contact, mais les capteurs magnétiques et acoustiques actifs captent également bien la cible, ce qui confirme les informations de l’armée. On pourra facilement faire des attaques par dislocation. De plus, ils n’ont déployé aucune contre mesure.

— Tôt ou tard, ils apprendront. Enfin, en attendant, on va en profiter. Très bien, merci. Annonce générale : plongée dans 30 minutes.»

Le soleil se levait sur une mer d’huile tandis que le dernier canot venait s’amarrer à bord. Les matelots firent transiter les sacs contenant les dé-bris récupérés en surface. Les plongeurs de combat venaient juste de remonter quelques éléments ramassés au fond. La zone était marquée, ils pourraient revenir étudier le reste plus tard. Dans l’immédiat, il fallait partir : l’orage visible à l’horizon masquait un navire de surface s’appro-chant à plus de 35 nœuds.

Un grand bruit d’éclaboussure fit se retourner Bjorn. L’espèce de baleine s’éloignait en frappant la surface de son immense nageoire caudale. Thadémus s’approchait de lui :

« J’ai retiré les shrapnels, et recousu tout ce que j’ai pu. Je n’ai pas fait d’injection, ne sachant pas de quelle façon cela pourrait l’affecter, mais je n’ai pas l’impression que les blessures soient graves. Ca m’a l’air costaud comme créature. J’ai fait des prélèvements sanguins, et de peau sur les blessures, pour analyses. Il y a manifestement une arme à radiations, peut être un laser ou un canon à particules. Je vais étudier tout ca, et lancer une analyse biologique complète. Capitaine, je jurerais qu’elle savait ce que je faisais. Elle n’a pas bougé pendant tout le temps où je la soignais, mais s’est écarté dès que j’ai commencé à ranger mes affaires. »

Les purges s’ouvrirent et laissèrent l’air s’échapper des ballasts dans un nuage de vapeur. Tandis que l’eau venait remplir les réservoirs, le Nauti-lus s’alourdissait, et sa proue s’enfonça doucement sous les flots. La vague d’étrave vint balayer le pont. Rapidement, le kiosque fut submergé à son tour. Le submersible se stabilisa doucement à trente mètres de profondeur, battant doucement les eaux à l’aide de sa turbopompe. De l’ex-trémité de la dérive se déroulait un câble à flottabilité nulle portant des microphones à intervalle régulier.

Les quatre hélices propulsant l’immense navire lélanton étaient une copie, agrandie, des hélices des navires scientifiques présents sur Azura avant l’invasion. La forme et l’état de surface ne bénéficiaient pas de nombreuses années d’expériences en matière de cavitation. En consé-quence, chaque pâle laissait derrière son passage une bulle sous pression, qui éclatait bruyamment. Un courant chaud d’eau douce s’écoulant tranquillement vers le sud ouest, entre deux eaux froides et plus salées, assurait un couloir au sein duquel les ondes sonores se propageaient sans être perturbées, jusqu’aux microphones placés sur les flancs et sur les 3000 mètres de câble à son arrière. A intervalle régulier se faisait également entendre un son strident.

« Ils frappent toujours la mer au sonar actif. Entre la distance et la thermocline, aucun risque qu’ils ne nous repèrent, mais si on s’approche, je ne garantis rien : aucune idée de la sensibilité de leurs instruments. J’ai quelques échos du fond, très accidenté. Sont-ils capables de le discrimi-ner ? » déclara le gnome de sa voix aiguë.

Bjorn écouta son officier sonar avec attention. A vitesse très réduite, ils avaient contourné le navire – classé comme cuirassé vu sa taille esti-mée, faute de plus de précisions – et se trouvaient maintenant sur son bâbord arrière. Les quatre tubes étaient armés, leurs portes ouvertes, les torpilles alimentées. Tout le Nautilus était prêt au combat. Autour, la mer restait calme, et même les bruits biologiques se faisaient plus discrets, comme si l’univers retenait son souffle dans l’attente de ce qui allait se passer. Bien sûr, ce n’était qu’une vue d’esprit. Un message téléchargé quelques heures plus tôt depuis le satellite avait appris au capitaine que deux submersibles de l’armée avaient repéré une plateforme off-shore escortée d’une importante flotte. Ils devaient avoir commencé l’engagement depuis une dizaine de minutes, selon leur planning. Les nordiens étaient coutumiers des raids multiples et simultanés, à la fois pour saturer et désorganiser les lignes de défense, et pour faire passer un message : « nous pouvons frapper n’importe où, à n’importe quel moment », ce qui obligeait l’adversaire à garder une vigilance constante, donc cou-teuse et épuisante. Bjorn entendait bien répéter ce schéma. Il donna l’ordre de mise à feu des deux premières torpilles.

L’eau sous pression, chassée par un piston, s’engouffra à l’arrière du tube, chassant la torpille qui s’y trouvait. La prise du câble d’alimentation de l’arme s’ouvrit, amorçant ainsi un premier signal. L’accélération de l’eau autour de l’arme ferma un capteur, lançant le second signal. Le cerveau électronique de la torpille décida alors qu’il était sorti du tube : sa mission commençait. Il ordonna l’ouverture d’une valve, admettant ainsi de l’eau de mer dans le compartiment énergétique. Ceci provoqua une réaction chimique avec les éléments de la batterie, qui se mit à débiter de l’électricité dans tout le système. A l’arrière, un moteur électrique entraina les deux hélices contrarotatives. La torpille accéléra doucement, con-çue pour perturber le moins possible son environnement.

Le module de navigation ordonna de brèves corrections des gouvernes, pour vérifier leur fonctionnement. Tout répondait correctement. Il chercha alors dans sa mémoire la première instruction de son programme : un segment de 6 nautiques à vitesse intermédiaire au cap 280 à 20 mètres de profondeur. Le gyroscope indiquant un cap actuel au 220, le calculateur déplaça les gouvernes pour ajuster son cap, puis accéléra. Le minuteur de fonctionnement envoya un premier top : la torpille était maintenant à plus de 150 mètres du sous-marin. Le programme ordonnait donc d’amor-cer la charge. Plusieurs relais se fermèrent, activant ainsi la charge explosive. Un seul relais restait encore ouvert sur la chaine de mise à feu, et ne serait fermé que lorsque la torpille passerait en mode d’attaque.

Les deux torpilles fendaient les flots à 30 nœuds, déroulant chacune derrière elle un câble de fibre optique relié au Nautilus grâce auquel elles échangeaient des informations avec le lanceur. Le capitaine avait été surpris lorsqu’on lui avait présenté ce système la première fois : après tout, on pouvait communiquer par radio d’une planète à une autre, pourquoi utiliser un fil avec les torpilles ? Il avait alors appris que les ondes radios ne traversaient pas l’eau.

Arrivé au premier point de navigation, les armes bifurquèrent une première fois au cap 220, pendant 4 nautiques, puis au cap 150. Rapidement, le sonar embarqué capta un bruit dont les fréquences correspondaient à celles codée dans la mémoire du calculateur. Discipliné, ce dernier trans-mit l’information via le long fil flottant entre deux eaux. Rapidement vint la confirmation du sous marin : là était bien la cible, il pouvait passer en mode d’attaque. Le dernier relais de la chaine de mise à feu se ferma. Le moteur électrique accéléra au maximum, et la torpille atteignit rapide-ment les 55 nœuds. Les frottements de l’eau perturbaient un peu ses mesures sonar, mais le son émit par le navire lélanton restait suffisamment clair pour qu’elle puisse estimer une trajectoire d’interception.

La source de bruit se faisait de plus en plus nette, la torpille s’approchait de sa cible. Brusquement, le son diminua considérablement. Le calcula-teur attendit deux secondes, conformément à son protocole : il était normal de perdre la cible lorsqu’il passait dessous. Mais le capteur magnéti-que de proximité ne signala rien, ce qui plongea le calculateur dans un moment de perplexité : il avait perdu sa cible ! Il décida alors de ralentir, et de faire des zigzags en suivant la direction générale qu’il avait suivi jusque là. Son sonar embarqué détectait bien un bruit de fond, mais rien dans les fréquences correspondant à sa cible. Il y eu bien pendant quelques temps un énorme son saturant toutes les fréquences, mais la signature ne correspondait toujours pas. Plusieurs passages sur toute la fréquence se firent entendre peu après, que le calculateur filtra comme étant des échos.

« Détonation de la torpille numéro 2, capitaine !

— Décrochez le fil, fermez le tube et rechargez. Préparez les tubes 3 et 4. Qu’en est-il de la torpille 1 ? Elle devait être devant ?

— Je l’ai toujours en filaire. Elle est passée en recherche sinusoïdale. On dirait qu’elle est passée dessous sans le détecter.

— Hum, peut être une contre-mesure ? Ou une défaillance du capteur ? Sonar, tu as quelque chose ? fit Bjorn en dépliant son propre écran de contrôle tandis qu’un grondement sourd se propagea à travers la coque.

— Rien pour le moment… Attendez… Un bruit mécanique… des bruits d’hélices. Il est toujours en vie. J’ai aussi la torpille 1, derrière la cible.

— Armement, fais faire demi-tour à l’arme, mode recherche circulaire, profondeur 3 mètres, détonation à l’impact. Pilote, immersion périscopi-que, je veux voir ce qu’on a là. »

Quelques minutes plus tard, la tête du mat optronique perçait la surface. Bjorn utilisa la manette directionnelle pour trouver le navire lélanton, puis zooma dessus. Si le précédent navire donnait une impression de chaos, celui-ci était au contraire d’une sobriété toute géométrique : un pont plat, surmonté de 4 globes répartis à l’avant et à l’arrière d’un bloc cubique central, le tout d’une couleur gris terne. L’imagerie infrarouge souli-gnait la forme générale du navire, et faisait ressortir la sphère la plus à l’arrière du pont comme point chaud. Plusieurs objets sombres en jaillirent et retombèrent tout autour du navire. La mer se mit à bouillonner, et plusieurs grondements sourds résonnèrent dans le Nautilus.

« Capitaine, je viens de perdre la torpille 1, le fil est sectionné ! s’exclama l’officier d’armement.

— Décroche le fil et recharge. Feu sur tubes 3 et 4 sur piste actualisée, profondeur 3 mètres, détonation à l’impact. »

A chaque fois qu’il ordonnait un changement de cap, espérant tromper l’adversaire, l’appareil venait frapper au sonar à proximité. Il avait forcé-ment un moyen de détection, moins précis mais très rapide. Un détecteur d’anomalie magnétique, peut être ? Le Nautilus était censé être dis-cret dans ce domaine, mais comment être sûr ? Ou alors une autre technologie, inconnue des habitants de Neorld ?

L’opérateur mit à jour le programme des torpilles avec la dernière position obtenue du navire. La surpression provoquée par l’éjection des deux armes fit claquer les tympans de Bjorn. Son regard fut attiré par un mouvement sur l’écran du périscope.

« En plongée d’urgence ! Rentrez le périscope. Pilote, maintiens au plus près du fond, sans prendre de risques, cap général au 180, autorisa-tion de changer à loisir pour éviter le relief, suivant le sondeur. Réduis la vitesse à 1/3. Sonar, la cible vient de lancer un appareil volant, trouve le et suis le ! Avertis moi s’il se rapproche. »

La carte de situation permettait de voir les positions connues des éléments autour. Mais Bjorn trouvait qu’elle montrait surtout ce qu’il ne savait pas : l’appareil volant était représenté au milieu d’un cercle dont le diamètre augmentait avec le temps, ce qui représentait la zone dans la-quelle il pouvait se trouver. Et encore, ils avaient du faire une hypothèse sur sa vitesse maximale. Non que cela ne change quoi que ce soit, le cercle englobait très largement la position du Nautilus, au centre. Par endroits, des points bleus émettaient régulièrement un cercle grandissant avant de s’effacer. Un son aigu était perceptible au même moment. Des bouées actives, mouillées par les lélantons, dont il fallait se tenir écar-té. Vers le haut de la carte, deux icones indiquaient les torpilles. Elles allaient aborder leur dernier virage et passer en phase d’attaque. Bjorn donna l’ordre de tirer les deux tubes restant. C’était un pari risqué, qui l’empêcherait de lancer d’autres armes pendant de longues minutes, mais ils n’avaient détecté aucun autre navire. Pour les aériens, c’était une autre histoire. Il disposait bien de quatre tubes lance missiles dans le kiosque, mais il devait être à l’immersion périscopique pour pouvoir les utiliser. De plus, d’après les rapports d’essais, le taux de réussite était inférieur à 40%, alors que son utilisation révélait la position du sous marin à coup sûr.

L’officier sonar se redressa brusquement : « Capitaine ! … »

Le cri du sonar actif vrilla les tympans du nordien. Il devait être tout prêt, impossible qu’il ne les ait pas détecté. Le temps n’était plus à la dis-crétion.

« Libérez les câbles, fermez les tubes et rechargez. Sonar, ramène l’antenne remorquée et préviens dès qu’elle est complètement rentrée. Pi-lote, en avant deux tiers. »

L’antenne linéaire remorquée freinait le submersible, et serait arrachée s’il naviguait à sa vitesse maximale. Il y en avait une seconde à bord, mais Bjorn préférait éviter de s’en séparer. De plus, par précaution, il en avait déjà fait rentrer 2000 mètres. Ses capacités de détection allaient être grandement diminuées s’il perdait l’antenne.

Le sonar signala une, peut être deux détonations. Les torpilles ? Difficile à dire, ils allaient déjà trop vite pour pouvoir entendre correctement, et sans le retour du filoguidage, le nordien en était réduit à faire des suppositions.

Un second ping, plus fort encore que le premier, l’assourdit à nouveau. Cette fois il avait tapé juste au dessus d’eux. Il était temps de courir pour s’échapper.

Lorsque le sonar annonça que l’antenne était rentrée, il était prêt : « Pilote, en avant toute, cap 330. Cavitation autorisée. »

L’accélération brusque manqua de le renverser alors que le pont s’inclinait brutalement. Puis rapidement, il se stabilisa à nouveau. Bjorn sentit le pont vibrer sous ses pieds – la turbo pompe brassait à pleine puissance, propulsant le monstre d’acier à plus de 40 nœuds. A travers le bruit du glissement de l’eau sur la coque, il crut entendre une succession de sons aigus. Avant qu’il n’ait pu interroger l’officier sonar, celui—ci s’était retourné :

« Capitaine, j’ai un autre sonar actif, répété, au 230. Je pense que c’est le cuirassé, en mode attaque. Il est tout proche! … Changement de fré-quence, on vient de croiser sa route ! Je ne suis pas sûr, mais j’ai un possible grenadage !

— Alerte générale : fermez toutes les écoutilles, préparez vous pour grenadage !»

Bien loin de toute cette agitation, le vent qui soufflait doucement sur la surface de la mer azure provoquait de petites vagues. L’une d’entre elle allait un peu plus vite que la précédente, qu’elle rattrapa et avec laquelle elle fusionna. La vague résultante, plus grande, prit encore de la vi-tesse, laissant un creux derrière elle qui fit ralentir la vague suivante. Progressivement, la masse d’eau en mouvement augmenta, se nourrissant de la houle légèrement plus lente. Dans le chaos laissé par son sillage germaient deux autres vagues, déjà deux fois plus haute que la houle environnante.

Cela faisait 40 longues minutes que le Nautilus se livrait au jeu du chat et de la souris avec le cuirassé lélanton, et Bjorn n’aimait pas avoir le rôle du gibier. Ils avaient subits trois grenadages déjà, un trop court, le suivant trop profond. Les charges de profondeur du dernier n’étaient pas passées loin, et leurs explosions les avaient bien secoués. La double coque du sous marin avait résisté, mais pour combien de temps encore ? Et ce maudit engin aérien…

Thadémus jugea bon d’apporter son avis :

« D’après nos observations, les appareils volants lélantons disposent de capacité de détection et de propulsion avancées, encore incomprises. Et ils se défendent plutôt bien : les forces de protections orbitales de Neorld doivent généralement utiliser des attaques saturantes pour les dé-truire.

— Je vois. Armement, rappelle-moi comment fonctionnent les missiles ?

— On a 4 tubes verticaux dans le kiosque. Les missiles peuvent être lancés depuis 20 mètres de profondeur, mais il faut être au moins à profon-deur périscopique pour pouvoir sortir le radar ou l’infrarouge, et pouvoir désigner une cible avant le tir. Sinon, ils doivent trouver la cible par eux même après être sorti de l’eau, au risque de passer complètement à coté. Leur cône de détection est…

— Combien de temps pour tous les envoyer à partir du moment où on est en position ? l’interrompit le nordien.

— Je vois ce que tu veux faire ! Environ 20 secondes si je prédéfini les directions de départ, par contre il faut rester à moins de 15 nœuds pen-dant ce temps, sinon on arrache les trappes. Une minute plus le temps d’acquisition si je dois les envoyer sur cible ou…

— Alerte grenadage ! » Le cri venait de l’officier sonar.

Malgré l’absence de toute perturbation extérieure, un paisible courant de fond se mit soudainement à tourbillonner, et s’élever vers la surface. Il passa ainsi au dessus du monstre de 22.000 tonnes d’acier et de titane qui fendait les eaux sans se rendre compte de rien, et monta à la rencontre des cylindres bourrés d’explosifs lâchés par le navire de surface. Les remous de courant détraquèrent imperceptiblement les capteurs de pression des charges de profondeur, provoquant leurs détonations une dizaine de mètres trop haut. Cela n’empêcha pas les ondes de choc de bousculer le Nautilus dans tous les sens dans l’enfer des explosions qui s’ensuivit, mais cela s’avéra suffisant pour permettre à la coque de ne pas se déchirer. Après l’explosion de la dernière charge, le courant changea à nouveau, et vint doucement pousser la masse métallique dé-sormais inerte vers le fond.

Un éclair… Puis un autre… Bjorn revenait progressivement à la conscience. Encore un éclair – il avait les yeux fermés, un goût de sang dans la bouche, et l’impression d’être endolorit de partout. Que c’était il passé ? Il avait comme un bourdonnement dans la tête. La sensation était désagréable. Il se força à ouvrir les yeux. Les flashs venaient des ampoules d’urgence, dont les rotations du faisceau rouge donnaient une al-lure lugubre au poste de commandement. Le nordien grogna en se redressant dans son siège. Autour de lui, les autres membres d’équipage semblaient également secoués, mais vivants. Il activa l’interphone pour demander un rapport des dégâts.

La situation aurait pu être pire : aucune blessure grave, quelques contusions et coupures légères du coté de l’équipage – probablement grâce aux mousses disposées sur tous les rebords. Le Nautilus était stabilisé, aucune voie d’eau détectée, les équipements vitaux étaient alimentés par batterie. Le discours du chef mécanicien, par contre, le laissait perplexe parce qu’il n’en comprenait pas un traitre mot : le réacteur s’était mit en sécurité suite à un arrêt des pompes primaires. Bjorn décida de se rendre directement au compartiment machines pour essayer d’y voir plus clair. Ce ne fut pas le cas, mais il comprit qu’il y avait des réparations à faire.

« Donc si je comprend bien, il faudrait au moins une heure pour réparer le circuit normal…

— le circuit de sodium liquide, oui…

— dont on ne sait pas s’il ne risque pas de fuir. Et ce sodium liquide explose au contact de l’eau. Dans un sous-marin. J’aimerais savoir qui est le responsable de cette ‘excellente’ idée ! Par contre, on peut récupérer l’énergie et la propulsion immédiatement en activant les pompes de secours ?

— le circuit à eau pressurisée, oui, plus robuste mais plus bruyant.

— Bruyant… je n’aime pas ca… Bon, on n’a pas le choix de toute façon, on ne peut pas attendre sans rien faire. Faisons comme ça. Préviens-moi dès que les réparations sont faites. »

A travers l’océan, un train de trois vagues avançait, poussées par le vent, plus vite que les autres, dont elles se nourrissaient. Chacune des va-gues faisait déjà 10 mètres de haut, et s’étendait sur des dizaines de kilomètres de front.

Lorsque le courant fut remis, le poste de commandement sembla revenir à la vie avec le démarrage de toutes les consoles, des lumières et de la ventilation. D’après la centrale inertielle, qui fonctionnait sur une batterie autonome, ils avaient nettement dérivés, et l’indicateur de profon-deur était au niveau du plancher marin. Avant de remettre la pompe hélice en marche, le capitaine ordonna de faire un sondage des environs : les cartes, établies au fur et à mesure de leur progression, étaient loin d’être précises, et la profondeur indiquée l’inquiétait, même si manifeste-ment ils n’étaient pas échoués.

Les projecteurs d’exploration balayèrent les flancs escarpés du ravin dans lequel était engoncé le Nautilus. Comment s’était-il retrouvé là ? L’es-pace entre les deux parois ne permettait au submersible de s’infiltrer que dans le sens longitudinal, et encore, en descente verticale. Le son-deur indiquait une grande cavité plus bas, sur bâbord. A explorer, mais plus tard, décida Bjorn, en faisant marquer l’emplacement sur la carte. Le tempérament bagarreur hérité de ses ancêtres le poussait à mettre un terme au combat – de préférence par l’élimination de ces adversaires.

« Bien, voici le plan : on remonte doucement à l’immersion périscopique. Sonar, tu me localises le cuirassé, et l’aérien – pas d’antenne remor-quée, je veux pouvoir accélérer au besoin. Je veux une solution pour le cuirassé, on lui envoie une volée de 3 torpilles – je préfère en garder une disponible. Et dès que l’aérien s’approche, on envoie tous les missiles dans sa direction approximative, et on replonge vite. Des questions ? Bon, alors purgez les ballastes, doucement. Pilote, contrôle l’assiette ».

Le Nautilus s’éleva hors de la faille accompagné d’un nuage de bulles. Bientôt, la pompe hélice se mit à tourner, doucement, pour donner un peu de vitesse et de contrôle au submersible.

Bjorn surveillait au périscope sur tribord le ballet de l’appareil volant lélanton, une sorte de patatoïde muni de trois ailes brisées. Etrange comme il avait pu les trouver facilement tout à l’heure, et maintenant le voilà qui cherchait, manifestement au hasard. Quant au navire, il tour-nait sur lui-même, frappant les eaux de son sonar actif – mais trop loin pour être une réelle menace. Le poste des machine appela : « circuit de sodium réparé et étanche, capitaine, demande permission de l’activer ?

— Accordé ».

Alors que le léger vrombissement des pompes disparût, Thadémus attira l’attention du capitaine sur le moniteur de surveillance qui affichait une du périscope à 360° :

« Vous avez vu ? Qu’est ce que c’est que ca ? »

Droit derrière eux, une ligne sombre se dessinait à l’horizon, et prenait régulièrement plus de hauteur.

« Un grain ? Ca n’en n’a pourtant pas l’air…

— Capitaine, l’aérien vient vers nous ! »

Effectivement, l’appareil se dirigeait maintenant droit vers eux, à grande vitesse, comme s’il s’avait qu’ils étaient là. Derrière, le cuirassé se tour-nait également dans leur direction. Bjorn se jeta sur l’interphone :

« Du capitaine aux machines : coupez le circuit sodium, repassez sur les pompes secondaires, vite ! C’est comme ca qu’il nous repère ! Puis, vers la console d’arme : prépare les missiles ! Feu à volonté, comme pour les torpilles 1 à 3 !

— Par tous les dieux, capitaine, c’est incroyable… regarde ça ! fit Thadémus, pointant vers la vue arrière du Nautilus.

— Thad, je suis occupé, pas le… »

L’image sur l’écran lui coupa la voix. « Plongée d’urgence !!!»

Le mur d’eau couvrait tout l’horizon et mesurait maintenant plus de 25 mètres de haut. Il avançait à grande vitesse, suivi de deux autres vagues tout aussi gigantesques, au milieu d’une mer relativement calme par ailleurs. Le phénomène aurait intrigué tout océanographe s’il s’en était trouvé pour l’observer.

Les quatre missiles surgirent à la surface dans un chapelet de flammes, et se dispersèrent en éventail. Le premier se précipita droit dans la mu-raille d’eau, le quatrième se perdit dans le ciel. Les deux autres, par contre, se trouvaient de part et d’autre de l’aéronef lélanton, et réussirent à l’accrocher sur leurs autodirecteurs. Celui—ci lança également un projectile qui percuta et détruisit le premier missile, et fit une embardée pour éviter le second. Malheureusement pour lui, cette manœuvre le précipita à la rencontre de la première vague, qui l’englouti totalement. L’appareil fut broyé sous la pression monumentale de plusieurs tonnes d’eau en mouvement.

Les projecteurs d’exploration balayèrent les flancs escarpés du ravin dans lequel était engoncé le Nautilus. Comment s’était-il retrouvé là ? L’es-pace entre les deux parois ne permettait au submersible de s’infiltrer que dans le sens longitudinal, et encore, en descente verticale. Le son-deur indiquait une grande cavité plus bas, sur bâbord. A explorer, mais plus tard, décida Bjorn, en faisant marquer l’emplacement sur la carte. Le tempérament bagarreur hérité de ses ancêtres le poussait à mettre un terme au combat – de préférence par l’élimination de ces adversaires.

« Bien, voici le plan : on remonte doucement à l’immersion périscopique. Sonar, tu me localises le cuirassé, et l’aérien – pas d’antenne remor-quée, je veux pouvoir accélérer au besoin. Je veux une solution pour le cuirassé, on lui envoie une volée de 3 torpilles – je préfère en garder une disponible. Et dès que l’aérien s’approche, on envoie tous les missiles dans sa direction approximative, et on replonge vite. Des questions ? Bon, alors purgez les ballastes, doucement. Pilote, contrôle l’assiette ».

Le Nautilus s’éleva hors de la faille accompagné d’un nuage de bulles. Bientôt, la pompe hélice se mit à tourner, doucement, pour donner un peu de vitesse et de contrôle au submersible.

Bjorn surveillait au périscope sur tribord le ballet de l’appareil volant lélanton, une sorte de patatoïde muni de trois ailes brisées. Etrange comme il avait pu les trouver facilement tout à l’heure, et maintenant le voilà qui cherchait, manifestement au hasard. Quant au navire, il tour-nait sur lui-même, frappant les eaux de son sonar actif – mais trop loin pour être une réelle menace. Le poste des machine appela : « circuit de sodium réparé et étanche, capitaine, demande permission de l’activer ?

— Accordé ».

Alors que le léger vrombissement des pompes disparût, Thadémus attira l’attention du capitaine sur le moniteur de surveillance qui affichait une du périscope à 360° :

« Vous avez vu ? Qu’est ce que c’est que ça ? »

Droit derrière eux, une ligne sombre se dessinait à l’horizon, et prenait régulièrement plus de hauteur.

« Un grain ? Ca n’en n’a pourtant pas l’air…

— Capitaine, l’aérien vient vers nous ! »

Effectivement, l’appareil se dirigeait maintenant droit vers eux, à grande vitesse, comme s’il s’avait qu’ils étaient là. Derrière, le cuirassé se tour-nait également dans leur direction. Bjorn se jeta sur l’interphone :

« Du capitaine aux machines : coupez le circuit sodium, repassez sur les pompes secondaires, vite ! C’est comme ca qu’il nous repère ! Puis, vers la console d’arme : prépare les missiles ! Feu à volonté, comme pour les torpilles 1 à 3 !

— Par tous les dieux, capitaine, c’est incroyable… regarde ca ! fit Thadémus, pointant vers la vue arrière du Nautilus.

— Thad, je suis occupé, pas le… »

L’image sur l’écran lui coupa la voix. « Plongée d’urgence !!!»

Le mur d’eau couvrait tout l’horizon et mesurait maintenant plus de 25 mètres de haut. Il avançait à grande vitesse, suivi de deux autres vagues tout aussi gigantesques, au milieu d’une mer relativement calme par ailleurs. Le phénomène aurait intrigué tout océanographe s’il s’en était trouvé pour l’observer.

Les quatre missiles surgirent à la surface dans un chapelet de flammes, et se dispersèrent en éventail. Le premier se précipita droit dans la mu-raille d’eau, le quatrième se perdit dans le ciel. Les deux autres, par contre, se trouvaient de part et d’autre de l’aéronef lélanton, et réussirent à l’accrocher sur leurs autodirecteurs. Celui—ci lança également un projectile qui percuta et détruisit le premier missile, et fit une embardée pour éviter le second. Malheureusement pour lui, cette manœuvre le précipita à la rencontre de la première vague, qui l’englouti totalement. L’appareil fut broyé sous la pression monumentale de plusieurs tonnes d’eau en mouvement.

Ensuite, la vague atteignit le cuirassé, qui tentait de lui échapper – trop tard. La première masse frappa le navire sur l’arrière, par tribord, avant qu’il ait fini de tourner, et le fit rouler sur le coté. C’est à ce moment que la première torpille frappa, au milieu des superstructures qui se pré-sentait désormais à l’horizontale. L’explosion déchiqueta les deux sphères du milieu du pont, et creusa un trou dans celui—ci. Le courant des-cendant à l’arrière de la vague redressait le navire, puis le poussa à giter dans l’autre sens, quand la seconde torpille frappa au niveau de la quille, qui représentait actuellement pour l’engin la ligne de flottaison de sa cible. Les puissants explosifs déchirèrent la coque déjà fragilisée en deux. La seconde vague percuta ce qui était déjà une épave à ce moment, et propulsa la proue du navire vers les profondeurs.

La troisième torpille avait détecté les explosions des deux précédentes, dont les échos saturaient son sonar passif. Elle prit donc la décision de passer en mode actif. Le retour des sons à haute fréquence lui permit de repérer deux cibles potentielles. La plus proche se trouvant sous le plancher limite qui lui avait été programmé, elle l’écarta pour s’intéresser à la seconde, dont la trajectoire semblait chaotique. D’ailleurs, la centrale de navigation de la torpille lui indiquait que ses propres déplacements étaient perturbés, et devait compenser en permanence. La ci-ble se rapprochant, le calculateur amorça le détonateur. Lorsque le capteur magnétique signala une détection, un relais se ferma.

La première explosion en provoqua une seconde, nettement plus importante, ce qui créa une bulle de gaz à très haute température au milieu de la vague, laquelle s’effondra localement. La troisième vague balaya les derniers débris, alors que la première sembla ralentir. Les trois mas-ses d’eau se percutèrent, et commencèrent à s’effondrer suivant le creux de la seconde. Un gigantesque rouleau se forma brièvement, avant de s’écraser à son tour. En dix minutes, la mer était revenue calme, uniquement parcourue par une légère houle.

Le Nautilus avait plongé en urgence en voyant la montagne d’eau, et avait réussi à passer dessous. L’équipage avait écouté avec attention les détonations. La confirmation d’explosions secondaires, ainsi que les bruits d’écrasements par la pression de la proue du croiseur lélanton avait suscité quelques réactions de joie, vite contenues. Nul ne savait quel avait été le sort de l’appareil volant.

Après 20 longues minutes sans rien entendre de nouveau, Bjorn ordonna de venir à l’immersion périscopique, d’où il constata que les envi-rons étaient déserts. Il commanda la purge des ballasts.

Le submersible vint se stabiliser, en surface, et l’équipage se déversa sur le pont, profitant de l’air frais

blanc sur le ciel rougissant, accompagnés de deux des cinq lunes, dans un spectacle enchanteur. Au loin, une immense créature sombre faisait des bonds hors de l’eau et provoquait de grandes éclaboussures en y replongeant.

Bjorn s’agenouilla sur le bord de la coque, et plongea ses doigts dans l’eau.

« Vois-tu, Thadémus, sur Neorld je n’ai jamais été très porté sur la religion. Aux dieux les affaires des dieux, à moi les miennes. Mais ici, avec ce que nous avons vu… Je prie pour que la mer ne se retourne jamais contre nous ! Bon, il faut envoyer le rapport à l’Aurora et demander du ravitaillement. Et j’aimerais explorer cette grotte sous marine qu’on a repéré tout à l’heure, j’ai comme dans l’idée que ca pourrait être un bon endroit pour installer une base. Quelque chose me dit qu’on va être là pour un bon moment. »

Le nordien sentit comme un courant chaud glisser entre ses doigts. Oui, ces eaux représentaient un défi à sa soif d’aventure et de découverte. Celui qui n’avait jamais vraiment eu d’attaches avait trouvé son foyer. Les yeux perdus vers l’horizon, il murmura comme une prière.

« Azura ».

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" Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !Suspendez votre cours :Laissez-nous savourer les rapides délicesDes plus beaux de nos jours !

" Assez de malheureux ici-bas vous implorent,Coulez, coulez pour eux ;Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;Oubliez les heureux.

" Mais je demande en vain quelques moments encore,Le temps m'échappe et fuit ;Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l'auroreVa dissiper la nuit.

" Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,Hâtons-nous, jouissons !L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ;Il coule, et nous passons ! "

Le lac par Alphonse de Lamartine