le combat antiraciste européen

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Présentation

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Page 1: Le combat antiraciste Européen

Présentation

Page 2: Le combat antiraciste Européen

Table des matières

Construire une société civile antiraciste européenne ....................................... 3

Historique ........................................................................................................................................... 3

Membres .............................................................................................................................................. 3

Actions .................................................................................................................................................. 4 Nuits européennes du testing ........................................................................................................................................... 4 Roma Pride ............................................................................................................................................................................... 5 Lobby auprès des institutions européennes ............................................................................................................... 5 Influence intellectuelle ........................................................................................................................................................ 6 Partage d’expertise ............................................................................................................................................................... 6

Calendrier prévisionnel 2012 ............................................................................. 7 Annual Meeting de l’EGAM { Oslo, Norvège .............................................................................................................. 7 Happening Européen contre les violences racistes ................................................................................................ 7 Campagne Européenne de Testing ................................................................................................................................ 8 Séminaire Européen sur l’histoire et la mémoire de la Shoah et des persécutions nazies .................. 8 Roma Pride Européenne ..................................................................................................................................................... 9 Annual Meeting de l’EGAM, Budapest, Hongrie ..................................................................................................... 10 Activités sur le long terme ............................................................................................................................................... 10

Annexes : Publications ...................................................................................... 12 Pour une société civile européenne antiraciste ! ................................................................................................... 12 Le renforcement du négationnisme du génocide des Tutsis ............................................................................ 13 Les "Assises contre l'islamisation de l’Europe", ou les dangers de l’extrême droite européenne ... 15 White Only ............................................................................................................................................................................... 17 Les jeunes Egyptiens ont le blues .................................................................................................................................. 18 La mort de Ben Laden marque-t-elle la fin de l'islamisme ? ............................................................................ 19 Pour l'interdiction du négationnisme du génocide des Arméniens par la loi .......................................... 21 De Srebrenica { Utoya, l'esprit de la "guerre civile européenne" .................................................................. 22 Appel { une «Pride» européenne pour les Roms le 1er octobre ..................................................................... 23 Une "Roma Pride" pour refuser le racisme et les discriminations ................................................................ 25 Racisme anti-Roms en Europe, l'alerte bulgare .................................................................................................... 27 Attachés { la démocratie, { la laïcité et au vivre ensemble, nous disons «non» aux intégrismes religieux ................................................................................................................................................. 29 Egypte : la France doit saisir la main tendue des révolutionnaires ............................................................. 31 Attentat du 6 avril 1994 : la vérité contre le négationnisme du génocide du Rwanda ....................... 32 De l'arrogance en politique... .......................................................................................................................................... 34

Page 3: Le combat antiraciste Européen

Construire une société civile antiraciste européenne

Historique

Depuis plusieurs années, le racisme, l’antisémitisme et les discriminations raciales sont en

progression partout sur le continent européen.

D’une part, les partis d’extrême droite remportent régulièrement des succès électoraux, et

influencent les coalitions gouvernementales ou les partis de gouvernement qui n’hésitent pas à

recycler les idées xénophobes à des fins populistes. Les mouvements d’extrême droite

séduisent de nombreux intellectuels, personnalités de la société civile, artistes et politiques.

D’autre part, la société civile antiraciste est d’une grande fragilité institutionnelle et financière

à travers toute l’Europe, et doit faire face à un manque de structuration politique de son

discours.

Ce constat a constitué le contexte institutionnel dans lequel a été lancée la constitution du

European Grassroots Antiracist Movement – EGAM.

Le point de départ a été les ratonnades contre des noirs migrants à Rosarno, dans le sud de

l’Italie, en janvier 2010, à la suite desquelles il n’y eut pratiquement aucune réaction de la

société civile et du monde politique, tant en Italie que dans le reste de l’Europe.

C’est dans ce contexte qu’a été décidée la constitution de l’EGAM, qui rassemble, dans

chaque pays du continent, les plus grandes organisations impliquées dans l’antiracisme.

A ce jour, l’EGAM compte 32 organisations membres issues de 29 pays. Il lutte contre le

racisme, l’antisémitisme et les discriminations raciales au niveau européen et a pour objectifs

de :

Renforcer le secteur antiraciste dans chaque pays.

Réaliser des actions de terrain coordonnées et simultanées.

Faire du lobby auprès des institutions européennes.

Membres

Les membres de l’EGAM sont :

Albania Mjaft ! Movement

Austria ZARA – Zivilcourage und Anti-Rassismus-Arbeit &

SOS Mitmensch

Belgium Kif Kif

Bosnia Youth Initiative for Human Rights (YIHR) – Bosnia

Page 4: Le combat antiraciste Européen

Bulgaria Bulgarian Helsinki Committee

Croatia YIHR – Croatia

Denmark SOS Mod Racism

Estonia Estonian Institute for Human Rights

Finland Rasmus network

France SOS Racisme

Germany TBB

Greece Greek Forum for Migrants

Hungary TASZ – Civil Liberties Union & NEKI

Italy SOS Razzismo

Kosovo YIHR – Kosovo

Latvia Latvian Center for Human Rights

Moldova Moldovan Institute for Human Rights

Montenegro YIHR – Montenegro

Netherlands Hi5 The King’s Movement.

Norway Norwegian Center Against Racism

Poland Open Republic

Romania Romani Criss

Russia Memorial

Serbia YIHR – Serbia

Slovakia Ludia Proti Rasizmu

Slovenia Ekvilib Institute

Spain SOS Racismo

Sweden Centrum Mot Rasism & Antidiscriminations Bureau

Turkey Durde

United Kingdom Search Light

Actions

Nuits européennes du testing

L’EGAM utilise l’outil du Situation Testing pour révéler les discriminations raciales dans

tous les secteurs de la société. Le Situation Testing consiste à répéter la même action

(demande d’emploi, entrée dans une boite de nuit) avec des personnes d’origines ethniques

différentes sur la base desquelles elles peuvent être discriminées.

Cet outil a valeur de preuve légale dans certains pays européens et permet de poursuivre en

justice les comportements discriminatoires. Il permet surtout de lever le voile sur des

comportements de la vie quotidienne qui empêchent de nombreux citoyens européens de jouir

de leur plein droit à vivre et faire vivre nos sociétés.

A cet effet, l’EGAM a lancé des campagnes de mobilisations inédites au niveau européen :

Première Nuit européenne du testing, contre les discriminations raciales, dans les lieux

de divertissement, le 5 mars 2011.

14 pays ont participé à l’opération simultanément.

Deuxième Nuit européenne du testing, contre les discriminations raciales, dans les

lieux de divertissement, le 11 juin 2011.

7 pays ont participé à l’opération simultanément.

Page 5: Le combat antiraciste Européen

Les campagnes européennes de testing ont été l’occasion de nombreuses reprises médiatiques,

en Europe, notamment dans des pays où les espaces de prises de parole concernant les

discriminations raciales sont extrêmement étroits, comme au Danemark ou en Serbie.

Par ailleurs, elles ont permis des avancées politiques concrètes significatives, comme la

décision de la Ville de Varsovie d’imposer à tous les lieux de divertissement louant dans des

immeubles de la Ville une clause dans le contrat obligeant à mettre en place une politique

antidiscriminatoire, et menaçant de fermeture tous les lieux ne respectant pas cette clause.

Enfin, elles ont permis d’impulser une dynamique militante forte au niveau européen, car elles

ont été les plus grandes mobilisations coordonnées de la société civile européenne antiraciste.

Roma Pride

L’idée d’une « Roma Pride », marche pour la dignité des Roms, tsiganes, gitans, manouches,

Gens du voyage,… a été lancée en novembre 2010.

Après un Preparatory Meeting à Bucarest début juillet 2011, la première Roma Pride s’est

déployée dans 7 pays européens le samedi 1er

octobre : Norvège, Danemark, Belgique,

France, Italie, Roumanie, Bulgarie.

Cette mobilisation a permis de créer des coalitions larges de la société civile, avec pour

initiateurs les organisations antiracistes membres de l’EGAM et leurs partenaires Roms

nationaux, pour dénoncer le racisme et les discriminations raciales dont sont victimes les

Roms à travers tout le continent, et pour réclamer une pleine et entière égalité des droits.

Cette mobilisation innovante, à la fois politique et culturelle, a été l’occasion de nombreuses

reprises médiatiques, de la plus grande manifestation de l’année eu Roumanie, et d’une

mobilisation dans 15 villes bulgares, alors même que se déroulaient des manifestations

d’extrême droite anti-Roms dans tout le pays.

La mobilisation a permis en outre de faire travailler ensemble les organisations antiracistes et

les organisations Roms, et d’impulser une dynamique nouvelle à l’échelle européenne.

Lobby auprès des institutions européennes

Tout d’abord, des réseaux de communication et d’information ont été constitués avec les

Membres de la Commission Européenne, les Membres du Parlement et les Membres du

Conseil de l’Europe.

Les dirigeants politiques et institutionnels européens sont donc mieux informés, plus

rapidement et avec des grilles de lecture plus construites, sur les questions de racisme,

d’antisémitisme et de discriminations raciales.

Page 6: Le combat antiraciste Européen

De plus, l’EGAM a rédigé une Déclaration Ecrite demandant la reconnaissance du testing

comme preuve légale de discriminations raciales, et dont l’adoption favoriserait sa

reconnaissance dans tous les pays de l’UE, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Influence intellectuelle

L’EGAM a commencé à publier des communiqués de presse destinés aux décideurs politiques

et institutionnels européens.

Surtout, l’EGAM a signé plusieurs tribunes, en France et à l’étranger, pour éclairer l’actualité

lorsque des événements étaient liés au racisme, à l’antisémitisme ou aux discriminations

raciales.

Partage d’expertise

L’EGAM a organisé un partage d’expertise au cours :

De l’Annual Meeting, dans lequel tous les dirigeants des 32 organisations membres de

l’EGAM se rencontrent et échangent à propos de leurs situations, expériences et

bonnes pratiques.

L’Annual Meeting de 2010 a eu lieu à Paris, celui de 2012 devrait avoir lieu à Oslo.

De Formations, qui précèdent les campagnes européennes du testing afin de former les

militants antiracistes à cet outil innovant et efficace.

Du Preparatory Meeting au cours duquel ont été éclaircis les contours de la Roma

Pride.

Du Séminaire Européen sur l’Histoire de la Shoah et des persécutions Nazies qui

permet d’apporter aux militants antiracistes européens un socle de connaissances

solide et commun pour lutter plus efficacement contre les négationnismes,

l’antisémitisme et le racisme dans leurs actions quotidiennes.

Page 7: Le combat antiraciste Européen

Calendrier prévisionnel 2012

Annual Meeting de l’EGAM à Oslo, Norvège

Dates : Du 6 au 9 Mars 2012

Concept : Meeting des dirigeants des 32 organisations membres de l’EGAM.

Evénement organisé par l’EGAM et son membre norvégien, The Antiracist Centre.

Nombre de participants : 80 dirigeants des organisations membres + 10 intervenants

internationaux.

Objectifs :

- Se rencontrer, débattre, échanger sur nos expériences et problèmes respectifs

- Assister à des conférences sur divers sujets (questions de mémoire, l’extrême

droite en Europe)

- Rencontrer des acteurs locaux (syndicats étudiants, parlementaires, membres du

gouvernement, membres des Jeunesses travaillistes etc.)

- Discuter et définir le programme de travail de l’EGAM en 2012 ainsi que

l’indépendance et la gouvernance du mouvement.

- Planification des activités futures

Suivi : L’Annual Meeting sera accompagné d’une champagne de communication

auprès des medias mais surtout auprès des institutions européennes. Il permettra

d’inscrire les acteurs institutionnels et les dirigeants antiracistes dans une dynamique

annuelle européenne.

Happening Européen contre les violences racistes

Dates : 17 Avril 2012

Concept : Happening européen pour dénoncer la résurgence des violences racistes et

des crimes d’extrême droite.

Lieu : Dans toutes les capitales européennes où sont présents les membres de l’EGAM

Objectifs :

- Dénoncer la résurgence des violences racistes et d’extrême droite

- Exprimer une solidarité des sociétés civiles européennes dans la lutte contre la

violence et pour la démocratie et la tolérance

- Sensibiliser le grand public et les médias sur la montée des violences racistes

Suivi : L’Happening Européen contre les violences racistes sera suivi d’une

Page 8: Le combat antiraciste Européen

conférence de presse à Bruxelles afin de sensibiliser le public et les décideurs sur ces

questions.

Campagne Européenne de Testing

Dates : Mai 2012

Concept : Campagne Européenne de Testing contre les discriminations raciales dans

les lieux de divertissement.

Lieu : Dans toutes les capitales européennes où sont présents les membres de l’EGAM

Formations : La campagne européenne de Testing sera précédée de 5 sessions de

formation des militants européens sur cet outil. Chaque session permettra de former

des militants originaires d’en moyenne 5 pays.

Objectifs :

- Former la société civile européenne à cet outil de lutte contre les discriminations

- Sensibiliser le grand public, les médias, comme les décideurs à l’ampleur des

discriminations raciales au quotidien

- Obtenir des réactions politiques, législatives ou judiciaires.

Suivi : La campagne européenne de Testing sera accompagnée d’une campagne de

lobbying auprès des autorités locales, nationales et européennes afin d’obtenir des

améliorations légales. Un rapport sur les différents testings menés lors de la

campagne sera rédigé et envoyé aux décideurs pour démontrer l’ampleur des

discriminations raciales dans les lieux de divertissements.

Séminaire Européen sur l’histoire et la mémoire de la Shoah et des

persécutions nazies

Dates : 10 au 14 Septembre 2012

Concept : Séminaire européen de formation des dirigeants antiracistes et roms

européens à l’histoire et la mémoire de la Shoah et des persécutions nazies.

Participants : 50 militants roms et antiracistes originaires de plus de 29 pays

européens.

Lieu : Paris, Mémorial de la Shoah, possibilité d’un partenariat avec l’UNESCO.

Activités : Conférences de spécialistes internationaux, ateliers participatifs, visites des

institutions mémorielles parisiennes, projections de documentaires.

Objectifs :

- Améliorer la compréhension de l’histoire de la Shoah et des persécutions nazies

des militants antiracistes et roms européens

- Construire, via cette transmission de connaissances historiques, une vision

Page 9: Le combat antiraciste Européen

européenne partagée du passé.

- Mieux combattre le négationnisme et les manipulations des faits historiques à des

fins politiques

- Permettre aux acteurs de la société civile européenne rome et antiraciste d’être

plus éclairés pour faire face aux événements politiques contemporains.

- Construire un espace de formation intellectuelle pour les membres de l’EGAM.

Suivi : Duplication de la formation au niveau local pour former de nombreux militants

antiracistes et roms des organisations participantes et de leurs réseaux,

Développement d’activités de terrain liées à l’histoire de la Shoah et des persécutions

nazies pour le grand public (conférences, expositions etc.)

Roma Pride Européenne

Date : 7 Octobre 2012

Concept : Evénement européen à al fois politique et culturel pour sensibiliser l’opinion

publique sur les discriminations et situations précaires dont sont victimes les

communautés romes à travers l’Europe.

Lieu : Dans toutes les capitales européennes où sont présents les membres de l’EGAM

Activités : Concerts, rassemblements, manifestations, conférences, expositions etc.

Objectifs :

- Améliorer la connaissance des cultures et de l’histoire des populations romes

européennes.

- Dénoncer les discriminations, la stigmatisation, la marginalisation et la précarité

des populations romes en Europe.

- Demander l’Egalité des droits et l’égalité de traitement pour tous les citoyens

européens

- Sensibiliser le grand public et les décideurs politiques nationaux et européens sur

ces questions afin d’obtenir des réactions politiques et institutionnelles.

Partenariat : Dans chaque pays, la Roma Pride sera organisée par un membre de

l’EGAM et une association rome. Ce partenariat inédit permettra de briser la distance

institutionnelle entre associations romes et antiracistes afin d’améliorer la protection

institutionnelle des organisations romes et d’intégrer les questions romes dans

l’agenda des organisations antiracistes.

Meeting Préparatoire : Une réunion préparatoire pour la Roma Pride se tiendra à Sofia,

Bulgarie du 27 au 30 juin 2012. Il permettra aux organisateurs de partager leurs

expériences passées, de discuter de la situation des Roms dans leurs pays respectifs et

de définir communément la forme de l’événement ainsi que le message politique à

promouvoir.

Suivi : Dans chaque pays, la Roma Pride sera précédée et suivie d’une campagne

nationale et européenne de communication pour mobiliser le grand public et les

personnalités. Une campagne de lobbying auprès des décideurs nationaux et

européens sera également mise en place pour que obtenir des réactions politiques et

Page 10: Le combat antiraciste Européen

institutionnelles.

Annual Meeting de l’EGAM, Budapest, Hongrie

Date : Novembre 2012

Concept : Meeting des dirigeants des 32 organisations membres de l’EGAM.

Evénement organisé par l’EGAM et son membre hongrois, NEKI : National Defence

Bureau of national and ethnic minorities.

Nombre de participants : 80 dirigeants des organisations membres + 10 intervenants

internationaux.

Objectifs :

- Exprimer une solidarité de la société civile européenne contre les dérives

autoritaires du gouvernement hongrois.

- Se rencontrer, débattre, échanger sur nos expériences et problèmes respectifs

- Assister à des conférences sur divers sujets (à définir)

- Rencontrer des acteurs locaux

- Discuter et définir le programme de travail de l’EGAM en 2013

Suivi : L’Annual Meeting sera accompagné d’une champagne de communication

auprès des medias mais surtout auprès des institutions européennes.

Activités sur le long terme

Des activités de lobbying

Objectifs:

- Informer et mobiliser les décideurs européens sur les questions de racisme,

d’antisémitisme et de discriminations raciales.

- Faire entendre la voix des associations antiracistes de terrain aux niveaux

institutionnels.

Actions : L’EGAM fournit des informations, des rapports et des analyses sur le

racisme, l’antisémitisme, les discriminations raciales et le secteur antiraciste en

Europe aux décideurs européens à travers une Newsletter Européenne, un site internet,

des revues de presse et des tribunes dans les grands journaux européens.

Un renforcement du secteur antiraciste dans tous les pays :

A cet effet, l’EGAM agit comme :

Plateforme de rencontre: A travers son Annual Meeting ou autres rencontres

européennes, l’EGAM permet aux dirigeants antiracistes européens de se rencontrer,

d’échanger et de débattre pour faire émerger une société civile européenne antiraciste.

Plateforme de conseil : L’EGAM apporte une expertise à ses membres sur les

questions européennes et le développement de projets et partenariats.

Plateforme de soutien financier: L’EGAM fournit à ses membres des informations

Page 11: Le combat antiraciste Européen

cruciales sur des appels à projets, des demandes de subventions et propose son aide

dans la rédaction des appels à propositions.

Plateforme de Solidarité: L’union des associations antiracistes apporte force et

protection à l’ensemble du secteur. Ensemble, les membres de l’EGAM mènent des

actions de terrain dont la dimension européenne apporte une protection naturelle.

Enfin, les membres du mouvement se soutiennent lorsque le racisme et la violence

frappent et que les droits fondamentaux sont remis en cause.

Ce constant effort de renforcement du secteur antiraciste implique des voyages réguliers de

l’exécutif de l’EGAM dans les pays membres. Ces voyages sont essentiels à la structuration

du réseau, au renforcement des liens entre l’EGAM et ses membres et permettre l’émergence

d’un mouvement antiraciste légitime et représentatif. Ainsi, l’EGAM peut soutenir ses

membres lorsqu’ils font fassent à certaines difficultés (comme lors des attaques d’Utoya, des

meurtres à Florence ou des manifestations anti-Roms en Bulgarie).

L’exécutif de l’EGAM doit également se rendre régulièrement à des événements majeurs ou

des conférences organisés par les institutions européennes, des organisations sœurs ou des

fondations privées. La présence de l’EGAM à ces événements est essentielle pour assurer la

représentation de la société civile antiraciste européenne.

Page 12: Le combat antiraciste Européen

Annexes : Publications

Pour une société civile européenne antiraciste !

LEMONDE.FR | 02.11.10 |

Notre constat est clair : alors que le racisme et l'antisémitisme s'étendent en Europe, la

résistance civile et politique est à ce point timide qu'elle est impuissante à conjurer ces fléaux.

Les récentes élections en Suède, en Hongrie et en Bulgarie, ainsi que l'accord de

gouvernement récemment conclu aux Pays-Bas, viennent confirmer la tendance : le racisme

politique progresse et enchaîne les succès électoraux en Europe.

Dopés par la crise économique et sociale, mais surtout par la crispation identitaire qui traverse

notre continent, les partis racistes inscrivent leurs thématiques traditionnelles au cœur des

débats publics et certains points de leurs programmes aux agendas gouvernementaux.

Cette influence électorale et idéologique grandissante est facilitée par la vitesse foudroyante

avec laquelle les opinions publiques européennes s'approprient, comme dans un funeste jeu de

dominos, les discours nauséabonds, à l'instar de ceux désignant récemment les Roms comme

une population dangereuse.

Cette circulation s'explique par les liens transnationaux qui existent entre les mouvements

racistes et par l'absence de repères intellectuels, politiques et idéologiques nécessaires pour

s'opposer à ces discours. Ce manque est dû notamment à la difficulté de beaucoup de pays

d'Europe à se confronter à leur passé : Shoah, fascisme en Italie, colonialisme pour les

anciennes puissances coloniales, totalitarisme en Europe de l'Est…

Il n'est alors guère étonnant que les réactions politiques et citoyennes aient été trop faibles

pour dénoncer les pogroms anti-noirs de Rosarno, dans le Sud de l'Italie, au début de l'année,

la stigmatisation des Roms en France, leurs expulsions forcées en Bulgarie, Grèce, Serbie,

Roumanie, jusqu'à leurs meurtres en Hongrie, les discours de haine anti-musulmans qui

sévissent au Danemark, en Allemagne et plus généralement en Europe de l'Ouest, comme les

discriminations raciales dont sont victimes au quotidien de nombreux citoyens en Europe.

Face à ce constat inquiétant, nous nous opposons fermement aux forces politiques qui se

nourrissent de ces contentieux pour produire leurs discours de haine. Nous n'acceptons pas

que les musulmans soient assimilés à des terroristes et à des dangers identitaires, que les

Roms soient expulsés, que les Juifs soient violentés et tentés de se dissimuler, que les noirs

soient pogromisés.

L'urgence de la situation nous oblige à faire émerger sans plus attendre une société civile

européenne antiraciste pour faire vivre par delà les frontières notre rêve européen.

Notre rêve européen, c'est de vivre sur un continent où la liberté d'un individu à définir son

propre destin n'est pas contrainte par ses origines familiales ou son appartenance à une

Page 13: Le combat antiraciste Européen

communauté, et de construire des sociétés de l'inclusion et de l'accueil, dans lesquelles

l'égalité entre les citoyens est inscrite dans les textes et dans les faits.

Pour faire vivre cet idéal, nous voulons faire entendre notre voix, celle des dizaines de milliers

de militants mobilisés au quotidien à travers toute l'Europe contre le racisme et

l'antisémitisme, celle des victimes trop souvent dépourvues de moyens d'action et d'influence

pour faire respecter leurs droits bafoués.

Nous allons mettre notre solidarité en acte en menant ensemble des actions de terrain, pour

transformer concrètement les réalités dans nos pays respectifs, et notamment pour y faire

reculer les discriminations raciales à l'emploi, au logement, aux loisirs, etc.

La tentation est forte, dans les périodes de crises, de désigner et de frapper des boucs-

émissaires, mais les discours de haine qui se nourrissent du manque d'espoir mènent toujours

à une impasse violente et destructrice de nos valeurs et de nos sociétés. Nous ne laisserons pas

circuler impunément la haine en Europe sans la combattre avec détermination.

Construire une Europe débarrassée du racisme et de l'antisémitisme est un défi immense, mais

nous avons avec nous la justice et notre force pour la faire triompher.

Signataires :

Abdoelhafiezkhan Dionne, présidente de la Fondation King Movement / Hi5, Pays-Bas ; Abtan Benjamin,

secrétaire général de l'European Grassroots Antiracist Movement ; Bihariova Irena, présidente de Ludia proti

rasizmu, Slovaquie ; Dabic Tea, coordinateur de Youth Initiative for Human Rights, Croatie ; Denes Balazs,

directeur exécutif de TASZ - Hungarian Civil Liberties Union, Hongrie ; Gidlund Lina, chef de projets du

Bureaux anti-discriminations de Suède ; Gjoshi Raba, directrice exécutive de Youth Initiative for Human

Rights, Kosovo ; Haruoja Merle, membre du Bureau e l'Institut estonien des Droits de l'homme ; Jedlicki

Jerzy, président de Otwarta Rzeczpospolita - Open Republic Association, Pologne ; Jereghi Vanu, directeur

exécutif de l'Institut moldave des Droits de l'homme ; Kanev Krassimir ; président du Comité Helsinki de

Bulgarie ; Kornak Marcin, prédient de Never Again !, Pologne ; Kouros Kristiina, secrétaire générale de la

Ligue finlandaise pour les Droits de l'homme ; Masic Alma, directrice deYouth Initiative for Human Rights,

Bosnie ; Matache Margareta, directrice exécutive de Romani Criss, Roumanie ; Micic Maja, directrice de

Youth Initiative for Human Rights, Serbie ; Moawia Ahmet, coordinateur du Forum grec des migrants ; Muhi

Erika, directrice de NEKI, Hongrie ; Nielsen Anne, présidente de SOS mod Racisme, Danemark ; N'Siala

Kiese Patrick, membre du Bureau de Kif kif, Belgique ; Osman Sherifay Mariam, présidente de Centrum Mot

Rasism, Suède ; Partapuoli Kari Helene, directrice du centre norvégien contre le racisme, Philipps Bruno,

président de Karawanserei ev Dresden, Allemagne ; Kovalenko Julia, avocate du Centre d'information juridique

pour les Droits de l'homme - LICHR, Estonie ; Primdahl Troels, chef de projets du Réseau nordique contre le

racisme – NoNAR, Danemark ; Raonic Boris, directeur de Youth Initiative for Human Rights, Monténégro ;

Scalzo Angela, présidente de SOS Razzismo, Italie ; Schindlauer Dieter, président de ZARA, Autriche ;

Sonderegger Philipp, directeur exécutif de SOS Mitmensch, Autriche ; Sopo Dominique, président de SOS

Racisme France ; Mjaft, Albania.

Le renforcement du négationnisme du génocide des Tutsis

LEMONDE.FR | 19.11.10 |

Depuis la diffusion le 1er

octobre dernier du rapport de l'ONU sur les atrocités commises au

Congo entre 1993 et 2003, qui suspecte notamment le Rwanda de crimes de guerre, de crimes

contre l'humanité voire d'actes de génocide, il s'opère un renforcement du négationnisme du

génocide des Tutsis.

Page 14: Le combat antiraciste Européen

Soyons clairs : avant d'être chef de l'Etat rwandais, Paul Kagame a été un chef de guérilla, et

c'est à la tête du Front patriotique rwandais qu'il a pris le pouvoir à Kigali, mettant par là fin

au génocide qui se déroulait sous l'impulsion des forces politiques qui dirigeaient alors le

pays.

Son action, comme chef de guérilla ou comme homme politique, doit être soumise à la

critique, à l'instar de ce que font à juste titre régulièrement les ONG et les organismes

internationaux.

La situation exceptionnelle du pays, où bourreaux et rescapés vivent côte à côte seize ans

après, si elle constitue un élément fondamental de compréhension, ne doit pas être une raison

d'adopter des critères différenciés d'évaluation des droits de l'homme, qui sont universels.

Cependant, dire, comme on l'entend de plus en plus depuis la parution de ce rapport, que ce

qui s'est passé au Rwanda en 1994 est "trop compliqué" pour en parler publiquement avec

clarté, qu'il faut attendre que les événements politiques actuels soient analysés avec la

distance du temps pour affirmer la simple vérité historique du génocide, que tout ça,

finalement, n'est pas si clair qu'on voudrait bien nous le dire, et donc qu'il est délicat de

qualifier de génocide le meurtre collectif et organisé de quelque 800 000 Tutsis entre avril et

juillet 1994, c'est participer du renforcement du discours négationniste.

Les rescapés, les premiers, se voient intimer l'ordre de condamner les faits et gestes de ceux

qui les ont sauvés d'une mort certaine, sous peine de voir leur histoire, notre histoire à tous,

niée. Alternative fallacieuse quand on sait que ceux qui portent ces discours sont les fers de

lance du négationnisme. Alternative qui confine au racisme car elle ne peut penser le Rwanda

autrement qu'en termes ethniques et complotistes, en faisant siens la thèse de la responsabilité

collective et le mythe d'un lien secret unissant tous les tutsis dans l'espace et dans le temps.

C'est dans ce cadre de pensée uniquement qu'il est logique de demander aux rescapés, en

premier, de condamner Kagame.

Cette logique de haine et de stigmatisation collective n'est que la perpétuation de la logique

qui a rendu le génocide possible. Demander à ceux qui en ont été victimes de la manière la

plus brutale de l'adopter est d'autant plus violent. Alternative qui tient du chantage

ignominieux car l'énonciation de la vérité historique ne peut être conditionnée au

positionnement politique actuel supposé des individus ou des institutions d'une catégorie de la

population.

FLOU

L'alternative proposée renforce le discours négationniste du génocide des Tutsis car elle

alimente ce qui le caractérise : le flou. Ici, et c'est peut-être la proximité temporelle qui

empêche cela, pas d'équivalent d'un Faurisson qui affirmerait que le génocide n'a pas eu lieu

ou qu'aucun tutsi n'est mort au Rwanda entre avril et juillet 1994.

Par contre, les mythes négationnistes, comme celui du "double génocide", dont Pierre Péan

est un des vecteurs les plus connus, sont autorisés par les tentatives de brouillage de la réalité

historique, pourtant abondamment étudiée et documentée.

Ainsi, le discours qui se présente comme respectueux des droits de l'homme et précautionneux

au vu des évolutions politiques récentes dans la région des Grands Lacs et du rapport de

Page 15: Le combat antiraciste Européen

l'ONU, contribue au flou qui renforce le négationnisme. Ce flou entraîne deux conséquences

principales.

Tout d'abord, il empêche la transmission de la connaissance historique de l'événement,

perpétuellement remise à plus tard, alors que les voix de certains témoins directs s'éteignent

avec leurs disparitions. Surtout, il sert à couvrir les responsables, en leur faisant gagner du

temps. Nombreux sont les génocidaires qui vivent en Belgique, en France, au Canada, sans

avoir été inquiétés jusque là.

Il profite à ceux, capitaine de gendarmerie ou bien responsable élyséen, qui portent une

responsabilité dans la préparation, l'organisation ou la perpétration du génocide et qui

cherchent à se soustraire à l'examen de celle-ci. L'exemple de Samuel Kunz, gardien du camp

d'extermination nazi de Belzec et inquiété par la justice seulement en 2010, est là pour nous

rappeler que les stratégies de gain de temps, comme celles à l'œuvre ici, peuvent s'avérer

efficaces.

Il est d'autant plus important de combattre ce renouvellement du discours négationniste, pour

que la vérité historique soit dite avec force et que la justice soit faite.

Benjamin Abtan est l'auteur de Rwanda. Pour un dialogue des mémoires (Albin Michel,

2007)

Les "Assises contre l'islamisation de l’Europe", ou les dangers de l’extrême

droite européenne

Nouvel Observateur 17-12-2010

On aurait tort de sous-estimer l’importance des "Assises contre l’islamisation de l’Europe"

organisées par le Bloc Identitaire ce samedi à Paris.

Tout d’abord, cette manifestation montre que les groupes racistes européens sont en lien, en

capacité de travailler ensemble et de régénérer une idéologie raciste commune. Face à cette

réalité, la constitution récente par SOS Racisme de l’European Grassroots Antiracist

Mouvement (EGAM), regroupant les principales organisations antiracistes d’Europe, est une

réponse de la société civile européenne, mais force est de constater qu’en la matière, les forces

militantes et politiques qui font du rejet de l’Autre le fondement de leur construction

intellectuelle et de leurs programmes politiques ont pris de l’avance.

Ensuite, cette manifestation vient illustrer le fait qu’en Europe, de plus en plus, cet Autre

contre lequel il faut se liguer, cet Autre à exclure d’une présence pleine et entière dans la

société, en particulier des lieux de pouvoir, cet Autre qu’il faut discriminer et expulser, cet

Autre contre lequel il faut définir un "nous" exclusif et ethnicisant, c’est le Musulman.

C’est dans le fantasme d’une invasion musulmane du continent et dans la croyance, qui relève

de la psychose, en une menace identitaire sur le point de détruire l’Europe qu’il faut trouver le

coagulant idéologique qui permet de souder entre eux des groupes racistes européens qui se

différencient de plus en plus en intégrant dans leurs discours l’expression de particularismes

nationaux.

A cet égard, Geert Wilders, dirigeant du Parti pour la liberté (PVV) néerlandais, est un

exemple éloquent. Tenant compte de certains éléments de consensus dans la société

Page 16: Le combat antiraciste Européen

néerlandaise, notamment la liberté d’expression et la tolérance religieuse, c’est prétendument

au nom de ces principes, qu’il abhorre en réalité, qu’il alimente la haine des musulmans. De

même, certaines déclarations de Marine le Pen, comme la présence à ces "Assises contre

l’islamisation de l’Europe" d’organisations ou de personnalités se réclamant du combat pour

la laïcité, veulent faire croire à l’intégration de cet élément, relativement consensuel, dans le

discours de l’extrême droite française, alors même que le Front National, fort de ses courants

catholiques fondamentalistes, constitue la force politique qui la combat le plus.

Ne soyons pas dupes : ces manipulation relèvent plus du subterfuge de communication que

d’autre chose.

De même, si la figure de fixation des discours racistes change, c’est toujours bien le même

mécanisme qui est en jeu : identifier l’ennemi intérieur – juif, musulman ou Rom - pour, sous

couvert de se défendre d’une prétendue agression, expulser, puis détruire tous ceux qui

n’entrent pas dans la catégorie d’un "nous" racialisé.

Par ailleurs, la présence à ce rassemblement d’Oskar Freysinger, dirigeant du parti d’extrême

droite suisse UDC, connu notamment pour avoir imposé, et remporté, le référendum sur

l’interdiction des minarets, n’est pas anecdotique et illustre la capacité de circulation des

discours racistes en Europe.

En effet, celui qui annonce fièrement qu’il prendra pour la première fois la parole en France

ce samedi n’a en réalité pas eu besoin de s’y déplacer physiquement pour que ses idées y

circulent. C’est en effet en filiation avec le débat suisse qu’en née, dans le chaudron du débat

sur l’identité nationale, la loi sur l’interdiction de la burqa en France. Sans vote suisse, ou sans

débat français et ses nombreux dérapages racistes, pas de discours stigmatisants aux relents

nauséabonds servant de justifications à cette loi.

Or c’est directement en référence aux arguments avancés par les promoteurs de cette loi en

France que les "Démocrates Suédois", l’extrême droite suédoise, ont pu imposer cette

thématique dans la campagne électorale, ce qui leur a permis de franchir pour la première fois

les portes du parlement et de provoquer un véritable coup de tonnerre en Europe.

On voit bien là la redoutable efficacité de cette circulation, dont ces "Assises sont un

accélérateur autant qu’un symbole.

Enfin, comme un nombre croissant de partis de gouvernement reprennent des éléments de

discours ou des points de programme élaborés dans les franges extrêmes de l’échiquier

politique, ces "Assises" devraient nous renseigner sur les tendances à venir.

Par exemple en Hongrie, c’est sous l’influence du Jobbik, qui prône depuis sa fondation en

2003 la reconquête des territoires de la "Grande Hongrie" perdus depuis le Traité de Trianon

en 1920, que le Fidesz au pouvoir fait monter la fièvre nationaliste magyare, ce qui ne

manque pas d’attiser les tensions avec la Slovaquie voisine et de marginaliser encore un peu

plus les communautés Rom et juive du pays.

De même en France, la criminalisation des immigrés et de leurs descendants, qui est au cœur

de l’offensive sécuritaire lancée par Nicolas Sarkozy au cours de l’été, n’est qu’une reprise

d’une thématique portée par le FN depuis de nombreuses années.

Page 17: Le combat antiraciste Européen

Il nous faudra donc être attentifs pour combattre dans les mois qui viennent les discours

élaborés lors de ces rencontres et pour empêcher leur passage vers les partis de gouvernement.

Ainsi, tant par ce qu’elles représentent que par ce qu’elles ne manqueront pas de produire, ces

"Assises" sont un événement politique d’importance, à combattre avec toute l’énergie que

donne le désir d’une société débarrassée du racisme.

Benjamin Abtan est Secrétaire Général de l'European Grassroots Antiracist Movement –

EGAM – et Membre du Bureau National de SOS Racisme

White Only

Mediapart, 21/03/2011

Par Benjamin Abtan

Alors qu'une étude récente révèle que dans toute l'Europe, l'accès à une soirée sur deux est

réservé aux «whites only», le Secrétaire général de l'European Grassroots Antiracist

Movement, Benjamin Abtan, décrit «un renforcement des pratiques discriminatoires dans

tous les secteurs de la vie».

Samedi 9 mars dernier, le Mouvement européen antiraciste (EGAM - voir la page Facebook

ici), fondé sous l'impulsion de SOS Racisme en novembre 2010, a organisé une grande

première sur tout le continent: la Nuit européenne du Testing (voir le rapport joint à l'article).

Dans 14 pays, de l'Espagne à la Pologne et de l'Albanie à la Suède, en passant par la

Roumanie et la France, quelque 300 militants antiracistes ont testé les discriminations raciales

à l'entrée de plus de 70 bars, restaurants et boîtes de nuit des principales villes européennes.

Le bilan est simple et préoccupant: une soirée testée sur deux était «Whites only». Les

populations discriminées varient d'une région à l'autre: Roms en Europe centrale et

balkanique, personnes originaires du Moyen-Orient en Europe du nord, noirs et arabes en

Europe de l'est et de l'ouest.

Ce constat est symptomatique d'une tendance lourde: l'Europe connaît, sur l'ensemble de son

territoire, un renforcement des pratiques discriminatoires dans tous les secteurs de la vie.

Ainsi, ce sont non seulement des millions de Français, comme le dénonçait récemment Robert

Badinter, mais plusieurs dizaines de millions de citoyens européens qui sont stigmatisés, de

facto interdits de lieux de sortie, tenus à l'écart du monde du travail ou incapables de trouver

un logement à cause de leur origine, de leur religion ou de la couleur de leur peau.

Tout se passe comme si les programmes des partis politiques d'extrême-droite ou nationaux

populistes commençaient déjà à être appliqués dans les faits, alors que ceux-ci ne sont pas

(encore?) au pouvoir dans la plupart des pays européens. C'est une funeste victoire par

anticipation pour ces partis en progression, qui sont les soutiens indispensables de coalitions

au pouvoir à l'image du Parti du peuple danois ou du Parti de la liberté néerlandais, ou qui

exercent une forte influence sur l'exécutif, à l'instar, notamment, du Jobbik en Hongrie ou du

Front National en France.

Ce phénomène n'arrive pas par hasard: à la faveur de la crise, se développe un courant

idéologique, intellectuel et politique, qui dépasse ces partis et qui prône une société

européenne où les discriminations raciales feraient loi. Cette idéologie, c'est celle d'Eric

Zemmour, acclamé par une partie des députés de l'UMP non pas en dépit de, mais en raison

Page 18: Le combat antiraciste Européen

de sa récente condamnation pour incitation à la discrimination raciale. C'est celle de Thilo

Sarrazin, du SPD allemand, dont le livre figure parmi les meilleures ventes en Allemagne non

pas en dépit de, mais en raison de ses déclarations racistes à connotation biologique sur les

juifs et les musulmans. C'est celle des ultranationalistes serbes, nostalgiques du génocide de

Srebrenica, et qui sont responsables du meurtre du supporter de football Brice Taton à

Belgrade en 2009.

Comme le disait Martin Luther King, «l'intégration véritable signifie le partage du pouvoir».

A l'inverse, l'exclusion de tous les secteurs de la vie, et a fortiori des lieux de pouvoir, dont

sont victimes des dizaines de millions de citoyens européens signifie pour eux une véritable

désintégration de la société dont ils font partie.

Face à cette idéologie de haine qui se montre conquérante, la première Nuit européenne du

Testing apporte également un enseignement porteur d'espoir et de justice: une dynamique est

en train de naître au sein de la société civile européenne antiraciste. Plusieurs dizaines de

milliers de militants et de citoyens de tous les pays européens, de tous horizons, de toutes

religions, de toutes origines et de toutes couleurs de peau sont décidés à interpeller les

pouvoirs publics nationaux et européens, beaucoup trop passifs face à l'urgence de la

situation, et surtout à agir concrètement pour faire vivre notre rêve européen d'un continent

débarrassé du racisme et de l'antisémitisme.

André Glucksmann le disait bien avant que le printemps arabe ne vienne le montrer à la face

du monde avec éclat: s'il y a un conflit de civilisations, ce n'est pas entre le «monde

musulman» et l'Occident, mais, au sein de chaque société, et en Europe même, entre les

tenants du totalitarisme et ceux de la démocratie. Au sein de ce conflit, notre engagement est

clair: l'avenir que nous voulons pour l'Europe, celui que nous construisons déjà aujourd'hui

par nos mobilisations communes, celui pour lequel nous nous battons avec enthousiasme et un

sentiment de justice, c'est sans conteste un espace démocratique où le racisme n'a pas droit de

cité.

Les jeunes Egyptiens ont le blues

Le Monde, 15.04.11

Alors que les manifestations et la répression reprennent place Tahrir, quelques jours passés au

coeur de la révolution égyptienne, auprès des jeunes « facebookiens » qui ont initié et en

partie animé le mouvement comme auprès des dirigeants politiques qui portent leurs

revendications, m'ont convaincu de la puissance de leur désir de France et de l'importance du

soutien international qu'ils demandent.

Près de deux mois après la chute d' Hosni Moubarak, les jeunes révolutionnaires connaissent

un syndrome de « revolution blues » : la fougue de leur engagement, leur faim de politique et

leur détermination à construire une société plus libérale cohabitent avec un certain

pessimisme, la crainte de l'influence islamiste et le manque de perspectives politiques qu'ils

sont en capacité de tracer. L'univers des possibles qu'ils ont entrevu s'est réduit, depuis la

reprise en main du pouvoir par l'armée, à une lutte de long terme contre l'ancien régime.

La sanglante répression des manifestations du 8 avril, le cas de Maikel Nabil, jeune blogueur

pacifiste traduit devant la justice militaire pour avoir critiqué l'armée, ou la nouvelle loi

restreignant la liberté de manifestation et de constitution des partis politiques sont là pour

nous rappeler que l'armée n'est pas l'alliée de la révolution. Elle s'inscrit dans la continuité du

Page 19: Le combat antiraciste Européen

régime Moubarak, notamment par la perpétuation de son alliance, tacite et ambiguë, avec les

islamistes.

Dans ce combat pour les libertés et la justice sociale, les élections législatives de septembre et

la présidentielle de novembre -décembre vont structurer le débat public pour les années à

venir. Or, dans un pays où la moitié de la population a moins de 18 ans et où environ 2

millions de nouveaux électeurs rejoignent chaque année le corps électoral qui en compte 40

millions, cette structuration aura des conséquences déterminantes à moyen terme.

Soutien sur le long terme

Face à ces enjeux, l'alternative qui est proposée à la France est claire : souhaitons-nous

soutenir une société égyptienne laïque, juste socialement, métissée, avec pleine égalité entre

les citoyens indifféremment de leur genre ou de leurs croyances ? Ou souhaitons-nous

demeurer absents de cette histoire et sourds aux appels de la jeunesse révolutionnaire, au

risque de voir se renforcer les Frères musulmans ou les caciques du système Moubarak ? Pour

répondre à cette question, écoutons le message que les militants de la place Tahrir comme les

dirigeants politiques portés par la révolution, Mohamed El-Baradei et Ayman Nour, m'ont

demandé de transmettre à mon retour.

Ce qu'ils veulent apprendre de la France et sur quoi ils veulent engager la jeunesse dans les

années à venir tient en quelques idées-forces : laïcité, lutte contre la haine religieuse, dont les

coptes sont les victimes, droits des femmes. Les jeunes militantes, qui ont vécu avec

amertume et déception les violences dont elles ont été victimes lors des manifestations

marquant la Journée internationale de la femme, insistent sur ce combat-là.

D'autres sujets restent à travailler, comme l'antisémitisme, diffusé par des vecteurs religieux et

politiques depuis plusieurs années, et qui a imprégné la société. S'il est clair que la

mobilisation populaire n'a jusqu'à présent pas été structurée par l'antisémitisme ou la haine

d'Israël, la révolution n'a pas non plus mis au travail cette question-là.

Ensuite, ils attendent un soutien sur le long terme de la France pour travailler le terrain. Si la

plupart des groupes révolutionnaires reçoivent un soutien des grandes fondations américaines

pour les droits de l'homme, la France brille par son absence. Or c'est sur le long terme et sur le

terrain, dans les faubourgs miséreux du Caire et des grandes villes, là où les islamistes sont

implantés et où ils représentent pour beaucoup la seule force politique visible, que la bataille

pour le pouvoir devra être menée.

Il serait salvateur, pour la France comme pour l'avenir de l'Egypte, que nous, société civile,

militants, politiques, sachions entendre le désir de France des révolutionnaires égyptiens et

nous engager dans l'action à leurs côtés.

Benjamin Abtan, Secrétaire Général de the European Grassroots Antiracist Movement

La mort de Ben Laden marque-t-elle la fin de l'islamisme ? LEMONDE.FR | 03.05.11 | 15h34

La disparition d'Oussama Ben Laden sonne comme le troisième temps de la mise à mort de

l'islamisme comme projet politique dans le monde musulman.

Page 20: Le combat antiraciste Européen

Premier temps : juin 2009. Sous les yeux ébahis du monde, des millions d'Iraniennes et

d'Iraniens descendent dans les rues au péril de leurs vies pour réclamer la prise en compte de

leurs votes, dénoncer les fraudes massives qui caractérisent le scrutin présidentiel et contester

la légitimité du régime des mollahs. Le mythe de la révolution islamique selon lequel, dans le

monde musulman, "le choix du peuple, c'est l'islamisme" tombe sous les effets conjugués de

la réalité de la pratique du pouvoir par les mollahs et du désir de démocratie de la jeunesse

iranienne.

Deuxième temps : le printemps arabe. Alors que la plupart des observateurs et dirigeants

internationaux croyaient en le désir de servilité des peuples arabes et pensaient que

l'islamisme était la seule alternative aux pouvoirs autoritaires en place, les jeunesses

tunisienne puis égyptienne démontent ces mythes en renversant leurs dirigeants autocrates par

des mouvements populaires structurés autour d'une demande de justice sociale et de

démocratie.

Si les transformations politiques en cours présentent des issues incertaines et se heurtent dans

certains cas à une répression sanglante, une chose est sûre jusqu'à présent : à la déstabilisation

des dictatures, ne succède pas l'islamisme.

Troisième temps : la mort d'Oussama Ben Laden. La décapitation d'Al-Qaida par un

commando américain en plein cœur du Pakistan envoie un signal clair : la force se situe du

côté du monde libre et non de celui de l'islamisme.

Les images spectaculaires des attentats du 11-Septembre avaient fait montre d'une certaine

puissance et avaient pu laisser croire à un basculement du rapport de force en faveur des

djihadistes, notamment dans le monde musulman où elles avaient été accueillies par de

nombreuses manifestations de joie. L'opération de dimanche porte un coup fatal au pouvoir de

séduction exercé par le terrorisme islamiste en signifiant que, quel que soit le temps que cela

prendra, ses dirigeants, abreuvés de haine de l'Occident, fous d'antisémitisme et de haine des

femmes, seront soit arrêtés, soit tués s'ils refusent de se soumettre à la justice.

A ceux qui s'interrogent sur l'utilité de la guerre en Afghanistan et de la présence des troupes

françaises et internationales dans le pays, ou bien qui demandent leur départ à chaque fois

qu'un soldat tombe au combat, la mise hors d'état de nuire de Ben Laden vient apporter une

réponse éloquente.

C'est en effet à force de détermination que la victoire militaire et politique dans le combat de

longue haleine contre le terrorisme et contre l'islamisme est désormais en vue.

Cependant, soyons lucides. Le terrorisme et l'islamisme ne sont pas totalement défaits,

comme le montre le soutien à Al-Qaida exprimé par les manifestations pakistanaises, le

Hamas palestinien et les Frères musulmans égyptiens.

Un quatrième temps politique

Pour que la victoire soit définitive, le combat contre l'islamisme nécessite un quatrième

temps, celui réclamé par les révolutions arabes : la réussite du passage à la démocratie.

Si les deux premiers temps de la mise à mort de l'islamisme ont été le fait de jeunesses

musulmanes et arabes et d'elles-seules, si nous devons le troisième temps à la persévérance

militaire américaine, il nous appartient, à nous société civiles, dirigeants politiques et citoyens

Page 21: Le combat antiraciste Européen

engagés, notamment en France et en Europe, d'en réaliser le quatrième avec les sociétés

civiles du monde arabe et du monde musulman.

De nouveau associées à la force et à la protection, les valeurs de la démocratie, déjà désirées

par les révolutionnaires arabes, le seront plus encore dans les temps à venir. Le soft power

sera l'arme de ce temps politique, qui pourra être celui de la défaite de l'islamisme à condition

que nous y soyons pleinement engagés.

La France et l'Europe ont été jusqu'à présent trop peu ou mal présentes dans ce combat. Il est

d'autant plus nécessaire que nous soyons à la hauteur des enjeux politiques du moment et des

attentes qui sont exprimées envers nous.

Soyons à l'écoute des démocrates arabes et apportons leur, comme ils nous le demandent,

notre soutien total. Militaire quand il le faut, comme en Libye ou en Syrie aujourd'hui,

politique tout le temps. La victoire politique et définitive contre l'islamisme est désormais à

portée de main.

Benjamin Abtan, secrétaire général de l'European Grassroots Antiracist Movement, et ex-

conseiller de Bernard Kouchner en lien avec les sociétés civile

Pour l'interdiction du négationnisme du génocide des Arméniens par la loi

LEMONDE.FR | 03.05.11 |

La loi du 29 janvier 2001 qui reconnaît le génocide des Arméniens est un texte déclaratif, qui

ne permet pas de poursuivre les négateurs de ce génocide devant la justice. Partant du constat

que le négationnisme du génocide des Arméniens n'est pas interdit pas la loi française, nous

exhortons la représentation nationale à pallier cette carence et, à l'instar de la loi Gayssot pour

la négation de la Shoah, à voter un texte normatif qui permettrait aux juges de condamner les

négationnistes du génocide des Arméniens. Nous en appelons ainsi aux sénateurs, pour qu'ils

votent, lors de la séance du 4 mai, en faveur de la proposition de loi votée en première lecture

par l'Assemblée nationale, et dont le processus d'adoption est bloqué depuis près de cinq ans.

Le négationnisme, parce qu'il procède du même mécanisme idéologique, est la continuation

de l'entreprise génocidaire qui vise à nier à un groupe le droit d'exister, puis celui d'avoir une

mémoire. Il n'a d'autre but que de rechercher à effacer les traces du crime, constituant ainsi la

phase ultime du génocide. La négation d'un génocide est une agression intolérable envers les

porteurs de la mémoire traumatique des survivants et des descendants des victimes, mais elle

constitue également une attaque envers les valeurs fondamentales de nos sociétés fondées sur

la réprobation des haines qui sont à la base des crimes contre l'humanité.

Le négationnisme n'est pas une opinion anodine, mais bien une atteinte à l'intégrité morale des

individus visés, ainsi qu'à l'ordre public. Nous n'aurons de cesse de défendre la liberté de

recherche et liberté d'expression. La loi Gayssot n'a jamais empêché les historiens de travailler

et l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que l'article 10 de la

Convention européenne des droits de l'homme, prévoient la possibilité de restreindre cette

liberté par la loi, lorsque cela est nécessaire, comme c'est le cas notamment pour le racisme et

la diffamation. Par conséquent, le droit à la dignité, qui est un principe constitutionnel auquel

nul ne peut déroger, ne met pas en péril la liberté d'expression.

Page 22: Le combat antiraciste Européen

Rappelons notamment, les manifestations négationnistes dans les rues de Lyon et de Paris, la

publication, dans plusieurs quotidiens à grand tirage, d'une page entière niant le génocide des

Arméniens (le 5 mars 2006), les dégradations des mémoriaux, les agressions physiques (à

Valence dans la Drôme en 2006 et à Bruxelles en 2007) ainsi que les sites Internet et la

publication d'ouvrages niant ouvertement la réalité du génocide (Génocide Arménien : Et si

on nous avait menti ?, en 2010 ou Esquisse de 2 000 ans d'Histoire de la Turquie, en 2011).

Face à la multiplication et au risque de banalisation des actes négationnistes, il nous apparaît

urgent que la loi protège les citoyens, en sanctionnant le négationnisme du génocide des

Arméniens.

Dominique Sopo, président de SOS Racisme ; Marcel Kabanda, président d'Ibuka-France ; Arielle Schwab,

présidente de l'Union des étudiants juifs de France ; Jean-Claude Gayssot, ancien ministre et ancien député à

l'origine de la loi Gayssot ; Jacky Mamou, président du collectif Urgence Darfour ; Vincent Nioré, avocat au

barreau de Paris ; Benjamin Abtan, secrétaire général de l'European grassroots antiracist movement ; Dogan

Özgüden, journaliste, président de la fondation Info-Türk ; Yériché Gorizian, étudiant, porte parole du Nor

Seround ; Yves Ternon, historien ; Bernard Jouanneau, avocat, président de Mémoire 2000.

De Srebrenica à Utoya, l'esprit de la "guerre civile européenne"

LEMONDE.FR | 09.08.11 |

Le massacre d'Utoya éclaire l'esprit de guerre civile européenne qui anime ceux qui disent

"lutter contre l'islamisation de l'Europe".

A bien des égards, c'est la guerre de Bosnie qui marque le début de cette croisade interne.

Nombreux sont alors ceux qui voient dans la chrétienne Serbie de Milosevic le dernier

rempart de l'Europe contre l'islamisation du continent dont la musulmane Bosnie serait le fer

de lance, comme la Serbie fut le rempart contre le nazisme dans les Balkans.

Cette grille de lecture opposant de manière irréconciliable la chrétienté et la civilisation à

l'islam et la barbarie a été utilisée par la suite avec un funeste succès par Poutine pour justifier

la destruction de Grozny et le massacre des Tchétchènes.

S'inscrivant dans la même logique, le génocide de Srebrenica en juillet 1995 marque l'apogée

de la violence raciste du pouvoir serbe et le début de sa fin.

Pour les croisés de la "lutte contre l'islamisation de l'Europe", la défaite de la Serbie, suivie

quelques années plus tard par l'indépendance du Kosovo puis par la chute de Milosevic, sonne

comme un avertissement : l'islamisation de l'Europe est en cours ; les musulmans ont

remporté une guerre ; ils peuvent donc remporter la guerre civile et détruire l'Europe comme

ils ont détruit la Grande Serbie.

On a souvent analysé à tort comme une modération les mutations récentes des partis

européens d'extrême droite sur l'exemple du Parti de la Liberté néerlandais de Geert Wilders.

En laissant de côté leur filiation directe avec les forces politiques qui organisèrent

l'extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale, en faisant mine d'accepter le

cadre démocratique du débat public, en reprenant dans leurs discours des références à des

combats et concepts progressistes tels le féminisme ou la liberté d'expression, ils se seraient

modérés.

Page 23: Le combat antiraciste Européen

Ces analyses ont trop minoré un aspect fondamental de ces mutations : l'unification des

mouvements européens d'extrême droite, que certains appellent désormais populistes, par la

haine des musulmans.

Cette coagulation idéologique lourde de menaces se réalise avec la crise pour toile de fond et

catalyseur. Elle a ses prophètes, comme Eric Zemmour en France ou Thilo Sarrazin en

Allemagne, qui théorisent la nécessité de la discrimination raciale, c'est-à-dire de l'application

d'une politique raciste dans un cadre formel d'égalité des droits. Elle a ses facilitateurs,

comme le Parti libéral danois ou le Peuple de la liberté italien, qui tendent à normaliser les

discours de haine en les portant au plus haut niveau de l'Etat. Elle a ses victoires offertes par

les démocrates, comme lorsque Angela Merkel et David Cameron critiquent le

multiculturalisme en laissant penser que l'analyse idéologique de l'extrême droite est la bonne.

Ces mutations récentes de l'extrême droite européenne ne sont pas une modération, car si

"l'ennemi principal" désigné a changé, l'idéologie de ce courant politique reste structurée par

l'obsession de l'ennemi intérieur à identifier et à exterminer. La "lutte contre l'islamisation de

l'Europe", c'est l'esprit de Srebrenica diffusé à travers tout le continent. C'est un "eux ou nous"

existentiel qui autorise et précède tous les massacres. C'est l'esprit de la guerre civile

européenne.

Face à cette injonction existentielle de l'élimination de l'Autre, les stratégies de mises en actes

sont principalement de deux natures.

Une première stratégie consiste à attaquer directement ceux désignés comme les ennemis

intérieurs, à l'instar du Jobbik hongrois dont la milice est responsable de nombreux meurtres

racistes de Roms, ou des néo-nazis allemands qui brûlent à intervalles réguliers des foyers

d'immigrés turcs.

Une deuxième stratégie, complémentaire et concomitante de la précédente, consiste à attaquer

les individus et les institutions qui représentent une protection pour les "ennemis intérieurs",

afin de pouvoir cibler ces derniers plus violemment par la suite.

C'est la logique de l'acte de Anders Behring Breivik, qui massacre à Utoya des personnes qu'il

considère comme "ethniquement similaires", mais dont l'attachement à la démocratie en fait

des traîtres à abattre car des alliés de l'ennemi.

La réponse promise par le premier ministre norvégien Jens Stoltenberg a été claire et forte :

"Plus de démocratie." Elle est non seulement juste moralement et politiquement, mais elle est

également nécessaire stratégiquement pour renforcer le camp de la démocratie européenne

menacée par les tenants de la guerre civile. Il serait bon que toute l'Europe s'en inspire.

Benjamin Abtan, secrétaire général du European Grassroots Antiracist Movement (EGAM)

Appel à une «Pride» européenne pour les Roms le 1er octobre

Libération, 02/09/2011

Il y a un an, de nombreux citoyens roumains et bulgares étaient brutalement expulsés de

France parce que Roms. Ces actes de violences se déroulèrent sous l’œil des caméras de

télévision mais dans l’indifférence quasi générale, non seulement des classes politiques, mais

Page 24: Le combat antiraciste Européen

également des sociétés civiles européennes. Pour beaucoup, ces violences apparaissaient

comme le dernier acte d’une tragédie que devraient fatalement subir les Roms à travers toute

l’Europe depuis plusieurs siècles, tragédie dont les persécutions des nazis et de leurs

collaborateurs ont constitué le paroxysme, mais pas la fin. Beaucoup se sont résignés à

l’indifférence par lassitude, par manque de protection politique ou institutionnelle, par

autoconviction que ces positions de dominés étaient acceptées voire désirées par les Roms

eux-mêmes.

L’évocation de ces violences est pourtant insupportable : en Hongrie, manifestations des

milices d’extrême droite dans les villages où vivent de nombreux Roms, comme à

Gyöngyöspata, les obligeant à fuir. En République Tchèque et en Hongrie, assassinats et

crimes racistes. Dans de nombreux villages, les Roms sont séparés du reste de la population

par des murs construits par les autorités locales, comme à Tarlungeni ou Baia Mare en

Roumanie, Michalovce, Košice, Prešov ou Svinia en Slovaquie, Sliven en Bulgarie… En

Serbie, Croatie, Moldavie, France et Turquie, violentes discriminations raciales dans tous les

secteurs de la vie. Retours forcés au Kosovo et expulsions d’Allemagne, du Danemark et de

Suède, etc. Cette funeste liste pourrait s’allonger indéfiniment, si bien que les sentiments de

fatalité et d’impuissance, voire de normalité de la violence subie l’emportent parfois, même

chez certains d’entre nous.

Ces sentiments sont similaires à ceux qui avaient gagné les membres de la communauté gay

américaine jusqu’à la fin des années 60. Ils s’étaient habitués aux représentations dégradantes,

à la condition de marginalité, à ne pas jouir des mêmes droits que les autres citoyens et à subir

régulièrement des violences, individuelles comme policières, simplement parce qu’ils étaient

gays. Le 29 juin 1969, suite à la descente policière du jour au Stonewall Inn, petit bar gay du

quartier de Greenwich Village à New York, une poignée d’habitués, rejoints par quelques

habitants du voisinage, ont décidé de dire «Assez !». Après quatre jours de confrontations

avec la police, quelque deux milles personnes ont organisé une marche dans les rues de la

ville : la Gay Pride était née.

Un an après l’affirmation d’une politique anti-Roms délibérée en France, quelques jours, mois

ou années après les insupportables violences racistes subies par les Roms sur tout notre

continent, le samedi 1er

octobre sera le «Stonewall rom européen». Ce jour-là, nous,

responsables de la société civile européenne antiraciste et rom, allons assumer nos

responsabilités et crier avec force et détermination: «Dosta !», «Assez !». Avec fierté et espoir

en une Europe débarrassée du racisme, de l’antisémitisme et de toutes les discriminations

raciales, nous allons marcher pour la première Roma Pride.

Nous en avons assez des stéréotypes racistes, assez des discriminations raciales permanentes,

assez de la marginalisation forcée, assez des violences quotidiennes, assez du statut de bouc

émissaire, assez des meurtres racistes qui touchent les individus ou communautés roms au

cœur de notre continent depuis trop longtemps, assez !

Ensemble, avec de nombreuses organisations de la société civile, des citoyens engagés

célèbres ou anonymes, puissants ou faibles, nous allons défiler au cœur des capitales

européennes pour faire mieux connaître et pour dénoncer le racisme et les discriminations

raciales dont sont victimes les Roms, aujourd’hui, à travers toute l’Europe. A l’occasion

d’événements culturels, nous partirons à la rencontre de tous ceux qui souhaitent mieux

connaître la diversité des cultures, des identités, des histoires et des mémoires roms, bien loin

des stéréotypes et clichés éculés. Par notre action commune, nous ferons vivre le rêve

européen et la valeur d’égalité qui le fonde. Notre revendication sera donc simple et claire :

Page 25: Le combat antiraciste Européen

l’égalité des droits et l’égale jouissance des droits pour tous les individus vivant en Europe.

En un mot, la dignité.

Ainsi, nous mènerons une coalition européenne de solidarité et d’idéal de la Norvège à la

Turquie, de la France à la Lettonie, en passant par la Roumanie, la Hongrie, la Bulgarie et

bien d’autres pays européens pour clamer haut et fort : Roma Pride !

Signataires :

Benjamin Abtan Secrétaire général du European Grassroots Antiracist Movement avec les dirigeants des

organisations roms et anti-racistes de 21 pays européens. Abanie : Aldo Merkoci MJAFT ! Movement et

Adriatik HasantariRoma Active. Allemagne : Serdar YazarTurkish Union in Berlin-Brandenburg (TBB).

Autriche : Barbara LieglZARA, Alexander PollakSOS Mitmensch et Andrea HärleRomano Centro.Belgique :

Patrick N’Siala KieseKif Kif. Bulgarie : Krassimir KanevComité Helsinki et Deyan KolevCentre Amalipe pour

le dialogue interethnique et la tolérance. Croatie : Mario MazicYouth Initiative for Human Rights - Croatia.

Danemark : Thomas V. Lytken LarsenCenter for Positive Integration, Anne NielsenSOS mod racism et Sofie

Amalie AndersenNyt Dansk Romanetværk. Finlande : Janette Grönfors Rasmus, réseau contre le racime et Nevo

Roma. France : Dominique SopoSOS Racisme et Eugène Daumas Union française des associations tsiganes -

UFAT. Grande-Bretagne : Samuel Tarrycampagne «Hope not hate» de Searchlight. Hongrie : Janos

FarkasGouvernement de la minorité Rom de Gyöngyöspata et Erika Muhi NEKI. Italie : Angela ScalzoSOS

Razzismo et Olga BalaPartita Romilor. Kosovo : Raba Gjoshi Youth Initiative for Human Rights - Kosovo et

Osman OsmaniInitiative 6. Lettonie : Anhelita KamenskaLatvian Centre for Human Rights. Moldavie : Nicolae

RaditaRoma National Center. Monténégro : Boris RaonicYouth Initiative for Human Rights - Montenegro.

Norvège : Kari Helene Partapuoli Norwegian Center Against Racism. Roumanie : Margareta MatacheRomani

Criss. Serbie : Jovana VukovicRegional Centre for Minorities et Maja Micic Youth Initiative for Human Rights -

Serbia. Slovaquie : Irena BihariovaLudia proti rasizmu (People against racism). Turquie : Selda Bilocer Roma

Youth Association et Cengiz Algan Durde !.

Une "Roma Pride" pour refuser le racisme et les discriminations

L’été 2010 et son cortège de discours agressifs envers les Roms et les Gens du voyage sonna

pour beaucoup comme une remise en cause de principes qui nous sont chers : le respect de la

dignité de chacun et l’égalité pour tous

Depuis trop longtemps, de nombreuses confusions sont volontairement entretenues entre

catégories administratives, nationales, culturelles et entre Roms, Tsiganes, Gitans et Gens du

voyage. Celles-ci fabriquent, pour mieux la désigner, une population qui serait homogène et

viscéralement dangereuse pour la République. Nous refusons ces confusions et nous

dénonçons le racisme et les discriminations qui visent plus particulièrement les individus ainsi

stigmatisés.

Depuis trop longtemps, les pouvoirs publics nationaux, en France comme ailleurs sur le

continent, instrumentalisent la dimension européenne de certaines problématiques pour se

défausser de leurs responsabilités sur d’autres pays, notamment la Roumanie et la Bulgarie,

ou sur les institutions européennes. Celles-ci sont de plus incapables d’intégrer la réalité de la

situation des Voyageurs français.

Nous refusons cette instrumentalisation et nous exprimons la solidarité européenne des

sociétés civiles.

Cette solidarité, nous voulons la construire comme un moment d’engagement partagé entre

Roms, Tsiganes, Gitans, Gens du voyage, antiracistes et plus largement tous les citoyens

militants pour l'égalité des droits. Une solidarité dans laquelle les revendications

particularistes - dont nous connaissons le côté étouffant - n’ont pas leur place. Une solidarité

Page 26: Le combat antiraciste Européen

qui, au contraire, se fonde sur l’égalité des droits et le respect de la dignité qui doit être

reconnue à chaque individu.

Au regard de ce qui nous guide, cette première "Roma Pride", organisée simultanément

dans de nombreux pays européens, de la Norvège à la Roumanie et de l’Italie au Danemark,

sera l’occasion, dans une ambiance citoyenne, festive et revendicative, de réclamer :

1/ Le respect pour tous les Européens de la liberté de circulation, un des fondements essentiels

de la construction européenne. Ceci implique notamment l'intégration de la Roumanie et de la

Bulgarie dans l'espace Schengen, ce qui leur est aujourd'hui refusé en particulier pour pouvoir

mieux expulser les Roms.

2/ La suppression de la loi de 1969, qui dessine un véritable "Code du Voyageur", et dont les

trois dispositions - les unes plus iniques que les autres - sont :

- L'imposition d'une commune de rattachement pour les Voyageurs, avec un quota maximum

de 3% de Voyageurs par commune.

- Des modalités très restrictives d'inscription sur les listes électorales (qui ne peut intervenir

qu’à l’issue de 3 ans de rattachement à une même commune).

- La mise en place de titres de circulation, dont le carnet à faire viser tous les 3 mois en

commissariat ou en gendarmerie.

Condamnée par feu La HALDE et même critiquée dans le récent rapport parlementaire du

sénateur Hérisson, cette loi n’a évidemment plus sa place dans une République respectueuse

du principe d’égalité et de sa Constitution.

3/ La reconnaissance de la caravane comme logement, et la réforme de la "taxe caravane", une

taxe injuste puisque ne prenant pas en compte le niveau de revenus des Voyageurs qui y sont

soumis.

4/ Le respect de la libre-circulation et du libre-stationnement pour les Gens du voyage,

comme pour tous les autres citoyens, en particulier la possibilité de s'arrêter dans toutes les

communes françaises. Ces droits sont aujourd’hui remis en cause puisque, en vertu

notamment de la législation sur les aires de stationnement et en raison de la disparition des

terrains municipaux ouverts au public, plus de 90% des communes sont interdites aux

voyageurs, alors qu'une génération auparavant, il existait une possibilité de halte dans

pratiquement tous les villages de France. Ces interdictions générales d’installation de

caravanes doivent être proscrites dans les documents d’urbanisme des communes.

Pour nous, ces quatre revendications manifestent une volonté et un désir. La volonté de

refuser que le mode de vie itinérant et l’habitat caravane soient réprimés dans notre pays. Le

désir que le principe d’égalité ne soit pas une proclamation vide de sens pour une partie de

nos concitoyens.

Le récent Sommet des maires pour les Roms et Gens du Voyage a conclu : "Nous affirmons

de nouveau notre ferme conviction que l’avenir de la société démocratique européenne

requiert l’inclusion et la participation de tous les Européens, y compris les Roms, à la

construction de la démocratie et à la pleine vitalité de leurs collectivités, avec tous les droits et

toutes les responsabilités que cela implique".

Page 27: Le combat antiraciste Européen

C’est pour faire vivre cette Europe démocratique car débarrassée du racisme et des

discriminations que nous nous retrouverons samedi 1er

octobre pour la première Roma Pride.

Liste des signataires

Benjamin Abtan (Secrétaire Général du European Grassroots Antiracist Movement - EGAM), Alain Daumas

(Président de l'Union Française des Associations Tsiganes), Laurent El Ghozi (Président de la FNASAT),

Dominique Sopo (Président de SOS Racisme). Fadéla Amara (Ancienne Ministre), Pouria Amirshahi (Secrétaire

national du PS à la coopération et aux droits de l'Homme), Kader Arif (Député européen), David Assouline

(Sénateur de Paris), Yves Azéroual (Journaliste, écrivain), Josiane Balasko (Comédienne), Antoine Baptiste

(Président de Gitans Languedoc Roussillon), Massira Baradji (Président de la FIDL), Marius Bauer (Président de

Latcho Drom), Antoine Becker (Président l'ANGV Rhône-Alpes), Souhayr Belhassen (Présidente de la FIDH),

Bénabar (Chanteur), Yamina Benguigui (Réalisatrice et Adjointe au Maire de Paris), Jean-Luc Bennahmias

(Député européen), Antoine Bernard (Directeur Général de la FIDH), Booder (Humoriste), Martial Brillant

(Président de l'ANGVC Angers), Jean-Yves Camus (Chercheur associé à l'IRIS), Elie Chouraqui (Cinéaste),

Daniel Cohn Bendit (Député européen), Djamel Bensalah (Cinéaste),Catherine Coquio (Professeur d'Université -

Paris 8), Christophe Cortze (Président des Gitans de Cavaillon), Christophe Cusol (Président de Le Niglo en

Colère), Christophe Daumas (Président de Marriane Voyage), Fernand Delage (Président de France Liberté

Voyage), Michèle Delaunay (Députée de Gironde), Harlem Désir (Premier Secrétaire par intérim du Parti

Socialiste, député européen), Raymond Etienne (Président de la Fondation Abbé Pierre), Miran Faipi (Président

de l'Union Des Roms De L'Ex- Yougoslavie En Diaspora), Eric Fassin (Sociologue, ENS), Maria de França

(Rédactrice en chef de La Règle du Jeu), Mariano Garcia (Président de Casa d'Espagne), Tony Gatlif (Cinéaste),

Jean-Patrick Gille (Député d'Indre-et-Loire), André Glucksmann (Philosophe), Estelle Grelier (Députée

européenne), Sylvie Guillaume (Députée européenne), Avela Guilloux (Maison ouverte de Montreuil), Sihem

Habchi (Présidente de Ni Putes Ni Soumises), Marek Halter (Ecrivain), Rona Hartner (Chanteuse), Jonathan

Hayoun (Président de l'UEJF), Pierre Henry (Président de France Terre d'Asile), Marcel Hognon (Président du

Mouvement des intellectuels Tziganes), Lana Hollo (Experte au Conseil de l'Europe sur les Droit de l'Homme),

Francine Jacob (Déléguée France du Forum européen des Roms et Gens du voyage au Conseil de l'Europe et

Présidente de Jamais Sans Nous), Alain Jakubowicz (Président de la LICRA), Eva Joly (Candidate à l'élection

présidentielle), Marcel Kabanda (Président d'Ibuka), Tony Lariviere (Président de Français dy Voyage), Yvan Le

Bolloc'h (Musicien), Patrick Le Hyaric (Député européen), Raïf Maljoku (Président de Romano Phralipé), Jacky

Mamou (Président du Collectif Urgence Darfour), Fernand Maraval (Président de Alerte L'indien), Sandrine

Mazetier (Députée de Paris), Pierre Ménager (Président de Entre Aide Gens du Voyage), Radu Mihaileanu

(Cinéaste), José Moréno (Président ADPG), Pierre-Alain Muet (Député du Rhône), Séta Papazian (Présidente du

Collectif VAN), Thierry Patrac (Président de Génération Musique), George Pau-Langevin (Députée de Paris),

Père Arthur, Jean-Luc Poueyto (Anthropologue), Jose Pubil (Président des Gitans de France), Sandra-Elise

Reviriego (Présidente des Jeunes Radicaux de gauche), Marie-Line Reynaud (Députée de Charente), Vincent

Ritz (Président de Regards), Yohan Salles (Président de Gitans de Tarascon), Jean Sargera (Président du Centre

Culturel Gitan), Emile Scheitz (Président de l'AFGVIF), Oscar Sisto (Producteur), Gino Soles (Président de

l'Association Culturelle Catalane), Joseph Stimbach (Président Chave Foun WINTA), Fodé Sylla (Ancien

Président de SOS Racisme), Christine Talabard (Président de Dialogue de l'image), Christiane Taubira (Députée

de Guyane), Jean-Louis Touraine (Député du Rhône), Catherine Trautmann (Députée européenne), Giorgi

Viccini (Président du Comité pour le Respect Des Droit Des Tsiganes), Henri Weber (Député européen), Baki

Youssoufou (Président de la Confédération Etudiante), Sasha Zanko (Président de Tchatchipen), ASAV 92,

Collectif D'ailleurs nous sommes d'ici, Association Nationale des Gens du Voyage Catholique, MRAP.

Racisme anti-Roms en Europe, l'alerte bulgare

LEMONDE.FR | 14.10.11 | 09h30

Depuis près de deux semaines, la Bulgarie connaît de violentes manifestations racistes anti-

Roms. Organisées par l'extrême droite, en particulier le parti Ataka ("Attaque") rejoint par des

hooligans, elles se déploient dans une vingtaine de villes du pays, rassemblant plusieurs

milliers de personnes. Lors des défilés, des slogans néonazis tels "les Roms en savon !" sont

scandés par la foule.

Le point de départ de ces manifestations racistes a été un meurtre perpétré dans la petite ville

de Katounitsa par les hommes de main du parrain de la mafia rom locale. Cependant,

Page 28: Le combat antiraciste Européen

confondre le point de départ de l'incendie avec ses causes profondes serait une erreur

criminelle.

Si ces manifestations rassemblent autant et aussi violemment, c'est que le terrain, travaillé

depuis de nombreuses années, est désormais propices à de tels agissements, qui concernent la

Bulgarie aujourd'hui mais qui pourraient concerner d'autres pays européens demain. Plusieurs

raisons peuvent expliquer cet état de fait.

Tout d'abord, les stéréotypes et les préjugés stigmatisant les Roms ou d'autres catégories de

populations (musulmans, immigrés, juifs…) s'expriment avec de plus en plus de facilité et

circulent en toute permissivité partout sur le continent. Or les tabous sur la parole raciste et

antisémite sont nécessaires à une société démocratique.

Ensuite, cela fait maintenant de nombreuses années que les Roms sont, dans toute l'Europe, la

cible d'insupportables actes de violence sans que cela ne suscite de justes et fortes

protestations politiques ou de la société civile.

Par exemple, en Hongrie, des individus sont assassinés parce que Roms. A Baia Mare et

Tarlungeni en Roumanie, comme à Michalovce, Košice, Prešov et Svinia en Slovaquie, ils

sont concentrés dans des ghettos où les conditions de vie sont indignes. En Serbie, en

Moldavie, comme en France et en Allemagne, ils sont victimes de discriminations

quotidiennes.

Ainsi, le peu de réactions que ces violences ont suscitées jusqu'à présent permet un passage à

l'acte plus aisé aujourd'hui, en Bulgarie comme ailleurs. Enfin, l'extrême droite s'est

organisée, structurée et renforcée ces dernières années partout en Europe.

Les partis d'extrême droite remportent des succès électoraux, comme le Jobbik en Hongrie, le

Parti de la Liberté aux Pays-Bas, ou Ataka en Bulgarie. Les mouvements d'extrême droite

exercent une influence sur certains partis de gouvernements, comme au Danemark, et

séduisent de plus en plus de personnalités.

Au moment où la construction européenne est en crise, l'extrême droite, sous ses différentes

composantes, propose un véritable modèle de structuration politique du continent, fondé sur le

racisme et les discriminations raciales. Ce projet est sous-tendu par l'esprit de "guerre civile

européenne" et l'obsession de "l'ennemi intérieur" à identifier et à exterminer et qui serait,

selon les moments et les pays, le musulman, le Rom, le juif, etc.

A l'opposé de ce funeste projet, dont la mise en acte à la suite d'une prise de pouvoir des

extrêmes droites européennes ne peut être totalement exclue, les sociétés civiles européennes

antiracistes s'unissent désormais pour faire vivre un modèle européen véritablement

démocratique car débarrassé du racisme, de l'antisémitisme et des discriminations raciales.

Samedi 1er

octobre fut à ce titre un jour fondateur. Ce jour-là, les sociétés civiles de nombreux

pays européens, menées par les organisations antiracistes membres de l'EGAM et leurs

partenaires Roms, se sont mobilisées ensemble pour la première "Roma Pride".

Elles ont notamment exprimé leur rejet du racisme et leur solidarité avec les Roms bulgares,

fait pression sur les autorités européennes, nationales et locales pour qu'elles réagissent

fermement aux violences racistes en protégeant la population et les organisations Roms.

Page 29: Le combat antiraciste Européen

En Norvège, au Danemark, en Belgique, en France, mais également en Roumanie, où près de

400 personnes ont défilé dans la plus grande manifestation de l'année, et en Bulgarie, où des

rassemblements publics se sont tenus dans 15 villes malgré les menaces, des dirigeants

associatifs, des politiques, des intellectuels, des artistes et des milliers d'autres personnes se

sont rassemblés pour faire Europe ensemble. Une Europe des valeurs partagées d'égalité et de

dignité, une Europe construite par les actions communes des sociétés civiles en mouvement.

Le silence assourdissant, politique et militant, lors des ratonades de janvier 2010 contre les

migrants noirs de Rosarno, dans le Sud de l'Italie, qui avait donné le coup d'envoi de la

constitution de l'EGAM, paraît lointain.

Désormais, c'est avec force et conviction que les sociétés civiles européennes s'unissent pour

faire vivre le rêve européen d'un continent débarrassé du racisme, de l'antisémitisme et des

discriminations raciales.

Benjamin Abtan, secrétaire général du European Grassroots Antiracist Movement (EGAM)

Attachés à la démocratie, à la laïcité et au vivre ensemble, nous disons

«non» aux intégrismes religieux

Libération 04/11/2011

Ces dernières semaines ont été marquées par une offensive des extrémismes religieux dans

notre pays. Depuis le 20 octobre, le Théâtre de la Ville à Paris a ainsi vu les représentations

d’une pièce de l’Italien Roméo Castellucci (« Sur le concept du visage du fils de Dieu ») être

fortement perturbées par des manifestations appelées par la mouvance catholique intégriste

qui jugeait cette pièce blasphématoire. Les associations à la manœuvre (Civitas, l’AGRIF,…

qui appartiennent à l’extrême droite traditionnelle) essaient de poursuivre cette offensive en

suscitant ou en proférant des menaces à l’encontre d’une pièce qui sera prochainement donnée

au Théâtre Garonne à Toulouse (« Golgota Picnic » de l’Argentin Rodrigo Garcia). Volontiers

matinées d’antisémitisme et de haine des étrangers, les manifestations, déclarations et

menaces qui se sont succédées sont des attaques contre le vivre ensemble auquel nous

sommes attachés.

Ces derniers jours, la sortie du numéro de Charlie Hebdo en date du 2 novembre, représentant

Mahomet et rebaptisé « Charia Hebdo », a été l’occasion de nouveaux appels à la haine et à la

violence (site du journal hacké par des réseaux islamistes, messages de menaces en cascade

visant à remettre en cause le droit au blasphème,…). Ce 2 novembre, l’incendie criminel des

locaux de Charlie Hebdo montrent qu’un palier a été franchi. Cet acte, qui n’est pas sans

rappeler les sinistres autodafés, vise à faire taire un hebdomadaire au ton incisif et

provocateur, c’est-à-dire une presse dont on connaît l’importance pour la vitalité de la

démocratie. Qu’il soit le fait de personnes mues par une vision islamiste de la société ou qu’il

relève d’une provocation de l’extrême droite, cet acte renvoie à une certitude : leurs auteurs

sont, à l’instar des catholiques intégristes, des ennemis du vivre ensemble puisque l’effet,

sinon le but, de leur acte favorise les tensions entre les citoyens appelés à rejoindre, chacun

avec sa religion en bandoulière, le camp de la haine, de l’intolérance et de la stigmatisation.

Les intégrismes religieux ont montré avec éclat ces dernières semaines à quel point ils étaient

les ennemis de trois combats qui sont les nôtres : - Le combat pour la démocratie, cette

dernière étant indissociable du droit absolu au blasphème, c’est-à-dire le droit de critiquer les

Page 30: Le combat antiraciste Européen

dogmes sacrés. Si ces dogmes devaient régler la vie sociale, l’espace de la libre discussion

démocratique serait en effet tout bonnement impossible.

- Le combat pour la laïcité qui ne peut se marier avec le partage de l’espace public entre les

différents dogmes et qui, au contraire, nécessite le refus de voir les religions être manipulées à

des fins politiques.

- Le combat pour le vivre ensemble, incompatible avec les combats visant à intimer à

chacun le devoir et l’ordre de rejoindre des communautés religieuses fermées et vivant de la

haine de la religion ou de l’athéisme de l’autre.

Bien loin de nous intimider ou de nous faire vaciller sur nos convictions, les actes de ces

dernières semaines ne font que renforcer notre détermination à poursuivre avec force et

ténacité ces 3 combats essentiels dans notre République.

Nous appelons tous les citoyens attachés comme nous à la démocratie, à la laïcité et au vivre

ensemble à se rassembler ce dimanche 6 novembre à 15h sur le Parvis de l’Hôtel de Ville de

Paris.

ABDAT Ameziane (Président de Zy Va), ABDI Mohammed (ex-conseiller spécial de Fadela Amara), ABELANSKI

Lionnel (Comédien), ABTAN Benjamin (Secrétaire Général de l’EGAM), ALFONSI François (Député Européen),

ALLEGRO FORTISSIMO, AMADIEU Jean-François (Professeur d’université), AMARA Fadela (Ancienne Ministre),

ARCIZET Guy (Grand Maitre du Grand Orient de France), ARDITI Pierre (Comédien), AUBRY Martine (Première

secrétaire du Parti Socialiste), Autremonde, AUFRAY Hugues (Artiste), AZEROUAL Yves (Journaliste), BALASKO

Josiane (Comédienne), BAYLET Jean-Michel (Président du PRG), BASS Jean-Louis (Journaliste), BAYOU Julien

(Conseiller Régional), BELHADDAD Souad (journaliste), BELIER Sandrine (Députée Européenne), BENARAB-

ATTOU Malika (Députée Européenne), BENCHEIKH Ghaleb (Théologien), BENGUIGUI Jean (Comédien),

BENNAHMIAS Jean-Luc (Vice-président du MODEM), BENSALAH Djamel (Cinéaste), BERGE Pierre (Président de la

Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent), BERGOVICI Philippe (Dessinateur), BERILLE Luc (Secrétaire général de

l’UNSA), BERLING Charles (Comédien), BESSET Jean-Paul (Député Européen), BILLARD Martine (Députée de

Paris), BORLOO Jean-Louis (Président du Parti Radical), BOUJENAH Michel (Humoriste), BOVE José (Député

Européen), BROSSEL Colombe (Adjointe au Maire de Paris), CAMUS Jean-Yves (Politologue), CANFIN Pascal

(Député Européen) Cé, CFDT, CGT, Charlie Hebdo, CHOPLIN Jean-Luc (Directeur du Théâtre du Châtelet),

Chouraqui Elie (cinéaste), COHN-BENDIT Daniel (Député Européen), Comité Laïcité République, CORBIERE Alexis

(Adjoint au Maire du 12ème arrdt de Paris) COUBES Dominique (Directeur artistique du théâtre du Gymnase), Nicolas

Demorand (Libération), DALIN Daniel (Président du Collectif DOM), DAUMAS Eugène (Président de l’UFAT), DE

HAAS Caroline (Fondatrice d’Osez le féminisme), DELLI Karima (Députée Européenne), DELPECHE Michel

(Chanteur), DENIAUD Laurianne (Présidente du MJS), DESAILLY Marcel (Ancien capitaine de l’équipe de France de

football), DESIR Harlem (Député Européen), DEVARIEUX Jacob (Artiste), DJEMANI Kahina (Porte-parole de la

FIDL), DOUCET Philippe (Maire d’Argenteuil), DRAY Julien (Conseiller Régional), DUCHE Geneviève

(Universitaire), EL FANI Nadia (réalisatrice) EMEYE Eglantine (Journaliste), ENCEL Frédéric (Géo politologue),

Europe Ecologie les Verts, FIDL, FABIUS Laurent (Député Seine-Maritime), FILIPPETTI Aurélie (Députée de

Moselle), FLAUTRE Hélène (Députée Européenne), FO, FOUREST Caroline (Rédactrice en chef de la revue Pro-choix),

FRANCK Dan (écrivain), FSU, GIDOIN Arno (Comédien), GLUCKSMANN André (Philosophe), GONTHIER

Patrick (Secrétaire général de l’UNSA éducation), GOUPIL Romain (cinéaste), GRENIER Estelle (Députée Européenne),

GREZE Catherine (Députée Européenne), GUIBERT Dominique (LDH), GUILLAUME Sylvie (Députée Européenne),

HABCHI, Sihem (Présidente de Ni Putes Ni Soumises), HALTER Marek (Ecrivain), HANOUNA Cyril (Présentateur),

HAYOUN Jonathan (Président de l’UEJF), HENRY Pierre (Directeur Général de France Terre d’Asile), HETIER

Bernadette (Présidente du MRAP), HOLLANDE François (Candidat PS à l’élection présidentielle), JADOT Yannick

(Député Européen), JAKUBOWICZ Alain (Président de la LICRA), JCALL France, Jeunesse en Mouvement, JOLY

Eva (Candidate EELV à l’élection présidentielle) KANDEL Liliane (Sociologue), KHRIS Taig, KILL-NIELSEN Nicole

(Députée Européenne), KINTZLER Catherine (Philosophe), KLUGMAN Patrick (Conseiller de Paris), LA LIGUE

DU DROIT INTERNATIONAL DES FEMMES, LANG Valérie (Comédienne), La Paix maintenant, La Règle du jeu,

LDH, LE BOLLOCH’Yvan (Comédien), LENEOUANNIC Pascale (Conseillère Régionale), LEROY Claude

(Sélectionneur national de Football), LES Désobéissant-e-s, LICRA, MAMOU Jacky (Président du Collectif Urgence

Darfour), MAY Mathilda (Comédienne), MAZETIERSandrine (Députée de Paris), MEHAL Fadila (Présidente des

Mariannes de la Diversité), MELENCHON Jean-Luc (Candidat du Front de Gauche à l’élection présidentielle), MJS,

MOSCOVICI Pierre (Député du Doubs), MOZAFFARI Medhi (Professeur d’université), MRAP, Ni Pute Ni Soumise,

OUALI Kamel (Chorégraphe), OSEZ le féminisme, PAPAZIAN Séta (Présidente du collectif VAN), Paris Foot Gay,

Parti Radical de Gauche, Parti de Gauche, Parti Socialiste, PCF, PEILLON Vincent (Député Européen),

PIETRASANTA Sébastien (Conseiller Régional), RIBES Jean-Michel (Directeur du Théâtre du Rond Point), RICHARD

Firmine (Comédienne), ROMANA Serge (CM 98), SAMAMA Laurent-David (Rédacteur en chef de l’Arche),

Page 31: Le combat antiraciste Européen

SCHALSCHA Bernard (Secrétaire Général de France Syrie Démocratie), SIFAOUI Mohamed (Journaliste), SIMON

Yves (écrivain), Smaïn (Comédien), SOPO Dominique (Président de SOS Racisme), SOS Racisme, STORA Benjamin

(Historien), SYLLA Fodé (Ancien président de SOS Racisme), RIVASI Michèle (Députée Européenne), TAUBIRA

Christianne (Députée de Guyane) TAMISIER Jean-Christophe (Editeur), TARTAKOWSKY Pierre, (Président de la

LDH), TAVERNIER Nils (Réalisateur), TESTUD Sylvie (Comédienne), TRAUTMANN Catherine (Députée

Européenne), UEJF, UNEF, UNL, UNSA, VALLS Manuel (Député-Maire d’Evry), VITKINE Antoine (Journaliste),

WEBER Henri (Député Européen), WIEDER Ionna (Co-fondatrice du Centre Audiovisuel Simone de Beauvoir),

WINTER Ophélie (Comédienne), YOUSSOUFOU Baki (Président de la Confédération étudiante), ZEMMOUR

Emmanuel (Président de l’UNEF), ZIDI Malik (Comédien), Julien Bayou (Conseiller régional), Jean-Louis Basse

(journaliste)

Egypte : la France doit saisir la main tendue des révolutionnaires

LEMONDE.FR | 13.12.11 | 09h57 • Mis à jour le 13.12.11 | 11h12

De nouveau, plus de neuf mois après la chute de Hosni Moubarak, le rythme de l'histoire

semble s'accélérer en Egypte. Place Tahrir, les manifestations ont repris, menées par les

mêmes mouvements révolutionnaires qui avaient initié celles de janvier et février. La

répression a, elle aussi, repris comme lorsque le Raïs était au pouvoir. Les espoirs de certains

de voir l'armée égyptienne se transformer en armée révolutionnaire, assurant l'installation de

la démocratie en Egypte et portant secours à ses voisins libyens en révolution, sont apparus

clairement pour ce qu'ils étaient, à savoir de vaines illusions.

La sanglante répression des manifestations, qui a fait 42 morts ces dernières semaines, indique

avec netteté la nature du régime politique dirigé par le Conseil supérieur des forces armées

(CSFA) : du moubarakisme sans Moubarak.

Par ailleurs, la première phase des élections législatives qui vient de se terminer montre une

large victoire des islamistes. Bien évidemment, ces résultats sont le fruit de l'alliance, tacite et

ambigüe, nouée entre l'armée et les Frères musulmans au temps de la dictature et qui a vu

pendant plusieurs années ces deux blocs s'opposer violemment mais s'entendre sur le partage

du pouvoir : à l'armée l'Etat, aux Frères musulmans la société.

Cependant, ces résultats sont également le reflet de l'évolution des rapports de forces

politiques depuis la chute de Moubarak. Si l'armée a perdu l'aura qu'elle avait acquise il y a

neuf mois, les islamistes, Frères musulmans et surtout salafistes, qui étaient apparus dans

l'espace public à la faveur des manifestations de janvier-février, ont fortement étendu leur

influence.

Seule force politique autorisée à se structurer au niveau national sous Hosni Moubarak,

présents sur le terrain depuis de nombreuses années, idéologiquement fanatisés et fortement

financés, les Frères musulmans ont bénéficié du calendrier court imposé par l'armée pour la

tenue des élections, malgré les revendications révolutionnaires de les organiser plus tard afin

de laisser à toutes les forces politiques le temps de se structurer.

Pris en étau entre l'ancien régime inflexible et les islamistes en progression, les

révolutionnaires n'ont eu d'autre choix que de descendre, de nouveau, dans la rue, au péril de

leur vie, pour conserver les acquis de la révolution concernant les libertés et la justice sociale.

L'évolution des rapports de forces au détriment de la jeunesse et des démocrates est le résultat

des dynamiques internes à la société égyptienne, mais également celui de la différence des

soutiens internationaux dont les camps en présence ont bénéficié.

Page 32: Le combat antiraciste Européen

Si les salafistes et les Frères musulmans ont pu compter sur le soutien sans faille et immédiat

de l'émir du Qatar et de l'Arabie saoudite dès Moubarak envolé pour Sharm el-Sheikh, force

est de constater que, malgré ses espoirs, c'est en vain que la jeunesse révolutionnaire a appelé

à un soutien international démocrate.

Ses besoins sont pourtant bien connus et extrêmement clairs : renforcer la société civile

démocrate, construire des institutions qui aient la confiance de la population, bâtir des

organisations nationales présentes dans les faubourgs miséreux des grandes villes comme

dans les villages reculés de la Haute Egypte et, plus largement, auprès de la population qui

n'est pas connectée à internet. Les jeunes révolutionnaires ont l'humilité, la lucidité et

l'intelligence de vouloir apprendre de la France quelques idées-forces.

Tout d'abord la lutte contre la haine religieuse, dont les coptes sont victimes. Les attaques

d'églises cairotes par les salafistes en mai dernier, qui s'étaient soldées par quinze morts et

deux cents blessés coptes, montrent que la cohésion sociale égyptienne post-moubarakisme

est fragile et menacée.

Ensuite, les droits des femmes. Les violences commises contre les femmes révolutionnaires

place Tahrir lors de la Journée internationale de la femme, comme le viol récent de la

journaliste française Caroline Sinz par des manifestants, ne sont que quelques exemples d'un

phénomène social violent et profondément ancré dans la société.

Enfin, la laïcité, au sujet de laquelle le modèle français interroge et intéresse. Les enjeux sont

immenses. La moitié des 80 millions d'Egyptiens ont moins de 18 ans et environ 2 millions de

jeunes vont chaque année rejoindre le corps électoral. Ainsi, la structuration du débat public

aura des conséquences déterminantes dans les mois et années à venir sur les discours et

orientations politiques du pays.

Les jeunes démocrates révolutionnaires, qui portent les valeurs universelles de liberté et

d'égalité, tendent la main à la France. Ce serait trahir ces valeurs et commettre une grave

erreur politique que de continuer à ne pas la saisir.

Benjamin Abtan, secrétaire général du European Grassroots Antiracist Movement (EGAM) ;

Hossam Eldin Ali, président de l'ONG égyptienne révolutionnaire Egyptian Democratic

Academy ;

Karim El Saka, membre des bureaux de l'Association nationale pour le changement

"Taghyeer" et de la campagne publique de soutien à Mohamed El-Baradei "Lazem".

Attentat du 6 avril 1994 : la vérité contre le négationnisme du génocide du

Rwanda

LEMONDE.FR | 18.01.12 | 09h49

Le rapport des juges Trévidic et Poux sur l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion du président

rwandais Habyarimana, qui a été l'élément déclencheur du génocide des Tutsis, est formel :

contrairement à ce qu'avait affirmé le juge Bruguière, ce ne sont pas les Tutsis du Front

patriotique rwandais (FPR) qui en sont les auteurs.

Page 33: Le combat antiraciste Européen

Dès lors, la question se pose : qui sont les responsables de l'attentat ? Si le rapport n'en

apporte pas la preuve matérielle, il désigne implacablement les extrémistes du "Hutu Power".

Ceux-là même qui, quelques heures à peine après l'attentat, érigèrent des barrages dans Kigali

et distribuèrent des listes préétablies de Tutsis à éliminer comme des "Inyenzi" ("cafards"),

mettant ainsi en application le plan génocidaire. Ceux-là même qui, au sein de la garde

présidentielle, des forces armées et de la gendarmerie rwandaises, qui furent les fers de lance

du génocide, reçurent formation et soutien de la part de militaires, gendarmes, coopérants et

mercenaires français, sur ordres des plus hautes autorités de l'Etat.

Les discours négationnistes relayés, notamment en France, par des responsables politiques,

hauts fonctionnaires, pseudo-historiens ou enquêteurs autoproclamés, s'écroulent.

L'écrire confine au ridicule mais le négationnisme, dans ce cas comme dans les autres, n'en est

pas dépourvu : non, les Tutsis ne sont pas responsables du génocide qui a vu massacrer

800 000 des leurs. Non seulement parce qu'un attentat ne fait pas un génocide, mais

également parce que les responsables de cet attentat ne sont pas Tutsis.

Pour faire admettre cette évidence pour ce qu'elle est, il aura fallu déconstruire,

consciencieusement, pièce après pièce, un dossier Bruguière dont le manque de fiabilité des

témoins-clés, qui sont revenus sur leurs déclarations, l'inexistence d'éléments matériels,

Bruguière ne s'étant jamais rendu au Rwanda, et la fausseté des conclusions, en font plus un

document de propagande qu'un rapport digne de la justice française.

Pourquoi donc Bruguière a-t-il élaboré ce rapport avant de mettre en examen plusieurs

proches de Kagamé et de provoquer ainsi une rupture des relations diplomatiques entre la

France et le Rwanda entre 2006 et 2010 ? S'il est difficile d'apporter des réponses définitives à

cette question sans confondre conjectures et certitudes, il est par contre aisé de décrire les

conséquences qu'a entraînées le rapport Bruguière.

Tout d'abord, il a renforcé les discours négationnistes, en permettant à de nombreux

responsables politiques ou intellectuels de diffuser les thèses négationnistes de la

responsabilité des Tutsis dans leur propre génocide, du "double génocide" ou encore de

"l'autogénocide" du peuple rwandais contre lui-même dans une supposée explosion de

violence tribale. Pierre Péan a ainsi soutenu la thèse du double génocide en partant de la

supposée culpabilité de Kagamé, alors chef du FPR, dans l'attentat du 6 avril, qu'il affirmait

avoir prouvée après une "enquête" tout aussi inconsistante que celle de son ami Bruguière.

Ensuite, il a apporté des protections à certains hommes politiques et très hauts fonctionnaires

français qui portent une lourde responsabilité dans la préparation et la perpétration du

génocide. En effet, certains ont, dans les années précédant 1994, soutenu les extrémistes hutus

qui étaient en train de préparer le génocide. Certains ont, pendant que le génocide se déroulait,

apporté un soutien sans faille au gouvernement génocidaire formé à l'ambassade de France,

sous l'égide de l'ambassadeur Marlaud, le soir même du lancement du génocide.

Il a également permis de soustraire l'ancien gendarme de l'Elysée, le capitaine Paul Barril, à la

mission d'information parlementaire de 1998. Pourtant, les éléments de réponse qu'il peut

apporter à certaines questions devraient être particulièrement intéressants. A la veille du 6

avril 1994, il est vu à Kigali, où il confie être présent le 7. Où était-il le 6 au soir, au moment

de l'attentat ? Le rapport Trévidic et Poux indique que les Forces armées rwandaises, dont le

camp est selon toute vraisemblance le lieu de départ du missile qui a abattu le Falcon 50 de

Habyarimana, n'avaient pas la formation militaire suffisante pour tirer le missile. Qui a tiré ?

Page 34: Le combat antiraciste Européen

S'il faut bien évidemment le prouver, de lourds soupçons se portent naturellement vers les

hommes de celui qui fut, pendant le génocide, un des vecteurs du soutien de l'Elysée au

gouvernement génocidaire à qui il a fourni armes, propagande, comme dans la rocambolesque

affaire de la vraie-fausse boîte noire, et mercenaires.

Il a enfin protégé de nombreux génocidaires, souvent exfiltrés en France grâce à l'armée ou à

l'Eglise, qui ont pu jouir d'une impunité totale jusqu'à il y a quelque deux années.

Plus de dix sept années après le génocide, le rapport des juges Trévidic et Poux est donc

salvateur, car, malgré toutes les tentatives de diversion, il fait progresser la vérité historique et

la justice. Comme le disait Elie Wiesel en 1987 lors de sa déposition au procès de Klaus

Barbie : "Le tueur tue deux fois, la première en tuant, et la seconde en essayant d'effacer les

traces de son meurtre (…). La seconde ne serait pas de sa faute, mais de la nôtre." C'est cette

recherche de la vérité qui permet de faire reculer le négationnisme, donc d'honorer la mémoire

des morts, d'apaiser les souffrances des rescapés et de leurs descendants, et d'apporter un

supplément de lucidité et de repères moraux aux générations actuelles et futures.

Benjamin Abtan est co-auteur de "Rwanda. Pour un dialogue des mémoires" (Albin Michel),

Secrétaire général du European Grassroots Antiracist Movement – EGAM

De l'arrogance en politique...

Libération, 02/02/20121

A la recherche d'une improbable martingale contre le candidat socialiste à l'élection

présidentielle, le Président de la République, le gouvernement et l'UMP accusent désormais

François Hollande et la Gauche «d'arrogance». On serait tentés de sourire, tant la tentative de

retournement est grossière, si ces attaques n'étaient portées par les plus hautes autorités de la

République.

L'arrogance en politique ne consiste pas en l'emploi du futur de l'indicatif plutôt que du

présent du conditionnel dans quelques phrases évoquant la Présidence de la République après

le mois de mai, puisque c'est de cela dont il s'agit. Elle se situe, en revanche, dans l'insolente

permissivité avec laquelle les plus hautes autorités de l'Etat ont dévoyé la parole publique et

les institutions de la République depuis près de cinq ans. Elle se manifeste aussi par le mépris,

voire une forme de jubilation, avec lesquels elles ont transgressé en toute impunité les valeurs

de la démocratie sur la scène européenne.

Dévoiement de la parole publique

Ainsi, lorsque le Ministre de l'Intérieur Claude Guéant, en charge des cultes, déclare en avril

2011 que «l'accroissement du nombre de musulmans, un certain nombre de comportements,

posent problème», il ne contribue pas à la paix sociale et religieuse comme ses fonctions le lui

intiment. Bien au contraire, il stigmatise une partie de la population française sur critère

religieux, détournant ainsi en toute quiétude le sens de l'institution qu'il dirige.

Ce dévoiement de la parole publique par des représentants de l'Etat crédibilise les discours

populistes et d'extrême droite non seulement dans notre pays, mais également à l'échelle

européenne. Ainsi, c'est en référence directe aux débats français sur l'identité nationale et sur

la burqa, qui avaient occasionné de nombreux discours aux relents nauséabonds, que

l'extrême-droite suédoise a réussi à imposer une rhétorique antimusulmane dans la campagne

Page 35: Le combat antiraciste Européen

législative de septembre 2010, ce qui a permis aux "Démocrates Suédois" d'entrer au

Parlement pour la première fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Transgression institutionnelle

Plus récemment, les déclarations sur les Roms du Conseiller d'Etat Arno Klarsfeld, qui

préside le Conseil d'Administration de l'Office français de l'immigration et de l'intégration

(OFII) depuis septembre 2011, s'inscrivent dans cette même logique. Il a en effet déclaré, lors

d'un déplacement à Bucarest en octobre 2011 qu' «on ne fait pas huit enfants quand on n'a

qu'une pièce. Après, les chefs des mafias viennent et disent: "Tu vas m'en donner deux pour

aller mendier ou faire le trottoir".» Il a tranquillement réitéré ces propos lors de son audition

par la Commission des lois de l'Assemblée nationale le 11 janvier, provoquant le départ des

députés de gauche.

Ce faisant, il inscrit l'institution qu'il représente en contradiction avec sa mission principale,

qui est l'accueil et l'intégration des migrants. Cette transgression institutionnelle a été

autorisée par celle de l'actuel Président de la République qui avait convoqué en juillet 2010

une réunion à l'Elysée pour «faire le point sur la situation des Roms et des gens du voyage».

C'était la première fois depuis 1945 qu'une catégorie supposée «ethnique» de la population

faisait l'objet d'une réunion à l'Elysée, qui se mettait alors en contravention coupable avec

l'esprit et la lettre du fonctionnement des institutions de la République.

Avec ces déclarations, le Conseiller d'Etat non seulement manque à son devoir de réserve,

mais surtout entame le crédit porté tant à son institution de rattachement qu'à celle qu'il

préside. De plus, tout comme le funeste Discours de Grenoble, discours aux accents

antirépublicains prononcé par un Président de la République, elles ont une résonnance

particulière en Europe, en particulier en Roumanie, en Bulgarie, en Hongrie ou encore en

Slovaquie. Dans de nombreux villages de ces pays, les Roms sont parqués dans des quartiers

séparés, et ils sont régulièrement victimes de meurtres racistes. Ces paroles institutionnelles

françaises apportent un soutien de poids à ceux qui décrivent les Roms comme une population

qui pose problème partout et par essence, et dont il faudrait en toute logique se débarrasser.

Soutien de l'UMP à Orban

L'accueil chaleureux réservé à Viktor Orban lors du Congrès du PPE organisé par l'UMP à

Marseille en décembre, comme le soutien entier que lui ont témoigné les députés européens

de l'UMP lors de sa controversée venue au Parlement européen le 18 janvier, fournissent un

dernier exemple, parmi tant d'autres, de ce dévoiement «décomplexé» des valeurs de la

République et des institutions démocratiques.

Alors même que le Premier ministre hongrois détruit chaque jour un peu plus la démocratie

dans son pays et porte au pouvoir les idées de l'antisémite et anti-Roms Jobbik, allié du Front

national au niveau européen, c'est sans complexe que les élus de l'UMP lui ont affiché leur

soutien, au mépris du mandat qui leur a été confié par les Français et qui commande la

défense inconditionnelle des valeurs démocratiques.

Pour le respect de ces valeurs en France comme dans le reste de l'Europe, il est urgent de

mettre un terme au dévoiement en toute impunité de la parole publique et des institutions de la

République, qui constitue aujourd'hui la véritable arrogance en France.

Benjamin Abtan, secrétaire général du Egam, European grassroots antiracist movement.

Page 36: Le combat antiraciste Européen

Sandrine Mazetier, députée de Paris et secrétaire nationale du Parti socialiste en charge de

l'immigration.