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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection Magnifier les défauts d’un matériau, un paradoxe ? Lucille Mazy Mémoire de master Janvier 2012 Directeurs de mémoire Jean-François Blassel Guillemette Morel-Journel Ecole d'architecture de la ville & des territoires à Marne-la-Vallée Document soumis au droit d'auteur

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfectionMagnifier les défauts d’un matériau, un paradoxe ?

Lucille Mazy

Mémoire de masterJanvier 2012

Directeurs de mémoireJean-François Blassel Guillemette Morel-Journel

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Mémoire de master Matières à penserJanvier 2012

Directeurs de mémoireJean-François Blassel Guillemette Morel-Journel

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfectionMagnifier les défauts d’un matériau, un paradoxe ?

Le champ d’action du béton étant particulièrement large, ce mémoire se concentre sur les surfaces apparentes des murs porteurs en béton en raison des paradoxes et questions qu’elles suscitent.

Partant d’une réflexion axée sur les contradictions rencontrées lors de la mise à nu du matériau, nous posons la question suivante: de quelle manière la nature imparfaite du béton a-elle amené les concepteurs à en faire l’outil d’une esthétique programmée ?

Ce travail examine dans un premier temps les causes qui ont amené l’architecte à accepter les défauts et le caractère imparfait du matériau. Cette respectabilité s’est construite progressivement grâce à l’identification de trois objectifs : donner un sens à l’exposition d’un matériau dont la fonction première n’est pas de s’exposer, casser les préjugés qui bloquent la tolérance à son égard et empêchent toute réception positive quant à sa visibilité, puis lui construire une image en rapport avec sa nature expressive et imparfaite. Il s’agit alors d’accepter le matériau en tant que tel et de développer les moyens et les outils de sa véritable expression.

Nous allons voir que ce processus de réflexion amène aujourd’hui l’architecte à intégrer les défauts du matériau au cœur de ses projets et à en faire le relief esthétique de son architecture. On se rend compte qu’en plus de donner à voir la véritable nature du béton, l’acceptation de ses imperfections permet une meilleure anticipation et un meilleur contrôle des apparitions expressives de celui-ci. Mais elle soulève de nouvelles interrogations, notamment la manière de provoquer artificiellement la réaction spontanée du matériau.

D’abord basée sur un travail d’observation de différentes surfaces de béton apparent, et appuyée par des échanges avec certains acteurs de la construction béton (expert et plasticien des bétons, chef de chantier, architectes et consultants béton), ce mémoire s’organise autour d’un corpus divisé en trois catégories. Il prend pour point de départ l’hypothèse où la technique est l’outil d’une recherche de perfection, et s’étend à la mise en place d’un processus à la fois structurel et visuel engendré par la prise en considération des défauts du matériau. Chaque exemple, dans une suite logique, nous permet de noter le processus qui conduit l’architecte à revaloriser les imperfections du matériau.

L’acte de magnifier les défauts en les plaçant au centre du projet s’accomplit dans un premier en temps à la surface du matériau tel que l’incitait sa mise à nu, mais elle amène progressivement l’architecte à travailler conjointement la surface et la structure du bâtiment, en pensant le béton comme un matériau à la fois esthétique et structurel. Une manière de réfuter le paradoxe consistant à mettre à nu un matériau structurel dépourvu de qualités esthétiques.

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Exposed concrete and the admissibility of imperfection Magnifying a material’s imperfection – a paradox?

Since concrete has such a wide field of application, this dissertation will focus on the particular issue of the exposed surfaces of weight-bearing concrete walls, because of the paradoxes and questions that these raw surfaces create.

Reflecting on the contradictions raised by the material in this state, we ask the following question: How has the imperfect nature of concrete led designers to use it in an esthetic perspective?

This work firstly examines the reasons that inspired architects to accept the imperfection and the flawed aspect of the material. A respectability gradually developed, thanks to the identification of three objectives: To give meaning to exposing a material whose first use is not that of being shown; to break prejudices that thwart acceptance of its esthetic aspect and prevent one from seeing it in a positive light; and lastly to build an image in relation to its expressive and imperfect nature. What it comes down to is accepting the material as it is and to develop ways and tools to grant it truly expressive qualities. We will show that this reflective process today leads architects to integrate the material’s imperfections at the heart of their projects and to use these to give their architecture an esthetic relief. It’s then easy to see that in addition to unveiling the true nature of concrete, accepting its imperfections enables better anticipation and control of its expressiveness. But it also gives rise to new questions, especially as regards how to artificially provoke a spontaneous reaction to the material.

Based on a personal work of observation of the various exposed concrete surfaces and on a series of interviews with specialists (concrete experts and technicians, construction site managers, concrete architects and consultants,), this dissertation is organized around a corpus divided into three categories: the hypothesis that technique guides the search for perfection, and also guides the implementation of a double process, both structural and visual, playing up the material’s imperfections. Each example supplied, in a logical progression, enables us to understand the process that led the architect to valorize these flaws.

The act of magnifying the imperfections, placing them at the center of the project,is accomplished firstly on the surface of the material, the rawness of which attracts our attention, and gradually leads the architect to work on both the building surfaces and structure, considering the material as having structural AND esthetic qualities. This sheds light on what seems to be a paradoxical choice, that of baring a material originally seen as purely structural.

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Exposed concrete and the admissibility of imperfection Magnifying a material’s imperfection – a paradox?

Since concrete has such a wide field of application, this dissertation will focus on the particular issue of the exposed surfaces of weight-bearing concrete walls, because of the paradoxes and questions that these raw surfaces create.

Reflecting on the contradictions raised by the material in this state, we ask the following question: How has the imperfect nature of concrete led designers to use it in an esthetic perspective?

This work firstly examines the reasons that inspired architects to accept the imperfection and the flawed aspect of the material. A respectability gradually developed, thanks to the identification of three objectives: To give meaning to exposing a material whose first use is not that of being shown; to break prejudices that thwart acceptance of its esthetic aspect and prevent one from seeing it in a positive light; and lastly to build an image in relation to its expressive and imperfect nature. What it comes down to is accepting the material as it is and to develop ways and tools to grant it truly expressive qualities. We will show that this reflective process today leads architects to integrate the material’s imperfections at the heart of their projects and to use these to give their architecture an esthetic relief. It’s then easy to see that in addition to unveiling the true nature of concrete, accepting its imperfections enables better anticipation and control of its expressiveness. But it also gives rise to new questions, especially as regards how to artificially provoke a spontaneous reaction to the material.

Based on a personal work of observation of the various exposed concrete surfaces and on a series of interviews with specialists (concrete experts and technicians, construction site managers, concrete architects and consultants,), this dissertation is organized around a corpus divided into three categories: the hypothesis that technique guides the search for perfection, and also guides the implementation of a double process, both structural and visual, playing up the material’s imperfections. Each example supplied, in a logical progression, enables us to understand the process that led the architect to valorize these flaws.

The act of magnifying the imperfections, placing them at the center of the project,is accomplished firstly on the surface of the material, the rawness of which attracts our attention, and gradually leads the architect to work on both the building surfaces and structure, considering the material as having structural AND esthetic qualities. This sheds light on what seems to be a paradoxical choice, that of baring a material originally seen as purely structural.

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1. Conflit à la surface du bétonIdéologie de la construction versus nature du matériau

1.1 Un matériau expressif et imparfait

Le béton est un matériau résultant de l’assemblage de granulats, de sables et de liants. Il est de ce fait un matériau composite dont la texture dépend directement de la nature de ses constituants. Pour comprendre les différents phénomènes qui régissent la construction béton, nous commencerons par observer puis interroger ce qui se passe à la surface du béton. L’approche par la surface nous permet d’aborder le matériau sous une autre dimension. Sans en comprendre le processus de fabrication elle nous offre une première approche visuelle de sa technicité, de sa matérialité et de sa complexité. Elle nous permet également d’évoquer la notion des sens, notamment le toucher et la vue, qui représentent la base de l’expérience architecturale et de notre rapport au monde construit.

1.1.1 Que se passe-t-il à la surface du béton ?Alors que le béton est en soi un matériau hétérogène si l’on considère son squelette, sa couche de surface en revanche composée d’un fin mortier de ciment durci, peut être considérée comme une masse homogène. Le ciment une fois pris est normalement et idéalement le seul visible à la surface du béton (figure 1). Ainsi les propriétés de surface du matériau telles que la dureté, la porosité ou la teinte devraient être uniformes et aucun problème important concernant les irrégularités de surface ne devrait se poser. Ce n’est pourtant pas le cas.

Après plusieurs heures de séchage, le coffrage est enlevé. Rien ne transparaît de l’extérieur si ce n’est la surface du matériau. Le caractère structurel du béton est caché dans son épaisseur, seule la part inerte du matériau se dévoile, c’est-à-dire sa matière, ses strates, son grain, sa couleur aléatoire, sa laitance et les marques du coffrage. Le mortier fin, fluide ou semi-fluide n’est pas stable et peut se dissocier de différentes façons. Des ségrégations entre l’eau et les matières solides, entre le ciment et les petits granulats, entre les particules de différentes

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1. Le béton: un matériau hétérogène et une surface homogène

Image de gauche: Schéma de la composition interne du béton, et du processus de répartition et de migration de ses composants appelée plus techniquement la dessiccation.Image de droite: Cette coupe sur un bloc de béton nous permet de comprendre visuellement la répartition des granulats, sables et liants après vibration et séchage.Documents LM, Marne la Vallée, Novembre 2011.

1

Couche de surface composée d’un fin mortier de ciment.Les petites particules du mélange ont migré en surface.

Sous la peau de ciment en surface du béton (appelée autrement: la laitance) apparaît la structure hétérogène du béton.

Plus on s’enfonce sous la couche de mortier et plus les granulats seront de taille importante. Il y a une migration décroissante des éléments vers la peau du béton.

2. La surface du béton: une peau soumise aux imperfectionsCes différentes photographies de surface illustrent les manifestations de surface que l’on rencontre le plus fréquemment dans la construction béton (voir annexes 2 et 3 pour plus de précision).Documents LM, Marne la Vallée, Août 2011.

2

Impact des gradients de température et d’humidité sur la teinte du béton

Coulures dues à un manque d’étanchéité du coffrage

Mauvaise répartition des granulats et manifestation en surface

Réactions entre la matière du béton et les huiles de démoulage mal étalées sur le coffrage

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formes ou de différentes grosseurs, et les gradients de température et d’humidité dans la phase de durcissement, causent un certain nombre d’irrégularités de surface. Le gris du ciment peut ainsi paraître inégal, le grain irrégulier rendant la surface tantôt lisse tantôt rugueuse, et de nombreuses traces de coulures ou autres viennent tacher la surface (figure 2). L’ensemble de ces phénomènes physiques rendent très difficile la maîtrise des propriétés de surface du béton. Elle est le résultat d’un processus, pour reprendre Didi-Hubermann, « […] dont le principe aboutit au non-principe suivant : on ne sait jamais exactement ce que cela va donner. » ¹

On remarque que ce qui se passe à la surface du béton est directement lié à l’utilisation de l’objet technique de construction, des phénomènes physiques et chimiques du matériau et d’un processus de durabilité. Le résultat obtenu dépend essentiellement du mélange, du processus de fabrication et de sa mise en œuvre.

1.1.2 La trace comme témoin d’un processusLes différents phénomènes relevés en surface nous permettent de noter que l’appareil du béton est bien plus qu’un mélange de sable, de gravillons, de ciment et d’eau. L’empreinte du coffrage ainsi que la réaction du granulat tassé ou vibré entre ses planches sont les témoins du travail de la matière. Les traces qui apparaissent sous le réglage du coffrage constituent un témoignage du système de production et de l’hétérogénéité que l’on trouve dans les différents actes de fabrication. La trace devient la matière même du matériau, le témoin de ses caractéristiques, l’instantané de sa chimie, de sa physique et de son industrie.

Cette matière souvent trop aléatoire et difficilement maitrisable a bien du mal à définir une règle d’expression que l’on puisse identifier et répéter. Une règle qui serait pourtant un moyen de déterminer des caractéristiques esthétiques au matériau. On identifie cependant deux types de traces pouvant établir une première connaissance et approche à l‘égard de l’esthétique des surfaces de béton.Une fois décoffré le béton expose sa texture sous une double apparence, celle du dessiné et celle du maculé (figure 3). L’une est liée au moule imprimant en négatif la texture de sa matière propre, l’autre correspond à la précipitation du grain, au versement de la matière, à son tassement puis à sa dessiccation. La première traduit le caractère indolent du matériau qui vient prendre la forme du moule qu’on lui propose, et l’autre témoigne des caractéristiques propres du matériau, marquées par son instabilité. Loin de se détruire, ou de se retourner l’une contre l’autre, ces deux manifestations visuelles travaillent ensemble à constituer la figure authentique du matériau. Cyrille Simonnet en parle ainsi « la surface sur

1 Didi-Huberman (G) (ss dir.) L’empreinte. Catalogue de l’exposition du 19 février au 19 mai 1997. Paris: Centre Georges Pompidou, 1997, p.336.

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4. Le béton: un matériau de l’instantCe morceau de surface du pavillon de conférence de Vitra par Tadao Ando témoigne du travail sensible du béton. Un matériau qui s’expose sous une double texture: celle du dessiné (trous de banche) et celle du maculé (le non anticipé). La surface du béton est le fruit de la nature imparfaite du matériau et des différents événements qui la composent.Couverture de l’ouvrage Exposed concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005.

4

3. Le béton: une texture sous une double apparence

- A gauche: une surface dessinée traduite par les traces des lignes du coffrage, des joints de reprise et des différents systèmes de mise en oeuvre imprimant en négatif leur présence.- A droite: une surface maculée traduite par la chimie lente et capricieuse de la dessiccation, la précipitation du grain, le versement de la matière, son tassement et sa vibration. Documents LM, Marne la Vallée, Août 2011.

3

Trace dessinée et anticipée:Trous de banches préalablement intégrés au dessin de coffrage.

Trace maculée et imprévue:Une feuille d’arbre est venue se loger dans le coffrage.

Trace dessinée et anticipée:Les lignes du coffrage

Trace maculée et imprévue:L’air contenu à l’intérieur du béton vient s’échapper en surface au moment du coffrage. Ces bulles d’air sont plus ou moins maîtrisables.

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19Conflit à la surface du béton

béton est l’ébauche de 1000 gestes, contenus et orchestrés par le diagramme des lignes du coffrage mais débordés de toutes parts par une constellation de traces qui sont le langage intime du matériau. »² Ainsi le béton se caractérise comme un matériau imparfait superposant des champs incontrôlés à une partition réglée.

Un pan du mur du pavillon de conférence de Vitra par Tadao Ando expose cette double modalité du signe en surface, celui du maculé et du dessiné. Le travail du béton du pavillon, comme nous le verrons par la suite, a été particulièrement étudié et dessiné en amont du projet. Les traces de coffrage, les trous de banche et les joints de reprise sont totalement intégrés au dessin de la surface. Cependant on note à un certain endroit du bâtiment un « accident » ou du moins une trace non anticipée et certainement non volontaire de la part l’architecte. Quelques feuilles sont venues se greffer et laisser leur empreinte dans la surface du béton. Ce pan de mur apparaît alors sous une double apparence, révélant ainsi un paramètre essentiel à la compréhension du matériau: celui de la trace (figure 4).

L’ensemble des traces inhérentes à la nature du matériau et à sa fabrication nous amène à interroger la notion qualitative ainsi que le degré de tolérance établi à l’égard de ces surfaces. Les difficultés esthétiques rencontrées à la surface du béton, et provoquées par la nature imparfaite et par les caractéristiques expressives du matériau, constituent un véritable enjeu lorsque ce dernier est exposé aux yeux de tous. Une difficulté majeure, qui divise les différents acteurs de la construction comme en témoigne le recours au revêtement.

1.1.3 Le revêtement comme renoncementAu début du siècle, de nombreux architectes, ingénieurs et entrepreneurs ne voient dans le béton armé qu’un matériau d’ossature nécessitant d’être revêtu. Franck Lloyd disait à ce sujet « il n’y a ni histoire ni ode qui chante les qualités esthétiques du béton»³. La matière du béton a du mal à se faire une place au cœur de l’esthétique architecturale. Le revêtement souvent utilisé pour pallier à ce problème manifeste la faiblesse des acteurs de la construction à l’égard des défauts du matériau. Une faiblesse exacerbée par une quête continuelle de perfection. Il s’agira d’ailleurs d’interroger ce qui motive et provoque ce rejet face à l’erreur et à l’imperfection.

Le revêtement est le plus fréquemment une couche de mortier qui recouvre la surface disgracieuse et la transforme en une surface homogène, régulière et esthétiquement recevable.Toutes les marques de la matière disparaissent au profit d’un écran neutre,

3 Propos de Franck Lloyd Wright rapportés par Collins (P) Splendeur des bétons. Les prédécesseurs et l’oeuvre d’Auguste Perret, Paris, Éditions Hazan, 1995.

2 Cyrille Simonnet «Le béton éclatant» L’esprit des matériaux architecture et philosophie N°1 Béton[S], Paris, Editions de la Villette, 2008, p.30.

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5. Sous le revêtement: un matériau qui s’exprimeCette image recense les traces majeures que l’’on peut trouver sous le revêtement d’un bâtiment. Il s’agit ici de photographies prises sur un chantier avant que murs et plafonds ne soient revêtus. Elles sont le témoignage gênant de la faiblesse de la technique face à un matériau en quête d’expressivité. Une image dérangeante pour le monde de la construction et que l’on cherche à cacher à tout prix.Exposed concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005, p. 186.

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Traces d’un coffrage non soigné

Bulle d’air et fuite de laitance

Faïençage et porosité de la surface

Peu d’attention portée au joint de reprise et mauvaise étanchéité du coffrage

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21Conflit à la surface du béton

totalement dépourvu de signes et de sens. Face aux différentes manifestations de surface le revêtement apparaît presque inévitable, ou apporte du moins une réponse rapide et qualitative. Il efface et protège les défauts du matériau du regard de l’observateur et éloigne le regard de la matière. (figure 5)Une attitude qui témoigne et illustre les idéologies d’une société à un moment donné. Le revêtement, mobilisant des moyens et des techniques de mise en œuvre différentes et non incluses dans le processus de conception du béton, marque un besoin déterminé et orienté. Il ne s’agit pas d’un geste gratuit et anodin mais volontaire et anticipé. Il marque un besoin fortement connoté de perfection.

Cette attitude apparaît comme une fuite face à la nature même du matériau. On recouvre sans essayer de composer avec ce dernier ; en cachant, on s’arrête à la caractéristique structurelle du matériau sans aller au-delà des préjugés auxquels il est exposé. On fabrique ainsi une image bien différente et contraire au but premier qui est de lui construire une image positive.L’acte de venir cacher et revêtir la surface du béton marque un signe de désintérêt ou d’impuissance face à la nature du matériau dans un monde sans cesse guidé par la maîtrise et par un besoin de perfection. On cache le défaut car il peut être perçu comme un signe d’impuissance du monde de la construction ou une incompétence du constructeur. La surface parsemée des signes d’expressions du béton devient le témoignage d’une technique n’arrivant pas à maîtriser son matériau. Un système où le matériau règne et devient maître sur l’outil technique ; une image dérangeante pour le monde de la construction (figure 5).

La question suivante que se pose Marc Mimram « Pourquoi tout ce qui est aspérité, ride, déformation, irrégularité devrait disparaître pour laisser place au lifting, à la rénovation de façade et autres interventions visant à […] dominer la nature ? »⁴ m’amène à questionner dans une seconde sous partie le pourquoi de ce subterfuge, et la raison qui nous pousse continuellement à dominer ce qui nous entoure.

4 Marc Mimram, Matières du plaisir, Lausanne, Editions Pavillon de l’Arsenal, 1999, p.27.

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy22

7. Visitor Center for the Darwin D. House à Buffalo: La puissance de la formulation.Architectes: Toshiko Mori et Sonya Lee

Dans ce bâtiment le mur occupe également une place majeure. Au centre de l’architecture, il guide l’ensemble des mouvements du visiteurs. Il convient donc de travailler tout particulièrement son aspect. Un aspect contrôlé par un travail d’expérimentation et de formulation.Exposed concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011.

6. Vitra Conference Pavilion à Weil-am-Rhein: Le dessin du coffrageArchitecte: Tadao Ando

Dans ce bâtiment le mur occupe une place très importante. Le volume simple de l’architecture lui donne un rôle tout à fait particulier, ce qui pousse l’architecte à travailler son expression.Une expression contrôlée par le dessin et l’anticipation des traces de mise en oeuvre et du coffrage.Tectonic visions in architecture, Copenhagen, Kunstakademiets Arkitekskoles, 2004.

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Une architecture qui crée un rapport particulier entre le mur et l’usager.

Le béton se trouve ici au coeur du projet dans une place centrale et singulière

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23Conflit à la surface du béton

1.2 Le paradigme de la perfection, fantasme d’une technique toute puissante: Le pavillon de conférence deVitra à Weil-am-Rhein et le Visitor Center pour the Darwin D. House à Buffalo

On remarque un véritable rejet des imperfections et des défauts quels qu’ils soient; un rejet qui comme nous l’avons présenté, peut s’exprimer par l’acte de cacher et s’illustre dans le cas du béton par le revêtement de la surface disgracieuse. Mais le revêtement peut être perçu comme une fuite face à la nature du matériau et une réponse à l’impossibilité de mettre à nu un matériau dépourvu de caractéristiques esthétiques. Ainsi nous allons voir que le béton apparent compte tenu sa nature imparfaite et expressive, représente un véritable défi dans le monde de la construction. Le paradoxe évoqué en introduction consistant à rendre apparent un matériau dépourvu de caractéristiques esthétiques et qui de plus, présente une nature imparfaite, en soulève un second qui réside à rendre parfait ou du moins esthétiquement acceptable, un matériau qui ne l’est pas. Ce paradoxe devient une entrée de démonstration technique aux yeux de tous. Il s’agit de faire du contrôle de l’imperfection le témoin d’une technique toute puissante. La surface devient ainsi le support d’une démonstration et le béton l’objet de celle-ci. Sa surface est alors, par les difficultés esthétiques qu’elle présente, le lieu d’un défi permanent, celui de rendre parfait quelque chose qui ne l’est pas.

1.2.1 Quelle est la place de la technique dans cette quête de perfection ?Le béton a du mal à s’imposer en temps que matériau visuel en raison de l’image peu positive qu’il renvoie. Il s’agit alors aux différents acteurs de la construction de concourir à la rendre acceptable et visuellement appréciable, sans avoir recours au revêtement évoqué précédemment qui constitue un contre sens notable aux objectifs de mise à nu du matériau.

Nous avons vu que l’expression du béton apparent était déterminée par la texture, les dimensions, la disposition des éléments de coffrage ainsi que par les phénomènes de surface apparaissant au décoffrage. Il s’agit d’abord de contrôler rigoureusement les travaux sur le chantier pour pallier aux différentes manifestations de surface. Plus le coffrage sera étudié et dessiné en amont du projet et la mise en œuvre précise et attentive, plus le résultat sera précis et sans mauvaise surprise. Pour un résultat maîtrisé, le béton demande une précision et une parfaite connaissance de ses composants.

La mise à nu du matériau pouvant ruiner l’aspect du bâtiment, les architectes ont d’abord cherché à maîtriser la surface du béton par des traitements après coulage (bouchage des joints et des trous d’ancrage), par le dessin scrupuleux du coffrage comme dans le cas du pavillon de conférence de Vitra (figure 6), puis plus récemment par un contrôle manifeste de la formulation comme nous le verront dans le centre des visiteurs pour le Darwin D. House à Buffalo (figure 7). Peu à peu le travail sur la plasticité et les textures s’est appuyé sur une meilleure

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy24

8. Visitor Center for the Darwin D. House à BuffaloEchantillons et expérimentations autour de la question d’aspect du béton

L’architecte Sonya Lee expérimente ici différentes formulations en jouant sur les différents paramètres du matériau: rapport e/c, couleur de ciment, vibration, agents de démoulage, etc. Ces trois échantillons ont été sélectionnés à l’issu des premiers tests. On note une particularité commune: l’aspect esthétique, homogène et uniforme de leur surface. (annexe 4 pour voir l’ensemble des échantillons)Tectonic visions in architecture, Copenhagen, Kunstakademiets Arkitekskoles, 2004.

9. Visitor Center for the Darwin D. House à BuffaloLa surface béton du bâtiment réalisée après tests

Cette photographie montre l’aspect du béton dans le projet final: un béton uniforme, totalement exempt de défauts., un béton que l’on pourrait presque apparenter à du plastique.Tectonic visions in architecture, Copenhagen, Kunstakademiets Arkitekskoles, 2004.

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La surface apparaît de manière totalement homogène, l’ensemble des traces inhérentes au matériau semblent avoir disparues.

Echantillon 5:- Béton autoplaçant- Vibration sur un seul côté- Coffrage lisse- Huile de cuisson dans le coffrage- Faible rapport e/c

Echantillon 7:- Béton 400 psi avec un superplastifiant- Coffrage recouvert de bande de bois et de fines ficelle dans les cannelures- Huile ordinaire dans le coffrage- Vibration interne et puissante

Echantillon 8:- Béton 400 psi avec un superplastifiant- Coffrage recouvert de bande de bois et de fines ficelle dans les cannelures- Huile ordinaire dans le coffrage- Vibré une première fois à 50 cm puis une seconde fois

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25Conflit à la surface du béton

interface entre tous les acteurs de la chaîne de production depuis la formulation du béton jusqu’au soin du décoffrage et au contrôle de la mise en œuvre.Le paradigme de la perfection guide l’ensemble des faits et gestes qui gravitent autour de la construction béton, il oriente la recherche et la réflexion scientifique vers cette question d’apparence et d’aspect du béton. La technique y trouve alors son paroxysme. Sa place devient primordiale, elle doit continuellement trouver les outils et développer des procédés pour rendre possible la maîtrise du matériau. Nous sommes dans une technique de contrôle, d’anticipation et d’innovation. Rien ne doit être laissé au hasard, tout est mesuré, anticipé et maîtrisé afin de limiter les expressions non désirées du matériau. La technique devient l’outil au service d’une idéologie.

1.2.2 Deux modes de contrôle : l’anticipation des caractéristiques chimiques et physiques du matériau, et le dessin des éléments de sa mise en œuvreNous avons établi plus tôt deux modalités du signe à la surface du béton : le maculé et le dessiné. On note ainsi deux familles d’attention portées à l’égard des surfaces de béton, celle de la formulation (adjuvants, granulats, sables et liants) et celle de la mise en œuvre (coffrage, coulage, etc.). Il s’agit alors d’analyser deux exemples pour comprendre l’impact et le rôle de la technique dans chacun de ces cas.

Le premier concerne le visitor Center for the Darwin D. House à Buffalo. On s’intéressera plus particulièrement au travail de l’architecte Sonya Lee mandatée par l’architecte du centre Toshiko Mori, pour effectuer différents essais de formulations et prototypes en vue de créer le béton le plus parfait possible. Ce bâtiment relativement simple est construit autour d’un mur de béton apparent. Ce mur présente un enjeu important en raison de sa visibilité et du rapport particulier qu’il crée avec le visiteur, ce premier accompagnant les déplacements de ce dernier d’un bout à l’autre du bâtiment. Sonya Lee a effectué pour ce mur une série de huit expérimentations et prototypes (figure 8). Elle cherche à déterminer la formulation et la mise en œuvre la plus adaptée au projet, à ses attentes esthétiques et structurelles. Une démarche qui témoigne du travail d’anticipation et de recherche à l’égard de l’expression du béton. Avec une même préparation et en jouant avec ses composants (liants, hydratation et granulats) on peut arriver à des effets de couleur et de texture très différents. Sonya Lee cherche à constituer un béton suffisamment stable pour couler le coffrage en une seule fois, et réduire les effets indésirables provoqués par les variations de températures et d’humidité. Elle essaye de définir la formulation finale idéale qui lui permettra de couler le bâtiment en un jour tout en ayant une texture consistante et une géométrie de coffrage précise. Cette attitude de recherche et d’expérimentation illustre les capacités de la technique à contrôler et à anticiper le matériau dans son expression. Le béton réalisé pour le Visitor Center montre un matériau totalement dépourvu d’imperfection. On pourrait même s’y tromper. Est-ce réellement du béton ? Il est là inerte sans expression, s’apparentant presque au plastique. La technique fait alors preuve de sa toute puissance au travers du travail de la

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10. Vitra Conference Pavilion à Weil-am-RheinLa technique au service d’un paradigme de perfection

La surface visuellement et proportionnellement parfaite du béton du pavillon de conférence par Tadao Ando témoigne d’une forte volonté de perfection de la part des différents acteurs de la construction. Il y a un ici une attention soignée des différents procédés de mise en oeuvre.Exposed concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005 p. 192

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11. Vitra Conference Pavilion à Weil-am-RheinUne surface de béton dessinée

Les coupes de réalisation du pavillon de conference témoignent du travail méticuleux de l’architecte à l’égard des marques laissées par la mise en oeuvre du béton. Chaque reprise de coffrage et chaque trou de banche a été soigneusement anticipé et intégré, et cela dès la réalisation du projet.Exposed concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005, p. 18.

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surface du béton et de la maîtrise parfaite du matériau (figure 9).

Le second concerne le Vitra Conference Pavilion de Tadao Ando à Weil-am-Rhein. Il s’agit dans ce cas de montrer le rôle et l’importance du dessin des éléments de coffrage dans la quête de perfection.L’architecte, dans son travail de conception, intègre les traces de la mise en œuvre (coffrage et trous de banche) dès les premières esquisses du projet. Tout a été calculé en amont du projet afin d’éviter que les traces de mise en œuvre ne viennent prendre le dessus sur l’architecture, l’objectif étant de fondre les traces dans un ensemble architectural visuellement homogène. Il crée ainsi une sorte de pattern ; reprenant le module des tatamis (figure 11). Chaque outil servant à la construction du béton a été soigneusement étudié, voir même dessiné pour le projet. L’architecte crée des coffrages sur mesure de 180 cm x 90 cm sur lesquels il dessine et anticipe chaque événement visuel, tel que les trous de banches laissés par le maintien des coffrages. Les tiges de maintien seront également dessinées spécialement pour ce projet, la figure 10 ci-contre en montre quelques échantillons. « Rien n’est laissé à l’accident », tout est anticipé, chaque élément est dessiné pour atteindre l’effet désiré.

Ces deux analyses ouvrent une porte au caractère à la fois culturel et historique du paradigme de la perfection. Nous ne nous étendrons pas sur le sujet, mais ces deux exemples Japonais témoignent d’une culture de la perfection qui se traduit jusque dans l’architecture. Un propos que l’on pourrait accompagner de l’ouvrage du philosophe Rolland Barthes L’empire des signes qui s’intéresse aux signes laissés par une culture et de ses pratiques. Günter Pfepfer dira d’ailleurs dans l’ouvrage Exposed Concrete au sujet du Conference pavilion de Tadao Ando et de la culture Japonaise, «l’importance n’est pas tant dans l’intérieur du cadeau mais plutôt dans le soin apporté à son emballage et la perfection de son expression.» ⁵

Quoiqu’il en soit la technique joue un rôle majeur dans la quête visuelle des constructions en béton apparent. Elle est l’outil d’une idéologie et s’exprime à tous les niveaux, c’est-à-dire de l’idée à la réalisation, en passant par le dessin, l’expérimentation, le prototype et en s’appliquant finalement à la mise en œuvre.

1.2.3 La perfection comme témoignage de compétencesA la suite de ces différentes analyses j’en suis arrivée à me confronter au travail du béton et à cette notion de perfection sur le terrain. Les deux exemples évoqués précédemment témoignent d’une recherche invétérée de perfection et de contrôle de la matière, mais quels sont les actes qui traduisent ce travail sur un chantier et quel est le regard de l’ouvrier sur l’imperfection ?

Le chantier du projet « Descartes + » sur le campus de Marne La Vallée, produit par

5 Günter Pfeifer, Exposed Concrete technology and design, editions Birkhaüser, Dusseldorf, 2005..

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12. L’imperfection d’une surface comme signe d’incompétence

Ces différentes photographies ont été prises sur le chantier “Descartes +”. Il s’agit plus particulièrement des traces pour lesquelles le chef de chantier se trouvait dans l’embarras, comme si elles remettaient en cause ses compétences et son travail.Documents LM, Marne-La-Vallée, Novembre 2011.

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13. La perfection d’une surface comme témoignage d’un savoir faire

Ce bâtiment de l’architecte Jean baptiste Pietri est présenté comme un exemple exemplaire du travail du béton par la société Betocib. Les critères étant ceux d’une maîtrise parfaite du matériau. Il est le témoignage parfait des compétences des différents acteurs qui l’ont mis en oeuvre.Photographies du photographe Philippe Piron.Eco

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29Conflit à la surface du béton

l’atelier Thierry Roche et Associés et construit par l’entreprise Léon Grosse témoigne de cette recherche de perfection du constructeur, en atteste la première réaction du chef de chantier lors d’une visite, «vous verrez mon béton est parfait, tout a été mis en œuvre pour le rendre irréprochable»⁶. Une réaction qui renforce les arguments développés jusqu’alors consistant à dire que le béton apparent est devenu de par le paradoxe auquel il est confronté, non seulement le moyen d’expression d’une technique toute puissante, mais également le signe des compétences de ceux qui l’ont étudié, fabriqué et mis en œuvre. Une observation confortée par les propos d’Hervé Beaudouin, architecte spécialisé dans les bétons de site, des bétons naturels dotés d’une grande spontanéité, sur lesquels nous reviendrons plus tard. Il dit «atteindre ce caractère spontané avec des entreprises habituées aux voiles et aux parements bien lisses et aux livraisons de béton industriel en camion toupie, sera le plus difficile. L’entreprise est réticente, elle juge ces bétons, ratés, mal faits, approximatifs ne reflétant pas ses compétences. Ils diront que c’est un béton d’amateur.»⁷

Le travail autour de la perfection du béton et de la maîtrise du matériau, considéré comme difficilement maîtrisable, témoigne des compétences et de la puissance de la technique développée. Un béton présentant un défaut serait donc une sorte d’échec pour l’entreprise. Le chef de chantier du projet « Descartes + » était très mal à l’aise lorsque je m’attardais sur les défauts de surface de son béton et cela même s’il s’agissait d’un béton structurel voué à être recouvert (figure 12). Bien que ne remettant pas en cause les qualités constructives du bâtiment, la trace quelle qu’elle soit, recouverte ou pas, est un signe d’échec pour le constructeur. Rudy Ricciotti disait « En prescrivant le béton, on défend un savoir faire »⁸, il n’est donc pas étonnant que l’entrepreneur soit sensible aux manifestations de surfaces du béton, qu’elles soient recouvertes ou apparentes, elles remettent en question la qualité de son travail.

On note à l’issu de cette première partie l’engrenage dans lequel est entré le béton. Matériau naturellement instable et particulièrement expressif, sa mise à nu n’a pas été tout de suite évidente. Fortement connoté et totalement dépourvu de caractéristiques esthétiques, on a d’abord cherché à le cacher, mais la montée de la technique et un besoin de démontrer la puissance de cette dernière a amené les différents acteurs de la construction à défier le matériau. Un défi qui nécessite la mise en place d’un grand nombre de moyens et qui soulève de nombreuses questions. Le paradoxe visant à rendre parfait un matériau qui par nature ne l’est pas, ne trouve-t-il pas de limites tant financières, culturelles que sociales ?

7 Propos de l’architecte Hervé Beaudouin recueillis lors d’une interview de ce dernier._8 Rudy Ricciotti «Paroles d’architecte» dans le magazine Béton(s) n°1, Nov. Dec. 2005, p. 18.

6 Propos du chef de chantier du projet Descartes + recueillis lors d’une interview de ce dernier.

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2. Les limites d’une technique toute puissanteDe la perfection à la recherche de technicité minimale

2.1 Le coût de la quête de perfection

Aller à l’encontre du matériau n’est pas un acte naturel et demande comme nous avons pu le voir, beaucoup d’attention, de contrôle et d’anticipation. Une intention qui requiert un engagement important de la part des différents acteurs de la construction, allant du concepteur qui joue un rôle de prescripteur à l’ouvrier, acteur de la réalisation. Pour atteindre l’ensemble des effets désirés, la transformation nécessite un processus extrêmement séquencé, contrôlé, ajusté et orchestré. Il apparaît que sans engagement du concepteur, sans réflexion pour créer un mélange et un moule performant, et sans attention à l’égard de sa fabrication, la matière s’exprimera à sa manière, sans intégrer la composante esthétique de l’architecture.

Une simple visite de chantier m’a permis de saisir les difficultés techniques et financières consécutives au contrôle d’un matériau ayant pour caractéristique principale, l’imperfection. Le temps passé à la réalisation d’une surface de béton apparent exemplaire représente un temps conséquent sur le chantier : essais, raccords, précision et attention. Or, il va sans dire, qu’en architecture le temps c’est de l’argent. Chaque seconde passée au contrôle et à l’anticipation du matériau ralentit d’autant l’avancement du chantier et peut détourner l’attention d’autres préoccupations. Le développement de techniques permettant le contrôle de la matière, les différentes étapes permettant d’anticiper et d’expérimenter cette dernière, le temps passé à cacher tel ou tel défaut après décoffrage nécessitent la mise en place de nombreux de moyens humains, financiers et matériels.

Je me suis rendue sur le chantier « Descartes + » dans un premier temps pour saisir le comportement et l’intérêt des ouvriers à l’égard de la recherche de perfection. Une première visite qui m’a permis de sympathiser avec le chef de chantier, lequel interloqué par le sujet de mon mémoire, m’a ouvert plusieurs fois les portes de son chantier afin de suivre l’évolution du travail du béton.

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy32

La surface témoigne des recherches d’aspect par les acteurs du chantierLe béton ayant été découvert sous un très mauvais aspect au moment du décoffrage, il a fallu tester de nombreuses solutions pour le rendre acceptable. Un mur du chantier avait été le lieu de divers essais. Il est intéressant de pouvoir comparer à travers ce témoin de surface, le passage de l’imparfait à l’esthétique.

Prototype (il y en avait quatre sur le chantier)

Coffrage fabriqué sur mesure

Mise en place de techniques particulière

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Aspect sous lequel le béton «apparent» est apparu après décoffrage. Il apparaît une fois de plus que le béton est un matériau instable.

2. Chantier du projet «Descartes +» à Marne-la-ValléeL’ensemble de ces photographies témoignent du travail effectué par l’entreprise pour rendre parfait un matériau qui par nature ne l’est pas. Documents LM, Marne-La-Vallée, Novembre 2011.

Aspect de la surface après traitements divers. Avec l’intervention de l’homme et de la technique le béton apparaît sous un tout nouveau jour.

1. Chantier du projet «Descartes +» à Marne-la-Vallée Le chantier porte les stigmates d’un investissement matériel, humain et financier à travers les différents outils utilisés pour la réalisation de ces surfaces.Documents LM, Marne-La-Vallée, Novembre 2011.

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33Les limites d’une technique toute puissante

Mon intérêt pour le chantier « Descartes + » se trouve ici dans le fait qu’il aborde deux types de béton que l’on va pouvoir comparer au regard des moyens mis en oeuvre pour leur réalisation. Il s ‘agit d’une part d’un béton apparent dont l’objectif était de le rendre esthétique, et de l’autre d’un béton de construction voué à être recouvert. J’ai essayé d’évaluer les différentes procédures et moyens utilisés pour ces deux bétons. Nécessitent-ils le même investissement en temps et en argent ? Le béton apparent présente l’avantage de ne pas avoir à être recouvert, on y fait donc l’économie d’un matériau de revêtement, mais est-ce si économique que cela ? A ces questions le chef de chantier avoue d’un air désespéré «C’est du simple au double, voir au triple, il est presque ridicule financièrement de mettre à nu un béton mais c’est le choix de l’architecte, alors je le fais »¹. Le chantier porte d’ailleurs les stigmates de cet investissement au travers des différents outils et objets utilisés pour la réalisation de ces surfaces de béton apparent : échantillons, prototypes, essais de surface, ponçage manuel, coffrage en bois, etc. (figure 1). Un certain nombre d’éléments témoignent du travail conséquent que le béton apparent a pu générer sur le chantier ainsi que les difficultés rencontrées lors de son coffrage et décoffrage. Un béton qui malgré son apparence remarquable semble avoir donné du fil à retordre aux ouvriers. La photo ci-contre montre l’instabilité du matériau, en témoigne l’apparition d’un défaut majeur de surface malgré l’ensemble des moyens mis en oeuvre pour arriver à sa perfection (figure 2). Une comparaison avec la surface obtenue après un travail de ponçage et des traitements chimiques montre l’ampleur du travail effectué par les ouvriers pour donner au béton son aspect actuel, un aspect dépourvu de traces, une surface témoin des compétences d’une entreprise.

Cette quête de perfection et l’ensemble des moyens mis en œuvre pour y accéder représentant un coût considérable sur le chantier, où est donc l’intérêt de mettre à jour un matériau qui nécessite la mise en place de tels procédés ? N’est ce pas également d’une autre manière une faute réelle des concepteurs de chercher à donner à un matériau une image qui n’est pas la sienne ?

2.2 L’hypocrisie de la technique et la stigmatisation d’un matériau:Le chantier du projet «Descartes +» par l’atelier Roche

Cette dernière question soulève deux phénomènes, celui de la stigmatisation du matériau et celui de l’hypocrisie de la technique. Par le premier on entend la mise en place de caractéristiques indélébiles au matériau. On lui donne d’une part une image qui n’est pas la sienne mais on en fait un trait caractéristique permanent. Le béton porte alors les stigmates d’un matériau artificiel, froid et parfait. De l’autre on entend la simulation et le mensonge d’une technique qui nous donne à voir

1 Propos du chef de chantier du projet Descartes + recueillis lors d’une interview de ce dernier.

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy34

4. Tableau de Marion Trivital et photographie de Michael Wolf Ces deux documents témoignent de la tristesse que crée un paysage et un bâtiment fait d’éléments monotones, homogènes et répétitifs. Un paysage et une architecture sans reliefs.Source du tableau: muuuz.comSource de la photographie: photomichaelwolf.com

Un bâtiment fait d’éléments répétitifs et homogènes.

Cette photographie de Michael Wolf nous montre à quel point le béton insipide, muet et triste fabrique une architecture sans intérêt visuel et ennuyeuse. Le caractère du béton a une influence directe sur la manière dont l’architecture nous apparaît.

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L’homogénéité des couleurs et l’uniformité des volumes fabriquent un paysage monotones et triste.Il n’y a aucun relief, aucune vie, tout est totalement immobile.

3. Surface d’un béton préfabriquéCe béton préfabriqué ne présente aucune aspérité, la surface du bâtiment est totalement homogène. Un aspect résultant d’un coulage en usine permettant de s’affranchir d’un certain nombre de procédures sur le chantier et souvent sujettes aux imperfections de surface.Image issue du site de Lafarge.3

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35Les limites d’une technique toute puissante

un matériau dont l’image n’est pas véritable. La technique est à l’origine d’un problème de discernement à l’égard de la nature authentique du matériau. Elle crée un non sens au matériau et de ce fait à l’architecture.

2.2.1 La perfection stigmatise le matériauL’idéologie visant à produire des bétons aux qualités irréprochables amène les industriels à créer de nouveaux modes de fabrication et de nouvelles formulations. L’objectif de ces nouveaux bétons vise à extraire un certain nombre de défauts de surface souvent inhérents à une mise en place sur le chantier. On développe ainsi notamment les bétons préfabriqués et les bétons autoplaçants. Le premier, coulé en usine permet de s’affranchir d’un certain nombre de procédures mise en place sur le chantier. On arrive ainsi à fabriquer des bétons plus propres, dépourvus de variation de teinte et totalement uniformes en mobilisant beaucoup moins de main d’œuvre et de travail. Une solution à la fois financière et esthétique. D’autre part les bétons autoplaçants présentent une formulation qui permet un allégement des procédures appliquées au matériau sur le chantier. Les bétons autoplaçants sont capables de se mettre en place dans les coffrages avec comme résultat un produit très homogène, sans avoir à passer par les différentes procédures de compactage et de vibration. Les bétons autoplaçants permettent une meilleure gestion de l’aspect des surfaces après décoffrage, ils limitent notamment le nombre de manifestations de la matière. On emploie ces deux types de béton pour leur aptitude à gommer à la fois les traces indésirables de la mise en œuvre et à limiter les traces témoins de l’imperfection du matériau (figure 3).

Ce développement de produits et de techniques visant à rendre un matériau irréprochable vient à le stigmatiser. Majoritairement utilisés lors de la réalisation de surfaces en bétons apparents, ils construisent un paysage insipide et triste, fait de bétons identiques, à la même particularité, celle d’une qualité esthétique irréprochable tel que le montrent des photos célèbres du photographe Michael Wolf (figure 4). Marc Mimram ajoutait au sujet d’un travail effectué sur les marques dans l’architecture, «l’imparfait de l’architecture lui donne vie et temporalité » ². Aujourd’hui la recherche de perfection, nous amène à construire un matériau sans caractère, plaqué sur des bâtiments sans être capable de leur apporter la moindre expression. En produisant la perfection nous allons à l’encontre d’une esthétique architecturale globale visant à donner du caractère aux bâtiments. On critiquait le côté sale et négligé du béton apparent mais on lui reprochait avant tout sa tristesse, chose qui finalement n’a pas réellement changé. L’image esthétique du matériau passe ici par la maîtrise de l’imperfection mais ne résout en aucun cas la question de son esthétique architecturale. La perfection n’est peut être pas le meilleur langage dont l’architecture doit s’acquérir. Marc Mimram ajoute à ce sujet « Le développement de matière de synthèse semble privilégier la permanence de l’apparence au détriment d’une acceptation des

2 Propos de Marc Mimram à propos d’un travail effectué pour le «Structure et architecture» en 4e année

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy36

6. Chantier du projet «Descartes +» à Marne-la-ValléeCes deux photographies de détail de chacune des deux surfaces de béton nous permettent de noter les différentes expressions qui s’en dégagent.Documents LM, Marne-la-Vallée, Novembre 2011.

Béton fonctionnel et structurel voué à être revêtu.

Béton apparent.

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5. Chantier du projet «Descartes +» à Marne-la-ValléeL’intérêt du projet «Descartes +» pour ce mémoire se trouve dans la double fonctionnalité du béton. On peut y observer conjointement le travail d’une surface de béton apparent et celle d’un béton structurel.Documents LM, Marne-la-Vallée, Octobre 2011.

Le béton apparent à l’opposé devient silencieux, totalement dépourvu d’une quelconque expression.C’est comme si nous avions affaire à deux matériaux totalement différents.

Le béton utilisé à des fins structurelles révèle de manière très expressive sa véritable nature: un matériau expressif et imparfait, caractérisé par une multitude de textures et de manifestations de surface.

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37Les limites d’une technique toute puissante

stimuli du temps (par exemple). Rêvons aux résines aliénables, aux agglomérats imparfaits, aux parements colonisables, car pendant le temps de cette quête de perfection pelliculaire, nos bâtiments vont devenir techniquement, fonctionnellement ou socialement obsolètes. » ³

2.2.2 L’hypocrisie de la technique et le blocage d’un matériau en soif de spontanéitéOn en vient alors à se demander le véritable sens que produisent cette quête de perfection et ce besoin de témoigner d’une technique toute puissante. Il y a une sorte d’hypocrisie de la technique qui fait dire au matériau tout autre chose que sa véritable nature.Toujours sur le chantier « Descartes + », j’en viens à observer et à comparer la façon dont s’expriment chacun des deux bétons. Le béton voué à être caché montre de façon impressionnante et presque magnifique sa véritable nature tandis que le béton apparent travaillé à la perfection semble inerte, totalement coincé et contraint par l’intervention mesurée et contrôlée de l’homme. Il peine à s’exprimer et devient au même titre qu’un mur recouvert de chaux, une surface quelconque et sans caractère. C’est comme si le béton n’était pas le béton. Le Corbusier disait « J’ai employé du béton brut. Résultat : une fidélité totale, une exactitude parfaite. Le béton est un matériau qui ne triche pas ; il remplace, il supprime l’enduit qui trahit : le béton brut dit je suis le béton. » ⁴. Or dans un cas comme celui de ce chantier, le béton ne dit plus rien, il est pourtant présent, mais la technique et les nombreux moyens mis en œuvre pour le rendre « parfait » l’empêchent d’exprimer quoi que ce soit. Il reste là inerte, régulier, telle une page blanche, vide de sens. (figure 6)

La technique inverse le sens premier du matériau. Elle masque les traces de la matière au profit d’un écran pur. Elle éloigne le regard de la matière au profit d’une exposition des compétences de l’ouvrier.Contrairement à la surface de béton apparent, celui voué à être recouvert et auquel on ne demande que de répondre à des caractéristiques physiques et techniques s’exprime librement. Les coulures, tachetures et efflorescences n’ont pas d’impact sur les caractéristiques physiques du béton et ne demandent donc pas d’attention particulière. Il n’est pas question d’établir ici le caractère esthétique des traces de coulures et d’efflorescences et d’en faire les principes esthétiques du béton, mais on note un véritable fossé entre ce que le béton dit être et ce que le concepteur fait de lui.

Cette attitude à l’égard de l’un et de l’autre apparaît presque superficielle, on cache le véritable matériau et l’on façonne celui qui sera visible aux yeux de tous. C’est un peu comme si on cherchait à créer un autre matériau à partir des composants du premier. Un petit détail anecdotique a également retenu mon attention sur le chantier. Il témoigne finalement dysfonctionnement de pensée qui régit le travail du béton

4 Le Corbusier dans «Cinq questions à la Corbusier», in Zodiac N°7, 1960, p.50. Cité par Frampton (K.) Le Corbusier.Edition Hazan, 1997, p.144.

3 Marc Mimram, Matières du plaisir, Lausanne, Editions Pavillon de l’Arsenal, 1999, p.27.

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy38

7. Chantier du projet «Descartes +» à Marne-la-ValléeLe béton apparent et les dessous du béton revêtu

Cette photographie nous permet de comparer visuellement le travail d’un béton apparent et d’un béton voué a être revêtu On note le côté superficiel du travail du béton qui consiste à rendre parfait les seules surfaces visibles.Documents LM, Marne-La-Vallée, Octobre 2011.

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Béton constructif voué à être recouvert

Béton apparent non visible et donc non nettoyé

Béton apparent nettoyé et apprêté

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39Les limites d’une technique toute puissante

6 Propos de Hervé Beaudouin recueillis sur son site Internet dans la rubrique «Matière d’architecture»

5 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décembre 2000, p.8-9.

et notamment l’hypocrisie qui consiste à montrer ce que la technique sait faire aux seuls endroits où elle est visible et exposée telle une vitrine. Seules les surfaces visibles sont travaillées à la perfection, chose que l’on peut comprendre d’un point de vue économique, mais cette attitude illustre ce qu’est réellement le béton et ce que la technique lui fait dire. Sur l’image ci-contre, on distingue différentes étapes et phases de travail à l’égard du béton. La plus marquante reste celle exprimée au niveau des poutres qui scellent le premier niveau au second. Le béton apparent nettoyé et travaillé s’arrête au dessous des poutres, une limite franche qui caractérise le visible du non visible, le contrôlé du non contrôlé, le faux du vrai (figure 7).

Pour revenir au contrôle et au blocage du matériau par la technique, Jean Pierre Aury, plasticien des bétons disait « Ce ne sont pas les tableaux référentiels ou des cahiers des charges normalisés qui sont porteurs de progrès et d’évolution » ⁵. Ce n’est pas en normalisant la fabrication du béton que l’architecture évoluera, au contraire ici on la contraint à dire quelque chose qu’elle n’est pas, on lui ôte et on limite toute possibilité de sensations et d’expressions.

2.3 L’affaiblissement de la recherche de perfection comme libération du matériau : Le travail de l’architecte Hervé Beaudouin

L’idéologie visant à fabriquer un béton exempt de traces et ce quelle qu’en soit la raison, constitue un contre sens au matériau lui-même. C’est ce qui m’a poussée à explorer le travail de l’architecte Hervé Beaudouin. Spécialisé dans l’utilisation de béton de site, il a orienté son travail autour de l’expression du matériau en partant à la recherche d’un béton «naturel» ⁶. Qu’est ce qu’un béton naturel ? Le terme naturel sous entend d’abord qu’il existe un béton non naturel certainement celui dont la nature a été contrariée par la mise en place d’une technique toute puissante. Son travail est une réaction face à la perte d’expression du matériau que nous avons pu aborder précédemment. Il s’agit pour lui de réinterroger le matériau pour arriver à lui redonner ses lettres de noblesse. Il part ainsi à la recherche de ces bétons naturels en explorant différents types de constructions à différentes époques et dans différents milieux. Il interroge le regard des passants à leur égard et ce qu’ils provoquent en termes de sensations, puis considère ses possibilités esthétiques. Hervé Beaudouin puise alors son inspiration dans les vieux bétons artisanaux que l’on rencontre dans les campagnes généralement pour des travaux liés aux routes ou aux chemins, aux murs de soutènement ou de clôture. Un béton dans ce cas purement fonctionnel, et qui ne s’attire pas pour autant les foudres des passants. (figure 8)

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8. Les bétons artisanaux: des bétons naturels et expressifsLes bétons artisanaux ont un aspect totalement opposé à celui des bétons industriels. Des bétons dont la nature n’a pas été contrariée par la mise en place d’une technique toute puissante.Documents LM, Marne-la-Vallée, Juillet-Décembre 2011.

8

9. L’architecture de Hervé BeaudouinL’architecture de Hervé Beaudouin est guidée par la recherche d’une béton «naturel» et expressif. En puisant son inspiration auprès des bétons artisanaux il place les caractéristiques expressives du matériau au coeur du projet.Documents LM, Marne-la-Vallée, Juillet- Août 2011.

9

Béton tassé à la main et non vibré. Des ségrégations de granulats apparaissent avec des densités plus ou moins grandes, ainsi qu’un faïençage de sa surface.

Béton tout venant. Ce béton est conçu à partir d’éléments disponibles au moment de sa fabrication.

Béton coulé à différents moments à l’aide de deux coffrage à la texture différente.

Béton conçu à partir de granulats de différentes natures.

Centre touristique et pédagogique à Chizé

Musée des Arts de Cognac

CAUE de la Charente à Angoulêmes

Centre Universitaire de Relations avec les entreprises à Poitiers

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Qu’est ce qui cause cette différence d’appréciation entre bétons artisanaux et bétons industriels ?

Nous avons vu que le béton apparent soumis à une technique toute puissante n’était pas représentatif du matériau, nous avons également noté le paradoxe qui consiste à rendre apparent une technique de construction et comme le témoigne son travail sur le chantier présente des aspects de surfaces peu esthétiques. Il appartient alors de trouver les moyens par lesquels nous pourrions donner un sens esthétique et naturel au matériau. C’est ce que cherche à faire Hervé Beaudouin lorsqu’il prend son inspiration auprès des bétons artisanaux. Ces derniers sont faits sans contraintes de temps, manuellement et sans à priori sur les aspects divers qu’ils généreront. Conscient de la perte de sens du béton au cours du temps, Hervé Beaudouin recherche l’essence même du matériau en retournant à l’origine de ce dernier : l’artisanat. Il raconte au sujet de ces bétons observés « la matière fruste, la texture brute, les mousses, les lichens finissent par le faire ressembler à la pierre. Ces bétons ont un côté totalement naturel qui découle de leur mise en œuvre et de la liberté de leurs expressions. La qualité de ces bétons provient d’une réponse simple, où l’on fait de l’architecture sans architectes. » ⁷ On peut retracer à travers ses différents projets d’architecture, la recherche expressive et artisanale du béton (figure 9). Hervé Beaudouin met l’expression du matériau au centre de ces projets.

Les bétons artisanaux présentent des qualités esthétiques mais quelle différence y-a t-il avec un béton industriel ? La qualité visuelle de leur béton, pourtant loin d’être dépourvu de traces, vient de l’ignorance de ces paysans qui, un jour se sont improvisés maçons. Une inexpérience qui les a amenés de fait à se libérer de toutes les contraintes techniques et normes inhérentes à la fabrication. L’architecte prend alors exemple relâchant à son tour le carcan de normes et de techniques. Il laisse ainsi le matériau faire preuve d’expression. La médiathèque et le musée de Lussac Les châteaux témoignent du travail d’expérimentation de l’architecte (Figure 10). Le coffrage devient artisanal, il tient du bricolage de planches diverses, pour la plupart récupérées. Hervé Beaudouin ne se préoccupe pas vraiment de l’aspect obtenu après décoffrage. Sans outillage technique, il coule le béton par petites hauteurs, en levées successives. Des hauteurs qui correspondent à la capacité que l’on a de gâcher le béton. Le caractère successif des coulées multiplie les reprises qui produisent alors un effet plastique spontané. La vibration, étape cruciale lorsqu’il s’agit des bétons industriels, et d’ailleurs souvent à l’origine des défauts de surface, s’exerce ici d’une manière artisanale. Le béton doit être vibré s’il y a une exigence importante de performance mais n’en justifie pas le besoin si les défauts de ségrégation ne deviennent plus une priorité. Il est alors tout au plus tassé avec des outils et des coups sont donnés sur le coffrage. Apparaissent alors certaines porosités ayant pour conséquence une

7 Hervé Beaudouin op. cit. p. 37

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10. Musée et médiathèque de Lussac-les-ChâteauxArchitecte: Hervé Beaudouin

La caractéristique du bâtiment se trouve dans l’expression de son matériau et la manière dont l’architecte est arrivé à produire, à partir d’une mise en oeuvre et de moyens artisanaux, un béton de qualité.Document Hervé Beaudouin

10

11. Musée et médiathèque de Lussac-les-ChâteauxArchitecte: Hervé Beaudouin

En prenant pour exemple les bétons artisanaux qu’il désigne comme «naturel» l’architecte cherche à se libérer des contraintes techniques et des normes inhérentes à la fabrication du béton pour lui redonner un sens et une véritable qualité esthétique.Documents Hervé Beaudouin

11

Le coulage du béton se fait par levées successives dessinant des strates où chaque niveau correspond à la capacité de gâcher le béton.

La faible hauteur des différentes coulées et le caractère successif de celles-ci multiplient les reprises qui produisent un effet plastique spontané.

Le béton non vibré fait apparaître certaines porosités ayant pour conséquence une fuite de laitance, laquelle laisse apparaître les granulats.

Le béton est fabriqué sur place en petites quantité et à partir de granulats trouvés dans les environs.

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43Les limites d’une technique toute puissante

fuite de laitance. Une technique qui permet de faire apparaître naturellement le sable et les granulats.Par le relâchement des techniques de mise en œuvre le béton se révèle. Contrairement aux bétons industriels évoqués précédemment, celui-ci présente des qualités plastiques incomparables. Une qualité que l’on doit à l’écoute d’un matériau qui au-delà de la technique ne demandait qu’à s’exprimer. (figure 11)

L’architecte signale tout de même au sujet de ces bétons : « les reprises de coulages et les nuances dues aux différences de conditions atmosphériques donnent aux parois cet effet calpiné. Il est donc important de bien concevoir le dessin à l’avance. » ⁸ Faire un béton naturel ne peut pas se limiter à un relâchement total des principes de conception. Il nécessite tout de même une attention et un travail de recherche. Hervé Beaudouin le dit d’ailleurs « il est indispensable de faire réaliser des éprouvettes de tests éventuels par les bureaux de contrôle.» ⁹ Rechercher à donner un sens esthétique et naturel au matériau ne veut pas dire couler sans penser, formuler sans mesurer, créer sans dessiner. L’architecte ne cherche pas à reproduire un mur de soutènement ou de clôture tel qu’il les a observés, mais à faire une architecture ; une architecture révélée par la puissance évocatrice d’un matériau.

Avant de conclure sur cette partie, on pourrait citer à titre d’exemple le travail du béton de la Chapelle Bruder Klaus par Peter Zumthor (figure 13). Le projet de Zumthor était de bâtir une chapelle à partir de matériau locaux, et à la faire construire simplement par le fermier, sa famille et ses amis. Le béton a alors été fabriqué à la main, sur place, avec le gravier, le sable et le ciment locaux. Les matériaux proviennent des environs, le mélange a été fait au coup par coup et le béton coulé en 24 couches à différents moments, se détachant des contraintes météorologiques ou autres désagréments. La mise en œuvre a été faite de manière artisanale : vibré à la main et coulé en plusieurs fois par petites hauteurs. Il en résulte un aspect «naturel» comme le décrit Hervé Beaudouin. Ce travail est l’archétype même du béton artisanal. L’architecte mêle ici une architecture contemporaine à une mise en œuvre totalement dépourvue de contraintes normatives. Le résultat n’en est pas moins saisissant. De forme simple, la beauté du bâtiment réside dans l’expression et le travail du matériau. Un matériau qui a retrouvé un sens et une sensibilité par le travail aléatoire et sans contraintes du paysan qui a su se détacher des normes de l’industrie. Le béton devient ici par son expression et ses caractéristiques visuelles un relief vivifiant pour l’architecture.

8 Hervé Beaudouin op. cit. p.37

9 Ibid

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12. Musée et médiathèque de Lussac-les-ChâteauxArchitecte: Hervé Beaudouin

Les croquis du projet témoignent de l’intention revendiquée portée au caractère expressif, irrégulier, naturel et imparfait du matériau. Tout est orienté dès les premières représentations du projet autour de l’expression du matériau. Document Hervé Beaudouin

12

13. Chapelle Bruder Klaus à Weil-am-RheinArchitecte: Peter Zumthor

Le travail du béton de la chapelle Bruder Klaus est l’archétype même du béton artisanal. En utilisant des matériaux locaux et en faisant construire le bâtiment par les fermiers du coin, l’architecte mêle ici une architecture contemporaine à une mise en oeuvre totalement dépourvue de contraintes normatives. Le béton s’exprime enfin, retrouve un sens et une sensibilité.Documents LM, Marne-La-Vallée, Juillet 2009.

13

La pensée et les principes de l’architecte se retrouvent jusque dans ses croquis. La nuance de couleur, la texture et l’aspect du béton sont au coeur de son projet.

Si on se rapproche, le grain du béton apparaît de manière aléatoire représentant finalement le caractère exprimé par l’architecte à travers ses croquis.

Des irrégularités de surfaces apparaissent, elles sont principalement dues à l’absence de vibration et au caractère artisanal du matériau.

Le béton a été entièrement mis en oeuvre de manière artisanale. Coulé en plusieurs fois par petites hauteurs , on retrouve à la surface les différentes étapes de sa fabrication.

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Il est très difficile de répondre au paradigme de la perfection dans le cas d’un matériau tel que le béton. On cherche à faire les bétons les plus uniformes et parfaits possible, mais on y arrive difficilement. On crée alors des normes de tolérance. Le terme «tolérance» en lui même témoigne de l’incapacité de la technique à rendre parfait un matériau qui par nature ne l’est pas, tout en conservant son authenticité. Des tolérances d’imperfections apparaissent ainsi. La surface dépend alors des goûts et des attentes des différents acteurs de la construction. Apparaît de fait la question subjective du tolérable et du non tolérable. Comment mesurer la qualité d’un béton de manière objective et quelles sont les limites de cette tolérance ? Qu’est ce qui nous permet de déterminer les défauts d’une surface ? Quelle est la limite entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas ? Nous avons vu que le béton était victime de son aspect et du travail spontané de sa matière, que la mise à nu du béton structurel posait la question de qualité d’une surface et de l’image que renvoient les traces de sa matière et de sa fabrication. La technique y trouvant ses limites, il est question de trouver différents procédés et moyens permettant d’améliorer ou de rendre convenable les traces des surfaces de béton mais avant tout d’accepter le matériau tel qu’il est.

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3. Les défauts du matériau au coeur du projet architecturalRespecter le matériau en composant avec ses caractéristiques

L’ensemble des paradoxes que soulève la question du béton apparent amène le concepteur à repenser le travail du béton et la philosophie assignée au matériau. Il convient alors de revenir à l’origine des phénomènes idéologiques qu’il a pu provoquer et de questionner ce qui jusqu’alors a causé son rejet et cette course à la perfection.

Suite à ces diverses observations, il apparaît que l’exposition du béton nécessite inévitablement l’acceptation du matériau dans toute sa dimension. On ne peut pas lui construire une image différente de celle qu’il possède naturellement et lui fabriquer une nouvelle identité sous prétexte qu’il n’a pas de qualité esthétique. Pour donner une image positive au matériau, il faudra d’abord essayer de comprendre ce qu’il représente, l’image réelle qu’il transmet et composer avec ses caractéristiques, quelles qu’elles soient. Après ce premier travail d’écoute et de compréhension on pourra mettre la technique au service d’une réalisation qualitative. Elle deviendra cette fois un accompagnateur et non plus un limiteur. Il faut recentrer la réflexion sur le matériau et le remettre au cœur du projet. Comme le disait Marc Mimram «Il s’agit de comprendre de manière sensible et raisonnée le rôle de la matière » ¹. Il faut changer de regard à l’égard de ces traces et les aborder comme le travail sensible du matériau plutôt que comme un échec quelconque de sa mise en œuvre.

3.1 Changer de regard sur la surface du béton :Le plasticien des bétons Jean Pierre Aury et oeuvres contemporaines

Dans le cas du béton, le défaut de surface provient, si l’on suit la réflexion développée jusqu’à présent, d’une mauvaise maîtrise de la technique de construction. D’où la difficulté majeure de l’accepter en temps que tel. En le

1 Marc Mimram, Matières du plaisir, Lausanne, Editions Pavillon de l’Arsenal, 1999, p.27.

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1

1. La minéralité de la pierre et celle du béton: un chemin étroit entre le naturel et l’artificielCette mise en comparaison de surface de bétons et de pierres nous permet de noter une certaine ressemblance de texture. Les phénomènes visibles à leur surface sont relativement proches et communs. Alors pourquoi accepter les variations de la pierre et non pas celles du béton ?Documents LM, Marne-La-Vallée, Novembre 2011.

Surface de la pierrePorosité, rugosité, efflorescences.

Surface de la pierreVariation de teinte, fissures, différentes

luminosités

Surface du bétonVariations de teinte, variation de la taille des

granulats, différentes luminosités

Surface du bétonEfflorescences; variation de teinte, rugosité

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49Le défaut du matériau au coeur du projet architectural

considérant de la sorte, il devient le signe gênant d’un échec, celui d’une non maîtrise du matériau et de la faiblesse d’une technique que l’on se plaît à croire toute puissante. La base de l’acceptation du défaut réside d’abord dans un changement de regard à l’égard du matériau et dans le détachement des préjugés. Jean-Pierre Aury souligne ce propos affirmant que « le béton est un matériau qui doit être pris en considération sous un angle culturel et non pas seulement d’un point de vue technique. »¹ Considérer un matériau sous un angle culturel consiste d’abord à le regarder autrement, à s’intéresser à ses origines, aux causes réelles de son disfonctionnement, en retournant notamment à la source de sa conception comme le fait Hervé Beaudouin. Pour se faire, il s’agit d’observer le matériau et ses représentations de surface, de réinterroger ses origines et ses qualités visuelles, d’étudier le contexte dans lequel il se trouve et de questionner son rapport à l’échelle.

3.1.1 La frontière délicate du naturel et de l’artificielLes regards respectifs du chef de chantier « Descartes + » (recherche de la perfection) et d’Hervé Beaudouin (privilégier l’aspect naturel) à l’égard du béton, nous amènent maintenant à examiner la plasticité de la matière en interrogeant ses différentes manifestations de surface. Dans la continuité du travail d’Hervé Beaudouin, il convient de se demander comment le défaut de surface peut-il être perçu comme une qualité ? Quel regard devons nous avoir pour l’apprécier dans son plus simple appareil ? J’ai alors croisé ma réflexion avec le travail de Jean pierre Aury, conseiller et plasticien des bétons. Son travail est reconnu par l’ensemble de la profession, tout le monde parle et vante la qualité de ses interventions. On note cependant qu’il existe encore très peu de plasticiens et de conseils béton, un manque qui traduit l’absence encore évidente de regard plastique à l’égard du béton. La reconnaissance du monde professionnel vis-à-vis de Jean Pierre Aury témoigne d’un intérêt et d’une ouverture pour les qualités du béton, mais on constate que finalement très peu s’y risquent. Beaucoup pensent encore que la meilleure expression du béton reste celle de la perfection.

Pour mettre à mal les différents comportements à l’égard du défaut et pointer le manque de discernement, il rappelle que « le béton de par sa composition est intimement lié au monde de la minéralité». Un monde minéral qui contient par nature une sensibilité et une réalité de variations avec des amplitudes plus ou moins fortes. On peut remarquer que « certains matériaux naturels » tel que la pierre « qui peuvent sembler pleins de défauts dégagent une harmonie qui laisse difficilement insensible. Sur le béton, ces variations sont considérées comme des taches mais puisqu’il s’agit de la pierre, on trouve cela beau. Pourtant tous les minéraux qui rentrent dans la composition du béton méritent respect et qualité. Cela renvoie à la dimension culturelle de la perception et de l’appréciation de l’esthétique des matériaux.»²

1 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décebre 2000, p.8-9.2 Ibid.

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2

Toile de Lucio Fontana FONTANA, catalogue II, Allemagne, galerie Karsten Greve, exposition novembre 1989 - janvier 1990

Défaut de béton sur chantier Documents LM, Marne-la-Vallée, Novembre 2011.

Défaut de béton sur chantierDocuments LM, Marne-la-Vallée, Novembre 2011.

Laurent Marre, Trace 16.Larentmarre.com

2. Comparaison: défauts du béton isolés de leur contexte et oeuvres d’art contemporaines Après avoir extrait de leur contexte quelques défauts rencontrés à la surface du béton, il est difficile d’établir le véritable statut de ces quatre images. Elles pourraient toutes provenir d’une même galerie d’artSources diverses

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51Le défaut du matériau au coeur du projet architectural

Paul Andreu évoque également ce phénomène paradoxal: « La frontière est délicate parce qu’on ne tolère pas d’un produit industriel les défauts que l’on aime dans les produits naturels. Il faut accepter qu’il ne puisse pas être parfait. Du jour où il sera parfait, il n’aura plus aucun intérêt, il ressemblera au plastique.»³ Il y a en effet un manque d’objectivité dans nos regards. On accepte les variations de surface d’une pierre que l’on considère comme autant de signes sensibles et qualitatifs mais on peine à accepter les variations du béton que l’on taxe peut être trop rapidement de défauts (figure 1).

Les propos suivants de Jean Pierre Aury témoignent de la nécessité de changer de regard à l’égard du béton. On ne peut l’apprécier, ni le travailler en s’affranchissant de ses caractéristiques: «toute personne qui n’est pas sensible à ce qui est minéral doit s’abstenir d’utiliser le béton.»⁴, sous peine finalement de reprocher au béton sa véritable nature ou de lui construire un contresens. Il convient donc pour apprécier les aspérités du béton de passer par l’acceptation de ses défauts et de considérer cette minéralité au même titre que celle d’une pierre. La minéralité du béton doit être élevée au statut de qualité et non plus désigner un défaut. Il faut changer de langage et redonner un sens aux manifestations de surface pour faire évoluer le regard sur le matériau.

3.1.2 La notion d’échelle et le contexteLa notion d’échelle et le contexte semblent jouer un rôle particulièrement important dans le rapport que nous établissons avec la surface et les aspérités du béton. Lorsque l’individu observe ces surfaces, l’échelle et le contexte sont déterminants dans sa manière de qualifier et d’aborder le matériau. L’objectivité de la perception est directement orientée par le regard et les préjugés qu’il aura au moment de croiser ses aspérités.

En premier lieu étudions le rapport au contexte. Lors de ma visite du chantier « Descartes + », j’ai d’abord pris une série de photographies des manifestations rencontrées à la surface du béton en essayant de faire abstraction du contexte de chantier. Étudiées ensuite en dehors de ce dernier, ces traces ont révélé leur caractère sensible. Y trouvant un intérêt particulier, je me suis interrogée sur le regard positif que pourraient avoir d’autres personnes à leur sujet. N’étant peut être pas suffisamment objective, j’ai soumis ces photographies au regard de quelques personnes qui ont majoritairement eu une réaction positive, opposée à celle dont ses traces faisaient l’objet sur le chantier. Le chef de chantier ne comprenait pas mon intérêt pour les traces visibles sur ces surfaces. Cette opposition de réaction nous permet de relever le rôle substantiel du contexte dans la manière dont nous regardons ces traces.

3 Andreu (P) dans Concrete architecture, design and construction, editions Birkhaüser, 2002.

4 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décebre 2000, p.8-9.

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy52

3. L’expression du peintre et du matériau: Qu’est ce qui donne à l’expression du peintre étalée sur sa toile un statut esthétique supérieur à l’expression sensible du matériau à la surface du mur ?Source de la photo de Pollock: artsvisuelsecoleprimaire.over-blog.comDocuments LM, Marne-la-Vallée, Décembre 2011.

3

Jackson PollockLe peintre se sert de la toile pour y exposer ses expressions.

Coulures du bétonLe béton s’exprime à travers la surface du mur.

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53Le défaut du matériau au coeur du projet architectural

Y trouvant un caractère plastique et esthétique fort, j’ai mis en comparaison des extraits de ces surfaces avec des oeuvres contemporaines et qui paraissent finalement assez comparables lorsqu’on les soustrait de leur contexte (figure 2). Le défaut du béton isolé de son contexte constructif arrive à séduire et à enthousiasmer au même titre qu’une œuvre d’art contemporaine. Un engouement que l’on doit au caractère sensible et instinctif du matériau. Les œuvres d’art plaisent quelque soit la quantité de coulures ou d’aspérités qu’on y trouve et pourtant en s’exprimant d’une manière similaire, le travail expressif du béton est rejeté. Pour démontrer un parallèle possible entre les deux, on pourrait citer Jackson Pollock qui traduit à travers ses toiles ses émotions et sa sensibilité. Au même titre que l’œuvre de Pollock, le béton nous fait part de son expérience en remplaçant la toile par la surface du mur. Pourquoi considérer l’œuvre de Pollock comme un chef d’œuvre et se soustraire aux expressions du béton ?( figure 3)Il en ressort que nous sommes porteurs d’un certain nombre de préjugés à l’égard du béton. Notre histoire et notre culture en sont entièrement responsables. Les images de la guerre (les blockhaus, le mur de Berlin, etc.) et de l’après guerre (reconstruction triste et rapide) ont marqué les esprits et entraîné ces préjugés sur le béton. Le sujet même de ce mémoire fait frémir mon entourage qui me répète constamment, qu’il n’y a aucun intérêt à parler du béton, que c’est moche, froid et triste. Et pourtant en exposant ces textures hors contexte elles fascinent. Il y a donc un réel lien entre le contexte et notre regard sur les choses. J’en viens à me dire que si ces surfaces trouvent un public lorsqu’on les débarrasse d’un contexte cousu de préjugés, pourquoi ne pourraient-elles pas constituer le caractère sensible de l’architecture, pourquoi ne pas les apprivoiser et en faire le relief esthétique de l’architecture ? Marc Mimram disait d’ailleurs « Un jours nos documents normatifs contractualiseront de belles fissures »⁵. Il y a donc une véritable ouverture aux défauts de matière et de conception dans le projet architectural. Nous étudierons cette question dans la partie suivante.

Passons à la notion d’échelle. Après observation elle se révèle être également un fait troublant dans la relation qu’elle établit entre nos regards et les défauts de surface du matériau. Le défaut se caractérise par une manifestation unique et isolée à la surface du matériau. On parle de défaut et d’imperfection dès lors qu’un élément s’oppose à l’unité et à l’homogénéité de la surface sur lequel il se trouve. A contrario cet élément jusqu’alors identifiable à la surface par sa rareté et sa singularité change de statut lorsqu’il se trouve à une échelle plus globale. Il passe d’une échelle locale à l’échelle de l’architecture, de la notion de défaut à l’appellation de matière architecturale. La notion d’échelle est donc particulièrement importante. Le défaut unique et localisable que l’on craint sur une surface irréprochable devient une matière qualitative lorsque ce dernier est

5 Marc Mimram, Matières du plaisir, Lausanne, Editions Pavillon de l’Arsenal, 1999, p.26.

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4. Le défaut et la notion d’échelleLe défaut singulier et repérable sur la surface maculée du mur change de statut lorsqu’il est travaillé à l’échelle complète d’une surface. On passe de l’imperfection à la notion de matière.Documents LM, Marne-la-Vallée, Décembre 2011.

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1. Nid de cailloux identifiable sur une surface homogène: dénomination du défaut

2. Nid de cailloux multiplié et travaillé à l’échelle globale de la surface: création d’une matière

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répandu à l’échelle globale de la surface. En le multipliant on ne distingue plus le caractère déplaisant de l’élément.Par exemple, une mauvaise ségrégation des particules du béton a un tout autre statut lorsqu’elle est localisée et unique à la surface du bâtiment, que si elle est travaillée à l’échelle du mur. Les ségrégations de surface de la chapelle Klaus Bruder par Peter Zumthor n’apparaissent plus comme une gêne visuelle mais comme le relief esthétique de l’architecture. On ne parle d’ailleurs plus de ségrégation mais d’une matière et d’un relief. Elle devient une caractéristique propre de la qualité architecturale. (figure 4)Le défaut devient esthétique lorsqu’il est travaillé à grande échelle, de même que lorsqu’il se retrouve à des niveaux répétitifs de l’architecture. Il perd le statut de l’imperfection que lui vaut sa singularité sur une surface immaculée pour prendre celui de matière architecturale.

L’acte de décontextualiser pour s’affranchir des préjugés et la réflexion autour de la question d’échelle du défaut soulève la notion de culture abordée plus tôt avec le travail de Hervé Beaudouin et renforcée par les propos de Jean-Pierre Aury « La création d’un béton a pour but de participer à un langage et à la sensibilité de ceux qui ont créé une architecture. […] Le béton est un matériau qui doit être pris en considération sous un angle culturel et non pas seulement d’un point de vue technique. » ⁶ Il convient de le voir autrement que comme une défaillance technique mais plutôt comme le travail sensible de sa matière.

3.2 L’imperfection comme processus : La chapelle Klaus Bruder de Zumthor , le centre de Sport Can Ricart de Vora Arquitectura et le Studio Rémy Zaugg de Herzog et de Meuron.

Après avoir montré qu’il était nécessaire d’apprendre à écouter le matériau et de valoriser son expression, et que le terme de défaut était très largement induit par un contexte historico-social et par des défis de construction, on s’aperçoit que l’imperfection peut retrouver une place au sein du projet. L’ensemble des réflexions évoquées jusqu’à présent nous amène à concevoir le processus suivant consistant à faire du défaut du matériau un principe esthétique. Il apparaît effectivement que la seule manière d’apporter un véritable sens à la matière passe par l’adhésion de l’architecte à un relâchement de la perfection et à la prise en considération des contraintes du matériau.

6 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décebre 2000, p.8-9.

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6. Chapelle Klaus Bruder à WachendorfLe détournement et la revalorisation d’une trace de mise en oeuvre

La surface étant parsemée de petits trous (conséquence directe de la mise en oeuvre), l’architecte va les détourner et les retravailler à des fins esthétiques pour le projet. Plutôt que de reboucher et de fuir les caractéristiques de mise en oeuvre du matériau, l’architecte les réinterprête et leur donne une véritable valeur esthétique.«A+U 456», Peter Zumthor, Brother Klaus Field chapel, Tokyo, 2008.

6

5. Chapelle Klaus Bruder à WachendorfArchitecte: Peter Zumthor

La chapelle Klaus Bruder est le fruit d’un travail artisanal réunissant des matériaux locaux et des moyens de construction dépourvues de normes et de contraintes techniques particulières.Documents LM, Marne-la-Vallée, Décembre 2011.

La surface du béton est parsemée de petits trous consécutifs à la mise en oeuvre du béton.

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Outils de mise en oeuvre dans une première vie, les trous d’étançons deviennent vitraux, laissant pénétrer la lumière de l’extérieur à l’intérieur de la chapelle.

Se trouve alors un véritable travail de requalification de ces traces de mise en oeuvre. Chaque trou a été consolidé et reçoit un oeil de verre.

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3.2.1 Les contraintes et aléas du matériau comme principe d’esthétismeCette intention de vouloir intégrer les défauts et contraintes du matériau au cœur du processus n’est pas une idée nouvelle. Les problèmes que soulèvent l’aspect d’une surface et ses textures préoccupent les architectes depuis longtemps. Dès 1871, le RIBA par exemple, organisait des discussions sur les moyens possibles à mettre en œuvre pour améliorer l’aspect du béton. Peter Collins rapporte au sujet de Sir Arthur Blomfield « Il reconnaissait que pour différentes raisons, il était impossible d’éviter les traces de banches aux différents niveaux de coulées ; mais puisqu’il s’agissait là d’une contrainte liée à l’emploi de ce procédé, il considérait qu’on devait en faire un trait caractéristique.»⁷ Un propos qui à l’époque aura du mal à s’imposer. Cinquante ans plus tard, le Congrès technique international de la maçonnerie et du béton armé repose l’argument en poussant son auditoire à révéler les beautés du béton plutôt que de venir le revêtir. Il y a donc depuis toujours cette conscience des beautés du matériau. Aujourd’hui avec l’échec de la maîtrise des surfaces, on prend conscience que les contraintes et les aléas surfaciques constituent la véritable matière du matériau et qu’il convient d’en tirer parti. Le béton possède en lui et dans ses procédés de réalisation les outils de son esthétisme. Sa surface formée sous l’influence d’états et de réactions fabrique un panel de possibilités d’expressions. Les différentes interactions liées aux propriétés du matériau et à l’influence de l’environnement sont réinterprétées et produites artificiellement pour obtenir des effets déterminés. On comprend que les différents aspects de surfaces jusqu’alors rejetés et évités à tout prix ont le potentiel de donner vie à l’architecture. Les contours indécis d’une surface sont alors considérés comme un apport agréable pour l’animation de la surface. On note différentes façons d’aborder la question des textures et des surfaces du béton au travers du paysage architectural contemporain.

Certains réinvestissent les traces en les détournant de leur fonction première à l’image de Peter Zumthor pour la chapelle Saint Klaus Bruder à Wachendorf. Construite de manière tout à fait artisanale et sans outillage technique, les fermiers ont coulé le béton par petites hauteurs, en levées successives. A chaque coulée apparaissent des trous d’étançons ayant servi au maintien du coffrage pendant la période de séchage. Le béton ayant été coulé en 24 couches la chapelle présente une série de trous à chaque niveau de coulée, ce qui vient parsemer le bâtiment (figure 6). Ces points d’ancrage laissent des traces inévitables. Il n’existe aujourd’hui aucun moyen de les éviter mis à part le recours au mortier, alors comme le disait Sir Arthur Blomfield : « il faut en faire un trait caractéristique» ⁷. Plutôt que les laisser à la surface du béton, signe de sa fabrication, Peter Zumthor va faire le choix de les réinterpréter et de les revaloriser. Il fait alors placer 250 yeux de verre qui amènent un peu de lumière

7 Propos de Sir Arthur Blomfield rapportés par Collins (P) Splendeur des bétons. Les prédécesseurs et l’oeuvre d’Auguste Perret, Paris, Éditions Hazan, 1995.

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8. Can Ricart Sport CenterL’utilisation des contraintes et des particularités d’une mise en oeuvre

Les architectes réinterprètent ici la difficile maîtrise des teintes du matériau notamment par l’usage des matériaux du coffrage.Béton, architecture in concrete, hors série AMC sous la direction de Maryse Quinton, édition du moniteur, Paris.

8. Can Ricart Sport CenterArchitecte: Vora Arquitectura

Le complexe sportif Can Ricart témoigne du travail d’aspect effectué entre un coffrage et les variations de réaction du béton.Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011.

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Élément du coffrage e bois- Humidité du matériau importante

Élément du coffrage en métal- Absence d’humidité du matériau

Une fois décoffré, la surface apparaît sous une double apparence: des éléments lisses et clairs et d’autres foncés et rugueux.

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extérieure à l’intérieur de la chapelle. Outils de mise en œuvre dans une première vie, les trous d’étançons deviennent vitraux dans une seconde. On note la qualité du travail visant à en faire un trait qualitatif et essentiel à l’esthétique de son architecture. Chaque trou a été consolidé à l’aide d’une petite lame de métal qui vient à son tour recevoir la partie en verre comme pour souligner et mettre en valeur ces éléments souvent rejetés et rebouchés par le concepteur (figure 6). Ils deviennent ainsi un élément à part entière au même titre que pourrait l’être une fenêtre. Nous ne sommes plus dans l’imperfection mais dans la réinterprétation de cette dernière. La surface ne souffre plus de l’impact de ses traces, mais se révèle grâce à elles.

D’autres réponses plus courantes consistent par exemple à utiliser les traces résultant de l’utilisation de différentes sortes de coffrage. Le centre de sport Can Ricart réalisé par Vora arquitectura à Barcelone témoigne du travail d’aspect effectué entre un coffrage et les variations de réaction du béton (figure 7). Les caractéristiques de la banche (texture et humidité) ont un impact considérable sur la texture et la colorimétrie du béton. Les architectes constituent ici un coffrage à l’aide de deux types de matériaux aux caractéristiques radicalement opposées en termes de texture et d’humidité : le bois et l’acier. La formulation du béton est la même et chaque module de coffrage est coulé en une seule fois. Une fois décoffrée la surface apparaît sous une double apparence : des éléments lisses et clairs et d’autres foncés et rugueux. Les premiers correspondent aux portions métalliques du coffrage et les autres aux parties en bois. On explique cette différence de teinte par le taux d’humidité contenu dans le coffrage bois et son inexistence dans les parties métalliques. Le séchage des surfaces métalliques a été plus rapide que celles en bois, des écarts de prise qui expliquent cette différence de colorimétrie. Les architectes réinterprètent ici la difficile maîtrise des teintes du matériau. Une caractéristique qui en temps normal est l’une des plus grandes causes de son instabilité. (figure 8)

Ces deux bâtiments pris à titre d’exemple ne sont pas des cas isolés mais représentent parmi tant d’autres une prise de conscience par les architectes des possibilités que le béton peut offrir en termes de qualité architecturale. Des projets qui regardent le défaut comme une intention revendiquée du projet architectural.

3.2.1 Travailler et inclure le défaut permet d’anticiper son apparition.Cette intention qui vise à réinvestir les défauts du béton à des fins esthétiques peut être également vu comme un moyen d’anticiper et de mieux masquer leur apparition.

Les provoquer, c’est certes les accepter, mais c’est avant tout un moyen majeur d’anticipation. C’est-à-dire qu’on accepte mieux d’avoir à provoquer volontairement un défaut, que de le voir apparaitre par surprise. En dessinant et en intégrant les défauts du matériau dans le projet, on fait le choix de pouvoir

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9. Studio Rémy Zaugg à MulhouseArchitectes: Herzog et de Meuron

Ce studio résulte d’un travail étroit effectué entre les architectes et l’artiste Rémy Zaugg. Il s’agit d’un petit atelier pour l’artsite lui permettant de travailler et d’y présenter des oeuvre d’arts. Une architecture simple dans la forme.Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011. Herzog et de Meuron 1981-2000 , El croquis, Madrid, 2000.

10. Studio Rémy Zaugg à MulhouseDes traces et défauts programmés

La particularité du bâtiment se trouve dans le travail effectué autour des rapports que la surface du mur entretient avec les phénomènes extérieurs, relation souvent délicate et à l’origine de dégradations importantes. Les architectes les provoquent ici pour sans doute mieux les anticiper. Une anticipation et une programmation du défaut qui trouve leur expression dans l’acte volontaire d’absence de gouttière.Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011.

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Absence de gouttière:- L’eau recueillie à la surface de la toiture coule sur le mur de béton

Formulation du béton:- Des fibres d’acier placées à la surface du béton sont attaquées par la corrosion dès les premières infiltrations.

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l’assumer. Autrement dit il est plus malin de provoquer volontairement le défaut que de subir et défendre les conséquences de son apparition non désirée. Cette anticipation et provocation du défaut nécessite la mise en place de moyens techniques particuliers. On arrive finalement à réintégrer la technique sous un tout autre visage. Jusqu’alors utilisée pour contrôler l’imperfection, on s’en sert pour la fabriquer ou la provoquer. Ce qui jusqu’alors pouvait être considéré comme une faiblesse apparaît comme une possible performance technique. On parvient à détourner ce qui parait être une faiblesse de la technique en un défi : celui de la réalisation du défaut. Jusqu’alors témoin de sa défaillance, il change de statut et devient matière pour laquelle l’outil technique devient celui d’un détournement. On crée les outils qui vont nous permettre de provoquer et d’anticiper ces défauts et manifestations de surface.La notion d’échelle évoquée plus tôt joue un rôle majeur dans l’anticipation et l’apparition des défauts et imperfections du béton. Elle doit être intégrée au processus d’anticipation de la trace si l’on considère que la provocation du défaut peut permettre de masquer son apparition. Il est en effet plus facile de confondre un défaut au sein d’une surface imparfaite, tout autant artificiel qu’il soit. Il sera par exemple difficile sur une surface marquée par les marbrures d’un gris aléatoire, d’identifier un défaut d’hydratation.

L’exemple qui illustre à la perfection ce phénomène d’anticipation des aléas du matériau n’est autre que le studio Rémy Zaugg par Herzog et de Meuron réalisé à Mulhouse. Il réunit l’ensemble des notions mises en avant jusqu’à présent : l’anticipation et la provocation volontaire d’une imperfection du béton, le développement d’une pensée technique orientée vers la provocation de ce défaut et la question d’échelle.Ce studio résulte du travail étroit effectué entre les architectes et l’artiste Rémy Zaugg. Il s’agissait de construire un petit atelier d’architecture pour y présenter des œuvres d’arts, tout en servant d’atelier pour l’artiste. En soit, une architecture particulièrement simple formellement. Nous nous intéresserons uniquement à sa façade en béton (figure 9).La particularité du bâtiment se trouve dans le travail effectué autour du rapport que la surface du mur entretient avec les phénomènes extérieurs, relation souvent délicate et à l’origine de dégradations importantes.Ici l’eau de pluie, recueillie à la surface de la toiture, coule sur le mur de béton du studio et s’infiltre dans la terre à côté d’un grand arbre. Les architectes exploitent les phénomènes de dégradation du bâtiment et en font un principe esthétique. Le béton brut de la façade est volontairement marqué par le ruissellement de l’eau de pluie. L’anticipation et la programmation du défaut trouvent leur expression par l’absence de gouttière et une formulation à base de fibres métalliques. Ces fibres d’acier placées à la surface du béton sont attaquées par la corrosion dès les premières infiltrations d’humidité (figure 10). En détournant une pathologie du matériau (sa dégradation), Herzog et de Meuron fabriquent un moyen radical pour la provoquer et mieux l’assumer. Les traces futures qui auraient inévitablement touché le bâtiment apparaissent paradoxalement dès la

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11. Studio Rémy Zaugg à MulhouseDe l’erreur à l’intention architecturale

La place qu’occupe l’imperfection dans ce projet est importante. Du statut de l’échec, de l’erreur singulière ou étendue à la surface de l’architecture, on se trouve ici dans un cas où l’’architecture n’a plus de sens ni d’intérêt sans son imperfection. Le projet n’est pas celui d’un espace compris entre deux murs mais celui d’une surface imparfaite anticipée et assumée.Herzog et de Meuron 1981-2000 , El croquis, Madrid, 2000.

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livraison du bâtiment et ne seront de fait jamais critiquées. Elles font partie intégrante du parti pris architectural et sont d’ailleurs toute la substance esthétique du projet. La prise en compte du défaut en amont permet non seulement d’anticiper son apparition en le devançant, mais permet également de masquer ses futures traces involontaires au cœur d’un tout. On ne distingue donc plus le vrai du faux.On notera au passage la place qu’occupe l’imperfection dans ce projet. Du statut de l’échec, de l’erreur singulière ou étendue à la surface de l’architecture, on se trouve ici dans un cas où l’architecture n’a plus de sens ni d’intérêt sans son imperfection. Le défaut de surface se retrouve au cœur de l’intention architecturale. Le projet n’est pas celui d’un espace compris entre deux murs de béton, mais celui d’une façade imparfaite, anticipée et assumée. Une place qui témoigne du changement de statut radical du défaut dans le regard de l’architecte. En le plaçant au rang d’intention architecturale, il magnifie les réactions du matériau (figure 11).

Le béton est de fait cousu de préjugés tout autant paradoxaux qu’ils soient. Nous rejetons le béton sans essayer d’en comprendre le fonctionnement car nous le regardons comme un échec technico-historico-social. Or, si on le sort de son contexte, il nous apparaît différemment, révélant ses beautés et la richesse de son expression. Il faut se débarrasser de nos à priori et préjugés pour en apprécier la véritable nature et matière. Après avoir questionné la matérialité du béton et changé de regard sur sa surface, nous avons démontré et illustré le passage du défaut à la matière architecturale. Le défaut change de statut et apparaît désormais dans l’architecture comme un parti délibéré. On le provoque, on l’anticipe, et l’on prend parti de ses particularités de surface pour révéler l’architecture. Le défaut devient matière d’architecture. Cependant l’ensemble des exemples et pensées évoqués jusqu’à présent ne concernent que la peau supérieure du béton, c’est-à-dire sa partie visible et accessible aux sens des passants. Il s’agit d’une certaine façon d’actions superficielles et détachées de la structure même du béton. On joue sur deux partitions totalement séparées : la structure puis la surface. Que se passe-t-il à l’intérieur du mur ? Est-il possible de questionner à la fois la structure et la surface autour d’une même idée architecturale ?

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4. Structure et surface au cœur du même processus de réflexionPenser le béton conjointement comme un matériau structurel et visuel

4.1 De la surface à l’appareil du béton Concours et travaux expérimentaux des classes de Thomas Schroepfer et Juan Herreros

Après avoir défini la notion d’imperfection, établi son statut, mis à jour la relation subjective qu’elle entretient avec son contexte, puis ses possibles qualités esthétiques, nous avons démontré l’apport vivifiant de sa prise en compte dans le projet, en la plaçant non plus au rang de défaut mais de matière architecturale. Pour aborder la suite de la réflexion, il faut revenir au premier paradoxe énoncé en introduction qui consistait à mettre à jour un matériau de construction dépourvu de qualité esthétique. Un postulat mettant la surface et la visibilité du matériau en premier plan, soulevant ainsi de nombreuses d’interrogations quant à la qualité de cette dernière. Nous avons avancé un certain nombre de réflexions cherchant à redonner un statut au matériau, à réinterroger ses particularités surfaciques pour les établir en tant que caractéristiques propres et permanentes du matériau. Une approche qui s’accomplit de plus en plus en surface, et qui comme nous allons le montrer se met progressivement à interroger le contenu et l’appareil du béton. Une démarche qui vise finalement comme nous le verrons dans une seconde partie à travailler conjointement la structure et sa surface visible.

4.1.1 Une première approche en surfaceDepuis les débuts de la construction en béton, la prise en compte des défauts du matériau s’est faite de manière progressive et cyclique. L’acceptation de sa surface et de ses imperfections est passée par différentes phases, souvent orientées par les idéologies et les mouvements d’une société à un moment donné. On note une prise de conscience d’abord intellectuelle des paradoxes du béton et des moyens à développer pour le rendre plus véritable et attractif. Une réflexion qui trouve un premier lot de réponses avec les modernes et s’affirme de manière appliquée avec des architectures contemporaines qui questionnent aujourd’hui systématiquement la question d’aspect de surface. Ce questionnement trouve ses réponses non seulement dans l’utilisation des outils et des procédés de mise en œuvre à des fins esthétiques, mais aussi dans

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Le béton apparent et la recevabilité de l’imperfection: Lucille Mazy66

2. La corrosion des armatures et l’intention de surface du Studio Rémy Zaugg à Mulhouse Action des architectes en surface comme sur une toile

L’intention des architectes pour le studio Rémy Zaugg ne va pas sans rappeler l’érosion des fers structurels du béton armé. Or ici les architectes agissent séparément des principes structurel du béton. Les armatures n’interviennent à aucun moment dans l’intention de surface, si ce n’est dans l’idée et l’illustration de leur possible érosion. Documents LM, Marne-La-Vallée, Juillet 2011. Herzog et de Meuron 1981-2000 , El croquis, Madrid, 2000.

1. Intervention en surface de l’architecte- Le travail du béton apparent et la prise en considération de ses imperfections et défauts se sont d’abord manifestés à la surface du matériau. On répond au problème de la mise à nu du matériau de construction en traitant sa surface visible.- A l’instar d’une toile, la surface devient le support d’une idée et d’une expression voulue par l’architecte.Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011.

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Champ d’action des architectes en surface du béton

Ils agissent sur la couche supérieure à distance des armatures et gros granulats.

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l’apprivoisement des défauts naturels du béton qui sont alors intégrés au processus et pris en compte dans le dessin des projets.

Ce changement de regard à l’égard du béton et de ses défauts s’est manifesté dans un premier temps de manière visuelle. On répond au problème de la mise à nu du matériau de construction en traitant cette surface visible (figure 1). On cherche des solutions pour rendre la visibilité du matériau acceptable, qualitative, tout en favorisant le caractère naturel et authentique du béton. Il n’est plus question de le cacher, de le fuir ni d’ignorer ses caractéristiques expressives. On cherche alors à intégrer ses caractéristiques et ses défauts dans les propriétés esthétiques du matériau. Une prise de position qui tend à donner un statut à la surface d’un matériau qui a été jusqu’alors fortement critiqué et rejeté. Avec cet acte d’adaptation et d’intégration des caractéristiques du matériau elles deviennent un point d’inflexion important du projet, changeant radicalement le statut du défaut dans ce dernier. Cette intervention ne touche cependant que la surface du béton, l’architecte ne venant à aucun moment modifier les propriétés physiques du matériau. Dans le cas, par exemple, du studio Rémy Zaugg cité plus tôt, les architectes intègrent des particules métalliques dans la composition de leur béton pour provoquer l’érosion artificielle désirée. Cette érosion de couleur rouille ne va pas sans rappeler l’érosion fréquente et possible des fers structurels avec le temps. Il est clair que les architectes provoquent ici de manière délibérée un phénomène que l’on rencontre habituellement de manière incontrôlée dans la construction béton. Pour se faire ils agissent de façon superficielle à la surface du mur en intégrant de petites particules métalliques qui, au contact de l’eau, se mettent à rouiller. Cette action en surface est totalement séparée des principes structurels du béton, les armatures n’interviennent à aucun moment dans l’intention de surface, si ce n’est dans l’idée et l’illustration de leur possible érosion (figure 2).

Dans la plupart des cas cherchant à réintégrer les défauts du matériau, les procédés structurels restent les mêmes et n’interviennent pas dans l’élaboration de ces surfaces. Seule la couche supérieure du mur change de visage. On note alors deux propriétés opposées, la structure et la surface, comme si l’un et l’autre constituent un champ particulier et indépendant de l’architecture.

4.1.2 Expérimentations du rapport structure/surface du bétonPeu à peu un nouveau questionnement se fait autour de l’appareil du matériau (figure 3). On prend conscience de l’opportunité que présente son caractère composite. Jean Pierre Aury dit à ce sujet, « le béton n’est pas un matériau qui enferme. Au contraire, il est ouvert à de nombreuses possibilités et favorisera de multiples imaginaires.»¹ Le béton en tant que matière composée met à la disposition du concepteur des variantes de cette matérialité en une multitude de

1 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décebre 2000, p.8-9.

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2. Questionnement et réflexion autour de l’appareil du matériauL’architecte prend conscience de l’opportunité que présente le caractère composite du matériau. Au delà de la surface il vient interroger la structure interne du béton en intégrant la notion parallèle de structure et de surface.Documents LM, Marne-La-Vallée, Décembre 2011.

4. Exploration de la matière interne du béton Ces images témoignent d’un travail expérimental à l’égard du béton. En explorant la matière et les composants du matériau, on cherche à interroger dans un même registre la notion esthétique du béton et la notion structurelle de ce dernier.Documents Marion Girodo, Madrid, Avril 2010.

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Le champ d’action s’élargit de la surface à la globalité du mur: - de la peau de ciment aux armatures jusqu’alors contenues à l’intérieur et invisibles.

Armatures et gros granulats deviennent les nouveaux outils d’expression du béton. On cherche à relier la notion de fonction et de visibilité en laissant apparaître l’ensemble des éléments constitutifs du mur.

Graphique établi à la suite des tests de résistance du matériau. Comparé à un graphique de résistance d’une structure type de béton, il nous permet de noter les possibilités structurelles de celui expérimenté.

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possibilités. De nombreux éléments entrent dans sa composition. Il s’agit des granulats, des liants, des armatures et des fibres qui vont être réutilisés et réinterprétés. De nombreux chercheurs vont essayer d’inverser les principes de son développement. Une inversion des processus de conception ayant pour objectif de travailler conjointement la question de surface et de structure. Une manière d’intégrer la dimension esthétique de façon moins artificielle qu’un simple traitement de surface. Ainsi les caractéristiques du béton, ses multiples capacités et la prise en compte de la question de surface ont progressivement placé le matériau au cœur d’un travail d’expérimentation et de recherche.

Le béton et ses composants permettent de créer un nombre infini de transpositions qui combinent dans un même registre la résistance, la densité et la texture. C’est un matériau que nous pouvons sans cesse réinventer en intégrant de nouveaux éléments, de nouveaux principes de mise en place, tout en le libérant de certaines procédures souvent contraires à l’expression du matériau. De nombreuses écoles organisent des TD et des concours visant à établir un fond de réponse à la question globale de structure et de surface du béton. Thomas Schroepfer enseignant à l’école de Design d’Harvard travaille autour de cette question qui vise à repenser la surface du béton tout en intégrant sa dimension structurelle. Il s’aperçoit que petit à petit le design et l’esthétique sont de plus en plus pensés de manière globale avec le reste de l’architecture. Un processus holistique qui tend à lier surface et structure et encore plus particulièrement dans notre cas avec le béton. C’est pourquoi, comme le rapporte Toshiko Mori « il est important d’intégrer l’expérimentation matérielle dans l’éducation des architectes»². Il met alors en place des workshops qui permettent aux futurs architectes de confronter des idées afin de constituer à terme un fond commun de savoirs. Des expériences qui les sensibilisent aux possibilités du béton apparent. Elles consistent d’une certaine manière à modifier notre regard à son sujet et à lui donner le statut de matériau dans toute sa dimension, c’est-à-dire à la fois technique et esthétique.

Une étudiante de l’école d’architecture de Marne-la-Vallée m’a présenté à ce sujet un travail effectué à l’école d’architecture de Madrid lors d’un échange Erasmus. Le professeur avait mis à leur disposition une quantité limitée et précise de chaque élément constitutif du béton. Il leur était demandé d’explorer la matière et d’y intégrer une réponse esthétique nouvelle tout en répondant aux besoins structurels de la matière. Après un certain nombre d’essais et de prototypes, l’élève s’est aperçue de l’impact des gros granulats dans la solidité du tout. Elle a ainsi choisi d’explorer la transparence du béton en remplaçant les gros granulats par des morceaux de verre de même dimension. Une expérience qu’elle a ensuite testée en termes de solidité (figure 4). Cet exercice donne l’opportunité d’explorer

2 Toshiko Mori dans «Opportunity in Transition: The reinventing of concrete», Solid States, Concrete in Transition, New York, Princeton architectural Press, 2010, p. 234.

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5. Extraits du concours international «Prefab concrete casesstudies»Le béton est doté de performances sous jacentes et ignorés. Le concours «Prefab concrete studies» vise à exprimer les éléments jusqu’alors invisibles à l’oeil du passant. Il s’agit de rendre visible tout ce qui intervient structurellement dans la construction béton, de faire de ces éléments les caractéristiques majeures de l’esthétique des surfaces de béton apparent.Herreros Juan, Implict Performance, Bruxelles, éditions Febelcem, 2009.

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l’expression tactile et sensorielle du matériau en surface, tout en testant sa résistance interne. Il est important de montrer à l’étudiant que faire du beau ne se limite pas à une surface mais que ce beau doit à la fois répondre à une volonté esthétique et aux contraintes techniques du bâtiment. Il ne s’agit pas de mettre des petits morceaux de verre pour laisser passer la lumière mais de faire en sorte que ces morceaux de verre deviennent une part structurelle du bâtiment. On cherche à effacer le factice et la beauté gratuite de l’architecture.

Sous le même principe, Juan Herreros a monté un concours international « Prefab concrete casesstudies ». Il explique dans son ouvrage Implicit performance ³ l’objectif de ce concours. Son propos se tient d’ailleurs tout simplement dans le titre de l’ouvrage qu’il explique ainsi « beaucoup d’éléments sont impliqués dans la nature et l’essence de quelque chose sans être révélés, exprimés ou développés»⁴. Il faut alors chercher à exprimer ces choses qui ne sont jusqu’alors pas totalement révélées. Dans le béton par exemple de nombreux éléments sont confinées sans jamais apparaître. Le béton est donc doté de performances sous jacentes et ignorées. Le mur a un rôle structurel mettant en pratique des éléments lui permettant de répondre à sa fonction. L’objectif évoqué par Juan Herreros est alors de travailler autour de l’ensemble des éléments tacites du béton. Le phénomène évoqué plus tôt dans le rapport qu’entretiennent la surface et la structure du béton, peut devenir le lieu commun d’expression de ces éléments jusqu’alors invisibles. On retiendra trois exemples d’expériences exposés ci-contre. Le premier consiste à évoquer les armatures sous jacentes en les utilisant avant coffrage pour marquer ce dernier, il y a dans ce cas une correspondance concrète entre la surface et la partie structurelle du béton. Le second cherche à explorer la répartition possible entre les armatures et la pâte granulaire, il s’agit de modifier la surface en utilisant ces armatures sans jamais les exposer à une érosion quelconque. Le troisième explore la structure granulaire du béton, il inverse cette structure normalement interne et invisible pour l’exposer en surface (figure 6).Des expérimentations qui posent tout de même une question : « Est-il pertinent structurellement de venir modifier de la sorte l’ordre et la disposition des éléments béton ?

Dans tous les cas de recherches, le processus revêt un aspect expérimental. Il repose d’abord sur l’expérience et l’observation, de manière à définir un point d’inflexion entre les expressions de surface et la résistance du matériau. Architectes et enseignants sont pour l’instant à la recherche des limites entre chacune de ces dimensions et des possibilités pour assurer leur développement conjoint dans le processus architectural. Il apparaît cependant peu probable de trouver des armatures à la surface du béton pour des raisons évidentes de durabilité. Mais regardons tout de même si ces recherches trouvent une réponse concrète dans l’architecture contemporaine.

3 Herreros Juan, Implict Performance, Bruxelles, éditions Febelcem, 2009, p.120.4 Ibid.

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6. Complexe d’habitation de Giardin à SamedanArchitectes: Mierta et Kurt Lazzarini

Ce bâtiment est un ensemble résidentiel crée dans un village Suisse marqué par la stratification du paysage. Le défi des architectes était la réalisation d’un bâtiment utilisant un matériau capable d’assurer un rôle à la fois de structure et de surface.Mierta und Kurt Lazzarini : De aedibus 19, Heinz Wirz, Luzern, 2007.

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7. Complexe d’habitation de Giardin à SamedanArchitecture construite autour du rapport surface/structure

Le complexe d’habitation de Giardin à Samedan en Suisse est une des rares mise en application du prin-cipe cherchant à concevoir conjointement la structure et la surface du bâtiment. Tout ce qui se passe structurellement doit être exposé et visible en surface. Les principes structurels deviennent esthétiquesMierta und Kurt Lazzarini : De aedibus 19, Heinz Wirz, Luzern, 2007.

Les murs de l’architecture doivent répondre à la fois à la fonction de structure et de surface. Chacune des deux notions doit être pensée conjointement avec l’autre.

Action dans l’épaisseur

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73Structure et surface au coeur du même processus de réflexion

4.2 Application du rapport structure/surface au cœur du projet architectural :Complexe d’habitation Giardin à Samedan par Mierta et Kurt Lazzarini

Cette prise de position à l’égard du rapport structure/surface du béton nous amène à interroger son application dans le monde architectural. Ces expériences trouvent-elle une réponse concrète dans l’architecture contemporaine ou s’agit-il uniquement de théories difficilement applicables au monde de la construction ?

4.2.1 Le béton, matériau de structure et de surface :On s’aperçoit d’une prise en compte de plus en plus systématique des enjeux que le matériau suscite : son mépris, son manque d’esthétisme, son caractère structurel et non surfacique, son imperfection et la volonté de lui construire une image qui n’est pas la sienne. L’architecte a mis un certain temps à questionner le travail du béton. Un travail qui s’est établi par phases successives, où l’on traite les paradoxes du matériau un à un, en s’appliquant d’abord à lui donner une image positive, en s’adaptant ensuite à ses caractéristiques et en introduisant ses défauts dans les caractéristiques esthétiques du matériau, etc. Il y a une application et une recherche assez lente sur les possibilités de réponses du béton mais elle permet finalement une meilleure compréhension de ses possibilités et de fait une meilleure maîtrise. Intégrées progressivement dans le paysage architectural, les textures diverses du béton ont fini par faire leur place et devenir de véritables principes esthétiques, indissociables du matériau.

Le complexe d’habitation de Giardin conçu par les architectes Mierta et Kurt Lazzarini représente une des rares mise en application du principe cherchant à concevoir conjointement la structure et la surface du bâtiment. Il illustre une réponse complète aux différents paradoxes évoqués jusqu’à présent.Forts sans doute du fond de culture développé à l’égard du béton au cours du temps, les architectes interrogent toutes les facettes du matériau : son identité, ses défauts, ses expressions, ses potentialités structurelles et esthétiques. Il y a une véritable prise de conscience de l’apport qualitatif, tant esthétique que théorique, dans l’attention portée à l’ensemble des enjeux du matériau. Il y a une écoute fondamentale établie à l’égard du béton dès la phase d’intention du projet. On pense béton et on crée béton dans sa dimension à la fois structurelle et esthétique.

Ce bâtiment est un ensemble résidentiel créé dans un village Suisse (figure 6). Samedan est entouré de collines façonnées pendant des siècles par les habitants sous forme de terrasses. Ce paysage apporte une dimension de stratification particulièrement importante pour la compréhension du projet.Le défi que les architectes s’étaient donnés, était la réalisation d’un bâtiment utilisant un matériau capable d’assurer un rôle à la fois de structure et de surface (figure 7).

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8. Complexe d’habitation de Giardin à SamedanTout est réuni pour justifier l’utilisation du béton. - la volonté d’utiliser des granulats locaux- la recherche d’une expression de surface particulière en vue de son intégration au paysage - l’ouverture vers une mise en oeuvre artisanale qui comme nous l’avons vu plus tôt respecte au mieux l’expression naturelle du matériau. Archithese, «Wohnüberbauung Giardin, Samedan », janvier 2008, p.18-24.

MINERALITE DU MATÉRIAUIntégrer la roche locale dans la conception du bâtiment, tant dans l’usage que dans la minéralité qu’elle dégage.

PAYSAGEIntégrer le bâtiment de manière harmonieuse avec son contexte paysagé.

MAÇONNERIE ARTISANALERetrouver le travailler artisanal de la construction de la région dans le travail de la matière du bâtiment.

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75Structure et surface au coeur du même processus de réflexion

La surface joue un rôle essentiel dans le projet et cela quelque soit la construction. Dans le cas du béton apparent, elle joue un rôle à la fois d’intégration dans un paysage, et est d’autre part, le reflet des phénomènes chimiques, physiques et constructifs du matériau. Elle est parallèlement un moyen d’intégration du bâtiment au paysage et le lieu d’expression d’un matériau. Elle se trouve ainsi entre le paysage et la structure du bâtiment.Le choix du béton s’est alors fait par rapport aux possibilités que ce dernier permettait, en soulignant notamment son caractère composite et expressif. L’intention majeure des architectes était de pouvoir intégrer le bâtiment de manière harmonieuse à son contexte tant paysager qu’historique (figure 8). Ils voulaient à la fois exprimer le mouvement stratifié du paysage, le travail artisanal de la maçonnerie des environs et intégrer les roches locales. Le béton se trouvait donc être le matériau le mieux adapté.

Le défi des architectes étant de traiter la surface et la structure dans un même processus, il a suscité énormément de recherches et d’expérimentations en amont. Le processus de développement du projet a été très long et a justifié la réalisation de nombreux prototypes. Une étape importante au cours de laquelle ils devaient déterminer le mélange des composants de sorte que les attentes à la fois esthétiques et les conditions physiques de construction soient respectées.Les architectes voulaient s’affranchir des armatures qui selon le principe du rapport surface/structure auraient dû apparaître à la surface du béton. Il était donc question d’exprimer les matériaux locaux et de se limiter à ceux-ci pour la constitution du mur et de sa fonction structurelle. Apparaît alors un enjeu important qui consistait à obtenir la résistance suffisante pour constituer la structure du bâtiment tout en exprimant l’effet de surface voulu (figure 9). Vibré et tassé à la main selon des procédés artisanaux, apparaissent en surface, comme nous l’avons vu avec la chapelle Saint Klaus Bruder de Peter Zumthor, des ségrégations assez fortes des granulats du béton. Une granulométrie qui est volontairement provoquée pour créer des densités plus ou moins fortes à la surface du béton et traduire d’une certaine façon les reliefs stratifiés du paysage environnant (figure 10). Cette structure poreuse du béton posait cependant des questions importantes quant à sa tenue dans le temps. La surface devait à la fois résister à la compression et au gel. De nombreux tests ont alors été faits pour mesurer la résistance et la durabilité de ce béton artisanal. La formulation et la dessiccation des grains devaient être optimales pour pallier à l’absence d’armatures. Les architectes étaient très attentifs à la réalisation de l’objectif recherché où structure et surface ne font plus qu’un.

Nous avons ici un exemple qui témoigne du langage qui s’opère entre les conditions physiques du matériau, son expression et son paysage environnant. Les architectes se sont servis des caractéristiques du matériau pour répondre au

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Quelques échantillons réalisés pour le projet. Il s’agit ici de tests liés à l’aspect, à la texture et à la couleur du béton.

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9. Complexe d’habitation de Giardin à SamedanL’intention de traiter conjointement la surface et la structure a suscité de nombreuses recherches et expérimentation en terme d’aspect, de durabilité et de résistance. Il fallait trouver le mélange et la mise en oeuvre qui répondent à ces trois paramètres.A+U, «Wohnüberbauung Giardin, Samedan » catégorie Architecture in Switzerland 2000-2009, numéro 808, 2011.

L’enjeu majeur était de répondre la fonction constructive du mur tout en exprimant l’effet de surface voulu.Il fallait donc trouver le point d’inflexion entre la structure et la texture induise par cette dernière.

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77Structure et surface au coeur du même processus de réflexion

mieux aux conditions d’intégration. Pour arriver à une telle réponse il faut être capable d’écouter et de comprendre la nature du matériau. Le béton a été choisi pour répondre à la fois à un principe constructif et à un besoin esthétique. Il y a un véritable langage entre la structure et sa surface, ainsi qu’entre la surface et son contexte. Le béton répond ici à toutes les conditions nécessaires au projet à partir d’un même et unique matériau.

4.2.2 Les limites de cette pratiqueLe travail effectué conjointement entre la structure et la surface du complexe d’habitation de Giardin est un cas isolé au jour d’aujourd’hui. Les expérimentations autour du matériau sont encore très rarement appliquées à la construction architecturale. Des expérimentations qui ne sont en fait qu’à l’état de recherches. Il s’agit plus d’une sensibilisation des futurs architectes, telle que nous l’avons expliqué plus tôt, que d’une réelle volonté d’application directe à l’architecture contemporaine. Elles reposent avant tout sur la transmission d’une idée, qui consiste à dire que le béton est un matériau de structure ayant également un fort potentiel esthétique et plastique, et qu’il convient de le penser dans sa dimension à la fois structurelle et surfacique pour augmenter les qualités architecturales du bâtiment.

Comme pour tout matériau, l’expérimentation et le développement de nouvelles techniques de mise en œuvre demande la mise en place d’un grand nombre de moyens, notamment financiers. La rareté de leur application dans la construction engendre, en plus des moyens préalablement mis en place, des coûts supplémentaires considérables. Les outils développés ne sont pas produits en grande quantité, il n’y a donc pas d’industrialisation des principes de construction. Les coûts de réalisation du complexe d’habitation de Giardin ne m’ont pas été communiqués, mais la durée des travaux laisse présager l’investissement à la fois financier et humain qu’il a fallu mettre en place. Un fossé se creuse entre le programme du projet et les deux ans de travaux qui ont été nécessaires à la réalisation de ce principe à la fois constructif et esthétique. Un paradoxe que l’on peut justifier par un état de réflexion peut être encore trop théorique. Cette notion de coût ne va pas sans rappeler la critique des nombreux moyens mis en place pour pallier aux imperfections du béton. Nous nous retrouvons dans un schéma identique, où le développement et l’intervention de la technique quelle que soit sa visée, représentent un coût conséquent de la construction. La seule différence se trouve cependant dans la pertinence de la réponse esthétique qui favorise la nature véritable du matériau, c’est peut être le prix à payer pour que le béton dise enfin qu’il est le béton.La réduction éventuelle des coûts d’une telle pratique architecturale passerait certainement par la mise en place de principes constructifs normalisés. Une normalisation qui permettrait de créer les outils adaptés à cette nouvelle pratique. Mais la standardisation des principes de construction fabriquerait un panel de réponses limitées à un certain champ d’action. Une telle action ne serait-elle pas un retour à une stigmatisation du matériau ? La quête esthétique des bétons ne

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Tassé et vibré à la main apparaissent en surface des ségrégations assez fortes des granulats du béton.

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10. Complexe d’habitation de Giardin à SamedanLe travail du béton dans cette architecture permet aux architectes de créer un langage particulier entre les conditions physiques du matériau, son expression et son paysage environnant. Il crée à partir des particularités physiques et matériels du matériau l’objet d’une intégration à la fois technique, esthétique et historique. Archithese, «Wohnüberbauung Giardin, Samedan », janvier 2008, p.18-24.

Une granulométrie créée volontairement pour créer des densités à la surface du béton et traduire d’une certaine façon les reliefs stratifiés du paysage environnant.

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79Structure et surface au coeur du même processus de réflexion

doit pas tomber dans la réalisation d’un répertoire, à l’image du catalogue RECKLI faisant état des possibilités de matrices de fond de moule.

Au début du siècle, le béton était vu par de nombreux architectes comme un matériau d’ossature nécessitant d’être revêtu, Franck Lloyd Wright disait « il n’y a ni histoire ni ode qui chante les qualités esthétiques du béton » ⁵. En exposant le béton à la vue de tous, on a été amené à traiter la surface de ce matériau d’ossature, non plus en l’ignorant par l’usage d’un revêtement mais en assumant et en dessinant, à l’aide de ses diverses expressions, ses caractéristiques esthétiques. En voulant aller plus loin dans le postulat qui consistait à mettre à nu quelque chose dont la fonction première n’était pas de s’exposer, l’architecte s’est mis à travailler conjointement l’idée de structure et de surface, en essayant de rétablir une cohésion entre ce que l’on voit sur la peau et ce qu’il se passe à l’intérieur du matériau. Une intention qui amène l’architecte à revisiter le processus de conception du béton et les procédés de sa mise en œuvre c’est-à-dire : installation des armatures, formulation, coffrage, coulage, vibration, séchage ou dans le cas d’un béton sans armature, formulation, coffrage, vibration, coulage. Il change le sens des choses en exposant par exemple la matière interne et finalement structurelle du matériau à la surface de celui-ci. Mais supposons que cela porte ses fruits (il n’y a aujourd’hui pas encore de réelles démonstrations techniques d’un tel processus), n’est ce pas détourner à nouveau l’essence même du matériau ? Ne sommes-nous pas, à partir des éléments du béton, en train de créer un nouveau matériau ? Ne serait-ce pas finalement la limite de l’expérimentation du béton ? Comment travailler la notion de surface et de structure sur un même niveau sans venir modifier la nature et l’origine constructive du matériau ?

5 Propos de Franck Lloyd Wright rapportés par Collins (P) Splendeur des bétons. Les prédécesseurs et l’oeuvre d’Auguste Perret, Paris, Éditions Hazan, 1995.

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Conclusion

Nous venons de voir que la conquête et la respectabilité de la matière et de la surface des bétons a mis du temps à s’installer. Cette respectabilité s’est construite progressivement grâce à la l’identification de trois objectifs. Le premier était de donner un sens à l’exposition du matériau en apportant une réponse à la question suivante : qu’est ce qui justifie sa mise à nu ? Il fallait ensuite casser les préjugés qui bloquaient la tolérance à son égard et empêchaient toute réception positive quant à sa visibilité. Pour finir, il convenait de lui construire une image en rapport avec sa véritable nature. Il s’agissait d’accepter le matériau en temps que tel et de développer les moyens et les outils de sa véritable expression.

Le béton est un matériau imparfait que l’on a cherché à rendre parfait coûte que coûte. Un paradoxe que l’on doit d’abord à une difficulté notable d’accepter l’échec de l’outil technique puis à une mauvaise appréciation et écoute de ce que le matériau cherchait à exprimer. La particularité majeure du béton se trouve dans l’expression de multiples phénomènes physiques, chimiques et naturels à sa surface. Un matériau qui par nature ne peut prétendre à la perfection. Ces aspérités, textures et défauts de surface pouvant ruiner l’aspect d’un bâtiment, les architectes ont d’abord cherché à maîtriser et à contrôler la surface du béton par des traitements après coulage et par le dessin scrupuleux des coffrages. Peu à peu, le travail sur la plasticité et les textures s’est appuyé sur une meilleure interface entre tous les acteurs de la chaîne de production depuis la formulation du béton jusqu’au soin du décoffrage et au contrôle de la mise en œuvre. Mais cette mise en place de moyens devient presque une caricature des ambitions des acteurs de la construction. Une insistance de l’homme sur le matériau qui croit pouvoir le contrôler et l’orienter comme bon lui semble. On doit cette ténacité au fait que l’homme veut tout maîtriser. Dans le cas du béton apparent une telle attitude peut se révéler mensongère à l’égard de l’architecture et de la nature des matériaux utilisés.

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Nous notons d’une manière plus générale que l’on considère de plus en plus le projet comme une réalité virtuelle coupée de la réalité physique et matérielle des choses. On est emprunt d’idéologies et de concepts que l’on cherche à mettre en œuvre sans questionner leur véritable nature. La matière telle que nous l’avons étudié avec le béton est alors réduite à des phénomènes artificiels et théoriques. Il y a un véritable fossé qui se creuse entre la réalité que l’on veut donner aux choses et la véritable nature de celles-ci. Pour appuyer les besoins et volontés esthétiques d’une société et pour limiter les manifestations d’un matériau en soif d’expression, on créée des règles et des normes qui viennent contrôler ce dernier. On produit de la sorte une certaine homogénéité, soustrayant toute surprise expressive des matériaux. Comme le soutient Marc Mimram dans Matière du plaisir « la normalisation limite le plaisir des sens pour transformer cette matérialité en un cahier de prescriptions duquel l’architecture se rend prisonnière»¹. Il est donc nécessaire de mettre l’expérimentation des matériaux et la recherche de leur nature expressive au centre des préoccupations architecturales. Il est question d’arrêter de limiter et de contrôler mais d’observer et d’étudier le véritable sens des matériaux pour en tirer un atout architectural.

Force est de constater qu’il était difficile de contrôler un matériau en allant à contresens de sa nature, et que l’architecture devenait une sorte de mensonge et de démonstration des compétences des uns et des autres, certains architectes ont renversé le problème en réquestionnant le matériau. Une remise en question qui s’illustre par la prise en compte de ses défauts, de ses aspérités et de ses textures dans la réalisation architecturale. Peu à peu ces paramètres deviennent supports d’architecture et prennent la place centrale de la conception architecturale. On interroge désormais les matériaux en regardant leurs imperfections comme des textures pouvant devenir le relief esthétique de l’architecture. A l’instar de l’art contemporain qui questionne ces questions depuis plus longtemps, l’architecture s’installe dans un champ de recherches et d’expérimentations visant à retrouver l’essence même du matériau. Au même titre que le béton, nous notons un travail expérimental à l’égard de l’acier avec une intégration de plus en plus fréquente des défauts de celui-ci (la rouille notamment) dans l’architecture notamment par l’utilisation de l’acier Corten. L’architecte se place dans un registre d’anticipation, il n’attend plus que son architecture subisse les défauts de sa mise en œuvre ainsi que les traces du temps mais les provoque et les anticipe.Les registres physiques, symboliques et esthétiques du béton se sont ainsi développés et les architectes ou designers, aidés par les industriels, lui ont construit une nouvelle image. Les idéologies se transformant, le béton a radicalement changé de peau et arbore aujourd’hui, pour des projets contemporains majeurs, des aspects de surface aux textures et couleurs fascinantes.

1 Marc Mimram, Matières du plaisir, Lausanne, Editions Pavillon de l’Arsenal, 1999

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On identifie différentes phases dans le processus d’acceptation et d’inclusion des phénomènes physiques et matériels du béton. Des séquences que l’on peut, peut- être, expliquer par une sensibilisation progressive et construite au cours du temps. On note d’abord une prise de position visuelle où l’on cherche à donner un statut à une surface. Une attitude de plus en plus courante et presque marginalisée des architectes qui, sensibles à l’apport des expressions diverses du béton, prennent conscience qu’il vaut mieux les provoquer et les exacerber que d’avoir à les assumer lorsqu’elles apparaissent sans anticipation.Une seconde phase plus actuelle et qui trouve encore peu de réponses dans le monde construit, consiste à travailler conjointement le béton comme un matériau de structure et de surface. C’est-à-dire que le matériau joue les deux partitions en même temps. Ce que l’on trouve à la surface du béton n’a plus seulement un caractère décoratif mais est une conséquence directe d’une relation structure/surface. On mêle alors structure et enveloppe, fonction et esthétique au sein d’un même tout. On pourrait à ce sujet faire un détour vers le mouvement brutaliste qui soulevait la question de la mise à nu d’un matériau en posant des questions similaires à celles qui nous préoccupent dans la relation structure/surface. L’architecture brutaliste a une apparence massive et sans apprêt, sa grande particularité se trouve dans l’exhibition de matériaux ou d’éléments structurels qui sont d’habitude dissimulés. Une parenthèse qui montre une idéologie ancienne à l’égard de l’apparence du béton. Déjà les architectes questionnaient la surface du matériau et se sont servi des possibilités de sa mise en œuvre et des particularités de sa matérialité. De la même façon que nous venons de l’évoquer, il y avait une prise en compte à la fois structurelle et visuelle du matériau. On ne se préoccupait pas de ce que ce dernier pouvait produire en surface, au contraire son expression révélait l’architecture et l’idéologie qui s’y incarnait. Cette dernière n’a pas réussi à s’imposer durablement et s’est attirée de nombreuses critiques. Aujourd’hui, les exemples étudiés interrogent la même question en apportant une dimension plus sensible aux aspects de surface. Les enjeux ne sont d’ailleurs plus les mêmes, l’expérimentation actuelle du béton ne correspond pas à une idéologie de construction mais a été provoquée par les limites de la technique à contrôler un matériau imparfait et par le manque d’expression d’une architecture contrainte par les normes visant à une perfection. Il s’agit dans notre cas de trouver les réponses tant financières, que structurelles, esthétiques et morales à un matériau expressif. Des dimensions qui lui vaudront peut-être plus de légitimité et de pérennité.

L’analyse du corpus et l’exposition de ces nouvelles manières de travailler le béton soulèvent deux nouvelles questions: les coûts de réalisation, et un nouveau paradoxe consistant à réquisitionner la technique pour créer artificiellement des phénomènes naturels. Des notions que j’ai tardivement identifiées, en raison du manque d’exemples contemporains ayant intégré la question des défauts du béton, et de l’absence de données chiffrées au sujet des coûts de construction

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pour des exemples de ce type. C’est une réflexion du chef de chantier du projet «Descartes +» qui m’a amené à les questionner. Voyant mon engouement pour les traces laissées à la surface du béton, il me disait avec complaisance, « lorsque tu seras architecte et que tu décideras de construire un bâtiment avec une intention de provoquer les défauts du béton, évite de faire appel à moi.»² Tout d’abord les traces laissées à la surface du béton sont des traces fortuites et naturelles, elles trouvent leur beauté dans leur aptitude à s’exprimer librement mais qu’en sera-t-il si la technique s’en mêle ? Comment construire artificiellement un geste spontané du matériau ? Il ajoutait «ce n’est pas que je veuille absolument un béton parfait, mais je pense qu’il est encore plus difficile de fabriquer un défaut que de faire un béton totalement exempt de défauts»³. D’autre part la mise en place des défauts du matériau au cœur des intentions de projet nécessite le développement de techniques et de moyens d’anticipation telle que la réalisation de nombreux prototypes pour apprivoiser au mieux l’effet désiré. Elle nécessite la mise en place de moyens coûteux. Ainsi, il revient aussi cher d’aller à l’encontre de la nature du matériau que d’aller à l’encontre d’une technique à laquelle on demande de produire des phénomènes aléatoires. On note d’ailleurs que l’ensemble des projets présentés sont de petits projets aux maîtres d’ouvrage privés. Une parenthèse qui explique la possibilité de réalisation de ces projets.

Ce travail de surface soulève également une question de pérennité indissociable de l’architecture. On admire ces nouvelles manières de travailler et d’exposer le béton. Ces réalisation sont récentes et rien ne les défigure encore, mais qu’en sera-t-il dans 50 ans, dans 100 ans et plus ? Nous n’avons pas suffisamment de recul pour l’apprécier. Je conclurai et ouvrirai cette réflexion en proposant cette citation de Jean pierre Aury disant « Le travail de la matière du béton apparent n’a de sens que si la matière mise en œuvre est pérenne. La surface du béton bien qu’esthétique n’est pas un décor plus ou moins éphémère […] faire du beau ne consiste pas à faire un mauvais décor qui dure 1 ou 2 ans. Pour éviter cela, il faut maîtriser la totalité de cette matière qui s’appelle le béton. Là, se trouve le point de convergence totale et d’interaction entre l’esthétique et la technique.»⁴ Finalement technique et esthétique trouveront peut être un accord autour de la question de pérennité des surfaces du béton.

4 Aury (J-P.) dans «Parements, conseils d’expert», Les Carnets de l’EFB, colloque du 13 décebre 2000, p.8-9.

3 Ibid.

2 Propos du chef de chantier du projet Descartes + recueillis lors d’une interview de ce dernier.

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Bibliographie

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• TRUB Ulrich (traduit par Jean Didry), Les surfaces de béton, éditions Eyrolles, Paris, 1976.

• KUNZEL Wilhelm, Le béton apparent dans la construction, traduit par R. Luchon, éditions Eyrolles, 1966.

• COLLINS Peter, Concrete, The vision of a new architecture, Quebec, National Library f Canada Cataloguing in Publication, 2004 (seconde édition), 1959 (première edition)

Monographies d’architectes et articles

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• Mierta und Kurt Lazzarini : De aedibus 19, Heinz Wirz, Luzern, 2007.

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• GOLDBACH Ines, Neue Architektur Oberrhein, Christoph Merian Verlag, Bâle, 2007.

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• LAGERFELD Karl, Tadao Ando: vitra house, Steidl, 2008.

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• MARQUEZ Fernando, Herzog et de Meuron 1981-2000 , El croquis, Madrid, 2000.

• LAGERFELD Karl, Tadao Ando: vitra house, Steidl, 2008.

•«Architectural design», Tadao Ando: vitra seminar house, vol.64, no 7/8, juillet-août 1994, pp. 92-97.

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Sites consultés

• http://www.lemoniteur.fr/

• http://www.cstc.be

• http://www.lafarge.fr/

• http://www.slideshare.net/Benwa/ParmentierCoffrages

• http://www.lrvision.fr

• http://www.betonsuisse.ch/

• http://www.herzogdemeuron.com

• http://www.herrerosarquitectos.com/

• http://www.lazzarinis.com/

• http://www.beaudouin-architecte.com/

• http://www.concretebennett.com/

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1 Tableaux d’analyse du corpus de bâtiments 91

1.1 - Vitra Conference Pavilion à Weil-am-Rhein par Tadao Ando - Médiathèque et musée à Lussac les châteaux par Hervé Beaudouin

91

1.2 - Bruder Klaus Chapel à Wachendorf par Peter Zumthor- Centre Sportif Can Ricart à Barcelone par Vora Arquitectura

93

1.3 - Complexe d’habitation Giardin à Samedan par Mierta et Kurt Lazzarini.- Studio Rémy Zaugg à Mulhouse par Herzog et de Meuron

95

2 Tableaux d’observation et d’analyse des surfaces de béton apparent 97

2.1 Pathologies et défauts de mise en oeuvre

2.2 Coffrages et pathologies

2.3 Traitements de surface

3 Tableau synoptique des effets sur l’aspect des surfaces de béton apparent 99

3.1 Composition du béton

3.2 Mise en oeuvre

3.3 Coffrage

3.4 Vieillissement

4 Tableau d’expérimentations de Sonya Lee pour le Visitor Center Darwin D.House à Buffalo

101

4.1 - Tableau des bétons abandonnés

4.2 - Tableau des bétons validés mais non utilisés

4.3 - Tableau des bétons validés et surface réalisée

Annexes

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Corpus de bâtiments Can Ricart Sports Center, Vora Arquitectura,Barcelone, Espagne,2006.

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando,Weil-am-Rhein, Allemagne, 1993.

Médiathèque et musée, Hervé Beaudouin,Lussac-les-Châteaux, France, 2010.

Nature des aspérités de la surface Coffrage (nature des bois de coffrage) Béton naturel (surface dessinée et maculée) Formulation (choix des granulats)

Caractéristiques de la surfaceQue voit-on ?

- Traces du coffrage et impression de ses caractéristiques (coffrage bois)- Différentes teintes de gris entre les différentes parties construites en béton (clair et foncé)- Une partie du bâtiment est tachetée (nuances de gris)

- Traces du coffrage (joints et points d’accroche) - Calepinage régulier et soigné. Les traces du cof-frage semblent intégrées dans le dessin du bâtiment- Impressions de feuilles d’arbre localisés = appa-remment il s’agit d’un accident de coffrage.-Uniformité de teinte

- Traces des différentes coulées, strates successives- Différentes teintes de coulées- Différentes granulométries- Utilisation d’un coffrage grimpant

Qualité du béton (en attente de documents) - Pour permettre une uniformité de couleur, le béton du pavillon a fait l’objet d’une attention particulière = béton de qualité- L’impression d’une feuille de cerisier du Japon sur la surface du béton témoigne du travail in-situ des phases de coulage et de coffrage.

Type de coffrage Coffrage bois et métal, matricé et fabriqué sur le chantier. - Coffrage métallique reprenant les dimensions des Tatamis (volonté de l’architecte) 180 cm x 90 cm- 6 points d’accroche par panneaux. Dessin régulier du système de mise en oeuvre.

Coffrage grimpant

Questionnement Qu’est ce qui détermine la texture et la variation de couleur des surfaces en béton apparent ?

La mise en oeuvre du béton semble avoir été particulière travaillé en amont du projet. Les traces de banches, les joints et les points d’accroches sont intégrés au dessin du projet. Cependant on note une particularité sur l’un des murs: des empreintes de feuilles complètement ou partiellement imprimées. Comment expliquer leur présence ?

Le bâtiment présente des strates de couleur et de nature différentes. En se rapprochant on aperçoit d’un travail méticuleux dans le choix des granulats. Il s’agit alors de comprendre l’impact de la formulation sur l’aspect des surfaces.

Analyse de la surfaceComment est-elle obtenue ?

- la nature du bois utilisé (humidité, dessin des veines, porosité, etc...)- le degré d’absorption du bois

- Le béton est un matériau qui réagit à ce qui le touche et l’environne. Dans ce cas précis on constate que ces traces n’étaient pas dessinées dans le projet.- Le coffrage du mur en question se trouvait à proximité de deux Cerisiers du Japon. Quelques feuilles de ces arbres se seraient alors glissées dans le coffrage au moment de sa mise en place, s’imprimant dans le mur au même titre que les points d’ancrage du coffrage. - Deux types de traces se rencontrent à a surface du béton: l’anticipé et l’accident.

Le coffrage est contrôlable dans son aspect graphique: dimensions et orientation des planches Des traces que le concepteur peut dessiner selon son gré.Le accidents sont les résultats du travail de la matière et des caractéristiques du matériau. Un certain nombre de facteurs sont imprévisibles et non maîtrisables lors de la réalisation.

- Béton désactivé (traitement après coulage et cof-frage) afin de mettre en valeur les agrégats utilisés.

- Les variations de couleur proviennent exclusive-ment des variations de taille de granulats. Explo-ration et ajustement de la courbe granulométrique.

- Le coffrage grimpant permet de couler le mur progressivement, strate par strate.

La surface dans le concept architec-tural

- Ces traces auraient pu être corrigées (grossièrement) au moment du décoffrage. Leur présence manifeste une réelle prise de conscience des architectes pour les qualités plastiques et esthétiques du matériau. Il est très difficile de corriger une erreur de coffrage (difficultés d’obtenir la bonne teinte, vieillissement différent des zones ragréées, etc.)

- Le travail de dessin et de calpinage du coffrage est une étape irrémédiable dans la réalisation de surface qualitatives.

Hervé Beaudouin travaille principalement avec la for-mulation. Il cherche à exprimer les capacités naturelle-ment esthétiques du matériau. Le travail de formulation pour ce type de résultat consiste à ajuster la courbe granulométrique. Il utilise la technique même du matériau pour exhiber ses propres caractéristiques. Le projet architectural repose sur ce travail de formulation.

Phénomènes relevés - Influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton

cf. Expériences sur l’influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton.(huile de démoulage, bois brut, bois raboté, bois noueux, bois mouillé, bois sec, bois vieilli et attaqué par champignons)

- Phénomènes d’impressions, d’intrusions et d’incrustations imprévues. Les surfaces de béton frais sont soumises à l’intrusion de matières étrangères. Ces matières étrangères sont transmises au béton par les surfaces de coffrages- L’anticipation et le dessin du coffrage dans le projet.

- L’étape cruciale de la formulation. Chaque compo-sant peut avoir un impact considérable. La formu-lation va déterminer les caractéristiques et l’aspect visuel de la surface.cf. Expériences de teinte pour un même béton com-posé de granulats différents. (Jean Pierre Aury, plas-ticien des bétons)

Phénomènes sous jacents - Coffrage- Hydratation et teinte du béton- agents de démoulage

- Du liquide au solide: le béton prend la forme de son coffrage- Imprégnation et incrustations

- Granulats et colorimétrie- Le rôle de la formulation- Traitement après décoffrage

Corpus de bâtiments

Nature des aspérités de la surface

Caractéristiques de la surfaceQue voit-on ?

Qualité du béton

Type de coffrage

Questionnement

Analyse de la surfaceComment est-elle obtenue ?

La surface dans le concept architectural

Phénomènes relevés

Phénomènes sous jacents

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Corpus de bâtiments Can Ricart Sports Center, Vora Arquitectura,Barcelone, Espagne,2006.

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando,Weil-am-Rhein, Allemagne, 1993.

Médiathèque et musée, Hervé Beaudouin,Lussac-les-Châteaux, France, 2010.

Nature des aspérités de la surface Coffrage (nature des bois de coffrage) Béton naturel (surface dessinée et maculée) Formulation (choix des granulats)

Caractéristiques de la surfaceQue voit-on ?

- Traces du coffrage et impression de ses caractéristiques (coffrage bois)- Différentes teintes de gris entre les différentes parties construites en béton (clair et foncé)- Une partie du bâtiment est tachetée (nuances de gris)

- Traces du coffrage (joints et points d’accroche) - Calepinage régulier et soigné. Les traces du cof-frage semblent intégrées dans le dessin du bâtiment- Impressions de feuilles d’arbre localisés = appa-remment il s’agit d’un accident de coffrage.-Uniformité de teinte

- Traces des différentes coulées, strates successives- Différentes teintes de coulées- Différentes granulométries- Utilisation d’un coffrage grimpant

Qualité du béton (en attente de documents) - Pour permettre une uniformité de couleur, le béton du pavillon a fait l’objet d’une attention particulière = béton de qualité- L’impression d’une feuille de cerisier du Japon sur la surface du béton témoigne du travail in-situ des phases de coulage et de coffrage.

Type de coffrage Coffrage bois et métal, matricé et fabriqué sur le chantier. - Coffrage métallique reprenant les dimensions des Tatamis (volonté de l’architecte) 180 cm x 90 cm- 6 points d’accroche par panneaux. Dessin régulier du système de mise en oeuvre.

Coffrage grimpant

Questionnement Qu’est ce qui détermine la texture et la variation de couleur des surfaces en béton apparent ?

La mise en oeuvre du béton semble avoir été particulière travaillé en amont du projet. Les traces de banches, les joints et les points d’accroches sont intégrés au dessin du projet. Cependant on note une particularité sur l’un des murs: des empreintes de feuilles complètement ou partiellement imprimées. Comment expliquer leur présence ?

Le bâtiment présente des strates de couleur et de nature différentes. En se rapprochant on aperçoit d’un travail méticuleux dans le choix des granulats. Il s’agit alors de comprendre l’impact de la formulation sur l’aspect des surfaces.

Analyse de la surfaceComment est-elle obtenue ?

- la nature du bois utilisé (humidité, dessin des veines, porosité, etc...)- le degré d’absorption du bois

- Le béton est un matériau qui réagit à ce qui le touche et l’environne. Dans ce cas précis on constate que ces traces n’étaient pas dessinées dans le projet.- Le coffrage du mur en question se trouvait à proximité de deux Cerisiers du Japon. Quelques feuilles de ces arbres se seraient alors glissées dans le coffrage au moment de sa mise en place, s’imprimant dans le mur au même titre que les points d’ancrage du coffrage. - Deux types de traces se rencontrent à a surface du béton: l’anticipé et l’accident.

Le coffrage est contrôlable dans son aspect graphique: dimensions et orientation des planches Des traces que le concepteur peut dessiner selon son gré.Le accidents sont les résultats du travail de la matière et des caractéristiques du matériau. Un certain nombre de facteurs sont imprévisibles et non maîtrisables lors de la réalisation.

- Béton désactivé (traitement après coulage et cof-frage) afin de mettre en valeur les agrégats utilisés.

- Les variations de couleur proviennent exclusive-ment des variations de taille de granulats. Explo-ration et ajustement de la courbe granulométrique.

- Le coffrage grimpant permet de couler le mur progressivement, strate par strate.

La surface dans le concept architec-tural

- Ces traces auraient pu être corrigées (grossièrement) au moment du décoffrage. Leur présence manifeste une réelle prise de conscience des architectes pour les qualités plastiques et esthétiques du matériau. Il est très difficile de corriger une erreur de coffrage (difficultés d’obtenir la bonne teinte, vieillissement différent des zones ragréées, etc.)

- Le travail de dessin et de calpinage du coffrage est une étape irrémédiable dans la réalisation de surface qualitatives.

Hervé Beaudouin travaille principalement avec la for-mulation. Il cherche à exprimer les capacités naturelle-ment esthétiques du matériau. Le travail de formulation pour ce type de résultat consiste à ajuster la courbe granulométrique. Il utilise la technique même du matériau pour exhiber ses propres caractéristiques. Le projet architectural repose sur ce travail de formulation.

Phénomènes relevés - Influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton

cf. Expériences sur l’influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton.(huile de démoulage, bois brut, bois raboté, bois noueux, bois mouillé, bois sec, bois vieilli et attaqué par champignons)

- Phénomènes d’impressions, d’intrusions et d’incrustations imprévues. Les surfaces de béton frais sont soumises à l’intrusion de matières étrangères. Ces matières étrangères sont transmises au béton par les surfaces de coffrages- L’anticipation et le dessin du coffrage dans le projet.

- L’étape cruciale de la formulation. Chaque compo-sant peut avoir un impact considérable. La formu-lation va déterminer les caractéristiques et l’aspect visuel de la surface.cf. Expériences de teinte pour un même béton com-posé de granulats différents. (Jean Pierre Aury, plas-ticien des bétons)

Phénomènes sous jacents - Coffrage- Hydratation et teinte du béton- agents de démoulage

- Du liquide au solide: le béton prend la forme de son coffrage- Imprégnation et incrustations

- Granulats et colorimétrie- Le rôle de la formulation- Traitement après décoffrage

1. Tableaux d’analyse du corpus de bâtiments

Documents LM, Marne-La-Vallée, Octobre-Décembre 2011.

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Corpus de bâtiments

Nature des aspérités de la surface

Caractéristiques de la surfaceQue voit-on ?

Qualité du béton

Type de coffrage

Questionnement

Analyse de la surfaceComment est-elle obtenue ?

La surface dans le concept architectural

Phénomènes relevés

Phénomènes sous jacents

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Bruder Klaus Chapel, Peter Zumthor, Wachendorf, Allemagne, 2007.

Can Ricart Sports Center, Vora Arquitectura,Barcelone, Espagne,2006.

Mise en oeuvre (coulée et points d’accroche) Coffrage (nature des bois de coffrage)

- Traces des différentes coulées - Réinterprétation des points d’accroches du coffrage- Variations de teinte sans doute liées aux différents temps de prise du béton

- Traces du coffrage et impression de ses caractéris-tiques (coffrage bois)- Différentes teintes de gris entre les différentes parties construites en béton (clair et foncé)- Une partie du bâtiment est tachetée (nuances de gris)

Béton de site et artisanal: Il est composé d’éléments et de granulats du site et a été tassé et vibré à la main.

- Coffrage grimpant avec des coulées successives. - 50 coulées de 80 cm effectuées sur une durée de un an.

Coffrage bois et métal, matricé et fabriqué sur le chantier.

Le béton souvent critiqué pour son caractère froid et sans traits caractéristiques, devient ici par le travail de l’architecte une matière vivante, sensorielle qui semble nous raconter une histoire, son histoire, celle de sa fabrication. Comment expliquer le passage d’un matériau sans identité à la définition d’une architecture vivante ?

Qu’est ce qui détermine la texture et la variation de couleur des surfaces en béton apparent ?

- Un béton artisanal fait avec les matériaux environ-nants et vibré à la main. En compactant le béton à la main le mélange n’est pas totalement homogène ce qui explique des traces de ségrégation d’eau et de granulats.

- Les traces de coulées successives s’expliquent par l’utilisation d’un coffrage grimpant. Les coulures successives révèlent un temps de séchage.

- la nature du bois utilisé (humidité, dessin des veines, porosité, etc...)- le degré d’absorption du bois

En laissant le béton s’exprimer, en réinterprétant les traces induites et inévitables de sa mise en oeuvre, l’architecte fait du béton un relief vivifiant pour l’archi-tecture. Loin de sa froideur et de son côté statique, le matériau et sa mise en oeuvre deviennent expressifs. Ils racontent discrètement l’histoire d’une construction. L’architecte utilise les caractéristiques et la technicité du matériau comme procédés esthétiques.

Le rapport coffrage, coulées et conditions clima-tiques.On note sur la surface du béton de la chapelle différentes teintes. Elles correspondent à différentes conditions climatiques lors du séchage. L’atmosphère (allant de sèche à saturé d’humidité) a un impact considérable sur les tons et les vitesses de dessiccation.

- Influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton

cf. Expériences sur l’influence des coffrages en bois sur les surfaces de béton.(huile de démoulage, bois brut, bois raboté, bois noueux, bois mouillé, bois sec, bois vieilli et attaqué par champignons)

- Le temps de séchage- La vibration et le compactage- Le détournement des traces (points d’ancrage = vitraux)

- Coffrage- Hydratation et teinte du béton- agents de démoulage

Documents LM, Marne-La-Vallée, Octobre-Décembre 2011.

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Corpus de bâtiments

Nature des aspérités de la surface

Caractéristiques de la surfaceQue voit-on ?

Qualité du béton

Type de coffrage

Questionnement

Analyse de la surfaceComment est-elle obtenue ?

La surface dans le concept architectural

Phénomènes relevés

Phénomènes sous jacents

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Wohnunberbaunn Giardin, Mierta et Kurt Lazzarini,Samedan, Suisse, 2007.

Studio Rémy Zaug, Herzog et de Meuron, Mulhouse, France, 1996.

Mise en oeuvre (mise en place et vibration) Temporalités (béton et outrage du temps)

- Trace des différentes coulées- Différentes teintes de coulées- Ségrégations forte de chaque coulée- Différents types de granulat utilisés

- Traces de coulures- Coulures de teinte orangé qui semble évoquer la présence de métaux- Un mur qui semble révéler par les coulures orangées la présence d’une armature métallique- Un mur en béton lisse

Béton de site: Il est composé d’éléments et de granulats de la région. Une manière pour les architectes d’intégrer le bâtiment aux teintes de son environnement.

Béton porteur doté d’une armature métallique. Béton de couleur uniforme sans défauts apparents.

- Coffrage grimpant. Coulées succesives - Coffrage métallique lisse. - Coffrage de grands panneaux: 2m x 2m.

La façade stratifiée du bâtiment est un choix délibéré des architectes. En s’approchant, on constate une texture particulière des différentes coulées, représentant un phénomène propre au béton: la ségrégation. Aléas de la construction, elle consiste ici en un véritable parti pris. Il s’agit alors de comprendre une telle mise en oeuvre et l’impact structurel d’une telle action.

Béton brut dont la façade est volontairement marquée par le ruissellement de l’eau de pluie. Il s’agit alors de comprendre l’origine de ces marques et leur impact sur la durabilité et la solidité du bâtiment.On interrogera ensuite la place et la cohérence d’une telle manipulation avec le projet architectural.

- Des nids de cailloux marquent les déversements successifs de béton.

- Pour obtenir une surface lisse, le mélange doit être malaxé et compacté (cf. vibration). Dans ce cas il n’a apparemment pas été malaxé. = Parti pris des architectes

-Le béton a une faible teneur en mortier. La granulométrie particulière, la faible teneur en mortier et sa faible consistance permet aux différents types de granulats de se séparer.

- Absence de gouttière = facteur programmé des coulures sur la façade

- Les fibres d’acier = placées à la surface du béton elles sont attaquées par la corrosion, dès les premières infiltrations d’humidité. (Contrairement à la corrosion des armatures, celle des fibres métalliques et sans conséquence pour la durabilité du bâtiment.

Les architectes étaient à la recherche d’une texture vivante et d’une intégration harmonieuse avec les paysages environnants. Ils ont trouvé dans la matérialité du béton un moyen de donner vie à leur surface.Un travail orienté par de nombreux prototypes qui leur ont permis de répondre à leur ambitions esthétiques et aux nécessités physiques du bâtiment.

Exploitation d’un défaut de la construction béton dans le concept architectural. on détourne une pathologie du matériau. une manière de la contrôler.

Le traitement de la surface par les architecte est au coeur du projet architectural. Sans ce travail de façade

L’impact du travail de la formulation sur la texture du béton, la composition du béton (matériau hétérogène), et le rôle des prototypes dans la réalisation de manière à répondre aux attentes esthétiques et aux conditions physiques.

1. Phénomène de vieillissement et d’exposition du béton apparent aux intempéries.2. Anticipation des architectes sur les phénomènes de dégradation d’un bâtiment. Ils tirent parti d’un désagrément et en font un principe esthétique.

- Ségrégation- Vibration- Compacité et ouvrabilité - Granulats et colorimétrie

- Pollution- Usure- Exposition

Documents LM, Marne-La-Vallée, Octobre-Décembre 2011.

Ecole

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BÉTON NATURELcoffrage et pathologies

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nature et origine des traces Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Agents de démoulages

Propreté du coffrage

Marques et coffrage

Joints Coffrage et humidité

Outils Coffrage métalique

Coffrage en bois

Coffrage matricé

Coffrage matricé

. Empreinte Tige de maintien

. Coffrage bois

Phénomène Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Répartition non uniforme des agents de démoulage

Incrustations dans le coffrage

Empreinte des outils

Fuite de laitance

Différents degrés d’absorption du coffrage

Aspect visuel et toucher de la surface

Lisse et uniforme

Trace du coffrage et des clous d’assemblage

Trace du coffrage et relief

Coffrage dessiné avec des pleins et des vides (jeux de relief et lumière)

Lisse et aspect nuageux

Efflorescences dues à l’incrustation de corps étrangers

Impact visuel fort car unique élément en creux

Rugueux et aspect négligé de la surface

Différentes teintes à la surface du béton

Conséquence (durabilité et esthétique) . . . .

Toléré selon le degré de qualité du parement

Tolérées si peu nombreuses .

Non toléré pour un béton apparent de qualité

Tolérés selon le degré de qualité du parement

Type de trace Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé

Exemple contemporain Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Spedant work, Greenway and Lee

BÉTON TRAVAILLÉtraitements .

10 11 12 13 14 15 16 17 18

Nature et origine des traces Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement mécanique

Traitement mécanique

Traitement technique

Traitement technique

Traitement technique

Outil et procédé utilisé Marteler Piqué Bouchardé Strié Façonné Poli . Desactivé Retardateur de prise

Aspect visuel et toucher de la surface

Rugueux Rugueux Rugueux Rugueux Lisse et brillant . Rugueux mais régularité des granulats

Lisse pour la lai-tance, rugeux pour la partie désactivée

Conséquence (durabilité et esthétique) . . . . . . . . .

Type de trace Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné . Dessiné Dessiné

Exemple contemporain Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Musée et médiathèque de Lussac, Hervé Beau-douin

Bibliothèque d’Eberswalde, Herzog et de Meuron

BÉTON APPARENTpathologies et mise en oeuvre

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nature et origine des traces Nids de cailloux

Coulures Strates Bullage Porosité Faïençage Fissures Teinte Érosion

Phénomène Ségrégation Ségrégation, étanchéité

Mise en place Air Vieillissement de la surface

Rapport E/C ou nature du ciment

Fissuration et effritement

Aspect visuel et toucher de la surface

Poreux et granuleux

Contraste de la coulure avec le reste de la surface

Rugueux et efflorescences localisées

Poreux Rugueux et poreux

Rugueux et effritement de la laitance

Visibilité de la fissure

Différence de teinte

Poreux et visibilité de l’armature

Conséquence (durabilité et esthétique)

Non toléré Toléré Courant et toléré

Toléré selon le degré de qualité du parement

.Non toléré pour l’esthétique de la surface

Non tolérés Toléré selon le degré de qualité du parement

Non toléré, nécessite une réparation

Type de trace Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé

Exemple contemporain Wohnunber-baunn Giardin, Mierta et Kurt Lazzarini

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

Bruder Klaus Chapel, Peter Zumthor

Alive Panel,Juan Herreros

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

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BÉTON NATURELcoffrage et pathologies

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nature et origine des traces Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Agents de démoulages

Propreté du coffrage

Marques et coffrage

Joints Coffrage et humidité

Outils Coffrage métalique

Coffrage en bois

Coffrage matricé

Coffrage matricé

. Empreinte Tige de maintien

. Coffrage bois

Phénomène Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Répartition non uniforme des agents de démoulage

Incrustations dans le coffrage

Empreinte des outils

Fuite de laitance

Différents degrés d’absorption du coffrage

Aspect visuel et toucher de la surface

Lisse et uniforme

Trace du coffrage et des clous d’assemblage

Trace du coffrage et relief

Coffrage dessiné avec des pleins et des vides (jeux de relief et lumière)

Lisse et aspect nuageux

Efflorescences dues à l’incrustation de corps étrangers

Impact visuel fort car unique élément en creux

Rugueux et aspect négligé de la surface

Différentes teintes à la surface du béton

Conséquence (durabilité et esthétique) . . . .

Toléré selon le degré de qualité du parement

Tolérées si peu nombreuses .

Non toléré pour un béton apparent de qualité

Tolérés selon le degré de qualité du parement

Type de trace Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé

Exemple contemporain Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Spedant work, Greenway and Lee

BÉTON TRAVAILLÉtraitements .

10 11 12 13 14 15 16 17 18

Nature et origine des traces Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement mécanique

Traitement mécanique

Traitement technique

Traitement technique

Traitement technique

Outil et procédé utilisé Marteler Piqué Bouchardé Strié Façonné Poli . Desactivé Retardateur de prise

Aspect visuel et toucher de la surface

Rugueux Rugueux Rugueux Rugueux Lisse et brillant . Rugueux mais régularité des granulats

Lisse pour la lai-tance, rugeux pour la partie désactivée

Conséquence (durabilité et esthétique) . . . . . . . . .

Type de trace Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné . Dessiné Dessiné

Exemple contemporain Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Musée et médiathèque de Lussac, Hervé Beau-douin

Bibliothèque d’Eberswalde, Herzog et de Meuron

BÉTON APPARENTpathologies et mise en oeuvre

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nature et origine des traces Nids de cailloux

Coulures Strates Bullage Porosité Faïençage Fissures Teinte Érosion

Phénomène Ségrégation Ségrégation, étanchéité

Mise en place Air Vieillissement de la surface

Rapport E/C ou nature du ciment

Fissuration et effritement

Aspect visuel et toucher de la surface

Poreux et granuleux

Contraste de la coulure avec le reste de la surface

Rugueux et efflorescences localisées

Poreux Rugueux et poreux

Rugueux et effritement de la laitance

Visibilité de la fissure

Différence de teinte

Poreux et visibilité de l’armature

Conséquence (durabilité et esthétique)

Non toléré Toléré Courant et toléré

Toléré selon le degré de qualité du parement

.Non toléré pour l’esthétique de la surface

Non tolérés Toléré selon le degré de qualité du parement

Non toléré, nécessite une réparation

Type de trace Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé

Exemple contemporain Wohnunber-baunn Giardin, Mierta et Kurt Lazzarini

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

Bruder Klaus Chapel, Peter Zumthor

Alive Panel,Juan Herreros

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Nature du coffrage

Agents de démoulages

Propreté du coffrage

Marques et coffrage

Joints Coffrage et humidité

Coffrage métalique

Coffrage en bois

Coffrage matricé

Coffrage matricé

. Empreinte Tige de maintien

. Coffrage bois

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Empreinte du moule

Répartition non uniforme des agents de démoulage

Incrustations dans le coffrage

Empreinte des outils

Fuite de laitance

Différents degrés d’absorption du coffrage

Lisse et uniforme

Trace du coffrage et des clous d’assemblage

Trace du coffrage et relief

Coffrage dessiné avec des pleins et des vides (jeux de relief et lumière)

Lisse et aspect nuageux

Efflorescences dues à l’incrustation de corps étrangers

Impact visuel fort car unique élément en creux

Rugueux et aspect négligé de la surface

Différentes teintes à la surface du béton

. . . .Toléré selon le degré de qualité du parement

Tolérées si peu nombreuses .

Non toléré pour un béton apparent de qualité

Tolérés selon le degré de qualité du parement

Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Vitra Conference Pavilion, Tadao Ando

Spedant work, Greenway and Lee

.

10 11 12 13 14 15 16 17 18

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement manuel

Traitement mécanique

Traitement mécanique

Traitement technique

Traitement technique

Traitement technique

Marteler Piqué Bouchardé Strié Façonné Poli . Desactivé Retardateur de prise

Rugueux Rugueux Rugueux Rugueux Lisse et brillant . Rugueux mais régularité des granulats

Lisse pour la lai-tance, rugeux pour la partie désactivée

. . . . . . . . .

Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné Dessiné . Dessiné Dessiné

Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Magma Arte et Congresos, F. Menus, F.A. Rufino

Musée et médiathèque de Lussac, Hervé Beau-douin

Bibliothèque d’Eberswalde, Herzog et de Meuron

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Nids de cailloux

Coulures Strates Bullage Porosité Faïençage Fissures Teinte Érosion

Ségrégation Ségrégation, étanchéité

Mise en place Air Vieillissement de la surface

Rapport E/C ou nature du ciment

Fissuration et effritement

Poreux et granuleux

Contraste de la coulure avec le reste de la surface

Rugueux et efflorescences localisées

Poreux Rugueux et poreux

Rugueux et effritement de la laitance

Visibilité de la fissure

Différence de teinte

Poreux et visibilité de l’armature

Non toléré Toléré Courant et toléré

Toléré selon le degré de qualité du parement

.Non toléré pour l’esthétique de la surface

Non tolérés Toléré selon le degré de qualité du parement

Non toléré, nécessite une réparation

Maculé Maculé Dessiné Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé Maculé

Wohnunber-baunn Giardin, Mierta et Kurt Lazzarini

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

Bruder Klaus Chapel, Peter Zumthor

Alive Panel,Juan Herreros

Atelier Rémy Zaugg,Herzog et de Meuron

2. Tableaux d’observation et d’analyse des surfaces de béton apparent

Documents LM, Marne-La-Vallée, Juillet-Aout 2011.

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Page 84: Le béton apparent et la recevabilité de territoires d'auteurmes.marnelavallee.archi.fr/mes/072011355.pdf · à Marne-la-Vallée Document soumis au droit d'auteur. Lucille Mazy

Causes

Composition du béton

trop maigre

trop gras

trop fluide

trop raide

Mise en oeuvre

mise en place

trop vibré

pas assez vibré

Coffrage

non étanche

instable

perméable

épais/lisse

chimiquement actif

produits de démoulages

.

Vieillissement

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Causes Nids de cailloux

Nids de sable

Pertes de sable

Coulures Bulles d’air

Perte de la peau de

ciment

Fissure de tasse-

ment

Faïençage Traces diverses

Porosité

Compo-sition du béton

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

trop maigre

. . . . . . .

trop gras

. . . . . . . . .

trop fluide

. . . .

trop raide

. . . . . . .

Mise en oeuvre

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

mise en place

. . . . . . .

trop vibré

. . . . . . .

pas assez vibré . . . . . . .

Coffrage 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

non étanche

. . . . . .

instable

. . . . . . . .

perméable

. . . . . . .

épais/lisse

. . . . . . . .

chimique-ment actif . . . . . . .

produits de démoulages . . . . . .

.1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Vieillisse-ment . . . . . . . .

3. Tableau synoptique des effets sur l’aspect des surfaces de béton apparent

Documents LM, Marne-La-Vallée, Juillet-Aout 2011.

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1074. Tableau d’expérimentations de Sonya Lee pour le Visitor Center Darwin D.House

1 2 3

Mélange 4000 psi ordinaire béton autoplaçant béton autoplaçant,moins de sable et plus de cendres volantes.

Huile de démoulage Aucune Utilisation d’eau sur la surface de la matrice

huile de cuison

Vibration Interne Légère Côté gauche frappé avec un marteau

Observations Utilisation du côté ordi-naire du coffrage

Coffrage retourné pour avoir une finition lisse

Coffrage retourné pour retrouver l’aspect original de celui-ci

Validé / Abandonné Abandonné Abandonné Abandonné

Résultats Fini granuleux et nid de cailloux

Fini rugueux, grosse quantité de nid de cailloux et forte laitance

Ton plus léger, moins consistant, grand quantité de nid de cailloux et de laitance

4 5 6

Mélange 4000 psi avec un superplastifiant (pour le rendre plus liquide)

béton autoplaçant béton autoplaçant

Huile de démoulage Quatre type d’huiles:huile ordinaire, huile de cuisson, ....

huile de cuison sur la gauche et rien surla droite

huile ordinaire

Vibration Puissante et interne tous les 25,4 cm

Interne et uniquement sur le côté gauche

Puissante et interne

Observations Utilisation du côté lisse du coffrage

Utilisation du côté lisse du coffrage

....

Validé / Abandonné Validé mais non selectionné Validé mais non selectionné Validé mais non selectionné

Résultats Rendu lisse et brillant avec réduction de nid de cailloux

Petites bulles d’air à l’intérieur des nervures

Fini rugueux sur le côté gauche et grande quantité de nid de cailloux à droite

4.1 Tableau des bétons abandonnés

4.2 Tableau des bétons validés mais non utilisés

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109

Tectonic visions in architecture, Copenhagen, Kunstakademiets Arkitekskoles, 2004.Traduction LM, Marne-la-Vallée, septembre 2011.

7 8

Mélange 4000 psi avec un superplas-tifiant

4000 psi avec un superplas-tifiant

Huile de démoulage huile ordinaire huile ordinaire

Vibration Puissante et interne Vibré une première fois à 50 cm puis une seconde fois.

Observations Recouvert de bande de bois, fine ficelle dans les cannelures

...

Validé / Abandonné Validé Validé

Résultats Discrètes bulles d’air à la surface du béton etfini lisse

Bulles d’air encore visible

4.2 Tableau des bétons validés et surface réalisée

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