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LES ZONES-CIBLES BADMINTON Le badminton est aujourd'hui totalement intégré aux contenus d'enseignement d'EPS. Sans nul doute cette APS correspond-elle au besoin de renouvellement des pratiques. Les modes d'approches sont nombreuses, diversifiées et permettent d'offrir un large éventail de propositions techniques et péda- gogiques pour entrer dans l'activité ou se perfectionner (*). PAR J. GAUVIN Le but du jeu consiste à faire tomber le volant dans le camp adverse ; nous comparons donc le terrain de badminton à un espace dans lequel il s'agit de viser des zones-cibles au sol. A partir de cette notion, nous cherchons à mettre en oeuvre une stratégie de « transformation » et proposons un outil d'évaluation. LOGIQUE DU JOUEUR Elle s'organise de manière différente selon six niveaux que nous avons établis. Niveau 1 Le volant constitue le centre de fixation de l'at- tention du joueur : absence de coordination entre la trajectoire du volant et celle de la raquette. L'élève frappe d'un bloc, sans dissociation seg- mentaire : il réduit le geste afin de diminuer l'in- certitude. Il aligne l'oeil et la raquette. Certains sont plus à l'aise pour frapper en revers. Le sujet se trouve en situation de risque. Niveau 2 L'élève se place dans une logique de l'échange. Il a plaisir à faire voler le volant. Il se déplace pour prendre les volants dans l'espace proche mais ne bouge pas sur ceux qui sont éloignés de lui. Les frappes sont hautes. Le sujet se trouve en situation de sécurité. Niveau 3 La situation correspond à celle du duel ; l'élève veut marquer en touchant l'autre, par un volant rapide et frappé fort. Il se déplace sur tout le ter- rain ; parfois il est même emporté par son élan. Il s'organise pour frapper. Le sujet se trouve en situation de risque. Niveau 4 La logique est ici celle de l'affrontement avec une recherche de l'utilisation des fautes et des points faibles de l'adversaire. L'élève se déplace pour jouer et se replace après les coups. Il peut frapper le volant dans des situations difficiles mais le renvoie alors au milieu du terrain. Le sujet se trouve en situation de risque. Niveau 5 Logique d'affrontement au cours de laquelle l'élève gère la rencontre. Il cherche à provoquer les fautes de l'adversaire. Les déplacements sont équilibrés. Il effectue des choix anticipatoires d'attaque ou de défense. Le sujet alterne sécurité et risque. Niveau 6 L'élève cherche à ne pas se mettre en position de faiblesse mais à dominer la rencontre et la gérer. Il s'adapte au jeu de l'adversaire. Ses déplace- ments sont économiques. Il renvoie le volant et se replace durant la frappe. Le sujet gère la sécurité et le risque. Placer les volants sur les zones matérialisées. PHOTO : MARC BEAUDENON PHOTO : AUTEUR EPS N° 252 - MARS-AVRIL 1995 13 Revue EP.S n°252 Mars-Avril 1995 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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Page 1: Le badminton est aujourd'hui totalement LES ZONES-CIBLES d

LES ZONES-CIBLES BADMINTON

Le badminton est aujourd'hui totalement intégré aux contenus d'enseignement d'EPS. Sans nul doute cette APS correspond-elle au besoin de renouvellement des pratiques. Les modes d'approches sont nombreuses, diversifiées et permettent d'offrir un large éventail de propositions techniques et péda­gogiques pour entrer dans l'activité ou se perfectionner (*).

PAR J. GAUVIN Le but du jeu consiste à faire tomber le volant dans le camp adverse ; nous comparons donc le terrain de badminton à un espace dans lequel il s'agit de viser des zones-cibles au sol. A partir de cette notion, nous cherchons à mettre en œuvre une stratégie de « transformation » et proposons un outil d'évaluation.

LOGIQUE DU JOUEUR

Elle s'organise de manière différente selon six niveaux que nous avons établis.

Niveau 1 Le volant constitue le centre de fixation de l'at­tention du joueur : absence de coordination entre la trajectoire du volant et celle de la raquette. L'élève frappe d'un bloc, sans dissociation seg-mentaire : il réduit le geste afin de diminuer l'in­certitude. Il aligne l'œil et la raquette. Certains sont plus à l'aise pour frapper en revers. Le sujet se trouve en situation de risque.

Niveau 2 L'élève se place dans une logique de l'échange. Il a plaisir à faire voler le volant. Il se déplace pour prendre les volants dans l'espace proche mais ne bouge pas sur ceux qui sont éloignés de lui. Les frappes sont hautes. Le sujet se trouve en situation de sécurité.

Niveau 3 La situation correspond à celle du duel ; l'élève veut marquer en touchant l'autre, par un volant rapide et frappé fort. Il se déplace sur tout le ter­rain ; parfois il est même emporté par son élan. Il s'organise pour frapper. Le sujet se trouve en situation de risque.

Niveau 4 La logique est ici celle de l'affrontement avec une recherche de l'utilisation des fautes et des points faibles de l'adversaire. L'élève se déplace pour jouer et se replace après les coups. Il peut frapper le volant dans des situations difficiles mais le renvoie alors au milieu du terrain. Le sujet se trouve en situation de risque.

Niveau 5 Logique d'affrontement au cours de laquelle l'élève gère la rencontre. Il cherche à provoquer les fautes de l'adversaire. Les déplacements sont équilibrés. Il effectue des choix anticipatoires d'attaque ou de défense. Le sujet alterne sécurité et risque.

Niveau 6 L'élève cherche à ne pas se mettre en position de faiblesse mais à dominer la rencontre et la gérer. Il s'adapte au jeu de l'adversaire. Ses déplace­ments sont économiques. Il renvoie le volant et se replace durant la frappe. Le sujet gère la sécurité et le risque.

Placer les volants sur les zones

matérialisées.

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D É M A R C H E ET C O N T E N U S D ' E N S E I G N E M E N T

Il faut faire entrer aussitôt que possible l'élève dans l'activité par une situation d'affrontement en 1 contre I ou 2 contre 2 (coopération).

Situation de référence Celte situation, qui dénature au minimum la lo­gique et les fondamentaux de l'activité, permet d'analyser les conduites motrices, de repérer les niveaux et les manques dans le but de déceler les conduites typiques et d'élaborer le travail des élèves. A l'issue de cette évaluation diagnostique, nous pouvons mettre en place : - des situations-problèmes, l'élève tente de trou­ver la ou les solutions ; - des situations d'apprentissage, permettant l'émergence de ce qu'il faut perfectionner. A tout moment, il sera possible en fonction des besoins de construire des situations de remédia­tion (situation plus simple ou plus complexe). Nous avons pu constater que la majorité des vo­lants se trouve au milieu du terrain. Aussi, nous abordons ici deux thèmes de travail : l'un qui uti­lise la longueur du terrain, l'autre la largeur.

Thème 1 : maîtrise de l'envoi en profondeur

Situation de référence Jeu Je 3 lois 5 minutes avec des adversaires dif­férents sur un demi-terrain dans le sens de la lon­gueur et la zone latérale de double. Ce demi-ter­rain est lui-même divisé en 6 zones qui correspondent aux différents endroits où peut tomber le volant, dans le filet, sur ou hors du ter­rain (schéma 1). Constat : la majorité des volants est au milieu du terrain.

Analyse Les joueurs sont dans une logique d'échanges : ils se renvoient les volants sans chercher à mettre l'autre en difficulté. Moyens : amortir, contre amortir et dégager.

Situation problème Sur un demi-terrain, matérialiser des zones dans lesquelles il faut envoyer le volant. Tous les vo­lants en dehors de celles-ci sont considérés com­me fautes.

Situation d'apprentissage Sur un demi-terrain, matérialiser des zones que le joueur « A » doit viser comme cibles ; au fond du terrain (dégagement), derrière le filet (amorti) (schéma 2). Il est possible d'imposer les cibles : - « A » ne doit renvoyer que dans la zone juste derrière le filet. - « A » ne doit renvoyer qu'au fond du terrain. Le joueur « B » joue le rôle d'un entraîneur ren-voveur. « A » est en situation facile par rapport aux conditions de match. Il peut aussi faire déplacer « A » en lui renvoyant des volants au filet ou en taisant des dégage­ments.

Situation d'évaluation Idem situation de référence mais les zones sont affectées d'un coefficient (fiche). En addition­nant tous les impacts, on obtient le nombre d'ac­tions effectuées. Exemple : un élève envoie 3 volants hors des li­mites. 4 qui ne passent pas dans le camp adverse. I qui va dans le filet. 1 dans le couloir de double. 7 dans la zone centrale. 6 amortis et 4 en déga­gement : cela correspond à un total de 26 actions. Cette note obtenue à partir de la grille d'évalua­tion traduit les capacités « techniques » et l'in­tention tactique du joueur.

Notation En multipliant le nombre de volants de chaque zone par le coefficient qui lui est affecté, on ob­tient un nombre de points. Pour obtenir une note sur 20. il s'agit alors de multiplier ce nombre de points par 20 et de divi­ser par le nombre d'actions :

points x 20 / nombre d'actions.

Exemple : pour le même élève que précédem­ment. 7 volants en zone à 0 points. 2 à 0.4 points. 7 à 1 point. 10 à 1,1 point donne un total de 18,8 points. Sa note sur 20 sera :

18,8 x 20/26 = 14,4. Le coefficient de performance (0.7 à 1,2) est ob­tenu par un classement des élèves à l'issue des matchs effectués au cours du cycle. Ce tournoi peut avoir lieu sous forme de tour­nante et au temps : par exemple : jeu sur 5 min., les élèves qui ont gagné « montent » vers le ter­rain n° 1, les autres « descendent ».

L'attribution des coefficients dépend du nombre d'élèves : pour 24 élèves, comme il y a 6 coeffi­cients, les quatre premiers obtiennent 1.2 ; les quatre suivants 1,1 ; etc.

1 - Zones d'impact 2 - Placements dans l'axe avant-arrière

Fiche : Evaluation des zones d'impact

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Thème 2 : maîtrise latérale avant et arrière

Situation de référence Jeu sur tout le terrain 3 fois 5 minutes, avec des partenaires différents. Le décompte des points peut se faire de façon réglementaire c'est-à-dire qu'il faut posséder le service pour marquer. Constat : il y a très peu de volants le long des bords latéraux. Ils sont situés soit au fond du court, soit près du filet.

Analyse La maîtrise en profondeur est mieux assimilée que la maîtrise latérale. Moyens : contre-amortis directs et croisés, déga­gements directs et croisés, placements du volant le long des lignes latérales.

Situation problème 1 contre 1 sur tout le terrain. Matérialiser des zones cibles sur lesquelles il faudra jouer (amor­tis latéraux et dégagements latéraux). Ces zones sont de plus en plus petites au fur et à mesure que l'élève progresse.

Situation d'apprentissage Sur un demi-terrain en largeur : « A » doit faire déplacer son adversaire en envoyant les volants à droite et à gauche (schéma 3) : - le long du filet ; - au fond du terrain ; - le long du filet, ou au fond du terrain (déplace­ments latéraux et avant-arrière). Le joueur qui renvoie peut avoir la consigne de viser le « lanceur ». une zone précise proche du filet ( 1 ou 2) ou au fond du terrain (3 ou 4).

Situation d'évaluation Idem thème 1.

Notation Idem thème 1.

ÉVOLUTION DES ZONES-CIBLES

Les zones-cibles peuvent être interprétées en dé­finissant des zones interdites dans une perspecti­ve de difficulté croissante.

Travail du dégagement D'une zone large vers une zone restreinte en pas­sant par une zone moyenne (schémas 4).

Différenciation dégagement/amorti D'une zone large vers une zone restreinte en pas­sant par une zone moyenne (schémas 5).

CONCLUSION

Après avoir décliné six niveaux de jeu. caracté­ristiques des comportements des élèves, nous avons centré notre démarche sur l'aspect spatial et plus particulièrement le placement des volants dans des zones-cibles. Plus que l'analyse des composantes de l'action motrice, c'est le résultat de l'action qui a été pris en compte. L'objectif de la procédure de transformation des conduites motrices est de placer l'élève dans des situations qui l'intéresse car signifiantes pour lui. Par des contraintes de plus en plus précises, il s'agit de l'amener à prendre conscience d'une nouvelle logique de comportement et la mettre en œuvre.

Joël Gauvin Professeur EPS, collège de l'oasis.

Le Port. Ile de la Réunion.

(*) Cf. EP.S » n° 248. juil.-août 1994. n° 250 nov.-déc 1994.

Remerciements pour leur aide à Nadia Valoff et Pierre Fratani, collègues professeurs agrégés et aux responsables MAFPEN, île de la Réunion.

Références bibliograhiques : G. Couartou et F. Grunenfelder : Badminton, initiation au collège : Revue EPS n° 213. G. Fernandez : Badminton et programme d'EPS : Revue EPS n° 229. .1. Dugal : Tennis, analyse et traitement didactique des APS : Revue EP.S n° 230. E. Mansuy : Badminton, le service ; Revue EP.S n° 233. H. Mansuy : Badminton, les prises de raquette ; Revue EP.S n° 237. E. Louis : Tennis, tennis de table, badminton, traitement di­dactique transversal : Revue EP.S n° 242. Cl. Pineau et A. Hébrard : Schéma directeur du programme d'EPS ; Revue EP.S n° 247. L. Sologub el K. Fusch : Badminton, éd. R. Laffont. E. Mansuy : Badminton, éd. Amphora. 11. Louchart : Le badminton au collège, document d'auteur. G. Couartou, F. Grunenfelder et F. Hoste Mahaux : L.U.C. badminton, document d'auteurs.

Terrain en jeu simple : 5,10 m sur 13,40 m. Terrain en double : 6,10 m sur 13.40 m. Hauteur du filet : 1,55 m sur les bords et 1,52 m au milieu. Décompte des points : comme au volley, il faut gagner le service avant de marquer un point. Jeu gagnant : - pour les filles, 11 points : - pour les hommes et les doubles. 15 points. Prolongations éventuelles : - pour les filles, 9 à 9, prolongation de 3 points ; 10 à 10 prolongation de 2 points : - pour les hommes et pour le double ; 13 à 13 prolongation de 5 points, 14 à 14 prolon­gation de 3 points.

3 - Placements latéraux

4 - Dégagements : difficultés croissantes

5 - Différenciation entre dégagements et amortis

Alternance jeu en fond de court et

amorti.

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EPS N° 252 - MARS-AVRIL 1995 15 Revue EP.S n°252 Mars-Avril 1995 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé