lde 145
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La lettre des élusTRANSCRIPT
Le mensuel d’information des élus étudiants
SOMMAIRE Edito
Association pour la Formation des Elus Etudiants
unef.fr
Une publication mensuelle de l’UNEF et de l’APFEE. N° de Commission Paritaire : 0108G82659 - ISSN : 1761-1547 — Directeur de publication : Anna MELIN Rédacteurs en chef : Annabelle JANODET, Salomé MERLO — courriel : [email protected] — Tél : 01 42 02 25 55 — Impression : imprimerie Grenier RCS Créteil B 622.053.189
APFEE
Actualités locales
Fiche pratique
Préparer un CA budgétaire
Interview
Ligia DECA, présidente de l’ESU
Dossier
Budget 2009 : un budget de renoncement
p. 7 p. 4 - 5
p. 2
p. 3
p. 6
Actualités nationales
Aides sociales
• Versailles Saint-Quentin : Maintien du contrôle continu
• Paris 4 : Le retour de la compensation annuelle
• Contrat doctoral : un danger pour les jeunes chercheurs
• Mobilisation étudiante en Italie
• Rapport Lambert : un rapport dangereux
Bonjour à tous,
Le budget de l’enseignement supérieur et de la Recherche est actuellement discuté au Parlement. Le PLF 2009 marque avant tout le renoncement de la ministre à tenir ses promesses, dans un contexte marqué par la crise finan-cière et sociale. Alors que les étudiants seront ceux qui subiront le plus les conséquences de la crise, c’est-à-dire un chômage de masse et une forte dé-qualification, le gouvernement choisi d’aggraver la situation, par un budget qui ne répond pas aux enjeux de la période.
L’enseignement supérieur n’est pas un cas isolé. Toute l’Education est aujourd’hui victime des politiques du gouvernement : 13 500 postes suppri-més dans l’Education Nationale, suppression des RASED, réforme du lycée… C’est pour demander au gouvernement de remettre la priorité à l’Education que l’ensemble de la communauté éducative est descendue dans la rue le 19 octobre et le 20 novembre, réunissant respectivement 80 000 et 220 000 per-sonnes. Il est temps que le gouvernement entende nos revendications.
La Lettre des Elus revient sur la question du budget dans son dossier. Nous consacrons également notre fiche pratique sur le vote du budget dans les conseils d’administration, afin que chaque élu puisse disposer des outils pour agir sur cette question.
Malgré ce contexte de pénurie budgétaire, les élus « UNEF et associations étudiantes » continuent de se battre dans les conseils pour faire entendre la voie des étudiants. Deux mois après la rentrée, les victoires sont au rendez vous : retour de la compensation annuelle à la Sorbonne et mise en place du contrôle continu non pénalisant à l’UVSQ.
Enfin, la Lettre des Elus donne la parole à Liega DECA, prési-dente de l’ESU (European Students Union), pour nous donner le point de vue des étudiants en Europe.
Bonne lecture,Annabelle JANODET,
élue au CNESER
p. 8
N° 145 - Octobre 2008 - 0,15 Euros
2 La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Maintien du contrôle continu à l’université de Versailles St Quentin
Actualités localesUniversité Versailles Saint Quentin. Suite à la mobilisation des élus « UNEF et associations étudiantes », le contrôle continu non pénalisant a été maintenu dans la réglementation des examens.
En baisse
220 000 euros pour repérer les leaders d’opinion…
Xavier Darcos et Valérie Pécresse ont
respectivement chacun engagé 100 000 et 120
000 euros pour « repérer les leaders d’opinion,
les lanceurs d’alerte, et analyser leur potentiel
d’influence et leur capacité à se constituer en
réseau.» On voit qu’elles sont les priorités du
gouvernement…
En hausse220 000 personnes dans la rue le 20 novembre pour l’éducation
A l’appel des syndicats de l’éducation, plus de
220 000 manifestants ont défilé dans les rues
de nombreuses villes pour dénoncer la politi-
que éducative du gouvernement et défendre le
service public d’éducation. Parmi eux, plus de
20 000 étudiants.
Suite à la mise
en place de la
réforme LMD en
2003, l’Université
Paris Sorbonne
(Paris IV) avait
fait le choix de re-
venir sur un droit
étudiant majeur
en supprimant la
compensation an-
nuelle. Les élus «
UNEF et associa-
tions étudiantes » ont enfin obtenu son retour.
A l’occasion des élections aux conseils
centraux, les élus « UNEF et associations
étudiantes » ont mis la revendication du
retour de la compensation annuelle au
cœur de leur campagne électorale. Pour
appuyer notre demande auprès de l’uni-
versité nous avons également fait appel
au soutien des étudiants par le biais de
pétitions. En effet, les élus « UNEF et as-
sociations étudiantes » défendent la com-
pensation annuelle car elle est le meilleur
moyen de prendre en compte le progrès de
chaque étudiant, pendant toute l’année. Il
nous paraît également absurde de refuser
à un étudiant de valider son année, alors
qu’il aurait obtenu la moyenne sur l’année.
Nos élus ont obtenu la mise en place de grou-
pes de travail sur les modalités de contrôle
de connaissance, où nous avons participé à
l’ensemble des discussions. Durant les dé-
bats en CEVU, les élus « UNEF et associa-
tions étudiantes » se sont battus pour faire
proposer la compensation annuelle au CA.
Au final, elle a été votée à l’unanimité par le
conseil d’administration le 3 octobre 2008.
Philippine BRYGO,
élue au CA l’université Paris 4
Rétablissement de la compensation annuelle à la Sorbonne.
MCC. Les élus « UNEF & associations étudiantes » obtiennent le retour de la compensation annuelle à Paris IV.
A la rentrée, la présidence de l’université de
Versailles St Quentin a voulu s’attaquer aux
droits étudiants lors des examens en révisant
les modalités de contrôle des connaissances.
Elle a voulu supprimer le contrôle continu non
pénalisant obtenu l’année dernière par les élus
« UNEF et associations étudiantes ». Vos élus
avaient réussi à faire inscrire dans le règlement
des examens de l’université la prise en compte
des notes du contrôle continu dans le calcul de
la moyenne que si celles-ci étaient supérieures
à la note des examens terminaux. Ce dispositif
permet de prendre en compte la progression de
l’étudiant tout au long du semestre et évite les
notes avec un effet « couperet ».
Face à la volonté de l’université, les élus
« UNEF et associations étudiantes » se sont
mobilisés pour que ce mode d’évaluation soit
maintenu. Ils ont mené une campagne de pé-
titions et obtenu le soutien de plusieurs mil-
liers d’étudiants. Le jour du vote des modalités
d’examen, vos élus ont organisé un rassemble-
ment devant le conseil d’administration. Face
à la mobilisation des étudiants, la présidence
de l’université n’a eu d’autres choix que de reti-
rer son projet et de laisser en place le contrôle
continu non pénalisant.
Benoît Soulier, élu au CA de
l’Université Versailles-Saint QUentin
Brèves du CNESER
CNESER du 20 octobre 2008.
Avis négatif pour la fusion de l’ENE-
SAD et de l’ENSBANA
Lors de la séance du 20 octobre, le
CNESER a rejeté le projet de fusion de
deux écoles d’ingénieurs à Dijon : l’ENE-
SAD et l’ENSBANA. Notamment parce
que dans les instances du nouvel établis-
sement, les représentants des étudiants
étaient sous représentés (2 membres sur
28 au conseil d’administration).
Résultat du vote : 4 abstention 9
contre et 5 pour
Adoption d’une motion sur la réforme
de la formation des enseignants
Lors de cette même séance, le CNE-
SER a adopté une motion sur la réforme
de la formation des enseignants. Cette
motion très largement adoptée et signée
par l’UNEF, le SNESUP, l’UNSA et la CGT,
dénonce le calendrier de la réforme et
demande un moratoire sur le dépôt des
maquettes des Masters préparant au
concours de l’enseignement. Le minis-
tère a transmis aux établissements une
circulaire demandant aux universités de
remettre leur projet de maquette pour la
fin décembre laissant moins de 2 mois
aux universités pour les préparer.
Union Européenne. Les étudiants italiens se mobilisent face à une réforme rétrograde des universités.
3La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Actualités nationales
Valérie Pécresse vient d’annoncer la suppres-
sion du monitorat et des allocations recherches,
leur substituant un contrat unique signé entre
chaque doctorant et son université. Cela signifie
que les financements des thèses ne seront plus
attribués directement par le ministère, mais par
chacune des universités, après négociation avec
le doctorant.
La mise en place de ce contrat ne répond pas
au besoin d’un statut pour les jeunes chercheurs,
désengage l’Etat de ses responsabilités et risque
de creuser les inégalités entre universités et filiè-
res.
Un renforcement des inégalités entre les universités et entre les étudiants
Aujourd’hui le système des allocations recher-
che, bien qu’imparfait, permettait une répartition
entre les universités et les filières et garantissait
un rôle moteur dans le pilotage de la recherche à
l’Etat. Avec ce nouveau contrat ce sont désormais
les universités qui vont piloter la recherche et ré-
partir les financements pour les doctorants non
pas en fonctions des intérêts pour toute la société
mais en fonction de leurs intérêts propres.
De plus le contrat doctoral sera un contrat «
à la carte », dont les missions seront variables.
Cela risque d’accroître les inégalités entre les
doctorants.
Une mauvaise solution pour un vrai problème
Le contrat doctoral ne répond pas aux attentes
des doctorants. Ceux-ci ont besoin d’un véritable
sttut leur permettant de faire leurs recherches
dans de bonnes conditions.
Aujourd’hui, 40% des doctorants abandonnent
leurs travaux en cours d’études faute de finance-
ment suffisants. Les élus « UNEF et associations
étudiantes » demandent des mesures pour ga-
rantir un financement de toutes les thèse :
* Création d’un statut du doctorant garantis-
sant les droits du doctorant (conditions de travail,
financement...)
* Doublement du nombre d’allocations de re-
cherche
* Donner une valeur contraignante à la charte
des thèses.
Florent Voisin,
élu au CNESER
Recherche. La création du contrat doctoral risque d’accroître les inégalités entre les doctorants.
Le mouvement des étudiants italiens pour la défense du service public
Le manque de financement de l’enseignement
supérieur n’est pas une problématique unique-
ment française, mais touche un certain nombre
de pays de l’Union Européenne. En Italie, des
dizaines de milliers d’étudiants, aux côtés des en-
seignants, sont mobilisés contre la réforme dite
Gelmini, du nom de la ministre de l’Education.
Les élus « UNEF et associations étudiantes »
partagent les inquiétudes des étudiants italiens,
qui font échos aux 900 suppressions de postes
dans l’enseignement supérieur français, et à un
budget de pénurie.
En effet, la réforme Gelmini présente trois dis-
positions dangereuses.
1. Le budget public des universités doit être
réduit de 25% sur les cinq prochaines années,
soit une coupe budgétaire de 60 milliards d’euros
annuels.
2. Un départ à la retraite sur cinq ne sera pas
remplacé.
3. Les universités auront la possibilité de fixer
elles-mêmes leurs frais d’inscription.
En même temps, les syndicats du primaire et
du secondaire se mobilisent contre les coupes
budgétaires et les suppressions de postes. La
Ministre souhaite également revenir au model de
l’enseignant unique par classe, réintroduire les
notes de comportement, et réintroduire le port de
« Contrat doctoral » : un contrat dangereux
la blouse d’écolier, tout en abaissant l’âge de la
scolarité obligatoire de 16 à 14 ans.
La mobilisation italienne grandit de jour en jour.
Elle rassemble des millions d’étudiants, d’ensei-
gnants et de citoyens en manifestation, et reçoit
un fort écho dans l’opinion publique avec près de
50% d’opinions favorable. Malgré cela, la ministre
persiste et a déclaré que « la loi passera », et que
les manifestants restent minoritaires.
Damien Ramage
Toutes les infos sont sur http://www.udu.it/
4 La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
DossierBudget 2009. Alors que la crise financière fait rage, le gouvernement fait le choix d’hypothéquer l’avenir des jeunes et des étudiants, en n’investissant pas dans l’Education et dans l’Enseignement Supérieur.
Un budget de renoncement qui ne répond pas aux priorités des étudiants
Le projet de loi de finance 2009, intervient
dans un contexte particulier. Contexte de crise
financière qui rend les orientations budgétai-
res du gouvernement caduques. Contexte
d’augmentation « affichée » des moyens de
l’enseignement supérieur, sur laquelle la mi-
nistre insiste pour faire la démonstration de la
bonne application des promesses de camap-
gne du président de la République.
Les élus « UNEF et associations étudiantes
» considèrent que ce budget 2009 n’est pas
à la hauteur des déclarations de Valérie Pé-
cresse. Alors que les étudiants connaissent
une nouvelle dégradation de leurs conditions
de vie et d’études, le budget est loin de faire
de l’enseignement supérieur une priorité. Il ne
fait ni de l’université, ni du diplôme, ni des qua-
lifications, ni de la recherche et de l’innovation,
les réponses nécessaires à un contexte écono-
mique difficile pour les jeunes. Pourtant, face à
la future montée du chômage, l’Education et le
diplôme restent les meilleures armes pour les
jeunes pour s’insérer durablement sur le mar-
ché du travail.
Pour les élus «UNEF et associations étu-
diantes », le budget ne sert aujourd’hui qu’à ag-
graver les inégalités dans l’enseignement su-
périeur, c’est un budget de renoncement, bien
loin des discours optimistes et volontaristes de
En décembre 2007, Nicolas Sarkozy a an-
noncé l’investissement de 5 milliards d’euros
pour financer un plan de rénovation des cam-
pus universitaire. Un an plus tard, les som-
mes prévues dans le projet de loi de finance
2009.
Etape 1 : 5 milliards d’euros pour
seulement 10 campus
Quelques jours, après l’annonce du Prési-
dent de la République, Valérie Pécresse an-
nonce que le plan de rénovation ne concer-
nera que 10 projets alors que plus d’un tiers
des locaux universitaires sont dans un état
très dégradé.
Etape 2 : 1,3 milliard d’euros s’envolent
Alors que Nicolas Sarkozy s’était engagé à
investir 5 milliards d’euros, seuls 3,7 milliards
d’euros ont pu être dégagés par la vente des
L’Opération Campus fait « pschitt »
la ministre, et ce pour plusieurs raisons.
De lourdes menaces sur l’exécution de certaines mesures
Un certain nombre de mesures annoncées
l’année dernière par a ministre n’ont pas les
moyens d’être financées pour 2009. L’exemple
le plus parlant est celui du logement : le gou-
vernement avait promis 5000 constructions de
logements universitaires dans le cadre du plan
Anciaux, mais seuls 4 200 sont financés dans
le budget. La ministre ne pourra pas non plus
tenir ses engagements sur le plan campus. Sur
les 5 milliards oqui nt été annoncés, ce sont
seulement 160 000 millions qui seront vérita-
blement débloqués en 2009 (voir encadré).
La ministre refuse de tenir ses engagements auprès des étudiants.
Les élus « UNEF et associations étudiantes »
s’étaient investis pour obtenir des pouvoirs pu-
blics l’application du plan « réussite en Licence
», ainsi qu’un plan d’action sociale pluriannuel
pour l’amélioriation des conditions de vie. Dans
son projet de budget 2009, la ministre renonce
à tenir ses engagements. Les crédits cumulés
sur 2009-2011 pour la vie étudiante (250 mil-
lions) ne permettront même pas d’augmenter
les bourses à la rentrée prochaine.
Les moyens annoncés pour le plan licence
ne sont également pas au rendez-vous. Les 68
millions d’euros annoncés pour le plan Licence
en 2009, ne permettront de financer qu’une
actifs d’EDF.
Etape 3 : Seulement 160 millions dans
le budget 2009
Dans le PLF 2009, ce sont seulement 160
millions d’euros qui apparaissent pour le plan
de rénovation. Parce que ce ne sont pas di-
rectement les produits de la vente des actifs
d’EDF qui financent l’opération, mais les inté-
rêts des placements de ces produits.
Etape 4 : Les partenariats public-privé
(PPP) : un mode de financement inadapté
Le financement des projets de l’opération
devait se faire par le biais de PPP. Le gouver-
nement a fait modifier la réglementation, no-
tamment en appliquant le caractère d’urgence
à ces projets. Cependant le conseil constitu-
tionnel a cassé cette décision. Au manque de
moyens financiers, s’ajoutent désormais des
incertitudes juridiques.
Les prêts étudiants : une bonne affaire pour les
banques, un vrai danger pour les étudiants.
A la rentrée, le gouvernement a annoncé,
à grands renforts de communication, le
lancement de prêts étudiants garantis par
l’Etat. Sur le fond, cette annonce est par-
ticulièrement inadaptée à la situation des
étudiants. Alors que les difficultés sociales
se multiplient, et que le surendettement est
à l’origine de la crise économique et finan-
cière actuelle, la perspective d’endetter les
jeunes dès leurs études est en elle-même
douteuse.
Sur la forme, les prêts étudiants de Valérie
Pécresse sont mauvais pour deux raisons :
1. Ce sont des prêts bancaires à taux po-
sitifs (autour de 4%) alors que durant sa
campagne le Président de la République
s’était engagé pour des prêts à taux zéro.
Par ailleurs, ces prêts suppriment un dis-
positif de prêts à taux zéro attribués par les
CROUS.
2. La garantie apportée par l’Etat est une
garantie aux banques et non aux étudiants.
En clair, en cas d’impayé, l’Etat paiera aux
banques 70% de la somme empruntée, mais
l’étudiant restera redevable de toute la som-
me, et ne bénéficiera d’aucune protection
contre le surendettement.
5La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Dossier
demie heure de cours en plus par étudiant et
par an, au lieu des 5h hebdomadaires promises
dans le plan licence.
Le budget prévoit, pour la première fois de-
puis 15 ans, la suppression de 900 postes dans
l’enseignement supérieur et la recherche.
Le budget ne prévoit, et ce pour la deuxième
année consécutive, aucune création de postes
d’enseignants-chercheurs. Pourtant le recrute-
ment de personnels d’enseignement est l’uni-
que levier pour améliorer l’encadrement et la
réussite des étudiants.
Un budget en trompe l’oeil : les élus « UNEF et associations étudiantes » contestent la réalité des 1,8 milliards.
Le gouvernement affiche une augmenta-
tion de 1,8 milliards d’euros pour le budget de
l’enseignement suéprieur et de la recherche.
Loin des beaux discours, les élus « UNEF et
associations étudiantes » dénoncent un budget
en trompe l’oeil, et dénoncent la stratégie du
gouvernement, qui reprend d’une main ce qu’il
donne de l’autre.
Cette année, plus de 600 millions d’euros
s’envoleront en exonérations fiscales aux en-
treprises, via les crédits impôts recherche, soit
77,5% des nouveaux crédits attribués à la re-
cherche.
Le gouvernement va également économi-
ser 12,7 millions d’euros par la suppression du
dispositif ALINE (aide pour la rentrée aux étu-
diants), et 43 millions par la suppression des
900 postes.
Les élus « UNEF et associations étudiantes
» refusent que les volontés de changement et
de réforme des étudiants restent sans réponse
parce que les caisses seraient « vides », alors
qu’il est possible de trouver en quelques jours
plusieurs milliards d’euros pour renflouer un
système bancaire qui s’effondre. Ce n’est pas
aux jeunes de payer aujourd’hui le prix des er-
reurs des générations d’hier en sacrifiant leur
avenir sur l’autel de la rigueur budgétaire. Pour
les élus « UNEF et associations étudiantes »,
l’enseignement supérieur et la recherche doi-
vent redevenir une priorité pour le pays. Loin de
rendre cette exigence caduque, la crise actuelle
témoigne du besoin de dépenses d’avenir pour
faire face à ses conséquences économiques et
sociales.
Les élus « UNEF et associations étudiantes » demandent donc au gouvernement de revoir ses orientations et demandent :
* un plan pluriannuel d’action social étudian-
te intégrant notamment la création d’un 10ème
mois de bourses et l’augmentation du nombre
et du montant des bourses ;
* le rétablissement des 900 postes suppri-
més ; un plan pluriannuel de recrutement d’en-
seignant chercheurs et de personnels adminis-
tratifs pour améliorer l’encadrement ;
* un plan national de rénovation des univer-
sités.
Annabelle Janodet,
élue au CNESER
6 La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Aide socialeCROUS. Dans le cadre du chantier vie étudiante, le rapport Lambert sur la réforme du réseau des œu-vres vient d’être remis à la ministre. Il ne répond en rien aux attentes des étudiants.
Le ministère de l’enseignement supérieur a
rendu public un rapport rédigé par Denis Lam-
bert, directeur du CROUS de Lyon sur l’avenir
des Œuvres universitaires. Les préconisations
du rapport apparaissent dangereuses pour les
étudiants. Elles visent notamment à remplacer
la mission sociale des CROUS par un objectif
d’attractivité. Alors que la rentrée est particuliè-
rement difficile sur le plan social et que le mi-
nistère est sourd aux attentes des étudiants, le
rapport Lambert évite soigneusement d’aborder
la question des conditions de vie étudiante, sujet
central de la rentrée.
Une menace pour le service public des CROUS
Le Rapport Lambert privilégie la logique d’at-
tractivité des universités, sur la mission sociale
des CROUS. En remplaçant les CROUS par un
réseau « d’agences de la vie étudiante en région
» (AVER) à la recherche de ressources propres
(notamment commerciales), la logique est de
désengager l’Etat, et de le remplacer dans la
dimension d’orientation par les établissements
d’enseignements supérieurs auxquels seraient
désormais subordonnés les AVER.
Le rapport préconise notamment de :
- remplacer le CNOUS par une « Agence
Nationale de la Vie Etudiante » aux prérogati-
ves réduites afin de faire de l’échelon local le «
nouveau centre de gravité » de la politique de
vie étudiante.
- renforcer le poids des universités en matière
de vie étudiante en confiant à la CPU la prési-
dence du CA du CNOUS, en confiant aux PRES
ou aux universités la présidence d’un conseil
d’orientation stratégique (sans étudiant) chargé
de définir les orientations du CROUS en lieu et
place du conseil d’administration dans lequel
siègent les élus étudiants.
Ce poids accru des universités en matière de
vie étudiante est inquiétant : non seulement il
ignore le fait que près de la moitié des étudiants
ne sont pas dans les universités (prépa, grandes
écoles..), mais il risque de soumettre les CROUS
non plus à la politique sociale de l’Etat mais aux
desiderata d’établissements dont les objectifs de
prestige passent avant les objectifs sociaux.
Des ajustements techniques
Le rapport n’est pas seulement inquiétant du
point de vue des étudiants, mais aussi pour les
personnels. Il suggère de remplacer des person-
nels fonctionnaires par des contractuels. Cette
mesure renforcerait le désengagement de l’Etat
et ferait davantage reposer les dépenses de
personnel sur le budget de chaque CROUS, et
donc sur l’argent des étudiants. À court terme,
cela renverra chaque CROUS à augmenter ses
tarifs (restauration, logement…) pour faire face
à la pénurie de personnels, là où auparavant, le
ministère répondait directement au problème.
Autre mesure inquiétante, le transfert des
aides au logement (APL et ALS) vers les
CROUS. Cela s’accompagnerait d’une réforme
de leur mode d’attribution (aujourd’hui fonction
des seules ressources des étudiants), qui pour-
rait remettre en cause la solvabilité de centaines
de milliers d’étudiants qui en bénéficient, et ce
faisant, leur accès à des logements indépen-
dants.
Pour « faire passer la pilule », le rapport or-
ganise une diversion, avec quelques mesures
gadgets :
* un 8ème élu dans les CROUS
* un Vice-Président du CNOUS
* la mise en place d’un vote électronique
La seule proposition intéressante du rapport
est le transfert de la gestion des bourses des
rectorats vers les CROUS. Revendication por-
tée par les élus « UNEF et Associations Etudian-
tes », cette mesure qui permettrait de réduire
significativement les délais de versements de
bourses, se heurte jusqu’à présent au manque
de volonté des ministres successifs.
Le Rapport Lambert ne répond pas à la dégradation des conditions sociales des étudiants
Alors que la dégradation des conditions socia-
les des étudiants s’est encore accélérée cette an-
née, que 9 étudiants sur 10 perdent aux réformes
engagées par la Ministre, le Rapport Lambert qui
propose une réponse purement technique, consti-
tue pour les élus « UNEF et Associations Etudian-
tes » une véritable provocation. Ce rapport fait
l’impasse sur le sujet majeur en matière de vie
étudiante : la nature, les objectifs et les moyens
de la politique sociale en direction des étudiants.
Pour permettre aux CROUS de remplir avec ef-
ficacité et rapidité l’ensemble de leurs missions,
ils doivent obtenir plus de moyens notamment de
la part de l’Etat. A défaut, ce sont aujourd’hui les
étudiants qui supportent ces charges via l’aug-
mentation du ticket RU (+0,5 centimes/an) ou des
loyers. Plus qu’un mécano-institutionnel, c’est
une augmentation du financement des CROUS
par l’Etat dont qu’il devrait être question.
Les étudiants attendent que l’Etat s’investisse
davantage dans le réseau des œuvres, en ren-
forçant le rôle du CNOUS, et les moyens hu-
mains alloués pour améliorer encore l’efficacité
du service aux étudiants (bourses, gestion des
résidences…). Du point de vue financier, l’Etat
doit accélérer les constructions et rénovations
de logements étudiants, augmenter réellement le
nombre de boursiers, et le montant de celles-ci.
Lucas Jourdain,
élu au CNOUS
Rapport Lambert : non à la LRU des CROUS !
7La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Fiche pratique
Tous les ans au mois de décembre, les
conseils d’administration des universités doi-
vent voter le budget de l’établissement. Afin
que les élus puissent bien préparer cette éta-
pe importante dans l’activité de l’université, la
LDE revient sur les éléments utiles que doivent
connaître les élus défendre les intérêts des étu-
diants.
Les modifications liées à la loi LRU
Les procédures budgétaires ont profon-
dément changé avec la mise en place de la
loi LRU et rendent les débats sur le budget
d’autant plus important. La principale évolution
est la mise en place du budget global dans le
cadre du passage à l’autonomie renforcée des
universités.
Dès le 1er janvier 2009, 20 universités vont
pouvoir mettre en place les compétences élar-
gies de la LRU. Un article permet d’attribuer
aux universités qui en font la demande, des «
compétences élargies en matière budgétaire
». Désormais les établissements seront dotés
d’un budget global, les moyens ne seront plus
fléchés sur des postes de dépenses précis.
Le budget global pose plusieurs problèmes : il
risque de creuser les inégalités entre les éta-
blissements et de fragiliser le service public. Le
budget inclura désormais les dépenses liées
à la rémunération des personnels de l’univer-
sité. Il permet de transformer des crédits desti-
nés à rémunérer des personnels en crédits de
fonctionnement. Les universités pourront ainsi
supprimer des postes alors même que le taux
d’encadrement administratif et pédagogique
est aujourd’hui insuffisant. Pour éviter des dé-
rives, les élus doivent être vigilant à afin que le
passage au budget global n’entraîne pas des
dérives et des coupes budgétaires dans tel ou
tel composantes de l’établissement et une di-
minution du taux d’encadrement pédagogique
et administratif.
Peser sur le débat budgétaire
Le débat budgétaire permet de contrôler la
bonne utilisation des dotations publiques ac-
cordées aux universités et de mettre en œu-
vre les objectifs politiques et les priorités de
l’établissement. La préparation du budget des
universités est régie par le décret du 14 janvier
1994, modifié par le décret du 28 juin 2008 :
1. Chaque composante et service commun
déterminent les moyens nécessaires à la réali-
sation de ses missions.
2. Le CA délibère sur les prévisions d’acti-
vités, arrête l’équilibre financier ainsi que les
grandes catégories de recettes et de dépenses
du projet de budget.
3. Le projet est communiqué au recteur.
4. Les UFR et les services adoptent leur bud-
get, qui est ensuite centralisé.
5. Présentation et vote en C.A.
6. Si le budget n’est pas exécutoire le 1er
mars, il est arrêté par le recteur d’académie.
Cette procédure est au final très peu respec-
tée dans les universités. Il est dans tous les cas
nécessaire de réclamer un maximum de débats
et d’informations en préalable du vote (calen-
drier précis), pour avoir des marges de manœu-
vre pour influer sur le débat budgétaire.
Les points à surveiller
Voici les priorités sur lesquelles, les élus
doivent être vigilants :
* Les recettes de l’université
L’université bénéficie de trois types res-
sources : la dotation générale de fonctionne-
ment (DGF), l’argent issu de la négociation du
contrat quadriennal, et les ressources propres
de l’établissement (frais d’inscription, taxe d’ap-
prentissage, subventions de collectivités terri-
toriales…). Il est important de surveiller l’évo-
lution des recettes pour mettre en évidence,
le cas échéant, une baisse du budget de l’éta-
blissement. Il faut également être vigilant quant
à la part prise par les ressources propres de
l’établissement dans son budget. Son augmen-
tation est surtout le signe du désengagement
croissant de l’Etat et constitue un véritable
danger pour les établissements car ces reve-
nus sont par essence soumis à des évolutions
fréquentes.
* Les dépenses de l’université
Il s’agit sans aucun doute de la partie la plus
complexe du budget de l’université. S’il est
seulement fait du budget une présentation par
grandes masses (fonctionnement, personnels,
investissement…) il faut en avoir une lecture
par chapitres. Il est important de comparer les
évolutions concernant la recherche, la vie étu-
diante, la pédagogie, les travaux, les heures
complémentaires… par rapport aux années
précédentes. Ces évolutions doivent être por-
tées à la connaissance des élus car elles illus-
trent les priorités retenues par la direction de
l’établissement.
Sébastien Maurice
Budget. Chaque année, les universités consacrent une séance de leur conseil d’administration à l’adop-tion du budget de l’établissement. Si la procédure manque souvent de clarté pour les élus étudiants, il est pourtant un rôle essentiel à jouer pour que les priorités budgétaires répondent aux aspirations des étudiants.
Comment préparer un conseil d’administration budgétaire ?
Liste des 20 universités concernées par le passage à l’autonomie renforcée en janvier 2009
Aix-Marseille 2
Cergy-Pontoise
Clermont-Ferrand 1
Corte
Limoges
Lyon 1
Marne-la-Vallée
Montpellier 1
Mulhouse
Nancy 1
Paris 5
Paris 6
Paris 7
La Rochelle
Saint-Etienne
Strasbourg 1
Strasbourg 2
Strasbourg 3
Toulouse 1
université technologique de Troyes
8 La Lettre Des Élus n°145 - Octobre 2008
Peux-tu nous dire un mot de l’organisation nationale dont tu es issue (ANOSR), ce qu’elle fait en Roumanie, et ce qui t’as amené à t’impliquer au niveau européen ?
Naturellement, je me suis engagée au sein
de ANOSR, l’organisation étudiante majoritaire
en Roumanie qui regroupe plus de 70% des or-
ganisations étudiantes des différentes universi-
tés roumaines. ANOSR défend les intérêts so-
ciaux, éducatifs, culturels et économiques des
étudiants, au niveau national et international.
Deux faits ont marqué mon mandat à la
tête de l’organisa-
tion. Nous avons
obtenu du gou-
vernement qu’il
investisse 5% du PIB dans l’éducation.
Nous avons également fait inscrire dans la
loi une Charte de Droits Etudiants. Le tra-
vail de l’ESU nous a été d’une grande utilité
pour obtenir ces victoires, et a également in-
fluencé nos prises de position. Nous avons
donc décidé de nous y impliquer davantage.
De plus en plus d’étudiants subissent la précarité et sont contraints de se salarier pour financer leurs études. Les jeunes attendent davantage de protection sociale des politiques européennes, mais il n’en est rien. Par exemple, peu d’étudiants voient aujourd’hui des retombées positives à l’européanisation de l’enseignement supérieur.
Comment expliques-tu cela, et quels sont les leviers d’action ?
Le Processus de Bologne (harmonisation
des cursus et construction d’un Espace Euro-
péen d’Enseignement Supérieur de manière
coordonnée entre les pays européens) fournis-
sait l’occasion parfaite pour réformer l’ensei-
gnement supérieur afin de mettre les étudiants
au cœur du système. Mais des intérêts éco-
nomiques illégitimes ont ouvert la porte à une
privatisation rampante, et des gouvernements
ont détourné les principes inhérents à Bologne
pour faire passer d’autres réformes (comme ce
fut le cas pour le LMD en France, et ailleurs).
Depuis le début, l’ESU se bat pour faire
inscrire la « dimension sociale » au cœur
du Processus. Ce travail a porté ses fruits,
puisqu’elle a été mise au rang des priori-
tés au sommet ministériel de Londres en
2007. Beaucoup reste encore à faire, et
les organisations étudiantes doivent faire
émerger des revendications sociales et
contraindre les gouvernements à y répondre.
Il est crucial de se rallier l’opinion à tous les
niveaux de représentation et dans le mouve-
ment social afin de contrer une dure réalité :
l’investissement public dans l’éducation est de
plus en faible, et c’est l’ensemble de la société et
des citoyens qui en payent les conséquences.
Quelles sont les priorités pour l’ESU cette année?
L’ESU a une année chargée devant elle.
Nous ne pouvons pas laisser les gouverne-
ments d’Europe dire que le Processus de
Bologne est aboutit. L’accès à l’enseignement
supérieur est encore réduit, la mobilité est loin
d’être la norme, l’assurance qualité manque
de fiabilité et de cohérence, la reconnaissance
des qualifications n’en est qu’à ses balbutie-
ments… et je pourrais m’étendre sur la question.
Aussi, l’insistance de plus en plus marquée
sur les notions d’excellence, de compétitivité,
et de développe-
ment économique
entraîne des déri-
ves importantes.
Nous devons être un rempart contre la mar-
chandisation de l’éducation. Les universités
ne sont par des « fournisseurs » sur le mar-
ché de l’enseignement supérieur, contrai-
rement à ce que laisse entendre l’OMC.
Dans ce contexte, les priorités de l’ESU
en tant qu’acteur de premier plan seront de
défendre les droits des étudiants et mar-
quer les consciences sur les inégalités per-
sistantes dans l’enseignement supérieur.
Aussi, il faut développer la mobilité et met-
tre en avant des mesures qui permettent
d’augmenter la part d’étudiants mobiles en
Europe (objectif de 20% d’ici 2020). Nous
souhaitons donc que la Présidence Fran-
çaise de l’UE soit à l’origine d’actions sur
le plan social et fasse priorité à l’éducation.
Propos recueillis
par Damien Ramage
Interview
3 questions à ... Ligia Deca, présidente de l’ESU
«Nous devons être un rempart contre la
marchandisation de l’éducation. »
Qu’est-ce que l’ESU ?
« The European Student Union » est une structure représentative regroupant les syndicats étudiants de 38 pays différents. Elle a pour but de développer les mouvements étudiants et de pousser pour la démocratisation de l’enseignement supérieur.