la révolution (tome 6)

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  • 8/3/2019 La Rvolution (Tome 6)

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    LA

    RVOLUTION,RECHERCHES HISTORIQUES

    Cft

    ORIGINE ET LA PROPAGATION DU MAL EN EUROPE

    MVIIIS LA WLXMAJMBAMCm JUSQU'A VOS JOUAS,

    P A R

    Mgr G A U M E ,fftoaotiire t po t t o l i f , fk*ir gririi 4 l o i a t , dt liestrataa #t d'Aqviia,

    doetear M t4#fi, cfcfttir # lerdr* Sttet-SfIt tUn.mtmht* d 1* Acadfoit 4 1 rtUfkm ea&olijva t RMM , t 1'Attdai* d tckei,

    rte t t iMHn-lettm 4 S M M O M , t ie .

    ( M a c i, t.)

    SIXIME LIVRAISON7.

    LE C S A R I S M E .

    PARIS

    GAUME FRRES, LIBRAIRES-DITEURS,

    S U E C A S S E T T E , 4 .

    1 8 5 6tour t les diteurs M rentrent 1 droit de traduction et d reproduciita l'trangt

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    Biblio!que Saint Librehttp://www.liberius.net

    Bibliothque Saint Libre 2009.

    Toute reproduction but non lucratif est autorise.

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    P A R U TY PO GR AP HI E D E HEN RI PLOW .

    IXFftJMSUft D L'fMPIRBOB,*

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    AVANT-PROPOS.

    Dans la livraison prcdente il a t prouv sura hondamment :

    1 Que la Voltairianisme ou la philosophie du dix*huitime sicle a puissamment contribu la Rvolution franaise, dans Tordre religieux et dans

    Tordre social ;2* Que mme, parler exactement , le Voltairianisme c'est la Rvolution accomplie dans les esprits,en attendant qu'elle passt dans les faits;

    3 e Que le Voltairianisme a constamment affirm

    que les vraies lumires, h vraie libert, la vraiecivilisation, ne se trouvaient qu'au sein des rpubliques de Sparte, d'Athnes et de Rome; que lergne social du christianisme avait t une poquede barbarie, d'esclavage et de superstition; que cet

    ge de fer n'avait cess en Europe qu' partir deTpoque de la Renaissance;

    4# Que le Voltairianisme n'a cess do prendre pourtype de la perfection Tantiquit paenne . sa philosophie, sa morale, ses grands hommes, ses arts, sa

    littrature, ses institutions sociales; qu'il a employVI. 4

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    2 AVANT-PROPOS.

    tous ses efforts pour persuader aux nations que Ux

    vrai moyen de se rgnrer c'tait de se refaire,aussi compltement que possible, limage des Grecset des Romains;

    5 Que le Voltairianisme est sorti tout entier descollges catholiques, et quant aux hommes et quant

    aux doctrines. Quant aux homme, tous les voltai-riens ont t levs par le clerg sculier et rgulier j quant aux doctrines, toutes sans exception setrouvent littralement dans les auteurs classiques,et ne se trouvent que l;

    6* Que le Voltairianisme n'a t produit ni parl'enseignement des professeurs, qui tait orthodoxe,ni par leurs exemples, qui taient irrprochables,mais uniquement par l'enseignement littraire;

    7* Que te Voltairianisme lui-mme a prouv celte

    gnalogie en adorant les auteurs paens, et en chassant ses matres en soutane;

    Que te Voltairianisme ne peut tre regard nicomme une aberration passagre, ni comme uneexception malheureuse compose de quelques indi

    vidus seulement; mais que tout le dix-huitimesicle, dans la gnralit des classes lettres, taitvoltairten, c'est--dire paen d'ides, de langage,de murs, de vie et de mort.

    Poor chapper la consquence qui jaillit de ces

    faits,, et innocenter les tudes classiques, on dit :

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    AVANT PROPOS.

    Au dix-huilime sicle, il soufflait sur l'Europe unesprit d'impit qui pervertissait la jeunesse au sortirdu collge. Telle est la vritable cause du Voltairia-nisme; l'ducation littraire n'y est pour rien ouseulement pour peu de chose.

    Cette rponse ne rsout pas la difficult, elle la

    recule. Il s'agit de savoir quel tait cet esprit d'impit et d'o il venait. On reprend : C'tait, dansl'ordre social, l'esprit d'indpendance, l'esprit rpublicain provoqu par le Csarisme, c'est--dire parl'absolutisme (tes rois, de Louis XIY en particulier,

    contre lequel se formait depuis longtemps, dans lesclasses leves, une raction terrible. Dans l'ordrereligieux, c'tait le libre penser, n du Protestantisme.Voil pourquoi le Voltairianisme n'a pas t autrechose qu'une guerre incessante contre la socit et

    contre le catholicisme. Le Csarisme d'une part, le Protestantisme de

    l'autre, tels seraient donc les anctres du Voltairianisme ou de la philosophie du dix-huitime sicle.

    Malgr les difficults que prsente cette solution,

    nous voulons bien l'accepter. Mais le Csarisme et leProtestantisme ne sont pas ns d'eux-mmes : ils ontleurs causes. Afin d'avancer d'un pas dans notrehistoire gnalogique du mal, il faut donc nousadresser au Csarisme et au Protestantisme, et leur

    demander, comme nous l'avons fait pour le Voltai-4.

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    4 AYANT-PROPOS.

    riaisme et la Rvolution : De qui tn-vous fils'.*Quelle eut votre gnalogie? La rponse du CsarMiueformera la prsente livraison; celle du Protestantisme composera la livraison suivante.*

    Dans les graves circonstances o se trouve l'Europe, en vue des ventualits peut-tre plus gravis

    de l'avenir, il nous semble difficile de traiter unsujet plus important, au double point de vue de lareligion et de la socit. L'avenir sera fils du prsent,comme le prsent est fils du pass : moins desavoir d'o nous venons, il est impossible de savoir

    o nous allons.

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    LE

    CSARISME.

    CHAPITRE PREMIER.

    IDE DU ^SAKISliE.

    Importance de la qut^tion. Dfinition du Csarisme. Son origiae. Son histoire dans l'antiquit. Il fonde l'ordre religieux et SOCIALsur la souverainet de rhorante. Do peuple, cette souverainetliasse Csar. La loi Regia. Droits et prrogatives de Csar.Paroles de Gravina, de Terrasson. Article de la loi Reglrt. R sultats da < prisme dans l'antiquit.

    Eo entrant dans ie monde, le mal a produit ledualisme. De l, deux hommes dans l'homme, et

    deux cits sur la terre. De l aussi, deux philoso phes , deux littratures aussi opposes entre ellesque les deux esprits qui les inspirent, les principescTou elles partent, les moyens qu'elles emploient,et le but auquel elles tendent. De l, par une con

    squence non moins absolue, deux politiques : la

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    CHAPITRE PRKMIKR. 7

    sa politique c'est le bien-tre matriel, sans rapportavec le bien-tre moral. Les destines futures del'humanit n'entrent pour rien dans ses calculs. Pourlui f la religion n'est qu'un instrument de rgne.Elle est dans sa main, et il la rgit, comme touteautre branche d'administration, par des prtres, ses

    fonctionnaires et ses agents. Tant que son intrt ledemande, et dans les limites o il le demande, illa fait respecter, sinon il l'abandonne et mme laperscute. Ds qu'elles assurent la scurit de k

    jouissance, en maintenant le peuple dans le de

    voir, toutes les religions, si contradictoires qu'ellessoient, sont bonnes ses yeux; y les protge toutessans croire aucune.

    Dans l'ordre sodm.1, mme suprmatie. Tout Tientde l'homme, tout retourne A l'homme. C'est lui qui,

    au moyen d'un contint dress par lui, sign de lui,fonde les socits. Le pouvoir, il le cre et le dlgue avec droit de le reprendre; la libert, il lamesure chacun; la proprit, il la fait; la Camille,il la constitue; l'ducation, il la donne; la for

    tune, il la gouverne : rien n'chappe sa souverainet.

    Comme on voit f le Csarisme dessin dans sesgrandes lignes est l'apothose sociale de l'homme.En principe, c'est la proclamation des droits de

    l'homme contre les droits de Dieu, et, en fait, le

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    * LE CfcSARISMK.

    despotisme lev sa dernire puissance. Tel fut lesystme qui rgit le monde antique.

    Ce systme remonte au jour o, par un acte solennel de rvolte, l'homme, proclamant on indpendance, devint lui-mme comme son dieu :erilix skut dit, suivant le mot profond du texte

    sacr. Au lieu de se gouverner et de gouverner lescratures d'aprs les volonts divines, il gouvernatontes choses suivant ses volonts arbitraires. L'tatsocial fond sur cette rvolte audacieuse en fut lechtiment : jamais esclavage pareil ne pesa sur le

    monde. Sous les noms divers de Peuple et de Csar,l'homme le subit et l'imposa tour tour.Sans examiner si les paens admettaient ou non,

    E N thorie, l'origine divine du pouvoir, il est certainque, dans la pratique gnrale, ils tenaient pour

    la ngative. Aa commencement, toutes leurs histoires nous prsentent I homme, sous le nom de

    peuple, comme la source de l'autorit, agissant dansT O N intrt et non dans celui de la divinit. Ce n'estP A S pour pratiquer plus parfaitement la loi de Dieu,

    A A I pour satisfaire plus facilement a se* besoins,qu'il tablit des socits. Si les dieux et quelsD I E U X ! interviennent, ce n'est gure que pour laterme; la religion n'est pas un but, mais un moyende gouverner.

    Sparte, Athnes, Rome, les a?f r

    es rpubliques

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    CHAPITRE PltEMIEH. 9

    de l'antiquit classique n'ont pas d'autre point dedpart, d'autre rgle de conduite 1. L, dans le principe, tout s'incline non devant i t majest des dieux,mais devant la majest du peuple. Roi, il fait leslois, cre les magistrats, les snats, les empercirs;il les juge, les absout ou les condamne. Pontife, ilinterprte son gr la loi naturelle, dont il a conserv quelques lambeaux ; il tablit des sacerdoces,

    1 Dans les rpubliques eiasi jues, et notamment Rome, toutpouvoir religieux, civil et social, vient originairement du peuple. Les rois, dit Terrasson, nomme par le peuple, furent les premiers ministres de la religion f et fixrent leur gr les ftes, leculte de chaque dieu, aussi bien que les crmonies qu'on devaitobserver dans les sacrifices. Le roi, dit la loi quatrime du codepapy rien, prsidera aux sacrifices et dcidera des crmonies quiy seront observes.

    Le mme co !c ajoute, loi quinzime : Le peuple se choisira desmagistrats ; il fera des plbiscites (qui avaient force de loi); enfin,

    Ton n'entrepr* ndra aucune guerre et Ton ne conclura aucune paixcontre son avis.

    t Le consul Valrius Publicola voulut que tes licteurs baissassentles faisceaux consulaires en prsence du peuple assembl : *& ma

    jest remplaait ceVe des rots. Le mme consul fit porter une lotpar laquelle aucun citoyen ne pouvait tre jug en dernier ressort

    qot par un arrt des Cartes, et tout criminel condamn pouvait enappeler au peuple*, a

    Ainsi, lgislateur, pontife, roi, magistrat, cour d'appel et courde cassation, le peuple tait tout cela. Ce qui se passait Homese passait dans la Grce, dVa Rome avait tir ses constitutions etses lois.

    * Terrasson, ffiitoire d$ la jmitpndenc* romaine, p. f i , 7 5 .

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    < 0 LE CSARISME.

    adopta et fiait des dieux, institue des ftes, prescritdes rites, ordonne des sacrifices et choisit les victimes. Il fiiit ta proprit, la donne, l'te, la partage. 1 rgle les mariages, proscrit ou commandela polygamie et le divorce. Il s'empare de l'enfantds sa naissance, lui laisse ou lui te la vie, le

    nourrit pour son compte et l'lve son profit ; enun mot, sous le nom de Peuple, l'homme rvolts'arroge tous les droits de Dieu et les exerce sanscontrle.

    Tel est, tant qu'elles restrent rpubliques, le

    joug de fer qui pesa sur ces cits fameuses qu'uneducation mensongre nous reprsente, depuisquatre sicles, comme le type de la perfection socialeet le paradis de la libert.

    *ec l tfPt f les nationalits de l'ancien monde

    viennent se perdre dans l'empire fond par Romu-lus. (Test alors que le peuple romain, matre defou les peuples, devient par excellence le Peuple-Roi, qui, loi-mme, se personnifie bientt dans unhomme appel le divin Csar. A cet homme indivi

    duel passent tous les droits, toutes les prrogativesreligieuses et sociales de l'homme collectif ou dupeuple, c'est--dire tout la fois du peuple romainet de tons tas autres, dont celui-ci est le dominateuret l'hritier.

    Roi, pontife et dieu, C>ar rgne en souverain

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    UiAPITRi: PRKMMH 41

    sur le monde. Roi el pontife, il fait dans Tordre social et religieux tout ce que faisait le peuple. 11 estla loi vivante et suprme. Cette loi oblige les autres,mais ne l'oblige pas lui-mme. Dieu, il s'attribueles titres et lea prrogatives de la divinit ; il parle deson ternit et de ses divines oreillesl. Vivant, il se

    fait offrir des sacrifices et condamne au dernier supplice ceux qui refusent d'y participer ; mort, il a destemples et des autels *.

    * JEterntias tua... Diodetianus maximas, ermis, imperator. .ad devinas aostres auras fama quaedam pervenit. Dcret., Diocl.

    apod Boliaad. Ac4. S. Gmrg., S3 epril., le., etc.1 i Lea Csars paens, dit l'auteur de l'Histoire universelle deFfm, taient la fois dieux, souverains pontifes et empereurs.Ptiae condamne au dernier supplice te* chrtiens de Bithynie ,pare qu'Us refusaient de sacrifier limage de Trajan. Adrien faitm dieu de aoa compagnon de dbauche. Antonio et Marc Aurte

    ont pour femmes de vraies prostitues. Au lien de rprimer leurfebertmage, Ha rcompensent leurs complices; mortes, ils ea fontles dfasse Mtaires des poux, leur consacrent des temples et despontifes, et obligent les jeunes maries leur offrir des saerfSees.

    Les Csars paens taient encore la loi vivante et suprme.Leur boa plaisir avait force de toi; cette loi obligeait les antres,mais ne les obligeait pa eux-mmes. Matres du droit, ou plutttait eux-mmes le droit principal, ils taient matres de tout, dela proprit comme di resta; rien s'tait A autrui que aous leurboa plaisir. Nulle place l'indpendance d'aucun roi, d'aucunpeuple.

    On en voit an chantillon dans l'empereur Caiigula. L'idepaenne du Csar paen se ralisa tout entire dans sa personne.

    Lui-mme se dclara dieu, se consacra un temple, des pontifes et

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    t * L E C T S A R I S U K .

    Un ordre de choses s'tablit sur le dogme del'omnipotence et de la divinit de Csar. Au lieuqu'autrefois on adorait le peuple, maintenant onadore le divin Imperator. La majest du premierdevient la majest du second Tandis que les anciens lgistes disaient : * Toute volont du peuple

    eUloi, les juristes impriaux disent : Toute volont de Csar est loi : quidquid placuit principi legis

    ta sacrifices. Sa sur Drusiile', avec laquelle il avait comms plusd'un inceste, tant morte, il en fit une desse, et jurait publiquement par sa divinit. Quand il lui en prenait envie, il envoyait

    dire i kl ou tel snateur qu'il se gardt de toucher sa femme,attendu que l'empereur daignait la prendre pour la sienne. Lorsqu'il et conduit l'arme romaine travers les Gaules, jusque surk l b o r d d e rOoan, pour ramasser d*s coquillages, il crivit sesi n t e n d a n t s *tSO* de lui prparer un triomphe qui n'et point euson p a r e i l , a t t e n d u qpHk mmim droit sur les biene oV fous le*homme* *. Sommet*wm9 disait-il sa grand'mre, qm tout m'estpermis, et envers lont le monde *. Et il ne se bornait pas le dire.Ainsi, ayant donn i Naptes le spectacle d'un combat naval, il fit

    j e t e r las spectateur* dans la mer. P l t aux dieux, s'etia-t-l uneantre fois, que le peuple romain n'et qu'une tte ***! C'tait pouravoir le plaisir d e la lut abattre d'un seul coup *****

    Tout cela T8ITatroce, mais lgal.1 Dicebatur populi romani majeatas... verso jure populi ad prin

    cipes, majostas imperatoria dtci epiL Lorry, !mtit. exposit. T. I,p . 4 9 , dtt. in 4 1 .

    * Qt t t ado i a oniftium bominam boas . u t haberen t Sue t . , m Calig.

    ** MeMeMo ornai t subi t t in omnet l ieere . Id . ibii.

    *** Ut i l populu i rwa tae t un i ra c#rv icem hcbar t t . 14 (bid.

    **## BiUoir* **ic*rrU$dt l'gHm, t. X V I I I , p . I t t .

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    I HAl'iTRi: PRKMl Kit. l-'i

    habet viyorem Cet axiome, devenu si fameux,est la base lgale du Csarisme. It proclame l'apothose de l'homme, principe fondamental auquel ilfaut toujours remonter si on veut se faire une ide

    juste de I histoire religieuse et sociale de l'antiquitpaenne, aussi bien que de l'poque moderne, ame

    ne par la Rvolution proclamer le mmo dogme.Ce point capital exige des preuves et des claircissements : nous allons les demander l'histoire.

    Lorsque Auguste, vainqueur de ses rivaux, rentra dans Rome aprs la bataille de Philippes, les

    potes, hier ses ennemis, aujourd'hui ses adorateurs, furent les premiers lui offrir leur encens;le snat, qui l'aurait condamn aux gmonies, s'ilavait t vaincu, le proclama pre et sauveur de lapatrie; et le peuple, dont les hues auraient accom

    pagn le supplice de l'ancien triumvir, lui fit hommage , ce n'est pas assez, lui fit litire de sa libert.Tous ses droits civils et politiques, de quelque nature qu'ils fussent, il s'en dpouilla en sa faveur.En change, il ne demanda son nouveau matre

    que des plaisirs, et la paix pour jouir des plaisirs :1 Httc usque unicum legum aoctorem ta tivitete Bomana agaovi-

    nua, popolum nempe, itique tam sub re $>us, quam constanterepubltca. Postjuam Auguatus rerum potitua fuit, populus leg*>Jtsffe, que de ejua imperio lata est, ei et in euro, omnem suampotestatem transtulit, atque exinde quidquid priacipt placuit Icgij

    habuit vigorera. ld. id., p. 9.

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    14 LE CSRfSiii.

    panm s* etnmm. Cette translation de F omnipotence religieuse et sociale se fit par la loi Hegia1, siclbre dans Thtstotre dn droit romain.

    I n vertu de cette loi, Csar succde tons tesdroits lia snat et du peuple. Dans Tordre politique,il est le chef suprme de la force arme de terre et

    de mer; il a le gouvernement suprme de la Rpublique, avec le droit absolu de paix et de guerre.Dans Tordre administratif, il est consul, consul perptuel, proconsul, proconsul perptuel, snateur,chefdo snat, qui! convoque et qu'il dissont, tribun

    chi peuple et tribun perptuel. Dans Tordre civil etlgislatif, il est censeur, il est prteur. Ses dits, sesdcrte, tes avis, ses lettres, ses rescrits, ses dcisions, eut force de loi 2 . Ainsi, dans Tordre social,Gltr pflflede le pouvoir tons les degrs, sous tous

    lsion)*t sons toutes les formes.9 m est de mme dans Tordre religieux. l est

    prtre, 11 est augure, il est souverain pontife, chefahttfo de tons les sacerdoces et de toutes les religions, a Les Csars, dit le juriste Gravina, com

    prirent que la plnitude dn pouvoir civil leur chapperait s'ils n'y joignaient la plnitude du pouvoirreligieux, et si, en prenant le souverain pontificat,ils ne devenaient les arbitres suprmes des choses

    Voir cette loi dans Gravina, etc., et dans Terrasson, j>. % Il.8 Gratina, De ortu et progrmu juris civil., c. iv. p. 68.

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    (Il iPITRE PRKMlKH 5

    divines, par lesq. jlles toutes les choses humainessont rgles et diriges. Ainsi, pour mettre l'humanit tout entire sous leur main, ils ne se contentent ni de l'augurt, ni du quindcemvirt, lesdeux plus grands sacerdoces de Rome; mais, hl'exemple d'Auguste, ils prennent le souverain pontificat. En vertu de cette dignit, ils commandent tous les pontifes et tous les sacerdoces, ils dcident souverainement de la religion, des crmonies, des rites et du culte des dieux. Ils interprtent le droit religieux dans tout ce qu'il a

    A'obscur, et leur interprtation a force de loi Cette translation de pouvoir a lieu en laveur dechaque nouveau Csar; al les empereurs ont grandsoin de constater ce fait capital en le gravant surleurs mdailles, o IVa trouve invariablement de

    puis Auguste jusqu' Gratien, tes titres de divin,* Potestatem dvilem ornatm, principes lato se minime spera-

    baat reienturos nisi etiaaa religione muaiissent, suaceptoque poo-ticatu maximo, arripufosent potestatem rernm drvinarora f qaiboshumana emaia obkgantur alque volvuatar. Igitur, ut per divine inarbitrium suum hnmana omnia rdigrent, imperatores non soiumauguratum, et quindecemviratum sacrornm, quas majora eacer-dotia erant; sed, Augusti exempta, ipsum susceperunt ponlihcatummaximum, quo jure pontificibus alita ac sacerdotiia omnibus im-perabant, de sacris, ccremoniis et ritibus, omnique deorum cullunon edicta propooebant modo, sed et faciebant leges, et obscurumquod esset in jure sacro interprta tione pandebant. (Gravina, De

    or/u, etc.,c. vu, p. 8.)

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    LE C S A M 8 M S .

    pamm H drctnm. Cette translation de romnipotence religieuse et sociale se fit par la hi Regia1, siclbre dans l'histoire dn droit romain.

    En vertu de cette loi, Csar succde tous (esdroits dn snat et dn peuple. Dans l'ordre politique,il est le chef suprme de la force arme de terre et

    de mer; il a le gouvernement suprme de la Rpublique, avec le droit absolu de paix et de guerre.Dans l'ordre administratif, il est consul, consul perptuel , proconsul, proconsul perptuel, snateur,chef du snat, qu'il convoque et qu'il dissout, tribun

    du peepte et tribun perptuel. Dans Tordre civil etlgislatif, il est censeur, il est prteur. Ses dits, sesdcrets, ses avis, ses lettres, ses rescrits, ses dcisions, ont force de loi * Ainsi, dans Tordre social,Csar possde le pouvoir i tons les degrs, sous tous

    le orns et sons toutes les formes.B en est de mme dans Tordre religieux. Il est

    prtr#, il est augure, il est souverain pontife, chefabsoa de tons les sacerdoces et de toutes les religions* C Les Csars, dit le juriste Gravina, com

    prirent qae la plnitude du pouvoir civil leur chapperait s'ils n'y joignaient la plnitude du pouvoirretigieux, et si, en prenant le souverain pontificat,ils ne devenaient les arbitres suprmes des choses

    1 Tsir cette loi dans Gratina, etc., et dans Terraason, p. i l ! .

    * Gravina, De ortu et progrmu juris civil., c. iv, p. 68.

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    CHAPITRE PREMIER. 5

    divine*, par lesquelles tontes les choses humainessont rgles et diriges. Ainsi, pour mettre l'humanit tout entire sous leur main 9 ils no se contentent ni de l'augurt, ni du quindcemvirat, lesdeux plus grands sacerdoces de Rome; mais, l'exemple d'Auguste, ils prennent le souverain pon

    tificat. En vertu de cette dignit, ils commandent tous les pontifes et tous les sacerdoces, ils dcident souverainement de la religion, des crmonies, des rites et du culte des dieux. Ils interprtent le droit religieux dans tout ce qu'il a

    d'obscur, et leur interprtation a force de loi!

    . Cette translation de pouvoir a lieu en faveur dechaque nouveau Csar; et les empereurs ont grandsoin de constater ce fait capital en le gravant surtours mdailles, o l'on trouve invariablement de

    puis Ajguste jusqu' Gratien, les titres de divin,1 Potestatem civilem omoem, principes lato se minime spera-

    bant retentures nisi etiam religione ssuaiiasent, suaceptoque poe*tificatu maximo, arripufesent potestatem rerum dtvinaram, quibnshumaaa omnia obliganlur atque volvuntur. Igitur, ut per divine in

    arbitrium suum humana omnia rdigrent, imperatores non solumauguratum, et quindecemviratum sacrorum, quaa majora sacer-dotia erant; sed, Augusti exemple, ipsum susceperuntpootificatummaximum, quo jure pontiicibus aliis ac sacerdottis omnibus ire-perabant, de sacris, ceremoniis et ritibus, omnique deorum culkinon edicla proponebant modo, sed et fadebant leges, et obscurumquod esset in jure sacro tnterpretatone pandebant. (Gravina, k

    ortUj etc., c. vu, p. 8.)

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    1 I E CfeSARISME.

    & empereur, de souverain pontife, de consul, de proconsul, de frtfrtm du peuple, et tous ceux qui P R O clament leur omnipotence absolue dans Tordre religieux aussi bien que dans Tordre social.

    Telle est la loi Royale 1 qui sert de base & Tordresocial de l'antiquit, ei dent !c I C A I C assez I O N G sersume tout entier dans l'article suivant : Tout cequi, d'aprs T usage de la Rpublique, lui paratraconforme la majest des choses divines, humaines,publiques et prives, que Csar ait le droit et lepouvoir de le faire

    Bst-il besoin de dire que l'abrutissement des1 Dans asa Histoire de ta jwrieprud nce romaine, Terrasso:

    R S U M E atoai CETTE lutteuse M tkga Q U I sert de base I l'ordresocial dans l'antiquit : Toute h puissance religieuse, politique,RGISITTJVE et civile, eu un mot, roasaipotenoe eu toutes choses etsur TOUTES CHOSES DONT Us jouissent, le peuple et le snat la transf

    rreot Csar, touque la Rpublique devint l'Empire. Cela se fit envertu de la loi Regia, dont Ulpien parte en ces termes : t Tout"VOIEOT D E Csar a force de toi, en vertu de la toi royale porte SU Raoa E M P I R E , par laquelle le peuple lui confre et lui donne tout sontapira ET toute aa puissance +.

    A l'avnement de chaque empereur on renouvelle toutes te>

    DISPOSITIONS DE cette loi".* Q U A B C A M Q U C ex usu reipubik, majestati divinarum, buma-

    oaruaa, pubtkarum pmatarumque rerum esse censebit, ei agervjus POTEATASQUE ait. Grav , p. Si.

    * Qood priacipi placuit lsgit bubet vigorem; utpote cum legt Brgia,

    qm tfa i m p e r aj ut lata es t , *ilus ei et in aura om ne t an i n im per iu m ET

    pot a t t a t t a i oca ler a t . Lib . I , Princip., g

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    CHAPITRE PREMIER. 17

    t

    mes, l'aplatissement des caractres, la dgradationuniverselle, des rvolutions sans cesse renaissantes,les cruauts et les dbauches les plus monstrueuses,furent les rsultats d'un systme politique qui, faisant un dieu de Nron, de Caligula, de Domitien,transformait leurs caprices en lois religieuses et so

    ciales, obligatoires dans tout l'empire?

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    CHAPITRE II.

    IDE HE LA POLITIQUE CHRTIENNE.AooUtkm de 1 loi Reia. Division du pouvoir. Paroles du pape

    saint Glase l'empereur Anastase. La politique chrtienne adoptepar Constantin, par Charlemagne, par les rois chrtien. Expos-t k f t qu'en fait saint Bernard Saint Thomas. Source du pouvoir Origine et but des aocits. Magnifique tableau de ia politiqueet de la socit chrtiennes par saint Thomas.

    Depuis vingt sicles, l'homme, esclave de l'homme,ae dbat dans les fers qu'il s'est volontairement imposs. Dieu prend le monde en piti. Son fils en

    personne descend du ciel pour rgnrer touteschoses, l'ordre social aussi bien que lVdre religieux. Saisissant la loi Begia, il la dchire et enattache les lambeaux la croix ; puis, cette chartedu plus monstrueux esclavage, il substitue la gronde

    charte de la libert universelle. Pour inaugurer uneroyaut nouvelle et une politique nouvelle, il divisels pouvoir 1 . A ct de Csar il cre le pontife. A Csaril laisse la puissance des corps, au pontife il donne

    1

    Voir de Gertecbe, tudes sur Sallutte. Prface.

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    GUAI'ITRK l)Ki:XlftMI

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    LE CSARISME.puisqu'il met eu haut ce qui doit tre en bas, et enbas ce qui doit tre en haut ; la politique chrtiennec'est Tordre, puisqu'elle met chaque chose sa place,eu haut ce qui doit*tre en haut, eu bas ce qui doittre en bas.

    Comme la semonce dpose dans une terre fconde

    se dveloppe bientt par une vgtation vigoureuse,la parole divine, qui contient toute la politiquechrtienne : Rendez Csar ce qui est Csar et

    Dieu ce qui est Dieu, donne naissance une socit nouvelle pleine d'avenir et d'nergie. Devant

    les tribunaux et dans les amphithtres, sous ladent des lions et au milieu des bchers, les aptreset les martyrs, en disant aux empereurs et leursbourreaux : Nous ne pouvons pas, non possumus, r

    vlent l'existence de cette jeune socit, et en affer

    missent les fondements.Malgr qu'ils en aient, il faudra que les Csars ab

    diquent leur divinit, et bientt leurs oreilles entendront de la bouche mme des pontifes, Texpos de lagrande charte de la libert humaine. Il y a, auguste

    Empereur, deux choses par lesquelles ce monde estgouvern : Taulorit sacre du pontife et la puissancede Csar. L'autorit des vques est d'autant plusredoutable qu'ils doivent rendre compte Dieu,dans le dernier jugement, mme du salut des rois.

    Vous n'ignorez pas que, quoique votre dignit vous

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    CHAPITRE DEUXIEME

    lve au-dessus des autres hommes, vous devezcourber humblement la tte devant les pontifes,chargs de la dispensation des choses divines, etque vous devez leur tre soumis en ce qui tient l'ordre de la religion et l'administration des saintsmystres. Vous savez qu'en toutes ces choses vous

    dpendez de leur jugement, et que vous n'avez pasle droit de les assujettir vos volonf?. Dans toutce qui est de l'ordre public, ces mmes voquesobissent vos lois ; votre tour vous devez leurobir en tout ce qui concerne les choses saintes,

    dont ils sont les dispensateurs Entre les paroles du pontife chrtien et les dis

    cours des flamines de l'ancienne Rome adresss Csar, il y a l'infini. La grande charte de l'ordreet de la libert qu'ils ont reue en dpt, les papes

    se la transmettent les uns aux autres ; les Pres del'glise et les docteurs l'expliquent aux peuples etaux rois : elle devient la base du droit public. Auconcile de Nice, Constantin lui rend hommage parces nobles paroles : Dieu vous a faits ses pontifes,

    dit-il aux voques, et vous a donn la puissancede juger nos peuples et nous-mmes. Il est donc

    juste que nous nous soumettions vos jugements etnon pas que nous entreprenions d'tre vos juges.Dieu vous a tablis pour tre comme nos dieux,

    1 EpUt. VII; S. Gelas, S. P., ad Anastas. imper,

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    22 LE CSARISME.

    et quelle apparence que des dieux fussent juges pardes hommes 1 ?

    Solennellement reconnue par Charlemagne et parses successeurs l'empire, la grande charte de lalibert est dj populaire au onzime sicle. L'illustre fondateur de Clairvaux, saint Bernard, cri

    vant Conrad, roi des Romains, lui expose en cestermes le plan de la politique chrtienne : Dieuseul, dit-il, est proprement souverain. Le Fils deDieu fait homme a t investi par son Pre de cettepuissance souveraine. Parmi les hommes il n'y a de

    puissance ou de droit de commander, si ce n'estde Dieu et par son Verbe. Le Fils de Dieu faithomme, Jsus-Christ, est tout la fois souverainpontife et roi souverain. 11 runit dans sa personne,et par l mme dans glise, et le sacerdoce et

    la royaut.nHais le sacerdoce est un, comme Dieu est un,

    comme la foi est une, comme l'glise est une,comme l'humanit est une. La royaut est multiplecomme les nations; elle est fractionne en rois divers

    et indpendants les uns des autres. Mais ces nationssi diverses qui partagent l'humanit sont ramenes l'unit humaine et l'unit divine par l'unit dela foi chrtienne, par l'unit de l'glise catholique,par l'unit de son sacerdoce.

    1 Euseb., VU. Con$t.f lib. III, c, 27.

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    CHAPITRE DEUXIME. 23

    Le devoir, l'honneur, la prrogative du premier roi chrtien, tel que l'empereur, c'est d'tre lebras droit, l'pe de la chrtient pour dfendretout le corps, principalement la tte, et seconder soninfluence civilisatrice au dedans et au dehors 1.

    Des lvres de l'abb de Clair vaux, cette doctrine

    passe sur celles du plus grand des thologiens. Dansson opuscule De regimine principum, saint Thomasexplique ainsi l'organisation chrtienne des socits:

    a La fin de la communaut, dit-il, est la mme quecelle des individus. Or, si vous demandez un chr

    tien : Pourquoi Dieu vous a-t-il cr et mis aumonde ? il rpond : Dieu m'a cr et mis su mondepour le connatre, l'aimer, le servir et parce moyenarriver la vie ternelle, qui est ma fin.

    a Interroge sur le mme point, toute communaut

    chrtienne doit faire la mme rponse : nulle autrene peut se soutenir 9.

    Partant de ce principe, lumineux comme le soleil,le docteur anglique dveloppe magnifiquement les

    km qui rgissent l'ordre social fond par te chris

    tianisme, les devoirs rciproques des rois et dessujets, ainsi que les rapports des royaumes temporels avec le royaume de Jsus-Christ qnj est 1%

    1Epi*tn 244. Ad Conrad, reg. Rom., oper., t. I, p. 54 4- tait*

    noviae. analyse par II. Rohrbacher, p. 42*, t. XV. Lib. H, c xiv,

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    24 LE CSARISME.

    glise. L'ordre et l'harmonie semblent couler de laplume de l'admirable philosophe.

    Pour saint Thomas, chaque royaume particulierest nn navire fourni de son quipage et muni detons ses agrs. Le roi en est le pilote. Lanc enpleine mer, ce navire cingle vers le port. Ce portest la fin pour laquelle le royaume a t cr. Avecsa lucidit ordinaire, saint Thomas prouve que cettei n n'est et ne peut tre ni la richesse ni le plaisir,mais seulement l'acquisition de la vertu. La vertuelle-mme est sans objet, si elle ne conduit pas

    la possession dn souverain bien qui est Dieu mme Or, ajoute l'illustre thologien, si l'homme pouvait par ses forces naturelles parvenir cette finultrieure, ce serait au roi de l'y conduire. Car,dans Tordre humain, le roi tant le suprieur le plus

    lev, i lui seul appartiendrait de diriger la finsuprme tout ce qui est au-dessous de lui. C'estainsi qu'en tout et partout, nous voyons celui quipfside ht fin ou Tusage d'une chose, dirigerceux qui prparent les moyens ncessaires pour arri

    ver cette fin. L'homme de mer dirige le construc-1 Quia homo viveodo secundum virtutem, ad ulterorem

    Aom ordiaator, qui consistit in fruitione divina, oportet eamdemfincm esse muitittidinia human, qui est homtnis unius. Non estergo tiHimus finis muilitudinis congregatae vivere secundum virtutem , sed per virtaosam vitam pervenire ad fruitionem divinam.De reg. principe lib. II, c. xiv.

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    CHAP ITRE DEUXIEME. 25

    leur do navires; l'architecte dirige le maon, lechef des armes dirige l'armurier.

    Mais T homme ne pouvant, par des vertus purement humaines, parvenir sa fin, qui est la possession de Dieu, il en rsulte que ce n'est pas unedirection humaine, mais une direction divine qui

    doit l'y conduire. Le Roi qui cette directionsuprme appartient est Celui qui n'est pas seulementhomme, mais Dieu en mme temps, notre SeigneurJsus-Christ, qui faisant les hommes enfants deDieu les conduit au cleste royaume.

    )> Afin que les choses temporelles et les chosesspirituelles ne fussent pas confondues, cette direction suprme a t confie non aux rois, mais auxprtres, et surtout au Souverain Prtre, le successeur de Pierre, le Vicaire de Jsus-Cbrist, le Pontife

    romain, qui tous les rois du peuple chrtien doivent tre soumis, comme au fils mme de Dieu. Telest Tordre : le moins se rapporte au plus, l'infrieurest soumis au suprieur, et tous arrivent leurfin

    1 Hujiis ergo regni ministorium, ut a terrenis estent spiritualiadislincta, non terrenis regibus, sed sacerdotibus est commissum etpraecipue summosacerdoti, suceessori Ptri, Chrtati vicario, Ro-mano pontifie!, cui oranes reges ropuli chrbtiani oportetesse sub-ditos, sieut ipsi Domino nostro Jesu CnrUo Sic enim e ad quera

    finis ultimi cura pertinet, subditi e#se debent illi, ad quos pertinetrura anlecedentiunj finium, et*jus imp^rio dirigi. Id., lib. I, c. xiv.

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    26 LE CSARISME.

    Pour voir dans une image sensible celte belle etprofonde exposition de la politique chrtienne, ilfaut donc considrer chaque royaume comme unnavire dont le roi est le pilote, et tous les royaumeschrtiens runis, comme une imposante escadre,dont chaque btiment doit, pour arriver au port,

    se rattacher au vaisseau amiral, qui est le royaumevisible de Jsus-Christ ou l'glise, dont le souverain pontife est le pilote. Si matre qu'il soit sur sonnavire, chaque pilote n'est pas indpendant. Afinde rester dans l'ordre, il doit toujours manuvrer

    d'aprs les signes de l'amiral, de manire dirigerson btiment vers le terme final de la navigation.A ce titre chaque roi est oblig de pourvoir ausalut ternel de son peuple, soit en ordonnant cequi peut le procurer, soit en dfendant ce qui peut

    l'empcher. C'est le pape qui lui fait connatre Funet l'autre : de mme que c'est l'amiral qui donnedes ordres aux capitaines et qui dirige l'escadre

    En rsum, le Verbe ternel, par qui l'univers a

    1

    Quia igitur vit, qua in pressenti beno vivimus, finis est beat i-tudo cteatis, ad refis officium pertinet ea ratione vitam multitu-dini* bonam procurare, secundum quod congrait ad clestembeatitudinem consequendam, ul scilicet ea praecipiat, qua adclestem beatitudinem ducunt; et eorum contraria secundum quodfuerit possibiie, interdical. Quae autem sit ad veram beatitudinem

    via,etqu *int iuipdimenta ejus, ex loge divina cognoscitur,cqjus doctrina pertinet ad sacerdotum officium. ~ td. id.

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    CHAPITRE DEUXIME. *7

    t cr et on qui il subsiste, est la loi, la voie, lavrit, la vie, et par l mme le roi souverain desnations. En se faisant homme, il a uni et subordonn en sa personne la terre au ciel, l'humanit la divinit. Ce qui s'est accompli dans l'Homme-Dieu, s'accomplira proportionnellement dans toutes

    les cratures. Tout doit tre assujetti au Christ, et,par le Christ, Dieu son pre. Telle est la grandeloi de la rhabilitation humaine et la fin de lacration. Cette grande subordination sera consomme, comme dit l'Aptre, lorsque, aprs avoir

    dtruit toute principaut, toute puissance, toute force,le Christ se soumettra lui-mme, avec son royaume,

    Celui qui lui aura soumis toute chose, afin que

    Dieu soit tout en tous *.

    D'o il rsulte que l'univers est une vaste tho

    cratie, qui se forme dans le temps pour s'accomplirdans l'ternit *.

    Ce magnifique principe est-il la base de la politique chrtienne? Nous le verrons dans les chapitressuivants.

    En attendant, l'exposition lumineuse de saintThomas montre toute la diffrence du Csarisme oude l'ordre social paen et de l'ordre social chrtien.

    Le premier dit : La Socit est un fait humain.1 I. Cor., 45. * Histoire univ*r$*lk d$ Vfflim, t. XIX,

    p. 391, premiers dition.

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    2 8 LE CSARISME.

    Le second dit : La Socit est un fait divin.Le premier: Pontife et roi tout ensemble, l'homme

    ou Csar rgne en matre absolu sur les corps etsur les mes : il ne relve de personne.

    Le second : Csar n'a pas le domaine des mes ;et mme dans Tordre temporel, il est soumis aux

    lois divines dont le souverain pontife est le conservateur et l'interprte.Le premier dit : Nul pouvoir qui puisse ou qui

    doive contre-balancer celui de Csar : franchises,liberts, distinctions, ducation, proprit, tout

    doit venir de lui, dpendre de lui, se rapporter lui.Le second dit : Soumission de Csar an pontife ;

    respect aux liberts de tous, aux franchises, auxlibres, aux droits acquis.

    Le premier dit : La religion est un instrument dergne.

    Le second dit : La religion est le but des rgneset la fin des empires.

    Le premier dit : L'glise est dans l'tat, comme

    la servante dans la maison.Le second dit : L'tat est dans l'glise, comme

    l'enfant entre les bras de sa mre.Le premier dit : Mon suprme devoir est de

    procurer aux peuples le plus de jouissances possible, sans considration avec leur fin dernire.

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    CHAPITRE DEUXIME. 29

    Le second dit : Mon devoir est de faire peu pourles plaisirs des peuples, beaucoup pour leurs besoins , tout pour leur vertu, afin de les conduire la possession ternelle du souverain bien.

    Tels sont, dans leurs grandes lignes, les deuxsystmes sociaux qui se partagent la dure des

    sicles. Entre le jour et la nuit, l'opposition n'estpas plus complte. De l sont sorties deux civilisations diffrentes. La civilisation paenne, ou le cultesocial de l'homme avec la force brutale pour rgle,l'esclavage pour base, le sensualisme pour but; la

    posie, la peinture, la sculpture, la musique, lesftes, tes thtres, tous les arts corrompus et corrupteurs pour accompagnement; les crimes, les bouleversements et la dgradation pour rsultat. Lacivilisation chrtienne ou le culte social de Dieu,

    avec la mrit pour rgle; la libert pour base;l'affranchissement de l'esprit pour but; tous lesarts sanctifis et sanctificateurs pour accompagnement; la vertu, la paix et le vritable progrs pourrsultat.

    Nos aeux, simples et naifs, optrent pour lesystme chrtien. Un rapide coup d'il sur leurhistoire nous montrera les bnfices qu'ils en retirrent, ainsi que l'ide sublime qu'ils avaient de lapolitique et de la royaut.

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    CHAPITRE III.

    HISTOIEE 0 1 LA POLITIQUE CHRTIENNE.

    Bue 4e KL BOUTIQUE chrtienne. Pouvoir social dela papaut.Paroi*

    daa crivains protestants. Les rois de France et d'Angleterre jugspar k pape. Compromis des rois de France et d'ARAGON. Appela Jnpmtst du pape. Affaire de Louis le Dbonnaire, de Lothaire,rai i'Aiistrasie. Dposition de l'empereur Henri IV. Bulle desalt Grgoire VII. Dposition de l'empereur Frdric. Bulled'Innocent IV.

    Dan* 1 personne de Pierre, le fils de Dieu est lechef visible de la socit chrtienne. Par la bouchede cet antre lui-mme, il dit ternellement aux rois

    et ai peuples cette parole toujours ancienne ettoujours nouvelle : Toute puissance rric t donne

    a u ciele t s u r la terre; et ses vicaires dans la suite

    des sicles : Je vous donnerai les clefs du royaume des deux ; tout ce que vous dlierez sur la terre sera

    UlU dans le ciel, et tout ce que xvus lierez sur laterre sera li dans le ciel,* vous tes la lumire du

    monde / enseignez toutes les nations et apprenez-leur prendre toutes mes lois pour rgle de leur con

    duite l. 1

    Matth.,XVI, etc.

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    CHA PIT RE TROISIME. Si

    Tout est soumis ces clefs, s'crie Bossuet ; tout,mes frres, rois etpeuples, pasteurs et troupeaux1.

    Dpositaire de l'autorit du Roi des rois, organeiLfeillible de ses volonts, le Souverain Pontife setrouve plac au sommet de la hirarchie sociale :entre ses mains sont les rnes qui doivent diriger

    le monde chrtien vers sa fin dernire; sur sonnavire est la boussole qui doit indiquer la route itous les navires, les maintenir dans leur ordre debataille et les acheminer au port de l'ternit. A luile droit de tracer la marche et de donner le mot

    d'ordre aux conducteurs des peuples ; lui djugeren dernier ressort les conflits entre les pilotes et lesquipages, en notifiant aux uns et aux autres les loisde l'ternelle justice. Et comme un pouvoir judiciaire est nul s'il n'est arm, k lui le droit de forcer

    par des peines efficaces les coupables l'obissance,'et mme 4'ter le commandement aux capitainesobstinment rebelles, qui, trahissant leur mission,conduiraient aux abmes et leur navire et les passa*gers.

    A moins de soutenir que la lin suprme desnattons n'est pas la mme que celle des individus,c'est--dire que cette fin renferme dans les limitesdes temps consiste vendre, acheter, boire\ man~ger, dormir et digrer en paix sans souci de l'ter-

    1 Serm. $ur Vunit dt glite.

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    32 LE CSARISME.

    nelle vie; ou que chaque pouvoir social a le droitde rgner suivant ses caprices ; ou enfin, qu'il a ledroit d'interprter infailliblement la loi divine : cesprincipes sont d'une vidence incontestable. Lemoyen ge en fit la base de son ordre social. Etquelque dur qu'il soit de l'entendre, il faut le redire:

    ces grandes vrits avec les consquences pratiquesqui en dcoulent, ont cr la civilisation chrtienneet fond la libert du monde; comme l'oubli de cesmmes vrits reconduit le monde la barbarie et l'esclavage. Telle est ici l'vidence des faits et la

    certitude du droit, que les protestants eux-mmeslui rendent hommage. C'est mme une justice quileur est due, ils le font avec une bonne foi et uneadmiration capables de faire rougir certains crivains soi-disant catholiques.

    Pour tre soumis la haute direction du pape,disent-ils, qu'on ne croie pas que les royaumes dumoyen ge en fussent moins heureux ni moins libres :le contraire est la vrit. C'tait une belle souverainet que celle des Innocent et des Grgoire... Respec

    tez-moi, soumettez-vous, obissez, disait-elle; enchange, je vo donnerai l'ordre, la science,l'union, l'organisation, le progrs..... D'une main,la papaut luttait contre le Croissant; de l'autre,die touffait les restes du Paganisme nergique duSeptentrion. Elle ralliait comme autour d'un point

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    CHAPITRE TROISIME. 3 ;

    centra!, les forces mora'es et intellectuelles de l'espce humaine : elle tait despote comme h* soleil qui

    fait rouler le globex.

    Diriger au flambeau de l'Evangile l'humanitrgnre dans la voix du vritable progrs; inspirerdes lois, crer des institutions en rapport avec ce

    but lev ; y ramener toutes les sciences, tous lesarts et jusqu'aux ftes populaires; faire de tous lesroyaumes chrtiens une famille toujours armecontre la barbarie, tel fut pour les nations du moyenge, le premier bienfait de la politique chrtienne.

    Maintenir la paix dans leur sein, en loigner lesdeux plus grands flaux de l'humanit, le schismeet lhrsie, terminer, autant que possible, leursquerelles en vitant l'effusion du sang, est le second.

    a N'tait-ce pas chose admirable, continue l'au

    teur dj cit, de voir un empereur allemand, dansla plnitude de sa puissance, au moment mme oil prcipitait ses soldats pour touffer le germe desrpubliques d'Italie, s'arrter tout coup et nepouvoir passer outre; des tyrans couverts de leur

    armure, environns de leurs soldats, Philippe deFrance ou Jean d'Angleterre, suspendre leur vengeance et se sentir frapps d'impuissance? A lavoix de qui, je vous prie? A la voix d'un pauvrevieillard, habitant une cit lointaine, avec deux

    1

    Quarterly RevLw, an. 484 i, et *.VI. 3

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    LE CSARISME.

    bataillons de mauvaises troupes, et possdant peine quelques lieues d'un terrain contest! N'est-ce pas un spectacle fait pour lever lame, une merveille plus trange que toutes celles dont la lgendeest remplie1 ?

    Les exemples que l'auteur cite avec une si lgi

    time admiration, ne sont pas des faits isols. L'histoire de l'Europe au moyen ge est pleine de monuments et d'actes solennels, qui font briller avecclat la loi fondamentale de la politique chrtienne ,le rgne de Jsus-Christ et l'autorit sociale de la

    papaut.Les Capitulaires de Charlemagne commencentainsi : a NOTRE SEIGNEUR JSUS-CHRIST RGNANT aMUAIS : Moi, Charles, par la grce et la misricordede Dieu, roi el chef du royaume des Francs, dre*

    dfenseur el humble coadjuteur de la sainte glise deDieu : tous las ordres de la pit ecclsiastique et toutes les dignits de la puissance sculire, lesalut de la perptuelle paix et batitude au Christ,seigneur Dieu ternel*.

    Dans les actes des particuliers pendant le moyenge, on trouve frquemment, avec l'anne du rgnedes princes, cette formule des premiers chrtiens : Rgnante Jesu Christo, JSUS-CHRIST RGNANT.

    * M. ib.2

    Baiuz., Capitul. reg. franc, t. F, col. 209.

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    CHAPITRE TROISIME. 5

    3.

    .Souvent la mort d'un roi, on lit : Fait dansVanne que mourut le roi N., SOLS LE RGNE DE JSUS-CHRIST, et tandis que nous attendions de lui unnouveau roi 1 .

    Suivant le protestant Blondel f nos anctres apposaient cette formule leurs actes pour nous rappelersans cesse que tout ce qui nous r

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    36 LE CSARISME.

    Aux monuments crits se joignent les actes. Enf208 la guerre clate entre Philippe de Franceet Edouard d'Angleterre. Malgr l'esprit nouveauintroduit par le Csarisme allemand, les deux puissants monarques conviennent de remettre au souverain pontife le jugement de leur diflrend. Le pre

    commun entend les plaintes de ses fils ; et pour neblesser personne rejette la guerre sur le dmon,l'ternel ennemi du genre humain; puis, juge,dfinit et prononce que la paix aura lieu aux clauseset conditions qu'il indique. Les deux rois s'inclinent

    devant la sentence du vicaire de Jsus-Christ; lesang cesse de couler, et une fois de plus les peuples bnissent la puissance sociale de la papaut

    En 1365 se rencontre un fait analogue, glorieuxvestige de l'ancien droit social de l'Europe chr

    tienne. Le roi de France et le roi d'Aragon sont enguerre. Tout coup ils se souviennent qu'ils sontrois chrtiens, que le sang des peuples leur sera redemand, et qu'il existe dans le systme social del'Europe un moyen pacifique de rtablir l'harmonie.

    Avec une simplicit sublime ils crivent le compromissuivant : Nostre saint-pre le pape du consentementde nous et de nostre dict frre, sera charg pour enordonner, parties oues, si comme il lui semblera

    1 Voir le texte de la sentence pontificale dans le Coiex jurisgmtium dipomaticus de Lfibnits, an. 129S.

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    tlHAPlTRK TROISIEME. H

    h faire par raison, et que nous et nostre diet frrenous en soumettrons nostre dict sainct-pre, sansprjudice de nostre souverainet, par les plus fortessArets qu'il pourra estre faict et ne pourrons jameznous ne nostre diet frre, ne les successeurs denous ou de luy, procder par voye de faict ne

    de guerre, pour occasion des demandes et chosesdessus dictes, ou des dpendances, mais en con-noistre toujours nostre dict sainct-pre, qui est etqui sera pour le temps 1 .

    Comme on voit, ds le commencement de l'

    glise, outes les grandes causes religieuses arriverdes diffrentes chrtients de FOrient et de l'Occident, au tribunal suprme du saint-sige, ainsinous voyons la France, T Angleterre, l'Espagne, /Allemagne du moyen ge soumettre leurs grandes

    causes sociales au jugement du souverain pontife.Cette haute magistrature, les papes l'exercent,

    non, comme on l'a prtendu, en vertu d'une concession des rois et des peuples, concession imaginaireet dont on ne trouve pas de vestige; mais bien en

    vertu d'un droit inhrent leur qualit de chefs dela socit chrtienne, d'interprtes infaillibles deslois divines, et de juges divinement tablis pourdcider les points de droit aussi bien public que priv,et revtus de l'autorit ncessaire pour faire excuter

    1 Libert* de Vglise gallicane, par Pitbou, 1.1, p. ! 19.

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    38 LE CAR!SME.

    leurs sentences. Tel est !e titre que les successeurs dePierre invoquent toutes les fois qu'ils accomplissentun de ces grands actes d'autorit sociale, si lgitimes,si salutaires, si justement bnis au moyen Age, et siodieusement calomnis de nos jours.

    Grgoire IV, dans les diffrends entre Louis le

    Dbonnaire et ses enfants ; Nicolas P

    r

    dans l'affaire deLothaire, roi d'Austrasie ; Urbain II, Victor III, tousinvoquent leur droit, et non la concession chimriquedont on parle. Mais citons quelques faits plus clatants. L'empereur Henri IV, appel le Nton de l'Al

    lemagne, nom qu'il mrita trop justement par sescruauts, ses dbauches, ses brigandages et sesattentats contre la libert de ses peuples, les droitsde ses voisins et l'autorit de l'glise, est plusieursfois averti par le pre commun des rois et des peu

    ples de rentrer en lui-mme et de se souvenir quele pouvoir lui a t donn non pour dtruire, maispour dier, non pour opprimer, mais pour protger. Henri mprise les avertissements. Viennentles menaces, dont il ne tient aucun compte.

    Alors le souverain pontife se souvient qu'il est levicaire du Roi des rois, et prononce en ces termesla dchance de celui qui s'est dclar lui-mmeindigne du trne : Bienheureux Pierre, il vous aplu et il vous plat que Je sois le chef du peuple

    chrtien, spcialement confi voue sollicitude; et

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    CHAPITRE TROISIME

    | K I R vous m'a t donn do Dieu le pouvoir do lieret de dlier au ciel et sur la terre. Kn consquence,pour l'honneur et la dfense de votre Eglise, do lapart du Dieu tout-puissant Pre et Fils et Saint-Esprit, en vertu de votre puissance et de votre autorit, J'te au roi Henri. fils de l'empereur Henri, qui,avec un orgueil inou s'est insurg contre votreglise, le gouvernement de toute l'Allemagne et de(Italie.

    Et Je dlie tous les chrtiens du serment de fidlit qu'ils lui ont fait, et je dfends quiconque de

    lui obir comme un roi. Car il est juste que celuiqui s'tudie diminuer l'honneur de votre glise,perde lui-mme l'honneur dont il jouit. En vertu devotre autorit, dont Je suis hritier, je l'enchanepar le lien de l'excommunication, afin que les na

    tions sachent et prouvent que vous tes Pierre, etque sur c ' ierre le Fils du Dieu vivant a bti songlise, et que les portes de l'enfer ne prvaudrontpoint contre elle.

    Donn l'an de l'incarnation du Seigneur mil

    soixante-quinze,1

    1 Bate Petre... tibi placuitet placet et populos ehristanas, tibi

    spcialiter communs, mihi obediat, et mihi tua gratia est potestasdata ligandi atque sol vend i in clo et in ferra.

    Hac itaque Oducia fretus, pro EccSesire ttue honore et defensione,ex part* omnipotentis Dei Patris et Filii et Spiritus sancti, |>er

    tiiam potesiatemet auctorititera Henricurgi, lilio Ilenriu tmpera-

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    iO LE CSARISME.

    D^ux sicles plus tard, en 1243, Innocent IV,en prsence du concile gnral de Lyon, invoque lemme droit et use de la mme formule contre l'empereur Frdric, cet autre Csar dont les crimesfurent la terreur et la honte de son sicle. Aprsavoir numr les forfaits de tout genre dont Fr

    dric s'est souill, ainsi que les avertissements paternels dont il a t l'objet et qu'il a mpriss, lesouverain pontife rappelle qu'il a t tabli pourpeser dans la balance le mrite et le dmrite, le

    juste et l'injuste, pour maintenir la paix de l'glise

    et la tranquillit gnrale de la socit chrtienne.Puis il ajoute : a En consquence, la cause soumise l'examen diligent du saint concile, puisque Noustenons, malgr notre indignit, la place de Jsus-Christ sur la terre, et qu'il N o u 3 a t dit dans la

    personne du bienheureux Pierre : Tout ce que tuliera$ sur la terre sera li dans le ciel, et tout ce que

    toris, qui contra Umm occlesiam inaudia suporbiainsurrexit, totiusregni Theutonicorum et tai :ae gubernacula contradico.

    Et omnes christianos a\incuio jurameoti, quoi sibi faciunt volfecerunt, absolve; utnulius ei sicut rgi serviat, interdire. Dignumest enim, ut qui studet honorern Eccli-si tua imminuere ipso honorerai amittat quein videtur habere. Viuculo eum anathematis vicetuaailigo, ut sciant gnies et comprobent quia tu esPetrus, etsuper tuam petrara Fiiiua Dei vivi dificavit Ecebsiam suam, etporte.inferi non praevalebunt advenus eam, etc.

    Datum anno ab incarnation Domini MLXXV. Builar. rom.,

    t. II, p. 35.

    http://incuio/http://incuio/http://incuio/
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    * ' Il A PIT Il F T I U J l S I U B . M

    tu dt-livras sur la (erre sera ilvliv dans le ciel ; Nousilclaions priv par le Seigneur de tout honneur etdignit, et tel Nous dnonons ! dclarons par notresentence le susdit prince qui ./est rendu si indignede l'empire, du royaume et de toute espce d'honneur et dignit, et qui par ses iniquits a mrit d trerejet de Dieu et priv du droit de rgner ; dliantpour toujours de leur serment ceux qui lui ont jurfidlit, dfendant en vertu dv Vautorit a/mtolique

    quiconque de lui obir dsormais comme s'il taitempereur ou roi, frappant d'excommunication ipso

    facto ceux qui lui donneraient conseil ou assistance; que ceux auxquels appartient l'lection del'empereur lui choisissant librement un successeur.

    Donn Lyon, le 16 des calendes d'aot,

    tanne troisime de notre pontificat *.

    1 Ad apostoliim dignttatis apicem, licet indigni dignationedivir.ae m :jestatis assumpti Cum fratribus nostris et sacro concilie), de iberMione pnehabita diligenli, eum j *m Christi vires licetimmeriti tenemuis in terris, nobkque in B. Ptri persona sit die-

    tum : qwHkuwqut Ugaverii, etc., memoratum prineipem, qui seimperio et rtgno, orrnlque honore ac dignilate reddidit lam indig-num, quiqae propfersuas iniquitates, a Deo ne regnet vel imperetest abjectus, suis ligalum jieccati* et abjectum, omn'que honoreet dignitate privatum a Domino o*< ndimus, denunciamus ac nihil-umnius sententiandc privamus; omnes qui ei 4uramento fideli-

    tatis tenentur adstricti, a juramento hujusmedi perpetuo absol-

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    42 LE CSARISME.

    Ces actes clatants que n'osent avouer certains catholiques, ces pontifes pour lesquels l'impit n'a pasassez de colres, les protestants les admirent. Parlant des papes et de l'exercice de leur suprmatiesociale, le clbre Jean de Muller crit ces paroles : Sans les papes, Ptome n'existerait plus; Grgoire,

    Alexandre, Innocent, opposrent une digue autorrent qui menaait toute la terre; leurs mains paternelles levrent la hirarchie, et cte d'elle lalibert de tons les tats 1 .

    Ce torrent, c'tait le Csarisme. Inspir par ses

    lgistes, Frdric II voulait marcher sur les tracesde quelques-uns de ses prdcesseurs, et aspirait tre le seul souverain, le seul propritaire, la seuleloi du monde.

    a Comme ses prdcesseurs, disent deux cr-

    vains gallicans, Frdric ne cachait point le projetde relever l'empire des Csars, et, sans l'influence

    des papes, il est probable que l'Europe aurait subile joug des empereurs de la Germanie. Frdric,rvant son tour la monarchie universelle, tendait

    certainement s'affranchir de la suprmatie de

    ventes I1H aulem ad quos in eodem imperio mperatorts spectaelectio, rgant libre soecessorem.

    Datum Lngduni decimo seito calendas augiisti, anno tertio. BuH. roro. Ib.

    1

    Voyages des papes, 17 s .

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    CUATITR TROISIME. i.\Rome. L empereur faisait appeler par sou chancelier tous les autres rois du monde rois provinciaux,et U s'intitulait lui-mme In loi rivante

    D'une part, il prtend rduire les rois do Sude,de Danemark, d'Angleterre, d'Espagne et de France,au rang de ses vassaux; d'autre part, il prtendque les papes lui serviront d'instrument dans cetteentreprise, comme le Mufti de Constantinople ensert au Grand Turc. Les papes s'opposent avec uncourage invincible ce monstrueux despotisme. Poursauver la libert et l'indpendance de l'glise, et

    avec elle la libert et l'indpendance de tous les roiset peuples de l'Europe, ils privent de toute autoritles modernes Nrons.

    O est le mal ?

    1 Michaud, Histoire des croisades, 1.1\\ p. 67, 6 , n e dition. -

    Le marquis de Villeneuve-Trans, Histoire de saint Louis, t. I,p. $38.

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    CHAPITRE IV.

    H I S T O I R E DE LA P O L I T I Q I E C H R T I E N N E (suit?).

    P e r m a n e n c e du droit pontifical. Dposition d'Henri Mil. Bulle

    d e Paul I I I . Dposition d'I l isaix th. Bulle de saint Pie V.

    Rflexions, Paroles de M. Coquerel. De Louis Hlaue. Di

    lemme. Rsultats MKiauv de la politique chrtienne et du C E n t r i s m e .

    Les ides des peuples et des rois peuvent changer, les nations choisir de nouvelles formes gouvernementales , mais le drci f ne change pas. En plein

    seizime sicle, une nouvelle sentence d'excommunication et de dposition fonde sur la mme autorit va frapper une tte non moins odieuse que cellede Frdric. Un tyran, dont les murs rappellentcelles d'Hliogabale, et la cruaut celle de Caligula,

    Henri VIII, fait asseoir tous les crimes sur le trned'Angleterre, et souille \Ue des saints par le pillagedes monastres, la destruction des glises, la profanation des tombeaux et le supplice de soixante-douzemille catholiques.

    Le pre de la grande famille europenne est in-

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    CHAPITRE QUATRIME. 4 5

    form de tant d'excs; il avertit, il reprend , il con jure : tout est inutile. Se rappelant alors et son devoir et son droit, il dpose le monstre couronn,dcharge l'Angleterre de l'obligation de se soumettre ses odieux caprices, et, autant qu'il est en lui,sauve le navire de l'abme o le conduit son cou

    pable pilote. Celui, dit Paul III, qui de son immobile ternit imprime par sa providence toutes lescratures le mouvement que nous admirons, a daign, dans sa clmence, Nous tablir, sans mrite denotre part, son Vicaire sur la terre, Nous placer sur

    le trne de la justice et Nous dire comme Jrmie :Voil que je Cai constitu sur les nations et sur lesroyaumes, avec pouvoir d'arracher et de dtruire,

    d'difier et dplanter.

    Imitant celui dont la misricorde gale la puis

    sance, press par la sollicitude apostolique qui Nousoblige veiller au bien de toutes les personnes divinement confies nos soins, Nous nous voyons oblig,pour les mettre l'abri des erreurs, des scandales,des excs et des normits de tout genre dont la

    malice du dmon les environne, de svir contreceux qui en sont les auteurs

    En consquence, pour mettre le tyran hors d'tatde nuire, et sauver ainsi l'ordre public, la libert, laproprit, la foi de l'Angleterre, le souverain pontife

    1

    Ejus qui immobile permanent, et : , Bullur., t. IV. p. 135-

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    4 6 LE CESARISME.

    fait le vide autour de lui, en dfendant, sous peined'encourir la mme excommunication dont il estfrapp, de lui obir, de lui prter aide ou assistance; puis, s'il demeure obstin, le chef de la famille europenne ordonne tous les rois ses filsd'aller au secours de 1 Angleterre, et de la dlivrer

    du sanglier qui la ravage

    1

    .L'Angleterre mconnat la voix du pre commun,et en punition de sa dsobissance, elle tombe sousle joug d'une femme dont les cruauts, les injustices, les infamies, ont une place part dans l'his

    toire; d'une femme dont la main souille du sang desa sur, signe le long martyre de l'Irlande, la mortau milieu de tortures inoues de tout ce que l'Angleterre a de plus recommandable, la spoliation surla plus vaste chelle, et enfin, ce qui est niiic fois

    plus triste, l'acte qui arrache l'le des saints sonantique foi, pour la jeter en proie au Csarismeaveugle et brutal, personnifi dans la fille d'Annede Bouleyn.

    Le trne de Pierre est occup par un saint. Fidle

    sa mission, Pie V, suivant l'exemple de ses prdcesseurs, fait usage du droit social dont la pa-

    1 Fautores, adharentes, consulteras et sequaces dicti Henricirgis... de catero non adsistant, non adha*reant, vel foveant...Principes contn Henricum et complices t:ma capiant, etc

    /

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    CHAPITRE QUATRIME. 47

    paut est dpositaire. Le 23 fvrier 1570, il lancecontre F K ^beth la sentence de dposition, fonde,non sur uu droit conventionnel, mais sur l'autoritapostolique. Celui qui rgne dans les hauteurs, qui a t donne toute puissance au ciel et sur laterre, a confi le gouvernement souverain de l'slise

    une, sainte, catholique et apostolique, hors de laquelle il n'y a point de salut, un seul chef sur laterre, savoir, le prince des aptres, Pierre, et au successeur de Pierre, le pontife romain. Seul il Ta tabli prince sur toutes les nations et sur tous les

    royaumes, a6n de draciner, de dtruire, de dissiperet de jeter au vent, de planter et d'difier, de manire contenir le peuple fidle par le lien de la charit et dans l'unit du Saint-Esprit, et de le prsenter sain et sauf son Rdempteur...

    En consquence, appuy sur l'autorit de celuiqui, malgr notre indignit, a daign Nous placersur ce trne souverain de la justice, dans la plnitude de t autorit apostolique, Nous dclarons la susdite Elisabeth hrtique et fautrice des hrtiques,

    et ses adhrents excommunis et retranchs de l'unit du corps de Jsus-Christ.

    De plus, Nous la dclarons prive de tout droitau royaume d'Angleterre, ainsi que de toute autorit, dignit et privilge; et les grands, les sujets et

    les peuples dudit royaume, et tous ceux qui lui ont

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    LE CSARISME.

    prt un serment quelconque, dlis pour toujoursde tout serment de fidlit et d'obissance, commeNous les dlions par l'autorit des prsentes. Dfendons et interdisons, sous peine d'excommunication, tous et chacun dobir, soit elle-mme, soit ses ordres ou ses lois *.

    D'aprs ces actes solennels, on voit, suivant lapense de Leibnitz, conforme celle de saint Thomas, que les papes sont les chefs spirituels, et les empereurs ou rois, les chefs temporels mais subordonns de l'glise universelle ou de la socit

    chrtienne : le droit public repose T U R cette base, etles jurisconsultes du moven ge raisonnent sur cepied-l f.

    On voit de plus, nous le rptons, que c'est en

    1

    Regnans in excolsis, cui data es*, omnis in clo et in lerrjprotestas, unam, sanctam. catholicam et apostolicam Eeciesiam.extra quatn nulla est saus, uni soli in terris, viJelieet aposlolorumprincipi Petro, Petrique succesori romano pontifia*, in polestalisplenitudine tradidit gubernandam. Hune unum super omnes gentes,et omnia rgna principera constitua, qui evellat, destruat. dis^ipet,dnperdat, plantet et axiifieet, ut fidelem populum niutu;p earitaii>nexu constrictum, in unitateSpiritus conlneat, sahumque et inco-!umem suo exlibeat Salvalori, etc., etc.

    Datum Romae apud S. Potrum, anno in arnat>onis dominicc ! *>7o.ralendas martii, pontifcatus nostri anno V. Bull. rom.. t. IV,p. 98.

    f Ohservat. sur le projet d'une paix perptuelle, par M. YnhW

    de Saint-Pierre, p. 59. uvres, t. V, in i, iition 7(38.

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    CHAPITRE yUATRIKMK. 4 . .

    vertu dune autorite inhrente leur charge, etnon en vertu d'une concession ou d'un compromis,que les souverains pontifes exercent leur suprmemagistrature. L'histoire le dit et la raisou leprouve.

    Comme dans Tordre religieux il faut iL toute n

    cessit un juge infaillible du vrai, de mme dansTordre social il faut un juge suprme du juste. Ole/ce jugement au pape, vous le donnez la force.Le duel, justement dfendu entre les particuliers,devient non-seulement lgitime, mais ncessaire de

    peuple peuple, et de peuples rois. Or pesez laconsquence : si Tordre social est tellement constituque la raison du plus fort soit la dernire raison dudroit, o est la bont, o est la justice > o est lasagesse de Dieu? Le genre humain n est plus, comme

    dit Rousseau, qu'une agrgation d'individualit*,hostiles, rgie par la morale des loups.

    Toutefois , en voyant les papes dpoter les rois etdlier les sujets de leur serment de fidlit, plusieut.se scandalisent. Pour excuser cette conduite, les

    uns essayent des explications malheureuses; ilsn'avouent les faits qu'avec timidit et presque enrougissant: aux yeux des autres, l'poque qui reconnaissait pour base de son droit publie une pareille tyrannie semble barbare, et ils saluent comme

    l're de la dlivrance le jour o finit la souverainetVI. i

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    0 LE ( SAUSME.

    sociale de la papaut. Que tous entendent ce queleur rpondent des hommes non suspects.

    Le pouvoir papal, dit un ministre protestant,disposant des couronnes, empchait le despotismede devenir atroce. Aussi, dans ces temps de tnbres,ne voyons-nous aucun exemple de tyrannie compa

    rable celle des Domitien de Rome. Un Tibre taitimpossible, RomeTet cras. Les grands des/mtismesarrivent quand les rois se persuadent qu'il n'y a rien

    au-dessus d'eux : c'est alors que l'ivresse d'un pouvoir illimit enfante les plus atroces forfaits

    En levant les rois au-dessus de ionte juridiction ecclsiastique, ajoute Louis Blanc, vous avezcru placer les trnes dans une rgion inaccessible auxorages. Cette erreur fait piti. L'mancipation dupouvoir papal ne change rien la ncessit d'un

    contrle. Elle ne fait que le dplacer, elle le transporte au parlement d'abord, puis la multitude. Lemoment vint, en France, o la nation s'aperutque LIIDPENOANCE DBS KOIS C'TAIT LA SERVITUDE DES

    PEUPLES. La nation alors se leva indigne, bout de

    souffrances, demandant justice. Mais les juges dejaroyaut manquant, la nation se Ht juge elle mme,et l'excommunication fut remplace par un arrt demort 8 .

    * Ch. Coquere, Essai sur l'histoire du christianisme, p. 7->.51 Histoire de la rvolu t ion} 1.1, p. 252.

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    CHAPITRE QUATRIME. >j\

    Tel est, en effet, le dilemme impitoyable que lesdtracteurs de la politique chrtienne ont rsoudre:ou vous admettez dans la socit un pouvoir sanscontrle, ou vous ne l'admettez pas.

    Si vous l'admettez, vous consacrez avec le despotisme le plus monstrueux l'abrutissement de la

    nature humaine, en rivant jamais les fers de l'esclavage au trne de tous les tyrans.

    Si vous ne l'admettez pas, voici l'alternative quise prsente : ou le contrle de la raison ou le contrle de la force ; ou la souverainet du pape ou la

    souverainet du peuple ; ou l'excommunication oul'chafaud; ou les canons du Vatican ou les canonsdes banicades.

    A chacun son got : dans leur simplicit, nosaeux, s'inclinant devant la souverainet sociale duvicaire de Jsus-Christ, lui disaient : a Vous tes lepre commun des rois et des peuples : vous dedcider entre vos enfants. En cela, nous les avonsirouvs barbares et nous avons dit Pierre : Nous

    ne reconnaissons pas ton autorit sociale; nous nevoulons pas que tu te mles de nos affaires; noussaurons bien les rgler sans toi.

    Voici quelques-uns des bnfices de cet acte demodestie et de pit filiale :

    4 L'Europe est rentre fatalement dans les con-4.

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    h* LE CESARISME.

    ditions sociales du paganisme, o, en cas de conflitsociaux, la force seule dcidait du droit;

    2 Tandis que dans la longue priode de six cent-ans on trouve peine cinq ou six rois, bourreauxde leurs peuples et opprobres de l'humanit, privesd'un pouvoir dont ils taient manifestement in

    dignes; c'est par centaines qu'i! faut compter, depuis la Renaissance, les trnes renverss, les couronnes jetes au vent, les rois, bons ou mauvais,chasss, dpouills de tout honneur et dignits,condamns l'exil, prissant sous la hache du bour

    reau ou par le fer des assassins.3* Avec la suprmatie pontificale, religieusementaccepte, nous n'aurions eu ni les guerres de religion qui ont ensanglant l'Allemagne, la France,l'Angleterre et la Suisse, aux seizime et dix-sep

    time sicles; ni le partage de la Pologne; ni lesscandaleux traits qui, attribuant Terreur desdroits qu'elle n'a pas, donnent une patente auxfaux monnoveurs de la vrit. Nous n'aurions euni les spoliations sacrilges du josphisme, ni l'

    branlement gnral de la proprit, ni les saturnales de 93, ni le culte de la Raison : et encoreaujourd'hui nous n'aurions ni l'incertitude dudroit, ni la ngation du devoir, ni des dynasti *sans lendemain, ni des peuples sans avenir, ni de

    socits ingouvernables, ni ce dluge universel de

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    i II A P l i Kl: y U A T K I M E . :.:

    doctrines monstrueuses qui menacent de transformernotre civilisation en barbarie, et de renverser l'Europe dans Fabime sans fond du socialisme.

    Voil pourtant ce que fait dans le monde undogme de plus ou un dogme de moins.

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    CHAPITRE V.

    HISTOIRE DU CSARISME AVANT LA RENAISSANCE.

    DROIT POLITIQUE.

    Le* empereurs d'Allemagne. ~ Le droit romain, )HIit|u* et

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    RU\IMTRI-: r . i x y r i r . v r

    drie d'Allemagne. Honors par le saint-sige dutitre de Csaret d'Auguste, ils prtendent en EXEREERLES anciennes prrogatives rvent LA monarchieuniverselle leur profit, ET commencent branlerLE dogme fondamental de la politique chrtienne,.si glorieusement proclam par Cbarlemagne : la s#;-

    parution des jnnwoirs, et la subordination neessaire

    rit j>4>uvoir temporel aa pouvoir spirituel.

    En Allemagne, ils prchent leurs prtentions parLi force; en Italie, ils leur cherchent un appui dansla popularit. Sur toutes les cits de la pninsule ils

    rpandent un esprit d'indpendance, non pour lesaffranchir, mais pour les attacher leur parti. Del naissent pour l'Italie des dissensions interminables, et pour l'Europe les grandes luttes dusacerdoce et de L'empire. L'instinct de leur ambi

    tion devient le thme favori des juristes courtisansqui, dans les universits de Bologne et de Padoue,essayent de le justifier devant la jeunesse de toutestes nations.

    Le DROIT PUBLIC et le DROIT CIVIL : voil les deux

    courants par lesquels les ides politiques et socialesde l'antiquit paenne, reviennent scientifiquementau sein de l'Europe de Charlemagne et de saintLouis. Si nul fait n'est plus certain, nul n'tablitmieux la grande thse que nous soutenons, savoir :

    Ql E LEf.SAfUSMB MODERNE ?I*EST Qi Y>i R A M E A U EMPOi-

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    LE < : S . \ R I S M E .

    SONNK gil A RENERIM SIR LE VIEl'X TRONC DU PAGANISME t

    \L SOI'FELEDE L'ENSEIGNEMENT CLASSIQUE.coutons ce sujet un des plus clbres phi

    losophes allemands.

    Un autre prsent non moins malheureuxque celui

    de IWnstote arabe, dit Frdric de Schlgel, intro

    duit en Europe par Frdric II, fut l'ancien tiraitelle tiettx code romain, que le gibelin Frdric l r r

    confirma solennellement dans les plaines de Ron-

    cagiia, avec tous les droits rguliers et toutes lesprrogatives de la couronne quil sut en faire dcouler

    son profit; ouvrant ainsi pour les sicles suivantsla porte tous les tours et dtours de la chicane,

    cette dialectique inextricable du barreau, une

    scolastique juridique sans issue et sans fin.

    Dj sans doute, avant lui, la jur: prudence

    romaine, ce code prolixe de Justinien faisait autorit sous les empereurs est-francs, lorsque le juris

    consulte allemand Irnrius fonda Bologne une

    chaire de cette nonwlle science. Mais les vieilles for

    mules de domination universelle qui se trouvent parws

    dans ce corps de droit romain souriaient, tout particulirement aux empereurs gibelins ; ils s'en servirent

    donc avec assez peu de rserve contre les empereurs

    grecs et contre d'autres rois, comme de titres vidents ou du moins trs-plausibles du droit qu'ils re

    vendiquaient la monarchie universelle.

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    i . l ! AIMTttK r.lNUl'IKil-:. >>~

    Ai ns i , c'est partir du t em ps drs Gi be li ns , et

    par suite de la vogue des principes absolus, que cet

    corps de lois rouaines, dont le- ?' >r mules artificielles

    et le ri go ur eu x encha nement ne s*harmonisaient

    ni av ec la \ i e no uv el le , ni a \ e e k s i i i u m l . alle

    m a n d e s , ni avec i esprit du christianisme, devientl'objet d' un e sc ien ce la m o de , ou plutt l'occas ion

    d'une nouvelle maladie du sicle.

    La > raie tache le la science du droit dans l'Oc

    cident chrtien, aurait t de ne voir dans cette

    vieil le ju ri sp rud en ce qu'u n art parfait; d'empr unter

    par co ns q ue nt ses formes , mai s d'en rformer l'es prit d'aprs les principes et tes ides du droit chrtien,

    en se faisant un devoir de puiser aux sources indi

    gnes et de recueillir cette foule d'excellentes choses

    rpandues d-insles anciennes lgislat ions germaines.

    Toutes lo ca le s, il est vr ai , et m in em me nt i nd i vi d u e l l e s , celles -ci pour la plupart co nve na ie nt a u x

    m u r s si mp le s et l'enfa nce d'u ne nation be l

    l i qu eu se , san s rpondre a u x bes oins d es civi l isa

    tions postrieures plus avances; et cependant elles

    offrent par to ut , a v e c de s traces d' un e ha ute qu i t ,la ba se nette et prc is e d e la libert v ri ta bl e

    Pour dterminer la renaissance de l'antiquit,

    ajoute un crivain franais, il fallait une cause mo

    rale : el le se prsent a. Ta nt qu'i l n'y av ai t en Italie1

    Philosophie de l'histoire, t. II, leon xiv.

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    que des prtendants I empire issus du sang car-loviugien, la couronne impriale, que Oharlemagneavait place au-dessous de la tiare, s'inclina devantla tiare sous le rgne de ses successeurs. MaisOthon !" importa en Italie des sentiments nom-eaux,ns en Allemagne. Ces sentiments, hostiles la pa

    paut , rompirent 1 alliance que Charlemagne arait forme entre le pouvoir pontifical et la puissance tem

    porelle.

    La guerre clata entre ces deux principes, nonpar des ngociations ni des discussions canoniques,

    mais par des violences, mais par des actes d'autorit. Sous la protection d Othon et avec son appui,Gerbert invoqua les auteurs paens dans sa lutte

    contre la cour pontificale : il invoqua la raison hu

    maine contre la puissance religieuse... La libert

    ramenait l'antiquit, dont les semences, conserves jusquau quatorzime sicle, germrent alors et pro

    duisirent la Renaissance. DE LA SURGIRENT, EN ALLE

    MAGNE, L'INDPENDANCE RELIGIEUSE; EN ITILIE, LA

    LIBERT NATIONALE; EN FRANCE, L ESPRIT PHILOSO

    PHIQUE1

    . Il est difficile de tracer plus nettement et en moins

    de mots l'histoire du Csarisme en Europe. Toutefois cette exposition ne sufft pas. La question duCsarisme est tellement grave en elle-mme, elle

    1

    Histoire de l'loquence latine, par 11. N. t p. ? et 9.

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    C I I M ' I T K K CINyi'lKMK. :\Q

    intresse un si haut point les socit* modernes,quelle exige de plus grands dveloppements.

    Les princes de Germanie, dit le savant auteurde l'Histoire universelle de l Eylise, auxquels lespapes transportrent la dignit impriale, aprsl'extinction de la ligue masculine de Charlemagne,mconnurent peu peu l'ide chrtienne de cettedignit, pour reprendre peu peu l'ide paenne deNron et de Caligula. Ils ne se disaient pas encoredieux ou souverains pontifes, mais ils y tendaient; etparce que les papes s'opposaient cette tendance,

    ils entreprirent de dfaire les papes lgitimes, etd'en faire de leur fabrique 1 . Si les nouveaux Csars ne se donnent pas encore

    pour souverains pontifes et pour dieux, leurs lgistes les donnent ds lors pour la loi vivante et

    souveraine, pour la loi incarne. L'empereur, disent-ils, ds le douzime sicle, telle est la loi vivante qui commande aux rois. De cette loi vivantedpendent tous les droits possibles. C'est elle qui lescorrige, qui les dissout, qui les lie. L'empereur est

    l'auteur de la loi, et n'y est tenu qu'autant qu'ilveut bien. Son bon plaisir est la rgle du droit*.

    1 Htutrs universelle Je l'fcgHw, t. XVIII, p. (>.2 &sir iex viva Mat rgi bus unpiTtivat legeque sub viva sunt

    omnia jura clativa : Iex ea rastigat, suivit et ips* ligat. Condilor est

    legis, ne* dbet leg** leneri, *\i i eomplucuilsub Je e iibanter

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    M LK r.KSARISMM.

    Les juristes paens ne disaient pas mieux.Cest ainsi que l'ide dn Yimirialit paenne se

    formule sous Henri V. Ses successeurs, avec leurslgistes de Bologne, en tirent les consquences naturelles : que l'empereur allemand est le seul matredu monde, le seul propritaire; que ni rois ni par

    ticuliers n'ont rien que sous son bon plaisir; (pie lessouverains d'Espagne, d'Angleterre et de France nesont que des rois proriuriuu.r J 7 destitumes au grde l'empereur.

    On en tait la, lorsqu'on 1135, un exemplaire

    des Pandectes de Justinien est dcouvert en Italie,dans la petite ville d'Amalii. Cet vnement, quiattire l'attention de toute l'Europe, donne une nouvelle impulsion l'tude du droit romain et vient propos favoriser les prtentions csariennes des em

    pereurs d'Allemagne. Lothaire fonde une chaire dedroit romain Bologne. Une de ses cratures, Ir-nrius, Allemand de naissance, en est nomme titulaire. Tous les efforts du nouveau professeur tendent tendre l'autorit du droit romain. Il obtient

    sans peine de Fempereur que les ouvrages de Justinien seraient cits dans le barreau, et auraient

    force de Un dans l'empire. Les juristes de son

    haberi; quidquij is ptaruit, juris ad instar erit. Godfr., Yilerb.chron., p. 47. Apid Baron., an n. 93.

    * Reges pro\in*iales.

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    CllAIMTRK ( INUUIM! M

    cole lelexrent .jusqu'aux nues et le surnommrent

    la lumire du droit, lueenm juris. lrurius mourut

    en 1190.

    Il est triste de le dire, mais c'est de l'Italie qu'est

    venue la renaissance du droit csarien, comme la

    renaissance de la philosophie et de la littrature

    paennes . Au temps d'Irnrius, dit Terrasson, il

    n'y avait point d'coles de droit en Allemagne; et,

    d'ailleurs la jurisprudence romaine se cultivait en

    Italie plus quen aucun autre endroit de l'Europe. De

    l vient que l'Allemagne envoyait ses lgistes se for

    mer aux coles d Italie

    l

    , de mme qu'au quinzime sicle elle envoyait ses lettrs se former

    Florence et a Rome.

    L'Allemagne n'est pas la seule tributaire de l'Ita

    lie. Aux leons des juristes italiens, Gosia, Bulgare,

    Roger, Othon, llugolinus, Azon, Accurse, Cinusde Pistoie, Bartole, Balde et autres encore, la France

    envoie ses jeunes lgistes pendant les douzime,

    treizime et quatorzime sicles. De l nous revien

    nent, pour ne nommer que les plus connus, Pierre

    de Belle-Perche (de Bella Pertica)t Durand le Specu-

    lator, et Placentin, qui enseigna longtemps et avec

    clat Montpellier. L'Angleterre et lKspagne imi

    tent la France *.

    1 Terrasson, 11/., part. IV, IV, j>. 3H'i.

    - Lu Renaissance du droit romain exera une grande influence

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    LE CSARISME.

    Or toute cette gnration de juristes antrieurs la Renaissance soutient hautement les principes fondamentaux du droit csarien. Ils enseignent entre autres : que l'empire est d'institutiondivine; qu'il est un et indivisible; que Constantinn'a pu le diminuer en donnant au pape le patrimoine

    de saint Pierre ; qu'en tout cas cette donation n'oblige nullement ses successeurs. Pour tre cru, nousavons besoin de citer leurs paroles.

    Le plus clbre disciple de Bartole, Balde de P-rouse, que les lgistes de la Renaissance ont dcor

    du nom d'Apollon Pytlricn, Apollo Pythius, s'exprime ainsi dans sa Prface du Diyeste : Vous ob jectez que l'empereur a autrefois diminu les droitsde l'empire en faisant une donation l'Kglise ? Jerponds que cette donation est un fait, mais ne con

    stitue pas un droit, et qu'elle ne prjudicie pointaux droits des successeurs l'empire. En effet, sil'empereur ne peut imposer son successeur sespropres lois, plus forte raison ne peut-il lui imposer la loi d'un contrat. Il ne peut diminuer les

    droits de l'empire, en retrancher une partie, en re-sar le droit public, et particulirement sur l'agrandissement donnau pouvoir royal : elle affaiblit l'autorit du droitccutumier, quiperdit de plus en plus son caractre germanique et national. L'enthousiasme pour le droit romain fut tel, qu'on douta un moments'il ne prendrait pas la place des coutumes. Il fallut un arrt dela cour du roi, de 4167, pour arrter cette tendance.

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    C.HAPITKR < T MJU:MR. 6*

    tenir une autre, eai l'empire est un tre : ^div^ible. . .

    et de mmo, la dignit impriale #-st (l'institution

    divine, et nul homme n'a le pouvoir do la sup

    primer >

    Pour une raison ou pour une autre, on laisse

    soutenir ces th se s, au moin* tranges , en prsence

    de la jeunesse . Comme on joua plus ta:d avec les

    ides philosophiques et littraires du paganisme, on

    jouait alors avec les principes du Csarisme, dont

    on tait loin de prvoir les terribles consquences.

    Cependant, de l'Italie, cet ense ignement raj onne

    dans toute l'Europe. Nous le t r o u v o n s en An gl eterre, en Espagne et en France, profess plus ou

    moins explicitement par le* untes royaux des

    treizime et quatorzime sicles. Les Brcueils de ju-

    rispmdence ancienne, et en particulier l'ouvrage de

    Savaron, De la souverainet du lioy*f

    en contiennentla preuve.

    1 Iiladonatio procedit de facto, f d non de jure, quia nonvaluit in prjudlcium successoris. Etsi non potes! imponere successori legem logis, ergo nec iegem contractus. N>c potest minuere

    jura imperii et partem a se abdicare et partem retinere, quia im-

    perium est indivisible eus Et item ilia dignitas (imperatona)suprema est a Deo instiuta, unde per hominem supprimi non potest. In prmio Digestor.

    2 De la souverainet du Boy et que Sa Majest ne peut se soumettre a qui que ce soit, par messire Jehan Savaron, conseiller duroi, prsident et lieutenant gnral en la snchausse d Auver

    gne et sige prsidial de Germont, in* 4 2.4020.

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    61 I.KC S A R I S M I - . .

    Nous nous contenterons de citer, entre tous, le jurisconsulte franais Jean de Paris{Joanws

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    CHAPITRE VF.

    HISTOIRE DU CSARISME AVANT LA RENAISSANCE.

    DROIT POLITIQUE (&tftte).

    Dente et son livre de la Monarchie. Principes du Csarisme. Arguments de Dante, philosophiques, politiques et theologiques. Ilsoutient la monarchie universelle e* l'omnipotence de Csar. Sadoctrine contraire renseignement catholique. Consquences qui

    e dcoulent.

    La doctrine du Csarisme, si agrable l'orgueil

    des reis, devient le Credo de leurs courtisans, ainsique le thme favori des lettrs ambitieux et mcontents de la papaut. Au nombre de ces derniers, onregrette de trouver en premire ligne Dante Ali-ghieri, le chantre clbre de la Divine Comdie. Mais

    plus l'aberration de ce grand gnie est dplorable,plus elle devient premptoire en faveur de la causeque nous soutenons. La lecture des auteurs paenslui a perverti le sens en politique, comme elle lui afauss le got en littrature. Pote > iblime partout

    o il est chrtien, il devient plat et ridicule lors-VI. 5

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    M IHOfiSABlSMK.

    qu'il fait te mlange bizarre, que chacun connat,des choses saintes et des choses profanes, des fleursmythologiques et des penses chrtiennes. Cest ainsi,par exemple, que, transformant Notre-Seigneur enJupiter, il s'crie : t 0 ofnmo Giove, che fosti cruci-

    faso per noi! 0 grand Jupiter, qui as t crucifi pour

    noua

    1

    ! Lgiste rudit, Dante a tudi le droit, etcette tude, jointe h des rancunes personnelles, Tarendu Gibelin fanatique. logicien nerveux, il dduit en arguments fortement enchans sa pensepolitique dans son ouvrage De inonarchia.

    Ce livre fameux peut tre appel le code du Csarisme au moyen ge. Le pote juriste tablit sa thsesur deux sortes de raisonnements : les raisonnementsphilosophiques et les raisonnements politiques. Lespreafprs consistent dire que Dieu gouvernant le

    monde par un seul mouvement et un seul moteur,l'humanit, image de Dieu, d