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LA PRISE EN CHARGE GLOBALE DU PATIENT DIABéTIQUE Janvier 2013 • Volume 8 • n° 65 • 8 E d www.diabeteetobesite.org MISE AU POINT DE LA CHIRURGIE BARIATRIQUE à LA CHIRURGIE MéTABOLIQUE Le diabète peut-il se traiter chirurgicalement ? J. Bringer et F. Pattou ont organisé le 24 octobre 2012 une réunion commune de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie au sujet de l’évolution de la chirurgie de l’obésité vers la chirurgie métabolique. à SAVOIR Le “Dead in bed” syndrome Pr Serge Halimi p. 1 RECHERCHE Tissu adipeux brun : renaissance et nouvelles perspectives thérapeutiques Emmanuelle Kuhn, Marc Lombès p. 8 EN PRATIQUE Métabolisme phospho-calcique et chirurgie de l’obésité Dr Charlotte Vaurs p. 20 COMPRENDRE Dysfonction mitochondriale et diabète de type 2 Dr Emmanuel Disse p. 24 Et si la chirurgie de l’obésité devenait une alternative aux traitements du diabète de type 2 ?

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L a p r i s e e n c h a r g e g L o b a L e d u p a t i e n t d i a b é t i q u e

Janvier 2013 • Volume 8 • n° 65 • 8 E

d www.diabeteetobesite.org

mise au point

De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Le diabète peut-il se traiter chirurgicalement ?J. Bringer et F. Pattou ont organisé le 24 octobre 2012 une réunion commune de l’Académie

de médecine et de l’Académie de chirurgie au sujet de l’évolution de la chirurgie de l’obésité vers la chirurgie métabolique.

à savoir

le “Dead in bed” syndrome

Pr Serge Halimi p. 1

recherche

tissu adipeux brun : renaissance et nouvelles perspectives thérapeutiques

Emmanuelle Kuhn, Marc Lombès p. 8

en pratique

métabolisme phospho-calcique et chirurgie de l’obésité

Dr Charlotte Vaurs p. 20

comprenDre

Dysfonction mitochondriale et diabète de type 2

Dr Emmanuel Disse p. 24et si la chirurgie de l’obésité

devenait une alternative aux traitements du diabète de type 2 ?

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sommaireJanvier 2013 • Vol. 8 • N° 65www.diabeteetobesite.org

Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).Photo de couverture : © Eduard Härkönen / iStockphoto

• Directeur de la publication :Dr Antoine Lolivier• Directrice du développement :Valérie Belbenoît• Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu• Rédactrice : Caroline Sandrez• Secrétaire de rédaction : Fanny Lentz• Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production :Cécile Jeannin• Chef de studio : Laurent Flin• Maquette et illustrations :Elodie Lecomte, Antoine Orry • Chefs de publicité :Catherine Patary-Colsenet, Elodie Leblond• Service abonnements : Claire Lesaint• Impression :Imprimerie de Compiègne60205 Compiègne

CoMIté De leCtuRe

Rédacteur en chef “obésité” : Pr Patrick Ritz (Toulouse)

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Les articles de “Diabète & Obésité” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs.

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l A P R I S e e n C h A R g e g l o B A l e D u P A t I e n t D I A B é t I q u e

n ActuAlitÉs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 6

n à sAvoir le “Dead in bed” syndrome ou la “mort subite dans son lit” du jeune diabétique de type 1 . . . . . p. 1 Pr Serge Halimi (Grenoble)

n recherche tissu adipeux brun renaissance et nouvelles perspectives thérapeutiques dans l’obésité et le diabète . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 8 Emmanuelle Kuhn, Marc Lombès (Le Kremlin-Bicêtre)

n mise Au point. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 13

De lA chirurgie bAriAtrique

à lA chirurgie mÉtAbolique

le diabète peut-il se traiter chirurgicalement ?Pr Patrick Ritz (Toulouse)

n en prAtique métabolisme phospho-calcique et chirurgie de l’obésité prévenir la survenue des maladies métaboliques osseuses . . . . . . . p. 20 Dr Charlotte Vaurs (Toulouse)

n comprenDre Dysfonction mitochondriale et diabète de type 2 Y a-t-il un lien de causalité ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 24 Dr Emmanuel Disse (Lyon)

n AgenDA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 5n bulletin D’Abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 19n l’inDex 2012 à retrouver sur www.diabeteetobesite.org

Toute l'équipe de Diabète & Obésité vous souhaite une Bonne Année 2013 !

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À savoir

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 1

Définition Du synDromeIl s’agit d’un jeune diabétique de type 1, en parfaite santé la veille du décès, retrouvé au matin, seul à domicile, “mort dans son lit”. La particularité est que son lit ne montre aucun signe de lutte, d’agi-tation ou de sudation. Ces décès

alors décrite comme “Dead in bed” syndrome (à l’origine des critères énoncés ci-dessus). Les auteurs avaient noté un passage récent des insulines animales aux insulines humaines (depuis 6 à 24 mois chez tous les patients) sans pour autant retenir de lien de cause à effet. Par la suite, d’autres études furent pu-bliées, en Australie et surtout en Suède (2) puis aux États-Unis (3), qui ont confirmé l’existence de tels décès avec une faible incidence.

L’étude la plus détaillée est sué-doise, Dahlquist et al. (2), et avait pour but d’analyser dans ce pays la prévalence et les causes de mor-talité des enfants diabétiques de type  1 diagnostiqués entre l’âge de 0 et 14 ans dans la période 1977-2000 (sur 23,5 années). Elle rapporte 78 décès survenus et analysables dans cette cohorte de 10 200 enfants diabétiques appa-

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

Malgré d’importants progrès théra-peutiques, les jeunes diabétiques de type 1 gardent un risque de dé-cès prématuré qui atteint jusqu’à dix fois celui de la population témoin du même âge. La plupart des causes de mortalité sont bien identifiées, elles sont principalement liées aux complications directement en relation avec l’état diabétique : car-diovasculaires surtout mais aussi, encore aujourd’hui, métaboliques telles la céto-acidose et indirecte-ment les hypoglycémies respon-sables d’accidents de la circulation, autres accidents, diverses mala-dies et suicides. Restent des décès inexpliqués, situations dramatiques et rares fort heureusement, parmi lesquels un tableau dit du “Dead in bed” syndrome, initialement décrit par Tattersal et al. en 1991 (1).

Introduction

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Le “Dead in bed” syndrome Ou la “mort subite dans son lit” du jeune diabétique de type 1Pr Serge Halimi*

* Service de diabétologie, Pôle Digestif D.U.N.E., CHU et Univer-sité Joseph Fourier, Grenoble [email protected]

dramatiques, sans témoin, ne re-trouvent aucune cause plausible. Lorsque des autopsies furent réa-lisées, aucune cause précise ne fut retenue. Ces sujets sont en règle générale très jeunes, moins de 30 ans (moyenne d’âge de 18 ans), ont une ancienneté de diabète de huit années et sont indemnes de complications, en particulier de neuropathie autonome. Les insu-lines humaines, depuis peu sur le marché, furent suspectées mais leur rôle fut ensuite réfuté.

Les séries rapportéesL’étude initiale de Tattersal et al. a rapporté 50 cas de patients atteints de diabète de type 1 (âge < 50 ans), décédés subitement au Royaume-Uni en 1989, 24 de cause inexpli-quée (1) dont seulement 20 cor-respondaient à une entité qui fut

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2 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

À savoir

riés (à 1 pour 5) avec 371 décès de sujets jeunes non diabétiques. Au total, 78 sujets, 49 hommes et 29  femmes, étaient décédés sur 81 600/années/patients d’obser-vation : tableau 1 (certificat de dé-cès, compte-rendu hospitalier et autopsie disponibles). Au décès, la moyenne de durée du diabète était de 8,2 ± 7,1 ans (0 à 20,7). Le ratio de surmortalité vs non diabé-tiques (âge et sexe pris en compte) était de 2,15 (IC 95 % : 1,70 à 2,68), plus élevé chez les femmes (2,65 vs 1,93), alors que dans la popula-tion générale, les jeunes hommes présentaient un taux de mortalité plus élevé que les jeunes femmes. L’âge moyen au moment du dé-cès était de 15,2 ± 8,6 ans (de 1,2 à 27,3). Les enfants atteints de dia-bète avant l’âge de 2 ans avaient un taux de mortalité multiplié par 4,66, alors que pour ceux dont le diabète fut plus tardif le taux de mortalité était multiplié environ par 3 avant 10 ans. Le pic de mor-talité se situait entre 10-12 ans de diabète. Au total, 23 décès furent clairement rattachés au diabète, 14 céto-acidoses dont 6 lors de la primo-décompensation. Un décès a été attribué à une intoxication par alcool qui est probablement responsable d’une hypoglycémie très sévère. Dans 17 cas (22 %), le tableau correspondait à une mort subite dans son lit, au domicile, sans cause établie après autopsie, soit 17/78 décès (21,7 %) contre seulement 2/364 décès (0,55 %) chez des témoins appariés non diabétiques.

Une étude plus récente portait sur 1 319 diabétiques de type 1 dia-gnostiqués avant l’âge de 18  ans. Sur 319 décès analysés, 19 cas de décès soudains, SUD (Sudden Unexplained Deaths), ont été ré-pertoriés, soit 8 % des décès et un risque multiplié par 10 par rap-

port à une population appariée non diabétique. Le “Dead in bed” syndrome représentait 7 cas. Les caractéristiques rapportées sont donc à prendre ici avec réserve : les auteurs retiennent cette fois que ces patients vivaient seuls, avec un sur-risque masculin et un IMC faible (19,3 ± 1,0 kg/m2 vs 25,6  ±  3,6  kg/m2 chez ceux non décédés), qu’ils étaient sujets à des accidents hypoglycémiques sévères et répétés dans un passé récent, avec un taux d’HbA1c médiocre (> 11 %) et d’assez fortes doses d’insuline (3).

Que retenir De ces séries ?Le “Dead in bed” syndrome expli-querait ainsi, selon les séries, 22  %  à  45 % des décès de causes inexpliquées (SUD) chez de jeunes diabétiques de type 1. Quoique ces observations, comme celles de Tattersal et al., ne permettent d’affirmer un lien entre le décès et un épisode hypoglycémique nocturne, le moment du décès et les circonstances suggèrent for-tement que l’hypoglycémie elle-même, ou un événement directe-ment relié à une hypoglycémie, est à l’origine des décès (1-3). Les hypoglycémies nocturnes sur-viennent le plus souvent dans les premières heures, entre 1 et 4h du matin, avant la production des hormones de contre-régulation (cortisol, hormone de croissance).

En outre, de nombreux sujets ayant une longue durée de diabète de type 1 (supérieure à dix années), ont également des hypoglycémies associées à une dysautonomie, si-tuations dans lesquelles glucagon et adrénaline ne sont pas sécrétés de manière adaptée en réponse à l’hypoglycémie. Dans ces circons-tances, lorsque des hypoglycémies surviennent, elles tendent à per-sister de façon prolongée.

mort subite, hypogLycémie nocturne et repoLarisation carDiaque (qt Long)La cause la plus probable du dé-cès semble être un trouble de la conduction par altération de la repolarisation cardiaque et aryth-mie ventriculaire (tachycardie ou tachyarythmie ventriculaire, supra-ventriculaire ou bradycar-die sinusale). Ces troubles, et plus particulièrement l’allongement du segment QT, peuvent aboutir à des arythmies menant à la mort. La concomitance d’épisodes d’hypo-glycémies est presque totalement avérée, ce qui semble confirmé par plusieurs études expérimentales. Des études récentes ont en effet montré que l’hypoglycémie pro-longe l’intervalle QT (Fig. 1 et 2) (4). L’intervalle QT (Fig. 1) commence par une dépolarisation ventricu-

tableau 1 – causes de décès dans la série suédoise d’après (2).

causes retenues nombre

Décès survenus sans précisions suffisantes 2

Causes rattachées au diabète • Acido-cétose• Hypoglycémies + alcool

23 (14)141

Décès sans rapport avec le diabète (accidents et maladies) 33

Causes indéterminées dont “Dead in bed” syndrome

2017

total 78

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Le “DeaD in beD” synDrome

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 3

laire (onde Q) et se termine avec la repolarisation ventriculaire (la fin de l’onde T). L’intervalle QT est plus long lors d’une bradycar-die et plus court en cas de tachy-cardie, il doit ainsi être normalisé selon le rythme cardiaque par la formule Bazzett qui fournit un intervalle QT corrigé (QTc) (5). L’allongement de l’intervalle QTc survient suite à des anomalies ac-quises telles que celles associées à l’utilisation de médicaments anti-psychotiques aboutissant à des arythmies ventriculaires graves telles que des torsades de pointes, une arythmie, précédant souvent une fibrillation ventriculaire ou bien secondaire à des anomalies génétiques (QT long familial). Un intervalle QT prolongé prédit un accroissement de la mortalité chez les personnes diabétiques de type 1, probablement au moins pour partie du fait d’une prédispo-sition à la mort subite.

HyperinsulinismeUne première hypothèse serait le rôle de l’hyperinsulinisme (exo-gène) qui entraîne une hypoka-liémie et secondairement des troubles de la conduction en pré-

sence d’une réponse adrénergique secondaire à l’hypoglycémie (6-7). Le lien entre décès par “Dead in bed” syndrome et hypoglycémie sévère nocturne a pu être directe-ment établi chez un jeune patient sous pompe à insuline grâce à l’analyse rétrospective des don-nées d’un enregistrement continu de la glycémie par CGMS (8).

neuropatHie autonomeLa seconde piste étudiée est celle du rôle joué par la neuropathie auto-nome. Celle-ci peut être associée à un allongement de QTc. Une étude récente a démontré l’existence d’un QTc long chez des jeunes dia-bétiques de type 1 présentant une dysfonction du système nerveux autonome très précoce, contrai-rement à ce que l’on avait imaginé jusque-là (9). De fait, la survenue de ce “Dead in bed” syndrome depuis la description princeps de Tatter-sal et al. reprise ensuite par Gill et al. (1, 10) chez de jeunes patients sans neuropathie pourrait s’avé-rer inexacte puisque celle-ci serait infra-clinique mais précoce. Toute-fois, dans la grande cohorte EURO-DIAB-IDDM, quoiqu’un lien ait été établi entre neuropathie autonome

et hypoglycémie, aucun lien direct entre neuropathie autonome et QTc long n’a été retenu (11).

En somme, la succession d’hypo-glycémies, sur terrain de neuro-pathie autonome cardiaque, puis de troubles du rythme fatals, ne semble pas tenir à l’analyse. En effet, et fort heureusement, toute hypoglycémie nocturne sévère n’aboutit pas à de tels drames, même en présence d’une neuro-pathie autonome. Ceci a conduit à des études de prédisposition, dont génétiques.

L’hypothèse D’une préDispositionLa cause réelle du décès dans le “Dead in bed” syndrome reste encore à déterminer, elle pour-rait être liée à plusieurs causes associées. Il existe des arguments prouvant que, parmi des patients atteints de diabète et présentant une dysautonomie cardiaque, ceux qui décèdent ont un inter-valle QTc plus long que ceux qui survivent (12). Le risque d’aryth-mies ventriculaires exacerbées par des épisodes nocturnes d’hypogly-

SegmentPR

SegmentST

ComplexeQRS

R

P T

QS

Intervalle PR

Intervalle QT

QTc = 456 msHR = 66 bpm

QTc = 610 msHR = 61 bpm

5,0 mM 2,5 mM

figure 1 – Description d’un électrocardiogramme

normal.

figure 2 – allongement de l’intervalle qt lors d’une hypoglycémie

(2,5 mmol/l) vs situation d’euglycémie (5 mmol/l) d’après (4).

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À savoir

cémie sévère semble ainsi bien lié à un intervalle QTc prolongé. À ses premiers stades, la neuro-pathie autonome correspond à une dénervation cardiaque vagale qui s’accompagne d’une activité sympathique disproportionnée pouvant conduire à des troubles du rythme et à une mort subite, mais seulement s’il s’y associe un allongement du QTc. On sait aussi que les bêtabloquants diminuent l’intervalle QTc et qu’ils ont été associés à une diminution de la mort subite chez les patients dia-bétiques en post-infarctus. Tou-tefois, au cours de l’hypoglycé-mie induite expérimentalement chez des patients présentant une dénervation cardiaque due à une neuropathie diabétique auto-nome, l’intervalle QTc n’augmente pas systématiquement, de sorte que, paradoxalement, certains de ces patients pourraient être pro-tégés contre la mort subite suite à cette dénervation cardiaque. Par conséquent, selon certains ryth-mologues, la situation au cours de laquelle l’hypoglycémie avec allongement de QTc puis arythmie ventriculaire serait le plus suscep-tible de se produire serait celle d’un sujet jeune ayant une courte durée de diabète et ainsi une forte réponse sympathique post-hypo-glycémie.

prolapsus De la valve mitrale ?Nombre d’experts ont la convic-tion que le trouble sous-jacent cardiaque serait génétique. Mais pour quelques autres, certes peu nombreux, dont Bell (13), la pré-sence d’un prolapsus de la valve mitrale jouerait un rôle majeur. Dans la plupart des cas, un tel pro-lapsus n’a que peu voire aucune conséquence. Il faut noter que la prévalence des prolapsus de la valve mitrale serait accrue dans

les maladies auto-immunes endo-criniennes comme la maladie de Basedow, la thyroïdite de Hashi-moto et le diabète de type 1 (14). Pour le tenant de cette hypothèse, les décès du “Dead in bed” syn-drome surviendraient à la suite d’une hypoglycémie nocturne, entraînant un QTc augmenté et une arythmie ventriculaire chez des jeunes diabétiques de type 1 ayant à la fois un terrain de pro-lapsus mitral et une neuropathie autonome (13).

préDisposition génétiQue ?Pour beaucoup d’experts il s’agi-rait d’une prédisposition d’ordre génétique par allongement du

paré à partir d’échantillons post-mortem de myocarde de sujets dé-cédés du “Dead in bed” syndrome, soit un total de 22 sujets. L’analyse génétique a été effectuée pour le SCN5A, le G6PC, le PHOX2B, et les gènes du CTGF. Aucune diffé-rence, par rapport aux témoins, n’a été trouvée pour le contenu en collagène I et III et CTGF. L’étude génétique de SCN5A a révélé trois polymorphismes silencieux A29A, E1061E et D1819D et un variant de la protéine H558R. Aucun variant génétique n’a été trouvé pour G6PC, PHOX2B, G-945C et CTGF, ce dernier étant pourtant clairement impliqué dans d’autres troubles du rythme chez des su-

QT avec ou sans dysautonomie sous-jacente. Chez des sujets non diabétiques victimes de décès nocturnes soudains, plusieurs mutations des canaux sodiques (INa ) ont été décrites, pour SCN5A essentiellement. Les mutations de SCN5A sont mises en cause dans le syndrome du QT long fa-milial, ou syndrome de Brugada (15), et seraient parfois à l’origine de syndromes de mort subite du nouveau-né (SIDS). Dans tous ces syndromes le QT dépasse 500 ms. De fait, le “Dead in bed” syndrome pourrait lui aussi être favorisé par des mutations de gènes des canaux ioniques, ceci aboutissant à des arythmies ventriculaires létales. Une seule équipe, Tu et al., à ce jour, a abordé cette question sous l’angle anatomo-patholo-gique, biochimique et génétique à partir de fragments autopsiques (16). L’ADN génomique a été pré-

jets non diabétiques. Les auteurs considèrent toutefois que le tissu utilisé dans cette courte série, blocs inclus dans la paraffine, ne constituait pas le matériel idéal pour une analyse ADN.

concLusion Le “Dead in bed” syndrome n’est pas une situation si rare, il concerne 5  % à 23 % des décès inexpliqués de jeunes diabétiques de type 1 (16), lorsqu’on considère la prévalence du diabète de type 1, l’âge des patients et l’incidence des décès précoces inexpliqués dans cette population. Même si l’on manque de données plus récentes et quoique de grands progrès ont été réalisés dans divers domaines (insulines analogues, pompes sé-curisées et capteurs glycémiques), identifier les jeunes sujets diabé-tiques de type 1 à risque de “Dead

Même si on manque de données plus récentes, identifier les jeunes sujets diabétiques de type 1 à risque de “Dead in bed” syndrome reste nécessaire afin d’éviter de tels drames.

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Le “DeaD in beD” synDrome

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 5

in bed” syndrome reste nécessaire afin d’éviter de tels drames. Ceci passe par la réduction de l’inci-dence des hypoglycémies noc-turnes grâce à une révision des schémas insuliniques, dans cer-taines situations en utilisant des bêtabloquants. Enfin, il convien-drait de rechercher les sujets ayant un électrocardiogramme “à risque” si les rythmologues pensent être en mesure de les identifier, sans toutefois inquié-

ter l’immense majorité des sujets qui n’encourt pas ce risque. Le re-cours à de nouvelles technologies comme les capteurs de glycémie avec alarmes ou les défibrillateurs sera peut-être plus à même de ré-duire ce risque de décès particuliè-rement tragiques compte tenu du très jeune âge des victimes et des circonstances de survenue. Ceci est une illustration supplémen-taire des conséquences à court et long terme des hypoglycémies

chez les diabétiques qui occupent tant, aujourd’hui, le monde de la diabétologie (18). n

conflit d’intérêt :

l’auteur ne déclare aucun conflit

d’intérêt en rapport avec ce manuscrit.

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BiBliographie

mots-clés : “Dead in bed” syn-

drome, mort subite, Jeune diabétique

de type 1, hypoglycémies nocturnes

agenDa

Congrès de la soCiété FranCophone du diabète 201326-29 mars – Montpellier

• Renseignements et inscriptions Site : www.congres-sfd.com

49th easd annual Meeting23-27 septembre 2013 – barcelone European Association for the Study of Diabetes

• Renseignements et inscriptions Site : http://www.easd.org/

Congrès annuel de la soCiété FranCophone de Chirurgie de l’obésité et des Maladies Métaboliques (soFFCo)6-8 juin 2013 – angers

• Renseignements et inscriptions Site : www.soffco2013.com/

aMeriCan diabetes assoCiation 73rd sCientiFiC sessions21-25 juin 2013 – Chicago

• Renseignements et inscriptions Site : scientificsessions.diabetes.org/

15e entretiens de nutrition6-7 juin 2013 – lille

• Renseignements et inscriptions Marie-Françoise Tahon :

[email protected]

dieteCoM 201321-23 mars 2013 – paris

• Renseignements et inscriptions Site : http://www.dietecom.com/inscription.asp

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actualités

6 Diabète & Obésité • Mars 2010 • vol. 5 • numéro 37

de la profession

Étude

Obésité et maladie d’AlzheimerA vec plus de 860 000 personnes atteintes en

France, la maladie d’Alzheimer et les mala-dies apparentées représentent la première cause de perte des fonctions intellectuelles liée à l’âge. Les altérations cognitives observées dans la ma-ladie d’Alzheimer sont notamment le résultat de l’accumulation de protéines Tau anormales dans les cellules nerveuses en dégénérescence. On sait que l’obésité, un facteur de risque majeur du déve-loppement d’une résistance à l’insuline et du dia-bète de type 2, accroît le risque de démences lors du vieillissement. Cependant, les effets de l’obé-sité sur les pathologies liées à la protéine Tau et dont fait partie la maladie d’Alzheimer, autrement appelées Tauopathies, n’étaient pas clairement élucidés. Les chercheurs supposaient notamment que la résistance à l’insuline jouait un rôle majeur dans ces effets de l’obésité.Des chercheurs de l’Inserm et de l’Université Lille

2/Université Lille Nord de France viennent de fournir la preuve expérimentale de la relation entre l’obésité et les pathologies liées à la protéine Tau dans un modèle de neurodégénérescence de la maladie d’Alzheimer.

Ces travaux, réalisés chez la souris et publiés dans la revue Diabetes, renforcent l’idée d’une contri-bution majeure des anomalies métaboliques dans le développement de démences.

Cette étude indique par ailleurs que la résistance à l’insuline ne serait pas le facteur aggravant, contrairement à ce qui était suggéré dans les pré-cédentes études. ß

Pour en savoir plus : http://www.inserm.fr/es-pace-journalistes/l-obesite-aggraverait-les-le-sions-associees-a-la-maladie-d-alzheimer

EN BREFAppel à cAndidAtureLa Fondation d’entreprise Groupe Pasteur Mutualité fête les 5 ans de ses Bourses d’aide à la recherche. Pour l’édition 2013, plusieurs prix d’une valeur totale d’au moins 100 000 € seront attribués, en priorité, à des chercheurs en santé de moins de 40 ans, qu’ils soient internes ou praticiens. Chaque lauréat peut bénéficier d’une bourse d’un montant allant jusqu’à 20 000 €. Pour participer : dossiers de candidature à remplir en ligne sur : www.fondationgpm.fravant le 31 mars 2013.

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actualités

Diabète & Obésité • Mars 2010 • vol. 5 • numéro 37 7

Projet d’avis scientifique

Sécurité d’emploi de l’aspartameL’ Autorité européenne de sécurité des ali-

ments (EFSA) confirme sans équivoque l’in-nocuité de l’aspartame.Dans un projet d’avis, l’EFSA indique que «  Pour cette réévaluation de la sécurité de l’aspartame, les experts scientifiques de l’EFSA se sont appuyés sur toutes les données scientifiques disponibles sur l’aspartame et ses métabolites et, après avoir conduit une analyse détaillée et méthodique, ont conclu dans ce projet d’avis que l’aspartame ne pose aucun problème de toxicité pour les consommateurs aux niveaux d’exposition obser-vés. La dose journalière admissible (DJA) actuelle est considérée comme sûre pour la population générale et le niveau d’exposition des consomma-teurs à l’aspartame est inférieur à la DJA. »La commission européenne a invité l’EFSA à pro-céder à la réévaluation de tous les additifs ali-mentaires d’ici 2020 ; c’est dans ce cadre que

l’aspartame est actuellement réexaminé. L’ISA (Association internationale pour les édulcorants) apportera sa contribution à la consultation pu-blique ouverte par l’EFSA, comme elle le fait habi-tuellement sur les sujets relatifs aux édulcorants intenses.L’aspartame bénéficie d’un historique d’usage en toute sécurité de plus de 30 ans dans le monde. Les données scientifiques sur lesquelles repose son innocuité ont été évaluées favorablement par les experts du comité international mixte FAO/OMS (Or-ganisation mondiale de la santé) des Nations Unies (JECFA) et par ceux des autorités sanitaires de plus de 100 pays, dont l’ANSES en France. Tous confirment que la consommation d’aspartame est sûre.L’aspartame est composé de deux acides aminés, libérés lors de sa digestion, qui sont naturellement présents dans de nombreux aliments courants, en quantité souvent plus importante. ß

Le chiffre du mois

78 %des diabétiques

consomment des produits avec édulcorants. C’est ce que rapporte une étude de l’institut CSA réalisée pour l’AFD et l’ISA France. Parmi les consommateurs diabétiques, 88 % estiment que les édulcorants leur sont utiles ; 63 % ont recourt aux produits avec édulcorants une à plusieurs fois par jour et 46 % ont suivi la recom-mandation de leur médecin.

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RecheRche

8 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

Le regain d’intérêt pour le BAT a été grandement réac-tivé en 2009 par la publica-

tion simultanée de trois articles dans le prestigieux New England Journal of Medicine (1-3) qui confirmaient, en particulier grâce à l’utilisation du PET-scan, l’exis-tence de BAT fonctionnel chez l’Homme adulte. Jusqu’alors, ce tissu métaboliquement hyperactif était restreint aux hibernants ou dans l’espèce humaine aux nou-veau-nés. Le BAT est le siège de la thermogenèse active qui protège de l’hypothermie et est possible-ment impliqué dans la résistance à l’obésité. Les adipocytes bruns utilisent les lipides comme subs-trat pour produire de la chaleur et ainsi augmenter la dépense éner-gétique. De nombreuses études ont montré que des changements d’ac-tivité du BAT pouvaient profondé-ment affecter la composition cor-porelle et l’homéostasie glucidique (4-7). C’est pourquoi l’identifica-tion des facteurs impliqués dans la détermination adipocytaire brune constitue un véritable défi.

Le tissu adipeux brunLe BAT et le tissu adipeux blanc (WAT : White Adipose Tissue) diffèrent en termes d’origine embryologique, de morpholo-gie, de fonction et de marqueurs moléculaires. Chez la souris, la localisation principale du BAT est interscapulaire, mais des dépôts

de BAT sont également retrouvés au niveau cervical, médiastinal, péricardique et périrénal. Chez l’Homme à l’âge adulte, il est prin-cipalement situé au niveau supra-claviculaire et dans la région cer-vicale, mais d’autres localisations sont possibles (paravertébrale, médiastinale, para-aortique, péri-rénale) (8). Par ailleurs, il existe un dimorphisme sexuel dans la mesure où l’expression du BAT est plus marquée chez la femme que chez l’homme. Une corrélation in-verse entre masse de BAT et indice de masse corporelle (IMC) a été également rapportée, plus impor-tante chez les sujets âgés. Tous ces éléments suggèrent un rôle poten-tiel du BAT dans la régulation du métabolisme énergétique chez l’Homme adulte (1).

La fonction du tissu adipeux brun : La thermogenèseContrairement au WAT, dont le rôle principal est le stockage éner-gétique sous forme de triglycé-rides, le BAT participe à l’équilibre énergétique par la dissipation ca-lorique sous forme de chaleur car c’est le siège privilégié de la ther-mogenèse adaptative, qui est for-tement stimulée par l’exposition au froid. L’innervation du BAT par le système nerveux sympathique (SNS) est importante et consti-tue un puissant stimulus, même s’il n’est pas exclusif, du déclen-chement de la thermogenèse. En

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

Dans les pays développés, la pré-valence de l’obésité, du diabète, de l’hypertension artérielle (HTA) et des maladies cardio-vasculaires est en constante augmentation, ce qui est dû, en partie, à des modifi-cations de nos comportements ali-mentaires et de nos habitudes de vie. La prise en charge de l’obésité et de son cortège de complications devient ainsi un enjeu majeur de santé publique. De nombreux tra-vaux sont conduits afin de mieux comprendre les mécanismes abou-tissant au développement de ces pathologies métaboliques, ce qui devrait permettre d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles. Augmenter la dépense énergétique pourrait ainsi repré-senter une stratégie intéressante, c’est pourquoi de très nombreuses équipes se sont de nouveau intéres-sées au tissu adipeux brun (BAT : Brown Adipose Tissue).

Introduction

tissu adipeux brunRenaissance et nouvelles perspectives thérapeutiques dans l’obésité et le diabèteEmmanuelle Kuhn*, Marc Lombès**

*Inserm U693, Le Kremlin-Bicêtre ; Faculté de Médecine Paris-Sud, Université Paris Sud-11, Le Kremlin-Bicêtre [email protected] **Inserm U693, Le Kremlin-Bicêtre ; Faculté de Médecine Paris-Sud, Université Paris Sud-11 ; Service d’Endocrinologie et des Maladies de la Reproduction, Hôpital de Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre

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Tissu adipeux brun

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 9

effet, celle-ci est déclenchée par le relargage de catécholamines des terminaisons nerveuses du SNS, stimulant les récepteurs β3 adré-nergiques et ainsi conduisant à la cascade d’événements intracellu-laires qui activera la protéine mi-tochondriale découplante UCP1 (UnCoupling Protein 1), localisée dans la membrane interne de la mitochondrie séparant matrice et espace intermembranaire. L’UCP1 utilise le gradient intra-mitochondrial de protons produit par la phosphorylation oxydative, court-circuitant le complexe V de la chaîne respiratoire et la produc-tion d’ATP, pour permettre la dissi-pation énergétique sous forme de chaleur (Fig. 1). L’expression d’UCP1 est sous le contrôle de plusieurs voies de signalisation (insuline, dérivés de l’acide rétinoïque, ca-técholamines, hormones thyroï-diennes, thiazolidinediones, etc.), notamment par l’intermédiaire de facteurs de transcription spé-cifiques [récepteur de l’acide réti-noïque (RXR), récepteur des hor-mones thyroïdiennes (TR), PPAR (Peroxisome Proliferator-Activa-ted Receptor), etc.], incluant aussi le coactivateur PGC-1α (PPAR-γ Coactivator-1α) fortement induit par l’exposition au froid ou la sti-mulation β-adrénergique (9).

La détermination adipocytaire brune est sous Le contrôLe de prdm16Des données récentes suggèrent que le BAT et le WAT ont deux origines embryonnaires dis-tinctes (Fig. 2). En effet, les cellules musculaires (ou myocytes) et les cellules adipeuses brunes parta-geraient une origine mésenchy-mateuse commune, comme en témoigne un profil d’expression de gènes similaires, en particulier l’expression du facteur de trans-cription Myf5 (10). Les adipocytes

bruns expriment des facteurs de transcription spécifiques comme PRDM16 (PR-Domain-Containing 16) ou BMP7 (Bone Morphogenic Protein 7) qui contrôlent l’expres-sion des marqueurs spécifiques du BAT comme PGC-1α et UCP1. Le facteur PRDM16, identifié par l’équipe de Bruce Spiegelman, a été caractérisé comme le chef de file déterminant l’engagement adipocytaire brun. La surexpres-sion de ce facteur dans des cellules induit une augmentation marquée de la phosphorylation oxydative

I II

Q III C IV V

NADH NAD+ succinate fumarate O2 H2O ADP+Pi

ATP

4H+ 4H+ 2H+ 3H+

Espace inter-membranaire

Membrane interne

Matrice mitochondriale

H+

H+ Chaleur

Phosphorylation oxydative / Découplage (fuite de protons)

UCP1

Figure 1 – La chaîne respiratoire et le mécanisme d’action d’uCp1 dans la mitochondrie.

Cellule souche mésenchymateuse

Précurseur myogénique(Myf5+)

Précurseur adipogénique(Myf5-)

Préadipocyte blancPréadipocyte brun

Adipocyte brun(interscapulaire)

Adipocyte blanc(sous-cutané, viscéral)

BMP7PRDM16

↗UCP1↗ PGC-1 ,↗ PPAR 2

↗ PPAR 2↗ C/EBP

- + Froid

CatécholaminesIrisine

Myocyte

Myoblaste

Adipocyte beige(sous-cutané)

Beigeing

25-200 m15-60 mRiche enmitochondries

AdipogenèseLipogenèse, LipolyseSécrétion adipokines

Thermogenèse Marqueurs MoléculairesCD137, TMEM26, CITED1

Figure 2 – Voies de différenciation cellulaire des ta brun, beige et blanc.

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10 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

RecheRche

aussi bien dans les adipocytes, les fibres musculaires ou les hépato-cytes (11). De façon surprenante, l’inactivation de PRDM16 dans les adipocytes conduit à une différen-ciation musculaire. À l’inverse, la surexpression de PRDM16 dans les myoblastes conduit à une dif-férenciation adipocytaire. L’éta-blissement de modèles animaux inactivés spécifiquement pour PRDM16 dans le tissu adipeux brun a permis de montrer que ce facteur de transcription n’était pas indispensable au développe-ment embryonnaire du BAT mais servirait plutôt de répresseur de l’expression des gènes adipocy-taires blancs. Ainsi, ce travail ré-cent apporte un argument supplé-mentaire sur le rôle pivot que joue PRDM16 dans la détermination adipocytaire brune.

Le phénomène de beigeing Le phénomène de “beigeing”, défini par l’émergence d’adipo-cytes multiloculés bruns (avec leur cortège de facteurs spéci-fiques comme UCP1) au sein d’un tissu adipeux blanc, a été mis en évidence chez les rongeurs (12-14). Il permet l’activation du pro-gramme thermogénique et favo-rise ainsi la dépense énergétique. Une stimulation prolongée par des agonistes β3-adrénergiques ou des ligands de PPARγ (thiazo-lidinediones) est capable de réac-tiver ce BAT (15-20). Ces cellules adipocytaires dites “brunes”, ne dérivant pas d’un lignage posi-tif pour Myf5, sont donc appe-lées “cellules beiges” ou BRITE (BRown-in-whITE). La distribu-tion de ces cellules beiges n’est pas homogène dans tous les dé-pôts adipocytaires chez les ron-geurs puisqu’elles sont plus fré-quemment retrouvées au niveau

du tissu adipeux sous-cutané (21-24) et plus rarement dans le tissu adipeux abdominal épididymaire. Le processus de “beigeing” a éga-lement été démontré par l’équipe de Sven Enerbäck (6), in vitro, en surexprimant spécifiquement le facteur de transcription FoxC2 (Forkhead box protein C2) dans les adipocytes.

découverte de L’irisinePar ailleurs, l’équipe de Bruce Spiegelman a mis en évidence une nouvelle hormone sécrétée par le muscle, appelée irisine, en étu-diant ce phénomène chez des sou-ris surexprimant au niveau muscu-laire PGC-1α (25). L’irisine est une hormone musculaire, conservée à 100 % entre la souris et l’Homme, et retrouvée dans le plasma de ces deux espèces. Sa concentration sérique (environ 40  nmol/l chez la souris) augmente lors d’un exer-cice physique et entraîne le phéno-mène de “beigeing” du WAT chez la souris. La même observation a été faite chez l’Homme avec une augmentation de deux fois du taux plasmatique de l’irisine après dix semaines de course à pied. Cepen-dant, cette donnée chez l’Homme a été remise en cause par une autre étude qui ne retrouve ni augmen-tation de la concentration d’irisine

avec l’exercice physique (ou du moins uniquement chez le sujet âgé sportif ), ni corrélation franche entre IMC, glycémie et insuliné-mie à jeun et niveau d’expression de l’irisine (26). Ainsi, beaucoup reste à faire pour établir définiti-vement le rôle de cette nouvelle hormone mais aussi pour évaluer les effets de l’irisine sur d’autres organes (par exemple le cerveau, le foie, le cœur...).

Enfin, l’équipe de Bruce Spiegel-man a démontré qu’à partir d’une fraction de stroma-vasculaire de tissu adipeux murin, il est possible d’isoler des lignées cellulaires clo-nales (riches en marqueur CD137, considéré comme le marqueur spécifique des adipocytes beiges) (27). Ces cellules beiges à l’état ba-sal présentent des caractéristiques de cellules adipocytaires blanches (faible expression d’UCP1) et sont capables, sous l’effet de l’irisine et d’autres activateurs, notamment de la voie de l’AMP cyclique, d’ac-quérir des propriétés thermogé-niques (forte expression d’UCP1), excluant une transdifférenciation directe à partir d’adipocytes blancs (Fig. 2). Finalement, en comparant le profil d’expression de quelques gènes spécifiques de chaque type adipocytaire (brun, blanc, beige),

BiopsiesBAT

WAT sous-cutané

Etudes de l’expression de gènes spécifiques

du BAT, WAT et adipocytes beigesEtudes IHC

Le BAT chez l’Homme adulte ressemble plus aux adipocytes beiges des rongeurs

qu’au BAT « classique »

Figure 3 – Le bat chez l’homme adulte présente les caractéristiques des cellules beiges

chez les rongeurs.

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Tissu adipeux brun

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 11

il apparaît clairement que, chez l’Homme, les cellules adipocy-taires dites “brunes” ont en fait les mêmes caractéristiques que les cellules adipocytaires “beiges” murines (Fig. 3). Ainsi le BAT chez l’Homme serait constitué de cel-lules adipocytaires “beiges” et non pas “brunes”, cela a été confir-mé par une étude récente avec l’identification de CITED1 (Cbp/p300-interacting transactivator 1) comme nouveau marqueur d’adi-pocytes beiges (28).

tissu adipeux brun et ContrôLe du métaboLisme énergétiqueDe nombreuses études, utilisant des modèles murins ont montré que la modulation de l’activité du BAT pouvait modifier à la fois la composition corporelle et le métabolisme énergétique (Fig. 4). En effet, les souris surexprimant UCP1 sous le contrôle du promo-teur aP2 dans le WAT ont une ré-sistance à l’obésité (5). À l’inverse, les souris invalidées pour UCP1 soumises à un régime riche en graisses deviennent obèses et ont un développement réduit du BAT (7). Sven Enerbäck a montré, lors du congrès annuel de l’Endocrine Society en juin 2012, que les sou-ris transgéniques surexprimant le facteur FoxC2 (Tg-FoxC2) pré-sentent, lors d’un régime riche en graisses, une résistance à l’obésité, une meilleure tolérance au glu-cose associée à une amélioration de l’insulino-sensibilité, com-paré aux souris sauvages. Cela peut être en partie expliqué par une augmentation de la masse du BAT, une augmentation de la biogenèse mitochondriale et la thermogenèse. De plus, l’admi-nistration par voie intraveineuse d’irisine pendant dix jours chez

des souris soumises à un régime hyperlipidique, induit une perte de poids très modeste mais signi-ficative, associée à une améliora-tion de la tolérance au glucose et une baisse de l’insulinémie à jeun reflétant une diminution de l’insu-lino-résistance (25). Cette prise de poids limitée sous régime riche en graisses chez ces souris pourrait correspondre à une augmentation de la dépense énergétique (aug-mentation de la consommation d’oxygène), sans doute expliquée par le phénomène de “beigeing”. Enfin, une étude très récente a montré que le BAT interviendrait dans la régulation du métabolisme glucidique (29). En effet, la trans-plantation de BAT au niveau de la cavité abdominale permet, chez les souris receveuses, de diminuer la prise de poids induite par un ré-gime hyperlipidique ainsi que l’in-sulino-résistance et donc d’amé-liorer la tolérance au glucose. Par ailleurs, cette transplantation de BAT permet d’augmenter le cap-tage de glucose induit par l’insu-line au niveau du BAT endogène des souris receveuses, du WAT et du muscle cardiaque ; mais de ma-nière surprenante cet effet n’est pas retrouvé au niveau du muscle

squelettique (29). Aussi, même si l’ensemble de ces études semble suggérer un lien entre activité du BAT et développement de l’obésité et du diabète, il manque encore des données indiscutables pour établir définitivement que l’activa-tion du BAT pourrait s’accompa-gner d’une perte de poids marquée et durable, ainsi que d’une amélio-ration du métabolisme glucidique chez l’Homme, sans effet secon-daire néfaste.

Vers une nouVeLLe arme thérapeutique Contre L’obésité et Le diabèteL’obésité résultant d’un déséqui-libre de la balance énergétique, il est clair que l’introduction de nou-velles molécules ciblées facilitant la dépense énergétique sans effet secondaire aurait très vraisembla-blement un potentiel majeur dans la prise en charge de cette patho-logie. Ainsi, la manipulation de l’activité du BAT dans des modèles murins montre que le BAT pour-rait être une stratégie interven-tionnelle intéressante. Des thé-rapeutiques d’avenir pourraient permettre :

irisine10j

Tg-UCP1

Tg-FOXC2

Activation programme

thermogénique(UCP1)

Surexpression UCP1

Surexpression FOXC2

Transplantation BAT

Injection irisine

Moindre prise de poids

Meilleure tolérance au glucose

Meilleure sensibilité à l’insuline

WT

UC

P1

0

100

200

300

400

0 15 30 45 60 90120

Gly

cém

ie (

mg/

dl)

Temps (min)

WT UCP1

020406080

100120

0 15 30 45 60 90 120

% g

lyce

mie

à T

0

Temps (min)

WTUCP1

Figure 4 – Conséquences métaboliques de l’activation du bat.

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12 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

RecheRche

• de stimuler l’activité du BAT, soit par une exposition modérée et prolongée au froid, soit par l’inter-médiaire d’une stimulation phar-macologique. Ainsi, les agonistes β3-adrénergiques ont beaucoup été étudiés mais les résultats sont décevants (30) ;

• de favoriser la prolifération du BAT au niveau de ses sites clas-siques de localisation ou de favo-riser l’émergence d’adipocytes beiges au sein d’adipocytes blancs. Les nombreuses recherches ci-blant le BAT devraient aboutir au développement de nouvelles théra-

peutiques pour lutter contre l’obé-sité et son cortège de complications métaboliques chez l’Homme. n

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BiBliographie

mots-clés : tissu adipeux brun, beigeing, obésité,

homéostasie glucidique, diabète

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Mise au point

De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Le diabète peut-il se traiter chirurgicalement ?

pr patrick Ritz (toulouse)

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Mise au point

14 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

1re inteRvention : tRaiteMent Du Diabète par J. bringer (Montpellier)Cette intervention expose la place et les objectifs du traitement du diabète de type 2 et ce en quoi il y a de la place pour d’autres alterna-tives.

On n’imaginait pas, il y a 15 ans, que la chirurgie de l’obésité appa-raîtrait comme une alternative à un traitement du diabète de type 2, lequel reste imparfait. S’il est facile de nous conditionner à manger certains aliments et à être séden-taire, il est plus difficile de nous déconditionner vers une alimen-tation équilibrée et une activité physique régulière, alors que cela reste la première ligne de traite-ment. Les médicaments prennent alors une place pour corriger la glycémie et les facteurs de risque. Cela reste un objectif très impor-tant.

Les travaux menés autour de l’étude STENO 2 montrent qu’un traitement intensif (de tous les facteurs de risque) réduit de 58 % la survenue à 8 ans des évènements cardio-vasculaires majeurs. Il en reste aussi une mémoire, puisqu’à 14 ans (6 ans après l’arrêt du trai-tement intensif ) la réduction des évènements est de 59 % et celle de la mortalité de 40 %. Beaucoup du résultat est médié par la réduction du cholestérol, des triglycérides et

de la pression artérielle, alors que seulement 15 % des patients ont une HbA1c inférieure à 6,5 %.

La surmortalité liée aux traite-ments est sans nuance et la mor-talité toutes causes confondues décrit une courbe en U où les HbA1c les plus hautes, mais aussi les plus basses, ont un risque plus élevé qu’à une valeur de 7,5 %. C’est aussi l’enseignement de Accord et de VADT.

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De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Le diabète peut-il se traiter chirurgicalement ?

n J. Bringer et F. Pattou ont organisé le 24 octobre 2012 une réunion commune de l’Académie

de médecine et de l’Académie de chirurgie au sujet de l’évolution de la chirurgie de l’obésité

vers la chirurgie métabolique. Voici le résumé des interventions.� Pr Patrick Ritz*

*Centre intégré TOSCA de l’obésité, CHU de Toulouse [email protected]

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De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 15

L’innovation thérapeutique génère des traitements qui ont moins d’ef-fets négatifs sur le poids. Le ser-vice médical rendu doit prendre en compte l’effet sur la glycémie, le poids et les effets secondaires. Les décisions thérapeutiques se font de façon individualisée, si possible en travaillant sur les profils de ré-pondeur/non répondeur et en dis-cutant le rapport bénéfice-risque-contrainte.

2e inteRvention : une bRève synthèse au suJet De La chiRuRgie De L’obésité par F. pattou (Lille)Il y a quatre interventions princi-pales : l’anneau gastrique, la sleeve gastrectomie, le bypass gastrique et la diversion biliopancréatique. Depuis la méta-analyse de H. Bu-chman en 2009, il est connu qu’à 2 ans et au-delà, la perte de poids est significative et durable. Le recul de la SOS study est de plus de 15 ans. Cela s’accompagne d’une réduction de la mortalité, surtout des patients hyperinsuliniques avant l’intervention. L’incidence des nouveaux cas de diabète est ré-duite de 88 % et les taux de rémis-sion moyens du diabète de type 2 dépassent 70 %. Enfin, la qualité de vie est améliorée. Les change-ments de profils glycémiques sont rapides et précoces après le bypass.

3e inteRvention : au-DeLà Du poiDs par b. Laferère (new york)

Pourquoi la glycémie s’améliore-t-elle si tôt aPrès un byPass gastrique ? L’auteur rapporte les résultats de son équipe. Il est difficile de sépa-rer l’effet du poids d’autres effets, car dans toutes les interventions il

y a perte de poids. Les arguments en faveur d’autres mécanismes sont la précocité des changements de glycémie, bien avant que le poids ne diminue. La restriction alimentaire très intense dans les jours suivant l’intervention amé-liore la sensibilité hépatique à l’insuline, alors que l’amélioration de la sensibilité périphérique à l’insuline apparaît beaucoup plus tard, après plusieurs mois. Enfin, des données publiées en 2010 suggèrent que la perte de poids induite par les analogues du GLP1 ou par anneau gastrique ajustable entraîne des effets très différents sur la glycémie.

contribution du tube digestifL’hypothèse d’une contribution du tube digestif a été apportée par la comparaison entre les résul-tats sur les profils glycémiques de diabétiques de type 2 ayant perdu 10 % de poids, soit tôt après un bypass gastrique, soit après une restriction calorique simple sans chirurgie. Alors que les patients étaient similaires dans les deux groupes avant l’intervention, la réponse à une charge orale de 50 g de glucose est très différente. Le GLP1 et le peptide C, après la charge, sont bien plus augmentés après le bypass qu’à la suite de la restriction calorique. L’effet incré-tine (comparaison de la sécrétion d’insuline après charge orale et charge intraveineuse) est aug-menté de 35 % après bypass et in-changé (augmentation de 6 % non significative) après restriction ali-mentaire. Les profils glycémiques après la charge sont très différents, avec des pics précoces et fugaces après bypass, peut-être par accélé-ration du transit, au travers d’une poche gastrique sans pylore. Cette augmentation de l’effet incrétine, contemporain de l’augmentation

du GLP1, pourrait être due à l’aug-mentation du nombre de repas, à l’accélération de la vidange gas-trique, à une malabsorption ou maldigestion des aliments, à la réduction de l’activité de la DPP IV ou encore à une augmentation de l’oxyndo-moduline et du PYY. Ces hypothèses devront être étayées.

Profils Plasmatiques ParticuliersEnfin, une hypothèse récente est apparue. Il semble que les patients diabétiques de type 2 ont des pro-fils plasmatiques particuliers en acides aminés, avec une associa-tion de concentrations élevées de cinq acides aminés (dont les acides aminés branchés) et la pré-diction du diabète de type 2. Dans les expériences décrites ci-dessus, les acides aminés branchés sont réduits de 38 % après bypass et inchangés après restriction calo-rique. Confirmant des données anciennes, l’analyse montre que cette réduction de concentration explique l’amélioration du HOMA (dans ce cas l’insulinosensibilité hépatique).

4e inteRvention : changeMent Du MicRobiote intestinaL apRès La chiRuRgie par K. clément (paris)Le microbiote intestinal est-il un indicateur des changements métaboliques induits par les trai-tements (dont la chirurgie) ? C’est une question dont les réponses sont attendues avec des enjeux très importants.

définition du microbiote intestinalLe microbiote intestinal est fait de 1014 bactéries, soit environ 100 espèces différentes, dont 30 % seulement sont cultivables. C’est

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16 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

Mise au point

un organe métabolique considéré comme aussi important que le foie, avec des fonctions de détoxi-fication, de fermentation, d’effet barrière protectrice et d’interac-tion avec le système immunitaire. Le bypass gastrique est vu comme un modèle intéressant de change-ment de microbiote intestinal, qui pourrait éclairer les changements des paramètres de l’inflammation et de l’immunité.

La carte d’identité bactérienne intestinale semble acquise tôt, vers l’âge de deux ans, avec environ 500  000 gènes et fonctions bacté-riennes partagés entre humains. Il y a trois familles principales de bactéries : les Bactéroides, les Pre-votella, et les Ruminococcus. Depuis les années 2010, il est connu qu’une alimentation riche en graisses et en protéines favorise les Bactéroides, une alimentation glucidique favo-risant les Prevotella. Les variations à court terme ne modifient pas le microbiote intestinal, d’où la ques-tion au sujet de son caractère pré-dicteur ou biomarqueur.

distribution des gènesLa distribution des gènes de ces bactéries est bimodale. Certaines personnes ont moins de gènes, en particulier les personnes obèses qui ont un phénotype “atrophié”. Les personnes avec ce phénotype atrophié sont aussi celles qui pré-sentent la plus grande résistance à la perte de poids, qui sont plus in-sulinorésistantes et qui prennent naturellement plus de poids au cours de leur vie. Les souris sans germe (axéniques) sont plus minces, plus actives et résistent mieux à la prise de poids induite par une hyperalimentation. Le transfert de microbiote d’une sou-ris obèse à une souris axénique favorise la prise de poids et l’insu-linorésistance.

Les résultats d’évolution du micro-biote intestinal après la chirurgie de l’obésité sont encore peu étu-diés. K. Clément et son équipe de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, montrent qu’après bypass gastrique chez l’Homme ou chez le rat, un enri-chissement du microbiote intes-tinal en quantité et en certaines espèces bactériennes est observé sans que l’on puisse encore dire s’il y a une relation de cause à effet avec les améliorations métaboliques.

5e inteRvention : Les DeRnièRes étuDes RanDoMisées par g. Mingrone (Rome)Comme il a été indiqué plus haut (F. Pattou), la SOS study qui a 15 ans de recul et qui compare la chirur-gie avec le traitement habituel montrait déjà plus de rémissions du diabète de type 2 dans les bras chirurgicaux. Dixon, en 2008, avait montré que chez des diabétiques de type 2 de découverte récente, l’an-neau gastrique (dans un essai ran-domisé vs le meilleur traitement médical possible) entraînait à 2 ans une perte de 21,1 kg (différence absolue), une réduction de 1,8 % en hémoglobine glyquée et une amélioration des autres facteurs de risque. Deux études randomisées ont été publiées en 2011. L’une de l’équipe de P. Schauer de Chicago, comparant le traitement médical moderne (recommandations de l’American Diabetes Association) à la sleeve gastrectomie ou au bypass (cinquante patients dans chacun des trois groupes). La chirurgie provoque une augmentation signi-ficative du nombre de rémissions à 12 mois (jugées sur une HbA1c in-férieure ou égale à 6 % avec ou sans traitement)1.Dans l’autre essai randomisé, G. Mingrone compare la diversion biliopancréatique ou le bypass au

traitement médical et montre la supériorité de la chirurgie pour les rémissions (jugées sur une glycé-mie à jeun inférieure à 100 mg/dl et une HbA1c inférieure à 6,5 % sans traitement)1. Cela concerne 75 % des patients avec bypass, 95 % de ceux avec diversion biliopancréa-tique et aucun patient sous traite-ment médical.

6e inteRvention : ceRtituDes et inceRtituDes Du tRaiteMent chiRuRgicaL par c. Jaffiol (Montpellier, académie de médecine)Comme il a été discuté précédem-ment, la chirurgie de l’obésité pré-sente certaines preuves d’efficacité en termes métaboliques. La rémis-sion est rapide et complète dans un nombre important de cas selon trois essais randomisés récents. Il y a soit un sevrage, soit une réduc-tion importante du besoin en médi-caments. La mortalité est réduite, tout particulièrement chez les patients avec diabète de type 2. Ce traitement est coût-efficace (pour l’anneau gastrique). Le risque est modeste avec une mortalité posto-pératoire faible, qui diminue avec l’expérience du chirurgien et de son équipe (malgré une augmen-tation très importante du nombre de procédures). Les complications à long terme sont connues, sous formes de carences, d’ulcères pour le bypass, de fistules pour la sleeve gastrectomie et de rares cas d’hypo-glycémies, parfois graves.Il reste cependant des incerti-tudes.

Les mécanismes qui conduisent à cette amélioration des glycémies

1. Les critères de rémission ne sont pas encore standardisés entre les équipes (Tab. 2).

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De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 17

sont mal connus, avec en particu-lier des inconnues sur les change-ments d’insulinosécrétion et sur le rôle de la néoglucogenèse intes-tinale. Le taux de récidive du dia-bète après rémission post-chirur-gicale est mal connu. Cependant, il semble que les patients les plus âgés, à la durée de diabète la plus longue, de genre féminin, traités par insuline en préopératoire et reprenant du poids en postopéra-toire sont plus exposés à une réci-dive du diabète de type 2. Nous ne savons pas quelle chirurgie privilé-gier si un bénéfice métabolique est recherché.

Peut-on oPérer des Patients diabétiques dont l’imc est inférieur à 35 kg/m2 ?Une revue systématique de la lit-térature par M. Fried en 2010 col-lige seize études, 343 personnes dont 66 % de femmes et 50 % de personnes à l’IMC inférieur à 30. Six études ont un suivi de plus de 2  ans. La mortalité est de 0,29 % et 4 % à 10 % des patients ont des complications précoces (premier mois). La réduction moyenne de l’HbA1c est de 2,9 % et 80 % des patients n’ont plus besoin de trai-tement médicamenteux2.

Il n’y a pas assez de données chez les adolescents et les personnes de plus de 60 ans.

Quant aux grossesses après di-version biliopancréatique, elles aboutiraient à des enfants un peu moins gros à la naissance, avec une réduction considérable de la proportion de macrosomes (1,8 % vs 14,8 % des enfants issus des mères avant l’intervention), une moindre proportion d’obésités

sévères et une meilleure formule lipidique. Ce sont les résultats obtenus à Québec dans l’équipe de P. Marceau.

C. Jaffiol conclut que des études de bénéfices-risques à plus long terme sont nécessaires pour éclai-rer ces points et que dire que le diabète est une affection au trai-tement chirurgical est encore pré-maturé.

7e inteRvention : coMMent aLLeR au-DeLà pouR FaiRe avanceR Le Débat par p. Ritz (toulouse)

qu’est-ce que la chirurgie métabolique Par raPPort à la chirurgie bariatrique ? La chirurgie bariatrique est celle dont l’objectif est une perte de poids. La chirurgie métabolique, selon la définition qu’en donne H. Buchwald, est « l’intervention chirurgicale sur un organe normal ou sur un système d’organes nor-maux, afin de modifier des valeurs biologiques, indicatrices d’un gain potentiel de santé ».

quels sont les mécanismes ?Beaucoup a été dit et il reste sans doute des pistes à explorer. Il n’en reste pas moins que le pourcen-tage de rémissions du diabète après la chirurgie est influencé de façon majeure par l’intensité de la perte de poids, comme le montre la figure 1.

une analyse Plus Poussée des essais randomisésLes trois essais couvrent les quatre types d’interventions et le critère de jugement était la rémission. Elle est clairement plus fréquente dans les trois essais que dans le bras médical mais n’est pas nulle dans ce dernier. En effet, dans l’es-sai de P. Schauer à Chicago, la perte d’excès de poids est de 13 % et 12 % des patients ont une HbA1c infé-rieure ou égale à 6 % (Tab. 1).

Il semble que la sleeve gastrecto-mie fasse un peu moins bien que le bypass dans cet essai (Tab. 1) puisque si les pourcentages de patients avec HbA1c inférieure ou égale à 6 % sont similaires dans les deux groupes chirurgicaux, cela est obtenu sans traitement médica-menteux en cas de bypass et avec

100

80

60

40

40 50 60

Anneau gastrique

Sleevegastrectomie Bypass gastrique

Diversionbiliopancréatique

% de la perte d’excès de poids

R2 = 0,9499% d

e ré

mis

sion

du

dia

bète

de

type

270 80

Figure 1 – Rémission du diabète de type 2 en fonction de la perte de poids (en perte

d’excès de poids) et selon les différentes procédures chirurgicales (d’après busetto L

et al. the growing role of bariatric surgery in the management of type 2 diabetes :

evidences and open questions. obes surg 2011 ; 21 : 1451-7).

2. Une autre revue de la littérature publiée en 2012 par Reis CEG, portant sur 1 209 patients, trouve 55 % de patients en rémission complète selon la définition du tableau 2 et 84 % en rémission partielle.

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18 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

Mise au point

traitement pour 28 % des patients avec sleeve gastrectomie. Une revue systématique des études ou-vertes, cas-contrôles, et des essais randomisés avec sleeve gastrecto-mie chez des patients diabétiques a été réalisée. Vingt-sept études sont conservées, soit 613 patients pour un suivi moyen de 13,1 mois (de 3 à 36 mois). La perte d’excès de poids est de 47,3 %, 66 % des patients sont en rémission et 13 % ont un traitement antidiabétique inchangé.

Dans l’essai de G. Mingrone, il n’y a pas de rémission dans le groupe médical mais cela traduit sans doute l’utilisation de critères de rémission plus stringents.

La définition de la rémission devra être précisée, comme le montre la disparité des critères utilisés (Tab. 2). Une conférence de consen-sus demandée par l’ADA n’a pas permis un accord.

que Penser de la mortalité Péri- et PostoPératoire ?En périopératoire la mortalité est basse, de l’ordre de 0,3 % dans les grandes séries de bypass, de 1 % après les diversions biliopan-créatiques et presque nulle après sleeve gastrectomie ou anneau gastrique.

La réduction de la mortalité à dis-tance de la chirurgie (d’environ 40 %) cache pourtant une autre réalité. S’il est vrai que la mortalité est réduite par rapport à un groupe apparié de personnes obèses non opérées, la mortalité reste chez les opérés de 50 % supérieure à celle d’une population de personnes ja-mais obèses et jamais opérées. Il y a encore de grands progrès à faire, sans doute dans la prise en charge postopératoire.

des recommandations qui évoluentLes recommandations de la HAS (2009) indiquent la chirurgie chez des patients qui présentent :• un IMC supérieur à 40 kg/m2 sans comorbidité ;• un IMC supérieur à 35 kg/m2 avec comorbidité, dont diabète ;• un IMC supérieur à 35 kg/m2 si reprise chirurgicale ou chirurgie en deux temps ;• un IMC supérieur à 50 kg/m2 pour la diversion biliopancréa-tique.Les recommandations de l’Inter-national Diabetes Federation (IDF) séparent les situations où

des patients sont éligibles à la chirurgie des situations où les patients sont priorisés pour la chirurgie (Tab. 3).

que manque-t-il Pour une recommandation Plus large de la chirurgie ?• Une définition “homogène” de la rémission. • Des études à long terme (cepen-dant la SOS a 15 ans, les essais ran-domisés sont à deux ans, il n’en est pas autant demandé pour l’AMM des médicaments).• Des données médico-écono-miques, car elles manquent.• Des études sur les autres aspects

tableau 1 – comparaison des trois groupes de patients dans l’essai randomisé de schauer (d’après schauer pR et al. bariatric surgery versus intensive Medical therapy in obese patients with Diabetes. n engl J Med 2012 ; 366 : 1567-76).

traitement médical(n = 50)

gbp(n = 50)

sleeve gastrectomie(n = 50)

hba1c < 6 % à 12 mois(% des patients)

12 % 42 %sans

traitement

37 %28 % avec traitement

perte de poids 5,2 % 27,5 % 24,7 %

% pep 13 88 81

tableau 2 – critères de rémission du diabète après chirurgie.

hba1c < ou Fpg <

traitement

hba1c <ou Fpg <

traitement

hba1c <ou Fpg <

traitement

Résolution

7 %100 mg/dl

Sans

NN

SansGly PP n

Rémission complète

6 %Sans

6 %100 mg/dlSans 1 an

contrôle ou rémission partielle

7 %125 mg/dl

Sans

6,5 %125 mg/dl

Sans pendant 1 an

améliorationRéduiteRéduiteRéduite

Références Dixon 2011 Buse 2009 Gill 2010

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De la chirurgie bariatrique à la chirurgie métabolique

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 19

de la balance bénéfice-risque, avec en particulier :- une analyse des bénéfices-risques du traitement du diabète quand il n’y a pas rémission. Le diabète est une maladie progressive, avec un phénotype secondaire à une interaction “gènes/atteinte pan-créatique/dialogue inter-organes/environnement”. Par conséquent, quels sont les effets à long terme de la chirurgie chez les diabé-tiques ? Y a-t-il un risque de réti-nopathie évolutive si l’équilibre métabolique s’améliore très vite ? Comment allons nous intégrer les carences en fer et en vitamine B12 qui altèrent les valeurs de l’hémo-globine glyquée ? - quel est le bénéfice sur la charge de soins et l’intensité du traite-ment, et sur le coût sociétal du dia-bète et de l’obésité (économique, social…) ?- quel est le bénéfice sur la facilité à atteindre les objectifs, en balance

avec l’intensité du traitement ?- quel est le risque réel de la chirur-gie, non seulement de l’acte (dans un centre expert ou dans un essai randomisé) mais si le traitement est disséminé ?- quels sont les avantages de la chirurgie dans les situations vrai-ment compliquées, comme chez les patients les plus fragiles (ceux qui ont eu la mortalité la plus éle-vée des études récentes d’inten-sification), dont le traitement est complexe (multi-injections…) ?

concLusion Il est encore trop tôt pour dire que la chirurgie de l’obésité est méta-bolique (elle a une composante métabolique) et qu’elle peut être considérée comme un outil théra-peutique du diabète à systémati-ser. n

tableau 3 – critères de l’iDF pour indiquer ou prioriser la chirurgie (d’après Zimmet p et al. iDF’s view of bariatric surgery in type 2 diabetes. Lancet 2011 ; 378 : 108-10).

iMc indiquer la chirurgie prioriser la chirurgie

< 30 kg/m2 Non Non

30-35 kg/m2 Oui conditionnel* Non

35-40 kg/m2 Oui Oui conditionnel*

> 40 kg/m2 Oui Oui

*Les points d’action devraient être abaissés de 2,5 points de niveau d’IMC pour les asiatiques.

mots-clés : chirurgie bariatrique, chirurgie méta-

bolique, Diabète de type 2, traite-

ment chirurgical, outil thérapeutique

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En pratiquE

20 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

ProblématiqueLa problématique posée est le « possible effet négatif de la chirur-gie bariatrique sur le squelette en accélérant la perte de la masse osseuse et ainsi augmentant la fra-gilité osseuse » (4). En effet, l’ostéoporose et l’ostéo-malacie sont reconnues comme étant des complications surve-nant au cours du suivi de patients gastrectomisés (5). De plus, une ostéomalacie a été décrite chez 2,5 % des patients après un bypass gastrique dans une étude améri-caine (6).

Les maladies osseuses méta-boliques peuvent refléter des perturbations dans la matrice organique, la phase minérale, les processus cellulaires du remode-lage osseux, les systèmes endo-criniens, nutritionnels et autres facteurs qui régulent l’homéosta-sie du squelette et des minéraux. Ces troubles peuvent être hérédi-taires ou acquis et affectent géné-ralement l’ensemble du squelette osseux. Les maladies osseuses métaboliques acquises sont les plus communes et comprennent l’ostéoporose, l’ostéomalacie, les modifications du squelette de l’hy-perparathyroïdie et l’insuffisance rénale chronique (ostéodystro-phie rénale) et une ostéite défor-mante (maladie de Paget).

Les patients souffrant d’une obési-té très sévère pour qui une chirur-gie de l’obésité est indiquée sont à haut risque de maladie méta-bolique des os pour de multiples raisons, en particulier une carence chronique en vitamine D par sé-questration de la vitamine D dans les adipocytes (7, 8), des apports calciques souvent inadéquats, une sédentarité, des régimes à répéti-tion, etc.Après la chirurgie, le risque de ma-ladie métabolique des os se majore devant une restriction alimentaire sévère induite par la technique

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

Le nombre de chirurgies de l’obé-sité a beaucoup augmenté ces 25 dernières années : environ 2 000 en 1995, 10 000 en 2000 et 25 000 en 2010 (1).Plusieurs types de chirurgies existent : les chirurgies restrictives pures, les chirurgies malabsorp-tives pures et les chirurgies à la fois restrictives et malabsorptives ; les chirurgies malabsorptives pures (Scopinaro) étant beaucoup plus rares. Les différentes chirurgies proposées actuellement sont les chirurgies restrictives comprenant l’anneau gastrique ajustable et la sleeve gastrectomie, et les chirur-gies associant une restriction et une malabsorption comme le bypass gastrique ou la divertion biliopan-créatique.La chirurgie de l’obésité permet une perte pondérale substantielle et durable et atténue voire corrige certaines comorbidités comme le diabète de type 2, les dyslipidémies, le syndrome d’apnées obstructives du sommeil et l’hypertension arté-rielle chez plus de 60 % des patients (2-3).

Introduction

métabolisme phospho-calcique et chirurgie de l’obésitéPrévenir la survenue des maladies métaboliques osseusesDr Charlotte Vaurs*

*Service Endocrinologie nutrition, Hôpital Larrey, Toulouse

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MétabolisMe phospho-calcique et chirurgie de l’obésité

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 21

chirurgicale, une diminution des apports calciques, une malabsorp-tion et une mauvaise observance à la prise de compléments vitami-niques oraux (9-11).

L’absorption des éléments traces comme le calcium ou le magné-sium s’effectue principalement au niveau du duodénum et du jéjunum proximal. La principale conséquence de la diminution de l’absorption du calcium est une activation de l’axe calcium-para-thyroïde avec hyperparathyroï-die et secondairement résorption osseuse. Quant à la vitamine D, l’absorption se fait principalement au niveau du jéjunum et de l’iléon, par diffusion passive dépendant de la présence de sels biliaires.

qu’en est-il dans la littérature ?Des études rétrospectives rap-portent un taux non négligeable de maladies métaboliques des os survenant après chirurgie de l’obé-sité (9-11). Une large étude a noté le développement de maladies mé-taboliques des os chez plus de 70 % des patients ayant bénéficié d’une procédure malabsorptive (12).

Techniques resTricTives puresUne méta-analyse de cinq études prospectives (13) portant sur l’évo-lution des marqueurs du remode-lage osseux a montré :• une augmentation précoce du remodelage osseux, prédominant sur les marqueurs de résorption osseuse (augmentés) par rapport aux marqueurs de formation os-seuse qui sont diminués ;• une baisse modérée de la cal-cémie (2 ans après sleeve gas-trectomie : de 2,32 mmol/l à 2,25 mmol/l  ; 2 ans après anneau gastrique : de 2,32 mmol/l à

2,21 mmol/l) ; • une absence de carence avérée en vitamine D ou d’hyperparathy-roïdie secondaire.

Sur le plan de la densité minérale osseuse (DMO), il est noté :• une baisse de la densité au niveau du col fémoral (à 24 mois, sans évaluation à long terme), cette di-minution pouvant être expliquée par une diminution de la charge mécanique après perte de poids ;• une absence de modification au niveau de la colonne lombaire et en termes de DMO totale.

Sur le plan de l’ostéoporose et du risque fracturaire, il n’a pas été re-trouvé de changement du T-score corps entier 2,5 ans après la pose d’un anneau gastrique ajustable dans une étude (T-score +  0,51 vs + 0,83 à 2,5 ans) (14).

Techniques malabsorpTives

❚ Diversion biliopancréatiqueDes carences en vitamine D avec hyperparathyroïdie secondaire sont fréquemment décrites après diversion biliopancréatique. Des anomalies de la minéralisation osseuse sur des biopsies osseuses pratiquées 1 à 5 ans après chirurgie sont retrouvées. Sur le plan de l’ostéodensitomé-trie, une diminution significative du Z-score lombaire (L2-L4) a été montrée 1 an après la chirurgie chez des femmes préménopau-sées, qu’elles soient sous supplé-mentation calcique (2  g/jour) ou non (pré 0,736 vs post -  0,356  ; et pré 0,715 vs post - 0,123 respective-ment ; p < 0,05) (15). Les auteurs si-gnalent que la majorité des patients reste obèse ou en surpoids après la chirurgie, paramètre pouvant contribuer au bénéfice d’une den-sité minérale osseuse meilleure par rapport à une population contrôle

de poids normal. Globalement, les T-scores restent largement au-dessus du diagnostic d’ostéopénie (- 0,356 et - 0,123).Une autre étude n’a pas mis en évidence l’apparition d’une os-téoporose à 2 ans d’une diver-sion biliopancréatique (16). Une étude a regardé les Z et T-scores de patients ayant bénéficié d’une diversion biliopancréatique à distance de la chirurgie. Les Z et T-scores de la hanche et du rachis lombaire restent inchangés 4 et 10 ans après la chirurgie (la moyenne du Z-score à 10 ans est de - 0,82 vs -  0,84 en préopératoire au niveau du rachis et de -  0,83 vs -  0,66 en préopératoire au niveau du col fémoral) (17).

❚ bypass gastriqueL’augmentation du remodelage osseux paraît plus importante après bypass gastrique qu’après technique restrictive pure, avec une prédominance des marqueurs de résorption osseuse (13). Des hyperparathyroïdies secondaires à des carences en vitamine D sont décrites et peuvent être difficiles à corriger malgré une supplémenta-tion orale (17).Une étude a regardé les T-scores de patients ayant bénéficié d’un bypass gastrique à distance de la chirurgie. Les T-scores de la hanche et du rachis lombaire restent inchangés 4 et 10 ans après la chirurgie (la moyenne du T-score à 10 ans est de 0,84 au niveau de la hanche et de 0,88 au niveau du rachis) (18). Sur le plan de l’ostéodensitomé-trie, une diminution significative de la densité minérale osseuse a été retrouvée au niveau de la hanche (7,8  %), du trochanter (9,3 %) et du corps entier (1,6 %) à 9 mois d’un bypass gastrique (19). Par ailleurs, les DMO restent iden-tiques chez des patientes prémé-

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22 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

En pratiquE

nopausées après bypass gastrique vs le groupe contrôle alors que les DMO des patientes ménopausées après bypass gastrique sont plus basses au niveau du col fémoral (20).

synThèse Pour conclure, une augmenta-tion du turn-over osseux est notée précocement après chirur-gie bariatrique, dès la première an-née, entraînant une diminution de la densité minérale osseuse, affectant préférentiellement la hanche, et à un degré moindre le rachis chez la femme, de manière plus intense après chirurgie ma-labsorptive. Les Z et T-scores sont normaux en post opératoire chez des sujets restant obèses ou en surpoids.

❚ la physiopathologie Elle demeure incertaine, reposant sur plusieurs hypothèses :• la malabsorption du calcium et de la vitamine D ; • l’hypo-œstrogénie surtout chez les femmes ménopausées (diminu-tion des œstrogènes en postopéra-toire secondaire à la diminution de l’activité de l’aromatase (21) ; • le rôle des adipokines (leptine, adiponectine) dont les effets sur l’os restent controversés (22, 23) ; • la précision et la fiabilité de l’ab-sorptiométrie biphotonique qui restent à préciser dans cette popu-lation d’obèses et après perte de poids majeure (24, 25).

❚ les limitesLes limites de ces différentes études sont nombreuses :• les populations étudiées sont hétérogènes (mélange de genres) ;• les effectifs sont faibles ;• les patientes sont à différents stades de la ménopause ; • les techniques chirurgicales sont différentes (mélange de diffé-

rentes techniques) ; • les études sont hétérogènes en termes de marqueurs de remode-lage osseux utilisés (télopeptides sanguins ou urinaires, ostéocal-cine, PTH, calcémie, vitamine D…) comme de la méthodologie (groupes contrôles, durée du suivi…).

recommandations

avanT la chirurgieIl semble impératif de réaliser un bilan nutritionnel complet avec dosage de la 25-hydroxy-vitamine  D, d’un marqueur de résorption osseuse comme la n-télopeptide urinaire ou les cross-laps sériques. Le dossier doit com-prendre une ostéodensitométrie de référence. Si celle-ci n’est pas réalisable chez un patient dépas-sant le poids maximum autorisé par la machine, une DEXA de l’avant-bras non dominant est alors à réaliser. Si des anomalies sont détectées sur l’ostéodensito-métrie, il convient de poursuivre les investigations.

après la chirurgie : insTauraTion D’une supplémenTaTion en calcium/viTamine DLe citrate de calcium sera préféré au carbonate de calcium devant une meilleure biodisponibilité, une assimilation osseuse supérieure et une efficacité à normaliser les mar-queurs du remodelage osseux (26). De plus, le citrate est métabolisé en bicarbonate ayant un effet neu-tralisant sur les urines, diminuant ainsi le risque de néphrolithiase.

La posologie habituellement recom-mandée est de 1 000 mg/jour, néan-moins certains préconisent des doses plus importantes en posto-pératoire immédiat, là où la perte

pondérale est la plus importante pouvant aller jusqu’à 2 000 mg/jour (27, 28).

Il est recommandé de vérifier la compliance du patient en dosant la calciurie. Une calciurie anorma-lement basse malgré une fonction rénale normale suggère fortement une mauvaise observance ou une mauvaise absorption (29).

Quant à la vitamine D, la supplé-mentation se fera avec du colé-calciférol (D3) plutôt qu’avec de l’ergocalciférol (D2).

En cas de carence éventuelle, la correction passera par 50 000  à 100 000 UI/jour de colécalcifé-rol pendant 1 à 2 semaines, puis la dose de maintenance sera 50  000  UI 1  à  2 fois/semaine. La prise se fera préférentiellement au cours du repas le plus impor-tant de la journée (car l’absorp-tion est fortement dépendante des sels biliaires) (30).

S’il persiste une carence en vita-mine D malgré un apport optimal, la photothérapie UVB apparaît comme une alternative efficace (31). Les cabines de bronzage aux UV ne sont pas recommandées car elles n’apportent qu’un faible pourcentage en UVB (5 %) contre 95 % d’UVA. Elles sont de plus pourvoyeuses de cancers cutanés.

Une surveillance régulière s’impose, 3 mois après la chirur-gie, tous les 6 mois les 2 premières années, puis de manière annuelle au long cours. Les carences nutri-tionnelles sont fréquentes malgré la prise de compléments multivi-taminiques (32).

Un apport protidique quotidien et suffisant est un facteur impor-tant à prendre en compte chez des

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MétabolisMe phospho-calcique et chirurgie de l’obésité

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 23

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BiBliographie

mots-clés : chirurgie bariatrique,

maladies osseuses métaboliques,

calcium, Vitamine d

patients présentant fréquemment une anorexie pour la viande après chirurgie de l’obésité.

Par ailleurs, il convient d’être pru-dent dans l’utilisation de la coles-tyramine chez des patients ayant de la diarrhée, car ce traitement majore la malabsorption de la vita-mine D et augmente le risque d’oc-clusion intestinale s’il est prescrit

sur de longues périodes (33, 34).

Une ostéodensitométrie pourra être réalisée 1 an après la chirurgie.

Enfin, s’il persiste des anomalies à la DEXA malgré la correction des carences en vitamine D/calcium, les bisphosphonates seront alors prescrits par voie intraveineuse plutôt que par voie orale. En effet,

la tolérance, le risque d’ulcération de l’anastomose ainsi que l’absorp-tion n’ont jamais été évalués dans cette population de patients. n

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comprendre

24 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

De nombreuses études ont investigué, depuis 10 ans, les liens potentiellement

physiopathologiques entre un dys-fonctionnement mitochondrial et l’existence d’une insulinorésis-tance ou d’un diabète de type 2. Les résultats de ces études ont été bien souvent contradictoires lais-sant encore le champ ouvert aux hypothèses mécanistiques liant la mitochondrie et l’insulinoré-sistance. Relevons qu’il existe en tout cas suffisamment d’évidences scientifiques pour suggérer que la densité mitochondriale et la capacité oxydative mitochondriale sont altérées dans les tissus insu-linosensibles des sujets insulino-résistants (4). Cette dysfonction apparaît précocement au cours du développement de l’insulinorésis-tance et elle est une condition re-connue comme sine qua non dans le diabète de type 2. Toutefois, de nombreuses questions restent en suspens : les anomalies fonction-nelles mitochondriales et/ou la faible densité mitochondriale ob-servées dans les situations d’insu-linorésistance sont-elles acquises ou innées ? Quelle est la nature des altérations mitochondriales en lien avec la diminution de l’utilisation du glucose en réponse à l’insuline ? Enfin, la dysfonction mitochon-driale est-elle une anomalie pri-maire à l’origine du développement de l’insulinorésistance ou est-elle au contraire la conséquence de celle-ci ? Dans cet article nous proposons

de faire une synthèse des connais-sances actuelles sur les altérations mitochondriales observées dans les tissus insulinosensibles chez les sujets insulinorésistants et nous discuterons ensuite des liens de causalité possibles entre la dys-fonction mitochondriale et le dia-bète de type 2.

La dysfonction mitochondriaLe dans Le muscLe insuLinorésistant Le muscle squelettique est le principal utilisateur de glucose en situation postprandiale et le principal responsable de la cap-tation et du stockage non-oxyda-tif du glucose en réponse à une hyperinsulinémie. Par ailleurs, le muscle squelettique est le prin-cipal déterminant de l’utilisation oxydative des substrats énergé-tiques à l’échelle du corps entier en réponse à l’entraînement physique. Les fonctions de la mitochondrie dans le muscle squelettique com-prennent : la phosphorylation oxydative, l’homéostasie calcique, la biologie des ROS (espèces réac-tives de l’oxygène), l’apoptose et la thermogenèse via le découplage mitochondrial. La nature des ano-malies mitochondriales observées dans les états d’insulinorésistance reste discutée. Plusieurs auteurs rapportent une réduction du contenu en mitochondries (5) ou de la capacité oxydative mitochon-driale dans le muscle squelettique

L’intérêt porté à la relation entre l’altération de la fonction mitochon-driale et la résistance à l’insuline a pris de l’ampleur il y a 10 ans lorsque Kelley et son équipe ont décrit un dysfonctionnement mitochondrial dans le muscle squelettique chez le patient diabétique de type 2. Il était rapporté une diminution d’activité de la NADH:O2 réductase et de la ci-trate synthase, enzymes mitochon-driales, ainsi que des anomalies morphologiques mitochondriales en microscopie électronique (1). Par la suite, deux publications ont montré une réduction coordonnée de l’expression de gènes impliqués dans la phosphorylation oxydative du muscle squelettique chez les pa-tients diabétiques de type 2 et leurs apparentés (2, 3). Ces équipes ont également retrouvé une réduction de l’expression de PGC1α, acteur crucial du métabolisme mitochon-drial chez les patients diabétiques de type 2 (2).

Introduction

dysfonction mitochondriale et diabète de type 2Y a-t-il un lien de causalité ?Dr Emmanuel Disse*

* Praticien hospitalo-universitaire, Service d’Endocrinologie, maladies métaboliques et nutrition, Centre Hospitalier Lyon Sud Centre Européen pour la Nutrition et la Santé (CENS), Lyon [email protected]

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Dysfonction mitochonDriale et Diabète De type 2

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 25

du sujet insulinorésistant (6) alors que d’autres n’identifient pas ces anomalies d’activité ou de capacité oxydative mitochondriale en situa-tion basale, mais plutôt un défaut de synthèse musculaire d’ATP en réponse à l’insuline (7). Nous allons maintenant décrire ces différentes anomalies mitochondriales retrou-vées à l’état basal ou en réponse au stimulus insulinique.

En situation basalERappelons que la synthèse d’ATP (la molécule qui fournit de l’énergie pour le fonctionnement de tous les composants cellulaires) a lieu dans la mitochondrie par deux voies. Une voie non oxydative, anaérobie à partir du lactate. Une voie aéro-bie, dans la chaîne respiratoire, où l’ADP et le P se combinent pour donner l’ATP, au terme d’une série de réactions qui transfère des élec-trons à l’oxygène (d’où oxydative, et ROS). In vivo, les patients dia-bétiques de type 2 présentent une réduction, dans le muscle squelet-tique, du niveau maximal de phos-phorylation oxydative induite par l’ADP en comparaison aux sujets sains après ajustement sur l’âge, le sexe et l’IMC, témoignant de l’incapacité de la cellule muscu-laire à répondre complètement à la demande énergétique du fait soit d’une altération de la plasticité mitochondriale, d’une réduction de la capacité de phosphorylation oxydative ou d’une réduction du contenu en mitochondries (8). De fait, plusieurs études ont rapporté une capacité de phosphorylation oxydative plus basse mesurée sur des biopsies musculaires de sujets diabétiques par rapport aux sujets sains (9). Cette anomalie reste pré-sente après ajustement sur la den-sité musculaire en mitochondries et a été confirmée ex vivo sur des mitochondries isolées, allant ainsi dans le sens d’une diminution de la capacité de phosphorylation oxy-

dative de la mitochondrie chez le patient diabétique de type 2, indé-pendamment du contenu en mito-chondries. Dans le même temps, les mesures de densité mitochon-driale ont souvent été retrouvées comme abaissées chez les patients diabétiques ou insulinorésistants (1, 5). Après ajustement sur l’IMC, plusieurs études n’ont toutefois pas retrouvé cette différence chez le diabétique par rapport au sujet sain (6, 9). Bien que la méthode utilisée dans ces études pour esti-mer la densité mitochondriale soit critiquable et puisse expliquer cette absence de différence, ces résultats font évoquer la possibi-lité du rôle prépondérant de l’obé-sité par rapport au statut méta-bolique dans la réduction de la densité mitochondriale du muscle squelettique. A contrario, certains auteurs rapportent, chez les dia-bétiques de type 2 et leurs descen-dants non diabétiques, une dimi-nution d’expression de PGC1α et de PGC1β, acteurs clés de la bioge-nèse mitochondriale (2, 3). PGC1α est sensible aux stimuli environ-nementaux comme la déplétion énergétique et permet à la cellule de s’adapter aux fluctuations nutri-tionnelles en régulant la biogenèse mitochondriale et l’oxydation des acides gras. Ainsi, PGC1α est un bon candidat pour lier l’altération de la plasticité mitochondriale, l’inflexibilité métabolique, l’insu-linorésistance et la réduction de la densité mitochondriale observées chez le patient diabétique de type 2. L’activité mitochondriale de repos, approchée par la synthèse basale d’ATP, a été décrite comme réduite chez les sujets âgés insulinorésis-tants (7) et chez les descendants de patients diabétiques de type 2 (10). La synthèse d’ATP étant fortement dépendante de la capacité maxi-male de phosphorylation oxydative induite par l’ADP, cette réduction peut traduire soit une altération

de la plasticité mitochondriale, soit une diminution de la demande énergétique cellulaire consécutive à l’état d’insulinorésistance. Tou-tefois, l’activité mitochondriale de repos a pu être retrouvée comme normale chez le patient diabétique de type 2 en comparaison au sujet sain (7) et la diminution de den-sité mitochondriale généralement observée est alors compensée par une augmentation de l’activité mi-tochondriale.

En résumé, malgré l’hétérogé-néité des résultats de la littéra-ture, il semble que l’insulinoré-sistance et le diabète de type 2 s’associent à une diminution de la densité musculaire en mito-chondrie et/ou à une réduction de la capacité de phosphoryla-tion oxydative en situation ba-sale menant à une production insuffisante d’ATP en réponse à l’élévation des besoins énergé-tiques cellulaires.

En réponsE à l’insulinEAu cours du clamp euglycémique hyperinsulinémique chez l’homme non diabétique, l’activité mito-chondriale augmente de 10  % à 90 % après 1  h à 2  h et la capacité oxydative mitochondriale aug-mente de 32  % à 42 % après 8  h d’hyperinsulinémie, reflétant la plasticité mitochondriale (7, 11, 12). Cette augmentation d’acti-vité mitochondriale est probable-ment le fait de l’augmentation de la demande énergétique cellulaire (élévation du ratio ADP/ATP) et de l’expression des enzymes clés de la chaîne respiratoire en réponse à l’insuline. Les sujets insulinoré-sistants ne présentent pas cette augmentation d’activité mitochon-driale au cours du clamp (7). Cette anomalie qui traduit une altération de la plasticité mitochondriale en réponse à l’insuline a été retrouvée, au-delà des patients diabétiques de

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type 2, chez leurs apparentés au premier degré (12), chez les dia-bétiques de type 1 (13) et chez les sujets sains après 6  h d’infusion lipidique (14). Du fait de la moindre sensibilité à l’insuline du muscle squelettique dans les états d’insu-linorésistance, l’entrée du glucose dans les myocytes est diminuée, de même que la concentration intra-cellulaire en glucose-6-phosphate. En conséquence, il existe une dimi-nution de la disponibilité des subs-trats, potentiellement limitante pour la production d’ATP, alors que la demande d’énergie cellulaire est augmentée par l’hyperinsuliné-mie. Toutefois, si l’on augmente la disponibilité intracellulaire en glu-cose-6-phosphate en réalisant un clamp hyperinsulinémique mais cette fois hyperglycémique, il n’est toujours pas observé d’augmenta-tion de l’activité mitochondriale du muscle squelettique chez le patient diabétique de type 2 (7). De même, les études ex vivo, sur myotubes de patients insulinorésistants dans des conditions d’excès de subs-trats pour la production d’ATP ne montrent pas d’augmentation des capacités de phosphorylation oxy-dative en réponse à l’insuline (15). L’hypothèse de la limitation d’ac-cès aux substrats pour expliquer le défaut de phosphorylation oxy-dative en réponse à l’insuline chez le patient diabétique de type 2 est donc peu plausible. Les myotubes de sujets normo-glycémiques minces ou obèses répondent à 4 h d’incubation par l’insuline par une augmentation de 30 % de la capa-cité de phosphorylation oxydative mitochondriale contrairement aux myotubes de sujets diabétiques de type 2 (16). L’ajout de palmitate dans le milieu altère cette réponse chez les sujets contrôles suggérant que l’insulinorésistance induite par les lipides interfère avec la plasticité mitochondriale. Ainsi, l’ensemble de ces don-

nées suggère que l’altération de la plasticité mitochondriale en réponse à l’insuline n’est pas une question de disponibilité de substrats mais bien une altéra-tion des capacités maximales de phosphorylation oxydative induite par l’ADP, limitant la pro-duction d’ATP nécessaire à la cou-verture de la demande énergétique. Cette anomalie pourrait être une caractéristique précoce de l’insuli-norésistance musculaire et de l’in-flexibilité métabolique.

En réponsE aux lipidEsLes sujets insulinorésistants se ca-ractérisent par des niveaux plasma-tiques élevés en acides gras libres (AGL). Une diminution des capa-cités du muscle à oxyder les lipides peut conduire à l’accumulation intramusculaire d’intermédiaires lipidiques comme le diacylglycé-rol (DAG) et les céramides, connus pour altérer la voie de signalisation insulinique et induire une insuli-norésistance. Ainsi, l’augmentation des niveaux plasmatiques de lipides suite à une infusion de triglycérides induit une insulinorésistance chez le sujet sain. Il a été proposé, sur un plan mécanistique, que la diminu-tion des capacités d’oxydation lipi-dique mitochondriale puisse être à l’origine de cette accumulation de lipides dans le muscle menant à l’insulinorésistance. L’élévation à court terme des acides gras libres plasmatiques, en regard de niveaux insuliniques post-absorptifs, n’en-traîne pas d’altération de l’activité mitochondriale et, en conséquence, l’insulinorésistance physiologique observée au cours du jeûne ne peut être imputée à une dysfonction mitochondriale. Notons que l’élé-vation des niveaux d’acides gras libres est à même d’activer PPARg et d’induire l’expression de PGC1α, améliorant l’oxydation mitochon-driale des lipides avant les éven-tuels effets délétères de ceux-ci

sur la fonction mitochondriale. Les capacités d’oxydation lipi-dique mitochondriale ne sont pas altérées chez les patients obèses ou diabétiques de type 2 (17, 18), mais ces capacités, bien que normales, pourraient être dépassées par une élévation chronique de la biodispo-nibilité lipidique. Cette élévation chronique d’AGL pourrait alté-rer l’interaction PPARg-PGC1α qui régule le niveau d’oxydation lipidique chez le sujet insulino-sensible et également conduire à l’oxydation incomplète des acides gras, décrite comme as-sociée à la perte de flexibilité métabolique et à l’insulinorésis-tance.

La dysfonction mitochondriaLe dans Le foie insuLinorésistantLe foie a un rôle central, à coté du muscle squelettique, dans la physiopathologie de l’insulinoré-sistance conduisant au diabète de type  2. La résistance hépatique à l’insuline correspond à la dimi-nution des capacités de l’insuline circulante à stimuler la synthèse de glycogène et à inhiber la pro-duction endogène de glucose. L’insulinorésistance hépatique est une caractéristique de l’état “pré-diabétique” associée ou non à une hyperglycémie modérée à jeun. Cet état est fortement corrélé au contenu hépatocytaire en lipides. À l’image du muscle squelettique, l’accumulation d’intermédiaires lipides dans l’hépatocyte est in-criminée dans l’altération de la signalisation insulinique. L’accu-mulation de lipides intrahépato-cytaires stimule simultanément l’oxydation mitochondriale des acides gras et la production de ROS, conduisant à la peroxydation lipidique et à l’altération de l’ADN mitochondrial. L’évolution de la

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Dysfonction mitochonDriale et Diabète De type 2

Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65 27

simple stéatose hépatique vers la NASH (hépatite stéatosique non alcoolique) implique une inflam-mation intrahépatique. Cette transition s’accompagne d’anoma-lies morphologiques (19), d’inclu-sions microcristallines et d’altéra-tions de l’ADN des mitochondries hépatocytaires (20). Malgré une augmentation de l’oxydation lipi-dique mitochondriale, les sujets porteurs d’une NASH présentent une diminution des capacités maximales de phosphorylation oxydative induite par l’ADP tradui-sant une réduction, soit de la capa-cité de phosphorylation oxydative, soit de la plasticité mitochondriale (21). Les patients diabétiques de type 2 présentent une réduction de l’activité mitochondriale de repos dans le foie (22), corrélée avec le degré d’insulinorésistance hépa-tique et périphérique. En l’absence de diabète mais pour le même contenu lipidique hépatocytaire, il n’a pas été retrouvé de diminution de l’activité mitochondriale hépa-tique (22). Ainsi, comme pour le muscle squelettique, le foie du sujet insulinorésistant ou dia-bétique de type 2 présente une dysfonction mitochondriale.

un Lien de causaLité entre La dysfonction mitochondriaLe et Le diabète de type 2 ? Le rôle initiateur ou primaire de la dysfonction mitochondriale sur la survenue de l’insulinorésistance et du diabète de type 2 reste très débattu. Nous proposons de pré-senter brièvement les altérations innées ou acquises de la fonction mitochondriale pouvant participer au développement de la résistance à l’insuline ainsi que l’effet des in-terventions comportementales et pharmacologiques sur la fonction mitochondriale chez le diabétique de type 2.

HypotHèsEs mécanistiquEsLe rôle potentiel de la dysfonc-tion mitochondriale primitive ou acquise dans le développement de l’insulinorésistance et du diabète est résumé dans la figure 1.

En présence d’une hérédité de diabète de type 2 ou d’une autre prédisposition génétique à l’insuli-norésistance telle que le syndrome des ovaires polykystiques ou bien encore face à une anomalie pri-maire du génome mitochondrial, l’activité de phosphorylation oxy-dative mitochondriale est réduite, correspondant à une dysfonction mitochondriale primitive. En conséquence, l’arrivée massive de lipides dans la cellule n’entraîne plus d’adaptation mitochondriale (plasticité) et l’oxydation lipidique devient incomplète. Des intermé-diaires lipidiques, tels que le dia-cylglycérol (DAG) et les céramides, s’accumulent dans la cellule muscu-laire. Ces intermédiaires lipidiques activent la protéine kinase C, abou-tissant à la phosphorylation d’IRS1 en sérine et à une altération en

conséquence de la signalisation insulinique. La dysfonction mito-chondriale secondaire peut être la conséquence du vieillissement cellulaire, d’une alimentation ina-daptée ou de la sédentarité. Une ali-mentation riche en lipides peut sti-muler la biogenèse mitochondriale en activant le récepteur PPARg ; parallèlement une surnutrition glucido-lipidique est à même de fa-voriser à la fois l’accumulation d’in-termédiaires lipidiques favorisant les dommages oxydatifs et l’alté-ration de la sensibilité à l’insuline. De plus, la surnutrition apporte un excès d’équivalents réducteurs à la chaîne respiratoire mitochon-driale, favorisant la génération de ROS. Les dommages oxydatifs qui en résultent altèrent, à leur tour, la capacité de phosphorylation oxy-dative mitochondriale reprodui-sant alors le phénotype de la dys-fonction mitochondriale primitive.

Si, d’un point de vue mécanis-tique et physiopathologique, il est envisageable que la dysfonction mitochondriale soit un initia-

DAG Céramides

IMCL

PKC

SignalisationInsulinique

phosphorylationoxydative

Lipides

phosphorylationoxydative

Hérédité de DT2 Anomalie primaire du

génome mitochondrial SOPK

Alimentation riche

en graissesSurnutrition

Vieillissementsédentarité

Biogenèse mitochondriale

ROS

Dysfonction mitochondrialeprimaire ou innée

Dysfonction mitochondrialesecondaire ou acquise

Flux dʼe

figure 1 - rôle de la mitochondrie dans le développement de l’insulinorésistance (adap-

tation de : pagel-Langenickel i, bao J, pang L, sack mn. the role of mitochondria in the

pathophysiology of skeletal muscle insulin resistance. endocr rev 2010 feb ; 31 : 25-51).

sopK : syndrome des ovaires polykystiques, imcL : lipides intramyocytaires, daG : diacyl-

glycérol, pKc : protéine kinase c, ros : espèces réactives de l’oxygène.

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28 Diabète & Obésité • Janvier 2013 • vol. 8 • numéro 65

teur de l’insulinorésistance, cette question reste l’objet d’intenses débats scientifiques. La dysfonc-tion mitochondriale chez le pa-tient diabétique de type 2 ne peut qu’aggraver l’insulinorésistance et s’il n’est pas possible de répondre sur le rôle causal de cette dysfonc-tion dans l’apparition du diabète, il est probable que l’amélioration de la fonction mitochondriale dans les situations d’insulinorésistance puisse permettre d’améliorer la sensibilité à l’insuline et peut-être de limiter la transition de l’insu-linorésistance vers le diabète de type 2.

améliorEr la dysfonction mitocHondrialE cHEz lE diabétiquE dE typE 2 Les études d’interventions hygié-no-diététiques ou pharmacolo-giques chez le patient diabétique ou insulinorésistant sont l’occasion d’étudier la réversibilité de la dys-fonction mitochondriale observée dans ces situations et ainsi d’appor-ter des éléments de réponse sur les liens de causalité entre dysfonction mitochondriale et insulinorésis-tance.

❚l’exercice physique et la diététiqueDans l’obésité et le diabète de type 2, les interventions comportemen-tales portant sur la diététique, la combinaison de la diététique et de l’activité physique ou sur l’activité physique seule entraînent une amé-lioration de la sensibilité globale à l’insuline. L’augmentation de l’exer-cice physique accroît la densité musculaire en mitochondries ainsi que la capacité oxydative mitochon-driale (23-24), l’activité de la chaîne respiratoire et la β-oxydation dans le muscle squelettique (25). Une in-tervention de trois mois d’entraîne-ment musculaire chez le diabétique a ainsi pu permettre la restauration d’une capacité maximale de phos-

phorylation oxydative induite par l’ADP équivalente à celles de sujets contrôles (24). Les interventions diététiques seules améliorent la sensibilité globale à l’insuline mais sans entraîner en parallèle d’amé-lioration de la capacité de phospho-rylation oxydative mitochondriale (26). Notons que, suite à une perte de poids, le contenu intramuscu-laire en lipides diminue ou bien reste inchangé indiquant que c’est avant tout la demande énergétique cellulaire qui déclenche la plasticité mitochondriale, plus que l’impor-tance du contenu intramusculaire en lipides ou du niveau d’insulino-résistance. De plus, ces résultats indiquent que l’amélioration de la capacité de phosphorylation oxy-dative n’est pas un pré-requis pour observer une amélioration de la sensibilité à l’insuline en réponse à l’exercice, ce qui est un argument allant contre un lien de causalité entre une dysfonction primaire de la mitochondrie et le dévelop-pement de l’insulinorésistance. Toutefois, certains facteurs de pré-disposition génétique pourraient participer à la réponse adaptative de la mitochondrie à l’exercice phy-sique (plasticité mitochondriale). En effet, il a été décrit un polymor-phisme dans le gène NDUFB6, co-dant pour une partie du complexe I de la chaîne respiratoire, associé à une meilleure réponse en termes de sensibilité à l’insuline et d’activité mitochondriale après 1 semaine

d’entraînement physique chez le diabétique de type 2 (27).

❚ les thiazolidinedionesPlusieurs classes pharmacologiques sont susceptibles de cibler la dys-fonction mitochondriale chez le sujet insulinorésistant. Les thiazo-lidinediones, agonistes pharmaco-logiques de PPARg actuellement retirées du marché français, amé-liorent la sensibilité à l’insuline par différents mécanismes. En activant PPARg, elles augmentent l’expres-sion de PGC1α et conduisent ainsi à une stimulation de la biogenèse mitochondriale et à une améliora-tion de la capacité oxydative mito-chondriale. Ainsi, la diminution de la capacité d’oxydation lipidique mitochondriale des myotubes de sujets diabétiques de type 2 est-elle réversible après un traitement par la troglitazone (28). La pioglita-zone stimule l’expression des gènes impliqués dans la phosphorylation oxydative mitochondriale muscu-laire chez les femmes porteuses d’un syndrome des ovaires polykys-tiques (29). La rosiglitazone stimule l’expression musculaire de PGC1α et induit la phosphorylation oxyda-tive musculaire chez le patient dia-bétique de type 2 (30). Notons que l’amélioration de la sensibilité à l’in-suline induite par les glitazones est susceptible, par elle-même, d’amé-liorer la plasticité mitochondriale et de permettre l’adéquation entre la demande énergétique induite par

La fonction mitochondriale… • Activité mitochondriale : correspond au niveau de phosphorylation

oxydative de repos de la mitochondrie et dépend principalement du besoin cellulaire en ATP, reflété par le ratio ADP/ATP.

• Capacité de phosphorylation oxydative : correspond au niveau maximal de phosphorylation oxydative induite par l’ADP, en situation de demande énergétique maximale et à saturation de substrats.

• Plasticité mitochondriale : correspond au changement de densité mito-chondriale, d’activité mitochondriale et de capacité de phosphorylation oxydative en réponse à une altération de la condition métabolique.

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Dysfonction mitochonDriale et Diabète De type 2

l’insuline et l’augmentation de la production d’ATP.

❚les activateurs de sirtuine 1La sirtuine 1, désacétylase NAD-dépendante, est un médiateur im-portant des effets bénéfiques de la restriction calorique. La sirtuine  1 a émergé récemment comme un élément-clé du fonctionnement mitochondrial et de la sensibilité à l’insuline. Le resvératrol, polyphé-nol extrait du raisin, est un activa-teur de la sirtuine 1. Le resvératrol à forte dose augmente l’expression de PGC1α et la biogenèse mitochon-driale chez le rongeur (31). Notons qu’au-delà de son rôle d’activateur de sirtuine 1, le resvératrol active l’AMPK et présente des propriétés anti-oxydantes. Le développement d’activateurs pharmacologiques de l’axe AMPK-SIRT1-PGC1α, pour améliorer les capacités de phos-

phorylation oxydative et le niveau de sensibilité à l’insuline, a donné des résultats prometteurs chez l’animal et pourrait offrir une nou-velle approche thérapeutique pour les patients insulinorésistants ou diabétiques de type 2 (32). n

mots-clés : dysfonction mitochondriale,

diabète de type 2, insulinorésistance,

muscle squelettique,

exercice physique,

cible thérapeutique

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BiBliographie

À retenirn L’insulinorésistance et le diabète de type 2 s’accompagnent d’une dysfonc-

tion mitochondriale correspondant à une diminution de la densité muscu-

laire en mitochondries et/ou de la capacité de phosphorylation oxydative

mitochondriale.

n La dysfonction mitochondriale primitive ou acquise est succeptible

d’induire ou d’aggraver une insulinorésistance.

n L’hypothèse d’un rôle initiateur fort de la dysfonction mitochondriale dans

l’insulinorésistance et le diabète de type 2 reste controversée.

n L’exercice physique améliore la densité mitochondriale et la capacité de

phosphorylation oxydative du muscle squelettique.

n L’amélioration de la dysfonction mitochondriale est une cible thérapeutique

d’avenir pour le traitement de l’insulinorésistance et du diabète de type 2.