anesthésie et réanimation du patient diabétique

23
Anesthésie et réanimation du patient diabétique M. Carles, J. Dellamonica, A. Raucoules-Aimé Le diabète est une maladie lourde de conséquences par ses complications. Le diabète de type 2 (anciennement non insulinodépendant) est le plus fréquent. Le délai moyen entre l’apparition de l’hyperglycémie et le diagnostic clinique de diabète de type 2 est de 10 ans. Dans ces conditions, les complications micro- et macrovasculaires commencent à se développer avant que le diagnostic n’ait été porté, ce qui explique en grande partie la morbidité importante dans cette population. Le risque opératoire est essentiellement lié aux complications dégénératives cardiovasculaires ou affectant le système nerveux autonome. Dans ce contexte, l’évaluation préopératoire est fondamentale. La place de l’anesthésie locorégionale est aujourd’hui réhabilitée et les niveaux du contrôle glycémique en per- et postopératoire sont maintenant aussi bien définis. Une normalisation de la glycémie semble souhaitable chez le patient diabétique en réanimation ou soumis à une chirurgie à risque d’ischémie. Les complications aiguës du diabète abordées dans ce chapitre sont le syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire, l’acidocétose diabétique, l’acidose lactique et l’hypoglycémie. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Diabète de type 1 ; Diabète de type 2 ; Complications dégénératives ; Anesthésie générale ; Anesthésie locorégionale Plan Introduction 1 Diagnostic, classification et épidémiologie du diabète 1 Prise en charge anesthésique du patient diabétique 2 Lésions dégénératives et évaluation préopératoire 2 Complications dégénératives et risque opératoire 4 Place de l’anesthésie locorégionale 7 Comment contrôler la glycémie et quel doit être le niveau optimal de la glycémie en périopératoire ? 8 Nouveaux traitements médicamenteux du diabète 9 Prise en charge dans certaines circonstances particulières 10 Réanimation du diabétique 11 Syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire 11 Acidocétose diabétique 14 Acidose lactique et diabète 17 Hypoglycémies 18 Introduction Le diabète est une maladie lourde de conséquences par ses complications. Il constitue un problème de santé publique dont le poids humain et économique augmente. Ses complications en font une maladie dont la morbidité et la mortalité sont forte- ment accrues par rapport à la population générale. Pour les complications cardiovasculaires, le risque est multiplié par un facteur de 2 à 3. Le diabète est la première cause de mise en dialyse en France, et le risque d’amputation de membre est multiplié par 10. Enfin, les complications oculaires en font une des premières causes de cécité ou d’altération de l’acuité visuelle [1] . Le diabète de type 2 (anciennement non insulinodépendant) est le plus fréquent. Aux États-Unis, des études longitudinales de suivi de sujets ayant été diagnostiqués comme diabétiques sur un test d’hyperglycémie provoquée orale (HGPO) pathologique ont montré que le délai moyen entre la découverte biologique et le diagnostic clinique de diabète de type 2 est de 10 ans. Dans ces conditions, les complications micro- et macrovasculai- res commencent à se développer avant que le diagnostic n’ait été porté, ce qui explique en grande partie la morbidité impor- tante dans cette population. Les critères diagnostiques de diabète qui ont prévalu jusqu’alors (glycémie 1,4 g l –1 ) ont dû être révisés à la baisse car ils ont contribué au retard de prise en charge de cette affection (cf. chapitre suivant). Cette modifica- tion des critères diagnostiques conduit aussi à une révision de la classification des diabètes et à une réévaluation des données épidémiologiques. Quant au risque opératoire, il est essentiellement lié aux complications dégénératives du diabète, en particulier cardio- vasculaires ou affectant le système nerveux autonome. Dans ce contexte, l’évaluation préopératoire est fondamentale. Par ailleurs, la place de l’anesthésie locorégionale est aujourd’hui réhabilitée et les niveaux du contrôle glycémique en per- et postopératoire sont maintenant aussi bien définis. Diagnostic, classification et épidémiologie du diabète Le diabète est une affection métabolique caractérisée par la présence d’une hyperglycémie chronique résultant d’une déficience de sécrétion d’insuline, d’anomalies de l’action de l’insuline sur les tissus cibles, ou de l’association des deux. Le diagnostic du diabète repose donc sur la mesure de la glycémie réalisée soit à jeun, soit 2 heures après ingestion de 75 g de 36-650-A-10 1 Anesthésie-Réanimation Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Upload: kajol14

Post on 07-Dec-2014

113 views

Category:

Documents


8 download

TRANSCRIPT

Anesthésie et réanimation du patientdiabétique

M. Carles, J. Dellamonica, A. Raucoules-Aimé

Le diabète est une maladie lourde de conséquences par ses complications. Le diabète de type 2(anciennement non insulinodépendant) est le plus fréquent. Le délai moyen entre l’apparition del’hyperglycémie et le diagnostic clinique de diabète de type 2 est de 10 ans. Dans ces conditions, lescomplications micro- et macrovasculaires commencent à se développer avant que le diagnostic n’ait étéporté, ce qui explique en grande partie la morbidité importante dans cette population. Le risqueopératoire est essentiellement lié aux complications dégénératives cardiovasculaires ou affectant lesystème nerveux autonome. Dans ce contexte, l’évaluation préopératoire est fondamentale. La place del’anesthésie locorégionale est aujourd’hui réhabilitée et les niveaux du contrôle glycémique en per- etpostopératoire sont maintenant aussi bien définis. Une normalisation de la glycémie semble souhaitablechez le patient diabétique en réanimation ou soumis à une chirurgie à risque d’ischémie. Lescomplications aiguës du diabète abordées dans ce chapitre sont le syndrome d’hyperglycémiehyperosmolaire, l’acidocétose diabétique, l’acidose lactique et l’hypoglycémie.

© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Diabète de type 1 ; Diabète de type 2 ; Complications dégénératives ; Anesthésie générale ;Anesthésie locorégionale

Plan

¶ Introduction 1

¶ Diagnostic, classification et épidémiologie du diabète 1

¶ Prise en charge anesthésique du patient diabétique 2Lésions dégénératives et évaluation préopératoire 2Complications dégénératives et risque opératoire 4Place de l’anesthésie locorégionale 7Comment contrôler la glycémie et quel doit être le niveau optimalde la glycémie en périopératoire ? 8Nouveaux traitements médicamenteux du diabète 9Prise en charge dans certaines circonstances particulières 10

¶ Réanimation du diabétique 11Syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire 11Acidocétose diabétique 14Acidose lactique et diabète 17Hypoglycémies 18

■ IntroductionLe diabète est une maladie lourde de conséquences par ses

complications. Il constitue un problème de santé publique dontle poids humain et économique augmente. Ses complications enfont une maladie dont la morbidité et la mortalité sont forte-ment accrues par rapport à la population générale. Pour lescomplications cardiovasculaires, le risque est multiplié par unfacteur de 2 à 3. Le diabète est la première cause de mise endialyse en France, et le risque d’amputation de membre estmultiplié par 10. Enfin, les complications oculaires en font unedes premières causes de cécité ou d’altération de l’acuitévisuelle [1].

Le diabète de type 2 (anciennement non insulinodépendant)est le plus fréquent. Aux États-Unis, des études longitudinales desuivi de sujets ayant été diagnostiqués comme diabétiques surun test d’hyperglycémie provoquée orale (HGPO) pathologiqueont montré que le délai moyen entre la découverte biologiqueet le diagnostic clinique de diabète de type 2 est de 10 ans.Dans ces conditions, les complications micro- et macrovasculai-res commencent à se développer avant que le diagnostic n’aitété porté, ce qui explique en grande partie la morbidité impor-tante dans cette population. Les critères diagnostiques dediabète qui ont prévalu jusqu’alors (glycémie ≥ 1,4 g l–1) ont dûêtre révisés à la baisse car ils ont contribué au retard de prise encharge de cette affection (cf. chapitre suivant). Cette modifica-tion des critères diagnostiques conduit aussi à une révision dela classification des diabètes et à une réévaluation des donnéesépidémiologiques.

Quant au risque opératoire, il est essentiellement lié auxcomplications dégénératives du diabète, en particulier cardio-vasculaires ou affectant le système nerveux autonome. Dans cecontexte, l’évaluation préopératoire est fondamentale. Parailleurs, la place de l’anesthésie locorégionale est aujourd’huiréhabilitée et les niveaux du contrôle glycémique en per- etpostopératoire sont maintenant aussi bien définis.

■ Diagnostic, classificationet épidémiologie du diabète

Le diabète est une affection métabolique caractérisée par laprésence d’une hyperglycémie chronique résultant d’unedéficience de sécrétion d’insuline, d’anomalies de l’action del’insuline sur les tissus cibles, ou de l’association des deux. Lediagnostic du diabète repose donc sur la mesure de la glycémieréalisée soit à jeun, soit 2 heures après ingestion de 75 g de

¶ 36-650-A-10

1Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

glucose (HGPO) (Tableau 1). En l’absence de symptômescliniques, le diagnostic de diabète, avant d’être retenu, doit êtreconfirmé par une seconde mesure.

La classification du diabète comporte schématiquement deuxformes : le diabète de type 1 anciennement appelé diabèteinsulinodépendant ou diabète juvénile, qui représente environ10 % des cas (150 000 personnes en France) et débute habituel-lement avant 30 ans, et le diabète de type 2 anciennementdénommé diabète non insulinodépendant ou diabète de lamaturité qui représente environ 90 % des cas (1 300 000 per-sonnes en France). La prévalence du diabète de type 2 diagnos-tiqué est proche de 3 % dans la population française. Lapopulation à risque de diabète de type 2 correspond essentiel-lement à la population des obèses. La prévalence de l’obésité(indice de masse corporelle > 30 kg m–2) dans la populationadulte française est estimée à plus de 10 %. Si le diabète de type1 est habituellement reconnu devant des symptômes (amaigris-sement, polyurie, polydypsie), le diabète de type 2 est le plussouvent asymptomatique et diagnostiqué fortuitement, àl’occasion d’une prise de sang lors d’un bilan systématique enparticulier avant un acte chirurgical. Le nombre de diabétiquesméconnus en France ne dépasse probablement pas 500 000.Ainsi, au moment du diagnostic clinique du diabète, la rétino-pathie est présente chez 10 à 29 % des patients et la protéinurieest détectée chez 10 à 37 % des sujets. Quant aux complicationsmacrovasculaires (coronaropathie, artériopathie périphérique),elles débutent encore plus précocement dès le stade de l’intolé-rance au glucose. Cette affection s’associe fréquemment àd’autres facteurs de risque cardiovasculaire : parmi les adultesporteurs d’un diabète de type 2 non diagnostiqué, 61 % sontdéjà hypertendus, 50 % sont hypercholestérolémiques et 30 %sont hypertriglycéridémiques. Une fois le diabète diagnostiqué,selon les pays 50 à 74 % sont hypertendus et 38 à 60 % sontdyslipidémiques [1].

■ Prise en charge anesthésiquedu patient diabétique

Les atteintes dégénératives liées au diabète sont très nom-breuses, en particulier chez le diabétique de type 2.

Lésions dégénératives et évaluationpréopératoire

Atteinte cardiovasculaire

L’atteinte cardiovasculaire fait toute la gravité du patientdiabétique et est la cause de la difficulté de sa prise en chargepériopératoire.

Atteinte coronarienne

L’étude Framingham a montré que le risque de maladiecoronaire est multiplié par deux chez les diabétiques de sexemasculin, comparés à une population non diabétique de mêmeâge [2]. Le risque est multiplié par trois chez les femmesdiabétiques après la ménopause. Cette étude a, pour la premièrefois, souligné la fréquence des morts subites et le caractèrevolontiers atypique de la sémiologie de l’ischémie myocardiquechez les diabétiques. Au cours des 20 dernières années,d’innombrables études épidémiologiques ou interventionsthérapeutiques portant sur de grandes cohortes de diabétiquesont confirmé le risque coronarien. En 1993, l’étude MultipleRisk Factor Intervention Trial (MRFIT) a montré que, sur unepériode de suivi de 12 ans, l’incidence de la maladie coronaireétait multipliée par 3,2 chez des hommes diabétiques comparésà des hommes non diabétiques, strictement appariés. Cetteétude a également démontré que le diabète de type 2 était unfacteur de risque coronarien majeur et indépendant [3]. Plusrécemment, dans l’étude épidémiologique United KingdomProspective Diabetes Study (UKPDS), chez des diabétiques detype 2 récemment diagnostiqués et des deux sexes, la maladiecoronaire a été identifiée comme la cause principale de décès [4].

La fréquence et le pronostic favorable de la maladie coro-narienne sont donc augmentés chez les patients diabétiquesqui viennent à la chirurgie et cela d’autant plus qu’ils sontâgés. Trois points concernant leur prise en charge en périopé-ratoire sont à souligner. Le premier porte sur le dépistage enpréopératoire de l’ischémie myocardique silencieuse (IMS), ledeuxième sur la place de l’angioplastie dans le traitement deslésions coronaires, le troisième concerne la place des inhibi-teurs de l’enzyme de conversion (IEC) après infarctus dumyocarde.

Diagnostic de l’ischémie myocardique silencieuse. Il doitêtre porté chez un malade ayant des lésions significatives sansaucun symptôme clinique thoracique, au repos, à l’effort, ou aufroid, et sans cardiomyopathie ou valvulopathie [5]. Son électro-cardiogramme (ECG) de repos soit est normal, soit est le sièged’anomalies évocatrices d’une ischémie myocardique. Lesmalades diabétiques qui, au froid, se plaignent à l’effort d’unedyspnée invalidante, de palpitations, d’une gêne thoracique,même si celle-ci n’a pas les caractéristiques habituelles de ladouleur angineuse, ne rentrent pas dans le cadre du dépistagede l’IMS. Ils sont d’emblée suspects d’une maladie coronaire àconfirmer ou à infirmer par une épreuve d’effort. Le dépistagede l’IMS doit être effectué pour les hommes, chez les diabéti-ques de type 2 suivants :• les diabétiques âgés de plus de 60 ans, artéritiques, ou ayant

fait un accident vasculaire cérébral (AVC) ayant laissé peu deséquelles. Chez ces patients, une maladie coronaire estdiagnostiquée dans 50 % des cas ;

• les diabétiques microalbuminuriques ou protéinuriques dontle risque coronarien est multiplié par 2 à 3 sur une périodede 10 ans par rapport à des diabétiques de type 2 normoal-buminuriques appariés ;

• les sujets cumulant tabagisme, hypertension artérielle (HTA)et hyperlipidémie.Chez les diabétiques de type 1 ayant dépassé l’âge de 40 ans

et ayant plus de 15 ans de diabète, le dépistage de l’IMS doitêtre réalisé en cas de néphropathie patente, d’artérite desmembres inférieurs ou en présence d’une intoxication tabagiquemajeure et ancienne. Pour les femmes âgées de plus de 65 ans,le dépistage de l’IMS doit être pratiqué chez :• les femmes ayant eu une ménopause précoce, non substituée ;• les femmes artéritiques ou ayant fait un AVC ;• les femmes présentant une protéinurie avec ou sans insuffi-

sance rénale.Pour dépister l’ischémie myocardique silencieuse, on dispose

de quatre méthodes d’investigation non invasives. Ces examensne doivent être prescrits que si le patient a préalablementaccepté que soient réalisés une coronarographie et éventuelle-ment un geste de revascularisation, au décours d’un testindiscutablement positif.

Tableau 1.Critères diagnostiques du diabète.

Anciens critères diagnostiques (OMS, 1980)

Était considéré comme diabétique, un sujet présentant à deux reprises :

– une glycémie à jeun > 7,8 mmol l–1 (1,40 g l–1) ;

– ou une glycémie 2 heures après la prise orale (charge) de 75 gde glucose, > 11 mmol l–1.

Nouveaux critères proposés par l’American Diabetic Association(ADA, 1997) et l’ANAES (1998)

Est considéré comme diabétique, un sujet présentant à deux reprises uneglycémie à jeun (au moins 8 heures de jeûne) > 7 mmol.l–1 (> 1,26 g l–1).

Est considéré comme normal un sujet ayant une glycémie à jeun< 6,1 mmol l–1 (< 1,10 g l–1).

Sont considérés comme ayant une glycorégulation anormale :

– les sujets ayant une hyperglycémie modérée à jeun : glycémie >6,1 mmol l–1 et < 7 mmol l–1 (> 1,10 g l–1 et < 1,26 g l–1) ;

– les sujets ayant une intolérance au glucose : glycémie à jeun< 7 mmol l–1 (< 1,26 g l–1) et glycémie 2 heures après la prise de 75 gde glucose > 7,6 mmol l–1 (> 1,40 g l–1) et < 11,1 mmol–1 (< 2 g l–1).

OMS : Organisation mondiale de la santé ; ANAES : Agence nationaled’accréditation et d’évaluation en santé.

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

2 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

L’enregistrement Holter des 24 heures possède une bonnespécificité mais une sensibilité très faible pour le diagnostic demaladie coronaire ; il a peu d’intérêt.

L’échocardiographie de stress est un examen séduisant maissa spécificité et sa sensibilité n’ont pas été évaluées chez lespatients diabétiques.

L’enregistrement ECG au cours d’une épreuve d’effort est unexamen facilement réalisable et d’un coût raisonnable. Ilpossède une excellente valeur prédictive négative (85 %), à lacondition que l’épreuve soit maximale et qu’elle soit réaliséeaprès l’arrêt des anti-ischémiques, en particulier les b-bloquants,depuis au moins 48 heures. Une épreuve d’effort maximalenégative dans les conditions précitées permet en pratiqued’éliminer le diagnostic de maladie coronaire.

La scintigraphie myocardique n’est réalisable que dans lescentres de médecine nucléaire. Ses performances sont légère-ment supérieures à celle de l’épreuve d’effort. En pratique, elledoit être réservée aux diabétiques dont l’épreuve d’effort seraimpossible ou ininterprétable.

La coronarographie n’est pas un examen de dépistage del’IMS, mais elle est indispensable pour préciser le siège, le degré,et l’étendue des sténoses coronaires lorsque l’épreuve d’effort oula scintigraphie myocardique ont suggéré une ischémie myocar-dique. Cet examen est nécessaire pour dépister les faux positifsdes scintigraphies myocardiques dont le pourcentage estdirectement corrélé à l’expérience de l’équipe ayant réalisél’épreuve. La coronarographie est également indispensable pourposer les indications d’une revascularisation myocardique. Lacoronarographie justifie des précautions d’emploi, tant en cequi concerne la prévention des épisodes d’insuffisance rénaleaiguë iatrogénique que l’utilisation des antidiabétiques oraux(cf. infra).

Places respectives de l’angioplastie et du pontage aortoco-ronarien. En termes de réduction de mortalité, il semble que,globalement, les diabétiques tirent le même bénéfice que lesnon-diabétiques des pontages aortocoronariens (en particulierles greffons artériels) et des dilatations endoluminales avec posede stents (réduction de la mortalité de 44 % après pontageaortocoronarien) [6, 7]. Les résultats préliminaires obtenus avecles stents actifs dans la population diabétique sont prometteurs.Cependant, une étude a comparé l’angioplastie au pontageaortocoronarien chez 2 600 diabétiques qui présentaient uneatteinte pluritronculaire [8]. Cette étude confirme la mortalitéélevée périopératoire après pontage (5 %) mais montre aussique, chez les diabétiques traités par insuline, la survie à 5 anset à 10 ans est meilleure après pontage qu’après dilatation.Cependant, dans la plupart des études sur le diabète et lachirurgie coronarienne, d’importants facteurs additionnels n’ontpas été pris en compte. Il s’agit, par exemple, de l’incidence etdu degré d’hypertension artérielle, de la présence d’une dys-fonction ventriculaire, ou encore de la sévérité des lésionscoronariennes. Il convient d’être prudent sur le pronostic d’unpontage coronarien chez le diabétique ayant une mauvaisefonction ventriculaire, puisque la mortalité, dans certainesétudes, atteint 10 à 15 %.

Données de l’étude GISI-3. Les données de l’étude GISI-3(lisinopril) concernant la réduction de la mortalité aprèsinfarctus du myocarde apparaissent transposables au diabéti-que [9]. L’étude du sous-groupe des diabétiques (dont unemajorité de type 2) montre une réduction de la mortalité à6 mois de 3,2 % par rapport au groupe placebo. Les résultats del’étude EUROPA suggèrent aussi un bénéfice de l’utilisation desIEC (périndopril) chez le patient diabétique coronarien stable entermes de diminution des événements cardiovasculairesmajeurs [10].

Hypertension artérielle

L’hypertension artérielle (définie par une pression artérielle ≥

140/90 mmHg à au moins trois consultations) est d’une grandefréquence au cours du diabète, en particulier dans le type 2, etaffecte 40 à 60 % des patients. Outre un lien génétique fort

entre diabète et hypertension artérielle, un certain nombre defacteurs ou de causes peuvent rendre compte de la survenue oude l’aggravation d’une hypertension artérielle chez un diabéti-que : obésité, hypersécrétion freinable de catécholamines,néphropathies (notamment vasculaires), syndrome d’apnée dusommeil, tabagisme, alcoolisme [11]. Elles représentent unfacteur de risque majeur de survenue d’une atteinte coronaire etun facteur aggravant de la néphropathie, de la rétinopathie etde la cardiopathie diabétiques. L’étude UKPDS a montré que leniveau tensionnel optimal pour prévenir les complicationsmicro- ou macroangiopathiques ou éviter leur progression étaitune pression artérielle inférieure à 130/80 mmHg [12]. Nouspouvons raisonnablement nous fixer le respect de cet objectifen périopératoire. Il convient toutefois de garder à l’esprit qu’unabaissement de la pression artérielle systolique en dessous de140 mmHg peut être difficile à obtenir, notamment chez lesujet avec une atteinte vasculaire évoluée (athérome diffus, sujetâgé). Quoi qu’il en soit, le contrôle de cette hypertensionartérielle est indispensable en préopératoire pour éviter, enassociation avec une neuropathie dysautonomique, une instabi-lité hémodynamique peropératoire et des complications coro-nariennes et rénales. Le traitement en première intention del’hypertension artérielle du diabétique repose sur les cinq classesthérapeutiques suivantes : b-bloquant cardiosélectif, diurétiquethiazidique, IEC, inhibiteur calcique, antagoniste des récepteursde l’angiotensine II (ARA II). Une association d’antihyperten-seurs est le plus souvent nécessaire et tout médicament antihy-pertenseur efficace et bien toléré peut être utilisé chezl’hypertendu diabétique. Il est recommandé d’inclure undiurétique thiazidique dans les associations [1]. Il n’y a pasd’effet délétère des diurétiques thiazidiques sur l’équilibreglycémique des patients diabétiques.

Pathologie myocardique et l’insuffisance cardiaque

Cardiomyopathie diabétique. Il est décrit, en peropératoire,des tableaux de défaillance cardiaque gauche avec troubles durythme en l’absence de toute cardiopathie hypertensive ouischémique. La diminution de la performance du ventriculegauche est davantage secondaire à un défaut de remplissageventriculaire gauche qu’à une diminution de la contractilité ouà une augmentation de la postcharge. L’importance des anoma-lies de la performance du ventricule gauche est corrélée à lasévérité de la microangiopathie au niveau de la rétine dupatient ainsi qu’à la qualité de l’équilibre glycémique [13]. Deslésions importantes au fond d’œil imposent donc la réalisationd’une échocardiographie doppler avant une chirurgie majeureou potentiellement hémorragique. Une fraction d’éjection aurepos inférieure à 35 % représente un facteur de risque opéra-toire majeur.

Insuffisance cardiaque congestive. Elle est deux fois plusfréquente chez le diabétique de sexe masculin et cinq fois plusfréquente chez la femme diabétique comparativement à lapopulation non diabétique, d’où la nécessité d’une évaluationcardiologique soigneuse en préopératoire. Les IEC sont lespremières molécules ayant démontré, dans des essais contrôlés,leur capacité à réduire la mortalité globale cardiovasculaire et lerisque d’apparition de récidive d’une insuffisance cardiaquesévère dans la population générale des insuffisants cardiaques.L’analyse par sous-groupes a montré leur aptitude à améliorerles paramètres cliniques et hémodynamiques chez les diabéti-ques avec dysfonction systolique mais aussi diastolique isolée oufaisant suite à un infarctus du myocarde [14]. L’étude DIG amontré, dans la population générale des insuffisants cardiaques,une diminution des poussées d’insuffisance cardiaque chroniquechez les patients traités par digoxine quelle que soit l’étiologiede la cardiopathie, que les patients soient en rythme sinusal ouqu’ils aient une fibrillation auriculaire [15]. Malgré l’absenced’essais contrôlés dans l’insuffisance cardiaque, les diurétiquessont utilisés dans les poussées congestives comme dans lesphases stables de l’insuffisance cardiaque chronique. Lesdiurétiques de l’anse sont les plus utilisés. En phase chroniquestable, la dose utile la plus faible devra être recherchée. L’ajoutd’antialdostérone semble efficace mais nécessite une grande

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

3Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

prudence lors d’association aux IEC. Deux études récentes ontmontré une réduction de la mortalité de 65 % avec des dosescroissantes initialement faibles de b-bloquant.

Neuropathie sensitivomotrice

Les atteintes périphériques (mono- ou polynévrites) sontfréquentes puisqu’elles sont observées chez environ 50 % despatients diabétiques après 15 ans d’évolution. La plupart desatteintes neuropathiques du diabète restent asymptomatiques etsont simplement découvertes par examen systématique. Laneuropathie diabétique, qui prédomine habituellement auxmembres inférieurs, peut entraîner des douleurs nocturnesinvalidantes, mais surtout, la neuropathie diabétique prédisposeaux plaies du pied. Les ulcères du pied font courir un risqueimportant d’amputations, surtout si le sujet est de plus atteintd’artérite des membres inférieurs. Chez le patient diabétique, lerisque d’amputations est multiplié par 10 à 15. Le dépistage enpréopératoire de cette neuropathie périphérique est importanten raison des implications possibles avec l’anesthésie locorégio-nale (cf. infra).

Fonction rénale

L’évolution de la néphropathie diabétique se fait en quelquesannées vers l’insuffisance rénale chronique, et le diabètereprésente environ 15 % des mises en hémodialyse en France.Les mécanismes de la néphropathie du diabète de type 2 appa-raissent plus complexes que ceux du diabète de type 1. Lanéphropathie du diabète de type 2 associe à des degrés divers :• des lésions de microangiopathie diabétique de mêmes méca-

nismes que dans la forme insulinodépendante ;• une hyperfiltration rénale liée à l’obésité ;• un athérome rénal favorisé par la dyslipidémie, l’hyperten-

sion artérielle et le tabagisme ;• une atteinte interstitielle, séquelle fréquente d’infections

urinaires hautes parfois latentes.La vitesse d’évolution vers l’insuffisance rénale terminale est

identique quel que soit le type de diabète [15]. En revanche, letabagisme a été identifié comme un facteur favorisant lasurvenue de la néphropathie car il aggrave la microangiopathierénale. L’hypertension artérielle accompagne et aggrave lanéphropathie diabétique dont le tournant évolutif est marquépar l’apparition d’une microalbuminurie (> 20-200µg min–1) [16]. Chez ces patients, les IEC sont habituellementprescrits, seuls ou en association à un traitement antihyperten-seur même si celui-ci était déjà efficace. Les IEC, probablementpar un effet de réduction de la pression intraglomérulaire,permettent de diminuer la microalbuminurie et de stabiliser,voire d’améliorer la fonction rénale. Les sartans (ARA II) fontl’objet d’études prospectives récentes. L’irbesartan à la dose de300 mg réduit significativement le risque de survenue d’unenéphropathie [17]. Ce bénéfice paraît indépendant de l’effetantihypertenseur.

Recherche d’une intubation difficile

Il est classique de dire que l’intubation trachéale est 10 foisplus difficile chez le patient diabétique. Ces difficultés d’intuba-tion sont liées à une glycosylation protéique non enzymatique,l’hyperglycémie favorisant la constitution d’un réseau decollagène anormalement résistant au niveau articulaire. Laraideur articulaire débute et prédomine aux mains. Elle toucheen premier, symétriquement, les métacarpophalangiennes et lesinterphalangiennes proximales des cinquièmes doigts, puiss’étend aux autres doigts. Elle se traduit par l’impossibilitéd’affronter les faces palmaires des mains et des articulationsinterphalangiennes réalisant le signe de la prière (Fig. 1). Cesigne doit être considéré comme un critère prédictif d’intuba-tion difficile. Au niveau du rachis cervical, il existe une fixationde l’articulation atlanto-occipitale et un défaut d’extension et deflexion de la tête sur les premières vertèbres cervicales, rendantl’intubation difficile, voire impossible. Toute tentative pourmettre la tête en hyperextension entraîne une voussure anté-

rieure de la colonne cervicale et un déplacement dans le mêmesens du larynx, diminuant l’exposition des cordes vocales(Fig. 2). Une altération des fibres de collagène au niveau dularynx participerait aussi aux difficultés d’intubation.

Cependant, les études qui rapportent une incidence élevéed’intubation difficile sont anciennes. Warner et al., dans uneétude prospective plus récente, incluant 725 patients diabéti-ques bénéficiant d’une intubation pour transplantations rénaleou pancréatique, ne retrouvent qu’une incidence de 2,1 % delaryngoscopie difficile [19]. Le plus important est probablementde rechercher les signes prédictifs d’intubation difficile spécifi-ques aux patients diabétiques, comme le signe de la prière ouune empreinte palmaire anormale ; s’ils sont présents, le risqued’intubation difficile est réel. Si l’examen est négatif, le meilleurrapport sensibilité/spécificité est l’ancienneté du diabète.Au-delà de 10 ans, le risque d’intubation difficile est accru [19].

Complications dégénératives et risqueopératoire

Risque infectieux

Chez le diabétique, les infections représentent les deux tiersdes complications postopératoires et 20 % des décès en pério-pératoire [20]. Les données expérimentales suggèrent une originemultifactorielle dans la survenue de ces infections. De nom-breuses altérations de la fonction leucocytaire ont été montréeschez les diabétiques hyperglycémiques, parmi lesquelles unediminution du chimiotactisme, une altération de la phagocytoseet une diminution de la capacité intracellulaire à lyser lesstaphylocoques et les pneumocoques. Lorsque l’on traite lesdiabétiques de façon à maintenir une glycémie en dessous de13,7 mmol l–1 (2,5 g l–1), la fonction phagocytaire des polynu-cléaires est améliorée et la destruction intracellulaire desbactéries est restaurée à un niveau pratiquement normal.

En chirurgie propre (classe I d’Altemeier) il a longtemps étéaffirmé que les patients diabétiques étaient plus sujets auxinfections (× 5). Cependant, lorsque l’on tient compte de l’âgeet des atteintes dégénératives préexistantes, il n’existe plus dedifférence. Récemment, en chirurgie cardiaque après sternoto-mie, le taux d’infections de la paroi a été retrouvé plus élevéchez les patients diabétiques, mais l’incidence de l’infection aété réduite par un contrôle strict de la glycémie [21]. Un apportcontinu d’insuline à la pompe semblait plus efficace qu’unapport discontinu.

L’infection urinaire étant l’infection la plus fréquemmentretrouvée, la prescription d’une cytobactériologie urinaire (CBU)en préopératoire doit être large, et même obligatoire en pré-sence d’une vessie dysautonomique. Le sondage urinaire doittoujours être réfléchi, la recherche d’un globe vésical doit êtresystématique en postopératoire.

Figure 1. Signe de la prière.

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

4 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Aucune antibioprophylaxie en périopératoire n’est à prévoirdu seul fait du diabète en dehors des indications reconnues etle taux d’infections nosocomiales doit pouvoir être diminuégrâce à un développement plus large de l’anesthésie ambulatoirechez les patients diabétiques [22].

Risque respiratoire postopératoire

Le diabète est un facteur de risque de survenue de complica-tions respiratoires en postopératoire immédiat. Il semble quecertains diabétiques dysautonomiques aient une diminution deleur réponse ventilatoire à l’hypoxie et à l’hypercapnie. Il estpar ailleurs noté une diminution, voire une absence de réacti-vité bronchique et du réflexe de toux lors de l’instillationtrachéale d’acide citrique chez ces mêmes patients. Un certainnombre des morts subites d’origine hypoxique périodiquementrapportées dans la littérature sont donc probablement enrapport avec les effets respiratoires résiduels de l’anesthésie ouavec des régurgitations passées inaperçues en raison de l’atteintedu réflexe de toux chez ces patients. Cela doit rendre prudentel’utilisation des analgésiques morphiniques en postopératoirepour les patients dysautonomiques et impose de prévoir unesurveillance stricte lors du réveil.

En dehors de la dysautonomie, il a été décrit, chez despatients diabétiques de types 1 et 2, une perte des propriétésélastiques du poumon. Il s’agit essentiellement d’une altéra-tion de la mécanique ventilatoire avec une diminution de lacapacité vitale, du volume expiratoire maximal par seconde(VEMS), ainsi qu’un trouble de la diffusion du monoxyde decarbone (CO). Ces altérations débutent très précocement dansla maladie diabétique, voire dès l’apparition des troubles de latolérance glycémique et leur évolution est parallèle à laqualité de l’équilibre glycémique [23]. Habituellement, cesaltérations n’ont qu’un retentissement clinique mineur, toutau moins dans la mesure où elles ne sont pas associées àd’autres facteurs de risque. Il n’est donc pas exclu qu’enpostopératoire immédiat, ces altérations, associées aux effetsrésiduels de l’anesthésie et au retentissement respiratoired’une chirurgie abdominale ou thoracique, puissent expliquerune fréquence plus élevée de complications respiratoires chezles patients diabétiques.

Risque lié à la neuropathie dysautonomique

Dysautonomie cardiaque

La neuropathie diabétique dysautonomique est retrouvée chez20 à 40 % des patients diabétiques hospitalisés [24]. Cettefréquence est encore plus élevée chez les diabétiques hyperten-dus (50 %). Une étude s’est intéressée à la morbidité et à lamortalité chez des patients diabétiques et des patients hyper-tendus qui n’étaient pas diabétiques en chirurgie programmée

(hors chirurgie cardiaque). Les patients diabétiques dysautono-miques n’ont pas présenté, en peropératoire, plus d’épisodesd’hypotension artérielle ou n’ont pas bénéficié plus fréquem-ment de vasopresseurs que les non-diabétiques ou les diabéti-ques sans neuropathie dysautonomique. Cependant, cinqpatients sur les 74 (7 %) ont présenté un arrêt cardiorespiratoireet/ou sont décédés en postopératoire. Tous ces patients avaientau moins deux tests explorant le système nerveux autonomeanormaux et des antécédents d’infarctus du myocarde ou unecardiomégalie.

Les causes de morts subites périopératoires sont bienconnues chez ce type de patients. En dehors des problèmesrespiratoires décrits au chapitre précédent, les diabétiquesdysautonomiques sont exposés à la survenue d’infarctus dumyocarde indolores et de troubles du rythme, en particulierde fibrillations ventriculaires (Tableau 2). Ces anomalies durythme sont liées à un déséquilibre entre le système vagal, dontl’activité est réduite, et le système sympathique dont l’activitéest maintenue. Ce déséquilibre peut être mis en évidence parune diminution de la variabilité de la fréquence cardiaque.L’intervalle QT, sous contrôle du système nerveux autonome,semble aussi un marqueur prédictif de l’instabilité myocardiquepériopératoire [25]. Plus récemment il a été montré que lavariabilité de la longueur du QT (dispersion du QT) est aussicorrélée au risque d’arythmie ventriculaire [26] et qu’il existe unerelation directe entre l’importance de la dispersion des valeursdu QT et la survenue d’une mort subite. Cette dispersion est lereflet des modifications du tonus autonome. Elle affecteparticulièrement les patients diabétiques insuffisants rénaux etdysautonomiques [26]. Si l’on veut réduire la fréquence desmorts subites périopératoires, la recherche d’une neuropathiedysautonomique doit être systématique, de même qu’uneintensification du monitorage et une surveillance postopératoireaccrue. Par ailleurs, certaines études ont montré que les patientsdiabétiques dysautonomiques étaient exposés à un risque accrud’instabilité tensionnelle périopératoire [27, 28]. Ces modifica-tions traduiraient la difficulté d’adaptation hémodynamique dupatient dysautonomique soit à l’hypovolémie, soit à l’adminis-tration de produits vasoplégiants ou modifiant le baroréflexe.Ces perturbations s’associent à une absence de variations destaux circulants de noradrénaline. Cependant, l’étude récente deKeyl et al. se veut rassurante [29]. Chez des patients diabétiques,coronariens b-bloqués et dysautonomiques, ces auteurs neretrouvent pas d’instabilité hémodynamique en peropératoire. Ilfaut cependant noter que ces patients avaient une bonnefonction ventriculaire gauche, ne présentaient pas d’hypovolé-mie et étaient endormis avec de l’étomidate. Plus récemment, ila été montré que la dysautonomie cardiaque exposait au risqued’hypothermie en peropératoire [30]. L’hypothermie s’installepour des durées d’anesthésie supérieures à 2 heures et serait enrapport avec des altérations de la vasoconstriction périphérique.

Figure 2. Au niveau du rachis cervical, il existeune fixation de l’articulation atlanto-occipitale (A)et un défaut d’extension et de flexion de la tête surles premières vertèbres cervicales, rendant difficile,voire impossible l’intubation. Toute tentative pourmettre la tête en hyperextension entraîne unevoussure antérieure de la colonne cervicale (B), etun déplacement dans le même sens du larynx,diminuant l’exposition des cordes vocales [18].

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

5Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Les signes cliniques permettant d’évoquer une neuropathiedysautonomique et les tests permettant de la diagnostiquer sontdécrits dans les Tableaux 3 et 4.

Gastroparésie diabétique

L’atteinte dysautonomique gastrique, souvent associée à desaltérations de la motricité œsophagienne avec diminution dutonus du sphincter inférieur de l’œsophage, augmenterait lerisque potentiel de régurgitation à l’induction et en postopé-ratoire. Le diagnostic est essentiellement clinique et doit êtresuspecté devant des douleurs postprandiales, des nausées ou

des vomissements, une distension épigastrique, etc. Laphysiopathologie de la gastroparésie est complexe. Elle estcertes due à une atteinte du parasympathique, et les manifes-tations cliniques sont assez semblables à celles observées aprèsvagotomie, mais les modifications des hormones comme lamotiline interviennent aussi. L’érythromycine, qui possède uneffet agoniste de la motiline, permet de restaurer une activitémotrice gastrique et de vider ces gros estomacs dysautonomi-ques en 2 heures (200 mg i.v., 2 heures avant l’inductionanesthésique).

Risque rénal périopératoire

Le diabétique est particulièrement sensible au risque d’insuf-fisance rénale aiguë (IRA) dans la période opératoire. Cela estobservé par exemple après chirurgie valvulaire ou pontageaortocoronarien [31]. Cette IRA peut aussi compliquer unehyperglycémie dans le contexte d’une chirurgie majeure,responsable d’une hypovolémie par diurèse osmotique oul’administration d’iode dans le cadre d’un bilan artériographi-que en préopératoire.

Quant aux patients diabétiques bénéficiant d’une transplan-tation rénale, le pronostic postopératoire immédiat n’est pasdifférent de celui des patients non diabétiques, qu’il s’agisse dupourcentage de complications, de décès ou de rejet du greffon.En revanche, à distance, la mortalité, essentiellement cardiovas-culaire, est plus élevée [32].

Risque neurologique

Ischémie cérébrale et glycémie

L’hyperglycémie aggrave le pronostic neurologique etdiminue les possibilités de récupération des patients ayant euune ischémie cérébrale. L’hypothèse selon laquelle le taux deglycémie est déterminant pour le pronostic neurologiqued’une ischémie est confirmée par la plupart des études chezl’animal après une ischémie cérébrale globale et une partiedes études sur l’ischémie localisée. Une méta-analyse récentea confirmé que l’hyperglycémie était un facteur de pronosticdéfavorable après accident vasculaire cérébral ischémique :une glycémie comprise entre 6,1 et 7 mmol l–1 multiplie par3 le risque de décès à court terme ; une glycémie compriseentre 6,7 et 8 mmol l–1 est associée à une plus mauvaiserécupération fonctionnelle [33]. Plusieurs hypothèses sontavancées : une toxicité directe de l’hyperglycémie sur leslésions ischémiques (l’acidose intracellulaire induite par lemétabolisme anaérobie conduirait à la formation de radicauxlibres et à une dysfonction mitochondriale), un effet fragili-sant de l’hyperglycémie sur la barrière hématoencéphaliquefacilitant l’infarcissement hémorragique. Ainsi, l’hyperglycé-mie pourrait majorer les lésions neuronales survenant aucours de l’ischémie, et pourrait s’associer à une diminution dudébit sanguin cérébral, ainsi qu’à une augmentation del’œdème et de la taille de l’infarctus cérébral.

“ Conduite à tenir

En pratique, la normalisation de la glycémie semblesouhaitable chez le patient diabétique soumis à unechirurgie à risque d’ischémie cérébrale.

Tableau 2.Principaux signes de la neuropathie dysautonomique diabétique.

Signes cardiovasculaires

Tachycardie sinusale

Allongement de l’espace QT

Troubles du rythme

Infarctus du myocarde indolore

Hypotension artérielle orthostatique

Labilité de la pression artérielle

Mort subite

Signes digestifs

Dysphagie

Nausées, vomissements

Diarrhée nocturne

Incontinence anale

Signes urogénitaux

Dysurie, pollakiurie

Rétention aiguë

Incontinence urinaire

Infections urinaires

Impuissance

Signes respiratoires

Pneumonies à répétition, inhalation bronchique

Diminution de la réponse à l’hypoxémie et à l’hypercapnie

Divers

Modifications de la sécrétion sudorale : crises sudorales

Hyperthermie lors de l’exposition au chaud

Modifications pupillaires

Suppression des signes cliniques accompagnant l’hypoglycémie

Modifications de la sécrétion des hormones gastro-intestinales et descatécholamines, etc.

Tableau 3.Scores de neuropathie dysautonomique diabétique. Test normal : 0 ; testlimite : 1/2 ; test anormal : 1. Un test limite pour le quotient de Valsalvaest considéré comme anormal et doit être coté 1.

Tests Résultats Scores

Diminution de la pression artérielle systémique(mmHg) en orthostatisme

≤ 10 0

11-29 1/2

≥ 30 1

Quotient des intervalles R-R lorsde l’orthostatisme

≥ 1,04 0

1,01-1,03 1/2

≤ 1,00 1

Augmentation de la pression artériellediastolique (mmHg) lors du test de préhension

≥ 16 0

11-15 1/2

≤ 10 1

Arythmie respiratoire (D FC en b min–1) ≥ 15 0

11-14 1/2

≤ 10 1

Quotient de Valsalva ≥ 1,21 0

1,11-1,20 1

≤ 1,10 1

Tableau 4.Relation entre le degré d’atteinte du système nerveux autonome (SNA) etles scores de la neuropathie dysautonomique diabétique.

Système nerveux autonome Score

Normal 0 ou 1/2

Altération précoce 1 à 1 1/2

Altération définitive 2 à 3 1/2

Altération sévère 4 à 5

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

6 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Ischémie neurologique périphérique et glycémie

Le diabète est identifié comme facteur de risque de survenued’une neuropathie postopératoire indépendamment de lachirurgie ou de la technique anesthésique [34]. L’hyperglycémiepériopératoire serait un des facteurs en cause. Il est démontréque l’hyperglycémie aiguë diminue la conduction nerveusepériphérique alors que l’hyperglycémie chronique s’associe àune perte en fibres myélinisées et non myélinisées. L’atteintedes fibres nerveuses étant précoce au cours de la maladiediabétique, il est possible que l’hyperglycémie aiguë observée enpériopératoire démasque et aggrave une atteinte nerveusesensitive infraclinique préexistante. Cela est important à savoirde façon à ne pas faussement attribuer l’apparition de lésionsneurologiques sensitives à une mauvaise position ou à unecompression en peropératoire.

Risque lié à l’atteinte vasculaire périphérique

Les patients diabétiques avec sténose carotidienne asymp-tomatique ont spontanément un risque élevé d’infarctus dumyocarde ou de mort subite, y compris en dehors de toutantécédent de coronaropathie. Au cours de la chirurgievasculaire périphérique, les patients, qu’ils soient ou nondiabétiques, sont à risque élevé de complications qui sontpour 30 à 40 % des cas d’origine cardiovasculaire. Cependant,dans l’étude de Sprung et al. menée après chirurgie majeure(7 000 patients) le diabète n’est pas identifié comme unfacteur de risque [35]. De même, le diabète n’est pas identifiécomme un facteur de risque d’accident vasculaire périopéra-toire après endartériectomie carotidienne. L’étude suédoise,qui a recensé en prospectif (2 622 patients) les complicationspostopératoires après endartériectomie sur 10 ans, montre unemortalité plus élevée chez les diabétiques à j30 et à 1 an(3,2 versus 1,4 %). En revanche, la morbidité périopératoire,neurologique et cardiaque, n’est pas augmentée. Enfin sur10 ans et malgré les progrès médicaux réalisés, aucuneréduction de la mortalité n’est observée chez les diabétiquescontrairement à la population de patients non diabétiquespour laquelle la mortalité a baissé de 50 % [36].

Défauts de cicatrisation

Depuis longtemps, il est démontré que la présence d’unepolynévrite, d’athérosclérose et de microangiopathie peuventcontribuer à une mauvaise cicatrisation. Des études expérimen-tales suggèrent que l’hyperglycémie en elle-même pourrait aussiprovoquer une mauvaise cicatrisation. Chez l’animal diabétique,la cicatrisation est retardée, avec une diminution de la synthèsede collagène et, en corollaire, une mauvaise résistance de lacicatrice. Ces anomalies sont corrigées par l’administrationd’insuline. L’obésité, l’insulinorésistance, la dépression de lafonction granulocytaire, mais aussi l’hyperglycémie peuventinterférer avec la synthèse du collagène et avec la cicatrisation.Il a été observé un ralentissement de l’afflux des granulocytes etun retard de croissance des néocapillaires. Par ailleurs, lasynthèse du collagène et du procollagène est diminuée auniveau des plaies chez les animaux diabétiques. L’administrationd’insuline est cruciale pour le développement du granulomeinflammatoire et, secondairement, pour la croissance desfibroblastes et la synthèse du collagène. Cependant, si l’insulineest nécessaire dans les phases précoces de la réaction inflamma-toire, elle ne semble plus avoir d’effet après les 10 premiersjours.

Dans les plaies de cornée, des taux de cicatrisation compara-bles ont été rapportés, que les patients soient ou non diabéti-ques. En fait, la cicatrisation des plaies épithéliales n’entraînepas d’afflux leucocytaire contrairement aux plaies profondes etla récupération de l’intégrité tissulaire ne repose pas sur lasynthèse de collagène. La réparation épithéliale n’est donc pasaltérée chez le diabétique, alors que la cicatrisation des plaiesprofondes l’est, en raison des problèmes de synthèse de colla-gène et de défense vis-à-vis de l’infection.

En ce qui concerne les fractures de cheville déplacées, lafréquence de complications est élevée (> 40 %) [37] chez lesdiabétiques (nécrose cutanée, défaut de cicatrisation et deconsolidation, infection ostéocutanée, voire nécessité d’ampu-tation). Ces complications sont significativement plus fréquen-tes après traitement chirurgical et doivent faire discuter la placede l’abstention chirurgicale chez les diabétiques âgés ou dans lesdiabètes évolués.

Risques particuliers de la circulationextracorporelle chez les patients diabétiques

L’hypothermie et les réactions au stress augmentent l’insuli-norésistance et entraînent une hyperglycémie. Cela est exacerbéchez le diabétique et l’administration d’insuline est peu efficaceavant le réchauffement complet. Il a été rapporté quelquesobservations où les agents inotropes positifs étaient inefficaces,malgré des pressions de remplissage correctes, un rythmesinusal, des gaz du sang et un ionogramme normaux. Dans tousles cas, la glycémie était élevée et, après administration d’insu-line, on récupérait une contraction myocardique efficace,autorisant une remise en charge du cœur. Après la phase decirculation extracorporelle (CEC), les diabétiques nécessitent lerecours aux inotropes positifs ou à la contre-pulsion aortiquecinq fois plus souvent que chez les patients qui ne sont pasdiabétiques [38]. Il y a là plusieurs raisons :• les angineux diabétiques ont des lésions coronariennes plus

étendues ;• ils sont plus exposés à l’hypertension artérielle ;• ils présentent plus volontiers une cardiomégalie, une hypoki-

nésie globale et des antécédents d’infarctus du myocarde.Les patients insulinodépendants, ayant une atteinte corona-

rienne et une dysautonomie, ont une compliance ventriculairediminuée et une pression télédiastolique du ventricule gaucheaugmentée par rapport aux sujets contrôles appariés.

Place de l’anesthésie locorégionale

Le choix du type d’anesthésie, locorégionale ou générale, estencore largement débattu. Les données actuelles sont en faveurde l’anesthésie locorégionale. Les raisons sont un risqueopératoire accru avec l’anesthésie générale et l’obtention d’unmeilleur équilibre métabolique périopératoire chez les patientsdiabétiques ayant bénéficié d’une anesthésie locorégionale.

L’anesthésie générale expose au risquede compressions cutanée et nerveuseen per- et postopératoire immédiat

Comme nous l’avons vu précédemment, en périopératoire, lediabétique a un risque plus élevé de lésions nerveuses enrapport avec l’atteinte microvasculaire et l’hypoxie nerveusechronique. Le nerf cubital au niveau du coude, le nerf médianau niveau du canal carpien, et le sciatique poplité externe sontles plus exposés [34]. Une étude réalisée à partir des plaintesreçues pour déficit neurologique lié à l’anesthésie montre que lacompression du nerf cubital est associée dans 85 % des cas àune anesthésie générale [39]. Ces données sont confirmées parl’étude de Warner et al. sur les atteintes du nerf cubital aprèschirurgie et qui a été menée sur plus de 1 000 000 de patientsanesthésiés [34]. Les auteurs retrouvent une fréquence du diabètequatre fois plus élevée que chez les témoins. L’anesthésiegénérale et la sédation au réveil seraient des facteurs favorisantscar ils retardent le diagnostic. Quoi qu’il en soit, pour uneanesthésie générale ou locorégionale, un soin tout particuliersera apporté durant la période opératoire à la protection despoints d’appui.

Sous anesthésie locorégionale, l’équilibremétabolique périopératoire est plus facileà obtenir

L’acte chirurgical constitue pour l’organisme une situationd’agression. À ce stress chirurgical correspond une réponseneuroendocrinienne. L’équilibre glycémique et métabolique

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

7Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

périopératoire dépend en grande partie de cette réponse. Laréaction endocrinométabolique du diabétique à la chirurgie estencore mal documentée. Les auteurs retrouvent une réponsehormonale d’intensité accrue chez le diabétique soumis à uneffort physique très intense comparable à un stress chirurgical.Par ailleurs, la réaction métabolique aux hormones de contre-régulation est augmentée. Les diabétiques développent unehyperglycémie 5 à 7 fois supérieure à celle des sujets nondiabétiques après administration de quantités identiques decortisol et d’adrénaline. Les techniques d’anesthésie locorégio-nale médullaire ou par bloc nerveux périphérique peuventmoduler la réponse hormonale et la sécrétion résiduelle d’insu-line. En cas d’anesthésie péridurale, et pour une chirurgie sous-ombilicale, le blocage de la conduction des diverses afférencesnerveuses nociceptives inhibe la sécrétion de la plupart deshormones liées au stress chirurgical. Enquist et al. ont montréque la sécrétion des catécholamines per- et postopératoires estentièrement inhibée dès que l’anesthésie péridurale atteint unniveau T4. Pour Bromage et al., la réponse corticosurrénalienneest partiellement inhibée sous anesthésie péridurale pourchirurgie sus-ombilicale.

Sur le plan métabolique, l’avantage d’une anesthésie péridu-rale est de bloquer la sécrétion de catécholamines, blocage dontl’intensité est proportionnelle à la hauteur du niveau del’anesthésie périmédullaire. Ces avantages perdurent pendant lapériode postopératoire où la poursuite d’une analgésie périmé-dullaire permet, là aussi, de diminuer la réaction neuroendocri-nienne, facilitant l’équilibre glycémique et un moindrecatabolisme protéique.

En ce qui concerne l’anesthésie locorégionale tronculaire, sonavantage par rapport à une anesthésie générale a été démontréen chirurgie de la cataracte chez des diabétiques de type 2. Ilexiste un bénéfice concernant une reprise plus précoce del’alimentation en postopératoire permettant ainsi un meilleuréquilibre métabolique et hormonal durant cette période [40].Nous avons observé les mêmes effets bénéfiques chez despatients diabétiques de type 2 bénéficiant d’une rachianesthésiepour une résection endoscopique de prostate (données person-nelles non publiées).

Il n’existe pas de travaux ayant démontrél’existence d’un risque particulier lié à l’utilisationd’une technique d’anesthésie locorégionalechez le patient diabétique

Certaines précautions doivent toutefois être prises, enparticulier vis-à-vis d’une neuropathie sensitivomotrice préexis-tante et de la dysautonomie diabétique.

Dans le cadre d’une chirurgie des extrémités effectuée sousbloc plexique ou tronculaire, une altération neurologiquepréexistante doit être recherchée impérativement (parésies,paresthésies douloureuses, fonte musculaire), voire, danscertains cas, investiguée (électromyogramme). En effet, quelquesobservations de complications neurologiques posent la questionde l’utilisation d’un bloc périphérique en présence d’uneneuropathie périphérique et de sa contribution aux lésionspostopératoires [41]. Des données obtenues in vitro suggèrentque chez l’animal diabétique, le risque de neurotoxicité desanesthésiques locaux est augmenté et nécessite de ce faitl’utilisation de doses inférieures à celles généralement utilisées.Cependant, tout et son contraire ont été dits concernant lasensibilité des nerfs diabétiques à la neurotoxicité des anesthé-sies locales (AL) et il est difficile d’imputer les altérationsneurologiques postopératoires à la technique anesthésiqueutilisée plutôt qu’à une cause positionnelle, ischémique (garrotpneumatique), inflammatoire, ou à l’exacerbation d’une neuro-pathie préexistante. En revanche, la présence d’une neuropathiepériphérique peut retarder le diagnostic de complicationnerveuse en particulier lors d’une infusion continue par uncathéter péridural ou par un cathéter périphérique. Une com-plication neurologique à type de déficit sensitivomoteurrécidivant a déjà été rapportée chez le diabétique. L’existence

d’une neuropathie après une anesthésie locorégionale (ALR)représente donc une contre-indication à une nouvelle anesthésielocorégionale. Enfin, devant un déficit neurologique postopéra-toire, il est impératif de réaliser rapidement un bilan électro-myographique à la recherche d’une neuropathie préexistante.

Bien que les répercutions hémodynamiques aient été rappor-tées uniquement lors de l’anesthésie générale, l’indication d’uneanesthésie médullaire chez les patients dysautonomiquesprésentant une atteinte cardiovasculaire importante doit êtrediscutée. Un des problèmes majeurs du bloc médullaire estl’hypotension artérielle liée à la sympathectomie. Cette hypo-tension est la résultante d’une veinodilatation avec baisse duretour veineux et d’une vasodilatation artérielle avec chute desrésistances périphériques. Les mécanismes de compensation fontintervenir la sécrétion de catécholamines et une activation desefférences sympathiques au-dessus du niveau du bloc induit afinde réaliser une vasoconstriction. Or, le système nerveux auto-nome est altéré de façon diffuse dans la dysautonomie diabéti-que. La conjonction d’une cardiomyopathie et d’unedysautonomie avec un bloc sympathique médullaire peutcontribuer à aggraver une instabilité hémodynamique et àprovoquer une ischémie (souvent silencieuse), ainsi que destroubles du rythme.

Comment contrôler la glycémie et quel doitêtre le niveau optimal de la glycémieen périopératoire ?

Plusieurs études expérimentales montrent que le métabolismedu glucose peut conduire à la production de radicaux libres detype espèces réactives oxygénées à partir de la chaîne respira-toire mitochondriale. Il a été montré que des monocytes soumisà une hyperglycémie augmentent leur production de radicauxlibres et que celle-ci s’accompagne d’une élévation du tumornecrosis factor a (TNF-a). Ces effets sont, en partie, inhibés parl’administration d’antioxydants. L’hyperglycémie augmentel’agrégation plaquettaire via une production d’anions hyper-oxydes. Une glycémie basse est associée à une réduction de lamortalité et de la morbidité, tandis que des besoins insuliniquesélevés sont associés à un pronostic défavorable [42].

Malmberg [43] a montré l’intérêt d’une insulinothérapieintensive pour contrôler la glycémie à la phase aiguë del’infarctus du myocarde chez les patients diabétiques. L’insuli-nothérapie intensive a permis une réduction de 11 % de lamortalité à 1 an. Les effets bénéfiques de l’administration dumélange glucose-insuline-potassium (GIK) sont connus depuislongtemps puisque les premières études ont été publiées il y a40 ans. Ces résultats ont été confirmés dans une méta-analyseoù il était observé, avant l’aire de la thrombolyse, une réductionde la mortalité hospitalière de 28 % dans le groupe GIK. Diazet al., dans une étude prospective randomisée, ont confirmé lerôle bénéfique du GIK à fortes doses associé à la thrombolyse.Pour les fortes doses, les auteurs mettent en évidence une baissede plus de 60 % de la mortalité hospitalière, associée à uneréduction de la morbidité (insuffisance cardiaque, troubles durythme) [44]. Le rôle protecteur du GIK en chirurgie des coronai-res a aussi été retrouvé. Dans l’étude de Lazar et al., les patientsdiabétiques soumis à un pontage coronarien bénéficient dumélange GIK en termes de fonction cardiaque postopératoire etde durée d’hospitalisation [45]. Cela pourrait s’expliquer par uneffet protecteur du GIK en situation d’ischémie-reperfusion auniveau myocardique où le glucose est le substrat préférentielle-ment métabolisé par les voies de la glycolyse.

L’apport d’une insuline intraveineuse d’action rapide etbrève en continu et à faible dose est la technique de choix.L’insulinothérapie sera associée à un apport continu etcontrôlé de glucose, dans la mesure où les variations desapports glucidiques sont une source importante de déséquili-bre glycémique (Tableau 5). En périopératoire, la clonidinedonnée en prémédication à la dose de 4 mg kg–1 a montré sonefficacité pour améliorer l’équilibre glycémique tout en rédui-sant les besoins insuliniques [46].

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

8 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Le niveau optimum de glycémie en périopératoire et enréanimation dépend probablement de la pathologie concernée.Pour des patients diabétiques sans antécédents particuliers etpour une chirurgie non à risque, le maintien d’une glycémieinférieure à 2 g l–1 est un objectif suffisant. En revanche, pourles patients diabétiques hospitalisés en réanimation ou soumisà des chirurgies à risque (chirurgie cardiaque, neurochirurgie) etles patients à risque (présence d’une neuropathie périphériqueou d’une insuffisance rénale modérée chez un diabétique parexemple), la recherche d’une glycémie proche de 5,5 mmol l–1

semble améliorer le pronostic. Les risques d’hypoglycémierestent cependant à évaluer. Dans l’étude de Van Den Berghe etal., les hypoglycémies sont six fois plus fréquentes [42]. Lemonitorage continu sous-cutané a été proposé pour ajuster aumieux le débit d’insuline et réduire la fréquence des épisodesd’hypoglycémie.

Nouveaux traitements médicamenteuxdu diabète

Les nouvelles molécules concernent essentiellement letraitement du diabète de type 2 [1].

Glinides : répaglinide et natéglinide

Le répaglinide est un dérivé de l’acide carbamoylméthylben-zoïque. Il stimule la sécrétion d’insuline en fermant les canauxpotassiques ATP-dépendants de la membrane de la celluleb-pancréatique. Il agit sur un récepteur spécifique différent decelui des sulfamides hypoglycémiants et son efficacité semblecomparable. Sa demi-vie d’élimination est courte (1 heure) et lepic d’action est atteint dans l’heure qui suit la prise. Il estmétabolisé par le foie et éliminé dans la bile. Sa pharmacociné-tique est peu modifiée par l’insuffisance rénale minime oumodérée. En revanche, sa demi-vie d’élimination plasmatiqueest doublée dans l’insuffisance rénale sévère. Cependant, lerépaglinide n’est pas contre-indiqué au cours de l’insuffisancerénale. Les effets indésirables observés ont été les troublesgastro-intestinaux, les réactions cutanées et les hypoglycémies.

Le natéglinide est un dérivé de la phénylalanine. Il stimulela sécrétion d’insuline en fermant les canaux potassiquesd’adénosine triphosphate (ATP)-dépendants de la membranede la cellule b pancréatique. Il agit sur le récepteur dessulfamides hypoglycémiants. Il est rapidement absorbé et saconcentration plasmatique maximale est atteinte en 1 heure.Sa demi-vie d’élimination est de 1,5 heure. Le natéglinide estmétabolisé par le foie et sa pharmacocinétique est peumodifiée dans l’insuffisance rénale. Il expose, lui aussi, aurisque d’hypoglycémie.

Inhibiteurs des alphaglucosidases intestinales :acarbose et miglitol

Il s’agit de pseudotétrasaccharides d’origine bactérienne. Cesanalogues structuraux des oligosaccharides alimentaires inhibentde façon compétitive et réversible les alphaglucosidases de labordure en brosse de l’intestin grêle. L’absorption du glucoseaprès le repas est ainsi retardée dans le temps. Ils n’induisentpas d’hypoglycémie lorsqu’ils sont utilisés seuls.

Thiazolidinediones

La première thiazolidinedione a été retirée du marché enraison de sa toxicité hépatique. Deux autres molécules ont étémises sur le marché en France, la rosiglitazone et la pioglita-zone. Ces molécules potentialisent l’action de l’insuline sans enstimuler la sécrétion. Elles diminuent l’insulinorésistance auniveau du foie, du muscle squelettique et du tissu adipeux. Ellesn’entraînent pas d’hypoglycémies mais potentialisent l’effethypoglycémiant des sulfamides. Elles favorisent la rétentionhydrosodée et peuvent aggraver ou déclencher une insuffisancecardiaque. Enfin, quelques cas d’atteintes hépatiques ont étérécemment rapportés.

Tableau 5.Protocoles d’insulinothérapie.

Type 1 (diabétique insulinodépendant) et chirurgie majeure

1. Pas d’administration de l’insuline habituelle le matin de la chirurgie

2. Passage au bloc opératoire à 8 h

3. À l’arrivée au bloc opératoire :

– glycémie capillaire

– mise en place de glucose à la pompe (ou Dial-A-Flo®) 125 ml h–1

de soluté glucosé à 5 % (G5 %)

– insuline d’action rapide et brève 1 à 2 UI h–1 à la seringue autopulsée(SAP)

– adaptation horaire du débit d’insuline en fonction des glycémiescapillaires - horaires de façon à maintenir la glycémie entre 1 g l–1

(5,5 mmol l–1) et 1,80 g l–1 (10 mmol l–1). Possibilité d’utilisationde petits bolus de 3 à 5 UI en intraveineux direct (i.v.d.) si besoin

4. En postopératoire : apport de glucose contrôlé par pompe et insulineà la SAP dont le débit est adapté en fonction de la glycémie mesuréetoutes les 2 h puis toutes les 4 h dès que la glycémie est stable

5. Lors de la reprise alimentaire, passage à l’insuline en sous-cutané (s.c.)

Type 1 et chirurgie mineure

1. Soit reprise du protocole « type 1 et chirurgie majeure »

2. Autre possibilité : administration de l’insuline SC habituelle (avec ousans l’insuline rapide) et mise en place d’une perfusion de G5 %(125 ml h–1) ou de G10 % (70 ml h–1). Reprise de l’alimentation per osdès que possible après l’acte opératoire

Type 2 (diabétique non insulinodépendant) et chirurgie majeure

1. Pas de prise du sulfamide hypoglycémiant le matin de l’intervention

2. Arrêt de la metformine 48 h avant l’intervention

3. À l’arrivée au bloc opératoire :

– glycémie capillaire

– mise en place de glucose à la pompe (ou Dial-A-Flo®) 125 ml h–1

de G5 %

– insuline d’action rapide et brève 1 à 2 UI h–1 à la SAP

– adaptation horaire du débit d’insuline en fonction des glycémiescapillaires horaires de façon à maintenir la glycémie entre 1 g l–1

(5,5 mmol l–1) et 1,80 g l–1 (10 mmol l–1). Possibilité d’utilisationde petits bolus de 3 à 5 UI i.v.d. si besoin.

4. En postopératoire : apport de glucose à la pompe (G5 % ou G10 %en fonction du volume désiré) et soit :

a. insuline à la SAP

b. insuline en SC toutes les 6 h selon protocole :

– glycémie capillaire ≥ 3 g l–1 (16,5 mmol l–1) → 10 UI insuline rapideen s.c.

– 2,5 g l–1 (13,7 mmol l–1) ≤ glycémie < 3 g l–1→ 8 UI d’insuline rapide

en s.c.

– 1,8 g l–1 (10 mmol l–1) ≤ glycémie < 2,5 g l–1→ 6 UI d’insuline rapide

en s.c.

– 1,2 g l–1 (6,5 mmol l–1) ≤ glycémie < 1,8 g l–1→ 4 UI d’insuline rapide

en s.c.

– glycémie < 1,2 g l–1→ pas d’insuline

5. Lors de la reprise alimentaire et en l’absence de complicationschirurgicales ou médicales (insuffisance rénale), reprise du traitementper os antérieur

Type 2 et chirurgie mineure ou examen radiologiqueavec administration d’iode

1. Arrêt de la metformine 48 h avant l’acte

2. Contrôle glycémique

a. Technique du « pas d’insuline – pas de glucose » = mise en placed’une perfusion de sérum physiologique et surveillancede la glycémie capillaire (maintenir glycémie < 2,5 g l–1 [13,7 mmol l–1]par de petits bolus de 3 à 5 UI i.v.d.)

b. Prise du sulfamide du matin et glucose en perfusion (125 ml h–1

de G5 %)

3. Reprise de l’alimentation per os le plus rapidement possible avecle traitement habituel

4. Après une artériographie, la metformine ne sera reprise qu’aprèsvérification de la fonction rénale

Se méfier des apports cachés en glucose ou en précurseurs du glucose : solutéscontenantdu lactate, colloïdes, transfusionsanguine,plasmafrais, etc.UI :unitésinternationales.

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

9Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Insulinothérapie

Insulines disponibles

Deux types d’insuline sont actuellement disponibles enFrance. Les insulines dites humaines (en fait de séquencehumaine car obtenues par génie génétique) et les analogues del’insuline dont la séquence d’acide aminés est modifiée parrapport à l’insuline ; on distingue les analogues rapides (lispro,aspart) et les analogues lents (glargine et détémir).

Insulines humaines. Dans le traitement du diabète, on estamené à utiliser les insulines rapides, les insulines semi-lentes(ou NPH), les mélanges de rapides et de semi-lentes dans desproportions variables (le nombre figurant à la fin du nom despécialité est le pourcentage d’insuline rapide du mélange).

Analogues de l’insuline. Les analogues rapides (lispro etaspart) ont des délais (15 à 30 min) et des durées d’action (3 à4 heures) plus courts que les insulines rapides. Les analogueslents ont pour différence pharmacocinétique avec la NPH unecourbe d’insulinémie plus plate. La durée d’action de la glargineest d’environ 24 heures et celle de la détémir d’environ 12 heu-res. Il existe des mélanges d’analogue rapide et de semi-lente (lenombre figurant à la fin du nom de spécialité est le pourcentaged’analogue rapide).

Les insulines semi-lentes (NPH) (seules ou mélangées avecune insuline rapide ou ultrarapide) se présentent sous forme desuspension. Les stylos injecteurs doivent donc être remués avantinjection afin d’homogénéiser la suspension et ainsi de réduirele risque de variabilité pharmacocinétique.

Indications de l’insuline dans le diabète de type 2

Chaque année, 5 à 10 % des diabétiques de type 2 devien-nent insulinorequérants. L’insulinothérapie est justifiée devantun échec du régime diététique associé à l’exercice physique etau traitement antidiabétique maximal par voie orale. En dehorsde l’insulinorequérance, les mises à l’insuline se font dans uncontexte d’urgence immédiate ou à très court terme. La néces-sité de cette insulinothérapie doit être réévaluée après l’épisodeaigu. Les indications indiscutables sont : la cétose, le comahyperosmolaire et la grossesse, si le bon contrôle glycémiquen’est pas obtenu par la diététique seule. Les autres situationsnécessitant une insulinothérapie à court terme sont regroupéesdans l’encadré.

Place des associations insuline-antidiabétiques oraux

Il est recommandé actuellement d’utiliser des associationsd’insuline et d’antidiabétiques oraux dont les mécanismesd’action sont différents, afin d’obtenir un équilibre glycémiquedans des conditions de sécurité maximale. L’effet favorable del’association insuline-sulfamides hypoglycémiants semblesurtout lié à la stimulation de la sécrétion endogène d’insuline :les meilleures réponses semblent obtenues chez les patients qui

ont une sécrétion endogène conservée. L’effet de l’associationinsuline-metformine reste encore à évaluer. L’assocationinsuline-thiazolidinedione est contre-indiquée en raison durisque accru d’insuffisance cardiaque.

Prise en charge dans certaines circonstancesparticulières

Diabétique en ambulatoire

Dès lors que le diabète est bien équilibré, et dans le respectdes impératifs habituels de l’anesthésie ambulatoire, la réalisa-tion d’interventions en ambulatoire est possible [22]. L’injectiond’insuline ou la prise du sulfamide hypoglycémiant se fera lematin de l’intervention, suivant l’horaire habituel, le petit-déjeuner étant remplacé par un apport glucidique intraveineux(i.v.) de substitution (soluté glucosé à 5 %, 125 ml h–1), jusqu’àla reprise de l’alimentation. Chez le diabétique de type 2 bienéquilibré un protocole « pas d’insuline-pas de glucose » estpossible (Tableau 5). Les biguanides seront arrêtés au moins48 heures avant l’acte en ambulatoire. La réalisation de l’inter-vention en début de programme opératoire doit permettre laprise d’une collation à l’heure du déjeuner et la sortie dupatient en fin d’après-midi, après un ultime contrôle glycémi-que. L’existence de vomissements ou d’une hyperglycémieimportante contre-indique le retour au domicile.

Anesthésie du diabétique en urgence

En urgence, l’obtention d’un contrôle glycémique vraimentsatisfaisant est illusoire tant que l’origine de l’état motivantl’intervention n’aura pas été traitée. On s’efforcera cependant deréduire l’hyperglycémie avant l’induction de l’anesthésie parl’administration i.v. de bolus d’insuline (5 à 10 unités interna-tionales [UI]), afin d’amener la glycémie en dessous de12 mmol l–1. L’insuline est ensuite délivrée par perfusioncontinue à la seringue automatique, couplée à la perfusioncontinue de glucose, avec un contrôle glycémique toutes les30 minutes. En parallèle, on commencera aussi à corriger uneéventuelle déshydratation, une hyperosmolarité, voire uneacidocétose. À la surveillance régulière de la glycémie s’ajoute-ront le contrôle de l’osmolarité, de la natrémie et de la kaliémie,de la créatininémie, des lactates, la recherche d’une élévation dutrou anionique et la détermination des gaz du sang. Si le patientétait traité par metformine, ou si une réduction du débitcirculatoire ou une hypoxie sont constatées en per- ou enpostopératoire, des dosages répétés de la concentration enbicarbonates, en lactates artériels et la mesure des gaz du sangs’avéreront nécessaires.

Examens radiologiques avec produits de contrasteiodés

Toute injection de produit de contraste iodé est, chez lediabétique, une situation à risque de survenue d’insuffisancerénale aiguë iatrogénique [1]. La prévention repose sur :• la limitation aux seuls examens strictement nécessaires ;• une hydratation adéquate ;• l’utilisation élective de produits de contraste non ioniques, de

faible osmolarité.Un contrôle de la créatininémie à la recherche d’une altéra-

tion de la fonction rénale est recommandé après la réalisationde l’examen. Cette insuffisance rénale aiguë risque d’entraîner,chez les patients traités par metformine, une acidose lactiquedont le pronostic est gravissime. Plusieurs observations docu-mentées dans la littérature et des relevés de pharmacovigilanceont montré la réalité de cette succession d’événements indési-rables. La metformine sera donc arrêtée au moins 48 heuresavant l’examen. Sa réintroduction ne se fera qu’après vérifica-tion de la normalité de la fonction rénale à la 72e heure(Tableau 6). De même, une altération transitoire de la fonctionrénale peut entraîner une hypoglycémie iatrogène prolongéeliée à la prise des sulfamides hypoglycémiants. Ce risque peutêtre prévenu par l’arrêt temporaire, le jour de l’examen, de laprise de ces médicaments et la surveillance rapprochée de laglycémie.

“ Point important

Situations nécessitant une insulinothérapietransitoire dans le diabète de type 2 :• infections sévères ;• existence d’une neuropathie ou d’une artériopathiecompliquée avec déséquilibre glycémique ;• interventions chirurgicales ;• contre-indications transitoires des sulfamideshypoglycémiants: explorations radiologiques utilisant unproduit de contraste iodé ;• mise en route d’une corticothérapie,• complications aiguës vasculaires nécessitant un boncontrôle du diabète et contre-indiquant les traitementsoraux (infarctus du myocarde, accident vasculairecérébral, artérite sévère en poussée).

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

10 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Précautions à prendre lors d’une corticothérapie

Les corticoïdes ont un effet hyperglycémiant dose-dépendant,réversible et transitoire, qu’ils soient administrés par voie orale,intraveineuse, intramusculaire ou intra-articulaire [1]. Laconduite à tenir dépend du risque de déséquilibre glycémiqueapprécié par la dose, la durée, le type de corticoïde et la voied’administration. Dans tous les cas, le renforcement de lasurveillance de la glycémie capillaire est indispensable dès lamise en place de la corticothérapie.

En ce qui concerne la corticothérapie par voie orale, chez lespatients traités par antidiabétiques oraux, une insulinothérapietemporaire peut être mise en route, en fonction des glycémiescapillaires. L’insuline est habituellement nécessaire en cas dedoses élevées (≥ 1 mg kg–1 de prednisone ou prednisolone).Chez les patients déjà sous insuline, les doses devront êtreadaptées et habituellement majorées. Dans tous les cas, il faudratenir compte du fait que ce sont les glycémies de fin d’après-midi et de début de soirée qui s’élèvent le plus (pour une prisematinale unique) alors que la glycémie au réveil est peumodifiée. La corticothérapie par voie intraveineuse induit undéséquilibre glycémique rapide et important ; une insulinothé-rapie fractionnée, souvent par voie intraveineuse, doit donc êtreinstituée. En cas d’administration de corticoïdes par voieintramusculaire ou intra-articulaire, le déséquilibre glycémiquepeut être prolongé jusqu’à 6 à 9 semaines.

Les principaux facteurs de risque opératoire des diabétiquesdevant subir une chirurgie sont ceux des maladies associées audiabète : atteintes coronaire ou cardiaque, insuffisance rénale,altération du tissu conjonctif et du collagène, dysfonctiongranulocytaire et neuropathies. Il est absolument nécessaired’évaluer et, si possible, d’améliorer ou de corriger ces facteursen préopératoire. Les relations éventuelles entre hyperglycémieet complications postopératoires restent débattues mais ilsemblerait qu’une normoglycémie améliore le pronostic posto-pératoire. Une surveillance glycémique étroite est utile chez lesdiabétiques subissant une CEC ou au cours d’une ischémiecérébrale. Le bénéfice est moins évident pour les autres groupesde diabétiques.

■ Réanimation du diabétiqueLes infections bactériennes (pneumopathies communautaires,

infections urinaires hautes, etc.) et les maladies intercurrentessévères (insuffisance rénale, infarctus du myocarde, accidentvasculaire cérébral, intervention en urgence, etc.) exposent lepatient diabétique à :• un déséquilibre glycémique, voire à une hyperosmolarité

(syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire [SHH]) ;• une acidocétose essentiellement chez le diabétique de type 1 ;• une acidose lactique chez les patients traités ou non par

metformine ;• des accidents hypoglycémiques chez les patients traités par

sulfamides hypoglycémiants et molécules apparentées ou chezles diabétiques traités par insuline, du fait d’une irrégularitédes apports alimentaires en glucides ou de l’apparition d’uneinsuffisance rénale.

Syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire

L’hyperosmolarité est affirmée sur des paramètres biologiques.L’hyperosmolarité plasmatique se définit comme une osmolaritéplasmatique (OsmP) supérieure à 300 mOsm.l–1. En fait, c’est latonicité plasmatique ou osmolarité plasmatique active (OsmPa)qui est importante puisque c’est elle qui rend compte desmouvements d’eau transmembranaires et donc de l’étatd’hydratation cellulaire. Lorsqu’elle est due à l’accumulation del’urée, elle est isotonique et n’a aucun retentissement surl’hydratation intracellulaire. Lorsqu’elle est due à l’accumulationde substances non diffusibles, elle est hypertonique. Le glucose,en présence d’insuline, pénètre dans les cellules et se comportecomme une osmole inactive. Lorsqu’il existe une carence(absolue ou relative) en insuline, le glucose devient une osmoleactive, responsable d’une hypertonie plasmatique.

L’hyperglycémie pourra donc avoir des conséquences méta-boliques multiples (Fig. 3) :• au niveau du secteur intracellulaire (SIC), l’hypertonie

plasmatique hyperglycémique entraîne une déshydratationintracellulaire, à l’exception du foie où le glucose pénètretoujours librement dans les cellules [48] ;

• au niveau du secteur extracellulaire (SEC), l’afflux d’eauprovenant du SIC induit une expansion volémique et une

Tableau 6.Appréciation de la valeur du débit de filtration glomérulaire selon laformule de Cockcroft et Gault.

Formule chez l’homme

Pour une créatininémie exprimée en µmol l–1 :

DFG* (ml min–1) = [140 – âge (année) × poids (kg)]/[créatininémie(micromol l–1) × 0,81]

Pour une créatininémie exprimée en mg l–1 :

DFG* (ml min–1) = [140 – âge (année) × poids (kg)]/[créatininémie(mg l–1) × 7,2]

Formule chez la femme

Retirer 10 % à 15 % de la valeur obtenue ou utiliser 0,85 à la placede 0,81 dans la formule où la créatininémie est exprimée en µmol l–1

*DFG : débit de filtration glomérulaire.

SEC

SEC

SEC

SIC

SIC

SIC

MC

MC

H2O

H2O

A

B

C

Na

H2ONa

H2O

H2O

Na+ +K Glucose extracellulaire

Figure 3. Conséquences de l’hyperglycémie sur les mouvements hy-droélectrolytiques [47].A. Hypertonie plasmatique par hyperglycémie conduisant à une déshy-dratation intracellulaire et une expansion volémique responsable d’une« fausse hyponatrémie » (dilution du sodium du secteur extracellulaire[SEC] par l’eau provenant du secteur intracellulaire [SIC]).B, C. Diurèse osmotique induite par l’hyperglycémie responsable d’unedéshydratation globale. Lorsque la polyurie osmotique est modérée, ladéshydratation extracellulaire (ou hypovolémie) reste aussi modérée et lanatrémie se normalise (B). Lorsque la polyurie osmotique est importante,la déshydratation extracellulaire (ou hypovolémie) devient importante etla natrémie est élevée (C). MC : membrane cellulaire.

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

11Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

dilution du sodium contenu dans le secteur plasmatique.C’est une hyperhydratation extracellulaire avec « faussehyponatrémie » ou hyponatrémie hypertonique (Fig. 3A). Endehors des patients avec insuffisance rénale chroniqueoligoanurique, ces modifications extracellulaires sont transi-toires et fugaces du fait de la polyurie osmotique.Dans la mesure où une molécule de glucose filtrée par le rein

entraîne 18 molécules d’eau, la glycosurie est responsable d’unediurèse osmotique, puis d’une déshydratation. Cette diurèseosmotique est responsable de pertes urinaires majeures ensodium, en potassium, en phosphore et en eau. Ces pertesseront d’autant plus importantes que le débit de filtrationglomérulaire (DFG) du patient sera préservé. Les pertes sodéesdans le SHH sont estimées en moyenne à 25 % du pool sodétotal de l’organisme avec une natriurèse d’environ 50 à70 mmol l–1 [48, 49]. Elles entraînent très rapidement unecontraction du SEC avec hypovolémie parfois sévère. Commeles urines générées par la polyurie osmotique sont hypotoni-ques, la natrémie s’élève progressivement et l’on passe d’unefausse hyponatrémie à une natrémie normale (Fig. 3B) ou mêmeélevée (Fig. 3C). Ainsi, une hypernatrémie traduit toujours undéficit hydrique et une déshydratation intracellulaire sévères.

La déplétion potassique est constante. Elle résulte des pertesurinaires de potassium induites par la polyurie osmotique et parl’hyperaldostéronisme secondaire à l’hypovolémie. La kaliémieinitiale masque ou sous-estime la déplétion potassique. L’hyper-kaliémie ou la normokaliémie, fréquemment observées audébut, témoignent de la sortie de potassium du SIC en rapportavec la carence insulinique.

Le cerveau étant contenu dans une boîte rigide inextensible,les modifications brutales de son volume sont extrêmement maltolérées. Le cerveau possède un moyen de lutte appelé « osmo-régulation cérébrale » qui lui permet de minimiser ses modifi-cations de volume induites par des variations de tonicitéplasmatique. L’osmorégulation cérébrale fait appel à unemodulation du contenu intracérébral en substances osmotiquesactives appelées molécules osmoprotectrices. Elles sont inorga-niques (électrolytes) et organiques (osmoles idiogéniquescomposées d’acides aminés, de polyols et de triéthylamines). Ensituation d’hypertonie plasmatique, le contenu intracérébral enosmoles actives augmente, de sorte que le gradient osmotiquetransmembranaire décroît. Ainsi, la déshydratation cérébrale quidevrait en résulter est atténuée [50, 51]. L’osmorégulation céré-brale, en termes de moyen et d’efficacité, dépend surtout de larapidité d’installation de l’hypertonie plasmatique (Fig. 4). Sil’hypertonie s’installe brutalement en moins de 24 heures,l’osmorégulation cérébrale se met en route rapidement (enmoins de 15 minutes) par l’intermédiaire d’un enrichissementen électrolytes. Cependant, la régulation de volume resteincomplète et modérée : la déshydratation cérébrale apparaîtmoins importante que si l’osmorégulation n’existait pas. Sil’hypertonie plasmatique s’installe lentement en plus de48 heures, l’osmorégulation passe principalement par uneaugmentation du contenu intracérébral en osmoles idiogéni-ques. Ce mécanisme est plus lent mais plus complet que leprécédent, de sorte que les variations de volume du cerveausont très faibles.

Diagnostic de syndrome d’hyperglycémiehyperosmolaire

Un facteur déclenchant est retrouvé dans plus de 60 % descas. Les deux causes les plus fréquentes sont l’infection, toutparticulièrement pulmonaire et urinaire, et l’absence de com-pliance au traitement.

Signes cliniques

L’installation du SHH est le plus souvent insidieuse etprogressive, faisant porter le diagnostic tardivement quelquesjours à plusieurs semaines après le début. Classiquement, le SHHse manifeste par des signes non spécifiques de déshydratation

globale. La déshydratation intracellulaire se manifeste par la soifavec sécheresse des muqueuses, la perte de poids et les troublesneurologiques. La polyurie-polydipsie est constante sauf en casd’insuffisance rénale chronique préexistante. Certaines particu-larités doivent cependant être notées :• les troubles neurologiques : le degré d’altération de cons-

cience est variable, allant de la simple obnubilation jusqu’aucoma profond. Pour la majorité des auteurs, il existe unecorrélation directe entre le degré d’hypertonie plasmatique etl’importance des troubles neurologiques. Pour un même degréd’hyperglycémie, les manifestations neurologiques sont plussévères que dans l’acidocétose diabétique (ACD). Les manifes-tations convulsives sont fréquentes puisque présentes dans 15à 20 % des cas, le plus souvent sous forme focale motrice [48,

49]. Elles se caractérisent par une résistance fréquente auxtraitements antiépileptiques classiques. Il peut aussi existerdes signes de localisation à type d’hémiparésie, d’aphasie,d’amaurose ou de quadriplégie posant un problème dediagnostic différentiel avec une éventuelle pathologie inter-currente telle qu’un accident vasculaire cérébral. Au total, lagravité du tableau neurologique est conditionnée parl’importance de la déshydratation intracellulaire, mais elle estaussi largement influencée par sa rapidité d’installation quidétermine l’efficacité de l’osmorégulation cérébrale [48, 50-52]

(Fig. 4).

Signes biologiques

La confirmation du diagnostic repose sur l’association d’unehypertonie plasmatique, c’est-à-dire : (2 × natrémie) (mmol l–1)+ glycémie (mmol l–1) supérieure à 300 mOsm l–1 et d’unehyperglycémie sévère sans cétose. Dans la forme classique duSHH, il n’existe pas d’acidose métabolique. Le pH est supérieur7,20, le contenu en CO2 total (CO2T = HCO3– + H2CO3 + CO2

dissous) est supérieur à 15 mmol l–1 et le trou anionique

Cerveau

100% eau

Tonicité plasmatique

normale

eau

eau

NaKCI

Hypertonie

plasmatique

Hypertonie

plasmatique

aiguë

15-30 min

98% eauacides aminés,

polyols,

triéthylamines

Hypertonie

plasmatique

chronique

2-3 heures

24-48 heures

Déshydratation

intracérébrale

Déshydratation

intracérébrale

modérée

Hydratation

intracérébrale

quasi normale

Figure 4. Étapes de l’osmorégulation cérébrale en cas d’hypertonieplasmatique [47]. Première étape : l’hypertonie plasmatique entraîne dansl’immédiat une déshydratation intracérébrale. L’osmorégulation céré-brale ne débutera que dans les 15 à 30 secondes qui suivent l’installationdu trouble. Deuxième étape : l’hypertonie plasmatique aiguë conduit à unenrichissement intracérébral en électrolytes, ce qui permet de limiter ladéshydratation intracérébrale ; ce phénomène atteint son maximum en2-3 heures. Troisième étape : l’hypertonie plasmatique chronique conduità un enrichissement intracérébral en osmoles idiogéniques, ce qui permetau cerveau de retrouver un état d’hydratation quasi normal ; ce phéno-mène atteint son maximum en 24-48 heures.

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

12 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

plasmatique (TA = ]&(Na+ + K+) – (Cl– + HCO3– )]) est normalou discrètement élevé, inférieur à 17 mmol l–1. Cependant, uneacidose métabolique modérée peut être présente, retrouvéemême par certains dans 50 % des cas [48, 49, 53]. Elle est souventmultifactorielle, attribuée à une élévation modérée des corpscétoniques, des lactates ou à l’insuffisance rénale sous-jacente.Une élévation franche de la pression artérielle (PA) doit fairerechercher une autre pathologie surajoutée, en particulier unehyperlactatémie en cas d’état de choc associé. Une alcalosemétabolique peut coexister en cas de vomissements.

Le SHH s’accompagne habituellement d’une déshydratationglobale. La déshydratation extracellulaire se traduit biologique-ment par une hémoconcentration (augmentation de l’hémato-crite et de la protidémie), mais celle-ci peut toutefois êtremasquée par un remplissage vasculaire. La déshydratationintracellulaire est constante et le plus souvent sévère. Le poolsodé est considérablement diminué du fait des pertes urinaires.Cependant, la natrémie peut évoluer de différentes façons(Fig. 3A, 3C). L’association hypernatrémie-hyperglycémie traduitune déshydratation intracellulaire majeure. Dans tous les cas,seule la natrémie corrigée (Na+ c), qui est la natrémie que l’onobserverait si la glycémie était normale, permet une évaluationprécise des pertes hydriques et donc de l’importance de ladéshydratation intracellulaire. Cette Na+ c est calculée par laformule de Katz : Na+ c = Na+ (mmol l–1) + [glycémie (mmol l–1)× 0,3].

La kaliémie peut être au début normale, diminuée ou aug-mentée, mais dans tous les cas, le pool potassique est abaissé.Ainsi, même si la kaliémie est normale ou élevée initialement,une hypokaliémie sévère peut apparaître en cours de traitement,si l’apport de potassium n’a pas été réalisé précocement dèsl’institution de l’insulinothérapie. Les mêmes anomalies sontprésentes avec le phosphore et le magnésium.

L’insuffisance rénale fonctionnelle est le plus souvent respon-sable d’une élévation de l’urée et de la créatinine plasmatique.L’élévation de la protidémie et de l’hématocrite témoigne de ladéshydratation extracellulaire. L’hyperleucocytose n’est pas rare,liée soit à un phénomène de démargination, soit à un processusinfectieux sous-jacent. Dans les urines, il existe une forteglycosurie avec ou sans une discrète cétonurie. La glycosuriepeut être absente en cas d’insuffisance rénale chronique. Elle nedoit de toute façon jamais être considérée comme un outil desurveillance de la glycémie.

Complications

Les complications du SHH sont le plus souvent imputables àdes erreurs thérapeutiques ou à des traitements mal conduits.Les deux complications les plus fréquentes sont les thrombosesvasculaires et l’œdème cérébral [49, 54].

Il s’agit de thromboses veineuses pouvant atteindre tous lesorganes, en particulier le cerveau (sinus caverneux), mais ausside thromboses artérielles. Elles sont attribuées à l’hypercoagula-bilité observée dans les hypertonies plasmatiques et auxépisodes hypotensifs [55].

L’œdème cérébral apparaît en cas de correction trop rapide del’hypertonie plasmatique. Sa prévention passe par la normalisa-tion lente de la glycémie, surtout si les troubles de la consciencesont absents. La baisse trop rapide de l’osmolarité plasmatiquepourrait conduire au développement d’une myélinolysecentropontine.

Les hémorragies cérébrales à type de pétéchies intraparenchy-mateuses, ou d’hémorragies ou d’hématomes sous-duraux sontdirectement en rapport avec le gradient osmotique transmem-branaire et l’issue d’eau des cellules qui entraîne une diminu-tion des pressions intracrâniennes et déchire les paroisvasculaires.

Une rhabdomyolyse serait observée dans 50 % des SHH. Elleaugmente le risque d’insuffisance rénale aiguë.

Le collapsus et l’oligurie sont la conséquence d’un remplis-sage vasculaire insuffisant associé à une décroissance trop rapidede la glycémie (Fig. 5).

Les pneumopathies d’inhalation peuvent se développer s’ilexiste des troubles de la déglutition.

L’hypokaliémie, l’hypophosphorémie et l’hypoglycémies’observent en cas d’administration d’insuline à forte dosesans supplémentation suffisante. L’hypophosphorémie exposeau risque d’insuffisances cardiaque, respiratoire et de rhabdo-myolyse.

Traitement du syndrome d’hyperglycémiehyperosmolaire

La priorité est avant tout de restaurer le volume du SEC ettout particulièrement la volémie circulante de façon à préserverl’oxygénation tissulaire. La correction des déficits électrolytiques(potassium, phosphore) est également nécessaire, de même quele traitement du facteur déclenchant. En revanche, la normali-sation de la glycémie n’est pas un objectif prioritaire, car untraitement précoce de l’hyperglycémie avant d’avoir rétabli lavolémie expose à la survenue d’un collapsus sévère (Fig. 5).

Restauration de la volémie et de l’équilibre hydrosodé

L’expansion volémique passe par la correction du déficit sodé.Le choix du soluté et ses modalités d’administration demeurentdiscutés. Certains [48, 56] débutent le traitement par du sérumsalé isotonique (0,9 %), 1 à 2 l en 1 à 2 heures, de manière àrétablir le pool hydrosodé plasmatique. Ce soluté permet à lafois l’expansion volémique et la baisse de la tonicité plasmati-que, puisqu’en présence d’une hypertonie plasmatique, le sérum

SEC

SEC

SEC

SIC

SIC

SIC

MC

MC

MC

H2O

H2O

A

B

C

Na+ +K

Glucose

extracellulaireGlucose

intracellulaire

Insuline

Diu

rèse

osm

otique

+ glucoseH2O

Figure 5. Effets de l’insulinothérapie [47].A. Hypertonies plasmatiques, hyperglycémie avec déshydratation intra-cellulaire et fausse hyponatrémie.B. Polyurie osmotique en rapport avec l’hyperglycémie aggravant ladéshydratation intracellulaire et conduisant à une hypovolémie (déshy-dratation extracellulaire).C. L’apport d’insuline entraîne l’afflux de glucose et d’eau (18 moléculesd’eau pour une molécule de glucose) du SEC vers le SIC, ce qui est àl’origine d’une diminution du SEC et d’une aggravation de l’hypovolémie.SIC : secteur intracellulaire ; SEC : secteur extracellulaire ; MC : mem-brane cellulaire.

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

13Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

salé à 0,9 % est hypotonique. Le relais par du sérum saléhypotonique à 0,45 % est pris dans un second temps, aprèsavoir rétabli une volémie satisfaisante. L’administration exclu-sive d’emblée de sérum salé hypotonique à 0,45 % n’estenvisageable qu’en cas de surcharge hydrosodée chez lespatients ayant une insuffisance rénale chronique oligoanurique.D’autres auteurs réalisent l’expansion volémique par desmacromolécules suivie de la perfusion de sérum salé hypotoni-que. Dans tous les cas, il faut contrôler la rapidité de correctiondes volumes hydriques extra- et intracellulaires. L’ajustementthérapeutique est fait essentiellement sur la réponse clinique dupatient. La quantité totale de liquide à perfuser dépend dudéficit hydrique total du patient (le plus souvent 10 à 15 l). Lamoitié sera perfusée dans les 12 premières heures à une vitessed’environ 500 ml h–1, le restant sur les 24-48 heures suivantes.L’estimation des pertes hydriques par des formules resteimprécise, de sorte que la quantité et la vitesse de perfusion duliquide hypotonique doivent être ajustées sur les donnéescliniques et biologiques répétées (initialement toutes les2 heures). Quel que soit le protocole thérapeutique choisi, ladécroissance de l’osmolarité plasmatique ne doit pas dépasser5 mOsm l–1 h–1 s’il existe des troubles neurologiques. Elle doitêtre encore plus lente, d’environ 2,5 mOsm l–1.h–1, et plusprudente chez le patient sans signes neurologiques, âgé ouayant une pathologie cardiaque sous-jacente [56]. La réhydrata-tion orale n’est jamais suffisante si les perturbations hydroélec-trolytiques sont importantes. Chez les patients avec uneinsuffisance rénale chronique, la correction des troubleshydrosodés nécessite une technique d’épuration extrarénale.

Restauration des pools potassique et phosphoré

La réhydratation et l’insulinothérapie induisent une pénétra-tion intracellulaire de potassium aggravant l’hypokaliémie.L’apport de potassium par voie intraveineuse doit donc se fairedès le début du traitement si la kaliémie de départ est normaleou basse, et en tout cas très rapidement dès la mise en route del’insulinothérapie. La quantité préconisée est de l’ordre de 10 à30 mmol l–1 h–1, en fonction de la quantité d’insuline adminis-trée [48, 49]. Un des moyens simples de contrôler cette kaliémieest de maintenir dans le temps un rapport quantité totale depotassium en mmol l–1 sur quantité totale d’insuline en UI (QK/QI) égal à 1. Pendant les premières heures, la surveillance reposesur un contrôle régulier de la kaliémie et surtout de l’ECG.L’administration de phosphore et de magnésium sera égalementnécessaire dans un second temps, en surveillant leur concentra-tion plasmatique.

Insulinothérapie

La seule hydratation corrige déjà en grande partie l’hypergly-cémie par le biais d’une dilution, mais aussi en rétablissant ladiurèse osmotique avec glycosurie. De ce fait, la persistance del’hyperglycémie ne reflète pas forcément une « insulinorésis-tance », mais plutôt une altération du débit de filtrationglomérulaire. L’insulinothérapie fait toujours appel à uneinsuline d’action courte, administrée par voie veineuse à laseringue automatique. Pour la plupart des patients, de faiblesdoses sont préconisées, en débutant par un bolus intraveineuxde 0,1 à 0,2 UI kg–1 (soit 5 à 10 UI), suivi d’une administrationcontinue de 3 à 5 UI h–1, adaptée en fonction de la glycémie.Cette posologie permet une décroissance lente de la glycémie(5,5 mmol l–1.h–1) mettant à l’abri d’un collapsus sévère, d’unehypokaliémie, d’une hypophosphorémie ou d’un œdèmecérébral. Tant qu’il existe une hypovolémie franche, l’insulino-thérapie ne doit pas être débutée (Fig. 5). L’insulinothérapie doitêtre précoce ou utiliser des doses plus importantes dans dessituations particulières telles que l’insuffisance rénale chroniquepour laquelle la réhydratation est limitée, l’hyperkaliémie sévèreou l’acidocétose associée. La glycémie sera contrôlée de façonhoraire. Dès qu’elle atteindra le seuil de 12-15 mmol l–1, le débitd’insuline sera diminué à 2-3 UI h–1 et associé à une perfusionde soluté glucosé à 5 %.

Autres traitements

La recherche d’un facteur déclenchant est capitale afin dedébuter un traitement spécifique approprié. Un traitementanticoagulant, ou tout au moins antithrombotique, estpréconisé.

Acidocétose diabétiqueL’acidocétose diabétique (ACD), complication métabolique

aiguë, est la conséquence d’une carence insulinique plus oumoins importante (Tableau 7). Si elle peut révéler la maladiediabétique, elle peut aussi survenir à tout moment dans la vied’un diabétique de type 1, quels que soient son âge et l’ancien-neté de la maladie. Les diabétiques de type 2 peuvent, eux aussi,dans des conditions particulières, être exposés au risqued’acidocétose, mais bien moins fréquemment [57].

Physiopathologie [57]

L’ACD est un désordre métabolique qui traduit une carenceinsulinique (relative ou absolue), empêchant la pénétrationcellulaire du glucose, associée à une élévation des hormones dela contre-régulation glycémique (glucagon, catécholamines,cortisol et hormone de croissance). Ces perturbations retentis-sent sur les métabolismes glucidique et lipidique.

La carence insulinique favorise un état catabolique avecactivation de la glycogénolyse et de la néoglucogenèse, avecpour objectif d’augmenter la production hépatique de glucose etde satisfaire ainsi les besoins des organes insulinoglucodépen-dants. Les hormones de la contre-régulation ont une actionidentique en inhibant le fructose 2,6 phosphatase, enzyme cléde la régulation biochimique de la glycogénolyse et de lanéoglucogenèse hépatique. Cependant, l’utilisation périphériquedu glucose n’est pas optimale. Les catécholamines, associées àla carence insulinique, réduisent l’utilisation périphérique duglucose (dans les muscles, le foie et le tissu adipeux) et ont uneaction lipolytique (effet b1). Par un effet a 2, elles stimulent lacétogenèse et inhibent la sécrétion insulinique, si celle-cipersiste. L’association de ces deux mécanismes (augmentationdu débit hépatique de glucose et réduction de l’utilisationpériphérique du glucose) contribue à augmenter la glycémie.Cette hyperglycémie est responsable de la glycosurie dès lorsque le seuil rénal du glucose, en général de 9,9 mmol l–1

(1,80 g l–1), est dépassé. La glycosurie est responsable d’unediurèse osmotique, puis d’une déshydratation (la perte d’eau esten moyenne de 5 à 10 % du poids du corps, soit environ 5 à6 l pour un adulte de corpulence moyenne).

La carence insulinique et l’augmentation des hormones decontre-régulation favorisent la production d’acides gras libres(stimulation de la lipolyse). Captés par le foie, ceux-ci vont êtretransformés dans les mitochondries en corps cétoniques. Cettecétogenèse est stimulée par le glucagon. Elle entraîne lasynthèse d’une quantité importante de b-hydroxybutyrate etd’acide acétoacétique (2 à 3 fois plus de b-hydroxybutyrate que

Tableau 7.Circonstances de survenue d’une acidocétose diabétique.

Carence insulinique absolue

Acidocétose révélatrice

Arrêt accidentel de l’insulinothérapie (problème technique)

Arrêt volontaire de l’insulinothérapie +++

Causes médicamenteuses (pentamidine, hydantoïne, tacrolimus...)

Carence insulinique relative : dose d’insuline inadaptée en casde maladie intercurrente

Infections+++

Infarctus du myocarde et accidents vasculaires

Traumatismes

Chirurgie

Grossesse non surveillée

Causes médicamenteuses : corticoïdes, b-mimétiques

Désordres endocriniens : hyperthyroïdie, phéochromocytome,hypercorticisme

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

14 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

d’acide acétoacétique) qui sont ensuite filtrés par le rein, puispartiellement excrétés dans les urines. L’acétone, qui provientde la transformation non enzymatique de l’acide acétoacétiquepar décarboxylation, est éliminée par voie respiratoire. Laréduction du volume plasmatique, secondaire à la déshydrata-tion, aggrave l’accumulation des corps cétoniques et contribueà l’apparition d’une acidose.

Manifestations cliniques [57]

Classiquement, l’ACD apparaît en quelques jours, précédéed’une phase de cétose simple. Le début peut être brutal chezl’enfant, la femme enceinte, la personne âgée ou lors de l’arrêtdu fonctionnement d’une pompe à insuline (quelquesheures) [58].

Phase de cétose simple

Le tableau clinique de la cétose simple associe :• les symptômes liés à l’hyperglycémie tels que le syndrome

polyuropolydipsique, les crampes nocturnes, les troublesvisuels. Leur intensité est plus ou moins importante selonl’ancienneté et l’importance de l’hyperglycémie ;

• les symptômes liés à la cétose : troubles digestifs à type dedouleurs abdominales, nausées, anorexie ;

• une haleine à l’odeur caractéristique d’acétone.En l’absence de prise en charge précoce, l’évolution se fait

vers la phase d’acidocétose.

Phase d’acidocétose

Aux signes de cétose simple qui se majorent vont s’ajouter lessymptômes liés à l’acidose métabolique, réalisant ainsi la triadehyperglycémie-cétose-acidose :• la dyspnée de type Kussmaul en quatre temps (avec pauses

inspiratoire et expiratoire) ou plus souvent en crédit temps,ample et bruyante. Elle est associée à une polypnée initiale-ment supérieure à 20 cycles par minute. La surveillance decette fréquence respiratoire est indispensable au cours de laprise en charge thérapeutique, notamment pour suivrel’évolution de l’acidose. La polypnée peut être absente dansles rares cas d’acidose majeure, déprimant les centres respira-toires ;

• les troubles de la conscience : si cette complication métabo-lique aiguë est communément appelée « coma acidocétosi-que », le coma vrai concerne moins de 10 % des patients. Ils’agit d’un coma calme, de profondeur variable, flasque avecaréflexie ostéotendineuse, sans signe de localisation à l’exa-men neurologique. Vingt pour cent des patients ont uneconscience parfaitement normale. Les 70 % restants sont engénéral dans un état de stupeur et plus ou moins confus ;

• les signes digestifs se majorent, avec nausées, vomissementset douleurs abdominales, pouvant simuler à tort une urgencechirurgicale, surtout chez l’enfant (disparition des bruitshydroaériques lors de l’examen abdominal) [58]. Toutefois,dans de rares cas, une pathologie digestive telle une pancréa-tite aiguë, peut être à l’origine de la décompensation acido-cétosique. Des vomissements hémorragiques peuventégalement être constatés. Ils sont secondaires à une gastritehémorragique ou à des ulcères de type Mallory-Weiss ;

• la déshydratation est favorisée par une compensation insuffi-sante de la diurèse osmotique, elle-même liée à l’hyperglycé-mie, et potentiellement aggravée par les troubles digestifs(vomissements, douleurs abdominales, etc.). Elle prédominesur le secteur extracellulaire, associant pli cutané, hypoten-sion artérielle et tachycardie. Le risque majeur est le collapsuscardiovasculaire, favorisé par une vasodilatation périphériquesecondaire à l’acidose. Elle peut être associée à une déshydra-tation intracellulaire (soif, sécheresse de la muqueuse buccale,hypotonie des globes oculaires). Ces patients déshydratés sontrarement anuriques (maintien d’une diurèse osmotique). Siune anurie est constatée, il convient de rechercher une causeorganique. La compensation de la déshydratation nécessitealors certaines précautions.Classiquement, il existe une hypothermie, favorisée par

l’acidose et la vasodilatation périphérique. Elle peut masquer un

syndrome infectieux. Une hypothermie profonde, inférieure à35 °C, témoigne souvent d’une infection sévère, en général depronostic défavorable.

Examens complémentaires

Premiers examens

Dans un premier temps, la réalisation d’une glycémie capil-laire (supérieure à 14 mmol l–1 soit 2,55 g l–1) ou d’uneacétonémie capillaire (supérieure à 0,6 mmol l–1) et d’unebandelette urinaire (sucre++++ et corps cétoniques +++ à ++++)au lit du patient apporte déjà des renseignements. En ce quiconcerne la cétonurie :• la bandelette urinaire doit être réalisée sur des urines fraî-

ches ;• certaines bandelettes urinaires (Keto-Diastix®) perdent de leur

fiabilité en présence d’une forte cétonurie (réaction de laglycosurie faussement abaissée). Certains auteurs recomman-dent ainsi d’utiliser les bandelettes urinaires Keto-Diabur-Test® ;

• la détermination quantitative des corps cétoniques urinairesse fait actuellement par une méthode colorimétrique semi-quantitative utilisant le nitroprussiate. Par cette méthode, seull’acide acétyl-acétique est repéré. En cas de prédominancemajeure de b-hydroxybutyrate, qui représente déjà à lui seul75 % des corps cétoniques au cours de l’acidocétose « classi-que », la réaction de la bandelette urinaire peut être fausse-ment abaissée. Afin d’éviter ces sources d’erreurs, destechniques de dosages rapides du b-hydroxybutyrate sanguinont été mises au point : c’est le cas du lecteur MediSenseOptium® (laboratoire Abbott) qui mesure de façon fiable letaux de ce corps cétonique sur un prélèvement capillaire de5 µl, en 30 secondes [59]. Ce système est particulièrementprécis pour des valeurs de b-hydroxybutyrate allant de 0 à6 mmol l–1. Au cours de l’acidocétose, le seuil sanguin sesitue aux alentours de 5 mmol l–1 et peut atteindre30 mmol l–1 (concentration usuelle de b-hydroxybutyratecirculant < 0,5 mmol l–1) [60]. La détermination capillaire dutaux de b-hydroxybutyrate permet également un diagnosticplus précoce de la cétose, la détection de corps cétoniques àla bandelette urinaire survenant de façon retardée par rapportà la détection plasmatique [61]. Au cours du suivi, la cétoné-mie se normalise également plus rapidement que la cétonurie.Ce dosage de b-hydroxybutyrate sur prélèvement capillairepermet donc un diagnostic plus précoce de la cétose maisaussi de sa résolution, ce qui évite ainsi de surtraiter inutile-ment les patients.

Autres examens paracliniques [57]

Le pH artériel confirme la présence d’une acidose avec unevaleur inférieure à 7,30. Le CO2 total (CO2T) est abaissé à moinsde 15 mmol l–1. Dans les formes sévères d’acidocétose, le CO2Test encore plus bas, classiquement inférieur à 10 mmol l–1, et lepH inférieur à 7,0. Le trou anionique est supérieur à12 mmol l–1, traduisant la présence des corps cétoniques. Lanatrémie est fonction de l’importance des pertes hydrosodées.Elle peut être abaissée (le plus souvent), normale ou haute.L’osmolarité est souvent modérément augmentée entre 300 et325 mOsm l–1 et représente un facteur de gravité. Si la déplétionpotassique est constante, la kaliémie peut être basse mais, leplus souvent, elle est normale ou élevée. Dans tous les cas, unenormokaliémie signe un déficit potassique majeur. L’électrocar-diogramme permettra d’évaluer l’intensité de l’hypokalicytie(allongement de l’espace QT, diminution de l’amplitude del’onde T et apparition d’une onde U). La phosphorémie, enrègle générale augmentée, est liée à l’insulinopénie, à l’acidosemétabolique, à l’hyperosmolalité et à l’insuffisance rénalefonctionnelle. Lors de la mise en route du traitement, laphosphorémie diminue brutalement en raison du transfert duphosphore vers la cellule. L’urée, la créatinine, les protides etl’hématocrite reflètent l’intensité de la déshydratation, l’éléva-tion des deux premiers témoignant en général d’une insuffi-sance rénale fonctionnelle. Une hyperleucocytose à poly-nucléaires neutrophiles témoignant de la déshydratation est

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

15Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

classique au cours de l’acidocétose, sans affirmer pour autantl’existence d’un syndrome infectieux. Les transaminases et lescréatines phosphokinases (CPK) sont souvent élevées, maisn’ont aucune valeur diagnostique. Quant aux taux d’amylases etde lipases, ils sont classiquement augmentés dans 16 à 25 % descas d’acidocétose, avec des valeurs parfois supérieures à trois foisla normale, en dehors de tout contexte de pancréatite aiguë [62].

Traitement de l’acidocétose diabétique

Le traitement de l’acidocétose diabétique repose sur larestauration de la volémie, la correction de la carence insulini-que, de l’hyperglycémie, de l’acidocétose, des désordres hydro-électrolytiques et le traitement du facteur déclenchant. Celajustifie une hospitalisation urgente pour une prise en chargeadaptée.

Le remplissage vasculaire a pour but de compenser les perteshydriques afin de restaurer la volémie. D’une manière générale,en l’absence de pathologie cardiovasculaire, ce remplissagerepose sur du sérum salé isotonique (0,9 %) à raison de20 ml kg–1 la 1re heure (en moyenne 1 à 1,5 l), puis à raison de4 à 14 ml kg–1 h–1 (0,5 à 1 l) les 2 heures suivantes [63].

S’il y a consensus pour l’administration d’insuline rapide eni.v. par le biais d’une pompe [64], aucune étude n’a retrouvé debénéfice à l’injection d’un bolus dès le début de la prise encharge. La dose initiale recommandée est de 0,1 UI kg–1 h–1, soitenviron 5 à 10 UI h–1. Lorsque la glycémie devient inférieure à13,7 mmol l–1 (2,50 g l–1), une perfusion de sérum glucosé à5 % est mise en route, de façon à éviter l’hypoglycémie. Laperfusion d’insuline rapide par voie i.v. est maintenue jusqu’àdisparition de l’acétonémie. Le débit est adapté à la glycémieque l’on maintient aux alentours de 11 mmol l–1 (2 g l–1). Ellen’est interrompue qu’après obtention d’un CO2T supérieur à18 mmol l–1, d’une normalisation du PA et d’une cétonurienégative ou d’une acétonémie inférieure à 0,5 mmol l–1 à deuxreprises. Le relais est effectué per os pour l’hydratation et parvoie sous-cutanée pour l’insuline.

Le risque du traitement de l’acidocétose est avant tout lié àl’hypokaliémie qui s’installe très rapidement dans les premièresheures de la prise en charge et augmente ainsi le risque d’aryth-mie, d’arrêt cardiaque et de détresse respiratoire. Les recom-mandations actuelles proposent de débuter la correction dudéficit potassique dès que la kaliémie est inférieure à5 mmol l–1. La dose est de 1,5 à 2 g de potassium par litre deliquide de réhydratation dans l’objectif de maintenir la kaliémieentre 4 et 5 mmol l–1 [64]. Si celle-ci est initialement inférieureà 3,3 mmol l–1, l’insulinothérapie n’est débutée qu’après lacorrection adaptée du déficit potassique, permettant d’obtenirune kaliémie supérieure à 3,3 mmol l–1. La gravité potentielle del’hypokaliémie impose la surveillance régulière de la kaliémie,toutes les 1 à 2 h, pendant les 5 premières heures de traitement,puis toutes les 4 à 6 heures, le risque étant majeur au début dela prise en charge thérapeutique de l’acidocétose. En cas dekaliémie inférieure à 4 mmol l–1, la surveillance du rythmecardiaque est indispensable.

Le recours aux solutés de bicarbonate de sodium (BS) restediscuté. Les états d’acidose majeure peuvent entraîner desdéfaillances multiviscérales (cardiaque, hépatique, cérébrale,etc.) mais l’apport de bicarbonate majore les risques d’aggrava-tion de l’hypokaliémie, expose à une acidose intracellulaireparadoxale, une acidification du liquide céphalorachidien (LCR),une hypoxie tissulaire... Des études (rétrospectives) réaliséesdans des cas d’acidocétose sévère (pH < 7,10) n’ont pas retrouvéde différences sur l’évolution de l’état de conscience et de laglycémie, que l’on ait ou non recours à un traitement par BS.En conséquence, il est actuellement recommandé de ne pasutiliser de solution de bicarbonates tant que le pH artériel estsupérieur à 7.

La majorité des études randomisées n’ont pas montré debénéfice à un traitement systématique par phosphate. Le recoursaux héparines de bas poids moléculaire peut être utile chez lesujet âgé, à risque accru de thrombose, surtout si une hyperos-molarité est associée à l’acidocétose.

Surveillance clinique et biologique [57]

du traitement

La pression artérielle, les fréquences cardiaque et respiratoire,la diurèse et l’état de conscience sont notés toutes les 30 minu-tes pendant la première heure de traitement, puis toutes lesheures pendant les 4 suivantes, puis toutes les 2 à 4 heures. Laglycémie capillaire et la cétonémie (ou cétonurie) sont sur-veillées toutes les heures afin d’adapter le débit d’insuline.

La biologie initiale comporte : la glycémie, l’ionogrammesanguin, l’urémie et la créatininémie, les gaz du sang. L’iono-gramme est contrôlé toutes les heures initialement, puis toutesles 4 h, associé à un contrôle du CO2T, jusqu’à correction del’acidocétose.

Complications liées au traitement

Le déficit potassique doit être régulièrement évalué et corrigé.L’hypoglycémie sera prévenue par un contrôle horaire de laglycémie, l’administration de sérum glucosé à 5 % (voire 10 %),dès que la glycémie est inférieure à 13,7 mmol l–1 (2,50 g l–1)jusqu’à reprise d’une alimentation normale.

Le mécanisme de l’œdème cérébral reste encore discuté.L’augmentation de l’osmolarité liée à l’hyperglycémie et àl’accumulation des corps cétoniques est responsable d’une sortied’eau du secteur intracellulaire vers le secteur extracellulaire.Lorsque la glycémie baisse trop rapidement (associée à ladisparition des corps cétoniques), on observe une expansionrapide du secteur intracellulaire responsable de l’œdème [65].Afin d’éviter cette complication, il est recommandé de corrigerprogressivement les déficits en eau et en sodium (au moyend’une solution isotonique en ne dépassant pas 50 ml kg–1

pendant les 4 premières heures) [66]. Quant à la glycémie, il estindispensable d’éviter une diminution trop rapide.

La correction de l’hypovolémie chez un patient âgé, porteurd’une insuffisance cardiaque ou rénale, peut favoriser lasurvenue d’une surcharge hydrosodée avec œdème aigu dupoumon.

Une acidose métabolique hyperchlorémique, sans anomaliedu trou anionique, est présente initialement dans 10 % desacidocétoses. Elle est fréquente au cours du traitement, notam-ment après résolution de la cétose. Elle serait due à la perfusionde solutés contenant du chlore et au passage intracellulaire duBS au cours de la correction de l’acidocétose. Le retentissementde l’hyperchlorémie reste mal évalué en pratique clinique. Elleest spontanément résolutive dans les 24 à 48 heures qui suiventsa constatation par augmentation de l’excrétion rénale desacides. Elle peut être limitée en réduisant les apports chlorés,notamment sous forme de chlorure de sodium [67].

L’hypophosphorémie se démasque parallèlement à la correc-tion de l’acidose et à l’administration d’insuline.

Complications évolutives de l’acidocétose

Ce sont les complications infectieuses qui classiquementobservées après des épisodes de déshydratation (pneumopathies,infections urinaires, mycoses, etc.). La pose systématique d’unesonde urinaire est limitée aux patients incontinents ou incons-cients pour lesquels la quantification de la diurèse reste indis-pensable. La mucormycose est une infection opportunisteprésentant une affinité particulière pour le tissu cérébral etaffectant des patients immunodéprimés. Dans 50 à 75 % descas, il s’agit de patients souffrant d’acidose et notammentd’acidocétose. Les premiers signes cliniques sont représentés parune sinusite aiguë associée à une rhinorrhée mucosanguinolenteet à un œdème de la face [68]. L’évolution favorable repose surla rapidité du diagnostic, sur la mise en route du traitement paramphotéricine B et sur le contrôle de l’acidocétose.

Les complications thromboemboliques peuvent être préve-nues par l’utilisation d’héparine de bas poids moléculaire en casde mauvais état veineux ou d’hyperosmolarité associée.

On peut observer des vomissements hémorragiques au coursd’une gastrite hémorragique.

L’incidence de la pancréatite aiguë au cours de l’acidocétosediabétique est de l’ordre de 10 à 15 %. Le diagnostic depancréatite aiguë peut être évoqué lorsqu’il existe au moins un

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

16 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

des critères suivants : une hyperamylasémie supérieure à troisfois la normale ; une hyperlipasémie supérieure à 3 fois lanormale ; une hypertriglycéridémie supérieure à 10 g l–1. Laconfirmation de ce diagnostic repose sur la réalisation d’unscanner abdominal.

Acidose lactique et diabèteL’acidose lactique est l’une des causes les plus fréquentes

d’acidose métabolique à trou anionique élevé. L’élévation dutrou anionique est expliquée par l’hyperlactatémie [69, 70]. Lediagnostic repose avant tout sur le dosage de la lactatémieplasmatique, veineuse ou artérielle. Elle est habituellement plusbasse dans le sang veineux, quoique cela ne soit pas constant.Le lactate plasmatique est habituellement compris entre 0,7 et1,3 mmol l–1. Une valeur de 2 mmol l–1 au repos est déjà élevée,même si, le plus souvent, ce sont des valeurs supérieures à 2,5,voire à 5 mmol l–1 qui sont considérées comme pathologiques.Chez les obèses et les diabétiques, la lactatémie est légèrementaugmentée. Cette augmentation de la concentration des lactatesserait due à une conversion du glucose en lactate par lamuqueuse intestinale. Du fait de la production liée au métabo-lisme des hématies, le prélèvement doit être conservé dans dela glace et centrifugé rapidement. Il faut prendre garde auxsurestimations toujours possibles dans le cas des grandespolyglobulies, qu’il s’agisse d’hématies ou de leucocytes. Lesautres éléments biologiques concernent, entre autres, le pH, leCO2T, la PaO2 et la PaCO2.

Une distinction doit être faite dans le diabète entre l’acidoselactique de cause commune, indépendante du diabète, maisplus fréquente en raison de l’atteinte microvasculaire et de lasusceptibilité aux infections, et celle qui est liée au diabète, eten particulier à son traitement par biguanides [69].

Acidose lactique de cause générale

Pathogénie [69]

L’hyperlactatémie correspond à une élévation anormale dutaux de lactate, tandis que l’acidose lactique signe l’accumula-tion à la fois de lactate et d’ions H+. La formation de lactate (àpartir du glucose) n’est pas pour autant à l’origine de l’acidose.Elle ne consomme ni ne génère d’ions H+ et, même si lemétabolisme d’une molécule de glucose conduit à la productionde deux protons, tous deux intègrent la formation de lactate(glucose + 2 ADp + 2 phosphates inorganiques → 2 lactates+ 2 ATP). C’est à la dégradation de l’ATP ainsi formé qu’ilrevient d’entraîner un excès de formation d’ions H+. Un telexcès se manifeste quand une hypoxie cellulaire empêche lerecyclage de l’ATP à partir de ses métabolites, de la façonsuivante : ATP → ADp + phosphate inorganique + H+ + énergie.

La production de lactate peut aussi conduire à une acidosemétabolique via le mécanisme d’échange lactate/hydroxyde(OH– ). La formation d’OH– à partir de l’eau extracellulaireconduit à l’entrée d’ions OH– dans la cellule et prévientl’abaissement du pH. Des ions H+ sont relargués dans l’espaceextracellulaire dans le même temps, mais sans chute du pH tantque l’hyperventilation réactionnelle exerce une compensationsuffisante.

Théoriquement, l’acidose intracellulaire devrait accentuerl’excès de production de lactate car le rapport lactate/pyruvateest sous la dépendance du rapport [NADH] [H+]/[NAD]. Cetteinfluence est cependant plus faible que celle exercée négative-ment sur l’activité phosphofructokinase par l’acidose intracellu-laire, et qui tend à protéger des conséquences de l’hypoxie enépargnant le glucose et en prévenant donc une hyperproductionde protons par hydrolyse de l’ATP. En outre, l’acidose améliorel’extraction de l’oxygène, avec le déplacement vers la droite dela courbe d’oxyhémoglobine.

Hyperlactatémie : un phénomène d’adaptation [69]

Le lactate n’est pas un déchet et encore moins un toxique. Ilpeut être métabolisé et oxydé par la plupart des cellules et defaçon préférentielle (même par rapport au glucose) dans laphase initiale de récupération de l’ischémie cérébrale ou del’hypoxie [71]. Il a ainsi été montré que l’administration de

lactate permet de prévenir les troubles cognitifs de l’hypoglycé-mie [72]. Les mécanismes par lesquels le lactate pourrait exercerun rôle adaptatif dans l’hypoxie sont :• un rapport ATP/adénosine diphosphate (ADP) effondré et une

production accrue de lactate, utilisé préférentiellement auglucose. Quand l’oxygène est à nouveau apporté aux tissus,l’oxydation du lactate en pyruvate prend encore le pas surcelle du glucose, qui nécessite une phosphorylation englucose-6-phosphate et donc la présence d’ATP ;

• le lactate joue le rôle de navette énergétique entre les tissus.Quand il est excrété par un tissu pour être oxydé par unautre, ce dernier « respire » pour le premier. Ce phénomènepourrait faire jouer un rôle d’épargne du métabolismeglucidique à certains tissus, en particulier au niveau dumuscle cardiaque ;

• le lactate semble bien jouer un rôle direct sur la fonctioncellulaire, et notamment sur l’activité ATPase.Au total, le lactate est un substrat métabolique majeur,

directement par son propre métabolisme et indirectement parson effet sur le métabolisme du glucose. Étant donné les effetsprotecteurs de l’acidose (tant que l’abaissement extrême du pHne compromet pas la fonction myocardique), le traitement doitêtre centré sur la prise en charge optimale de l’affection causaleet non pas sur ses conséquences sur la production de lactate.

Principales causes d’acidose lactique

Le critère retenu classiquement pour faire la distinction sur leplan physiopathologique des différentes situations est laprésence ou non d’une hypoxie tissulaire (type A/type B)(Tableau 8). Cette distinction est en réalité trop caricaturale carrestriction en oxygène et facteurs métaboliques sont habituelle-ment associés [69].

Acidose lactique observée dans le cadred’un traitement par les biguanides

Son incidence était élevée avec la phenformine, actuellementretirée du marché (0,4/1 000 patients/année). Elle est beaucoupplus faible avec la metformine (0,024/1 000 patients/année) etn’est pratiquement rencontrée que dans le cadre du non-respect des contre-indications [73]. Le mécanisme exact et larelation entre dose et toxicité sont toujours discutés. Lametformine a sans doute un effet inhibiteur de la gluconéoge-nèse hépatique [74], mais le mécanisme exact d’action de cemédicament est encore mal connu. Il est vraisemblable qued’autres modifications métaboliques interviennent en plus d’unsurdosage comme en témoignent les suites favorables des raresobservations d’intoxications massives volontaires. Des anoma-lies sous-jacentes peuvent participer à la constitution del’acidose lactique. Il a été rapporté récemment que les patientsporteurs de diabètes de type 2 avaient des anomalies de l’inter-conversion lactate-pyruvate [71].

Le pronostic des acidoses lactiques observées au cours destraitements par les biguanides est souvent sévère (mortalitévariant de 30 à 50 %). Il s’agit de patients ayant le plus souventun terrain fragilisé mais l’agressivité des mesures thérapeutiquesentreprises oblige à s’interroger sur l’aspect potentiellementiatrogène de tels traitements, en particulier le recours à desdoses massives de solutés alcalins.

L’analyse des observations publiées dans la littérature montreque ces acidoses lactiques surviennent lors de prescriptionsinopportunes de metformine et dans des situations cliniquescontre-indiquant normalement son usage. Ces situations sontcaractérisées par [75] :• une prolongation de la demi-vie du médicament liée à une

insuffisance rénale organique ou fonctionnelle : insuffisancerénale (débit de filtration glomérulaire apprécié par la formulede Cockcroft < 60 ml min–1), insuffisances cardiaque ethépatocellulaire ; administration de produits de contrasteradiologique iodés (cf. supra) ;

• un trouble de l’extraction hépatique des lactates : insuffisancehépatocellulaire, alcoolisme aigu ou chronique ;

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

17Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

• une production exagérée de lactate : affections respiratoiresaiguës et chroniques, acidoses métaboliques aiguë et chroni-que, choc, hypovolémie, infections sévères, cardiopathieischémique évolutive, poussée d’artérite.Ces situations cliniques à risque d’acidose lactique doivent

conduire à l’arrêt de la prescription de metformine.

Traitement de l’acidose lactique

Le traitement de l’acidose lactique doit être centré sur :• la prise en charge optimale de la cause de l’acidose lactique ;• la préservation ou la restauration de l’état hémodynamique et

de la fonction ventilatoire. Un des signes cliniques del’acidose est l’hyperventilation avec tachypnée qui tend àabaisser la PaCO2 et diminuer l’acidémie pour normaliser lepH. Cependant, lorsque l’acidose devient trop profonde,l’épuisement musculaire, l’augmentation de la production deCO2 liée au travail ventilatoire et la majoration de l’espacemort tendent à faire remonter la PaCO2. Il convient d’adapterla ventilation alvéolaire aux besoins métaboliques ;

• l’alcalinisation par BS n’est pas indiquée sauf pour des pH trèsbas (pH < 7) qui perdurent. Graff et al. ont montré, sur unmodèle expérimental d’acidose lactique hypoxique, que lebicarbonate de sodium aggravait l’acidose, majorait la pro-duction de lactate au niveau digestif, diminuait le pHintracellulaire hépatique et altérait le débit cardiaque [76]. Leseffets délétères du bicarbonate de sodium sont égalementdécrits en clinique. Cooper et al. ont montré que l’apport deBS au cours d’acidose lactique n’améliorait pas l’hémodyna-mique et ne modifiait pas le pronostic des patients [77] ;

• le dichloroacétate (DCA) augmente l’activité de la pyruvatedéshydrogénase et accélère le métabolisme des lactates. Sonefficacité a été démontrée dans différents types d’acidoselactique [78, 79]. Cependant, si le DCA augmente la clairancehépatique des lactates, il ne modifie pas l’hémodynamique etla survie des patients [79]. Cette thérapeutique ne peut êtreenvisagée que comme adjuvante à un traitement symptoma-tique et étiologique ;

• la dialyse a sa place pour les conséquences de l’anurie quesont l’hypervolémie et l’hyperosmolarité.

Hypoglycémies

On parle classiquement d’hypoglycémies quand s’associentun malaise évocateur et une glycémie inférieure ou égale à3,3 mmol l–1 (0,6 g l–1). Cependant, le seuil de perception del’hypoglycémie est variable selon les individus. Les signescliniques dépendent également de la rapidité d’installation et dela durée de l’hypoglycémie.

L’hypoglycémie est l’effet secondaire le plus grave associé àl’utilisation des sulfamides hypoglycémiants (SH) [80]. Les sujetsâgés et les patients ayant une insuffisance rénale sont les plusexposés aux accidents hypoglycémiques [81]. La survenue d’unehypoglycémie par absence de modulation de l’insulinosécrétionest habituellement compensée par l’augmentation des hormo-nes de contre-régulation. Toutefois, la neuropathie végétativecompliquant un diabète ancien ou mal équilibré s’accompagned’un déficit de sécrétion des hormones de contre-régulation encas d’hypoglycémie. Les signes adrénergiques de l’hypoglycémiedisparaissent et des hypoglycémies graves peuvent survenir alorssans signe précurseur.

Clinique

Tout malaise chez un diabétique traité doit faire évoquer unehypoglycémie. Les manifestations aiguës sont résumées dans leTableau 9. Les sueurs sont très évocatrices. Les hypoglycémiespeuvent provoquer des traumatismes divers (chutes avecfractures, accidents de la circulation). Elles ont également étéimpliquées dans la survenue de mort subite chez les diabétiquesde moins de 40 ans [82]. La présence de signes de focalisationn’élimine par l’origine hypoglycémique d’un trouble neurologi-que aigu. Des taux d’hémoglobine glyquée normaux peuvent

Tableau 8.Classification des acidoses lactiques.

Type A (évidence clinique d’une hypoxie tissulaire)

Hypoperfusion régionale (ischémie mésentérique, de membre)

Hypoxie sévère

Intoxication par le monoxyde de carbone

Asthme sévère

Choc (cardiogénique, septique, hypovolémique)

Type B (pas d’évidence clinique d’une hypoxie tissulaire)

B1 (acidose lactique associée à une pathologie sous-jacente)

Diabète

Hépatopathie

Malignité

Sepsis

Phéochromocytome

Carence en thiamine

B2 (acidose lactique secondaire à une intoxication ou des médicaments)

Biguanides

Éthanol, méthanol

Éthylène glycol

Fructose, sorbitol, xylitol

Salicylés

Acétaminophène

Épinéphrine

Ritodrine

Terbutaline

Cyanure

Nitroprussiate de Na

Isoniazide

Propylène glycol

B3 (acidose lactique secondaire à un trouble métabolique congénital)

Déficit en glucose 6-phosphatase, fructose 1,6-diphosphatase, pyruvatecarboxylase, pyruvate déshydrogénase

Défaut de phosphorylation oxydative

Autres

Acidose lactique par isomère dextrogyre

Hypoglycémie

Tableau 9.Principales manifestations cliniques des hypoglycémies.

Signes mineurs Signes majeurs

Signes en rapport avec la réponse

catécholaminergique

Convulsions

Syndrome déficitaire

Troubles sensitifs

Syndromecérébellovestibulaire

Coma profond

Hypertonique avecaccentuation des réflexeset signes d’irritationpyramidale

Faciès vultueux

Sueurs

Sueurs (~ 50 %)

Tremblements (~ 30 %)

Pâleur

Poussée hypertensive

Signes de neuroglycopénie

Signes neuropsychiques :

– vision trouble – diplopie (~ 30 %)

– asthénie intense (~ 30 %)

– confusion (~ 15 %)

– comportement anormal (~ 10 %)

– paresthésies (~ 10 %)

– céphalées

Signes digestifs :

– fringale (~ 25 %)

– épigastralgies

– nausées

– diarrhée

Signes cardiovasculaires :

– tachycardie

– extrasystolie

– précordialgies

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

18 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

être constatés chez des diabétiques qui font des hypoglycémiesfréquentes et répétées. Par ailleurs, les hypoglycémies ou parfoismême la normalisation rapide et soutenue d’une hyperglycémiechronique peuvent provoquer des hémorragies sur une rétino-pathie proliférante. La survenue d’une hypoglycémie modifiedurablement (environ 24 heures) l’équilibre glycémique [83] etaltère les mécanismes physiologiques de contre-régulation [84]

pendant 4 à 5 jours. À long terme, des modifications régionalesdu flux sanguin cérébral peuvent être observées [85]. Il fautinsister sur l’importance de la reconnaissance des « petites »hypoglycémies à distance des repas, se traduisant par desfringales ou des malaises mineurs. Ces hypoglycémies signifientun surdosage en SH qui justifie une adaptation des doses allantjusqu’au retrait du sulfamide et la recherche d’interactionsmédicamenteuses.

Les manifestations chroniques en rapport avec des hypo-glycémies répétées profondes se rencontrent plus spécifique-ment dans les diabètes secondaires à une pancréatitechronique calcifiante d’origine éthylique quand le maladen’est pas sevré. Elles peuvent conduire à une encéphalopathiechronique avec amyotrophie des quatre membres, neuropa-thie périphérique, pseudodémence, syndrome parkinsonien etparfois hémiplégie. En dehors de ces situations extrêmes, denombreuses études ont été consacrées aux conséquencescognitives et comportementales des hypoglycémies répétées.Les hypoglycémies peuvent s’accompagner d’un comporte-ment hostile et d’une tendance dépressive secondaire [86].Chez l’adulte s’installe fréquemment une peur intense del’hypoglycémie conduisant le patient à ne jamais faire baissersa glycémie en dessous d’un certain seuil. Cette attitude peutfavoriser la prise de poids par prise alimentaire inadéquate. Àlong terme, des zones d’hypoperfusion régionale apparaî-traient au niveau du cerveau.

Principales causes des hypoglycémieschez les diabétiques

Les facteurs de risques principaux, valables aussi pour lediabète de type 2, sont précisés ci-dessous.

Dans la pratique, la survenue d’hypoglycémies fréquentes,c’est-à-dire plus de trois par semaine chez un diabétique bienéquilibré, amène à rechercher des facteurs favorisants.

Les SH sont les principaux pourvoyeurs d’hypoglycémies.L’hypoglycémie affecte environ 15 à 20 % des patients traitéspar SH. Parmi ceux-ci, les sulfamides de demi-vie longue commele chlorpropamide ou le carbutamide sont à l’origine d’hypo-glycémies prolongées. Les sulfamides de seconde génération ontune demi-vie plus courte. Les sujets âgés et les patients ayantune insuffisance rénale sont les plus exposés. Parmi les médica-ments susceptibles d’induire ou de majorer des hypoglycémies,il faut citer les IEC du fait de leur utilisation particulièrementlarge chez le diabétique hypertendu [87]. Les hypoglycémiesgraves sous sulfamides hypoglycémiants sont néanmoins raresavec une incidence annuelle de 2 pour 10 000. Dans l’étudeUKPDS portant sur 10 ans, 0,6 % des patients traités par

sulfamides hypoglycémiants ont présenté une hypoglycémiesévère. En revanche, les hypoglycémies graves sont grevéesd’une lourde mortalité (5 à 10 %) [80].

Traitement des hypoglycémies

Le traitement comporte trois aspects : symptomatique,étiologique et préventif. Dans la mesure du possible, la réalitéde l’hypoglycémie doit être vérifiée par détermination capillaire.Cette vérification ne doit pas retarder le traitement.

Traitement de l’hypoglycémie en urgence

Si la conscience est conservée, l’apport d’hydrates de carboneper os est le plus souvent suffisant. Si le patient est inconscient,la correction de l’hypoglycémie nécessite une injection intravei-neuse de 30 à 50 ml de glucosé 30 %, renouvelable si besoin.Le relais par une perfusion de sérum glucosé 10 % s’impose avecles SH de durée d’action longue, les formes galéniques « retard »ou en présence d’une insuffisance rénale. L’injection de gluca-gon nécessite la présence de réserves hépatiques en glycogène.L’administration de 1 mg de glucagon par voie intramusculaireou sous-cutanée est plus facile d’utilisation par l’entourage.L’injection doit être répétée en cas d’absence d’amélioration dessymptômes au bout d’un quart d’heure. Un coma hypoglycémi-que nécessite une surveillance prolongée et un malade vivantseul doit être hospitalisé.

Traitement étiologique de l’hypoglycémie

Il faut identifier le ou les facteurs qui ont déclenché l’hypo-glycémie. L’éducation du patient doit être revue à cette occa-sion.

“ Point important

Les facteurs de risque principaux d’hypoglycémie,valables aussi pour le diabète de type 2 sont :• le degré du déficit insulinosécrétoire (ancienneté dudiabète) ;• l’existence d’antécédents d’hypoglycémies sévères ;• la mauvaise perception de l’hypoglycémie ;• l’intensité du traitement insulinique reflétée par les tauxd’hémoglobine glyquée et les objectifs glycémiques.Par ailleurs, une association entre le génotype ACE DD etla fréquence des hypoglycémies sévères a été rapportée.

“ Point important

Facteurs favorisant la survenue d’hypoglycémiesfréquentes (plus de trois par semaine chez undiabétique bien équilibré) :• repas ou collation insuffisants ou sautés ;• exercice physique non programmé ou avec mauvaiseadaptation des doses d’insuline et des apports glucidiquessupplémentaires ;• repas (notamment du soir) insuffisamment glucidique,souvent par méconnaissance des règles d’équivalencediététique ;• erreurs dans la réalisation de l’injection d’insuline ;• injection dans des zones de lipodystrophie ;• repas trop retardés par rapport à l’injection ;• schéma insulinique comportant trop d’insuline rapide(pas plus de 50 % de la dose totale et, le soir, pas plus de30 % de la dose nocturne ; cette règle est à modifier avecl’utilisation des analogues rapides de l’insuline) ;• objectifs glycémiques trop ambitieux par rapport à laprise en charge globale : le fractionnement des injectionset la multiplication des autocontrôles glycémiques doiventnotamment en être le corollaire ;• adaptation des doses trop brutale, voire inappropriée,avec suppléments d’insuline rapide intempestifs,notamment au coucher ;• autres erreurs éducatives : méconnaissance dessymptômes, pratique d’un resucrage insuffisant ou tardif ;• prise de médicaments potentialisant les hypo-glycémies : inhibiteurs de l’enzyme de conversion,b-bloquants non cardiosélectifs, en fait rarementconfirmée ;• très rarement cause organique : gastroparésie, souventaccusée à tort, insuffisance hormonale, malnutrition,insuffisance hépatique, surtout insuffisance rénale.

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

19Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

■ Références[1] Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé. Traite-

ments médicamenteux du diabète de type 2. Recommandations de

Bonnes Pratiques, (à paraître 2006).

[2] Kannel W, McGee DL. Diabetes and cardiovascular disease. The

Framingham study. JAMA 1979;241:2035-8.

[3] Stamler J, Vaccaro O, Neaton JD, Wentworth D. Diabetes, other risk

factors and 12 year cardiovascular mortality for men screened in the

Multiple Risk Factor Intervention Trial. Diabetes Care 1993;16:

434-44.

[4] Turner RC, Millns H, Neil HA, Stratton IM, Manley SE, Matthews DR,

et al. Risk factors for coronary artery disease in non-insulin dependant

diabetes mellitus. United Kingdom Prospective Diabetes Study

(UKPDS 23). BMJ 1998;316:823-8.

[5] Passa P. Le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le

diabétique. Rev Fr Endocrinol Clin Nutr Metab 1999;40:3-5.

[6] Barzilay JI, Kronmal RA, Bittner V, Eaker E, Evans C, Foster ED.

Coronary artery disease and coronary artery bypass grafting in diabetic

patients aged > or = 65 years (Report from the CoronaryArtery Surgery

Study [CASS] Regidstry). Am J Cardiol 1994;74:334-9.

[7] Kip KE, Faxon DP, Detre KM,Yeh W, Kelsey SF, Currier JW. Coronary

angioplasty in diabetic patients. The National Heart, Lung, and Blood

Institute Percutaneous Transluminal Coronary Angioplasty Registry.

Circulation 1996;94:1812-25.

[8] Weintraub WS, Stein B, Kosinski A, Douglas Jr. JS, Ghazzal ZM,

Jones EL, et al. Outcome of coronary bypass surgery versus coronary

angioplasty in diabetic patients with multivessel coronary artery

disease. J Am Coll Cardiol 1998;31:10-9.

[9] Zuanetti G, Latini R, Maggioni A, Franzosi M, Santoro L, Tognoni G.

Effect of the ACE inhibitor lisinopril on mortality in diabetic patients

with acute myocardial infarction. Data from the GISSI-3 study. Circu-

lation 1997;96:4239-45.

[10] Fox KM. EURopean trial On reduction of cardiac events with

Perindopril in stable coronary Artery disease investigators. Efficacy of

perindopril in reduction of cardiovascular events among patients with

stable coronary disease: randomised, double-bind, placebo-controlled,

multicentre trial (the EUROPA study). Lancet 2003;362:782-8.

[11] Nathan D, Meigs J, Singer D. The epidemiology of cardiovascular

disease in type 2 diabetes mellitus: how sweet it is or is it? Lancet

1997;350(suppl1):14-9.

[12] Tight blood pressure control and risk of macrovascular and

microvascular complications in type 2 diabetes UKPDS 38. UK

Prospective Diabetes Study Group. BMJ 1998;317:703-13.

[13] Zoneraich S. Small-vessel disease, coronary artery vasodilator reserve

and diabetic cardiomyopathy. Chest 1988;94:5-7.

[14] Shindler D, Kostis J, Yusuf S, Quinones MA, Pitt B, Stewart D, et al.

Diabetes mellitus, a predictor of morbidity and mortality in the studies

of left ventricular dysfunction (SOLVD). Trials and registry. Am

J Cardiol 1996;77:1017-20.[15] The effect of digoxin on mortality and morbidity in patients with heart

failure. The Digitalis Investigation Group. N Engl J Med 1997;336:525-33.

[16] Ritz E, Stefanski A. Diabetic nephropathy in type II diabetes. Am

J Kidney Dis 1996;27:167-94.[17] Parving HH, Lehnert H, Brochner-Mortensen J, Gomis R, Andersen S,

Arner P. Irbesartan in Patients with Type 2 Diabetes andMicroalbuminuria Study Group. The effect of irbesartan on thedevelopment of diabetic nephropathy in patients with type 2 diabetes. N

Engl Med 2001;345:870-8.[18] Nichol HC, Zuck D. Difficult laryngoscopy--the ‘‘anterior’’ larynx and

the atlanto-occipital gap. Br J Anaesth 1983;55:141-4.[19] Warner ME, Contreras MG, Warner MA, Schroeder DR, Munn SR,

Maxson PM. Diabetes mellitus and difficult laryngoscopy in renal andpancreatic transplant patient. Anesth Analg 1998;86:516-9.

[20] Hjortrup A, Sorensen C, Dyremose E, Hjortso NC, Kehlet H. Influenceof diabetes mellitus on operative risk. Br J Surg 1985;72:783-5.

[21] Furnary AP, Zerr KJ, Grunkemeier GL, Starr A. Continuousintravenous insulin infusion reduces the incidence of deep sternalwound infection in diabetic patients after cardiac surgical procedures.Ann Thorac Surg 1999;67:352-60.

[22] Brogard JM, Diemunsch P, Grimaud D, Guillausseau PJ, Lambert H,Massabie P, et al. Diabète et anesthésie. Recommandations concernantla prise en charge du diabétique en période opératoire. Ann Fr Anesth

Reanim 1995;14:523-31.[23] Schuyler MR, Niewoehner DE, Inkley SR, Kohn R. Abnormal lung

elasticity in juvenile diabetes mellitus. Am Rev Respir Dis 1976;113:37-41.

[24] Flynn MD, O’Brien IA, Corrall RJ. The prevalence of autonomic andperipheral neuropathy in insulin-treated diabetic subjects. Diabet Med

1995;12:310-3.[25] Ewing DJ, Boland O, Neilson JM, Cho CG, Clarke BF. Autonomic

neuropathy, QT interval lengthening, and unexpected deaths in malediabetic patients. Diabetologia 1991;34:182-5.

[26] Kirvela M, Yli-Hankala, Lindgren L. QT dispersion and autonomicfunction in diabetic and non-diabetic patients with renal failure. Br

J Anaesth 1994;73:801-4.[27] Burgos LG, Ebert TJ, Asiddao C, Turner LA, Pattison CZ, Wang-

Cheng R, et al. Increased intraoperative cardiovascular morbidity indiabetics with autonomic neuropathy. Anesthesiology 1989;70:591-7.

[28] Latson TW, Ashmore TH, Reinhart DJ, Klein KW, Giesecke AH.Autonomic reflex dysfunction in patients presenting for electivesurgery is associated with hypotension after anesthesia induction.Anesthesiology 1994;80:326-37.

“ Points essentiels

Le diabète de type 2 est un facteur de risque coronarienmajeur et indépendant.Le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse (IMS)doit être effectué chez les diabétiques de type 2 âgés deplus de 60 ans, artéritiques, ou ayant fait un AVC ; lesdiabétiques microalbuminuriques ou protéinuriques ; lessujets cumulant tabagisme, HTA et hyperlipidémie.L’importance des anomalies de la fonction ventriculairegauche est corrélée à la sévérité de la microangiopathie auniveau de la rétine du patient.L’intervalle QT, sous contrôle du système nerveuxautonome, est un marqueur prédictif de l’instabilitémyocardique périopératoire. La variabilité de la longueurdu QT (dispersion du QT) est corrélée au risqued’arythmie ventriculaire en périopératoire.La dysautonomie cardiaque expose au risqued’hypothermie au cours de l’anesthésie générale.Au-delà de 10 ans d’évolution du diabète, le risqued’intubation difficile est accru.Chez le patient diabétique soumis à une chirurgie à risqued’ischémie cérébrale, obtenir une normalisation de laglycémie semble souhaitable.Chez le diabétique, les infections représentent les deuxtiers des complications postopératoires et 20 % des décèsen périopératoire.Les déficits neurologiques liés à l’anesthésie sont associésdans 85 % des cas à une anesthésie générale. Un soin toutparticulier sera apporté durant la période opératoire à laprotection des points d’appui.La clonidine donnée en prémédication à la dose de4 mg kg–1 a montré son efficacité pour améliorerl’équilibre glycémique tout en réduisant les besoinsinsuliniques périopératoires.Un contrôle de la créatininémie (à j3) à la recherche d’unealtération de la fonction rénale est recommandé, dans lessuites d’une artériographie.Les infections bactériennes et les maladies intercurrentessévères (insuffisance rénale, infarctus du myocarde,accident vasculaire cérébral, intervention en urgence,etc.) exposent le patient diabétique à un déséquilibreglycémique, voire à une hyperosmolarité (syndromed’hyperglycémie hyperosmolaire), à une acidocétoseessentiellement chez le diabétique de type 1 et à uneacidose lactique chez les patients traités ou non parmetformine.

.

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

20 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

[29] Keyl C, Lemberger P, Palitzsch KD, Hochmuth K, Liebold A,

Hobbhahn J. Cardiovascular autonomic dysfunction and hemodynamic

response to anesthetic induction in patients with coronary artery disease

and diabetes mellitus. Anesth Analg 1999;88:985-91.

[30] Kitamura A, Hoshino T, Kon T, Ogawa R. Patients with diabetic

neuropathy are at risk of a greater intraoperative reduction in core

temperature. Anesthesiology 2000;92:1311-8.

[31] Morricone L, Ranucci M, Denti S, CazzanigaA, Isgro G, Enrini R, et al.

Diabetes and complications after cardiac surgery: comparison with a

non-diabetic population. Acta Diabetol 1999;36:77-84.

[32] Heino A. Operative and postoperative non-surgical complications in

diabetic patients undergoing renal transplantation. Scand J Urol

Nephrol 1988;22:53-8.

[33] Capes SE, Hunt D, Malmberg K, Pathak P, Gerstein HC. Stress

hyperglycemia and prognosis of stroke in nondiabetic and diabetic

patients: a systematic overview. Stroke 2001;32:2426-32.

[34] Warner MA, Warner ME, Martin JT. Ulnar neuropathy. Incidence,

outcome, and risk factors in sedated or anesthetized patients.

Anesthesiology 1994;81:1332-40.

[35] Sprung J, Abdelmalak B, Gottlieb A, Mayhew C, Hammel J, Levy PJ,

et al. Analysis of risk factors for myocardial infarction and cardiac

mortality after major vascular surgery. Anesthesiology 2000;93:

129-40.

[36] AhariA, Bergqvist D, Troeng T, Elfstrom J, Hedberg B, Ljungstrom K,

et al. Diabetes mellitus as a risk factor for early outcome after carotid

endarterectomy-a population-based study. Eur J Vasc Endovasc Surg

1999;18:122-6.

[37] Blotter RH, Connolly E, WasanA, Chapman MW.Acute complications

in the operative treatment of isolated ankle fractures in patients with

diabetes mellitus. Foot Ankle Int 1999;20:687-94.

[38] Johnson WD, Pedraza PM, Kayser KL. Coronary artery surgery in

diabetics: 261 consecutive patients followed four to seven years. Am

Heart J 1982;104:823-7.

[39] Fitzgibbon DR, Posner KL, Domino KB, Caplan RA, Lee LA,

Cheney FW. Chronic pain management: American Society of

Anesthesiologists Closed Claims Project. Anesthesiology 2004;100:

98-105.

[40] Barker JP, Robinson PN, Vafidis GC, Burrin JM, Sapsed-Byrne S,

Hall GM. Metabolic control of non-insulin-dependent diabetic patients

undergoing cataract surgery: comparison of local and general

anaesthesia. Br J Anaesth 1995;74:500-5.

[41] Horlocker TT, O’Driscoll SW, Dinapoli RP. Recurring brachial plexus

neuropathy in a diabetic patient after shoulder surgery and continuous

interscalene block. Anesth Analg 2000;91:688-90.

[42] van den Berghe G, Wouters P, Weekers F, Verwaest C, Bruyninckx F,

Schetz M, et al. Intensive insulin therapy in the critically ill patients. N

Engl J Med 2001;345:1359-67.

[43] Malmberg K. Prospective randomized study of intensive insulin

treatment on long term survival after acute myocardial infarction in

patients with diabetes mellitus. DIGAMI (Diabetes Mellitus, Insulin

Glucose Infusion in Acute Myocardial Infarction) study group. BMJ

1997;314:1512-5.

[44] Diaz R, Paolasso EA, Piegas LS, Tajer CD, Moreno MG, Corvalan R,

et al. Metabolic modulation of acute myocardial infarction. The ECLA

(Estudios Cardiologicos Latinoamerica) Collaborative group. Circula-

tion 1998;98:2227-34.

[45] Lazar HL, Chipkin S, Philippides G, BaoY,Apstein C. Glucose-insulin-

potassium solutions improve outcomes in diabetics who have coronary

artery operations. Ann Thorac Surg 2000;70:145-50.

[46] Belhoula M, Ciebiera JP, De La ChapelleA, Boisseau N, Coeurveille D,

Raucoules-Aime M. Clonidine premedication improves metabolic

control in type 2 diabetics during ophthalmic surgery. Br J Anaesth

2003;90:434-9.

[47] Jaouar H, Blay M, Raucoules-Aimé M. Le syndrome d’hyperglycémie

hyperosmolaire (SHH. Méd/Thér 2002;8:181-7.

[48] Halperin ML, Goguen JM, Cheema-Dhadli S. Diabetic emer-

gencies. In: Arieff AI, DeFronzo RA, editors. Fluid, electrolyte, and

acid-base disorders. New York: Churchill Livingstone; 1995.

p. 741-73.

[49] Cruz-Caudillo JC, Sabatini S. Diabetic hyperosmolar syndrome.

Nephron 1995;69:201-10.

[50] Arieff AI, Kleeman CR. Studies on mechanism of cerebral edema in

diabetic comas: effects of hyperglycemia and rapid lowering of plasma

glucose in normal rabbits. J Clin Invest 1973;52:571-83.

[51] Cserr HF, DePasquale M, Patlak CS. Volume regulatory influx of

electrolytes from plasma to brain during acute hyperosmolality. Am

J Physiol 1987;253:530-7.

[52] Ayus JC, Arieff AI. Brain damage and postoperative hyponatremia: the

role of gender. Neurology 1996;46:323-8.

[53] Halperin ML, Marsden PA, Singer GG, West ML. Can marked

hyperglycemia occur without ketosis? Clin Invest Med 1985;8:253-6.

[54] Arieff AI, Carroll HJ. Non ketotic hyperosmolar coma with

hyperglycemia: clinical features, pathophysiology, renal function, acid-

base balance, plasma-cerebrospinal fluid equilibria and the effects of

therapy in 37 cases. Medicine 1972;51:73-94.

[55] Grant PJ, Tate GM, Hughes JR, Davies JA, Prentice CR. Does

hypernatraemia promotes thrombosis? Thromb Res 1985;40:393-9.

[56] Pope DW, Dansky D. Hyperosmolar hyperglycemic nonketotic coma.

Emerg Med Clin North Am 1989;7:849-57.

[57] Paulin S, Grandperret-Vauthier S, Penfornis A. Acidocétose diabéti-

que. In: Grimaldi A, editor. Traité de diabétologie. Paris: Médecine-

Sciences Flammarion; 2005. p. 483-91.

[58] Malone ML, Gennis V, Goodwin JS. Characteristics of diabetic

ketoacidosis in older versus younger adults. J Am Geriatr Soc 1992;40:

1100-4.

[59] Byrne HA, Tieszen KL, Hollis S, Dornan TL, New JP. Evaluation of an

electrochemical sensor for measuring blood ketones. Diabetes Care

2000;23:500-3.

[60] Umpierrez GE, Watts NB, Phillips LS. Clinical utility of beta-

hydroxybutyrate determined by reflectance meter in the management

of diabetic ketoacidosis. Diabetes Care 1995;18:137-8.

[61] Guerci B, Benichou M, Floriot M, Bohme P, Fougnot S, Franck P, et al.

Accuracy of an electrochemical sensor for measuring capillary blood

ketones by fingerstick samples during metabolic deterioration after

continuous subcutaneous insulin infusion interruption in type 1 diabetic

patients. Diabetes Care 2003;26:1137-41.

[62] Yadav D, Nair S, Norkus EP, Pitchumoni CS. Nonspecific

hyperamylasemia and hyperlipasemia in diabetic ketoacidosis:

incidence and correlation with biochemical abnormalities. Am

J Gastroenterol 2000;95:3123-8.

[63] Kitabchi AE, Umpierrez GE, Murphy MB, Barrett EJ, Kreisberg RA,

Malone JL, et al. Hyperglycemic crises in patients with diabetes

mellitus. Diabetes Care 2003;26(suppl1):S109-S117.

[64] Kitabchi AE, Wall BM. Diabetic ketoacidosis. Med Clin North Am

1995;79:9-37.

[65] Bohn D, Daneman D. Diabetic ketoacidosis and cerebral edema. Curr

Opin Pediatr 2002;14:287-91.

[66] Mahoney CP, Vlcek BW, DelAguila M. Risk factors for developing

brain herniation during diabetic ketoacidosis. Pediatr Neurol 1999;21:

721-7.

[67] Oh MS, Carroll HJ, Uribarri J. Mechanism of normochloremic and

hyperchloremic acidosis in diabetic ketoacidosis. Nephron 1990;54:

1-6.

[68] Tierney MR, Baker AS. Infections of the head and neck in diabetes

mellitus. Infect Dis Clin North Am 1995;9:195-216.

[69] Lalau JD. Acidose lactique et diabète. In: Grimaldi A, editor. Traité

de diabétologie. Paris: Médecine-Sciences Flammarion; 2005.

p. 499-507.

[70] Leverve X, Barnoud D, Carpentier F, Guignier M. Métabolisme du

lactate, hyperlactatémies, acidoses lactiques. In: Anesthésie-

Réanimation du patient diabétique. Collection d’anesthésie, de réani-

mation et d’urgences. Paris: Masson; 1999. p. 167-83.

[71] Leverve XM. Lactic acidosis.Anew insight? Minerva Anestesiol 1999;

65:205-9.

[72] King P, Kong MF, Parkin H, MacDonald IA, Barber C, Tattersall RB.

Intravenous lactate prevents cerebral dysfunction during hypoglycemia

in insulin-dependent diabetes mellitus. Clin Sci 1998;94:157-63.

[73] Sulkin TV, Bosman D, Krentz AJ. Contraindications to metformin

therapy in patients with NIDDM. Diabetes Care 1997;20:925-8.

[74] Avogaro A, Toffolo G, Miola M, Valerio A, Tiengo A, Cobelli C, et al.

Intracellular lactate- and pyruvate-interconversion rates are increased

in muscle tissue of non-insulin-dependent diabetic individuals. J Clin

Invest 1996;98:108-15.

[75] Gan SC, Barr J, Arieff A, Pearl RG. Biguanide-associated lactic

acidosis. Case report and review of literature. Arch Intern Med 1992;

152:2333-6.

[76] Graf H, Leach W, Arieff AI. Evidence for a detrimental effect of bicar-

bonate therapy in hypoxic lactic acidosis. Science 1985;227:754-6.

Anesthésie et réanimation du patient diabétique ¶ 36-650-A-10

21Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

[77] Cooper DJ, Walley KR, Wiggs BR, Russell JA. Bicarbonate does notimprove hemodynamics in critically ill patients who have lacticacidosis.Aprospective, controlled clinical study. Ann Intern Med 1990;112:492-8.

[78] Stacpoole PW, Greene YJ. Dichloroacetate. Diabetes Care 1992;15:785-91.

[79] Stacpoole PW, Wright EC, Baumgartner TG, Bersin RM, Buchalter S,Curry SH, et al. A controlled clinical trial of dichloroacetate fortreatment of lactic acidosis in adults. The Dichloroacetate-LacticAcidosis Study Group. N Engl J Med 1992;327:1564-9.

[80] Intensive blood glucose control with sulfonylureas or insulin comparedwith conventional treatment and risk of complications in patients withtype 2 diabetes (UKPDS 33). UK Prospective Diabetes Study(UKPDS) Group. Lancet 1998;352:837-53.

[81] Campbell IW. Metformin and the sulphonylureas: the comparative risk.Horm Metab Res 1985;15:105-11 [suppl].

[82] Sovik O, Thordarson H. Dead-in-bed syndrome in young diabeticpatients. Diabetes Care 1999;22(suppl2):B40-B42.

[83] Hejlesen OK, Andreassen S, Cavan DA, Hovorka R. Analysing

the hypoglycaemic counter-regulation: a clinically relevant

phenomenon? Comput Methods Programs Biomed 1996;50:

231-40.

[84] George E, Harris N, Bedford C, Macdonald IA, Hardisty CA,

Heller SR. Prolonged but partial impairment of the hypoglycaemic

physiological response following short-term hypoglycaemia in normal

subjects. Diabetologia 1995;38:1183-90.

[85] Keymeulen B, Jacobs A, de Metz K, De Sadeleer C, Bossuyt A,

Somers G. Regional cerebral hypoperfusion in long-term type 1

(insulin-dependent) diabetic patients: relation to hypoglycaemic

events. Nucl Med Commun 1995;16:10-6.

[86] Merbis MA, Snoek FJ, Kanc K, Heine RJ. Hypoglycaemia induces

emotional disruption. Patient Educ Couns 1996;29:117-22.

[87] Herings RM, De Boer A, Stricker BH, Leufkens HG, Porsius A.

Hypoglycaemia associated with use of inhibitors of angiotensin

converting enzyme. Lancet 1995;345:1195-8.

M. Carles, Praticien hospitalier ([email protected]).J. Dellamonica, Interne.A. Raucoules-Aimé, Professeur des Universités, praticien hospitalier.Département d’anesthésie-réanimation, hôpital Archet 2, 151, route Saint-Antoine-Ginestière, BP 3079, 06202 Nice cedex 3, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Carles M., Dellamonica J., Raucoules-Aimé A. Anesthésie et réanimation du patient diabétique. EMC(Elsevier Masson SAS, Paris), Anesthésie-Réanimation, 36-650-A-10, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com

Arbresdécisionnels

Iconographiessupplémentaires

Vidéos /Animations

Documentslégaux

Informationau patient

Informationssupplémentaires

Auto-évaluations

36-650-A-10 ¶ Anesthésie et réanimation du patient diabétique

22 Anesthésie-Réanimation

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “

Cet article comporte également le contenu multimédia suivant, accessible en ligne sur em-consulte.com et

em-premium.com :

1 autoévaluation

Cliquez ici

Rejoignez ous sur Facebook: “ La Radiologie Pour Tous “