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La politique culturelle Iran en par Djamchid Behnam Unesco Paris 1972

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La politique culturelle

Iranen

par Djamchid Behnam

Unesco Paris 1972

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Politiques culturelles : études et documents

Dans cette collection 1. Réflexions préalables sur les politiques culturelles2. La politique culturelle aux États-Unis

par Charles G. Mark3. Les droits culturels en tant que droits de Vhomme4. La politique culturelle au Japon

par Nobuya SMkaumi5. Aspects de la politique culturelle française

par le Service des études et recherches duMinistère des affaires culturelles, Paris

6. La politique culturelle en Tunisiepar Rafik Saïd

1. La politique culturelle en Grande-Bretagnepar Michael Green et Michael Wilding,en consultationavec le professeur Richard Hoggart

8. La politique culturelle en Union des républiques• socialistes soviétiques

par A. A. Zvorykine, avec le concours deN. I. Goloubtsova et E. I. Rabinovitch

9. La politique culturelle en Tchécoslovaquiepar Miroslav Marek, avec le concours deMilan Hromadka et Josef Chroust

* La politique culturelle en ItalieÉtude effectuée par les soins de la Commissionnationale italienne pour l'Unesco

La politique culturelle en Yougoslaviepar Stevan Majstorovic

La politique culturelle en Bulgariepar Kostadine Popov

La politique culturelle à Cubapar Lisandro Otero, avec le concours deFrancisco Martinez Hinojosa

Quelques aspects des politiquesculturelles en Indepar Kapila Malik Vatsyayan

La politique culturelle en FinlandeÉtude effectuée par les soins de la Commissionnationale finlandaise pour l'Unesco

La politique culturelle en Egyptepar Magdi Wahba

La politique culturelle en Iranpar Djamchid Behnam

A paraîtreLa politique culturelle du Nigeria

A l'occasion d'un changement de présentation decette collection, la numérotation sérielle a été abandonnéeà partir de cet ouvrage.

1972 Annéeinternationaledu livre

Publié en 1972par l'Organisation des Nations Unies pourl'éducation, la science et la cultureplace de Fontenoy, 75700 ParisImprimé parPresses Universitaires de France, Vendôme

ISBN 92-3-201002-X

© Unesco 1972SHC.72/XIX.18/F

Préface

Le but de cette collection est de montrer comment divers États membresplanifient et appliquent leur politique culturelle.

Les politiques culturelles sont aussi diverses que les cultures elles-mêmes ; il appartient à chaque État membre de déterminer et d'appliquerla sienne, compte tenu de sa conception de la culture, de son système socio-économique, de son idéologie politique et de son développement technolo-gique. Néanmoins, les méthodes de la politique culturelle (comme celles dela politique générale du développement) posent des problèmes universels —principalement d'ordre institutionnel, administratif et financier — et l'onreconnaît de plus en plus la nécessité d'échanges d'expériences et d'informa-tions à leur sujet. Les publications de la présente collection — dont on s'estefforcé d'uniformiser autant que possible la présentation afin de faciliter lescomparaisons — portent essentiellement sur ces aspects techniques de lapolitique culturelle.

En règle générale, les études traitent des questions suivantes : principes etméthodes de la politique culturelle, évaluation des besoins culturels, struc-tures administratives et gestion, planification et financement, organisationdes ressources, législation, budget, institutions publiques et privées, contenuculturel de l'éducation, autonomie et décentralisation culturelles, formationdu personnel, infrastructure institutionnelle correspondant à des besoins cul-turels particuliers, préservation du patrimoine culturel, institutions de diffu-sion culturelle, coopération culturelle internationale et questions connexes.

Les études portent sur des pays représentant des systèmes sociaux etéconomiques, des régions géographiques et des niveaux de développementdifférents. Elles reflètent par conséquent une large variété de conceptionset de méthodes de la politique culturelle. Dans leur ensemble, elles peuventfournir des modèles utiles aux pays qui n'ont pas encore mis au point unepolitique culturelle. A tous les pays, et notamment à ceux qui cherchent denouvelles formules pour leur politique culturelle, elles permettent de profiterde l'expérience acquise ailleurs.

Cette étude a été préparée pour l'Unesco par Djamchid Behnam, secré-taire général du Conseil supérieur de la culture et des arts.

Les opinions qui y sont exprimées sont celles de l'auteur et ne sauraientengager l'Unesco.

Table des matières

9 Introduction : itinéraire d'une culture

15 Objectifs et principes

18 Structure administrative et financière des activitésculturelles

23 Mise en valeur du patrimoine culturel

28 Diffusion de la culture

40 L'enseignement de l'art

42 Conclusion : réflexions sur la politique culturelle

46 Annexes

Introduction :itinéraire d'une culture

L'Iran, situé entre la péninsule Indienne et la Méditerranée, à égale distancede l'océan Atlantique et de l'océan Pacifique, a été pendant des milliersd'années un carrefour de cultures.

Sa civilisation est d'origine indo-européenne, mais les peuples installéssur le plateau iranien ont fait une synthèse des civilisations de l'Extrême-Orient et de celles, brillantes, des bords de la Méditerranée et du Moyen-Orient, ainsi que des modes de pensée et des techniques indiennes, chinoises,grecques et arabes.

Si l'on fait abstraction de la période préhistorique correspondant à l'émi-gration des Aryens vers l'Asie occidentale, on peut affirmer avec certitudeque depuis l'an 4000 av. J.-C., la civilisation iranienne a conservé une conti-nuité assez rare dans l'histoire des autres civilisations.

Le premier grand Etat iranien fut fondé aux environs de l'an 550av. J.-C. par Cyrus le Grand. Vingt-cinq siècles d'histoire iranienne mon-trent des périodes bien distinctes résultant de différents facteurs histo-riques : la venue d'Alexandre le Grand en 330 av. J.-C., l'influence de lacivilisation grecque, l'invasion arabe et la conversion à l'islam au VIIe siècle,et, enfin, l'invasion mongole au XIIIe siècle qui, peut-être, ne fut pas aussiimportante que les deux précédentes.

Malgré ces différentes invasions, la civilisation iranienne n'a ni dis-paru, ni décliné ; tout au contraire, elle a influencé les civilisations desenvahisseurs.

La grâce même des divinités grecques ne put avoir prise sur la civili-sation iranienne. Les Iraniens contribuèrent eux-mêmes à l'implantation dela civilisation islamique et les Mongols furent séduits par les us et coutumesiraniens.

D'une manière générale, la principale caractéristique de la civilisationiranienne est la continuité culturelle parallèle à la continuité de l'État etde l'empire iranien ; et les rois qui gouvernèrent le pays s'avérèrent tou-jours de véritables promoteurs de la science, de la culture et de l'art.

Introduction. : itinéraire d'une culture

La plus ancienne religion de l'Iran, le zoroastrisme, qu'on appelle aussiparfois mazdéisme, fut fondée approximativement en 600 av. J.-C. parZoroastre. Elle est basée sur un dualisme : la présence dans l'univers de deuxforces opposées, Ahura-mazda, source de bonté et de lumière, et Ahriman,symbole du Mal. L'bomme participe à la lutte d'Ahura-mazda contre Ahri-man, qui se termine par la disparition du mal.

Certains voient dans le zoroastrisme une religion monothéiste danslaquelle Abura-mazda intervient comme arbitre entre le « Bien » et le « Mal ».

Le zoroastrisme fut la religion officielle de l'empire d'Iran pendant dessiècles. Elle disparut presque totalement après l'invasion arabe, mais elleconserve encore quelques dizaines de milliers d'adeptes en Iran et en Inde(les parsis).

Elle est toujours reconnue officiellement par le droit constitutionneliranien.

Trois siècles avant Jésus-Christ, une autre religion a pris son essor enIran : le mitbraïsme, d'origine indo-iranienne, fondé sur l'adoration deMithra (le Soleil).

Mithra est le dieu de la lumière, de l'amour et des pâturages. Mithra estl'ami de l'homme, qu'il aide dans ce monde aussi bien que dans l'autre. Ilest le médiateur entre Dieu et l'homme, entre la lumière et l'obscurité. .

Il y a une analogie certaine entre le mitbraïsme et le christianisme, et Jaconcurrence entre les deux religions fut très intense au IIIe siècle, à Rome.

De l'Asie Mineure, le mithraïsme s'étendit à tout l'Empire romain ets'infiltra même jusqu'au nord de l'Europe. On trouve encore des templesde Mithra en Allemagne et en Angleterre.

Mani, fondateur du manichéisme, tenta d'effectuer une réforme duzoroastrisme. Le manichéisme s'étendit jusqu'à l'Extrême-Orient (Chine),l'Asie centrale, l'Afrique du Nord et les Balkans et certaines branches decette reh'gion (comme le catharisme) subsistèrent longtemps en Europe.

Mani définit ainsi la condition humaine : l'homme est né de Dieu, maispar suite de son ignorance une couche de poussière cache sa véritable per-sonnalité ; cependant il a toujours le pouvoir de s'élever aux sphères supé-rieures et, dès que cette poussière disparaîtra, il retrouvera son authenticité.

Le monde dans lequel vit l'homme est constitué par deux élémentsopposés, le ce Bien » et le « Mal », qui, à l'origine, étaient distincts.

La conversion des Iraniens à l'islam (viie siècle) a marqué une phasenouvelle dans l'histoire de l'Iran et dans celle de l'islam.

L'islamisation de l'Iran est allée de pair avec l'iranisation de l'Islam, etles Iraniens, en adoptant une doctrine islamique particulière, le chiisme eten la développant, introduisirent la civilisation iranienne en Islam.

Ce qui différencie le chiisme du sunisme (autre doctrine islamique), clestla contestation de la succession du Prophète. Les adeptes du chiisme ontfoi en la légitimité d'Ali en tant que successeur et de ses descendants jus-qu'au 12e imam (12e génération).

L'imam est, pour les chiites, l'intermédiaire entre l'homme et Dieu. Le

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Introduction : itinéraire d'une culture

dernier imam a une vie occulte et dirige d'une manière invisible les affairesde ce monde ; il apparaîtra un jour pour y rétablir la justice1.

Face à l'orthodoxie sunite, le chiisme est plus large d'idées et plus ouvertau mysticisme.

Dans les premiers siècles de l'islam, la langue arabe, langue du Coran eten même temps langue scientifique de l'époque, a contribué à la diffusion desœuvres des savants iraniens dans tous les pays musulmans. Ainsi, le mode depensée iranien a eu un rôle déterminant dans l'apparition de la philosophieislamique. C'est au cours de cette période que les philosophes iraniens ontdécouvert les œuvres grecques et que, réciproquement, la philosophie, lesmathématiques, l'astronomie et la médecine iraniennes se sont étenduesvers l'Occident : les œuvres d'Avicenne et de Razi en sont deux exemples.

Toutefois, l'islam n'a pu bouleverser le mode de vie et l'âme iraniens.La langue persane est restée intacte et, même actuellement, après plus demille ans, le Chah-namè (Livre des rois) de Firdusi est lu avec enthousiasmedans les villages les plus reculés et aisément compris par le peuple. La languepersane, qui est le résultat de l'évolution naturelle des langues préislamiquesde l'Iran, est l'élément essentiel de la pensée et de l'unité iraniennes et del'apparition d'une littérature extrêmement riche, particulièrement dans ledomaine de la poésie.

Le premier exemple de poésie iranienne se trouve dans l'Avesta, recueildes écritures sacrées de la religion zoroastrienne. Les parties les plusanciennes de l'Avesta, appelées « gathas », c'est-à-dire « cantiques », sontattribuées au prophète Zoroastre lui-même et dateraient d'une époquesituée entre le XIe et le vie siècle avant notre ère.

L'Iran, vaincu au vne siècle par les conquérants arabes, trouve bientôtdans la poésie le moyen d'expression le plus approprié de son génie, et lapoésie persane, née il y a plus d'un millénaire, s'est développée sans inter-ruption jusqu'à nos jours. Dès le XIe siècle, elle a étendu son influence horsdu plateau iranien : des Indes jusqu'aux confins de la Chine d'une part,jusqu'à l'Asie Mineure de l'autre.

Mariant les souvenirs des littératures préislamiques aux traditionsmusulmanes, elle constitue l'art le plus achevé de l'Iran islamique.

Épique, lyrique, didactique, narrative ou confidentielle, légère ou grave,elle laisse paraître, avec une remarquable constance, une certaine façon desentir le monde, qui est l'esprit d'un peuple. Associée à tous les momentsde la vie, elle est aussi le truchement de la méditation philosophique.

Tout Iranien, même s'il n'est pas poète, sait goûter les vers. Paradoxesignificatif : les plus raffinés des poètes persans sont aussi les plus popu-laires (Hafiez, Saadi, Djalal al-Din Rumi ; Oniar Khayyam)2.

1. H. NASSH, Iran, Paris, Unesco, janvier 1966. (Uuesco/TE/6.)2. Anthologie de la poésie persane, XI-XXe siècle. Textes choisis par Z. Safâ. Traduction

par G. Lazard, E. Lescot et H. Massé. Paris, Gallimard, 1964, 422 p. (Collection Unescod'œuvres représentatives : série persane.)

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Introduction : itinéraire d'une culture

Les poètes persans ont prêché l'humanisme au-dessus des religions et desraces et ils ont chanté l'amour et le vin comme signes du dépassement de soiet de l'oubli des vanités : « C'est dans la coupe que nous avons trouvél'image de notre Bien-Aimé. 0 Ignorant qui ne connais pas la raison denotre éternelle ivresse. » Puisque, d'après la philosophie mystique, chaqueêtre est capable d'atteindre une parcelle de la vérité divine et que la genèsede cette vérité est à l'intérieur de l'être humain, ce n'est que par ses propresefforts qu'il parviendra à la dégager. Ainsi, le mysticisme a permis d'entre-prendre dans toutes les voies des recherches personnelles et l'expérimenta-tion spéculative et sentimentale. Dans ce puits sans fond qu'est la penséemystique, la poésie a puisé ses thèmes ; elle donne aux relations humainesune chaleur et une saveur toujours renouvelées ; elle concrétise les conceptsmystiques en leur donnant la forme d'expériences vécues. Rarement dansla vie d'un peuple la poésie a joué un rôle aussi important. Elle est la formed'expression artistique et littéraire la plus répandue. Même dans les discoursphilosophiques et les récits historiques, elle est demeurée le langage favori.Elle est certainement aussi le ferment de la cohésion culturelle. Elle estsurtout considérée dans la conversation quotidienne comme un système deréférence et le reflet des valeurs auxquelles toute une nation est attachée.Les restrictions imposées par le dogme islamique dans le domaine des repré-sentations figuratives et des expressions musicales ont certainement ren-forcé la charge émotionnelle et esthétique de la poésie. Grâce à elle, la languepersane a préservé sa continuité1.

Les œuvres des poètes inspirent encore la morale populaire. Les anal-phabètes eux-mêmes connaissent un grand nombre de vers par cœur.

On trouve des poèmes inscrits sur les objets et les bâtiments et les mar-chands ambulants présentent leurs marchandises en récitant des vers.Les tombeaux de poètes comme Saadi et Hafiz constituent des lieux depèlerinage.

Un autre élément important de la civilisation iranienne est son art uni-versellement connu. Les objets et les statues de bronze de la période préhis-torique qui se trouvent dans la plupart des musées du monde sont lespremiers témoignages de cet art. Au cours de la période historique, l'archi-tecture et la sculpture apparaissent et atteignent leur apogée. Les anciennescapitales (comme Pasargades, Persépolis, Suse), les palais, les forteresses, lestombes et les bas-reliefs qu'on a découverts dans toutes les parties du paysen font foi. Il faut y ajouter l'art de la poterie, des textiles, le travail desmétaux, etc.

Les arts plastiques révèlent une certaine continuité en dépit de nom-breuses invasions. La peinture est à l'honneur à l'époque Sassanide. Legrand réformateur de la religion zoroastrienne, Mani, est en même tempsconnu comme un grand peintre. Dans la période islamique, différentesécoles de peinture se créent. Elles s'adonnent entièrement à la miniature,

1. E. NABAGHI, « Quelques aspects de la culture iranienne », Opinion, mars 1971.

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Introduction : itinéraire d'une culture

qui est la peinture persane par excellence. Les envahisseurs mongols duxme siècle sont de véritables amateurs de peinture. Ils encouragent lesgrands artistes peintres et, malgré leur caractère nomade et guerrier, ilss'intéressent vivement à leur art. Sous les Timourides et, plus tard, sous lesSafavides, la peinture persane entre dans sa phase la plus remarquable avecl'école de Hérat et celle de Tabriz.

Contrairement à la peinture, la sculpture de l'ère islamique, s'éloignantdes traditions achéménides, parthes et sassanides, s'appauvrit et ne produitaucun grand maître digne de ce nom. Par contre, la céramique conserve detout temps sa popularité millénaire. Les céramiques de Nichapour et lespoteries vernissées de Kachan ont une réputation mondiale1.

Dans la poterie, la calligraphie, le tissage, la céramique et, enfin, dansle plus célèbre des arts persans, le tapis, on est frappé par la beauté dudessin.

L'artisanat iranien fait partie intégrante de la vie du peuple. Le tissagede tapis dans les maisons, que ce soit en ville ou à la campagne, et mêmesous les tentes des nomades, a toujours été pratiqué et se pratique encore.

Des villes importantes telles que Yazd, Kachan et Kerman sont descentres importants de fabrication de textiles. D'autres villes comme Qhomet Hamadhan sont réputées pour leurs poteries et leurs céramiques. Il nefaut pas oublier l'art de la miniature, qui continue à occuper une place émi-nente dans l'ensemble des arts de l'Iran.

Dans la période islamique, l'architecture constituait un des arts les plusimportants du pays et, compte tenu des différences climatiques, elle a prisdes formes variées dans le Nord, le Sud et dans la région désertique. Acertaines époques, comme sous les Seldjoukides et les Safavides, l'architec-ture combinée à l'urbanisme a contribué à la création des chefs-d'œuvre telsque la ville d'Ispahan.

Les origines de la musique iranienne se perdent dans la plus lointaineantiquité. L'iconographie des Sassanides (226-641) nous révèle que lamusique était très en faveur à cette époque et l'on sait que sous le règne deChrosroes II (590-628), les musiciens jouissaient d'une grande considération.De grands théoriciens comme Farabi (xe siècle) et Avicenne (xie siècle) nousont laissé d'importants ouvrages théoriques. La musique connut un nouvelessor et la documentation musicale devient plus précise vers la fin duxixe siècle. Comme la plupart des pays de langues indo-européennes, l'Iranappartient au monde de la musique modale. La musique iranienne comptedouze systèmes modaux essentiels ; elle est monodique, autrement dit ellene fait pas entendre plusieurs notes à la fois. Si la forme de la mélodie esten général assez simple, l'art réside dans la manière de la jouer et l'improvi-sation joue un rôle primordial. Musique d'intimité, de « mouvement d'âme »,elle est avant tout un moyen d'exprimer un état intérieur2.

1. A. TADJVIDI, L'art moderne en Iran, Téhéran, Ministère de la culture et de l'art.2. N. GABON et D. SAFVATE, Iran : traditions musicales, Buchet et Chastel, 1966.

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Introduction : itinéraire d'une culture

Dès le xvne siècle, l'Iran commence à prendre contact avec la civilisationoccidentale. Ce contact s'intensifie au XIXe siècle par la voie de la Russie,de la Turquie, du golfe Persique et de l'Inde.

Les œuvres philosophiques et littéraires européennes sont traduites enpersan et les pensées sociales occidentales s'infiltrent en Iran par l'intermé-diaire des voyageurs et des étudiants.

Le commencement de l'industrialisation de l'Iran est allé de pair avecla pénétration des sciences et des techniques, du mode de vie et des artsoccidentaux. Au cours des cinquante dernières années, les relations cultu-relles entre l'Iran et les autres pays du monde se sont intensifiées.

Actuellement, l'Iran est entré dans une nouvelle ère culturelle, socialeet économique et, une fois encore, s'efforce d'accomplir sa mission'histo-rique qui est d'assimiler les cultures étrangères tout en sauvegardant sonidentité nationale.

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Objectifs et principes

En septembre 1966, un texte définissant la politique culturelle et la respon-sabilité des différentes organisations dans ce domaine a été approuvé parS. M. I. le Chahinchah.

Ce texte se proposait de donner des directives générales relatives à lacoordination des activités culturelles du secteur public, coordination dontle besoin, après de longues années d'activité gouvernementale et comptetenu de l'avènement d'une nouvelle ère économique et sociale pour le pays,se faisait fortement sentir.

La mise en œuvre des plans de développement ainsi que les réformessociales ont eu pour résultat, au cours des dix dernières années, une aug-mentation du revenu par habitant et une hausse de la demande des serviceset des produits de consommation, dans le domaine culturel comme ailleurs.

L'accroissement annuel de la population (plus de 3 %) et l'extrême jeu-nesse de celle-ci (plus de 51 % des habitants ont moins de vingt ans), paral-lèlement à l'accroissement rapide de la population urbaine (8 % par an),montrent l'immensité des besoins.

.L'élévation du niveau des études et l'apparition des classes moyennesne permettent plus que la culture soit comme autrefois l'apanage d'unepetite élite.

En 1970/71, plus de 4 700 000 élèves se sont inscrits dans les écoles pri-maires et secondaires. Dans la même année, le nombre des étudiants de65 établissements d'enseignement supérieur (y compris 8 universités) s'éle-vait à 76 000 ; et ceci, abstraction faite d'un grand nombre d'étudiantsiraniens qui poursuivent leurs études à l'étranger.

Les conséquences les plus importantes de ces bouleversements sontl'apparition de modes de vie nouveaux, la transformation des structuresfamiliales, l'entrée des femmes dans la vie sociale, politique et culturelle,ainsi que la naissance des problèmes relatifs à la jeunesse et à ses loisirs quise posent à une population urbaine de plus de 10 millions d'âmes. Quantà la population rurale, qui vit dans 50 000 villages, elle a, elle aussi, ses

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Objectifs et principes

besoins et ses exigences sociaux et culturels, encore accrus du fait de ladiffusion des moyens de communication, de la réforme agraire et de la luttecontre l'analphabétisme.

Le développement rapide des « mass média » constitue également unélément nouveau, dont l'importance augmente chaque jour. La radios'infiltre dans les villages les plus éloignés et jusque dans les tentes desnomades. La télévision accapare toutes les grandes villes et s'étend mêmeaux campagnes.

En considération de ces nouveaux éléments, la politique culturelled'Iran s'inspire de principes définissant les responsabilités des pouvoirspublics et des organisations privées dans l'ensemble de l'action culturelle.Parmi ces principes, mentionnons l'accès de tous à la culture et la sauve-garde du patrimoine culturel national dans une société en voie d'indus-trialisation.

Le texte concernant la politique culturelle souligne l'importance d'uneculture basée sur la continuité nationale, mais répondant aux besoins despopulations qui doivent vivre dans une société en transition. Le but neconsiste ni à imiter aveuglément la civilisation et la culture occidentales, nià les rejeter. L'Iran doit effectuer une évaluation permanente de son héri-tage culturel par rapport aux éléments nouveaux et s'efforcer d'adopter lesmeilleurs de ces éléments.

Face à la révolution technologique occidentale, on a pu observer, aucours des dernières décennies, des réactions différentes allant d'une imita-tion complète (volontaire, ou imposée par les pays colonisateurs) à une néga-tion totale des valeurs de l'Occident. Toutefois, entre ces deux extrêmes, ilexiste des pays à la recherche de voies intermédiaires. Ces pays sont, surtouten Asie, ceux qui ont une histoire, une tradition et une culture anciennes etriches. Tel est l'objectif que la politique culturelle iranienne se proposed'atteindre : faire en sorte que le pays progresse économiquement et socia-lement, mais sans perdre son originalité devant l'uniformité imposée parles valeurs relatives à la civilisation technologique moderne.

Un autre objectif de la politique culturelle est le développement de lacréation artistique et intellectuelle. Celle-ci a toujours été riche en Iran,mais, par suite des contacts avec les autres cultures, une évaluation de sesformes et de ses buts devient nécessaire.

Enfin, un autre objectif de la politique culturelle est la diffusion de laculture par la création des maisons de la culture et le développement desmass média. Dans ce domaine, le rôle de l'État est jugé de première impor-tance, surtout dans les campagnes.

D'une manière générale, le devoir de l'État consiste essentiellement àprotéger l'artiste, le créateur et l'innovateur, et à développer les moyensde diffusion de la culture au sein des différentes classes sociales.

Un de ses soucis principaux, toutefois, est de réaliser la décentralisationdes affaires culturelles. Les offices représentant le Ministère de la cultureet de l'art dans les provinces s'efforcent, en collaborant avec les autorités

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1. Mosquée du roi Chah, Ispahan. 2. Musée archéologique de Téhéran.

3. Marches du Palais Apadaua, Persépolis.

4. Tour de Mihmau Alouste, Bamghan.

Objectifs et principes

locales, de dépister les exigences et les besoins des populations et oriententleurs activités dans ce sens. D'ailleurs, le texte définissant la politiqueculturelle du pays déclare expressément que celle-ci doit être exécutéeconformément aux particularités géographiques et sociales de chaque régionet doit, autant que possible, encourager la participation des capitaux privés.L'État, tout en prenant à sa charge la direction des activités archéolo-giques, de la radio-télévision, etc., encouragera la participation du secteurprivé et se réservera d'appliquer une politique d'administration et d'orien-tation. Cette politique nécessitera une planification au niveau du Plan quin-quennal de développement économique et social. Ce qui ne veut pas direque l'État imposera une conception particulière de la culture.

L'exposé du Ministre de la culture et de l'art à la Conférence intergou-vernementale des ministres de la culture à Venise met en lumière les prin-cipes de l'action de l'État :

« En ce qui concerne le rôle des pouvoirs publics, il convient surtoutd'en définir les limites ; car, comme l'a très bien précisé la récente réunionde Téhéran sur la politique culturelle, il n'appartient pas à l'État de déter-miner le contenu d'une culture officielle imposée à tous les citoyens et decontrôler toutes les manifestations subjectives ou d'en susciter les tendances.

» Toutefois, l'État ne peut se désintéresser entièrement du contenu de laculture, car il est le garant de l'ordre social et de la liberté des individus, eta la vocation de sauvegarder l'héritage culturel face au développement deplus en plus rapide et uniforme de la culture mondiale... Mais nous savonsbien que l'Etat ne peut suppléer à la créativité et devenir un agent deproduction culturelle. Tout au plus peut-il jouer le rôle de ce que certainsspécialistes ont appelé " le troisième homme ", l'intercesseur naturel entrecréation et assimilation de la culture. »

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Structure administrative etfinancière des activités culturelles1

D'une manière générale, toutes les activités culturelles, que ce soit à l'inté-rieur ou à l'extérieur du pays, relèvent de deux conseils principaux : leConseil culturel impérial, présidé par S. M. I. le Chahinchah et chargé del'expansion des relations culturelles avec l'étranger ; le Conseil supérieur dela culture et de l'art, qui exerce ses/fonctions par l'intermédiaire du Minis-tère de la culture et de l'art, et des autres ministères et organismes gouver-nementaux compétents.

Le secteur privé, d'autre part, contribue de plus en plus à étendre lechamp de ses activités dans le domaine culturel, au moyen des publicationset par la création de galeries d'art.

Dans ce chapitre, nous nous attacherons plus particulièrement à décrireles activités des organismes gouvernementaux les plus importants.

Ministère de la culture et de l'art

Le Ministère de l'éducation nationale, fondé il y a soixante et un ansenviron, avait à sa charge les questions éducatives, culturelles et artistiques,et le mot « beaux-arts », dans le titre officiel de ce ministère, suivait le mot« éducation ». ,

Pendant de longues années, ce ministère, en plus des tâches citées, a faitde nombreux efforts pour promouvoir les recherches archéologiques, la créa-tion de bibliothèques, de musées et d'écoles d'art et la production de livres.

Dès 1950, il a créé à l'intérieur de sa propre structure un départementspécial intitulé « Beaux-arts ».

1. Les informations données dans ce chapitre concernent uniquement la structure admi-nistrative des activités culturelles et aucune mention n'est faite des établissementsd'enseignement. En Iran, l'enseignement primaire, secondaire et professionnel est régipar le Ministère de l'éducation nationale et l'enseignement supérieur (universités etétablissements supérieurs) par le Ministère de la science et de l'enseignement supérieur.

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Structure administrative et financière

Toutefois, étant donné l'intensification des activités culturelles et ledéveloppement des affaires éducatives, ce ministère a été divisé, en 1964,en Ministère de l'éducation et Ministère de la culture et de l'art.

Conformément à la loi, les tâches du Ministère de la culture et de l'artse présentent comme suit : mettre en œuvre les moyens du progrès de laculture et de l'art, protéger et faire connaître l'héritage et la civilisation dupays en sauvegardant les œuvres culturelles, élever le goût et le niveau decompréhension artistique du peuple, promouvoir l'utilisation des moyensaudio-visuels, former des artistes et diffuser les arts tels que le cinéma, lamusique, le théâtre, la danse, etc.

A part les services administratifs et financiers, les sections les plus impor-tantes de ce ministère se présentent sous forme d'administrations générales.

Administration générale de l'archéologie et des traditions populaires. Estchargée d'examiner les œuvres anciennes découvertes par ses équipes et desuperviser le travail d'autres équipes archéologiques iraniennes et étran-gères. La section de la tradition populaire s'occupe de recueillir les élémentsdu folklore, les us et coutumes iraniens et les dialectes populaires.

Administration générale des musées et monuments historiques. Est chargéede sauvegarder les œuvres culturelles et artistiques en créant des musées, de

-recueillir et de conserver les objets anciens et de veiller à la réparation et àla conservation des monuments historiques.

Administration générale des bibliothèques. Est chargée de créer desbibliothèques publiques, d'établir des bibliothèques nationales, d'effectuerdes échanges de livres et de microfilms entre les bibliothèques, de mettreen œuvre les moyens nécessaires pour former des bibliothécaires qualifiés.

Administration générale des affaires cinématographiques. A pour fonc-tions de contribuer à l'avancement de l'art cinématographique et photogra-phique au moyen de films documentaires sur la culture de l'Iran et laconnaissance du pays, de fournir une assistance technique aux cinéastesiraniens et de surveiller la production de films et la présentation de filmsétrangers en Iran.

Administration générale de l'enseignement artistique. S'occupe de la direc-tion des affaires relatives à la création d'écoles spéciales d'art au niveausecondaire et supérieur, de la formation de maîtres et moniteurs d'art, dela surveillance des cours d'art libres, de l'enseignement de l'art dans lesécoles en collaboration avec le Ministère de l'éducation nationale.

Administration générale des créations artistiques. Est chargée d'assisterles artistes en leur accordant des subsides, des primes et des bourses ; elles'occupe de la formation de troupes et associations et du contrôle de l'exé-cution de la loi sur la protection des œuvres artistiques et littéraires.

Administration générale des activités artistiques. Est chargée de la diffu-sion de l'art dans les différentes couches de la population, dans les villes etdans les campagnes, au moyen de représentations de théâtre, musique,danse et des programmes de télévision ; elle supervise le fonctionnement del'Opéra de Téhéran, et des groupes de théâtre, de musique et de danse.

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Structure administrative et financière

Administration générale des activités audio-visuelles. Utilise les moyensaudio-visuels pour la diffusion de l'art et de la culture et distribue des films,des diapositives et des bandes magnétiques dans les écoles, les usines, etc. ;elle distribue aussi des films pour les cinémas itinérants dans les campagnes.

Administration générale des relations culturelles. Est chargée de faireconnaître la culture iranienne aux peuples des autres pays et, inversement,la culture et l'art étrangers aux Iraniens, par l'organisation d'expositions,l'échange de troupes et d'œuvres artistiques. De plus, le contrôle des acti-vités des attachés culturels et des maisons de la culture de l'Iran à l'étrangerest à la charge de cette administration.

Organisations affiliées au Ministèrede la culture et de l'art

Le Ministère de la culture et de l'art exerce sa surveillance sur quelquesautres organisations ayant leur indépendance budgétaire et administrative.Les plus importantes de ces organisations sont : l'Académie royale, l'Opérade Téhéran (salle Roudaki), le Conseil d'administration des bibliothèques,l'Organisation nationale du folklore, etc. Les fonctions de ces organisationsseront définies plus tard, avec la description de leurs activités.

Conseil supérieur de l'art et de la culture

Ce conseil, placé sous la présidence suprême de S. M. I. le Chahinchah,a été fondé par une loi spéciale en 1967. Il comprend les personnalitéssuivantes : le ministre de l'art et de la culture, le ministre de l'éducationnationale, le ministre de l'information, le ministre de la science et de l'ensei-gnement supérieur, ainsi que seize sociologues, économistes, psychologueset artistes, nommés pour quatre ans par firman royal.

Le conseil a essentiellement pour fonction de superviser l'exécution dela politique culturelle et de coordonner les activités des différentes organi-sations chargées de l'exécution de cette politique. Il dispose d'un secrétariatdirigé par un de ses membres faisant fonction de secrétaire général. Le secré-tariat a des services de recherche, de coordination, de publication et uncentre de documentation. D'autre part, il entretient des relations perma-nentes avec les organismes publics et privés du pays. En organisant réunionset séminaires, le secrétariat maintient des contacts permanents et person-nels avec un grand nombre d'artistes et d'écrivains et communique auconseil leurs pensées et opinions. Le secrétariat réalise également des étudessur les problèmes relatifs à l'héritage culturel de l'Iran et la diffusion de laculture. Le centre de documentation se tient au courant de l'activité cultu-relle des autres pays.

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Structure administrative et financière

Le secrétariat est en relation étroite avec l'Organisation du plan,chargée de l'élaboration du plan quinquennal, et il collabore à l'établisse-ment de la partie culturelle de ce plan.

Organisation nationale de la radioet de la télévision

La radio, créée il y a trente ans, faisait alors partie du Ministère de l'infor-mation. De même, la télévision était placée sous le contrôle de ce ministère.A l'heure actuelle, l'Organisation nationale de la radio et de la télévisionforme un organisme indépendant au point de vue administratif et budgé-taire ; elle est chargée du développement de son réseau, de la production etde la distribution de ses programmes.

Cette organisation est dirigée par une assemblée générale formée desministres de l'information, des finances, et des postes-télégraphe-téléphone.Elle a un conseil exécutif composé du ministre de la culture et de l'art,de cinq autres Tnitii.st.rfis et de cinq personnalités du monde culturel. Leministre de l'information est responsable de cette organisation devant leParlement.

Organisation pour la protection desmonuments historiques

En raison de l'immensité des actions nécessaires pour assurer la protectionet la restauration des monuments historiques qui, étant donné la longuehistoire de ce pays, sont très nombreux, une organisation nationale a étécréée. Elle a un budget indépendant et fonctionne sous la surveillance duministre de la culture et de l'art.

Cet organisme, conformément à un programme bien déterminé, s'occupede la restauration des monuments historiques et, par la création de comitésde protection des monuments historiques dans les villes et villages, encou-rage les bonnes volontés à participer à cette entreprise. Dans les localitéspossédant un monument historique, ces comités sont formés avec l'aide etla participation des autorités gouvernementales et locales.

Autres organisations culturelles

D'autres organisations gouvernementales prennent également part aux acti-vités culturelles du pays. Il s'agit principalement du Ministère des affairesétrangères (relations culturelles avec les autres pays et avec les organisa-tions internationales), du Ministère de l'éducation nationale (enseignementde l'art et de la culture dans les écoles), du Ministère de la science et del'enseignement supérieur (affaires culturelles et artistiques au niveau

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Structure administrative et financière

universitaire), et du Ministère des coopératives et affaires rurales (maisonsrurales de la culture).

De plus, certaines fondations culturelles et organisations privées s'oc-cupent aussi de la culture, et leur budget est assuré soit par des subsidesdu gouvernement, soit par des sources privées. On peut les énumérer commesuit : Section culturelle du Bureau spécial de S. M. I. la Chahbanou ; Sectionculturelle de la Fondation Pahlavi ; Organisation pour la formation intel-lectuelle et mentale des enfants et adolescents ; Fondation « Farhang Iran » ;société Assar Melli.

La description des activités de ces ministères, organisations et fondationssera faite au chapitre « Diffusion de la culture ».

Le budget des organisations culturelles provient, en principe, de troissources : budget ordinaire, crédits du plan et revenus particuliers de chaqueorganisation.

En 1970/71, le budget ordinaire du Ministère de la culture et de l'artétait de 547 179 000 riais1, dont 17,93 % étaient alloués à l'enseignement del'art, 42,66 % à la diffusion de la culture, 16,41 % à l'archéologie et à laprotection des monuments et 22,99 % aux services administratifs.

Dans la même année, 173 935 000 riais ont été mis à la disposition duMinistère de la culture et de l'art par l'Organisation du plan.

Les chiffres qui suivent donnent une idée de la totalité des sommesallouées aux organisations culturelles sur le budget ordinaire.

Le Ministère de la culture et de l'art, le Ministère de l'information, latélévision, l'Organisation pour la protection des monuments, le secrétariatdu Conseil supérieur de la culture, l'Organisation de l'opéra ont disposéen 1970 d'une somme de 4 010 522 000 riais.

Toutes les organisations mentionnées ci-dessus, plus le Ministère del'éducation nationale et le Ministère de la science et de l'enseignement supé-rieur, ont disposé en 1970 d'une somme de 22 680 374 000 riais.

Par conséquent, on peut estimer que 1 % environ du budget ordinairea été alloué en 1970 aux affaires culturelles.

D'autre part, il faut ajouter que les crédits prévus au IVe Plan quin-quennal (1968-1972) pour la culture et les moyens de communication deniasse se répartissent comme suit : Ministère de la culture et de l'art,1 500 millions de riais ; Télévision (création et développement de nouveauxréseaux), 1 900 millions de riais ; Radio (création et développement de nou-veaux réseaux), 1 220 millions de riais ; Tourisme-culturel (projet Unesco),300 millions de riais.

1. 72 riais = 1 dollar des États-Unis.

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Mise en valeur dupatrimoine culturel

Recherches archéologiques

Les recherches archéologiques montrent que le plateau iranien fut un despremiers habitats de l'homme et nous font découvrir aussi une période pré-historique pendant laquelle les Iraniens ont possédé des techniques trèsavancées.

Dès la période historique, et spécialement sous la domination desAchéménides, des Parthes et des Sassanides, la sculpture, l'architecture etl'urbanisme sont apparus ; au cours de la période islamique de notre his-toire l'architecture et la création artisanale ont pris un grand essor.

Les recherches archéologiques et les fouilles ont commencé en Iran à lafin du XIXe siècle, mais les fouilles effectuées jusqu'en 1930 ne sont pascomparables, du point de vue scientifique, à celles qui ont été faites aprèscette date. Dès 1891, une mission française entreprit, à Suse, des fouillesqui se poursuivent encore aujourd'hui. D'autres fouilles commencent àPersépolis, Pasargades, sur la colline de Sialk et dans les provinces du Farset de l'Azerbaïdjan.

Actuellement, toute opération de fouille est soumise à l'autorisation duMinistère de la culture et de l'art. Les excavations officiellement permisessont les suivantes : a) celles effectuées par des missions étrangères ou pardes groupes mixtes d'Iraniens et d'étrangers ; &) celles effectuées par leséquipes de l'Administration générale de l'archéologie et de l'Université deTéhéran ; c) celles effectuées par des groupes privés avec l'autorisationspéciale du Ministère de la culture et de l'art.

Il faut ajouter à cette liste les découvertes accidentelles de certainsobjets au cours de forages et excavations.

Toutes ces fouilles sont effectuées sous le contrôle de l'Administrationgénérale de l'archéologie. En ce qui concerne les missions étrangères ou leséquipes privées, le partage des objets trouvés se fait suivant des règlementsspécifiques. L'autorisation accordée aux équipes privées est due au fait que

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Mise en valeur du patrimoine culturel

l'Iran, offre des possibilités immenses. D'autre part, cette autorisationempêche les activités frauduleuses et a donné jusqu'ici des résultats excel-lents. Dans le passé, à part quelques cas exceptionnels, le but des fouillesétait la découverte d'objets. Ce n'est qu'après la seconde guerre mondialeque les fouilles entreprises par des équipes étrangères et iraniennes ont prisun caractère méthodique et scientifique.

D'autre part, l'expansion des travaux d'urbanisme et d'aménagementdu territoire a exigé de nombreuses excavations qui ont amené à faire desdécouvertes accidentelles.

Le Ministère de la culture et de l'art se propose d'encourager à l'avenirles excavations internationales et d'inviter des groupes mixtes d'archéo-logues de plusieurs pays à venir travailler dans une région déterminée.

En vue de l'exécution des projets susmentionnés, un Institut nationald'archéologie et d'histoire de l'art, affilié au Ministère de la culture et del'art, vient d'être créé.

Protection et expansion de la langue persane

La langue persane constitue une partie importante de l'héritage culturel del'Iran. Les langues iraniennes sont formées de tous les dialectes parlés sur leplateau iranien depuis l'immigration des Aryens. La langue persane estdérivée des langues indo-iraniennes, qui elles-mêmes sont d'origine indo-européenne. Des anciennes langues iraniennes découlent la langue avesta,l'ancien persan et les autres langues anciennes. La langue moderne com-prend le persan et les dialectes aryens de l'Iran d'aujourd'hui et des paysvoisins.

La langue persane est celle dans laquelle la très riche littérature post-islamique a été écrite et, bien qu'ancienne, c'est une langue vivante et riche.Dernièrement, elle a montré sa souplesse et sa capacité d'exprimer lesconcepts scientifiques, sociaux, techniques et industriels.

La langue persane n'a pas été seulement limitée aux frontières politiquesdu pays. Pendant longtemps, la poésie persane a été récitée jusqu'en Chineet en Indonésie ; pendant de longues années elle a été la langue de la cour del'Inde. Même maintenant, elle se parle dans nombre de pays voisins del'Iran (Tadjikistan, Afghanistan, Inde et Pakistan), où la plupart des écri-vains et poètes célèbres s'expriment en persan.

Différentes organisations iraniennes, dont la plus importante est l'Aca-démie royale de la langue persane, travaillent dans ce domaine. L'Académieroyale comprend, outre des académiciens, plusieurs groupes de chercheursqui s'occupent de la langue et de la grammaire. D'autres groupes s'inté-ressent aux dialectes des différentes régions. L'Institut Dehkhoda, affilié àl'Université de Téhéran, travaille depuis de longues années à la mise aupoint d'un dictionnaire, dont plusieurs volumes ont déjà été publiés.

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Mise en valeur du patrimoine culturel

Sauvegarde des monuments historiques

Comme il a été indiqué plus haut, l'Organisation pour la sauvegarde desmonuments historiques et plusieurs associations créées pour assurer cettesauvegarde s'occupent, dans les villes et les villages, de la restauration desmonuments, sous le contrôle du Ministère de la culture et de l'art. La plu-part de ces monuments (ponts, mausolées, palais) ont été enregistrés et sontrestaurés ou en cours de restauration. Toutefois, étant donné leur grandnombre, il reste encore beaucoup à faire.

Une partie du projet « Tourisme culturel » de l'Unesco, exécuté avec lacollaboration du gouvernement iranien, a trait à la restauration des grandsmonuments historiques.

L'Université nationale de l'Iran, en collaboration avec l'Université deFlorence, a organisé un cours spécial de restauration et les étudiantsdiplômés et spécialisés dans cette branche pourront être d'une grande aide.

Manuscrits

Une des sources de l'héritage culturel iranien est constituée par de nom-breux manuscrits scientifiques, philosophiques et littéraires éparpillés enIran et dans d'autres pays. On en trouve dans les bibliothèques et musées dumonde entier. En Iran, des démarches ont été faites au cours des quarantedernières années pour rassembler et imprimer ces manuscrits. Plusieursgrandes bibliothèques, dont la Bibliothèque impériale et la bibliothèque del'Université de Téhéran (qui possède 12 000 manuscrits), la bibliothèquedu Parlement (qui possède 14 000 manuscrits), la bibliothèque du Sénat etla bibliothèque de Méched sont chargées de ce travail.

D'autre part, on s'est efforcé de faire des microfilms des manuscritsrenfermés dans des collections privées en Iran et dans les autres pays. LeMinistère de la culture et de l'art, l'Université de Téhéran et d'autresorganismes complètent ce travail en établissant des bibliographies de cesmanuscrits.

Un autre projet est en cours de réalisation qui prévoit la création àTéhéran d'archives destinées à abriter des manuscrits. Les livres apparte-nant à l'État y seront déposés ; des bibliothèques et même des personnesprivées pourront également y déposer leurs livres pour qu'ils soient à l'abrides accidents.

Recherches ethnologiques

On peut distinguer trois périodes dans l'évolution de la recherche ethnolo-gique en Iran.

Une première période, commençant au xvin6 siècle, où les voyageurs etles géographes, pratiquant une ethnologie empirique, ont décrit certains

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Mise en. valeur du patrimoine culturel

aspects particuliers de la vie des nomades, des paysans et des citadins, quileur paraissaient simplement pittoresques.

Une deuxième période, se situant entre les deux guerres mondiales, aucours de laquelle certains anthropologues ou iranologues allemands, anglais,français et russes se sont livrés à titre individuel à des travaux scientifiquessur l'Iran : études d'anthropologie physique, études sur les croyances et lescoutumes. Leurs ouvrages ont été publiés soit entre les deux guerres, soittout de suite après la seconde guerre mondiale.

Au cours de la troisième période, les Iraniens eux-mêmes se sont attachésà connaître scientifiquement leur pays.

Actuellement, nous pouvons distinguer plusieurs tendances dans larecherche ethnologique. Des études sont réalisées sur la base d'observa-tions recueillies. Les différents départements de l'Institut d'études et derecherches sociales de l'Université de Téhéran entreprennent des travauxinterdisciplinaires sur les tribus et les villages où l'aspect ethnologique estévoqué, ainsi que des études proprement ethnologiques. Enfin, le Départe-ment des arts et traditions populaires du Ministère de la culture et de l'art,fondé il y a une dizaine d'années, organise des enquêtes, en prélevant unéchantillonnage dans différentes régions, afin d'acquérir une connaissanceaussi complète que possible de la vie rurale et pastorale. Ce départementespère avoir bientôt étudié le pays tout entier. Il assure en même temps ladiffusion de questionnaires destinés à apporter des dossiers plus approfondissur les structures sociales, les liens de parenté, l'écologie, l'adaptation despaysans aux changements sociaux, etc.

La conception et l'orientation actuelles des recherches ethnologiquesen Iran visent à une meilleure connaissance des populations afin de mettrel'ethnologie au service de l'expansion. Il s'agit donc là à la fois d'unedémarche relevant de 1' « ethnologie d'urgence » et d'une contribution à lasociologie du développement.

La création artisanale

La création artisanale est l'un des traits permanents de la culture iranienne :la renommée des tapis n'est plus à faire, l'Iran possède pratiquement lemonopole mondial des meilleurs dessins et des meilleurs tissages. Les tapisoccupent une place privilégiée parmi les exportations iraniennes. On en tissepresque partout : dans les villes, les villages, sous la tente des nomades.L'État essaie, par la création de « sociétés de tapis », de préserver la qualitéde cet art en fournissant des modèles.

Les autres créations artisanales comme le tissage, le travail du verre, letravail du métal, l'orfèvrerie, la céramique, le travail du bois, répandus danstout l'Iran, constituent l'une des ressources importantes des paysans et deshabitants de certaines villes. Nulle part ailleurs, peut-être, on ne trouve untel équilibre entre les travaux champêtres et les créations artisanales.

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Mise en valeur du patrimoine culturel

La politique d'aide de l'État se manifeste par la collaboration du Minis-tère de la culture et de l'art, qui assure la qualité des œuvres par l'intermé-diaire des ateliers, et du Ministère de l'économie, qui aide les producteurs encréant des coopératives de production et en développant des marchés inté-rieurs et extérieurs. Ces coopératives revêtent une importance particulièreen mettant les producteurs individuels à l'abri des fluctuations des prix desmatières premières et des spéculations des intermédiaires. Elles vendent àleurs membres des matières premières à des prix pondérés et achètent leurproduction à juste prix. Cette politique est appelée à se maintenir longtempsencore en raison du très grand nombre d'artisans.

La plupart des produits artisanaux répondent aux besoins de la consom-mation dans les domaines vestimentaires et ménagers. Leur meilleure diffu-sion permet, d'une part, de soutenir une activité économique nationale,ressource majeure d'une catégorie très nombreuse d'habitants, d'autre part,de diminuer les importations et, enfin, de contribuer à la préservation dupatrimoine artistique.

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Diffusion de la culture

Films et cinéma

Le cinéma est un des loisirs les plus appréciés de la population urbaine del'Iran. On peut dire que dans la majorité des villes de plus de 20 000 habi-tants et, même, dans certaines régions, des villes de plus de 5 000 habitants,il y a une salle de cinéma. Les films! étrangers sont tous doublés en persan,mais ce sont surtout les films iraniens qui obtiennent un grand succès auprèsde la population. Depuis quelques décennies, l'Iran produit des films. Maisc'est surtout au cours de la dernière que leur nombre et leur qualité ontprogressé : 65 films iraniens ont été projetés sur les écrans en 1971. C'estsurtout le secteur privé qui investit dans la production de ces films. L'in-vestissement d'Etat, sauf quelques exceptions, concerne les films docu-mentaires (œuvres d'art, traditions, développement économique et socialde la nation), et les films éducatifs concernant l'hygiène, l'agriculture,l'élevage, etc.

Des prix annuels, décernés par le Ministère de la culture et de l'art,récompensent les meilleurs films, acteurs et actrices.

Au cours des dernières années, des films ont été réalisés en coproduction.Le secteur privé iranien y porte de l'intérêt.

Les jeunes réalisateurs iraniens s'intéressent à la création de films pourenfants et de dessins animés.

En Iran comme ailleurs, le problème se pose d'assurer un équilibre har-monieux entre les films commerciaux et les films d'art. La majorité desfilms est encore commerciale mais, au cours de la dernière année, lesconditions d'élaboration des films d'art ont été améliorées.

L'intérêt de la population iranienne urbaine pour le cinéma va croissantsans que le développement de la télévision n'y fasse obstacle. Les prix desplaces sont modiques. Ainsi, toutes les couches de la population peuvent yavoir accès. Pour la grande majorité, le cinéma n'est encore qu'une forme deloisir, mais il ne faut pas oublier l'importance de l'influence culturelle qu'il

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Diffusion de la culture

exerce en présentant de nouveaux modèles d'attitudes et de vie dans unesociété en transition.

Les acteurs les plus populaires du cinéma iranien connaissent un trèsgrand succès ; ce sont des « idoles », dont les couches populaires remarquentles costumes et les manières de vivre.

Il existe plusieurs revues spécialisées de cinéma et les revues hebdoma-daires lui consacrent plusieurs pages.

Outre les films iraniens, ce sont surtout les films indiens, américains etitaliens qui connaissent le succès.

Le cinéma itinérant existe depuis longtemps : des projections de docu-mentaires, de films éducatifs et, quelquefois même, de longs métrages ontlieu dans les villages, même les plus isolés.

Récemment, le cinéma d'amateur a éveillé l'intérêt des jeunes : quelquesuniversités ont fondé des clubs. La télévision iranienne diffuse ces films.

Des ciné-clubs existent à Téhéran et dans certaines villes. Par leur inter-médiaire, l'élite se met au courant des films d'avant-garde et des grandsfilms de l'histoire du cinéma.

Concernant la distribution des salles, on peut proposer les évaluationssuivantes : 49,6 % des salles se trouvent dans les villes de 100 000 habitantset plus, 25,8 % dans les villes de 25 000 à 100 000 habitants, 20,3 % danscelles de 5 000 à 25 000 habitants, 4,3 % dans celles de moins de 5 000 habi-tants. Téhéran possède un fauteuil pour 30 habitants en moyenne, mais,dans certains de ses arrondissements, la proportion est d'un fauteuil pour3 habitants et, dans d'autres, d'un fauteuil pour 226.

D'après une première enquête, on peut apporter les précisions suivantessur les spectateurs de cinéma de Téhéran : 45 % de la population a déclaréaller au cinéma ; parmi eux, 11 % y vont plusieurs fois par semaine,34 % une fois par semaine et le reste une ou deux fois par mois.

Vont au cinéma : 82 % des personnes ayant fait des études de niveausupérieur et 78 % de celles qui ont fait des études de niveau secondaire.Les hommes y vont plus souvent que les femmes : 54 % des hommes contre38 % des femmes. Les employés et les fonctionnaires y vont plus que lesprofessions libérales et les ouvriers plus que toutes les autres catégories.

Les films qui remportent le plus grand succès sont les comédies ; puisviennent les films historiques, les policiers et les westerns.

Pour chacune des trois dernières années, 400 à 450 films en moyenne ontété projetés pour la première fois et 2 000 films au total ont paru sur lesécrans.

Chaque cinéma de Téhéran a montré, en moyenne, 50 à 60 films par anet chaque cinéma de province 70. Chaque cinéma de Téhéran a montré de17 à 20 films iraniens et pour le reste des films étrangers ; en provincechacun a projeté 28 films iraniens et pour le reste des films étrangers. Cer-tains cinémas sont spécialisés dans les films iraniens, surtout dans les quar-tiers populaires, à Téhéran comme en province, et d'autres n'en présententaucun.

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Diffusion de la culture

Livres et bibliothèques

Le développement des bibliothequ.es publiques a été assez important aucours de ces dernières années. On peut en chercher les causes, d'une part,dans l'effort de scolarisation et l'augmentation du nombre des élèves et desétudiants et, d'autre part, dans l'augmentation du nombre des publicationsen langue persane.

On peut classer ainsi les bibliothèques les plus importantes :Bibliothèques publiques. Elles sont administrées par un haut comité indé-

pendant composé de personnalités et présidé par le ministre de la cultureet de l'art. Ce comité dispose de 1,5 % des taxes municipales pour créeret développer les bibliothèques.

Bibliothèques publiques administrées directement par le Ministère de laculture et de l'art.

Bibliothèques pour l'enfance et la jeunesse. Elles sont administrées parl'Association pour la promotion culturelle et l'enfance. Le nombre de cesbibliothèques s'accroît constamment dans toutes les provinces d'Iran.L'association a publié au cours des dernières années beaucoup de livresd'enfants très réussis. Les enfants sont abonnés à ces bibliothèques etpeuvent emporter les ouvrages à domicile. On y organise également desséances de lecture, de narration et de musique.

Bibliothèques universitaires. Elles se multiplient par suite du développe-ment des universités. Les plus riches sont la Bibliothèque centrale et labibliothèque de la Faculté des lettres de l'Université de Téhéran et lesbibliothèques des facultés des lettres de l'Université Pahlavi à Chiraz,des universités d'Ispahan et de Tabriz.

Bibliothèques spécialisées. Quelques bibliothèques ont une importance par-ticulière en raison de la quantité et de la qualité de leurs dotations ;ainsi, la bibliothèque du Sénat, la bibliothèque de la Chambre desdéputés et la bibliothèque du Mausolée de l'imam Réza à Méched.

Bibliothèque nationale de Téhéran.Bibliothèques des mosquées et des écoles religieuses.Bibliothèques des lycées.Bibliothèques privées. Quelques bibliothèques sont surtout connues pour

leurs manuscrits, à Téhéran, Ispahan, etc.Il faut aussi souligner le rôle des bibliothèques itinérantes qui ont été

récemment associées au cinéma itinérant. La voiture qui transporte le maté-riel de projection contient également des livres qui sont prêtés aux paysanspour une période allant d'une quinzaine de jours à un mois.

Aux universités de Téhéran et de Tabriz des cours spéciaux pour la for-mation des bibliothécaires sont organisés au niveau de la licence et de lamaîtrise. Un centre spécialisé, rattaché au Ministère des sciences et del'enseignement supérieur, prépare des fiches bibliographiques pour tous leslivres imprimés en Iran.

Il existe des revues spécialisées dans la bibliographie et les comptes

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Diffusion de la culture

rendus critiques. Le nombre de bibliographies détaillées de manuscritsappartenant aux différentes bibliothèques va croissant.

La qualité des éditions, de l'impression et de la reliure ne cesse des'améliorer.

Apparus en Iran depuis quelques années, les livres de poche sont trèsfavorablement accueillis.

Sauf à l'Université Pahlavi, qui est bilingue, toutes les universitésenseignent les sciences et les techniques en persan. Les savants iraniensaccomplissent un effort considérable et couronné de succès pour créer unvocabulaire persan relatif atix sciences et aux techniques modernes. Il existedéjà des milliers d'ouvrages scientifiques et techniques dans cette langue.

La majorité des livres est imprimée et éditée par le secteur privé. Leslivres scolaires, surtout primaires (plus de vingt millions d'exemplaires paran), sont imprimés par une organisation semi-publique. Le Ministère de laculture et de l'art et certaines universités, surtout celle de Téhéran, sonteux-mêmes éditeurs. Quelques fondations spéciales éditent avec l'aide del'État les œuvres littéraires, philosophiques et scientifiques qui font partiedu patrimoine culturel iranien, ainsi que les traductions des chefs-d'œuvreétrangers.

Festivals

II faut évoquer ici deux festivals d'art et deux festivals de cinéma.Le Festival de la culture et de l'art se déroule chaque année, durant

deux semaines, au mois d'octobre, dans l'Iran tout entier, sous la forme decongrès, de séminaires, de représentations théâtrales et de concerts. L'andernier, douze groupes théâtraux ont monté des pièces dans de petites villesde province. On envisage d'étendre ultérieurement aux villages cette mani-festation. Le but de ce festival est d'entreprendre une action intense dansune courte période pour diffuser la culture et les arts, surtout parmi lespopulations qui n'ont pas la possibilité d'en profiter de façon continue aucours de l'année. Sur la proposition de l'Iran, la Conférence générale dePUnesco, lors de sa seizième session, a recommandé à tous les États d'essayerd'organiser ce genre d'activité tous les ans dans leur propre pays.

L'autre festival est celui de Chiraz. Il a pour but de créer un pont entrel'Orient et l'Occident. Ce festival en est à sa quatrième célébration. Il a lieuà Chiraz et à Persépolis à la fin de chaque année. Des groupes célèbresd'artistes asiatiques, africains, européens et américains s'y produisent. Cefestival est en train d'acquérir une renommée mondiale à cause des œuvresd'avant-garde et des œuvres expérimentales de musique et de théâtre quiy sont présentées.

Les festivals de cinéma sont : le Festival international des films pourenfants, qui a Heu chaque année à Téhéran et auquel participent vingt àtrente pays ; le Festival des films iraniens, dont nous avons parlé au cha-pitre concernant le cinéma.

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Diffusion de la culture

Musées

On peut en distinguer trois catégories :Les musées archéologiques, très importants en raison de la richesse des sites

et de l'avancement des fouilles. Les principaux sont le Musée archéo-logique de Téhéran, avec ses trésors préhistoriques, préislamiques etislamiques, et les musées archéologiques de Persépolis, Suse, Chiraz,Ghazvin, Ispahan et Abadan.

Les musées rattachés aux sanctuaires, principalement à Méched et à Qhom.Ces musées, très riches au point de vue de l'art islamique, voient lenombre de leurs visiteurs multiplié par les pèlerinages.

Un troisième groupe comprend diverses sortes de musées, tels que le Muséeethnologique de Téhéran, le Musée du palais Golestan, le Musée desjoyaux de la couronne, le Musée des arts nationaux et le Musée des artsdécoratifs de Téhéran. Dans un prochain avenir on inaugurera le Muséedu tapis à Téhéran.

En tout vingt-deux musées sont ouverts en Iran.

Centres culturels

Si l'on appelle centre culturel un lieu où un groupe d'individus qui seconnaissent dialoguent et s'entretiennent des problèmes et des manifesta-tions culturels, la mosquée réunissant plusieurs fois par jour les fidèles etles maisons de thé répondent à cette définition. La majorité des hommesfréquente quotidiennement la maison de thé, à la ville comme à la cam-pagne. Là, chaque soir, le « maître » conte, chante et mime l'épopée nationalede l'Iran (le Livre des rois de Firdusi) aussi bien que des poèmes lyriques.Les murs sont couverts de peintures montrant des scènes épiques ou reli-gieuses, traitées dans la manière propre à F « école des maisons de thé ». A ladifférence des autres lieux de réunion, café ou brasserie par exemple, c'estcomme un rituel qu'on y célèbre. Toutes les classes sociales, sans ségréga-tion, y ont accès. On y observe les règles d'une certaine tenue : les vieuxbénéficient d'un respect particulier, on sollicite du « maître » des conseils detout ordre. C'est donc là le lieu des dialogues et des discussions professionnels,sociaux et politiques.

Récemment, la télévision y a fait son entrée et, depuis, elle fait concur-rence au « maître ». Dans les services officiels de la culture quelques-unspensent qu'on pourrait transformer ces maisons en centres culturels actifs.Quelques expositions de peinture et des bibliothèques qu'on y a déjà orga-nisées ont donné des résultats encourageants.

Quant aux centres culturels modernes, ils sont de plusieurs types.Les maisons de culture urbaines, peu nombreuses et considérées comme des

centres expérimentaux, réunissent des groupes de théâtre, de musique,des groupes d'amateurs de photographie, d'échecs, etc. Leur principale

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5. Mosquée de « Vendredi-Djamei », Ispahan.

6. Mosquée Gohar Chad, Méched.

7. Musée archéologique de Téhéran (nouveau bâtiment).

8. Opéra de Téhéran : « salle Roudaki ».

Toutes les illustrations proviennent duMinistère de la culture et de l'art d'Iran

Diffusion de la culture

activité consiste en cours libres de musique et d'arts plastiques. Cer-taines villes possèdent des centres culturels de quartier. La politique àlong ternie consiste à créer une grande maison de la culture dans la villeprincipale de chaque département pour qu'elle serve ensuite de centred'où essaimeront d'autres établissements qui s'installeront dans les villessecondaires comme dans les quartiers des grandes villes. A leur tour, cescentres secondaires assisteront les maisons de la culture rurales, ache-vant ainsi de constituer un réseau complet.

Les maisons de la culture rurales sont actuellement en train de dépasser lenombre de 350 dans les villages. Elles se composent d'une ou deux piècespourvues d'une petite bibliothèque, de la radio et, quelquefois, de latélévision. Les « sépahi du savoir » (jeunes bacheliers ou licenciés qui fontleur service militaire dans les campagnes pour vaincre l'analphabétisme)animent ces centres avec l'aide de quelques villageois. Les maisons de laculture rurales sont aussi le lieu des réunions du Comité des coopérativesagricoles et c'est là qu'on donne à la population des informations concer-nant les travaux agricoles, l'hygiène de la femme et de l'enfant et laplanification familiale.

Les maisons des jeunes existent dans quelques quartiers de Téhéran et dansquelques autres villes. Elles organisent diverses manifestations : théâtre,concerts, films, conférences.

Des maisons des jeunes affiliées au « Lion et Soleil rouge » (correspondantiranien de la Croix-Rouge) se rencontrent dans la majorité des villesd'Iran. Leurs membres sont surtout des élèves de l'enseignement secon-daire qui, tout en s'initiant aux méthodes d'assistance sanitaire et d'aidesociale, contribuent ici à l'animation artistique et culturelle.

Les centres culturels des universités, ainsi que les centres culturels des asso-ciations culturelles entre l'Iran et les pays étrangers, parachèvent cetteorganisation.

Arts plastiques

A partir de la fin du XIXe siècle, la peinture et la sculpture occidentales ontpénétré en Iran. Mais la tournure qu'a prise la peinture iranienne depuisune vingtaine d'années est tout à fait différente de celle du début du siècle.Les séjours de plus en plus prolongés des artistes iraniens en Europe intro-duisent dans notre peinture l'influence des écoles modernes. Etant donnéle traditionalisme artistique, l'art moderne a tout d'abord essuyé un refusquasi absolu de la part du public et de la majorité des artistes. Mais,au cours des années, artistes et connaisseurs d'art découvrent dans l'artmoderne iranien soit une adaptation de la miniature traditionnelle, soitl'empreinte de la calligraphie persane ou, finalement, un retour à Fart orne-mental et bidimensionnel. Ainsi l'art moderne acquiert droit de cité et sepopularise chaque jour davantage. Un mouvement original s'esquisse quidistingue l'art moderne iranien de celui des autres pays.

33

Diffusion de la culture

Quant à la sculpture, elle aussi a. évolué, bien qu'à un rythme beaucoupplus lent que la peinture. Cela provient du fait épie l'Islam a interrompu lapratique régulière de cette forme d'art en Iran, ainsi que la tendance orne-mentaliste de l'art persan dans lequel les surfaces décoratives revêtent uneimportance plus grande que le volume. De nos jours encore peu d'artistess'adonnent à la pratique systématique de la sculpture. Par contre, nom-breux sont les fervents de la céramique et des pièces intéressantes ont étéréalisées dans ce domaine, dont la plupart sont des œuvres en terre cuiteémaillée qui tiennent à la fois de la sculpture proprement dite et de lacéramique.

Il y a une trentaine d'années, on a créé des écoles de peinture au niveausecondaire et aussi les départements de peinture et de sculpture des facultésdes beaux-arts. Après la deuxième guerre mondiale, les jeunes peintres sesont intéressés aux écoles modernes et aux expériences de la peinturemoderne et d'avant-garde. Aujourd'hui, beaucoup de peintres iraniensconnaissent un grand succès dans les expositions internationales. Certainstravaillent en Europe et aux États-Unis d'Amérique.

L'intérêt des amateurs et des acheteurs n'a cessé de croître et Téhéranpossède actuellement onze galeries permanentes d'exposition.

• Les arts décoratifs modernes, dans ce pays déjà doté d'une si riche tra-dition, connaissent un développement particulièrement heureux. La Facultédes arts décoratifs forme chaque année des spécialistes, surtout dans ledomaine des arts graphiques.

Musique

On peut distinguer aujourd'hui trois types de musique en Iran. La musiquetraditionnelle, vieille de plusieurs siècles, est en relation intime avec lapoésie : elle repose sur des règles scientifiques que les spécialistes iranienset étrangers ont dégagées au cours de ces. dernières années et qu'ils ontcomparées, au cours de plusieurs réunions (parfois organisées sous l'égidede l'Unesco), avec les autres musiques traditionnelles d'Asie. Cette musiquetrès riche, connue de toujours par les citadins, revit grâce à la radio et à latélévision qui la diffusent dans le pays tout entier. Le Conservatoire demusique traditionnelle forme, depuis de nombreuses années, des composi-teurs et des instrumentistes. Leurs œuvres sont jouées avec un grand succèsdans les grands festivals internationaux.

La musique folklorique est très riche, en raison de la variété des cou-tumes locales. Elle est largement diffusée, elle aussi, parles moyens modernesde communication. Les danses folkloriques ont fait leur entrée sur les scènesdes théâtres urbains.

La musique occidentale, sous la forme classique, pop, et sous celle dujazz, a conquis une place de premier plan au cours des dernières décen-nies et a particulièrement séduit les jeunes couches de la population urbaine.

34

Diffusion de la culture

Le Conservatoire de musique classique ainsi que le Département de musi-que de la Faculté des beaux-arts de l'Université de Téhéran en assurentl'enseignement.

L'opéra et le ballet commencent à être appréciés en Iran. La création del'Opéra de Téhéran, il y a cinq ans, y a beaucoup contribué. Des programmesréguliers sont établis sur le modèle des répertoires internationaux et crééspar des artistes iraniens. Un orchestre symphonique, l'orchestre de l'opéraet quelques orchestres de chambre jouent régulièrement.

Une chaîne de radio diffuse en stéréophonie les programmes de musiquetraditionnelle et classique et toutes les autres chaînes présentent aussi desprogrammes musicaux.

Les trois émetteurs de Téhéran ont diffusé l'an dernier 8 755 heures etles émetteurs de province 18 142 heures de musique. Le pourcentage desprogrammes musicaux. dans l'ensemble des programmes était de 49,2 %pour Radio-Iran, de 90 % pour Radio-Téhéran et de 100 % pour l'émet-teur FM de Téhéran.

Les programmes musicaux étaient répartis de la façon suivante entrela musique iranienne et la musique étrangère : Radio-Iran : musiquetraditionnelle, 90,5 % ; musique étrangère, 6,9 % ; musique folklorique,2,6 % ; Radio-Téhéran : musique traditionnelle, 11,3 % ; musique étran-gère, 88,7 %. (Le pourcentage était le même pour les émetteurs deprovince.) - .

Les chiffres pour la télévision sont de 974 heures de musique par an(dont 362 heures de musique traditionnelle).

La production et l'importation de. disques sont en augmentation ; la pro-duction des disques 45 tours à prix modique assure un contact sans cesseélargi avec les couches populaires.

Théâtre .... .

Avant l'arrivée en Iran du théâtre occidental, il existait déjà plusieursformes traditionnelles de spectacles : le théâtre religieux, le spectacle popu-laire, les représentations de bateleurs, le théâtre des ombres (bazi-khial) et,enfin, le théâtre de marionnettes.

Le théâtre religieux (taziê) était le plus important. Téhéran et les prin-cipales villes possédaient d'immenses édifices pour permettre ce genre dereprésentations, qui nécessitait des orchestres, des centaines d'exécutants etd'acteurs, des chevaux, une gigantesque mise en scène, etc. Dans les cam-pagnes, on organisait des spectacles semblables, mais de proportions plusmodestes, joués par les paysans eux-mêmes.

Cette forme de théâtre existe encore dans les villes de province et dansles villages. Les pièces sont écrites par des auteurs anonymes, souvent envers. Les représentations ont lieu en plein air, sur les places publiques oudans les théâtres nommés tahiê. Au centre est placée une estrade carrée ou

35

Diffusion de la culture

ronde (foi sert de scène. Elle est ouverte de tous les côtés et dépourvue dedécor. Les représentations durent pendant des heures entières et les rôlesféminins sont joués par des hommes.

Outre le taziê, il existe des représentations de sujets religieux, maisayant un caractère satirique. On y montre, en les ridiculisant, les ennemisdu Prophète.

Le nemayech est un théâtre de libre improvisation dont la base essen-tielle est toujours la clownerie. La haute bourgeoisie ne fréquente pas cethéâtre mais, contre une rémunération modique, invite toute la troupe àvenir donner des représentations à domicile. Le décor est inexistant ; untapis suspendu sert de toile de fond. Les pièces sont improvisées par lesacteurs au cours de l'action ; elles sont accompagnées de danses comiques.Les troupes se composent généralement de cinq ou six artistes. Le directeurpropose un sujet quelconque : sur ce canevas, les acteurs brodent, laissantlibre cours à leur imagination1.

Au cours des premières années du XXe siècle, le théâtre occidental estapparu en Iran avec des pièces de Molière et de Corneille traduites en persanet adaptées. A partir de la même date se sont fondés des groupes théâtrauxet quelques salles permanentes à Téhéran. Parallèlement, des pièces ont étéécrites en persan. Mais c'est surtout après la seconde guerre mondiale quele théâtre moderne, occidental et persan, a pris son essor.

Aujourd'hui, les salles permanentes se multiplient, même en province,ainsi que le nombre des spectateurs.

Le Ministère de la culture et de l'art a créé, à Téhéran, un théâtre oùl'on ne montre que des pièces iraniennes modernes et il aide les groupeslibres d'acteurs qui créent des pièces étrangères traduites. Depuis quelquesannées, l'Iran a des groupes de théâtre expérimental et moderne, aussi biendans le domaine du théâtre persan que dans celui du théâtre étrangerd'avant-garde.

Le Ministère de la culture et de l'art et la Télévision nationale de l'Iranont créé deux ateliers appropriés à ces travaux expérimentaux.

Le Conservatoire d'art dramatique forme des acteurs, des metteurs enscène et des techniciens au niveau de la licence et de la maîtrise et, récem-ment, un « département du théâtre » a été créé à la Faculté des beaux-artsde l'Université de Téhéran. La radio, depuis trente ans, et la Télévision,depuis quelques années, montent des pièces de théâtre qui connaissent unlarge succès. Depuis deux ans, les centres d'éducation artistique, établisdans les grandes villes de province, aident les amateurs à se perfectionnerdans l'art dramatique.

1. M. REZVANI, Le théâtre et la danse en Iran, Paris, Maisonneuve et Larose, 1962.

36

Diffusion, de la culture

Télévision

Le premier émetteur de télévision en Iran fut un émetteur commercial.Actuellement, l'Organisation nationale de la radio-télévision jouit du mono-pole de la diffusion, avec trois chaînes à Téhéran (dont une éducative)et sept dans les provinces. Les chaînes de Téhéran diffusent environ7 000 heures de programmes par an et les chaînes de province diffusententre 3 et 5 heures par jour.

Le nombre des récepteurs est estimé à 450 000. Considérant que lesfamilles possédant la télévision sont des familles plus nombreuses que cellesqui en sont dépourvues, et si l'on tient compte des relations des famillesentre elles et avec leur voisinage, on peut se figurer l'agrégat humain qui estatteint par les messages de la télévision. Parmi les familles possédant latélévision beaucoup reçoivent régulièrement des gens n'appartenant pas àla famille qui viennent la regarder. Si nous ajoutons à ce nombre celui desgens qui sont invités irrégulièrement, nous nous rendons compte du rôlejoué par la télévision dans la création et le renforcement des relations aussibien sociales que familiales.

Les chiffres suivants montrent l'utilisation de la télévision par des tiers :9,5 % des familles possédant la télévision reçoivent régulièrement 1 télé-spectateur ; 13,5 %, 2 téléspectateurs ; 13,5 %, 3 téléspectateurs ; 17,5 %,4 téléspectateurs ; 11,5 %, 5 téléspectateurs ; 8,5 %, 6 téléspectateurs ;14,5 %, 7 téléspectateurs et plus ; et 11,5 % des familles reçoivent unnombre de téléspectateurs non défini.

Sachant que, dans la section « 7 téléspectateurs et plus », le nombre destéléspectateurs s'élève à 10, 13 et parfois 21, l'on se rend compte que devéritables clubs de télévision se forment au sein des foyers.

De l'ensemble des familles, 89,3 % ayant la télévision la regardent tousles jours et les 10,7 % restant la regardent irrégulièrement.

Si nous considérons le nombre d'heures consacrées par les familles à latélévision (de 0 à 13 heures durant les jours ordinaires), nous constatons quechaque famille regarde en moyenne la télévision pendant 5 h 3' 20" parjour. La médiane se situe entre 4 h 30 et 5 heures.

Le nombre d'heures consacrées par chaque famille à la télévision s'éta-blit de la façon suivante : jusqu'à 2 heures, 10,4 % des familles ; de 2 à3 heures, 13,5 % ; de 3 à 4 heures, 17,2 % ; de 4 à 5 heures, 15,5 % ;de 5 à 6 heures, 12,8 % ; de 6 à 7 heures, 13,5 % ; plus de 7 heures, 17,1 %.

Quant à la comparaison entre le cinéma et la télévision, le nombre desgens qui ont avoué, dans les provinces, préférer la télévision au cinéma estsans conteste supérieur à celui qui ont placé le cinéma avant la télévision.Ces mêmes gens ont également déclaré préférer la télévision au cinéma parcequ'elle est d'accès plus facile (56 à 59 %), plus économique (environ 15 %),que les programmes sont plus moraux et plus instructifs (6 à 11 %), etc.

En vue de procéder à l'étude des changements causés par l'introductionde la télévision au foyer, il a été demandé aux habitants de Téhéran si son

37

Diffusion de la culture

entrée dans leurs foyers avait ou non modifié leur façon d'occuper leursloisirs. Des gens interrogés, 84 % ont reconnu (jue leur mode de vie avaitchangé et les 16 % restants ont nié tout changement.

Par ailleurs, 73 % des personnes interrogées sur la nature de ces chan-gements ont déclaré cpi'ils s'étaient opérés sur le plan du divertissement,23 % sur le plan de l'instruction et de la morale et 4 % dans d'autresdomaines1.

Radio

Le premier émetteur de radio a été inauguré en 1940 à Téhéran. Actuelle-ment Téhéran possède 3 émetteurs et les provinces en possèdent 12. Radio-Iran diffuse pendant 24 heures sur 24, Radio-Téhéran 12 heures par jouret les radios de province entre 8 et 18 heures. Les 3 émetteurs de Téhérandiffusent 12 133 heures et les 12 émetteurs de province 53 176 heures deprogrammes par an, ce qui fait au total 65 309 heures.

Le nombre de récepteurs de radio a été estimé à 2 millions environ. Onpeut considérer, en tenant compte des dimensions moyennes des familles,

Fréquence d'écoute de la radio (en pourcentage)

Catégories

HommesFemmes

35 ans et plusMoins de 35 ans

OuvriersEmployés et fonctionnairesProfessions libéralesMénagèresLycéens et étudiants

AnalphabètesPersonnes ayant fait des

études primairesPersonnes ayant fait des

études secondairesPersonnes ayant fait des

études supérieures

Tous lesjours

7573

7175

7377717283

66

76

81

80

Plusieursfois parsemaine

2123

2321

1820252415

26

21

17

18

Une ou deuxfois parsemaine

33

52

43432

5

2

2

2

Une ou deuxfois par

mois

11

12

5——1

3

1

1. M. K.OTOBI, « Importance et portée de la télévision en Iran », VIIe Congrès mondial desociologie, Varna, 1970. (Multigraphiê.)

38

Diffusion de la culture

que chaque poste a au moins 4 auditeurs, ce qui donne un nombre minimalde 8 millions d'auditeurs pour le pays entier.

Après enquête, on peut établir ainsi les pourcentages des ménages dedifférentes villes qui possèdent un récepteur : 94,5 % à Ispahan ; 90,5 % àChiraz ; 99,5 % à Racht ; 72,5 % à Rézaieh.

Le temps moyen d'écoute est de 4,68 heures à Ispahan ; 2,47 heures àChiraz et 4,39 heures à Racht.

39

L'enseignement de Fart

Enseignement spécialisé

II existe en Iran, au niveau supérieur, depuis plus de trente ans. Actuelle-ment les écoles supérieures sont : la Faculté des beaux-arts de l'Universitéde Téhéran (sections d'architecture, de peinture, de sculpture, de théâtreet de musicologie) ; la Faculté d'architecture de l'Université nationaled'Iran ; la Faculté des arts décoratifs (sections de peinture, de décoration,d'arts graphiques) ; la Faculté des arts dramatiques (sections décompositionde pièces, de mise en scène, d'art dramatique, des décors et costumes, etc.) ;le Conservatoire de musique nationale traditionnelle ; le Conservatoire demusique classique ; l'École supérieure de radio et de télévision (sections deproduction et de diffusion).

La sanction des études dans chacun de ces établissements est assuréepar la délivrance d'un diplôme de licence ou de maîtrise.

Quant à l'enseignement spécialisé au niveau secondaire, il comprend lesétablissements suivants : cinq écoles secondaires de peinture, une écolesecondaire des arts nationaux, une école secondaire de ballet et une écolesecondaire de musique et de danse folkloriques.

Chacun des deux conservatoires supérieurs comprend également uneécole secondaire.

Enseignement et formation générale

Les écoles primaires donnent des cours de peinture, de musique et de calli-graphie (l'un des arts nationaux de l'Iran).

Au cours du cycle « d'observation » (correspondant aux trois années sui-vantes de l'école primaire), le programme comprend aussi des cours d'art etd'histoire des arts.

Les institutions d'enseignement libre de la peinture, de la musique, et

40

L'enseignement de l'art

les cours du soir ne cessent de se multiplier : selon la dernière enquête, ilssont plus de cent.

Le Ministère de la culture et de l'art a créé et crée encore des centresd'éducation artistique dans les différentes villes de province, afin d'attirervers les arts les différentes couches de la population. Les moniteurs et lesanimateurs de ces centres sont recrutés parmi les anciens élèves des écolesartistiques supérieures.

Il faut souligner, dans ce domaine, le rôle très important joué par lesmass média, principalement les émissions éducatives régulières de la radioet de la télévision. Il existe deux revues bimensuelles pour la musique, unerevue spécialisée trimestrielle pour l'architecture ; plusieurs revues men-suelles ou hebdomadaires et quelques quotidiens ont des rubriques consa-crées à la critique et à l'information artistiques.

Le nombre des expositions (de peinture, de sculpture, etc.) augmentedans les galeries permanentes et aussi, régulièrement, dans les maisons dela culture, les maisons des jeunes et les instituts de relations culturelles avecdifférents pays étrangers, dans les universités et même quelquefois dans deslieux publics (maisons de thé, salles d'attente des cinémas et banques).

Selon les dernières informations, le nombre et le pourcentage des étu-diants dans les branches spécialisées de l'enseignement artistique au niveausupérieur s'établissent de la façon suivante (sur un total de 2 809 étudiants) :Architecture et urbanisme, 1 580 et 56 % ; musique, 102 et 4 % ; sculp-ture, 57 et 2 % ; peinture, 181 et 6 % ; décoration, 362 et 13 % ; art drama-tique, 240 et 9 % ; cinéma et télévision, 217 et 8 % ; divers, 70 et 2 %.

Ce total comprend 2 151 garçons et 658 filles.A eux tous, ils représentent 4 % de la totalité des étudiants iraniens.

Parmi eux : 13 % suivent le premier cycle des études (2 ans après le bacca-lauréat) ; 35 % suivent le cycle de la licence (4 ans après le baccalauréat) ;51 % suivent le cycle de la maîtrise (6 ans après le baccalauréat) ; 1 % seconsacrent à la préparation d'un doctorat.

41

Conclusion : réflexionssur la politique culturelle

Dans les pages qui suivent, sont évoqués, sous forme de notes, quelquesexemples des préoccupations exprimées par des artistes, écrivains, anima-teurs et planificateurs, au cours de débats sur les formes de l'action cultu-relle en Iran.

Ces exemples, choisis parmi beaucoup d'autres, serviront peut-être àsusciter et à encourager des discussions et des études plus approfondies sur lesproblèmes de la politique culturelle dans des pays de civilisation différente.

Dans les sociétés en transition, les loisirs représentent encore des élémentsd'intégration liés à l'ensemble de la vie économique et sociale de la commu-nauté. Dans ces sociétés, même ouvertes aux modes de vie occidentale, ladéfinition des loisirs et les moyens de les utiliser doivent être repensés etpas toujours dans le sens d'un rejet des formes traditionnelles, ce qui estmalheureusement le cas assez souvent.

Si la population des grandes villes commence à s'habituer à un nouveaurythme de travail et de loisir, pour la grande majorité de la population, ladéfinition même de travail et de non-travail, de temps libre et de tempslibéré (temps légalement libre) demeure ambiguë ou s'inspire de principesdifférents de ceux qui sont acceptés dans les sociétés industrielles.

D'une part, l'aspect souvent familial et même domestique (artisanat,agriculture, petit commerce) du travail échappe aux définitions très rigou-reuses et, d'autre part, l'entrecroisement des activités fait qu'il devientdifficile de séparer le temps du travail de celui des loisirs.

Il faut souligner aussi la différence entre les sens donnés aux obligationsdans différentes civilisations. Pour les sociologues occidentaux, les loisirsforment l'ensemble des occupations auxquelles l'individu peut s'adonner deplein gré après s'être dégagé de ses obligations professionnelles, familialeset sociales, tandis que dans d'autres civilisations certaines de ces obligationsne sauraient être considérées comme une contrainte ; par exemple, enIran, participer aux réunions religieuses ou bien passer son temps avec les

42

Conclusion

membres d'un groupe de parenté ou d'un groupe de voisinage sont vuscomme une manière agréable d'employer les loisirs.

Quant aux formes d'utilisation des loisirs, il faut souligner que, malgréla place prise par le cinéma, les moyens traditionnels ont gardé toute leurimportance et que même la radio et la télévision sont venues s'intégrer auxmoyens anciens et les compléter. Fréquenter les maisons de tbé où l'onécoute le conteur public, flâner dans les rues, participer aux séances de lec-ture de poésies, passer un temps interminable au « bazar » où les acheteurss'attardent devant les boutiques et sont invités à boire du thé et à mar-chander, voilà des formes de loisir qui restent très appréciées.

Les loisirs traditionnels sont collectifs, actifs et non commerciaux, et ilconvient de préserver ces caractéristiques autant que possible.

Considérer les loisirs comme un bien de consommation qui s'acquiert auprix de beaucoup d'heures de travail risque de créer une disparité encoreplus grande entre les couches sociales.

La participation du public, tant recherchée de nos jours, est un autreélément des moyens traditionnels : ainsi l'individu en tant que membre d'ungroupe organise activement ses loisirs (conversation, jeux collectifs, parti-cipation aux fêtes, promenades en groupe, etc.).

Si certaines de ces formes sont condamnées à disparaître, d'autres, quine sont pas nécessairement incompatibles avec les exigences du dévelop-pement économique et social, ne peuvent-elles être conservées et mêmemises en valeur par la politique culturelle ?

La pénétration des arts occidentaux en Iran eut pour résultat, dans une pre-mière période, d'attirer avec une force magique les artistes et de leur fairecroire qu'il n'existait d'autre voie que l'imitation des modèles occidentaux.Les arts anciens furent abandonnés : les vers libres remplacèrent la richepoésie persane, les grands musiciens disparurent et les architectes formésen Occident importèrent des styles européens.

Cette tentation de l'Occident se limita dans la majorité des cas à l'adap-tation des « écoles modernes » sans aucune connaissance approfondie de lacontinuité de l'art occidental et de son contexte socio-économique.

Ainsi un fossé sépara l'artiste du peuple et l'artiste ne créa que pour unecertaine élite occidentalisée.

Dans une deuxième période, c'est-à-dire depuis une trentaine d'années,nous assistons à un certain retour à la tradition et aussi à un effort, sansdoute très difficile, de synthèse.

Cette synthèse exige une connaissance parfaite des traditions artistiques,aussi bien de l'Iran que de l'Occident, et une compréhension des caractéris-tiques socio-économiques de l'Iran contemporain.

Toute innovation dans ce domaine doit être le résultat d'un certain dyna-misme interne et l'apport étranger ne doit être considéré que comme unetransfusion de sang nouveau dans un corps solide qui l'aidera à mieuxaccomplir ses fonctions naturelles.

43

Conclusion

Depuis quelque temps, les pays en voie de développement semblentrenoncer, avec raison, aux modèles occidentaux, lesquels sont d'ailleurscontestés au sein même des sociétés qui les ont créés. Malheureusement, aucours des derniers siècles, les pays d'Asie et d'Afrique se sont trouvés encontact avec l'Europe (ou bien avec une seule métropole dans le cas des payscolonisés) sans avoir presque aucun contact avec leurs voisins.

Dans une période où, à la recherche de nouvelles sources de création,l'élite occidentale regarde vers l'Orient, n'est-il pas temps que les paysd'Asie et d'Afrique commencent à apprécier leur patrimoine culturel réci-proque pour s'enrichir mutuellement ?

Dans toute action culturelle, on peut distinguer, d'une part, un micro-groupe (écrivains, producteurs, planificateurs) qui pense, oriente et décided'après sa logique et, d'autre part, le public qui, sans être toujours sollicité,subit cette action. Quant aux moyens de cette action, ils sont malheureuse-ment peu nombreux et se limitent aux moyens dits traditionnels (théâtres,musées, etc.) ou bien aux moyens de communication de masse. Et pourévaluer cette action l'on a recours à des indicateurs statistiques (heuresd'écoute de la radio, nombre d'entrées dans les salles de cinéma, etc.).

Ce processus, critiqué quelquefois même en Occident, perd toute sonefficacité dans les sociétés en transition.

Dans ces sociétés, souvent riches d'un passé culturel, l'élite occidenta-lisée oriente l'action culturelle et, malgré toute sa bonne volonté, ne réussitpas toujours, car elle ignore les vrais besoins culturels et sous-estime lesmoyens traditionnels au profit des moyens importés, appartenant à la civi-lisation européenne.

Sans doute, toujours et dans tous les pays, l'écart restera-t-il grand entreles besoins logiquement reconnus et la demande effective, et c'est la missionmême des créateurs et des planificateurs de trouver le meilleur dosage entreces deux éléments. Mais, souvent, la demande effective montre les aspira-tions et peut être utile au moins sur le plan du choix des moyens de l'actionsi ce n'est sur celui de son orientation.

Les études relatives aux besoins culturels sont de première urgence etles méthodes d'enquête doivent être repensées et adaptées à la situation dechaque pays. Les indicateurs quantitatifs ne sont pas toujours significatifset, même dans les pays industriels, ils ne se rapportent qu'à certaines expres-sions magistrales de la « culture distribuée » et ne révèlent que le taux deconsommation de cette culture par un certain public. En revanche, ils nepermettent nullement de mesurer la situation et les aspirations culturellesdu « non-public s1.

Par exemple, dans un pays comme l'Iran, où la musique traditionnelleest exécutée et appréciée dans l'intimité, l'indication relative au nombre

1. Rapports des commissions du VIe Plan 1971-1975 : Affaires culturelles, p. 16, Paris,1971.

44

Conclusion

d'entrées dans les salles de concert peut-elle être considérée comme un indicevalable ?

Le choix des priorités dans le temps et dans l'espace est un autre pro-blème posé aux planificateurs. Quelles sont les couches sociales ou lesgroupes d'âge les plus importants du point de vue de l'action culturelle ?Faut-il concentrer le développement culturel dans le milieu urbain en crois-sance rapide ou bien viser le milieu rural en plein changement ? La jeunesse(plus de 53 % de la population iranienne a moins de vingt ans) ne doit-ellepas avoir la première place dans nos préoccupations ? L'action culturellepourra-t-elle prolonger, en prenant leur relève, les efforts de scolarisationet la lutte contre l'analphabétisme ?

Voilà un éventail de choix qui montre la diversité des besoins dans unseul pays et révèle en même temps la multiplicité des besoins et des formesd'action dans le monde contemporain.

45

Annexe I : Coordinationdes activités culturelles

Fondationssemi-publiques

Fondations privées

Universités

Conseil supérieurde la cultureet des arts

Secrétariat

Ministèrede la culture

et de l'art

Ministèrede l'information

Ministèrede l'éducation

nationale

Ministèrede la science

et de l'enseignementsupérieur

Ministèrede la réforme agraireet des coopératives

46

Annexe II : Organigramme duMinistère de la culture et de l'art

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Errata

Page 30, 14e ligne, lire: "l'Association pour lapromotion culturelle de la jeunesse et de l'enfance "IllustrationsN° 1 : lire, "Mosquée du Chah, Ispahan".N° 4 : lire, "Tour de Mihman Douste, Damghan".N° 5: lire, "Mosquée de Vendredi ('Djamei'), Ispahan"