la justice expliquée aux maliens ***** 100 fiches

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La justice expliquée aux Maliens ***** 100 fiches pratiques pour comprendre le Droit Avec le soutien technique et financier de l’USAID via le Mali Justice Project Mali Justice Project MINISTERE DE LA JUSTICE SECRETARIAT GENERAL *******************

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La justice expliquée aux Maliens

***** 100 fiches pratiques

pour comprendre le Droit

Avec le soutien technique et financier de l’USAID via le Mali Justice Project

Mali Justice Project

MINISTERE DE LA JUSTICE

SECRETARIAT GENERAL

*******************

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Préface de M. le Ministre de la justice, Garde des Sceaux

Dans son allocution prononcée le 5 décembre 2017 lors de la rentrée solennelle des Juridictions du Mali, le Président de la République, S.E.M. Ibrahim Boubacar KEÏTA, soulignait qu’ « une justice toujours exemplaire et efficace est une exigence morale. C’est une exigence démocratique, c’est une exigence tout simplement humaine. Cette justice a besoin certainement d’être confortée dans l’éminence de son rôle et dans les moyens qui lui sont donnés ». Pour donner corps à cette vision, le Gouvernement de la République a adopté le Programme d’Urgence pour le Renforcement du Système Judiciaire, dans le cadre de l’Accord de paix issu du processus d’Alger. Cet accord prévoit en effet en son Titre V consacré à « la réconciliation, à la justice et aux questions humanitaires », la généralisation de l’assistance judiciaire et l’information sur les droits des citoyens (article 46.9).

Or, l’accès au droit est confronté dans notre pays à des défis de grande ampleur : une carte judiciaire encore incomplète, le coût élevé des procès, les lenteurs dans le jugement des affaires, une image détériorée du service public de la Justice, l’éloignement des juridictions, mais aussi et peut-être surtout, la méconnaissance de leurs droits par les citoyens. L’accès au droit requiert donc une stratégie axée sur la plus large diffusion des concepts de base de la Justice pour une meilleure compréhension du rôle et des responsabilités de tous ceux qui concourent à sa distribution.

« La Justice donne un ordre aux choses et des ordres aux hommes » disait Georges Clémenceau. Ce recueil de 100 cas pratiques inspirés de la vie quotidienne des Maliens et des Maliennes met le Droit à la portée de tous. Il ne se veut pas exhaustif mais illustratif des solutions que notre Justice peut et doit apporter aux problèmes de nos concitoyens. Les choses de la vie s’y trouvent comme ordonnées selon une logique simple et efficace. Le désordre de la vie en société paraît prévu et comme réglé par ces 100 fiches faciles d’accès et allant droit au but.

Cet important travail montre combien l’édifice juridique et judiciaire de notre pays était, est et sera au service de tous. Il montre que le Législateur et le Juge sont les deux jambes sur lesquelles s’appuient une société qui se veut d’ordre, de paix et d’équité. « Entre le faible et le fort, c’est la liberté qui opprime, c’est la Loi qui affranchit » écrivait Lacordaire. Ne nous y trompons pas : si notre Constitution érige le Judiciaire en pouvoir constitutionnel, à l’égal de l’Exécutif et du Législatif, c’est bien parce que sa mission fondamentale est d’assurer la protection de tous contre les abus, les violences, les injustices. Autant de maux dont le Mali veut se débarrasser et ceci passe par une Justice efficace, prévisible, respectée et respectable.

Ce guide pratique va être mis à la disposition de tous ceux qui – à Bamako, à Mopti, à Kayes et ailleurs, dans les cercles et dans les villages les plus reculés de notre grand pays – œuvrent à un meilleur accès au droit pour nos concitoyens. Je suis convaincu que cet ouvrage profitera aussi bien aux professionnels de la justice qu’aux para-juristes, agents de médiation, animateurs des cliniques juridiques et des bureaux d’accueil et d’orientation des Palais de Justice, cadis et chefs de village, associations de victimes, de jeunes juristes, étudiants en droit, simples citoyens… Je souhaite que cet important volume soit mis à la disposition du plus grand nombre.

Il devrait être traduit dans plusieurs de nos langues nationales et diffusé sous forme d’émissions radiophoniques partout où le besoin de Droit se fait sentir. Je ne doute pas que « La Justice

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Expliquée aux Maliens » va devenir un bestseller des prétoires, des amphithéâtres et des bibliothèques des OSC œuvrant pour l’accès au Droit et à la Justice.

C’est une belle idée et une belle réalisation. Je félicite et remercie vivement tous ceux qui ont contribué à sa conception, à sa rédaction, à sa relecture et à sa diffusion. Le Ministère est satisfait du soutien sans faille que la Coopération américaine lui apporte via le Mali Justice Project. En décidant ainsi de jouer sa partition dans le renforcement de l’accès à la justice, ce projet de USAID apporte une contribution majeure à la restauration de la confiance des citoyens dans la Justice de leur pays.

Le Ministère de la Justice ne ménagera aucun effort pour assurer une large diffusion de ces 100 fiches pratiques et formule par ma voix, ses vœux de plein succès à tous les chantiers ouverts avec le Mali Justice Project pour le renforcement de la gouvernance du Ministère que j’ai l’honneur de diriger, pour la qualité et la redevabilité du travail en juridictions, pour une Justice exemplaire et efficace.

Et maintenant, que chaque page tournée de ce précieux guide soit un pas de plus vers plus de justice et d’équité dans notre cher Mali.

HAMIDOU YOUNOUSSA MAIGA Chevalier de l’Ordre national

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Introduction

Au Mali, l’accès à la justice est confronté à plusieurs défis de taille : les distances physiques qui séparent les juridictions des justiciables ; la disponibilité des ressources humaines ; les frais de justice qui ne sont pas toujours à la portée des citoyens mais aussi et surtout la compréhension de la loi, du droit et des procédures de notre justice.

Aux questions concernant l’accès physique et la disponibilité des ressources humaines, le législateur a apporté des réponses à travers la révision de la carte judiciaire. Cette loi reste en partie à mettre en œuvre. La Loi n° 2011-037 / du 15 juillet 2011 portant organisation judiciaire a créé plusieurs types de juridictions, notamment dans les localités qui en étaient dépourvues jusque-là. C’est par exemple le cas des Cours d’appel de Ségou, Sikasso et Gao qui viendront compléter bientôt celles de Kayes, Bamako et Mopti.

Le recrutement des acteurs de la justice, c’est-à-dire les magistrats, les greffiers et les secrétaires de greffes et parquets va progressivement combler le déficit en personnel et renforcer la composition des tribunaux en vue d’une plus grande rapidité dans la distribution de la justice. Il faut également mettre en œuvre le principe de collégialité consacré par la loi – c’est-à-dire pouvoir être jugé par trois magistrats et non par un seul juge - mais aussi affecter des magistrats dans les juridictions nouvellement créées.

L’assistance judiciaire a été parallèlement instituée au bénéfice des couches démunies afin de rétablir l’égalité des armes et l’égal accès de tous à la justice conformément aux dispositions de l’article 2 de la Constitution : « Tous les maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs… ».

La compréhension par les citoyens de la Loi et du Droit soulève des interrogations importantes : le niveau de scolarisation voire d’alphabétisation des populations, le contexte sécuritaire, le vouloir vivre ensemble, la coexistence pacifique de groupes aux cultures différentes, la volonté de résoudre pacifiquement les conflits, la confiance que chacun place dans le système judiciaire… en d’autres termes, le pacte social.

Le risque de décrochage des Maliens est grand au regard du taux d’analphabétisme qui touche près de 80% de la population. Le français, langue officielle qui est aussi la langue du Droit perd du terrain du fait des insuffisances du système éducatif. Or, les populations locales, le plus souvent étrangères au français, le sont souvent aussi aux autres langues nationales du Mali. Elles ne voient pas d’autre issue à leurs problèmes que de s’adresser à ceux qui parlent leur langue. Au surplus, le Droit s’exprime dans une formulation ardue à la fois du fait du recul du nombre de locuteurs de Français mais aussi en raison de la spécialisation des branches du droit. Trop souvent, les hommes de Loi jargonnent plutôt que d’exprimer leurs vues ou leurs décisions dans un langage clair et simple.

Même les personnes éduquées voire les intellectuels font mal la différence entre les cadres de la justice (magistrats, greffiers et secrétaires de greffes et parquets) et les auxiliaires de justice (avocats, notaires, huissiers-commissaires de justice..) et donnent très souvent du « maître » lorsqu’ils s’adressent à un juge.

Les populations rurales, pour la plupart en raison des motifs invoqués ci-dessus et du cérémonial des palais de justice préfèrent, au-delà des questions de prévisibilité de la décision

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de justice, recourir aux modes informels de règlement des litiges en s’adressant aux autorités coutumières. Une justice traditionnelle, coutumière voire religieuse basée sur les chefs de village et les cadis prend de plus en plus le pas sur celle de la République.

L’adage selon lequel « nul n’est censé ignorer la Loi », apparaît de plus en plus comme une fiction destinée à préserver le pacte social. Non seulement le droit est quasiment inaccessible par son langage, mais en outre il n’est pas ou peu diffusé et guère suivi d’effets. La publication irrégulière du journal officiel, la non publication des décisions de justice, le fréquent défaut d’exécution des jugements rendus au nom du peuple malien, l’imprévisibilité de décisions rendues, les tiraillements au fond entre la première instance et l’appel, les commentaires désabusés et récurrents sur la collusion réelle ou supposée du juge avec l’une des parties au détriment de l’autre... autant de syndromes qui minent l’accès et le recours au droit au Mali.

De plus en plus d’opérateurs économiques renoncent à faire dire le droit en justice car tous considèrent comme valide – et il est souvent difficile de leur donner tort – l’autre adage selon lequel « un mauvais compromis vaut mieux qu’un bon procès ».

Grâce aux organisations de la société civile appuyées par des partenaires techniques et financiers, quelques textes fondamentaux ont fait l’objet de traduction dans les langues nationales : la Constitution, le Code du mariage et de la tutelle avant sa relecture, le Code forestier… Mais les défis dans ce domaine sont encore immenses compte tenu de l’inflation législative, de l’irruption du droit international et communautaire et des réformes en cours.

Ces différents constats fondent la démarche et la finalité du Mali Justice Project qui vise à restaurer la confiance et la connaissance minimums des citoyens dans leur justice. C’est toute l’ambition des fiches pratiques qui suivent, dans le seul but de mieux expliquer la justice aux citoyens en calquant la présentation sur les situations du quotidien auxquelles sont confrontés les Maliens et les Maliennes. Il s’agit de partir de la norme pour la couler dans la vie de tout un chacun, pour lui donner un abord anthropologique qui soit familier au vécu du plus grand nombre.

L’exercice a privilégié une approche exhaustive avec au total cent (100) fiches pratiques juridiques qui portent sur :

- la présentation simplifiée des institutions et des acteurs qui contribuent à la distribution de la justice (magistrats, avocats, greffiers et secrétaires de greffes et parquets, notaires, huissiers-commissaires de justice, surveillants de prison, experts judiciaires…) ;

- le droit civil et sa procédure ;

- le droit foncier ;

- le droit pénal et sa procédure ;

- le droit des affaires et ses variantes (droit des transports ; droit des assurances ; droit de la concurrence) ;

- le droit de la consommation sous l’angle de la concession de service public ;

- le droit électoral ;

- le droit de l’informatique et des nouvelles technologies ;

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- le droit des marchés publics ;

- le droit communautaire.

La transcription socio–anthropologique et culturelle de ces situations en modes de communication accessibles au plus grand nombre sera la prochaine étape, dans des langues et des formes de diffusion qui les rendront faciles à appréhender. Ceci se traduira par des mises en scène contextualisées en plusieurs langues, via des émissions radiophoniques ou des brochures de vulgarisation. Il convient aussi de prendre en compte le souci d’assurer une large diffusion de ce recueil en le mettant en ligne via les organisations de la société civile agissant pour l’accès au droit. Il s’agira enfin de diffuser ces fiches à destination d’étudiants en droit, de jeunes praticiens ou d’agents de médiation pour parfaire leur formation et les assister dans leur pratique.

Les équipes des trois composantes du MJP ont contribué à l’identification des cas pratiques. Les experts de la composante institutionnelle du MJP – Mesdames et Messieurs Mangal Traoré, Aminata Maiga Keita, Magninè Sacko Konaté, Amadou Bocar Touré, et Aboubacar Sidibé – ont conçu et rédigé ces cent fiches. M. Mangal Traoré en a assuré la supervision éditoriale et juridique. MM. Abdoulaye Dicko et Mohamed Sissoko ont soutenu l’équipe de rédaction. M. Francis Saudubray a conçu ce projet. Qu’ils soient tous remerciés pour leur engagement et leur détermination.

C’est aussi le lieu de remercier le Ministère de la Justice, dont la confiance et l’esprit de coopération sont un soutien quotidien pour les cadres du MJP. L’accompagnement de la Chancellerie dans la diffusion de ces fiches contribuera à rapprocher davantage la justice et les justiciables, à donner une bonne image du service public de la Justice et à favoriser une meilleure compréhension du droit et des juridictions par nos concitoyens.

L’EQUIPE DU MALI JUSTICE PROJECT

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Table des matières Préface de M. le Ministre de la justice, Garde des Sceaux ................................................................. 2

Introduction .................................................................................................................................................. 4

Table des matières ...................................................................................................................................... 7

LES INSTITUTIONS ET LES ACTEURS DE LA JUSTICE ............................................................... 11

Fiche n° 1 : organisation et fonctionnement des juridictions ..................................................... 12

Fiche n° 2 : le Tribunal d’Instance et le Tribunal de Grande Instance ..................................... 15

Fiche n° 3 : le juge des enfants .......................................................................................................... 17

Fiche n° 4 : la Cour d’appel ............................................................................................................... 19

Fiche n° 5 : la Cour Suprême ............................................................................................................ 21

Fiche n° 6 : la Cour Constitutionnelle ............................................................................................ 23

Fiche n° 7 : la Haute Cour de Justice .............................................................................................. 25

Fiche n° 8 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le magistrat .............................. 27

Fiche n° 9 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le greffier et le secrétaire de greffe et parquet ................................................................................................................................... 29

Fiche n° 10 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’avocat ................................... 31

Fiche n° 11 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le notaire ............................... 33

Fiche n ° 12 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’Huissier - Commissaire de Justice. ..................................................................................................................................................... 35

Fiche n° 13 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - les officiers et agents de police judiciaire ................................................................................................................................................. 37

Fiche n° 14 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le surveillant des services pénitentiaires ......................................................................................................................................... 39

Fiche n° 15 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’expert judiciaire ................. 41

DROIT CIVIL ET PROCEDURE CIVILE ............................................................................................. 43

Fiche n° 16 : l’assistance judiciaire ................................................................................................... 44

Fiche n° 17 : la rupture de fiançailles ............................................................................................... 46

Fiche n° 18 : le divorce ....................................................................................................................... 48

Fiche n° 19 : la garde des enfants ..................................................................................................... 50

Fiche n° 20 : l’adoption ....................................................................................................................... 52

Fiche n° 21 : l’acquisition de la nationalité ..................................................................................... 54

Fiche n° 22 : l’acquisition de la nationalité (suite)......................................................................... 56

Fiche n° 23 : les changements de nom et de prénoms ................................................................ 58

Fiche n° 24 : le jugement d’hérédité ................................................................................................ 60

Fiche n° 25 : obtenir réparation à raison des dommages subis lors d’une hospitalisation .. 62

Fiche n° 26 : comment engager une procédure de référé ......................................................... 64

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Fiche n° 27 : réclamation de somme d’argent en l’absence d’une attestation de remise .... 66

Fiche n° 28 : vente frauduleuse d’un véhicule ................................................................................ 68

Fiche n° 29 : contestation de paternité d’un enfant en cas de divorce ................................... 70

Fiche n° 30 : erreur dans la tenue d’un compte bancaire ........................................................... 72

Fiche n° 31 : expulsion en cas de loyer impayé ............................................................................ 74

Fiche n° 32 : augmentation du loyer en cours d’exécution d’un contrat de bail ................... 76

Fiche n° 33 : contestation d’une vente immobilière et revendication d’hérédité ................. 78

Fiche n° 34 : obtenir un certificat de nationalité et un extrait de casier judiciaire ............... 80

Fiche n° 35 : obtenir un jugement supplétif à un extrait de naissance ..................................... 82

Fiche n° 36 : obtenir réparation du fait de dommages causés par la négligence de l’administration ..................................................................................................................................... 84

Fiche n° 37 : contestation de l’expulsion d’un locataire par son bailleur ................................ 86

Fiche n° 38 : appel contre un jugement de divorce défavorable ............................................... 88

Fiche n° 39 : le pourvoi en cassation dans une affaire de divorce ............................................ 90

DROIT FONCIER .................................................................................................................................... 92

Fiche n° 40 : délivrance d’un permis d’occuper pour un terrain déjà attribué à un tiers.... 93

Fiche n° 41 : l’expropriation pour utilité publique ....................................................................... 95

Fiche n° 42 : attribution par un Maire de terrains affectés à des servitudes publiques ....... 97

DROIT PENAL ET PROCEDURE ........................................................................................................ 99

Fiche n° 43 : réagir à des violences conjugales ............................................................................ 100

Fiche n° 44 : rixe entre pasteur et agriculteur ............................................................................ 102

Fiche n° 45 : coups et blessures volontaires ayant occasionné une infirmité permanente 104

Fiche n° 46 : abus de confiance ....................................................................................................... 106

Fiche n° 47 : escroquerie ................................................................................................................. 108

Fiche n° 48 : grivèlerie (défaut de paiement d’un service rendu) ........................................... 110

Fiche n° 49 : tentative de vol avec effraction ............................................................................... 112

Fiche n° 50 : vol qualifié .................................................................................................................... 114

Fiche n° 51 : détention illégale d’armes à feu .............................................................................. 116

Fiche n° 52 : détention de drogue ................................................................................................. 118

Fiche n° 53 : légitime défense, coups et blessures ayant entraîné la mort ........................... 120

Fiche n° 54 : dénoncer le blanchiment d’argent et la corruption ........................................... 122

Fiche n° 55 : enregistrement d’un colis piégé .............................................................................. 124

Fiche n° 56 : vol avec violence, plainte non suivie d’effet, constitution de partie civile ..... 126

Fiche n° 57 : réparation du préjudice subi par une victime d’un accident de circulation . 128

Fiche n° 58 : recel de biens volés ................................................................................................... 130

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Fiche n° 59 : réparations des dommages causés par un accident de conduite en état d’ivresse................................................................................................................................................................ 132

Fiche n° 60 : provocation, rixe, excuses et circonstances atténuantes ................................. 134

Fiche n° 61 : troubles de voisinage ................................................................................................ 136

Fiche n° 62 : obtention d’un extrait de casier judiciaire spécial .............................................. 138

Fiche n° 63 : l’appel d’un jugement de condamnation pénale .................................................. 140

DROIT DES AFFAIRES ......................................................................................................................... 142

Fiche n° 64 : erreur ou tromperie sur la marchandise .............................................................. 143

Fiche n° 65 : augmentation arbitraire du loyer d’un bail commercial et sa résiliation unilatérale ............................................................................................................................................ 145

Fiche n° 66 : l’inscription au Registre du commerce ................................................................. 147

Fiche n° 67 : le nantissement de marchandises en garantie d’un prêt bancaire ................... 149

Fiche n° 68 : la constitution d’un gage en garantie d’un emprunt ........................................... 151

Fiche n° 69 : la constitution d’une hypothèque en garantie d’un prêt ................................... 153

Fiche n° 70 : recours des actionnaires contre la gestion dispendieuse d’un dirigeant de société .................................................................................................................................................. 155

Fiche n° 71 : l’annulation d’une commande pour retard excessif à la livraison ................... 157

Fiche n° 72 : chèque sans provision ............................................................................................... 159

DROIT DES TRANSPORTS ................................................................................................................ 161

Fiche n° 73 : la restitution de biens saisis en Douane ............................................................... 162

Fiche n° 74 : la réparation des dommages subis du fait du blocage de bétail par la Douane................................................................................................................................................................ 164

Fiche n° 75 : la responsabilité d’un chauffeur du fait des dommages subis par les marchandises transportées .............................................................................................................. 166

DROIT DES ASSURANCES ................................................................................................................ 168

Fiche n° 76 : dédommagement d’un accident de la route subi par refus de priorité ......... 169

Fiche n° 77 : réparation du préjudice physique, financier et moral subi lors d’un accident de la route ................................................................................................................................................. 171

Fiche n° 78 : indemnisation des ayants-droit en cas de décès dans un accident de la route................................................................................................................................................................ 173

DROIT DE LA CONCURRENCE ET DE LA CONSOMMATION ........................................... 175

Fiche n° 79 : concurrence déloyale ................................................................................................ 176

Fiche n° 80 : concurrence déloyale (suite) ................................................................................... 178

Fiche n° 81 : obtenir un dédommagement du fait des dommages causés par une anomalie dans la distribution de l’électricité ................................................................................................. 180

DROIT DU TRAVAIL ET DE LA SECURITE SOCIALE ............................................................... 182

Fiche n° 82 : licenciement sans cause réelle et sérieuse ........................................................... 183

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Fiche n° 83 : harcèlement au travail ............................................................................................... 185

Fiche n° 84 : CDD et CDI ............................................................................................................... 187

Fiche n° 85 : le droit de grève ......................................................................................................... 189

Fiche n° 86 : le congé de maternité en cas d’enfant mort-né .................................................. 191

Fiche n° 87 : faute personnelle ou de service et licenciement ................................................ 193

Fiche n° 88 : le congé d’expectative .............................................................................................. 195

Fiche n° 89 : les démarches à effectuer avant un départ en retraite ..................................... 197

Fiche n° 90 : démission d’un salarié titulaire d’un CDI ............................................................. 199

Fiche n° 91 : démission d’un salarié titulaire d’un CDD ........................................................... 201

Fiche n° 92 : calcul des indemnités de licenciement .................................................................. 203

DROIT DE L’INFORMATIQUE ET DES NOUVELLES TECHNOLOGIES .............................. 205

Fiche n° 93 : droit à l’image et protection de la vie privée sur l’Internet ............................. 206

DROIT ELECTORAL ............................................................................................................................ 208

Fiche n° 94 : droits et devoirs d’un candidat aux élections ...................................................... 209

Fiche n° 95 : inscription d’un individu sur deux listes de candidats de partis politiques ... 211

Fiche n° 96 : inéligibilité et démission d’office d’un élu municipal ........................................... 213

DROIT DES MARCHES PUBLICS ..................................................................................................... 215

Fiche n° 97 : retard du paiement d’un fournisseur par l’Administration ............................... 216

Fiche juridique n° 98 : contester l’attribution d’un marché public ......................................... 218

DROIT COMMUNAUTAIRE .............................................................................................................. 220

Fiche juridique n° 99 : le recours à la CCJA de l’OHADA ...................................................... 221

Fiche n° 100 : le recours à la Cour de Justice de la CEDEAO ................................................ 223

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LES INSTITUTIONS ET LES ACTEURS DE LA JUSTICE

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CHECCHI AND COMPANY CONSULTING, INC. MALI JUSTICE PROJECT

1899 L Street, NW, Suite 800, Washington, DC 20036 Tel: 202-452-9700 | Fax: 202-466-9070 | www.checchiconsulting.com |

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Fiche n° 1 : organisation et fonctionnement des juridictions

La Loi n° 2011 -037 du 15 juillet 2011 portant Organisation judiciaire en République du Mali énumère les types de juridiction dont certaines en raison de leur statut feront l’objet de fiches distinctes (Cour Suprême, Cour Constitutionnelle, Haute Cour de Justice). Il convient de retenir pour une meilleure compréhension, celles qui seront évoquées à ce stade. Il s’agit d’une part des juridictions de droit commun et d’autre part des juridictions d’exception.

A- les juridictions de droit commun

Elles ont vocation à connaître toutes les procédures à moins que la loi n’en dispose autrement. De manière schématique, l’organisation est de type pyramidale avec au bas les Tribunaux d’Instance (qui remplacent les Justices de Paix à Compétence Etendue) ; les Tribunaux de Grande Instance (qui remplacent les Tribunaux de Première Instance) ; les Cours d’Appel et enfin la Cour Suprême au sommet de la pyramide judiciaire.

Les Justices de Paix à Compétence Etendue

La Loi portant organisation judiciaire en date de 2011 a prévu leur suppression progressive mais force est de reconnaître qu’elles continuent encore de fonctionner dans plusieurs localités et présentent la particularité de cumuler les fonctions de poursuite, d’instruction et de jugement au niveau d’un seul magistrat , le Juge de Paix à Compétence Etendue.

Les Tribunaux d’Instance

Ils remplacent les Justices de Paix à Compétence Etendue mais sont pour l’heure créés dans seulement 6 localités (Nioro du Sahel, Yelimané, Bougouni, San, Bandiagara, Niono). Contrairement aux Justices de Paix, les Tribunaux d’Instance fonctionnent avec au moins 3 magistrats en l’occurrence un procureur de la République qui s’occupe des poursuites, un juge d’instruction qui est saisi lorsque des zones d’ombre pèsent sur l’infraction commise et enfin un président chargé de juger, en somme de se prononcer sur la culpabilité du prévenu. On parlera ainsi de prévenu devant le TribunaI d’Instance ou le Tribunal de Grande Instance, d’inculpé devant le juge d’instruction et d’accusé devant la Cour d’assises. En matière civile, commerciale et sociale, ils ont la même compétence d’attribution que les tribunaux de Grande Instance.

Les Tribunaux de Grande Instance

Ils connaissent en premier et dernier ressort des actions civiles et coutumières dont le taux n’excède pas 500 000 FCFA en principal et 50 000 FCFA de revenu mensuel déterminé soit en rente, soit par prix de bail. Au-delà de ce montant, le litige est susceptible d’appel de même que l’appel est possible en matière d’état des personnes, de successions, donations et testaments dont le montant est supérieur aux mêmes sommes. Comme innovation majeure, il convient de souligner l’introduction du principe de collégialité c’est-à-dire que les affaires

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sont examinées et jugées par une formation comprenant au moins trois magistrats. Le principe de collégialité tarde toutefois à entrer en vigueur alors même que certaines juridictions sont actuellement pourvues en personnel magistrat suffisant pour sa mise en œuvre qui renforce le principe d’impartialité des juridictions.

La Cour d’Appel

Il s’agit d’une juridiction au sein de laquelle la collégialité est de règle et qui connaît des appels interjetés contre les décisions rendues par les juridictions dites de première instance (Tribunal d’Instance et Tribunal de Grande Instance). Elle comprend une chambre civile également compétente pour les matières coutumières ; une chambre d’accusation ; une chambre correctionnelle ; une chambre sociale et une chambre commerciale.

La Cour d’assises, juridiction non permanente siège au sein de la Cour d’appel et juge les crimes, c’est-à-dire les infractions les plus graves (assassinat, meurtre, vol qualifié…). Son originalité réside dans la participation d’un jury populaire qui a les mêmes prérogatives que les magistrats professionnels et qui se prononce sur la culpabilité de l’accusé et la peine.

B- Les juridictions spécialisées

Les Tribunaux de commerce

Ils statuent sur les litiges concernant les transactions entre commerçants ainsi que des contestations portant sur les actes de commerce, les règlements judiciaires, liquidations et faillites. Dans leur composition, les juridictions commerciales comprennent un président et quatre juges consulaires (deux titulaires et deux suppléants) élus par leurs pairs.

Les Tribunaux administratifs

Ils sont compétents pour statuer sur les contentieux opposant les citoyens à l’Etat. Ils statuent sur les contentieux relatifs aux :

-recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décisions des autorités administratives régionales ou locales ;

-recours en interprétation et en appréciation de légalité ;

-demandes en décharge ou en réduction en matière fiscale dans les conditions fixées par le règlement financier ;

-contentieux concernant l’élection des Assemblées des Collectivités territoriales ;

-contentieux soulevés dans le cadre d’un acte passé au nom du Gouvernement ou de ceux relatifs à l’exécution d’un service public

Les Tribunaux pour enfants

Ils connaissent des infractions commises par des mineurs c’est-à-dire des personnes âgées de moins de 18 ans conformément aux dispositions du Code Pénal. La répression des dites infractions est marquée du sceau de la protection et de la rééducation avec le concours d’éducateurs spécialisés. En cas de condamnation, les mineurs purgent leur peine dans des centres spécialisés à l’instar du Centre de Bollé qui est pour le moment le seul sur l’étendue du territoire

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Les Tribunaux du travail

Ils sont compétents pour les différends entre travailleur et employeur ainsi que les différends relatifs aux conventions collectives. Dans sa composition, il convient de souligner que le Tribunal du Travail fonctionne avec un président et deux assesseurs. Ceux –ci représentent les employeurs et les travailleurs

Les Tribunaux militaires

Ces juridictions connaissent d’une part les infractions dites purement militaires telles que la désertion et d’autre part les infractions de droit commun commises par des militaires dans un cadre lié à leur fonction. C’est par exemple le cas du vol commis par un militaire dans une caserne. La formation de jugement obéit au principe de collégialité avec cette particularité que cette formation comprend au moins un juge militaire du même grade que le prévenu.

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Fiche n° 2 : le Tribunal d’Instance et le Tribunal de Grande Instance

Le Tribunal de Grande Instance (TGI) et le Tribunal d’Instance (TI) occupent dans l’organisation judiciaire une place de premier plan. Ce sont des juridictions de droit commun, ce qui signifie qu’elles sont compétentes à connaitre, en première instance tous les litiges de nature privée dès lors que la loi n’en dispose pas autrement.

• Compétence

L’étendue de la compétence territoriale du TGI et du TI est fixée par décret pris en Conseil des ministres. Le TGI ou le TI connait en premier et dernier ressort des actions civiles et coutumières dont le montant n’excède pas 500 000 francs CFA en principal et 50 000 Francs CFA de revenu mensuel à déterminer soit en rente, soit en prix de bail.

Ils connaissent en premier ressort seulement des actions s’élevant au-dessus des sommes ci-dessus indiquées et des actions concernant l’état des personnes ainsi que les successions, les donations et testaments dont le montant est supérieur aux mêmes sommes.

En matière correctionnelle, ils sont compétents pour connaitre les délits commis dans leur champ de compétence territoriale. En matière de simple police, ils connaissent toutes les contraventions prévues par la loi et toutes les infractions dont la connaissance leur est attribuée par des textes spéciaux.

• Mode de saisine

En matière civile, le TGI et le TI peuvent être saisi sur requête à défaut, par assignation. Par contre en matière pénale, la saisine intervient par voie soit de renvoi du juge d’instruction, soit de citation directe, de flagrant délit ou de comparution immédiate pour le jugement des délits et des contraventions de simple police.

• Composition

La composition du TGI ou du TI est fixée conformément aux dispositions de l’article 26 de la Loi portant organisation judiciaire en RM du 15 juillet 2011 à savoir : 1 président ; 1 vice-président ; 1 ou plusieurs juges au siège ; 1 ou plusieurs juges d’instruction ; 1 procureur de la République ; 1 ou plusieurs substituts du procureur de la République ; 1 greffier en chef, responsable du greffe ;

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Des greffiers ; Des secrétaires de greffe et de parquet.

• Organisation

Le TGI ou le TI comprend au moins 2 chambres : -une chambre civile qui siège en outre en matière coutumière ; -une chambre correctionnelle qui siège en outre en matière simple police.

En matière pénale et dans les matières communicables, le ministère public est représenté à l’audience.

La chambre civile lorsqu’elle siège en matière coutumière est complétée par les assesseurs de la coutume des parties, qui avant leur entrée en fonction, prêtent serment. Ces assesseurs ont voix délibérative.

Dans les TGI, les jugements sont rendus par un président et deux juges au siège (principe de la collégialité) tandis qu’au niveau des TI, le président ou un juge au siège rend seul la justice dans les matières qui sont de la compétence de la juridiction.

Le TGI ou le TI peut se réunir soit en audience solennelle soit en assemblée générale.

En audience solennelle, le tribunal comprend l’ensemble des magistrats du siège. Il est présidé par le Premier président de la Cour d’appel ou un conseiller. Il est toutefois valablement constitué avec quatre (04) juges au moins, le président compris. Il se réunit notamment pour procéder à l’installation des chefs de juridiction et de parquet du tribunal. Le Ministère public y est représenté.

Le tribunal se réunit en assemblée générale sur convocation du président ou sur réquisitions du procureur de la République. L’assemblée générale comprend l’ensemble des magistrats. Elle est présidée par le président du tribunal.

Elle est compétente pour : établir ou modifier le règlement intérieur ; fixer les audiences spéciales, extraordinaires et foraines ; délibérer sur toute question touchant au fonctionnement de la juridiction…

Le tribunal a un Bureau composé du président ; du procureur de la République et du Greffier en chef, responsable du Greffe.

Au début de chaque année judiciaire, le bureau fixe le nombre et les jours des audiences du Tribunal. Ce mode d’organisation est aussi valable pour le tribunal du Travail, le tribunal de Commerce, le tribunal Administratif et le Tribunal pour Enfant en tenant compte de leurs spécificités.

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Fiche n° 3 : le juge des enfants

L’article 7 de la loi n°01-081 du 24 août 2001 portant sur la minorité pénale et institution de juridictions pour mineurs cite le juge des enfants parmi les juridictions pour mineurs.

• Nomination

Le juge des enfants est un magistrat nommé par décret du président de la République après avis conforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, compte tenu de l’intérêt qu’il porte aux questions de l’enfance et de ses aptitudes.

• Compétence

Le juge des enfants est compétent pour recevoir les plaintes et les dénonciations concernant les mineurs délinquants. Il statue sur la restitution des objets saisis et les règlements définitifs des dossiers qui lui sont soumis dans le cadre des infractions reprochés aux mineurs. C’est le lieu de préciser que la majorité pénale est fixée à 18 ans.

- Au stade de l’enquête préliminaire, dès qu’un mineur est appréhendé, outre le procureur de la République et les parents ou tuteurs, le juge des enfants, est informé immédiatement par l’officier de police judiciaire.

Avec l’accord préalable et sous le contrôle du procureur de la République ou du juge des enfants, la détention d’un mineur de plus de 15 ans à ce stade de l’enquête ne saurait excéder 20 heures sauf prorogation pour une durée ne pouvant excéder 10 heures soit du procureur ou du juge des enfants.

- S’agissant de l’instruction, le juge des enfants effectue toutes les diligences et investigations utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et à la connaissance de la personnalité du mineur ainsi que des moyens appropriés de sa rééducation. Lors de la première comparution, le juge des enfants est tenu de signaler au mineur qu’il lui sera désigné un défenseur d’office au cas où lui et ses parents n’auraient pas la possibilité d’en constituer.

Il doit en outre informer des poursuites les parents, tuteurs ou gardiens connus auxquels il communiquera le nom du défenseur commis qui peut être un avocat désigné par le Bâtonnier de l’ordre des avocats, ou à défaut toute personne physique ou morale manifestant de l’intérêt pour les problèmes de l’enfance .

Le juge des enfants recueille ou fait recueillir par toute personne qui lui semble qualifiée par une enquête sociale, les renseignements sur les caractères et antécédents du mineur, la situation matérielle et morale de sa famille, sur sa fréquentation scolaire et son attitude à l ‘école, sur les conditions dans lesquelles il a vécu ou a été élevé.

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Il ordonne un examen médical, un examen médico-psychologique et facultativement un examen physiologique. Il peut dans l’intérêt de l’enfant décider à titre provisoire toute mesure d’éducation, de surveillance ou de garde.

En cas de mauvaise conduite ou de péril d’un mineur en liberté surveillée, le juge des enfants peut soit d’office, soit à la requête du procureur, ordonner de citer le mineur pour qu’il soit statué à nouveau.

Le juge des enfants est compétent pour détenir provisoirement un mineur dans une maison d’arrêt lorsque cette mesure parait indispensable ou encore s’il estime impossible de prendre toute autre disposition.

Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur de moins de 18 ans sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par le juge des enfants à la requête des parents conjointement ou de l’un deux, du gardien ou du tuteur du mineur, du mineur lui-même ou du ministère public.

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Fiche n° 4 : la Cour d’appel

La Cour d'appel est une juridiction de droit commun du second degré qui connait par la voie de l'appel des demandes tendant à un nouvel examen de l’affaire qui aura pour effet soit une réformation partielle soit une infirmation du jugement rendu par la juridiction du premier degré (Tribunaux de grande Instance, Tribunaux d'instance, Tribunaux de commerce , Tribunaux de travail , Tribunaux pour enfants … ).

Organisation

La Cour d’appel peut se réunir en audience solennelle ou en assemblée générale. Elle se réunit notamment pour recevoir le serment des magistrats et l’installation des chefs de juridictions et parquets.

Elle a un bureau composé du Premier président, du Procureur Général, des Présidents de chambres, du Greffier en chef, responsable de greffe.

Au début de chaque année judiciaire, le bureau fixe le nombre et les jours d’audience de la cour. Le Premier président est le chef de la juridiction.

Composition

La Cour d’appel est composée :

-d’un Premier président ;

-de Conseillers ;

-d’un Procureur Général ;

-d’un Avocat Général ;

-d’un ou plusieurs Substituts généraux ;

-d’un Greffier en chef, responsable du Greffe ;

-de greffiers ;

-de secrétaires de greffes et parquet.

La Cour d’appel comprend au moins :

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-une chambre civile siégeant également en matière coutumière ;

-une chambre commerciale ;

-une chambre sociale ;

-une chambre correctionnelle ;

-une chambre d’accusation ;

-une chambre spéciale des Mineurs.

Chaque chambre est composée d’au moins trois conseillers dont un Président.

Les arrêts sont rendus en toute matière par un Président et deux conseillers en présence du Procureur Général ou de son représentant et avec l’assistance d’un greffier.

Compétence

L’article 8 de de la Loi portant Organisation judiciaire du 15 juillet 2011 indique que la Cour d’appel est compétente pour connaitre, tant en matière civile et commerciale qu’en matière correctionnelle ou de simple police, de l’appel des jugements rendus en premier ressort par les TGI et les TI, les Tribunaux du commerce, les Tribunaux pour enfants et les Justices de Paix à Compétence Etendue.

Mode de saisine

L’appel tend à faire reformer ou annuler par la Cour d’appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré. L’appel est formé par déclaration unilatérale faite au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée ou par requête conjointe.

Le délai de recours est d’un mois en matière contentieuse et de quinze jours en matière gracieuse. Le délai de recours varie suivant les affaires à compter de la signification ou du prononcé du jugement. Une fois ce délai expiré, il n'est plus possible de faire appel.

En matière sociale et pénale c’est à compter du prononcé du jugement. Dans les autres matières le délai court à compter de la signification.

Décision de la cour d'appel

Les décisions des Cours d'appel sont des « arrêts » tandis que les tribunaux rendent, quant à eux, des « jugements ». La Cour d’appel peut confirmer le premier jugement ou prendre une position contraire en l’infirmant.

La décision d'une Cour d'appel est susceptible de recours ou pourvoi en cassation devant la Cour suprême.

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Fiche n° 5 : la Cour Suprême

Au sommet de la pyramide judiciaire, c’est la plus haute juridiction qui incarne le pouvoir judiciaire et qui est une institution prévue par la Constitution au même titre que le Président de la République, le Gouvernement l’Assemblée Nationale, la Cour Constitutionnelle ; la Haute Cour de Justice ; le Haut Conseil des Collectivités Territoriales le Conseil Economique, Social et Culturel (article 25 de la Constitution).

La Loi n° 2016 -046 du 23 septembre 2016 portant Loi organique fixe l’organisation, les règles de fonctionnement et la procédure suivie devant la Cour Suprême.

Organisation

La Cour suprême est présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire désigné parmi les magistrats de grade exceptionnel. Le Président est chargé d’assurer la bonne marche de la cour dont il est ordonnateur du budget. Il dispose d’un cabinet comprenant un chef de cabinet et deux chargés de mission.

Sous l’autorité du Président, le Secrétaire Général assure l’exécution des délibérations du Bureau de la Cour et prend toutes dispositions utiles à l’organisation de la juridiction.

Les fonctions du Ministère public sont exercées par le Procureur Général, le Premier Avocat Général, les Avocats généraux et les Avocats généraux référendaires.

Le Procureur Général près la Cour Suprême dans le cadre de ses attributions exerce un pouvoir de contrôle et d’inspection sur les parquets institués auprès des juridictions de fond.

Compétence

Les attributions de la Cour Suprême se déclinent à travers les sections qui composent cette juridiction.

1-La section judiciaire statue sur la légalité des décisions rendues par les juridictions de droit commun et les décisions des juridictions d’exception en premier et dernier ressort , c’est-à-dire qui ne sont plus susceptibles d’appel ou d’opposition. La section judiciaire est placée sous la responsabilité d’un Président et comprend des conseillers et des conseillers référendaires qui animent 5 chambres : deux chambres civiles, une chambre criminelle, une chambre sociale et une chambre commerciale.

Elle est en outre compétente pour statuer sur :

-les demandes en révision des procès criminels et correctionnels ;

-les demandes de renvoi d’une juridiction à une autre pour cause de suspicion légitime ou de sûreté publique ;

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-les règlements de juges ;

-les demandes de prise à partie ;

-les recours contre les avis rendus par la Chambre d’accusation en matière d’extradition ;

-les contrariétés de jugement ou arrêts rendus en dernier ressort entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens par différentes juridictions de l’ordre judiciaire.

La section peut siéger en chambres réunies par exemple sur demande écrite du Procureur Général ou lorsque l’affaire pose une question de principe notamment en cas de solution divergente entre les juges du fond et la Cour.

2-la Section Administrative : Elle comprend une chambre d’annulation, une chambre des marchés publics ; une chambre des contrats administratifs, une chambre du contentieux fiscal et une chambre du contentieux électoral. Elle est placée sous la direction d’un président et animée par des conseillers, un premier Rapporteur public, des Rapporteurs publics et des conseillers référendaires. En attendant la mise en œuvre des dispositions de la Loi qui prévoit des Cours administratives d’appel, la Section administrative de la Cour Suprême est juge d’appel des décisions rendues en premier ressort par les Tribunaux administratifs. Elle connait en premier et dernier ressort :

- des recours pour excès de pouvoir contre les décrets, arrêtés ministériels ou interministériels ainsi que des actes des autorités administratives nationales ou indépendantes ;

-des recours contre les décisions des organismes administratifs à caractère juridictionnel ;

-des recours en interprétation et des recours en appréciation de la légalité des actes dont le contentieux relève de la section ;

-des requêtes en règlement de juges dans les contentieux administratifs

3-La Section des Comptes : Elle est présidée par un fonctionnaire de la catégorie A de classe exceptionnelle et comprend des conseillers, des conseillers référendaires et des auditeurs.

Elle comprend quatre chambres à savoir :

- une chambre de contrôle et de jugement des opérations financières des institutions de la République et des administrations de l’Etat ;

- une chambre de contrôle et de jugement des comptes des collectivités territoriales ;

- une chambre de contrôle et de jugement des comptes des organismes personnalisés ;

- une chambre de contrôle des programmes et projets de développement financés sur ressources extérieures.

Elle comprend en outre une chambre non permanente de discipline financière et budgétaire.

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Fiche n° 6 : la Cour Constitutionnelle

Composition

La Cour Constitutionnelle est une institution prévue par la Constitution dans ses articles 85 et suivants.

La Loi n° 97 -010 du 11 février 1997 portant Loi organique déterminant les règles d’organisation et de fonctionnement de la Cour Constitutionnelle ainsi que la procédure suivie devant elle fixe le cadre général concernant cette juridiction. Ce texte est modifié par la Loi n° 02- 011 du 05 mars 2002.

La Cour Constitutionnelle est composée de neuf membres désignés pour un mandat de 7 ans renouvelable une fois. Ces membres sont respectivement proposés par le Président de la République, le Président de l’Assemblée Nationale et le Conseil Supérieur de la Magistrature.

Deux des trois membres désignés par le Président de la République et le Président de l’Assemblée Nationale doivent être obligatoirement des juristes tandis que les membres proposés par Conseil Supérieur de la Magistrature sont des magistrats. Les conseillers sont choisis en priorité parmi les professeurs de droit, les avocats et les magistrats ayant 15 ans d’ancienneté dans leur profession.

Avant d’entrer en fonction, ils prêtent le serment prescrit par la loi et élisent en leur sein un président au scrutin secret. Celui –ci assure la gestion administrative de l’institution dont il est ordonnateur du budget. En cas d’absence ou d’empêchement, l’intérim du Président est assuré par le conseiller le plus âgé.

Compétence et Procédure

La compétence de la Cour porte sur des domaines variés et concerne les opérations liées au référendum ; l’élection du Président de la République et des Députés à l’Assemblée Nationale ; le contrôle de constitutionnalité des lois organiques, des lois ordinaires et des engagements internationaux ; l’examen des textes de forme législative, des fins de non- recevoir ainsi que son avis qui est obligatoirement requis en cas de vacance de la présidence de la République.

Ainsi en matière de référendum, la Cour veille à la régularité des opérations et proclame les résultats. A ce titre, elle reçoit de l’autorité désignée à cette fin par la loi électorale les résultats provisoires accompagnés des procès-verbaux du scrutin. Elle reçoit aussi toute réclamation sur les opérations référendaires et tranche les litiges y afférents. Elle proclame dans un délai de 2 mois les résultats définitifs du référendum en audience publique.

Dans ses attributions, la Cour a aussi pour mandat d’examiner et trancher les contestations sur la validité des candidatures aux élections présidentielles et législatives. A cet égard, tout candidat, tout parti politique ou représentant de l’Etat dans la circonscription peut intenter une action devant la Cour. Ce droit est également reconnu à tout membre d’un bureau de

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vote à condition que sa contestation soit mentionnée sur le procès-verbal de dépouillement du scrutin.

Dans les quarante-huit heures qui suivent la proclamation des résultats provisoires des premier et deuxième tours des élections présidentielles ou législatives, tout candidat ou parti politique peut contester la validité du scrutin devant la Cour Constitutionnelle.

La Cour peut selon les cas annuler l’élection ou confirmer le résultat en proclamant le candidat régulièrement élu.

La Cour Constitutionnelle veille sur la conformité à la Constitution des lois organiques adoptées par le Parlement et qui sont obligatoirement soumises à son appréciation avant leur promulgation.

Les autres catégories de loi peuvent aussi être déférées à la censure de Cour en cas de saisine par des autorités limitativement énumérées. Il s’agit du Président de la République, du Premier ministre, du Président de l’Assemblée Nationale ou d’un dixième des députés, du Président du Haut Conseil des Collectivités Territoriales ou d’un dixième des conseillers nationaux.

En d’autres termes les simples citoyens ne sont pas habilités à saisir la Cour Constitutionnelle alors qu’il s’agit d’une tendance forte en droit comparé et qui est permise par exemple dans certains pays de la sous-région. C’est en l’occurrence le cas au Bénin.

La Cour Constitutionnelle se prononce par ailleurs le caractère législatif ou règlementaire des dispositions qui lui sont soumises.

Elle est également saisie par le Président de l’Assemblée Nationale et le Premier ministre pour constater la vacance de la présidence de la République ou l’empêchement absolu ou définitif du Président de la République.

Elle est enfin obligatoirement saisie pour se prononcer conformément à la Constitution sur la réunion des circonstances qui habilitent le Président de la République à faire usage de pouvoirs exceptionnels lorsque le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu ou en cas de menaces graves sur les institutions de la République, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux.

Les débats devant la Cour Constitutionnelle ne sont pas publics. Par contre la procédure est écrite et gratuite. Les parties peuvent se faire assister par le conseil de leur choix notamment dans le cadre du contentieux électoral.

A souligner enfin que les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont pas susceptibles de recours et s’imposent aux pouvoirs publics, aux autorités administratives et juridictionnelles et à toutes les personnes physiques et morales.

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Fiche n° 7 : la Haute Cour de Justice

Compétence et composition

La Loi n° 97-001 du 13 janvier 1997 fixe la composition et les règles de fonctionnement de la HCJ ainsi que la procédure suivie devant elle

La Haute Cour de Justice est une institution prévue par la Constitution (article 25, 95 et 96) qui est chargé de juger le président de la République pour des faits de haute trahison.

De même, la Haute Cour de Justice est également compétente pour juger les ministres pour des faits qualifiés de crime ou délit dans l’exercice de leurs fonctions.

La haute trahison n’est définie en tant qu’infraction ni dans le Code pénal, ni dans la Constitution ou un texte normatif quelconque même si plusieurs auteurs s’accordent pour reconnaître qu’il s’agit de faits relatifs à la violation du serment prononcé par le Président de la République lors de son entrée en fonction.

En raison de son importance, il convient de rappeler ce serment ainsi libellé à l’article 37 de la Constitution : « je jure devant Dieu et le Peuple malien de préserver en toute fidélité le régime républicain, de remplir mes fonctions dans l’intérêt supérieur du peuple, de préserver les acquis démocratiques, de garantir l’unité nationale, l’indépendance de la patrie et l’intégrité du territoire national.

Je m’engage solennellement et sur l’honneur à mettre tout en œuvre pour la réalisation de l’unité africaine »

La Haute Cour de Justice est composée de neuf (09) juges titulaires et de neuf (09) juges suppléants tous désignés par l’Assemblée Nationale.

Les membres titulaires élisent en leur sein un Président et un Vice –Président. Les fonctions de juge à la HCJ prennent fin en même temps que le mandat de député ou en cas démission. Avant d’entrer en fonction, aussi bien les membres titulaires que les membres suppléants prêtent serment devant l’Assemblée Nationale.

Le Ministère public près la Haute Cour de Justice est assuré par le Procureur Général près la Cour Suprême tandis que l’instruction est mise en œuvre par une commission composée de 05 magistrats dont trois titulaires et deux suppléants désignés parmi les magistrats de la section judiciaire de la Cour.

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Procédure

Le Parlement est saisi par son président lorsque le Président de la République est susceptible d’être inculpé de Haute trahison.

Par contre s’il s’agit d’un ministre qui encourt des poursuites pour crimes ou délits commis dans l’exercice de ses fonctions, le dossier est transmis par le procureur de la République au procureur général près la Cour Suprême qui l’adresse au Président du Parlement.

La mise en accusation est votée par les députés à l’exception des juges titulaires et suppléants à la majorité des 2/3 et par scrutin public conformément aux dispositions de l’article 95 de la Constitution. Il est important de souligner à ce niveau que la Haute Cour de Justice est liée par la définition des crimes et délits et par la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits. En d’autres termes, la Haute Cour de Justice ne saurait retenir dans les liens de l’accusation le Président de la République ou les ministres pour des faits autres que ceux retenus et votés par l’Assemblée Nationale.

La résolution de mise en accusation et le dossier sont transmis par le Président de l’Assemblée Nationale au Procureur Général près la Cour Suprême qui à son tour saisit le Président de la Commission d’instruction. Les inculpés sont invités à se faire assister par un conseil de leur choix et à défaut de choix exprimé, le Président de la Commission d’instruction leur en désigne d’office parmi les avocats inscrits au tableau de l’Ordre.

La Commission procède à toute information utile à la manifestation de la vérité tant à charge qu’à décharge. Si au terme de l’instruction il ressort que les faits ne constituent ni haute trahison, ni crime, ni délit, elle prend une ordonnance de non- lieu à suivre. Dans le cas contraire, elle ordonne le renvoi devant la Haute Cour de Justice.

Les accusés reçoivent signification de l’ordonnance de renvoi au plus tard huit jours avant leur comparution. Les débats se déroulent conformément aux prescriptions du Code de procédure pénale. Ils sont publics sauf huis –clos ordonné à titre exceptionnel par le Président de la Cour.

Aucune constitution de partie civile n’est possible devant la Haute Cour de Justice. Les actions en réclamations ou demandes de dommages et intérêts sont portées devant les juridictions de droit commun après la condamnation prononcée par la Haute Cour.

Il convient de souligner à ce niveau que la Haute Cour de Justice se prononce sur la culpabilité des accusés par vote à bulletin secret.

Les arrêts de la Haute Cour de Justice ne sont susceptibles ni d’appel, ni de pourvoi en cassation. Seul le recours en révision est admis dans les conditions fixées par le Code de procédure pénale par exemple lorsqu’après une condamnation, on découvre un fait ou des pièces qui sont de nature à établir l’innocence de l’intéressé.

Ce recours est uniquement ouvert :

-au condamné ou en cas d’incapacité à son représentant légal ;

-après la mort du condamné ou en cas d’absence déclarée à son conjoint, à ses descendants ou ascendants, à ses légataires universels ou à ceux qui ont reçu de lui une mission dans ce sens.

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Fiche n° 8 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le magistrat

Définition et typologie

Les magistrats sont régis par un statut particulier (Loi n° 02-054 du 16 décembre 2002 à laquelle est annexé un Code déontologie) et ont pour mission rendre justice en disant le droit. On distingue les magistrats du siège et les magistrats du parquet.

Les magistrats du siège sont effectivement chargés de dire le droit en se prononçant sous forme de jugement, d’ordonnance et d’arrêt.

Parmi les magistrats du siège, il y a les juges d’instruction chargés d’ouvrir une information dans les cas précisés par le Code de procédure pénale, obligatoirement en cas de crime ou facultativement en cas de délit revêtant une certaine complexité. A la fin de l’information, ils statuent par voie d’ordonnance de non –lieu lorsque les faits ne sont pas établis ou de renvoi devant le tribunal dans le cas contraire.

Les magistrats du parquet pour leur part ne jugent pas mais demandent (requièrent) l’application la loi après avoir mis en œuvre toutes les dispositions pour déférer l’auteur d’une infraction devant le tribunal. On dit qu’ils assurent la poursuite de l’infraction. Ils sont placés sous l’autorité du Ministre de la Justice qui peut leur donner des instructions par le canal du Procureur Général près la Cour d’Appel de leur ressort.

Accès au corps et Déroulement de la carrière

L’accès au corps est possible par voie de concours ou sur titre. Comme conditions requises, le candidat à l’auditorat doit outre les conditions de moralité :

-être titulaire d’une maîtrise en droit privé ou public ou d’un diplôme de même spécialité et d’un niveau au moins équivalent ; -être de nationalité malienne ; - jouir de ses droits civiques ; -se trouver en position régulière au regard des lois sur le recrutement de l’Armée ;- remplir les conditions d’aptitude physique ;- Etre âgé de 21 ans au moins et 40 ans au plus, limite qui peut être modulée sans pour autant dépasser 45 ans ;

Les candidats admis au concours de recrutement organisé par le Ministère de la Justice sont nommés auditeurs de justice et doivent suivre une formation théorique et pratique qui s’étend sur une durée de 2 ans à l’Institut National de Formation Judiciaire.

Le recrutement sur titre est ouvert aux avocats et aux notaires ayant au moins 15 ans d’ancienneté et régulièrement inscrits ainsi qu’aux titulaires d’un doctorat en droit privé ou public.

A l’issue de leur formation, les auditeurs de justice sont nommés magistrats après leur admission à l’examen de sortie. Ils prêtent serment devant la Cour d’Appel et en fonction de leur classement sont affectés dans les juridictions.

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Dans le cadre du déroulement de leur carrière, ils évolueront au départ au sein du 2è grade avant d’accéder au premier grade et de terminer en principe au grade exceptionnel. Ils peuvent indifféremment passer du siège au parquet ou vice-versa ou encore des juridictions de droit commun (Tribunal de Grande Instance ou Tribunal d’ Instance) aux juridictions d’exception (Tribunal du travail, Tribunal de commerce..). Ils exerceront ensuite à la Cour d’Appel et ont vocation à terminer leur carrière à la Cour Suprême qui est placée au sommet de la pyramide judiciaire.

Droits et devoirs

Les magistrats du siège comme rappelés ci –dessus sont indépendants et inamovibles. En d’autres termes, ils ne peuvent faire l’objet de mutation pendant une durée de trois ans sauf pour nécessité de service ou en cas de faute disciplinaire. C’est une manière de les mettre à l’abri de toute pression dans la distribution de la justice.

Par contre ceux du Parquet peuvent à tout moment être déplacés et sont indivisibles, c’est-à-dire peuvent se remplacer au cours d’une audience sans que cela prête à conséquence. Ils sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du Ministre de la Justice.

Cette subordination est toutefois limitée par les pouvoirs propres des chefs de parquet. En cas de refus d’exécuter une instruction du Ministre, celui –ci ne peut prendre une décision à leur place. En outre à l’audience le procureur de la République ou son substitut conserve sa liberté de parole et peut défendre une position contraire aux instructions écrites reçues et exécutées. C’est ce qu’on illustre par le célèbre adage : « la plume est serve mais la parole est libre ».

Dans l’exercice de leurs fonctions, les magistrats sont protégés contre toute menace ou attaque dont ils peuvent faire l’objet et ont droit dans les cérémonies officielles à des honneurs civils et militaires.

Ils sont par ailleurs astreints au port d’un costume dont la composition est fixée par décret pris en Conseil des Ministres. Ils ont l’obligation de résider au siège de la juridiction où ils exercent et ne peuvent en dehors de leurs fonctions se livrer à des activités autres que celles d’enseignement, des travaux scientifiques, artistiques ou littéraires. Ils ne peuvent militer au sein d’un parti politique mais ils ont le droit d’adhérer à un syndicat pour la défense des intérêts de leur profession.

Lorsqu’un magistrat viole une des interdictions ainsi prévues, il encourt des poursuites disciplinaires qui sont également possibles toutes les fois qu’il est coupable d’abus de droit notoire ou de manque avéré de diligence dans l’accomplissement de sa mission.

Le Conseil Supérieur de la Magistrature est saisi en cas de faute disciplinaire. Il peut prononcer en fonction de la gravité des faits des sanctions qui vont de la réprimande avec inscription au dossier à la révocation avec ou sans suppression de droit à la pension.

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Fiche n° 9 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le greffier et le secrétaire de greffe et parquet

Définition et typologie

Les greffiers et les secrétaires de greffes et parquets sont régis par l’Ordonnance n° 05 -014 / P-RM du 22 mars 2005 portant statut du personnel du cadre des greffes et secrétaires de greffes et parquets.

Le greffier qui tient la plume lors des audiences est en somme la mémoire du tribunal. C’est un fonctionnaire investi de la qualité d’officier public. On distingue les greffiers en chef, les greffiers et les secrétaires de greffes et parquets.

Les greffiers en chef qui sont des fonctionnaires de la catégorie A dirigent le service du greffe, en assurent la responsabilité et la gestion administrative sous l’autorité des chefs de juridiction, de parquet et de services.

Les greffiers qui sont pour leur part des fonctionnaires de la catégorie B2 assistent les greffiers en chef et les magistrats dans leurs missions sous l’autorité des chefs de juridictions, de parquets et de services. Ils peuvent être désignés par l’autorité hiérarchique pour exercer d’autres fonctions du greffe.

Les secrétaires de greffes et parquets enfin sont des fonctionnaires de la catégorie B1. Ils sont chargés des tâches administratives d’’exécution sous l’autorité des chefs de juridictions, de parquets, de services, des greffiers en chef et des greffiers.

Accès au corps et déroulement de la carrière

L’accès aux différents corps est uniquement prévu par voie de concours à conditions que le postulant remplisse les critères suivants :

-avoir la nationalité malienne ;

-jouir de ses droits civiques et être de bonne moralité ;

- se trouver en position régulière au regard des textes sur le recrutement de l’Armée ;

-être âgé de 18 ans au moins et 32 ans au plus pour les secrétaires de greffes et parquets ;

- être âgé de 35 ans au plus pour les greffiers et 40 ans au plus pour les greffiers en chef ;

-remplir les conditions d’aptitude exigées pour l’accession au corps de recrutement ;

- être titulaire d’une maîtrise en droit ou d’un diplôme reconnu comme équivalent pour les greffiers en chef ;

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- être titulaire d’un brevet de technicien en droit ou d’un diplôme reconnu comme équivalent pour les greffiers ;

- enfin être titulaire d’un Certificat d’Aptitude Professionnelle ou d’un diplôme reconnu comme équivalent pour les secrétaires de greffe et parquet.

Après leur admission au concours, les greffiers en chef, greffiers et secrétaires de greffes et parquets suivent une formation de 18 mois à l’Institut National de Formation Judiciaire.

Attributions, Droits et Obligations

A l’issue de la formation, le greffier en chef est nommé et titularisé par arrêté du Ministre de la Justice. Il prête le serment prescrit conformément à la loi, est astreint au port d’un costume lors des audiences et des cérémonies solennelles des cours et tribunaux. En outre le greffier en chef est installé au cours d’une audience solennelle.

Il assiste au quotidien le juge dans les actes de sa juridiction et authentifie les décisions de justice dont il délivre les expéditions, copies et grosses de jugements et d’arrêts. Il est dépositaire des minutes et archives dont il assure la conservation. Il assure la garde des scellés et de toutes sommes et pièces déposées au greffe.

Il peut désigner sous sa responsabilité un ou plusieurs greffiers et secrétaires de greffes et parquets pour exercer tout ou partie des fonctions ainsi répertoriées.

Il est formellement interdit au greffier en chef, au greffier et au secrétaire de greffe et parquet de solliciter ou recevoir directement ou par personne interposée même en dehors de leurs fonctions mais en raison de celles-ci des dons, gratifications ou avantages quelconques. De même, il est interdit aux intéressés d’exercer toute activité commerciale même par personne interposée.

Ils doivent en toute circonstance, veiller à la promotion des intérêts de la collectivité et éviter tout comportement de nature à compromettre la dignité de la fonction.

Le droit et la liberté syndicale sont reconnus aux intéressés. De même ils ont droit aux émoluments spéciaux prévus par les textes en vigueur.

Une Commission Administrative paritaire est créée au sein de chaque corps pour prendre en charge les questions liées à l’avancement ou à la discipline. A ce titre , elle est saisie des questions individuelles intéressant tout greffier en chef, greffier et secrétaire de greffes et parquets en ce qui concerne les manquements à la discipline , l’insuffisance professionnelle et le recours en matière de notation.

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Fiche n° 10 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’avocat

Définition

L’avocat est celui qui est au sein des professions juridiques et judiciaires quotidiennement au contact des tribunaux. A ce titre l’avocat peut plaider devant n’importe quel type de juridiction. Sa compétence s’étend à l’ensemble du territoire national. Ainsi un avocat inscrit près la Cour d’Appel de Kayes peut se déplacer pour défendre un dossier devant le Tribunal de Grande Instance de Gao.

Les avocats sont régis par le Règlement n° 5 CM/UEMOA du 25 / 09 / 2014 entré en vigueur le 1er janvier 2015 relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace UEMOA, complété en tant que de besoin par les dispositions non contraires de la Loi n° 94-042 / AN-RM du 13 octobre 1994 portant création et organisation de la profession d’avocat. Dans le cadre des dispositions communautaires, l’avocat exerçant au Mali peut ouvrir un cabinet dans tous les pays membres de l’espace UEMOA.

Organisation

Aux termes des dispositions précitées, l’avocat qui exerce des fonctions judiciaires et juridiques est un des acteurs principaux du service public de la justice et non un « auxiliaire de justice » selon la formule anciennement consacrée.

Défenseur de la veuve et de l’orphelin, les avocats sont organisés en Conseil de l’Ordre sous forme d’un Barreau unique. Le Conseil de l’Ordre est à ce titre chargé de représenter la profession auprès des pouvoirs publics. Il est élu pour trois ans par les avocats inscrits au tableau. Il est habilité à traiter toutes questions relatives à l’exercice de la profession et veille à l’observation des devoirs des avocats ainsi que la protection de leurs droits.

Le Conseil de l’Ordre est dirigé par un Bâtonnier élu parmi les avocats en exercice qui représente le Barreau dans tous les actes de la vie civile. « Il prévient et concilie les différends d’ordre professionnel entre les membres du Barreau et instruit toute réclamation formées par les tiers »

Accès au Barreau et Exercice de la profession

L’accès au corps est possible par voie de concours ou sur titre. Comme conditions requises, le candidat doit :

-être de nationalité malienne ; être de bonne moralité ; être âgé de 21 ans an moins ; justifier soit d’un Master II en droit reconnu par le CAMES soit d’une maîtrise en droit ou d’un titre reconnu comme équivalent et être titulaire d’un Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat reconnu dans l’espace UEMOA.

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Les Professeurs agrégés des facultés de droit sont intégrés sur titre. De même les magistrats justifiant au moins 10 ans d’exercice effectif de leur profession peuvent demander sans condition de stage leur inscription au tableau de l’Ordre après avoir démissionné de leurs fonctions. Après le concours, les avocats postulants suivent une formation sanctionnée par la délivrance d’un Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat (CAPA). Cette formation théorique et pratique s’étend sur une durée de 3 ans susceptible de prorogation.

Avant d’entrer en fonction, sur présentation du Bâtonnier, l’avocat prête serment devant la Cour d’Appel.

Il est astreint au port d’un costume dont la composition est fixée par Décret pris en Conseil des Ministres.

Il doit enfin être inscrit au tableau de l’Ordre. L’avocat est libre d’exercer soit à titre individuel, soit à titre de collaborateur d’un autre avocat, soit d’associé ou de salarié. Il peut également exercer en groupe par le biais de Société Civile Professionnelle, de Cabinets groupés ; de Société Civile de Moyens et enfin de Groupe d’Intérêt Professionnel.

Lorsqu’il exerce à titre de salarié d’un avocat ou d’un cabinet d’avocat, il ne peut avoir de clientèle personnelle mais la subordination à l’employeur se limite aux seules conditions de travail. L’avocat a seul qualité pour plaider. Il peut assister et représenter son client en toute matière et devant tous types de juridictions, organismes juridictionnels et disciplinaires, instances arbitrales, Administrations Publiques…

A noter toutefois certaines dérogations. Ainsi, les parties peuvent toujours se présenter en personne ou désigner un représentant devant les juridictions. Ce droit est reconnu à toute personne physique ou morale qui peut par obligation naturelle ou professionnelle plaider ou présenter des conclusions écrites pour elle-même, parents ou alliés, employeurs ou employés.

Droits et devoirs

Dans l’exercice de ses fonctions, l’avocat est couvert par une immunité de parole et d’écrit et ne peut ainsi être poursuivi pour des propos tenus à la barre dans sa plaidoirie sous réserve des injures, diffamations ou outrages susceptibles de poursuite pénale. Dans le même ordre d’idées, son cabinet est inviolable et ne peut faire l’objet de perquisition qu’à la suite d’une autorisation écrite délivrée par le Procureur Général. Vis-à-vis du client, l’avocat est tenu d’une obligation de moyens et en cas de contestation sur les honoraires, les réclamations sont portées devant le Bâtonnier.

Parallèlement à ses droits, l’avocat dans le cadre de l’obligation de moyens qui lui incombe, doit faire preuve de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence dans la conduite de l’affaire qu’il a choisi de défendre. Il ne peut refuser de défendre lorsqu’il est commis d’office.

Dans tous les cas, les écarts de conduite sont passibles de poursuites disciplinaires. Il convient de souligner à ce titre que la profession est incompatible avec toute fonction publique ou espèce de négoce. Toutefois il est permis à l’avocat de dispenser des cours dans les écoles ou facultés.

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Fiche n° 11 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le notaire

Définition

Le notaire est un officier public ministériel institué à vie dont la mission est d’assurer le service public de la preuve (article 3 de l’Ordonnance n° 2013 – 027 / P-RM du 31 décembre 2013 portant Statut des Notaires). Il reçoit tous les actes auxquels les parties veulent donner un caractère d’authenticité pour en assurer la date et en conserver le dépôt, en délivrer des grosses, expéditions ou extraits.

Organisation

Les notaires sont régis par un Ordre qui est un établissement Public à caractère professionnel doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière et qui comprend tous les notaires exerçant sur le territoire national.

L’Ordre a notamment pour rôle de prévenir et concilier les différends d’ordre professionnel entre notaires ; d’examiner toute réclamation de la part d’un tiers contre les notaires dans l’exercice de leurs fonctions et de saisir à défaut de règlement amiable la juridiction compétente après en avoir avisé le ministre de la Justice. Il vérifie par ailleurs la tenue des comptabilités des études et donne son avis en matière de création, transfert ou suppression de charges. Le Président de l’Ordre est élu pour un mandat de 3 ans renouvelable et représente l’Ordre vis-à-vis des pouvoirs publics et dans les actes de la vie courante.

Accès à la profession et exercice de la charge

L’accès au corps est possible par voie de concours ou sur titre. Comme conditions requises, le candidat doit : être âgé au moins de 21 ans révolus ; être de nationalité malienne ou ressortissant d’un Etat accordant la réciprocité ; justifier d’une bonne moralité et jouir de ses droits civils ; Etre titulaire d’une maîtrise en droit ou d’un diplôme reconnu comme équivalent.

Sont admis sur titre et dans un proportion de 30 % des places disponibles les titulaires d’un diplôme supérieur de notariat ; les titulaires d’un diplôme de 3è cycle de spécialité notariale ; les clercs de notaires inscrits sur le registre des clercs et ayant dix ans au moins d’expérience professionnelle ; les titulaires d’un doctorat en droit privé et enfin les magistrats, avocats et huissiers de justice ayant 10 au moins et 20 ans au plus d’expérience professionnelle sous la condition de réciprocité d’accès par les notaires à ces professions.

Après le concours, les candidats admis sont nommés aspirants – notaires par arrêté du ministre de la Justice après avis conforme de l’Ordre des notaires.

L’aspirant –notaire est inscrit sur un registre paraphé par le Premier Président de la Cour d’appel et suit une formation dispensée à l’Institut National de Formation Judiciaire. Un Certificat d’Aptitude à la Profession de Notaire est délivré à l’issue de cette formation. La

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durée de stage est de 3 ans en principe et réduite à deux ans pour les candidats admis sur titre.

L’aspirant –notaire qui accomplit avec succès son stage de formation théorique et pratique est nommé notaire. Il peut exercer à titre individuel ou s’associer avec un ou plusieurs confrères dans le cadre d’une société civile de moyens, c’est-à-dire la mise en commun des moyens nécessaires à l’exercice de leurs activités. Les notaires peuvent également créer une société civile professionnelle en vue d’exercer en commun. Dans ce cas, la charge vacante suite à la création de la société civile professionnelle sera fermée dans le délai d’un an.

Le greffier – en- chef assure la fonction de notaire dans les juridictions dépourvues d’office mais sa compétence s’exerce uniquement dans les limites territoriales de la juridiction contrairement au notaire titulaire d’un office dont la compétence couvre l’ensemble du territoire national.

Droits et devoirs

L’office notarial est une charge publique qui comporte d’une part à la fois le titre, en l’occurrence le droit d’exercer la fonction dont l’attribution appartient à l’Etat et d’autre part le patrimoine mobilier cessible à un nouveau postulant par le notaire ou ses ayants –droit sous le contrôle de l’Ordre des notaires.

Le cessionnaire doit un prix dont le montant en cas de désaccord est soumis à une Commission comprenant un représentant du ministre chargé de la Justice ; un représentant du ministre chargé des Finances et 3 représentants de l’Ordre des notaires.

L’office notarial est inviolable et son accès subordonné à une autorisation du Procureur Général près la Cour d’appel. Dans les cérémonies publiques, le notaire est astreint au port d’un costume dont la composition est fixée par décret en Conseil des ministres.

Il est tenu de prêter son ministère lorsque son office est requis et résider dans le lieu fixé par son décret de nomination ; Il ne peut s’absenter du territoire national que sur autorisation du Président du Bureau de l’Ordre sous peine de sanction. Il doit en outre prêter serment dans les trois mois de sa nomination devant la Cour d’appel de sa résidence et déposer ses signature et paraphe au greffe de la Cour d’appel.

Il lui est interdit de se livrer à toute opération de bourse ou de commerce , de s’immiscer dans l’administration d’une société ou entreprise de commerce ou d’industrie à laquelle il prête son ministère ; de servir de prête –nom ; de consentir avec ses deniers personnels des prêts non constatés par acte authentique ; de recevoir ou conserver des fonds à charge d’en servir intérêt ; d’utiliser même temporairement les sommes et valeurs dont il est détenteur à titre quelconque à un usage auquel elles ne seraient pas destinées. Le notaire est enfin tenu de garantir sa responsabilité civile à l’égard de la clientèle en souscrivant une assurance et verser un cautionnement à la Caisse de Dépôt et Consignation pour garantir le paiement des amendes encourues pour faute commise dans l’exercice de ses fonctions.

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Fiche n ° 12 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’Huissier - Commissaire de Justice.

Avant la loi n°2016-053 du 20 Décembre 2016 portant Statut des huissiers-commissaires de justice, les huissiers étaient régis par la loi n° 08-048 du 26 décembre 2008 et les commissaires-priseurs par la loi n° 88-04 ANRM du 27 Février 1988. Il y avait donc deux (02) corps distincts et c’est une nouvelle profession dont les membres portent le titre d’huissier-commissaire de justice qui est substituée aux professions d’huissier et de commissaire-priseur. Les huissiers -commissaires de justice sont des officiers ministériels et publics qui assurent le service public de la signification et de l’exécution.

Rôle et responsabilités

Les huissiers -commissaires de justice exercent une profession libérale en toute indépendance. Ils délivrent les convocations en justice : les « assignations » en matière civile, et « citations », en matière pénale et mettent en œuvre certaines procédures d’exécution forcée. Ainsi, lorsqu’ un débiteur refuse de régler sa dette vis-à-vis du créancier, celui-ci est habilité par la loi à pratiquer une saisie sur les biens du débiteur. Une fois l’autorisation de saisie obtenue du tribunal, l’huissier –commissaire de justice sera mis à contribution pour effectuer la saisie.

Les huissiers –commissaires de justice assurent par ailleurs le service des audiences des cours et tribunaux et sont astreints à cette occasion au port d’un costume dont la composition est fixée par arrêté du ministre de la Justice. Ils font exécuter les décisions de justice notamment par les mises en demeure, les commandements de payer... Ils mettent en œuvre les mesures conservatoires et les mesures générales ou spécifiques d’exécution forcée à travers les saisies- ventes, saisie- attribution, expulsion ; saisie ou immobilisation de véhicule, saisie des rémunérations du travail…

Ils rédigent tous les actes de procédures judiciaires et extrajudiciaires dont le particulier ou l’entreprise peut avoir besoin dans sa vie privée ou dans le cadre de son activité professionnelle. Ils réalisent les sûretés judicaires sur le patrimoine immobilier du débiteur comme par exemple inscrire une hypothèque provisoire ou définitive, sur le patrimoine de celui-ci.

Ils ont le monopole de la loterie commerciale notamment des jeux et concours, Ils procèdent à la vente aux enchères publiques des biens reformés de l’Etat, des collectivités territoriales, du secteur parapublic, des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours de la puissance publique, ainsi que de ceux des organisations non gouvernementales, des représentations diplomatiques... Ils sont requis en matière de procédure collective, pour procéder à l’inventaire, à la prisée et à la vente publique aux enchères des objets mobiliers ou à la requête de toute personne physique ou morale. Ils supervisent les ouvertures de plis des

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marchés soumis à concurrence, les ventes sous plis fermés et les locations des immeubles de l’Etat.

Recrutement

Le postulant à l’admission au stage d’huissier – commissaire de justice de justice doit : Etre titulaire d’une maitrise en droit ou d’un diplôme national ou étranger réglementairement considéré comme une spécialité ou d’un niveau équivalent ou supérieur ; Etre de nationalité malienne ou ressortissant d’un Etat accordant la réciprocité ; Jouir de ses droits civiques et être de bonne moralité ; Etre âgé de 21 ans révolus. Peuvent être nommés aussi huissiers- commissaire de justice dans la proportion de 10% des places mises au concours : les personnes titulaires d’un doctorat en Droit Privé ; les clercs d’huissiers –commissaires de justice ayant au moins dix (10) ans d’exercice.

Les candidats admis au concours sont nommés huissiers- commissaires de justices stagiaires par arrêté du ministre de la Justice .Ils suivent une formation de deux (02) ans à l’Institut National de Formation Judicaire (INFJ) dont une année de formation théorique et une année de formation pratique. Apres les deux années de formation, ils sont nommés par décret pris en Conseil des ministres sur proposition du ministre chargé de la Justice .Le même décret fixe le ressort territorial de l’huissier- commissaire de justice.

Droits et obligations

Les huissiers – commissaires de justice sont protégés par les lois et règlements dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leur fonction. Ils ont le droit de requérir l’assistance de la force publique. L’huissier – commissaire de justice avant d’entrer en fonction est tenu de prêter serment devant la Cour d’appel de sa résidence.

Il est tenu de garantir sa responsabilité par la souscription d’une police d’assurance individuelle et d’une police d’assurance professionnelle. Il est en outre astreint au paiement d’un cautionnement en espèce de Cent Mille (100.000) FCFA à la Caisse des Dépôts et Consignations. Les actes des huissiers- commissaires de justice font foi jusqu’à inscription de faux.

Il lui est interdit de se rendre directement ou indirectement adjudicataire de biens meubles ou immeubles dont il est chargé de poursuivre ou de procéder à la vente ; de se rendre directement ou indirectement cessionnaire de droits successoraux d’actions et droits litigieux, objets de procédures dans lesquelles il a officié ; de percevoir des droits et émoluments autres que ceux prévus par les textes en vigueur. Tout refus d’instrumenter, tout retard injustifié dans l’exécution portant préjudice peut exposer le contrevenant à une sanction disciplinaire sans préjudice de l’action en réparation de la victime.

Enfin, l’huissier commissaires de justice ne peut instrumenter ni pour lui-même ni pour ses conjoints, ses parents en ligne directe et ligne collatérale jusqu’au 4eme degré inclusivement sous peine de sanction disciplinaire et de nullité de l’acte.

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Fiche n° 13 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - les officiers et agents de police judiciaire

Définition

Il est courant d’opposer le terme de police judiciaire à celui de police administrative alors qu’il s’agit de fonctions complémentaires. En effet si la police administrative vise à prévenir la commission d’une infraction, la police judiciaire par contre est chargée de constater la commission de toute infraction , d’en rechercher l’auteur et de le déférer devant la juridiction compétente.

C’est l’exemple classique de l’agent en faction devant un carrefour qui règle la circulation pour éviter les accidents (tâche de police administrative) et qui dresse aussitôt procès-verbal en cas de violation du Code de la route par un automobiliste (tâche de police judiciaire).

Les officiers et agents de police judiciaire sont ainsi chargés de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte. Lorsqu’une information est ouverte, ils exécutent les délégations des juridictions d’instruction et défèrent à leurs réquisitions.

Composition

La composition de la Police judiciaire découle de la liste établie par le Code de Procédure Pénale ( Loi n°01-80 du 20 août 2001 modifiée par la Loi 2013-016 du 21 mai 2013 ) dont il ressort d’une part les Officiers de Police Judiciaire (OPJ) visés à l’article 33 et d’autre part les Agents de Police Judiciaire (APJ) visés à l’article 37 et enfin certaines catégories de personnel et agents investies de pouvoirs de police judiciaire ( articles 39 à 41 ).

Les Officiers de police judiciaire

Le CPP définit la liste des OPJ qui se compose ainsi qu’il suit : -les maires et leurs adjoints ;-le Directeur Général de la Police Nationale et son Adjoint ;-le Directeur Général de la Gendarmerie Nationale et son adjoint ;-les Officiers de la gendarmerie nationale en poste dans les services actifs de la police judiciaire ; -les fonctionnaires du corps des commissaires de police de la Police Nationale en poste dans les services actifs de la police judiciaire ; -les inspecteurs de police ayant au moins 5 ans d’ancienneté nommés OPJ par arrêté du ministre de la Justice sur proposition du Procureur Général ; -les sous –officiers de la gendarmerie ayant au moins 5 ans d’ancienneté nommés OPJ par arrêté du ministre de la Justice sur proposition du Procureur Général.

Les Agents de police judiciaire

Les fonctionnaires des services actifs de police et de gendarmerie qui n’ont pas la qualité d’OPJ sont Agents de police judiciaire

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Les Fonctionnaires et agents investis de pouvoirs de police judiciaire

Il s’agit essentiellement des ingénieurs et agents assermentés des Eaux et Forêts ; des fonctionnaires et agents habilités à instrumenter en matière de douanes, de commerce et de concurrence ainsi qu’en matière de législation de travail. A souligner le cas des hauts commissaires de l’Etat c’est-à-dire les gouverneurs de régions et du District de Bamako investis de certains pouvoirs de police judiciaire en matière de crimes et délits contre la sûreté de l’Etat.

Attributions

Après la commission d’une infraction, il s’écoule un laps de temps avant la saisine des tribunaux dans la mesure où il faut procéder à des investigations, des recherches ou enquêtes et enfin à l’arrestation du suspect. Une fois saisi, l’officier ou l’agent de police judiciaire après avoir avisé le procureur de la République se déplace pour procéder à des constatations et recherches sur les lieux de l’infraction. Ainsi, il va recueillir sur place toute trace ou indice notamment à travers des prises de vue, relevés d’empreintes digitales…S’il s’avère que l’arme ayant servi à commettre l’infraction se trouve ailleurs, l’OPJ peut sans désemparer procéder à des perquisitions qui ne peuvent cependant être entamées avant 6 H et après 18 H sous réserve des dérogations prévues par la loi et des réclamations faites de l’intérieur. En tout état de cause, il appartient à l’OPJ de veiller au respect du secret professionnel et des droits de la défense. Les pièces à conviction sont inventoriées et placées sous scellés en présence des personnes ayant assisté à l’opération.

Si l’OPJ estime devoir s’assurer de la personne du suspect afin d’éviter une fuite éventuelle ou une influence sur les témoins, il décidera d’une mesure de garde à vue dont la durée est fixée à 48 H, délai qui est susceptible d’être prorogé à 72 H à condition qu’il existe des indices graves et concordants motivant l’inculpation du suspect par le juge d’instruction. A noter également à ce niveau des cas de dérogations qui autorisent des délais plus longs, particulièrement en matière d’infractions liées à la criminalité organisée notamment en matière de terrorisme. Après l’ouverture d’une information, la police judiciaire procède à l’exécution des délégations judiciaires et des commissions rogatoires.

Contrôle et responsabilité des OPJ et des APJ

Le cadre d’intervention des OPJ et des APJ touchant de près les libertés individuelles, le législateur a imaginé des garde-fous au stade de l’enquête préliminaire. Ainsi le procureur de la République qui est destinataire des procès-verbaux peut instruire à l’OPJ l’audition de toute personne dont la déposition est utile à la manifestation de la vérité, lui enjoindre d’effectuer des transports, perquisitions, saisies. A n’importe quelle phase de la procédure, il peut dessaisir un OPJ au profit d’un autre qu’il estime plus diligent ou plus efficace. Quant au Procureur Général, il lui revient de proposer au garde des Sceaux la nomination des inspecteurs de police et des sous –officiers de gendarmerie ayant 5 ans d’ancienneté en qualité d’OPJ. En cas de manquement dans l’exercice des fonctions, la Chambre d’accusation assure le rôle de juridiction disciplinaire des OPJ. Si les faits sont de peu de gravité, la Chambre d’accusation peut se contenter d’adresser des observations à l’OPJ ; Dans le cas contraire, l’intéressé peut se voir infliger une interdiction temporaire ou définitive d’exercer en qualité d’OPJ.

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Fiche n° 14 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - le surveillant des services pénitentiaires

Définition

Le surveillant de service pénitentiaire est selon la loi n°2016-031/AN-RM du 07 juillet 2016 portant Statut des Fonctionnaires du Cadre de la Surveillance et de l’Education Surveillée un fonctionnaire de l’Etat chargé de la surveillance et la gestion des services pénitentiaires et de l’Education surveillée. A ce titre, il participe à l’exécution des décisions pénales et au maintien de la sécurité publique. Il est associé au traitement de la peine et à son individualisation et participe aux actions de réinsertion sociale. Missions

Le surveillant de service pénitentiaire a vocation à assumer, sous l’autorité de son chef hiérarchique, les missions de sécurité des personnes et des biens, de maintien ou de rétablissement de l’ordre public, de renseignement et de surveillance et de respect des lois et règlements. Il est un agent de l’autorité publique assermenté doté de compétence pour assurer les tâches d’exécution dans les services de l’administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée et de toutes autres tâches connexes a lui confiées. Il participe aux diverses activités de réinsertion sociale des détenus. Il doit en outre maintenir l’ordre et la discipline dans les Etablissements Publics d’Education Surveillée sur toute l’étendue du territoire national. Ainsi, il assure l’accueil, l’enregistrement, les contrôles des mouvements (entrées et sorties) de toute personne et objet au sein de l’établissement (détenu, visiteur, membre de l’administration, population). Il assure la surveillance avec vigilance et fermeté dans les cellules, dans les lieux de distraction des détenus, dans les lieux de travail, dans les ateliers et dans les lieux de culte. Il assure enfin les escortes temporaires et les transfèrements administratifs et judiciaires. Les Personnels Le cadre des fonctionnaires de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée comprend trois (03) corps : -Le corps des inspecteurs de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée : Les fonctionnaires de ce corps ont vocation à assurer des fonctions de conception, de direction, de contrôle, de coordination, d’encadrement technique, administratif et de recherche se rapportant aux activités de l’administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée. Ils sont en outre chargés de la gestion administrative financière et matérielle des établissements pénitentiaires et de l’éducation surveillée. Ils peuvent enfin dispenser dans les

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établissements de formation spécialisée des enseignements correspondant à leur profil. En principe, ils ont vocation à occuper en priorité les fonctions de Régisseur de la maison d’arrêt. -Le corps des Contrôleurs de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée : Les fonctionnaires relevant de ce corps ont vocation à assumer sous l’autorité de leurs chefs hiérarchiques les missions de renseignement, de surveillance, de maintien ou de rétablissement de l’ordre public ; les tâches d’animation, d’encadrement et de formation des agents techniques de la surveillance et de l’éducation surveillée et toute autre mission connexe. Ils peuvent assurer la gestion administrative, financière et matérielle des établissements pénitentiaires. Ils peuvent aussi dispenser toute formation correspondant à leur profil. -Le corps des agents de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée. Sous l’autorité de leurs chefs hiérarchiques, les fonctionnaires relevant de ce corps ont vocation à assumer les missions de sécurité des personnes et des biens, de maintien ou de rétablissement de l’ordre public, de renseignement et de surveillance. Ils participent en outre aux activités de réinsertion sociale des détenus. Pour être recruté dans ces différents corps, tout postulant doit outre les conditions de nationalité, de moralité et de diplôme requis (maîtrise en Droit, Sociologie ou Psychopédagogie, Brevet de Technicien et CAP selon le corps) :-être âgé de 18 ans au moins et 30 ans au plus pour les inspecteurs ; -être âgé de 18 ans au moins et 26 ans au plus pour les contrôleurs ; -être âgé de 18 ans au moins et 22 ans au plus pour les agents. Ceux qui sont admis au concours suivent une formation militaire obligatoire de 06 mois dont l’issue conditionne l’accès à la formation professionnelle qui s’étale sur 06 mois. La titularisation est acquise à l’issue d’un stage probatoire de 12 mois renouvelable une fois.

Devoirs et interdictions

Le fonctionnaire du cadre de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée doit servir l’Etat avec dévouement, loyauté et intégrité. Il doit notamment veiller à tout moment à la promotion des intérêts de l’Etat et éviter, dans le service tout comme dans la vie privée, tout ce qui serait de nature à compromettre l’image des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée. Il lui est formellement interdit de solliciter ou de recevoir, directement ou par personne interposée même en dehors de ses fonctions mais en raison de celles-ci, des dons, gratifications ou avantages quelconques. Ill ne peut quelle que soit sa position, exercer une activité lucrative ou non lucrative mais susceptible de porter le discrédit sur sa fonction ou à créer une équivoque préjudiciable à celle-ci. Il est tenu à une obligation de ponctualité et d’assiduité dans l’exercice de ses fonctions. Tout fonctionnaire du cadre de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées et tenu de se consacrer, durant les heures de service, à l’accomplissement exclusif de ses fonctions. Avant d’entrer en fonction le fonctionnaire du cadre de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée prête serment devant le Tribunal de Grande Instance.

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Fiche n° 15 : rôle et responsabilité des acteurs de la justice - l’expert judiciaire

Définition Les experts judiciaires sont régis par la Loi n° 88-05 / AN-RM du 27 février 1988 et constituent un maillon important dans la distribution de la justice lorsque se posent des questions techniques qui ne sont pas toujours connues ou bien maîtrisées par le magistrat. L’expertise consiste pour un technicien à examiner les points qui lui sont soumis par le tribunal ou le juge d’instruction et à établir un rapport avec son avis motivé qui sera ensuite transmis.

Organisation et attributions

Les experts judiciaires peuvent exercer à titre individuel ou se regrouper dans le cadre d’une société civile professionnelle. Avant d’entrer en fonction, l’expert judiciaire doit prêter le serment prescrit par la loi mais contrairement aux autres acteurs de la justice, il n’est pas astreint au port d’un costume. Il est permis à un expert étranger d’exercer au Mali à condition de faire une élection de domicile auprès d’un confrère sur place. Ils sont organisés au sein d’un ordre professionnel doté de la personnalité civile qui a pour mission d’assurer la défense de l’honneur, de l’indépendance et des intérêts moraux et matériels de ses membres. A ce titre, l’Ordre est chargé : -de déterminer les règles relatives aux devoirs professionnels et d’élaborer un règlement intérieur dans ce sens ; -d’assurer la discipline des membres et de veiller au respect des devoirs professionnels, de l’honneur et de la probité. -de fixer le montant des cotisations et de s’occuper de toute question d’entraide et de solidarité professionnelle. - de donner son avis sur toute demande d’admission et d’inscription au tableau ; -de contribuer à la formation continue de ses membres dans le cadre des programmes de l’Institut National de Formation Judiciaire. L’ordre est dirigé par un bureau avec un Président qui le représente auprès des pouvoirs publics. Les attributions des experts judiciaires couvrent un champ assez large et il possible d’avoir recours à leur service dans tous les types de litiges tant en matière civile, commerciale, sociale…

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Il en sera ainsi par exemple pour auditer les comptes d’une société en cas de litiges entre associés, d’examiner la position de lots à usage d’habitation pour déterminer un empiètement possible d’une parcelle sur une autre parcelle voisine… De même leur intervention est souvent sollicitée en matière pénale notamment en cas d’accidents de la circulation pour évaluer les dégâts subis par les véhicules entrés en collision. Dans tous les cas de figure, le tribunal ou le juge d’instruction peut désigner un ou plusieurs experts en fonction de la complexité de la tâche. Il leur sera imparti un délai au terme duquel les experts devront adresser leur rapport avec leur avis motivé. A la lumière de l’avis reçu, les parties peuvent demander et le tribunal ordonner un complément d’expertise en désignant le même expert ou une contre-expertise en désignant un autre expert pour être suffisamment édifié. A la fin de ses travaux l’expert percevra des honoraires selon une tarification tenant compte de la complexité des actes accomplis. Il est formellement interdit aux membres de l’Ordre qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales d’assurer une mission de représentation devant les tribunaux et d’effectuer des travaux d’expertise pour des clients auxquels ils sont liés par des relations d’affaires et chez lesquels ils possèdent des intérêts directs ou indirects.

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DROIT CIVIL ET PROCEDURE CIVILE

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Fiche n° 16 : l’assistance judiciaire

Cas pratique

Bakary qui est diplômé sans emploi depuis plusieurs années retourne au village où il compte s’installer pour cultiver la terre. Malheureusement il trouve que le champ paternel est exploité par un riche citadin qui prétend l’avoir acquis à la suite d’une attribution du chef de village.

N’ayant aucune ressource, Bakary souhaite saisir le Juge de Paix pour être mis dans ses droits. Peut-il obtenir gain de cause ?

Définition

En matière d’accès à la justice, l’assistance judiciaire est un dispositif qui permet à un plaideur dépourvu de ressources d’être déchargé de tout frais à payer depuis l’introduction de l’instance jusqu’à l’aboutissement de la procédure après épuisement des voies de recours.

Procédure

Ainsi dans le cas d’espèce, il revient à Bakary de saisir le Bureau d’assistance judiciaire qui est en principe prévu auprès de chaque Tribunal de Grande Instance et des Tribunaux d’Instance qui remplacent les Justices de Paix à Compétence Etendue.

La demande d’assistance judiciaire comporte les pièces suivantes :

-les nom, prénoms, profession, nationalité et domicile du requérant ;

-l’objet du procès à intenter avec l’exposé sommaire des motifs ;

- les nom, prénoms et domicile de la partie adverse ;

-la juridiction saisie ou celle qui doit être saisie de l’affaire ou s’il s’agit d’un acte conservatoire ou d’un acte d’exécution le lieu où ils doivent être exécutés avec indication des nom, prénoms et adresse de l’agent d’exécution ;

-les nom, prénoms et adresses des officiers publics et ministériels choisis, le cas échéant.

La demande est dans tous les cas accompagnée :

- d’un extrait du rôle de ses contributions ou d’un certificat de non- imposition du percepteur de son domicile ;

-d’un extrait de son carnet de famille ;

Cette demande est adressée au Président du Bureau qui est le représentant de l’Etat dans la circonscription administrative ou son délégué.

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Le Bureau d’assistance judiciaire comprend en outre comme membres :

-le maire ou son représentant ;

-le chef du service de l’enregistrement et des domaines ou son représentant ;

-un représentant du Barreau résidant au siège du Bureau s’il y a lieu ;

-le chef de village, de quartier ou de fraction du demandeur ;

Les fonctions de secrétaire sont assurées par le greffier en chef de la juridiction près de laquelle est institué le Bureau ou par tout autre greffier désigné à cet effet.

Le Bureau est en principe mis en place tous les 3 ans au mois de janvier et sa formation constatée par une ordonnance du président du Tribunal.

Effets

Suite à l’examen de la demande et des pièces justificatives requises, le Bureau peut décider du rejet de l’assistance judiciaire, étant entendu qu’aucun recours n’est possible contre une telle décision. Il reviendra à Bakary de trouver les ressources nécessaires pour payer la consignation pour permettre au tribunal d’examiner sa requête.

Si le Bureau accorde l’assistance judiciaire, Bakary n’aura aucun frais à engager. En d’autres termes, il est déchargé du payement de la consignation et des droits de timbre, d’enregistrement ou de greffe ainsi que de toute consignation d’amende.

Il est en outre dispensé du paiement d’émoluments, de droits ou d’honoraires aux officiers ministériels ou aux greffiers.

En cas de transport du tribunal sur les lieux aux fins de constatations, tous les frais de déplacement des magistrats, du greffier, des officiers ministériels, des experts et les taxes dues aux témoins sont avancés par le budget de l’Etat.

Mieux, Bakary peut solliciter et obtenir du Bureau la désignation d’un avocat qui l’assistera au cours de la procédure. Cet avocat sera rémunéré sur la base d’un forfait dont le taux varie selon la juridiction saisie.

Pour éviter que ces dispositions ne restent lettre morte, il convient que le Département en charge de la Justice se fixe des objectifs visant à une mise en œuvre progressive de l’assistance judiciaire qui permet de soutenir les justiciables qui n’ont pas en général les ressources suffisantes pour conduire toutes les étapes d’un procès du Tribunal d’instance ou du Tribunal de Grande Instance à la Cour suprême.

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Fiche n° 17 : la rupture de fiançailles

Cas pratique :

Après la rupture de leurs fiançailles, Banou demande à Ramata le remboursement de toutes les dépenses engagées pour les préparatifs notamment les habits achetés, les bijoux, les manifestations folkloriques ainsi que la dot. Il réclame en tout la somme de 750 000 FCFA.

Peut-il obtenir gain de cause ?

Problème de droit

Les dépenses engagées pour les préparatifs ainsi que la dot peuvent-elles faire l’objet de remboursement suite à une rupture des fiançailles ?

Le fiancé pourra-t-il obtenir aussi des dommages-intérêts pour le préjudice subi suite à la rupture des fiançailles ?

Réponses Il revient au demandeur d’une part de prouver les fiançailles et d’autre part de justifier le préjudice subi.

Les preuves peuvent être diverses. Il peut s’agir de photo du couple le jour des fiançailles, les factures des frais dépensés pour le mariage ou des acomptes. Le préjudice peut, quant à lui, être moral et/ou matériel. Il sera moral lorsque le fiancé délaissé invoque sa souffrance, l’atteinte à son honneur en raison de l’humiliation subie, de la dépression dans laquelle cette situation l’a entrainé.

La preuve pourra être rapportée au travers de certificats médicaux. A contrario, il sera matériel s’il concerne uniquement les frais dépensés pour le mariage tels que les acomptes et frais divers pour la robe de mariage, la location de la salle, le service traiteur etc….

Si l'on admet l'existence d'un contrat entre les fiancés, il n'y aurait pas de faculté de rupture unilatérale. Le responsable de cette rupture unilatérale devrait à l’autre des dommages-intérêts. S’agissant de la dot, elle ne peut donner lieu à restitution qu’en cas de non consommation du mariage.

Définition

Préliminaire au mariage, on entend par fiançailles la promesse qu'échangent un homme et une femme de se prendre ultérieurement pour époux.

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Les fiançailles sont une convention par laquelle un homme et une femme, en accord avec leur famille, se promettent mutuellement le mariage (278 CPF). Elles s’opposent au mariage qui est « un acte public par lequel un homme et une femme, consentent d’établir entre eux une union légale dont les conditions de formation, les effets et la dissolution sont régis par les dispositions du CPF (280). Effets de la rupture des fiançailles Trois problèmes principaux se posent : la conservation des cadeaux, le paiement d'éventuels dommages-intérêts contre l'auteur de la rupture, le remboursement de la dot. La conservation des cadeaux Il est constant en droit que : « toute donation faite en vue du mariage sera caduque si le mariage ne s'ensuit pas ». Les présents d’usage sont évidemment conservés par le fiancé déçu. En revanche, les cadeaux plus importants tels qu’une bague de fiançailles sont régis par un régime plus complexe. En principe, la bague de fiançailles doit être restituée en cas de rupture des fiançailles ou de caducité de celle-ci due au décès du fiancé. Cependant, le fiancé peut répondre de sa faute par exemple en rompant les fiançailles quelques jours seulement avant la date du mariage alors que bien des commandes et de dépenses ont déjà été effectuées ou parce que la rupture s’effectue dans des conditions particulièrement blessantes ou humiliantes. Dans ce cas, la jurisprudence décide que « la fiancée abandonnée qui n'a rien à se reprocher peut garder cette bague ». Le fiancé même s’il a commis une faute dans la rupture des fiançailles, pourra conserver la bague lorsque celle-ci constitue un « bijou de famille ». Les dommages-intérêts à la charge de l'auteur de la rupture Les tribunaux accordent assez souvent des réparations pécuniaires bien plus souvent au fiancé(e) délaissé(e). Le fondement des dommages-intérêts repose sur le régime général de la responsabilité civile délictuelle conformément aux dispositions du Régime Général des Obligations (Loi n° 87-31 / ANRM du 29 août 1987). La mise en œuvre de cette responsabilité requiert la réunion de trois conditions : une faute de l'auteur de la rupture, un dommage pour la victime de la rupture et un lien de causalité entre cette faute et ce dommage. Le Code des personnes et de la famille précise par ailleurs (article 279) en ce qui concerne la dot qu’elle ne peut donner lieu à restitution qu’en cas de non consommation du mariage du fait de l’épouse.

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Fiche n° 18 : le divorce

Cas pratique

Le couple Oumar et Fanta bat de l’aile et en définitive Oumar finit par saisir le tribunal d’une demande en divorce alors que les époux sont mariés depuis 10 ans et ont eu 3 enfants dont une fille âgée de 8 ans et deux garçons de 5 et 3 ans. Oumar vous demande conseil sur la garde des enfants, le droit de visite et la pension alimentaire.

Définition

Le divorce est une rupture du lien conjugal consacré par le tribunal saisi à cet effet. Il se distingue de l’abandon de domicile conjugal qui est considéré comme une infraction à la loi pénale lorsqu’un des époux décide d’aller habiter en dehors du domicile conjugal en invoquant des faits rendant impossible la vie en commun (excès, sévices ou injures graves…).

L’abandon de foyer qui est également une infraction à la loi pénale se caractérise par contre par le fait pour un époux de quitter son conjoint ou son enfant et refuser de pourvoir à leur entretien. A noter par ailleurs sur ce volet la répudiation qui est la volonté exprimée et non équivoque de l’époux de rompre le lien conjugal.

Le divorce n’est pas enfin à confondre avec la séparation de corps qui autorise les époux à vivre en tout autre lieu différent du domicile conjugal et qui est accordée par le tribunal compétent.

Procédure

La procédure diffère selon qu’il s’agit d’un divorce par consentement mutuel ; d’un divorce pour rupture de la vie commune ou d’un divorce pour faute.

Ainsi en cas de divorce par consentement mutuel, Oumar et Fanta adressent une requête conjointe au tribunal et peuvent recourir au même avocat. Dans cette requête conjointe, ils règlent de commun accord les questions liées à la pension alimentaire, à la garde des enfants et au droit de visite. Si la procédure est fondée sur la rupture de la vie commune, Oumar saisira le tribunal sur la base des causes limitativement énumérées par la Loi (époux séparés de fait depuis au moins 3 ans ; impossibilité de satisfaire ses obligations conjugales ou altération grave des facultés mentales)

Le divorce pour faute sera basé sur des cas également limitatifs , à savoir l’adultère , les excès , sévices , injures graves ; la condamnation à une peine afflictive et infâmante ( pour crime ) ; l’alcoolisme invétéré ou la toxicomanie et enfin le manquement à un engagement substantiel ( nourriture , logement , habillement , soins médicaux ).

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Oumar qui a décidé de saisir le tribunal adressera une requête au président du TGI ou du TI du dernier domicile conjugal du couple avec l’exposé sommaire des motifs pour lesquels il souhaite divorcer.

Une fois saisi, le président du tribunal peut directement convoquer les parties pour la phase préalable et obligatoire qui est la tentative de conciliation généralement connue sous les initiales TC. Le président du tribunal a toute latitude pour confier la conciliation à un juge au siège. Si la procédure aboutit, un procès –verbal sera dressé qui indiquera les points sur lesquels le couple s’est accordé et ce procès –verbal aura la même force qu’un jugement.

A défaut de conciliation, Oumar sera invité par le président du Tribunal à verser une consignation afin de couvrir les frais de la procédure. Il obtiendra par la suite un permis de citation signé par le Président qui l’autorise en somme à faire comparaître aux jours et heures indiqués son épouse. Ce permis est remis à un Huissier –commissaire de justice qui procédera aux formalités requises.

Aux jours et heures indiqués, Oumar et Fanta comparaitront à l’audience qui se déroule en chambre du conseil, c’est-à-dire dans le bureau du juge hors la présence du public. Toutefois, les parties peuvent se faire assister par leurs avocats et en cas de besoin par les témoins.

A l’issue des débats le président rendra son verdict qui sera prononcé en audience publique soit le jour même soit à une date convenue après mise en délibéré. Si Fanta estime que c’est à tort que la procédure est engagée à son encontre, elle peut demander au tribunal de débouter Oumar. Elle peut aussi demander le divorce si elle estime que c’est la seule issue.

Oumar et Fanta dans tous les cas gardent la possibilité de faire appel et de se pourvoir devant la Cour suprême. Le recours introduit suspend la décision rendue par le Tribunal ou la Cour d’appel jusqu’au prononcé de la décision ultime de la juridiction saisie.

Effets

La garde des enfants est confiée à l’époux qui a obtenu le divorce en principe sauf au tribunal qui peut d’office ou à la demande du parquet ou de la famille prendre en compte l’intérêt des enfants décider de les confier tous ou quelques-uns à l’autre époux et même à une tierce personne. Bien que la loi n’ait opéré aucune distinction selon l’âge des enfants, les tribunaux dans la pratique confient en général la garde des enfants n’ayant pas atteint l’âge de 7 ans à leur mère. L’époux qui n’a pas obtenu la garde conserve le droit de visite soit en se déplaçant soit en recevant les enfants chez lui selon les conditions et modalités fixées par le Tribunal. Il a l’obligation de contribuer à leur entretien et de surveiller leur éducation. En fonction de l’intérêt de l’enfant, la garde peut être modifiée sur la base d’une requête adressée au tribunal. L’épouse dans le besoin du fait du divorce prononcé aux torts du mari a droit à une pension alimentaire sans préjudice de dommages-intérêts. Celle –ci ne peut excéder le quart des revenus du mari lorsque celui –ci est marié à une épouse. En cas de mariage polygamique, la fraction à verser en guise de pension alimentaire ne peut excéder :-le 1/ 8 è lorsque le mari a deux épouses ; le 1/ 12 è lorsqu’il est marié à trois épouses ; le 1/ 15 è lorsqu’il est marié à quatre épouses. Elle cesse d’être due en cas de remariage de la femme, de changement substantiel avéré dans ses revenus, d’inconduite notoire ou lorsqu’elle cesse d’être nécessaire. Après un délai maximum de 5 ans, elle cesse d’être due.

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Fiche n° 19 : la garde des enfants

Cas pratique

Suite au divorce entre leurs parents, la garde des enfants Modibo et Oumou est confiée à leur mère qui s’adonne par la suite à des pratiques contraires à la morale devant ses enfants.

Le père peut-il solliciter un changement de la garde des enfants ?

Problème de droit

La demande de modification de garde d’enfant est-elle possible après le prononcé d’un divorce entre époux ?

Solution

Il ressort des dispositions de l’article 370 du Code des personnes et de la famille que « Les père et mère conservent dans tous les cas le droit de surveiller l'entretien et l'éducation des enfants et sont tenus d'y contribuer à proportion de leurs revenus.

Ils ont également le droit de visite dans les conditions fixées par le juge. La garde, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, peut toujours être modifiée, soit d’office, soit à la requête de la famille ou du Ministère public »

Dans le cas de l’espèce, rien ne s’oppose à ce que le père sollicite le changement de la garde des enfants.

La modification de la garde des enfants

Lors d'un divorce, le sort des enfants est souvent un des enjeux principaux. Il est constant en droit que la garde des enfants mineurs est confiée à l'époux au profit duquel le divorce est prononcé à moins que le tribunal, soit d’office, soit sur la demande de la famille ou du ministère public, n'ordonne pour l’intérêt des enfants que la garde de tous ou de quelques-uns soit confiée soit à l’autre époux ou à une tierce personne.

Lorsque la personne à laquelle est confiée la garde de l’enfant n’aura pas rempli ses obligations vis-à-vis de celui-ci, l’un des parents ou le ministère public pourra demander la modification de la garde sur requête au président du tribunal.

Le juge organisera la garde des enfants au regard de leur intérêt supérieur.

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Dans le cas de l’espèce, le cadre n’est pas propice à l’éducation et l’épanouissement moral des enfants à travers les pratiques peu orthodoxes de l’ex- épouse.

Toutes les formules sont imaginables et possibles et le juge appréciera dans l'intérêt supérieur des enfants (Modibo et Oumou).

Il est important de souligner que les décisions en cette matière ne sont jamais définitives. Il est toujours possible de saisir le juge à nouveau afin de faire modifier les modalités de la résidence et l'exercice du droit de visite et d'hébergement.

Les effets résultant de la modification

Les enfants issus du lien dissous conservent tous les droits et privilèges qu’ils tiennent des lois ou des conventions matrimoniales de leurs parents.

La dissolution du mariage par divorce admis en justice ne privera les enfants nés de ce mariage des avantages qui leur étaient assurés par les lois ou par les conventions matrimoniales de leurs père et mère.

Quelle que soit la personne à laquelle les enfants seront confiés, les père et mère conservent respectivement le droit de surveiller l’entretien et l’éducation de leurs enfants et seront tenus d’y contribuer à proportion de leurs facultés.

Ils jouissent également de leur droit de visite dans les conditions fixées par le juge.

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Fiche n° 20 : l’adoption

Cas pratique

Samba et Mariam sont mariés depuis 20 ans et n’ont pas d’enfants. Ils souhaitent adopter la fille d’une cousine qui se trouve au village et donner leur nom de famille à l’enfant.

Définition

L’adoption est un acte par lequel une personne décide de prendre sous sa protection un enfant mineur soit pour assurer son entretien, son éducation, sa protection matérielle ou morale, soit pour assurer sa postérité.

Dans le premier cas, on parlera d’adoption –protection et dans le second cas d’adoption –filiation.

L’adoption –protection permet ainsi à des époux d’adopter soit un ou plusieurs enfants mineurs en état d’abandon matériel ou moral soit un ou plusieurs enfants remis par leurs parents.

Par contre l’adoption –filiation concerne des enfants abandonnés ou dont les parents sont inconnus. En outre l’enfant doit être âgé de moins de 5 ans au moment de la demande.

Au regard de ces précisions, Samba et Mariam ne pourront engager que la procédure d’adoption –protection, l’enfant étant celui d’une cousine bien connue qui est restée au village.

Outre les couples, l’adoption-protection est ouverte à la femme célibataire jouissant d’une bonne moralité et de revenu suffisant ainsi qu’à l’homme célibataire remplissant les mêmes conditions. Toutefois, l’homme célibataire ne peut adopter qu’un enfant de sexe masculin âgé de 13 ans au moins.

Procédure

Le couple doit adresser la demande au service chargé de la promotion de l’Enfance qui procède aux enquêtes nécessaires afin de s’assurer que Samba et Mariam sont de bonne moralité.

Une fois les conclusions reçues, le service de la promotion de l’Enfance saisit le Tribunal compétent en principe celui du domicile des requérants.

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Les débats se déroulent en chambre du conseil c’est-à-dire dans le bureau du juge en présence de Samba et Mariam et du représentant de l’administration chargée de la promotion de l’Enfance.

L’adoption doit présenter des avantages pour l’enfant en tenant compte de son intérêt. Si l’adopté est âgé de plus de 13 ans, il doit être présent à l’audience et consentir personnellement à l’adoption.

De même, les père et mère de l’adopté ou l’un deux si l’autre est décédé doit également consentir personnellement à l’adoption.

Si l’un des parents est dans l’impossibilité de comparaître, il doit produire un acte authentique (notarié par exemple) ou un acte légalisé à la Mairie constatant son consentement.

Effets

L’adoption-protection met à la charge de l’adoptant l’obligation de nourrir, loger, entretenir, élever l’adopté et préparer son établissement.

Les droits relevant de l’autorité parentale sont exercés par les adoptants dans les mêmes conditions qu’à l’égard d’un enfant légitime.

En retour, l’adopté doit des aliments à l’adoptant lorsque celui-ci se trouve dans le besoin.

L’adoption –protection n’ouvre droit à la succession que dans les conditions limitatives et peut être révoquée à tout moment dans l’intérêt de l’enfant ou pour des motifs graves.

Cette révocation intervient dans les mêmes formes que celles prévues pour la procédure d’adoption.

Elle est ouverte à l’adoptant, à l’adopté à condition que celui –ci soit âgé au moins de 15 ans ; aux personnes ou institutions dont le consentement est requis ; au Ministère Public ; aux délégués à la protection de l’Enfance et enfin à toute personne qui justifie d’un intérêt.

En conclusion, les conditions n’étant pas réunies, Samba et Mariam ne peuvent donner leur nom à l’enfant et devront se contenter d’une adoption-protection dont les effets sont moins énergiques que ceux de l’adoption-filiation qui est irrévocable.

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Fiche n° 21 : l’acquisition de la nationalité

Cas pratique

Paul est français et vit au Mali depuis 5 ans. Il s’est fait beaucoup d’amis et souhaite obtenir la nationalité malienne. Quelles sont les démarches qu’il devrait effectuer ?

DEFINITION

La nationalité d’un pays confère un certain nombre de droits et d’obligations au nombre desquels le droit d’être électeur et éligible, de travailler pour la Fonction publique et l’obligation d’accomplir le service militaire.

En dehors de la nationalité d’origine accordée aux enfants légitimes ou naturels nés de père et de mère maliens, la nationalité s’acquiert par des modes limitativement énumérés par la Loi.

Il s’agit de l’acquisition de la nationalité par la filiation lorsque l’enfant fait l’objet d’une adoption –filiation par des parents adoptifs tous deux maliens ou dont l’un est malien.

L’acquisition est aussi possible par voie de mariage ; en raison de la naissance et de la résidence au Mali, enfin par décision de l’autorité publique.

Ceci concerne d’une part la naturalisation et d’autre part la réintégration.

. Nul ne peut être naturalisé s’il n’a depuis 10 ans au moins sa résidence habituelle au Mali au moment de l’introduction de la demande.

Ce délai est réduit à 5 ans pour le demandeur ayant rendu au Mali des services exceptionnels.

Est assimilé à la résidence au Mali : le séjour à l’étranger dans une fonction conférée par le Gouvernement malien ou l’existence à l’étranger d’une fonction ou d’un emploi dans une Ambassade, une Légation ou un Consulat ; la présence à l’étranger dans une formation de l’Armée malienne.

Dans le cas d’espèce, Paul qui vit au Mali depuis au moins 5 ans demandera sa naturalisation.

PROCEDURE

Dans sa demande adressée au Ministre de la Justice qu’il lui est également loisible de déposer au niveau de la DNAJS, Paul produira :

- des pièces attestant qu’il est majeur ou mineur émancipé ; - un certificat de bonne vie et mœurs ;

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- une attestation du casier judiciaire certifiant qu’il n’a subi aucune condamnation supérieure à une année d’emprisonnement non effacée par la réhabilitation ou l’amnistie pour une infraction de droit commun.

Il doit enfin joindre une attestation dans laquelle il souscrit un acte solennel de soumission à la République.

Après enquête et avis des services compétents, la demande peut faire l’objet d’un rejet formel ou implicite qui n’est pas susceptible de recours.

Dans le cas contraire, elle est présentée par le Garde des Sceaux en Conseil des Ministres.

Le décret accordant la naturalisation n’est pas motivé.

EFFETS

La personne qui acquiert la nationalité malienne jouit à partir de la date du décret de tous les droits et soumis aux obligations liées à cette naturalisation.

Cependant, l’étranger naturalisé ne peut à compter du décret de naturalisation :

- Etre investi de fonction ou de mandat électif pendant un délai de 5 ans ; - Etre électeur pendant un délai de deux ans ; - Etre nommé à des fonctions publiques rétribuées par l’Etat, inscrit à un Barreau ou

nommé titulaire d’un Office ministériel pendant un délai de deux ans.

Ces délais, à titre exceptionnel peuvent être abrégés par décret en Conseil des Ministres sur rapport du Ministre de la Justice.

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Fiche n° 22 : l’acquisition de la nationalité (suite)

Cas pratique

François est fiancé à une malienne et souhaite accomplir les mêmes démarches mais se trouve au Mali depuis seulement 1 an. Comment peut-il s’y prendre ?

Définition

La nationalité d’un pays confère un certain nombre de droits et d’obligations au nombre desquels le droit d’être électeur et éligible, de travailler pour la Fonction publique et l’obligation d’accomplir le service militaire, de payer ses impôts…

En dehors de la nationalité d’origine accordée aux enfants légitimes ou naturels nés de père et de mère maliens, la nationalité s’acquiert par des modes limitativement énumérés par la Loi.

Il s’agit de l’acquisition de la nationalité par la filiation lorsque l’enfant fait l’objet d’une adoption –filiation par des parents adoptifs tous deux maliens ou dont l’un est malien.

L’acquisition de la nationalité est également possible en raison de la naissance ou de la résidence au Mali.

Il en sera ainsi pour l’enfant né au Mali de parents étrangers qui peut dans les six mois suivant sa majorité faire une déclaration d’option s’il a sa résidence au Mali depuis 5 ans au moins.

La nationalité peut aussi s’acquérir par décision de l’autorité publique par voie de naturalisation ou par voir de réintégration.

Ainsi pour prétendre à la naturalisation, le demandeur doit justifier de dix ans de résidence habituelle au Mali, délai réduit à 5 ans s’il a rendu des services exceptionnels au pays.

Par contre aucune condition de délai de séjour n’est exigée pour la réintégration qui concerne un demandeur qui a perdu sa nationalité malienne et qui souhaite la recouvrer.

Il lui suffit simplement de joindre à sa demande copie de la décision par laquelle il a perdu sa nationalité.

L’acquisition de la nationalité est enfin possible par voie de mariage et il est certain que dans le cas d’espèce, François ne remplit pas les conditions de séjour telles que prévues pour prétendre à la naturalisation.

Par contre en célébrant le mariage avec sa fiancée malienne, il peut acquérir la nationalité malienne par voie de mariage.

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Procédure

La seule célébration du mariage suffit pour conférer la nationalité à François. Toutefois, le gouvernement dispose d’un délai d’un an pour s’opposer à l’acquisition de la nationalité s’il s’avère qu’il s’agit d’un « mariage blanc » conclu à cette seule fin d’obtention de la nationalité.

Le délai court à compter du jour de la célébration du mariage au cas où les époux ont convolé au Mali. Si le mariage a été célébré à l’étranger, ce délai court du jour de la transcription de l’acte sur le registre d’état civil.

En cas d’opposition du Gouvernement, François sera réputé n’avoir jamais acquis la nationalité malienne.

De même, la nationalité malienne acquise par le mariage se perd si celui –ci est déclaré nul par une décision d’une juridiction malienne ou rendue exécutoire au Mali même s’il a été contracté de bonne foi.

Effets

En cas d’annulation du mariage, les enfants issus de l’union demeurent maliens. Les actes passés de bonne foi antérieurement au décret d’opposition ou au jugement constatant la nullité du mariage restent valables et ne peuvent être remis en cause.

En dehors de ces cas, François qui acquiert la nationalité malienne jouit à partir de la date du décret de tous les droits et soumis aux obligations liées à cette naturalisation.

Cependant, l’étranger naturalisé ne peut à compter du décret de naturalisation :

- Etre investi de fonction ou de mandat électif pendant un délai de 5 ans ; - Etre électeur pendant un délai de deux ans ; - Etre nommé à des fonctions publiques rétribuées par l’Etat, inscrit à un Barreau ou

nommé titulaire d’un Office ministériel pendant un délai de deux ans.

Ces délais, à titre exceptionnel peuvent être abrégés par décret en Conseil des Ministres sur rapport du Ministre de la Justice.

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Fiche n° 23 : les changements de nom et de prénoms

Cas pratique

Souroukou se fait souvent chahuter par ses camarades et veut changer de prénom et s’appeler Ibrahima. Il estime en outre selon les informations dont il dispose que ses parents à l’origine sont des DIARRASSOUBA devenus DIARRA suite à une erreur de transcription avant l’indépendance du Mali.

Définition

Dans la vie en société le nom et les prénoms servent à identifier un individu dans ses relations interpersonnelles.

Ainsi, le nom sert à identifier les membres d’une même famille. On dira que tel est DIARRA pour le distinguer des TRAORE, COULIBALY, TOURE étant entendu que cette identification se rapporte à une tribu ou à un clan.

Ainsi, d’un point de vue juridique, le nom est immuable, en d’autres termes une personne qui a un nom le garde toute sa vie. De même, le nom est imprescriptible ce qui signifie que son usage ne peut être perdu. Enfin, le nom est inaliénable c’est à dire insusceptible de transaction.

Des dérogations sont cependant prévues par la loi.

L’enfant né dans le mariage porte le nom de son père tandis que l’enfant né hors mariage porte celui de sa mère.

Par contre l’enfant dont la filiation est inconnue prendra le nom attribué par l’officier d’état civil.

Quant au prénom, il sert à individualiser les membres d’une même famille. Il est librement choisi par les parents et il possible à une personne d’avoir plusieurs prénoms ou d’adjoindre le prénom du père ou de la mère à celui figurant sur l’acte de naissance.

Le prénom peut également être choisi par l’officier d’état civil par exemple lorsqu’un nouveau- né est abandonné par sa mère.

Il peut enfin être choisi par la juge en cas de procédure de changement initiée par un demandeur.

Procédure

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Dans le cas d’espèce, Souroukou qui estime qu’il est DIARRASSOUBA doit adresser une demande au Ministre de la Justice et justifier d’un intérêt légitime pour appuyer sa demande de changement de nom.

Une enquête est diligentée par les services compétents du Département en charge de la Justice, en l’occurrence la DNAJS qui dresse un rapport à l’attention du Garde des Sceaux.

Si le changement est justifié, le Garde des Sceaux présente la requête au Conseil des Ministres qui l’adopte sous forme de Décret qui cependant ne prend effet qu’une année après sa publication au Journal Officiel ou dans un journal d’annonces légales.

Dans l’intervalle, il est loisible à toute personne ayant intérêt à présenter une requête au Ministre de la Justice pour solliciter la révocation du décret.

Le changement de prénoms par contre obéit à une procédure plus souple car elle se déroule dans le cadre d’une requête adressée au tribunal civil du domicile qui prononce s’il y a lieu le changement de prénoms.

Ainsi, il appartiendra à l’intéressé dans la requête de préciser s’il veut s’appeler Ali, Oumar ou Mamadou au lieu de Souroukou qui veut dire « Hyène » en Bamanakan.

Il reste entendu que le choix du prénom n’est pas toujours anodin et peut quelquefois tenir compte des jours de la semaine ou même d’évènements heureux ou malheureux. Ainsi en milieu bambara, quelqu’un dont tous les frères aînés décèdent se verra au moment de la naissance désigné par un prénom typique pour amadouer le destin en somme se fera appeler par exemple « Nyamaton » qui signifie « tas d’ordures »

Il convient de souligner cependant que le choix du nom ou du prénom doit éviter toute dénomination de nature à porter atteinte à la considération de l’intéressé et Souroukou au regard de la traduction rapportée ci-dessus sera bien fondé dans sa demande de changement de prénom.

Effets

En l’absence d’opposition, le décret sort son plein effet à l’expiration du délai d’un an. En d’autres termes, c’est seulement au bout d’un an que Souroukou sera habilité à utiliser dans tous ses documents administratifs le nouveau prénom et le nouveau nom.

Il est porté mention du décret de changement de nom soit d’office soit à la demande du bénéficiaire du changement sur réquisition c’est-à-dire à la demande du procureur de la République du lieu de naissance en marge des actes de l’état civil de l’intéressé.

La même mention est portée en marge des actes d’état civil de son épouse et de ses enfants mineurs. Il en est de même pour le casier judiciaire.

Pour le changement de prénom, mention est également portée en marge des actes de l’état civil et Souroukou utilisera le nouveau prénom dans les mêmes conditions et délais précisés pour le changement de nom.

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Fiche n° 24 : le jugement d’hérédité

Cas pratique

Après le décès de leur père, fonctionnaire à la retraite et polygame, Mamadou et ses deux frères utérins souhaitent obtenir un jugement d’hérédité afin de bénéficier de la pension de leur défunt père. Ils saisissent le tribunal à l’insu de leur demi-frère Barou en poste à Ségou. Celui –ci apprend la nouvelle et sollicite votre avis.

Problème de droit

Un jugement d’hérédité peut-il faire l’’objet de rétractation ?

Solution

Tout héritier qui peut justifier de sa qualité peut solliciter la rétractation du jugement d’hérédité rendu à son insu devant le tribunal qui a rendu la décision querellée.

Définition

La rétractation est le fait pour une personne, une autorité administrative ou judiciaire de revenir sur une décision déjà prise.

Procédure Lorsqu'une personne décède, sa personnalité disparaît et ses biens ainsi que ses dettes passent à d'autres personnes. La succession ou l'héritage est la transmission des biens laissés par une personne décédée.

- Quel est le Tribunal territorialement compétent pour connaître de la procédure en rétractation de jugement d'hérédité ?

C'est le tribunal du lieu où se situe le dernier domicile du défunt ou le tribunal du lieu où il est décédé. Ainsi, Barou va se renseigner et attaquer le jugement qui ne l’a pas pris en compte. Le jugement d’hérédité est un jugement déclaratif qui peut par conséquent faire l’objet de rétractation à tout moment.

- Quelles sont les pièces à fournir ? Il va adresser au Président du tribunal compétent : - une demande (requête) timbrée ; - payer les frais de consignation fixés à 7500 FCFA au greffe du tribunal ; - joindre à la requête une copie d’extrait d’acte de naissance et un certificat de vie individuelle ;

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-joindre une copie d’acte de mariage de ses parents ; - faire citer à l’audience Mamadou et ses deux frères utérins. - le jour de l’audience, présenter deux (02) témoins majeurs munis de leurs pièces d’identité civile en cours de validité lesquels vont confirmer le bien-fondé de son action. Il peut au besoin constituer un avocat pour assurer la défense de ses intérêts.

Effets

Il appartient au tribunal de vérifier au préalable si Barou a effectivement la qualité d’héritier. Le Code des personnes et de la famille exclut en effet de la succession celui qui est condamné comme auteur ou complice pour avoir donné ou tenté de donner la mort au défunt même s’il est son fils légitime.

Sont également exclus de l’héritage pour cause d’indignité celui qui aura donné des coups ou commis des violences qui ont entraîné la mort du défunt ou qui aura entretenu ou tenté d’avoir des relations sexuelles avec une épouse de son père.

Outre ces cas qui entraînent l’exclusion obligatoire de la succession, le tribunal peut apprécier et exclure quiconque, même étant fils du défunt qui aura été condamné pour témoignage mensonger ou dénonciation calomnieuse contre le défunt.

La même exclusion est encourue par quiconque est condamné pour violences ayant entraîné la mort du défunt même sans intention de la donner.

Si aucun élément de cette nature n’est rapporté devant le tribunal, celui –ci examinera alors les pièces produites par Barou et estimer à la lumière des débats que ces pièces ne permettent pas de remettre en cause le jugement rendu et dans ce cas, Barou sera invité à fournir tout autre document complémentaire ou produire un témoignage susceptible d’appuyer sa requête.

Si par contre le tribunal considère que la demande de Barou est fondée au vu des pièces et des témoignages, il rendra une nouvelle décision dite de rétractation et dans cette hypothèse Barou sera ajouté aux autres héritiers.

La succession fera l’objet d’un nouveau partage tenant compte de cette nouvelle situation afin de mettre Barou dans ses droits légitimes. C’est dire qu’il recevra dans l’immédiat et dans le cas d’espèce sa part dans la pension de son défunt père.

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Fiche n° 25 : obtenir réparation à raison des dommages subis lors d’une hospitalisation

Cas pratique Mme Oumou ne se sent pas bien depuis deux jours et elle est subitement prise de malaise juste avant le déjeuner. Elle est conduite aussitôt à la clinique du quartier où l’infirmière de garde lui administre un sérum qui la plonge dans le coma. Ses parents la conduisent à l’Hôpital où elle subit des soins intensifs grâce auxquels elle sort du coma et se rétablit progressivement. Elle décide malgré les conseils de sa famille de porter plainte contre le directeur de la clinique. Son action a-t-elle des chances d’aboutir ? Problème de droit Un patient victime d'une faute voire d'une erreur médicale, peut-il demander une indemnisation pour le préjudice subi ?

Solution

Les erreurs médicales proviennent le plus souvent d’un déficit organisationnel du système de santé et de l’incompétence des professionnels de santé.

La médecine est souvent vue comme infaillible. Basée sur la preuve, elle ne peut tolérer d’accidents et les patients exigent un niveau de sécurité totale.

Désormais on préfère parler d‘évènement indésirable plutôt que d’erreur médicale.

Le seul fait de poser un diagnostic erroné ou de choisir un mauvais traitement ou une mauvaise méthode d’intervention ne suffit pas à engager la responsabilité du médecin. Il faut que cette erreur soit fautive, c’est-à-dire que cette erreur n’aurait pas été commise par « un bon médecin placé dans les mêmes circonstances ». La preuve de cette erreur doit être présentée par le demandeur. Définition Un évènement indésirable est un événement qui n’était pas dans le contrat moral passé avec le professionnel de santé.

Il existe toujours un contrat tacite entre le médecin et le patient, ce dernier attend que son état soit amélioré par l’acte de soin, en tout cas ne soit pas dégradé par le soin.

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Conditions de mise en œuvre de la responsabilité de la clinique

Les professions médicales sont soumises à une obligation de moyens et non pas de résultats. En d'autres termes, quel que soit leur statut, ces professions doivent mettre tout en œuvre pour soigner le mieux possible le patient, mais elles ne sont pas contractuellement obligées de le guérir.

Dans le cas de l’espèce, la preuve de la faute est à la charge du patient ou de ses parents. La réparation est liée à l’existence d’un préjudice certain, direct et actuel. C’est à dire, avec une relation de cause à effet, une réalité tangible du préjudice et une apparition postérieure à la faute. Dès lors qu'il y a faute, la responsabilité civile de l’auteur est engagée. Dans le cas de l’espèce l’infirmière n’a même pas cherché à connaitre les antécédents de santé de la patiente ou d’appliquer un protocole établi par un médecin avant de lui administrer le sérum. La preuve de la faute se fait par tous moyens et elle est à la charge de la personne qui l’invoque. Conséquences Un patient qui s'estime victime d'une erreur ou d'une faute médicale peut d'abord entamer une démarche amiable auprès du professionnel de santé ou de l'établissement de soins concerné pour obtenir réparation.

Si le différend persiste ou si le préjudice subi est important, il peut s'adresser à l'assureur en responsabilité du praticien ou de l'établissement, et à défaut d'accord saisir les tribunaux.

La Responsabilité civile est une obligation de répondre devant la justice d’un dommage et d’en réparer les conséquences en indemnisant la victime. Une faute simple suffit à engager la responsabilité de la clinique laquelle peut à son tour exercer un recours contre l’agent fautif, l’infirmière dans le cas d’espèce.

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Fiche n° 26 : comment engager une procédure de référé

Cas pratique Fatoumata qui est dans le commerce de véhicules d’occasion vend une voiture à son amie Kadiatou qui verse une avance et s’engage à solder le reliquat dans deux semaines. Trois semaines plus tard, Fatoumata ne parvient pas à récupérer le reliquat du prix de la vente du véhicule. Elle apprend en outre que Kadiatou s’apprête à revendre la voiture à une tierce personne. Un voisin qu’elle vient consulter lui conseille de saisir le juge des référés.

Qu’est-ce qu’un juge des référés ?

Le juge des référés est le juge de l’urgence. Il ne juge pas du principal (ex : ne prononce pas l’annulation d’une décision) mais permet d’obtenir des mesures provisoires et rapides, destinées à sauvegarder les droits et libertés des justiciables. Il se prononce par ordonnances.

La procédure du référé permet de demander au juge de prendre rapidement des mesures

provisoires dans l'attente du procès qui règlera le litige. En effet, le délai entre la saisine du

juge compétent et le prononcé de sa décision peut être très long. La demande de référé

permet donc de préserver ses droits.

Ainsi dans le cas d’espèce, à défaut du payement du reliquat du prix de la vente, Fatoumata

demandera la saisie conservatoire du véhicule en référé en attendant le jugement sur le fond

qui lui permettra de réclamer le reliquat du prix de vente de la voiture.

La procédure

La demande est portée par voie de citation à une audience tenue à cet effet aux jour et heure

habituels des référés, par le président du tribunal, ou par le juge que celui-ci aura désigné .

Le demandeur peut, à son choix, saisir soit le juge du tribunal qui est compétent pour connaitre

du litige au fond, soit le juge du lieu de l’incident.

Lorsqu’il lieu à référé à l’occasion de l’exécution d’un jugement, le demandeur s’adressera au

président du tribunal du lieu de l’exécution.

Le juge compétent pour statuer en référé sur la désignation d’un expert est celui du lieu où

doivent être portées les contestations.

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Lorsqu’il lieu à référé à l’occasion de l’exécution d’un jugement infirmé par la cour d’appel,

le litige devra être porté à la connaissance de celle-ci. Si, néanmoins, le cas requiert célérité,

le juge des référés peut permettre d’assigner, à heure indiquée, même les jours fériés ou

chômés, soit à l’audience, soit à son domicile, portes ouvertes.

Conditions

- Le recours à la procédure de référé se fera dans tous les cas d’urgence ou lorsqu’il

s’agira de statuer sur les difficultés relatives à l’exécution d’un titre exécutoire.

- Le Président peut prescrire même en présence d’une contestation sérieuse les

mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un

dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

- Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas contestable, il peut accorder une

provision au créancier.

Conséquences de la décision de référé

- L’ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d’une partie,

l’autre présente ou dûment appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est

pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement des mesures nécessaires.

- La décision du juge des référés n’a pas au principal l’autorité de la chose jugée .Il peut

en cas de nécessité ordonner que l’exécution ait lieu au seul vu de la minute ou

prononcer des condamnations sous astreintes avec possibilité de les liquider à titre

provisoire et statuer sur les dépens

- Il peut en outre subordonner l’exécution provisoire à la constitution d’une garantie.

- Enfin, la décision rendue par le juge des référés peut être frappée d’appel et les minutes

des ordonnances de référé sont conservées au greffe de la juridiction.

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Fiche n° 27 : réclamation de somme d’argent en l’absence d’une attestation de remise

Cas pratique Harouna qui est conseiller municipal demande à Bakary la somme de 300 000 FCFA au titre des frais d’édilité pour obtenir une parcelle dans une nouvelle zone en cours de lotissement. Six mois plus tard alors que le lotissement est achevé, Bakary n’a toujours pas de parcelle. Quel conseil donner à Bakaty pour l’aider dans la mesure où il ne dispose pas de reçu attestant la remise des fonds ?

Problème de droit

Comment prouver la remise de fonds en l’absence d’un document écrit ?

Définition

Le mot preuve désigne :

- un fait, un témoignage, un raisonnement qui permet d'établir de manière irréfutable la vérité ou la réalité de quelque chose. En droit, la preuve est un élément matériel qui établit solidement la réalité d'une situation, d'un acte ou d'un fait juridique avancé par l'une des parties.

- Elle est la démonstration de la réalité d'un fait, d'un état, d'une circonstance ou d'une obligation.

Procédure

Bakary doit assigner Harouna devant le tribunal civil aux fins de réclamation de somme d’argent. L’article 270 du Régime Général des Obligations du Mali pose la règle de la preuve écrite des actes juridiques. Cette règle connait cependant des exceptions.

- En cas d’impossibilité de prouver par écrit / de se procurer un écrit :

Cette situation peut résulter de circonstances diverses ; relations familiales, peur, relations de travail, force majeure …

Il revient à Bakary de prouver par n’importe quel moyen la remise du fonds. La preuve en l’état est libre.

La loi offre plusieurs solutions dans ce cas:

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• Seront considérées comme commencement de preuve par écrit, les déclarations faites par Harouna, conseiller municipal, lors de sa comparution devant le juge. Il en est de même de son refus de répondre ou son absence de déférer à la convocation du juge.

Le commencement de preuve par écrit devra être complété par d’autres éléments tels que :

- Le témoignage d’un tiers : c’est une déclaration faite devant le tribunal et sous la foi du serment par une personne qui n’est pas partie au procès et rapportant un fait directement perçu. Si la personne n’est pas admise à prêter serment en raison d’un empêchement tel que le lien de parenté ou d’alliance, elle peut cependant être entendue à titre de simple renseignement et le tribunal apprécie. - l’aveu : c’est la déclaration qui consiste pour Harouna à reconnaître les faits qui lui sont imputés en et qui est de nature à produire des effets juridiques. Il peut selon les cas intervenir alors même qu’aucune procédure n’est engagée auquel cas il sera qualifié d’extra –judiciaire et sera pris en compte uniquement si le témoignage est admis dans la cause. Ce type d’aveu a moins de force que l’aveu à la barre même du tribunal dénommé aveu judiciaire et qui fait foi contre celui dont il émane.

- le serment : c’est une déclaration faite sous une forme solennelle, civile, religieuse ou coutumière d’un fait profitable à celui qui le prête et qui peut être proposé soit par une partie au procès soit directement par le tribunal. - la présomption : c’est un mode de preuve en vertu duquel la loi ou le juge induit de l’existence d’un fait, l’existence d’un autre fait. Elle découle soit de la loi soit du fait de l’homme. Lorsqu’elle découle de la loi, elle peut être revêtue d’une force particulière et dans ce cas aucun mode de preuve contraire ne sera admis. On dira qu’elle est « irréfragable ». Il en sera ainsi lorsque par exemple Harouna aura remis une attestation de reconnaissance de remise de la somme établie par acte notarié qui ne peut être attaqué que par une procédure assez formaliste dite d’inscription de faux. Par contre la preuve contraire est admise en cas de présomption simple. Les présomptions dites du fait de l’homme sont dans tous les cas laissées à l’appréciation du juge à condition qu’elles découlent de faits graves, précis et concordants par exemple en cas d’enregistrements produits par une partie contre son adversaire.

Effets

Un commencement de preuve par écrit non corroboré par d’autres éléments de preuve n’a aucune valeur en justice et équivaut donc à l’absence de preuve, alors dans ce cas, l’action de Bakary sera déclarée mal fondée.

Par contre, si l’action est bien soutenue par l’un quelconque des moyens précités, Harouna sera condamné à rembourser à Bakary la somme qui lui avait été remise.

En plus du remboursement, le juge pourra en outre le condamner au paiement de dommages- intérêts au cas où Bakary parviendrait à justifier d’un préjudice découlant de son comportement.

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Fiche n° 28 : vente frauduleuse d’un véhicule

Cas pratique

Un véhicule a été vendu à Jonas par Mamadou avec une copie de la carte grise établie au nom de Jean et la copie de la pièce d’identité de l’intéressé. Une semaine plus tard, Jean vient réclamer le véhicule au motif qu’il n’a donné aucun mandat à Mamadou malgré l’attestation de vente en bonne et due forme signée devant témoin.

Jean pourra-t-il récupérer son véhicule ?

Problème de Droit

Peut-on disposer librement d’un bien d’autrui sans son consentement ?

Définition

La propriété est « le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. »

Solution au problème de droit

Le droit de propriété peut porter sur un bien meuble tel que les appareils électro –ménagers (réfrigérateur, cuisinière, climatiseur…), les vêtements et bijoux, le mobilier de bureau ou de salon, les voitures, bicyclettes, pirogues... Il peut aussi porter sur un bien immeuble tel qu’un terrain nu ou bâti en titre foncier, une maison… On constate que la liste des biens meubles est plus longue que celle des biens immeubles. De même le droit de propriété peut porter sur un bien corporel qui est palpable et qu’on peut appréhender (cas de la voiture ou d’un ordinateur) ou un bien incorporel à travers les titres ou actions qui représentent une prise de participation dans une société commerciale. Le droit de propriété est, en principe, absolu, perpétuel, exclusif, imprescriptible. Le caractère absolu signifie que le propriétaire peut faire ce qu’il veut du bien : il peut l’utiliser comme bon lui semble, il peut le vendre, le détruire. Il peut faire tout ce qui ne lui est pas défendu. Le caractère absolu va de pair avec le caractère exclusif qui signifie que l’usage de ce droit est personnel sauf exception notamment dans les cas de copropriété. Le caractère perpétuel signifie tout simplement que le propriétaire d’un bien peut le revendiquer entre les mains de quiconque malgré l’écoulement du temps. Ce n’est pas parce que le propriétaire du bien s’est absenté pendant longtemps par suite de voyage qu’il perd la propriété de son bien dès lors qu’il dispose de tous les documents

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justificatifs qui attestent de sa propriété. On dit à ce propos que le droit de propriété est perpétuel ou imprescriptible.

C’est un droit opposable à tous. La propriété d’autrui doit être respectée.

Dans le cas de l’espèce, Jean, le propriétaire de la voiture peut faire respecter sa propriété au regard du caractère exclusif dont il jouit. A ce titre, il dispose d’un droit entier sur son bien ; il est le seul à pouvoir en user et en disposer. Il peut s'opposer à l’intervention d’un tiers sur ses biens en exerçant une action en justice tout en justifiant l’absence de mandat au profit de Mamadou et l’absence de sa signature sur l’attestation de vente.

La production de copies de la carte grise du véhicule et de la carte d’identité civile de Jean ne suffiront pas à emporter la conviction du tribunal si Jean produit des éléments qui annulent l’argumentation de Mamadou.

Jean peut ainsi présenter l’original de la carte grise ou certificat d’immatriculation qui atteste de l’identité du véhicule et de ses caractéristiques même si la carte grise n’est pas d’un point de vue juridique un titre de propriété. En principe, lorsqu’un véhicule fait l’objet d’une première mise en circulation ou d’une cession, une carte grise est établie qui indique l’identité du premier acquéreur ou de la personne qui vient d’acheter la voiture. Dans ce cas des délais sont impartis au nouvel acquéreur pour procéder à la mutation à son profit.

Aussi, le propriétaire peut également revendiquer son droit même en l'absence de préjudice, ce qui s'oppose aux exigences courantes de la responsabilité civile, qui imposent l'existence d'un préjudice. Aussi, le propriétaire peut se voir restituer son bien lorsqu’il le revendique face à un éventuel possesseur.

Enfin, Jean pourra lancer une action pénale contre Mamadou pour abus de confiance qui n’est ni plus ni moins qu’une forme d'appropriation frauduleuse du bien d'autrui par détournement.

Le droit de propriété n’est pas limité dans le temps. Tant que le bien existe, le droit de propriété peut continuer à s’exercer sur lui.

Ainsi, le fait de ne pas utiliser le bien pendant un temps ne retire pas pour autant le droit de propriété de son titulaire sur ce bien ; l’absence d’usage de la chose ne fait pas perdre au propriétaire son droit.

On peut rappeler que même lorsque le titulaire change, la propriété subsiste ; ainsi de la possibilité pour les héritiers d’acquérir le bien possédé par leurs ascendants. Il existe donc bien une continuité de la propriété, bien que le titulaire ait changé.

Le droit de propriété ne s'éteint pas. Il est simplement transféré à un autre titulaire. Jonas risque fort de ne pas récupérer son argent si Mamadou est indélicat.

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Fiche n° 29 : contestation de paternité d’un enfant en cas de divorce

Cas pratique

Un couple s’est marié courant mars 2003 après s’être fréquenté durant 5 ans. Est né de cette union courant avril 2004, un garçon. Dès la naissance, l’époux exprime son refus de s’en occuper au motif qu’il soupçonne son épouse d’avoir entretenu une liaison extraconjugale. Il veut intenter une action en divorce. Quel sera le sort de l’enfant au cas où sa demande aboutit ?

Problème de droit.

Un époux peut-il contester la paternité d’un enfant issu de son mariage ?

Solution

La présomption de paternité est une présomption légale consistant en l’attribution à l’époux de la paternité des enfants mis au monde pendant la durée de son mariage. Elle a été exprimée par le célèbre adage « le père est celui que le mariage désigne ». Cet adage est généralement associé à un autre ainsi libellé : « L’identité de la mère est toujours certaine ».

Définition

On définit la filiation comme étant le lien juridique entre deux personnes qui fait que la première est l'enfant de la deuxième et la deuxième est le parent de la première.

On distingue la filiation naturelle et la filiation légitime.

La filiation légitime est la filiation de l'enfant issu d'un couple marié. L'enfant est nécessairement légitime à l'égard des deux époux. Est en principe légitime tout enfant conçu pendant le mariage, mais aussi tout enfant simplement né dans le mariage. La filiation légitime se prouve normalement par l'acte de naissance. Le nom de la mère dans l'acte de naissance établit en effet la maternité.

La paternité est établie par présomption que l'enfant d'une femme mariée a normalement pour père le mari de celle-ci, sans qu'il soit nécessaire d'apporter la preuve de cette paternité.

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La filiation naturelle est la filiation hors mariage qui concerne par exemple les enfants de concubins. La filiation naturelle est établie par:

• la reconnaissance • la possession d'état • la recherche judiciaire de maternité ou de paternité

En cas de demande en divorce ou en séparation de corps, la présomption de paternité est écartée lorsque l'enfant est né plus de 300 jours après la date soit de l'homologation de la convention réglant l'ensemble des conséquences du divorce ou des mesures provisoires, soit de l'ordonnance de non-conciliation, et moins de 180 jours depuis le rejet définitif de la demande ou la réconciliation.

La présomption de paternité n'est pas applicable à l'enfant né plus de 300 jours après la dissolution du mariage, ni, en cas d'absence déclarée du mari, à celui qui est né plus de 300 jours après la disparition. La présomption de paternité est également écartée quand l'enfant, inscrit sans l'indication du nom du mari, n'a de possession d'état qu'à l'égard de la mère. Le père peut exercer une action en désaveu de paternité dans les six mois de la naissance de l'enfant.

La contestation de la filiation légitime

Le père peut exercer une action en désaveu de paternité dans les six mois suivant la naissance de l'enfant. Même en l'absence de désaveu, la mère pourra contester la paternité du mari, mais seulement aux fins de légitimation, quand elle se sera, après dissolution du mariage, remariée avec le véritable père de l'enfant. Lorsque l'enfant n'a pas la possession d'état d'enfant légitime (c'est-à-dire qu'il est et se considère comme étant l'enfant d'une personne), tout intéressé (père, mère, enfant, membre de la famille) peut contester la paternité légitime pendant trente ans à compter de la reconnaissance.

La contestation de la filiation naturelle

La filiation naturelle peut être contestée en justice par toute personne ayant un intérêt direct à la contestation, y compris celui qui l'a faite. Toutefois la contestation n'est plus possible que de la part de l'enfant lui-même, de son autre parent ou de ceux qui se prétendent ses véritables parents, lorsqu'une possession d'état de dix ans s'est instaurée depuis la reconnaissance.

La filiation établie par jugement ne peut pas être contestée.

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Fiche n° 30 : erreur dans la tenue d’un compte bancaire Cas pratique Frédéric sollicite auprès de sa banque un découvert de 150 000 FCFA pour faire face à des dépenses imprévues. Il est surpris de voir tomber dans son compte la somme de 1. 500 .000 FCFA et ne manque pas de signaler les faits au chef d’agence de la Banque. Deux mois plus tard, Frédéric qui avait retiré la somme de 150 000 FCFA constate qu’il reste toujours le reliquat des 1. 500. 000 FCFA dans son compte. Il a d’autres besoins pressants et se demande s’il peut faire un retrait sur ce montant.

Frédéric pourra-t-il disposer de ce montant ? Peut-on disposer d’une somme ou d’un bien dont on n’est pas propriétaire ?

Définition

« L’indu » signifie encaisser quelque chose qui n’est pas dû. Il en sera ainsi lorsque le banquier porte au crédit de son client une somme ou un chèque qui ne lui était pas destiné. Ce sera également le cas lorsqu’un héritier paie une dette du défunt en ignorant que cette dette avait fait l’objet de règlement ou qu’un commerçant envoie une livraison à une autre personne que le véritable destinataire. Il ressort à cet égard des dispositions de l’article 160 du Régime Général des Obligations que « celui qui de mauvaise foi a reçu l’indu doit restituer la chose et les fruits qu’elle a produit… ». Dans le cas d’espèce, Frédéric sait à l’évidence que le montant qui demeure sur son compte a été déposé par erreur par la banque et sa mauvaise foi serait prouvée au cas où il serait amené à opérer un retrait sur cette somme. Le fait pour lui d’avoir informé l’agence de la Banque dans sa commune ne constitue pas un élément justificatif dès lors qu’il décide d’effectuer un retrait sur le montant qui se trouve par erreur sur son compte. Procédure

Si Frédéric utilise cette somme qui se trouve sur son compte, il s’expose à la mise en œuvre par la Banque d’une procédure de recouvrement des fonds connue sous le nom de « répétition de l’indu ».

Cette procédure suppose évidemment un paiement comme préalable et dans le cas d’espèce ce paiement est matérialisé par le dépôt effectué sur le compte de Fédéric.

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Ce paiement doit en outre avoir appauvrit celui qui l’effectue au profit de celui qui reçoit le bien ou la somme d’argent. Elle suppose aussi l’absence de dette et le versement effectué ne doit avoir aucune cause. Celui qui paie sa dette ne peut de toute évidence en demander la restitution. Elle suppose enfin une erreur de celui qui effectue le payement.

Effets

Lorsque ces conditions sont réunies, les effets du paiement de l’indu vont se manifester selon la bonne ou la mauvaise foi de celui qui a reçu le paiement. Celui qui par erreur ou sous la contrainte a acquitté la dette d’autrui peut agir en restitution contre le créancier. Néanmoins ce droit cesse dans le cas où le créancier, par suite du paiement, a détruit son titre ou abandonné les sûretés qui garantissaient sa créance.

La restitution peut aussi être demandée à celui dont la dette a été acquittée par erreur.

L’article 161 du RGO dispose par ailleurs que : « celui qui, en l’absence d’un acte juridique, s’est enrichi aux dépens d’autrui, est tenu de l’indemniser dans la mesure de son propre enrichissement jusqu’à concurrence de l’appauvrissement ».

L’enrichissement sans cause est un fait purement volontaire de l’homme, qui fait naitre, du seul fait de la loi, certaines obligations juridiques particulières en dehors de tout contrat.

En résumé Frédéric ne pourra valablement disposer de la somme que la banque a déposé par erreur sur son compte. S’il le fait, il sera tenu au remboursement de la dite somme puisse qu’il se serait enrichi au détriment de la banque.

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Fiche n° 31 : expulsion en cas de loyer impayé

Cas pratique

Suite à plusieurs mois d’arriérés de loyers, le bailleur de Binta l’a citée par voie d’huissier devant le juge pour obtenir son expulsion en période hivernale avec l’ensemble de sa famille.

Quelle protection lui garantit la loi ? Un locataire bénéficie-t-il d’une couverture ou protection légale en cas d’expulsion en période hivernale ?

Définition

Le terme « expulsion » implique par définition une contrainte. C’est un départ forcé avec le concours de la force publique suivant une décision de justice suivie d’un commandement de quitter les lieux.

Solution au problème de droit

Le juge, lorsqu’il est saisi a pour rôle d’appliquer la loi et faire preuve d’impartialité.

Les mesures d’expulsion sont réglementées par les dispositions de l’article 711 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale.

Sauf dispositions spéciales, l’expulsion ou l’évacuation d’un immeuble, ou d’un lieu d’habitation, ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice, ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire, et après signification d’un commandement d’avoir à libérer les locaux.

S’il s’agit de personnes non dénommées, l’acte est remis au parquet à toutes fins. Si l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne expulsée, ou de tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration du délai imparti par le commandement.

Toutefois, par décision spéciale et motivée, le juge peut, notamment lorsque les personnes dont l’expulsion a été ordonnée, sont entrées dans les locaux par voie de fait, réduire ou supprimer ce délai.

Lorsque l’expulsion aurait, pour la personne concernée, des conséquences d’une exceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l’année considérée, ou des circonstances atmosphériques, le délai peut être prorogé par le juge pour une durée n’excédant pas six mois.

Au regard de ces prescriptions, le tribunal examinera les motifs invoqués compte tenu des conséquences engendrées par une éventuelle expulsion au cours de la période invoquée et décider que le locataire continuera à jouir de son bail malgré les arriérés dus.

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Question : En cas de concours de la force publique, que se passe-t-il en cas de refus du locataire ?

Il sera expulsé par la force publique qui passera outre à toute résistance. Il convient de souligner dans ce cas que la force publique sera requise par un huissier –commissaire de justice mandaté par le bailleur et qui sera présent sur les lieux aux fins de dresser un constat en bonne et due forme.

Question : Quel est l’impact de l’avertissement par le locataire de la saisine du juge de l’exécution le jour de l’expulsion ?

La saisine de ce juge n’est pas suspensive de l’exécution. La décision n’appartient pas aux huissiers-commissaires de justice et ceux-ci en tant que mandataires en réfèrent à leur client pour lui donner cette indication.

Question : Peut-on concevoir que suite à une procédure d’expulsion, le locataire se retrouve sans domicile ?

C’est assez rare. En France par exemple, lorsque l’huissier se présente au domicile de la personne, il a en sa possession une liste d’hébergement temporaire.

En outre la période hivernale est fixée dans ce pays par voie règlementaire et court en principe du mois de novembre au mois mars en fonction de l’année et qui couvre une période plus longue que l’hiver au sens strict, généralement entre novembre et février.

Au Mali, compte tenu de certaines circonstances atmosphériques qui ont été rappelées ci -dessus, le délai peut être prorogé par le juge pour une durée maximum de six mois, durée au-delà de laquelle l’expulsion interviendra à moins que le locataire dans l’intervalle ne soit à jour de ses payements.

Il revient en effet au tribunal d’apprécier si le locataire était habituellement à jour de ses payements et s’il n’avait pas signalé au propriétaire par voie de courrier les difficultés temporaires auxquels il se trouve confronté comme par exemple en cas de chômage temporaire.

Question : Peut-on en même temps que signifier un jugement notifier un commandement de quitter les lieux ?

Il faut dans ce cas examiner le jugement et plus précisément vérifier s’il était assorti ou non de l’exécution provisoire ou s’il s’agit d’une ordonnance de référé. Si le jugement est assorti d’une exécution provisoire ou s’il s’agit d’une ordonnance de référé, le commandement de quitter les lieux peut être délivré en même temps que la signification de jugement.

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Fiche n° 32 : augmentation du loyer en cours d’exécution d’un contrat de bail

Cas pratique

Boubacar a signé courant janvier 2017 pour 5 ans un contrat de bail d’un appartement à usage d’habitation avec un loyer de 100 000 f / mois. Le propriétaire décide unilatéralement une augmentation du loyer fixé à 150 000 FCFA applicable à partir du 30 septembre 2017. Boubacar vient vous voir pour vous demander la conduite à tenir ?

Un bailleur peut-il unilatéralement augmenter le montant du loyer ?

Réponse

L’article 57 de la Loi n°2015-036/ du 16 juillet 2015 portant protection du consommateur au Mali dispose « Que le bail soit à durée déterminée ou indéterminée, le montant du loyer est fixé conformément à l’évaluation faite de la valeur de l’immeuble. Un décret spécifique aux loyers à usage d’habitation sera pris en Conseil des Ministres ».

Il ressort de ces dispositions que toute révision à la hausse du loyer d’un local à usage d’habitation doit se faire dans les termes et conditions fixés par la réglementation en vigueur.

Il est important de souligner que ces conditions sont différentes de celles prévues lorsque le bail est à usage professionnel par exemple pour les besoins d’un commerce ou d’une unité industrielle.

Dans ce cas, il convient de se référer à la règlementation du droit communautaire au sein de l’OHADA qui a adopté des actes uniformes applicables dans tous les pays membres.

Les conditions d’augmentation de la location d’un immeuble

Très généralement, le bailleur peut décider d’une augmentation lorsqu’il estime que le loyer est manifestement sous-évalué où en cas de travaux améliorant significativement le confort du logement.

En attendant l’adoption d’un nouveau décret, celui qui régit actuellement la question (Décret n° 146 / PG-RM du 27 septembre 1967 portant réglementation des loyers des locaux à usage d’habitation) fixe le plafond maximum du loyer à 11 % de la valeur réelle de l’immeuble et précise qu’en aucun cas le montant du loyer mensuel ne peut excéder le douzième du loyer annuel.

Plusieurs éléments entrent en ligne de compte pour la détermination du prix du loyer. Il s’agit en premier lieu de la valeur de la construction calculée en fonction du mètre carré bâti et

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après application d’un coefficient qui tient compte de de l’état d’entretien ou de vétusté du bâtiment. Il s’agit aussi d’une estimation fondée sur des éléments correctifs dus à la situation de l’immeuble notamment la zone de localisation, la salubrité, les nuisances liées au bruit…

A titre d’illustration, un immeuble situé dans la presqu’île résidentielle de la Cité du Niger ou dans la zone dite de l’ACI 2000 n’aura pas la même valeur locative qu’un immeuble bâti dans un quartier périphérique du District de Bamako. Si l’immeuble présente un degré de confort ou de luxe qui dépasse les caractéristiques précisées dans le barème établi par la Commission permanente, le prix sera fixé à partir de la catégorie la plus élevée.

Une commission permanente procède à la révision des loyers –plafonds au 1er janvier de chaque année et il appartient à Boubacar de vérifier si l’augmentation prévue par le bailleur correspond aux normes précisées ci-dessus.

Ainsi, il est indifférent que le contrat de bail soit être écrit ou non. Les parties en fixent librement la durée. Le bail peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’écrit ou de terme fixé, le bail est réputé conclu pour une durée indéterminée.

En tout état de cause, en l’absence d’une clause de révision dans le contrat de location, le bailleur devra attendre la révision annuelle fixée par la Commission permanente qui est composée en principe des représentants de plusieurs départements ministériels (Justice, Urbanisme, Travail, Finances, Commerce…)

En se référant aux dispositions de l’Acte Uniforme sur le droit communautaire de l’OHADA, il ressort qu’en matière de bail à usage professionnel, les parties gardent leurs prérogatives pour fixer librement le montant du loyer, sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires applicables. Le loyer est révisable dans les conditions fixées par les parties, ou à défaut, à l'expiration de chaque période triennale.

Procédure et effets

A défaut d'accord écrit entre les parties sur le nouveau montant du loyer, la juridiction compétente est saisie par la partie la plus diligente. Dans le cas d’espèce, il revient au bailleur d’engager une procédure d’expulsion ou au locataire d’engager une procédure pour demander son maintien dans les locaux. Toute contestation en la matière est portée devant le juge du lieu où la convention a été contractée ou exécutée ou lorsque l’une des parties sera domiciliée en ce lieu.

La juridiction compétente se prononcera en tenant compte aussi bien des délais prescrits que des éléments qui ont été passés en revue. A l’évidence, la hausse du loyer dans le cas d’espèce est proposée par le bailleur qui n’a pas jugé utile d’attendre la date de janvier 2018 prévue pour la révision annuelle.

En toute logique, la juridiction compétente décidera du maintien dans les lieux de Boubacar jusqu’à la date normale de révision annuelle, à savoir le 1er janvier 2018 à condition toutefois que sa bonne foi soit établie. Est réputé de bonne foi tout locataire qui exécute ses obligations à terme échu, c’est-à-dire qui s’acquitte du paiement du loyer exigible.

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Fiche n° 33 : contestation d’une vente immobilière et revendication d’hérédité

Cas pratique

Mamadou reçoit en héritage après le décès de sa mère une maison près de Dio dont la vente est attestée par acte notarié entre celle-ci et Hassan courant 1988. Or, Seydou, un des fils d’Hassan également décédé se présente et réclame la maison en sa qualité d’héritier légitime. Seydou veut intenter une action en revendication et sollicite vos conseils.

Questions juridiques soulevées

Deux questions se posent : d’une part Seydou a-t-il la qualité d’héritier légitime d’Hassan ; d’autre part celle relative a-t-il la possibilité de réclamer une maison régulièrement vendue par acte notarié.

Il incombe à Seydou de prouver devant le tribunal qu’il est effectivement un héritier légitime de son père en produisant un jugement d’hérédité pour appuyer sa demande.

Une fois cette étape franchie, il devra prouver que la maison reçue par Mamadou appartient toujours à son défunt père.

Procédure

Seydou devrait initier une procédure devant le tribunal du domicile du défunt dont la personnalité disparaît suite au décès et dont les biens seront transmis à sa succession.

A cet effet, Seydou adressera une demande ou requête au tribunal en y joignant les pièces essentielles suivantes :

- l’acte de décès de son défunt père ;

- l’extrait de mariage et le certificat de vie individuel de la veuve ;

- les extraits de naissance des enfants et le certificat de vie collectif ;

- les renseignements d’identité de deux témoins qui seront appelés à comparaître.

Après avoir payé les frais de consignation, l’audience sera fixée par le Tribunal et à l’issue des débats, le jugement sera rendu en indiquant les personnes qui ont qualité pour hériter du défunt.

Il est important de souligner à ce niveau qu’il ne suffit pas d’être un enfant du défunt pour être son héritier.

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Procédure de réclamation de la maison vendue par acte notarié

L’acte notarié a ceci de particulier qu’il est revêtu d’une force probante qui ne tombe qu’à la suite d’une procédure très formaliste dite d’inscription de faux.

Ainsi Seydou devrait introduire une requête auprès du tribunal compétent en déposant au greffe de ladite juridiction un acte établi en double exemplaire qui doit articuler avec précision les moyens invoqués pour établir le faux.

La dénonciation est faite par notification entre avocats ou signification à la partie adverse dans le mois de l’inscription.

La copie de l’acte d’inscription est jointe à la requête qui contient sommation pour Mamadou de déclarer s’il entend ou non faire usage de l’acte prétendu faux.

Si Mamadou déclare ne pas vouloir faire usage de la pièce considérée comme un faux, le tribunal en donne acte à Seydou et on considère à ce stade que celui-ci a obtenu gain de cause.

Si par contre Mamadou déclare faire usage de l’acte notarié constatant la vente de la maison à sa mère, le procès suivra son cours.

Le dossier est communiqué au procureur de la République qui donnera son avis sous forme de réquisition et le juge peut ordonner l’audition du notaire qui a dressé l’acte.

Le tribunal ordonnera toute mesure d’instruction nécessaire au besoin en demandant au notaire de produire une pièce d’écriture pour comparer avec les caractères figurant sur l’acte.

Le tribunal statue au vu des éléments rapportés et de tout autre moyen que le tribunal peut relever d’office, c’est-à-dire de sa propre initiative.

Le jugement qui déclare le faux sera mentionné en marge de l’acte reconnu faux. En cas de renonciation ou de transaction sur l’inscription de faux, le procureur de la République peut poursuivre au pénal car le faux est une infraction à la loi qui peut revêtir le caractère de crime ou de délit et puni comme tel.

Si par contre au regard des arguments et des pièces produites, le tribunal estime que l’acte notarié produit par Mamadou ne souffre d’aucune anomalie, Seydou sera débouté et pourrait être condamné à une amende civile de 5000 F à 20 000 F sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés par Mamadou.

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Fiche n° 34 : obtenir un certificat de nationalité et un extrait de casier judiciaire

Cas pratique Bakary qui est jeune diplômé en droit apprend qu’un concours est ouvert pour le recrutement de magistrats. Il doit fournir un certificat de nationalité et un casier judiciaire. Quelle est la procédure d’obtention de ces pièces et quel est leur intérêt ?

DEFINITION ET INTERET

Le certificat de nationalité est une pièce administrative qui atteste de la nationalité de l’intéressé selon qu’il a acquis cette nationalité par sa naissance, par le mariage ou par la naturalisation. L’accès à des fonctions administratives est en effet subordonné à des conditions de délais en ce qui concerne certains modes d’acquisition de la nationalité.

Ainsi un étranger qui accède à la nationalité malienne par voie de naturalisation ne peut prétendre intégrer la fonction publique pendant un délai de deux ans à compter du décret de naturalisation. Pour être investi d’un mandat électif, ce délai est porté à 5 ans.

A titre exceptionnel, ces délais peuvent être abrégés par décret pris en Conseil des ministres sur rapport du ministre de la Justice.

Le casier judiciaire qui est également exigé pour l’accès à la fonction publique ou à un emploi dans le secteur privé permet de centraliser les condamnations prononcées contre un individu. Il est délivré sous forme de bulletin en trois volets.

Le Bulletin n° 1 ou B1 centralise l’ensemble des condamnations prononcées contre un individu et n’est remis qu’aux autorités judiciaires par exemple en cas de procès pour attester ou vérifier l’état de récidive légale.

Le Bulletin n° 2 ou B2 contient l’intégralité des condamnations figurant au B1 à l’exception des condamnations à l’encontre des mineurs, des contraventions de simple police, des condamnations avec sursis.

Le Bulletin n°3 ou B3 qui est uniquement remis à l’intéressé contient toutes les condamnations à une peine criminelle et les condamnations à une peine délictuelle supérieures à 2 ans ainsi que les interdictions et les déchéances.

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Procédure

Pour obtenir les pièces ci-dessus indiquées, il revient à Bakary d’adresser une demande timbrée au Président du tribunal de son lieu de résidence alors que la demande de casier judiciaire est toujours adressée au procureur de la République près du tribunal du lieu de naissance de l’intéressé.

Les pièces ci-après doivent être jointes à la demande du certificat de nationalité, à savoir :

-une copie de la carte d’identité en cours de validité ; -une copie de l’extrait de naissance ; - la somme de 750 FCFA.

La demande est enregistrée au niveau du bureau du certificat de nationalité et casier judiciaire par le greffier ou tout autre agent qui remplit une fiche sur la base des pièces fournies et qui sera transmise au greffier en chef aux fins de vérification.

A l’issue de ce processus de vérification, le certificat est soumis à la signature du président du tribunal et remis à l’intéressé dans un délai de 24 H

En cas de refus de délivrance du certificat, Bakary peut introduire un recours adressé au Ministre de Justice, Garde des Sceaux.

Pour la demande de casier judiciaire, l’intéressé doit fournir des renseignements sur son domicile, sa profession et sa situation familiale.

Les demandes pour les natifs du District de Bamako sont déposées au niveau du greffe du TGI de la Commune III et au greffe de la Cour d’appel pour les maliens nés à l’étranger.

Il doit fournir les pièces énumérées ainsi que la somme indiquée pour la demande de certificat de nationalité.

Le greffier en chef après vérification soumet le bulletin à la signature du procureur de la République avant de le remettre au demandeur.

Le casier judiciaire obéit aux mêmes conditions de délai pour sa remise à savoir 24 H.

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Fiche n° 35 : obtenir un jugement supplétif à un extrait de naissance

Cas pratique Bakary a égaré son acte de naissance et malgré toutes ses recherches, il ne parvient pas à en obtenir copie à la Mairie. Il doit donc obtenir un jugement supplétif d’acte de naissance.

Définition et Intérêt

On entend par jugement supplétif une décision du tribunal qui demande la transcription d’un fait d’état civil (naissance ou décès) lorsque cette transcription est inexistante, perdue ou détruite.

Il convient en effet de rappeler à ce sujet que toute naissance d’un enfant né vivant sur le territoire de la République du Mali doit être déclarée au centre d’état civil du lieu de naissance dans un délai de 30 jours francs après la date de naissance.

Si par négligence, les parents traînent à faire la déclaration, celle-ci peut être faite par tout autre parent et à défaut par le médecin, la sage-femme ou quiconque aura assisté à l’accouchement.

De même, cette déclaration peut être faite par la personne chez qui l’accouchement a eu lieu et à défaut par le chef de village ou de fraction ou n’importe quel membre du conseil de village ou de fraction.

Faute d’avoir fait la déclaration dans les délais indiqués , les parents sont obligés de se tourner vers le tribunal pour solliciter un jugement supplétif d’acte de naissance.

Il en sera ainsi dans le cas d’espèce pour Bakary qui ne retrouve pas son acte de naissance.

La délivrance d’un jugement supplétif est ainsi prévue soit lorsque la déclaration de naissance n’est pas intervenue dans les délais requis, soit lorsque l’acte n’a pas été retrouvé.

Le principal intérêt d’un jugement supplétif est d’attester la matérialité d’un fait d’état civil, qu’il s’agisse de naissance ou de décès sur la base d’éléments précis et vérifiables.

Procédure et effets

Avant de saisir le tribunal, Bakary doit se rendre à la Mairie pour demander un extrait de son acte de naissance au cas où les archives sont bien tenues à ce niveau.

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Si les services municipaux ne sont pas en mesure de retrouver l’extrait, ils délivreront à Bakary un certificat de non inscription qui sera joint en ce moment à la requête que Bakary va adresser au tribunal.

Cette requête qui doit être obligatoirement contresignée par le Maire de sa commune de résidence est accompagnée du carnet de famille ou d’un extrait du cahier de recensement délivré par le Maire.

La loi exige en outre une condition supplémentaire en ce qui concerne les scolaires, les travailleurs salariés, les militaires et les enfants admis dans une institution de placement. Dans ces cas énumérés, une attestation du chef de service doit certifier l’inexistence d’acte de naissance pour l’intéressé.

Bakary doit également joindre à sa requête les copies de pièces d’identité de deux témoins qui ont l’âge de ses parents et payer les frais administratifs de la procédure qui s’élèvent à la somme de 3250 FCFA.

En principe chaque Tribunal de Grande Instance ou Tribunal d’Instance fixe un jour de la semaine pour les audiences consacrées aux jugements supplétifs. Les parties ne sont pas invitées à comparaitre et le tribunal juge sur pièces.

Après vérification, le président du tribunal ou tout juge désigné par ses soins appose la mention « Conforme » lorsque les pièces produites sont au complet et ne suscitent pas de problèmes particuliers.

La décision est ensuite transmise par le greffier en chef à la mairie pour transcription et délivrance d’un extrait de jugement supplétif d’acte de naissance à Bakary qui complétera ainsi son dossier pour le concours de recrutement des auditeurs de justice.

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Fiche n° 36 : obtenir réparation du fait de dommages causés par la négligence de l’administration Cas pratique : Pendant la saison des pluies, Adama se rend la mairie de Mopti pour y accomplir des formalités administratives et gare son véhicule dans la cour sous un vieil arbre devant l’Hôtel de Ville. Soudain un orage éclate et une branche de l’arbre tombe sur le véhicule, occasionnant des dégâts importants. Adama souhaite attaquer la Mairie de la Commune devant le tribunal. Quelles sont ses chances à votre avis ?

Problème de droit

Adama peut-il demander un dédommagement après le préjudice subi dans la cour de la Mairie suite à la chute d’une branche de l’arbre sur son véhicule ?

Solution

Il revient à Adama dans le cas d’espèce d’apporter la preuve soit d’une faute de la commune soit d’un vice qui affectait l’arbre.

Il est important de souligner que son action sera portée non devant le tribunal administratif mais devant le tribunal de droit commun, à savoir le Tribunal de Grande Instance de Mopti.

Les juridictions de droit commun sont en effet seules compétentes pour examiner les litiges mettant en jeu la responsabilité de l’administration pour dommage causé à des particuliers.

Toute commune a l’obligation en général de veiller à bien entretenir régulièrement les arbres sur les principaux axes urbains et les voies communales. L’obligation d’entretien existe à fortiori en ce qui concerne les arbres plantés dans la cour de la mairie.

La Loi n° 87-31 / ANRM du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations sanctionne quiconque qui par sa faute même d’imprudence, de maladresse ou de négligence cause à autrui un dommage (article 125).

L’obligation de réparation apparaît dès lors que la preuve est rapportée que les délais d’entretien régulier des arbres plantés dans la cour de la Mairie ont été largement dépassés.

Une fois la preuve de l’entretien régulier établie, il sera difficile en conséquence de reprocher à la Commune une quelconque négligence fautive parce qu’une branche s’est détachée pour causer des dégâts à des personnes ou à des biens.

On dit dans le jargon que la Mairie est astreinte dans ce cas à une obligation de moyens qu’on oppose aux obligations de résultat.

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Par contre si Adama parvient à établir l’existence d’un vice quelconque qui a rendu l’arbre moins résistant aux intempéries, la juridiction compétente peut dans ce cas retenir la responsabilité de la Mairie dès lors que l’orage n’avait rien d’exceptionnel.

Il en sera ainsi si la branche présentait par exemple à l’évidence des signes visibles de sectionnement ou de torsion laissant présumer qu’elle pouvait à tout moment tomber et causer un dommage aux personnes ou aux biens.

La responsabilité de la Mairie dans ce cas de figure sera engagée toujours sur la base des dispositions de la Loi précitée fixant le Régime Général des Obligations mais cette fois ci sur le fondement de la responsabilité du fait des choses, en l’occurrence l’arbre dont elle avait la garde car plantée dans sa cour (article 149).

En raison des circonstances, la Mairie peut être en mesure de prouver que l’orage était d’une rare violence avec des poussées très fortes du vent soufflant à des centaines de Km / heures. Dans ce cas, sa responsabilité sera écartée pour cause de force majeure

La force majeure désigne un événement à la fois imprévu, insurmontable et indépendant de la volonté d’une personne.

En raison des conséquences qu’elle recouvre, il faut plusieurs conditions pour qu’un cas de force majeure soit juridiquement reconnu.

Ainsi l’évènement invoqué doit être à la fois irrésistible, imprévisible et extérieur. Les phénomènes naturels comme les orages, tempêtes, séismes ou sécheresses peuvent être considérés comme irrésistibles lorsqu’ils revêtent un caractère violent et d’une particulière gravité.

Quant à l’aspect imprévisible, il suppose que l’évènement ne pouvait être prévu. Enfin l’évènement doit revêtir un caractère extérieur, ce qui signifie que le débiteur de l’obligation ou l’auteur du dommage n’est pour rien dans la survenance de l’événement qui résulte d’une cause étrangère et est indépendant de sa volonté.

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Fiche n° 37 : contestation de l’expulsion d’un locataire par son bailleur

Cas pratique

Alou, locataire à Lafiabougou qui refusait l’augmentation de loyer décidé par son bailleur, est assigné par celui-ci devant le Tribunal de la Commune IV alors qu’il était en déplacement à Dakar. A son retour, il apprend que le TGI a ordonné son expulsion après un jugement par défaut ; il veut faire opposition et vous demande la conduite à tenir.

Définition

L’opposition remet en question, devant le même juge, les points jugés par défaut pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Procédure

Il convient de préciser que le jugement rendu par défaut est signifié par tout huissier territorialement compétent. La signification doit, à peine de nullité, faire mention en caractères très apparents du délai d’opposition fixé et du délai de distance.

Si le destinataire n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail, la signification sera faite à parquet. Dans ce cas, le procureur de la République le fera rechercher d’office.

Si le destinataire est retrouvé, le délai d’opposition courra du jour du procès-verbal de remise à l’intéressé ou du récépissé de l’acte.

Si le destinataire n’est pas retrouvé, le demandeur présentera requête aux fins de permis d’exécution.

Au vu du procès-verbal de recherches infructueuses, le Président du Tribunal autorisera, par ordonnance, le demandeur à exécuter le jugement à l’expiration du délai d’opposition qui courra du jour de cette ordonnance.

Ainsi au vu du procès-verbal de remise, Alou formera opposition par lettre ou télégramme adressé au greffe de la juridiction qui a rendu le jugement ou par déclaration reçue audit greffe.

. La partie qui aura formé opposition, sera invitée par le greffier de la juridiction à verser la consignation prévue par la réglementation en vigueur, dans les 15 jours qui suivent l’opposition à peine d’irrecevabilité. Le jugement frappé d’opposition n’est annulé que par le jugement qui le rétracte.

Il est aussi de principe que l’opposition ne sera plus recevable après trente jours à compter de la notification.

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Toutefois, si la notification n’a pas été faite à personne, la partie condamnée pourra former opposition jusqu’à exécution du jugement.

Les parties seront assignées à l’audience la plus proche en observant les délais de citation.

En matière sociale, en cas de jugement par défaut, signification du jugement est faite, sans frais, à la partie défaillante par le greffier du tribunal, un huissier ou un agent administratif commis spécialement à cet effet par le président.

Si dans un délai de dix jours après significations plus les délais de distance, le défaillant ne fait pas opposition au jugement, celui-ci est exécutoire.

Il est important de souligner que l’appel des jugements susceptibles d’opposition ne sera point recevable pendant la durée du délai d’opposition.

Les Effets de l’opposition

L’opposition à un jugement est irrecevable lorsqu’il résulte d’un acte que l’exécution de ce jugement a été connue de la partie défaillante.

Le délai de recours par une voie ordinaire suspend l’exécution du jugement. Le recours exercé dans le délai est également suspensif.

Celui qui se laisserait juger une seconde fois par défaut n’est plus admis à former une nouvelle opposition.

Si le jugement a été rendu par défaut ou s’il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l’expiration du délai si le défendeur, sans qu’il y ait eu faute de sa part, n’a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours, ou s’il s’est trouvé dans l’impossibilité d’agir.

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Fiche n° 38 : appel contre un jugement de divorce défavorable

Cas pratique

François et Agnès sont mariés depuis une dizaine d’années mais ne s’entendent plus. François décide de saisir le TGI de sa commune. Le Tribunal prononce le divorce aux torts réciproques. François n’est pas de cet avis et veut faire appel. Il demande conseil à son avocat.

Définition

Voie de recours ordinaire, l’appel tend à faire examiner par la Cour d’appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré en vue de reformer ou annuler ce jugement.

Conditions de déclaration d’appel

L’appel est formé par déclaration faite au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée ou par requête conjointe. La déclaration d’appel est faite par acte contenant, à peine de nullité :

- si l’appelant est une personne physique : ses nom, prénoms, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; - l’identité et les précisions sur le domicile de l’intimé et l’indication de la Cour devant laquelle l’appel est porté. Enfin l’indication du jugement. La déclaration précise, le cas échéant, les chefs du jugement auxquels l’appel est limité et le nom de l’avocat chargé d’assister l’appelant devant la Cour. Elle est signée et accompagnée d’une copie de la décision. Elle vaut demande d’inscription au rôle.

L’appel est consigné dans un registre coté et paraphé par le président du tribunal. Dès l’enregistrement de la déclaration, le greffier est tenu de délivrer au déclarant une copie certifiée conforme de l’acte d’appel, et de procéder pareillement par lettre simple aux intimés et leurs conseils.

Le délai d’appel pour les jugements contradictoires court à compter de la notification du jugement et pour les jugements par défaut du jour où l’opposition n’est plus recevable. Le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n’y a pas renoncé.

En matière contentieuse, l’appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties en première instance. Tous ceux qui ont été parties peuvent être intimés. Le délai de recours est d’un mois en matière contentieuse. En matière gracieuse, l’appel est recevable même en l’absence d’autres parties. Le délai de recours est alors de quinze jours.

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Il est par ailleurs possible de renoncer à l’appel mais cette renonciation ne peut être antérieure à la naissance du litige. La renonciation peut être expresse ou résulter de l’exécution sans réserve d’un jugement non exécutoire. La renonciation tombe si, postérieurement, une autre partie interjette elle-même régulièrement appel.

Dans les quinze jours du prononcé du jugement en matière sociale, appel peut être interjeté dans les conditions prévues par la loi. Le dossier de l’appel est transmis dans les deux mois qui suivront la déclaration, au greffe de la Cour d’appel avec une expédition du jugement.

Les jugements susceptibles d’appel

La voie de l’appel est ouverte en toutes matières, même gracieuse, contre les jugements de première instance, s’il n’en est autrement disposé. Sont susceptibles d’appel les jugements qualifiés en dernier ressort, lorsqu’ils ont été rendus par des juges qui ne pouvaient prononcer qu’en premier ressort. Les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal, et ordonnent une mesure d’instruction ou une mesure provisoire, peuvent être immédiatement frappés d’appel comme les jugements qui tranchent tout le principal. Il en est de même lorsque le jugement qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident met fin à l’instance.

Les effets de l’appel

L’effet dévolutif

L’appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d’appel pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

La dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. Pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.

L’effet suspensif

Lorsqu'un recours est engagé contre une décision de justice ayant pour effet d'empêcher l'exécution de celle-ci jusqu'à la nouvelle décision. Il est temporairement fait échec à l'exécution du jugement durant tout le temps nécessaire à l’examen du recours ainsi formé.

L’évocation

Lorsque la Cour d’Appel est saisie d’un jugement qui a ordonné une mesure d’instruction, ou d’un jugement qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l’instance, elle peut directement évoquer les points non jugés en vue de donner à l’affaire une solution définitive.

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Fiche n° 39 : le pourvoi en cassation dans une affaire de divorce

Cas pratique

La Cour d’appel confirme le jugement entre François et Agnès ; François demande à son avocat de se pourvoir en cassation devant la Cour Suprême.

Définition

Le pourvoi en cassation tend à faire censurer par la Cour suprême ou par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA la non-conformité aux règles de droit du jugement qu’il attaque.

L’ouverture du pourvoi en cassation

Le pourvoi en cassation n’est ouvert qu’à l’encontre de jugements rendus en dernier ressort. Toutefois certains jugements en dernier ressort ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation indépendamment des jugements sur le fond que dans les cas spécifiés par la loi.

Toute partie qui y a intérêt, est recevable à se pourvoir en cassation, même si la disposition qui lui est défavorable ne profite pas à son adversaire. En matière gracieuse, le pourvoi est recevable même en l’absence d’adversaire. En matière contentieuse, le pourvoi est recevable même lorsqu’une condamnation a été prononcée au profit ou à l’encontre d’une personne qui n’était pas partie à l’instance. Si le procureur général près la Cour suprême apprend qu’il a été rendu en dernier ressort une décision contraire aux lois et aux formes de procéder, et contre laquelle cependant aucune des parties n’a réclamé dans le délai fixé, il en saisit la chambre compétente de la Cour suprême.

La procédure du pourvoi

Le pourvoi est formé par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée dans les deux mois de la notification de la décision si elle est contradictoire et dans le même délai qui ne court qu’à compter du jour où l’opposition n’est plus recevable si la décision est rendue par défaut. La déclaration de pourvoi est faite par acte contenant, à peine de nullité :

- si le demandeur en cassation est une personne physique : ses nom, prénoms, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

- le nom, prénoms et domicile de l’intimé ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ; 3° l’indication de la décision attaquée ; 4° l’indication du jugement.

La déclaration indique, le cas échéant, les chefs de la décision auxquels le pourvoi est limité. Elle est signée et accompagnée d’une copie de la décision. Le greffier dresse procès-verbal de

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la déclaration souscrite, soit par le demandeur en personne, soit par son avocat, soit par toute personne munie dans ce cas d’un pouvoir spécial. Il notifie le pourvoi au défendeur soit par lettre recommandée, soit par télégramme avec demande d’avis de réception, dans les trente jours qui suivent la déclaration au pourvoi. .

Le demandeur en cassation doit à peine de déchéance, déposer au greffe de la Cour suprême, au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la date de réception du dossier à ce greffe, un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée, le cas échéant les pièces invoquées à l’appui du pourvoi. Il doit en outre sous peine d’irrecevabilité, acquitter, au greffe de la Cour suprême une consignation destinée à couvrir les divers frais de procédure et d’enregistrement. Le défendeur au pourvoi dispose d’un délai de quinze jours à compter de la notification du mémoire du demandeur, pour adresser par lettre recommandée au greffe de la Cour suprême un mémoire en réponse.

Le greffe de la Cour suprême constate par un procès-verbal dressé en la forme administrative, le défaut de production du mémoire ampliatif ou du mémoire en défense dans les délais impartis. La déchéance est prononcée d’office par la Cour suprême. Dès que le défendeur dépose son mémoire en défense et au plus tard à l’expiration du délai à lui imparti à cette fin, l’affaire est réputée en état et remise à la chambre compétente. Le président de la chambre saisie désigne un conseiller en qualité de rapporteur.

Le rapporteur établit sans retard son rapport et le remet pour le tout être communiqué au ministère public. Dès que celui-ci a conclu, le Président de chambre procède à l’enrôlement de l’affaire. La formation de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée statue après la lecture du rapport, à l’audience. Les mandataires ou conseils des parties sont entendus après la lecture du rapport s’ils le demandent. Les parties elles-mêmes peuvent être entendues après y avoir été autorisées par le président. La Cour statue après avis du ministère public. L’arrêt vise le texte de loi sur lequel la cassation est fondée. L’arrêt est signé par le président et le greffier. Le dossier de l’affaire accompagné d’une copie de l’arrêt est retourné à la juridiction dont la décision avait été attaquée. Les autres règles établies pour les tribunaux inférieurs seront observées devant la Cour suprême.

Les effets du pourvoi en cassation

Le pourvoi en cassation est suspensif en matière immobilière, d’état des personnes, des successions et des droits fonciers. La Cour suprême peut rejeter le pourvoi en substituant un motif de pur droit à un motif erroné ; elle le peut également en faisant abstraction d’un motif de droit erroné mais surabondant. Elle peut, sauf dispositions contraires, casser la décision attaquée en relevant d’office un moyen de pur droit. Si le pourvoi en cassation est rejeté, la partie qui l’a formé n’est plus recevable à en former un nouveau contre le même jugement. Après cassation la Cour suprême renvoie la cause et les parties devant une juridiction du même ordre ou degré que celle qui a rendu la décision annulée, ou devant la même juridiction autrement composée.

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DROIT FONCIER

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Fiche n° 40 : délivrance d’un permis d’occuper pour un terrain déjà attribué à un tiers

Cas pratique Dans le cadre d’une opération de lotissement, Harouna, conseiller municipal a délivré à Gaoussou un permis d’occuper sur une parcelle. Au moment d’identifier le site, Gaoussou trouve des briques sur place et des plaques au nom d’un tiers qui a déjà construit une chambre pour le gardien. Que peut-il faire ? Définition

La cession des terrains appartenant à l’Etat peut se faire à l’amiable ou par vente. Elle peut également intervenir après mise en valeur à la suite de la transformation d’une concession rurale, d’un permis d’occuper ou d’un bail avec promesse de vente en titre définitif de propriété.

La délivrance des concessions rurales intervient dans les zones péri-urbaines tandis que le permis d’occuper délivré par les mairies concerne les communes urbaines.

Le permis d’occuper donne le droit à un individu d’occuper légalement un terrain appartenant à l’Etat. Il permet d’exercer tous les droits et prérogatives attachés à l’occupation et à la mise en valeur d’une parcelle conformément aux clauses et conditions des dispositions législatives et réglementaires régissant l’occupation de la zone dans laquelle il est situé.

Le permis d’occuper a vocation après mise en valeur à être transformé en titre foncier qui confère au titulaire un droit de propriété sur la parcelle avec toutes les garanties de sécurité qui s’y attachent.

Procédure

Tout d’abord, Gaoussou doit désigner un huissier-commissaire de justice pour qu’il fasse un constat des lieux.

Muni du procès-verbal de constat, Gaoussou peut lancer une procédure d’expulsion et de démolition devant le Tribunal de Grande Instance. A ce stade, le permis d’occuper sera présenté au tribunal et la personne qui a déjà construit sera invitée à produire l’acte qui justifie sa présence sur le site litigieux.

S’il arrive à le produire, Gaoussou demandera au juge d’ordonner un sursis à statuer pour lui permettre de saisir le Tribunal administratif pour obtenir l’annulation du permis d’occuper. Dans ce cas, le juge administratif pourrait ordonner une expertise foncière

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pour connaitre les limites de la parcelle d’une part et d’autre part le ou les différents documents administratifs qui y sont attachés.

Parallèlement à cette action, rien n’empêche Gaoussou de solliciter le concours du service des Domaines et du Cadastre par voie de réquisition pour connaitre l’historique de la parcelle litigieuse.

Effets

• Dans l’hypothèse où le tiers qui a amené ses briques sur le site n’arrive pas à présenter un acte administratif de propriété, le juge de l’ordre judiciaire ordonnera son expulsion et la démolition des travaux qu’il aura réalisés sur le site.

• S’il présente un titre foncier, il convient de rappeler que dans le Code domanial et foncier, le titre foncier est celui qui est entouré de la garantie la plus élevée. Même si l’Etat doit le retirer pour cause d’utilité publique, il ne peut le faire sans en aviser le propriétaire et le dédommager en conséquence. Alors, si l’attribution à Gaoussou n’a pas respecté la règlementation, toute réclamation éventuelle qu’il sera amené à faire n’aura pas de suite favorable.

• Si l’adversaire oppose un permis d’occuper plus ancien que celui de Gaoussou, il se pourrait qu’il soit le vrai propriétaire. Les résultats de la réquisition détermineront les droits respectifs sur le site litigieux.

• En cas de doubles, triples et même quadruples attributions d’une même parcelle, l’action de Gaoussou a toutes les chances de se voir rejetée sauf si le service des domaines atteste que son permis d’occuper est antérieur à tous les autres documents présentés.

• Il est en effet possible qu’il y ait des chevauchements car il n’est pas rare de se voir attribuer une parcelle qui a déjà fait l’objet d’attribution antérieure au compte d’une ou de plusieurs personnes différentes, chacun disposant pour autant d’une lettre, ou d’un permis dûment établis en son nom avec des reçus de paiement des frais d’édilité ou de taxes préfectorales.

• Il est alors possible de poursuivre en responsabilité devant le juge pénal les conseillers municipaux et agents communaux qui ont délivré des permis d’occuper sur des parcelles déjà attribuées.

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Fiche n° 41 : l’expropriation pour cause d’utilité publique

Cas pratique

Dominique est propriétaire d’une concession rurale de 2 hectares depuis une dizaine d’années. Il a pris le soin de la transformer en titre foncier. En outre Dominique y plante des oranges et des mangues qui lui rapportent un complément de revenu.

En écoutant la radio, il apprend que le Ministère de l’urbanisme demande à tous les riverains de sa zone d’habitation à se faire recenser dans le cadre d’une opération d’expropriation pour cause d’utilité publique visant à l’aménagement urbain, l’élargissement des voies et la construction d’un échangeur dans le quartier.

Il vous demande conseil sur les démarches à suivre et souhaite être édifié sur cette procédure

Définition

L’expropriation pour cause d’utilité publique est une disposition permettant à la puissance publique (Etat ou Collectivité territoriale) à forcer un possesseur à céder son bien contre son gré.

Aux termes des dispositions du Code domanial et foncier, l’utilité publique est déclarée :

-soit expressément dans l’acte qui autorise les travaux d’intérêt public projetés tels que : la construction de routes , chemins de fer , ports , travaux urbains, travaux militaires, aménagement et conservation de forêts , protection de site ou de monument historiques , aménagement de forces hydrauliques et distribution d’énergie , installation de service public ; création ou entretien du domaine public , travaux d’assainissement , d’irrigation ou de drainage.

-soit par une déclaration complémentaire lorsque l’acte qui autorise les travaux ne déclare pas l’utilité publique.

Procédure

Le Ministre chargé des domaines doit en la matière prendre un arrêté de cessibilité qui désigne les propriétés atteintes. Si l’arrêté n’intervient pas dans le délai d’un an à compter de la publication de l’acte déclaratif d’utilité publique, l’administration sera considérée comme ayant renoncé à l’expropriation.

L’arrêté dans tous les cas doit être précédé d’une enquête appelée dans le jargon de « commodo et incommodo » afin de s’assurer que les parcelles concernées ne font pas l’objet d’autres droits ou titres.

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Il est courant en effet dans le contexte local d’apprendre que des droits coutumiers peuvent concerner une partie de la zone retenue par la puissance publique et dans ce cas il faut aussi envisager une procédure dite de purge de ces droits coutumiers.

Une fois l’arrêté de cessibilité publié, aucune construction, plantation ou amélioration quelconque ne peut être réalisée sur les terrains situés dans la zone sauf autorisation du ministre en charge des domaines.

En tout état de cause, des affiches sont apposées sur les immeubles ou titres visés ainsi que dans les lieux habituels d’affichage pendant une durée d’un mois.

En cas d’urgence la durée de l’enquête peut être réduite à huit jours.

L’arrêté de cessibilité est publié au journal officiel et dans un journal autorisé à publier les annonces légales. Cet arrêté est notifié sans délai par l’autorité administrative aux propriétaires intéressés ainsi qu’aux occupants et usagers notoires.

Effets

Il est important de souligner que l’expropriation pour cause d’utilité publique s’opère toujours par décision de justice et moyennant une juste et préalable indemnité.

La juridiction compétente est le Tribunal de Grande Instance ou le Tribunal d’Instance du lieu du lieu du bien immobilier.

Le tribunal tiendra compte de l’état et de la valeur du bien à la date du jugement d’expropriation ainsi que de la plus -value ou de la moins- value qui résulte pour la partie de l’immeuble non exproprié de l’exécution de l’ouvrage projeté.

L’indemnité est calculée sur la base du dommage actuel et certain directement causé par l’expropriation et ne peut prendre en compte un dommage incertain, éventuel ou indirect.

Dominique s’il n’est pas d’accord avec le montant retenu peut demander une expertise. Cette faculté est aussi accordée à la puissance publique.

L’expertise sera réalisée par trois experts à moins que les parties ne s’accordent sur la désignation d’un expert unique.

Une fois le jugement prononcé, l’indemnité est offerte à l’intéressé et en cas de refus de la recevoir, elle est consignée auprès du Trésor public.

Si le propriétaire accepte de recevoir l’indemnité mais que celle –ci n’est pas acquittée dans les six mois du jugement, les intérêts de 10 % lui seront dus .

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Fiche n° 42 : attribution par un Maire de terrains affectés à des servitudes publiques

Cas pratique

Dramane est bénéficiaire d’une concession urbaine non loin des berges du fleuve Niger, à Sébénicoro à Bamako. Il y vit avec sa famille, depuis plusieurs années. Sur le schéma d’aménagement du quartier établi par la Direction régionale de l’urbanisme et de l’habitat, il est prévu des canaux d’écoulement des eaux de ruissellement. Dans l’attente des travaux de viabilisation de la zone, Dramane, un matin, est surpris de constater que les voies et servitudes menant au fleuve sont encombrées par des briques et que des ouvriers sont occupés à bâtir les fondations de ce qui ressemble à une maison à usage d’habitation.

Dramane s’adresse à la personne qui a entrepris ces travaux, à savoir M. Abdoulaye, lequel lui présente un titre de concession urbaine délivré par le Maire de la Commune. Dramane décide de saisir le Tribunal administratif de Bamako d’un recours tendant à l’annulation du titre délivré à Abdoulaye et vous demande si son action a des chances de prospérer.

Problème de droit

Un Maire peut-il attribuer un terrain destiné à des servitudes publiques à des particuliers aux fins de construction urbaine ?

Définition et procédure

Une servitude est une limitation à l’usage et à la jouissance attachés au droit de propriété des immeubles dans un but d’utilité publique. Les servitudes ne sont pas assimilables à une expropriation, mais elles visent principalement à imposer des restrictions au droit de construire.

Il existe deux grandes catégories de servitudes administratives : les servitudes dites d’utilité publique et les servitudes d’urbanisme.

Les servitudes d’urbanisme résultent principalement du plan d’occupation des sols dans le cadre d’un plan local d’urbanisme. Il peut s’agir du coefficient d’occupation des sols, de la limitation en hauteur des constructions, de l’interdiction de bâtir des locaux industriels ou commerciaux dans une zone résidentielle, etc.

Quant aux servitudes d’utilité publique, elles trouvent leur fondement dans les normes liées à la protection, à la salubrité et à la sécurité publique, à la conservation du patrimoine naturel, à l’utilisation de certaines ressources et équipements, à la protection du domaine public…

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Selon le Code domanial et foncier, l’utilité publique peut être déclarée dans l’acte qui autorise les travaux d’intérêt public tels que les constructions de routes, chemins de fer, ports, travaux urbains, travaux militaires ; les aménagements et conservation des forêts, la protection de sites classés ou de monuments historiques, les aménagements hydrauliques et la distribution d’énergie, les installations de service public, la création ou l’entretien du domaine public, les travaux d’assainissement, d’irrigation et de drainage…(art. 228)

Aucune construction ne peut être élevée, aucune plantation ou amélioration ne peut être effectuée sur les terrains situés dans de telles zones, sans une autorisation délivrée par le ministre chargé des Domaines conformément aux dispositions de l’article 229 du Code précité.

Issue du litige

Dans le cas d’espèce, il s’agit bien de servitudes d’utilité publique destinées à des travaux d’assainissement et de drainage des eaux usées et des eaux de pluie, afin d’éviter l’inondation des maisons bordant le fleuve, dont celle de Dramane. Les constructions en cours d’exécution par Abdoulaye constituent à l’évidence des obstacles à l’écoulement normal des eaux.

En aucun cas un élu communal ne peut affecter des terrains affectés à des servitudes publiques à un tiers sans l’autorisation de l’autorité compétente en la matière à savoir le ministre en charge des Domaines de l’Etat.

En toute logique le Tribunal administratif prononcera l’annulation de la décision du Maire de la Commune pour excès de pouvoir si les pièces versées au dossier de la procédure attestent que le Maire n’avait pas sollicité l’autorisation requise ou passé outre en affectant le terrain malgré l’avis négatif de l’autorité compétente.

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DROIT PENAL ET PROCEDURE

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Fiche n° 43 : réagir à des violences conjugales

Cas pratique

Une cousine mariée au village, suite à des actes de violence de son époux, quitte le domicile conjugal. Elle envisage de saisir le juge et sollicite votre avis.

Définition

Le Code pénal ne définit pas la violence conjugale en tant qu’infraction à la loi pénale alors qu’il s’agit d’un phénomène de société de plus en plus fréquent tant dans les villes que dans les campagnes engendrant des drames qui défraient régulièrement la chronique

Il ne faut pas pour autant penser que dans le cas d’espèce, la violence subie restera impunie.

Procédure

Il revient à la cousine d’effectuer le déplacement pour saisir la brigade de gendarmerie proche de sa localité afin de déposer plainte auprès du Commandant de Brigade.

Elle peut aussi se rendre directement au Tribunal d’Instance pour déposer plainte auprès du Procureur de la République.

A défaut de Tribunal d’Instance, c’est le Juge de Paix à Compétence Etendue qui sera saisi en gardant à l’esprit que la Justice de Paix est appelée à disparaître au profit du Tribunal d’Instance.

Dans les deux cas de figure, une enquête sera diligentée par le Commandant de Brigade s’il est directement saisi ou sur instruction soit du Procureur de la République soit du Juge de Paix.

Dans le cadre de cette enquête, il interrogera le mari, entendra au besoin des témoins ou procédera à des confrontations selon la complexité de la cause.

Il saisira également par réquisition le centre de santé pour déterminer si les coups et blessures ont occasionné une quelconque incapacité de travail.

Il dressera à la fin un procès-verbal qui sera transmis au tribunal compétent.

Effets

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Dans la pratique les cas de violence conjugale sont en général traités à l’amiable soit à la phase de l’enquête devant la police ou la gendarmerie soit par le tribunal en raison des pesanteurs sociétales et du souci invoqué de sauver le couple.

Il convient cependant de rappeler que si les faits sont établis, la sanction en cas de jugement varie en fonction de la gravité des coups et de l’incapacité de travail constatée par le certificat médical.

Ainsi, conformément aux dispositions de l’article 207 du Code Pénal, s’il résulte des coups portés et des violences une incapacité de travail personnelle ou une maladie pendant plus de vingt jours, la peine sera de 1 à 5 ans assortie d’une amende de 20 000 à 500 000 F.

Si la preuve est rapportée qu’il y avait préméditation ou guet-apens, l’échelle d’appréciation change et ce sera un cas déféré devant la Cour d’assises qui prononcera une peine de 5 à 10 ans de réclusion.

Il en sera de même si les violences, blessures et coups auront été suivis de mutilation, amputation, privation de l’usage d’un membre ou d’un sens, cécité, perte d’un œil ou autres infirmités ou maladies.

Si les blessures, coups, violences ou voies de faits n’ont occasionné aucune maladie ou incapacité de travail mentionnée ci-dessus, la peine sera d’un emprisonnement de 11 jours à deux ans et d’une amende de 20 000 à 100 000 F ou de l’une de ces deux peines (article 208 du Code Pénal).

S’il y a préméditation ou guet-apens, la peine sera de 1 à 5 ans et l’amende comprise entre 25 000 et 150 000 FCFA.

Une interdiction de séjour de 1 à 10 ans pourra en outre être prononcée. En d’autres termes, le coupable peut se voir obligé de quitter la localité où l’infraction a été commise pour éviter tout risque de récidive.

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Fiche n° 44 : rixe entre pasteur et agriculteur

Cas pratique

Alors que Samba ramène son troupeau à la maison, des moutons entrent dans le verger de Moriba où ils commettent des dégâts aux plantations. Le chien de Moriba blesse un mouton et Samba abat le chien. Moriba arrive sur les lieux. Très irrité, il frappe Samba. Avec l’intervention des voisins, tous les deux se calment mais n’arrivent pas à trouver un accord, Moriba estimant ne rien devoir à Samba qui a fait irruption dans son verger avec des animaux.

Chacun souhaite engager la responsabilité de l’autre. Comment les départager ?

Problème de droit

La question est double : qui doit répondre de dégâts causés par des animaux ? Est-il possible de se rendre justice soi-même ?

Définition

L’expression justice privée vise à recouvrir l’ensemble des procédés par lesquels un sujet de droit se fait justice à lui-même

Solution

L'exercice de la justice est un pouvoir régalien de l'État et non d’une personne physique. Nul ne peut se substituer à l’Etat pour se rendre justice et c’est le lieu de condamner les exactions qui perdurent telles le fait de lyncher un voleur au lieu de le conduire au commissariat de police.

Il convient d’examiner d’une part la responsabilité de Samba et d’autre part celle de Moriba.

En ce qui concerne Samba

Etant le gardien du troupeau, Samba est responsable civilement et pénalement du préjudice causé aux plantations de Moriba.

Ainsi les dispositions du Régime général des Obligations et du Code pénal apportent des éléments de réponse à ce sujet.

Aux termes de ces dispositions : « Toute personne est responsable du dommage causé par le fait des choses ou des animaux dont elle a la garde » (article 149 du RGO). Il est en outre précisé que la garde est le pouvoir d’usage, de direction et de contrôle détenu par le propriétaire qui utilise l’animal ou la chose personnellement ou par l’intermédiaire d’autrui.

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Quant au Code pénal , il souligne à l’article 317 que « quiconque aura lâché dans la nature ou dans une agglomération des animaux domestiques sans emprise effective, les prédisposant par ce seul fait à causer des dégâts à autrui ou à gêner la circulation sur les voies publiques, sera puni de onze jours à six mois d’emprisonnement ou d’une amende de 20.000 à 1.000.000 FCFA.

Lorsque les animaux errants auront causé des dégâts à autrui ou au domaine public, il sera fait application des mêmes peines ».

C’est dire qu’il s’agit d’un délit dont la punition est beaucoup plus sévère que celle d’une simple divagation d’animaux qui est une contravention de simple police. Cette infraction est constituée par le seul fait de trouver des animaux dans la rue même si aucun dommage n’est causé à autrui.

En ce qui concerne Moriba

La justice est rendue au Mali par les Cours et les Tribunaux et nul n’a le droit de se faire justice soi-même.

Moriba aurait dû déposer une plainte au commissariat de police, à la brigade de gendarmerie ou se rendre directement au tribunal pour porter plainte au niveau du parquet. Il ne peut au seul motif qu’il est en colère, s’en prendre à Samba physiquement.

En définitive, pour les départager, il convient de leur notifier qu’ils sont tous les deux en porte à faux avec la loi. Par conséquent, tous les deux tombent sous le coup de la condamnation par le tribunal correctionnel.

Cette condamnation en ce qui concerne Moriba dépendra de la gravité des coups portés et de l’incapacité de travail qui en découle pour Samba.

De même, aussi bien Samba que Moriba peuvent être condamnés à des dommages et intérêts pour réparer en somme le préjudice occasionné à savoir d’une part les dégâts causés aux plantations de Moriba ainsi que la mort de son chien et d’autre part le dommage corporel subi par Samba ainsi que les dommages causés à son troupeau.

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Fiche n° 45 : coups et blessures volontaires ayant occasionné une infirmité permanente

Cas pratique

Suite à un contrôle de routine et face au refus d’obtempérer d’un usager de la circulation routière, le policier Koreissi tire sur Marcel qui conduisait une moto Djakarta et lui occasionne des lésions graves qui le rendent infirme pour le restant de ses jours. Que peut faire la victime ?

Définition

L’incivisme revêt plusieurs formes dans nos sociétés et occasionne souvent des drames regrettables. Le refus d’obtempérer lors des contrôles routiers est malheureusement un phénomène courant et à ce sujet, il arrive que les forces de police ou de gendarmerie usent de moyens très énergiques.

Ainsi dans le cas, d’espèce, la victime peut bien déposer plainte au commissariat de police, à la brigade de gendarmerie ou directement devant le procureur de la République. Il invoquera certainement avoir été l’objet d’une tentative de meurtre.

Procédure

Le Procureur de la République peut selon les éléments découlant du procès-verbal décider soit de citer directement l’agent devant le tribunal correctionnel pour coups et blessures volontaires ou à défaut ouvrir une information en retenant la même qualification ou une incrimination plus grave, par exemple de tentative de meurtre.

Il en sera ainsi lorsque les éléments qui figurent dans le procès-verbal ne permettent pas de bien cerner les circonstances de commission des faits. Dans ce cas un juge d’instruction sera saisi.

Le magistrat instructeur procédera à l’inculpation du policier et à son interrogatoire en recueillant sa version des faits. De même, la victime sera entendue et éventuellement des témoins qui ont assisté à la scène.

Le juge d’instruction peut au besoin procéder à des confrontations entre l’inculpé et la victime et mettre au besoin sous scellés l’arme utilisée par le fonctionnaire de police comme pièce à conviction.

Le juge d’instruction prendra enfin le soin de verser au dossier le certificat médical attestant du degré d’infirmité de la victime.

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Une fois l’information terminée et en fonction de la qualification retenue par le magistrat instructeur, le dossier sera soit renvoyé devant le tribunal correctionnel pour coups et blessures volontaires, soit transmis à la chambre d’accusation pour tentative de meurtre et saisine de la Cour d’assises.

Effets

En retenant l’hypothèse de la saisine de la Cour d’assises, il est fort probable que celle-ci procède à une requalification des faits en écartant toute volonté délibérée du fonctionnaire de police de donner à la mort à la victime.

Elle retiendra certainement contre l’accusé des faits de coups de blessures volontaires commis à l’occasion ou dans l’exercice d’une profession conformément aux dispositions de l’article 207 du Code Pénal.

Aux termes des dites dispositions, tout individu , qui volontairement aura porté des coups ou fait des blessures ou commis toute autre violence ou voies de fait , s’il est résulté de ces sortes de violences une maladie ou incapacité de travail personnelle pendant plus de vingt jours sera puni d’un emprisonnement de 1 à 5 ans et d’une amende de 20 000 à 500 000 F.

Si les blessures, violences ou coups ont été suivis de mutilation, amputation, privation de l’usage d’un membre ou d’un sens, cécité, perte d’un œil ou autres infirmités ou maladies, la peine sera de 5 à 10 ans de réclusion.

Lorsque les coups, blessures ou les violences ci-dessus spécifiés l’auront été par le coupable à l’occasion ou dans l’exercice de sa profession, il sera prononcé en outre une suspension de 5 ans au moins et de 10 ans au plus de l’exercice de cette profession.

C’est dire que si la culpabilité du policier Koreissi est reconnue, la Cour d’assises prononcera obligatoirement contre l’accusé une interdiction d’exercer pendant une durée qui ne pourra être inférieure à 5 ans.

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Fiche n° 46 : abus de confiance Cas pratique Aminata confie la garde la somme de 5 millions CFA à Fatou. Au moment de récupérer ce montant, elle s’entend répondre que celle-ci a utilisé l’argent pour ses besoins personnels et se trouve dans l’incapacité de rembourser. Que conseillez-vous à Aminata ?

Définition

Est qualifié d’abus de confiance , le fait pour une personne de détourner au préjudice d'autrui des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a accepté à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé. L'abus de confiance est une forme d'appropriation frauduleuse du bien d'autrui par détournement.

Dans l'abus de confiance l'auteur de l'infraction s'approprie un fonds, un objet qui lui a été remis sans employer de moyens frauduleux comme dans l'escroquerie. La chose lui a été remise et il ne la soustrait pas comme dans le vol. L'abus de confiance est la violation de la foi contractuelle.

Conditions de l’abus de confiance

La condition préalable de l'abus de confiance est la remise de la chose en vertu d'un contrat de détention précaire. Les éléments constitutifs sont le détournement volontaire au profit du propriétaire.

• Le contrat

Un contrat doit exister en vertu duquel une chose est remise à une personne, à charge pour celle-ci d'en faire un usage déterminé. Le contrat doit comporter une obligation de restitution de la chose qui a été confiée ou d'en faire un usage déterminé. Il en est ainsi du dépôt, du louage, du crédit-bail, du mandat, du prêt à usage, du gage.

• La chose

La remise qui peut donner lieu à abus de confiance porte sur des fonds, des valeurs mobilières ou des biens quelconques. Ceci exclut les immeubles. La chose peut être un document quelconque, un fichier clientèle, une carte de crédit….

Sans remise de la chose il n'y a pas d'abus de confiance, mais cette remise peut être faite directement ou par un tiers. La remise doit être volontaire et elle droit être précaire. Dans le cas de l’espèce, Aminata a remis volontairement la somme de 5 millions à son amie à charge

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pour elle de la lui confier et non d’en faire un autre usage notamment l’utiliser pour ses besoins personnels.

Eléments constitutifs

1. Le détournement

Le détournement, élément matériel de l’infraction .Le détournement est l'élément matériel du délit. Il est réalisé dès lors que le propriétaire de la chose confiée n’est plus en mesure d’exercer ses droits sur elle, par suite des agissements frauduleux de celui qui la détenait. Le seul fait du détournement caractérise l'abus de confiance sans qu'il soit besoin de mise en demeure. Le détournement est suffisant même si le prévenu ne s'est pas approprié la chose ou n'en a pas tiré un profit personnel

Le détournement peut consister en une action ou une omission. Il peut résulter d'une restitution partielle ou d'une rétention. Il peut aussi résulter d'une utilisation de la chose à des fins autres que celles qui avaient été stipulées, d'un usage abusif et d'un détournement d'affectation. L'offre de remboursement ou une éventuelle compensation ne peuvent être invoqués.

Le seul défaut de restitution n'est pas une preuve suffisante de l'abus de confiance. L'existence d'un acte de détournement doit être prouvée.

2. Le préjudice

Le préjudice résulte du seul fait que le propriétaire se trouve privé de ses droits sur la chose

3. L'intention

L'intention résulte de la conscience de la précarité de la détention résultant de l'obligation de restituer et de la conscience d'un éventuel préjudice, autrement dit c’est l’agissement en connaissance de cause.

Sanctions

Tout coupable d'abus de confiance sera puni de six mois à trois ans d'emprisonnement, et facultativement d'une amende de 120 000 à 1 220 000 francs. Si l'abus de confiance prévu ci-dessus a été commis par un domestique, élève, clerc, commis, ouvrier ou apprenti, au préjudice de son maître, la peine sera de un à cinq ans d'emprisonnement. Si l'abus de confiance a été commis par un officier ministériel, un fonctionnaire public au sens de l'article 77 du Code pénal, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, la peine sera de cinq à dix ans de réclusion et facultativement, d'une amende qui ne pourra excéder 6 000 000 de francs Sont réputés fonctionnaires publics, au regard du Code pénal (cf. article 77), tous citoyens qui, sous une dénomination et dans une mesure quelconque, sont investis d'un mandat même temporaire, rémunéré ou gratuit, dont l'exécution se lie à un intérêt d'ordre public, et qui à ce titre, concourent au service de l'Etat, des administrations publiques, des communes ou des groupements administratifs.

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Fiche n° 47 : escroquerie

Cas pratique

Hendou est un commerçant dont les affaires marchent difficilement depuis quelques mois. Aussi sur les conseils d’un ami, il se rend chez Ladji, marabout bien connu de la place. Celui-ci lui montre plusieurs cantines remplies de billets de banque et lui promet de faire fortune après le sacrifice de 3 taureaux et le versement d’une somme de 05 millions. Hendou reçoit en retour plusieurs talismans, des philtres à boire et une cantine à ouvrir au bout de 45 jours.

A la date convenue, Hendou ouvre la cantine qui ne contient que des vieux journaux et apprend que Ladji a disparu sans laisser de traces. 3 ans plus tard, il apprend que Ladii se trouve à Sikasso et vous demande conseil car il veut porter plainte.

Problème de droit

Le cas pratique tel que posé soulève deux types de problèmes juridiques à savoir d’une part la nature des faits susceptibles d’être invoqués par Hendou à l’encontre du marabout et d’autre part la possibilité d’agir dans les délais fixés par la loi.

Nature des faits

Aux termes des dispositions du Code pénal ( article 275 ), tombe sous le coup de l’escroquerie : « quiconque, soit en faisant usage de faux noms, de faux titres ou de fausses qualités , soit en employant des manœuvres frauduleuses, des mensonges caractérisés pour persuader de l’existence de fausses entreprises ; d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire ou pour faire naître l’espérance ou la crainte d’un succès ou d’un accident ou de tout autre évènement chimérique, se sera fait remettre ou tenté de se faire remettre des fonds, des titres , des objets ou effets mobiliers et aura, par l’un des moyens escroqué ou tenté d’escroquer la totalité ou partie de la fortune d’autrui, ou obtenu des prestations de service… »

L’escroquerie suppose la réunion de trois éléments constitutifs que sont l’utilisation de moyens frauduleux, la tromperie et un préjudice.

-l’utilisation de moyens frauduleux : dans le cas d’espèce, le marabout a bien utilisé des moyens frauduleux , en l’occurrence la présentation d’une cantine remplie d’argent à Hendou qui est ainsi renforcé dans sa conviction que Ladji a le pouvoir de multiplier des billets de banque.

En cela l’escroquerie est différente de l’abus de confiance qui suppose une remise volontaire d’un bien ou de somme d’argent sans l’utilisation d’un quelconque artifice.

-la tromperie : Il s’agit de toutes les manœuvres frauduleuses telles que la remise de gris-gris ou de philtres censés être dotés d’un pouvoir mystique.

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-le préjudice : le préjudice est constitué par la remise d’une somme de 5 millions au marabout ainsi que les autres dépenses pour le sacrifice de taureaux.

Délai pour agir en justice ou prescription

Le marabout Ladji ayant fui pour une destination inconnue après son forfait, toute la question est de savoir si Hendou est encore en mesure d’agir contre lui après avoir appris sa présence à Sikasso.

Selon les distinctions spécifiées par la loi en fonction de la gravité de l’infraction, les délais de prescription pour la mise en mouvement des poursuites ou action publique sont différents selon qu’il s’agit de crime, de délit ou de contravention.

Ainsi, en matière de crime, l’action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis, sauf si dans cet intervalle, il a été accompli un acte d’instruction ou de poursuite ( plainte devant le parquet avec ouverture d’une information par exemple devant le juge d’instruction qui aura dans l’intervalle procédé à l’audition du plaignant ou lancé des commissions rogatoires en relation avec les faits ). Si dans cet intervalle un acte est effectué, l’action ne se prescrit qu’après dix ans révolus à compter du dernier acte.

En matière de délit, la prescription est de trois ans révolus selon les distinctions précisées et cette prescription est d’une durée d’un an pour les contraventions de simple police qui sont les infractions les moins graves.

Compte tenu de ces distinctions, il revient à Hendou d’apporter la preuve qu’il avait aussitôt après les faits déposé plainte à la police, au parquet ou devant un juge d’instruction. Dans tous les cas de figure cette plainte doit être déposée avant l’expiration du délai de 3 ans qui court à compter de la commission des faits.

En d’autres termes, l’action au pénal devant le tribunal correctionnel sera déclaré irrecevable si Hendou dépose plainte seulement après avoir appris la présence de Ladji à Sikasso alors que le délai de trois ans est expiré depuis la commission des faits qui constituent un délit au regard de la loi pénale.

Sanctions pénales

Quiconque est reconnu coupable d’escroquerie encourt la sanction d’un emprisonnement de un à cinq ans et facultativement d’une amende de 120 000 F à 1. 200. 000 FCFA.

Des peines complémentaires sont aussi susceptibles d’être prononcées telles que l’interdiction de séjour, la confiscation spéciale de produits ayant servi à la commission de l’infraction ou des choses produites par le délit.

Si par contre Hendou n’est plus en mesure d’agir devant le tribunal correctionnel, il pourra introduire une action en réclamation de somme devant le tribunal civil car le délai de prescription est plus long dans ce cas (20 ans en principe sauf exceptions énumérées par le Régime Général des Obligations)

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Fiche n° 48 : grivèlerie (défaut de paiement d’un service rendu)

Cas pratique

Adama, en panne d’essence se fait aider pour amener sa voiture dans une station-service. Après avoir commandé pour 20 000 FCFA de carburant, il déclare avoir perdu son portefeuille et qu’il n’a aucun autre moyen pour payer. Quel sort lui réserve la loi dans le cas d’espèce ?

Définition

La grivèlerie est un délit voisin de l'escroquerie, qui consiste à profiter d'un service notamment dans la restauration, les stations-services distribuant le carburant et l'hôtellerie en utilisant des subterfuges pour ne pas en payer le prix.

C'est un acte qui consiste à commander un service que l'on refusera de payer, ou dont on a conscience que l'on n'aura pas les moyens de payer.

Les éléments constitutifs de la grivèlerie

Le délit est constitué si :

- la prestation a été commandée par un client qui récupère ses vêtements dans un pressing ou qui se fait servir du carburant dans une station d’essence ou encore réserver une chambre d’hôtel pou tel nombre de jours ;

- la prestation a été consommée par exemple le nettoyage des habits a été effectué par le pressing ; le réservoir de carburant a été rempli par le pompiste de la station ; le client a effectivement séjourné à l’hôtel pendant le nombre de jours indiqué dans sa réservation…

- le client est dans l’impossibilité matérielle de régler le service ou est déterminé avant de consommer à ne pas payer ; Ainsi dans les exemples précédents, le client emporte ses habits au pressing sans régler la facture ou dans le cas d’espèce, démarre sans payer la commande au pompiste ; ou encore quitte l’hôtel sans régler la note…

- l’intention frauduleuse est reconnue et doit être préalable à la consommation. Ainsi le délit n'est pas forcément constitué, par exemple, si le consommateur oublie de payer en raison de sa concentration sur une communication téléphonique qu’il est entrain de faire ou se trouve obligé de partir subitement à cause d'un événement de force majeure.

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- Il en sera ainsi en cas d’incendie dans la station d’essence par exemple alors qu’il vient juste de faire le plein ou en cas d’attaque armée de bandits venus braquer une boutique libre-service au niveau de la station.

Dans le langage courant, les actes les plus graves sont appelés « filouterie » tandis que les actes les moins graves sont qualifiés de « resquille ».

Exemples de filouterie :

• quitter un restaurant, un bar, un hôtel après s'être fait servir, sans régler l'addition ou la note ;

• se faire servir du carburant et partir sans payer ; • prendre le taxi et le quitter sans s'acquitter du prix de la course.

Exemples de resquille :

• embarquer dans le car sans billet ou s’installer dans le train dans un compartiment de première classe avec un billet de seconde classe ;

• assister à un match de football ou à une séance de cinéma sans avoir payé le ticket d’entrée ;

• ne pas payer le stationnement au parking au moment de démarrer ;

Les sanctions du délit de grivèlerie

Adama, au vu des éléments de l’espèce tombera sous le coup d’une sanction pénale. Le juge appréciera en se fonda sur les dispositions de l’article 258 du code pénal qui dispose : « quiconque, sachant qu'il est dans l'impossibilité absolue de payer, se sera fait servir ou aura fait consommer par un tiers des boissons ou des aliments dans les établissements à ce destinés, se sera fait loger ou transporter ou fera loger ou transporter un tiers, sera puni d'un emprisonnement de onze jours à six mois et d'une amende de 25 000 à 100 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement ».

On notera au passage que les peines sont plus sévères en matière de vol ou d’escroquerie, cas dans lesquels, le coupable encourt de un à cinq ans d’emprisonnement assorti facultativement d’une amende qui est en matière d’escroquerie de 120 000 à 1.200 000 F.

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Fiche n° 49 : tentative de vol avec effraction

Cas pratique

Des voyous escaladent le mur de la clôture du voisin pour dérober la moto garée dans la cour. N’ayant pu commettre leur forfait du fait de la présence inopinée de Amadou qui se trouvait sur les lieux, ils tentent de fuir et sont poursuivis et appréhendés par la clameur publique. Que prévoit par la loi ? La tentative de vol est-elle punissable ?

Définition

La tentative est constituée lorsqu’un individu commence à commettre une infraction, mais qu’il se trouve interrompu dans son action par la survenance d’un événement extérieur qui l’empêche de mener à son terme son entreprise.

Solution au problème de droit

La réalisation d’une infraction suppose trois (3) éléments qui doivent être réunis pour qu’un individu soit sanctionné pénalement :

• Une intention coupable ; • Un commencement d'exécution ; • Une absence de désistement volontaire.

Cependant, si en droit un acte matériel est nécessaire, un résultat nuisible n’est pas toujours exigé pour que l’infraction soit punissable : c’est ce que l’on appelle la théorie de la tentative.

Le droit pénal se distingue là encore du droit civil, où la notion de tentative n’existe pas, puisqu’il faut dans la plupart des cas qu’un résultat dommageable soit constaté pour qu’une action en responsabilité puisse être engagée.

En droit pénal, l’élément matériel ne réside pas dans le résultat de l’acte. L’idée est de sanctionner un comportement antisocial, de punir un individu considéré comme nuisible à la société et ceci alors même que l’ordre social n’a finalement pas été troublé, puisque l’infraction n’a pas été consommée. L’attitude est considérée comme sévère.

« La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue, ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ».

• En matière de crime, la tentative est toujours réprimée

• En matière de délit, seulement si la loi le prévoit

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• En matière de contravention, il n’y a pas de tentative réprimée.

Dans le cas de l’espèce, les jeunes ont escaladé le mur dans le but de s’emparer de la moto, du coup, la tentative de vol n’est plus simple.

Le vol aggravé est un vol commis avec des circonstances aggravantes. Un vol commis avec circonstances aggravantes est plus lourdement sanctionné qu'un vol simple. Plus les circonstances sont graves, plus les sanctions sont lourdes.

Sanctions

Est puni de cinq à dix ans de réclusion criminelle et facultativement d'un à dix ans d'interdiction de séjour, tout individu coupable d'un vol commis la nuit. Les mêmes peines seront applicables en cas de vol commis le jour, avec l'une des circonstances suivantes:

1°) A l'aide d'effraction, d'escalade ou de fausses clés;

2°) Par deux personnes au moins;

3°) Si le voleur est un domestique ou un employé, même lorsqu'il aura commis le vol envers des personnes qu'il ne servait pas, mais qui se trouvaient soit dans la maison de son employeur, soit dans celle où il l'accompagnait, ou si c'est un ouvrier ou un apprenti, dans la maison, l'atelier, le magasin ou l'exploitation agricole de son patron, ou un individu travaillant dans l'habitation où il aura volé.

4°) Si le vol a été commis par l'employeur au préjudice de son domestique, homme de service à gages, ouvrier ou apprenti.

Sera puni de mort, tout individu coupable de vol commis en bande ou à main armée. La même peine sera applicable en cas de vol commis à l'aide de violences, avec ou sans port d'arme, ou à l'aide de substances enivrantes ou anesthésiantes.

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Fiche n° 50 : vol qualifié

Cas pratique Alassane prend frauduleusement un bélier de tabaski attaché à un arbre devant le domicile de Moussa. En cherchant à revendre le mouton, il est démasqué par un voisin de Moussa qui a reconnu le bélier et confond Alassane. Celui-ci est conduit au commissariat de police et reconnait son forfait. Quelles vont être les conséquences ?

Problème de Droit

Le vol est la soustraction frauduleuse d’une chose (meuble, véhicule, animal, argent…) appartenant à autrui.

Solution au problème de droit

La loi punit la soustraction d’une chose, quelle qu’elle soit, si elle appartient à autrui.

La chose, objet du vol peut-être corporelle ou incorporelle. Elle doit appartenir à autrui, elle ne doit pas être la propriété de l’auteur de la soustraction.

Ainsi, les choses n’ayant pas de propriétaire ou étant abandonnées ne peuvent faire l’objet d’un vol.

Il convient de préciser que la soustraction frauduleuse, « nécessaire pour constituer le vol, ne se rencontre pas dans le cas où la chose est remise volontairement ». Le vol ne peut donc pas être constitué si la personne qui remet la chose le fait de son plein gré. En outre, l’infraction n’est réalisée que si le voleur a eu l’intention bien arrêtée de s’approprier l’objet dérobé. Dans le cas d’espèce, Moussa doit se rendre au commissariat de police pour y faire sa déclaration en donnant les explications nécessaires pour attester que le bélier est bien sa propriété. De même, le voisin sera également entendu pour expliquer dans quelles circonstances il a été abordé et comment il est parvenu à confondre Alassane qui sera déféré devant le procureur de la République.

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Compte tenu des aveux circonstanciés d’Alassane, le dossier de la procédure sera en principe programmé pour la plus prochaine audience et ne fera pas l’objet d’une information devant le juge d’instruction. Sanctions Après avoir reçu la citation de l’huissier-commissaire de justice, Alassane doit comparaître à l’audience fixée par le tribunal pour reprendre sa déclaration faite au commissariat de police. Le voisin, en tant que témoin sera aussi appelé à comparaître pour faire sa déposition à la barre du tribunal. Moussa doit également se constituer partie civile pour demander la restitution de son bélier au cas où l’animal serait gardé à la fourrière ou au commissariat de police en attendant le jugement. Il peut réclamer des dommages et intérêts pour le préjudice subi et le tribunal appréciera les arguments et les justificatifs de dépenses engagées suite à la procédure pour accorder le dédommagement. Quant à Alassane, il encourt un emprisonnement de onze jours à cinq ans assorti d’une amende de 180 000 à 1 800 000 francs. S’il se trouve être un récidiviste, c’est-à-dire ayant par le passé subi une condamnation pour des faits de vol, la peine sera plus lourde. Outre cette condamnation au plan pénal, Alassane sera condamné au plan civil à des dommages et intérêts pour le préjudice occasionné. Le coupable peut se voir en outre être interdit des droits civiques, civils et de famille, d’exercer une fonction publique ou se voir condamné à une interdiction de séjour de cinq ans au moins et dix ans au plus, à compter du jour où il aurait subi sa peine.

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Fiche n° 51 : détention illégale d’armes à feu

Cas pratique

Dans la nuit du 31 décembre, au cours d’un contrôle de routine, une quantité importante d’armes à feu est trouvée dans le coffre du véhicule de Bertrand. Interpellé, celui-ci déclare être victime d’une machination et affirme qu’il ignorait la présence des armes à feu dans son coffre. A-t-il des chances de se soustraire à l’action de la justice ?

La détention d’arme à feu par un particulier est-elle autorisée par la loi ?

L’article 2 de la loi n° 04-050 du 12 Novembre 2004 régissant les armes et munitions en République du Mali dispose que « la détention d’armes et de munitions de guerre est formellement interdite aux particuliers ». A priori, il est difficile pour Bertrand de se dérober des faits à lui reprochés sous prétexte qu’il ignorait la présence des armes dans le coffre de son véhicule. Arguant que c’est un complot orchestré contre sa personne, il lui revient d’apporter ses preuves soit à la phase de poursuite, soit lors du jugement.

Les conditions de détention d’arme et de munitions

L’importation ou l’achat de munitions pour les armes à feu par les particuliers pour usage personnel est soumise à une autorisation du Représentant de l’Etat dans le cercle ou du District de Bamako. Cette autorisation induit un paiement des taxes sur l’arme et la détention d’un permis de chasse en règle. Toutefois, les quantités annuelles de munitions accordées sont fixées par Arrêté du Ministre en charge de la Sécurité Intérieure. Il est formellement interdit aux particuliers de revendre les dites munitions. Les conditions requises en termes d’âge exigent d’avoir 18 ans. De même l’intéressé doit jouir de ses droits civiques. Cependant il y a des critères selon les types d’armes; par exemple pour les pistolets il faut pouvoir justifier un besoin de protection en particulier le besoin de protéger le patrimoine (commerçants, caissiers, etc.).

Pour importer ou acheter une arme, on doit adresser d’abord une demande d’autorisation au service concerné. Une fois qu’on obtient l’autorisation d’importer (ou d’acheter) on se fera délivrer sur présentation de l’arme et de sa facture le permis de port d’arme. Il faut aussi s’acquitter d’une taxe. Les autorisations d’importation ou d’achat d’armes et de munitions et le permis de port d’arme sont délivrés par les autorités ci-après: – pour les armes blanches: par le Représentant de l’Etat dans le Cercle de résidence du requérant ou dans le District de Bamako;

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– pour les armes à feu de 2ème catégorie: par les Gouverneurs de région; – pour les armes à feu de 3ème et 4ème catégories1: par le Ministre chargé de la Sécurité Intérieure; – pour les munitions d’armes de 2ème et 3ème catégories: par le Représentant de l’Etat dans le Cercle de résidence du requérant ou dans le District de Bamako; – pour les munitions d’armes de 4ème catégorie: par le Ministre chargé de la Sécurité Intérieure.

Catégorisation des armes

Les armes sont classées en quatre catégories: 1ère catégorie : Armes Blanches: armes tranchantes (notamment lances, sabres, poignards, flèches, couteaux en forme de poignards, stylets, cannes-épée, machettes) et armes contondantes (notamment coups de poing américains, matraques, casse-tête, massues);

2ème catégorie : Armes à feu à canon lisse ; Fusils de chasse perfectionnés d’importation et de fabrication artisanale ; Fusils dits “de traite” , fusils à piston ;

3ème catégorie : Armes à feu à canon rayé: Carabines de chasse ou de salon, Carabines à canon mixte;

4ème catégorie : Armes à feu de défense; Pistolets traditionnels, pistolets, révolvers.

Les Sanctions

Les contrevenants aux conditions exposées ci-haut sont punis d’une peine d’emprisonnement de un (1) à cinq (5) ans et d‘une amende de 50.000 à 500.000 FCFA ou de l’une des deux peines.

La condamnation entraine la confiscation des armes et munitions objet de l’infraction et en outre pour les commerçants, armuriers et réparateurs d’armes ou de munitions, le retrait de l’autorisation et la fermeture du commerce ou de l’atelier.

En cas de saisie définitive, elles sont vendues aux enchères à des personnes détentrices d’autorisation d’importation ou d’achat. Le produit de la vente est versé au trésor public.

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Fiche n° 52 : détention de drogue

Cas pratique

Lors d’un concert de musique au Carrefour des jeunes, un petit sachet contenant du chanvre indien est découvert dans la poche d’un spectateur surnommé « Wallasky » sans autre précision. Conduit au Commissariat de police, celui-ci soutient ne pas être un vendeur de stupéfiant mais tout simplement un consommateur occasionnel pour soigner ses maux de tête. Quel sort lui réserve la loi en pareille circonstance ?

La détention ou la consommation de stupéfiants en vue de soigner des maladies est-elle autorisée par la loi ?

L’article 137 de la loi n° 01-78 du 18 Juillet 2001 portant sur le contrôle des drogues et des précurseurs dispose « l’usage hors prescription médicale des drogues sous contrôle est interdit sur le territorial national ».

Dans le cas de l’espèce, il revient à « Wallasky » de justifier que le chanvre indien lui a été prescrit par un médecin et de produire pour la circonstance une ordonnance.

Définitions

Le terme « drogue » désigne une plante, une substance ou une préparation placée sous contrôle par la loi nationale ou une convention internationale ratifiée par le Mali.

« Une drogue dure » est celle qui engendre un état de dépendance.

« Une drogue douce » est celle qui a des effets mineurs sur l’organisme

Le chanvre indien est considéré comme une drogue douce.

Les conditions de détention

Les drogues ne peuvent être prescrites et délivrées aux particuliers que sous une forme compatible avec leur usage thérapeutique (médicament) et seulement sur ordonnance :

- d’un médecin,

- d’un chirurgien-dentiste pour les prescriptions nécessaires à l’exercice de l’art dentaire,

- d’un directeur de laboratoire d’analyses de biologie médicale pour les prescriptions directement liées à l’exercice de la biologie,

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- d’un docteur vétérinaire pour l’usage vétérinaire, d’une sage-femme, d’un infirmier d’Etat pour les prescriptions nécessaires à l’exercice de sa profession et dans les limites établies par un arrêté du Ministre chargé de la Santé Publique .

En outre, l’ordonnance doit indiquer :

- le nom, la qualité et l’adresse du praticien prescripteur,

- la dénomination du médicament, sa posologie et son mode d’emploi

- la quantité prescrite ou la durée du traitement et éventuellement le nombre des renouvellements

- les noms et prénoms, sexe et âge du malade ou s’il s’agit d’une ordonnance délivrée par un vétérinaire, du détenteur de l’animal ;

- date à laquelle elle est rédigée, la signature et le cachet du prescripteur.

Sanctions

Toute drogue trouvée en la possession d’une personne qui en fait un usage illicite est saisie et sa confiscation est ordonnée par l’autorité judiciaire si ladite personne ne fait pas l’objet de poursuites.

Toutefois, ceux qui auront de manière illicite, détenu, acheté ou cultivé des plantes ou substances classées comme stupéfiants ou substances psychotropes dont la faible quantité permet de considérer qu’elles étaient destinées à leur consommation personnelle, seront punis :

- S’il s’agit d’une plante ou d’une substance classée comme drogue à haut risque, y compris l’huile de cannabis, d’un emprisonnement de 3 mois à 1 an et d’une amende de 25000 à 100000 F ou de l’une de ces deux peines seulement

- S’il s’agit d’un dérivé de la plante de cannabis autre que l’huile de cannabis, d’un emprisonnement de 2 mois à 6 mois et d’une amande de 15000 à 75000 F ou de l’une de ces deux peines seulement ;

- S’il s’agit d’une plante ou d’une substance classée comme drogue à risque, d’un emprisonnement de 1 mois à 3 mois et d’une amende de 10000 à 50000 F ou de l’une de ces deux peines seulement.

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Fiche n° 53 : légitime défense, coups et blessures ayant entraîné la mort

Cas pratique

De retour d’une soirée dansante, Bouba entre dans une boutique pour acheter un paquet de cigarettes. Impatient, il insulte le boutiquier Saloum lui reprochant sa lenteur à servir les clients. Une altercation s’en suit et Bouba, ivre sort son couteau pour agresser Saloum. En voulant se défendre, le boutiquier assène un coup de bâton sur la tête de Bouba qui tombe et meurt sur le champ.

Saloum est placé en garde à vue et conduit devant le Procureur de la République. Que risque-t-il ?

Problème de droit

La légitime défense est-elle une cause d’exonération de responsabilité ? Saloum risque-t-il d’être inculpé de meurtre commis sur la personne de Bouba ?

Solution

L’article 28 du code pénal prévoit qu’il n’y a ni crime ni délit :

1- Lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l’action ou de légitime défense de soi-même ou d’autrui ; 2- Lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister ; 3- Lorsqu’il a agi en vertu d’un commandement de la loi ou d’un ordre de l’autorité légitime.

Dans le cas de l’espèce, Saloum était en état de légitime de défense face à Bouba qui voulait l’agresser avec un couteau. Bouba était par ailleurs ivre et nul ne saurait mesurer les conséquences de ses actes si Saloum ne s’était pas défendu. Sa riposte devient alors légitime en raison d’un fait justificatif, autrement dit que l'infraction commise est justifiée par le péril qui menaçait l’auteur des faits.

Définition

La légitime défense est une cause d'irresponsabilité pénale. C’est une exception juridique qui interrompt l'action au pénal contre un prévenu qui aura fait cesser une agression contre lui-même ou autrui par des moyens en d'autres cas interdits. Elle permet à l'auteur d'une infraction pénale de se libérer de sa responsabilité dès lors qu'il l'a commise pour repousser une agression actuelle et injuste le menaçant ou menaçant autrui.

Conditions relatives à l'agression

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Pour agir dans le cadre de la légitime défense des personnes, l'agression contre soi-même ou autrui doit répondre à trois conditions (cumulatives). Elle doit être :

• Réelle : le danger doit être réel et préalable. Par exemple, n'est pas en état de légitime défense celui qui frappe un agresseur maîtrisé et maintenu fermement par une tierce personne.

• Actuelle : la réaction doit être immédiate .si le danger est passé ou le mal accompli, la défense pour l'éviter est inutile. Il s'agit alors non plus d'un acte de défense mais d'une vengeance privée, ce qui est exclu dans un Etat de droit. Par exemple, n'est pas en état de légitime défense celui qui tire sur un voleur en fuite. La légitime défense n'est pas davantage retenue lorsque l'attaque et le danger ne sont que futurs et éventuels, quand on se sent menacé par exemple.

• Injuste : n'est pas injuste l'agression autorisée ou ordonnée par la loi ou justifiée par la faute de la personne agressée. Ainsi, ne peut pas invoquer la légitime défense celui qui a provoqué, par sa faute, l'agression dont il se prétend victime.

Conditions relatives à la riposte

La riposte répond également à certaines conditions :

• La riposte doit être nécessaire il n'y a aucun autre moyen de se soustraire au danger voire strictement nécessaire s'agissant de la légitime défense des biens.

• La riposte doit être mesurée, c'est-à-dire qu'elle doit être proportionnée à l'agression. Si la vie ou l'intégrité physique de la personne sont en danger, l'homicide de l'agresseur peut être envisagé. Il n'en va pas de même si l'agression ne vise que des biens.

• La riposte doit être volontaire : par exemple, un individu qui se défend contre une atteinte à son intégrité physique en repoussant son agresseur qui trébuche et heurte la tête contre un trottoir, cette chute entraînant son décès.

Preuve de la légitime défense

C'est à celui qui invoque la légitime défense de prouver qu'il remplit toutes les conditions exigées. Autrement dit, c'est celui qui est poursuivi pour avoir commis une infraction pénale qui doit prouver qu'il était en état de légitime défense.

Pour alléger le fardeau de la preuve, il existe des cas particuliers prévus par la loi dans lesquels la légitime défense est présumée. Dans ces situations, celui qui invoque la légitime défense n'a plus à prouver qu'il en remplit les conditions. La loi vise notamment le cas de l'individu qui est amené à repousser celui qui pénètre de nuit, par effraction, violence ou ruse dans son domicile.

Effets

Si l'une des conditions d'existence de la légitime défense fait défaut, ce qui n'est pas rare, la légitime défense ne sera pas retenue par les juges.

La légitime défense exonère la responsabilité pénale de l'agent mais également sa responsabilité civile, excluant donc toute condamnation à des dommages-intérêts pour réparer le dommage causé.

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Fiche n° 54 : dénoncer le blanchiment d’argent et la corruption

Cas pratique Ousmane est connu de tous comme un chômeur qui n’a jamais travaillé. Il a changé de quartier depuis peu et subitement est devenu propriétaire de deux grandes boutiques libre-service et d’un parc de voitures qu’il change au gré de ses humeurs. On le soupçonne de blanchiment de capitaux sans en avoir la moindre preuve. Que dit la loi en de pareille circonstance ?

Problème de droit Le problème de droit est d’une part celui de savoir sur qui pèse la déclaration de soupçon au regard de la loi et d’autre part comment faire pour amener Ousmane à justifier son changement de statut du jour au lendemain dans un domaine où il est question de blanchiment d’argent.

Définition

Le blanchiment d’argent est une des techniques de la criminalité financière. C’est l’action de dissimuler la provenance d’argent acquis de manière illégale (spéculations illégales, activités mafieuses, trafic de drogue, d’armes, extorsion, corruption, fraude fiscale…) afin de le réinvestir dans des activités légales (par exemple la construction immobilière…). Le blanchiment permet à cet argent de sembler propre, c’est-à-dire de prendre une apparence honnête.

Les personnes assujetties à la déclaration de soupçon La CENTIF (Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières ) est un service qui reçoit les déclarations de soupçons et peut demander l’ouverture d’une enquête sur n’importe quelle personne physique ou morale sur laquelle pèse des soupçons de blanchiment comme rapporté dans le cas d’espèce d’un individu chômeur devenu subitement riche. Elle travaille notamment avec le Trésor Public ; la BCEAO ; les organismes financiers ; les membres des professions juridiques indépendantes (avocats, notaires…), lorsqu’ils représentent ou assistent des clients en dehors de toute procédure judiciaire, notamment dans le cadre des achats et ventes de biens, d’entreprises commerciales ou de fonds de commerce… La mission de la CENTIF est de recueillir et de traiter tout renseignement financier sur les circuits de blanchiment de capitaux. Elle émet des avis et propose les réformes nécessaires sur la mise en œuvre de la politique de l’Etat en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux.

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Les autres assujettis Il s’agit essentiellement des apporteurs d’affaires aux organismes financiers ; des commissaires aux comptes ; de agents immobiliers ; des marchands d’articles de grande valeur, tels que les objets d’art (tableaux, masques notamment), pierres et métaux précieux ; des transporteurs de fonds ; des propriétaires, directeurs et gérants, de casinos et d’établissements de jeux, y compris les loteries nationales ; des agences de voyage ; des Organisations Non Gouvernementales (ONG). Suites données aux déclarations de soupçons Lorsque les opérations mettent en évidence les faits susceptibles de constituer l’infraction de blanchiment de capitaux, la CENTIF transmet un rapport sur ces faits au Procureur de la République, qui saisit immédiatement le juge d’instruction. De la recherche des preuves

Dans le cas de l’espèce, le citoyen lambda n’est pas éligible pour faire une déclaration de soupçon. Par contre, rien ne l’empêche de signaler le changement brusque du train de vie au procureur de la République du Pôle judicaire spécialisé en matière de délinquance économique et financière qui pourra dans ce cas requérir l’ouverture d’une enquête avant de saisir le juge d’instruction. Mesures d’investigation

Le juge d’instruction peut ordonner, conformément à la loi, pour une durée déterminée, sans que le secret professionnel puisse lui être opposé, diverses actions, notamment : - la mise sous surveillance des comptes bancaires pour avoir des éléments sur l’origine des fonds utilisés par Ousmane ; l’accès à des systèmes, réseaux et serveurs informatiques utilisés ou susceptibles d’être utilisés par des personnes contre lesquelles existent des indices graves et concordants ; la communication d’actes authentiques ou sous seing privé, de documents bancaires, financiers et commerciaux. Il peut également ordonner la saisie des actes et documents susmentionnés. Sanctions Le juge d’instruction peut prescrire des mesures conservatoires, notamment la saisie ou la confiscation des biens en relation avec l’infraction objet de l’enquête ainsi que le gel des sommes d’argent et opérations financières portant sur lesdits biens. Quiconque est reconnu coupable d’une infraction de blanchiment de capitaux encourt un emprisonnement de trois (03) ans à sept (07) ans et une amende égale au triple de la valeur des biens ou fonds sur lesquels ont porté les opérations de blanchiment.

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Fiche n° 55 : enregistrement d’un colis piégé Cas pratique A la veille de son voyage à Dubaï, Abdoul reçoit d’une vague connaissance un colis emballé dans un sachet noir à remettre à un fournisseur. Au moment de l’enregistrement des bagages, le colis explose, causant plusieurs victimes. Abdoul est aussitôt interpellé et placé en garde à vue pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste.

Problème de droit

L’explosion du colis constitue-t-elle un acte terroriste ? Abdoul pourra-t-il se soustraire à l’action de la justice ?

Solution A partir du moment où il y a eu des victimes, une enquête sera ouverte pour connaitre les auteurs et complices. L’infraction d’association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme est la clé de voûte de la lutte contre le terrorisme. L’explosion de colis est un mode d’acte terroriste qui est réprimé par la loi.

Définitions Le terrorisme passe par l’usage de la violence envers des innocents à des fins politiques, religieuses ou idéologiques. L’association de malfaiteurs suppose :

• un groupement ou une entente de personnes ayant la résolution d’agir en commun, • ayant pour but la préparation d’actes de terrorisme ; • ayant manifesté une adhésion au groupe en connaissance de ce dessein avec la volonté d’apporter une aide efficace dans la poursuite de l’entreprise ; • une infraction intentionnelle ; • que chaque participant ait intégré le groupement en connaissance de cause mais avec la volonté d’apporter un concours, notamment des moyens matériels ou des informations.

Dans le cas de l’espèce, il serait très difficile pour Abdoul de dire qu’il ne connaissait pas le contenu du colis ou celui qui le lui a remis ou encore celui à qui le colis était destiné.

En matière de terrorisme, rien n’est laissé au hasard, tous les détails comptent et c’est pourquoi Abdoul en l’état peut difficilement échapper à l’action de la justice. Il ne saurait invoquer une quelconque négligence l’ayant empêché de s’assurer que le colis reçu était sans danger aussi bien pour lui que pour les tiers.

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Actes Terroristes

Pour qu’un crime ou un délit soit considéré comme un « acte de terrorisme », il faut qu’il soit lié à une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, la violence, la mort etc. Nul besoin qu’un attentat soit commis pour que cela soit considéré comme une infraction. La simple appartenance à une organisation terroriste est punissable, sans qu’il soit nécessaire de démontrer la fonction occupée par la personne, dès lors qu’elle a eu connaissance du dessein terroriste du groupe et qu’elle y a adhéré volontairement. Modes opératoires des terroristes

Les terroristes ont traditionnellement plusieurs modes d’action parmi lesquels les plus courants sont les prises d’otages qui consistent en la séquestration de civils non consentants dans le but de demander des rançons ou la libération de prisonniers politiques. Il convient également de citer les attentats aveugles qui sont des attentats consistants en des bombes placées dans des endroits fréquentés par les civils dans le but de faire un nombre important de victimes dans le but de semer la peur et déstabiliser le régime en place. A noter enfin les attentats suicides qui consistent en l’explosion de charges portées par un humain qui a l’intention de se suicider en entraînant avec lui de nombreuses victimes dans des lieux fréquentés.

Sanctions

Les sanctions concernant les actes de terrorisme vont de six ans d’emprisonnement à la

réclusion criminelle à perpétuité selon les cas. Les peines sont toujours assorties d’une période

de sûreté. Les personnes condamnées pour terrorisme peuvent se voir infliger d’autres peines

en plus de la peine principale. Elles peuvent se traduire par des interdictions de séjour, ou

encore interdiction de droits civiques

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Fiche n° 56 : vol avec violence, plainte non suivie d’effet, constitution de partie civile

Cas pratique Après le crépuscule, alors qu’elle revenait d’un mariage à Djicoroni et au moment où elle s’apprêtait à sortir du taxi, Bakadia est violemment dépossédée de son sac à main qui contenait ses bijoux en or par deux individus cagoulés qui prennent la fuite en moto. Peu de temps après, elle apprend que deux jeunes du quartier, Ali et Brin ont tenté de vendre des parures en or à un bijoutier. Elle décide de déposer plainte contre ces deux jeunes pour vol auprès du procureur de la République mais reçoit quelques jours plus tard un avis de classement sans suite. Bakadia n’en démord pas et apprend qu’elle peut porter plainte avec constitution de partie civile. Elle demande à être assistée dans cette procédure.

Définition Une plainte avec constitution de partie civile permet à une victime de saisir directement un juge d’instruction et demander l’ouverture d’une enquête appelée information judiciaire. C’est une manière de combattre l’inertie du parquet qui refuse d’engager des poursuites à la suite d’une infraction. La plainte avec constitution de partie civile lance à la fois :

• une action pénale, l’auteur des faits risquant un procès et des sanctions pénales (peine de prison et/ou amende)

• et une action civile qui permet de demander une indemnisation à l’auteur des faits.

Elle se distingue de la plainte simple qui saisit le procureur de la République

Conditions

Il est possible de porter plainte avec constitution de partie civile uniquement si :

• une plainte simple pour les mêmes faits a été classée sans suite par le procureur de la République. Dans ce cas, il revient au plaignant de produire comme support un avis de classement sans suite ou un courrier du procureur indiquant son refus d’engager des poursuites.

• ou si une plainte simple a déjà été déposée pendant un certain temps sans qu’aucune suite n’ait été donnée. Dans ce cas, la production d’un courrier du procureur de la République informant du classement sans suite n’est pas une condition préalable. Toutefois, le plaignant dans ce cas doit détenir la preuve datée de son dépôt de plainte.

• Les parents ou tuteurs d’un mineur sont seuls habilités à déposer en son nom une plainte avec constitution de partie civile.

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Ainsi dans le cas d’espèce, Bakadia produira devant le juge d’instruction l’avis de classement sans suite adressé par le procureur de la République.

Formalités et procédure

La recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile est conditionnée au versement d’une consignation dont le montant est fixé par le juge d’instruction.

Après le versement de la consignation, le juge d’instruction communique le dossier au procureur de la République qui peut demander au juge d’instruction de ne pas prendre en compte la plainte s’il estime par exemple que les faits ne constituent pas une infraction.

En somme, le procureur de la République ne peut saisir le juge d’instruction de réquisitions de non –informer que si les faits même établis et démontrés ne sont pas susceptibles de qualification pénale. C’est l’exemple classique de réclamation de dette ou de somme d’argent que d’aucuns, au lieu de saisir le tribunal civil amènent devant un juge d’instruction qui ouvre une information pour…abus de confiance ou escroquerie , cas typique de détournement de procédure.

En cas de plainte insuffisamment motivée ou insuffisamment justifiée par les pièces produites, le juge d’instruction peut être saisi de réquisitions tendant à ce qu’il soit provisoirement informé contre toutes les personnes que l’information fera connaitre.

Décision du juge d’instruction

Le juge d’instruction peut décider de suivre ou non l’avis du procureur de la République.

Dans la première hypothèse (ouvrir une information judiciaire) l’enquête commence et le juge d’instruction pose conformément à la loi à tous les actes nécessaires à l’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité.

Lorsqu’il va dans le sens d’une ordonnance de refus d’informer (pas d’infraction pénale ou faits manifestement non commis), le juge refuse d’ouvrir une information. Le plaignant peut alors saisir la chambre d’accusation de la Cour d’appel pour contester cette décision. Le recours doit être fait dans un délai de 10 jours suivant la notification de l’ordonnance contestée. Si le juge décide de ne pas ouvrir d’information, la ou les personnes visées par la plainte peuvent se retourner contre la personne qui a déposé plainte pour dénonciation calomnieuse.

A la fin de l’information, le juge d’instruction peut soit :

• Rendre une ordonnance de non-lieu. L’inculpé et toutes personnes visées dans la plainte sont recevables pour demander des dommages-intérêts au plaignant à condition que l’ordonnance soit définitive. L’action doit être portée par voie de citation devant le tribunal correctionnel où l’affaire a été instruite.

• Renvoyer les auteurs présumés de l’infraction devant la juridiction pénale compétente au cas où l’information aura réuni des charges suffisantes contre les inculpés.

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Fiche n° 57 : réparation du préjudice subi par une victime d’un accident de circulation

Cas pratique

Lagaré a été renversée par un camion, en plein centre de Sikasso. Elle a subi plusieurs interventions chirurgicales en raison de ses blessures. Une fois de retour à Bamako, elle compte obtenir réparation de son préjudice évalué à 800 000 FCFA devant le tribunal de sa commune car ne pouvant encore se déplacer facilement. Quelle est la juridiction compétente en la matière ?

Définition

La compétence d’une juridiction pénale est fondée sur son aptitude à juger une infraction donnée et cette compétence est selon les cas personnelle, matérielle ou territoriale.

Ainsi, la compétence du tribunal pour enfants est exclusive pour juger les délits commis par des mineurs c’est-à-dire les prévenus qui n’ont pas atteint l’âge de 18 ans. De même, sur la compétence personnelle, les tribunaux militaires jugent les crimes et délits qui ne peuvent être commis que par des militaires comme la désertion.

Quant à la compétence matérielle, elle est fonction de la gravité des infractions. A ce titre, la cour d’assises juge les infractions les plus graves ou crimes, le tribunal correctionnel est compétent pour le jugement des délits et le tribunal de simple police est compétent pour le jugement des infractions de peu de gravité, à savoir les contraventions.

Pour illustrer, on retiendra que la loi considère comme contravention simple police toute infraction punie de un à dix jours d’emprisonnement ou d’une amende n’excédant pas 18 000 FCFA.

Pour revenir au cas d’espèce, Lagaré est victime d’une atteinte à son intégrité physique en l’occurrence les coups et blessures involontaires, terme générique prévu par le Code pénal qui recouvre les accidents de la circulation causés par maladresse, imprudence ou inattention au volant.

Le Code Pénal réprime également les coups et blessures volontaires qui impliquent une volonté délibérée lorsque par exemple il y a rixe (bagarre) entre deux ou plusieurs individus.

Procédure

Pour obtenir réparation, le premier acte à poser par Lagaré est d’obtenir un certificat médical afin de déterminer l’étendue du préjudice subi et l’incapacité de travail découlant de l’accident.

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En attendant la délivrance du certificat et en fonction de son état physique, elle a le choix entre plusieurs options. Le Tribunal de Grande Instance compétent dans sa formation correctionnelle sera :

- le tribunal correctionnel du lieu de l’infraction c’est-à-dire dans ce cas le TGI de Sikasso : c’est en principe le tribunal le mieux indiqué car il est facile de trouver sur place les témoins qui ont assisté à l’accident et dont la déposition est toujours utile lorsque des contradictions apparaissent entre les déclarations du prévenu et celles du plaignant ;

- le tribunal correctionnel (TGI) du lieu de résidence du prévenu : dans le cas d’espèce, si le chauffeur réside à Bamako ou dans toute autre localité, Lagaré n’aura pas besoin de se rendre à Sikasso compte tenu de son état de convalescence. Elle portera directement plainte devant cette juridiction. Par contre si le lieu de résidence du prévenu est plus éloigné, il serait plus raisonnable pour elle de faire le déplacement à Sikasso ;

- le tribunal correctionnel (TGI) du lieu l’arrestation de l’auteur de l’infraction : la compétence de ce tribunal sera retenue en cas de fuite du chauffeur comme cela arrive malheureusement quelquefois.

Dans ce cas, le tribunal du lieu de l’interpellation du chauffeur sera habilité à juger le prévenu même lorsque cette arrestation aura été opérée pour une autre cause.

La compétence du tribunal correctionnel s’étend aux délits et contraventions qui forment avec l’infraction déférée un ensemble indivisible. Elle peut aussi s’étendre aux délits et contraventions connexes.

Effets

Une fois le tribunal correctionnel compétent au plan territorial saisi, les formalités seront accomplies en vue de l’audience notamment la citation du chauffeur, de la partie civile et des témoins en cas de besoin.

En fonction des éléments de preuve rapportés sur l’étendue du préjudice subi , notamment par la production du certificat médical , des factures de soins dans une clinique et des ordonnances prescrites, le tribunal appréciera le bien-fondé de la réclamation de 800 000 FCFA et se prononcera en conséquence.

En conclusion, Lagaré ne peut intenter un procès pénal devant le tribunal correctionnel de son propre domicile.

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Fiche n° 58 : recel de biens volés

Cas pratique

Moussa habite dans la même concession que Sira qui constate la disparition d’un lot de basins teints lui appartenant. Deux jours plus tard, en se rendant à un mariage dans le quartier voisin, Sira aperçoit un revendeur de carburant, habillé dans un de ses tissus. Elle interroge séance tenante l’intéressé qui lui répond avoir acheté le tissu auprès de Moussa. Que peut faire Sira ?

Le problème de droit

Le recel d’un bien constitue-t-il une infraction à la loi pénale ?

Dans le cas de l’espèce, le jeune Moussa a vendu au revendeur de carburant des tissus ne lui appartenant pas et toute la question est de savoir comment il est entré en possession de ces marchandises.

Pour lever toute équivoque, Sira ira déposer plainte au commissariat de police ou à la brigade de gendarmerie. Elle peut aussi se rendre directement au tribunal pour déposer sa plainte contre Moussa pour vol et contre le revendeur de carburant pour recel.

Définition

Le vol est la soustraction frauduleuse d’une chose appartenant à autrui. Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose ou de faire office d’intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d’un crime ou d’un délit, ou est liée à celui-ci s’il s’agit d’une personne.

Le recel peut également résulter du fait, en toute connaissance de cause, de bénéficier d’une chose provenant d’un crime ou d’un délit.

Les conditions

L’élément matériel du recel est réalisé par la dissimulation, la détention, la transmission ou l’office d’intermédiaire pour transmettre.

La notion de détention est interprétée largement par les tribunaux qui retiennent le recel chaque fois que le prévenu a la faculté de disposer de la chose même sans l’avoir matériellement entre les mains.

L’élément matériel du recel est également réalisé chaque fois que le prévenu a bénéficié, par un moyen quelconque, du produit d’un crime ou d’un délit.

La seule limite à l’extension de l’élément matériel du recel réside dans l’exigence de constater le caractère personnel des faits de commission

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Le recel est une infraction intentionnelle. Il suppose donc la conscience de l’origine frauduleuse de la chose et la volonté de la détenir ou d’en profiter.

La preuve de l’élément moral du recel est établie par tout indice grave et concordant de nature à établir la collusion entre Moussa et le revendeur de carburant. Parmi les indices relevés par les juges, figurent notamment les conditions insolites de l’opération, le comportement du prévenu et, le cas échéant, sa qualité de professionnel.

Le tribunal peut retenir Moussa dans les liens de la culpabilité s’il avoue directement les faits de vol ou s’il ressort des témoignages et autres indices graves et concordants qu’il a effectivement volé le basin malgré ses dénégations.

Quant au revendeur de carburant, celui-ci peut être retenu comme complice par voie de recel si la preuve est rapportée par le procureur de la République qu’il avait connaissance de l’origine frauduleuse du tissu sur la base d’un ensemble de faisceaux tels que le prix dérisoire d’acquisition ou encore le lieu et le moment de la transaction avec Moussa…

Les sanctions applicables

Le revendeur encourt la même peine que Moussa qui est l’auteur principal du vol et on dit en la matière qu’il y a « emprunt de criminalité ». En d’autres termes le tribunal condamnera le complice de recel à la même peine que celle prononcée contre le voleur sauf s’il établit qu’il n’avait pas connaissance de l’origine frauduleuse des biens ou si des circonstances atténuantes sont reconnues en sa faveur.

Les peines applicables en matière de délit de vol et de recel sont : l’emprisonnement de onze jours à cinq ans, La peine de travail d’intérêt général, L’amende de 180 000 à 1 800 000 francs

Les coupables pourront en outre être interdits des droits civiques, civils et de la famille, d’exercer une fonction publique ou condamnés à une interdiction de séjour sur le territoire de cinq ans au moins et dix ans au plus, à compter du jour où ils auraient subi leur peine

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Fiche n° 59 : réparations des dommages causés par un accident de conduite en état d’ivresse

Cas pratique : Mory, 19 ans, a décidé de fêter sa réussite au baccalauréat avec quelques amis. Il emprunte la voiture de ses parents pour aller dans un club. A trois heures du matin, il rentre chez lui en état d’ivresse. Sur le chemin, Mory perd le contrôle de la voiture et vient s’encastrer dans une citerne garée le long de la route. Heureusement, les pompiers et la police arrivent très rapidement sur les lieux ; ils découvrent Mory hébété, mais indemne. Mory redoute les conséquences de son accident. Problème de Droit Quelle est la portée de la responsabilité de Mory dans cet accident ?

La responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle est celle qui a lieu en dehors de tout contrat, entre la victime du dommage et l’auteur. Cette responsabilité provient non pas d’un acte juridique mais d’un fait juridique.

La preuve de la faute

Tout acte dommageable ouvre droit à une action en dommages-intérêts. La victime, pour obtenir réparation, doit établir l’existence de la faute qui doit être objective, prouvée ou éventuellement présumée. On distingue :

La responsabilité personnelle qui trouve son fondement dans l’article 125 du RGO qui dispose que « toute personne qui par sa faute même d’imprudence, de maladresse ou de négligence cause à autrui un dommage est obligé de le réparer », que cette faute ait été volontaire ou non le domaine est très vaste et il peut s’agir d’une simple omission notamment en cas de danger potentiel.

Il s’agit d’une obligation générale de prudence et de diligence, même si la réglementation en vigueur est respectée. Mais, le fautif présumé pourra dégager sa responsabilité : - s’il n’a pas commis le fait reproché ; - si ce fait n’est pas constitutif d’une faute ; - si un autre fait à un lien direct avec le préjudice notamment un tiers ou la victime imprudente ; - en cas de force majeure. Au cas de figure de la responsabilité personnelle s’ajoute la responsabilité du fait des choses et des personnes dont on est responsable.

La responsabilité du fait d’autrui et du fait des choses relève de l’article 149 du RGO qui vise toute personne responsable du dommage causé par le fait des choses ou des animaux dont elle a la garde.

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La garde étant le pouvoir d’usage, de direction et de contrôle qui peut être transférée lorsque le propriétaire confie l’animal ou la chose à autrui ou dans le cas d’utilisation par un tiers à l’insu ou contre la volonté du propriétaire.

Mais, le fautif présumé pourra dégager sa responsabilité ou l’atténuer :

- si le lien de préposition n’est pas établi ;

- si le fait de la victime a concouru au dommage ;

- si un transfert de garde est intervenu par exemple en cas de location.

Les conditions de mise en œuvre et effets de la responsabilité délictuelle

Il faut la réunion de trois (03) éléments : - un dommage subi par la victime ; - un fait générateur imputable au fautif ; - un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage. Mory étant majeur pourra être poursuivi pénalement pour conduite en état d’ivresse. Il est de principe en droit, que l’auteur d’un délit commis en état d’ivresse ne peut bénéficier de circonstances atténuantes devant un tribunal.

Sur le plan civil, la citerne ayant été endommagée il sera condamné à réparer le préjudice causé sur le fondement des dispositions de l’article 125 du Régime Général des Obligations

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Fiche n° 60 : provocation, rixe, excuses et circonstances atténuantes Cas pratique Pathé est berger et conduit ses animaux paître dans une concession rurale qui sert à la fois d’habitation et de champ à Zanké. Celui-ci et ses frères après des mises en garde restées sans suite s’en prennent violemment à Pathé qui est molesté. Pathé porte plainte. Quelle peut être l’issue du procès ? Problème de droit L’excuse de la provocation constitue-t-elle un fait justificatif ou une cause exonératoire de responsabilité ? En d’autres termes Zanké et ses frères peuvent-ils avancer le motif de la provocation pour justifier leur acte et échapper à une condamnation ? Solution Se rendre justice à soi-même est prohibé par la loi quelles que soient les raisons invoquées. En d’autres termes, la justice et le droit de punir relèvent des prérogatives de l’Etat même si certaines circonstances sont de nature à atténuer la responsabilité de l’auteur d’une infraction.

Les excuses en tant que présomptions de responsabilité atténuée

Il convient de faire la distinction entre les causes qui écartent toute responsabilité pénale (démence, légitime défense de soi-même ou d’autrui ; contrainte ; ordre de la loi ou commandement de l’autorité légitime) et les excuses qui sont susceptibles d’atténuer cette responsabilité telles que la provocation, la minorité pénale ou la dénonciation par les auteurs et complices de crimes commis en bande organisée.

Ainsi l’excuse de provocation pourrait être invoquée par Zanké et ses frères qui ont molesté Pathé en repoussant l’intrusion réitérée de Pathé dans leur habitation ou ses dépendances. Toute expédition punitive après l’intrusion dans la concession rurale relèvera de la vengeance et de la préméditation pure et simple. Dans ce cas, il sera impossible d’invoquer l’excuse de provocation.

Effets de l’excuse sur la responsabilité pénale

L’excuse n’a aucune influence sur le principe même de la responsabilité pénale. Elle suppose le caractère délictueux du fait accompli et la culpabilité matérielle et morale du délinquant. Elle ne s’oppose même pas à la condamnation et se limite à entraîner une réduction de la peine objectivement encourue par un délinquant sans excuse.

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Mais elle produit des effets plus étendus que les causes d’atténuation de peine prévues par la loi en raison de l’âge ou du sexe d’un condamné. L’excuse atténuante influe sur le principe même de la pénalisation, tandis que la cause d’atténuation de peine a simplement pour résultat d’adoucir ses modalités d’exécution.

Mesures d’atténuation de la peine due à l’excuse

Si l’excuse de provocation est retenue par le tribunal, Zanké et ses frères encourent entre 1 et 5 ans d’emprisonnement et une amende de 20 000 à 500 000 FCFA au cas où les coups portés ont occasionné une incapacité de travail de plus de 20 jours pour Pathé. Dans le cas contraire, ils encourent un emprisonnement de 11 jours à 2 ans assorti d’une amende de 20 000 à 100 000 conformément aux dispositions combinées des articles 207 et 208 du CP. Ils peuvent cependant bénéficier de circonstances atténuantes.

Les circonstances atténuantes

Le législateur malien dans l’article 18 du code pénal autorise le juge à atténuer la peine prévue par la loi dans tous les cas où il existe des circonstances atténuantes au bénéfice du délinquant. Mais cet article ne définit pas les circonstances atténuantes dont l’appréciation est par conséquent laissée à la discrétion du tribunal. Autrement dit, il suffit au juge correctionnel ou de simple police de constater qu’il existe des circonstances atténuantes ou encore qu’il y a lieu de faire à l’inculpé une application modérée de la loi.

Les circonstances atténuantes diffèrent des excuses atténuantes qui sont limitativement énumérées par la loi. Elles donnent la possibilité au juge de tenir compte même des faits postérieurs à l’acte lorsque ceux-ci seront de nature à les éclairer sur le caractère du prévenu ou de l’accusé, à démontrer qu’il n’était pas entièrement perverti, à faire apparaître rétrospectivement sa faute comme moins répréhensible. Toutefois le juge devrait veiller à faire en sorte que la peine appliquée ne perde pas son caractère dissuasif au motif que des circonstances atténuantes sont reconnues en faveur de l’auteur des faits.

Les circonstances atténuantes s’appliquent à tous les crimes et délits prévus par le code pénal, sans distinction, et, sur disposition spéciale des lois compétentes aux crimes et délits punis par des lois particulières. En principe toutes les catégories de délinquants peuvent bénéficier des circonstances atténuantes : mineurs, majeurs, délinquants primaires, délinquants multiples et même récidivistes.

Les circonstances atténuantes peuvent être accordées non seulement aux délinquants qui sont jugés contradictoirement mais aussi à ceux qui sont jugés par défaut. Il faut cependant noter que le code pénal dans son article 18 interdit au juge de faire bénéficier des circonstances atténuantes à l’auteur d’un crime ou délit commis en état d’ivresse.

Toutes les juridictions de jugements disposent du pouvoir d’accorder des circonstances atténuantes, aussi bien les juridictions d’exception que les juridictions de droit commun.

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Fiche n° 61 : troubles de voisinage

Cas pratique

Makan vous explique que son voisin immédiat a érigé son logement en cabaret et que depuis sa famille est perturbée de jour comme de nuit à cause des nuisances occasionnées à tout le voisinage. Il sollicite vos conseils pour connaître les voies de recours dont il dispose et ses chances de succès.

Problème de droit

Les troubles de voisinage sont-ils réprimés par la loi

Dans le cas où les nuisances provoquées par les voisins deviennent excessives, elles constituent

alors un trouble anormal de voisinage qui peut être sanctionné par les tribunaux. Ce trouble

peut être sanctionné même si leur auteur n'a commis aucune faute. C'est l'anormalité de la

nuisance qui permet au juge de sanctionner le trouble et d'indemniser la victime.

Les caractères anormaux d’une nuisance

Pour vérifier le caractère anormal d'une nuisance, les tribunaux retiennent différents critères

à savoir : la fréquence et la durée du trouble ; le moment où il se produit (jour ou nuit) ; la

localisation du trouble (zone résidentielle ou industrielle, campagne ou ville, cité

administrative, maison individuelle ou appartement...).

Les nuisances sonores peuvent être de deux types. Elles peuvent être occasionnées par le

comportement du voisin (bruit de pas, bricolage, musique, radio, aboiements de chien...) ou

résulter d'activités professionnelles (bar, discothèque, garage, scierie...)

Dans le cas de Makan, il s’agit des fortes nuisances occasionnées au voisinage résultant de

l’exploitation d’un bar. Les bruits émis par le bar peuvent être constitutifs d'un trouble à la

tranquillité du voisinage par leur durée, leur répétition et leur intensité, que ce soit de jour

comme de nuit comme par exemple les sons de la musique, les bruits des engins, les excès

dans le langage après les consommations d’alcool, les bagarres etc….

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Preuve

La preuve des nuisances peut être faite par tous moyens : constat d'huissier, procès-verbal,

témoignages…

Règlement du litige à l'amiable

Il convient de privilégier une solution amiable avec l'auteur du trouble de voisinage pour régler

un litige de voisinage. Pour cela, il faut informer le voisin de la nuisance qu'il cause (il n'en a

peut-être même pas conscience) et essayer de trouver un terrain d'entente. Si cette démarche

ne produit aucun résultat, il faut mettre en demeure le voisin de cesser le trouble en lui fixant

un délai raisonnable.

Si le voisin ne réagit pas à la mise en demeure ou refuse de s'exécuter, il est possible de faire

appel à un huissier pour constater la nuisance. Cette preuve pourra alors être produite devant

les tribunaux. Il est également possible de faire intervenir un tiers pour tenter de régler le

conflit. Si toutes ces démarches ne prospèrent pas, alors Makan pourra saisir les tribunaux

dans ce cas :

Les juridictions civiles

Lorsque les tentatives de règlement amiable du litige ont échoué, il faut saisir les tribunaux

civils afin d'obtenir la cessation du trouble de voisinage et l'octroi de dommages et intérêts en

réparation du préjudice subi.

Les juridictions pénales

Dans l’échelle de la gravité des infractions, les troubles anormaux à travers des bruits, tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité des habitants sont constitutifs d’une contravention qui sont les moins graves contrairement aux délits et aux crimes. Il s’agit de la catégorie des infractions qui sont punissables d’une amende de 300 à 18 000 FCFA et facultativement d’un emprisonnement de un à dix jours. Makan devrait porter plainte auprès du commissariat de police ou se rendre directement au parquet du tribunal compétent. Il est loisible pour le procureur de la République d’engager à son tour une procédure de médiation pénale qui invitera le voisin immédiat de Makan à mettre en place tout dispositif d’insonorisation en lui fixant un délai à cet effet pour réduire au minimum les nuisances occasionnées.

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Fiche n° 62 : obtention d’un extrait de casier judiciaire spécial

Cas pratique

Safi est une malienne née en France qui décide à la fin de ses études de revenir au pays pour tenter de s’insérer dans le tissu économique. Elle lit dans les journaux un avis de recrutement d’une société privée qui exige la production du casier judiciaire dans le dossier de candidature.

Elle réalise qu’en ce qui la concerne, il faut un extrait de casier judiciaire spécial.

La procédure d’obtention d’un casier judiciaire spécial Le casier spécial ou certificat de non condamnation est un acte sur lequel sont mentionnées les condamnations prononcées contre un individu. Le casier judiciaire est toujours régi au Mali par les dispositions du Décret du 02 septembre 1954 qui l’a institué en A.O.F et au Togo. Si pour les maliens nés au Mali, il suffit de se présenter à la juridiction de son lieu de naissance muni de son extrait d’acte de naissance, pour les maliens nés à l’étranger ainsi que les étrangers vivant au Mali il convient de demander un casier spécial (certificat de non condamnation) ce qui implique une procédure différente. Les conditions d’obtention du casier spécial : personnes ayant à demander un casier spécial

Pour obtenir un casier spécial, il faut être Malien né à l’extérieur ou un étranger vivant au Mali. Outre cette condition, l’intéressé doit présenter une copie de l’extrait d’acte de naissance transcrit par le ministère de l’Administration territoriale du Mali pour les Maliens nés à l’extérieur et une copie du passeport pour les étrangers vivant sur le territoire du Mali. Le casier spécial peut aussi être demandé par les autorités policières ou judiciaires dans le cadre des procédures criminelles ou même par l’administration publique Les juridictions compétentes pour délivrer un casier spécial

La demande du casier spécial est adressée au greffier en chef de la Cour d’Appel de Bamako qui après réception procède à une vérification dans les registres avant de soumettre le document à la signature du Procureur Général près de ladite cour. Ensuite, le casier est répertorié dans un registre affecté à cet effet et comporte la mention de condamnation ou de non condamnation de l’intéressé en précisant son identité.

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Pour la délivrance du casier judiciaire d’une personne née au Mali, seul le tribunal du lieu de naissance est compétent. Cette exigence de la loi ne manque pas de susciter des difficultés dans le contexte actuel marqué par une insécurité qui empêche le fonctionnement régulier des juridictions dans certaines localités du centre et du nord du pays. L’importance du casier spécial

Lees pratiques anciennes de marquage des condamnés ont laissé place au casier judiciaire qui permet de retracer le passé judiciaire des individus condamnés. Le casier judiciaire est le seul moyen légal permettant à un individu de prouver son passé judiciaire ; il est une pièce importante dans les dossiers de demande d’emploi aussi bien dans le secteur privé que dans l’administration publique. L’exigence du casier comme condition d’accès à certains postes dans l’administration publique comme dans le secteur privé s’explique par le fait que l’extrait de casier est l’acte qui permet de s’assurer qu’un individu n’a pas subi de condamnation qui lui interdise d’occuper des emplois publics ou de responsabilité. Ainsi la fonction publique écarte tout condamné à une peine criminelle même si la peine prononcée a été réduite au minimum en raison des circonstances atténuantes.

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Fiche n° 63 : l’appel d’un jugement de condamnation pénale

Cas pratique

Le TGI de la Commune III ayant condamné à 3 ans de prison ferme Broulaye pour vol, celui-ci a l’intention de faire appel et souhaite être édifié sur la procédure.

Définition

Lorsque les parties au procès ne sont pas satisfaites du jugement rendu par une juridiction de premier degré (TGI et TI) en matière pénale, elles ont la possibilité d'interjeter (de faire) appel afin que l'affaire soit rejugée par la Cour d’appel territorialement compétente. Dans le cas de Broulaye, le recours sera porté devant la Cour d’appel de Bamako.

Qui peut faire appel d'un jugement pénal ?

Tout jugement pénal statue d’une part sur l'action publique et d’autre part sur l’action civile lorsqu'une victime s'est constituée partie civile. L'action publique est celle engagée par le procureur de la République à l'encontre du prévenu qui est poursuivi pour avoir commis une infraction à la loi pénale. Dans la partie du jugement relative à l'action publique, les juges doivent se prononcer sur la culpabilité de la personne jugée ainsi que sur la peine encourue. L'action civile par contre est celle mise en œuvre par la victime d'une infraction devant la juridiction pénale en vue d’obtenir une indemnisation pour le préjudice subi. Le droit d'appel est accordé aux parties par le Code de procédure pénale en fonction des dispositions du jugement qui sont contestées. Le droit d'interjeter appel des dispositions pénales (c'est à dire de la décision prise par les juges sur la culpabilité et la peine) n'est accordé qu'aux personnes suivantes : le prévenu en matière correctionnelle ou de simple police ; le procureur de la République ; le Procureur général près la Cour d'appel ; les administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l'action publique (par exemple en matière douanière). Le droit d'interjeter appel des dispositions civiles du jugement appartient au prévenu, à la partie civile (quant à ses intérêts civils seulement et lorsque la demande est supérieure à 100 000 FCFA) et enfin à la personne civilement responsable. Il est important de souligner que la victime ne peut jamais interjeter appel contre les dispositions pénales du jugement, c'est à dire la décision du tribunal relative à la culpabilité ou à la peine, son droit d'appel étant strictement limité aux dispositions relatives à son indemnisation.

Pourquoi faire appel d'un jugement pénal ?

Le motif de l'appel étant généralement la première question qui est posée à l'appelant par la Cour le jour de l'audience, il est très important d'être capable de le formuler clairement. Du

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point de vue du prévenu, trois raisons principales peuvent motiver un appel à la suite d'une condamnation pénale.

• La première est relative à la contestation par la personne condamnée de sa culpabilité. Cette dernière estime ainsi que c'est à tort que la juridiction pénale l'a déclarée coupable de l'infraction et souhaite que son affaire soit rejugée afin que son innocence soit reconnue par la Cour d'appel ;

• La seconde est relative à la peine prononcée par la juridiction de première instance. Dans ce cas, la personne condamnée, sans contester sa culpabilité estime que la peine prononcée n'est pas adaptée ou est trop lourde et souhaite que celle-ci soit révisée par la Cour ;

• La troisième raison est relative aux dommages et intérêts que la personne condamnée doit verser à la partie civile.

Du point de vue du Procureur les mêmes raisons peuvent être à l'origine de l'appel, soit que ce dernier estime que c'est à tort que la juridiction a relaxé, ou acquitté la personne poursuivie, soit que la peine prononcée lui semble inadaptée par rapport aux faits poursuivis. Du point de vue de la partie civile, le motif d'appel concernera toujours le niveau des dommages et intérêts alloués.

Quel est le délai d'appel d'un jugement pénal ?

Le délai pour faire appel est fixé à un mois et court à compter de la notification du jugement conformément aux dispositions du Code de procédure civile, commerciale et sociale auquel renvoie le Code de procédure pénale. Quelles sont les conséquences possibles d'un appel ?

La décision de faire appel doit toujours être prise de manière réfléchie et après une analyse approfondie de la décision rendue en première instance. Le prévenu doit tout d'abord identifier la cause essentielle de son appel qui peut concerner les dispositions pénales , civiles ou les deux.Si en principe le seul appel du prévenu sur les dispositions pénales ne permet pas aux juges d'appel de prononcer une peine plus sévère que celle prononcée en première instance, il est important de savoir qu'en cas d'appel, le Parquet aussi fera systématiquement un appel incident qui a pour effet de permettre à la Cour d'appel d'aggraver les peines prononcées si elle le souhaite. Si la Cour estime que l’appel est tardif ou irrégulièrement formé, elle le déclare irrecevable. Si elle estime que l’appel bien que recevable n’est pas fondé, elle confirme le jugement attaqué. Si par contre le jugement est reformé parce que la Cour estime qu’il n y a pas d’infraction à la loi pénale ou que le fait n’est pas établi ou encore qu’il n’est pas imputable au prévenu, elle renvoie celui-ci des fins de la poursuite.

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DROIT DES AFFAIRES

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Fiche n° 64 : erreur ou tromperie sur la marchandise

Cas pratique El Hadj est un commerçant très apprécié de produits cosmétiques. Au moment de passer commande de marchandises, il avise un emballage carton qu’il pensait être de la crème pour la peau. Il lança sa commande de 20 cartons à 6 unités chacun. A la réception des marchandises, il ne trouve que du shampooing dans les cartons. El hadj avait commencé à faire de la publicité sur ce nouveau produit et avait reçu des commandes de la part de sa clientèle. Il appelle le fournisseur et lui fait remarquer que cette situation lui a causé des dommages et porte atteinte à sa réputation. Il demande au fournisseur de rembourser les frais qu’il a eu à engager mais celui-ci refuse. Le fournisseur ne veut plus reprendre les cartons ni rembourser quoique ce soit car il estime que c’est bien ce qui a été commandé par El Hadj. Ce dernier voudrait connaitre ses chances de faire plier son fournisseur.

Problème de droit

Monsieur El Hadji constate qu’il y a non-conformité entre les marchandises reçues et la commande qu’il a faite. Peut-il faire annuler ladite vente ou réclamer une réparation de préjudice ? Pour que son action aboutisse, il faut envisager deux cas de figure, en l’occurrence d’une part celle de la fraude du vendeur et d’autre part celle de l’erreur commise lors la commande.

La fraude du vendeur La chance pour El Hadj d’obtenir gain de cause est de procéder en premier lieu à la dénonciation de la fraude du vendeur. En effet, celle-ci est constituée par la livraison d’une marchandise autre que celle qui a fait l’objet du contrat. La fraude peut être prouvée par tous moyens. Ainsi en droit comparé, les tribunaux ont condamné un commerçant pour fraude sur l’identité de la marchandise par la livraison à un grossiste de cartons de haricots importés des Etats-Unis en remplacement de « flageolets de France » mentionnés dans la commande. Il sera ainsi possible pour El Hadj de présenter à la barre du tribunal l’original du bon de commande envoyé au fournisseur qui atteste que les produits commandés sont de la crème pour la peau et non des lotions pour cheveux.

La fraude peut également être constituée en cas de tromperie sur les risques liés à l’utilisation du produit, les contrôles effectués, les modes d’emploi ou les précautions à prendre. De même, la vente de produits non conformes aux normes prévues constitue une fraude.

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La fraude ainsi invoquée découle de la violation des obligations du vendeur qui sont : la livraison de la marchandise, sa conformité et la garantie du bien vendu conformément aux dispositions des articles 250 à 261 de l’Acte Uniforme portant Droit Commercial Général ( AU-DCG ) de

l’OHADA dont le Mali est membre. L’erreur au niveau de la commande Est-ce la faute du vendeur qui aurait conduit l’acheteur à faire une erreur de commande ? L’erreur est une représentation fausse de la réalité constituant un vice du consentement. L’erreur n’est une cause de nullité du contrat que si elle porte : - sur la substance même de la chose objet du contrat, c’est-à-dire sur une qualité essentielle de la chose objet du contrat, qualité qui a déterminé la partie à donner son consentement ; - sur la personne du cocontractant lorsque la personnalité de celui-ci est déterminante. Les autres erreurs, sur les qualités non substantielles ou sur la valeur de la chose résultant d’une appréciation économique erronée à partir de données exactes, ne compromettent pas la validité du contrat

Au terme de l’article 41 du Régime Général des Obligations du Mali : « La convention contractée par erreur, dol ou violence donne lieu à une action en nullité ». En tout état de cause, les tribunaux font une distinction : - si le cocontractant (le vendeur) ignorait quelle était la qualité déterminante aux yeux de l’acquéreur des biens objets du contrat, la nullité n’est pas prononcée. Ce serait, en effet, sacrifier un contractant de bonne foi, lequel au demeurant n’avait commis aucune erreur. On voit, donc, qu’il y’a une limite que l’on ne peut franchir sans créer des injustices ; - il en va autrement si, lors de l’acquisition, l’acquéreur a déclaré ce qu’il recherchait et quelle sont pour lui, la nature ou la qualité déterminante. Dans ce cas il convient de faire la distinction : soit le vendeur savait que cette qualité n’existait pas et il a été de mauvaise foi en se taisant (il ne mérite pas alors qu’on le protège) ; soit il croyait de bonne foi, que cette qualité existait. A l’évidence, on se trouve dans un cas de double erreur et le contrat ne peut se former sur un malentendu. Si le juge estime que cette erreur est fondée, il pourra ordonner la nullité du contrat de vente qui va consister en une annulation rétroactive, c'est à dire, faire comme si le contrat liant El Hadj au fournisseur n’avait jamais existé. Il pourra même décider d’accorder des dommages et intérêts à l’acheteur.

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Fiche n° 65 : augmentation arbitraire du loyer d’un bail commercial et sa résiliation unilatérale

Cas pratique

Hamady qui exploite un magasin de produits alimentaires depuis 2 ans a beaucoup de clients au point que le propriétaire des murs décrète unilatéralement une hausse de loyer du simple au double. Face au refus de Hamady, le propriétaire lui demande de quitter les lieux en rêvant secrètement de s’emparer de son commerce. Ce propriétaire sans scrupules peut-il obtenir gain de cause ?

Problème de droit

La résiliation d’un contrat de bail de façon unilatérale est-elle possible alors que le contrat n’inclut pas de clause de révision ?

Solution

Le bailleur peut donner congé à son locataire à condition de respecter un délai de préavis qui permet à celui-ci d’examiner les nouvelles conditions et décider s’il doit rester ou bien quitter les lieux purement et simplement.

Définition

La résiliation est le fait de rompre les effets d'un contrat à partir d’une date donnée sans annuler ce qui a déjà été exécuté. La résiliation s’oppose à la résolution qui efface les effets du contrat à son origine.

La conclusion d’un contrat de bail est une opération courante, souvent nécessaire même avant le début de l’exploitation d’un fonds de commerce. Le bail professionnel désigne toute convention, même non écrite, passée entre le propriétaire d’un immeuble et toute personne physique ou morale, permettant à cette dernière d’exploiter dans les lieux toute activité commerciale, industrielle, artisanale ou professionnelle.

Procédure

Hamady peut saisir le président du tribunal de commerce pour violation des termes du contrat par le propriétaire de la maison.

Conditions et durée du bail

Les articles 72 et suivants de l’Acte uniforme relatif au Droit Commercial Général (AU-DCG) prévoient que les parties fixent librement la durée du bail, qui peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d'écrit ou de terme fixé, le bail est réputé conclu pour une durée indéterminée.

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Le loyer est révisable dans les conditions fixées par les parties, A défaut d'accord écrit entre les parties sur le nouveau montant du loyer, la juridiction compétente est saisie par la partie la plus diligente. Pour fixer le montant du nouveau loyer, la juridiction compétente tient notamment compte de certains éléments notamment la situation des locaux, leur superficie, l'état de vétusté et le prix des loyers commerciaux couramment pratiqués dans le voisinage pour des locaux similaires.

Conditions de révision du loyer

Sauf clause contraire du contrat liant les parties, le montant du bail convenu ne peut être révisé qu’à l’expiration de chaque période de 3 ans. Si le locataire n’est pas d’accord avec le nouveau montant de loyer que lui propose le bailleur à l’issue de la période triennale, c’est le juge qui doit départager les parties.

Droits reconnus au bailleur en cas de loyers impayés

Le bailleur qui dispose d’un contrat de bail écrit doit, dans un premier temps, faire servir à son locataire, par un huissier, un commandement de payer les loyers. A défaut de paiement par le locataire, le bailleur peut demander à l’huissier de pratiquer une saisie sur les meubles et les effets mobiliers garnissant les lieux loués. Lorsque le bailleur obtiendra un titre exécutoire, c’est-à-dire une décision de justice devenue définitive établissant sa créance, il fera notifier au locataire un exploit dit « acte de conversion ». Cet acte de conversion lui permettra de procéder à la vente des biens saisis, à moins que le locataire ne les vende lui-même dans un délai de un mois pour payer les arriérés de loyer.

Conditions de renouvellement du bail commercial

Même en cas de clause contraire du contrat, le bailleur est tenu de renouveler le contrat de bail si le preneur justifie avoir exploité conformément aux stipulations du contrat de bail, l’activité prévue dans ledit contrat pendant une durée minimale de 2 ans. Et si le bailleur veut absolument mettre fin au contrat de bail, il doit payer au locataire une indemnité d’éviction. A défaut d’accord sur le montant de cette indemnité, celle-ci est fixée par la juridiction compétente en tenant compte de certains éléments tels que le montant du chiffre d’affaires, les investissements réalisés par le preneur, la marque créée ou la situation géographique du local.

Conditions de résiliation par les parties d’un bail commercial à durée indéterminée

Chaque partie, bailleur et locataire, peut résilier le contrat en donnant à l’autre partie un préavis par acte d’huissier au moins 6 mois à l’avance. Le bailleur doit justifier la résiliation, soit par un motif grave et légitime contre le preneur (par exemple, l’inexécution par le locataire d’une obligation substantielle du bail, ou la cessation de l’exploitation du fonds de commerce, etc.) ; soit par la nécessité de démolition pour reconstruire ; ou bien par son intention d’occupation personnelle du bail, ou par son conjoint, ses ascendants ou descendants. Si le locataire ne veut pas quitter les lieux parce que la loi lui donne le droit au renouvèlement, il a le droit de s’opposer au préavis.

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Fiche n° 66 : l’inscription au Registre du commerce Cas pratique De retour du Congo où il prêtait main forte à des amis dans le commerce, Amadi souhaite avec ses économies ouvrir un magasin d’import-export. Il apprend qu’il doit d’abord se faire immatriculer au Registre du commerce et du crédit immobilier. Il sollicite votre éclairage sur les démarches à suivre.

Définition L’immatriculation est la procédure par laquelle un commerçant personne physique ou morale se fait inscrire sur le registre du commerce et du crédit mobilier en vue de se faire reconnaître la qualité de commerçant ou d'acquérir la personnalité juridique. L'immatriculation est personnelle et obligatoire.

Conditions.

Toutes les personnes physiques ayant la qualité de commerçant au sens de l'article 2 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général sont tenues de s'immatriculer au registre du commerce et du crédit mobilier.

En principe, un commerçant ne peut se faire immatriculer qu'une seule fois dans l'un des Etats membres de l'OHADA. Cette règle connaît toutefois une exception. En effet, l'existence d'une succursale ou d'un établissement secondaire dans un autre ressort que celui dans lequel le commerçant a été immatriculé, oblige ce dernier à acquérir une deuxième immatriculation appelée immatriculation secondaire.

La demande d'immatriculation doit contenir certaines informations relatives à la personne du commerçant ainsi que certaines informations sur l'activité exercée par l'assujetti. Toute personne physique dont l'immatriculation est requise par la loi doit satisfaire à cette obligation dans le premier mois de l'exercice de son activité en s’adressant au greffe de la juridiction compétente dans le ressort de laquelle son activité se déroule.

L’intéressé doit communiquer des informations relatives à son identité à savoir ses nom et prénoms, ses date et lieu de naissance ; la date et le lieu de son mariage, le régime matrimonial adopté ; sa nationalité ainsi que l’adresse de son domicile personnel. De même, il doit communiquer le nom sous lequel il exercera son activité et l'enseigne utilisée. etc…

A l'appui de sa demande, le demandeur est tenu de fournir toutes les pièces justificatives.

Outre les commerçants personnes physiques, certaines personnes morales doivent également faire l'objet d'une immatriculation au Registre du commerce et du crédit mobilier.

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Il s'agit, d'une part, des sociétés commerciales , des groupements d'intérêt économique, dont la particularité est qu'ils ne sont pas commerciaux par la forme et d’autre part des sociétés commerciales dans lesquelles un Etat ou une personne morale de droit public est associé ainsi que des succursales de personnes morales ou physiques dont le siège de l'activité est situé à l'étranger.

Les personnes morales sont également soumises à l'immatriculation. Elles doivent demander leur immatriculation dans le mois de leur constitution, auprès du greffe de la juridiction compétente ou de l'organe compétent dans l'Etat partie dans le ressort duquel est situé leur siège social ou leur principal établissement.

Cette demande faite avec le formulaire mentionne la raison sociale ou la dénomination sociale, le sigle ou l’enseigne, la forme de la personne morale ; le montant du capital social avec l'indication du montant des apports en numéraire et l'évaluation des apports en nature ; l'adresse du siège social, etc...

A cette demande sont jointes les pièces justificatives suivantes à savoir une copie certifiée conforme des statuts ou de l'acte fondateur ; la déclaration de régularité et de conformité ; la déclaration notariée de souscription et de versement ; la liste certifiée conforme des gérants, administrateurs, dirigeants ou associés tenus indéfiniment et personnellement responsables ou ayant le pouvoir d'engager la société, une déclaration sur l'honneur signée du demandeur.

Conséquences de l’immatriculation

L'immatriculation au registre du commerce crée une présomption légale de la qualité du commerçant de la personne immatriculée. Cette présomption est cependant susceptible d’être écartée ou renversée par une preuve contraire. Puisque la personne est présumée commerçante, toutes les règles découlant du statut du commerçant vont lui être applicables (règles de prescription, de preuve et de compétence notamment).

Les conséquences du défaut d'immatriculation sont multiples. Ainsi, la personne physique ou morale assujettie à l'immatriculation qui n'a pas demandé celle-ci dans les délais prévus, ne peut se prévaloir, jusqu'à son immatriculation, de la qualité de commerçant aussi bien à l'égard des tiers, qu'à l'égard des administrations.

En outre, elle ne peut invoquer son défaut d'immatriculation pour se soustraire aux responsabilités et aux obligations inhérentes à cette qualité. En d'autres termes, le défaut d'immatriculation prive l'assujetti du bénéfice des règles propres au commerçant mais ne lui permet pas de se soustraire aux charges inhérentes à cette qualité.

Enfin le législateur OHADA a énuméré un certain nombre d'infractions pénales relatives au non-respect de l'obligation d'immatriculation tout en laissant le soin à chaque Etat partie d'en fixer les peines.

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Fiche n° 67 : le nantissement de marchandises en garantie d’un prêt bancaire Cas pratique

Békaye est vendeur de véhicules d’occasion et sollicite un prêt de la banque pour développer son fonds de commerce. Il souhaite commander une vingtaine de véhicules utilitaires au port de Lomé. Il se voit opposer comme condition la souscription d’un contrat de nantissement sur les véhicules pour garantir la banque. Il veut comprendre en quoi ce contrat l’engage.

Définition

Le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet un bien meuble à son créancier pour garantir sa dette. Le nantissement est un mécanisme juridique permettant au créancier de s’assurer le paiement de sa créance par le débiteur.

Conditions de forme

Le nantissement de créance doit respecter des conditions de forme pour être valable.

Exigence d’un écrit

Pour réaliser un nantissement, un écrit, signé par les deux parties, est exigé. Cet écrit peut prendre la forme d’un acte sous seing privé. Le nantissement doit ensuite être enregistré par le créancier sur un registre spécifique tenu par le greffe du tribunal de commerce. Il peut aussi prendre la forme d’un acte notarié. Au regard de la pratique en la matière, il est certain que la Banque demandera à Békaye de prendre rendez-vous avec le notaire convenu d’accord parties. L’acte de nantissement doit clairement désigner la ou les créances garanties sous peine de nullité.

Exigence d’une publication sur un registre spécifique

Le nantissement doit être publié dans un registre dédié, qui est géré par le greffe du tribunal de commerce. L’objectif de la publication est d’informer les tiers de l’existence de cette convention et d’éviter que le débiteur ne vende le bien à l’insu du créancier. C’est donc une mesure de protection des intérêts du créancier.

Conditions de fond

Le nantissement de créance, pour être valablement constitué, est soumis à des conditions de fond. Celles-ci ont trait à la créance nantie et à la créance garantie. Le nantissement de créance porte sur une ou plusieurs créances, actuelles ou futures. Aucune exigence n’est requise quant à la nature de la ou des créances nanties. En effet, toutes les créances peuvent être nanties : elles peuvent être contractuelles ou délictuelles, civiles ou commerciales et même d’origine étrangère.

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Il en de même pour les créances garanties. La qualité du créancier ou du débiteur n’a pas d’importance. Les créances garanties peuvent également être futures, à condition toutefois qu’elles soient déterminées ou, à tout le moins, déterminables.

Conditions d’opposabilité

Le nantissement doit respecter, comme toutes les sûretés réelles, des conditions d’opposabilité, qui auront pour but d’informer les tiers de l’existence des sûretés, afin que le créancier puisse leur opposer son droit.

A l’égard du débiteur de la créance nantie, l’accomplissement des formalités d’opposabilité permet de s’assurer que le débiteur a une connaissance certaine et réelle de l’existence du nantissement. Pour que le nantissement lui soit opposable, le débiteur devra recevoir une notification de l’acte ou devra y intervenir. Une notification intervenue par simple lettre suffit.

Toutefois, il y a lieu de préciser que même en l’absence de notification, le nantissement demeure valable entre parties. A l’égard des autres tiers créanciers du constituant, le nantissement leur est rendu opposable à dater de son inscription au Registre du commerce et du crédit immobilier.

Les effets du nantissement de créance

Le créancier nanti devient, grâce au nantissement, un créancier privilégié. Il bénéficie d'une priorité de paiement en cas de survenance d’un autre créancier à moins que celui-ci ne bénéficie de privilèges spéciaux comme c’est le cas pour le Trésor public. Si le débiteur ne s’exécute pas à l’échéance, le créancier nanti peut vendre ou faire vendre le bien nanti pour obtenir le paiement de sa créance.

L’Acte uniforme portant organisation des sûretés distingue à cet égard deux situations.

La première hypothèse est celle où la créance nantie vient à échéance avant la créance garantie. Le créancier ne peut s’approprier les sommes reçues du débiteur, dans la mesure où cette appropriation vaudrait paiement de la créance garantie, alors même qu’elle n’est pas encore exigible.

La deuxième hypothèse vise la situation où la créance garantie arrive à échéance avant la créance nantie. Le créancier nanti dispose alors d’une option. Il peut se faire attribuer la créance, soit par attribution judiciaire, soit par l’effet d’une convention spéciale appelée dans le jargon « pacte commissoire ». Le créancier nanti peut également attendre l’échéance de la créance nantie. Par ailleurs, le commerçant qui a donné son fonds en nantissement, en conserve l'administration et la disposition. Il doit maintenir le fonds en activité et s'abstenir de tout acte de nature à en diminuer la valeur.

Le créancier nanti a un droit de préférence et un droit de suite. En vertu du droit de préférence, le créancier nanti lorsque le débiteur ne le rembourse pas à l'échéance, peut faire vendre le bien nanti aux enchères et se faire payer sur le prix, par préférence aux autres créanciers ordinaires Le droit de suite permet au créancier, d'exercer son droit, même entre les mains de celui qui a acquis le bien du débiteur. En définitive, Le nantissement de fonds de commerce permet au créancier de vendre le fonds de commerce si le débiteur ne rembourse pas sa dette.

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Fiche n° 68 : la constitution d’un gage en garantie d’un emprunt Cas pratique

Alain a entamé depuis bientôt trois ans la construction de sa maison à Moribabougou mais se trouve à court d’argent. Il se rend chez Daniel, une connaissance du village dont les affaires sont florissantes, pour lui demander un prêt. Celui-ci exige un gage : Alain lui propose une des deux machines de forage de sa petite exploitation. Que pouvez-vous lui conseiller ?

La constitution du gage

Le gage est une sûreté réelle mobilière c’est-à-dire une garantie donnée à un créancier sur un bien meuble corporel appartenant à son débiteur. Aucune condition spécifique n'est exigée du créancier. Il doit simplement être capable de contracter et ne doit pas être un professionnel du gage.

Le constituant est le plus souvent le débiteur mais un tiers peut offrir ses meubles corporels en garantie de la dette du débiteur par un cautionnement réel. Il doit avoir la capacité de vendre car la réalisation du gage peut déboucher sur la vente du bien mis en gage. C’est dire que dans le cas d’espèce, rien n’empêche à priori Alain de donner en gage une de ses machines. La créance garantie est l'assiette du gage

La nullité ou l'inexistence de la créance entraînerait la disparition du gage. Pour qu'un bien puisse être donné en gage il doit être mobilier et aliénable car la sûreté débouche parfois sur sa vente.

Il est possible qu'un bien gagé soit remis à un tiers, ce qui permet que plusieurs gages soient constitués sur une même chose.

La rédaction d'un écrit

Elle permet de faire connaître aux tiers l'existence d'un contrat de gage. On veut éviter que les droits des tiers ne soient diminués par un accord entre le créancier gagiste et le débiteur.

En l'absence de remise du bien gagé le contrat de gage n'est pas formé c'est à dire que ce contrat n'existe pas par le seul échange des consentements. Jusqu'à la remise, c'est une promesse de gage dont l'inexécution sera sanctionnée.

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Effets

Le gage apparaît avant tout comme une sûreté permettant au créancier de détenir la chose d'autrui et le but originaire de cette détention consiste à lui permettre de faire vendre le bien si à l'échéance il n'est pas payé.

Avant l'échéance de la dette garantie

a. Les droits du créancier gagiste

Ils résultent du fait qu'à ce moment précis le créancier est dans une situation d'attente. Il sera éventuellement tenu de restituer le bien à l'échéance s'il est payé du montant de sa créance. Il est titulaire dès ce moment-là d'un droit de rétention et peut récupérer le bien en vertu d'un droit de suite s'il s'en est involontairement dessaisi. Ce droit de rétention est opposable aux tiers.

b. Les obligations du créancier gagiste

Les obligations du créancier gagiste s’apparentent à celles d'un dépositaire. Il est tenu de conserver la chose puisqu'il sera éventuellement tenu d’une obligation de restitution si sa créance est payée à l'échéance. Il ne peut se servir de la chose car il la détient à titre de garantie. Le non-respect de cette obligation de conservation est doublement sanctionné : d’ une part, il y a une sanction pénale qui prévoit d'appliquer les peines de l'abus de confiance s'il détourne ou détruit la chose; d'autre part, civilement, il sera responsable des détériorations et destructions. Il est seulement tenu d’une obligation de moyens. En d’autres termes, le débiteur doit tenir compte au créancier des dépenses utiles et nécessaires engagées par celui-ci pour la conservation du gage.

Après l’échéance

Lorsque l'échéance de la dette garantie arrive, deux situations se présentent :

- le débiteur paie spontanément le créancier. Dans ce cas la sûreté va disparaître et le créancier sera tenu d'une obligation de restitution ;

- le débiteur ne paie pas et dans ce cas la sûreté va être mise en œuvre. En d’autres termes le bien remis en gage sera vendu pour désintéresser le créancier.

a. La restitution du bien gagé

Dès l'extinction de la dette garantie, le créancier doit obligatoirement restituer le bien à son véritable propriétaire.

b. La réalisation du bien gagé

En cas de non-paiement de la dette garantie à l'échéance, le créancier peut demander la réalisation de la sûreté et bénéficie d'un droit de préférence qui fait que le bien sera affecté à son paiement. De ce fait le créancier gagiste a deux prérogatives discrétionnaires :

- faire vendre le bien ;

- se faire attribuer la propriété de ce bien à condition toutefois que sa valeur ne dépasse le montant de la créance.

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Fiche n° 69 : la constitution d’une hypothèque en garantie d’un prêt

Cas pratique

Mody possède une unité de menuiserie métallique. Pour développer ses affaires, il sollicite un prêt de 50 000 000 FCFA auprès de sa banque. La banque lui demande une hypothèque sur sa maison ou un terrain lui appartenant mais faisant l’objet de titre foncier. Mody a un terrain bien placé près du centre commercial et vous demande de quoi il s’agit.

Définition

Une hypothèque est un droit concédé sur un immeuble par un débiteur qui en est le propriétaire afin de garantir une créance. Le Code domanial et foncier du Mali reconnaît deux types d’hypothèques : d’une part l’hypothèque forcée ; d’autre part l’hypothèque conventionnelle (article 98 de l’Ordonnance n° 00-027 du 22 mars 2000 et textes modificatifs subséquents).

L’hypothèque forcée est celle qui fait suite à une décision de justice sans le consentement du débiteur et qui est par exemple accordée à une femme mariée sur les biens de son mari pour sa dot et ses droits matrimoniaux ; au mineur et à l’interdit sur les biens de leur tuteur ; à la masse des créanciers en cas de faillite du débiteur…

L’hypothèque conventionnelle est celle qui résulte d’un contrat consensuel entre les parties et de la liberté contractuelle.

Le rôle du notaire dans la constitution d’hypothèque

La constitution d'une hypothèque en raison de son importance sur le patrimoine requiert l’intervention d’un notaire. L’hypothèque est alors consentie par « acte authentique ». Mais l’hypothèque n'a d'effet qu'une fois publiée au Registre de la conservation des hypothèques.

Le notaire doit vérifier si le débiteur est réellement le propriétaire de l'immeuble qu'il entend hypothéquer. Il doit en outre informer le créancier des éventuelles autres créances garanties par l'immeuble. (Exemple : une autre hypothèque, une sûreté immobilière...). S'il ne respecte pas son obligation, sa responsabilité professionnelle voire délictuelle sera engagée.

Si le notaire a joué le rôle d'un courtier, c'est-à-dire s'il a négocié personnellement l'hypothèque pour le compte de l'une ou l'autre des parties, c'est alors sa responsabilité contractuelle qui sera engagée, notamment si la valeur de l'immeuble se révèle insuffisante pour couvrir la dette.

Formalités de la constitution d’hypothèque

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L'hypothèque doit remplir certaines conditions de fond et de forme, à défaut desquelles elle sera considérée nulle ou inopposable aux tiers.

Sur le fond :

Celui qui consent une hypothèque sur son bien doit en avoir la capacité, ce qui suppose donc qu'il est propriétaire du droit qu'il hypothèque. Aussi, la spécialité de l'hypothèque doit être respectée quant à la créance qui peut être actuelle ou future.

Sur la forme :

La constitution d'une hypothèque doit obligatoirement se faire devant notaire. Pour se prévaloir de l'hypothèque vis-à-vis des tiers, il faut encore qu'elle soit inscrite à la conservation des hypothèques.

L’acte de constitution d’hypothèque doit faire l’objet d’une inscription au bureau des hypothèques compétent. La date de cette inscription est très importante car s’il y a plusieurs hypothèques constituées sur un immeuble, le créancier dont l’hypothèque est inscrite la première pourra se servir avant tous les autres créanciers sur le prix de vente de l’immeuble.

La constitution d’hypothèque entraine un certain nombre de frais à charge de l’emprunteur : un droit fiscal d’enregistrement, un droit fiscal d’hypothèque, des frais du bureau des hypothèques, le coût des recherches et les honoraires du notaire.

L’inscription hypothécaire s’éteint par :

-l’extinction de l’obligation dont elle constitue la garantie ;

-la renonciation du créancier à son droit ;

-l’accomplissement de la procédure de purge des hypothèques par un tiers détenteur sur expropriation forcée ou sur expropriation pour cause d’utilité publique.

Ces différentes situations se traduisent par un acte de mainlevée

C’est un acte notarié signé par les parties concernées et dont copie sera adressée au bureau des hypothèques qui effectuera la radiation. A défaut d’accord du créancier, la mainlevée peut être ordonnée par le juge dans le cas du règlement de la dette servant de cause à l’hypothèque. La mainlevée d’hypothèque entraine un certain nombre de frais : un droit d’enregistrement, des frais de radiation dus au bureau des hypothèques et des honoraires du notaire.

L’hypothèque peut aussi être constituée sur un immeuble appartenant à une personne autre que l’emprunteur, qui l’accepte. De même, un contrat passé en pays étranger peut contenir une stipulation valable d’hypothèque sur un ou plusieurs immeubles situés au Mali à la condition d’être authentifiés par un notaire exerçant sur place.

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Fiche n° 70 : recours des actionnaires contre la gestion dispendieuse d’un dirigeant de société Cas pratique

Directeur d’une société commerciale, Souleymane est fréquemment en déplacement. Il mène un grand train de vie ce qui inquiète les trois autres actionnaires de la société qui font en vain des rappels à l’ordre lors des réunions du conseil d’administration. A la fin de l’année, les dépenses somptuaires du directeur ont mis la société dans une situation critique et le bilan des commissaires au compte révèle un déficit de plusieurs dizaines de millions. De quel recours disposent les actionnaires ?

Problème de droit

Les actionnaires peuvent demander la dissolution anticipée de la société dont la durée est en principe fixée dans les statuts. A titre de rappel, en aucun cas, cette durée ne peut excéder 99 ans et court à compter du jour de l’immatriculation de la société au Registre du commerce et du crédit immobilier. Aux termes des dispositions de l’article 200 de l’Acte Uniforme sur les sociétés commerciales et les GIE, les causes de dissolution sont les suivantes :

- L’expiration du terme ; - La réalisation ou l’extinction de son objet ; - L’annulation du contrat de société ; - La décision des associés aux conditions prévues pour modifier les statuts ; - La dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente à la demande d’un ou

de plusieurs associés pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé empêchant le fonctionnement normal de la société ;

- Enfin pour toute autre cause prévue par les statuts.

Procédure

La dissolution peut intervenir à l’amiable par devant le notaire qui a établi les actes constitutifs de la société. A défaut d’une dissolution à l’amiable, les associés peuvent saisir le tribunal compétent du lieu du siège social.

L’instance commence par une requête adressée au président du tribunal par l’associé qui se plaint du fonctionnement anormal de la société. Il y expose les faits incriminés, les moyens de droit et sa prétention de voir dissoudre par anticipation la société. Ensuite le gérant est assigné par acte extra judiciaire à la date indiquée par le tribunal.

Avant de se prononcer le tribunal procède à la mise en état du dossier. C’est la phase des écritures, des dépôts et échanges de conclusions, de production de toutes pièces utiles par les parties ou leurs conseils. Cette phase est sanctionnée par une ordonnance de clôture que prend le président de la chambre de mise en état. Celui-ci peut être le président même de la

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juridiction ou tout autre juge désigné par ses soins. L’ordonnance de clôture renvoie l’affaire à l’audience sur le fond.

A ce stade, les conseils des parties peuvent estimer que tout est déjà écrit dans les conclusions et observations assorties des pièces subséquentes ( procès-verbal de constat d’huissier-commissaire de justice par exemple sur l’irrégularité ou la non tenue du conseil d’administration, l’irrégularité des pièces comptables et des états financiers, le manque de transparence dans la gestion de la société… ). En conséquence, les avocats demanderont au tribunal de mettre l’affaire en délibéré pour une prochaine date.

Ils peuvent aussi estimer que certains documents ou actes posés par le gérant méritent des éclaircissements et dans ce cas les débats sont ouverts et les plaidoiries reçues en commençant par les conseils des requérants, le conseil du défendeur ayant toujours la parole en dernier.

Effets

La dissolution judiciaire d’une société requiert la réunion de deux conditions cumulatives à savoir d’une part une mésentente grave entre associés et d’autre part l’impossibilité pour la société de fonctionner. Si par contre les autres associés souhaitent continuer l’exploitation de la société, ils doivent prouver que le blocage est dû au comportement du gérant qui peut être invité à céder ses parts.

En cas de refus le tribunal fera droit à la demande des associés au regard des preuves produites et prononce la dissolution qui entraîne la liquidation et le partage des biens sociaux. La dissolution ainsi prononcée n’aura d’effet à l’égard des tiers qu’à compter de sa publication au RCCM suite au dépôt au greffe du tribunal des actes ou procès-verbaux décidant ou constatant la dissolution dans le cas où il s’agit d’une procédure amiable et du jugement définitif lorsqu’il s’agit d’une procédure contentieuse après épuisement de toutes les voies de recours.

Elle est publiée par un avis dans un journal d’annonces légales du lieu du siège social.

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Fiche n° 71 : l’annulation d’une commande pour retard excessif à la livraison

Cas pratique

Issa dirige une entreprise de BTP à Sikasso. Il passe commande de pièces de rechange d’une valeur de 3 000 000 FCFA auprès d’un fournisseur basé à Bamako. Près de 6 mois plus tard, les pièces tardent à être livrées et Issa dont les activités tournent au ralenti souhaite annuler la commande. Le fournisseur refuse et met en cause le transporteur dont le camion n’est toujours pas arrivé à destination. Issa souhaite saisir le tribunal et sollicite votre avis.

Définition

Le contrat de vente commerciale peut être écrit ou verbal et n’est soumis à aucune condition de forme. Conformément aux clauses convenues entres les parties, l’acheteur doit payer le prix convenu tandis que le vendeur pour sa part s’oblige à livrer les marchandises mais également à s’assurer de leur conformité. Il doit aussi accorder sa garantie.

La conformité signifie que les pièces livrées doivent correspondre aux caractéristiques spécifiées par l’acheteur qui sera en droit de refuser toutes pièces non conformés ou livrées en retard par le vendeur. De même l’obligation de garantie implique que l’acheteur soit protégé contre toute réclamation de tiers sur les marchandises, une fois la vente conclue.

Dans le cas d’espèce, il convient d’examiner les options offertes à Issa qui souhaite annuler la commande en raison de retard important qui occasionne pour lui un manque à gagner au niveau de son entreprise de BTP.

Options offertes à l’acheteur

En premier lieu, il faut interroger l’acheteur pour savoir si la date de livraison avait fait l’objet d’une mention explicite sur la commande car cela est de nature à créer une obligation de résultat à la charge du vendeur.

Il convient aussi de s’assurer que les parties avaient effectivement convenu de la remise des pièces de rechange à un transporteur chargé de les acheminer jusqu’à destination.

Si par contre aucune date n’avait été mentionnée pour la livraison, Issa qui est l’acheteur peut proroger les délais accordés au vendeur si après discussion, la bonne foi de celui-ci ne peut être mise en cause.

En cas de recours à un transporteur conformément aux clauses du contrat, la délivrance s’effectue dès lors que celui -ci a accepté sans réserve les pièces qu’il devait acheminer à Sikasso. Dans ce cas de figure, la mauvaise exécution de l’obligation de livraison ne serait pas imputable au vendeur mais plutôt au transporteur.

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Effets

Les dispositions de l’Acte Uniforme portant Droit Commercial Général (AU-DCG) dans l’espace OHADA sanctionnent l’inexécution ou la mauvaise exécution des obligations de l’acheteur ou du vendeur.

La sanction peut consister soit au maintien de certaines clauses du contrat de vente, à la restitution de ce qui a été payé ou à la résiliation pure et simple du contrat et au versement de dommages intérêts au regard des hypothèses ainsi énoncées.

Le contrat encourt la résiliation et le vendeur ou fournisseur sera condamné au remboursement du prix de la commande déjà encaissé et au payement de dommages-intérêts si les délais de livraison avaient été énoncés de manière explicite.

De même la responsabilité du transporteur sera retenue en l’absence de délai sauf pour lui à invoquer un cas de force majeure (catastrophe naturelle ayant par exemple gravement endommagé l’état de la route ou accident de la circulation) le mettant dans l’impossibilité de remplir ses obligations.

En tout état de cause, le tribunal saisi appréciera en fonction de la nature des marchandises ou des usages de la profession.

Ainsi un retard de livraison supérieur à trois mois peut être considéré comme excessif dans certains cas tandis que dans d’autres cas, ce délai a été considéré comme excessif après18 mois d’attente.

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Fiche n° 72 : chèque sans provision

Cas pratique

Lors de travaux d’aménagement de sa maison, André achète des meubles à crédit et remet au commerçant un chèque volontairement antidaté que celui-ci devrait présenter à la banque le 30 septembre. Le 10 octobre, le commerçant se rend à la banque et apprend que le chèque est sans provision. Il appelle André qui déclare être en déplacement et lui demande de patienter. Le commerçant veut porter plainte et sollicite vos conseils.

Problème de droit

La question préliminaire à poser dans le cas d’espèce est celle de savoir si un non commerçant peut bien utiliser un chèque comme effet de commerce à l’égard d’un commerçant ?

Il convient ensuite de s’interroger sur la sanction de l’émission d’un chèque sans provision.

Le chèque comme instrument de garantie d’une créance

Le chèque est un titre tiré par un tireur sur une banque ou un établissement assimilé pour obtenir paiement au profit du porteur d’une somme d’argent qui est disponible à son profit.

La nature juridique du chèque suscite des débats quant à son appartenance aux effets de commerce ou aux instruments de paiement.

Le chèque au départ était utilisé uniquement par les commerçants pour leurs opérations commerciales (ou pour les besoins de leur commerce). Ensuite, le chèque est utilisé par les commerçants comme effet de commerce, c'est à dire comme garantie de paiement d’une créance alors qu’en principe, le chèque est payable à vue.

Actuellement le chèque est utilisé par toutes les catégories socio-professionnelles, salariées et non salariées et même par ceux qui sont au chômage, à condition de disposer d’un compte dans une banque de la place.

En tout état de cause, le commerçant peut être fondé à réclamer sa créance selon les voies de recours prévues à cet effet, car conformément au règlement n°15 de UEMOA, le chèque est un instrument de paiement et non un effet de commerce.

La loi ne reconnaît pas en conséquence de chèque antidaté. Ainsi, un chèque dont la date d’émission n’est pas encore échue est payable le jour de sa présentation au guichet de la banque.

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Les opérateurs économiques doivent comprendre que le chèque n’est pas un instrument de garantie. Il s’agit d’une pratique certes répandue mais à éviter car méconnue par les techniques bancaires.

Procédure et sanction en cas d’émission de chèque sans provision

Au plan communautaire, l’UEMOA prévoit une procédure faisant obligation au porteur du chèque de se présenter à la banque du lieu d’émission pour le règlement de la somme dans un délai de huit (08) jours sous peine de perdre l’avantage d’une éventuelle garantie. En d’autres termes, le commerçant qui a reçu le chèque à Bamako peut se présenter à Kayes ou dans n’importe quelle localité du territoire national où la banque dispose d’une représentation.

La banque doit à son tour remettre au commerçant une attestation de rejet et un certificat de non- paiement à l’expiration d’un délai de 30 jours à compter de la première présentation.

Ces deux documents seront remis par le commerçant à un huissier-commissaire de justice qui observera à son tour un délai de 10 jours pour constater le non- paiement.

Au terme de ce délai il signifiera par exploit un commandement de payer à M. André qui peut ainsi faire l’objet d’une exécution forcée sauf si dans l’intervalle il parvient à provisionner son compte en y mettant la somme suffisante pour régler le commerçant.

Le règlement communautaire a par ailleurs dépénalisé le délit d’émission de chèque sans provision laissant toutefois subsister la possibilité d’une incrimination dans deux cas de figure.

Il s’agit d’une part de quiconque en connaissance de cause émet un chèque domicilié sur un compte qu’il savait déjà clôturé et d’autre part de quiconque après avoir émis un chèque procède à un ou plusieurs retraits de tout ou partie de la provision par transfert , virement ou tout autre moyen dans l’intention de porter atteinte aux droits d’autrui.

Le Code pénal du Mali n’a pas encore pris en charge cette évolution de la législation communautaire et dispose ainsi qu’il suit : « ceux qui, de mauvaise foi, émettent un chèque sans provision préalable, suffisante et disponible, retirent après l’émission tout ou partie de la provision, ou font défense au tiré de payer, seront punis de un à trois ans d’emprisonnement et d’une amende au moins égale au montant du chèque émis » (article 276 du CP).

La mauvaise foi résulte dans les faits de la cause de la connaissance que M. André avait de l’indisponibilité de fonds dans son compte bancaire.

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DROIT DES TRANSPORTS

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Fiche n° 73 : la restitution de biens saisis en Douane

Cas pratique

Les marchandises de Fatoumata en provenance de la Guinée sont saisies par la Douane au poste frontalier de Kouremalé. Fatoumata qui avait une urgence à Bamako décide de continuer son voyage et revient deux jours plus tard. Elle constate que l’agent de la Douane est en déplacement et celui qui est de permanence ne reconnaît pas la saisie des marchandises réclamées malgré la présentation d’un procès-verbal de saisie par Fatoumata.

Celle-ci décide alors de s’adresser au Bureau de prévention de la corruption à Bamako. Quelles sont ses chances de récupérer ses marchandises ?

Problème de droit

Le problème de droit est de savoir dans quelles conditions des marchandises saisies par le service des Douanes peuvent faire l’objet de réclamation ?

Le Code des Douanes souligne qu’aucune marchandise ne peut être retirée des bureaux ou des lieux désignés par l'Administration des Douanes sans que les droits et taxes aient été préalablement payés, consignés ou garantis. Les marchandises ne peuvent être enlevées sans l'autorisation de l'Administration des Douanes.

Dans le cas de l’espèce, s’il est vrai que les marchandises ont été saisies, il revient à Fatoumata d’en apporter la preuve par la production du procès-verbal attestant l’existence d’une infraction douanière.

Procédure de réclamation des marchandises

Le procès-verbal désigne d'une manière générale tout document par lequel les agents des douanes consignent un fait dont ils ont qualité pour constater la matérialité et qui est constitutif d’une infraction à la législation douanière.

Toute marchandise saisie par la douane doit être sanctionnée par un Procès-verbal. On en distingue deux principaux types:

- Le procès-verbal de constat: C'est un document par lequel, les agents de douane qui ont constaté une infraction au Code des Douanes, caractérisent les faits et décrivent les circonstances de commission de l’infraction.

- Le procès-verbal de saisie: C’est un document par lequel, les agents de douane qui procèdent à la saisie désignent les marchandises, leur nature et leur volume …

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Les procès-verbaux énoncent la date et la cause de la saisie ; la déclaration faite au prévenu ; les noms, qualité et domicile des saisissants et de la personne chargée des poursuites ; la nature des objets saisis et leur quantité ; la présence du prévenu ou la sommation qui lui a été faite d'y assister ; le nom et la qualité du gardien ; le lieu de la rédaction du procès-verbal et l'heure de sa clôture.

Lorsque les marchandises saisies ne sont pas prohibées, il est offert mainlevée des moyens de transport sous caution solvable ou sous consignation de la valeur.

Si par extraordinaire, Fatoumata présente le procès-verbal au Bureau de prévention de la corruption mais néglige de faire sa réclamation dans le délai requis, l’Administration des douanes peut en vertu des dispositions de l’article 231 du Code des Douanes procéder à la vente des marchandises en dépôt « Les marchandises qui n'ont pas été enlevées dans le délai de trois mois à dater de leur inscription au registre de dépôt sont vendues aux enchères publiques.

Les marchandises périssables ou en mauvais état de conservation peuvent être vendues immédiatement, avec l'autorisation de l'autorité judiciaire compétente.

Les marchandises d'une valeur inférieure à 100.000 francs qui ne sont pas enlevées à l'expiration du délai de trois mois visé à l'alinéa premier ci-dessus sont considérées comme abandonnées. L'Administration des Douanes peut les vendre aux enchères publiques ou en faire don à des hôpitaux, hospices ou autres établissements de bienfaisance, ou faire procéder à leur destruction ».

Les marchandises sont en outre vendues libres de tous droits et taxes perçus par la Douane avec la faculté pour l'acheteur, d'en disposer pour toutes les destinations autorisées par la législation et la réglementation en vigueur.

Lorsque le produit de la vente est suffisant, il est procédé au règlement de tous autres frais pouvant grever les marchandises. Le reliquat éventuel est versé à la Caisse des Dépôts et Consignations où il reste pendant deux ans à la disposition du propriétaire des marchandises ou des ayants droit. Passé ce délai, il est acquis au Trésor public.

Enfin au cas où les marchandises saisies ne sont pas prohibées et n’ont pas été retrouvées en dépit de la production du procès-verbal de saisie, c’est dire que l’Administration des Douanes est en faute et procédera par la transaction pour dédommager la dame Fatoumata. Cette transaction peut intervenir même après le jugement si les parties entre les parties avant ou après le jugement définitif.

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Fiche n° 74 : la réparation des dommages subis du fait du blocage de bétail par la Douane

Cas pratique

Moussa est marchand de bétail. Il se rend en Mauritanie pour acheter des moutons avant la fête de Tabaski. Au poste frontalier, le camion en provenance de Nouakchott est immobilisé par l’Administration des Douanes maliennes pendant trois jours. Moussa déplore la mort de 7 moutons. A son retour à Bamako, il sollicite votre avis pour savoir s’il dispose d’un recours contre les Douanes.

Problème de droit

L’Administration des douanes est-elle responsable des dommages résultant de l’immobilisation des moyens de transport ?

Les Conditions d’immobilisation par la douane d’un moyen de transport de marchandise

Toute marchandise introduite sur le territoire, même celle destinée à être réexportée, doit être soumise au contrôle douanier, qu'elle soit passible ou non de droits et taxes. Elle doit être couverte par une déclaration sommaire et être présentée aux agents habilités.

La déclaration sommaire doit être établie sur un formulaire conforme au modèle officiel prévu à cet effet. Toutefois, l'Administration des Douanes peut accepter que soit utilisé, comme déclaration sommaire, tout document commercial ou administratif qui contient les énonciations nécessaires à l'identification des marchandises.

Le dépôt de la déclaration sommaire est effectué :

a) soit par la personne qui a introduit les marchandises sur le territoire douanier ou, le cas échéant, par la personne qui prend en charge le transport des marchandises après que cette introduction ait eu lieu ;

b) soit par la personne au nom de laquelle les personnes visées ci-dessus ont agi.

L'Administration des Douanes peut, en vue d'assurer le contrôle tant des marchandises que du moyen de transport sur lequel elles se trouvent, exiger à tout moment le déchargement et le déballage des marchandises.

Comme préalable, le service des Douanes, conformément aux dispositions de l’Arrêté interministériel nº 2015 - 1535/MCI/MEF-SG du 5 Juin 2015 fixant la liste des produits prohibés à l'importation et à l'exportation devrait se faire présenter par Moussa un certificat zoo-sanitaire

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délivré par les autorités compétentes de la Mauritanie et qui est exigé pour le transit et l’importation d’animaux vivants autres que des bovins.

Il lui revient en outre en raison des délais d’immobilisation du véhicule, de prendre toutes dispositions utiles afin d’éviter que l’entassement des moutons dans le camion n’occasionne un danger quelconque pour leur vie ou leur santé.

En conséquence, le marchand de bétail Moussa avancera tout élément susceptible de mettre en évidence la carence ou la négligence des Douanes qui en laissant les animaux entassés pendant trois jours dans un camion les exposaient à un préjudice certain.

Les marchandises importées ou exportées doivent par ailleurs faire l'objet d'une déclaration en détail leur assignant un régime douanier.

Cette déclaration émanera des personnes physiques ou morales ayant obtenu l'agrément de commissionnaire en douane.

Les conséquences de l’immobilisation

Si la perte des animaux intervient alors que l’Administration douanière a pris toutes les dispositions qui s’imposaient eu égard aux circonstances, sa responsabilité ne saurait être recherchée ou mise en cause par Moussa.

Dans le cas contraire, la responsabilité du service peut être engagée sauf à prouver un cas de force majeure. En effet, le Code des douanes communautaire dispose en substance qu'aucune dette douanière n’est réputée naître en cas de force majeure.

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Fiche n° 75 : la responsabilité d’un chauffeur du fait des dommages subis par les marchandises transportées

Cas pratique

Des dommages sont constatés à l’arrivée d’un camion chargé d’engrais chez le destinataire. Le chauffeur Marcel se voit retirer la valeur des sacs mouillés sur le montant qui lui était dû. Il décide de saisir le Bureau de prévention de la corruption de la localité, Sikasso.

Problème de droit

Le chauffeur est-il responsable des pertes de marchandises (des sacs mouillés) dans le cadre d’un contrat de transport ?

Les Conditions du contrat de transport

Le contrat de transport de marchandise existe dès que le donneur d'ordre et le transporteur sont d'accord pour le déplacement d'une marchandise moyennant un prix convenu (article 3 de l’Acte Uniforme relatif aux contrats de transports des marchandises par la route).

L’obligation essentielle du transporteur est d’acheminer la marchandise à destination, en bon état et à la date prévue. Il est donc garant de la marchandise et de la prise en charge à la livraison.

L’Acte Uniforme précité précise en outre que lorsque le transporteur et le destinataire s'entendent sur l'état de la marchandise à la livraison, ils peuvent faire une constatation commune écrite. Dans ce cas, la preuve contraire au résultat de cette constatation ne peut être faite que s'il s'agit de pertes ou avaries non apparentes et si le destinataire a adressé au transporteur un avis écrit indiquant la nature des pertes ou avaries dans les sept jours suivant cette constatation commune, dimanche et jours fériés non compris.

Lorsqu'il n'y a pas de constatation commune écrite de l'état de la marchandise à la livraison, le destinataire doit adresser au transporteur un avis écrit indiquant la nature des pertes ou avaries : a) au plus tard le premier jour ouvrable qui suit la date de la livraison, en cas de pertes ou avaries apparentes ;

b) dans les sept jours suivant la date de la livraison, dimanche et jours fériés non compris, en cas de pertes ou avaries non apparentes.

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À défaut d'avis dans ces délais, la marchandise est présumée reçue dans l'état décrit à la lettre de voiture.

Les limites

Sont considérés comme des événements constitutifs de la force majeure : des événements climatiques d’une exceptionnelle gravité tels que les tempêtes, pluies, orages, incendies provoqués par la foudre, tremblements de terre, glissements de terrains, inondations ; destructions découlant d’actes de guerre, de terrorisme, de vols avec violence ou d’atteintes graves à l’ordre public… ; etc.

En conséquence, en cas de « force majeure », la responsabilité du transporteur en l’occurrence le chauffeur est difficile à retenir. Lorsque, pour cause de force majeure, une partie a été empêchée de respecter ses engagements, l’autre partie ne peut pas demander réparation. Il incombe à celui qui prétend qu’un événement l’a empêché d’exécuter le contrat de démontrer que cet événement :

1°) ne dépendait pas de lui ;

2°) était imprévisible au moment de la conclusion du contrat ;

3°) était insurmontable ou irrésistible au moment où il s’est produit et qu’il a tenté malgré tout d’exécuter son obligation (par exemple en mettant en place des solutions alternatives ou en prenant des mesures pour atténuer l’impact de l’événement sur l’exécution de ses obligations) et de limiter le préjudice de son cocontractant, notamment en l’en informant.

Par contre, s’il n’a pris aucune disposition pour protéger les marchandises à transporter par exemple dans le cas de l’espèce couvrir, protéger les sacs d’engrais, on pourra déduire qu’il a été négligent, du coup, sa responsabilité civile est engagée.

L’Acte uniforme précité précise par ailleurs que l'indemnité pour avarie ou pour perte totale ou partielle de la marchandise est calculée d'après la valeur de la marchandise et ne peut excéder 5 000 Francs CFA par kilogramme de poids brut de la marchandise. Toutefois, lorsque l'expéditeur a fait à la lettre de voiture une déclaration de valeur ou une déclaration d'intérêt spécial à la livraison, l'indemnité pour le préjudice subi ne peut excéder le montant indiqué dans la déclaration.

Dans le cas d'une déclaration d'intérêt spécial à la livraison, il peut être réclamé, indépendamment de l'indemnité prévue et à concurrence du montant de l'intérêt spécial, une indemnité égale au dommage supplémentaire dont la preuve est rapportée.

En tout état de cause, il est aussi de principe en droit qu’on ne se rend pas justice soi-même. Il ne revient pas au propriétaire des sacs d’engrais de se faire dédommager sur le montant qu’il devait remettre au chauffeur Marcel.

Il appartient donc au juge de comparer le comportement qu'a eu le titulaire du droit avec celui qu'aurait eu un homme normalement prudent et diligent placé dans les mêmes circonstances. C’est sur cet aspect que le Bureau de prévention de la corruption de la localité, en l’occurrence celui de Sikasso doit se fonder pour agir. Il va se prévaloir de l'abus de droit pour amener le juge à vérifier si tel est le cas au regard des circonstances concrètes de la cause.

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DROIT DES ASSURANCES

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Fiche n° 76 : dédommagement d’un accident de la route subi par refus de priorité

Cas pratique

Alors que Souleymane se rend au centre commercial du Dabanani, sa priorité est forcée par une camionnette SOTRAMA qui enfonce le pare-choc avant gauche de sa voiture. Le chauffeur du SOTRAMA souhaite une négociation à l’amiable. Souleymane vous consulte sur les démarches à effectuer auprès de sa compagnie d’assurance.

Définition

Le contrat d’assurance est un contrat par lequel une partie (l’assuré ou souscripteur) se fait promettre pour son compte ou celui d’un tiers par une autre partie (l’assureur) une prestation en principe pécuniaire en cas de survenance d’un risque moyennant le paiement d’une prime ou cotisation. Il s’agit d’un contrat dont l’exécution s’échelonne dans le temps avec des clauses imposées par l’assureur.

On parlera de « contrat d’adhésion » dont la caractéristique réside dans les dispositions générales élaborées et rédigées par l’assureur et que l’assuré ne peut discuter.

A noter que le contrat d’assurance est possible dans plusieurs secteurs tels que l’indemnisation des héritiers à la suite du décès suite par exemple à un accident ou sur la base d’une assurance -vie, la couverture des dommages corporels notamment pour les artistes et les sportifs ainsi que la couverture des dommages matériels à la suite d’incendie, de vol, d’accident de la circulation…

Le contrat d’assurance est valable par le seul échange de consentement qui donne lieu à des obligations réciproques. Ainsi, il appartient à l’assuré de payer la prime et faire des déclarations exactes tandis que l’assureur doit régler les indemnités en cas de sinistre.

On entend par sinistre tout évènement malheureux, fortuit, imprévisible, non intentionnel et soudain.

Dans le cas d’espèce, Souleymane doit d’abord demander sur le champ un constat auprès du commissariat de police afin de se faire délivrer un procès-verbal. La brigade de gendarmerie ou un huissier-commissaire de justice sont également habilités pour dresser procès-verbal.

Le procès-verbal est envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception à l’assureur. Celui peut être informé verbalement avant réception du PV mais dans tous les cas il est important pour Souleymane de se faire délivrer un récépissé.

Il sera joint au procès-verbal un devis des réparations à effectuer ou une facture acquittée au cas où Souleymane prend sur lui de réparer directement son véhicule.

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Procédure

L’assuré dispose d’un délai de 5 jours ouvrés pour faire sa déclaration auprès de l’assureur. Dans certains types de sinistres par exemple en cas d’assurance couvrant le vol, le délai de déclaration est ramené à 24 Heures.

Dans la déclaration, l’assuré apporte les précisions suivantes :

- la date et les circonstances du sinistre ;

- les causes connues ou présumées ;

- la nature et le montant approximatif des dommages ;

- les noms et adresses des auteurs et des témoins en cas de besoin.

En pratique, un imprimé sera remis à l’assuré qui aura la charge de renseigner ce document.

L’assureur dans tous les cas désignera un expert pour évaluer le sinistre et la valeur exacte du préjudice. Il ne peut en aucun cas être engagé par une reconnaissance de tort de l’assuré.

Effets

Dans le cadre du contrat d’assurance responsabilité civile, au cas où la responsabilité de Souleymane est retenue, l’assureur sera tenu de réparer le préjudice causé à la camionnette SOTRAMA.

Si c’est par contre la responsabilité du conducteur de la camionnette SOTRAMA qui est engagée, l’assureur demande à la compagnie d’assurance de celui-ci de réparer la voiture de Souleymane.

En cas de torts partagés comme cela peut arriver, le montant que l’assureur adverse rembourse dépend de la part de responsabilité retenue.

Au cas où Souleymane bénéficie d’une couverture « dommage par accident », la compagnie d’assurance, compte tenu des dispositions contractuelles, remettra son véhicule dans son état d’avant sinistre et se retournera contre le tiers pour se faire dédommager.

A cet effet, l’expert commis tiendra compte de la valeur réelle du véhicule assuré au jour du sinistre ainsi que du coût des réparations à effectuer notamment le coût de remplacement des pièces, les fournitures diverses, la main-d’œuvre et la TVA.

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Fiche n° 77 : réparation du préjudice physique, financier et moral subi lors d’un accident de la route

Cas pratique

Salimata qui circule sur sa moto « Djakarta » essaie d’éviter un choc et entre en collision avec un taxi. Elle subit plusieurs lésions à la tête, au dos et au genou. Elle vous demande la conduite à tenir car elle aussi assurée auprès d’une compagnie de la place. Le contrat d’assurance ayant déjà été examiné dans la fiche précédente, il s’agit dans le cas de Salimata d’examiner la procédure à suivre et les effets de la couverture dont elle bénéficie en tant qu’assurée.

Procédure

Pour lui permettre d’engager le processus d’indemnisation, Salimata doit au préalable demander un constat établi par la police ou la gendarmerie et veiller à ce que le procès-verbal (PV) dressé comporte des renseignements essentiels à savoir :

- le nom, prénoms et adresse du conducteur du taxi ;

- le nom de la compagnie d’assurances qui couvre le taxi et le numéro du contrat.

Elle doit ensuite procéder à la déclaration de sinistre au plus tard dans un délai de 5 jours ouvrés auprès de sa compagnie d’assurance et fournir les pièces complémentaires suivantes :

- une copie du PV ;

- le certificat médical initial et le certificat médical définitif constatant les lésions subies et la durée de l’incapacité de travail découlant de l’accident. En fonction de la gravité des blessures, l’assureur peut désigner un médecin pour vérifier les constatations du médecin initialement saisi. En cas de contradiction sur les diagnostics, les deux médecins peuvent désigner un troisième et faute d’accord, c’est le tribunal du lieu du sinistre qui procédera à cette désignation.

- si elle est salariée copie du bulletin de salaire des 6 derniers mois précédant l’accident ;

- le devis de réparation de la moto ;

- la copie de sa carte d’identité.

Types de préjudices corporels indemnisables

Il s’agit essentiellement des frais, de l’incapacité temporaire, de l’incapacité permanente, du préjudice économique, du préjudice moral, du préjudice esthétique et de la souffrance physique.

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Les cas les plus usuels qui retiennent l’attention sont relatifs d’une part aux frais et d’autre part à l’incapacité temporaire qui seuls feront l’objet de développements. A souligner que dans le cadre de la règlementation communautaire des assurances, le Code CIMA fixe des barèmes pour accorder les indemnisations de ces différents préjudices certainement en réaction des montants parfois exorbitants des réparations allouées par les tribunaux.

Les frais

Dans le cas de Salimata, les frais de toute nature peuvent être, soit remboursés à la victime sur présentation des pièces justificatives, soit pris en charge directement par l’assureur du véhicule ayant causé l’accident.

L’incapacité temporaire

Au cas où l’accident occasionne une incapacité temporaire de travail, celle –ci est fixée par expertise médicale. En cas de perte de revenus, l’évaluation du préjudice est basée :

- pour les personnes salariées sur le revenu net : salaires, avantages ou primes de nature statutaire perçus au cours des six derniers mois précédant l’accident ;

- pour les personnes non salariées disposant de revenus, sur les déclarations fiscales des deux dernières années précédant l’accident ;

- pour les personnes majeures ne pouvant justifier de revenus, sur le SMIG mensuel.

Dans les deux premiers cas, l’indemnité à verser est plafonnée à six fois le SMIG annuel.

A noter que la responsabilité pénale du chauffeur de taxi peut être également poursuivie en fonction de la gravité des dommages corporels qu’il a causés à Salimata.

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Fiche n° 78 : indemnisation des ayants-droit en cas de décès dans un accident de la route

Cas pratique

Yougo, âgé de 55 ans, décède suite à un accident de la circulation le 12 février 2016 laissant derrière lui une veuve, trois enfants ainsi que son père, sa mère, deux sœurs et sept frères.

Au moment de son décès, Yougo avait un revenu mensuel de 110 000 FCFA. L’aîné de ses enfants demande la procédure à suivre et les pièces à fournir pour obtenir une indemnisation et la part à laquelle ses ayants-droit peuvent prétendre.

Pièces à fournir

- copie du procès-verbal de constat de l’accident établi par les services de la police ou de la gendarmerie ;

- le certificat de décès ;

- une attestation sur l’activité professionnelle de la victime et l’adresse de son employeur ;

- le montant des revenus de la victime avec toutes pièces justificatives utiles par exemple les bulletins de salaire des six derniers mois ;

- les pièces justificatives des frais de toute nature engagés du fait de l’accident (ordonnances, frais médicaux, frais funéraires…)

- le jugement d’hérédité non frappé d’appel ;

- le certificat de vie de chaque ayant-droit ;

- les extraits de naissance de chaque ayant-droit ainsi que leurs pièces d’identité ;

- la désignation de la personne habilitée à agir au nom des ayants-droit ;

- le lieu où les correspondances doivent être adressées.

Types de préjudices couverts

Il y a d’abord les frais funéraires dans la limite de deux fois le SMIG annuel du pays de l’accident ou, s’il y a lieu, du pays de l’espace CIMA où les funérailles ont lieu.

Il y a ensuite le préjudice économique des ayants-droit du défunt. A ce titre, chaque enfant à charge, conjoint et ascendant en ligne directe recevra un capital égal au produit d’un pourcentage du revenu annuel du défunt selon une table de conversion fixée par la réglementation communautaire du Code CIMA. A défaut de revenu justifié le calcul du

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préjudice subi est effectué sur la base d’un revenu fictif correspondant au SMIG annuel du pays de l’accident.

La capitalisation est limitée à 25 ans pour les enfants mineurs et les enfants majeurs si ceux-ci justifient de la poursuite d’études. Ainsi, selon le nombre d’enfants à charge, la clé de répartition sur la base du revenu annuel du défunt fixe ainsi qu’il suit le pourcentage à accorder aux ayants –droit à savoir un montant de 5% aux ascendants ; de 40 % au conjoint et de 30 % aux enfants avec répartition uniforme entre les enfants.

L’indemnité totale revenant aux ayants-droit au titre du préjudice économique est plafonnée à 85 fois le montant du SMIG annuel de l’Etat membre sur le territoire duquel l’accident est survenu ou, s’il y est plus élevé, du pays de l’espace CIMA où la victime avait sa résidence habituelle.

Il y a enfin le préjudice moral des ayants-droit et à ce niveau seul le préjudice moral du conjoint, des enfants mineurs, des enfants majeurs, des ascendants et des frères et sœurs de la victime est indemnisé. En cas de pluralité d’épouses survivantes, le montant total des indemnités qui leur sont allouées au titre de leur préjudice moral ne peut excéder six fois le SMIG annuel.

A titre illustratif et en se référant au cas de Yougo :

- le revenu mensuel est de 110 000 FCFA et le revenu annuel de 1 320 000 FCFA tandis que le préjudice moral calculé sur la base du SMIG annuel est de 480 000 FCFA ;

- la veuve de Yougo qui est âgée de 33 ans obtiendra en fonction de la valeur de 1 Franc prix de rente soit 13 961 FCFA : pour le préjudice économique : part du conjoint sur le revenu annuel soit 40 % ; revenu mensuel X 12 X 40 % X prix de 1 F de rente soit : 110 000 X 12 X 40 % X 13 961 F = 7 371 408 FCFA ; -préjudice moral : part du conjoint, 150 % du SMIG annuel soit 480 000 X 150 % = 720 000 FCFA. Au total, la veuve de Yougo obtiendra la somme de 8 091 408 FCFA ;

- pour chaque enfant mineur âgé de 16 ans au plus, la valeur du prix de rente est fixée à 6 621 FCFA ; le préjudice économique sera calculé ainsi qu’il suit : 396 000 / 3 X 6621 = 873 972 FCFA ; pour le préjudice moral : par enfant mineur (480 000 X 100 % = 480 000 FCFA. Total à verser pour tout enfant mineur en fonction son âge : 1 353 972 FCFA.

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DROIT DE LA CONCURRENCE ET DE LA CONSOMMATION

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Fiche n° 79 : concurrence déloyale

Cas pratique

Sékouba est un jeune opérateur économique qui décide de lancer sa propre marque de thé et enregistre à cet effet une demande auprès des services compétents pour la marque « Attaya » laquelle est rapidement prisée par les consommateurs. Quelques mois plus tard Sékouba apprend qu’un commerçant vient de décharger un container entier de thé de marque « Attaï » avec pratiquement le même emballage. Sékouba veut porter plainte. Que lui conseillez-vous ?

Analyse

Lorsqu’il existe un conflit entre deux marques similaires mais non identiques ou entre une marque et un autre signe distinctif qui serait similaire, le titulaire de la marque déposée antérieurement dispose d’un recours en contrefaçon par imitation. Il s’agit là d’une atteinte à la fonction de garantie d’origine de la marque et son titulaire doit prouver qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit du consommateur. Dans le cas de l’espèce, rien n’empêche Sekouba d’agir en justice contre le commerçant pour concurrence déloyale.

Définition

La « concurrence déloyale » est le fait de créer dans l’esprit du public une confusion avec l’entreprise concurrente afin que la clientèle se trompe et soit attirée. C’est une restriction à la liberté de la concurrence et de l’industrie et un « l’abus de la liberté du commerce, causant volontairement ou non, un trouble commercial ».

La Loi sanctionne cet abus sur la base de l’article 125 de la Loi n° 87-31 / AN-RM du 29 août 1987 fixant Régime Général des Obligations.

Les conditions de la concurrence déloyale

La concurrence déloyale suppose une faute qui doit être prouvée. Cette faute peut toutefois être non intentionnelle, il n’est pas nécessaire de prouver l’intention de nuire. L’action en concurrence déloyale implique une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice : - la faute : il suffit d’une faute même légère. Un comportement non intentionnel peut être fautif, l’intention de nuire n’est pas nécessaire ; - le préjudice : il doit être direct et certain. Il peut constituer en un trouble commercial (ex : perte d’image, détournement de clientèle…) ;

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- le lien de causalité : l’acte en concurrence déloyale cause en lui-même un trouble commercial, la causalité est donc présumée. Les actes de concurrence déloyale

Il en existe plusieurs :

- l’obtention d’un avantage concurrentiel illicite : un commerçant va pratiquer le commerce de manière irrégulière en ne respectant pas certaines obligations. Il va alors bénéficier d’avantages vis-à-vis des autres commerçants constituant un trouble commercial. A titre illustratif, le fait de masquer la publicité des concurrents, de divulguer des informations sur le concurrent, de détourner la clientèle, de débaucher les salariés d’un concurrent…

- le dénigrement : l’idée est de dévaloriser aux yeux du public l’entreprise concurrente ou les produits que cette entreprise commercialise ;

- la création d’une confusion : il s’agit de se faire passer pour le concurrent en créant une confusion dans l’esprit du public. Dans le cas de Sekouba, c’est la ressemblance avec son produit, sa présentation à travers l’emballage et un nom très proche ;

- les manœuvres frauduleuses tendant à échapper à la taxation en douane, aux impôts et charges sociales afin d’aboutir à un prix de revient inférieur à celui d’un concurrent qui lui respecte la réglementation fiscale.

Qui peut agir en concurrence déloyale ?

Le commerçant victime des agissements déloyaux constitutifs de concurrence déloyale est fondé à demander réparation du préjudice matériel ou moral subi. Mais les consommateurs ne peuvent pas exercer une action en concurrence déloyale pour des actes déloyaux entre commerçants.

Les effets de l’action en concurrence déloyale

L’action en concurrence déloyale a pour effet de faire cesser les actes anticoncurrentiels. C’est pourquoi le jugement qui ordonne la cessation des agissements déloyaux peut être accompagné d’une astreinte c’est-à-dire le payement d’un montant forfaitaire par jour jusqu’à la cessation du trouble causé par les actes de concurrence déloyale. L’action peut déboucher sur l’octroi de dommages et intérêts dont le montant est évalué au jour du jugement et apprécié par la juridiction commerciale compétente en la matière qui peut faire appel à un expert pour l’évaluation du dommage.

Le demandeur peut également obtenir la publication du jugement aux frais de l’auteur des actes de concurrence déloyale dans les journaux de la place. Il peut aussi obtenir la cessation des agissements déloyaux dont il est victime. Exemple : en matière d’homonymie, le tribunal peut ordonner que soient ajoutées au nom de l’homonyme, les précisions nécessaires pour établir la distinction entre les entreprises.

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Fiche n° 80 : concurrence déloyale (suite)

Cas pratique Boubacar tient une boutique de téléphones portables et en raison de ses nombreux déplacements, il engage Seydou comme vendeur. Celui-ci au bout de quelques mois démissionne et ouvre dans la même rue un kiosque où il vend les mêmes articles. Boubacar veut citer Seydou devant le tribunal et veut savoir s’il a des chances de gagner le procès pour concurrence déloyale. Problème de droit Il est important de préciser que la notion de concurrence déloyale n’est pas définie précisément par la loi. C’est plutôt les décisions des tribunaux (jurisprudence) qui posent un principe selon lequel un commerçant est fondé à saisir la juridiction compétente s’il fait l’objet d’une concurrence déloyale. Du principe de la liberté du commerce et de l’industrie résulte celui de la liberté d’entreprendre. Cependant, cette liberté n’autorise pas les commerçants et les entreprises à user de procédés contraire aux usages loyaux du commerce pour nuire à un concurrent afin de détourner sa clientèle. Ces procédés, très variés, peuvent être regroupés sous diverses formes : dénigrement, utilisation des signes distinctifs d’une entreprise concurrente ou imitation de ses produits, appropriation de clientèle, débauchage de personnel, etc. En l’absence des textes particuliers, ces actes sont sanctionnés sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun (articles 125 et suivants du Régime Général des Obligations du Mali). La concurrence déloyale est un détournement fautif de la clientèle d’un commerçant, par des procédés illégaux ou malhonnêtes, et lui causant un préjudice. Elle est sanctionnée par une action en concurrence déloyale lorsqu’il y a : - une faute du concurrent : acte intentionnel, imprudence ou négligence… Sont considérées comme fautes le dénigrement du concurrent, de ses produits ; la désorganisation interne de son entreprise, l’imitation de ses marques ou de ses produits ; les atteintes au nom commercial, à l’enseigne, par imitation ou détournement créant un risque de confusion dans la clientèle. - un préjudice : matériel (perte de clientèle) ou moral (atteinte à la réputation). La réparation du préjudice comprend : des dommages-intérêts, la cessation sous astreinte des faits répréhensibles, la publication de la décision dans les journaux. Dans le cas d’espèce, Boubacar est fondé à intenter une action en justice contre Seydou pour concurrence déloyale par parasitisme. Le parasitisme est l’ensemble des comportements par

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lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer bénéfice sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire. Pour prouver la faute, il n’est pas nécessaire d’établir le risque de confusion traditionnellement requis dans le cadre de la concurrence déloyale. Cette action peut être intentée même par celui qui ne peut pas, ou ne peut plus, se prévaloir d’un droit privatif par exemple une exclusivité de représentation d’une marque. Ainsi a été jugé et condamné le salarié qui, après s’être frauduleusement procuré le fichier des fournisseurs de son employeur (une société), avait brusquement quitté celui-ci pour créer une société concurrente qui avait alors utilisé ce fichier.

Sur la base des éléments rapportés, le tribunal pourrait ordonner à Seydou soit de ne pas vendre les mêmes produits ou de fixer des limites géographiques dans lesquelles il ne doit pas faire les mêmes prestations que son ex- employeur.

Le Code du travail apporte au demeurant quelques précisions sur cette question en soulignant la nullité de toute clause interdisant à un travailleur d’exercer une activité quelconque à l’expiration de son contrat.

Il reste cependant possible de prévoir en cas de rupture pour faute lourde l’impossibilité pour le travailleur de mener pendant une durée de six mois et dans un rayon de 15 km une activité quelconque de nature à concurrencer son ex-employeur en s’inspirant de ses méthodes ou en utilisant toute information acquise dans l’établissement.

Seydou peut par ailleurs être condamné au paiement d’astreintes à telle somme fixée par jour de retard pour cesser cette activité dans les limites géographiques fixées ainsi qu’au paiement des dommages-intérêts.

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Fiche n° 81 : obtenir un dédommagement du fait des dommages causés par une anomalie dans la distribution de l’électricité Cas pratique

Pendant l’hivernage, Sory constate à plusieurs reprises une masse électrique sur le poteau qui alimente sa maison à chaque fois qu’il pleut. Il signale les faits à l’agence du quartier de la Société de Distribution d’Energie qui promet d’envoyer une équipe. Une nuit, un violent orage éclate et subitement c’est la coupure au moment où Sory suit un match de football à la télévision. Tous les appareils de la maison sont hors d’usage : deux téléviseurs, un ordinateur portable et un réfrigérateur. Sory décide de porter plainte contre la compagnie d’électricité et vous consulte sur la procédure à suivre ainsi que sur ses chances d’être dédommagé.

Problème de droit

Sory peut-il engager la responsabilité de la compagnie d’électricité ?

Solution

Dans ce cas, il faut faire appel aux dispositions combinées du Régime Général des Obligations et des textes qui régissent le secteur de l’électricité au Mali.

L’article 125 du RGO prévoit que : « toute personne qui, par sa faute, même d’imprudence, de maladresse ou de négligence, cause à autrui un dommage est obligé de le réparer ». Par personne, il faut entendre les personnes physiques mais aussi les organismes et sociétés dotés de la personnalité morale.

De même, l’Ordonnance n°00-021 / P-RM du 15 mars 2000 portant création et organisation de la Commission de Régulation de l’Electricité et de l’Eau (CREE) précise que cette autorité administrative indépendante a dans ses missions la défense des intérêts des usagers et de la qualité du service public.

Procédure

Tout acte dommageable ouvre droit à une action en dommages-intérêts. La victime, pour obtenir réparation, doit établir l’existence de la faute qui doit être objective, prouvée, éventuellement présumée.

Sory doit déclarer dans les meilleurs délais le sinistre et prouver que c’est la coupure d’électricité qui est à la base des dégâts subis. Il sera d’autant plus conforté qu’il avait pris le soin d’aviser l’agence du quartier au sujet de la masse électrique constatée sur le poteau.

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Les faits rapportés doivent être justifiés par des preuves ou des témoignages sous serment conformément aux dispositions du Décret n° 00-185 / P-RM du 14 avril 2000 fixant les modalités d’application de l’ordonnance précitée.

Cette Ordonnance sur la CREE souligne que cette autorité peut être saisie par tout usager d’une plainte dès lors que celui-ci avait pris le soin d’adresser une lettre recommandée restée sans suite à l’opérateur et exposant ses griefs. De même, la CREE peut être saisie dans le cas où l’usager n’a pas reçu de réponse satisfaisante dans le délai d’un mois.

La CREE à son tour adressera la plainte à l’opérateur qui dispose d’un délai de 60 jours maximum pour réagir et il sera accordé 20 jours supplémentaires à l’usager pour se prononcer sur les réponses de l’opérateur.

Effets

A L’issue de ses investigations sur la base de l’échange des conclusions, la CREE peut, outre le dédommagement de l’usager, prononcer une sanction administrative sous forme d’amende contre l’opérateur convaincu de négligence ou de violation des dispositions législatives ou réglementaires.

Si les parties trouvent un accord amiable, avant la fin de cette procédure, la CREE sera avisée et en tirera toutes les conséquences. Elle peut passer outre si elle estime que l’accord n’est pas satisfaisant.

Les textes régissant le secteur de l’électricité précisent par ailleurs qu’en cas de sinistre, la responsabilité du concessionnaire d’électricité à savoir la SDE est engagée si le sinistre trouve son origine dans la défectuosité des installations extérieures (raccordements extérieurs, poteaux...)

Par contre si le court-circuit résulte d’une mauvaise installation des raccordements à l’intérieur de la maison, c’est la responsabilité du consommateur qui sera engagée.

La réparation du dommage suppose en tout état de cause l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.

Si Sory n’est pas satisfait de cette procédure, il peut se tourner vers les juridictions compétentes pour ses réclamations.

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DROIT DU TRAVAIL ET DE LA SECURITE SOCIALE

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Fiche n° 82 : licenciement sans cause réelle et sérieuse

Cas pratique

Aminata travaille dans une société depuis 5 ans. Elle s’absente durant quatre jours tous les mois en produisant une fiche médicale pour des douleurs récurrentes. Son employeur lui notifie son intention de la licencier. Que peut-elle faire ? Définition

Le licenciement est la mesure par laquelle, agissant d’une manière unilatérale, un employeur met fin au contrat de travail qui le lie à un salarié. Etant une rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur, le licenciement s’oppose à la démission qui constitue une rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié.

Problème de droit

Aminata est-elle protégée contre le licenciement pour raisons de santé (dans le cas de l’espèce, quatre jours tous les mois) justifiées par un certificat médical ?

Procédure amiable

A toutes les étapes de la procédure, Aminata pourra se faire assister d’un avocat de son choix.

Elle peut d’abord saisir l’Inspection du travail. A ce stade, son employeur est convoqué. Une tentative de conciliation est diligentée par l’Inspection du travail. Le salarié et l’employeur peuvent se mettre d’accord sur les conditions qui mettent fin au litige. Si la tentative aboutit, un procès-verbal de conciliation est établi signé par les différentes parties, contresigné (visé) par l’Inspecteur chargé du dossier. Ainsi, Aminata continuera à exercer ses fonctions au sein de son entreprise. Dans le cas contraire, l’Inspecteur de travail dresse un PV de non conciliation en enjoignant à l’employeur, si le motif du licenciement n’est ni réel ni sérieux, d’y renoncer au motif que le licenciement est abusif et à défaut, de payer à Aminata les indemnités prévues par le droit du travail.

Procédure contentieuse

Si l’employeur refuse de s’exécuter, Aminata peut saisir le tribunal du travail territorialement compètent pour licenciement abusif en joignant à sa requête le certificat médical justifiant ses absences répétées quatre jours par mois.

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Ce mode de rupture du contrat de travail est encadré par la loi. Le juge cherchera à connaitre le fondement du licenciement d’Aminata. Repose-t-il sur une cause réelle et sérieuse ? La cause du licenciement, pour qu’elle soit réelle et sérieuse, doit remplir les conditions suivantes :

Cause réelle de licenciement : la rupture du lien contractuel doit être basée sur des faits objectifs et susceptibles de vérification.

Cause sérieuse de licenciement : le motif de licenciement doit revêtir une certaine gravité, rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Dans le cas de l’espèce, Aminata a justifié ses absences. Le certificat médical produit fait foi jusqu’à inscription de faux. L’employeur n’arrive pas à lui imputer d’autres griefs excepté ses absences lesquelles sont certifiées par un médecin. Il peut cependant demander une contre-expertise médicale.

Solution

Le licenciement dans le cas de l’espèce peut être qualifié d’abusif sauf preuve par l’employeur du caractère infondé du certificat médical.

Les conséquences du licenciement abusif

Le licenciement, lorsqu’il est jugé abusif ou injustifié, ouvre droit à une réparation pour l’employé. Le montant de l’indemnité est calculé en fonction de l’ancienneté du salarié et de l’effectif de la structure d’emploi.

Le juge peut proposer la réintégration du salarié au sein de la société avec maintien de ses avantages acquis. En cas de refus de réintégration, le juge accorde une indemnité à l’employé. À cette réparation s’ajoutent l’indemnité de préavis et l’indemnité de congés payés.

Le juge pourra aussi enjoindre à l’employeur de lui délivrer un certificat de travail.

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Fiche n° 83 : harcèlement au travail

Cas pratique

Mariam travaille dans une société de matériel plastique depuis 1993 en qualité d’agent de nettoyage. Elle est licenciée courant 2010 et remplacée par Aïcha, qui parait plus jeune et plus jolie mais avec les mêmes qualifications. Mariam estime que le motif invoqué pour son licenciement est faux et qu’elle est en fait victime de harcèlement sexuel de la part de son employeur. Que lui conseillez-vous ?

Définition

Il y a harcèlement sexuel lorsqu’une personne fait subir à un salarié ou un candidat à l’embauche des contraintes ou pressions en vue d’obtenir des faveurs de nature sexuelle. Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

Problème de droit

Mariam est-elle protégée contre un licenciement à la suite d’un harcèlement sexuel ?

Solution

Tout salarié ou candidat à un emploi, un stage ou une formation en entreprise, quel que soit son sexe, bénéficie d’une protection en matière de harcèlement sexuel, qu’il ait subi ou refusé de subir des agissements à l’occasion de son embauche, tout au long de l’exécution du contrat de travail ou lors de sa rupture. Les salariés qui témoignent ou relatent de tels actes sont également protégés.

Qui peut être l’auteur de harcèlement sexuel ?

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Le harcèlement sexuel peut aussi bien être le fait de l’employeur ou d’un autre supérieur hiérarchique, que d’un collègue. Dans le cas de l’espèce, Mariam dénonce son employeur pour harcèlement sexuel.

Procédure

Elle peut saisir l’inspection de travail. A ce stade, son employeur est convoqué. Une tentative de conciliation est menée par l’Inspection de travail. Le salarié et l’employeur peuvent se mettre d’accord sur les conditions qui permettent de mettre fin au litige. Si la conciliation aboutit, un procès-verbal est établi et signé par les différentes parties, contresigné (visé) par l’inspecteur chargé du dossier. Ainsi, Mariam continuera ses services dans la société.

Dans le cas contraire, l’inspecteur de travail dresse un PV de non conciliation en enjoignant à l’employeur de renoncer au licenciement au motif que les causes invoquées ne sont ni sérieuses ni réelles car ayant pour motif véritable le refus par Mariam de céder à ses avances. Si l’employeur refuse de s’exécuter, Mariam pourra saisir le tribunal du travail territorialement compètent de ce licenciement.

En quoi consistera le rôle du juge du travail saisi de l’affaire ?

Il peut s’avérer difficile de rapporter la preuve d’un harcèlement sexuel. Dès lors, la loi a prévu un mode de preuve favorable à la victime. Celle-ci n’a pas à prouver l’existence d’un harcèlement mais doit simplement établir des faits permettant de présumer son existence. Mariam pourra aussi conforter sa thèse au besoin par témoignages. Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés.

Effets

Quelles sont les sanctions en cas d’harcèlement sexuel ?

Même si le harcèlement sexuel n’est pas encore pénalement réprimé dans la législation malienne, la salariée pourrait avoir droit à la réintégration ou à défaut, elle aura droit aux indemnités de rupture pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Une sanction ou un licenciement pris à l’encontre du salarié victime ou témoin d’un harcèlement sexuel serait nul de plein droit.

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Fiche n° 84 : CDD et CDI Cas pratique

Issa travaille dans une agence immobilière en qualité d’agent commercial et bénéficie d’un CDD (contrat à durée déterminée) de 6 mois déjà renouvelé à deux reprises. Il voudrait votre avis sur la conduite à tenir pour bénéficier d’un CDI (contrat à durée indéterminée).

Problème de droit

Un CDD peut-il faire l’objet de renouvellement plus de deux fois ?

Aucun travailleur ne peut renouveler plus de deux fois un contrat à durée déterminée avec la même entreprise. Le troisième renouvellement du contrat à durée déterminée constitue de plein droit un contrat de travail à durée indéterminée conformément aux dispositions de l’article L. 20 de la Loi n° 92-020 du 23 septembre 1992 portant Code du Travail et textes modificatifs subséquents.

Qu’est-ce qu’un CDD ?

Un contrat de travail à durée déterminée (CDD) est un contrat de travail pour lequel un employeur recrute un salarié pendant une durée déterminée, précisée dans le contrat. Le CDD est une forme de contrat très pratique pour les employeurs, c’est une forme de contrat précaire car il ne garantit pas un emploi stable et durable au sein de l’entreprise. Pourquoi un CDD plutôt qu’un CDI ?

Le CDD est destiné à pourvoir un emploi de manière temporaire uniquement. Ainsi, un employeur n’a pas le droit d’engager un salarié en CDD, si c’est dans le but de pourvoir à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Quelles sont les durées minimum et maximum d’un CDD ?

La loi ne prévoit pas de durée minimale du CDD .Un salarié peut être embauché en CDD pour uniquement quelques jours. Par contre, le CDD ne peut être conclu pour une durée supérieure à deux ans. Il est important à ce niveau de souligner que tout CDD de plus de trois mois doit être déposé par l’employeur à l’inspection du travail avant tout commencement d’exécution.

Conversion d’un CDD en CDI

Lorsqu’un salarié souhaite ériger son CDD en CDI à la fin de son CDD, il doit solliciter une requalification de son contrat.

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Cette requalification intervient aussi lorsque l’employeur n’a pas respecté certaines conditions de forme lors de la signature du CDD. Le CDD conclu oralement doit être considéré comme un CDI et requalifié comme tel. Il en est de même lorsque le contrat ne mentionne pas le motif du recours au CDD.

Un CDD sans signature de l’employeur doit être requalifié en CDI

Si le contrat ne prévoit pas les conditions de son renouvellement, un CDD ne peut être renouvelé que par un avenant conclu avant la fin du contrat. Si le salarié continue de travailler après cette date en l’absence d’avenant, le CDD doit être requalifié en CDI.

Le non-respect des règles applicables à la durée et au renouvellement du CDD peuvent également justifier une requalification en CDI. En principe, la durée maximale d’un CDD ne peut pas dépasser la durée limite convenue. Lorsque le contrat est poursuivi au-delà de ce délai, il doit être requalifié en CDI.

Dès lors qu’une requalification de son CDD en CDI est possible, le salarié doit saisir soit l’inspection du travail soit le tribunal de travail pour faire valoir ses droits autrement dit dès lors qu’il estime que son contrat de travail doit être requalifié, le salarié doit agir pour faire requalifier son CDD en CDI par un juge si l’employeur refuse de le faire passer en CDI . Mais le salarié doit agir en justice avant la fin du délai de prescription, qui est fixé à 2 ans. Le point de départ du délai de prescription débute à compter de la signature du CDD.

Lorsque les jugent requalifient un CDD en CDI, le salarié peut obtenir différentes indemnités notamment l’indemnité de requalification et l’indemnité de précarité.

En cas de requalification, l’employeur est condamné à lui verser une somme spécifique : l’indemnité de requalification, à laquelle peuvent s’ajouter une indemnité due pour rupture abusive d’un CDI.

L’indemnité de requalification est fixée par les juges et ne peut pas être inférieure à un mois de salaire. Sa base de calcul repose sur le salaire moyen touché par le salarié.

L’indemnité de précarité est calculée sur la base du montant de la rémunération totale brute due au travailleur pendant la durée du contrat. Son taux est fixé par voie de convention ou d’accord collectif de travail.

Enfin, lorsque le CDD est requalifié en CDI, la modification du contrat de travail ne porte que sur le terme de celui-ci. Cette requalification ne modifie donc pas les autres stipulations du contrat, et notamment celles relatives à la durée du travail.

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Fiche n° 85 : le droit de grève

Cas pratique

Michel est fonctionnaire à la Direction régionale de la santé de Bamako. Depuis quelques temps il est victime de menaces de la part du responsable des ressources humaines suite à sa participation à la marche organisée par le syndicat national des fonctionnaires et contractuels en vue de l’amélioration des conditions de vie et de travail.

Quelle protection lui offre la loi face aux agissements dont il est suis l’objet ?

Problème de Droit

Un fonctionnaire peut-il faire l’objet de menaces de la part de sa hiérarchie pour avoir participé à une manifestation syndicale organisée par son syndicat ?

Définition

La grève est une cessation concertée et collective du travail pour défendre des intérêts professionnels. C’est le fait pour un travailleur d’arrêter l’exécution de ses obligations contractuelles de travail pour faire pression afin d’obtenir des droits ou de les faire respecter.

Les types de grève

La « grève perlée » qui consiste à prendre son service mais à ralentir son travail ou à exécuter son travail de manière partielle ou défectueuse. Cette forme de grève est interdite. La « grève du zèle » consiste à appliquer minutieusement toutes les consignes de travail et à exécuter avec un perfectionnisme exagéré les tâches confiées, ce qui a pour effet de ralentir ou de rendre impossible l’activité. Cette forme de grève est aussi interdite. La grève « tournante » est la cessation concertée de travail à tour de rôle entre les différentes catégories de personnel dans le même service ou différents services dans le même organisme .Ce type de grève est aussi interdit dans le secteur public.

Solution aux problèmes de droit

La grève est un droit fondamental qui à l’origine était interdit dans la fonction publique, car considéré comme incompatible avec le principe de la continuité du service public. Cependant, lorsque l’exercice du droit de grève est régulier, l’agent ne saurait être inquiété, mis en demeure de reprendre son poste ou faire l’objet d’une procédure d’abandon de poste. Aucune sanction ne peut être prononcée sans que l’agent intéressé n’ait été mis à même de présenter des observations sur les faits qui lui sont reprochés au risque de voir la mesure prise qualifiée d’arbitraire, illégale et injuste.

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Peut-on sanctionner un travailleur gréviste ?

Il est impossible de sanctionner un agent en raison de l’exercice normal de son droit de grève. La grève étant un droit, elle ne peut constituer une faute. La sanction pécuniaire des retenues pour fait de grève est donc la seule conséquence possible de la grève. L’agent ne pourra être sanctionné pour des faits commis pendant un mouvement de grève qu’en cas d’agissement grave comme par exemple des injures prononcées à l’encontre de son supérieur hiérarchique.

Qui peut faire grève ?

Tous les travailleurs du secteur public, qu’ils soient fonctionnaires, stagiaires, ou non titulaires du secteur public, et les agents ou salariés du secteur privé, en contrat à durée indéterminée ou en contrat à durée déterminée, sont soumis au préambule de la Constitution qui reconnaît à tous le droit fondamental de faire grève. Dès lors qu’un préavis de grève a été déposé, tout agent peut se mettre en grève, qu’il soit ou non syndiqué ou qu’il soit syndiqué dans une autre organisation que celle qui a déposé le préavis. Il convient de préciser cependant que les militaires échappent au droit de grève. L’Article 11 de l’Ordonnance n°°2016–020/P-RM du 18 Août 2016 portant Statut Général des militaires dispose « L’exercice du droit de grève est incompatible avec l’état de militaire ». L’Article 1er de l’ordonnance précise que « : L’Armée de la République est au service de la Nation. Sa mission est de préparer et d’assurer, au besoin par la force des armes, la défense de la patrie, de la forme républicaine de l’Etat, des acquis démocratiques et des intérêts supérieurs de la Nation. L’état de militaire est la situation d’une personne à laquelle s’appliquent les dispositions de l’ordonnance portant Statut général des Militaires. L’état de militaire exige, en toute circonstance discipline, loyauté et esprit de sacrifice. Les devoirs qu’il comporte et les sujétions qu’il implique méritent la considération et la reconnaissance de la Nation ».

Comment peut-on se mettre en grève ?

Les travailleurs du secteur public ne peuvent pas se mettre en grève tant qu’un préavis de grève n’a pas été déposé par les syndicats. Le Décret n° 90-562 P-RM du 22 Décembre 1990 fixe toutefois la liste des services, emplois et catégories de personnel indispensable à l’exécution du service minimal en cas de cessation concertée de travail dans les services publics de l’Etat et des Collectivités territoriales et des Organismes personnalisés chargés de la gestion d’un service public. Ainsi pour les services de la Justice, le service minimum requiert la présence des personnes ci-après : Le Premier Président, les présidents de section et de chambre et deux conseillers de la Cour Suprême ; Le Premier Président, les présidents de section et de chambre et deux conseillers de la Cour d’appel ; les Procureurs généraux et Avocats généraux de la Cour suprême et de la Cour d’appel ; le Président, Vice-président des Tribunaux de Première instance et le JPCE ; le procureur de la République ; le greffier-en –chef ; le service d’information.

Les effets de la grève sur la rémunération

Le fait d’être en grève ne peut donner lieu à sanction disciplinaire. En revanche, la rémunération ne sera pas versée car elle n’est due qu’après service fait. La déduction concerne la rémunération de base ainsi que toutes les primes. Sont en revanche exclus de la retenue les avantages familiaux et les indemnités liées au logement.

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Fiche n° 86 : le congé de maternité en cas d’enfant mort-né

Cas pratique

Djeneba est secrétaire dans une entreprise de cigarettes depuis 5 ans. Elle prend ses congés de maternité et accouche hélas d’un enfant mort-né. Elle veut profiter pour se remettre du reste de son congé de maternité mais son employeur n’est pas d’accord sur la date de reprise. Elle sollicite vos conseils.

Observation générale

La solution du différend nécessite l‘examen des problèmes suivants :

- la durée du congé de maternité et la date possible de jouissance dudit congé ; - l’accouchement d’un enfant mort-né et la durée du congé post natal

Solution

La durée du congé de maternité est de 14 semaines (art L179 du Code du Travail). Ce congé commence 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement et se termine huit semaines après l’accouchement.

Lorsque l’accouchement a lieu avant la date présumée, la période de repos est prolongée jusqu’à l’expiration des 14 semaines de congé.

En cas de maladie attestée par un certificat médical et résultant de la grossesse ou des couches, la femme peut prétendre à une prolongation de congés de 3 semaines.

Pendant la durée du congé de maternité, l’intéressée bénéficie de soins gratuits et de la rémunération qu’elle percevait au moment de son départ en congé.

Elle conserve également le droit aux prestations en nature.

Si par suite de maladie, la femme ne peut reprendre son travail à l’expiration de son congé de maternité, la suspension du contrat de travail prend effet pour compter du premier jour suivant l’expiration dudit congé.

Il est important de noter que pendant toute la durée de la période de suspension, l’employeur ne peut résilier le contrat de travail.

L’accouchement d’un enfant mort-né et la durée du congé post-natal

Dans la mesure où il s’agit effectivement d’un accouchement et non d’un avortement ou d’une fausse couche, peu importe au regard du Code du travail que l’enfant soit né mort ou vivant, la femme a droit à la totalité du congé de maternité prévue après l’accouchement.

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Dans le cas d’espèce, Djénéba aurait voulu sans doute reporter après son accouchement, le congé prénatal dont elle n’aurait pas bénéficié.

L’employeur est en droit de le lui refuser car elle était libre de jouir de tout ou partie du congé prénatal que lui accorde la loi.

Même si l’employeur acceptait le report du reliquat du congé prénatal, la sécurité sociale peut légalement refuser d’indemniser la période concernée.

Cependant il convient de souligner que Djénéba n’ayant bénéficié que de 12 jours de congés avant son accouchement, l’employeur se trouve en porte à faux avec les dispositions du Code du Travail qui interdisent que l’intéressée soit employée pendant une période consécutive de 7 semaines dont 3 semaines avant la date présumée de l’accouchement.

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Fiche n° 87 : faute personnelle ou de service et licenciement

Cas pratique

Un véhicule d’une ONG en mission est impliqué dans un accident qui a causé des dommages à tiers, y compris corporels. Le chauffeur perd son emploi, à tort selon lui. Il demande à rentrer dans ses droits. Mathias, agent de l’ONG était chef de mission.

Problème de droit

Un salarié en mission à bord d’un véhicule de service peut-il perdre son travail par suite d’un accident de circulation entrainant des dommages corporels sur autrui ?

Réponse

Dans ce cas, il y a licenciement pour motif personnel notamment pour faute (accident de circulation entrainant des dommages corporels à autrui).

Il est incontestable en droit que tout licenciement doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse.

Définition

Le licenciement est un mode de rupture du contrat de travail imposé au salarié par l’employeur.

Conditions du licenciement personnel pour faute

Le motif du licenciement doit être fondé sur une cause réelle et sérieuse. Il incombe à l’ONG à travers l’agent, chef de mission, d’apporter la preuve que le chauffeur a failli. A défaut, le licenciement peut être qualifié d’abusif, ce qui peut ouvrir droit à réparation.

Le licenciement pour motif personnel vise un salarié en particulier, dont la faute ou l’inaptitude professionnelle est de nature à empêcher la poursuite de son contrat de travail. Ce type de licenciement doit nécessairement être fondé sur une faute ou une inaptitude. Le licenciement pour faute est une rupture de contrat qui intervient lorsque le salarié commet une faute grave, une faute lourde ou cesse de se présenter sur son lieu de travail.

On parle d’inaptitude lorsqu’il y a insuffisance professionnelle, autrement dit, quand les résultats professionnels du salarié sont insuffisants ou que son état de santé est de nature à compromettre le bon déroulement de son contrat de travail (maladie ou accident du travail). Dans ces conditions, le licenciement personnel est admis, mais strictement encadré.

Par contre le licenciement pour motif économique intervient lorsque les difficultés économiques ou les mutations technologiques subies par l’entreprise imposent une

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suppression ou une modification de poste(s), l’employeur peut procéder à un licenciement économique individuel touchant par exemple un seul salarié ou à un licenciement économique collectif touchant deux ou plusieurs salariés.

La procédure de licenciement personnel pour faute

Quel que soit le type de licenciement, la procédure obéit à des règles strictes et des étapes obligatoires. En premier lieu, l’employeur doit convoquer le salarié pour un entretien, au cours duquel il lui annoncera son licenciement et exposera ses motifs. Ensuite, l’employeur doit notifier par écrit son licenciement au salarié.

Ce dernier continuera alors de travailler au sein de l’entreprise pendant la durée de son préavis ; le salarié peut toutefois faire une demande de dispense. En cas de licenciement sans préavis, le salarié peut réclamer à l’employeur des indemnités.

Les conséquences du licenciement

Après un licenciement, l’employeur doit remettre au salarié plusieurs documents : certificat de travail, attestation de solde de tout compte, etc. Le salarié peut également bénéficier de mesures compensatoires destinées à pallier la perte de son emploi. Ainsi, l’employeur doit verser au salarié licencié une compensation financière légale.

Le montant de l’indemnité de licenciement peut être aménagé de manière contractuelle ou conventionnelle entre l’employeur et le salarié, et son calcul se fait en fonction du salaire de référence et de l’ancienneté.

À défaut de cause réelle et sérieuse, le licenciement personnel est considéré comme un licenciement injustifié et peut être contesté par le chauffeur. Dans ce cas, il lui est loisible de saisir le tribunal de travail ou / et se faire représenter par un avocat.

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Fiche n° 88 : le congé d’expectative

Cas pratique

Youssouf est à 6 mois de la retraite après 35 ans de service sans interruption. Il souhaite s’arrêter maintenant pour constituer son dossier de pension. Que prévoit la législation à cet effet ?

Problème de droit

A quel moment précis le fonctionnaire malien peut-il prétendre à un congé d’expectative pour les besoins de préparation de la retraite ? Peut-il interrompre le travail pour préparer sa retraite ?

Définition

Le congé d’expectative est la situation du fonctionnaire qui se trouve dans une situation d’attente qui ne lui est pas imputable notamment l’attente d’une réaffectation ou celle d’une admission à la retraite

Solution au problème de droit

Le congé d’expectative est accordé par le Ministre chargé de la Fonction Publique sur demande expresse du fonctionnaire. Le congé d’expectative peut être accordé dans les cas d’attente de réaffectation afin de couvrir la période durant laquelle, faute d’emploi vacant correspondant à son corps et à son grade, un fonctionnaire est déclaré apte au service à la fin d’un congé de maladie de longue durée.

Ce cas concerne également la situation du fonctionnaire à l’expiration d’une période de détachement ainsi que celui dont la suspension de fonction a pris fin mais qui n’est pas réaffecté à un autre poste.

Tout bénéficiaire d’un congé d’expectative doit être réaffecté dans un emploi dans le délai de six (6) mois à compter de la date de signature de l’arrêté accordant le congé. Le bénéfice intégral des prestations familiales est maintenu dans tous les cas.

Le fonctionnaire en congé d’expectative peut être affecté à diverses tâches administratives que lui assignent l’autorité.

L’expectative d’admission à la retraite est prononcée pour limite d’âge. Dans la pratique, le fonctionnaire bénéficie de ce congé 3 mois avant la date effective d’admission à la retraite.

Procédure

Une lettre d’information émanant de la Direction Nationale de la Fonction Publique et du Personnel est adressée 5 à 6 mois avant la fin d’année aux Gouverneurs, aux Préfets, aux

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Directions Administratives et Financières des départements ministériels qui doivent le notifier aux agents concernés et recueillir éventuellement les contestations.

Un arrêté et une décision sont rédigés, puis signés par le Ministre du Travail et de la Fonction Publique respectivement pour les fonctionnaires et pour les conventionnaires.

Les deux documents sont ensuite envoyés aux Directions Nationale et Régionales des Caisses de Retraite, aux Gouverneurs et Préfets qui informent les intéressés.

Le partant à la retraite constitue un dossier qu’il dépose à la Caisse de Retraite et reçoit un récépissé avec un numéro d’enregistrement.

La Division chargée de la retraite vérifie l’authenticité des documents, élabore un bordereau d’analyse et un bordereau d’envoi et transmet le dossier à la Direction Générale précisément à la Division prestations en espèces (DPE).

La DPE calcule le montant de la pension. Une décision individuelle de concession de pension d’ancienneté ou proportionnelle mentionnant les éléments de la pension est rédigée puis signée par le Directeur Général de la Caisse de retraite accompagnée d’une lettre d’information ainsi que d’une fiche de contrôle physique que le partant à la retraite retire au lieu de dépôt de son dossier.

Le dossier est transmis à la Direction Générale de l’INPS à la DPE et après le calcul de la pension. Le partant reçoit une fiche signalétique, une fiche comptable qui précise les éléments de la pension, une lettre d’information, et un badge de retraité.

Documents à fournir

- Acte de naissance du fonctionnaire ;

- Acte de mariage ;

- Acte de naissance des enfants ;

- Certificat de vie collectif des enfants ;

- Arrêté de mise à la retraite (Fonction Publique) ;

- Arrêté d’Intégration (Fonction Publique) ;

- Arrêté de titularisation (Fonction Publique) ;

- Relevé général de service (Fonction Publique) DNFPP ;

- Certificat de Cessation de Paiement (C.C.P.)

- Imprimés C.R.M. (à remplir à la Mairie)

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Fiche n° 89 : les démarches à effectuer avant un départ en retraite

Cas pratique

Bakary est ouvrier au service d’une entreprise de construction. Il est en fin de carrière et souhaite connaître les démarches à effectuer dans le cadre de son départ à la retraite. Il doit se rendre au bureau de l’INPS de sa commune de résidence.

Documents à fournir :

- Certificat d’emploi et de salaires (original) à remplir et à signer par l’employeur - Demande de liquidation de retraite (original) à remplir et à faire signer par l’employeur

Il lui sera remis trois documents :

1. Demande de liquidation de retraite visée ; 2. Certificat de travail ; 3. Certificat d’emploi et de salaires visés. Dépôt du dossier au centre de l’INPS

Les documents ci-après sont également exigés :

• Extrait d’acte de naissance (original) ;

• Certificat d’emploi et de salaires visé par l’employeur (original) des huit (08) dernières années de salaire ;

• Certificat de travail (original) des différentes fonctions occupées ;

• Demande de liquidation de retraite visée par l’employeur (original) ;

• pour l’assuré marié, un extrait d’acte de mariage (original)

• Extrait d’acte de naissance (original) du conjoint

• Pour l’assuré ayant des enfants : un certificat médical (original) pour les enfants âgés de moins de 6 ans, de vie collective ou d’assiduité scolaire pour les enfants âgés de 6 à 14 ans, certificat de fréquentation scolaire pour les enfants de plus de 14 ans ;

• Extrait d’acte de naissance (original) de chaque enfant.

Il lui sera remis un document intitulé « Numéro du bordereau d’envoi » en échange du reçu pour le dépôt du dossier de la pension de retraite normale (original). Un numéro de pension et une lettre d’information seront ensuite adressés à l’intéressé sur présentation à la fois du numéro de bordereau d’envoi et de l’original du reçu de dépôt de dossier. Pour le paiement

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de la pension en espèces, il doit présenter l’original de sa pièce d’identité et l’original de sa carte d’assuré social.

Montant des pensions

1. La retraite normale : Pour le calcul du montant de la pension, un taux de 2% est appliqué par an sur les huit (08) dernières années d’activité, multiplié par le nombre d’année d’assurance. Elle ne peut pas être supérieure à 80% du salaire mensuel moyen des huit (08) dernières années (minimum : 44 397 F CFA).

2. La retraite anticipée : Pour le calcul du montant de la pension un taux de 2% est appliqué par an sur les huit (08) dernières années d’activité, multiplié par le nombre d’année d’assurance. Elle ne peut pas être supérieure à 80% du salaire mensuel moyen des huit (08) dernières années (minimum : 44 397 F CFA) Le montant de la pension sera affecté d’un abattement de maximum 10% pour les deux années.

3. La pension de solidarité Cette allocation est versée mensuellement sous forme de rente viagère. Elle est égale à 14 799 F CFA. Elle est indexée sur le SMIC.

NB : - Si le montant à payer est inférieur à 50 000 F CFA, le paiement se fait au niveau des caisses communales. - Si le montant à payer est supérieur ou égal à 50 000 F CFA, le paiement se fait par chèque. Le paiement de la pension et des allocations se fait suivant un calendrier et par groupe pour les montants inférieurs à 50 000 f CFA.

Les groupes sont déterminés de la façon suivante :

- Groupe 1 : assurés dont la date de naissance se termine par 0, 1, 2 et 3 - Groupe 2 : assurés dont la date de naissance se termine par 4, 5 et 6 - Groupe 3 : assurés dont la date de naissance se termine par 7, 8 et 9 Coût légal : gratuit

Le Code de Prévoyance Sociale institué par la LOI N°99-041 du 12 août 1999 confie à l’INPS la gestion de quatre régimes de prévoyance sociale qui sont :

le régime des prestations familiales ; le régime de réparation et de prévention des accidents du travail et des maladies

professionnelles ; le régime de l’assurance vieillesse, invalidité et décès ; le régime de protection contre la maladie.

Toutefois, aux termes de la loi N°09-015 du 26 juin 2009, la protection contre la maladie disparait au profit du régime de l’Assurance Maladie Obligatoire dont la gestion est confiée à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CANAM). La loi N°99-047 du 28 décembre 1999 a institué l’Assurance Volontaire à certains régimes de Prévoyance sociale gérés par l’INPS au profit d’autres catégories socioprofessionnelles. Il s’agit des membres non-salariés des professions libérales, artisanales, commerciales et industrielles, ainsi que les travailleurs indépendants. En outre, la Loi confie à l’INPS la gestion d’une action sanitaire et sociale qui complète les prestations fournies au titre des régimes de prévoyance.

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Fiche n° 90 : démission d’un salarié titulaire d’un CDI

Cas pratique

Hamma est employé dans une ONG locale depuis 2011 en qualité de Coordinateur de programme Santé sous contrat à durée indéterminée. En mars 2017, Hamma présente sa lettre de démission suite à une offre d’emploi plus intéressante. Il dispose d’un cumul de congés de 28 jours dont il n’a pas encore bénéficié et son employeur lui signale qu’il ne cessera ses fonctions que fin 30 avril 2017 sans aucune indemnité de départ. Hamma avait déjà confirmé à son futur employeur qu’il serait disponible au1er Avril 2017. A souligner que Hamma a été très performant durant les six ans au sein de l’Organisation et espérait des indemnités de départ. Vous êtes saisi de l’affaire pour dire exactement ses droits.

Observations générales :

La solution du différend nécessite l‘examen des problèmes suivants :

- la démission en matière de Contrat à Durée Indéterminée (CDI) et la durée du préavis ;

- les droits et obligations des parties au contrat du fait de la rupture du CDI par démission.

La démission en matière de CDI et la durée du préavis

Le contrat à durée indéterminée peut toujours prendre fin par la volonté de l’une des parties. Mais la rupture est subordonnée à un préavis par celle qui en prend l’initiative (Art L40 du code du travail). Le CDI cesse dans notre cas d’espèce suite à une démission de M. SANGARE, employé par l’ONG locale.

Le préavis ou délai congé est la période qui doit s’écouler obligatoirement entre la notification de la rupture et la cessation effective du travail. En l’absence de conventions collectives la durée du préavis est de 3 mois pour les cadres et le personnel de Direction.

Les droits et obligations des parties au contrat du fait de la rupture du CDI pour démission

Pendant la durée du préavis l’employeur et le travailleur sont tenus au respect de leurs obligations réciproques. L’inobservation du délai de préavis crée l’obligation pour l’autre de verser une indemnité à l’autre partie dont le montant est calculé en fonction du délai précisé ci-dessus.

La partie qui désire mettre fin au contrat doit informer l’autre et être à mesure de prouver que la notification lui a été faite par écrit. Le préavis commence à courir à partir de la notification et le travailleur n’est pas tenu d’indiquer le motif de sa démission dans la lettre de préavis.

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Pendant le préavis, le travailleur a une journée par semaine pour chercher un nouvel emploi, mais il doit informer son patron. Cette journée ne fera pas l’objet d’une retenue quelconque sur son salaire.

Ainsi, en résumé, Hamma disposera :

- D’un cumul de congés de 28 jours dont il pourra jouir au cours du préavis ;

- De 14 jours pour la recherche de l’emploi en raison de 2 jours par semaine pour la période du 14 Mars au 30 Avril 2017. Cette disposition prévue par la convention collective et fédérale du commerce prime sur celle du code du travail car elle est plus favorable au travailleur.

-Du payement du salaire de présence durant le préavis avec un reçu pour <<solde de tout compte>> ;

-D’un certificat de travail pour la durée totale de ses services au sein de l’organisation.

Par ailleurs, la démission de Hamma n’exige de l’ONG aucun paiement d’indemnité de départ en raison de la nature du contrat, à savoir, un CDI avec moins de dix ans de service.

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Fiche n° 91 : démission d’un salarié titulaire d’un CDD

Cas pratique

Béatrice a été recrutée en qualité d’Assistante Administrative dans une Organisation Internationale en Janvier 2016 pour un contrat à durée déterminée de deux ans. Elle perçoit un salaire mensuel brut de 400 000 FCFA et n’a pas encore bénéficié de ses congés annuels.

En mai 2017, elle trouve une meilleure offre dont le poste est à pourvoir à compter le 1er Juin 2017. Elle présente sa démission mais et se heurte au refus de son employeur. Elle vous demande conseil sur la conduite à tenir.

Problème juridique

Est-il permis au travailleur de démissionner en cours de Contrat à Durée Déterminée (CDD) ?

En cas de démission du travailleur en matière de CDD, quels sont les droits et obligations des parties au contrat du fait de la rupture ?

Solution

Le CDD est le contrat dont la durée est précisée à l’avance suivant la volonté des parties. Aux termes de l’art L39 du Code du travail, la rupture d’un CDD ne peut se faire avant terme par la volonté de l’une des parties que dans les cas prévus au contrat ou de faute lourde laissée à l’appréciation de la juridiction compétente.

Est considérée comme faute lourde l’incapacité pour l’employeur d’assurer le versement régulier du salaire ou encore toute modification des clauses du contrat sans le consentement du travailleur ainsi que tout comportement répréhensible de nature à justifier une démission.

C’est par exemple le cas lorsque le travailleur subit un harcèlement sexuel de la part de son employeur.

Il est également admis que le travailleur sous CDD peut valablement démissionner s’il reçoit une offre d’embauche pour un CDI.

Il doit à cet effet produire le type de contrat pour lever toute équivoque sur la nature de CDI qui lui a été proposé par son prochain employeur et observer un préavis sauf dérogation d’un commun accord.

Enfin les parties peuvent d’un commun accord convenir de la démission du travailleur bien qu’il soit sous CDD.

Toute rupture injustifiée du contrat en dehors de ces hypothèses par l’une des parties ouvre droit au paiement des dommages – intérêts.

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Ces dispositions à l’évidence sont plus restrictives qu’en matière de CDI qui peut cesser à tout moment par la volonté de l’une des parties à la seule condition de donner un préavis dont la durée est fonction de certains critères.

A titre d’illustration, la durée du préavis est par exemple de 8 jours pour le personnel payé à la journée ou à la semaine ; d’un mois pour le travailleur dont le salaire est payé au mois ; de deux mois pour les agents de maîtrise et assimilés et de trois mois pour les cadres et personnel de direction.

Il faut noter que la fin normale d’un CDD est l’arrivée du terme et le travailleur doit bénéficier d’une indemnité de précarité qui est égale à 2,5% de la rémunération brute perçue pendant la période de référence.

Au regard de l’énoncé du cas pratique, il convient de déduire que le CDD n’était pas arrivé à terme et ceci explique certainement le refus de l’employeur.

En cas de démission du travailleur en matière de CDD, quels sont les droits et obligations des parties du fait de la rupture ?

Le travailleur est tenu de verser à l’employeur le montant de la rémunération brute restante qu’il aurait perçu s’il avait travaillé normalement jusqu’à la fin du contrat CDD car il y a rupture du fait du travailleur.

Dans le cas d’espèce, Béatrice est tenue de rembourser à son employeur le montant total qu’elle aurait perçu de juin à décembre 2017 à raison de 400 000 FCFA par mois, déduction faite des deux mois de congés dont elle est en droit de disposer sur la période des deux ans. Elle ne bénéficiera pas d’indemnité de précarité liée à la fin normale d’un CDD. Elle peut au contraire se voir condamnée à verser des dommages et intérêts à son employeur dans la mesure où la rupture du lien contractuel lui est imputable.

Béatrice aura droit à un certificat de travail pour la durée de ses services au sein de l’Organisation internationale.

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Fiche n° 92 : calcul des indemnités de licenciement

Cas pratique

Aicha est musulmane et travaille dans une ONG catholique depuis le 1er mars 1993 en qualité de secrétaire. Elle a été licenciée le 31 mai 2005 et remplacée par une secrétaire du nom de Vivianne qui est bilingue français-anglais l et chrétienne. Aicha estime que l’ONG travaille très peu en anglais et que par conséquent le motif évoqué pour son licenciement est faux. Elle pense est en fait être victime de ses opinions religieuses.

A noter qu’Aicha du 1er janvier 2003 au 30 septembre 2003 percevait un salaire mensuel de 250 000 f CFA. Ce salaire a été porté à 300 000 F CFA à partir du 1er octobre 2004. Elle a bénéficié d’un congé de 2 mois à compter en août 2004. Depuis le 1er janvier 2005, elle percevait une indemnité mensuelle de transport de 30.000 f CFA. Elle sollicite vos conseils.

Problème juridique

Peut-on soutenir que le licenciement d’Aicha est abusif ? Si le caractère abusif du licenciement est retenu, comment calculer l’indemnité de licenciement dans ce cas d’espèce ?

Solution

Il y a licenciement abusif lorsque l’employeur pour motif illégitime et inexact, pour une cause réelle et non sérieuse, met fin aux relations de travail qui existent entre lui et son salarié. Rien dans l’énoncé ne permet de l’affirmer de façon catégorique mais cependant le fait qu’Aicha ait travaillé au poste pendant 12 ans et 3 mois sans problème en estimant que le motif invoqué pour son licenciement est faux, laisse penser qu’il n’y avait pas à proprement parler, un problème de langue par rapport au poste qu’elle occupait. Dans ce cas, le tribunal du travail saisi peut prononcer la réintégration d’Aicha. Mais celle-ci doit être acceptée par les deux parties au contrat. A défaut la salariée a droit à des dommages-intérêts.

L’abus peut être constaté par une enquête du tribunal qui détermine les causes et les circonstances de la rupture. En cas de contestation par l’employeur, il doit apporter la preuve de l’existence d’un motif légitime de licencier. La rupture est abusive lorsqu’elle est motivée par les opinions du travailleur ; son activité syndicale et sa religion ; son appartenance politique.

Dans le cas d’espèce, l’argument de la religion est avancé et il revient au tribunal d’apprécier les arguments avancés avant de trancher. En donnant raison à Aicha, celle-ci aura droit à des dommages-intérêts et à une indemnité de préavis, conformément au délai de préavis de 2 mois pour les agents de maitrise et assimilés. Elle aura également droit à une indemnité de congés payés calculée au prorata à raison de 2,5 jours par mois de service effectif pour la période du 1er janvier au 31 mai 2005 et enfin à une indemnité de licenciement calculée ci-dessous conformément aux taux de 20 %, 25 % et 30 % .

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En pratique, les éléments ci-après entrent en ligne de compte pour la période de référence (12 derniers mois) : du 1er juin 2004 au 31 mai 2005, ancienneté = du 1er mars 1993 au 31 mai 2005 soit 12 ans et 3 mois ; calcul du salaire global moyen (12 derniers mois)

- du 1er juin 2004 au 30 sept 2004 (4mois) : 250.000 x 4 = 1 000 000 f CFA - du 1er oct. 2004 au 31décembre 2004 (3mois) : 300.000 x 3 = 900 000 f CFA - du 1er janv. 2005 au 31 mai 2005 (5 mois) : (300000 + 30.000) x 5 = 1 650 000 f CFA

Total des 12 mois : 1 000 000+ 900 000+ 1 650 000= 3 550 000 f CFA

Son salaire mensuel moyen est de : 3 550.000 : 12 = 295 833 f CFA. Calcul de l’indemnité de licenciement :

Indemnité de la 1ère à la 5ème année incluse : 295 833 x 20 x 5/100 = 295 833 f CFA

Indemnité de la 6ème à la 10ème année : 295 833 x 25 x 5 /100 = 369 791 f CFA

Indemnité delà de 10 ans (2 ans et 3 mois) : 295 833 x 30 x 2/100 + 295 833 x 30 x 3/100 x12 = 199 686f CFA

L’indemnité totale de licenciement est donc de : 295 833+ 369 791+ 199 686 = 865 310 f CFA

Aicha aura droit enfin à un certificat de travail pour la durée totale des services.

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DROIT DE L’INFORMATIQUE ET DES NOUVELLES TECHNOLOGIES

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Fiche n° 93 : droit à l’image et protection de la vie privée sur l’Internet

Cas pratique

Amateur des nouvelles technologies, Michel est un cadre dirigeant d’une grande administration de Bamako. Il a la désagréable surprise de découvrir sur les réseaux sociaux une photo de lui en galante compagnie à la porte d’un restaurant connu de la place. La photo est partagée et vue par des centaines d’utilisateurs. Michel veut porter plainte et sollicite vos conseils.

Problème de droit

L’intimité ou la vie privée des personnes est-elle protégée par la législation en vigueur au Mali et selon quels recours ?

Solution

L’irruption des réseaux sociaux via internet permet toutes sortes d’atteinte au droit à l’image ou à la vie privée mais la liberté d’expression a ses limites. Dans le cas de l’espèce, il s’agit de la vie privée de l’intéressé dont les réseaux sociaux ne sont pas autorisés à faire état sauf bien entendu si Michel a au préalable donné son consentement.

Définition

Si la loi protège la vie privée, elle n’en donne pas de définition précise. Cette notion s’est donc construite à travers des cas soumis aux tribunaux.

Différentes composantes de la vie privée sont souvent abordées dans les procès, qui correspondent aux aspects principaux de la vie notamment la vie familiale, la vie sentimentale, les loisirs, la santé, les mœurs…

L’atteinte à la vie privée peut résulter de la diffusion d’un écrit ou d’une image concernant la personne et ses activités.

Les conditions de publication de l’image d’une personne.

Toute publication de l’image d’une personne suppose, en principe, une autorisation de la part de l’intéressé ou de son représentant légal s’agissant des mineurs.

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Portée de l’autorisation

La Loi n° 2013 -015 du 21 mai 2013 portant protection des données à caractère personnel en République du Mali dispose en son article 2 : « l’informatique doit être au service de chaque personne. Elle doit respecter l’identité humaine, les droits de l’Homme, la vie privée, les libertés publiques et individuelles. Toute personne a droit à la protection des données personnelles la concernant… »

Toute personne dispose en principe sur son image, partie intégrante de sa personnalité, d’un droit exclusif qui lui permet de s’opposer à sa reproduction sans son autorisation expresse et spéciale, de sorte que chacun a la possibilité de déterminer l’usage qui peut en être fait en choisissant notamment le support qu’il estime adapté à son éventuelle diffusion.

Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

Options offertes

L’avènement de l’internet a considérablement augmenté les possibilités de porter atteinte à la vie privée d’autrui. Peu importe le support de l’information dès lors qu’une atteinte à la vie privée peut être reprochée à l’occasion de la diffusion de l’information litigieuse. Dans son cas, Michel peut demander au fournisseur d’accès du réseau concerné le retrait des images le concernant. C’est ce qu’on appelle communément « droit à l’oubli ». Le fournisseur d’accès dispose d’un délai de 30 jours pour s’exécuter.

Si le fournisseur d’accès refuse de s’exécuter, Michel peut saisir l’Autorité pour la Protection des Données Personnelles (APDP) qui reçoit et instruit les plaintes conformément aux missions qui lui sont dévolues. Celle-ci peut faire des injonctions au fournisseur d’accès et infliger des sanctions administratives et pécuniaires, indépendamment du droit qui lui est reconnu de porter plainte devant le tribunal correctionnel.

Michel peut également saisir directement le tribunal correctionnel. En effet, aux termes de l’article 126 du Code pénal « sera puni d’un emprisonnement de 6 mois à 3 ans et d’une amende de 25.000 F à 30.000 F ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque aura volontairement porté atteinte à l’intimité de la personne en fixant, transmettant au moyen d’un appareil quelconque, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé sans le consentement de celui-ci ».

Le tribunal peut, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé.

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DROIT ELECTORAL

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Fiche n° 94 : droits et devoirs d’un candidat aux élections

Cas pratique

Amina est candidate aux futures élections législatives. A la veille de la campagne électorale, elle vient vous demander conseil sur ses obligations et les interdictions qui pèsent sur les candidats.

Les droits et obligations

Les élections sont régies par la Loi n° 2016-048 / du 17 octobre 2016 portant loi électorale.

La déclaration de candidature sur une liste doit comporter :

- le titre de la liste, les listes présentées par les groupements de partis politiques précisent l’appartenance politique de chaque candidat ;

- les nom, prénoms, dates, sexe et lieu de naissance, la profession et le domicile dans l’ordre de présentation des candidats ;

- la couleur choisie pour l’impression des bulletins de vote ;

- l’indication du cercle ou de la commune dans lequel Mme Amina se présente ;

- le sigle et l’emblème choisi qui doivent être différents de ceux retenus par les partis politiques légalement constitués au cas où Mme Amina se présente en candidate indépendante.

La déclaration de candidature doit être accompagnée du bulletin n° 3 du casier judiciaire datant de 3 mois au plus. Elle doit être déposée au plus tard le quarante-cinquième jour précédant le scrutin au niveau du représentant de l’Administration qui en délivre immédiatement récépissé.

Tout candidat ou son mandataire a le droit de contrôler les opérations de vote le jour du scrutin et de participer au dépouillement des bulletins ainsi qu’au décompte des voix et d’exiger l’inscription au procès-verbal de toute observation ou protestation sur lesdites opérations.

Le candidat ou son mandataire ne peut être expulsé sauf cas de désordre provoqué ou de flagrant délit justifiant son arrestation. Dans ce cas, il sera fait appel par le Président du bureau de vote à un délégué suppléant.

Après dépouillement le président du bureau de vote proclame les résultats et doit remettre une copie du récépissé de proclamation à chaque délégué de parti ou groupement de partis ainsi qu’aux candidats indépendants.

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En cas de contestation, le contentieux est porté à la Cour constitutionnelle conformément à la loi organique régissant la dite Cour.

Les interdictions

Conformément aux dispositions de la loi susvisée, les pratiques publicitaires à caractère politique et commercial (offre de tissus, de tee-shirts, d’ustensiles de cuisine, de stylos, de porte-clefs, de calendriers ) ainsi que leur port et leur usage, les dons et libéralités en argent ou en nature à des fins de propagande pour influencer ou tenter d’influencer le vote durant la campagne électorale sont interdits dès la convocation du collège électoral.

Sont également interdites les faveurs administratives faites à un candidat quelconque. De même, il est interdit l’utilisation des biens ou moyens d’une personne morale publique, institution ou organisme public ainsi que toute campagne dans un lieu de culte.

Il est par ailleurs prohibé lors des campagnes toute déclaration injurieuse ou diffamatoire par quelque voie que ce soit à l’endroit d’un ou de plusieurs candidats ou liste de candidats.

La loi électorale prohibe tout affichage en dehors des emplacements réservés dans chaque commune. Il est aussi interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins ou autres documents le jour du scrutin.

Ces dispositions sont assorties de sanction pénale en cas de violation.

Ainsi, à titre illustratif, quiconque par des pratiques publicitaires à caractère politique et commercial (offre de tissus, de tee-shirts, de stylos…) ou par des dons ou libéralités en argent ou en nature, par l’utilisation de biens d’une personne morale publique aura influencé ou tenté d’influencer le vote d’un ou de plusieurs électeurs soit directement soit par l’entremise d’un tiers et quiconque par les mêmes moyens aura déterminé ou tenté de déterminer un ou plusieurs électeurs à s’abstenir, sera puni d’un à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de cent mille à un million de francs.

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Fiche n° 95 : inscription d’un individu sur deux listes de candidats de partis politiques

Cas pratique

Mamadou est militant du parti politique Mali XO ; il est membre du bureau de la section VI du District de Bamako. A la veille du dépôt des listes pour les municipales, son Parti constate que son nom figure sur la liste du parti Mali AX en même temps que la sienne. Les responsables du parti Mali XO décident de déposer plainte contre lui. Quel est le tribunal compétent et quelles sont les chances de gagner ce procès ?

Conditions requises pour la validité d’une candidature

Toute déclaration de candidature lors des élections obéit à des conditions prévues par la loi. Ainsi tout parti ou groupe de parti peut présenter un candidat ou une liste de candidats. De même les candidatures indépendantes sont autorisées. Les candidats d’une liste doivent faire une déclaration revêtue de leur signature, dûment légalisée.

La déclaration doit indiquer les renseignements et les pièces indiqués à la fiche précédente. Chaque liste doit également comprendre un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir.

En matière d’élection de conseillers des collectivités territoriales, toute liste de candidature d’au moins trois personnes présentée par un parti politique ou un groupement de partis ou encore un regroupement de candidats indépendants est irrecevable si elle présente plus de 70% de femmes ou d’hommes.

Il est interdit aux listes concurrentes dans la même circonscription électorale d’avoir le même titre. Nul ne peut être candidat dans plusieurs circonscriptions, ni sur plusieurs listes dans la même circonscription. Les voix données aux candidats appartenant à de telles listes sont considérées comme nulles.

Au regard de ces prescriptions, il apparaît clairement que Mamadou qui se trouve à la fois sur la liste Mali XO et sur la liste Mali AX est en porte à faux avec la loi. Il lui est impossible en tout état de cause de retirer sa candidature une fois que les listes sont régulièrement déposées. Le parti Mali XO est fondé à intenter une plainte à deux niveaux.

Procédure

Le parti Mali XO peut dénoncer la double inscription de Mamadou au représentant de l’Etat dans le Cercle, la Région ou le District. Celui-ci a l’obligation de vérifier la conformité de la déclaration à la réglementation en vigueur. S’il constate qu’une déclaration ne satisfait pas aux conditions d’éligibilité fixées par la loi électorale, il invite immédiatement le mandataire de la liste à procéder aux rectifications nécessaires dans le délai imparti. Il s’agira alors pour Mali

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XO de demander de sortir Mamadou de sa liste pour qu’il figure uniquement sur celle de Mali AX. En tout état de cause, les listes de candidatures sont publiées au plus tard 42 jours avant le scrutin.

Si par extraordinaire, le représentant de l’Etat publie les listes sans procéder aux rectifications sollicitées, les mandataires des listes de candidats pourront saisir le juge civil du ressort dans un délai de 48 Heures à compter de la date de publication des listes. La requête doit sous peine d’irrecevabilité préciser les faits et moyens invoqués. Le juge doit se prononcer dans un délai de 10 jours et aviser les parties de sa décision dans les 48 heures du verdict. Un appel est possible dans un délai de 48 heures à compter de la notification et la Cour d’appel dispose à son tour d’un délai de 8 jours pour statuer. Dans ce cas, la décision de la Cour d’appel sera considérée comme proclamant définitivement la liste des candidats.

Il est par ailleurs loisible pour le mandataire du parti Mali XO de déposer plainte auprès du procureur de la République du tribunal du ressort concerné. L’article 115 nouveau de la Loi n° 2016-048 / du 17 octobre 2016 portant loi électorale punit en effet d’un emprisonnement de un mois à un an et d’une amende de 25 000 francs à 250 000 francs ;

- toute personne qui se sera fait inscrire ou aura tenté de se faire inscrire sur une liste électorale sous de faux noms, fausses qualités, qui aura dissimulé ou tenté de dissimuler une incapacité prévue par la loi, qui aura réclamé, obtenu ou tenté d’obtenir une inscription sur deux ou plusieurs listes ;

- toute personne qui, à l’aide de déclarations frauduleuses ou de faux certificats, se sera faite inscrire ou aura tenté de se faire inscrire indûment sur une liste électorale ou, à l’aide de moyens frauduleux, aura fait inscrire ou radier indûment un citoyen ;

- toute personne qui aurait fait campagne dans des lieux de culte.

Effets

En cas de plainte devant le Représentant de l’Etat dans la circonscription et au vu des vérifications entreprises, il est certain que Mamadou sera radié au moins d’une des listes présentées.

Il est loisible également de le déférer devant le tribunal correctionnel dont les sanctions en matière pénale auront pour effet d’écarter Mamadou du scrutin présent et même à venir en cas d’interdiction prononcée par ledit tribunal.

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Fiche n° 96 : inéligibilité et démission d’office d’un élu municipal

Cas pratique

Bengaly est conseiller à la mairie d’une commune rurale proche de Bamako et n’hésite pas à enfermer des habitants de la commune dont des femmes enceintes et des vieillards pour non-paiement d’impôts. Suite à une plainte des victimes, Bengaly est interpellé puis condamné pour enlèvement de personne par la Cour d’assises à une peine de 2 ans d’emprisonnement avec sursis. Le Ministre en charge de l’Administration territoriale prend une décision à la demande du maire pour mettre fin au mandat du conseiller. Aux élections suivantes, Bengaly est pourtant réélu conseiller et par crainte de représailles, ses victimes décident de porter plainte devant le tribunal estimant que Bengaly est inéligible, étant entendu qu’il a été démis de ses fonctions lors de son mandat précèdent.

Problème de droit

La condamnation pénale antérieure d’un élu communal constitue-t-elle une condition d’inéligibilité aux élections qui suivent ? Quelle est la juridiction compétente pour examiner et trancher la requête des victimes ?

Solution

Dans le cas d’espèce, la démarche préalable pour les plaignants est de saisir le maire actuel qui adressera une requête au préfet du Cercle dont relève la commune rurale, auquel la loi donne la latitude de déclarer la démission d’un élu communal.

Le préfet une fois saisi, doit impérativement donner suite à la requête dans un délai de 3 mois.

Si le préfet ne réagit pas dans les délais prévus, le Tribunal administratif est la seule juridiction compétente pour annuler l’élection de Bengaly.

Il convient en effet de rappeler que le tribunal administratif est notamment compétent pour statuer sur le contentieux relatif à l’élection des assemblées des collectivités territoriales ; des recours en annulation pour excès de pouvoir dirigés contre les décisions des autorités administratives régionales, locales ou communales ; des recours en interprétation et en appréciation de la légalité des actes dont le contentieux relève de sa compétence…

Procédure

Il ressort des dispositions combinées du Code électoral et du Code des collectivités territoriales que le mandat d’un conseiller communal prend fin suite à :

- l’expiration du mandat du conseil ; - la démission ; - la dissolution du conseil.

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Concernant la démission, l’article 18 du Code des collectivités territoriales dispose que : « la démission d’office du conseiller communal intervient dans l’une ou l’autre des situations suivantes :

- l’application des décisions de justice ; - la perte de la capacité électorale ;

- l’acquisition d’une qualité entrainant l’une ou l’autre des incompatibilités inéligibilités prévues par les textes en vigueur ;

- le refus de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les textes en vigueur. »

La démission d’office du conseiller communal est déclarée par décision du représentant de l’Etat dans le Cercle, soit de sa propre initiative, soit à la demande du maire ou de tout citoyen de la commune.

Ainsi dans le cas d’espèce, si le préfet donne suite à la requête, le conseiller communal Bengaly qui sera déclaré démissionnaire d’office peut à son tour former un recours devant la juridiction administrative qui examinera la pertinence des arguments avancés.

La même faculté appartient aux conseillers pris individuellement et a tout citoyen de la Commune en cas de refus du représentant de l’Etat dans le Cercle de déclarer la démission du conseiller condamné par la justice.

Dans le cas d’espèce, Bengaly sera déclaré démissionnaire par le Tribunal administratif, étant entendu que la décision ministérielle qui mettait fin à son premier mandat, était justifiée par la perte de sa capacité électorale, suite à sa condamnation par la Cour d’assises.

Le Tribunal administratif statue en formation collégiale avec un président et deux juges administratifs en présence du commissaire du gouvernement. Le dossier de la procédure est soumis à un juge rapporteur qui provoque les conclusions de parties avant le jour fixé pour l’audience.

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DROIT DES MARCHES PUBLICS

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Fiche n° 97 : retard du paiement d’un fournisseur par l’Administration

Cas pratique

Pour la fourniture de consommables informatiques, la Direction des Finances et du Matériel du Ministère de la justice, a conclu avec l’Entreprise NIANGADO, un contrat en novembre 2017 pour un montant 7 000 000 F.CFA TTC (toutes taxes comprises).

La totalité du montant a fait l’objet d’un engagement dans le délai réglementaire mais par inadvertance, l’agent chargé des liquidations et mandatements, oublie de soumettre la dépense au Directeur des Finances et du Matériel pour ordonnancement et paiement.

Après la transmission de la facture et autres pièces justificatives comptables, l’Entreprise NIANGADO constate qu’elle n’a reçu aucun paiement à la fin de l’exercice budgétaire de l’année 2017.

Problème de droit

Comment se faire payer après la clôture de l’exercice budgétaire ?

Procédure

L’entreprise NIANGADO doit adresser une correspondance à la Direction des Finances et du Matériel aux fins de réclamation du paiement de sa créance.

Conformément aux dispositions de l’article 44 du Décret n°2014-349/P-RM du 22 mai 2014, portant Règlement général de la comptabilité publique en République du Mali, toutes les dépenses de l’Etat doivent être autorisées par une Loi de Finances. En conséquence toute dépense non prévue ne peut être exécutée.

La procédure de paiement d’une dépense publique se fait en trois 4 étapes :

L’engagement de la dépense : consiste à reconnaitre la dépense après le lancement de la commande et la sélection du fournisseur désigné pour fournir la commande. Cet engagement est pris par une autorité ayant qualité et pouvoir pour souscrire une dette au nom de l’Etat et le document est soumis au visa du Contrôleur Financier accrédité auprès de cette autorité.

La liquidation de la dépense : elle a pour objet de vérifier la réalité de la dette et son montant exact.

L’ordonnancement ou le mandatement : est l’acte administratif par lequel, conformément aux résultats de la liquidation, l’ordre est donné par l’ordonnateur au comptable de payer la dette de l’Etat.

Le paiement : c’est l’acte par lequel un ordonnateur au nom de l’Etat le libère de la dette.

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Effets

Dans le cas d’espèce, il s’agit d’une dépense engagée mais non payée. Il appartient à l’Entreprise NIANGADO de saisir le Directeur des Finances et du Matériel ou le Responsable de Programme concerné par écrit pour réclamer le montant qui lui est dû en joignant à la correspondance toutes les pièces justificatives en sa possession (copie bon de commande, bordereau de livraison…).

Pour le paiement dudit montant, le Directeur des Finances et du Matériel ou le Responsable de programme doit avoir une autorisation d’engagement sur l’exercice budgétaire N+1 auprès du Ministre de tutelle.

A défaut de réaction de l’Administration, l’Entreprise NIANGADO peut saisir le Tribunal administratif de Bamako pour obtenir une décision condamnant l’Etat à lui régler son dû avec intérêts et pénalités pour retard de paiement.

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Fiche juridique n° 98 : contester l’attribution d’un marché public

Cas pratique

Suite à un appel d’offres émis par la Direction des Finances et du Matériel du Ministère de la Justice et après évaluation des offres, un marché public est attribué à INFO Groupe SARL. L’entreprise SAMAKE et frères s’estime lésée par la sous-commission d’attribution des marchés des marchés et saisit le Directeur des Finances et du Matériel.

Procédure

Dans le système de passation des marchés publics, il peut naître des différends dus à une mauvaise interprétation des textes ou de la prise d’une décision qui est contestée par une des parties dans les diverses phases du processus, à savoir : la passation ou d’exécution du marché. L’entreprise SAMAKE dans le cas d’espèce a le choix entre plusieurs options :

Le recours gracieux

Tout candidat ou soumissionnaire s’estimant injustement évincé, dispose d’un délai de cinq jours ouvrables à compter de la publication de la décision d’attribution du marché, de l’avis d’appel d’offres ou de la communication du Dossier d’Appel.

Le recours devant le Comité de Règlement des Différends (CRD)

Les décisions rendues dans le cadre du recours gracieux peuvent faire l’objet d’un recours devant le Comité de règlement des différends dans un délai de deux jours ouvrables à compter de la date de notification de la décision faisant grief. En l’absence de décision rendue par l’autorité contractante ou délégante ou l’autorité hiérarchique de la DFM, dans les deux jours ouvrables à compter de la date de sa saisine, le recours est considéré comme rejeté.

Dans ce cas, le requérant peut saisir le Comité de Règlement des Différends le troisième (3ème) jour ouvrable. Le Comité de Règlement des Différends rend sa décision dans les sept jours ouvrables de sa saisine, faute de quoi l'attribution du marché ne peut plus être suspendue.

Les décisions du Comité de Règlement des Différends doivent être motivées. Elles peuvent faire l'objet d'un recours devant la Section Administrative de la Cour Suprême dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la publication de la décision. Ce recours n'a cependant pas d'effet suspensif.

Le recours juridictionnel

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Les litiges relatifs aux marchés publics sont soumis aux juridictions compétentes, pour connaître du contentieux des contrats administratifs. Les litiges relatifs aux marchés des Sociétés Nationales, Sociétés Anonymes à participation publique majoritaire et autres personnes morales de droits privés visés à l’article 4 du CMP sont soumis aux tribunaux de droit commun.

Le recours devant les juridictions arbitrales

Les litiges relatifs aux marchés publics peuvent également être soumis à un tribunal arbitral dans les conditions prévues par l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif à l'arbitrage, à condition qu'une clause compromissoire conforme audit Acte soit expressément prévue par les cahiers des charges.

Effets

- Si les faits sont justifiés : conformément aux dispositions du Code de passation des marchés publics et du code pénal, des sanctions sont prononcées à l’encontre des agents publics et des candidats ou attributaires des marchés publics lorsqu’ils sont auteurs de fautes graves commises dans le cadre de la procédure de passation des marchés publics.

- Si les membres de la commission d’attribution des marchés sont en faute : sans préjudice des sanctions pénales et disciplinaires prévues par les lois et règlements en vigueur, ils peuvent être tenus, le cas échéant, à la réparation des dommages résultant de leurs actes lorsqu'ils sont les auteurs de fautes graves commises dans le cadre de la procédure des marchés publics.

Au cas d’espèce

- Si INFO Group est en faute : des sanctions peuvent être prononcées par le Comité de Règlement des Différends siégeant en formation disciplinaire, à l'égard des candidats et titulaires de marchés en cas de constatation de violations des règles de passation des marchés publics commises par les intéressés. Les violations commises sont constatées par le Comité de Règlement des Différends qui lance toutes les enquêtes nécessaires et saisit les autorités compétentes. Les sanctions suivantes peuvent être prononcées, et, selon le cas, de façon cumulative : confiscation des garanties constituées par le contrevenant dans le cadre des procédures de passation de marchés auxquelles il a participé ; exclusion du droit à concourir pour l'obtention de marchés publics, délégations de service public pour une durée déterminée en fonction de la gravité de la faute commise. Ces sanctions peuvent être étendues à toute entreprise au sein de laquelle l'entreprise contrevenante possède tout ou partie du capital. Lorsque les violations commises sont établies après l'attribution d'un marché, d'une délégation de service public ou d'un contrat de partenariat, la sanction prononcée peut être assortie de la résiliation du contrat en cours ou de la substitution d'une autre entreprise aux risques et périls du contrevenant sanctionné.

- Si les faits ne sont pas justifiés : L’Entreprise SAMAKE sera purement et simplement déboutée de toutes ses prétentions.

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DROIT COMMUNAUTAIRE

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Fiche juridique n° 99 : le recours à la CCJA de l’OHADA

Cas pratique : La société commerciale Bizness & Co a livré à crédit des articles de quincaillerie pour un montant total de 15 000 000 FCFA à Famakan, commerçant à Ségou. Le fournisseur devait être payé au bout de trois mois et c’est seulement six mois plus tard que la société reçoit un paiement de 6 000 000 FCFA, puis plus rien.

Toutes les démarches amiables pour recouvrer le reliquat dû se révèlent infructueuses. En effet, Famakan soutient avoir placé les marchandises auprès de revendeurs, arguant une mévente liée à la situation sécuritaire dans la région.

Pour obtenir le paiement de sa créance, la société Bizness & Co introduit une requête devant le Président du TGI de Ségou qui statue par ordonnance d’injonction de payer. Famakan fait appel de cette décision.

La Cour d’Appel à son tour confirme la décision contestée et Famakan décide de se pourvoir en cassation. Selon lui l’injonction de payer serait un abus du créancier d’autant plus qu’il reconnaît la dette et propose un échéancier.

Problèmes de droit

Famakan ayant décidé de se pourvoir en cassation, quelle est la juridiction compétente pour statuer sur ce pourvoi ?

L’autre question est celle de savoir si la procédure initiée par la société Bizness & Co répond aux conditions requise pour la mise en œuvre de l’injonction de payer ?

Définition et procédure

Dans le cadre de l’harmonisation du droit des affaires, ce n’est plus la Cour suprême du Mali mais plutôt la Cour commune de justice et d’arbitrage établie à Abidjan (CCJA) qui est chargée de veiller à l’unicité de la jurisprudence commerciale. Cette Cour créée en 1998 a commencé à rendre ses décisions en 2001.

La CCJA est donc la juridiction de cassation dans toutes les matières ayant fait l’objet d’actes uniforme dans l’espace Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires (OHADA).

Ces actes uniformes portent sur :

- le droit commercial général ; - le droit des sociétés commerciales et des groupements d’intérêt économique ; - le droit des sûretés ;

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- les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution ; - les procédures collectives d’apurement du passif ; - le droit de l’arbitrage ; - l’organisation et l’harmonisation de la comptabilité des entreprises ; - le contrat de transport de marchandises par route ; - les sociétés coopératives.

La CCJA comprend treize juges élus par le Conseil des ministres de l’OHADA pour un mandat unique de sept ans. Les juges élisent en leur sein un président et deux vice-présidents pour un mandat de trois ans et demi non renouvelable.

La Cour tient régulièrement des audiences foraines dans les dix-sept pays membres de l’Organisation en vue d’être mieux connue et plus proche des justiciables.

Conditions de validité du recours

Dans le cas d’espèce, Famakan conteste le recours à la procédure d’injonction de payer. Or ce recours est subordonné à la réunion de plusieurs conditions précisées dans l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.

Ces conditions sont relatives les unes aux caractères et les autres à la nature de la créance.

Aux termes de l’article 1er de l’acte précité : « le recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer ».

La créance est certaine lorsque son existence est incontestable et actuelle.

La créance est liquide ou est réputée liquide, non seulement lorsqu’elle est d’ores et déjà évaluée en argent, mais aussi « lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation ». Plus précisément, lorsque les indications du titre constatant l’obligation permettent de procéder sans difficulté à l’évaluation en argent de la créance.

La créance est exigible lorsque le créancier est en droit d’en exiger immédiatement le paiement et ce, sans que le débiteur puisse invoquer un délai, tel un délai de grâce, ou une condition susceptible de repousser ou d’empêcher l’exécution. Autrement, lorsque le terme convenu est échu.

En dehors de ces conditions, l’article 2 du même Acte uniforme précise que la créance doit être de nature contractuelle ou résulter de l’émission ou de l’acceptation de tout effet de commerce, ou d’un chèque dont la provision s’est révélée inexistante ou insuffisante.

En somme, la procédure d’injonction de payer peut être envisagée pour le recouvrement d’une créance lorsque celle-ci réunit de façon cumulative toutes les conditions ci-dessus rappelées.

Ces différents éléments indiquent une forte probabilité du rejet du pourvoi en cassation introduit par Famakan dans la mesure où celui-ci ne conteste ni la réalité, ni le montant de la dette et encore moins le dépassement du terme de trois mois, largement échu.

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Fiche n° 100 : le recours à la Cour de Justice de la CEDEAO

Cas pratique Suite à des mouvements insurrectionnels qui conduisent au renversement du pouvoir, un Conseil de Transition est mis en place. Il adopte une nouvelle loi électorale qui exclut pour une période de 10 ans tous ceux qui ont milité et occupé des postes de direction au sein du parti déchu. Ceux-ci ne pourront pas en conséquence participer aux futures élections présidentielles et législatives. Des formations politiques et plusieurs citoyens se sentant concernés crient à l’arbitraire et décident de saisir la Cour de justice de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Problème de droit Quelle est la procédure à suivre et quelle est la composition de cette juridiction communautaire ? L’adoption d’une telle loi électorale constitue-t-elle une violation des droits d’éligibilité aux postes électifs de son pays ?

Définition et procédure

Les critères d'éligibilité, prévus par le code électoral couvrent l'ensemble des conditions requises pour pouvoir être élu et sont fondés sur des bases objectives telles que l’âge, l’absence de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, la nationalité, la résidence.

Dans le cas d’espèce, les formations politiques et les citoyens concernés estiment que le Conseil de Transition tente de les écarter sans motif objectif de la conquête du pouvoir.

Ils sont donc fondés à intenter une action devant la Cour de justice de la CEDEAO créée conformément aux dispositions des articles 6 et 15 du Traité révisé de 1993 de la CEDEAO.

C’est une juridiction qui comprend 7 juges désignés par les chefs d’Etat ou de gouvernement sur recommandation du Conseil de la magistrature de la Communauté pour un mandat unique de quatre ans et qui est compétente pour statuer sur tous les cas de violations de droits de l’Homme commis dans les Etats membres de l’organisation.

La Cour est également compétente pour se prononcer sur les différends entre Etats membres.

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Il n’est pas nécessaire d’épuiser les voies internes de recours, ce qui fonde l’originalité de cette juridiction. En d’autres termes, la Cour peut faire l’objet d’une saisine directe par les requérants qui ne sont pas obligés de porter plainte devant les juridictions nationales.

La requête est adressée au greffe de la Cour avec les indications relatives aux faits incriminés.

La Cour de justice de la CEDEAO est une institution régionale qui a pour rôle majeur d’assurer le respect du droit et des principes d’équité dans l’interprétation et l’application des dispositions du Traité révisé ainsi que d’autres instruments juridiques subsidiaires adoptés par la Communauté.

En raison des instruments juridiques internationaux ratifiés tels que la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples ainsi que la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 , tout indique que la Cour déclarera cette nouvelle loi discriminatoire, parce qu’elle prive des citoyens de leur droit sacré et constitutionnel , en l’occurrence celui de pouvoir participer aux compétitions électorales et de prendre part à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis.

La décision de la Cour n’est pas susceptible d’appel mais de révision. Elle est exécutoire par l’Etat condamné.