la france et l'otan

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Sous la direction de Maurice Vaïsse, Pierre Melandri et Frédéric Bozo La France et L'Otan André V ersaille éditeur

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la france et l'otan ministère d'affaire étrangères

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Sous la direction de Maurice Vaïsse,Pierre Melandri et Frédéric Bozo

La France et L'Otan

André Versaille éditeur

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Actes du colloque tenu à l'École militaire, les 8, 9 et 10 février 1996, à Paris, écrits par Maurice Vaïsse.

Ce livre a une histoire : lorsque ce colloque a été envisagé, les or-ganisateurs avaient pour idée de marquer le 30e anniversaire de la décision prise en 1966 par le général de Gaulle de faire sortir la France de l’organisation militaire intégrée de l’OTAN. Or, au même moment avaient lieu des conversations entre Paris et Washington pour revenir sur cette décision : si ces entretiens n’ont pas abouti, l’on sait que depuis, en 2008, la France est de nouveau membre à part entière de l’OTAN.Afin de permettre au lecteur de se repèrer pour la période 1996/2011, il trouvera en fin de volume une orientation bibliographique consti-tuée uniquement d’ouvrages (à l’exclusion des dizaines d’articles suscités par cette question), qui ne porte pas seulement sur la ques-tion précise des rapports entre la France et l’OTAN, mais est élar-gie à la question de l’Alliance atlantique elle-même, profondément transformée depuis 1996.

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SOMMAIRE

Maurice VaÏSSeLa France et l'OTAN : survol ........................................................ I

Maurice VaÏSSeAvant-propos .................................................................................... 17

Première Partie : du temPs de la iVe réPublique

La France et La création de L'otan

Georges-Henri SOUtOULa sécurité de la France dans l'après-guerre .............................. 21

charles cOGanPuissance virtuelle : la France, de la Victoire à l'OTAN ............ 53

Pierre GUILLenLes militaires français et la création de l'OTAN ............................ 77

Pierre GerBetLe rôle de la France dans la négociation de l'Alliance atlantique . 93

Jean-Jacques BecKerLa scène intérieure ..................................................................... 103

Une aLLiée soUrciLLeUse (1950-1958)

Marc tracHtenBerGLa formation du système de défense occidentale : les États-Unis, la France et MC 48 ................................................ 115

Patrick FacOnLes bases américaines en France, 1945-1958 : un enjeu politique 129

Olivier POttIerLa présence américaine en France, 1951-1967 :cohabitation ou acculturation ? ..................................................... 147

Philippe VIaL

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La France et L'otan

8

L'aide américaine au réarmement français (1948-1956) ............. 169

amiral Marcel DUVaLLa crise de la CED (1950-1954) ................................................... 189

deuxième Partie : la réPublique gaullienne

Une sortie proGraMMée (1958-1966)

Maurice VaÏSSeIndépendance et solidarité, 1958-1963 .......................................... 219

Geoffrey WarnerDe Gaulle and the Anglo-American « Special Relationship » 1958-1966 : perceptions and realities ........................................... 247

reiner POMMerInLa France, l'Allemagne et l'OTAN ................................................ 267

colette BarBIerLa France et la Force multilatérale (MLF) .................................. 285

Lawrence KaPLanLes débats stratégiques .................................................................. 307

Michel WInOcKLes attitudes des Français face à la présence américaine (1951-1967) .................................. 323

Le retrait de L'orGanisation MiLitaire intéGrée (1966-1969)

Frédéric BOZOChronique d'une décision annoncée : le retrait de l'organisation militaire (1965-1967) ......................... 331

Lieutenant-colonel Frédéric GUeLtOnLe retrait de l'organisation militaire intégrée ............................... 359

Jean-Paul BrUnetLe retrait de la France de l'OTAN : la scène intérieure ............. 379

Frank cOStIGLIOLaLa réaction américaine au retrait de la France de l’OTAN ....... 403

charles ZOrGBIBeLe retrait français de l'OTAN : rapport de synthèse ................... 421

Béatrice HeUSer et cyril BUFFetRésister à la tempête : les réactions britanniques au départ de la France de l'intégration militaire de l'OTAN ...... 427albert KerSten

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sommaire

Neutralising political poker play with a cardboard pistol : Dutch reactions to France's Withdrawal from NATO's integrated defence (1966) ........................................ 451

Leopoldo nUtIItaly and the French Withdrawal from NATO in 1966 ................ 469

Paul LÉtOUrneaULe Canada et la politique française envers l'OTAN en 1966 ...... 489

Mikhaïl narInSKILes Soviétiques et la décision française ........................................ 503

troisième Partie : aPrès de gaulle

La France et L'aLLiance atLantiqUe depUis 1969

Pierre MeLanDrILa France et l'Alliance atlantique sous Georges Pompidou et Valéry Giscard d'Estaing .................. 519

Samuel F. WeLLS, JrFrance and NATO under Mitterrand, 1981-1989 ......................... 559

Diego a. ruiz PaLMerLa coopération militaire entre la France et ses alliés, 1966-1991 :entre le poids de l'héritage et les défis de l'après-guerre froide . 567

Bruno tertraISLa coopération militaire depuis 1969 : la France, l'OTAN et la question nucléaire .................................. 617

Dominique MoïsiEn guise de postface ....................................................................... 633

Chronologie établie par Frédéric BOZO ....................................... 635

Les auteurs ...................................................................................... 643

Bibliographie ................................................................................... 649

Index ................................................................................................ 655

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I

LA FRANCE ET L’OTAN : SURVOL

Le sommet du 60e anniversaire de l’Otan, les 3 et 4 avril 2009, a consacré le retour de la France dans les structures du commandement intégré. cela faisait 43 ans que la France avait rompu avec l’intégration. On a parlé de « trahison », du retour du fils prodigue, de la fin de l’exception française. Qu’en est-il exac-tement ? en fait les relations de la France avec l’Otan ont été sinusoïdales : membre fondateur de l’alliance, puis contestataire au sein du système, se plaçant ensuite en marge de l’Otan, avant le retour au bercail.

après 1945, soumise à la contrainte de la Guerre froide, la France obtient ce qu’elle avait souhaité lors des deux guerres mon-diales : un engagement précoce des États-Unis en europe. Face à la menace soviétique, elle constate son impuissance et l’insuffi-sance des moyens militaires, même dans le cadre d’une Union occidentale trop inféodée à l’impérieuse albion, et elle préfère s’en remettre au grand allié américain, qui – en temps de paix – accepte de se lier aux pays européens dans une alliance restreinte à l’atlantique- nord. en signant le traité de Washington le 4 avril 1949, la France est donc un des membres fondateurs de l’alliance atlantique. La transformation de l’alliance en organisation au début des années 1950 en fait, grâce à sa situation de carrefour géographique, un membre essentiel : des bases américaines et canadiennes y sont installées ainsi que les organes de commande-ment, comme le SHaPe, dirigé par un général américain, le SaceUr. Mais, confrontés aussi à la décolonisation, les dirigeants de la IVe république ne cessent de réclamer que la solidarité ne soit pas restreinte au domaine atlantique, mais étendue partout où les intérêts de l’Occident sont en cause, en particulier en Médi-terranée et au Proche-Orient. Ils revendiquent aussi de participer à la direction stratégique de l’alliance, à la mesure du rôle que la France y occupe. en 1958, la France traverse une crise de

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MaUrice Vaïsse

II

confiance dans l’alliance atlantique, résultant pour beaucoup des pressions américaines lors de l’affaire de la ceD (communauté européenne de défense), et de la crise de Suez, et plus largement du soutien des États-Unis au mouvement de décolonisation. aussi bien, quand de Gaulle revient au pouvoir, il est plutôt porté par une opinion anti-américaine, sensible à la propagande du PcF, pour lequel l’Otan est une machine de guerre des banquiers amé-ricains contre l’Union soviétique. De Gaulle est particulièrement chatouilleux au sujet de la présence des forces américaines sur le sol national dans le cadre de l’Otan. Il considère que la France, tout en ne remettant pas en cause son appartenance à l’alliance atlantique, doit se libérer de l’état de dépendance à l’égard des États-Unis et que l’Otan doit être réformée. en particulier, il désapprouve le système militaire intégré, car il estime nécessaire pour la France de garder le contrôle entier de sa défense.

Le mémorandum de septembre 1958 synthètise les revendica-tions françaises. L’absence de coordination politique en-dehors de la zone Otan est le grief principal, et l’exigence d’un élargisse-ment de la compétence géographique de l’Otan est clairement formulée. Les deux autres axes du texte sont la remise en cause de l’intégration et l’exigence d’une association de la France à la direc-tion du monde libre. américains et anglais font des réponses dila-toires et acceptent du bout des lèvres des rencontres tripartites, qui butent très rapidement sur la difficulté de donner à ces consultations un caractère organique, ainsi que sur trois différends principaux : l’arme nucléaire, l’intégration, c’est-à-dire la place des forces fran-çaises dans le dispositif occidental, et la vision de l’europe. alors que la France est déterminée à acquérir la capacité nucléaire, sym-bole de son rang retrouvé, les États-Unis, hantés par la perspective de la prolifération, tentent de s’y opposer en refusant leur aide au programme français. Ils déplorent que les fonds dépensés par la France pour la réalisation de cette force l’empêchent de consentir, dans le domaine des armements classiques, à l’effort prévu dans le cadre de l’Otan, d’autant plus que l’armée française engagée en algérie ne tient pas sa place sur le théâtre centre-européen. La France refuse l’installation sur son sol de rampes de lancement pour des missiles américains et de stocks d’armes nucléaires pour les escadrilles américaines, d’où le retrait progressif des chasseurs bombardiers des bases de l’Otan en France. Décidé à faire évoluer la doctrine de l’alliance vers une riposte flexible et d’élever le seuil du recours au nucléaire, Washington veut pousser l’europe à avoir recours aux armes conventionnelles, tandis que de Gaulle

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La France et La crÉatIOn De L’Otan

LA SÉCURITE DE LA FRANCE DANS L’APRÈS-GUERRE

Georges-Henri SOUtOU

La politique française de sécurité a connu deux bouleversements entre 1945 et 1949 : le passage de la menace allemande à la menace soviétique et l’engagement historique des États-Unis pour la sécurité de l’europe dès le temps de paix. Il faut bien mesurer l’ampleur et la difficulté de ce changement radical, politique mais aussi intellectuel et moral.1

certes les dirigeants français n’ont pas découvert la guerre froide en 1947 seulement, avec le discours truman et l’échec de la conférence de Moscou en mars-avril 1947, mais à la suite d’un processus complexe. Pour certains responsables, mais qui étaient fort minoritaires au début, l’inquiétude apparut dès 1945, quand commencèrent à devenir évidentes la puissance soviétique et les orientations politiques de Moscou, après la défaite du reich et dans la perspective d’un départ d’europe rapide de la part des américains.2

Mais une fois admise la priorité de la menace soviétique (le problème allemand n’étant néanmoins jamais perdu de vue) et une fois abandonnées les illusions d’une europe « troisième force », les responsables se divisèrent en deux grandes tendances : les partisans d’une politique française de sécurité appuyée d’abord et aussi directement que possible sur les États-Unis ; les partisans d’un regroupement de sécurité européen, certes allié à l’amérique

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GeorGes-Henri soUtoU

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mais conservant son indépendance, pour des raisons stratégiques mais aussi politiques.

Les projets initiaux de De Gaulle pour l’après-guerre : la menace allemande, les trois étages de la sécurité et le Bloc occidental

Dès alger, de Gaulle et le cFLn avaient envisagé pour la France après la guerre une sécurité à trois étages, tournée essen-tiellement contre l’allemagne : une alliance franco-soviétique prioritaire, ensuite une alliance franco-britannique, en dernière ligne la garantie américaine dans le cadre de la future organisation mondiale de sécurité collective.3 en effet, de Gaulle estimait que l’UrSS serait la plus disposée à soutenir la France contre l’alle-magne et à maintenir celle-ci dans une situation de faiblesse, alors que les anglo-Saxons auraient la tentation de la relever rapidement et seraient en tout cas moins disposés à agir rapidement pour soutenir la France en cas de difficulté. Il était en effet entendu que l’allemagne resterait la menace principale, soit par elle-même, soit comme l’enjeu international majeur pouvant susciter un conflit entre les vainqueurs. Pour de Gaulle, l’allemagne perdrait ses provinces orientales au profit de la Pologne, ses régions occiden-tales seraient détachées et étroitement contrôlées par la France (Sarre et rhénanie) ou soumises à un régime international (ruhr). Le reste du reich serait divisé ou ne formerait tout au plus qu’une très lâche confédération.4

en même temps de Gaulle était parfaitement conscient du poids qu’aurait l’UrSS en europe après la guerre. Pour rééquilibrer Moscou, il comptait sur l’alliance franco-anglaise, sur la partici-pation américaine à la future OnU,5 et sur le « Bloc occidental », ou « groupement occidental », ou « Fédération de l’europe occi-dentale », notion apparue à alger à l’automne 1943 et officialisée par de Gaulle lui-même qui la reprit, en parlant d’un « groupement occidental », dans un discours prononcé le 18 mars 1944 devant l’assemblée consultative. Il s’agissait de réunir autour de la France les pays du Bénélux, peut-être l’Italie, ainsi que la Sarre, la rhé-nanie et la ruhr détachées du reich. cet ensemble, éventuellement appuyé sur la Grande-Bretagne, serait capable de faire contrepoids

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PUISSANCE VIRTUELLE : LA FRANCE, DE LA VICTOIRE À L’OTAN

charles cOGan

Dans cette période « de la Victoire à l’Otan », la France a entériné quatre pactes – Moscou, Dunkerque, Bruxelles et Washington (à vrai dire, les deux derniers pactes ne se sont pas succédés ; ils se sont superposés) – pour aboutir à l’enterrement de la vieille alliance à rebours entre Paris et Moscou. J’ai songé pendant un instant à intituler cette communication, « Quatre mariages et un enterrement », mais puisque ce n’est ni très origi-nal ni au cœur de ce qui s’est passé pendant ces années, j’ai préféré le titre, « Puissance virtuelle : la France, de la Victoire à l’Otan. »

De toutes les grandes nations de l’europe, la France avait été la seule à être conquise par l’allemagne pendant la Deuxième Guerre mondiale. (Lorsque j’emploie le terme « grande nation », je me réfère au concept historique du concert européen traditionnel : la Grande-Bretagne, la France, la Prusse, la russie et l’autriche-Hon-grie). À cause de ce fait capital, l’effondrement rapide de 1940 avait été d’autant plus ressenti et le choc d’autant plus intense. Le fait d’être historiquement une des grandes nations d’europe signi-fiait que la France avait en quelque sorte le droit d’avoir son mot à dire sur les conditions de la paix qui allait faire suite aux hosti-lités. Le corollaire était que la France, étant le plus grand, et de loin, des pays qui avaient été vaincus et qui avaient été occupés par les allemands, se trouvait dans la meilleure position, de tous

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cHarLes coGan

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les pays occidentaux, pour soutenir avec force l’argument qu’un redressement rapide de l’ancien ennemi était inacceptable.

Le Traité d’alliance et d’assistance mutuelle de Moscou

au fur et à mesure de l’intensification de la Deuxième Guerre mondiale, charles de Gaulle entretenait l’espoir que les russes pourraient l’aider contre les pressions qu’exerçaient les anglo-Saxons sur son mouvement. De plus, il y avait les marches alle-mandes à l’est de la France – la rhénanie, la ruhr, la Sarre – où de Gaulle espérait trouver un soutien russe pour ses revendica-tions.

Or, l’Union soviétique n’était pas plus prête que les États-Unis à reconnaître à la France ce statut de grande puissance virtuelle. La France à l’époque était trop faible pour compter beaucoup aux yeux des russes et elle constituait en outre une menace potentielle pour l’avenir. cela se voit à travers des documents récemment révélés par le Woodrow Wilson Center à Washington,1 dont l’élé-ment principal est un mémorandum d’Ivan Maisky, daté du 10 janvier 1944, peu après son retour à Moscou après un séjour à Londres comme ambassadeur. ce mémorandum, destiné à Viatcheslav Molotov, avait comme objectif d’établir la politique étrangère de l’Union soviétique pour les trente à cinquante années à venir.2

D’après Ivan Maisky, le premier objectif stratégique à atteindre dans les décennies à venir devait être de mettre l’allemagne hors d’état de nuire, ce qui devait être accompli par l’occupation du pays par les alliés pour une durée d’à peu près dix ans, par le démembrement de l’allemagne, par le désarmement militaire, industriel et idéologique du pays, par des réparations, et par ce qu’il appelait la « rééducation ».3 Ivan Maisky donna comme deu-xième objectif stratégique – et cela ressemble étrangement au fameux rapport Wolfowitz de 1991, filtré par la presse mais rapi-dement désavoué comme n’étant qu’un brouillon – « d’empêcher la formation en Europe d’une puissance ou d’une combinaison de puissances munies d’armées fortes. Notre intérêt sera servi le mieux si l’Europe de l’après-guerre n’a qu’une seule puissance terrestre – l’URSS – et une seule puissance maritime – l’Angle-

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LES MILITAIRES FRANÇAIS ET LA CRÉATION DE L’OTAN

Pierre GUILLen

tirant les leçons de la Deuxième Guerre mondiale, les militaires français reconnaissent que la France ne peut plus assurer seule sa sécurité. cette vision nouvelle de la défense, dépassant le cadre national, est renforcée par les prodromes de la guerre froide : la défense de la France s’insère dans un cadre plus large, la défense du monde libre. Quelle forme devrait prendre le système de défense dont la France ferait partie ? trois tendances apparaissent dans les élites militaires.

Les uns prônent une alliance bilatérale avec les États-Unis cou-vrant la France et l’afrique du nord. Le général Billotte s’en est fait l’apôtre depuis l’automne 1945.1 Il est relayé en 1947 par les attachés militaires à Moscou et à Washington, dont les rapports persuadent le général Humbert, chef de l’eMDn, que devant la menace soviétique la France doit négocier une alliance militaire avec les États-Unis.2 c’est aussi le point de vue des généraux Juin et revers.

D’autres sont favorables à une organisation ouest-européenne spécifique. Pour les généraux de Lattre et Ély, cette organisation, à laquelle les États-Unis apporteraient leur concours, permettrait de défendre le continent le plus à l’est du rhin possible.3 en outre, estiment les généraux Léchères et Valin, l’amiral Lepotier, le colo-nel Goutard, cette organisation ouest-européenne érigerait un bloc eurafricain en troisième force, refusant de prendre parti entre le

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pierre GUiLLen

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camp américain et le camp soviétique et pesant de son poids pour préserver la paix.4

D’autres, enfin, sont les avocats d’un ensemble euratlantique animé par les États-Unis. cette conception l’emporte au cours de l’année 1948 ; les contacts et habitudes prises pendant la guerre de travailler avec les militaires anglo-américains facilitent cette conversion : « La notion d’intégration des forces françaises dans un ensemble atlantique avec la nécessaire obéissance à des auto-rités interalliées avait été comprise et admise. »5

L’évolution de la conjoncture internationale rallie en effet l’en-semble des élites militaires françaises à la conception d’une europe occidentale poste avancé de la défense du monde libre. D’autre part, l’organisation mise sur pied dans le cadre du traité de Bruxelles (OtB) a vite révélé ses insuffisances et fait l’objet de vives critiques :6 elle est incapable d’assurer efficacement la couverture de la frontière du rhin, mission prioritaire assignée aux armées françaises en liaison avec les alliés du traité de Bruxelles7 et ne répond pas aux conceptions stratégiques qui s’im-posent : « La petite Europe n’a aucun sens militaire », écrit le général Gérardot. Pour le général chassin, l’expansionnisme soviétique réduit l’europe occidentale à une frange adossée à la mer ; il faut renforcer avant tout les liens avec les États-Unis, base arrière de l’Occident, et avec l’afrique.8 Pressenti pour prendre le commandement des forces terrestres de l’OtB, le géné-ral Juin refuse « ce commandement subalterne et mal défini », il considère l’OtB comme une création « purement artificielle et vide de substance » ; seule l’aide des États-Unis permettrait de mettre sur pied quelque chose de valable.9 en outre, l’OtB, que les Britanniques cherchent à placer sous leur prédominance, prend mal en compte les intérêts français ; dénonçant l’orientation qu’elle prend sous l’influence anglaise, le général Humbert, chef de l’eMDn, demande qu’on fasse appel aux américains ; le Pacte atlantique en cours d’élaboration donnera « l’occasion de réviser les choses dans le sens que nous souhaitons ».10

Dans une longue note de fin janvier 1949, l’eMDn souligne « les insuffisances et lacunes graves » de l’OtB, que le Pacte atlantique devrait combler. L’OtB ne couvre que l’europe occi-dentale, or l’Union française a « une ampleur mondiale » et sa défense doit s’intégrer dans une stratégie d’ensemble ; l’OtB ne permet pas à la France de participer à l’élaboration de cette stra-tégie d’ensemble, qui demeure le privilège d’un état-major anglo-américain, survivance du Combined Chiefs of Staff (ccS), dont

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LE RÔLE DE LA FRANCE DANS LA NÉGOCIATION

DE L’ALLIANCE ATLANTIQUE

Pierre GerBet

très tôt, les dirigeants français se sont préoccupés d’obtenir la participation américaine à la défense de l’europe occidentale et de faire de la France, avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, l’un des trois pays dirigeants de l’alliance atlantique. Ils attein-dront le premier objectif avec la signature du Pacte atlantique, mais non le second lors de la mise sur pied de l’Organisation du traité de l’atlantique-nord.1

Dès mars 1946, edmond Michelet, ministre MrP des armées dans le gouvernement tripartite de Félix Gouin, prit à l’insu du président du conseil et des ministres communistes une initiative approuvée par le général de Gaulle, qui venait de quitter le pou-voir, et par Georges Bidault, ministre des affaires étrangères. Il envoya aux États-Unis le général Pierre Billotte, officiellement pour représenter la France au comité d’état-major de l’OnU, en fait pour prendre des contacts avec les militaires américains.2 Lors de ses conversations à Washington avec les membres du Combined Chiefs of Staff, Billotte constata que ceux-ci, en cas d’avance de l’armée rouge, avaient prévu l’abandon de l’europe continentale à l’exception de la péninsule ibérique. Il plaida pour une alliance dirigée par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, pays ayant des intérêts mondiaux, alliance à l’échelle mondiale, comme l’était la menace communiste. Le général de Gaulle approuvait

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pierre GerBet

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cette conception. Mais ces contacts officieux furent interrompus par Félix Gouin dès qu’il en apprit l’existence.3

c’est après l’échec de la conférence de Moscou sur l’allemagne (10 mars-24 avril 1947) et l’exclusion des communistes du gou-vernement ramadier (4 mai) que commencèrent les premières démarches officielles. Dès le 11 juin, Georges Bidault confiait à l’ambassadeur des États-Unis que la France se sentirait plus en sécurité avec des bombardiers atomiques américains basés sur l’elbe.

en octobre le général revers, chef d’état-major, prenait contact avec l’attaché militaire américain à Paris et affirmait que, si la France recevait les armes nécessaires, elle pourrait aligner un mil-lion d’hommes et de 20 à 40 divisions pour la défense de l’europe de l’Ouest. Les militaires américains étaient intéressés. Ils avaient été impressionnés par la façon dont s’était effectuée la mobilisa-tion de près de 300 000 hommes pour réprimer les grandes grèves insurrectionnelles d’octobre-novembre 1946. Ils estimaient qu’il fallait équiper l’armée française pour lui permettre de lutter contre le communisme à l’intérieur et à l’extérieur.4

Dans le même temps, Jean chauvel, secrétaire général du Quai d’Orsay, suggérait à Londres que des préparatifs militaires soient faits pour protéger l’europe occidentale contre l’Union soviétique, mais les Britanniques – qui avaient signé avec les Français le traité de Dunkerque du 4 mars 1947 dirigé contre l’allemagne – ne voulaient pas compromettre les chances d’une dernière conférence à quatre à Londres.5 c’est après l’échec de celle-ci, le 15 décembre, que seront prises les premières initiatives.

L’appréciation du danger soviétique n’était pas la même chez les Occidentaux. Les inquiétudes étaient les plus grandes en France, dont la situation était la plus vulnérable. Déjà, Georges Bidault craignait un coup de force de Moscou sur la tchécoslo-vaquie. Les Britanniques étaient confiants dans leur insularité. ernest Bevin, ministre des affaires étrangères, ne pensait pas que l’Union soviétique fût en état de faire la guerre, mais qu’elle pourrait exercer une pression. Quant aux américains, disposant alors du monopole nucléaire, ils ne craignaient pas une guerre immédiate mais d’ici quelques années. au total, c’étaient les Fran-çais qui étaient les plus pressés de recevoir une aide militaire, essentiellement de la part des États-Unis.

c’est cependant la Grande-Bretagne qui va prendre l’initiative. Dès le 15 décembre 1947, Bevin soumet au général Marshall, secrétaire d’État américain, un projet d’union de l’europe occi-

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LA SCÈNE INTÉRIEURE

Jean-Jacques BecKer

Le Monde du 2 novembre l948 citait le journal britannique L’Observer qui venait d’écrire : « La France est un allié sur lequel nous ne pouvons plus compter. » cette appréciation désabusée n’était pas la conséquence d’une prise de position française hostile au camp occidental, mais à l’impression de faiblesse qu’elle don-nait face à la « subversion » communiste.

La France connaissait de très graves affrontements sociaux dans lesquels le rôle du parti communiste n’était guère dissimulé : tour-mente sociale à l’automne l947 touchant la plus grande partie de la France et de très nombreuses corporations ; grève des mineurs à l’automne l948 s’éternisant du début du mois d’octobre à la fin du mois de novembre. Pour reprendre les bassins miniers et y permettre le retour à « la liberté du travail », le ministre de l’In-térieur, le socialiste Jules Moch, avait dû engager de véritables opérations militaires.

Dans l’état actuel de la documentation, il apparaît peu vraisem-blable qu’il se soit agi de mouvements insurrectionnels destinés à s’emparer du pouvoir – le but était bien davantage de lutter contre « l’impérialisme américain » en faisant échouer le plan Marshall. Mais, tant dans une bonne partie de l’opinion française que dans l’opinion étrangère, on ne voyait pas les choses ainsi, d’autant que le « coup de Prague » en février l948 et le début du blocus de Berlin au mois de juin apparaissaient comme les signes de l’agres-

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Jean-JacqUes Becker

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sivité soviétique. Dans son discours de rennes du 27 juillet l947, le général de Gaulle, dans une formule saisissante, avait rappelé qu’entre la frontière du bloc soviétique et celle de la France, il n’y avait que 500 kilomètres, « soit à peine la longueur de deux étapes du tour de France ».1

Le sentiment que l’Union soviétique se préparait à s’emparer de l’europe occidentale était fort répandu. Dès le mois de juillet l947, un sondage montre que 35 % des Français croient à une guerre proche.2

Or dans ce contexte d’inquiétude, les gouvernements de la France apparaissaient comme particulièrement faibles.

ce sentiment de faiblesse était d’abord la conséquence de l’ins-tabilité gouvernementale : depuis la fin de l’année l947 jusqu’au début de l95l se succédèrent les gouvernements dirigés par robert Schuman (huit mois), andré Marie (un peu plus d’un mois), de nouveau robert Schuman (six jours), Henri Queuille (un peu plus de treize mois), Georges Bidault (huit mois), de nouveau Henri Queuille (neuf jours), rené Pleven (huit mois), sans compter les périodes de crise plus ou moins longues qui séparaient un gou-vernement de l’autre, ainsi 22 jours de crise après la chute du premier gouvernement Queuille.

L’historien ou le politiste peut facilement constater que l’insta-bilité gouvernementale était compensée par une certaine stabilité ministérielle : ainsi Jules Moch resta ministre de l’Intérieur de novembre l947 à février l950, robert Schuman, ministre des affaires étrangères de juillet l948 à février l953... Pour l’essentiel, chaque gouvernement était composé par les mêmes hommes, même s’ils pouvaient être à des postes différents.

Le sentiment de faiblesse était ensuite la conséquence de la formule politique de la majorité. Depuis l’éviction des commu-nistes du gouvernement, au début du mois de mai l947, la formule était celle de la « troisième force », force centrale faisant face au parti communiste d’un côté, au rPF de l’autre. La troisième force, c’était tous les autres, depuis les socialistes jusqu’aux modérés de la droite classique, en passant par le MrP et le rassemblement des Gauches républicaines (rGr), lui-même réunion de l’UDSr et des radicaux. Mais cette « majorité » au pouvoir était une majorité par défaut dans la mesure où elle était minoritaire dans le pays. Si l’on prend comme terme de mesure les élections muni-cipales d’octobre l947, au moins dans les villes de plus de 9 000 habitants, le rPF avait recueilli près de 40 % des suffrages expri-més et le parti communiste près de 30 %, ce qui n’en laissait

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Une aLLIÉe SOUrcILLeUSe (1950-1958)

LA FORMATION DU SYSTÈME DE DÉFENSE OCCIDENTALE :

LES ÉTATS-UNIS, LA FRANCE ET MC 48

Marc tracHtenBerG

au mois de décembre 1954, le conseil de l’Otan adopta le document Mc 48, un rapport du comité militaire de l’alliance sur « Le système le plus efficace à adopter pour les forces mili-taires de l’Otan pendant les prochaines années ». en approuvant ce document, le conseil autorisa les autorités militaires de l’al-liance à « établir des plans et à faire des préparatifs en se basant sur l’hypothèse suivant laquelle les armes atomiques et thermo-nucléaires seront utilisées pour la défense dès le début d’une guerre ».1

c’est un événement d’une importance capitale, voire primor-diale, dans l’histoire de l’âge nucléaire. On adopta, en effet, une stratégie, comme le notèrent les chefs d’état-major français, « qui pour la première fois se traduit par la possibilité d’une défense européenne valable ».2 ce fut aussi l’avis du commandant suprême allié (SaceUr). Le général alfred Gruenther, qui était SaceUr depuis 1953, fut avec son très bon ami Dwight eisenhower le principal architecte de la nouvelle stratégie. Gruenther estima dans son « Plan des possibilités », document de base pour Mc 48, que « l’adoption de ce plan permettrait, en 1957, de résister à une attaque soviétique malgré l’infériorité numérique des forces dont l’Occident disposerait à cette date en Europe. » Mais « il précise que cet espoir, pour la première fois affirmé depuis la constitution de l’OTAN, est absolument conditionné par : l’utilisation immé-

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Marc tracHtenBerG

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diate et massive, dès le début des hostilités, des armes atomiques et thermo-nucléaires ; la participation effective des forces alle-mandes à la défense ; l’aménagement des forces occidentales et la révision de leurs conceptions tactiques par rapport aux impé-ratifs de la guerre atomique. »3

L’idée clef était simple. Dans une guerre européenne – et en effet, dans n’importe quelle guerre entre l’Otan et l’Union sovié-tique en europe, y compris une guerre découlant, par exemple, d’une agression soviétique contre la Yougoslavie – il n’y avait qu’un choix : « Le seul moyen d’assurer la défense de l’Europe en cas d’agression soviétique est de déclencher contre l’agresseur une contre-attaque immédiate atomique et thermo-nucléaire. »4 La stratégie envisageait une attaque massive, concentrée et, surtout, extrêmement rapide : « Le commandant suprême des forces alliées en Europe (SACEUR) prend pour postulat de base de l’ensemble de ses conceptions, l’emploi immédiat des armes nouvelles dès la première manifestation d’hostilité. » Selon lui, il faudrait que la « contre-attaque aéro-atomique de l’Otan » soit déclenchée « sans perdre une minute ».5 L’attaque serait montée avec des armes tactiques et stratégiques – c’est-à-dire à la fois contre la source de la puissance militaire de l’ennemi en russie, et contre ses forces au théâtre d’opérations européen. Une force de couver-ture en europe, utilisant les armes « nouvelles » adaptées au champ de bataille nucléaire, pourrait tenir la ligne et défendre l’europe occidentale pendant la période relativement courte au début du conflit, quand la menace soviétique serait très grande ; après la destruction par l’offensif aérien stratégique des sources de la puissance de guerre soviétique en russie même, la menace en europe diminuerait très rapidement. Mais pour protéger l’eu-rope occidentale pendant cette guerre, il faudrait frapper vite, il faudrait diriger l’attaque initialement « contre le potentiel ato-mique de l’adversaire et ses positions clefs : dans ce domaine, où le facteur temps est décisif, des mesures doivent être arrêtées pour réduire au minimum le temps de la décision et les délais d’exé-cution. »6

La stratégie Mc 48 est donc une véritable stratégie de défense europénne. ce n’est pas seulement une stratégie de dissuasion. en cas de guerre, l’europe occidentale serait protégée ; l’Union sovié-tique serait détruite, totalement vaincue. Mais pour mettre l’eu-rope à l’abri d’une riposte soviétique – et la sauvegarde de la société européenne est la condition de la stratégie – il faudrait neutraliser le potentiel nucléaire de l’adversaire dès le commen-

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LES BASES AMÉRICAINES EN FRANCE, 1945-1958 : UN ENJEU POLITIQUE

Patrick FacOn

curieusement, le thème de la présence des troupes américaines en France – du début des années cinquante au milieu des années soixante – n’a guère été traité, non seulement dans les ouvrages portant sur l’histoire générale de la guerre froide ou de l’Otan, mais aussi dans ceux qui concernent plus particulièrement les rela-tions franco-américaines pendant la même période. La preuve en est le livre d’Irwin Wall, en date de 1989, où la question est à peine effleurée.1 Le sujet plus général des forces américaines en europe n’a pas semblé intéresser les historiens, même s’il a attiré l’attention de quelques politologues anglo-saxons au début des années soixante-dix, qui lui ont consacré un symposium tourné plutôt vers le temps présent. Il a fallu attendre le commencement des années quatre-vingt-dix pour qu’un colloque historique, auquel l’auteur de ce travail a participé, soit organisé par l’Institut d’études politiques d’ebbenhausen et embrasse le problème dans toute sa dimension. cette manifestation s’est révélée d’une grande impor-tance pour le sujet, dans le sens où elle a permis de comparer l’attitude de chacun des pays où des forces américaines ont sta-tionné, de déterminer une sorte de typologie d’ensemble et de constater à quel point la position de la France s’est révélée aty-pique par rapport à celle des autres alliés des États-Unis.2 Une France sourcilleuse, jalouse de son indépendance, prête à défendre sa souveraineté, mais contrainte aussi de prendre en compte les

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patrick Facon

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impératifs de sa sécurité. L’affaire de ce qu’on nomme les bases américaines3 s’inscrit donc bien dans un dilemme qui domine la politique française des années cinquante.

avant d’aborder le sujet proprement dit, il importe de faire quelques remarques préliminaires. en relativisant tout d’abord l’importance de la présence américaine sur le sol français, même si d’importantes bases, de nombreux dépôts et divers états-majors, dont celui du SHaPe, y ont été implantés. en 1966, lorsque la France décide de quitter l’organisation militaire intégrée du Pacte atlantique, les forces américaines basées sur son territoire repré-sentent 25 000 hommes, soit 11 000 pour l’aviation et 14 000 pour l’armée de terre.4 À la fin de l’année 1951, époque où les américains ont entamé, depuis à peine quatre mois, le déploiement de leurs moyens, ils ne dépassent pas 6 000 hommes pour l’US Air Force, mais ces derniers sont 15 000 un an plus tard.5 alors qu’en fait, près de 700 000 personnes – militaires et civils compris – seront déployées en europe au plus fort de la présence améri-caine. Par ailleurs, le nombre de travailleurs français employés sur les bases de l’Otan atteint son plus haut niveau en 1957, avec 31 000 personnes, alors que près de 50 000 Japonais travaillent pour le compte des forces armées des États-Unis sur la seule île d’Okinawa, à la même époque.6 Les installations sur lesquelles ils se trouvent – Évreux, châteauroux, toul, Laon, Phalsbourg, chau-mont et Étain7 – ne représentent que quelques-unes des 2 000 bases disséminées dans soixante-quatre pays – 19 d’amérique latine, 10 d’extrême-Orient, 11 d’afrique, 13 d’europe, 11 du Proche-Orient et d’asie du Sud – qu’occupent les États-Unis dans le monde au milieu des années soixante.8

Sans doute convient-il aussi de remarquer combien la présence américaine en France a représenté un enjeu politique majeur, un moyen de pression d’un côté comme de l’autre. elle a constitué, plus généralement, en europe, pendant des décennies, une des pierres angulaires des relations entre le Vieux continent et le nou-veau monde. tout cela ne donne que plus de relief et d’intérêt aux remarques qui ont été avancées au début de cette étude. en fait, le nombre de soldats que les États-Unis ont consenti à déployer face au rideau de fer a de tout temps été, dans l’esprit des européens, un révélateur particulièrement fiable de l’intérêt affiché par Washington pour cette partie du monde et un indice de la volonté américaine de s’engager plus ou moins dans sa défense en cas de conflit avec l’Union soviétique. Dans le cas français, le problème suscite des réactions et des attitudes para-

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LA PRÉSENCE AMÉRICAINE EN FRANCE, 1951-1967 :

COHABITATION OU ACCULTURATION ?

Olivier POttIer

Dans l’introduction de son étude sur la présence militaire amé-ricaine au royaume-Uni durant la Seconde Guerre mondiale, l’his-torien britannique David reynolds insiste sur la nécessité de réconcilier l’histoire sociale et l’histoire militaire.1 Les militaires, surtout lorsqu’ils s’implantent d’une manière durable dans un pays étranger, ne doivent pas être perçus seulement comme les objets d’une politique qui les dépasse. Ils doivent aussi être considérés, autant qu’il est possible, dans leur dimension sociale et psycho-logique, c’est-à-dire comme des êtres ordinaires placés dans des circonstances extraordinaires, comme le prétend judicieusement David reynolds.2

ainsi, c’est en observant le fait militaire dans cette double optique – politique et sociale – que nous avons abordé l’étude de la présence militaire en France de 1951 à 1967, autrement dit des premières installations effectives d’unités américaines jusqu’à leur départ. Il nous a semblé intéressant d’évaluer l’impact de cette présence sur un pays européen fier de son passé et très attaché au respect de sa souveraineté. Quel fut le rôle de la présence militaire des États-Unis dans le processus d’américanisation de la France ? Quelle fut la nature des relations entre Français et américains sur le terrain et, notamment, quelle fut l’importance des préjugés et des peurs que les deux peuples ont nourris l’un envers l’autre en ces circonstances ? comment enfin les autorités civiles et mili-

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oLiVier pottier

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taires des deux pays tentèrent-elles de rapprocher les deux com-munautés ?

Pour répondre à ces questions, nous avons obtenu l’autorisation de consulter, à titre dérogatoire, les archives de la Mission centrale de liaison pour l’assistance aux armées alliées. cet organisme, créé en 1950, avait pour but de régler toutes les difficultés posées par la présence militaire alliée en France métropolitaine et au Maroc. Le fonds des archives de la McLaaa est conservé au Service historique de l’armée de terre à Vincennes ; il n’est ni inventorié ni classé.3 Il présente une très grande richesse ainsi qu’une grande diversité : notes de service à destination des ministres, rapports de synthèse annuels sur les activités de la Mis-sion et sur la présence américaine, rapports mensuels fournis par les officiers français de liaison affectés dans les principales unités américaines, comptes rendus de réunions, lettres et dossiers spé-cifiques. Les archives de la McLaaa se prêtent donc pleinement à une étude aussi bien politique que sociale de la présence militaire américaine.

Les bases américaines en France : le spectacle fascinant de l’american way of life

Le rôle des familles

La présence militaire américaine en France de 1951 à 1967 reste limitée. elle n’atteint pas les chiffres de la présence militaire amé-ricaine des première et seconde guerres mondiales. au début de 1954, le nombre total d’américains, civils et militaires, installés en France est d’environ 56 000 personnes,4 soit 0,1 % de la popu-lation totale de la France, 2,8 % des étrangers vivant en France et 15 % des troupes américaines installées en europe. On est loin des 2 013 000 militaires américains stationnés en France à la fin de 19185 et des 250 000 hommes que la rFa accueille au début des années cinquante.6 Même si elle a atteint, et certainement dépassé les 100 000 personnes vers 1958-1959, la population amé-ricaine en France n’est donc pas très importante comme le remarque judicieusement Patrick Facon.7 néanmoins, plusieurs départements français connaissent une certaine affluence améri-caine : la charente-Maritime, l’Indre, la Meuse, la Meurthe-et-

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L’AIDE AMÉRICAINE AU RÉARMEMENT FRANÇAIS (1948-1956)

Philippe VIaL

On sait combien l’aide américaine fut décisive pour permettre la renaissance des forces françaises, à partir de 1943.1 On sait moins, par contre, à quel point les dollars et les matériels venus d’outre-atlantique permirent à la IVe république, quelques années plus tard, d’entreprendre conjointement la modernisation et le développement de ses armées. Si personne en effet n’ignore les mérites du plan Marshall, force est de constater que ceux de l’aide militaire qui lui succéda sont beaucoup moins connus...2

Le cas de la France est à cet égard exemplaire : il n’existe à l’heure actuelle aucune étude d’ensemble sur le sujet, alors que Paris fut, comme pour le plan Marshall, le principal bénéficiaire de cette manne.3 Il ne s’agira donc pas, dans le cadre de cet article, d’apporter des réponses définitives à un sujet que seules plusieurs thèses suffiraient à épuiser, mais plutôt de donner un cadre à la réalisation de recherches plus approfondies.

Bien sûr, l’analyse de ce processus complexe pose de nom-breuses questions : quelle fut l’importance de cette assistance militaire par rapport à l’aide Marshall ? Quelle fut sa valeur sur le plan de la qualité des matériels cédés ? Quel fut le rôle respec-tif des différentes administrations, françaises et américaines, civiles et militaires, dans sa gestion ? Mais compte tenu de sa nature, notre travail ne pourra qu’effleurer les réponses, dans la mesure

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pHiLippe ViaL

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où il nous faudra d’abord décrire à grands traits l’évolution des montants et des modalités de cette aide entre 1948 et 1956.

L’ouverture de négociations à ce sujet est en effet un des aspects essentiels du vaste marchandage atlantique qui s’engage début 1948. Les débuts du conflit coréen, fin juin 1950, puis la tenue de la conférence de Lisbonne, en février 1952, sont autant de paliers dans le développement d’une aide militaire américaine qui ne commencera à décroître qu’après 1956. Même si les matériels et les dollars continuent d’arriver jusqu’en 1963, l’urgence n’est désormais plus la modernisation des armées françaises mais leur adaptation à une forme de guerre qui, si elle passe aux yeux de beaucoup pour un nouvel avatar de la lutte contre l’UrSS, est bien loin des réalités du combat envisagé en centre-europe.

L’aide militaire : un nouveau type d’assistance américaine (printemps 1948-printemps 1950)

Lorsqu’au début du mois de mars 1948, les dirigeants français sollicitèrent officiellement la conclusion d’une alliance militaire avec les États-Unis, ils en lièrent immédiatement les aspects poli-tiques et matériels.4 Il faut dire que, compte tenu de la pénurie financière de l’époque, le budget national était hors d’état de finan-cer les projets de réarmement que l’accélération de la guerre froide rendaient chaque jour plus urgent.5 « Rien n’est possible dans ce domaine sans l’aide américaine », annonce le général Humbert, chef d’état-major de la Défense nationale, dès le 16 mars 1948, lors d’une visite au secrétaire général du Quai, Jean chauvel.6 Quelques mois plus tard, le général Juin, pressenti pour prendre le commandement des forces terrestres du nouveau Pacte de Bruxelles, cite l’absence de certitudes en la matière comme l’une des raisons essentielles de son refus.7

Littéralement pris à la gorge, le gouvernement français fit de cette question l’une de ses principales revendications durant les négocia-tions, alors même que l’aide Marshall commençait à peine à se mettre en place. cette exigence d’une assistance militaire immédiate se heurta à la volonté américaine de bâtir d’abord une alliance poli-tique à long terme.8 en outre, les États-Unis attendaient, de leur côté, un effort des Européens avant de les aider,9 en particulier grâce

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LA CRISE DE LA CED (1950-1954)

amiral Marcel DUVaL

Je ressens particulièrement l’honneur que m’ont fait les organi-sateurs de ce colloque en m’invitant à y présenter une communi-cation sur « La crise de la ceD », puisque, contrairement aux autres intervenants, je ne suis pas un historien de formation mais, tout au plus, un historien-amateur, et alors aux deux sens du mot. et seulement de vocation tardive, puisque c’est pour reconstituer l’histoire de la grande aventure du nucléaire militaire français, que je me suis lancé, il y a dix ans, dans la recherche historique. Mais, oserais-je l’avouer devant tant d’historiens éminents, avec une prédilection pour l’histoire orale, laquelle, pour ma défense, était la seule à ma disposition, étant donné le sujet que j’avais choisi.

Pourquoi, dans ces conditions, m’a-t-on confié cette communi-cation ? Étant donné la répugnance que je viens d’évoquer des hommes de science pour l’histoire orale, je ne crois pas que ce soit parce que j’ai eu le privilège d’être le témoin de la crise de la ceD à partir du Pentagone, où, de 1953 à 1955, j’ai appartenu à la Délégation française au « Groupe permanent » de l’Otan – le Nato Standing Group – alors son instance stratégique suprême, où mes patrons furent successivement le général Ély et le général Valluy, avec comme adjoint le général Stehlin. La confiance dont m’honorait le général Valluy me valut aussi d’être son observateur personnel aux « accords de Paris » qui, en octobre 1954, clôtu-rèrent la crise de la ceD, et ensuite d’accompagner Pierre Mendès

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aMiraL MarceL dUVaL

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France au cours de sa visite à Washington. Mais, rassurez-vous, je ne ferai pas état de mon témoignage, qui n’aurait d’intérêt qu’au niveau de l’anecdote. et quant à ma modeste expérience dans l’histoire des armements nucléaires, elle me sera de peu d’utilité, puisque ceux-ci n’ont pas joué un rôle significatif dans la « crise de la ceD », encore qu’ils n’en aient pas été absents, comme j’aurai l’occasion de l’évoquer.

en fait, malgré mes handicaps, c’est une sorte d’obligation morale qui m’a fait accepter de traiter ce sujet. J’appartenais en effet à une famille typique de l’époque, puisque, né avant la « Grande Guerre des Français », pour parler comme Jean-Baptiste Duroselle, le regretté maître de beaucoup d’entre nous, j’avais été élevé dans l’idée que l’allemagne était « l’ennemi héréditaire ». Or, la crise de la ceD a été à cet égard mon « chemin de Damas », c’est-à-dire l’occasion de ma conversion à l’idée de la réconcilia-tion franco-allemande, occasion qui fut alors « manquée » par beaucoup d’autres Français, et c’est pourquoi je me suis intéressé personnellement aux causes de cet échec.

Bref rappel des événements 1

Pour ne pas y revenir trop souvent par la suite, il me paraît utile de rappeler brièvement les principaux événements de cette crise, qui débuta en 1950 lorsque commença à se poser de façon urgente le problème du réarmement de l’allemagne de l’Ouest, puisque c’est lui qui, de bout en bout, sera au cœur de la crise.

L’année précédente avait déjà été marquée par des évolutions importantes dans la situation internationale avec la création du conseil de l’europe, première institution de réflexion sur l’avenir de notre continent ; la conclusion du traité de l’atlantique ; l’ac-cès de l’Union soviétique à la capacité atomique ; l’arrivée au pouvoir des communistes en chine ; la constitution d’un gouver-nement en allemagne de l’Ouest, dit de la république Fédérale d’allemagne (rFa), suivie en allemagne de l’est de celle d’un gouvernement communiste, dit de la république Démocratique allemande (rDa). et en 1950, les événements vont se multiplier, avec en mai la proposition faite par la France de créer une « com-munauté économique européenne pour le charbon et l’acier » (ceca) ; en juin le début de la guerre de corée, qui va aspirer

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Une SOrtIe PrOGraMMÉe (1958-1966)

INDÉPENDANCE ET SOLIDARITÉ 1958-1963

Maurice VaÏSSe

Dans la grande politique menée par de Gaulle, il y a une cohé-rence de la période 1958 à 1963. Le Général pousse à l’émergence d’une « personnalité » politique européenne distincte des autres entités et fondée sur la défense.1 Si ces idées sont affirmées dès juin 1958, elles font l’objet d’une application adaptée à l’évolution de la situation française et internationale. Jusqu’en 1962, la guerre d’algérie pèse d’un poids considérable sur les options de politique étrangère et militaire. La modernisation de la défense, nécessaire à la restauration de la politique d’indépendance nationale, est inconcevable avec une armée engagée en algérie.2 Le tournant décisif se situe en 1962-1963 car il marque d’une part la fin de la guerre d’algérie, d’autre part la fin d’une phase dure de la guerre froide avec l’accalmie, après les crises de Berlin et de cuba. Le recul soviétique dans cette épreuve de force paraît avoir convaincu de Gaulle que désormais il pourrait mener une politique plus indépendante à l’égard des États-Unis, et c’est ainsi qu’il s’achemine vers la sortie de l’Organisation atlantique.

Mais le fondement de cette politique est bien le mémorandum de 1958. De ce document, probablement le plus important de la politique étrangère de la Ve république, découle presque logique-ment la décision de retrait de 1966. Il s’agit donc du point de départ d’une politique qui entend concilier l’indépendance et la solidarité, c’est-à-dire d’une part la liberté d’action revendiquée

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MaUrice Vaïsse

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par la France par rapport à l’Otan, d’autre part la solidarité, qui est également une revendication de la France à l’égard de ses alliés.3 Une double interrogation apparaît : le mémorandum de 1958 est-il un effort sérieux pour réformer l’organisation, ou une manœuvre tactique pour justifier un retrait ultérieur de l’Otan ? Le mémorandum introduit-il vraiment une rupture dans la poli-tique pratiquée par la IVe république ? en fait, le mémorandum n’est pas seulement un point de départ. c’est aussi un point d’aboutissement. c’est même un double point d’aboutissement. aboutissement d’une tendance lourde de la IVe république ; abou-tissement des conceptions du général de Gaulle et des circons-tances de l’été 1958.

Sans compter la crise de la ceD, depuis 1956, en effet, la France de la IVe république traverse une crise de confiance dans l’alliance atlantique et en particulier dans les alliés anglo-saxons, dont l’attitude en Indochine après le cessez-le-feu et l’ambiguïté de la position à l’égard de l’afrique du nord font douter de leur amitié et de leur solidarité.4 De Guy Mollet en 1956-1957 au général de Gaulle en 1958, les gouvernements français ne cessent pas de réclamer une alliance qui ne soit plus restreinte au domaine atlantique, mais étendue partout où les intérêts de l’Occident sont en cause, en particulier en Méditerranée et au Proche-Orient.5 Or dans les dix-huit mois suivants, de graves litiges opposent la France, profondément engagée dans la guerre d’algérie6 et qui se présente comme la sentinelle de l’Occident, à ses alliés anglo-américains (livraisons d’armes à la tunisie).7 Dans une déclaration à l’assemblée, Félix Gaillard évoque « l’Alliance globale », qui « repose sur le principe qu’on ne peut être allié ici sans l’être en même temps partout. »8

alors que la IVe république avait bâti sa défense sur une imbrication très étroite avec ses alliés et singulièrement avec les américains, l’intégration est remise en question à partir de 1956.9 L’échec de l’opération de Suez signifie aussi l’échec de la collaboration militaire franco-britannique et, singulièrement, de l’intégration alors réalisée.10 car pour pallier les inconvé-nients d’une juxtaposition des forces coalisées, les Français ont accepté le principe du commandement intégré, qui place donc les troupes françaises dans la dépendance étroite des chefs bri-tanniques.11 De Suez datent aussi les décisions prises dans le sens de la création d’un armement atomique français, qui témoi-gnent d’une orientation différente de l’effort de défense. certes,

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DE GAULLE AND THE ANGLO-AMERICAN « SPECIAL RELATIONSHIP » 1958-1966 :

PERCEPTIONS AND REALITIES

Geoffrey Warner

It was Winston churchill who publicly launched the term « spe-cial relationship » as applied to the alliance between Britain and the United States in his Fulton speech of 5 March 1946. He had, however, already spelled out what he meant by it in an earlier speech at Harvard on 5 September 1943. In brief, churchill envi-saged the continuation of the unprecedented wartime collaboration between the two countries, which he saw as based upon ties of language, blood and culture as well as national interest, into the post-war world. Such collaboration, he suggested, might even evolve into common citizenship.

the post-war British Labour government never went so far, but there is no doubt that it was almost as strongly committed to the maintenance of the closest possible links with the United States as churchill. the reason was quite simple. One of some halfdozen great powers on the eve of the second world war, Britain found itself at the end of that conflict in a greatly weakened position vis-à-vis two emergent superpowers : the United States and the Soviet Union. at the same time, it had world-wide interests and commitments to protect. Some form of association or alliance with other countries was therefore a matter of necessity rather than one of choice.

an alliance with the Soviet Union was out of the question, not least because that country was seen as the greatest threat to British

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GeoFFrey Warner

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interests. ernest Bevin, the Labour government’s foreign secretary, toyed with the idea of a “ third force ”, based upon cooperation between western europe, its colonial empires and the independent countries of the British commonwealth, but this proved fruitless. Western europe was seen as too weak and too enamoured of unrealistic means of collaboration, such as federalism, while the commonwealth countries were not willing to subordinate their foreign and defence policies to those of any government in Lon-don.

this left the United States and despite important differences on colonial and economic policies, the two countries were agreed on the need to counter the threat of Soviet expansionism. although both countries had global interests, the principal monument to their agreement in the early post-war period was the north atlantic alliance of april 1949, which was essentially an anglo-american creation. By the end of May 1950 Bevin could tell his cabinet colleagues that since the north atlantic treaty was the kernel of american policy, « it must also be the kernel of ours. »1

Successive British governments were under no illusions as to their country’s power in relation to that of the United States, but they did believe that Britain’s position as the second largest eco-nomy in the western world, the size of its armed forces and its influence across all continents of the globe entitled it to a privile-ged role as america’s principal ally. Successive United States administrations did not disagree. this was the underlying reality of the post-war anglo-american « special relationship ».

While this situation was broadly acceptable to most members of the western alliance in the late 1940’s and early 1950’s, it was always deeply resented by France. the governments of the Fourth republic felt that their country’s military strength and extensive overseas interests entitled them to a similar role in america’s counsels as their British counterparts and only their weakness pre-vented them from making life even more difficult for the United States and Britain than they did anyway.

By 1960, however, the configuration of power, both inside the western alliance and beyond it, had experienced a number of signi-ficant changes. Within natO, for example, a marked shift in relative economic power was taking place. France’s gross domes-tic product was only 61 % of Britain’s in 1950, West Germany’s 59 % and Italy’s 47 %. ten years later the proportions were : France 72 %, West Germany 95 % and Italy 63 %. the three continental countries, moreover, were all members of the recently

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LA FRANCE, L’ALLEMAGNE ET L’OTAN

reiner POMMerIn

I

Dans la perspective de la politique de sécurité de la république fédérale, la république gaullienne met dès l’abord l’accent sur des points négatifs et suscite un certain émoi au sein de l’alliance. Lorsque le ministre fédéral de la Défense, Franz Josef Strauss, rend visite le 8 juillet 1958 au nouveau président de la république française charles de Gaulle, son collègue Pierre Guillaumat lui fait savoir que la France a décidé de poursuivre seule son pro-gramme nucléaire. Le protocole (FIG) signé peu de temps aupa-ravant, en novembre 1957, par les ministres de la Défense de France, d’Italie et de la république Fédérale d’allemagne est ainsi caduc. ce protocole prévoyait une étroite collaboration dans les domaines militaires, de l’armement ainsi que de la coordination scientifique, technique et industrielle y compris sur le plan nucléaire. Strauss ne peut dissimuler sa déception : il avait placé en effet de grands espoirs dans cette coopération et avait différé l’achat d’un avion susceptible d’emporter des armes nucléaires, afin de donner une chance au Mirage, alors en cours de dévelop-pement, et d’offrir à la France un gage de sa bonne volonté. Il n’hésite plus dès lors à adopter, comme le souhaitait l’armée de l’air, un système déjà opérationnel, le F-104 G, le Starfighter.1

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reiner poMMerin

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Le grand frère de la république fédérale, les États-Unis, s’était inquiété lui-même de voir se profiler une telle coopération franco-allemande. « Le secret et le flou qui entourent l’accord FIG et les plans allemands dans ce domaine nous inquiètent », lance avec inquiétude de Bonn l’ambassadeur américain, David K. Bruce, dans un message adressé début 1958 à Washington.2

À l’automne 1958, on ne peut encore se livrer qu’à des suppu-tations quant à la politique de De Gaulle face à l’Otan.3 ainsi le commandant en chef des forces terrestres de l’Otan centre-europe, le général Hans Speidel, rapporte que la France veut se séparer de l’organisation intégrée « par un lent processus de déta-chement ». Le chancelier fédéral Konrad adenauer ne se montre nullement compréhensif lorsque la France informe le gouverne-ment fédéral qu’elle n’accepte plus la subordination des troupes françaises au commandant en chef de l’Otan centre-europe. Son inquiétude s’estompe, provisoirement du moins, quand de Gaulle parvient à l’apaiser à l’occasion de la visite du chancelier à colombey-les-Deux-Églises. en revanche, le mémorandum secret que de Gaulle adresse le 17 septembre au président américain Dwight D. eisenhower et au Premier ministre britannique Harold Macmillan suscite un vif émoi à Bonn. Il y propose, vainement il est vrai, la constitution par la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis d’un triumvirat de l’Otan. Il veut assurer ainsi la participation directe de la France aux décisions politiques et sur-tout aux décisions stratégiques de l’alliance. ainsi donc, le statut français de grande puissance et l’infériorité allemande y sont clai-rement soulignés. adenauer, courroucé, n’entend parler de la pro-position française que trois semaines plus tard, par des tiers, et redoute une étroite coopération au sein du triumvirat des trois grandes puissances comme aussi l’amoindrissement du poids de la république Fédérale d’allemagne. Une lettre de De Gaulle au chancelier fédéral produit un premier apaisement. On n’en conti-nue pas moins à supposer et à redouter sans cesse, à Bonn, une nouvelle offensive française dans cette direction.

La note remise plus tard, en juillet 1960 à rambouillet, par de Gaulle à adenauer et relative à l’organisation de l’europe – la France venait de tester avec succès en février sa première bombe atomique – ne peut qu’accroître les inquiétudes allemandes face à la crise de Berlin. L’intention qu’a la France de mettre un terme à l’intégration américaine et d’établir l’alliance atlantique sur de nouvelles bases constitue, aux yeux d’adenauer, une grave menace pour l’Otan comme aussi pour les relations franco-allemandes.

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LA FRANCE ET LA FORCE MULTILATÉRALE (MLF)

colette BarBIer

Le projet de Force multilatérale (MLF), en vue de créer une force nucléaire stratégique intégrée au service de l’Otan, est la réponse apportée par les États-Unis à leurs alliés occidentaux, afin de rétablir leur confiance dans la couverture nucléaire américaine de l’europe, satisfaire leur désir d’être davantage associés aux décisions en matière de stratégie nucléaire, décourager toute pro-lifération atomique et toute force de dissuasion autonome, par conséquent contrer la politique d’indépendance atomique de la France, et enfin renforcer la cohésion de l’alliance.

ce projet ambitieux, tout à la fois militaire et politique, n’était pas né d’une idée subite. Mélange de proposition Gates1 et de rapport Bowie,2 il s’inscrivait dans la liste déjà longue des diffé-rents plans américains élaborés depuis 1957 pour « nucléariser » l’Otan, et répondre aux demandes exprimées par le SaceUr en matière de MrBM, plans repoussés par nombre de pays euro-péens, la France en particulier.

La « Force multilatérale » ne vit jamais le jour, pourtant elle a été au centre des débats de l’Otan de 1960 à 1965 et a retenti non seulement sur la politique européenne et atlantique de la France, mais encore sur sa politique intérieure.

Les trois temps forts de la MLF se situent en décembre 1960, son acte de naissance officiel ; décembre 1962, les accords de

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coLette BarBier

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nassau et la relance du projet ; fin 1964, la ligne de fracture : apogée/déclin.

À ces trois moments critiques correspondent des actions et des réactions françaises non moins importantes : 1960, le choix, une force nucléaire stratégique nationale ; 1963, le « défi » français, le « non » à la Force multilatérale ; fin 1964, la très grave crise euro-atlantique, dont la MLF est l’enjeu. La France fait connaître publiquement son hostilité au projet, alors que dans le même temps se forge le consensus national. tous les partis politiques sont una-nimes pour rejeter la « Force multilatérale », considérée comme une « mauvaise solution ». ce sont ces moments et les raisons de cette évolution qui sont brièvement rappelés.

1960 : la proposition Herter et le choix de la France : une force nucléaire stratégique nationale

Le 16 décembre 1960, lors de la session du conseil ministériel de l’Organisation atlantique, à Paris, le secrétaire d’État américain, christian Herter, propose au nom de son gouvernement de mettre à la disposition de l’Otan, avant la fin de 1963, comme force intermédiaire, dans les mêmes conditions d’emploi que la VIe Flotte de Méditerranée, cinq sous-marins atomiques, armés chacun de seize missiles de type Polaris. Il offrait, en outre, si les alliés européens acquerraient environ une centaine d’autres missiles, à déployer soit sur des sous-marins, des navires de surface ou à terre, qui seraient servis, possédés, contrôlés sur une base « mul-tilatérale », dont les têtes nucléaires seraient fournies par les États-Unis et placées sous leur garde, de joindre les cinq sous-marins à Polaris à cette force collective des alliés, le tout constituant une force de dissuasion de l’Otan, placée sous commandement Otan.3 c’était la première consécration officielle et diplomatique du terme « multilatéral », qui ne fut aucunement précisé ni défini.

La proposition Herter demeurait très vague sur un certain nombre de points, en particulier : où seraient placés les Polaris ? Sur terre, sur mer, sur sous-marins ou sur navires de surface ? Qui achèterait les missiles ? l’alliance en tant que telle, ou chaque pays, pour les reverser ensuite à la collectivité ? Qu’entendait-on par « commandement Otan » ? Qui déciderait de l’emploi final

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LES DÉBATS STRATÉGIQUES

Lawrence KaPLan

the literature of what may be termed « the great nuclear debate »1 within natO between the United States and the euro-pean partners in the years of the Gaullist ascendancy usually has been framed in terms of low vs. high nuclear threshold. More specifically, it applies to european, particularly French, suspicions of american pressure for « flexible response » and a build-up of conventional force as evidence of a weakening of america’s concern for the defense of europe. It was a debate between two major figures – the French president charles de Gaulle and the american secretary of Defense robert S. Mcnamara. the debate had many implications : american insistence upon centralized control of nuclear decisions, european distrust and resentment of american authority, the particular French resentment of the anglo-Saxon nuclear monopoly, and the lessening intensity of the Soviet threat which ultimately permitted France’s withdrawal from the military arm of natO in l966.

What has received less attention is the division within the ame-rican establishment – both diplomatic and military – over the appropriate strategy toward the communist bloc. De Gaulle may have offended other europeans by the manner of his presentations and he certainly deviated from the rest of his allies by his depar-ture from SHaPe, but he spoke for much of Western europe in resisting the logic of flexible response, especially the increase in

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LaWrence kapLan

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conventional forces as both a deterrent and a method of coping with Soviet invasion. By contrast, Mcnamara had to cope with dissent within his Defense Department, with significant elements in the State Department, and with the Supreme allied commander in Paris. Powerful as Mcnamara was in the Kennedy and Johnson administrations, he encountered more opposition than de Gaulle did from his european colleagues.

Whatever the judgments made about strategic planning in the Mcnamara Pentagon, they must take into account both external and internal circumstances that would have affected any occupant in the office of the secretary of Defense. change was in the air before the presidential election of l960, even if the specific forms they would take were not clear. Within the republican as well as Democratic leadership there was growing uneasiness with the prin-ciple of massive retaliation as the leitmotif of america’s nuclear strategy. the strategic concepts of the early l950s were less cre-dible at the end of the decade. Such credibility as it had depended upon a nuclear superiority that was seemingly eroded by the end of the eisenhower administration, as the Soviet Union developed technological skills that appeared equal if not superior to those of the United States.

the launching of Sputnik in l957 sparked massive discontent in the West. In the United States popular pressures, reflected in congressional actions, led to a rapid acceleration of the nation’s missile production as well as progress in space exploration. astro-nauts soon matched cosmonauts. In europe the Soviet military achievements led to questions about the reliability of american support when for the first time the United States would be as vulnerable as europeans to Soviet power. If Sputnik could orbit the earth, then Soviet intercontinental ballistic missiles could strike at american targets. Would the United States in the future be willing to risk destruction of its own cities in defense of europe’s ?

these questions went unanswered – at least for the moment – as the nation wrestled with means to cope with changed circums-tances : manned bombers vs. IcBMs, limited warfare vs. large scale conflict, counterinsurgency vs. conventional ground forces. above all, the United States under Mcnamara introduced the concept of counterforce against military targets as opposed to des-truction of urban centers in a new approach to nuclear strategy. this was an initial component of the doctrine of « flexible res-ponse » that was to characterize strategic thinking in the next generation.

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LES ATTITUDES DES FRANÇAISFACE À LA PRÉSENCE AMÉRICAINE (1951-1967)

Michel WInOcK

Pour rendre compte des réactions françaises à la présence amé-ricaine sur le territoire national entre 1951 et 1967, je distinguerai les positions des leaders d’opinion – politiques et intellectuels – et l’état de l’opinion tel que nous le révèlent les sondages de l’IFOP.1

Les bases américaines installées en France entre 1951 et 1967 ont d’abord provoqué des réactions conformes aux divisions de la guerre froide. L’hostilité du parti communiste s’est traduite par un pilonnage incessant : discours, proclamations, éditoriaux, repor-tages, œuvres littéraires et œuvres d’art se sont multipliés, princi-palement au début des années 1950.

Le vocabulaire des communistes est caractéristique. Ils avaient choisi leur camp – celui de la « paix » – contre le camp de la « guerre ». Les troupes américaines qui s’installent dans les bases de l’Otan en France sont assimilées à une nouvelle « occupa-tion » à laquelle les Français doivent « résister » ; ceux d’entre eux qui ont voulu ou approuvé cette invasion sont les nouveaux « collabos ».

c’est le thème que développe andré Stil dans son roman, Le Premier choc, en 1951, suivi en 1952 du Coup de canon. On y voit des dockers d’un port de l’atlantique qui militent contre cette « nouvelle occupation » et l’arrivée des armes pour la guerre qui se prépare. « La misère, c’est les Ricains ! », proclame l’un des héros. « Ça leur fait mal, dit-on dans un autre passage, qu’il y ait

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MicHeL Winock

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tant de gens heureux en Russie. » Le roman de Stil obtient le prix Staline en 1952, pour avoir été « la première œuvre importante sur la lutte du peuple français contre les colonisateurs améri-cains. » commentaire de l’auteur : « Il revient aussi à tous ceux qui, comme les dockers montrés en exemple dans Le Premier choc, non seulement travaillent à l’union la plus large pour la défense de la paix, mais s’engagent résolument sur la voie de la lutte de masse pratiquée contre toutes les formes concrètes de la guerre et de la préparation à la guerre, en premier lieu la honte de l’occupation américaine infligée à notre pays. »2

De L’Humanité à la presse locale – comme La Marseillaise, L’Écho du centre à châteauroux – de France nouvelle à La Pen-sée, le parti communiste s’est efforcé à un martelage incessant, souvent violent, contre la présence américaine en France, à la fois dans son principe et dans ses réalités pratiques. François Jarraud, qui a étudié le cas de châteauroux, donne ainsi maints exemples de ce manichéisme renouvelé, faisant feu du moindre incident, du moindre accrochage, entre les militaires de la base et la population de châteauroux et de ses environs.3

au cours de cette même période, la mouvance communiste bénéficie de l’appoint du courant neutraliste, constitué principale-ment par des intellectuels, au Monde, à l’Observateur, à Esprit, aux Temps modernes... Si cette dernière revue, derrière son direc-teur Jean-Paul Sartre, s’aligne entre 1952 et 1956 sur les positions communistes, les autres intellectuels de gauche entendent défendre les chances d’une europe non alignée et socialiste. Mais la plupart font des États-Unis et du capitalisme américain les principaux responsables de la tension internationale.

Dans un numéro d’Esprit de 1950, un ancien officier de marine, Louis de Villefosse, explique ainsi l’origine de l’anti-américanisme qu’on notera durablement dans l’intelligentsia de gauche : « Car à l’origine de la construction, de la mise en mouvement de l’énorme machine qui comporte le plan Marshall, le Pacte Atlan-tique, la guerre froide, la bombe atomique, la bombe H, derrière le rideau de fumée de la propagande pour la Liberté, les Droits de l’Homme, la civilisation occidentale, il n’y a qu’une réalité simple, lisse et dure comme un blindage de coffre-fort : les hommes d’affaires américains et le système économique américain feront faillite s’ils perdent les marchés, et ne pas étendre indéfiniment ces marchés, c’est déjà les perdre. »4

Le thème de l’impérialisme américain – une « guerre idéolo-gique pour coca-cola » – fait attribuer, par les intellectuels neu-

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Le retraIt De L’OrGanISatIOn MILItaIre IntÉGrÉe (1966-1969)

CHRONIQUE D’UNE DÉCISION ANNONCÉE : LE RETRAIT DE L’ORGANISATION MILITAIRE

(1965-1967)

Frédéric BOZO

trente ans après la décision du général de Gaulle, la politique française à l’égard de l’Otan demeure marquée par le retrait de la France de l’organisation militaire. certes, une série de décisions récentes (retour au comité militaire, participation aux réunions des ministres de la Défense, discussion à l’Otan des questions nucléaires) traduisent une volonté d’adapter cette politique aux réalités de l’après-guerre froide. Mais l’essentiel, à savoir le refus de l’intégration, n’est pas à ce jour remis en cause et ne devrait pas l’être tant que les structures militaires de l’Otan n’auront pas été radicalement transformées.

c’est dire que la décision de février-mars 19661 est au cœur de la problématique des relations entre la France et l’Otan depuis trois décennies. On ne reviendra pourtant pas ici sur la grande politique gaullienne à l’égard de l’alliance ni sur les origines du retrait de l’organisation militaire.2 Il s’agira d’examiner, sous cer-tains de ses aspects principaux, la décision du Général telle qu’elle se profile dès 1965, de préciser selon quelles modalités elle est mise en œuvre à compter de mars 1966 et d’analyser ses consé-quences sur la France et l’Otan telles qu’elles apparaissent en 1967, une fois réglés la plupart des problèmes qu’elle avait sou-levés.

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Frédéric Bozo

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La décision

Dans le rapport sur l’état de l’alliance qu’il rédige au lendemain du retrait français, le secrétaire général de l’Otan, Manlio Brosio, note que la France « n’a pas entièrement profité d’un effet de surprise » tant « l’organisation militaire de l’Alliance et le concept d’intégration ont été vigoureusement critiqués par les plus hautes autorités françaises » au cours des derniers mois et années. en revanche, c’est « la méthode choisie par le gouvernement français, c’est-à-dire le fait de prendre des décisions unilatérales » qui a, selon lui, surpris les alliés.3 Qu’en est-il exactement ? Dans quelle mesure le retrait français était-il prévisible ? Le Général a-t-il cherché à se ménager un effet de surprise ? Bref, comment la décision a-t-elle été prise ?

Une décision prévisible

comme le gouvernement français le fait valoir dans son aide-mémoire du 11 mars 1966, le retrait des organismes militaires intégrés n’est que la dernière d’une série de mesures prises depuis 1959. Dès cette période, de Gaulle était en effet bien décidé à soustraire progressivement l’outil militaire français aux rouages de l’Otan, la France ne pouvant « accepter l’intégration de ses forces, ni une organisation du commandement allié qui lui retire-rait sa liberté d’action ».4 D’où les décisions prises par la suite : retrait de la flotte française de Méditerranée ; refus de la présence d’armes nucléaires américaines en France (1959) ; non-réaffecta-tion aux commandements Otan des divisions retirées d’algérie (1962) ; non-affectation des forces françaises à la « défense de l’avant » mise en place par le SaceUr le long du rideau de fer (1963) ; retrait de la flotte française de l’atlantique (1964).

À partir de 1965, il ne peut échapper aux alliés, à commencer par les États-Unis, que ces orientations conduiront à terme à un retrait français complet de l’appareil militaire intégré. charles Bohlen, l’ambassadeur des États-Unis à Paris, juge dès janvier 1965 que de Gaulle procédera d’ici à 1969 (c’est-à-dire à l’échéance de vingt ans prévue par le traité de Washington) à une modification radicale des rapports France-Otan.5 Brosio, reçu à

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LE RETRAITDE L’ORGANISATION MILITAIRE INTÉGRÉE

Lieutenant-colonel Frédéric GUeLtOn

« Au total il s’agit de rétablir une situation normale de souve-raineté, dans laquelle ce qui est français, en fait de sol, de ciel, de mer et de forces, et tout élément étranger qui se trouverait en France, ne relèveront plus que des seules autorités françaises. C’est dire qu’il s’agit là, non point du tout d’une rupture, mais d’une nécessaire adaptation. »

(conférence de presse du général de Gaulle, 21 février 1966)

Les réactions initiales dans les armées françaises

Préambule méthodologique

Pour un observateur étranger à « l’institution militaire » et aux questions de défense, les armées sont souvent perçues sous la forme d’un ensemble cohérent, homogène et essentiellement uni-forme. nous savons tous qu’il n’en est rien. en fait, l’hétérogénéité des forces armées nous impose, avant d’aborder le cœur de notre sujet, de définir, à travers trois remarques, le cadre méthodolo-gique de notre réflexion.

Il s’agit tout d’abord de bien préciser les limites chronologiques que nous nous sommes fixées ; puis de définir, au sein des armées françaises, les groupes humains auxquels nous nous sommes plus particulièrement intéressés ; enfin d’évoquer les sources utilisées.

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LieUtenant-coLoneL Frédéric GUeLton

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La période chronologique

La perception du retrait français évolue rapidement dès le prin-temps de 1966 puis au cours des années suivantes. elle est jalon-née par les retraits physiques des Français et des alliés, par les négociations bilatérales qui s’engagent, enfin par la signature des premiers grands accords comme les accords Ailleret-Lemnitzer de 1967 sur la coopération du 2e ca français avec centaG.1 Dans ce vaste ensemble chronologique en évolution permanente, nous avons limité notre champ d’investigation à 1966 et, chaque fois que cela était possible, en nous situant au cours du printemps ou de l’été de cette année. ce faisant, notre objectif était clair, il s’agissait de rechercher les réactions initiales – à chaud – des militaires français dans les semaines qui suivent les décisions poli-tiques françaises. Il nous est en effet apparu que c’est au cours de cette période initiale, marquée du sceau de la plus grande incer-titude, que les réflexions sont les plus intéressantes car elles doi-vent envisager toutes les évolutions, depuis une coopération qui ne serait qu’une intégration déguisée jusqu’à la rupture totale entre la France et ses alliés.

La « population » étudiée

nous avons dans un premier temps ébauché, de façon théorique et simplifiée, une typologie à trois niveaux successifs présentant des caractéristiques relativement homogènes que sont :

– les militaires placés à la charnière politico-militaire et siégeant dans les organismes et conseils supérieurs comme le conseil de Défense ;

– ceux appartenant aux grands états-majors nationaux, ayant à la fois une mission de réflexion et d’organisation ;

– enfin les unités de combat, dans l’acception la plus large du terme, depuis la division jusqu’au régiment en passant par le bâti-ment de la royale ou la base aérienne.

nous l’avons ensuite réduite afin de centrer notre propos sur les réactions de l’état-major des armées (eMa),2 éliminant de ce fait les organismes politico-militaires et n’évoquant que briève-ment les unités combattantes. ce choix délibéré s’explique pour deux raisons principales. Il apparaît, en premier lieu comme nous le verrons plus loin, que dans la majorité des unités à caractère opérationnel les réactions à l’annonce du retrait de l’organisation intégrée vont de l’ignorance à la résignation en passant par l’in-

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LE RETRAIT DE LA FRANCE DE L’OTAN : LA SCÈNE INTÉRIEURE

Jean-Paul BrUnet

La décision de retirer la France de l’organisation militaire inté-grée de l’alliance atlantique fut une décision fondamentalement politique. Le général de Gaulle la prit seul, sans même en avoir préalablement informé ses ministres. Si la politique est l’art du possible, la « scène intérieure » est d’un intérêt essentiel pour apprécier la portée de cette décision. Depuis l’automne 1965, l’idée d’un certain désengagement de l’alliance atlantique avait-elle été lancée et l’opinion préparée à une telle orientation. Mais le pays et sa représentation politique furent surpris par la rapidité de la décision du 7 mars 1966. Une fois de plus, le Général avait parié sur l’appui de la France profonde pour briser l’opposition des partis, des notables et des médias. c’est sur cette dimension intérieure que, dans le cadre de cette recherche collective, il nous appartient de mettre l’accent en soulignant d’emblée que, contrai-rement à ce qu’une vision rétrospective et simplificatrice tend à faire accroire aujourd’hui, un total succès du Général n’était nul-lement acquis au départ.

Lors de sa conférence de presse du 9 septembre 1965, le pré-sident de la république avait déclaré : « À l’expiration des enga-gements pris jadis, c’est-à-dire au plus tard en 1969, cessera pour ce qui nous concerne la subordination qualifiée d’intégration, qui est prévue par l’Organisation et qui remet notre destin à l’autorité étrangère. »1 Plusieurs organes de presse avaient alors regretté

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Jean-paUL BrUnet

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qu’au lieu de chercher à discuter avec nos alliés de la réforme de l’Otan, la France pratiquât, comme dans les instances euro-péennes, la politique de la chaise vide.2 Mais tout en regrettant l’aspect « inadmissible » de la diplomatie gaulliste – « la désin-volture à l’égard de nos partenaires, la volonté de faire cavalier seul, le rêve de dominer l’Europe, le caractère spectaculaire et provocant des principales décisions, le secret maintenu sur les objectifs qu’on s’efforce réellement d’atteindre, la disproportion entre les fins et les moyens » –, Maurice Duverger reconnaissait dans Le Monde que les meilleures intentions qu’était susceptible de nourrir Washington ne pouvaient rien contre la disproportion de force qui séparait les États-Unis des États européens et que l’Otan n’était pas en mesure de limiter réellement la liberté de décision des premiers dans les affaires importantes.3

en fait, l’opinion n’était guère sensibilisée à ces questions, ni plus généralement à la politique étrangère qui ne joua qu’un rôle marginal dans l’élection présidentielle de décembre 1965 : les électeurs de François Mitterrand se déterminèrent exclusivement sur la politique intérieure ; quant à ceux de Jean Lecanuet, les problèmes européens ne semblent être entrés dans leurs motiva-tions que dans la mesure très limitée où ils étaient liés à la situa-tion de l’agriculture.4 c’est donc à partir du 21 février 1966, date de la nouvelle conférence de presse du général de Gaulle, puis surtout au lendemain de sa décision du 7 mars, que les questions de l’Otan et de l’alliance atlantique furent projetées sur le devant de la scène. elles n’y demeurèrent d’ailleurs pas très long-temps, puisqu’au lendemain du débat sur la motion de censure, les 19 et 20 avril, l’opposition tout entière sembla considérer que le retrait de la France de l’Otan était absolument irréversible et que la presse enterra le problème.

Sans négliger de donner quelques coups de projecteur sur les temps forts de l’activité politique ultérieure, nous concentrerons donc notre étude sur les quelques mois de février à juin 1966, en rendant compte d’abord des prises de position de la presse et des partis politiques, puis en nous demandant dans quelle mesure l’opinion s’est trouvée susceptible d’admettre voire d’approuver la décision du général de Gaulle.

Le 21 février 1966, au cours de la première conférence de presse du nouveau septennat, les propos du Général qui concernaient l’Otan furent ceux qui soulevèrent les réactions les plus nom-breuses. « Sans revenir sur son adhésion à l’Alliance atlantique – déclara-t-il – la France « va d’ici au terme ultime prévu pour

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NOT « A NORMAL FRENCH GOVERNMENT » :LA RÉACTION AMÉRICAINE

AU RETRAIT DE LA FRANCE DE L’OTAN

Frank cOStIGLIOLa

Les dirigeants de l’administration Johnson étaient convaincus d’avoir raison quant à leur réaction au retrait de la France de l’Otan, et que charles de Gaulle avait tort. Les américains croyaient que le poids de l’histoire était à leur avantage et que la période écoulée depuis les années quarante avait révélé la réus-site et le désintéressement de la politique des États-Unis envers l’europe. Les américains dédaignaient la politique gaullienne d’indépendance nationale ; ils pensaient que cette politique était inutile, perturbatrice et « anormale ».1 De plus, ils considéraient les idées et la politique prônées par de Gaulle comme de petites manies d’un chef égocentrique, dont le pays n’était pas assez puissant pour se permettre une action indépendante dans les rela-tions internationales. Officiellement, le gouvernement américain minimisa l’impact du retrait de la France, souhaitant réduire l’in-fluence politique de De Gaulle ; et les dirigeants américains croyaient d’ailleurs que l’Otan pouvait fonctionner sans la par-ticipation de la France.

Pour les dirigeants américains, la question clef était la suivante : quelle allait être la réponse de la république Fédérale d’alle-magne au retrait de la France de l’Otan ? Les américains s’in-quiétaient de ce que les initiatives de De Gaulle pourraient pousser Bonn à abandonner la voie de l’intégration atlantique et européenne pour chercher un moyen indépendant de réunification

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Frank costiGLioLa

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de l’allemagne. Pour moderniser l’intégration et pour rendre le « containment » plus acceptable au gouvernement d’allemagne de l’Ouest, le gouvernement Johnson renforça l’Otan en établis-sant le Groupe de planification nucléaire (Nuclear Planning Group, ou nPG) et en accroissant le rôle de l’Otan dans la coordination de la détente est-Ouest.

Johnson et ses conseillers se voyaient comme des acteurs jouant un rôle historique. Fiers de ce rôle hérité de Dean acheson, ils voulaient poursuivre la politique américaine d’intégration euro-péenne qui, à leurs yeux, avait si bien réussi dans les années quarante et cinquante, et l’adapter à la période turbulente des années soixante. Parmi les principaux conseillers politiques pour l’europe de l’administration Johnson, le secrétaire d’État Dean rusk, le conseiller pour la Sécurité nationale Walt W. rostow et charles « chip » Bohlen, ambassadeur en France, avaient colla-boré avec acheson pour créer l’empire américain de fait qu’était le « monde libre ». Johnson lui-même, en tant que sénateur, avait participé au côté législatif de cette entreprise. Le sous-secrétaire d’État George Ball, avocat de Washington et proche de Jean Mon-net, s’était consacré durant des décennies à l’intégration de l’eu-rope occidentale par le Marché commun et l’Otan. D’ailleurs, en 1966, alors qu’acheson retrouvait le Département d’État et surveillait l’élaboration de la réponse américaine à la décision de De Gaulle de retirer la France de l’Otan, il aurait été difficile d’oublier les heures de gloire de la diplomatie achesonnienne. conseiller adjoint pour la Sécurité nationale, Francis Bator explique qu’acheson avait alors la fonction de facto de secrétaire d’État adjoint.2 Même si acheson ne possédait pas son pouvoir d’autrefois, il lui restait encore son autorité personnelle qui lui permettait, par exemple, d’« exploser » de colère devant le prési-dent et ses autres conseillers.3 Malgré des différences de stratégie, Johnson et ses principaux conseillers s’accordaient sur leur capa-cité à maîtriser les transformations de l’europe par la diplomatie multilatérale et une gestion adroite des alliés.

cette confiance s’exprimait dans un mémorandum de rostow, adressé à Johnson en avril 1966 : « Il n’est pas question de s’at-tacher aux idées démodées de la fin des années 1940. Pour nous et pour les Européens, la question est la suivante : avons-nous appris la leçon des deux guerres mondiales et celle de la marche de l’histoire moderne ? ».4 La référence de rostow à « la leçon » au singulier, et non pas au pluriel, trahit ce qui était pour lui et pour d’autres dirigeants américains de l’époque une certitude :

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LE RETRAIT FRANÇAIS DE L’OTAN : RAPPORT DE SYNTHÈSE

charles ZOrGBIBe

Les quatorze partenaires atlantiques de la France ont implici-tement admis la distinction entre l’appartenance à l’organisation militaire intégrée et la participation au traité du 4 avril 1949. Dans leur déclaration commune du 18 mars 1966, ils ont affirmé : « Le traité de l’Atlantique-Nord et l’Organisation établie en vertu de ce traité sont tous deux également essentiels à la sécurité de nos pays. » Mais l’acceptation du point de vue français repose plus ici sur un souci d’apaisement diplomatique que sur une évidence juridique. Sans doute, les formules utilisées par le traité – « les Parties agissant individuellement et conjointement », la capacité « individuelle et collective » de résistance, le droit de légitime défense « individuelle et collective » – n’impliquent-elles pas la mise en place d’une organisation. Sans doute, le terme même d’« organisation » n’est-il pas inséré dans le traité : il apparaît pour la première fois avec la convention d’Ottawa du 20 sep-tembre 1951, qui reconnaît à l’Otan – c’est-à-dire au conseil et aux organes subsidiaires – la capacité de contracter, d’acquérir et d’aliéner des biens meubles et immeubles, le droit d’ester en jus-tice et le bénéfice d’une immunité de juridiction. Mais c’est pré-cisément parce que l’Organisation n’est pas dissociable du traité ; l’Organisation n’est pas un sujet de droit dans l’ordre international, mais simplement un ensemble de moyens, d’administrations, de services, placés directement sous l’autorité des États parties au

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cHarLes zorGBiBe

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traité par l’intermédiaire du conseil – un ensemble auquel la convention de 1951 octroie la personnalité interne aux fins du commerce juridique dans l’ordre des États membres, et non la compétence de réaliser par une action propre des objectifs com-muns. en fait, on se heurte ici au problème de l’importance res-pective des organes principaux et des organes subsidiaires d’une institution internationale. comment concilier la distinction fran-çaise avec la nécessité de fonctionnement des alliances « du sys-tème de Yalta », si fréquemment institutionnalisées ? Peut-on vraiment faire table rase d’un édifice institutionnel progressive-ment mis en place, pour revenir à un traité de base dont les dis-positions sont très sommaires ? Quel avenir concevoir pour une organisation, si le nombre et l’importance de ses organes subsi-diaires l’emportent sur les organes principaux ?

Si les partenaires atlantiques n’ont pas cru opportun de contester, dans son principe, le point de vue français, ils n’ont pas manqué de déplorer les conséquences juridiques qu’il comportait – c’est-à-dire la violation d’une série d’engagements internationaux souscrits par le gouvernement de Paris. ainsi, les États-Unis ont-ils fait valoir que la décision de la France de ne plus tolérer sur son territoire la présence de troupes étrangères entraînait la caducité d’une série d’accords conclus entre 1951 et 1958 par la France et les États-Unis – accords relatifs au quartier général des forces américaines en France, à certains aérodromes et installations mis à la disposition de l’armée de l’air des États-Unis, au système de communications et de dépôts de l’armée de terre américaine... – accords jusque-là tenus secrets mais dont la teneur fut rendue publique en cette occa-sion par Washington. Or, ces différents accords avaient été conclus pour une durée égale à celle du traité atlantique et leur dénonciation n’était possible que par le consentement mutuel des deux parties... ainsi, par ailleurs, le problème du statut des forces françaises sta-tionnées en allemagne fédérale a-t-il révélé l’insuffisant fondement juridique de la thèse française. en effet, le gouvernement de Paris avait, dans le même temps qu’il exigeait le retrait des forces étran-gères de son territoire, exprimé le désir de maintenir ses propres forces sur le territoire allemand – et cela, non plus dans le cadre de l’Otan mais sur la base des accords de Paris de 1954, et dans le cadre bilatéral du traité de coopération franco-allemand. À cette demande, le gouvernement de Bonn eut beau jeu de répondre que, si le stationnement des forces françaises avait bien été prévu par les accords de 1954, la présence des troupes étrangères en alle-magne n’en était pas moins étroitement liée à leur affectation à

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RÉSISTER À LA TEMPÊTE : LES RÉACTIONS BRITANNIQUES

AU DÉPART DE LA FRANCE DE L’INTÉGRATION MILITAIRE DE L’OTAN

Béatrice HeUSer et cyril BUFFet

Prélude : 1958-1965

Même s’il est attendu de longue date, un événement redouté suscite l’étonnement quand il survient. c’est notamment le cas avec les mémoranda du général de Gaulle en mars 1966. Le retrait français des structures intégrées de l’Organisation du traité de l’atlantique-nord était prévu depuis longtemps par le gouver-nement britannique, qui avait commencé dès 1963 à réfléchir à cette éventualité. À partir de la seconde moitié de 1964, la presse londonienne s’était également faite l’écho de spéculations à ce sujet.1

Les responsables et les journalistes britanniques connaissaient l’intention du général de Gaulle, affichée dès son retour au pouvoir en 1958, de réformer l’Otan et de créer un directoire tripartite (France/États-Unis/Grande-Bretagne) qui aurait en charge les questions importantes, voire celles qui ne concernaient pas direc-tement l’Otan.2 Des spécialistes des affaires de sécurité conser-vaient à l’esprit les déclarations du président de Gaulle en 1958 et 1959, quand il s’était prononcé contre l’intégration militaire de l’Otan.3 Prenant conscience du développement de l’armement nucléaire français, ils percevaient le lien dialectique existant entre la force de frappe et la recherche de l’indépendance nationale.4

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Béatrice HeUser et cyriL BUFFet

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en 1961-1962, les Britanniques se rendaient bien compte que de Gaulle ne cessait d’être insatisfait avec l’Otan.5 De Gaulle leur expliqua à plusieurs reprises, notamment au Premier ministre Harold Macmillan, qu’il n’aimait guère l’intégration militaire de l’Otan, laissant entendre qu’il envisageait un départ de l’organi-sation intégrée, voire de quitter l’alliance atlantique.6 c’est dans ce contexte que le gouvernement britannique commanda en 1963 à ses services spécialisés (Defence Planning Staff) une étude consacrée aux répercussions sur l’Otan d’une telle décision.7

Durant toute l’année 1965, la rumeur relative à un prochain désengagement français de l’Otan gagne en intensité.8 Les Bri-tanniques estimaient toutefois que de Gaulle attendrait les résultats des élections présidentielles du 5 décembre et qu’il ne ferait donc une annonce en ce sens qu’au début de l’année suivante. La presse avait même eu connaissance en mai 1965 que les gouvernements britannique et américain avaient mis à l’étude des plans de défense du territoire de l’Otan sans participation de la France :9 il s’agis-sait en fait du rapport actualisé de 1963, qui fut discuté en juin 1965 par des représentants du Foreign Office avec leurs homolo-gues américains, allemands et néerlandais.10 Un nouveau rapport traitant des conséquences pour l’Otan d’un départ français est rédigé en décembre 1965.11

Le retrait progressif d’unités militaires françaises de l’intégra-tion militaire otanienne depuis 1959 ne constituait pas d’ailleurs un secret. Une série de mesures prise par la France étaya du reste les supputations britanniques. D’abord la flotte de Méditerranée et ensuite les forces rapatriées d’algérie ne furent pas mises à la disposition du SaceUr.12 À l’éte 1965, l’Élysée annonça que la France ne participerait pas au prochain exercice de l’Otan Fal-lex prévu pour le printemps suivant.13 en novembre, le gouverne-ment français informa ses alliés que son représentant ne prendrait pas part à la réunion des ministres de la Défense de l’Otan, fixée à Paris pour la fin du mois.14

Les déclarations ambiguës du général de Gaulle à l’automne 1965 pouvaient laisser supposer que la France avait non seulement l’intention de discuter de la réforme de l’Otan mais était prête à rompre l’alliance en 1969, au cas où ses revendications n’au-raient pas abouties.15 en même temps, la presse anglo-saxonne se demanda si de Gaulle n’avait pas inspiré un article publié par Politique étrangère sous la signature du général andré Beaufre et exposant les propositions françaises sur la réforme de l’Otan. Mais les journaux français émirent des doutes.16

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NEUTRALISING POLITICAL POKER PLAY WITH A CARDBOARD PISTOL :

DUTCH REACTIONS TO FRANCE’S WITHDRAWAL FROM NATO’S

INTEGRATED DEFENCE (1966)1

albert KerSten

a fundamental incapacity in understanding the decision of the French president charles De Gaulle for retreat from the integra-ted defense structure of the north atlantic treaty motivated the Dutch governement and especially its Minister for Foreign affairs, Joseph Luns, to their vehement and uncompromising reaction. the Dutch policy can be interpreted as a principal rejec-tion of the Gaullist foreign policy aims ; the goals have been pursued by De Gaulle since 1958 and had collided with the principles of Dutch postwar foreign policy on many occasions. the Hague had opposed the Gaullist attack on the european institutions embodied in the proposals for a european political union in accordance with De Gaulle’s design of an Europe des États, the so-called Fouchet proposals ; the unilateral Gaullist « no » to a British membership of the european community was a blow in the face of the Dutch who favored enlargement ; the Franco-German treaty of friendship had created the Paris-Bonn axis within the european community, a situation which at least spread the smell of a potential Franco-German directorate ; the Gaullist empty chair policy in the eec in June 1965 had demons-trated the French opposition to majority voting within the euro-pean community to which it was obliged by the treaties of rome ; the compromise of Luxemburg of January 1966 (the Six

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aLBert kersten

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agreed to disagree) had brought France back to the Brussels decisionmaking process without solving the core issue.

after all these obstructive and destructive acts in the field of european integration politics, the French President had now turned to natO. Herewith De Gaulle stepped upon the central fundament of Dutch foreign policy. after the « rape »2 of her neutrality by Hitler’s Germany in May 1940, the netherlands’ government in exile decided to discontinue the policy of non-involvement and neutrality and its innate and silent reliance on the British protec-tion of Dutch territory in europe, Southeast asia and the Western Hemisphere. through the experience of May 1940 the Dutch government was convinced that due to military-technological developments the defense of the territorial integrity by a single country was no longer feasible. In her view cooperation with other peaceloving states was the sole sound course in the prevention of aggression. as to its construction, the Dutch preferred a global system of regional security organisations and they regarded ame-rican and British participation and leadership in each regional alliance essential. especially in the north atlantic region, ameri-can participation was of utmost importance since in two world wars american intervention had been necessary for undoing Ger-man aggression. according to the Dutch Foreign Minister eelco n. van Kleffens, Washington should be « seduced » into a euro-pean engagement in order to discourage future German agression.3

american participation in whatever european security arrange-ment became the centerpiece of Dutch postwar security policy. Before entering the negotiations for the Western Union in February 1948, the Hague sounded out in Washington whether a Western european defence arrangement would be disadvantageous to a future american defence agreement with Western europe. In the case of an affirmative answer the Hague would not have partici-pated. to the Dutch, the treaty of Brussels of March 1948 was the upbeat to the north atlantic treaty of april 1949. Its very basis was that europe herself could not produce the required deter-rence to an expansionist and aggressive policy by one of its great powers, because Great Britain as a world power in decline could no longer guarantee a european balance of power. From the Dutch perspective, american domination of all Western european states in the north-atlantic region was preferable over the hegemony of one european great power, notably France, in a separate european security system. Since the beginning of 1948, the shift of inter-national power relations after World War II to a bipolar system

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ITALY AND THE FRENCH WITHDRAWAL FROM NATO IN 1966

Leopoldo nUtI

this paper looks at the Italian reaction to the French decision to withdraw from the integrated military structure of the atlantic alliance in March 1966. In order to place the decisions of the Italian government in the proper historical context, the first part of the essay traces a brief survey of the relationship between France and Italy after the return to power of General de Gaulle in 1958. the second portion of the essay then deals with the specific problems of 1966. the paper concludes that Italy, while seriously worried by the French initiative, decided not to take any conspicuous counteraction but rather to try to reinforce the cohe-sion and the strength of the alliance, as well as to improve its own status within it.

Italy faces de Gaulle’s initiatives, 1958-1963

Italy and de Gaulle’s return to power

the return to power of General de Gaulle in June of 1958 marked a significant watershed in the relations between France and Italy and was regarded as a pivotal event by most Italian

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LeopoLdo nUti

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politicians, who realized from the the start that the General’s future policies were likely to have a profound impact on Italy, both from the domestic and from the international point of view.

those politicians who had spent their exile years in France during the Fascist regime and who had some firsthand experience of French political life usually took a balanced position as they realized that only de Gaulle could prevent the algerian question from dragging France into a serious crisis and perhaps into a civil war. By and large, however, the comments of the Italian parties were influenced and shaped by their political outlook : for the Italian left the General was the incarnation of the triumph of conservative forces, and he loomed as a very threatening presence that jeopardized the existence of democracy in his country, and possibly across its borders as well. the sector of the political spectrum ranging from the moderate center to the extreme right, on the contrary, hailed de Gaulle’s return to power, but even among the moderates there were those who feared that his come-back meant at least a partial detour from the standard route of politics in a democracy.1

In international affairs de Gaulle’s comeback was perceived in rome as a worrisome event. In June 1958 the american embassy in rome noted how some of the more important officers of the Ministry of Foreign affairs were already concerned about the future of Franco-Italian relations, fearing in particular a pos-sible French attempt to set up a trilateral directorate within natO.2 this initial uneasiness was somewhat dispelled by the positive outcome of the meeting between de Gaulle and the Ita-lian Prime Minister Fanfani in early august 1958.3 the optimism, however, quickly disappeared when de Gaulle advanced his famous proposal for a tripartite directorate within the atlantic alliance on September 17, 1958.4 as the rumors about this French initiative began to circulate in rome even a francophile politician like the leader of the Social Democratic Party Giuseppe Saragat warned US ambassador David Zellerbach that the crea-tion of such a directorate would entail the end of natO,5 and when the early reports were confirmed the Italian government felt compelled to take a forceful reaction : Fanfani ordered the ambassadors in Washington, Bonn and London to meet directly with eisenhower, adenauer and MacMillan and express the strongest Italian reservations against the creation of a directorate, stressing that its acceptance would compel Italy to reassess its international position.6

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LE CANADA ET LA POLITIQUE FRANÇAISE ENVERS L’OTAN EN 1966

Paul LÉtOUrneaU

Dès la création de l’Otan en 1949, le canada et la France ont eu des visions très différentes de cette institution. alors que la France y a recherché une position prépondérante aux côtés des États-Unis et de la Grande-Bretagne, envisageant un leadership des trois Grands face aux autres signataires, le canada a plutôt favorisé la mise sur pied d’une communauté atlantique basée sur l’égalité des États membres et devant mener idéalement à une intégration économique et politique poussée de l’Otan.

Le retrait de la France du commandement intégré de l’Otan en 1966 constitue donc, pour le canada, un revers majeur dans sa poursuite d’un lien transatlantique dépassant la simple coopé-ration militaire. Bien entendu, la décision française ne remit aucu-nement en question la participation canadienne à l’alliance.1 cependant, le comportement de la France dans le cadre de l’Otan allait tout à fait à l’encontre des efforts déployés par le canada depuis 1947, dans le but d’éviter au sein de l’alliance une répé-tition du monopole décisionnel exercé par les grandes puissances pendant la Deuxième Guerre mondiale.

certaines revendications françaises, notamment la dénonciation de l’hégémonie grandissante des États-Unis au sein de l’alliance ainsi que la volonté de repenser le dialogue avec l’Union sovié-tique, rejoignaient cependant les positions canadiennes. Malgré ces points communs, les objectifs du canada et de la France étaient

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paUL LétoUrneaU

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motivés par des intérêts fondamentalement opposés. en effet, Ottawa recherchait surtout, de par son engagement dans les ques-tions de sécurité européenne, à garder une certaine distance face aux États-Unis et à éviter d’avoir à affronter seul son puissant voisin lors des discussions concernant la sécurité occidentale. La voie du multilatéralisme était naturellement favorisée par un pays dont la géographie risquait d’imposer un bilatéralisme trop étroit entre Washington et Ottawa. Les motivations françaises étaient évidemment d’un tout autre ordre et la « logique de rupture »,2 qui apparaîtra dans les politiques du président de Gaulle face à l’alliance, était surtout déterminée par la poursuite d’un rôle inter-national beaucoup plus significatif pour la France.

nous tenterons donc ici, après avoir présenté les réactions offi-cielles du canada à la décision française, de démontrer pourquoi Ottawa était opposé à ce geste en présentant ce qui, selon nous, demeure le principal facteur explicatif de l’engagement canadien dans l’Otan.

Les réactions canadiennes à la décision française

Le canada, comme la plupart des autres pays de l’alliance, fut choqué par la réception de l’aide-mémoire daté du 10 mars 1966 faisant part de l’intention de la France de retirer ses forces ter-restres et aériennes du commandement intégré de l’Otan et de reprendre le contrôle des installations militaires alliées sur son territoire. Les revendications émises par le président de Gaulle depuis son retour en 1958 étaient claires : il envisageait un rôle accru pour la France sur la scène internationale. Dans le cadre de l’Otan, la prédominance anglo-saxonne au niveau décisionnel n’était pas acceptable dans la mesure où de Gaulle recherchait un partage égal des responsabilités entre la France, la Grande-Bre-tagne et les États-Unis. cette volonté de changement avait été exprimée ouvertement au président eisenhower et au Premier ministre anglais Macmillan dans le mémorandum de septembre 1958, qui faisait mention d’une organisation tripartite des trois Grands et dont le rôle serait, entre autres, d’élaborer les stratégies d’emploi des armes nucléaires. Les réticences américaines et bri-tanniques ne firent qu’augmenter le mécontentement de la France, qui débuta en mars 1959 sa dissociation avec l’Otan en retirant

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LES SOVIÉTIQUES ET LA DÉCISION FRANÇAISE

Mikhail narInSKI

Pour les différentes étapes de la guerrre froide, les historiens russes appliquent, pour les années 1962-1985, la formule « ni guerre, ni paix ». L’UrSS et les États-Unis tâchaient d’éviter des confrontations directes dangereuses. Plutôt que d’élargir leurs sphères d’influence, déjà existantes, les deux pays cherchaient selon toute apparence à les consolider. Plus que par une volonté consciente, leurs profondes contradictions s’alimentaient de plus en plus de la logique même des événements,1 d’où une configu-ration complexe des oppositions des deux superpuissances, la rhé-torique de la guerre froide, rendant flou le système bipolaire des relations internationales et faisant naître les éléments d’une paix multipolaire.

Pour la politique étrangère soviétique du milieu des années soixante, il y avait deux problèmes d’importance primordiale. Le premier était lié à la guerre du Vietnam. Guidée par des considé-rations les plus diverses (idéologiques, géopolitiques, rivalité avec la direction chinoise), l’UrSS prenait de plus en plus le chemin de l’opposition aux États-Unis, tout en tâchant quand même de limiter l’influence de la guerre vietnamienne sur le développement général des relations soviéto-américaines. néanmoins, c’est « avec colère et indignation » que le XXIIIe congrès du Parti communiste de l’Union soviétique (29 mars-8 avril 1966) a condamné « une agression barbare des États-Unis d’Amérique contre le peuple

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MikHaïL narinski

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vietnamien frère ». Le congrès déclara : « En poursuivant leur ‘escalade’ d’une honteuse guerre contre le peuple vietnamien, les agresseurs se heurteront à un soutien toujours croissant au Viet-nam de la part de l’Union soviétique et d’autres amis et frères socialistes. »2

Le deuxième souci majeur de Moscou consistait à s’opposer à la croissance de l’influence de la république fédérale d’allemagne en europe, et en particulier à son désir d’accéder par n’importe quel moyen à l’arme nucléaire. en juillet 1966, à Bucarest, lors de la consultation au sommet du comité politique consultatif des pays-membres du Pacte de Varsovie, les participants ont souligné : « En prenant en considération le danger pour la cause de la paix en Europe que représentent les visées nucléaires de la RFA, les États doivent déployer leurs efforts afin d’exclure la possibilité de l’accès de la RFA à l’arme nucléaire sous n’importe quelle forme – que ce soit directement ou indirectement, par l’intermédiaire des groupes d’États, que ce soit dans leur disposition exclusive ou sous tout autre forme de participation à la disposition d’une telle arme. »3

c’est dans ce contexte international que s’inscrit la ligne géné-rale de l’Union soviétique sur le développement de ses relations avec la France. cette ligne visait à tenir compte et à mettre à profit le désir toujours croissant des dirigeants de la cinquième république d’appliquer un cours plus indépendant à leur politique internationale. en quête d’une plus grande indépendance et dans le cadre d’un anti-américanisme manifeste, la politique étrangère gaullienne accordait une attention croissante à la coopération avec l’UrSS et les pays socialistes. Marie-Pierre rey note à ce propos : « Ainsi, si à la fin de l’année 1964, l’URSS semblait plus favorable que la France au rapprochement bilatéral, l’année 1965 semble être celle d’une relation plus équilibrée. D’autre part, alors que le rapprochement n’a pas encore permis aux Soviétiques de concrétiser leurs objectifs, la diplomatie gaullienne a progressé : les relations bilatérales s’établissant à partir d’un consensus fran-çais avec les dirigeants des Démocraties populaires se multiplient. Fort de cet arrière-plan, le gouvernement français, consolidé par le succès électoral du général de Gaulle en décembre 1965, accen-tue encore l’orientation ‘pro-soviétique’ de sa diplomatie, dans le contexte d’une américanophobie grandissante. »4

À ce propos, on notera que les objectifs soviétiques concernant le rapprochement avec la France étaient exposés assez clairement dans divers documents. en juillet 1965, l’ambassade d’UrSS en

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La France et L’aLLIance atLantIQUe DePUIS 1969

LA FRANCE ET L’ALLIANCE ATLANTIQUE SOUS GEORGES POMPIDOU

ET VALÉRY GISCARD D’ESTAING

Pierre MeLandri

« Au fond, la difficulté tient à l’équilibre économique, aux questions monétaires, aux relations politiques qui doi-vent être celles d’une Alliance, non d’une subordination. J’entends par là une chose non pas impossible, mais déli-cate à définir. Cela explique le rôle de la France, plus considérable que lui donnerait sa puissance intrinsèque. »1

Georges Pompidou à richard nixon, le 13 décembre 1971 aux açores

essayer d’étudier l’évolution de l’attitude française à l’égard de l’Otan sous les présidences de Georges Pompidou et de Valéry Giscard d’estaing, c’est évidemment tenter de répondre à la ques-tion : dans quelle mesure y eut-il dans ces années plutôt change-ment ou plutôt continuité ? De toute évidence, c’est la continuité qui a dominé. non seulement, en 1981, la France n’a nullement rejoint l’armée intégrée, mais elle a multiplié les accords visant à appliquer et à décliner la relation libre mais étroite de coopération que le général de Gaulle avait choisi de lui substituer. Pourtant, dans le cadre général de cette continuité, des inflexions ont été par la force des choses apportées. elles tiennent sans doute au changement des hommes, mais aussi à l’évolution des capacités militaires de la France et, plus encore, au contexte général où se placent ses relations avec l’alliance.

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pierre MeLandri

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Lorsqu’en 1969, le général de Gaulle se retire, il laisse à ses successeurs un héritage à la fois facile et délicat à gérer. aisé à régir, il l’est du fait de l’harmonie que le chef de l’État a peu à peu établie entre les choix diplomatiques et stratégiques du pays. De 1966 à 1969, il a su progressivement adapter la participation française à l’Otan aux deux pôles qui délimitent sa conception des relations alliées : l’indépendance et la solidarité. De ce dip-tyque, l’indépendance est évidemment la priorité. elle reflète la conviction que, en dernière analyse, seule la France peut défendre ses intérêts et que le développement d’une force nucléaire straté-gique est l’ultime garantie de sa survie. Sans elle, note le chef de l’État dans un document du 24 janvier 1967, la France demeurera « vulnérable au point de risquer littéralement de disparaître si un État doté des armes voulues venait à la frapper de bombardements nucléaires, suivis, ou non, d’invasion, soit pour l’anéantir elle-même, soit pour détruire les forces que pourrait faire entrer chez elle un étranger belligérant, soit enfin pour soustraire préventi-vement à celui-ci les ressources dont elle dispose. »2

La même priorité exige, comme il a souvent été rappelé, qu’en aucun cas la France se retrouve automatiquement liée, à travers un système intégré, par des décisions qu’elle ne jugerait pas conforme à ses intérêts. en 1969, la France a ainsi réussi à se tailler une place singulière. celle-ci est parfaitement adaptée à ses capacités militaires : elle tient compte de la montée en puissance de la Bundeswehr. elle respecte ses impératifs stratégiques : la non-occupation d’un créneau lui permet d’intervenir, le cas échéant, en gardant à la manœuvre nationale de dissuasion son caractère prééminent. elle reflète son ambition politique : l’affir-mation de l’identité nationale face à la menace d’absorption dans le système atlantique.3

L’indépendance de notre politique de défense est ainsi claire-ment affirmée. Inversement, parler d’une politique de défense indépendante serait schématiser la réalité.4 La France reste au sein d’une alliance dont le Général n’a pas hésité à rappeler l’absolue nécessité tant que le « règne de la paix » ne sera pas « réellement assuré. »5

cette position, les deux premiers successeurs du Général ne cesseront de la marteler. « Nous voulons, a fait savoir très tôt Georges Pompidou aux américains, rester dans l’alliance dont nous savons que nous avons besoin... Restant des alliés des États-Unis, nous pouvons être libres de nos mouvements. »6 elle sera proclamée, sous Valéry Giscard d’estaing, dans la loi de program-

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FRANCE AND NATO UNDER MITTERRAND, 1981-1989

Samuel F. WeLLS, Jr.

to the pleasant surprise of conservatives in the United States, Great Britain, and Germany, the first Socialist President of the Fifth republic turned out to be both more Gaullist in his defense policies than his predecessor and more interested in maintaining a cooperative working relationship with the United States and its new president, ronald reagan, than had been expected. a large part of François Mitterrand’s reason for pursuing these policies was a new international situation in which the Soviet Union was challenging Western interests from central europe to africa and central america. the new president wanted to adopt a firmer policy toward Moscow, and this would increasingly put him on parallel policy lines with Washington. Other reasons came in domestic politics. For a government that intended to devote most of its energies to implementing a socialist program in economic and social affairs and which included four communist members in its first cabinet, it was useful to stand up to the russians and cooperate with the americans in foreign policy. It also proved to be sound politics to win as much support as possible within the defense community by pursuing traditional policies in military and alliance affairs.

In the early months of the government, a senior diplomat des-cribed the new policy as « putting relations with Moscow on a strict diet to cleanse the system of ambiguities and illusions. »

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saMUeL F. WeLLs, Jr

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Mitterrand took a strong stand against the Soviet deployment of SS-20 missiles, which had, he said, « upset the military equili-brium in Europe ». after meeting with West German chancellor Helmut Schmidt, he announced publicly for the first time in July 1981 French support for the installation of new US missiles in Western europe and urged that they be deployed without waiting for the results of arms control negotiations. He was sharply criti-cal of the Soviet invasion of afghanistan and would subsequently denounce the imposition of martial law in Poland and the shooting down of Korean air Flight 007 in September of 1983.1

With regard to natO, Mitterrand accepted the level of military cooperation that had developed in the 1970s and expanded it signi-ficantly. By 1985 French military relations with natO were more extensive and deeper than at any time since General de Gaulle took office in 1958. the president and his ministers and generals participated more fully in alliance meetings, and France hosted a meeting of the atlantic council in June 1983, the first in Paris since 1966. French military officers participated actively in plan-ning for command, operational, and logistical arrangements, and French and alliance forces took part in numerous joint maneuvers during the 1980s. On his first day in office, Mitterrand learned about the covert nuclear cooperation between France and the Uni-ted States, and he expanded this relationship while continuing to keep it secret. In pursuing a strong atlanticist policy, the Socialist president gave strong support to US policy on the deployment of intermediate-range nuclear forces (InF) and on a series of other policies designed to reassure the people and the leaders of the Federal republic of Germany.2

But this new relationship with natO did not change the Gaul-list independence of French defense and nuclear policies. Mit-terrand always insisted that he would not return to the alliance’s integrated military command nor compromise the independence of the French nuclear deterrent. On June 13, 1981, Mitterrand described to visiting King Khaled of Saudi arabia how he saw his government’s relations with the superpowers and the alliance : the recent political shift in France has not affected the rapport with Washington, which is always friendly and founded upon cooperation and the alliance (without there being any question of a return of France to the integrated military structure of natO). the two countries have identical conceptions about what concerns the necessary strategic equilibrium with the power of the USSr.3

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LA COOPÉRATION MILITAIRE ENTRE LA FRANCE ET SES ALLIÉS,

1966-1991 : ENTRE LE POIDS DE L’HÉRITAGE ET LES

DÉFIS DE L’APRÈS-GUERRE FROIDE

Diego a. rUIZ PaLMer

Introduction

trente ans après son retrait de la structure militaire intégrée de l’alliance, la France a entamé une redéfinition majeure de son rôle et de sa place dans l’Otan, en parallèle avec l’évolution de l’alliance elle-même. cette nécessaire redéfinition a une double dimension. D’une part, la dimension strictement militaire, c’est-à-dire les rapports entre les forces françaises et les autres forces alliées encadrées dans la structure militaire intégrée. La redéfini-tion dans ce domaine militaire doit prendre en compte l’héritage que constituent les nombreux accords de coopération opération-nelle qui ont régi la relation militaire France-Otan depuis le retrait français de l’intégration, y compris l’accord Lanxade-nau-mann-Shalikashvili de janvier 1993 relatif à l’emploi de l’euro-corps dans le cadre de l’alliance, sous le commandement opérationnel du commandant suprême allié en europe (Supreme Allied Commander Europe ou SaceUr).1 elle doit aussi intégrer à la fois l’expérience retirée de l’engagement de forces françaises au cours de ces cinq dernières années dans des opérations multi-nationales de coalition (Desert Storm, Provide Comfort et Southern Watch en Irak ; Restore Hope en Somalie ; Provide Promise dans l’ex-Yougoslavie) et interalliées (Sharp Guard, Deny Flight, Deli-

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dieGo a. rUiz paLMer

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berate Force et Joint Endeavour dans l’ex-Yougoslavie), et les travaux d’élaboration du concept de « Groupements de Forces interarmées multinationaux » (GFIM) au sein de l’alliance.2 c’est donc un dossier complexe.

D’autre part, la dimension politique et politico-militaire, qui concerne les modalités de la participation de la France aux pro-cessus décisionnels de l’alliance au siège de l’Otan à Bruxelles. cette redéfinition des rapports France-Otan dans la dimension politique et politico-militaire s’inspire de l’idée énoncée dans le Livre Blanc sur la Défense publié en février 1994, selon laquelle les principes posés en 1966 n’empêchent « (...) pas la France, comme elle le fait depuis 1991, de participer activement à la définition des grandes orientations concernant la rénovation de l’OTAN, y compris en ce qui concerne l’adaptation de l’organi-sation militaire aux nouvelles missions. Il est en conséquence logique d’assurer la participation de la France aux réunions des instances de décision de l’Organisation, dès lors que l’engagement des forces françaises et nos intérêts sont en cause (...) Cette posi-tion est conforme à notre volonté constante de renforcer, au sein de l’Alliance, le poids des enceintes multilatérales où chaque État s’exprime en pleine capacité. »3 Il est bien entendu que ces deux dimensions – militaire d’une part, politique et politico-militaire de l’autre – se chevauchent et se complètent.

Dans ce contexte en pleine mutation, le ministre français des affaires étrangères, Hervé de charette, a informé ses collègues le 5 décembre 1995, à l’occasion de la réunion ministérielle d’au-tomne du conseil de l’atlantique-nord, de la décision de la France de reprendre sa place au comité militaire, d’envoyer à l’avenir son ministre de la Défense à des réunions des ministres de la Défense de l’alliance, et de renforcer les relations entre l’état-major des armées à Paris et le Grand Quartier général des Puis-sances alliées en europe (Supreme Headquarters Allied Powers Europe ou SHaPe) à Mons, en Belgique.4

À bien des égards, l’histoire, complexe et en demi-teinte, de la relation militaire établie entre la France et l’Otan au fil des années après le retrait français de la structure militaire intégrée (en fait, une série de retraits successifs dont le point culminant sera 1966, comme cela sera évoqué ci-dessous) se confond avec le débat plus large, mais central dans l’histoire de l’alliance, sur le rôle de l’atome dans la défense commune, débat clos avec la fin de la guerre froide, du moins dans sa dimension plus immédiate relative à la défense de l’allemagne occidentale.5 Loin de se

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617

LA COOPÉRATION MILITAIRE DEPUIS 1969 :LA FRANCE, L’OTAN

ET LA QUESTION NUCLÉAIRE

Bruno tertraIS

On peut distinguer trois temps dans l’évolution des relations entre la France et l’Otan dans le domaine nucléaire : une période de tension initiale, puis l’ébauche d’une concertation dans un contexte politico-militaire nouveau, enfin la détente des années quatre-vingt marquée par un rapprochement stratégique et concep-tuel.

La tension initiale et la théorie du détonateur

Du point de vue de l’Otan, le problème essentiel qui résultait de la constitution de la force de frappe et du retrait de l’organi-sation intégrée était celui du risque d’ouverture précoce du feu nucléaire par la France, au risque d’entraîner l’alliance tout entière dans une guerre nucléaire.

cette préoccupation des alliés, exprimée dès les débuts de l’ad-ministration Kennedy par le secrétaire à la Défense Mcnamara, était, du point de vue américain, parfaitement légitime :

D’abord, il y avait bel et bien un décalage doctrinal entre la France et l’Otan de nature à faire craindre à l’alliance une ouverture intempestive du feu nucléaire par la France. au moment

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BrUno tertrais

618

même où « l’OTAN et les Américains envisageaient de renforcer leur dispositif classique pour lui permettre d’éviter un recours précoce aux armes nucléaires, la doctrine militaire française s’en-gageait dans la direction exactement opposée. »1

ensuite, les capacités limitées des forces nucléaires françaises ne les rendaient aptes qu’à l’exercice d’une frappe massive contre les villes adverses ; or, les États-Unis s’engageaient alors dans la direction opposée.

enfin et surtout, les États-Unis avaient d’autant plus de raisons de s’inquiéter que la France envisageait sa force de frappe comme un détonateur.2 Il s’agissait de contraindre les américains – et le cas échéant des européens réticents – à procéder à une riposte nucléaire rapide et massive afin d’empêcher tout conflit conven-tionnel prolongé sur le continent. certains aux États-Unis vou-laient bien convenir in petto que ce risque pouvait effectivement contribuer à la dissuasion – notamment en compliquant la plani-fication de l’adversaire – mais l’administration n’en demeurait pas moins animée par la préoccupation de ne pas voir l’amérique entraînée dans un conflit nucléaire contre son gré (ainsi que par la volonté d’en maîtriser le cours après le premier tir).

Le développement d’un armement nucléaire tactique national, qui s’inscrivait en partie dans cette logique, allait aviver les craintes de l’Otan. Pour la France, celui-ci résultait d’une triple considération :

– La nécessité de disposer, pour la bataille et la manœuvre de test, d’une puissance de feu que seule l’arme nucléaire pouvait donner aux forces françaises. De ce point de vue, la France sera confortée dans son choix lorsqu’elle aura constaté l’inapplicabilité de la clause des accords ailleret-Lemnitzer (22 août 1967) relative au soutien nucléaire que le SaceUr pourrait apporter au IIe ca « si la bataille devenait nucléaire ». comme l’a rapporté le géné-ral Valentin, les autorités de l’Otan avaient clairement fait connaître à Paris les difficultés d’ordre politique et organisationnel attachées à un tel soutien envers un allié désormais non intégré, même s’il disposait encore à l’époque de vecteurs nucléaires amé-ricains.3

– L’intérêt politique de disposer d’armes équivalentes à celles des autres puissances – y compris pour que, si l’emploi de ces armes devait se faire concomitamment avec les alliés, la France soit alors sur un pied d’égalité avec eux.4

– enfin, le besoin d’insérer la pratique de la solidarité en cas de conflit dans un cadre théorique cohérent avec la philosophie

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633

EN GUISE DE POSTFACE : Dominique Moïsi

À partir des actes préparatoires à ce colloque il est possible de tirer une double leçon. La première est l’extraordinaire actualité des textes de la fin des années 40, du début des années 50, voire des années 60. en fait tout se passe comme si rien n’avait changé, comme si en l’espace de cinquante ans on n’avait progressé ni dans le débat, ni dans la réflexion, ni dans sa traduction dans les faits. Les mêmes questions se posent, avec toujours la même absence de réponses décisives. Quelle est la menace principale ? se deman-dait-on au milieu des années 40. celle de l’adversaire à qui l’on doit faire face, mais quel adversaire, d’abord l’allemagne puis l’UrSS, ou l’allié principal dont on veut se dégager, les États-Unis ? Quelle doit-être la nature de la réponse, atlantique, euro-péenne, nationale ? Peut-on avoir les moyens d’une défense européenne sans les USa ? est-il légitime à terme de faire dépendre sa sécurité de la bonne volonté d’un autre ? Les débats de la fin des années 40, ceux du début des années 50, voire pour nous Français, le rapprochement avec la question de savoir si les accords de Maastricht connaîtront le sort de ceux de la ceD, résonnent à nos oreilles de manière presque trop familière. en relisant ces textes, nous ne ressortons pas extraordinairement optimistes, sur-tout alors que l’europe sort amoindrie de la crise de l’ex-Yougos-lavie. nous n’aurions donc rien appris au cours de ces cinquante dernières années ? La question principale qui se pose est la sui-vante : comment faire l’europe sans l’amérique, comment la faire avec elle ? nous n’avons pas trouvé de réponses à cette question fondamentale, tout au long de ces cinquante dernières années.

Le rapport à l’amérique et donc à l’Otan va constituer la clé de lecture, l’aune à partir de laquelle, la France va juger de son identité nationale, et va en quelque sorte se mesurer à elle-même. Plus que tout autre question le rapport de la France à l’alliance constitue le baromètre de cet exercice d’équilibrisme auquel va se livrer la France dans l’après Seconde Guerre mondiale, entre l’ef-fort d’adaptation et celui de rejet du système international. cet effort d’adaptation s’impose parce que la France passe du rang de

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635

CHRONOLOGIE

19494 avril signature à Washington du traité de l’atlantique nord.25 juillet ratification du traité par l’assemblée nationale.24 août entrée en vigueur du traité après dépôt des instruments de rati-

fication.17 septembre première session du conseil de l’atlantique nord (can).6 octobre signature par truman du Mutual Defense Assistance Act.

19509 mai annonce du plan Schuman (ceca).15-18 réunion du can à new-York ; acheson pose la question du

réarseptembre 1950 mement allemand.24 octobre annonce du plan Pleven (armée européenne. )19 décembre nomination du général eisenhower comme SaceUr.20 décembre déclaration des cinq membres du traité de Bruxelles transférant

à l’Otan les compétences militaires de l’Union occidentale.

195115 février ouverture à Paris de la conférence sur l’armée européenne.2 avril création du commandement allié en europe et installation du

SHaPe.20 septembre convention d’Ottawa sur le statut de l’Otan.

195218 février accession de la Grèce et de la turquie au traité de l’atlantique

nord.20-25 février réunion du can à Lisbonne.12 mars nomination de Lord Ismay comme secrétaire général de l’Otan.16 avril inauguration du siège provisoire de l’Otan au palais de chaillot.28 avril première réunion à Paris du can qui siège désormais de façon

permanente. Désignation du général ridgway pour succéder à eisenhower.

27 mai signature à Paris du traité instituant la communauté européenne de défense (ceD).

195310 juillet désignation du général Gruenther pour succéder à ridgway.

195421 juillet accords de Genève.30 août rejet de la ceD par l’assemblée nationale.28 septembre-3 octobre conférence de Londres.

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La France et L'otan

636

20-22 octobre conférence de Paris.22 octobre signature des accords de Paris. Le can approuve les résultats

des conférences de Londres et Paris et invite la rFa à adhérer au traité de Washington.

19555 mai 1955 accession de la rFa à l’Otan.14 mai création du Pacte de Varsovie.18-23 juillet première conférence des Parlementaires de l’Otan à Paris.

19564-5 mai session ministérielle du can Gaetano Martino, Halvard Lange

et Lester Pearson sont chargés d’un rapport sur la coopération non militaire au sein de l’alliance.

31 octobre intervention franco-britannique dans la zone du canal de Suez.4 novembre les troupes soviétiques écrasent l’insurrection hongroise.20 novembre le général Lauris norstad succède à Gruenther comme SaceUr.15-16 décembre approbation par le can du rapport des trois. Désignation de

Paul-Henri Spaak pour succéder à Lord Ismay.

195725 mars signature des traités de rome.4 octobre lancement du Spoutnik.16-19 décembre réunion du can à Paris au niveau des chefs de Gouvernement.

Proposition américaine de constitution de stocks nucléaires de l’Otan en europe.

195817 septembre mémorandum du général de Gaulle sur l’alliance atlantique.10 novembre ultimatum de Khrouchtchev sur Berlin.

19596 mars annonce par le représentant français au can du retrait de la flotte

française du commandement allié de Méditerranée.25 mai annonce par le général de Gaulle au président eisenhower de son

refus d’accepter le stockage en France d’armes nucléaires amé-ricaines.

15-22 décembre session ministérielle du can à Paris ; inauguration du nouveau siège de l’Otan porte Dauphine.

196013 février première explosion atomique française à reggane (Sahara).29-30 juillet rencontre entre le général de Gaulle et le chancelier adenauer à

rambouillet.16-18 décembre session ministérielle du can ; annonce par christian Herter du

projet américain de force multilatérale.

196121 avril Dirk Stikker succède à Spaak.13 août construction du mur de Berlin.13-15 session ministérielle du can ; désaccords franco-américains à décembre 1961 propos de Berlin.

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chronologie

637

196217 avril échec du plan Fouchet.4-6 mai session ministérielle du can à athènes ; discours de robert

Mcnamara sur la riposte graduée et contre les forces nucléaires tierces.

25 juillet nomination du général Lyman Lemnitzer comme SaceUr en remplacement du général norstad.

22 octobre annonce par John F. Kennedy du blocus de cuba.7 novembre le représentant français au can annonce la non-réaffectation à

l’Otan des deux divisions françaises rapatriées d’algérie.21 décembre accords de nassau.

196314 janvier conférence de presse du général de Gaulle ; rejet des accords

de nassau et de la candidature britannique au Marché com-mun.

22 janvier signature du traité de l’Élysée.Juin annonce par la France du retrait au 1er janvier 1964 de la flotte

française du commandement allié de l’atlantique.16 mai 1963 vote par le Bundestag de la ratification du traité de l’Élysée ;

adjonction d’un préambule diminuant la portée du traité.5 août signature à Moscou du traité sur l’interdiction partielle des essais

nucléaires (ntB).1er septembre entrée en vigueur de la Défense de l’avant de l’Otan le long

de la frontière interallemande.

19641er août Manlio Brosio succède à Stikker comme Secrétaire général.

196531 mai-2 juin réunion ministérielle du can, Mcnamara propose la création

d’un comité restreint sur la consultation nucléaire.5 juillet de Gaulle décide que la France ne paticipera pas au comité res-

treint.1er juillet début de la « chaise vide » française à la cee.14-16 décembre réunion ministérielle du can ; tension franco-américaine à pro-

pos des problèmes nucléaires.

196618 janvier fin de la « chaise vide » française.7 mars lettre de De Gaulle à Johnson sur le retrait de la France de l’or-

ganisation militaire intégrée.10 mars premier aide-mémoire du gouvernement français.29 mars second aide-mémoire du gouvernement français.20-30 juin visite du général de Gaulle en UrSS.1er juillet fin de l’affectation des forces françaises en allemagne aux com-

mandements de l’Otan.13 septembre décision du transfert du SHaPe à casteau, près de Mons.26 octobre décision du transfert du siège de l’Otan à Bruxelles.14 décembre décision de créer le Groupe des plans nucléaires (nPG).

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La France et L'otan

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196731 mars inauguration du SHaPe à casteau.6-7 avril première réunion du nPG à Washington.22 août « accords » ailleret-Lemnitzer.16 octobre inauguration du nouveau siège de l’Otan à Bruxelles.13-14 décembre réunion ministérielle du can ; adoption du rapport Harmel.

196824-25 juin réunion ministérielle du can à reykjavik et adoption d’une

déclaration sur des réductions mutuelles et équilibrées des forces.1er juillet signature du traité de non-prolifération (tnP).21 août intervention des forces du Pacte de Varsovie en tchécoslovaquie.13-14 novembre formation de l’eurogroupe.

196910-11 avril réunion ministérielle du can à Washington ; 20e anniversaire du

Pacte atlantique.Juillet le général andrew Goodpaster succède au général Lemnitzer

comme SaceUr.1-2 décembre sommet des Six à La Haye.

19705 mars entrée en vigueur du tnP.

19711er octobre Joseph Luns succède à Manlio Brosio comme secrétaire général.3 septembre accord quadripartite sur Berlin.

197226 mai signature à Moscou des accords SaLt et aBM.

197313 avril discours de Henry Kissinger sur l’année de l’europe.25 juin accord soviéto-américain sur la prévention de la guerre nucléaire.6-24 octobre guerre du Kippour.30 octobre ouverture des MBFr à Vienne.14-15 décembre sommet des neuf à copenhague.

197416-19 juin réunion ministérielle du can à Ottawa ; adoption de la déclara-

tion sur les relations tranatlantiques.26 juin réunion des chefs de gouvernement à Bruxelles ; signature de la

déclaration sur les relations transatlantiques.Juillet accords Valentin-Ferber.Décembre le général Haig nommé SaceUr en remplacement du général

Goodpaster.

19751er août signature de l’acte final d’Helsinki.

19762 février création du Groupe européen indépendant de programme (GeIP.)

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chronologie

639

197717-18 mai réunion ministérielle du comité des plans de défense (cPD) ;

décision de mise sur pied d’un programme de défense à long terme (LtDP).

28 octobre discours d’Helmut Schmidt à l’IISS à Londres.

197825 mai discours de Valéry Giscard d’estaing devant l’assemblée générale

extraordinaire des nations Unies sur le désarmement.

197911 avril création d’un Groupe spécial chargé d’étudier les questions de

limitation des armements nucléaires de théâtre.Juin le général Bernard rogers succède au général Haig comme

SaceUr.18 juin signature à Vienne du traité SaLt II.11-14 décembre réunions ministérielles du cPD et du can ; réunion spéciale des

ministres des affaires étrangères et de la défense ; « double décision » sur la modernisation et la maîtrise des armements nucléaires de théâtre.

27 décembre intervention soviétique en afghanistan.

198022 septembre guerre Iran-Irak.

198130 novembre début à Genève des négociations sur les FnI.2 décembre demande de l’espagne d’adhésion à l’Otan.12 décembre loi martiale en Pologne.

198230 juin ouverture de négociations Start à Genève.

1983 Discours de François Mitterrand au Bundestag.23 mars discours de ronald reagan sur l’initiative de défense stratégique

(IDS).9-10 juin réunion ministérielle du can à Paris, pour la première fois

depuis 1966.27 octobre réunion des ministres de la Défense de l’Otan à Montebello.23 novembre début du déploiement des FnI en europe (installation de missiles

de croisière sol-sol en Grande-Bretagne).

198426-27 octobre réunion à rome et déclaration des ministres de la Défense et des

affaires étrangères de l’Union de l’europe occidentale sur la relance de l’UeO.

198511 mars Mikhaïl Gorbatchev, secrétaire général du PcUS.12 mars ouverture des négociations soviéto-américaines sur les forces

nucléaires et les défenses spatiales à Genève (nSt).19-21 novembre sommet reagan-Gorbatchev à Genève.

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La France et L'otan

640

198612 mars référendum sur l’adhésion de l’espagne à l’Otan.11-12 octobre sommet reagan-Gorbatchev à reykjavik.21-22 octobre réunion du nPG à Gleneagles (Écosse).

198717 février ouverture à Vienne de discussions entre l’Otan et le pacte de

Varsovie sur un mandat de négociation sur les forces convention-nelles en europe de l’atlantique à l’Oural.

19 juin Helmut Kohl propose la création d’une brigade franco-allemande.1er juillet le général John Galvin remplace le général rogers comme

SaceUr.27 octobre adoption à La Haye par les ministres des affaires étrangères et

de la Défense des pays membres de l’UeO d’une plateforme sur les intérêts européens en matière de sécurité.

8 décembre signature à Washington du traité sur les FnI.

198822 janvier 25e anniversaire du traité de l’Élysée ; création d’un conseil de

défense et de sécurité franco-allemand et d’une brigade franco-allemande.

15 mai début du retrait des forces soviétiques d’afghanistan.1er juillet Manfred Wörner succède à Lord carrington comme secrétaire

général de l’Otan.14 novembre adhésion de l’espagne et du Portugal à l’UeO.7 décembre discours de Mikhaïl Gorbatchev sur le désarmement à l’assem-

blée générale des nations unies.

1989.2 février clôture des MBFr.9 mars ouverture des négociations Fce.29-30 mai sommet de l’Otan à Bruxelles adoption d’un concept global de

désarmement et de maîtrise des armements.31 mai visite de George Bush en rFa.23 octobre ouverture du mur de Berlin.

19905-6 juillet sommet de l’Otan à Londres.12 septembre traité de Moscou à « 2+4 » sur l’unification allemande.3 octobre unification allemande.19-21 novembre sommet de la cSce à Paris ; adoption de la charte de Paris pour

une nouvelle europe.

199126 juin intervention de l’armée yougoslave en Slovénie.7-8 novembre sommet de l’Otan à rome.9-10 décembre sommet de Maastricht.

199221-22 mai sommet franco-allemand à La rochelle ; création du corps franco-

allemand.

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chronologie

Juin réunion ministérielle du nac à Oslo ; l’Otan pourrait jouer un rôle en appui de la cSce.

Décembre réunion ministérielle du nac à Bruxelles ; l’Otan pourrait jouer un rôle en appui de l’OnU.

199321 janvier accord France-allemagne-Otan sur le rôle de l’eurocorps.avril participation française aux travaux du comité militaire de l’Otan

pour les questions de maintien de la paix.12 avril début de l’opération « Deny Flight » de l’Otan en Bosnie.

199410-11 janvier sommet de l’Otan à Bruxelles.9 février ultimatum de l’Otan à propos de Sarajevo.28 février 2 F 16 américains abattent quatre avions serbes bosniaques.Septembre le ministre français de la Défense participe à une réunion infor-

melle avec ses homologues de l’Otan à Séville.

1995Mai crise des otages en Bosnie.Juillet déploiement de la force de réaction rapide franco-britannique en

Bosnie.août offensive croate en Krajina et croato-musulmane en Bosnie.Septembre opération « Deliberate force ».Décembre l’IFOr est déployée en Bosnie ; fin de la mission de la FOr-

PrOnU.5 décembre la France annonce sa pleine participation au comité militaire de

l’Otan et à d’autres instances non intégrées de l’alliance.

19961er février discours du président Jacques chirac au congrès des États-Unis.

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655

acHeSOn (Dean), 46, 70, 72, 99, 230, 235, 252-253, 312, 404, 409, 413-414, 416-417, 464, 497.

aDenaUer (Konrad), 194, 202-205, 209-210, 212, 236-237, 268-269, 274, 276-280, 460, 470, 473.

aILLeret (général charles), 309, 314, 341-345, 348-351, 360-361, 521, 529, 576-577, 579-580, 584, 590, 618.

aLeXanDer (général Harold George), 66.

aLLIBert (colonel), 180.aLPHanD (Hervé), 229, 250, 290,

303, 337, 455.aMMan (amiral), 178, 180, 216.anDrÉ (Pierre), 108.anDrIeU (rené), 383.arOn (raymond), 60, 288, 325, 389,

544.attaLI (Jacques), 622, 625.attLee (clement), 28.aUrIOL (Vincent), 31, 34-36, 38,

40-42, 44-45, 47, 60, 68, 97.

BaILLY (général), 143.BaKer (James), VII.BaLL (George), 319, 333, 404, 409,

417, 435.BarILLOn (M.), 508.BartHÉLeMY (amiral), 575-576.BartLett (Dewey), 546.BatOr (Francis), 404, 409, 415, 417.BaUDet (Philippe), 511.BeaUFre (général andré), 288, 314,

428.BeaUMarcHaIS (Jacques de), 342.BeaUVaLLet (général), 431.Ben BarKa (el Mehdi), 336.Benn (tony), 260.BentIncK Van ScHOOHeten

(adolf W.-c.), 455, 458.

BÉrarD (armand), 98, 480.BeUVe-MÉrY (Hubert), 385.BeVIn (ernest), 28, 34, 58-59, 61-63,

94-98, 198, 248.BIDaULt (Georges), 27-31, 33-36, 40,

46, 57-59, 61, 63, 93-100, 104, 106, 111, 134, 140, 163, 194, 290, 425.

BILLOtte (général Pierre), 25, 27, 34-35, 38-42, 57-58, 63-64, 72, 77, 81, 93, 95.

BILLOUX (François), 388, 512.BIrrenBacH (Kurt), 277.BISSeLL (richard), 261.BLancarD (Jean), 531, 544.BLUM (Léon), 27-30, 34, 40, 56.BOeGner (Jean-Marc), 225.BOGOMOLOV (Mikhaïl), 25.BOHLen (avis), 198.BOHLen (charles), 23, 71, 198, 332-

338, 343, 382, 404, 406, 408-411.BOISSIeU (général alain de), 527,

581-582, 619.BOISSOnnat (Jean), 548.BOnneFOUS (Édouard), 386.BOnnet (Henri), 27, 36-37, 39,

70-71, 98-99, 134.BOOn (Han n.), 455, 463.BOUtanG (Pierre), 383.BOWIe (robert), 252-253, 285, 319.BraDLeY (général Omar), 39, 82, 84.BranDt (Willy), 533, 535.BrÉBISSOn (général de), 340.BreJneV (Leonid), 525, 547-548,

551.BrentanO (Heinrich von), 229.BrIanD (aristide), 72-73.BrOOK (sir norman), 250.BrOSIO (Manlio), 332-335, 337-338,

463, 465.BrOWn (George), 257, 442.BrUce (David K.), 137-138, 268,

271, 280

INDEX DES NOMS CITÉS DANS CE VOLUME

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656

La France et L'otan

BrZeZInSKI (Zbigniew), 549, 552.BUcHaLet (général), 232.BUnDY (Mc George), 259, 297, 313,

409, 412.BUrIn DeS rOZIerS (Étienne), 293,

337.BUrKe (amiral), 215.BUSH Jr (Georges W.), IX.BUSH Senior (Georges), VII.

caBanIer (amiral Georges), 178-179, 180, 364, 372.

cacHIn (Marcel), 107, 111.caFFerY (Jefferson), 98, 133-134.caMUS (albert), 60.carraUD (Pierre), 534.carter (Jimmy), 537-538, 545-552.catrOUX (Georges), 25.cHaLLe (général Maurice), 227.cHarette (Hervé de), 568.cHarLOt (Jean), 394.cHaSSIn (général), 78.cHaUVeL (Jean), 27, 36, 38-39, 45,

59, 94, 170, 250.cHÊneBenOIt (andré), 108.cHerrIÈreS (général), 88.cHeVÈneMent (Jean-Pierre), 624.cHeYSSOn (claude), 547.cHIrac (Jacques), VIII-X, 540, 564,

634.cHUrcHILL (sir Winston), 55, 197-

198, 200-201, 247, 250, 442.cHVeDOV (V.), 510.cLeVeLanD (Harlan), 414-417.cLIntOn (Bill), VIII.cLOSe (robert), 546.cOOPer (Duff), 28.cOrneaU (alain), 153.cOUVe de MUrVILLe (Maurice),

36, 121, 216, 225, 229, 255, 293, 299, 333, 335-338, 343, 345, 382, 397, 413, 455, 465-466, 509.

DaVID (Jean-Paul), 112, 325.Dean (sir Patrick), 256.DeBrÉ (Michel), 197, 216, 226, 233,

524, 528-529, 531.De GaSPerI (alcide), 194.DeLPecH (Jean-Laurent), 544.DeStreMaU (Bernard), 523.DILLOn (Douglas), 140, 290, 406.DOBrYnIne (anatoli), 412.

DOUGLaS-HOMe (alec), 255, 263.DOUIn (Jean-Philippe), 600.DUccI (roberto), 475.DULLeS (John Foster), 121-122, 201,

206, 209, 223, 226-227, 232, 270, 634.DUnn (James), 137-138, 175.DUVerGer (Maurice), 380, 391-392,

395-396.

eDen (anthony), 200-201, 204, 250-251, 439.

eISenHOWer (Dwight-David), 58, 68, 72, 85-86, 115, 117-118, 121-123, 132, 191, 193, 199-201, 224-225, 227-230, 233-234, 251-252, 261, 268, 293, 429, 470, 490, 570.

ÉLY (général), 27, 77, 79, 82-84, 87, 89, 189, 196, 222, 231-232.

entHOVen (alain), 311, 315, 317.erHarD (Ludwig), 281-282, 298-

299, 302, 412.erLer (Fritz), 276.

FanFanI (amintore), 426, 470, 472-474, 477, 479, 482.

FaUre (edgar), 195, 277.FaUre (Maurice), 382.FenOaLtea (M.), 477-478.FerBer (général), 530, 539, 542, 579,

581-583, 621.FLetcHer (Maria), 152.FOntaIne (andré), 387.FOrD (Gerald), V.FOrnarI (M.), 479, 481.FOUcHet (christian), 451, 453, 457.FOUrQUet (général), 521, 529, 543,

591.FrançOIS (claude), 153.FrançOIS-POncet (andré), 384-

385, 395.

GaILLarD (Félix), 142-143, 220-221, 231.

GaLLOIS (général Pierre), 314.GaLVIn (général), 586.GateS (thomas), 285.GaULLe (charles de), II-V, 17-18,

22-27, 54-57, 73, 93, 100, 104, 109-111, 122-123, 132, 137, 142-143, 177, 193, 195-196, 205, 208-210, 213, 215-216, 219-231, 233-238, 249-251, 254-255, 258-260, 262-

Page 79: la france et l'otan

657

index des noms

263, 267-271, 275-282, 287-288, 290, 292-294, 296, 298-299, 301-303, 307-309, 313-314, 318, 319, 326-327, 329, 331-343, 345-348, 350-353, 359, 364, 372, 379-388, 390-392, 394, 396-397, 403-418, 424-425, 427-430, 432-443, 451-461, 463-464, 466, 469-475, 477, 479-482, 484, 490-493, 500, 504, 506, 508-513, 515, 519-520, 522, 525, 527, 530, 542-543, 552-553, 560, 563-565, 569-572, 576, 581, 587, 596, 619, 625.

GaVIn (James), 234.GÉrarDOt (général), 78.GIraUD (andré), 564.GIScarD D’eStaInG (Valéry), V,

VI, 519-524, 537-539, 542-544, 547-552, 588, 621.

GOLDScHMIDt (Bertrand), 208, 232.GOLItSYn (anatoly), 262.GOODPaSter (général andrew),

529, 591.GOrBatcHeV (Mikhail), 563.GOre (David Ormsby), 252.GOre BOOtH (sir Paul), 257-258.GOUIn (Félix), 27, 93-94.GOUtarD (colonel), 77.GrOMYKO (andreï), 55, 505, 511.GrUentHer (général alfred), 71,

115, 118.GUILLaUMat (Pierre), 208-209, 216,

267.

HaIG (général), VI, 539-540, 542, 547, 582, 621.

HaMOn (Léo), 197.HarMeL (M.), IV, 352, 415, 545.HarteMann (général), 79.HaSSeL (Kai-Uw von), 280.HaZLett (« Swede »), 251.HeaLeY (Denis), 437-438, 442-443.HeatH (edward), 432, 439-440.HernU (charles), 562.Herter (christian), 233, 277, 286-

289.HeUrGOn (Marc), 383.HeWItt (amiral), 215-216.HIrScH (Étienne), 384.HItLer (adolf), 405, 452.HOUGHtOn (M.), 232.HOWarD (Michael), 546.

HULL (cordell), 408.HUMBert (général), 31-33, 77-78,

88, 170.HUnt (Kenneth), 593.HUSSeIn (Saddam), VII.

IaOUnDSeMS (I.), 509.ISenBerGH (Max), 232.ISMaY (lord Hastings), 82, 119, 161.IVacHOUtIne (P.), 507.

JacQUInOt (Louis), 33.JacQUOt (rené), 361.JeBB (sir Gladwyn), 62.JOBert (Michel), 522, 532-535, 544.JOHnSOn (Lyndon Baines), IV, 226,

252, 255-256, 263, 297-298, 301, 302, 320, 327, 336, 348, 382, 388, 404-406, 409-410, 412-413, 416-417, 429, 459, 479, 483-484, 513.

JOLIOt-cUrIe (Frédéric), 111.JOUKOV (Youri), 512.JUIn (général puis maréchal alphonse),

25, 27, 31, 35, 38, 40-42, 46, 66-68, 71, 77-78, 85-86, 133, 136, 170, 195-196.

JUPPÉ (alain), 597, 626.

KaMMHUBer (M.), 273.KaUFMann (William W.), 312.Kennan (George), 59-60.KenneDY (John Fitzgerald), III, V,

117, 123, 226, 229-230, 235, 251, 253-255, 259, 275, 278, 280, 289-294, 296-297, 313-314, 320, 333.

KHaLeD (Ibn abd al-aziz), 560.KHrOUcHtcHeV (nikita), 205, 425,

497.KIeLManSeeG (général), 351.KISSInGer (Henry), V, 55, 258, 337,

525-526, 532-535, 537, 541, 545-546.

KLeFFenS (eelco n. van), 452.KOBrIn (M.), 513.KOenIG (général Pierre), 36.KOHL (Helmut), VII, 562.KOSSYGUIne (alekseï), 506.KOUZnetSOV (Vassili), 510.KOVaLIOV (a.-G.), 511-512.KraVcHenKO (M.), 108-109.

LaBOULaYe (François de), 552.

Page 80: la france et l'otan

658

La France et L'otan

LacaZe (général Jeannou), 622.La GranVILLe (Jean de), 337-338,

341.LaLOY (Jean), 225.La MaLFa (Ugo), 472.LanGe (Halvard), 498.LanIeL (Joseph), 196, 201.LanXaDe (amiral Jacques), 567, 600.LaSSaLLe (colonel), 25.Lattre de taSSIGnY (général puis

maréchal Jean de), 26, 31, 35, 37-45, 67-68, 77, 79, 85.

LeBer (Georg), 535.LecanUet (Jean), 327, 380, 382-

384, 387, 390.LÉcHÈreS (général), 77, 79, 89, 138,

174, 180.LeDerMan (Paul), 153.Lee (amiral John M.), 291.LeMaY (général curtis), 311.LeMÉnaGer (r.), 154.LeMnItZer (général Lyman), 66,

319, 341, 344-345, 348-351, 360, 521, 529, 572, 576, 579-580, 584, 590, 618.

LeMOnnIer (amiral), 33.LePOtIer (amiral), 77.LeUSSe (Bruno de), 233, 340, 455.LIe (trygve), 95.LIMaGne (Pierre), 385, 389.LIPPMann (Walter), 60.LLOYD (Selwyn), 258, 262.LOVett (robert), 62, 64.LUcet (charles), 337-338.LUMUMBa (Patrice), 262.LUnS (Joseph), 229, 451, 454-457,

459-461, 464-466.

MacMILLan (Harold), 223-224, 226, 229-230, 235, 250-251, 253-255, 258-259, 268, 292, 428-430, 470, 490, 570.

MceLrOY (neill H.), 270.McGHee (George), 407.McLean (Donald), 62, 97.McnaMara (robert S.), 235, 278,

281, 291-292, 307-320, 347, 411, 413-415, 617.

MaISKY (Ivan), 54-55.MaKSIMIcHeV (I.), 508.ManrOe (Glenn), 509.MarcILHacY (Pierre), 387.

MarIe (andré), 104.MarOSeLLI (andré), 33.MarSHaLL (général George), 30, 34,

57-59, 61-64, 66-67, 70, 94-97.MartIn (Jacques), 232.MartIn (Paul), 491-492.MartInO (Gaetano), 498.MaSSIGLI (rené), 27, 36, 39, 56, 95,

511.MaSSIP (roger), 381, 385.MaSt (général), 89.MaUrIac (François), 384.MaUrIn (général François), 529.MaYer (rené), 191.MenDÈS France (Pierre), 120, 190,

192, 196, 201, 208-209.MercHant (Livingston), 296.MÉrIc (andré), 384.MÉrY (général Guy), VI, 539-544,

550, 582, 594, 621.MeSSMer (Pierre), 273-274, 294,

342, 347, 372.MIcHeLet (edmond), 27, 57, 93.MILLer (contre-amiral), 215.MILLOn (charles), IX.MItterranD (François), VI-VIII,

292, 295, 300, 327, 380, 382-383, 386-391, 559-565, 623-625.

MOcH (Jules), 103-104, 110-111, 197.MOLLet (Guy), 141, 220, 277, 327,

390.MOLOtOV (Viatcheslav), 28, 54-55.MOnnet (Jean), 38, 40-41, 175, 194,

199, 291, 404, 522.MOntaLaIS (Jacques de), 381.MOnteIL (andré), 384.MOnteL (andré), 180.MOntGOMerY (maréchal Bernard),

39, 41, 44, 65-68, 79, 364.MOrGan (général), 34, 58, 81, 95.MOrO (aldo), 476, 479, 484.MUSKIe (edmund), 545, 548.

naUMann (M.), 567, 600.nennI (Pietro), 476, 480-481, 484.nIKOLSKI (Sergueï), 508.nItZe (Paul), 276-277.nIXOn (richard), 519, 522, 526-527,

529, 533, 621-622.nOMY (amiral Henry), 214-215, 364.nOrStaD (général Lauris), 138, 143,

Page 81: la france et l'otan

659

index des noms

215, 232, 270, 275, 310, 319, 368-369, 572.

nUnn (Sam), 546, 621.

OrLanDI (M.), 483.OrtOna (egidio), 474.OWen (M.), 600.PaLeWSKI (Jean-Paul), 301.PaLLISer (Michael), 433.PaLMer (robert), 61.ParODI (alexandre), 137-138.PaStI (nino), 426, 483.PatOU (amiral), 364.PÉan (Pierre), 564.PearSOn (Lester B.), 493, 497-498,

500.PenKOVSKY (Oleg), 262.PeYreFItte (alain), 225, 250, 564.PFLIMLIn (Pierre), 143.PHILIPPOn (vice-amiral), 364.PIcaSSO (Pablo), 107.PIcKLeS (William), 440.PInaY (antoine), 175, 195, 277.PISar (Samuel), 542.PLeVen (rené), 72-73, 104, 175,

193-194, 196, 199, 203, 208, 389-390.

PODGOrnY (nikolaï), 506.POMPIDOU (Georges), V, 292-293,

299, 340, 388, 509, 519-523, 525-532, 535, 538-539, 544.

POntecOrVO (M.), 480.POWer (général thomas), 311.PreSLeY (elvis), 152.PUGet (général andré), 368-369, 571,

590.

QUeUILLe (Henri), 104-106, 110-112.

raDFOrD (amiral), 118, 231.raMaDIer (Paul), 30-33, 42, 44-45,

68, 72, 89, 94, 100.reaGan (ronald), VI, 559, 561.reBUFFeL (amiral), 179.reILLY (sir Patrick), 425, 429.renOU (Jean), 232.reVerS (général Georges), 31, 42,

77, 83, 94.rIBIÈre (M.), 41.rIcKOVer (amiral), 297.

rIDGWaY (général Matthew), 34, 58, 64, 81, 95, 118, 191, 193.

rIOU (alain), 149, 153.rOcHe (Émile), 385.rOGerS (général Bernard), 540, 542,

584, 586, 622.rOMaInS (Jules), 387.rOOSeVeLt (Franklin Delano), 55,

250, 408.rOSe (François de), 17, 232, 531, 534.rOStOW (Walt-W.), 319, 404, 413,

415.rOUre (rémy), 108.rUMSFeLD (Donald), 534.rUSK (Dean), 229, 237, 252, 255, 301,

319, 333, 337, 404-405, 407-409, 415, 417, 466, 482.

SaDate (anouar el), 549.SaInt-LaUrent (Louis), 95.SaInt-rOBert (Philippe de), 327.SanDrart (général von), 585.SanGnIer (Marc), 193.SaraGat (Giuseppe), 470, 479, 484.SarKOZI (nicolas), X.Sartre (Jean-Paul), 324.ScHeeL (Walter), 533.ScHerer (Marc), 108.ScHLeSInGer (James), 521.ScHMIDt (Helmut), 541, 543, 547-

552, 560.ScHneLL (Dr.), 583.ScHrÖDer (Gerhard), 282, 438.ScHUMan (robert), 38, 40, 42,

45-47, 57, 63-64, 67, 97, 99, 104-105, 137-138, 140, 194.

ScHUMann (Maurice), 105.ScHUrMann (c.-W.-a.), 464.ScOtt (sir robert), 259.SeMenOV (V.-S.), 512.SerVan-ScHreIBer (Jean-Jacques),

385-386, 390.SHaLIKaSHVILI (général), 567, 600.SIeGFrIeD (andré), 106.SIraUD (P.), 454-455.SMItH (Gérard), 291.SOaMeS (christopher), 442.SOKOLOVSKI (maréchal), 37.SOLana (Javier), IX.SOnnenFeLDt (Helmut), 537.SOOnG, 25.SOrenSen (theodore), 251-252.

Page 82: la france et l'otan

La France et L'otan

SPaaK (Paul-Henri), 96, 335, 436.SPeIDeL (Hans), 268.SPOFFOrD (M.), 199.StaercKe (andré de), 531.StaLIne, 23, 55, 112, 176, 201, 205-

206, 385, 456.SteHLIn (général), 189, 198.SteWart (Michael), 435, 442, 481.StIKKer (Dirk), 431.StIL (andré), 323-324.StraUSS (Franz-Josef), 267, 271,

273-274, 278, 460.

tarBÉ de SaInt-HarDOUIn (M.), 27.

tcHanG KaÏ-cHeK, 224.teItGen (Pierre-Henri), 39.tHatcHer (Margaret), 442, 552.tHÉnOZ (général), 530.tHOMSOn (David), 440.tHOreZ (Maurice), 107-108.tHYraUD de VOSJOLY (Pierre),

262.tILLOn (charles), 133.tIXIer-VIGnancOUr (Jean-Louis),

382, 387.

treMeLLOnI (M.), 480.trettner (Heinz), 282.trUMan (Harry S.), 21, 24, 30, 43,

62-63, 66, 70, 72, 172, 198-199.tWInInG (général), 118.tYLer (William r.), 405.

ULBrIcHt (Walter), 206.ULLMann (richard), 538.

VaLentIn (général François), 17, 529-530, 539, 542-543, 579, 581, 618, 621.

VaLIn (général Martial), 77.VaLLUY (général Jean), 189, 222.Vance (cyrus), 600.Van ZeeLanD (Paul), 194.VanDenBerG (arthur), 65.VeDeL (amiral), 341.VILLeFOSSe (Louis de), 324.VOrOnOV (a.), 513.

WaSHInGtOn (George), 69.WeDeMeYer (général albert), 39,

64, 72.WeStOLM (Gunnar), 510.