in vodka veritas n°15

24
1

Upload: in-vodka

Post on 15-Mar-2016

244 views

Category:

Documents


6 download

DESCRIPTION

In vodka 15 encore

TRANSCRIPT

Page 1: In Vodka Veritas n°15

1

Page 2: In Vodka Veritas n°15

2

EDITO3 Entre les murs

5 Et pendant ce temps là, à Sciences Po

12 Le Sciencespoly

14 La chronique du Dr F. Yion

15 Chronique de l’ambition ordinaire

16 Pratiques orales à risque

17 Ils ont Tocqueville comme modèle...

19 Et si je passais ma troisième année au Canada ?

20 Bibliothèque rouge - 6

21 In Situ

SOMMAIRE

LES MEMBRES DE LA REDACTIONDenis Carlier

Denis de réalité

Arnaud IssLa saucisse

Samuel Andre-BercoviciSid Bercovicious

Louis MoulinMoud du gland

Nedal JounaidiCorpophile

Boubker AlphonsevilleTiqqun du Spectacle

La crise c’est tellement drôle que Michel Foucault il a dit que ça le faisait rire. Mais les étudiants qui sont en Finance & Stratégie ne le connaissent pas alors ils croient qu’il faut pleurer. Et puis ils ne risquent pas de le connaître parce qu’il est mort.

Tenez, l’autre jour, j’en ai croisé un. Je me suis moqué de lui, je lui ai dit qu’il avait raté sa vie. Mais au lieu de m’ignorer comme ses congénères le font normalement, il s’est arrêté, une larme a coulé le long de sa joue blême, il s’est tourné vers moi et de son cœur a jailli cette supplique :

« Ô Dow Jones, ô désespoir, ô subprime [ ennemieQue ne puis-je rire plus longtemps des [dérivesdemesprofits,Moi qui ne suis qu’un simple pêcheur perdu [ en merSur le flot impétueux de cette tempête [ boursière ?Quel sot ? Quel fou ? Quel économiste y [ eût cru ?Notre soif fut si profonde que d’elle-même [ elle se butMon esprit torturé, sur ces steppes [ bleutées, dès lors erreDe l’espoir indistinct de pouvoir un jour [ toucher terreSeulement, loups de mers boursières, [ d’espoir il n’est plus,Et pleutre ou non, pour dernier geste je [ plonge vers l’inconnu. »

Il a alors joint le geste à la parole, a ouvert une fenêtre et s’est jeté dans le vide. Et même que le vide, il a eu mal.

Cette histoire vraie m’a alors inspiré, et puis je me suis tourné vers mes compagnons de la rédaction qui se trouvaient être là pour les besoins de l’histoire, et je leur dit : « Et si on parlait un peu de la crise immobilière à Sciences Po dans le prochain numéro d’In Vodka Veritas les amies et les amis ? ». Et ils ont rigolé, parce que Michel Foucault il rigolait quand on lui parlait de la crise.

Regrets éternels

Nous déplorons de n’avoir pu, dans le supplément « Le petit Coin-Coin illustré » du numéro 14, vous faire part de ce trésor de photo où Richie se frottait de manière suggestive contre un poteau devant le 27. Coin-Coin l’a en effet retirée de son magnifique Fesse-bouc avant que nous ne puissions l’enregistrer. En attendant, si nous devions la recevoir par hasard en fichier attaché à [email protected], nous la ferions partager avec plaisir.

Naïke DesquesnesDirectrice de la publication

Maud BorieGare au Borie

Béatrice CointeDou, la gadoue...

Viviane GraveyBurinée

Nathanel AmarLes fourberies de Youpin

Antoine CaulletChut, ça colle...

Victoire TuaillonDe Samothrace

Michèle Alliot-MarieMinistre des pitbulls autonomes

Ma petite entrepriseNe connaît pas la crise

Julien Palomo

Financier occulte

Benoît Hamon Bofis

Che Guevara

Boîte à strings

Page 3: In Vodka Veritas n°15

3

ENTRE LES MURS SCIENCES PO ET L’IMMOBILIER

Sciences Po, première DauphineLes aventures immobilières de l’administration ne sont bien sûr pas totalement nouvelle. Richie of the Quinces donneparexemplesursonblog(05/10)unepetiteleçond’histoireofficielleàproposdece pourrait appeler “l’épisode de Nanterre” (voir numéro 3). L’année préparatoire(AP)–premièresurlestroisdel’époque–devait,surdécisionétatiquede1967,êtredélocaliséeàNanterre.Maismai1968partde l’université, et la décision est annulée par le nouveau Premier ministre qui juge peu « opportun[e] » la proximité avecles gauchistes agitateurs, au plus grand bonheur du directeur Jacques Chapsal. Sciences Po se retrouve alors avec une promo sans bâtiments. Le gouvernement permet alors à l’école d’installer son APdans les anciens locaux de l’OTAN (ledépart de la France de l’organisation date de 1966), placeDauphine, au sein de cequidevienten1969Paris-IX.

Cette installation temporaire dure jusqu’en 1976, date où l’AP est déménagée ruede la Chaise. Mais celle-ci se fait suivant suivant un plan d’un genre fumeux, queRichie résume (05/10) en expliquant quel’IEPsous-loueleslieuxàEDF…entreprisequi les loue elle-même à la mairie de Paris. Pour revenir d’ailleurs à des préoccupations plus contemporaines, le bail arrive bientôt à expirationetlesnégociationsvontdoncbontrain pour ne pas se faire mettre à la porte.

Et pour compléter rapidement l’historique desprincipauxbâtimentsdeSciencesPo,signalons pour ceux qui ne le savent pasencorequ’àcôtédusiègehistoriquedu27rue Saint-Guillaume, acheté en 1879, le56 rue des Saints-Pères est réquisitionnéen1945parMongénéralpouraccueillirleslocauxdel’ENAetrevientàl’IEPdeParis

aprèsledéménagementen1978del’écoleruedel’Université.Le13ruedel’Universitéest quant à lui enfin récupéré par Coin-Coin suite au déménagement définitif del’ENA à Strasbourg, enmême temps quele117boulevardSaint-Germain (écoledejournalisme).

Chapelle, dis donc !Maisplutôtque lesbeauxsuccèsaffichésdans les plaquettes de promotion, intéressons-nous au plus bel échec de la direction de ces dernières années : celui en2002de l’acquisitiond’unepartiede lafrichede l’ancienhôpitalLaënnec,38000m² en plein VIIe. Malgré le soutien de la mairie de Paris et l’importance de l’enjeu au vu de la grande dispersion du campus urbain (un peu mieux maîtrisée depuis2003avecuneréductionde50à43sites-33àPariset10enprovince), l’institutafinalement du renoncer. Plus petit et pluscher, le site de la rue de l’Université est peu aprèsretenu,avantmêmeledépartdéfinitifdel’ENA.

Pour la petite histoire, le prochain échec planifiéestleprojetderéaménagementdelafricheparlaconstructionde120logementssociaux dont 50 pour les étudiants, unjardin public et une unité de gérontologie de 40 chambres. Ce projet est en pauseprolongéesuiteàunarrêt(juin08)dutribunaladministratif de Paris contre lequel la ville a déclaré vouloir faire appel. Il provoque en effet selon le tribunal une “atteinte à la visibilité des bâtiments historiques” et “une harmonisation insuffisante du projet avec les lieux avoisinants”. Et Coin-Coin de noter sur son blog : “Des HLM rue de Sèvres ? Des logements étudiants ? Voilà qui aurait effectivement défiguré le quartier”. Notons toutefois pour nuancer que le reste du projet consiste en logements privés,

barrant — sacrilège ! — par une grille digicodée l’accès à une chapelle classée, survivante de l’ancien hôpital. Et on sait à quel point on aime les chapelles, dans le VIIe !

Coin-Coin en mode berserkL’échec de Sciences Po avec Laënnec est utile, on va le voir, pour décrypter la stratégie de Descoings dans sa candidature au rachat de l’Ecole nationale des

ponts et chaussées (ENPC), dévoiléedébut octobre. Le ministère du budget cherchait en effet un acquéreur pour les 10000m²del’hôteldeFleury(dont7820“utiles”) situé rue des Saints-Pères enfacedelafacultédemédecine.Avecpasmoinsde40salles(dontunnombrenonprécisé d’amphis), l’IEP aurait bénéficiélà d’un généreux complément aux 70salles disponibles actuellement. Pipo avait d’ailleurs déjà loué par le passé des classes de l’ENPC pour palier le manque d’espace.

Le rachat était proposé pour une somme de 35M€,alorsquelebienenvalait60à70avant le début de la crise immobilière, sur labasededeuxarguments.Toutd’abord,les travauxétaientestimésentre20et30M€1, comprenant une mise aux normesde sécurité et l’aménagement d’accès handicapés. Autre argument de poids

1 Au passage, le bâtiment Rémondétait en moins bon état que prévu (non, neditespas«ilestmort,d’ailleurs»)etSciencesPoadécroché1,5M€derallongedelapartdel’Etatentantqu’ancienpropriétairedeslieux.

Sciences Po, pour utiliser une métaphore, c’est un peu comme un ours polaire coincé sur un iceberg et qui dérive vers les mers chaudes, désespéré de sentir sous ses pattes velues fondre la glace. En bref, la population augmente chaque année au grand dam des malthusiens syndicaleux, alors que les bâtiments refusent de leur côté de s’agrandir malgré les efforts désespérés de l’administration. L’orchestre du Titanic de la rue Saint-Guillaume ne désespère pas pour autant et a décidé de jouer jusqu’à la fin…

CENT ANS DE SOLITUDEEt pour quelques dollars de plus…Merci à lapéniche.net (03/10), pour sonanalyse « simple, claire et éclairante » du rachat de l’ENPC : « Si Sciences Po venait donc à emprunter la moitié de la somme nécessaire pour faire l’OPA sur le bâtiment en question, cela porterait à 3 miliards(sic)d’euros la charge financière annuelle, le montant total des bourses étant de 3.9 miliards (re-sic) d’euros en 2007. » Les milliards (avecdeux« l ») évoquéspourlebudgetdesboursesétantfinancésenpartie par les frais de scolarité (1,7 M€pour pour la partie directement issue des fraisdescolarité),ceux-cipeuventselonnotre habile calcul s’élever à plus de 5M€ par an et par personne, soit 25M€sur l’ensemble de la scolarité. L’auteure de l’article nous renvoie « pour mieux comprendre les calculs » à un post de « Florian » (par ailleurs fondateur delapéniche.net)surleforumplushaut,oùla mystérieuse abréviation de « million d’euros » en « M€ » semble avoir comme seméletrouble…

Propos volésDenis C. à Louis M. : « T’as une idée de combien ça se loue 10 000 m² dans le VIIe ? C’est pour un ami. »

Page 4: In Vodka Veritas n°15

4

selon l’administration, la mairie de Paris était censée soutenir Dédé pour que le bâtiment reste affecté à l’enseignement supérieur, avec comme élément dans la balance que c’est d’elle que dépendent la délivrance des permis de construire. Oron a bien pu voir avec le cas de l’ancien hôpital Laënnec à quel point ce soutien compte peu.

Dans un premier temps triomphaliste, Descoings s’est tout de même senti par la suite obligé de relativiser quelque peu sur son blog puisque les questions de basse procédure permettaient dès le début de prévoir que Sciences Po allait droit dans le mur. L’Etat devait en effet d’abord annuler un appel d’offre dans lequel da Quinces admettait n’avoir aucune chance, pour ensuite permettre un accord de gré à gré. Dédé-la-débrouille voulait par ce changement de procédure éviter les conditions très restrictives de l’offre : suspensionimpossibleetcautionde3M€.Mais cet échec n’était bien entendu que le prélude de la victoire finale…En effet iln’est pas nouveau pour Sciences Po de louerdesbâtiments,etavantdequalifiernotre directeur de « loser » comme le fait lapéniche.net (voir l’encadré “Centansde solitude”), il est utile de rappelerque notre Grand Timonier a très vite déclaré sa volonté de négocier avec le nouvel acquéreur de l’ENPC dans le cas où il s’agirait d’un fond d’investissementimmobilier. Cette hypothèse devenue réalité, il s’agit à présent d’attendre de voir l’issue des négociations éventuelles avantdecrachersurlecalvicieuxenchef.

NotonsparailleursqueDexia,aucœurdela tourmentefinancière,est labanquequiappuie Sciences Po dans ses aventures immobilières. Gageons que le rachat par la BNP de la branche française est un complot ourdi dans les couloirs de la FNSP…L’emprunt sur30ansde50M€contractépourle13ruedel’Université(coûttotal:60M€)coûtechaqueannéeenviron2M€.Unemprunt supplémentaire aurait donc porté lachargeà3à4M€/ansuivantlemontant.

Ce demi-échec, qui ressemble tout de même un peu à une stratégie désespérée, est la conséquence claire de l’échec — complet cette fois — du projet de Créteil (voir numéros 10 et 14), suite au refusde l’Etat. Sciences Po Banlieue n’aura pas lieu. Ce qui pose problème, alors que Canard Ier souhaite passer le nombre d’étudiants de 8 300 à 12 000.Oui, oui,c’est très sérieux. Vous n’arrivez pas àcirculer à l’intercours ? Il n’y a pas de place en cours ? Eh bien vous n’avez encore rien vu !

Privatisation, piège à Con-ConLa déprime doit pointer au 2e étage du 27, puisqu’aux nombreux déboiresimmobiliers (et budgétaires) de l’IEPs’ajoute l’échec du dossier dossier de candidature pour la grande loterie « Opération Campus ». Le principe consistait à retenir un certain nombre de sites (six au final), pour financer leurrénovation, « grâce » à la vente d’une partie du capital d’EDF. Un grand « Campus Universitaire Paris Centre » est donc sorti de nulle part, alliant Sciences Po, Paris V Descartes, Paris VII Diderot et

MAIRIE A TOUT PRIXCadastre exquisOn en a rêvé, lamairie de Paris l’a fait : le 27n’existeplus!Laprochainefoisquevousentrerezà Sciences Po, regardez d’abord à gauche des portes,oùvousverrezunnuméro27,puisàdroite,oùvousdécouvrirezunnuméro…29.Lamairiearappelé à à l’ordre l’administration sur le non respect delanumérotationofficielleducadastre.Aregardersurcadastre.gouv.fr,onvoitque lesnuméros23,25,27et29dépendentdubâtimentdeSciencesPo mais que les portes principales sont bien au niveaudun°29.Le27correspond…àl’entréedeservice. Ca ne plaira pas forcement à tout le monde, mais après tout, personne ne se plaint d’étudierdansuneannexedelaBNP.

Livresque des profondeursLa mairie semble décidément avoir une dent contre Sciences Po. CCertains y vont jusqu’à croire que la ville aimerait voir partir l’IEP de la capitale, ce qui est toutefois contradictoire avec le soutien obtenu dans la tentative de rachat de l’ENPC. En effet, c’est carrément le projet de rénovation del’annexedelabibliothèqueau27quiestremisencause,mêmes’iln’estofficiellementquereportéd’unanafindecommencerlestravauxpendantl’étéetlimiterlesnuisancessonores.Plusquel’élargissementdesplagesd’ouverturedelabibliothèque(nombreusesdanslepassé),la direction s’intéresse à la rénovation des salles de lecture et de collections ainsi qu’à un agrandissementaurez-de-chaussée.SciencesPoproposeeneffet1placedelecturepour10étudiants,loindelamoyennedesuniversitésdepaysindustrialisésquiestde1pour5.Letoutcoûteraitenviron4,7M€.Placésousl’égidedesArchitectesdesbâtimentsdeFrance,le27nepeutsubird’importantesmodifications,d’oùuncertainnombrededifficultés:sontentreautresimposéslerespectdesmenuiseriesexistanteset l’absencedepercementsupplémentaire…Difficiledoncderéagirquandlamairiefaitremarquerqu’ilmanqueuneissuedesecours!Leprojetsemblebiendansuneimpasse…

l’ObservatoiredeParis.Allianceduchouavec le poireau ? Non, car on avait bien là affaire à « un ensemble universitaire d’envergure mondiale, articulé autour d’un projet scientifique faisant dialoguer de manière innovante et dynamique les sciences humaines et sociales et les sciences expérimentales » (sic). Resteque le chou et le poireau ont perdu.

Perseverare diabolicumParmilesvieuxprojets,SciencesPonevoitprobablement pas d’un mauvais oeil l’idée de récupérer le 28 rue Saint-Guillaumeaprès départ de l’Institut de droit comparé (Paris-II)etl’Institutdeshautesétudessurl’Amériquelatine(Paris-III).Cetteoptionaémergédemanièreplusquefloueàlafindesannées1990,dansuneperspectivedetrès long terme, sûrement pour ne fâcher personne.Laquestiondurachatdu21rueSaint-Guillaume(directementàgauchedu27),évoquéeà lamêmepériode,sembleégalement relever du fantasme. Fichu pour lemoment,maisàlamoindreoccasion…

Et pour évoquer quand même de nouvelles perspectives d’échec, on peut citer la mise en vente par Bernard Tapie de son hôtel particulier de 2 700 m² rue desSaints-Pères (juste à droite de SciencesPo), pour la modique somme de 40M€,meubles compris (Le Moniteur, 12/09).Destravauxderemiseenétatseraienttrèsprobablement nécessaires. Mais Canard Ier ne s’est pour le moment pas prononcé sur le sujet.

Seuls deux projets ont été récemmentévoqués par Sciences Po. Le premier est appelé “ensemble Saint-Thomas-d’Aquin”,c’est-à-dire(àlalouche)25000m² qui semblent appartenir à l’armée sur le départ, entre la place Saint-Thomas d’Aquinet la rueSébastien-Bottin. Ilétaitfait référence à cet endroit dans une carte dufumeuxprojet“Paris centre”, avec celui de l’ENPC. On peut s’interroger sur lecoût d’un tel endroit, mais noter qu’il peut particulièrement intéresser Sciences Po carunecommunicationavecles6000m²du13ruedel’Universitéseraitpossibleviale mur du fond du jardin.

Toutefois, Descoings préfère parler ces temps-ci (30/10) de l’ancien “immeuble des douanes”, situé de l’autre côté de la rueSébastien-Bottin(enfacedurestaurantdubonvieuxJoëlRobuchon)etquel’Etata autorisé à la vente depuis 2005. Lebâtiment est un peu moins grand, sûrement prochedes20000m² (autreestimationàlalouche).

Misesenperspective avec les 43000m²utilisésparSciencesPoactuellement(dont21000possédés),cessurfacesnepeuventque pousser à dire “Whoah !” : “Whoah !”. Richie, même au fond du trou, est vraiment dugenreàvoir l’avenirengrand…Alors,tousensemble,ontapedanslesmains…Le million ! Le million !

Page 5: In Vodka Veritas n°15

5

Mais que diable allait-il faire dans ce gala ?Le BDE a été en mai dernier victime d’une tentative de braquage concernant l’argent dugagala.Deuxprétenduspolicierssesontprésentés juste avant la fermeture pour une enquête sur une affaire de viol (comme ilsemble courant dans les soirées BDE), onttenté de récupérer les clés du local puis ont agresséleresponsabledubureau(onespèrequ’ilaeumal)avantdepartiraveclacaisse(source:Le Parisien,30/05).

Lebutinestestiméà45,69€etunboutondemanchette, en raison des mauvaises ventes de lasoiréedugala,etchacunsaitdanslesmilieuxautorisés1 qu’il s’agit d’une minable arnaque à l’assurance. Heureusement, IVV veille !

La Loco motiveIl semble que la Loco a mystérieusement récupéré des adresses d’étudiants de Sciences Po qui se sont rendus dans une soirée BDE sur place, et qui reçoivent désormais des spams pour des soirées méga cools de la boîte. Ca leur apprendra.

1 Autorisésàcroiretoutcequ’onditici

ET PENDANT CE TEMPS LÀ, À SCIENCES PO...

BOURREAU DES ÉLÈVESLe BDE vient d’organiser son Waïïïï(comprendre“Week-end d’intégration”) pour les étudiantsenmaster et les internationaux. Cette année,c’est Bruxelles qui a eu l’honneur (?) de voirdébarquer les blaireaux des élèves, commele raconte lapéniche.net (04/11). Un compte-rendu, évidemment, dithyrambique, appuyé notammentparletémoignagedePhilippe(4A): “je ne peux rien reprocher au BDE”. C’est rigolo, parce qu’à IVV, on a eu un autre son de cloche... Utilisant à bon escient notre boîte mail, une jeune participante nous raconte son WEI à elle : comment son “budget bouffe” mensuelde120€aété“avalé goulument par le BDE” pour payer “2 nuits dans une auberge de jeunesse à 10 €” et “un aller-retour en car pour Bruxelles” qu’on peut facilement négocier

à 30€ individuellement (donc moins cher demanièrecollective).Acelas’ajoutent2entréesen boîte et un “barathon”, à chaque fois sans consommation. En calculant large, on peine à atteindre les90€.Toutça rienquepour “voir les escort-girls des BDEboys se trémousser” ? Non, pas juste pour ça ! Il s’agit aussi de financerle“champagne [qui] coul[e] à flots chez nos gentils organisateurs”, retranchés dans un carré VIP improvisé pendant le barathon avec une “muraille de tables”. Bel exemple de lavolonté d’intégration du Bastion des élites ! Notre témoinafiniparrepartirenstop,dégoûtéedeson “week-end d’intégration”. Mais laissons la conclusion à lapéniche.net : “Un week-end festif et réussi donc, qui a rempli sa mission et permis de démarrer l’année sur les chapeaux de roue...”

Bruits d’amphis“Bon écoutez c’est simple tout de même ! Une femme de ménage vient vous voir, elle vous propose de l’embaucher pour un euro. Un euro ! Un euro ! UN EU-RO ! Vous l’embauchez, vous ? Non ! Non ! Vou s vous dites : “Sa productivité doit être extrêmemement faible !”M.-M. Salort, maître de conf’ d’économie

Marie-Victoire Comet est le genre de personne dont on rêve quand on écrit dans IVV. Chargée des soirées au BDE, elle prend la peine d’écrire à la vue de tous(surFacebook,03-06/10)d’octobrelegenre de choses qu’en général on garde pour soi. Certains avaient été refoulés à la soiréedeseptembrecarmineurs(bienfaitpour leurgueule),maishélas, “il y a une chose contre laquelle on ne peut rien faire : la loi1”.Pourcelled’octobre(avec l’AS),

1 “Lesmineursentre16et18ansontle droit d’entrer en discothèque... mais n’ont droit de consommer que les alcools des pre-mieretdeuxièmegroupe,soitriendeplusfortque de la bière ou du vin. Et comme chacun le sait, in vodka veritas !

“les videurs ne ser[aient] pas aussi stricts”, promis ! OK, “aucune entrée sans carte d’identité n’[était] garantie”, mais le BDE “en [avait] parlé avec [son] intermédiaire au Globo”. Quoi de plus idiot qu’un aveu écrit d’une négociation pour contourner la loi?Ah,oui, inciter lesautresàemboîterle pas : “on compte sur vous pour trouver des astuces et passer la porte”, comme “vous vieillir et vous faire beaux (sic)”.Pour la soirée de novembre, Comet propose une meilleure technique, face à un responsable moins conciliant (04/11): “tout majeur de cette école a une carte d’identité et une carte Sciences Po et les deux sont valables”…combineàn’utiliserqu’en cas de force majeure

SOUVENIRS D’ÉGOTISMEDansuneétudedel’AERES(juillet08),onpeut lire que “la direction communique bien à l’attention de ses étudiants”, en particulier “par le blog du directeur, régulièrement commenté”.Mercidoncaux10personnesquilisentles34pompeuxbilletsquotidiensde Richie et commentent soit d’un “Vous comprenez vraiment rien, vous êtes pitoyable1”,soitd’un“Oh!Maisencoreuneidée brillantissime, monsieur le directeur !”. Et c’est donc sur ces avis que les décisions seprennent…

Parmi les très rares commentaires pas totalement idiots, citons la suggestion (07/10) de réduire les cours d’un quartd’heure pour dégager un créneau horaire supplémentaire, moyen de disposer

1 Pour les quelques initiés, “Titilleur”qui crache sur chaque post de Coin-Coin est aussi sur le forum de Sciences Po l’inénarrable “bob4”,anciennement“AntoineSanz”

sans frais de plus de salles de cours. Descoings déclare étudier la proposition. Reste dans cette hypothèse à savoir ce que deviendraient les 30 min de pausesupplémentaireainsidégagées.Onattendl’avis de Titilleur.

Richie aime écrire, et aime se faire lire. Donc il fait la promo de son blog à loisir :onaparexemplepuenrepérerunliensur launedu sitedePipo (actude juillet08), sur son Facebook (novembre 08),dans lanewsletterentreprises (mai07),àcôté du mot de présentation de Coin-Coin aux futursétudiants (MAJ :août08)…Aufinal, leQuinces boy se vante d’avoir eu enoctobre15622visiteursuniques.Coin-Coin, prochain client de notre “Chronique de l’ambition ordinaire” ?

Tu es ma came

Miroir, mon beau miroir...

Ca blog quelque part

Week-end de désintégration

Jeune et con

La connerie de RichieLacrymogène« […] avec toutes les équipes de Sciences Po nous essayons de faire, du mieux que nous pouvons, avec nos faiblesses et nos erreurs, mais aussi notre passion, nos réussites et nos résultats.»(05/10)Snif, c’est beau ! De quoi faire pleurer les pluskydoniaphobes…

Page 6: In Vodka Veritas n°15

6

DROITE DANS SES BOTTESEtre jeune et de droite — à part une cible à abattre — est-ce être révolutionnaire ou réactionnaire ? Les versions divergent. La campagne de rentrée de l’UNI, basée sur le slogan « Et si le mérite devenait à la mode ? » renvoie à la gauche sa « lourde responsabilité » en la matière. Voilà donc l’UNI ralliée à cette valeur progressiste de lutte contre le népotisme et les déterminismes sociaux. Les verra-t-on bientôt réclamer la fin du concoursd’entrée ? Pas encore ! Pour le moment, ils se contentent d’exiger lasuppression de tous les emploisuniversitairespouryfaireexploiterà la place les étudiants dans le besoin. Ce n’est pas pour rien que Marion Cannone

définit (Tribord, mai 08) l’UNI commeune « réaction à [la] subversion gauchiste ».

L’UMP dont dépend (presque officiellement)l’UNI défend étrangement le discours inverse. Aux Jeunespopulistes, on affirmeque « la jeunesse qui bouge a changé de camp » (voir numéro13).Quibouge,oui,maisdans quelle direction ? Si on ne les jugeait pas si ignorants des réalités, on en viendrait à avoir peur, à apprendre la tenue (04/10) d’undébat intitulé « Peut-on être jeune de droite et révolutionnaire ? ». La jeunesse qui se souvient

de la dernière révolution « de droite », dite « Révolution nationale », doit elle aussi avoir changé de camp.

A quand les mêmes avec Pétain, en vrai coton des colonies ?

RévisionsA Nouvelle donne, on aime à triturer laréalité. Peut-être une conséquence du délire communicationnel qui saisit les décérébrés qui ymilitent(voirbrève“Idées-cadeaux”).Dansletract de rentrée, on peut donc lire que l’UNEF est contre le concours d’entrée, ce qui est objectivementfaux1°)àmoinsqueSUDn’ensoituneexcroissance,2°)parcequeselonnosinformations l’UNEF a clairement suggeré l’an dernier à la direction d’adopter une posture malthusiennequantauxadmissions

A la lecture de cette brève, dans le localsyndical, un soldat de l’armée de l’UNEF sera immédiatementchargéd’identifierladitesource.

Nouvelledonnenousremerciesursonsite(12/10)d’avoir raillé son inanité dans notre guide de rentrée (numéro14).Noussommesbiensûrtouchésparcemessage,quisignifiequenousavonsététropmous. Heureusement, pour nous reprendre, notre droitierpréféréMatthieuCreux(numéros5,6,8,11et12)décidederefairedessiennes.Nousnesaurions être virulents dans nos propos envers notre ami, parce que nous l’aimons bien sûr, pas par une quelconque peur de représailles. Certes un rédacteur d’IVV a par le passé été menacé physiquement par ce monsieur. Certes, de vils détracteurs croient savoir qu’il ne serait pas étranger aux menacesde mort exprimées àl’encontre de différentes personnes(dontcertainsmembres d’IVV), sousla forme de visages méthodiquement rayés d’une croix sur desphotos(affichéesdanslelocalsyndical)avecenbonus des vols et destructions de matériel. Mais chacun sait que jamais il ne pourrait passer à l’acte : on n’a pas souvenir d’une seule promesse mise en pratique à Nouvelle donne...

Rien à voir avec un certain monsieur Vide, qui centre lui ses attaques sur l’UNEF. Nos camarades les sales jaunes ont il y a quelques semaines eu la mauvaise surprise de découvrir la disparition, non seulement de matériel de propagande mais aussi et surtout de tous les contrats signés

avecdesétudiantspourlabourseauxlivresdel’UNEF,dontilignoraitpeut-êtrequ’ilexistaitdesdoubles.Par un hasard tout à fait fortuit, la session de M. Vide - connu pour laisser des traces de ses méfaits - se trouvait allumée sur le PC du local lors de la constatation des faits.Autre hasard, de calendrier celui-ci, Matthieu

Creux(quin’adoncrienà voir avec monsieur Vide) a dans lamême période décidé unilatéralement que le local syndical devait désormais ressembler à un open space HSBC (et ne plus avoir dephotos de gens qu’il n’aime pas accrochées auxmurs).Endécideurnaturel, il a donc envoyé un mail d’insultes à une responsable de l’UNEF, doublé d’un autre à la direction -- Julien Palomo s’étant trouvé au passage lors de l’expression “imagée”

de la volonté purificatrice -- assurant queassurantquesiaprèsunultimatum(!)dedeuxsemaines le local n’était pas rangé, monsieur se chargerait de tout mettre dans la benne à ordure.

Commefaceàunpreneurd’otages(pourutiliserune métaphore de droite), Palomo et Prunieront choisi de jouer les négociateurs de crise et promis de voir avec la direction de l’immobilier pour déménager le local syndical vers un lieu plus appropriéen janvier2009.Aurait-onàNouvelledonne compris le concept de “rapport de force” ?

Pascalou Perrineau et Domi-Domi Rey-nié enquêteurs du CEVIPOUF cherch-ent des preuves dans le local syndical.

Action-réaction

La connerie de RichieOu pas«Sciences Po 2008 c’est une université sélective qui accueille et mène au succès les élites populaires.»(11/08)Richinoccio au sommet de sa forme !

Fatal flatteurLe commentaire du mois : «“Excellente initiative” dit : “C’est une excellente initiative.” » (17/08)Sans nul doute.

Cantate moi la chatteComment prend-on la tête du Centre Saint-Guillaume ? Réponse du principal intéressé, Alexandre Dallemagne (lapéniche.net,03/10):«j’ai passé mon année [à l’étranger] en Inde. L’occasion pour moi de découvrir un monde imprégné de spiritualité, et donc de réfléchir à mes racines, d’interroger les sources même de ma foi. L’Inde est toujours une sorte d’errance intérieure, j’en suis revenu serein. A mon retour, on m’a proposé de prendre en charge cette association. C’était pour moi une continuité, j’ai accepté cette tâche. » Tu m’étonnes que le CSG revendique « une ambiance du tonnerre»danssesréunionsdeprière…

Dallemagnequidéclareégalement :« […]notre WEI (week-end d’intégration) à nous, […]pour ne pas concurrencer le BDE, tombe le 8-9 novembre ». Les impies licencieuxdoivent s’en être trouvé rassurés !

Modem en la matièreParmi les innombrables messages reçus pendant la procédure de reconnaissance associative1, remercions les bisounours du Modem qui nous ont spammé en masse, avec un tutoiement de mauvais goût doublé d’une personnalisation par bot interposé (“Salut Charles-Henri”). Rappelons avecforce indignation (oh que oui !) que cetteviolation de la loi Informatique et libertés est puniede5ansdeprisonet300000eurosd’amende. Pas l’idéal pour commencer sa médiocre carrière politique de mou-du-gland/froide-du-clito.

1 IVV se vante de n’avoir envoyé de message qu’à ceux qui sont sur sa liste dediffusion.

Mort à Creux-dit

Page 7: In Vodka Veritas n°15

7

A l’occasion dutrès discret 50e anniversaire de la Constitution, RogerKaroutchi,chargé des relations avec le Parlement organisait le 28 septembreun concours d’éloquence. Rien à voir bien sûr avec sa volonté de s’imposer auxrégionales de

2010 -miseenavantdesapersonnedans lacommunicationetdans leprixfinal (dîneraveclui et un président de chambre), invitation desdroitiers de l’UMPGE, etc.

Les “festivités” étaient du genre cheap : un amphi surchaufféaudeuxièmesous-sold’uneannexe,le très chuintant Descoings en retard... qui avait oubliél’événement,uncocktailsansalcool(uneconstitutionsedoitd’êtresobre),etdescandidatsauxperformancesassezpitoyables.Quatredescinq compétiteurs venaient de Sciences Po, ce qui n’a rien arrangé. Chacun s’est attaché à défendre notre noble Constitution contre les

vils malandrins qui l’attaquent, avec comme passageobligédesimitationsdefindebanquet(Sarkozy,VGE,Chirac,etc.).

Dans la catégorie inexistants, le chevrotant premier candidat ne nous aura même pas laissé le temps de retenir son nom. Tout juste retiendra-t-on que sa volonté de montrer une grande connaissance en matière législative lui aura valu d’être repris vertement par Karoutchi.AlexandreVesperini, qui nous a dit être venu les mains dans les poches, a donné dans le one man show complet, et a même réussi à sortir quelques bonnes blagues, ce qui ne l’a pas empêché de tomber dans les comparaisons misogynes, comme la quasi intégralité des candidats. Dans la catégorie réactionnaires, donnons une mention spéciale à AlexandreSalichon, nostalgique de « notre empire », et défendant « une seule solution : aucun changement », avec tout de même « peut-être quelques aménagements ». Comme renforcerleSénatpourmieuxmaintenirl’ordre.AlexandreQuinton représentait l’archétype du droitier langue-de-bois encravaté. Sa largeur d’épaules ne se traduisait pas en largeur d’esprit. Il regrettera–grandmoment !–quele principe de précaution soit garanti quand la liberté d’entreprendre ne se transmet que par l’éducation des bien nés. Le seul à avoir nuancé de manière infime la magnificence

Non, Marlon Brando n’est pas mort.

de la Constitution aura été Bruno Cruchant. Son regret concernant le fait que « le lieu où se font les lois est celui où les discriminations sont les plus visibles » aura fait acquiescer bien des bourgeois blancs de la salle. Pour le reste, son plan « I) Une femme d’un certain âge, II) Une femme d’un âge certain » ne mérite pas spécialement de commentaire.

Ecouter des citations et blagues pourries de droitiers en milieu naturel devenait franchement ennuyeux,etvosenvoyésspéciauxpensaientmêmeàs’enfuirquandenfin le juryestvenurendre un verdict assez inattendu… PierreBellanger, monsieur Skyrock (« premier surle concours d’éloquence » ?)1, vient en effet expliquer pourquoi ce qu’il a vu et entendu,c’est de la merde : « Wikipédia c’est bien, la réflexion c’est mieux », « le lieu commun, ça tue », il faut respecter les femmes et éviter les blagues que « même dansL’AlmanachVermotils n’osent pas faire ! », etc. Le président du jury OlivierDuhamelexpliquequ’enconséquenceil n’y aura pas de classement, mais décerne lepremierprixàVesperini.Cruchant,desoncôté, aura droit pendant le cocktail des pique-assiettes à un débriefing gratos de Duhamel et un sermon paternaliste de Descoings.

1 Celui dont les journaux ont avecdélectationdétaillélaviesexuellecesdernièressemaines

Karoutchi dans la colle

Vousn’avezpaspumanquerl’affichedelacampagne de Nouvelle donne, placardéepartout(pasunmm²delibre)àlarentrée.Biensûr,elle est ridicule de vacuité, avec son énorme et éculé plagiat du logo de Milton Glaser. Bien sûr, le slogan « le syndicat des étudiants de Sciences Po Paris » est une resucée corporatiste de celui de l’UNEF, « le syndicat étudiant ». Mais le plus amusant est de lire ensuite dans le tract complémentaire que « Nouvelle donne veut faire de Sciences Po Paris un

véritable éco-campus agréable à vivre », reprenant à son compte les propositions d’Interzaide-Fac Verte, dont une significative…« réduction des photocopies ».

IVV, journal impliqué dans la vie étudiante, suggère également à sa corpo préférée d’exigerqueleschocosuissesretrouvent leur taille normale. Une idée simple et efficace

comme « chaque année [ils] en [ont] et en défend[ent] des dizaines ».

Idées-cadeaux Fra-ter-ni-té !A l’UMP on sait aider ses “amis dela majorité”. On appelle donc à voterNouveau centre une fois sa propre section reconnue. “Nous sommes solidaires au gouvernement, nous devons l’être à Sciences Po.“ Et réciproquement ?

Bruits d’amphis“Jésus n’était pas fondamentalement antisémite”H.S.,étudiant,exposésur

“De nos jours on trouve pas une paire de pompes correcte à moins d’un SMIC…”J. B., étudiant

Aprèsenquêtemenéeàgrandfracasnumériqueau sujet des très controversés “ziCours1”,(carSciencesPo. est bien connue pour être un havrededémocratiestatistique),ils’avèreque90%desétudiantsinterrogéssont“tout à fait” ou “plutôt d’accord” sur le fait que “l’enseignement en amphithéâtre oblige à se déplacer, ce qui permet de ne pas rester isolé”, que81%estiment que “l’enseignement en amphithéâtre permet de mieux connaître son enseignant”, et qu’enrevanche87%nesontpasfranchementd’accord pour dire que “l’enseignement en ligne permet des échanges simples avec le professeur“,mêmesi72%s’accordentàdire

1 Un groupe Facebook contre lee-learning sauf en complément du CM s’est même créé sur Facebook, ce à quoi Nouvelle donne a répondu en créant un contre-groupe pour le e-learning tout en conservant les cours. C’est la même chose ? Non, le verre est à moitié plein !

eCours n’ont apparemment pas provoqué de traumatismes et sembleraient être sans danger pour la santé des étudiants. Ceci dit, ces derniersdemeurentdans l’ensembled’affreuxréactionnaires qui n’ont rien compris à l’intérêt pédagogique de la révolution numérique, puisque les résultats de l’enquête tendent à montrer que, globalement, ils préfèrent avoir descoursenBoutmy(malgrél’inconfortnotoiredesbancsusés)quedessubstitutsyoutubiséspéniblementsynchronisésparlesmalheureuxtuteurs(quisevoientcontraintdepasser leurweek end en tête à tête avecMomindum®).Ce sont néanmoins de bons pipoteurs, puisque tant qu’à faire, ils sont majoritairement partisans du couplage des ressources. Notons enfinl’intéressant0%demembresduréseauTwitterparmi les sondés, qui prouve à qui en doutait encore que les étudiants de Sciences Po sont tout ce que vous voulez, mais ne sont pas des geeks.

que “l’enseignement en ligne permet de ne pas se déplacer”. On peut en déduire que, dansleur écrasante majorité, les étudiants de la Maison savent faire la différence entre réel et virtuel, et sont donc psychologiquement aptes à l’utilisation des ressources numériques. Les

Les cours par téléphonoscope (Robida)

J’eCours !

Page 8: In Vodka Veritas n°15

8

Bruits d’amphis“Ne dites jamais que vous ne savez pas ! C’est une faute très grave. Inventez quelque chose, évitez la question, mais ne laissez pas voir que vous ne savez pas.”[quelques cours plus tard]“ - Monsieur, pourquoi l’Amérique Latine s’appelle l’Amérique Latine?[regard consterné]- Eh bien enfin, parce qu’elle est peuplée de latins, évidemment !”Fabien Menant, maître de conf’ d’histoire

CHAR D’ASSOSRien ne va plus dans le petit monde policé des médias Sciences Corpo. C’est la guerre entre RSP et lapéniche.net. Le point déclencheur semble avoir été un article de copinage de rentrée (“Semaine de reconnaissance I/II: Sciences Po et la presse”), où une entrevue de 25minutesse trouve résumée en très peu de lignes1. Emilien C r e s p o , p r é s i d e n t de RSP, avait choisi de mener en bateau (en pénichemême, ahah !)l’intervieweur en racontant un certain nombre d’énormités, c o m m e l’histoire de la radiodepuis1908-“Avant ? On se passait les bandes sous le manteau !” - ou RSP comme “seul média de Sciences Po” - “Lapéniche.net ? Mais voyons, c’est un blog !”.ValentineBruneaud’Artois,auteurede l’article (maispasde l’interview)etparailleurs aux commandes de lapéniche.net, n’a visiblement pas apprécié. Réduite à la portion congrue, la présentation était savamment bourrée de sous-entendus - comme les meilleures brèves d’IVV. OnpouvaitparexemplelireentreleslignesqueRSP prétendait être reconnue association permanente à la prochaine commission

1 Pour IVV, nous en avions été prevenus, mais notre interview est probablement postérieure

paritaire, ce qui est certes un objectif pour la radio, mais s’inscrivait surtout dans la suite du récit imaginaire des 100 ans deRSP, censée vouloir regagner son aura d’antan.

RSP, ébranlée dans ses fondations par la violence des attaques subies (c’est-à-dire quelque chose comme deux ou troiscitations hors contexte) as e m b l e - t -il multiplié les appels, r é c l a m a n t suppress ion du passage ou un “droit de réponse” (comprendre“interview rien

que pour nous”2), estimant par ailleursque RSP ne relève pas de la “presse”. Du coup, exit toute référence à RSPdans l’article en question. Le monde aseptisé des médias pipo serait-il en train de lâcher le sacro-saint apolitisme de droite ? On aurait aimé pouvoir le dire,hélas nous croyons savoir qu’une version préliminairebienplusexplicitedel’articleincriminé a été corrigée à la dernière minute, parce que faut pas déconner quand même. La méchanceté gratuite reste donc l’apanage d’IVV !

2 Le droit de réponse est en général publié dans des conditions comparables à la publication originale, mais l’éditeur peut bien sûraccepterd’enpublierunbienpluslong(loidu29juillet1881,art.13)

De la friture en péniche

Des relations de franche camaraderie qui unis-sent lapeniche.net et RSP

Passe, impair et manque pour Sciences Pognon. Association morte-née, elleproposait de perdre son argent à l’Euromillion en “augmentant” ses chances de gagner de 1/14 millions à1/400000, toutendivisant lesgainspar36. Ouah ! Si chacun a le droit d’êtrecon, Julien Palomo, anticipant une décision plus élevée, a décidé que les aides de l’institut ne pouvaient aller à un telprojet.L’undesparieursmalchanceux(pléonasme)s’estalorsélevésurleforumde Sciences Po contre cette “victoire du gaucho-réformisme”(sic)etnotreélogedusinistrecenseurdanslederniernuméro(lezélécoupableenadepuispayéleprix).

La question du nom n’a pas non plus franchement aidé nos perdants puisque SciencesPoest très frileux sur cepoint.Ainsi, RSP ne s’appelle pas RadioSciences Po, juste RSP. Et Sciences Pot-de-vin a du mettre de l’eau dans…son vin et se renommer In Vino Veritas.

Tiens, à propos, savez-vous pourquoi cette association est la seule à pouvoir officiellement distribuer de l’alcool àSciences Po ? Tout simplement parce que le lobby du vin est un gros recruteur à la sortie de l’école, et qu’il ne s’agirait pas de saoulercesgenslà…

Notons par ailleurs que l’association Sciences Putes a elle-même du être renommée Bureau des élèves. Ce qui ne l’empêche pas non plus - loin de là - de bénéficier de passe-droits. Julien “Pas l’aumône” manque ainsi de cohérence en faisant dans sa newsletter la propagande du cercle de poker de Sciences Po, nouvellement rattaché au BDE (il faut être bien candide pourignorer qu’il sera question d’argent). Ilavait pourtant été signifié au cercle de ne pas se représenter lors de la procédure de reconnaissance cette année. Sciences Bédo sait maintenant ce qu’il lui reste à faire.

In nomine pas triste

Buzz l’éclairQuand à RSP on dispose d’une info, on fait monter le buzz avant de la diffuser, coco ! Le problème quand on est une Radio Sans Public, c’est que le buzz il monte pas, même avec des super partenaires qui tuent leur race. La radio promet donc depuis des mois les corrections du concours d’entrée pour “cet après-midi”, pendant que le forum dusitepartenairedecorrection(quimettaitlui l’info en une) comptait (le 12/10) 13messages,dont6(six!)del’admin.

Aproposdesuperpartenaires,RSPs’estfaite remettre à sa place quant à ses amis des casinos Partouche. Contre toute attente, lesjeuxd’argentsontcontradictoiresaveclamoraleSciencesPo(voirbrève“In nomine pas triste”).Parcontre,l’Arméedeterrequienvoie des gens se faire buter pour rien, ça va.Ouf,onaeupeur.

La croisière ça m’uselapeniche.net recrute (21/10). Mieux,en cette période de crise, le très courtois webzine propose “des postes à responsabilité”, histoire de gonflerencore un peu le nombre de grades dans l’association, comme à Nouvelle donne. Ainsi, vous pouvez devenir “responsable événements” ou “responsable sondages” et attention, “d’autres postes pour de toutes nouvelles responsabilités sont également disponibles mais nous en reparlerons le moment venu”. Génial non ?

Dans le même billet, on apprend que “LaPéniche est ouverte à toute candidature et article que vous lui proposeriez”. Manque de pot, il paraît que ce n’est pas toujours le cas. Aussi cette jeune rédactrice enherbe qui témoigne : “j’avais prévu de faire connaitre mon asso [cafebabel.com] grace à la peniche.net, dont la rédactrice pensait qu’un certain nombre d’étudiants pourraient être intéressés. Cependant, elle a trouvé l’article que je lui ai proposé trop engagé et ne fera que me citer”.Amusant, quandon constate sur lapéniche.net le nombre “d’articles” qui ne sont pourtant que des pubs déguisés. On peut évoquer aussile refus d’une interview du président de l’UNEF Jean-Baptiste Prévost, passée à la trappe car jugée pas assez consensuelle. “Alors,Jean-Baptiste,underniermotàdiresur ton projet ?”.

Page 9: In Vodka Veritas n°15

9

Scandale à Sud à propos des élections au CNESER, un organe de cogestion qui sied bien au syndicalisme de

GAUCHER CONTRARIANTcombat. Le syndicat est passé à quelques voix d’obtenir un siège ets’est fendu conjointement à la FSE d’uncommuniquéincendiaire(juillet08)contre les nombreuses fraudes qui ont - comme toujours - émaillé le scrutin. A Sciences Po, le cas est considérécomme symptomatique : il y a zéro vote Sud malgré un élu en conseil scientifique ! Une bataille juridique s’enclenche avec un recours devant le tribunal administratif de Paris. C’est décidé, Sud ne se laissera pas marcher sur les pieds par les sales bourgeois de l’UNEF qui ont truqué le vote ! Ouimais…l’élu-dontontairalenomparcequ’il écrit aussi dans IVV - s’est tout simplement laissé convaincre à force de discussions de voter pour l’ennemi ! La réputation de Sud Sciences Po comme section “à part” n’est plus à faire !

Cheminade au bord de crackerScène vécue devant Sciences Po. Un prophète de l’apocalypse, disciple de Jacques Cheminade, demande à de sales gauchistes qui se foutent de sa gueule, “quelle solution apporter au krach”. Réponse deSamuelA.:“le Subutex”.

Les VisiteursL’occupation durant quelques minutes du terrain de l’immense acteur Christian Clavier par des indépendantistes corses a eu des résonances médiatiques pendant des jours et desjours.Elleaaussipermisàceux-cid’obtenirce qu’ils ne pouvaient espérer autrement, une mutation du chef de la police en Corse, Dominique Rossi, « le con qui a merdé » (SarkozycitéparLe Canard enchaîné,03/09).En conséquence, la section Sud Sciences Po aurait selon nos infos un temps caressé l’idée d’occuper la cour de l’hôtel particulier de Bernard Tapie, rue des Saints-Pères.

On ne perd jamais le Sud

Bruits d’amphis

[exposésurlaCommunedeParis]- La répression de ces deux mois de Commune a été un véritable massacre… [...][reprised’exposé]- […] D’autre part, Mademoiselle… je sais bien que vous êtes passionnée, mais enfin tout de même, mesurez votre langage! Parler d’un “massacre” pour la fin de la Commune…- Ben euh… vous appelez ça comment, vous, 30 000 morts en une semaine ?”Fabien Menant, maître de conf’ d’histoireMessage entendu. Parlons désormais des “altercationsde1940”,des“rixesdelaGuerred’Espagne”…”

Comment dire du mal du BDA1 ? Notre surmoi bobo nous interdit toute critique vis-à-vis de cette institution qui nous nourrit l’esprit de sa manne artistique…Nouvelle preuve de l’excroissance boboqui sévit à Sciences Po, la nouvelle tournurequeprendleCinéClub.Autrefoisassociation permanente clandestine de Sciences Po, distincte du BDA, dont lebudgetnedépassaitpasles1500euros2. L’association secrète sévissait dans des salles inconnues de Sciences Po, il fallait être initié pour assister à desprojectionsoùlescinqmembres du Ciné Club composaient l’assistance. Mais centralisme démocratique aidant, toutes les associations allogènes se sont peu à peu regroupées… LeCiné Club rejoint donc la grandefamilleduBDAetmultiplie son budget par 46. Comment ça ? Unpeu d’histoire s’impose.

Le Ciné Club du BDAs’est doté d’un nouveau responsable, Juan Paulo Branco (dontle site www.juanbranco.es nous livre l’hagiographie), apparemment bienintroduit dans le milieu du cinéma puisqu’il

1 Surtout que c’est “sympa”, “génial”, “chouette”, “cool” “super”, et bien d’autres choses encore (http://www.facebook.com/video/video.php?v=36263970980&oid=2268311936)2 SelonlePVdesonauditionde2007devant la commission paritaire (soit avantson intégration dans le giron du BDA), lessubventions du Ciné Club étaient de 1 500euros par an de la part de Sciences Po.Aumoment de l’intégration du Ciné Club au sein duBDA, leur compteétait créditeurde3000euros.

parvient à inviter chaque semaine des chroniqueurs des Cahiers du Cinéma, des acteurs en vue, des producteurs, pour les séances du Ciné Club. Ce qui nous permettrale19novembrederegarderMa Mère de Christophe Honoré, en présence du réalisateur et de Louis Garrel. Ne boude pas ton plaisir, ami-e lecteur-trice, nous savons combien tu apprécies Louis Garrel, et que tu te rendras avec joie à la projection sur ton Vélib’, un panier des produits bios del’AMAPsouslebras…

Le Ciné Club, nouveau paradis du bobo ? Pire que cela, puisque la direction aurait décidé de transformer Sciences Po en salle de cinéma. Il fut un temps où SciencesPo louait des salles de cinéma pour qu’on puisseysuivredescoursdufaitdestravauxde restauration des bâtiments. Désormais, c’est le cinéma qui s’invite à Sciences Po. Youpi. Comme le bobo doit se sentir bien dans son environnement naturel, la direction aurait décidé sans raison valable de doter Boutmy du dernier équipement cinéma. Le coût de l’opération ? 70 000euros. Une somme pharamineuse pour Sciences Po, en quête perpétuelle d’argent, dont larechercheestsous-financéeet les

locauxdeplusenplusexigus.TransformerBoutmy en cinéma, quelle idée de génie, quand on connaît le légendaire confort de ses fauteuils, et surtout sa vitre géante qui laisse passer la lumière du jour une fois le store descendu. Bref, une opération complètement irrationnelle comme nous a habitué la vénérable direction, dont les motivations nous sont toujours obscures. Mais les voies du Seigneur sont impénétrables dit-on. Il se murmure même (mais nous ne pouvons relayer

cette rumeur !) que JuanPaulo Branco écrit le blog de Descoings, ce qui facilite les avantages en nature. Quoi qu’il en soit, on imagine la tronche que tirent les autres associations permanentes, comme l’AS qui a vuson budget diminuer drastiquement (en mêmetemps, vu la dette laissée par le dernier bureau, on comprend pourquoi), nepouvant même pas louer des salles de sport auxdires de leur direction.

Ah oui, une dernière remarque. Ou sesitue Sciences Po ? N’est-ce pas à Saint-Germain, dans ce quartier réputé pour la qualité de ses nombreux cinémas ?Oui, mais me diriez-vous, pourquoi sedéplacer (même en Vélib’) de quelquemètres pour passer des accords avec des cinémas de quartier, alors que nous pouvons dépenser sans compter l’argent que l’on n’a pas ? Quant au responsable du Ciné Club, vous pouvez retrouver ses critiques cinématographiques dans l’émission puant de fausse érudition germanopratine de RSP, “Plan Q”. Le Plan Q, on ne sait pas s’il l’a trouvé, mais le Plan Thune, sûrement.

Le Bobo des Arts : beaucoup de Bureau, peu d’Arts

Page 10: In Vodka Veritas n°15

10

SCIENCES PO INC.Aprèslesacheteursd’Orange(voirnuméro11), c’est désormais aux formateurs (desvendeurs) d’avoir le privilège de pouvoirrecevoir une formation top-cool. Celle-ci concernera (silicon.fr 02/10) 1 000personnesenvironenl’espacede3ans.

Le rapport avec la mission de l’IEP ? Eh bien c’est pour Sciences Po un moyen de faire de la thune, alors que le budget est plutôt ric-rac. Quelques petits milliers d’euros de bénéfice pour le dernier exercice surun budget de 110 M€, autant dire rien,et même une menace de pertes pour l’année suivante. Pour ne rien arranger, l’Etat a refusé deux propositions de plansquadriennaux de financement, et l’IEPqui veut augmenter sa dotation de 50%sur 5 ans (+ 6M€/an, sur la même baseque les engagements de Sarkozy pour les universités)fonctionnedoncpourlemomentsurlabaseduplan2003-2006(lerapportdel’AERESnotetoutdemêmesur lapériode2000-2007 - donc par rapport au plan

précédent - une augmentation de la dotation de 80,5% contre 52% pour la populationétudiante). On imagine les conséquences,ne serait-ce qu’au niveau de l’inflation. Ladotation étatique représente les deux tiersdubudget(71,8M€),leresteétantconstituédes ressources propres de l’établissement.

Acôtédes16,6M€(15%desrecettes)desfrais d’inscription, il reste donc le mécénat privé, les formations pour les entreprises (Orange pour le cas qui nous intéresse),la taxe d’apprentissage, les partenariats(13,2M€en tout, soit12%),ainsique lesprestations de service (études, contrats,etc.) (7,7 M€ pour 7%)1. Ce tiers restant est potentiellement soumis à d’importantes fluctuations, et nécessite un travail demaintiendelaconfiance–comprendreunefellation en règle.

1 Nondatés,ceschiffresdeconstruire.sciences-po.fr sont probablement ceux dubudget2008.

Qui a formé à Orange les marchands ?Le kangourou Richard adhère au PartiEn 2005,Sciences Po avait déjà formé des diplomates no rd -co réens “de haut niveau”, entre autre pour les initier à cette notion barbare d ’ é c o n o m i e de marché. Sciences Po diversifie son offre avecdes formations “aux cadres du Parti, aux militaires et aux officiels locaux” chinois dont60cetété,à6hparjourpréciseCanardIer (Aujourd’hui la Chine, 27/10). Pourjustifierd’enseignerlahainedesfoulesdeGustave Le Bon et la bonne propagande façon Edward Bernays, Descoings blablate mollement démocratie et Tibet. Mais le temps presse, “l’analyse démographique est simple : avec 1,6 milliards d’habitants, si on est pas en Chine maintenant, on n’y sera jamais”.Qu’ilserassure,officiellementonenestencoreà1,36milliard,ilresteunpeu de temps.

Technocrate qui se dilateBruno “Capitaine Guacamole” Patino, désigné à la tête du pôle presse Internet des Etats généraux de la presse, adécidé d’utiliser dans ce cadre sa suite d’étudiants de l’école de journalisme. 7heureuxélusontdoncreçuparmailuneoffre virile mais correcte à « réaliser des comptes-rendus filmés [des] débats ». Problème : Patino s’est manifestement fait taper sur les doigts par Nicolas Princen, monsieur police d’Internet à l’UMP et rapporteur des débats. Celui-ci aeneffetinterditl’accèsauxdiscussionsaux journalistes non participants, et nosconscrits s’en trouvent donc réduits à faire quelques pauvres interviews sur leur site tout pourri.

Nos grands reporters de lapéniche.net sontallés(15/10)rencontrer prendre en note un communiqué de Nadia Marik et Anne-Sophie Beauvais sur la questionde la campagne pour réclamer des dons auxanciensdeSciencesPo.Beauvais,chargée des relations avec les anciens et de la levée de fonds, arrive directement du cabinet de Valérie Pécresse, Marik étant elle-même ancienne secrétaire nationale de l’UMP à l’enseignement supérieur.

Le coeur de l’article du message de l’administration1 est que le programme de demandes de dons a été lancé de manière plutôt timorée en novembre 2007, par crainte des réactions desanciens. Quelques rares gauchistes de l’association desAnciens ont bien prisleur stylo Mont-Blanc pour protester contre l’initiative, mais la majorité s’est félicité de cette initiative anticonformiste permise par la loi du 31 octobre 2007(réduction fiscale des dons auxinstitutionsd’enseignementsupérieur).

Entre novembre 2007 et septembre2008, 1,47 M€ ont été ramassésauprès de 1 150 donateurs, soit unpeu moins de 1 300 € de moyenne.Peut-être notre grand social scientist Louis Chauvel préfèrerait-il regarder la médiane, puisqu’il y a quelques “grands donateurs” qui ont lâché comme ça entre 100000et150000€.L’und’eux,“qui ne rend pas encore son identité publique”

1 Paraphraser sans le direexplicitement les propos de la directions’apparente-t-il plus à du plagiat ou à de la malhonnêteté intellectuelle ? Seul le logiciel espion de Pipo peut répondre à la question

ambitionnemêmedelâcher600000€2. Yenaqu’ondufricàperdre.Avec66%de réduction dans la limite de 20% durevenu pour l’impôt du même nom et 75% pour l’ISF dans une limite de 50000€,monsieurapprocheaumoinsles3 M€ de revenu par an s’il s’agit pourlui d’en profiter aussi pour ses impôts (qui le saignent, bien entendu). Lepublic visé est aussi anglo-saxon, vuque la pratique est directement inspiré du modèle en vogue chez les têtes dites pensantes de l’enseignement supérieur. Les anciens présents en Grande-Bretagne ont ainsi eu droit à un gala en septembre dernier à Londres, etunautreestprévufin janvier2009àNew York, en présence de notre DSKfavori. Marik et Beauvais ont enfin dans l’espoirque25%desdonateursdonnentànouveaucetteannée.Onespèrepourellesquelegénéreuxdonateurinconnusoit dans le lot.

2 1000moisdevied’unélèveselonlacomptabilitéSciencesPo,soitplusde83ansd’études, soit 78 redoublements ! N’est pasNadia ? -Tout à fait Richard !

« Mais... Mais... Je vais avoir pied !? »

Les hommes donneurs

La connerie de RichieJaune et rougeDepuis sa chaise longue, au bord de la piscine : “Amis lecteurs, merci de m’avoir accompagné tout ce mois d’août. A demain pour de nouvelles aventures.” (31/08)AprèsOui-Oui,voiciCoin-Coin…

Bruits d’amphis“Les anarchistes du XIXe siècle voulaient la fin de l’Etat. Ils étaient des gens très intelligents mais n’avaient pas compris qu’ils devaient pour cela passer par le capitalisme et non par le socialisme !”Jean Baudoin, professeur de pensée politique

“Ecoutez, V. je veux bien qu’on soit de gauche, mais enfin tout de même, y a des limites à la caricature !”M.-M. Salort, maître de conférence d’économie

Page 11: In Vodka Veritas n°15

11

CHÔMAGE À TOUS LES ÉTAGESOnl'avaitévoqué(numéro12),lesmasters"droit économique" et "carrières judiciaires et juridiques" donnent l'équivalent d'unemaîtrise de droit, donc le droit de tenter le concours du barreau. Cette décision a été prise par arrêté interministériel (enseignement supérieur et justice, mars07), déclenchant un recours devant leconseild'Etatdelapartdedeuxassociationsdeprofsdedroit,conclul'étédernierparunarrêt favorable à Sciences Po. L'AERESs'estégalement inquiétée(rapportde juillet08)d'unrisquededispersiondelaformation,évoquant de manière sous-entendue cette nouvelle attribution. Mais Descoings a en réponse perfidement pointé sur son blog

(29/07) le fait que "le président du comité d'évaluation […]est professeur agrégé des facultés de droit", avant d'exulter quelquesjours plus tard (08/08) : "Les élèves de Sciences Po sont de vrais juristes, si l'on en croit la Haute Assemblée[leconseild'Etat]".

Et un commentateur du blog de rapporter une anecdote qui a sa saveur : "Résultat d'une demande d'équivalence en droit à Assas pour un étudiant qui a fini son M1 de droit éco à Sciences Po avec des notes honorables : 'nousavonsleplaisirdevousautoriseràvousinscrireenL2'…Donc pour eux, 4 ans de Sciences Po = une première année de fac de droit !"

Le barreau de Richard De quoi je me maile ?Le rapport de l’AERES vante sans réserve“l’investissement de l’établissement dans la diffusion de l’information pédagogique et administrative auprès des étudiants”. Les étudiants de M1 des masters Finance etstratégie, Gestion des ressources humaines et Marketing et études apprécieront l’ironie, eux à qui Jean-Baptiste Nicolas a envoyéunmail3semainesavantlarentréepourlesinformer de la création d’un tronc commun auxtroisbranches.

Rien ne presse“On ne peut pas supprimer la filière presse écrite quand même !” a-t-on entendu récemment dans les couloirs de l’école de journalisme. C’est pourtant en bundle avec la radio que la presse écrite a été proposée auxélèvesdecinquièmeannéecetterentrée.Deuxétudiantsseulementyavaientcandidatésur35aspirantsjournalistes.Ilfautdirequ’àrépéter à longueur de temps que la presse écrite est morte, on finit par l’enterrer pourde bon. C’est ce qu’on appelle un discours performatif.

De 99F au D100Jean-Michel Carlo, à la tête de l’école de communication prévient (lapéniche,23/05) : pour devenir un glandeurcocaïnomane begbeddique, il faut « faire preuve d’une sensibilité créative », « démontrer des qualités de leader[…]et aussi d’entrepreneur ».

Desinformationsàretenirpourcréersaficheà Dungeons & Sciences Po :– « Je bénéficie de 2D10+8 en capacitéd’entreprenariat, je tente donc la reprise de cette agencedepub.Jelanceledé…20!Génial!–Attends,tuoubliesquel’échecdeladernièrecampagne t’as mis un malus de 10 pointssur ta capacité leadership…Tenteun jetdesauvegarde sur ta créativité… Ah ! Echeccritique…Unretourd’acidetefaitdansernusur le bureau de ton contact-client. Ton patron te propose une toute nouvelle perspective de carrière.Tuesviréengros,désolé…»

Amusante méprise à PipoAlors que l’association PAVéS lance sonAMAP (Association pour le maintien d’uneagriculture paysanne) à Sciences Po(informationssurpaves.scpo.free.fr), l’AMAP(Association des élèves du master affairespubliques)proteste:“Non,nousnesommespas tous des légumes !”

Descoings entend suivre l’une des recommandationsdel’étudedel’AERES,concernant le cycle doctoral. On savaitdéjà que ce n’était pas facile d’y entrer, il est également dur d’en sortir, à en croireletauxd’abandonsetladuréedesthèses.Lerapportdonnelechiffrede500doctorantspour60soutenances.

Sciences Po annonce donc en réponse resserrer l’encadrement des thésards par leur directeur, mais aussi et surtout réduire le nombre d’admission à l’école doctorale en échange d’unmeilleurfinancement individuel.Moinsdedoctorants, certes, mais des thèses “de haute qualité”, car Coin-Coin l’a annoncé, la recherche est et restera l’une de ses principales priorités.

Descoings : l’antithèse

Novices et vertusUne information de première importancedansMonaco-Matin(26/08),une habitante de La Turbie entre à Sciences Po. Elle regrette de n’avoir pu emmener son clavecin. Heureusement, à l’autre bout de la France, à Creil, apprend-on dans Le Parisien - L’OiseMatin (01/09), un lycéen a été admisà Sciences Po. Mieux, “sans passer pour utopiste, [il] aimerai[t] beaucoup [s]’investir pour essayer d’améliorer quelque chose dans la vie des gens”. Qu’il nous contacte, on lui transmettra les coordonnées pour aider au déménagement.

Au râle des mourantsComme chacun le sait, dès 2009 leconcoursd’entréeàbac+0comprendraune épreuve orale. Mais il convient de préciser que, selon le voeux deDescoings, l’épreuve orale qui est déjà

la base de la procédure CEP s’étendra non seulement au concours “normal”, mais aussi à la procédure “mention très bien”. Et contrairement à ce que la rumeur prétend, la prestation orale consisteenunexposé.

Pendant ce temps à l’ENA : les technocrates déclassésUne réforme de l’ENA en coursd’élaboration vise à supprimer le classement de sortie qui permet en théorie de choisir son poste dans la haute fonction publique. La perversion de ce système est bien connue puisqu’il force à choisir son poste non en fonction de son intérêt mais par conformisme social en fonction de son seul positionnement dans le classement, dans un reste bâtard de logique aristocratique. Reste à voir ce quidoitêtreinstauréàlaplace…

La connerie de RichieVa te faire amputer !« Il est élève à Sciences Po, il est amputé de l’avant[-]bras gaucheil est médaille d’or de saut en longueur dans les jeux Paralympiques de Pékin [...] mille bravos émus.»(11/09)En terme de formulations foireuses, on a connu Coin-Coin plus en forme, mais ne boudonspasnotreplaisir…

Page 12: In Vodka Veritas n°15

12

LE SCIENCESPOLY Encore en train de lire IVV pendant un cours aussi magistral que soporifique ? Heureusement, nous avons pensé à toi ! Mieux que le Sudoku de 20 Minutes, plus fort que les mots fléchés de Métro, voici le SciencesPoly !

Bon, c’est vrai qu’il faut un peu de matériel pour jouer, l’idéal étant un jeu complet de Monopoly. Au moins pour les billets. Quoique si vous êtes de la haute, vous pouvez jouer avec de vrais billets.

Pour le reste, il suffit de deux dés : pour avancer bien sûr mais aussi pour les cases “Vie étudiante” et “Opportunité de carrière”. Quand vous tombez sur l’une de ces deux cases, lancez les deux dés, additionnez et reportez vous aux instructions.

Pour vous éviter de vous trimballer les cartes de propriété, on a tout résumé ici. En tout petit, d’accord, mais bon. Pour les hôtels, les maisons et les pions, vous vous démerdez. Les règles sont les mêmes qu’au Monopoly. Enjoy !

LES PROPRIÉTÉSLire comme suit : Nom : Loyer terrain nu / une maison / deux maisons / trois maisons / quatre maisons / un hôtel - Valeur de l’hypothèque

Secrétariat des langues : 200€ / 1.000€ / 3.000€ / 9.000€ / 16.000€ / 25.000€ - 3.000€

Laboratoire des langues : 400€ / 2.000€ / 6.000€ / 18.000€ / 32.000€ / 45.000€ - 3.000€

Ascenseurs du 56 : 600€ / 3.000€ / 9.000€ / 27.000€ / 40.000€ / 55.000€ - 5.000€

Toilettes du 56 : 600€ / 3.000€ / 9.000€ / 27.000€ / 40.000€ / 55.000€ - 5.000€

Ex caféteria fumeurs : 800€ / 4.000€ / 10.000€ / 30.000€ / 45.000€ / 60.000€ - 6.000€

Bureau des élèves : 1.000€ / 5.000€ / 15.000€ / 45.000€ / 62.500€ / 75.000€ - 7.000€

Association sportive : 1.000€ / 5.000€ / 15.000€ / 45.000€ / 62.500€ / 75.000€ - 7.000€

Bureau des arts : 1.200€ / 6.000€ / 18.000€ / 50.000€ / 70.000€ / 90.000€ - 8.000€

VIE ETUDIANTE

2 - Tu entres en première année. Achète la bibliographie complète d’Olivier Duhamel. Donne lui 4 .000 €

3 - Pour entretenir ta forme, tu décides de t’inscrire en pétanque. Paye 1.000 € à l’AS

4 - Tu te prends de passion pour le post-sino-bobo-éthico-réalisme théâtral. Ton abonnement au Bureau des arts te coûte 3.000 €

5 - Tu sors avec un(e) BDE-trendy pipole. Dépense 10.000 € en shopping et restau.

6 - Tu craques pour une caisse entière de chocosuisses. Paye 2.000 € au CROUS

7 - Trop saoûl, tu as égaré ton tout nouvel iPhone durant le week-end d’inté’ du BDE. Débourse 7.000 € pour en racheter un autre.

8 - Tu renverses une bougie sur ton MacPro tout neuf. La MAIF de Sciences Po t’envoie un chèque de 15.000 €

9 - Pour aller au gala, tu t’achètes un smoking ou une robe de soirée. Débourse 30.000 €.

10 - Le serveur de l’Abbaye te harcèle pour que tu règles enfin ton ardoise. Tu as bu pour 4.000 € de bière.

11 - Tu revends les crédits de photocopie de ton association morte-née à In Vodka Veritas. L’équipe du journal te verse 10.000 € 12 - Tu détournes une partie de l’argent du BDE. Va sur la case “Bureau des élèves” et touche 10.000€. Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000€

Page 13: In Vodka Veritas n°15

13

OPPORTUNITE DE CARRIERE

2 - Tu t’engages à l’UNEF. Ton ambition te porte à la case « Local syndical ». Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 €

3 - Tu tentes de corrompre Cédric Prunier pour obtenir ton année. Lance les dés. Si tu fais un double, va sur la case départ et touche 40.000 €

4 - Ton engagement associatif fort au sein du BDE satisfait les sponsors. Rejoins la case « L’Oréal », parce que tu le vaux bien. Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 €

5 - Pour la campagne des élections syndicales, tu es missionné sur la case « campus de Menton ». Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 €

6 - Tu avais demandé le campus de Paris, mais malgré tes capacités supérieures, tu es envoyé au « Campus du Havre ». Ne passe pas par la case « Départ », ne touche pas 20.000 €

7 - Tu deviens l’amant ou la maîtresse d’un membre de l’administration. Tu es donc introduit dans les soirées spéciales « FNSP » dans les tréfonds secrets de Sciences Po. Rends toi à la case « Salle SM ». 8 - Malgré ta gueule de bois, tu te rappelles soudain que tu as un exposé à présenter dans moins de 2 heures. Cours vers la case « Bibliothèque ». Si tu passes par la

case « Départ », touche 20 000 €

9 - Tu es diplômé du master FinStrat’. Marche sur les pas de Jérôme Kerviel en te rendant sur la case « BNP-Paribas ». Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 €

10 - Tu sèches ton amphi d’analyse économique. Va sur la case « Jardin des délices » te fumer un bon pétard et ramasse la thune. Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 €

11 - Diplômé de l’école doctorale, tu obtiens après 25 ans de galère ta titularisation à Sciences Po. Donne ton premier cours sur la case « Amphi Boutmy ». Si tu passes par la case « Départ », touche 20.000 € 12 - Le journalisme, c’est ta passion ? Peut-être mais pour l’instant, tu fais de chouettes reportages à l’ANPE. Pour oublier, va sur la case « Abbaye ». Si tu passes par la case « Départ », touche toi.

Ecole de la com’ : 1.400€ / 7.000€ / 20.000€ / 55.000€ / 75.000€ / 95.000€ - 9.000€

Ecole de journalisme : 1.400€ / 7.000€ / 20.000€ / 55.000€ / 75.000€/95.000€ - 9.000€

Ecole doctorale : 1.600€ / 8.000€ / 22.000€ / 60.000€ / 80.000€ / 100.000€ - 10.000€

Local syndical : 1.800€ / 9.000€ / 25.000€ / 70.000€ / 87.500€ / 105.000€ - 11.000€

Péniche : 1.800€ / 9.000€ / 25.000€ / 70.000€ / 87.500€ / 105.000€ - 11.000€

Bibliothèque : 2.000€ / 10.000€ / 30.000€ / 75.000€ / 92.500€ / 110.000€ - 12.000€

Basile : 2.200€ / 11.000€ / 33.000€ / 80.000€ / 97.500€ / 115.000€ - 13.000€

Bizuth : 2.200€ / 11.000€ / 33.000€ / 80.000€ / 97.500€ / 115.000€ - 13.000€

Abbaye : 2.400€ / 12.000€ / 36.000€ / 85.000€ / 102.500€ / 1220.000€ - 14.000€

Eichtal : 2.600€ / 13.000€ / 39.000€ / 90.000€ / 110.000€ / 127.500€ - 15.000€

Chapsal : 2.600€ / 13.000€ / 39.000€ / 90.000€ / 110.000€ / 127.500€ - 15.000€

Boutmy : 2.800€ / 15.000€ / 45.000€ / 100.000€ / 120.000€ / 140.000€ - 16.000€

Bureau de Descoings : 3.500€ / 17.500€ / 50.000€ / 110.000€ / 130.000€ / 150.000€ - 17.500€

Salle SM : 5.000€ / 20.000€ / 60.000€ / 140.000€ / 170.000€ / 200.000€ - 20.000€

1 campus : 2.500€ - 2 campus : 5.000€ - 3 campus : 10.000€ - 4 campus : 20.000€

L’Oréal et la BNP : si l’on possède un des deux, il faut payer 4 fois le montant indiqué par deux dés, si l’on possède les deux, il faut payer 10 fois le montant.

Prix des maisons et des hôtels : 2.500€ sur le premier côté, 5.000€ sur le deuxième côté, 10.000€ sur le troisième côté, 20.000€ sur le quatrième côté. Pour sortir du campus du Havre avant la fin des 3 tours de punition, il faut réussir à faire un double(-cursus)

Page 14: In Vodka Veritas n°15

14

LA CHRONIQUE DU DOCTEUR F. YION - 3

Vous l’attendiez avec impatience, trépignation ou pas, c’est le retour du Dr. FrancisYION !Spécialiste incontesté desproblèmes psychologiques, sexologiques,troulogiques le Dr. F. Yion est à l’écoute de vos problèmes ou soucis qu’ils soient personnels ou sociaux. Il a plus d’un tourdans ses bourses, plus d’un trou dans son sac et plus d’un gode à son arc, évidemment bien bandé. Bref, le Dr. F. Yion est à la gynécologie ce que le bulldozer est à la chirurgie, ce que Josef Fritzl est à la psychothérapie,ceque leBDAestà l’art,ce que François Bayrou est au courage politique et ce que Benoît Mathieu est au smoothie.

Très chers lecteurs, très chères lectrices, c’est avec plaisir que je suis de nouveau disponible pour vous au sein de cette rubrique qui vous est dédiée. Je reviens juste d’un pays au charme profond, à l’innocence sensuelle : la Thaïlande. Les indigènes, que certains de mes amis appelaient affectueusement les Niaks, sont des gens adorables, serviles et d’une remarquable passivité. Ce qui est aussi sidérant pour l’Européen supérieur, c’est l’extrême jeunesse de ce pays, où il esttrèsdifficilededifférencieruneenfantde8ans,d’uneadultede18ans-d’autantquebeaucoupserasent-,ungarnementde5ansd’undélicatéphèbede23ans-d’autantque l’autochtone est petit et imberbe.

Les fêtes thaïlandaises sont pleines de couleurs, de chants et de ce que l’on pourrait qualifier de notre point de vue supérieurd’une délicieuse débauche païenne. N’écoutant que mon âme altermondialiste, mon côté citoyen du monde, je me suis laissé entraîner dans ce folklore chatoyant. Amateurs de déguisement, les thaïsadorent les masques et c’est un véritable plaisir de voir le regard de locaux quandvous enfilez unmasque de porc, d’autantquebeaucoupsonttrèsaffectueux,disonsle même : les gens de ce pays ont besoin

d’une ENORME attention. Les indigènesressentent souvent comme un déchirement lorsqu’ils voient des touristes, car ils savent qu’attachés, ils seront perforés par les bons sentiments de leurs nouveaux amis, puisdélaissés.

Allez en Thaïlande, n’hésitez plus, neserait-ce que pour la bien nommée plage de Phuket ! Vous soutiendrez cette économie émergente, vous tirerez le pays, et ses habitants, vers le haut, ou vers le bas si vous préferez. Et puis, je n’ai pas pris un tel pied en vacances depuis Cuba...

Cher Monsieur F. Yion ,

Je vous écris parce qu’il m’arrive quelque chose de très étrange, et même un peu bizarre, je crois. Je commence à me sentir mal à cause de ça et c’est pour cela que je vous envoie cette lettre.

J’avais un ami qui vous a écrit et qui voulait se suicider, il y pensait tous les jours et sans cesse. En vous contactant il a retrouvé confiance en lui et finalement au bout de sa deuxième tentative il a réussi son projet de vie, ou de mort ça dépend comment on voit les choses. Moi aussi je veux réussir, je veux réussir à comprendre ce qui m’arrive. Voici mon problème : j ’étais sous ma douche le mercredi 15 novembre. Là je me lavais le corps tranquillement. Quand soudain en me lavant le sexe, j ’ai commencé à ressentir du plaisir.Docteur je ne veux pas y aller par midi ou quatorze chemins : suis-je homosexuel de moi-même ?

D’ailleurs, peut être suis-je en fait une femme pour mes mains et un homme pour mon sexe. J’ai tenté de vérifier si j ’étais aussi une femme pour ma bouche, mais j ’ai glissé sur ma savonnette et la seule réponse que j ’ai eue c’est

que mon anus était suffisament élastique pour ma bouteille de shampooing. Encore eut-il fallût que je me pose la question .

Dr. je suis déboussolé, j ’ai l’anus tout élargi et j’ai beaucoup de mal à contrôler ma défécatio, j ’ai peur de l’incontinence anale à vie, aidez-moi !

Très cher patient,

J’ai déjà eu à traiter des cas comme le tien.Tout d’abord un anus élargi, n’est pas nécessairement ton ennemi. Pense au contraire à toutes les perspectives que cela t’ouvre. Dans la vie quotidienne, un gros trou est souvent gage d’intégration sociale et de réussite intellectuelle. Ne dit-on pas des étudiants de Sciences Po qu’ils sont destrousducul?Alorsimaginetoi,toiungros trou du cul, tu vas bientôt devenir la star de notre belle institution, et l’administration teporteratoutnu.Tupeuxaussit’enservirpour ranger tes yaourts aux fruits, servirderéceptacleau jeudu lancerdecaillouxou comme zone d’élevage de diverses espècesanimales(dontlagerbille).Bref,tevoilà un homme comblé.

Pour tonauto-sexualité, jediraique l’onestlà encore dans un cas classique. L’auto-sexualité, que tu appelles naïvement“l’homosexualité de toi-même” est trèsrépandue. Néanmoins je te dirais que ton cas reste assez effrayant de connerie. Sache, cher ami, que tu peux pratiquer l’auto-sexualitésans risque. Sous ta douche, évidemment, maisaussidansmilleautreslieuxtelsquelescabines d’essayage, le métro ou le bureau de RichardDescoings.Oualorsdemanièreplusintellectuelle - quoique - et collective dans des réunionsduNPA. Ce qui est dommage c’est que tu ne te sois touché la nouille qu’à cet âge. En effet tu aurais, si tu avais eu une bonne éducation catholique, eu l’occasion de te caresser face à de respectables prêtres, d’honnêtes pédophiles, de sympathiques violeurs, comme peuvent peut-être en témoigner nos camarades du CSG.

Mais je me dois de t’avertir : la palpation répétée et vigoureuse de ton braquemard finira trèsprobablementpar s’accompagnerdel’expulsionviolented’unliquideblanchâtre.N’en perds pas une goutte : c’est très bon pour ta ligne et pour ton teint. Le conseil du Dr. F. Yion : En préparation de Noël, allez tous et toutes défoncer des vierges que ce soit avec des verges ou de gros cierges, l’essentiel étant de ne laisser personne sur la berge. (oui,jesuisunpeupoète).

Non au célibat des prêtres !

Depuis que Catwoman est partie, Batman se sent un peu seul.

Page 15: In Vodka Veritas n°15

15

CHRONIQUE DE L’AMBITION ORDINAIRE - 4

En guise d’ouverture, on pourrait dire que Benoît Mathieu est un audacieux :“A titre personnel, j’avais pris part pour le candidat démocrate”, prise de position courageuse révélée par La Provence (06/11) qui raconte la “folle soirée” de ce “Cavaillonais à New York”. Et qui dit Cavaillon dit melon : notre héros du mois a pris soin de mettre ledit article en avatar Facebook. Il s’est surtout forgé un site web à son nom, www.benoitmathieu.fr donc.

Et là, stupeur. Un graphisme improbable rouge strié, une police de caractère jaune, et surtout la désormais classique bannière, où apparait invariablement le portrait del’ambitieux ou ambitieuse. Ici y figurentdeux séries identiques de trois portraitsqui font prendre conscience avec effroi à votre serviteur que le langage est limité et qu’ilestparfoisimpuissant(lelangage,pasvotreserviteur)àdécrirecertainesréalités.Essayons tout de même : Benoît Mathieu apparaît de face à chaque fois, dans une espèce de grisâtre transparent rehaussé de rosesurson(inévitable)cravateetsurtoutdevertsurdeuxdesestroisvisages,dansle plus pur style Hulk. Bref, c’est moche.

Benoît Mathieu n’est pas médiumLe contenu, hélas, n’est pas beaucoup plus affriolant. Le programme est vaste, pourtant : “Savoir - Consommer - Investir - S’informer - Voyager - Vivre - Découvrir - Pratiquer - Voir - Contacter - Partager - Ecouter - Rire - Prendre plaisir à - Déguster - Se perdre - Ennivrer - Echanter - Ecrire - Rédiger”, comme l’annonce la têtière. Assezdrôled’ailleursdevoirque“Savoir” ou “Enchanter” sont mis sur le même plan que “Consommer” ou “Investir”. Mais en fait, il s’agit surtout d’un melting pot improbable de billets sur la finance,les transports et plus généralement la “consommation”. Rassure-toi lecteur, dans le bourbier on trouve tout de même quelques perles.

“Je ne suis pas médium et je déteste faire des plans sans savoir de quoi je parle” nous avertit Benoît Mathieu dans un billet surlaprivatisationdelaPosteoù,pourtant,il défend tout et son contraire en donnant justement l’impression de ne pas savoir de

quoi il parle. Et il se fait un peu médium aussi : “Privatisation! Bouh, ce mot vous fait peur! Je le sais.” Ite missa est. Mais mieux encore.Ce billet non-daté,mais apriori du début de l’année intitulé “La crise des subprimes aura-t-elle lieu en 2008?”. Onserendalorscomptequ’effectivement,Benoît Mathieu n’est pas médium : “Mais en 2008, ce n’est pas que cette crise qui va jouer sur les marchés financiers. Le baril de pétrole aura dépassé les 100 dollars tandis que l’euro devrait continuer à voir son cours augmenter par rapport à celui du dollar”. C’est bel et bien la crise des subprimes qui a frappé les marchés financiers, lebaril depétroleest repassésousles60dollarsetlecoursdel’euroadégringolé par rapport au dollar. Chapeau l’artiste !

“ I Love Sciences Po Paris ”Maisnenousattardonspasenceslieuxet cliquons immédiatement sur la page www.ciao.fr de notre héros. Nous voici donc dans “La communauté Shopping”-oùBenoîtMathieu égrène ses avis conso. Parmi les hôtels et les compagnies aériennes testées, un “produit” retient pourtant l’attention : “IEP Paris”. Sobrement intitulée “I Love Sciences Po Paris”, la page dédiée est un vrai bonheur ! Petit recueil de blagues : “En premier lieu, il faut évacuer les clichés que l’on peut avoir sur Sciences Po Paris. En effet, cette école ne “formate” pas les étudiants”.Ah bon ?“Le 7ème arrondissement, la rue Saint[-]Guillaume, le boulevard Saint[-]Germain, la rue de l’Université, sont des lieux chargés d’Histoire, dans lesquels il fait bon étudier [...]. Les étudiants de Sciences Po ont de la chance d’y être mais ils l’ont mérité.” Onparle bien dumêmequartier, celui oùil est impossible de manger à pas cher et où il n’y a que des boutiques de luxe? “nous regrettons DSK depuis 1 an” Non, non, vraiment ! “étudier une langue parmi le japonais, le chinois, le coréen et l’indhou”Ou l’hindinon?Etonpassesurles exemples d’associations étudiantesou sur la description des syndicats. Car évidemment, comme de nombreuxambitieux à Sciences Po, Benoît Mathieuest à Nouvelle donne.

Be kind, rewindC’est d’ailleurs ce qui expliqueque dans son profil Dailymotion(www.dailymotion.com/bennat/1) figurentdeuxvidéosdela“victoire”àlaConcordeen2007,dontuneoùl’onpeutadmirerlesjeunesses sarkozyiennes de Sciences Po et leur belle banderole. Mais ce ne sont de loin pas les meilleures vidéos. Il y a par exemple celles prises àTimes Square à New York le 4 novembre, pour l’élection

de Barack Obama, où Benoît Mathieunous décrit une “foule en liasse, heu... non, en laisse, en laisse, c’est comme ça qu’on dit ?”. Celle avec le pêcheur de Syracuse est très bonne aussi. Mais la petite dernière, la recette du Smoothie, est fabuleuse. Occupant sa troisième annéecomme il peut, Benoît Mathieu joue à Joël Robuchonavecunsérieuxquidonnetoutela saveur à la vidéo. Et par décence, on ne relèvera pas son passage chez Morandini. Au final, on tient encore un spécimen-gominé- assez classique de l’ambitieuxà Sciences Po, qui ne manque pas une occasion pour se mettre en avant, parfois jusqu’au ridicule. Celà dit, dans le fond, le Benoït Mathieu n’a pas l’air d’un mauvais bougre. Et, bon point, il n’a pas poussé la prétention à réaliser son propre logo. Pas encore ?

Notre ambitieux du mois (merci au lecteur qui nous a signalé son cas), Benoît Mathieu, passe sa troisième année à New York : une caractéristique parmi tant d’autres de cet apprenti trader aux dents longues. Pendant qu’il croque dans la grande pomme, on se paie la sienne.

“ Ho, ho, ho, Géant Vert ! ”

Déontologie ?Cette rubrique n’est pas “très sympa” et ne transpire pas la “cordialité” ou le sacro-saint “esprit de promo”. C’est normal : chier sur ses petits camarades c’est une pratique recommendée et même un plaisir, surtoutàSciencesPooùpullulentlesRastignac en puissance. Comme on n’est pas chiens, on vous fait partager nos meilleures trouvailles dans cette rubrique et en échange, vous êtes vivement encouragés à nous indiquer de nouveaux sujets d’étude([email protected]). Du“gagnant-gagnant” quoi.

Mais pour voir votre candidat sélectionné, il faut qu’il remplisse quelques critères. Alors que lapopulation potentiellement cible de notre charmante attention est pléthorique, nous sommes du genre difficiles et nous nous concentrons sur lesambitieux-eusesquis’activentsurle web. C’est là un très bon indicateur del’ambitionelle-même(“bonjour, j’aivingtansetunsitewebàmonnom”),etcequiyestmisenavant(citations,vidéos,etc.)suffitànotrebonheur.

Si les personnes concernées peuvent en prendre ombrage, ce n’est que le juste revers d’une médaille qu’ils ont bien trop lustrée. Mais loin de nous l’idée de nous élever en redresseurs de torts. Au contraire : toujours plusde blogorhée, pour nos instincts coprophages !

Page 16: In Vodka Veritas n°15

16

PRATIQUES ORALES À RISQUE POLITIQUE DES LANGUES - 1

« Au mieux, on stagne, au pire, onrégresse ! » Quand on évoque les langues à Sciences-Po, c’est toujours le même refrain…Pas assez d’heures, pas dematériel, pas de méthode, pas de seconde langue pour les nuls ni de langues rares pour les débutants... la liste est longue. Pourtant, sur le site ouèb de notre multilingue établissement international, il est indiqué que « la maîtrise de l’anglais et d’une deuxième langue (sic) [on dit “seconde”,sinon il y en aurait une troisième -- ah... une troisième...] est la condition indispensable de la réussite professionnelle ». Hum, eh ben on est mal barrés. Pour ce premier épisode, petit retour sur le côté obscur de nos enseignements préférés.

English is the best. Sur le campus de Paris, pas moyen d’échapper à l’anglais, la langue essentielle pour ta world net personnelle. Et si, avant d’entrer à Sciences Po, tu n’as pas encore faitdeséjour linguistiqueauxStates ou tu n’as pas une grand-mère british, d’abord tu pars très mal dans la vie petit, ensuite on t’offre généreusement de ne suivre que ta bi-classe d’anglais. Fini la seconde langue, tant que tu n’as pas le level 4deswarriors. « C’est dramatique pour les 2A qui partent à l’étranger l’année prochaine. S’ils sont mauvais en anglais, ils perdent leur deuxième langue. Et ils sont coincés » nous explique-t-on. Résultats au TOEFLtrop justes=pasdepaysanglophones=BelgiqueouQuébec.Avouonsle,lechoixest limité. Et l’ouverture à l’international en prendunsacrécoup…Sanscompterquecette année, on continue à ridiculiser le mot « international », étiquette si solidement accrochée à notre école. En effet, ni le chinois, ni le coréen, ni le hindi, ni le japonais, ni le hongrois, ni le tchèque, ni le polonais ne sont enseignés à Sciences Po enniveaudébutant.Unniveau3estrequispour commencer. Inutile de vous décrire la têtedesmalheureuxquiontdécouvertça

à la rentrée, en inscription de master… « Nous sommes très inquiets de cette nouvelle tournure. Le chinois et l’hindi sont des langues qui sont pourtant de plus en plus sollicitées à Paris»confie-t-on au département Asie-Pacifique.Amis sinophiles,adieu. L’anglais triomphe, et Collins sourit. Niark niark.

Ambiance, ambi-ance. Le GROS problème, c’estque personne ne peut se sentir, au département des langues. Le bureau de la secrétaire de Richard Collins est surnommé « Les portes de l’Enfer », c’est peu dire… Certaines professeurestremblent à l’idée de rencontrer Richard, qui en a déjà fait pleurer plus d’une. Les employées du département sont jugées comme étant les plus teigneuses de toutes les secrétaires par les étudiants. Pour formuler des projets pédagogiques, pour discuter de nouvelles orientations, pour travailler en commun, c’est juste impossible. Et pourtant : Richard Collins a décidé de surmonter ces multiples obstacles pour lancer dans quelques semaines une magnifique réforme. Etquelle réforme !

La Nouvelle Politique des LanguesPour savoir quoi mettre dedans, inutile de consulter les professeurs ni les employés du département des langues. La solution résidedans…leconsulting. D’abord, une enquête TNS-Sofres auprès des étudiants et des profs, menée l’année dernière : questions fermées et mal formulées, aucune place pour des suggestions ou des conseils,ilfautrépondresanss’abstenir…On nous demande même notre avis surla part du budget que devait prendre la politique des langues sans nous donner ni les autres postes de dépense, ni sa proportion actuelle dans ledit budget. De quoi jeter plusieurs dizaines de milliers d’euros par les fenêtres… il fallait biença, d’autant que la direction en a rajouté une couche avec un « benchmark » auprès d’HEC, la LSE et la Bocconi. Onmélange tout dans un grand saladier, et cela donne… la Nouvelle Politique des Langues, présentée le mercredi 22 octobre aux syndicats étudiants.Derrièreles hypocrisies qui annoncent le désir

que tous les étudiants aient un niveau remarquable in English, se cache un triste objectif : dépenser moins, réduire les postes et continuer à faire semblant. Pour cela, Sciences Po ressort sa méthode préférée de l’année : le e-learning, nouveau concept de la novlangue SciencesPo,uneméthodetrès21e siècle, où le prof est remplacé par un logiciel.Ou comment supprimer les professeurset laisser les étudiants se perdre devant leurs ordinateurs. Richard Collins propose donc de réduire à une heure par semaine les cours de langue - et l’UNEF négocie actuellement une demi heure de plus - qui seront complétés par des logiciels et des professeurs devenus tuteurs. Ceux quidésirentunedeuxièmelanguen’aurontpasbesoin de professeur, mais enfonceront le CD-ROM dans la bouche de l’ordi.« Apprendre avec un CD-ROM, cela peut-être bien pour compléter l’apprentissage. Mais en aucun cas cela ne doit remplacer les deux heures avec le professeur. Une langue sert à communiquer, on doit avoir un interlocuteur ! Et l’ordinateur reste une machine… » explique un professeurd’anglais à Sciences Po.

Avec26ordisentoutetpourtoutdanslesdeux labos sans casques nimicros pour8 300 étudiants, SciencesPo ne semblepas s’être préparé à sa nouvelle révolution du e-learning. D’ailleurs, la direction n’a toujours pas prévenu les professeurs…Une heure de moins par semaine, pour un enseignant c’est aussi le salaire divisé en deux.«Les enseignants vont passer leur temps à chercher un nouveau boulot... Quant à ceux qui seront devenus tuteurs, on les humilie en détruisant leur métier d’enseignant » explique un employé. Etcela s’appelle : sacrifier l’enseignementhumain sur l’autel de la réduction des coûts. Welcome.

Lénine avait sa nouvelle politique économique, Richard Collins a sa nouvelle politique des langues. Les deux ont en commun un décision centralisée dans un contexte de fort affaiblissement de la productivité. Mais si le volontarisme de la NEP a rencontré du succès, on peut douter qu’il en sera de même avec la baisse des investissements prévue par Sciences Po. Affamés de langues étrangères, pour vous IVV enquête.

« Jamais je ne sortirai de la bi-classe »

« Allez, hop, double ration d’Anglais ! »

Page 17: In Vodka Veritas n°15

17

ILS ONT TOCQUEVILLE POUR MODÈLEDE LA DÉMOCRATIE CHEZ LES JEUNES POP’

“Aux Jeunes Pop’, en août / Ne fais pas un prout !” Voilà comment un poète pourrait résumer les élections interne des jeunesses sarkozystes l’été dernier. Chronique d’une victoire annoncée, celle de la liste menée par Benjamin Lancar, elle auront été le théâtre d’une bataille digne des plus grandes heures du RPR.

Le candidat le plus risible a sans conteste été Guillaume Delarue. Ce “pauvre type”, “en manque chronique de notoriété et vraisemblablement très malhonnête”, un “tricheur”, qui a “déjà des réflexes de petit magouilleur sans vergogne planqués derrière de longs discours sirupeux”(selonleblogd’unesectionUMP)aétévirépouruneraisonsimple:il avait selon l’UMP “oublié” de demander à une membre de sa liste son consentement avant de l’y inscrire. Dommage pour ce réactionnaire qui se voyait déjà lui aussi vainqueur contre les “magouilles” au sein du “magma homogène qui n’agit pas”(sic).

Vexécontresonpartienvoiede“bolchévisation”, il rumine désormais sa devise, citation du “résistant vendéen” (re-sic)Cadoudal [contre-révolutionnaire chouan] : “Tout homme qui dirige ou fait quelque chose a contre lui tous ceux qui voudraient faire la même chose,

tous ceux qui voudraient faire exactement le contraire. Et aussi la grande masse de ceux qui ne font strictement rien.” Et vice versa.

Restaient parmi les listes en course celles d’Aurore Bergé (étudiante à Sciences Po,tienstiens)etMathieuGuillemin.Maisc’estlàqu’entrent en scène les vils porte-flinguesdel’Elysée, qui a décidé d’avance de l’issue du scrutin. Claude Géant, Frédéric Lefebvre, Eric Cesari (directeur de cabinet de Devedjian)et Jérôme Peyrat (conseiller à l’Elysée) sontsemble-t-il lesnomsà retenir.Un coupde filestpassé,probablementpar l’und’eux,àunapprenti parasite politicien : “Si tu ne retires pas ta candidature, je te détruis” (Le Figaro,07/08).Aïe!Onest loindela“maison bleue” (adosséeàlacolline?)voulueen2002parlepoète Raffarin !

Les listes de Bergé et Guillemin fusionnent, puis les deux se retrouvent toutsimplement séquestrés dans les sous-sols de l’UMP (JDD, 07/08).De 9h30à 22h30, priésde “négocier” alors qu’il s’agissait d’un simple dépôt des noms, la liste commune abandonne. Hugo Brugière(SciencesPo,toujours),responsable des relations presse del’équipeBergé/Guillemin,inviteles umputes à “innonder (sic)la boîte mail” de Fabien Sans-Nicolas et Frédéric Lefebvre ainsi qu’à submerger le siège de courriers indignés.

Frédéric Lefebvre, en mode “l’ordre règne à Varsovie”, déclare alors quant à lui qu’il n’y

a eu “aucune pression”, qu’au contraire “les candidats ont souhaité être le contre-exemple des socialistes en affichant une unité pour la prochaine université d’été de leur mouvement”. L’unité se conquiert à la pointe de l’épée, faut-il croire.

Louis-Alexandre Osinski, le seul outsidersurvivant (bien réac dans son genre), arassemblé25%desvoix,alorsqu’ilavait toutde même critiqué totalement l’organisation de la campagne, avec une élection en juillet des conseillersnationauxchargésd’élireleprésidentdel’UMP,c’est-à-diredansunepériodeoùtoutle monde est en vacances. Dans sa fédération du Nord, par exemple, “il n’y a eu que 60 votes sur 1230 inscrits, dont 30 se sont fait par procuration sans que nous ayons la possibilité d’en vérifier l’authenticité”. Ces conseillers sont d’ailleurs facile à approcher pour “orienter” leur vote,commel’expliquel’und’eux:“À la rentrée de septembre, je devais avoir des fonctions plus importantes au sein des jeunes Pop. On m’a bien fait comprendre que les chances que cela aboutisse seraient bien plus grandes si je votais pour lui”(Bakchich,22/08).

Autre critique, le système de scrutinélectronique dont, selon Osinski, unresponsable de fédération peut facilement récupérer les codes personnels des votants. Le président précédent des Jeunes Putes, Fabien de Sans-Nicolas, se croit malin en sortant que “c’est abracadabrantesque !”, référence au néologisme de Chirac répondant à propos de la cassette Méry et du financementocculte du RPR. Inutile de préciser quelle liste Sans-Nicolas soutient pour l’élection. En fait, Osinski explique lui-mêmeclairement les raisons qui l’ont fait rester en lice : “Je suis conscient d’avoir été la caution démocratique. J’ai pensé à me retirer, mais je me serais retiré sans rien, contrairement à Matthieu Guillemin et Aurore Bergé1. Si je l’avais fait, on aurait dit que c’était par manque de courage”.

Car le grand gagnant de tout ce cirque, c’est le candidat déclaré unique par l’UMP sur son site (selon Delarue), malgré undépôtde listehorsdélais(selon lemême),j’ai nommé Benjamin Lancar. Etudiant à HEC et Sciences Po2, président jusqu’alors de la section UMP-Grandes écoles3, le jeune requin avait commencé à y lancer un début de culte de sa personnalité, en

1 Bergé devient porte-parole, etGuilleminsecrétairenationalauxfédérations2 Remercions le partenariat Sciences Po-HEC pour avoir rapproché l’info du lectorat.3 LepipoteuxBrunoCruchantprend lasuiteentandemavecuncertainAdrienLenoir

Jaunalistes : oppressés ou trop pressés ?

Nosamislespisse-copies,buvantsurplacelesmessagesdesofficielsUMPoubiencopiant-collant les communiqués triomphants annoncent un parti uni, sans discorde aucune,tantchezlesvieuxquechezlesjeunes.Toutvapourlemieuxdanslemeilleurdesmondes,pascommechezlessocialistes.Lesambitieuxporte-flinguesdel’UMPqui se tirent dans les pattes l’ont assez répété, donc ça doit être vrai. Beaucoup de journauxfontmêmeleuruneenl’affirmant.

Seul… 20 Minutes (04/09), à notre connaissance, titre sur « l’ambiance massacrante » de l’université d’été. L’article parle des démissions, des départs, des achetés (GuillemainetBergé)obligésdevenir semontrer… Il évoquesurtout unassezamusantgroupeFacebook(ah! lemilitantismevirtuel!)appelantàsifflerlediscours de Lancar. La réaction première de l’intéressé a été de vouloir les interdire de « campus » les « rebelles».TristanMaupoil,undesnéo-maquisards,expliquealors avoir des contacts à la KommandanturpourfairedefaussescartesUMP.OnresteloindupipoteuxHugoBrugièreannonçantquelquesjoursavantavec“un rire un brin sardonique”(JDD,25/08):“on va foutre un sacré bordel”.

Non, on a là affaire à « des jeunes UMP toujours euphoriques » (Ouest-France, 07/09)et«confiants dans l’avenir» (Reuters,06/09).«Qu’on se le dise, le parti sarkozien va bien»!…

Page 18: In Vodka Veritas n°15

18

introduisant sa gueule et son nom un peu partout4. Il avait repéré en mai dernier par les fins limiers d’IVV, entre autres par son blog digne des meilleures “chroniques de l’ambition ordinaire”. Ce blog a été supprimé le temps de la campagne ainsi que son Facebook (que de sacrifices !), en raisondes messages de haine de ceux qui nesavent reconnaître son talent5. Lancar a finalement, après quelques péripéties, faitses75%,avec53%departicipation.La question qu’on se pose naturellement est bien sûr de savoir pourquoi Sarkozy (à travers l’UMP)a faitautantdebordel (lemotest juste)pourfaireélire“son”candidatà la tête du “Comité de contrôle (sic) des Jeunes populaires(re-sic)”.D’autantquesilabaissedesadhésionsexistaitdéjàbienavantl’élection6, les derniers rats quittent désormais

4 Un peu comme notre ami MatthieuCreux avait tenté de le faire à SciencesPo avec Nouvelle Donne, avant d’échouer lamentablement.5 Heureusement, depuis son retour, leblog n’accueille que des louanges sans nuances, àcroirequ’ilestlacibledefatalsflatteurs…6 Auniveaudel’UMPengénéral,onestpasséenunande370000à200000membres.Mais selon les déclarations de Karoutchi, 10%des adhérents jeunes populistes seulement ont renouveléleuradhésionen2008.Duralorsque

le navire, parfois avec option découpage de carte devant caméra. Lancar a déclaré ne pas vouloir toucher ses indemnités de fonction (2 500 € officieusement),mais onpeut douter qu’il le fasse, après tout il va travailler plus donc il doit gagner plus.

Pourquoi donc, alors ? Lancar était comme on l’a dit, déjà plutôt bien positionné, mais cela ne faisait pas de lui un chouchou naturel. Les règlements de compte sur le net alimentent donc pas mal de rumeurs d’hypothèses.On prête donc à Lancar desrelations,môsieur.AvecDavid-XavierWeiss,chefdecabinetdeRogerKaroutchi(présentle soir des résultats7). Karoutchi sembleraitvouloirprofiterdumalléableLancarpoursonobjectif unique du moment, la région Ile-de-France.Autrehypothèse,avecJeanSarkozy,filsde,quiseraitalorsdécidémentdanstousles traquenards, après l’épisode mémorable des municipales de Neuilly. Benjamin Lancar va-t-il aller jusqu’à se convertir au judaïsme ?

Maisuneautreexplicationestàprendreencompte, moins Paris-Match, certes, mais non négligeable. Fabien de Sans-Nicolas avait en 2005 remplacéMarie Guévenoux,viréeavantlafindesonmandatparcequ’elleessayait d’émanciper les Jeunes UMP de la maison-mère. Pas aussi con qu’il en a l’air (et pourtant…), Lancar s’est pendantla campagne mis dans la ligne de travailler directement pour Sarkozy, quand par exempleOsinskipréférait l’idéede travailleravec, donc dans une certaine autonomie. Mais laisser l’autonomie aux Jeunes pop’,c’est limiter l’autonomie de l’UMP. Il est des principes sur lesquels un bon libéral ne transige pas.

Sarkozy considère (Marianne2.fr, 01/09) qu’ils’agitd’unrefletdesapopularité!Siçapeutlerassurer, la baisse est semble-t-il étrangement plusfaibledanslesgrandesécoles…7 Notre camarade de Sciences PoAlexandre Vesperini aussi, espérons qu’il aapprécié à sa juste valeur le spectacle donné ce soir là !

L’arrêt lycée, le dos bien droit

Le junior président des populistes Benjamin Lancar a dès son élection mis en place une mesure phare, la création d’une division « UMPlycée»et«UMPcampus[universitaire]»auxcôtésde«l’UMPgrandesécoles»,puisavecquelquessemainesderetardcelled’une«UMPFilièrespro»(onattendavecimpatienceune«UMPHorssystèmesco»ouune«UMPJ’aiunboulot»).OnnevoitpastroplecaractèrenovateuretvisionnairedecequinefaitquesubdiviserlesJeunessessarkozistes(15à30ans).Maisfaireduneufavecduvieux,çadoitêtreça,créerunnouvelélanpopulairepourmontrerque«la France qui bouge a changé de camp »(sic)(voirnuméro13).D’ailleurscréer–parexemple–unesection«UMPJansondeSailly»estjuridiquementinterdit,donc vont être créés des postes de « référents », chargés de s’occuper des établissements d’un secteur. Une révolution, on vous dit.

XavierDarcos,ministredel’éducation,n’apasmanquédefaireunfauxpasàcetteoccasionensortantdelaréserveàlaquellesaresponsabilité le soumet s’il souhaite garder un minimum de crédibilité avec ses interlocuteurs. Darcos s’est donc félicité « qu’on puisse, non pas installer un parti politique (sic)dans les lycées, mais avoir des jeunes qui sont de notre sensibilité et qui sont organisés ». Il s’agit, selon Devedjian de « donner [au mouvement jeunes UMP] une dimension nationale beaucoup plus forte, à la fois pour nous irriguer et pour l’implanter dans des milieux où il n’est pas encore»,comprendre,horsdesmilieuxbourgeois.

EtDarcosdefaireuncommentairedigned’unFrédéricLefebvrearguantquel’UNL(syndicatlycéenprochedel’UNEFquiquantàellese«limite»àl’université)estdirectementinféodéauPS,qu’iln’yaquedesorganisationsdegauche,quiprétendentparlerpourtoutlemonde,etqueceneseraqu’unrééquilibrage.Onaduapprécieràl’UNILycée,pourlecoupdirectementrattachéeàl’UMP(présenceauxcongrès,etc.–voirnuméro10),devoirainsileurexistencepurementetsimplementniée.

Onretrouveicil’absurdeetclassiqueaccusationdemanipulationdeladroiteenverslagauche(«s’ilss’opposentàlaréforme,c’estparcequedesgauchisteslesontmanipulé»),maisl’impossibilitéd’enfairedemême,alorsqu’àlesécouter,c’estsifacileàfaire.

Best-of du nouveau droitier en chef

• A propos desJeunes Pop : “Je souhaite qu’elles (sic) incarnent une jeunesse révolutionnaire”.

• Sur son surnomde “Martinon Junior” : “Mon seul surnom, c’est Benj”.

•Aprèsl’expulsiondeprovocateursdesjeunesses populistes de l’université d’été du PS : “Le PS, auquel les divisions internes ont fait perdre toute crédibilité, semble maintenant décidé à renouer avec les vieilles méthodes soviétiques”.

• “Vous savez, je suis issu d’une génération à qui le pape a dit « n’ayez pas peur » et le président « je ne vous comprends pas »”

•“Révolutionner le pays c’est aujourd’hui le réformer”. On se contentera derépondre avecOrwell que “l’ignorance, c’est la force”.

•“C’est dans l’objectif d’échanger sur la crise financière et de renforcer nos liens avec la Chine que nous sommes partis en Chine.”EtnonenAustralie.

• A propos de l’UMP Lycées : “Je te rassure, nous ne comptons absolument pas instaurer la majorité civique à 16 ans.”21ans,c’estdéjàbien.

• Lancar dans toute sa (mauvaise)rhétorique orwelienne : http://w w w . d a i l y m o t i o n . c o m / v i d e o /k2qqM2YIVQGuAaOedz

Page 19: In Vodka Veritas n°15

19

LES APPRENTIS INGÉNIEURS ET LE POTEAU VOLÉ ET SI JE PASSAIS MA 3e ANNÉE AU CANADA ?

Exemple:Queen’sUniversity,respectableuniversitécanadiennefondéeen1841.Ellese trouve à Kingston, une ville prospèreabritant quelques 117 000 habitants, auborddulacOntario.Lavillefutlacapitaledu Canada pour un temps, avant d’être dépourvue de son titre par Ottawa, unpeu plus éloignée de la frontière avec lesEtats-Unis–doncunpeuplussûre.Aujourd’hui, c’est une cité pénitentiaireen même temps qu’une étape touristique idéalement située pile entre Toronto et Montréal, où l’on peut s’arrêter pourlézarder près du lac (en été dumoins),pour visiter les fortifications de Fort Henry, ou pour déambuler parmi les rues résidentielles dont les charmantes maisons abritent souvent le bordel de coloc’ étudiantes. Car outre l’apport des estivants et des prisonniers, une bonne partie de l’activité de la ville dépend de la population estudiantine –divisée entre les élèves du Royal Military College et ceux de Queen’sUniversity, on y vient. On évitera la visitedu collège militaire, pour s’intéresser au campus de la seconde université (fort agréable, avecdes bâtiments néo-gothiques en pierre grise, des arbres, des pelouses, plusieurs bibliothèques, bref, tout ce qu’on n’a pas à Sciences Pointe)etàses20000étudiants(onn’apas tout ça non plus à Sciences Pôplé, encoreheureux).

Comme dans n’importe quelle université, il arrive chaque année un contingent de nouveauxfraîchementsortisdulycée,etqui, le jouroù ilsdébarquentavec leursvalises et leur mini-frigo pour s’installer dans leur piaule d’étudiant, n’ont aucune idée de ce dans quoi ils se sont embarqués…Ceux-là,onlesappelleles frosh. Heureusement, il y a les anciens, qui vont se faire un plaisir de leur donner un avant-goût (épicé et éthylé) de lasauce à laquelle il vont être mangés. Ce

sont surtout les deuxièmes années quivont s’y coller, forcément, tout heureuxqu’ils sont d’avoir définitivement passé le stade de “bleus-tout-paumés”. Ceux-là, on les appelle les frecs. Ils disposent d’une semaine (judicieusement appeléefrosh week)pourapprendrelavieàleurssuccesseurs, et se débarrasser de toutes les pulsions entravant l’étude avant que les cours ne reprennent. Comme ils croient en la division du travail, ils se partagentleboulotparfacultés:lesArts&SciencesaveclesArts&Sciences,lesCommerciaux avec les Commerciaux,les Ingénieurs avec les Ingénieurs…logique, somme toute.Après, à eux de

donner libre cours à leur imagination pour faire vivre, mourir ou évoluer les traditions d’accueil. L’ambiance sur le campus devient donc franchement surréaliste pour une semaine, et force est de reconnaître que ce sont bien les ingénieurs les plus inventifs en la matière. Chez les autres, paraît-il et de l’avis d’une ingénieure de 4e année, c’est moins drôle, ils se contentent de se recouvrir d’une combinaison et se balancer de la boue ou de la peinture les uns sur les autres.

Alors, que font-ils, ces ingénieurs, pouroccuper leur première semaine de septembre ? Eh bien, déjà, ils ressortent du placard leur veste d’ingénieur, un

blouson en cuir d’un beigeasse censé être doré, customisé à coups de patchs appropriés et affichant l’année de leur promo. Ensuite, les frecs, vêtus de leur veste et d’un kilt, se plongent dans de la teinture violette, et s’amusent à se sculpter des coiffures bizarres à grands renforts de gel et tondeuse. Ces êtres au teint mauve déambulent à travers le campus, saisissant le moindre occasion de traumatiser les pauvres frosh, et carburant comme il se doit à l’alcool fort. S’ensuivent quelques grands moments d’euphorie (ou d’eufolie ?) collective,comme ces ésotériques Highland Games, quiconsistent(engros)àseroulerdans

la boue, à sauter tous ensemble au son de sa chanson de promo, et surtout à utiliser son blouson en cuir pour violemment fouetter le sol en rythme pendant plusieurs minutes, en signe de respect aux“anciens”(ethistoirede soulever un peu de poussière, pour changerdelaboue).Dans le genre rituel indéchiffrable par les non-initiés, c’est assez réussi.

Mais l’essentiel, en fait, c’est que tout le monde soit bien défoulé, bien maculé, et bien imbibé pour le bouquet final du

samedi. C’est pour ça que tout le monde passe la nuit du vendredi à boire. Le samedimatinauxaurores (enfin,à8h),on entasse tous ces étudiants défoncés, déchaînés et sapés n’importe comment dans des school buses universitaires, et on amène ces troupeaux beuglants enpleinmilieud’unchampboueuxà trois-quartsd’heureducampus.Aumilieuduchamp, on a creusé une fosse circulaire, qu’on a remplie d’un ragoûtant liquide maronnasse (théoriquement de l’eauboueuse, après… personne n’est alléfaire d’analyses). Planté au centre decette baignoire géante se dresse le clou de la semaine, j’ai nommé le Grease Pole. Vous ne savez probablement pas ce que c’est, et vous ne voulez

A Sciences Pompes, on a beaucoup de choses, mais le bizutage, on n’a pas. Faut dire, c’est interdit. N’empêche, sur ce point, les prépas maths et autres écoles d’ingé s’y prennent beaucoup mieux pour contourner les normes, infiltrer les failles juridiques, et ne pas laisser passer une aussi belle occasion de se beurrer la gueule. Mais le mieux, pour observer le phénomène dans toute sa splendeur, c’est encore d’aller faire un tour outre-Atlantique. Parce que dans les facs nord américaines, le bizutage, ils ont.

Entre une cérémonie païenne d’hommage à un dieu priapique de la fertilité et la prise d’Iwo Jima.

Page 20: In Vodka Veritas n°15

20

LA TRILOGIE DE JULES VALLÈS LA BIBLIOTHEQUE ROUGE - 6

probablement pas le savoir, mais je vais vous le dire. Avant, c’est-à-direà la fin des années 50, lePole menait unepaisibleexistencedepoteaudebutsur un terrain de football de l’Université de Toronto. Cela ne dura guère, car à l’occasion d’un match inter-universitaire, ces petits taquins de Queen’s décidèrent de scier le poteau, et de l’emporter aveceuxàKingston–enpassantpar Winnipeg, ce qui défraie toute logique, mais peu importe. Depuis, tous les ans en septembre, le Pole est enduit d’une substance graisseuse jaunâtre, orné d’un chapeau à pompon d’étudiant, et planté au milieu d’une mare de boue. Il a été décidé (on saitpas trop comment) qu’une promod’ingénieurs de Queen’s ne pouvait devenir promo d’ingénieurs de Queen’s à part entière qu’une fois qu’elle avait récupéré le chapeau (“tam”) qui couvre le sommet dupoteau.

Alors onmet les premières annéesdans la marre de boue, on laisse le reste s’attrouper autour (et hurler insultes etobscénités, sinon c’est pas drôle), eton attend qu’ils trouvent comment se démerder - jusqu’à ce que le troupeau en ait marre d’attendre et se rue dans la marrepourébranlerlesrangs(promoparpromo, on reste ordonné). Bon, commeon est en 2008 et qu’on veut montrerqu’on n’est pas (trop) des sauvages,tout ça est encadré et surveillé par une

équipe de sécurité à casquettes oranges : contrairement à ce qui était d’usage dans les premières années, les frecs ne passent plus la nuit à boire dans le champ oùà lieu l’événement,et ilne jettentpasnon plus des détritus, cadavres de souris ou substances défécatoires dans la fosse ; onamêmeexpliquéauxjeunotsquepour

atteindre le sommet, il fallait former une pyramide humaine à base concentrique, et on leur laisse prendre leur temps, histoire d’éviter qu’ils se brisent tous la colonne vertébrale, ou étouffent deux-troismalchanceuxperdusdanslamasse.C’est sûr, dans ces conditions, dès que la base montre un signe de faiblesse, il faut interrompre pour tout recommencer ; donc non seulement ça devient vite agaçant (“maiseuh,nonquoi,pasencore,zutàla

fin !”), mais surtout ça dure une éternité(2h36 et quelques secondes pour cettefois, mais ça peut facilement dépasser les 3heures),etilfaitfroid,etilfaithumide,etonn’yvoitrien.Jusqu’àcequefinalement,oh miracle de la supervision et de l’arrivée en masse des anciens qui viennent prêter main (ou plutôt épaule) forte, un grand

dadais maigrichon réussisse à arracher le totem du sommet, permettant à tout le monde de s’en aller souiller les bus du retour, direction : la douche.

Cette épreuve surmontée, il incombe aux nouveaux admisde prendre soin du Pole jusqu’à l’année suivante. En clair, cela signifie ne pas se le faire voler par les années supérieures, qui sont prêts à tout pour pouvoir exiger le paiement d’une rançonen caisses de bière. Là encore, les ingénieurs-voleurs déploient des trésors insoupçonnés

d’imagination pour cacher leur butin : on raconte par exemple

que le Pole aurait passé du temps au fond d’un lac, dans le hangar d’une ferme, dans la soute d’un paquebot transatlantique, ou encore sous les verrousdelaprisondeKingston…Maisle pire qui puisse arriver, bien sûr c’est qu’il soit dérobé par les vilains ingénieurs del’UniversitédeToronto–cequi,quandc’estarrivéàl’automne2000,avaluaux froshs une humiliation cuisante, vous l’imaginezbien(oupas).

Gange bang

Bien souvent on donne à lire l’Enfant au collège, que l’on présente aux élèvescomme un exemple typed’écriture autobiographique sur les premières années de la vie. On y explore lerécit d’une enfance difficile,sous la chappe d’une mère tyrannique et d’un père absent, on y décortique la narration particulière propre au genre, on y examine lagrammaire, les temps, les adjectifs. Pourquoi pas. Mais en proposant à la lecture l’Enfant de Jules Vallès comme on donnerait Poil de Carotte de Jules Renard ou W de Georges Perec (les deux alternatives,pas moins remarquables, les plus prisées des professeurs), en sortantl’œuvre de son contexte et de sacondition de premier opus d’une trilogie, on passe souvent trop rapidement sur une de ses dimensions essentielles : la révolte.

Car c’est bien de révolte qu’il s’agit au fil de cestrois livres, qui ne peuvent se comprendre que dans leur totalité. Le triptyque s’intitule Jacques Vingtras, on y suit le parcours de l’alter-ego éponyme d’encre et de papier de Jules Vallès. Un parcours qui démarre par l’enfance donc, oùl’auteur-personnage fait la découverte brutale de l’autorité, de l’arbitraire et de l’injustice qu’il ne va par la suite cesser de combattre. Le Bachelier,

sûrement le plus réussi de trois volets, évoque les années charnières du passage àl’âgeadulte,laviedebohème(ondiraitaujourd’hui « de précarité ») d’étudiantprovincialdemodesteextractiondébarquéà Paris, les petits boulots, l’éveil au journalisme et les premières désillusions qu’il entraîne. Et la révolte, toujours, contre le surgé, contre le directeur de la publication, contre les hiérarchies

imbéciles. Avec en point d’orgue lerécit à la fois amusé et cruel, plein d’autodérision, d’une pseudo-révolution de quelques étudiants, sortis agiter gauchement un chiffon rouge contre le pouvoir en place.

Dans l’Insurgé, Vingtras-Vallès est devenu grandetfait larévolutionpourdebon.Oule récit de la Commune de Paris vécue par l’undesesprincipauxacteurs, lesespoirssoulevés, les luttes de comités, et le fracas de la contre-révolution. Ce dernier tome reste inachevé : Vallès est mort avant d’avoir puterminersonoeuvre.Aujourd’hui,hormisdans les cours de français de quatrième et sur quelques plaques de rues de la banlieue rouge, on ne parle plus beaucoup de Jules Vallès. Son œuvre reste pourtant sans égale, portée par un style incisif, âpre, vivant, précurseur, qui n’a rien à envier, parexemple,àunLouis-FerdinandCéline.Et pour la coquetterie, on recommendera l’édition qui regroupe les trois livres avec une jolie couverture de Tardi. C’est un peu plus cher qu’en poche, mais l’ouvrage en vaut bien la peine.

Page 21: In Vodka Veritas n°15

21

EN RÉTORSION À LA PAGE 38 DU “27” IN SITU - 1

A ceux qui disent que Guy Debord c’est à se tirer une balle, répondez que c’est ce qu’il a fait. Mais il nous revient tout de même d’entre les morts pour nous livrer un dernier couplet aigri. Il répond ici à un article sur la beauté de Facebook, paru dans le journal du BDE Le 27, en juin dernier.

Nous autres, enfants invisibles et maudits du spectacle, voudrions témoigner de notre irritation. Nous fûmes résignés à devoir ingurgiter vos facéties à grosses

lampées jusqu’à conclure, les paupières lourdes,qu’ilvalaitmieuxmettreuntermeàvosbégaiementsetfinirparvousgronder.C’est avec une mine concernée que l’on nous conseille de rejoindre le Grand Réseau, réticents que nous sommes, sans lequel nous encourrions une mort sociale imminente, qui nous faucherait sans ménagements. L’argumentaire est souvent attendrissant, («VIENSAVECNOUS,ONVA S’AMUSER »), complaisant (« TROPBIEN ») pour enfin s’avérer fonctionnel(«C’ESTPRATIQUE»).

« Non mais tu comprends, cette année je dois développer ma liste deCONTACTSpour m’ouvrir des portes. Je vais également multiplier lesSTAGESpourvaloriser mon profil ». Si l’on en croit cette scribouillarde de la rue Saint Guillaume, entenduemillesfois,l’expositionréciproquede sa valeur d’échange, la classificationde ses traits de surface, l’extensionspectaculaire de ses amitiés en plastique, l’arithmétique de ses propriétés, en clair, sa réification, son auto-fragmentationen particules et leurs ordonnancements taxinomiques qui s’ensuivent ne sont queles aspects d’un ordre des choses sympa, oùsuinterait l’amitiéet laputaindebonnehumeur à laquelle on nous intime de nous plier, nous autres dindons de la farce. « IL FAUT Y ETRE », ou le nouvel impératifcatégorique appauvri, qui se leste toutefois, soyons honnêtes, de fonctionnalité lorsqu’on nous assène que c’est pratique.Atout dispositif, sa transcendance. D’après Zuckerberg, l’illuminé en chef, imité par ses ouailles en latex : « (Le graphesocial), c’est l’ensemble des relations de toutes les personnes dans le monde. Le graphe social : il y en a un seul et il comprend tout le monde. Personne ne le possède. Ce que nous essayons de faire c’est de le modeler, le modéliser, de représenter exactement le monde réel en en dressant la carte (tomirrortherealworldbymapping

it out). » Du pain béni que vous offrel’adorable informaticien de Harvard, vous autres stratèges financiers, manageursde la culture, gestionnaires de ressources et autres glauques individus. Signalons que les propos du Gentil Informaticien de Harvard font étrangement échos à la description naïve que faisait Arendt dusystème de classement que concevait l’Okrana:«L’Okrana, prédécesseur tsariste de la Gépéou avait, dit-on, inventé un système de classement. Chaque suspect était inscrit sur une grande carte au centre de laquelle figurait son nom entouré de rouge. Ses amis politiques étaient désignés par des cercles rouges plus petits, et ses connaissances non politiques par des cercles verts. Des cercles bruns indiquaient les personnes qui étaient en contact avec les amis du suspect mais qui n’étaient pas connus de lui personnellement. Les recoupements entre les amis du suspect, politiques et non politiques d’une part, et d’autre part, les amis de ses amis étaient indiqué par des lignes joignant les cercles respectifs. Manifestement cette méthode n’a d’autre limite que la dimension des cartes. De plus, théoriquement, une seule GIGANTESQUE FEUILLE montrerait les relations et les recoupements des relations de la population toute entière. »Autantdireque le problème est réglé.

Ce ne sont pour autant guère les ambitions de Zuckerberg qui nous effraient, tant le paradigme de la maison de verre nous a pénétré les consciences avec vigueur. Nulle paranoïa burroughsienne en somme. Les prophéties mégalomanes de l’enculé de Harvard ne seront pas discutées ici, mais bien davantage l’endoflicage doncvous vous faites les poètes.

L’une des hâbleries à la peau dure, qui s’avère être un mauvais holisme en somme, consisterait à imputer une dimension totalisatrice aux dispositifs,lesquelles broieraient les subjectivités de sorte à ce que celles-ci ne puissent guère découper d’espaces de liberté. Nous croyons, en revanche, à une dimension

« par le bas » et que l’essentiel à analyser, plutôt que de se toucher sur le père qui nous fouette, est la réinvention continuelle opérée par les sujets, de nous intéresser au résiduel, à l’ambivalence, à l'impensé et au non-dit. Nous pencher, en gros, sur les réinventions identitaires constantes des structures collectives,montrer qu’il existe,quelque soit le contrôle opéré, des postures groupales de refus, des réappropriations et desréinventionsfaceauxinjonctionssubies; mais aussi nous pencher sur les stratégies de résistance du sujet micropolitique, par le biais d’une éthique (échapper au contrôleviaungouvernementdesoi)deprocessusde subjectivation (s’évader, tracer des

lignes de fuite) et des jeux identitaires (adaptation dumoi à des universmobilesetdifférenciés).Bref,iln’existenuldispositifcapable de totaliser les sujets et de les aliénerpleinement.Autrementdit,quelsquesoient les moyens techniques offerts par les réseauxsociaux,quellequesoitlapressionexistante pour s’y soumettre, quellesque soient les sanctions symboliques et sociales encourues si l’on « ne joue pas le jeu » une posture de refus, ou du moins de tempérance est possible. «Oui,mais,tu vois, moi perso, je ne le prends pas au sérieux,c’estjustepouravoirdesnouvellesde mes potes perdus », nous assène l’utilisateur isolé de ses comparses, tout en nous infligeant ses photos à grandescascades,nousinformantdesonsexe,deson nom, de sa tronche, de ses humeurs et de ses grimaces. (Laissons de côtél’utilisateur fou furieux dont la traçabilitémise en spectacle nous permettrais, si l’on avait que ça à foutre, de relever tous ses mouvements sur les trois dernières années. Ce même utilisateur est, au passage, un connard).Forceestdoncdeconstaterquecequinousfaitfrémirfinalement,c’estbienl’attitude des utilisateurs, leur plasticité et leur argumentaire trempé de mauvaise foi.

Page 22: In Vodka Veritas n°15

22

Endoflicage donc. Chacun l’assumera,ou en a déjà payé le prix, dès lors quereviendra au galop, et à grands renforts de fraîcheur, l’hostilité essentielle des rapportssociaux.Car lesbeauxportraitsdes « photos de soirées/vacances »ne cachent que très mal la réalité des parents qui fliquent leurs gosses, lesmecsquifliquentleursnanasetviceversça, les curiosités mal placées, l’apparition d’indésirables que l’on avait écarté, bref, un champ des possibles du contrôle que nepeutquetrèsdifficilementoffrirleréelpalpable. Nous autres avons été témoins de DRAMES. Nous savons que desétudiants de troisième cycle ont été refusés par certains directeurs de recherche les estimant trop fêtard(e)s, preuvesphotographiques à l’appui ; nous savons que des journalistes ne s’embarrassent plus d’entretiens et préfèrent visiter les « pages » des individus dont ils font le portrait ; nous avons été les témoins, dans des contextes autoritaires, demanifestations sociales dévitalisées, car mobilisée par le seul vecteur numérique, dans la lignée logique du performativisme qui donne le là à notre époque (si on aaccru les moyens de se réunir, ce qui est bien,encorefaut-illatextualitéquidonnesensàlamobilisation...);nousavonsétéles témoins de débâcles amoureuses, d’amitiés qui partent en fumée, du fait du filtrage d’informations dont on aurait eu a priori jamais eu vent. Nul besoin de serment, le champ d’actualité est déterritorialisé : le flagrant délit est unprésent permanent.

« Et c’est quoi cette application du superwall qui permet de voir qui consulte son profil? Camarche vraiment? Est-ceque je peux toujours mater les photosde ma voisine de conf 5 fois par jourssans qu’elle sache que je suis un pervers qui bave sur elle ? Dans la négative, Facebook perdrait beaucoup de son intérêt. ». Au delà d’une fastidieusediscussion sur le gadget dont il est question, l’inquiétude de cet inconnu, péché dans le bavardage du forum Sciences Po, est la parfaite illustration de la « révolution de la communication entre les étudiants de Sciences Po » célébré par « Le 27 ». L’obsession du calcul propre à la drague se moule ici dans un jeu de rôle-contrôle numérisé où chaque subjectivité devient un fluxcontrôlant en puissance : la complétude corporellequi s’ensuitentre leprep’ENAet la Jeune Fille d’Affaires Publiques setransmute,si«çaMARCHE»,sinonenunesupra-subjectivité(versionnumériséedu«onseditTOUT»),dumoinsenunentre-corps infinitésimalement réduit, àperméabilitéparfaite,oùlaseuledistancerésiduelle admise trouverait explicationdans l’entre-corps physique nécessaire au contrôle. Découpons un espace de visibilité et cartographions la conductivité sociale qui circule dans le réseau. Ici,

le noeud n°1 observe le noeud n°2 touten sachant que ce dernier le sait. Si le noeudn°2finissaitparêtrebaveusementséduit, il observerait à son tour le noeud n°1 tout en sachant qu’il le sait. Lecontrôleur-contrôlé est alors neutralisé par son équivalent, minimisant ainsi les risques d’un râteau tout en comptabilisant des indices d’intérêt, le tout ordonnancé dans un tableau de bord des évènements accessible aux deux, hissant la dragueentre les étudiants de Sciences Po au rang d’une ECONOMIE POLITIQUE DUFRISSON.

Le Réseau Social ne fait qu’entériner une fois pour toute les prédicats qui nous PARLENT. Il nous corporéisedansun langagesocialetàdes jeuxdemots déterminants qui font de nous que ce que l’onNOUSADITD’ENDIRE, etl’inverse, tout en nous restreignant dans CE QUE L’ONA CHOISIT DE DIRE, etl’inverse. Nous ne prétendons guère que le réseau social engendrerait ce qui n’est ici et finalement qu’une vulgaire aporieanthropologique dépourvue d’originalité, mais bien plutôt qu’il exclue le champdes possibles des jeux identitaires pourn’inclure qu’un vulgaire paramétrage faussement comique (« Jean-Eudes estheureux/triste/mélancolique ; de droite/centriste/de gauche ; hétérosexuel/homosexuel/bi ; à La Baule/à SciencesPo/auFouquet’s»).Aunniveauatomiquedu social, le paramétrage identitaire de Facebook est aux jeux identitairescontingents ce que la positivité est auxconditions aléatoires d’émergence des savoirs : le résidu objectivé et détaché d'un en-dehors expulsé du Savoir/Pouvoir. Autrement dit, enmimant la texture desrelations sociales, (« to mirror the real

world by mapping it out »), Zuckerbergn’impose rien d’autre qu’un schématisme social aux ambitions proliférantes, qui,par son inscription, intègre des données réifiées (« Je suis ça ») pour mieux enexclure leurs conditions d’énonciationsméthodologiques(peut-ondire«je suis » sur Facebook ? ). Bref, si les nazis du« 27 » disent vrai, l’étudiant de Sciences Po ne serait qu’un paramétrage objectivé sur pattes. Nous ne sommes pourtant pas sans savoir que dans le titanesque mardi-gras postmoderne, certains d’entre-vous s’évertuent à se constituer en sujets filants,glissantentrelesunités,singeantles appartenances, secouant les totalités, lézardantlesidentitéschosifiéesquevousimposent chaque jour les curetons en tous genres(devotrepère,àvotrePrésident,enpassantparl’inouï«Descoings»).

C’est pourtant à grand coups de lames quevousdécoupezdesterritoiresdefixitééchappant ainsi à un trop-de-liberté non assumée. Bref, il faut s’objectiver : aligner les identités qu’on nous prête dans une nomenclature spectaculaire et effacer les débris de subjectivité in-utile ; il faut se mettre en réseau pour assurer la bonne circulation marchande de notre être désormais métonymique. Etudiant-pilote ou Homme-tubine, en tout cas cyborg bien bête, l’étudiant de Sciences Po alimente le système de comportements que ce dernier a lui-même rendu possible, et contribue par conséquent au rétrécissementduchampd’expressiondeson être. L’étudiant de Sciences Po est l’agent d’une régression intégrée.

Reprenons. Le Réseau Social n’autorise pas de dire que l’on est : il est le parfait fossoyeur du doute cartésien. Nous nous pardonnons ce truisme : en action, le navigateur qui s’affiche sous son plusbeau jour, se fait des copains et qui poke à longueur de journée, est d’autant plus dépourvu d’intériorité qu’il est incapable d’introspection, personnage objectivé qu’il est. C’est pourtant d’un ton définitifque les salopards du « 27»s’exclament« plus qu’un prolongement de l’espace social, en apparaît un autre », oubliant que bon nombre d’utilisateurs ne

Page 23: In Vodka Veritas n°15

23

« vivent » plus que pour ça, en faisant du vecteur de communication une preuve de leur communicabilité. L’intériorité du sujet est effacée pour la seule est bonne raison que la langage du sujet se réduit à celui que le vecteur a rendu possible. Al’instardesfarceursd’AlQaïdaquiontphénoménologiquement révolutionné la façon de faire du terrorisme _ la bombe était un vecteur qui permettait à l’homme de dialoguer alors que la bombe humaine fait de la violence un dialogue en soi _ Zuckerberg a su désintégrer l’intermédiaire dérangeant qu’était le langage pour ne faire du lien numérique qu’un rapport social en soi, un être-là du rapport, lui-même valorisé algébriquement, comme l’indique l’énoncé «j’ai23342786746032469friends».

« Truc a mis les photos de la soirée sur Facebook, c’était vraiment bien ». Le Réseau Social est l’alibi, le complice, la preuve et la caution d’une vie bien menée.

Ne rien rater, être là où ça se passe,marchersurlesillagedeceuxquiontvouluêtreavec vous, sont autant demaximesque se répète l’homoéconomicus névrosé qui, après avoir sérialisé et standardisé à peu près tout ce qui l’entourait, cisaille sapropreexistenceenunamoncellementd’expériences, de rencontres et de coïts détachables, isolables et voués à êtres commentés grâce aux bienfaits de lanumérisation web 2.0. Construit sur lesupport photographique, le Réseau Social

nous livre une bien piquante curiosité : il permet à l’individu de vivre l’évènement en toute re-présentation tout en permettant à celui-ci de se targuer d’être présent. C’est ainsi qu’il vit dans l’illusion de vivre sa propre vie. Photographier le Taj Mahal est en soit une idiotie permettant à chacun de se persuader d’avoir été là. Un souvenir dites-vous ? De la vanité, répondons-nous, et surtout une ANGOISSE,seulement et simplement, de ne pas avoir été là, dans le coup.

Richard Descoings 2.0 est un parfaitcomplément analytique en ceci qu’il incarne, à titre d’exemple, le nouveauparadigme de gouvernementalité que l’on doit désormais se farcir. Nous ne parlons ici nullement de l’homme, que nous laissons tranquille, mais plutôt d’une hypothèse de pouvoir par trop sagace. Célébrons-là par ces modestes énoncés.

Richard Descoings 2.0 est un type COOL et qui sait le décliner avec calcul. Afficher l’éclat de son teint hâlé ainsi que la mignardise de sa bobine souriante est une invitation à les lècher d’une seule langue et à dire de Descoings qu’il est MARRANT. Se balancer entre les poteaux, poutres et colonnes de la rue Saint-Guillaume, prévoit qu’on en dise qu’il est RIGOLO. Arborer la fraîcheur de son petit Bonzaï, attend qu’on en dise que c’est ETONNANT. Le COOL du pouvoir se décline et se nourrit de prédicats compactés et aussitôt intégrés, voués à êtres répétés et circulés.

Du pouvoir souverain et ses régimes de vérité extorqués sous le supplice à la gestion disciplinaire, qui découpe, renferme, concentre, quadrille, emmure les sujets en vu de leur dressage a succédé désormais une nouvelle norme de gouvernementalité de surveillance-sourire dont Richard

Descoings 2.0 est le protocole d’expérimentation.

Surveiller et sourire est la maxime à double tête dont Richard Descoings 2.0 est l’agencement PARFAIT.

L’hypothèse Richard Descoings 2.0, est un processus de dé-placement du centre du pouvoir vers les oubliettes. Sa pesanteur molaire, le ban glacial souverain, est simultanément atténuée par ses micro-agitations moléculaires qui nous sont distillées comment autant de petits A.I.E aveuglants. Dès lors que le directeur nous embrassera un à un dans les couloirs, signera « your friend » dans les documents administratifs, et se baladera en chemise blanche et bonzaï à la main, nous décréterons l’optimum de Descoings atteint, le pouvoir oublié et son agencement supposé, une baliverne.

Richard Descoings 2.0 est la corde sanitaire dissimulée derrière le cordon de la gloriole : l’èthos institutionnel que l’étudiant est chargé de défendre avec tant de dévouement lui ferait presque oublier qu’il est de passage et que son séjour peut a fortiori être écourté. « Le directeur a tous les droits sur la vie nue. Il peut faire entrer et faire sortir qui il veut, quand il veut, où il veut ».Il est en somme celui qui vous rappelle que lorsque l’on aime son quartier, ON RAMASSE.

Le débat portant sur le nouveau logo de « Sciences Po » NE NOUS INTERESSE PAS.

Richard Descoings 2.0 est au pouvoir ce que la flatterie culpabilisante est au simulacre démocratique. Comme le pouvoir, il donne la parole tout en se gardant d’écouter. Tout comme lui, il sait s’armer de succédané pour se rendre disponible, visible, facebookable, de sorte à accroitre l’intensité du regard froid, normalisateur et désarmant propre à l’exercice du ban. Deviens l’ami du pouvoir et oublie donc que LE POUVOIR N’EST PAS TON POTE.

Lorsque le pouvoir a su se glisser dans l’immanence, la séduction, et la furtivité, grande partie du terrain était conquis. Seul lui manquait le prétexte du copinage pour effacer le substrat de sévérité sur lequel il reposait, et nous injecter ainsi des doses de sympathies létales. « Descoings est sur mon Facebook ! Il est sympa ». Sachez que LE POUVOIR N’EST PAS SYMPA. Il est même TRES OCCUPE.

Page 24: In Vodka Veritas n°15

24