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SAMEDI 8 JUIN - 16H30Salle des concerts
France / Allemagne Aimons-nous !
Richard WagnerWesendonck-Lieder
Lieder de la « période parisienne »
entracte
Richard Wagner / Franz Liszt Isoldes Liebestod, pour piano solo
Charles GounodAimons-nousDonne-moi cette fleurCrépusculeLe Vallon
Claude DebussyLa Mer est plus belleLes ClochesFleur des blésLe Jet d‘eau
Nathalie Stutzmann, contraltoInger Södergren, piano
Ce concert est surtitré
Fin du concert vers 18h15.
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Aimons-nous !
Ce concert, qui emprunte son titre à l’une des mélodies de Gounod, harmonise la France et l’Allemagne sous le signe de l’amour. Le lyrisme naturel de Gounod et l’imagerie esquissée de Debussy s’y donnent la main à travers Wagner : celui, bien peu connu, de ses mélodies en français, et celui, bien plus célèbre de Tristan et des Wesendonck-Lieder, dont la manière annonce par endroits le goût symboliste français.
Richard Wagner (1813-1883)Wesendonck-Lieder
Der Engel (L’Ange)
Stehe still! (Ne bouge pas !)
Im Treibhaus (Dans la serre)
Schmerzen (Douleurs)
Träume (Rêves)
Composition : 30 novembre 1857-1er mai 1858.
Création : privée, le 30 juillet 1862, dans la villa des Schott à Laubenheim près de Mayence, avec Hans von Bülow
au piano.
Durée : environ 19 minutes.
« Quand les yeux boivent la joie dans d’autres yeux / que l’âme entière se noie dans une autre âme / que l’être se retrouve dans un autre être / et que le but de tous les espoirs est proche / les lèvres sont muettes, silencieuses dans leur étonnement / et notre cœur secret n’a plus aucun désir » : l’on pourrait se croire au milieu du duo d’amour de Tristan et Isolde, mais il s’agit du deuxième morceau des Wesendonck-Lieder, qui en sont les contemporains. Sur les deux œuvres plane la même figure tutélaire, celle de Mathilde Wesendonck, épouse d’un protecteur de Wagner avec laquelle le compositeur noue une idylle passionnée au cours de l’hiver 1857-1858.
Il s’agit d’ailleurs de la seule des œuvres de maturité à utiliser un texte qui n’est pas du compositeur (Wagner compose au fur et à mesure ses lieder sur les poèmes que Mathilde écrit) – ainsi que d’une des très rares incursions en dehors du monde de l’opéra. L’influence wagnérienne (et, à travers le compositeur, celle de Schopenhauer) se laisse déceler dans certains des thèmes traités par la jeune femme, tandis que d’autres font appel à des topoï du romantisme ou de la littérature amoureuse.
La proximité entre le recueil et Tristan et Isolde est musicalement décelable dès le premier instant dans Im Treibhaus (qui utilise le thème de la solitude de Tristan du début de l’acte III) et Träume (esquisse de l’hymne à la nuit du deuxième acte, dans le même la bémol majeur), sous-titrés « études pour Tristan et Isolde ». Le langage reste cependant très marqué par les opéras
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précédents ; certains motifs dérivent des pages déjà composées de L’Anneau du Nibelung (que Wagner vient de laisser en suspens au milieu de Siegfried), tandis que la tempête qui ouvre Stehe still! se souvient aussi bien de La Walkyrie que du Vaisseau fantôme.
Angèle Leroy
Lieder de la « période parisienne » :
Mignonne allons voir si la rose
Attente
Tout n’est qu’images fugitives
Les Deux Grenadiers
Date de composition : en 1840, l’année de Rienzi.
Pendant son très décevant séjour parisien de deux ans et demi, Wagner, entre autres activités, taquine la mélodie française. Il serait oiseux d’y chercher des prémonitions de ses grands drames, mais certaines de ces pages juvéniles ont de la pertinence et du caractère. La tendance est à la forme libre, les rares redites ressemblent à de discrets points de repère.
Une batterie pianistique entraîne l’envol impatient d’Attente, dans un tempo très vif, à l’articulation périlleuse.
Tout n’est qu’images fugitives, brève philosophie en trois strophes, traverse trois états : la gaîté un peu fébrile, la tristesse, puis le tourment orageux. La conclusion revient, triplement imperturbable : seul n’est durable que le ciel.
Pour Mignonne allons voir si la rose, un accompagnement de valse délicate soutient le gracieux texte de Ronsard : ambiance proche de Schumann, voire de Mendelssohn, qu’apparemment Wagner ne détestait pas tant que cela !
Le poème de Heine Les Deux Grenadiers se présente ici dans une traduction française approuvée par l’auteur. Cette belle ballade témoigne d’un sens dramatique évident : piétinement accablé du début, succession torturée d’accords pour évoquer la défaite de l’Empire, marche funèbre… En coda, le fantasme de résurrection d’un des grenadiers s’accompagne d’une Marseillaise intégralement citée au piano, auquel la voix fait contrepoint. Quelques mois plus tard Schumann reprendra le même poème (en allemand), et adaptera lui aussi la Marseillaise.
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Richard Wagner / Franz Liszt (1811-1886)Mort d’Isolde - extrait de Tristan et Isolde
Composition : 1859.
Tanscription : de Franz Liszt en 1867.
Durée : environ 8 minutes.
Liszt a consacré la moitié de son énergie à transcrire au piano l’œuvre d’autrui, par goût, par admiration et par appétit musical pur, même si en son temps ce travail revêtait une fonction utilitaire : diffuser la musique. Son ami (et futur gendre) Richard Wagner, qu’il a soutenu sans faille avec un bien mince retour, reçoit ici sa part d’hommages pianistiques. Le titre Mort d’Isolde est de Liszt, pour Wagner c’était La Transfiguration d’Isolde. Cette page extatique représente l’accomplissement d’un amour, impossible ici-bas mais révélé dans l’au-delà ; elle prend des accents quasi-religieux et s’inscrit dans un ressac sonore, « dans la houle des vagues, dans la respiration de l’univers » selon Wagner. Ici le travail de Liszt est une traduction fidèle, sobre, dont les tremolandi orchestraux, frémissants et océaniques, n’apparaissent qu’à bon escient.
Charles Gounod (1818-1893)
Aimons-nous (1872)
Donne-moi cette fleur (1868)
Crépuscule (publié entre 1865 et 1869)
Le Vallon (1840-42)
Dans Aimons-nous, l’amoureux presse une jeune femme en lui donnant toute la nature en exemple. Un mouvement perpétuel du piano accompagne les élans vocaux, le tout en trois strophes identiques.
Donne-moi cette fleur fétichise une fleur fanée, mais sur un ton d’aimable flirt. Deux strophes se succèdent dans un tempo de valse, aux modulations fines.
Dans Crépuscule, un amant rêve seul sur une colline, et invoque mentalement sa bien-aimée : pastorale sérieuse en trois strophes, qui égrènent en 6/8 leurs harmonies nuancées et mélancoliques.
Le Vallon traduit la lassitude lamartinienne devant la vie ; il commence sur une sorte de glas, et la voix s’exprime de façon délibérément uniforme. Les deux strophes en majeur, la troisième puis la cinquième et dernière, aspirent au repos éternel au sein d’une nature clémente.
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Claude Debussy (1862-1918)
La Mer est plus belle (1891). Dédié à Ernest Chausson.
Les Cloches (1891)
Fleur des blés (début 1881)
Le Jet d’eau (1887-89)
Debussy ne pouvait rester insensible à l’hommage de Verlaine adressé à la mer. Un piano aux arpèges généreux, mouvants et modulants, esquisse avec ivresse une vague anticipation du fameux ouvrage symphonique La Mer ; une joie impressionniste, à la Monet, se dégage des paroles « Elle a des airs bleus, gris, roses et verts » que Debussy consacre pianissimo dans l’aigu, avec dévotion.
Une formule obstinée de trois notes descendantes soutient Les Cloches, petit tableau paisible et contemplatif : feuilles dans les branches, tintements dans le ciel. Si le bref poème s’achève dans la nostalgie des « jours d’autrefois », pour le musicien ce bonheur semble sereinement fixé dans une image translucide.
Fleur des blés est une page de jeunesse, probablement créée par Madame Vasnier, bonne chanteuse amateur et protectrice adorée du compositeur. Un doux courant pianistique, tel le frisson du vent sur les champs, porte ce petit hommage rustique d’un amoureux ; le poème est « fleur bleue » et la voix évolue avec une discrète émotion qui le transcende.
Debussy eut l’occasion d’entendre, en 1886 à Rome, Franz Liszt interpréter son propre Au bord d’une source. Cette œuvre jaillissante aux suaves dissonances de seconde a visiblement nourri « l’impressionnisme » de Debussy, qui reprend ici une écriture analogue, en la ralentissant avec langueur ; la voix suit une « mélodie infinie » un peu troublée et imprévisible. Les arpèges, les quintolets obstinés, toutes les gouttelettes et les cristaux pianistiques de ce jet d’eau deviennent le symbole de la vie toujours variée, qu’envisage avec étonnement un couple détendu et comblé.
Isabelle Werck
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Nathalie Stutzmann
Nathalie Stutzmann est considérée
comme une des personnalités
musicales les plus marquantes de
notre époque et comme une des rares
authentiques voix de contralto.
Elle enregistre depuis 2011 sous
contrat d’exclusivité avec Deutsche
Grammophon, comme chanteuse et
chef d’orchestre. Un disque consacré
à Bach, intitulé Une Cantate
imaginaire, est sorti en novembre
2012. Comme pour son précédent
enregistrement sous ce label, Prima
Donna, elle est à la tête de son propre
orchestre de chambre, Orfeo 55.
Nathalie Stutzmann travaille
régulièrement avec les plus grands
chefs et se produit avec les orchestres
les plus prestigieux comme le
Philharmonique de Berlin, le
Philharmonique de Vienne,
l’Orchestre de Paris, le London
Symphony Orchestra… Exemple
même de la musicienne complète,
Nathalie Stutzmann, dès son plus
jeune âge, fait des études
approfondies de piano, basson,
musique de chambre et direction
d’orchestre. La célébration de l’année
Mahler a été pour elle l’occasion de
nombreux concerts autour de ce
répertoire : Troisième et Huitième
Symphonies avec l’Orchestre
Philharmonique de Berlin sous la
direction de Sir Simon Rattle, Das Lied
von der Erde, Kindertotenlieder, etc.
Grande récitaliste, spécialiste du lied
allemand et de la mélodie française,
elle se produit dans le monde entier
avec la pianiste suédoise Inger
Södergren. Parallèlement à ses
nombreux concerts en tant que
cantatrice, elle consacre désormais
une partie de sa saison à la direction
d’orchestre, que ce soit en tant que
chef invité mais aussi pour de
nombreux concerts à la tête d’Orfeo
55, orchestre de chambre qu’elle a
créé en 2009 et qui est actuellement
en résidence à l’Arsenal de Metz. Avec
Orfeo 55, elle fait une tournée
européenne avec le programme
Prima Donna, Une Cantate imaginaire
de Bach et un programme Haendel,
Il Duello Amoroso. On a pu la retrouver
cette saison comme chef
symphonique invité dans un
répertoire classique et romantique
pour des concerts avec les orchestres
symphoniques de São Paulo, Valencia,
du Swedish Chambre Orchestra, de
l’Orchestre National de Lyon, et de la
Kammerakademie de Potsdam entre
autres. Nathalie Stutzmann fera ses
débuts de chef lyrique à la tête de
l’Orchestre Philharmonique de Monte
Carlo en février 2014 pour une
production de L’Elisir d’amore de
Donizetti. Nathalie Stutzmann a reçu,
pour le chant, l’enseignement de sa
mère, Christiane Stutzmann, puis a
étudié à l’École d’Art lyrique de
l’Opéra de Paris avec Michel Sénéchal
et, enfin, a été l’élève du baryton
allemand Hans Hotter. Elle a été
formée par Jorma Panula pour la
direction d’orchestre. Nathalie
Stutzmann a enregistré plus de 75
disques. Chevalier des Arts et Lettres,
et Chevalier dans l’Ordre National du
Mérite, Nathalie Stutzmann donne
des cours d’interprétation à travers le
monde et enseigne également à la
Haute École de Musique de Genève.
Inger Södergren
Née en Suède, la pianiste Inger
Södergren reçoit une bourse de la
Stockholm Royal Academy of Music
pour continuer ses études à Vienne
dans la classe de Carlo Zecchi, puis en
France avec Nadia Boulanger et
Yvonne Lefébure. Elle s’embarque
alors dans une carrière internationale,
prouvant qu’elle est une musicienne
dotée d’un talent exceptionnel et
original. Ses enregistrements –
exclusivement pour Calliope – ont été
salués unanimement par les critiques
et couverts de récompenses :
Diapason d’Or, Choc du Monde de la
musique, Grand Prix du Disque de
l’Académie Charles Cros, etc. Ses deux
plus récents enregistrements sont
consacrés à trois sonates de
Beethoven dont Waldstein et Les
Adieux, ainsi qu’un récital Mozart.
Inger Södergren participe aux grands
événements du piano et est l’invitée
de différentes séries prestigieuses de
concerts : à Paris, invitée par Piano
quatre Étoiles et Les Grands Concerts
à la salle Gaveau ; concerts au Théâtre
du Châtelet ; festivals de La Roque
d’Anthéron, de Radio France et de
Montpellier, récitals au
Concertgebouw d’Amsterdam,
Fundação Calouste Gulbenkian
à Lisbonne, à Tokyo au Bunka Kaikan,
à Londres, Berlin, Milan, Madrid, etc.
Depuis 1994, elle est également la
partenaire de la contralto Nathalie
Stutzmann, avec laquelle elle parcourt
le monde musical, du Japon à São
Paulo en passant par tous les grands
centres musicaux d’Europe et
d’Amérique du Nord. Elles ont
enregistré (pour RCA Victor red seal)
7
des lieder de Schumann (Japan
Record Academy Award) et Brahms,
des mélodies de Chausson et Poulenc.
Elle a entrepris, toujours aux côtés de
Nathalie Stutzmann, l’enregistrement
des 3 grands cycles de lieder de
Schubert, Winterreise,
Schwanengesang et Die schöne
Müllerin.
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