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Marie Delclos Franc-maçonnerie et kabbale « Le développement de l’ensemble des possibilités de Malkouth, son plein rayonnement est l’apanage de la fin des temps lorsque la lune symbole de la Shekhinah, devient aussi imposante que le soleil » (G. Lahy, Dictionnaire encyclopédique de la Kabbale)

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Page 1: Franc-maçonnerie et kabbale - Editions Trajectoire · Éliphas Lévi, notamment dans sa traduction du Zohar intitulé Le Livre des splendeurs paru en 18922. On peut supposer que

Marie Delclos

Franc-maçonnerie et kabbale

« Le développement de l’ensemble des possibilités de Malkouth, son plein rayonnement est l’apanage de la fin des temps lorsque la lune symbole de la Shekhinah, devient aussi imposante que le soleil » (G. Lahy, Dictionnaire encyclopédique de la Kabbale)

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« La kabbale est une tradition reçue par Moïse de la «Bouche» de la Puissance. » Nahmanide

Chapitre 1

Qu’est-ce que la kabbale ?

La kabbaleLe mot kabbale

Le mot « kabbale » est la transcription du mot hébreu kabbalah hlbqe (qof beith lamed hé) qui signifie « réception », du verbe kabbel « recevoir par tradition ». À l’origine, on l’a transcrit en français de manières fort diverses : Cabale ou Cabbale1, qaballah, qabal, qabale, ou kabalah. Charles Mopsik (1956-2003), dans son introduction au Zohar, écrivait la « cabale » et les « caba-listes ». Aujourd’hui, d’une façon générale, on écrit « kabbale », orthographe lancée par les maçons occultistes, en particulier par Éliphas Lévi, notamment dans sa traduction du Zohar intitulé Le Livre des splendeurs paru en 18922. On peut supposer que si la

1. Simon Munk, article « cabale », Dictionnaire de la conversation, 1833.2. Éliphas Lévi, Le Livre des Splendeurs, Chamuel éditeur.

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grande majorité des auteurs aujourd’hui écrit kabbale, c’est pour différencier ce mot de son homophone « cabale », utilisé dans le sens de « intrigue » ou « complot ».

Définition

On peut définir la kabbale comme étant une tradition dans le sens de « Tradition ésotérique reçue1 ». André Chouraqui, dans son Histoire du judaïsme, écrit que « la kabbale constitue, dans l’histoire du judaïsme, le courant profond et secret qui complète l’initiation biblique et talmudique2  ». Cela dit, autrefois, ce « courant secret » n’avait pas encore pris le nom de kabbale  ; il se nommait ’Hokhmah Nistarah « Connaissance ou Sagesse cachée  »3. Le mot kabbale n’apparut véritablement qu’au xie-xiie siècle.

L’origine mythique : la Loi de feu donnée à Moïse sur le mont Sinaï

Pour les kabbalistes, cette tradition ésotérique reçue est la « Loi orale et secrète » donnée par YHVH (Dieu) à Moïse sur le mont Sinaï, en même temps que la «  Loi écrite et publique » (la Torah).

Quant à la Torah (hrvt – tav vav reish hé – ce mot signi-fie « enseignement », « instruction »), elle désigne le « Penta-teuque  » soit les cinq premiers livres de l’Ancien Testament, Genèse, Exode, Lévitique, Nombre et Deutéronome.

Feu noir sur feu blanc

Elle fut écrite feu noir sur feu blanc (Midrash Tanhouma I et Zohar III, 132 a) suivant les paroles prononcées par Moïse dans Deutéronome 33, 2  : « L’Éternel est apparu du haut du Sinaï,

1. Georges Lahy (Virya), Dictionnaire encyclopédique de la kabbale (DEK), éditions Lahy.

2. Chouraqui, Histoire du judaïsme, Puf coll. « Que sais-je ».3. Virya DEK.

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a brillé sur le Séir, s’est révélé sur le mont Pharan, a quitté les saintes myriades qui l’entourent. Dans sa droite une Loi de feu [tdsa eshdath, soit esh sa «feu» et daath td «loi»]. »

Cette Loi de feu fait écho au premier mot de la Genèse Beré-shith, qui peut se lire Bérith « Alliance » Esh « (de) Feu », car l’Éternel est un feu : « L’Éternel ton Dieu est un feu dévorant. » (Deutéronome IV, 24)

C’est pourquoi on représente le Tétragramme ineffable (le nom divin imprononçable de quatre lettres YHVH hvhy) sous forme de quatre lettres de feu (fig. 1).

La gloire de YHVH sous la forme d’un homme, l’Adam Kadmon

Cette représentation de la Kavod dvbk (la « Gloire ») de Dieu, composée de feu noir et blanc, est évoquée dans le Livre d’Ézéchiel (Ézéchiel I, 26) comme ayant la forme d’un homme (l’hébreu écrit  : «  d’un Adam  »). C’est la représentation du nom divin en tant qu’Adam Kadmon, l’Adam archétypal ou Être primordial (de kadmon ]vmdq ancien, antérieur, avant toutes choses créées), le plus antique de tous les êtres primordiaux à l’image duquel fut créé l’homme. Il a donc précédé l’Adam de la Genèse.

Dans cette représentation, les lettres sont disposées verticalement de sorte que le yod (y) au sommet représente la tête  ; le vav (v), le tronc ; les branches verticales du hé (h) supérieur, les deux bras ; les branches verticales du hé inférieur, les deux jambes (voir plus loin le paragraphe intitulé « Les lettres/chiffres ou othioth »).

Cet Adam Kadmon, disent les kabbalistes, contient tous les plans de l’existence universelle, sous l’apparence des dix séfi-roth, comme on le verra plus loin lors de l’étude de ces dernières.

Fig. 1

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Le Feu noir : les mots écrits, le sens littéral

Les lettres de feu noir représentent les mots écrits. On compare ce feu à de l’encre et à du sang.

Ces lettres représentent le premier niveau de lecture, le sens simple le Pshat. C’est le premier des quatre niveaux de lecture de la Torah, le sens littéral.

Le Feu blanc : les espaces entre les mots, l’interprétation ésotérique

C’est lui qui comprend les trois autres niveaux de lecture, autrement dit tout ce que nous lisons « entre les lignes ».

On distingue le Remez ou allusif  ; le Drash ou allégorique et enfin le Sod, le plus subtil des quatre  niveaux de lecture, celui que l’on nommait ’Hokhmah Nitsarah, cette connaissance cachée qui prendra le nom de « kabbale ».

La valeur numérique de son nom Sod montre la complexité de ce niveau de lecture : Sod qui s’écrit dvc a pour valeur 70 (samekh 60 + vav 6 + daleth 4 = 70), ce qui signifie qu’il y a 70 niveaux d’interprétation des textes de la Torah, certains disent 70 000.

La transmission de la Loi orale réservée aux initiés

C’est oralement, et seulement à ceux dont il avait éprouvé la sagesse, que Moïse transmit oralement l’explication de la Torah écrite et son sens le plus caché.

D’après le Talmud – dans Pirké aboth (« chapitres des Pères ») – Moïse a reçu (qibel) la Torah sur le mont Sinaï. Il l’a trans-mise à Yeshoua (Josué fils de Noun), et celui-ci l’a transmise aux anciens, les anciens aux prophètes, et les prophètes aux hommes de la grande synagogue.

D’après le midrash Yalkout Shim’onni Parashat Vaheleh allu-sion 945, Moïse l’enseigna dans son intégralité à son Beith Din (Assemblée d’hommes sages), les soixante-dix Anciens. Ces soixante-dix Anciens étant les soixante-dix qui étaient montés

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avec Moïse vers l’Éternel sur le Sinaï (Exode 24, 1 et 9). (En réalité, 74 furent témoins de la Gloire de l’Éternel sur le mont Sinaï : outre Moïse et les 70 Anciens, il y avait Aaron, Nadab et Abihou.)

Tous ces Anciens, à leur tour, la transmirent à d’autres Anciens.

On peut donc dire que la kabbale remonte à Moïse, ou tout au moins à l’écriture du Pentateuque.

De la transmission orale à l’écrit. La période historique. Les grands textes

La transmission ne put rester indéfiniment orale en raison des problèmes rencontrés par les fils d’Israël. Sous peine de voir tomber dans l’oubli le précieux dépôt de la connaissance, il leur fallut coucher par écrit ce qui avait été reçu et l’expliquer.

PÉRIODE JUDÉO-BABYLONIENNE

La Mishna (Michna) (début de l’ère chrétienne) écrite par les tannaïm

La Mishna est la première compilation de la Torah orale. Son nom vient de la racine shana « répéter » soit « assimiler quelque chose par répétition », rappelant ainsi que l’enseignement oral s’inculque par répétition.

La Mishna fait donc référence à l’enseignement oral, qu’elle se contente de rapporter.

Elle est la base du Talmud. Elle rapporte les commentaires des Anciens sur la Torah.

Elle fut écrite avec l’aide de ceux qui étaient dotés d’une mémoire hors du commun. Ils étaient chargés de réciter, par cœur et à la demande, des passages entiers de la Torah ou les commentaires oraux des différents rabbins.

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Rabbi Akiba, le père de la kabbale

La Mishna fut écrite par les tannaïm (pluriel de tanna), soit les « instructeurs », « enseignants », que les chrétiens appellent les « docteurs de la Loi », ou par d’autres qui rapportèrent leurs commentaires. Parmi les plus grands cités dans le Talmud, on compte Hillel le Babylonien (appelé aussi Hillel l’Ancien ha zaqen, qui peut s’interpréter comme «  le sage »), qui vécut et enseigna au temps du roi Hérode (et donc au temps de Jésus), Rabbi Eliézer ben Hykarnos (appelé aussi R. Éliézer le grand) et Rabbi Akiba son élève (ca 40-ca 137). C’est à ce dernier qu’on attribue la plus grande partie de la Mishna. Certains le considèrent comme le père de la kabbale.

Enfin, on attribue la fin de la rédaction de la Mishna à R. (rabbi) Yéhudaha nasi (hanasi « le prince ») en 180.

Mais, en réalité, les auteurs des sentences qui remplissent certains de ces traités comme Pirké Aboth, les « Chapitres des Pères » vivaient entre 200 avant et 200 après J.-C.

La Mishna est divisée en six parties, les Sedarim (« ordres »), et chaque ordre comprend un certain nombre de traités, les massichtoth.

La Guemara écrite par Les aMoraïM entre 200 et 500

Après les tannaïm vinrent les amoraïm, commentateurs, inter-prètes, littéralement « ceux qui parlent » entre 200 et 500.

Ils interprétèrent et commentèrent la Mishna comme les tannaïm avaient commenté la Torah. Ils rédigèrent ainsi la Guemara, de la racine guamar « terminer » soit « complément », « achèvement », « perfection ». En fait, il s’agit de transcriptions des discussions de générations de maîtres qui se confrontaient sur la base des six ordres de la Mishna.

En fait, on peut dire que les tannaïm étaient «  ceux qui enseignent » et les amoraïm « ceux qui expliquent ». C’est pour-quoi le texte de la Guemara est beaucoup plus long que celui de la Mishna.

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La Guemara réunie à La Michna forMa Le taLMud (« étude » sous-entendu de La torah)

On distingue le Talmud de Jérusalem, le plus ancien, dont la rédaction finale se situe au Ve siècle et le Talmud de Babylone terminé à la fin du vie  siècle. En effet, à partir du iiie  siècle, Babylone était devenue le centre de la vie juive. Le Talmud de Jérusalem est plus court et ne concerne pas toute la Mishna.

On ne parle pas de kabbale à propos de cette époque, mais les jeux de mots propres à cette dernière sont déjà présents.

Ainsi à propos de la phrase « Les tables [de la Torah] étaient l’œuvre de Dieu et ce qu’elles portaient étaient l’écriture de Dieu gravée sur les tables » (Exode 32,16), la Michna écrit : « Ne lisez pas kharouth uvrx (gravé), mais kherouth tvryx (liberté), car aucun homme n’est libre sinon celui qui travaille dans la torah. »

On pense à la colonne « gravée » des ateliers de perfection (qui remplace la « planche tracée » des loges bleues) et qui pour-rait bien avoir un rapport avec la « liberté »…

La Littérature des paLais (Heikhalot) ou du char céLeste (merkhava)

Parallèlement à ces écrits du Talmud fut rédigée, entre les iie et ve siècles, probablement par les docteurs de la Mishna ou du Talmud, toute une littérature comprenant plus de vingt  textes mystiques.

Écrits en hébreu ou en judéo-araméen, inspirés par le premier chapitre du livre d’Ezéchiel, ils relatent des visions extatiques qui se dévoilent durant les ascensions mystiques, du Char céleste (Merkhava), des sept Palais (Heikhaloth) célestes, des cieux, des anges et du trône divin.

Parmi les textes majeurs on retiendra  : Heikhaloth Zutarti, «  Petit traité des Palais  », relatant l’ascension mystique de Rabbi Akiba ; Maaaseh Merkhava « Récit du Char », Merkha-vah Rabba  : «  Le traité du Grand Char  »  ou encore le Séfer

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Heikhaloth : « Le Livre des Palais », nommé aussi Le « Livre hébreu d’Hénoch » ou « Hénoch III », qui aura son impor-tance dans le grade de Royal Arch en Franc-maçonnerie.

Le Séfer Yetsirah ou « Livre de La forMation » (vie siècLe ou avant)

Le Séfer Yetsirah est anonyme. Mais des kabbalistes connus en ont donné différentes versions, et Nahmanide l’a commenté.

La tradition le fait remonter à Abraham. Aujourd’hui, certains le datent entre 200 et 400 de l’ère chrétienne. En tout cas, il est cité à partir du vie siècle, et les premiers commentaires connus remontent au xe siècle1.

Le Midrash et Les midrashim du iie au xe siècLe

Le mot midrash vient de la racine darash « exiger », « interro-ger ». Il se traduit par « explication », interprétation », « étude », « commentaire ».

Au singulier, il désigne un procédé exégétique, une méthode d’exégèse souvent présentée sous la forme d’un récit allégorique.

Il est déjà fait mention de midrash dans la Bible, comme dans II Chroniques XIII, 22 : « Le reste des Actes d’Abiah, ses agis-sements et ses propos sont écrits dans le Midrash du prophète Iddo » et dans XXIV, 27  : « Ses fils ses multiples charges, la fondation de la maison de l’Élohim les voici écrits dans le Midrash de l’Acte des rois », mais en fait, il y en a eu de tout temps.

Quand il sera question des différents textes utilisant ce procédé, on parlera de midrashim, pluriel de midrash (avec une minuscule).

Parmi les plus importants Midrashim citons :

1. Georges Lahy (Virya), Le Séfer Yetsirah, éditions Lahy.

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Le Midrash Tan’houma (« Midrash consolation »)

Il tire son nom de celui d’un rabbin palestinien. C’est essen-tiellement une exégèse de Beréshith. Ce midrash développe l’idée de la Loi de feu.

Le Midrash Rabba (« Grand Midrash »)

C’est le plus célèbre. Il rapporte des commentaires anciens (entre le iie siècle avant et le ier siècle après J.-C.), mais fut rédigé vers la seconde moitié du ve siècle.

Il développe, dans Beréshith Rabba, le « Grand Midrash de la Genèse », le sens du nom Amon, qui sera au cœur des Old Charges et auquel fait référence la geste des quatre fils Aymon.

Amon désigne dans ce midrash la Sagesse, la Torah, l’Artisan divin de Proverbes VIII, 30.

Le Midrash intitulé Pirké (« Chapitres ») de Rabbi Éliézer

On le date aujourd’hui du viiie-ixe siècle de notre ère. Mais, en fait, on ne sait ni le dater ni le situer (pour les uns, il aurait été écrit en Italie, pour d’autres en Palestine).

Ce midrash est une sorte de réécriture de la Torah (surtout de la Genèse et de l’Exode). Il fut abondamment lu à la période médiévale, il fut cité et commenté par Rachi de Troyes et par Maimonide.

À la Renaissance, sa popularité lui valut d’être édité au moins deux douzaines de fois, la première fois à Constantinople en 1514, la deuxième à Venise en 1544, la troisième à Sabbioneta en 1567.

Dans le troisième chapitre, consacré à la création du monde par les Dix Paroles, Hiram entre en scène comme possédant « les trois vertus résumant ces Dix Paroles ».

Willermoz disait que la légende maçonnique d’Hiram vient du Talmud ; en fait, il s’agit probablement de ce midrash.

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PÉRIODE EUROPE OCCIDENTALE – APPARITION DU MOT « KABBALE »

Vers la fin du premier millénaire, les centres juifs se dépla-cèrent au nord de l’Afrique puis en Espagne. Toutes ces spécu-lations se répandirent en Europe  : en Allemagne, en France (notamment en Champagne et en Provence), en Italie. À partir de là, on trouve :

En Champagne, Rachi de Troyes (Salomon ben Isaac) 1040-1105

Il est considéré comme le plus grand exégète de la Torah.

Première partie du xiie siècle : en Provence, Le Séfer ha Bahir « Livre de la clarté », et en Andalousie, Moreh Nevoukim « Le Guide des égarés » de Maimonide (Rambam)

Le Bahir

Considéré comme le tout premier livre de la littérature propre-ment kabbalistique, il se réfère au Séfer Yetsirah et assimile les dix séfiroth aux Dix Paroles. « Né en Provence », on pense qu’il est le fruit du travail de différents sages appartenant à l’école kabbalistique provençale. On n’en connaît ni l’auteur (ou les auteurs), ni la date de parution.

Maimonide

Pendant ce temps-là, Maimonide (1135-1204), rabbin anda-lou, écrit dans son Guide des égarés  : « Ce traité a encore un autre but : celui d’expliquer des allégories très obscures qu’on rencontre dans les livres des prophètes et que l’ignorant et l’étourdi prennent dans leur sens extérieur sans y voir un sens ésotérique… »

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Le xiiie siècle en Catalogne – L’entrée dans la grande époque de la kabbale

C’est l’époque de Villard de Honnecourt et de la légende des quatre fils Aymon.

La Catalogne espagnole est un vivier de kabbalistes éminents.

Première utilisation du nom de cabbale (avec un « c »).

Isaac l’aveugle (1160-1235)

A écrit des commentaires sur le Séfer Yetsirah. Ses propos ont été recueillis par Ezra Ben Salomon (Ezra de Gérone).

Ezra de Gérone (né autour de 1175, date de sa mort incon-nue)

Son Commentaire du Cantique des cantiques est daté entre 1225 et 1230. Il était le neveu et disciple d’Isaac l’aveugle.

R. Moïse ben Nahman de Gérone (Nahmanide 1194-1270)

Nahmanide est connu pour son Commentaire sur la Torah et célèbre pour la « Dispute de Barcelone ». Elle eut lieu en 1263 devant le roi d’Aragon entre lui-même et Paul Christiani, un juif converti au christianisme. Dans cette mémorable dispute qui finalement aboutit à l’exil de Nahmanide en Palestine, chacun utilisait le Talmud pour défendre sa cause à propos du messie.

Abraham Aboulafia (1240-1292)

Né à Saragosse, vivant à Barcelone, où il étudie le Séfer Yetsi-rah, il écrit le Séfer ha Tserouf « Le livre des combinaisons de lettres », le Sheva Netivot ha Torah « l’Épître des sept voies ».

Reprenant un célèbre jeu de mots fait par le Talmud (Berakhot 64 a) entre « tes enfants » banaïkh et tes « bâtisseurs » bonaïkh (« Ne dis pas tes fils mais tes bâtisseurs »), il montre les relations

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fondamentales sur le plan ésotérique entre les mots Ben « fils », Binah « intelligence » et Binyan « édifice ».

Il eut des disciples chrétiens et Alphonse de Valladolid dit Abner l’apostat (1270-1340) écrivait : « Les chrétiens désignent l’intelligence (tebouna) du Saint béni soit-il par le nom de fils (ben) [Le Christ] du fait qu’elle naît de la Sagesse ’Hokhmah, car le fils, l’intelligence et le discernement proviennent de la même racine ]b [beith noun]. » Cet ouvrage est à l’origine du Mot de Maître en Franc-maçonnerie.

Joseph Gikatilla (1248-1305)

Gikatilla fut quelque temps élève d’Aboulafia.

Il est célèbre par ses livres le « Jardin des noyers », Guinat Egoz et les «  Portes de la Lumière  » Shaaréi Orah, qui fut traduit en latin, lu et étudié par les kabbalistes chrétiens. Il s’agit d’un ouvrage très détaillé sur les séfiroth, leurs rapports avec les colonnes du Temple de Salomon. Il a fortement inspiré le Royal Arch en Franc-maçonnerie.

Le Séfer ha Zohar (Le Livre de la Splendeur)

Bien qu’il fût originellement attribué à Rabbi Shimon bar Yohaï, Tana du iie siècle, on considère aujourd’hui (mais la ques-tion n’est pas vraiment tranchée) qu’il fut rédigé par Moïse de León (né en Castille) ou par son entourage entre 1270 et 1280. Il est écrit en araméen. Il s’agit d’une exégèse ésotérique et mystique de la Torah. Il y est écrit : « Le sens littéral de l’Écriture, c’est l’enveloppe ; et malheur à celui qui prend cette enveloppe pour l’Écriture même ! »

Xvie siècle, l’apogée de la kabbale en Galilée

La kabbale atteint son apogée à Safed, en Haute-Galilée, avec Moïse Cordovero et Isaac Louria (ARI le lion) à l’origine de la théorie du Tsimtsoum (voir plus loin dans le paragraphe de ce chapitre intitulé : « la kabbale spéculative »).

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Après Safed

La kabbale se maintient dans divers cercles d’étude, et aujourd’hui, de nombreux livres ou cours tentent de se mettre à la portée des profanes.

Les instruments de la kabbale

La kabbale s’exprime d’une façon générale en symboles. Elle dispose d’instruments précis : des textes sacrés chiffrés et symboliques, un alphabet de consonnes/nombres et des numéra-tions pures, les séfiroth.

Des textes sacrés chiffrés et symboliques. La Bible hébraïque, le Tanakh.

C’est sur la Bible hébraïque, le Tanakh et ses vingt-quatre livres, que s’appuient les kabbalistes, autrement dit, non seule-ment sur la Torah, mais sur bien d’autres textes comme le Livre des Rois, le Livre d’Ézéchiel ou le Cantique des cantiques.

La kabbale déchiffre les différents codages de la Bible des plus simples au plus subtils.

Parmi les plus simples, il y a les textes qui mettent en évidence des nombres clefs.

Chouraqui, dans son Univers de la Bible1, en donne des exemples accessibles à tous.

« La création du monde en sept jours, écrit-il, se reflète dans la construction du texte :

Le premier verset comporte sept mots (Beréshith bara élohim êt hashamaim veèt haarètz)  ; le second, sept fois deux, soit quatorze ; le récit de la création compte cinquante-six versets, soit sept fois huit. » Il ajoute que le nom d’Élohim revient (7 x 5) 35 fois, le mot éretz « terre » (3 x 7) 21 fois, comme les ciels

1. Chouraqui, L’Univers de la Bible en dix volumes, éditions Lidis.

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(shamaîm et raqia’) et comme la femme (isha, ’ézér ou séla), les noms de l’homme ish et de l’humain adam (4 x 7) 28 fois.

Certes, cette mise en évidence de l’importance du nombre sept n’est que la partie visible de l’iceberg, mais il donne au profane une idée du codage du texte hébraïque.

Naturellement, la lecture de la Bible est inséparable de celle des lettres-nombres, une par une. C’est pourquoi son interprétation kabbalistique commence par cette lecture.

C’est pourquoi aussi, en Franc-maçonnerie, l’Apprenti comme le Compagnon à qui on communique un mot hébreu « ne peut le prononcer mais seulement l’épeler ».

Les lettres/chiffres ou othioth de l’Aléf-Beith (l’alphabet hébreu)

Il y en a 22 plus 5 finales (ce sont des lettres qui changent de forme à la fin d’un mot).

Tableau 1

Valeur V. ordina

V.Nréduit

Prononciation Nom Nom écrit

Valeur pleine (celle du nom)

a 1 1 1 ’ aléf [la 111b 2 2 2 B/V beith tyb 412

g 3 3 3 Gh guimel lmyg 83d 4 4 4 D daléth tld 434h 5 5 5 H hé Aah 6v 6 6 6 V vav v av 13z 7 7 7 Z zayin ]yz 67x 8 8 8 Ch ’H ’heith tyx 418u 9 9 9 T teith tyu 419y 10 10 1 Y yod dvy 20k 20 11 2 K ou Kh kaf [k 100l 30 12 3 L lamed dml 74m 40 13 4 M mèm ,m 80n 50 14 5 N noun ]vn 106

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Qu’est-ce que la kabbale ?

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Valeur V. ordina

V.Nréduit

Prononciation Nom Nom écrit

Valeur pleine (celle du nom)

c 60 15 6 S samekh ;mc 120i 70 16 7 ’ ’ayin ]yi 130p 80 17 8 P/F pé Aap 81o 90 18 9 Ts tsadé Qqydo 204q 100 19 1 Q qof [vq 186r 200 20 2 T réish syr 510s 300 21 3 S Sh shin ]ys 360

t 400 22 4 T tav vt 406; 500 23 5 KH kaf final 820, 600 24 6 M mem final 640] 700 25 7 N noun final 756[ 800 26 8 P pé final 81/ 900 27 9 Ts tsadé final 204

Ces 22 othioth (féminin pluriel du mot oth) sont à la fois des lettres et des chiffres, ou plus exactement des consonnes et des chiffres. De la sorte, un mot est à la fois la somme de plusieurs lettres et une somme numérique de chiffres séparés : un nombre.

Le mot oth tva est formé par la première et la dernière lettre de l’Aléf-Beith (équivalent de l’alphabet) : du aléf a la première et du tav t la dernière (aléf et tav sont les équivalents hébraïques de l’alpha et oméga en grec). Ces deux lettres sont réunies par le vav v (à la fois conjonction de coordination « et » et mot qui signifiant « crochet »).

Oth lui-même signifie aussi « signe », « symbole », « preuve », « miracle ».

Chaque lettre en effet est à la fois non seulement une consonne, un chiffre, un nombre, mais aussi un mot. Ce mot est, d’une part, un nombre par addition des valeurs de ses lettres, d’autre part, il renvoie à un objet-symbole. Chaque lettre est aussi, par son graphisme, un symbole stylisé.

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Exemple

Le beith b est, d’une part, la lettre consonne B, le chiffre 2, le nombre 2.

Son nom beith tyb signifie « maison » et est le nombre 412 (b 2 + y 10 + t 400 = 412).

Enfin, son graphisme évoque un croissant de Lune. C’est pour-quoi le Séfer Yetsirah1 le met en correspondance avec la Lune.

Dieu crée le monde avec les 22 othiot

C’est avec ces 22 lettres que Dieu créa le monde, comme il est écrit dans le Séfer Yetsirah :

« Dieu les grava, les burina, les pesa, les intervertit, et forma par elles les êtres qui existent et tous ceux qui existeront, tout le formé et tout le futur à former. »

En tant que lettres on distingue :

Trois lettres « mères » (immoth)

Ce sont : aléf a mem m et shin s.

Ces trois lettres mères (immoth pluriel de èm ,a) peuvent se représenter en triangle. On les retrouvera sur les trois séfiroth supérieures. C’est la triade issue de l’Unité.

Elles sont en rapport avec les trois Éléments : aléf, l’Air ; mem, l’Eau et shin, le Feu

Sept lettres doubles (kafouloth)

Ces sept lettres doubles (kafouloth pluriel de kafoul lvpk) ont deux prononciations possibles. Ce sont beith, guimel, daleth, kaf, pé, reish, tav.

1. Version Gra Ari. Certaines versions diffèrent. La version Gra Ari est la seule qui soit en accord avec le Zohar (In Lahy Le Séfer Yetsirah).

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Elles sont en rapport avec les six directions de l’espace plus le centre, avec les sept jours de la création et de la semaine. Elles symbolisent le temps en tant que structure de l’espace.

Elles sont en rapport avec les sept planètes.

Beith, la Lune ; guimel, Mars ; daleth, le Soleil, kaf, Vénus ; pé, Mercure ; reish, Saturne, tav, Jupiter.

Douze lettres simples (pashoutoth)

Ces douze  lettres simples (pashoutoth pluriel de pashout uvswp) sont les lettres hé, vav, zayin, ’heith, teith, yod, lamed, noun, samekh, ’ayin, tsadé, qof.

Elles sont en rapport avec les douze signes du zodiaque.

Hé, Bélier ; vav, Taureau ; zayin, Gémeaux ; ’heith, Cancer ; teith, Lion  ; yod, Vierge  ; lamed, Balance  ; noun, Scorpion  ; samekh, Sagittaire  ; ’ayin, Capricorne  ; tsadé, Verseau  ; qof, Poissons.

Tableau 2

Lettre Prononciation Objet symboleAléf a Lettre mère H muet Air Un taureau

L’oreilleBeith b ou Veith

L. double B ou V Lune Une maison

Guimel g L double G Mars Un chameauDaleth d L. double D ou th anglais Soleil Une porteHé h L. simple H aspiré Bélier Une fenêtre, un

passage d’airVav v L. simple V ou w (water) Taureau Un crochetZayin z L. simple Z Gémeaux Une arme’Heith x L. simple Ch (comme le

Ch allemand)Cancer Une haie

Teith u L. simple T Lion Vase, boue, limon

Yod y L. simple Y comme dans yoga

Vierge une main. Le germe. Le point initial

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Lettre Prononciation Objet symboleKaf k ou ’Haf L. double K ou Kh (Ch

allemand)Vénus Paume de la

mainLamed l L. simple L Balance Aiguillon.

Signifie « apprendre »

Mem m L. Mère M Eau L’eauNoun n L. simple N Scorpion Un poissonSamekh c L. simple S Sagittaire Un poteau.

Signifie « soutenir »

’Ayin i L. simple H guttural Capricorne Œil sourcePé pou Fé L. double P ou F Mercure Une boucheTsadé o L. simple TS Verseau Une javelineQof q L. simple Q Poissons Le chas

d’une aiguille Signifie « singe »

Reish r L. double R (roulé) Saturne Une têteShin s ou Sin L. Mère S ou Ch Feu Une dent, la

racine d’un arbre

Tav t L. double T ou Th Jupiter Une croix

La kabbale symbolique et ses procédés

Grâce aux propriétés des 22 consonnes/nombres, la kabbale symbolique va trouver dans l’Écriture sainte un sens ésotérique ou mystique différent du sens littéral.

La guématrie

C’est le procédé le plus connu de la kabbale symbolique. Il est passé dans le domaine public. On en abuse même parfois. C’est la science de la valeur numérique des lettres (voir plus haut l’exemple avec le beith de valeur 412). (Les cinq finales ne sont pas prises en compte, car elles ne font pas partie de l’alphabet originel, et c’est avec 22 lettres que l’Éternel a créé le monde et non 27.)

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Elle permet de substituer un mot à un autre de même valeur numérique, d’établir un rapprochement entre deux mots qui, à première vue, n’auraient aucun rapport, ou encore d’expliquer une phrase qui, sans l’utilisation de ce procédé, n’aurait aucun sens.

Exemple de rapprochement

Le mot « nom » Shem ,s a pour valeur numérique 340 (shin 300 + mem 40 = 340), c’est aussi la valeur du mot « nombre » Saper rpc (samekh 60 + pé 80 + reish 200 = 340).

En conséquence, l’Éternel étant appelé « le Nom » Ha Shem, il peut aussi être appelé « le Nombre » Ha Saper.

« Par ailleurs le mot « livre » Séfer, mêmes lettres que Saper (seule diffère la prononciation du pé), a donc la même valeur. Autrement dit, le Livre contient tous les noms, c’est-à-dire tous les nombres1. »

Exemple de décodage

Il est écrit dans Genèse 24 : « Et Abraham [était] vieux [et n’a pas encore d’enfant] il avançait en âge et l’Éternel bénit Abra-ham dans tout. » Et aussitôt, rapporte le texte, Abraham appelle son serviteur et lui fait jurer de trouver une femme pour son fils.

Comment la fin de la phrase « L’Éternel bénit Abraham dans tout » indique qu’Abraham, vieux et sans enfant, a tout à coup un fils ?

C’est parce que, explique Rachi, le mot « dans tout », Bakhol lkb (beith 2 + kaf 20 + lamed 30) a la même valeur numérique 52 que le mot « fils » Ben ]b (beith 2 + noun 50). On peut donc lire  : «  l’Éternel bénit le fils d’Abraham  » ou si l’on préfère « l’Éternel bénit Abraham en lui donnant un fils » – c’est, selon Rachi, pour ce verset, le pshat que l’on traduit par sens littéral...

1. A. D. Grad, Pour comprendre la kabbale, Dervy.

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Table des matières

Introduction 5

1 – Qu’est-ce que la kabbale ? 17

2 – La kabbale et les chrétiens. Des premiers Pères de l’Église aux kabbalistes chrétiens 49

3 – Les trois points 65

4 – De Houzzé à Hosché 79

5 – Les deux colonnes Yakhin et Boaz 89

6 – Hiram et la kabbale 103

7 – Le redressement d’Hiram du « signe d’horreur » aux « cinq points de la Maîtrise » 113

8 – M.B. Le « mot » substitué ou le « mot » de Maître 127

9 – Le Chevalier prussien ou Noachite 21e degré du REAA : « La Clef de la Maçonnerie » 141

10 – Le Chevalier de Royale Hache (22e degré du REAA) 175

11 – Chevalier du Soleil (28e degré du REAA) 181

12 – Le Chevalier Kadosh et l’Échelle mystique (30e degré du REAA) 187

13 – Les mots hébreux. Personnages et mots sacrés 195

14 – Le temps sacré du maçon du premier au seizième degré 219

Bibliographie 228

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